SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 3 mai 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Tous les membres du Comité étant présents, je déclare la séance ouverte.
Permettez-moi de commencer par souhaiter la bienvenue à notre hôte, U Shwe Maung, qui va témoigner devant nous aujourd'hui par vidéoconférence.
Nous sommes ravis que vous participiez aujourd'hui aux travaux de notre Comité et nous nous réjouissons à l'avance d'entendre le témoignage de l'ancien député que vous étiez au Parlement du Myanmar en 2010. Nous comptons bien que vous allez nous raconter ce qui vous est arrivé depuis cette époque et nous dire quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés, vous-même et le peuple Rohingya, dans la région.
Pour débuter, je donne la parole à M. Anderson. La parole est à vous.
Je m'appelle U Shwe Maung, également connu sous le nom d'Abdul Razak. J'ai siégé à la Chambre des représentants du Myanmar de 2010 à 2015, mais j'ai été empêché de me représenter à l'élection de 2015.
Je vous remercie.
Oui. J'ai quatre pages de notes et, si vous me le permettez, monsieur le président, je peux donc poursuivre.
Je vous en remercie.
Je tiens tout d'abord, monsieur le président, à vous remercier de me donner ainsi l'occasion d'informer le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de votre Chambre des communes de la situation actuelle des droits de la personne des Rohingyas au Myanmar.
Pour rappel, je m'appelle U Shwe Maung, également connu sous le nom d'Abdul Razak. J'ai siégé à la Chambre des représentants du Myanmar de 2010 à 2015. Une élection historique a été organisée dans mon pays le 8 novembre 2015. Elle a donné une victoire écrasante à la Ligue nationale pour la démocratie, la LND, dirigée par Daw Aung San Suu Kyi.
Le 1er avril 2016, le Parti de l'union, de la solidarité et du développement (USDP), dirigé par le président U Thein Sein, a cédé le pouvoir étatique à la LND. Comme cette dernière n'était pas parvenue à faire modifier la constitution de 2008 sous le parlement précédent, les militaires du Myanmar conservent encore l'essentiel du pouvoir étatique. Les ministères de l'Intérieur, de la Défense, des Douanes, de l'Immigration et des Affaires religieuses relèvent toujours du chef militaire du Myanmar. Les administrations des régions, des États, des districts et des cantons, ainsi que la Police birmane, sont aux ordres du ministère de l'Intérieur.
Cela revient à dire que l'essentiel du pouvoir étatique se trouve encore dans les mains des militaires, même si la LND a formé un gouvernement civil. C'est ce qui a amené la LND à présenter un projet de loi pour créer un poste de conseillère d'État du Myanmar au Parlement, poste destiné à sa présidente, Daw Aung San Suu Kyi, qui ne pouvait être nommée à la présidence de l'État en raison d'une règle de la constitution de 2008. Ce projet de loi a été adopté et Daw Aung San Suu Kyi est maintenant conseillère d'État du Myanmar, dirige le gouvernement de la LND et assume de facto les fonctions de présidente du Myanmar.
Daw Aung San Suu Kyi fait de son mieux pour réformer, petit à petit, l'ancien régime du pays. Nous convenons qu'elle prend les bonnes mesures pour entrer dans une nouvelle ère, mais elle n'a encore dit mot de la détresse des Rohingyas. Elle a pris le parti des oppresseurs. Son parti et elle ont nié l'existence du peuple Rohingya au Myanmar.
Face aux problèmes touchant les Rohingyas et les musulmans, l'USDP et la LND ont adopté le même comportement politique, même s'il y a des différences très importantes entre leurs politiques à l'échelle nationale.
Depuis 2012, les peuples Rohingya et Kaman ont été victimes de violences dans l'État de Rakhine, auparavant appelé Arakan. En 2013, ces violences se sont déplacées dans le canton de Meikhtila situé au centre du Myanmar. Les deux partis politiques ont fait leurs, directement ou indirectement, les discours de haine du groupe bouddhiste nationaliste Ma Ba Tha.
Une seconde poussée de violence s'est produite en octobre 2012 contre les musulmans rohingyas et kamans. Ce fut pour moi l'occasion de proposer au président du Parlement, Thura U Shwe Mann, par l'intermédiaire de l'USDP, d'agir contre la violence faite aux Rohingyas et aux Kamans par les habitants du canton de Kyauk Pru. Le président a demandé son avis à la présidente du Comité des affaires juridiques, Daw Aung San Suu Kyi, mais celle-ci a rejeté cette proposition.
Enfin, le Parti de l'unité nationale a présenté cette proposition au Parlement. J'ai, bien sûr, eu l'occasion d'en discuter et de demander au ministre de l'Intérieur de procéder à la réforme du corps policier de l'État de Rakhine, car selon les victimes de violences chez les Rohingyas et chez les Kamans, ces policiers étaient parmi les auteurs de ces violences. Lors de la poussée de violence de 2013 dans le canton de Meikhtila, le député LND de la circonscription, U Win Htein, a blâmé les musulmans au lieu des vrais coupables.
L'USDP a organisé un référendum, sanctionné par un vote du Parlement, dans le but de modifier la constitution pour retirer au 1,3 million de Rohingyas leur droit de vote, même si ceux-ci avaient été autorisés à participer à toutes les élections précédentes. Ni Daw Aung San Suu Kyi, ni aucun député de la LND ne se sont opposés à ces dispositions. Thura U Shwe Mann et Daw Aung San Suu Kyi ont conspiré pour retirer leur droit de vote aux Rohingyas à compter de l'élection de novembre 2015. Aucun de ces deux partis n'a désigné un seul candidat à cette élection. La Commission électorale de l'État de Rakhine et celle de l'Union m'ont toutes deux interdit de me présenter à l'élection du 8 novembre 2015, alors même que j'étais déjà député.
Je me suis vu refuser le droit de contester l'élection parce que le ministère de l'Immigration et la Commission électorale ont prétendu, à tort, que mes parents n'étaient pas citoyens du Myanmar lors de ma naissance. Pourtant, lors de l'élection de 2010, le même ministère de l'Immigration et la même Commission électorale avaient approuvé mes documents de candidature à l'élection dans la circonscription de Buthidaung, située dans l'État de Rakhine.
Permettez-moi de vous dire que c'est là la blague la plus cynique du XXIe siècle: tous les candidats rohingyas ont été victimes de la même exclusion. Des douzaines de candidats musulmans birmans ont également vu leurs candidatures rejetées par les autorités électorales. Ne vous y trompez pas: nous avons été victimes de nos ethnies et de notre religion.
Lors d'une conférence de presse tenue juste avant l'élection, Daw Aung San Suu Kyi a déclaré que parler de la persécution des Rohingyas était une exagération. À l'occasion d'une visite en Europe en 2013, elle a également déclaré être une politicienne et non pas une défenderesse des droits de l'homme. Elle a également déclaré plusieurs fois aux médias que la question des Rohingyas en était une d'immigration, qui touchait à la primauté du droit et qu'elle relevait de la responsabilité du gouvernement.
Monsieur le président, Daw Aung San Suu Kyit porte maintenant le titre d'honorable puisqu'elle est la ministre responsable des Affaires étrangères, du Cabinet du président et conseillère d'État. C'est elle qui dirige le gouvernement.
Permettez-moi de vous rappeler ce que le gouvernement de la LND a fait jusqu'à maintenant pendant le premier mois de son mandat. Quantité de prisonniers politiques ont été libérés par ordre du président de la LND et de la conseillère d'État, mais les prisonniers politiques rohingyas, comme ceux qui sont des musulmans birmans, ont été exclus de l'application de cette mesure. Environ un millier de Rohingyas ont été emprisonnés sous de fausses accusations après les violences de 2012, qui ont provoqué le déplacement de 140 000 personnes dans le pays. Lors d'une entrevue diffusée sur RFA Burmese, le ministre des Affaires religieuses, Thura U Aung Ko, a accusé tous les musulmans du Myanmar d'être des « citoyens associés » ou des « citoyens invités ».
La loi sur la citoyenneté de 1982 accorde aux citoyens associés à peu près les mêmes droits qu'aux étrangers. Concrètement, ces citoyens associés sont considérés et traités comme des étrangers par les organismes gouvernementaux de mon pays. Alors que les organisations musulmanes ont demandé avec insistance au gouvernement de la LND de publier une déclaration indiquant clairement les politiques qu'elle entend appliquer aux musulmans du Myanmar, aussi bien la LND que l'honorable conseillère d'État Daw Aung San Suu Kyi sont restées muettes.
Lorsqu'un bateau a chaviré sur la côte, près de Sittwe, dans l'État de Rakhine, et qu'une vingtaine de personnes déplacées, Kamans et Rohingyas, se sont noyées, le gouvernement de la LND n'a aidé aucune des victimes ni n'a fait part de ses condoléances, alors que l'ambassade des États-Unis située à Rangoon a transmis ses condoléances et a utilisé le terme « Rohingyas ». Par la suite, le groupe bouddhiste nationaliste Ma Ba Tha a tenu des discours haineux en insultant non seulement les Rohingyas, mais également l'ambassade des États-Unis à Rangoon, l'ambassadeur des États-Unis, M. Scot Marciel, et le gouvernement américain. Enfin, ce groupe et le Myanmar National Network ont organisé une manifestation devant l'ambassade des États-Unis à Rangoon le 28 avril 2016. À l'occasion de cette manifestation, le chef du Ma Ba Tha a publié une déclaration insultant les Rohingyas, l'ambassade américaine et le gouvernement américain.
La Police birmane avait accordé un permis de manifester. Les forces policières sont des complices. Il est probable que ce permis a été délivré avec l'accord du ministre de l'Intérieur, mais la LND est restée coite comme si rien ne se passait dans le pays.
La National Democratic Force, ou NDF, a publié une déclaration critiquant celle de l'ambassade américaine et l'ambassadeur américain pour avoir utilisé le terme « Rohingyas », mais sans manifester la moindre sympathie à l'endroit des victimes. C'est un parti nationaliste qui, de pair avec les politiciens extrémistes de l'État de Rakhine, blâme et insulte toujours les Rohingyas.
Dans sa déclaration, la NDF demandait avec insistance au gouvernement de la LND de publier sa propre déclaration sur l'emploi du terme « Rohingyas » par l'ambassade américaine. Interrogé à ce sujet par RFA Burmese, le dirigeant de la LND, U Tin Oo, a déclaré que c'était le gouvernement précédent qui avait décidé de la terminologie utilisée pour ces personnes. Le gouvernement de la LND n'avait rien à dire sur cette question si ce n'est que, pour lui, il n'y a pas de Rohingyas.
Monsieur le président, il est maintenant tout à fait manifeste que la LND et le gouvernement qu'elle dirige ne reconnaissent pas les Rohingyas et n'ont aucune intention de chercher une solution au problème des camps de personnes déplacées d'origine rohingya. À la suite des violences de 2012, il y a encore 120 000 Rohingyas déplacés. Lors d'un vol en hélicoptère au-dessus de Sittwe, j'ai moi-même vu, le 10 juin2012, les bouddhistes extrémistes de Rakhine mettre le feu aux maisons des Rohingyas.
Depuis cette époque, j'ai pris la défense des victimes qui ont besoin d'être réinstallées et je demande à ce que les auteurs de ces violences et les policiers qui y ont participé soient punis. Aucun député ne m'a écouté et aucun ministre n'a prêté attention à mes questions ou à mes propositions.
J'ai compilé un relevé des faits qui prouve l'existence des Rohingyas et qui propose une solution de coexistence pacifique. Je l'ai remis en 2013 au président Thura U Shwe Mann, et à la présidente de la LND, Daw Aung San Suu Kyi, ainsi qu'à tous les députés birmans mais, à ce jour, ni Thura U Shwe Mann ni Daw Aung San Suu Kyi ne m'ont répondu. Aucun d'eux n'est désireux de régler le problème des Rohingyas. Ils pratiquent la « diplomatie silencieuse ».
Si c'est bien le cas, les difficultés auxquelles se heurtent les Rohingyas vont être multipliées par deux dans un avenir proche. Nous ne sommes pas des immigrants illégaux. Nous n'avons pas besoin d'être naturalisés. Nous demandons simplement qu'on nous redonne nos droits, y compris notre citoyenneté et nos droits politiques.
Aujourd'hui, les conditions de vie des Rohingyas restent graves. J'ai moi-même visité des camps de déplacés à Sittwe le 31 août 2015. La situation de ces gens est désastreuse. Les enfants souffrent de malnutrition, les personnes âgées sont malades. L'Hôpital général de Sittwe s'apparente à un hôpital nazi pour les Rohingyas. La plupart de ceux qui s'y sont fait traiter auraient été tués par les infirmières bouddhistes. Les Rohingyas ont peur de s'y rendre. Les cliniques installées dans les camps de déplacés manquent d'équipements. C'est pourquoi la plupart des patients rohingyas veulent être hospitalisés à Rangoon plutôt qu'à Sittwe, mais on leur impose pour cela des frais énormes que la plupart d'entre eux ne sont pas en mesure de payer.
Je suis navré de vous interrompre. Le temps imparti pour votre déclaration préliminaire aura expiré dans 30 secondes. Peut-être pourrez-vous revenir, dans vos réponses, sur les points qu'il vous reste à aborder. Je sais que vous avez également quelques recommandations à nous formuler.
Je vous serais reconnaissant de bien vouloir clore votre déclaration préliminaire, et je vous en remercie d'avance.
Très bien.
Pour en terminer, ils restent dans les camps à attendre la mort. Certains d'entre eux tentent de se rendre au Bangladesh pour obtenir de meilleurs soins médicaux. Lorsqu'ils reviennent, on les accuse de franchissement illégal de la frontière et on les met en prison pour un à deux ans. La plupart des patients sont des femmes et des enfants. J'ai des cousins qui sont victimes de ce traitement. Les Rohingyas n'ont pas le droit de se déplacer librement et ils font aujourd'hui face à quantité de problèmes.
Je vous remercie, monsieur le président.
Merci beaucoup.
Je vais demander aux membres du Comité s'ils acceptent que le reste de votre déclaration figure, dans sa forme écrite, au procès-verbal.
Nous entamons maintenant la période de questions aux témoins et commençons avec M. Anderson.
Bonjour, monsieur. Je suis ravi de vous revoir.
Le président a une copie de votre document, mais pas nous. Si je comprends bien, vous avez quelques recommandations à formuler et je me demande si vous pourriez prendre quelques minutes pour nous en faire part. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez laissé entendre qu'une coexistence pacifique serait possible, et vous avez également formulé quelques autres suggestions. Je suis bien prêt à vous céder de mon temps de parole si vous voulez nous faire part des recommandations que vous prônez.
Je vous en remercie, monsieur Anderson.
J'en profite donc pour poursuivre. Les Rohingyas font effectivement face à des problèmes puisque, aujourd'hui, on leur refuse une citoyenneté pleine et entière en les traitant comme des étrangers, sans qu'ils puissent anticiper si les démarches pour récupérer leur citoyenneté seront fructueuses. Notre ethnie Rohingya n'est pas reconnue, on nous accuse d'être des immigrants illégaux, nous n'avons pas le droit de nous déplacer librement, nous n'avons pas accès à l'enseignement supérieur, notre avenir dans les camps de réfugiés est incertain et nos mariages sont soumis à des restrictions.
Ce sont les restrictions imposées à nos déplacements dans notre propre pays qui nous posent le plus de problèmes. Pour les Rohingyas, chaque ville de l'État de Rakhine s'apparente à une prison ouverte.
C'est pourquoi, au nom des Rohingyas du Myanmar, j'aimerais demander au Parlement et au gouvernement du Canada, par l'intermédiaire du président de ce Comité, d'insister auprès de la conseillère d'État du Myanmar, Aung San Suu Kyi, et du commandant en chef des armées du Myanmar, Min Aung Hlaing, pour qu'ils mettent en oeuvre immédiatement les recommandations que je propose.
Voici ces recommandations:
cesser tous les abus contre les Rohingyas dans l'État de Rakhine;
élaborer une feuille de route pour s'attaquer à la crise des Rohingyas;
leur accorder la liberté de circulation;
leur accorder l'accès à l'enseignement supérieur et construire suffisamment d'écoles primaires;
réinstaller les déplacés rohingyas dans des maisons sur leurs terres d'origine;
démanteler la clôture séparant les collectivités rakhines et rohingyas dans la ville de Sittwe, dans l'État de Rakhine;
reconnaître officiellement l'ethnie Rohingya;
reconnaître ou restaurer la citoyenneté de plein droit et les droits politiques des Rohingyas;
inviter des représentants rohingyas à la conférence du XXIe siècle de Pinlon sur la réconciliation nationale.
Voilà, monsieur le président, la fin de ma déclaration préliminaire. Je vous remercie du temps que vous avez bien voulu me consacrer, et je remercie également M. Anderson.
Je vous remercie, monsieur le président.
J'ai une question à vous poser.
Il ne suffit pas que les sociétés prennent des mesures contre la discrimination pour que celle-ci disparaisse. J'aimerais que vous me disiez, à votre avis, quelles sont les mesures qu'il faudrait mettre en œuvre dans la société du Myanmar. Les Canadiens pourraient-ils jouer un rôle, et lequel, dans la mise en place de certains de ces changements? Que faudrait-il faire pour que votre peuple puisse profiter pleinement de sa citoyenneté au Myanmar?
En réalité, le peuple Rohingya est un groupe autochtone du Myanmar, et donc, sans la modification apportée à la loi sur la citoyenneté… Avec la législation en vigueur, si le gouvernement en manifestait la volonté politique, il pourrait accorder à tous les Rohingyas une citoyenneté pleine et entière. L'obstacle le plus important est que les gouvernements, le précédent comme celui de la LND, ne semblent nullement avoir l'intention de résoudre ce problème.
Pouvez-vous nous dire assez rapidement en quoi les modifications apportées à la mise en œuvre de la loi sur la citoyenneté vous ont touchés? Dans votre cas, vous étiez député. Vous n'avez même pas été autorisé à poser votre candidature à la dernière élection. Est-ce bien cela? Pouvez-vous nous expliquer rapidement comment cela s'est produit, comment le gouvernement s'est senti autorisé à ne vous reconnaître aucun droit, à vous et aux autres?
Je vous remercie, monsieur Anderson.
J'ai été élu à deux élections. Lorsque j'ai transmis la même documentation à la Commission électorale et aux dirigeants de l'État de Rakhine, ainsi qu'à la Commission électorale birmane, tous ont rejeté ma candidature en prétendant, à tort, que mes parents n'étaient pas citoyens birmans lorsque je suis né. C'est ridicule parce que, après l'indépendance, tous les citoyens du Myanmar, y compris mon père, et même tous les présidents du Parlement, même l'ancien général Ne Win, détenaient la même carte. Par contre, après l'adoption de la loi sur la citoyenneté de 1982, ils ont accusé aveuglément les Rohingyas ne pas être des citoyens birmans. Ils ne reconnaissent même pas la carte de citoyenneté émise par le gouvernement précédent.
S'ils en ont la volonté, ils peuvent reconnaître la citoyenneté des Rohingyas immédiatement, sans avoir à modifier un seul article de la loi actuelle sur la citoyenneté.
Comment le gouvernement canadien pourrait-il inciter les entreprises canadiennes à exercer des pressions? Nous discutons d'investissements au Myanmar, et nous parlons avec les représentants de votre pays de la levée possible des sanctions. C'est le genre de sujet que nous abordons avec eux. Comment les entreprises canadiennes pourraient-elles vous apporter leur aide quand elles s'implantent dans votre pays et y investissent?
J'aimerais, en m'adressant au Parlement et au gouvernement du Canada, demander aux hommes d'affaires canadiens de ne pas faire d'affaires avec le gouvernement du Myanmar. S'ils le veulent, ils devraient parler aux dirigeants, en particulier à la conseillère d'État Daw Aung San Suu Kyi, pour qu'ils règlent le problème des Rohingyas en leur reconnaissant la citoyenneté birmane afin qu'ils puissent profiter de leur droit au même titre que les autres peuples. Je crois que c'est ainsi que les gens d'affaires du Canada, et bien sûr le gouvernement du Canada, devraient s'y prendre pour résoudre ce problème.
Je vous remercie.
J'ai apprécié votre exposé et je vous en remercie.
J'ai trouvé vos recommandations très intéressantes. Je suis fermement convaincue que nous ne pouvons pas contraindre un pays à collaborer ni le forcer à recevoir l'aide que nous sommes prêts à lui apporter.
Il y a maintenant quelques mois, Aung San Suu Kyi était interrogée sur BBC News et a eu un petit accrochage avec une journaliste qui lui demandait de condamner les souffrances imposées aux Rohingyas et les atrocités commises à leur endroit. Elle aurait alors dit: « Personne ne m'a prévenu que j'allais être interrogée par une musulmane .» Même s'il n'y a pas là matière à tirer des conclusions, cela peut nous inciter à penser que le gouvernement ne tient pas vraiment, pour l'instant, à soulager les souffrances des Rohingyas.
Qu'en pensez-vous?
Monsieur le président, avec votre permission, je vais répondre aux commentaires et aux questions de la députée.
Si nous comparons la situation avant et après l'élection, je vous dirais que, dans le premier cas, nous avions des approches similaires. Ils craignaient d'avoir du mal à remporter l'élection, surtout depuis que les groupes bouddhistes et nationalistes tiennent des discours de haine. Ils craignaient de ne pas recueillir la majorité des voix au niveau national. Même si cela semble une bonne idée, je ne la partage pas parce que si leur comportement était justifié par la crainte de la LND, ou de n'importe quel autre parti, de perdre des voix lors de l'élection de 2015, qu'en sera-t-il lors de l'élection de 2020? D'autres élections seront déclenchées à l'avenir et, s'ils suivent cette voie, ils ne seront jamais en mesure de résoudre leurs problèmes.
C'est la raison pour laquelle Daw Aung San Suu Kyi a déclaré qu'elle n'aurait pas donné d'entrevue à Mishal Husain si elle l'avait su musulmane. Je suis personnellement convaincu que Daw Aung San Suu Kyi savait fort bien que Mishal Husain, la correspondante de BBC News, est musulmane, car elle a un nom musulman. N'oubliez pas non plus que Daw Aung San Suu Kyi a fait des études à l'Université d'Oxford.
En parlant de cette façon, elle tient à montrer qu'elle apporte son appui à la majorité bouddhiste. En étant favorable aux bouddhistes, elle se trouve en même temps indirectement à s'opposer aux musulmans. Si c'est ce qui s'est passé lors de l'élection de 2015, qui va garantir que cela ne se reproduira pas lors de l'élection de 2020? C'est une attitude très dangereuse pour notre pays.
Aung San Suu Kyi parle de libérer le peuple du Myanmar de la crainte, mais c'est elle maintenant qui a peur, peur de ne pas gagner l'élection. C'est ce qui m'amène à demander à notre conseillère d'État d'être suffisamment brave pour dire la vérité au peuple du Myanmar sur la tentative d'effacement de la diversité et sur l'intérêt d'une société pluraliste. Si la même politique continue à s'appliquer pendant le reste de la session parlementaire, ils ne vont chercher à résoudre aucun des problèmes des Rohingyas.
Je vous remercie de votre attention.
Nous savons fort bien qu'il s'agit là d'un tout nouveau gouvernement, et les nouveaux gouvernements qui font la transition vers une forme démocratique de gouvernement ont besoin d'aide. Croyez-vous que le Canada pourrait proposer une sorte de mentorat qui permettrait au gouvernement du Myanmar d'apprendre comment le Canada a fait sienne la démocratie et comment nous la célébrons? Pensez-vous que le Myanmar serait en mesure de profiter de ces leçons du gouvernement canadien de façon ouverte et inclusive?
Je trouve que c'est une excellente idée. Cela m'amène à demander au Parlement et au gouvernement du Canada, en collaboration avec la communauté internationale, de défendre la démocratie en prenant l'exemple de la diversité qui caractérise le Canada, afin que Daw Aung San Suu Kyi ait la possibilité d'expliquer au peuple du Myanmar de quoi il s'agit et les avantages qu'elle présente, et la majorité sera alors à même de comprendre l'intérêt de la diversité, des religions, et de la liberté de les pratiquer, et des droits de la personne. Au Myanmar, la majorité des nationalistes estiment que les droits et les libertés de la personne ne s'appliquent qu'à eux, et pas aux musulmans ni aux chrétiens.
Il y a eu récemment beaucoup de problèmes avec l'église chrétienne. Un moine tentait de construire un monastère à proximité d'une mosquée et un autre moine essayait de consulter une pagode. Les nationalistes sont d'avis que la religion bouddhiste est de loin la meilleure et que les autres sont sans importance.
Donc, si les gens d'affaires ou le Parlement du Canada pouvaient faire cela, ce serait une excellente chose. Je suis pleinement d'accord avec cette approche.
Je vous remercie. Nous passons maintenant à la troisième personne ayant des questions à vous poser. Madame Hardcastle, la parole est à vous.
Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais demander à notre hôte de nous entretenir un peu de certaines des possibilités de coopération et du rôle que, à son avis, le gouvernement du Canada pourrait jouer. Savez-vous si, actuellement, des discussions ont lieu au sein du nouveau parti gouvernemental concernant l'allégement des restrictions que vous avez évoquées précédemment et l'adoucissement de la législation discriminante envers les minorités religieuses? Dans quels domaines y aurait-il des possibilités de coopération?
Merci, monsieur le président.
Je vais répondre à la députée. En date d'aujourd'hui, je n'ai pas connaissance d'une indication quelconque qui porterait à croire que le nouveau gouvernement, pas plus que la LND, serait prêt à entamer des discussions avec nos représentants rohingyas dans le pays. Bien que quantité de partis politiques, de représentants et de politiciens aient essayé de les approcher, même Daw Aung San Suu Kyi et son parti n'ont jamais accepté de les rencontrer.
C'est pourquoi, dans mes recommandations, je demande à ce que les représentants rohingyas soient invités à la Conférence nationale de réconciliation qui doit se tenir à Pinlon. Ces jours-ci, le dirigeant de la LND, U Tin Oo, s'est demandé où se trouvaient les Rohingyas lors des manifestations tenues en face de l'ambassade des États-Unis à Rangoon.
Avant l'élection, en 2014 et 2011, un des cadres dirigeants de la LND a mentionné plusieurs fois les Rohingyas mais c'est un terme qui semble tabou maintenant. Ils sont même très réticents à rencontrer les représentants des Rohingyas.
Permettez-moi de vous donner un autre exemple. Lors de la session parlementaire précédente, j'ai essayé trois fois de parler à Daw Aung San Suu Kyi. La première fois, elle m'a écouté pendant trois secondes, puis m'a demandé en souriant « Comment allez-vous? » La seconde fois je n'ai eu droit qu'à un sourire et la troisième fois elle est tout simplement partie.
J'ai aussi préparé un dossier documentaire sur les Rohingyas intitulé A Truthful Rohingya Solution. Je sais qu'il lui a été remis, tout comme au président précédent du parlement, Thura U Shwe Mann, mais je n'ai obtenu aucune réponse.
Étant donné tout ceci, nous pouvons en déduire que nos dirigeants ne sont pas encore prêts à parler ou à discuter. Le Parlement et le gouvernement du Canada peuvent peut-être demander à notre conseillère d'État d'en discuter dans un avenir très proche.
Vous aimeriez donc que les entreprises canadiennes imposent une certaine forme de sanctions ou que le Canada prenne position pour que les choses bougent. Vous ne percevez actuellement aucune possibilité de coopération et vous êtes d'avis que nous devrions pouvoir jouer un rôle. Vous ai-je bien compris?
Tout à fait. En vérité, j'aurais préféré pouvoir éviter de dire cela, mais la situation m'y contraint, et je ne fais en cela que reprendre ce qu'a déjà fait Daw Aung San Suu Kyi.
À l'époque où le régime militaire rebelle niait ses droits, elle en a appelé auprès du gouvernement des États-Unis et de ceux de tous les pays industrialisés pour qu'ils appliquent des sanctions contre le régime de l'époque. Nous pensons que ces sanctions ont largement contribué aux changements démocratiques survenus dans notre pays. De la même façon, j'espère qu'une autre forme de sanctions pourra aider à résoudre la crise des Rohingyas.
Je vous remercie, monsieur Razak, de votre témoignage, et plus encore de votre courage.
Le test d'une jeune démocratie, ou en vérité de toute démocratie, réside dans la façon dont elle traite ses minorités ou les personnes les plus vulnérables, et vous avez manifestement relevé un certain nombre de défaillances dans le cas des Rohingyas.
J'aimerais vous demander d'approfondir un peu les causes, à votre avis, du silence du gouvernement actuel. Je sais bien que vous avez évoqué des tensions religieuses ou quasi religieuses, mais j'aimerais que vous nous donniez de plus amples détails sur les raisons de l'inertie du gouvernement actuel en la matière.
J'aimerais vous demander d'approfondir un peu les causes, à votre avis, du silence du gouvernement actuel ou, si vous préférez, de son inertie face à ce problème, et que vous nous parliez des difficultés auxquelles se heurterait une jeune démocratie en défendant vos droits ou, au moins, en vous accordant certains des droits fondamentaux reconnus au Myanmar.
Je réalise fort bien que notre démocratie est très jeune et que le gouvernement favorise les mauvaises personnes, mais n'importe quel gouvernement pourrait au moins prendre quelques mesures. Ils pourraient s'exprimer. Le problème est qu'ils sont totalement muets.
Ce que je vous dis ne repose pas sur des observations faites pendant un seul mois. Je suis attentivement les comportements et les idées politiques de la LND depuis 2012, soit depuis le moment où certains de leurs représentants ont été élus au Parlement, et je n'ai rien vu, rien entendu de leur part. J'en conclus donc qu'ils n'ont aucun intérêt à résoudre ce problème.
Il est vrai que, dans d'autres domaines, ils font des efforts. Ils sont confrontés à de nombreux défis. Il se peut qu'il y ait un autre problème, caché celui-ci. Étant donné que, comme je vous l'ai dit précédemment, la LND a formé un gouvernement civil, mais que l'essentiel du pouvoir est entre les mains des militaires, le problème des Rohingyas devient un outil pour réaliser des gains politiques. Si quelqu'un essayait de résoudre ce problème, un autre groupe pourrait en tirer parti. Ce genre de situation ne fait qu'aggraver la souffrance des Rohingyas.
Je vous remercie.
Vous avez évoqué brièvement le rôle des militaires.Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le rôle qu'ils jouent dans le gouvernement actuel et sur l'influence que, à votre avis, ils exercent.
Oui, mais permettez-moi de commencer par vous dire haut et fort que ce gouvernement est… Nous pouvons dire qu'il s'agit d'une démocratie édulcorée parce que, en creusant un peu, on constate que ce sont les ministres de l'Intérieur et de la Défense qui ont la haute main sur le pays. Au quotidien, les gens ordinaires ont à faire face à l'administrateur local. Ces administrateurs locaux ne sont pas élus, ils sont nommés directement par le ministre de l'Intérieur. C'est donc à lui, en principe, que va leur fidélité.
Le peuple du Myanmar, y compris les Rohingyas, est toujours confronté à une administration de type militaire.La constitution empêche que le ministre de l'Intérieur, celui de la Défense et celui des Douanes soient nommés par le président. C'est le chef militaire qui les nomme. De plus, comme la constitution ne parle pas du ministre de l'Immigration, sa désignation relève d'un compromis entre la LND et les militaires.
C'est un ancien général qui a été nommé nouveau ministre de l'Immigration. Celui-ci joue un rôle très important dans la question qui nous occupe et il y a un jeu politique entre ces deux groupes.
Je vous remercie, monsieur le président. Je tiens aussi à remercier très sincèrement M. Shwe Maung de son témoignage et à le féliciter pour sa bravoure et son courage.
Puis-je vous demander, monsieur, combien de Rohingyas ont voulu faire acte de candidature à l'élection de 2015, et combien ont été autorisés à le faire.
Vous nous avez dit plus tôt que tous les membres de la LND ont voté en faveur du projet de loi qui retirait leur citoyenneté aux Rohingyas du Myanmar. Est-ce bien cela?
Oui. Lorsque les députés de l'USDP ont déposé ce projet de loi, aucun député de la LND ne s'y est opposé. On peut donc dire, en toute logique, qu'ils l'ont accepté. Ils n'ont contesté aucune de ses dispositions.
Le fait qu'ils n'aient pas contesté ce projet de loi ne signifie pas nécessairement qu'ils ont voté en sa faveur. Est-ce bien ce que vous nous dites?
Oui, ils n'ont pas nécessairement voté en faveur de ce projet de loi. De toute façon, ce texte aurait été adopté à la majorité.
Bien.
Vous ne mâchez pas vos mots et c'est assez courageux. Avez-vous eu personnellement à en payer le prix?
J'ai eu à payer le prix fort pour ma défense des Rohingyas persécutés.
Je vis maintenant aux États-Unis. Comme M. Anderson le sait fort bien, j'y étais venu pour assister à une conférence de l'International Panel of Parliamentarians for Freedom of Religion or Belief et à un certain nombre de réunions avec des représentants du Département d'État et, bien sûr, du Congrès des États-Unis.
À la suite de ce voyage, le Président du Myanmar, celui du Parlement, l'USDP et les militaires se sont entendus pour me tendre un piège. Si je retourne chez moi, je serai arrêté à l'aéroport, en date du 1er mai, je crois, puis accusé de l'incendie du village de Duchiradan et de la flambée de violences de 2014.
À cette époque, j'ai critiqué la Police birmane. À ce que m'ont dit mes électeurs, la police a participé à ces violences alors que le gouvernement du Myanmar en a accusé le peuple Rohingya. Selon les dirigeants gouvernementaux, ce serait les Rohingyas eux-mêmes qui auraient mis le feu à leur village. Je réponds à cela: « C'est faux. D'après les Rohingyas, c'est la police qui a brûlé leurs maisons. » C'est à la suite de cela que le président du Myanmar, Thein Sein, a demandé par écrit au Président du Parlement de délivrer un mandat d'arrestation à mon endroit. C'est ainsi qu'ils me manifestent leur rancune.
Comme par la suite, j'ai démissionné de l'organisation birmane du PDNU, cette rancune s'est encore accrue. Mon principal tort est d'avoir défendu à répétition le peuple Rohingya. C'est pour cela qu'ils ne veulent pas que je retourne dans mon pays, parce qu'ils veulent se servir de moi comme d'un symbole. Qui va défendre maintenant les Rohingyas? Peu importe qui va parler en leur nom, cette personne sera punie. C'est le principe. C'est pourquoi, bien que je désire retourner chez moi, je ne peux pas le faire parce que, en collaboration avec la police, un mandat d'arrêt a déjà été levé contre moi.
C'est le prix que j'ai à payer pour m'être porté à la défense de ce peuple persécuté.
Je vous félicite pour votre courage, mais permettez-moi de changer de sujet maintenant.
Vous avez fait état de 120 camps de personnes déplacées. Y a-t-il quelqu'un qui assume un rôle de leader en veillant à l'hébergement et aux soins des Rohingyas dans ces camps?
Il y a effectivement des chefs de camp nommés par le gouvernement du Myanmar, mais ils n'ont aucun pouvoir. La situation est catastrophique dans tous les camps. Un nombre élevé de familles se partage un espace très restreint. Elles n'ont pas accès à l'eau potable, ne reçoivent pas d'alimentation convenable. La plupart des enfants souffrent de malnutrition et la plupart des personnes âgées ont des maladies chroniques. Si elles essaient de se faire hospitaliser, leurs parents les retrouvent mortes. C'est comme si elles se rendaient dans un hôpital nazi et les gens ont maintenant peur d'y être hospitalisés.
Dans ces camps, je ne vois pas trace d'une gestion systématique qui permettrait de traiter ces Rohingyas comme des êtres humains. C'est l'incurie généralisée.
Je vous remercie.
Il ne nous reste que très peu de temps, mais je vais inviter M. Saini à vous poser une question fort brève. Il faut qu'elle soit brève parce qu'il nous reste encore un point de l'ordre du jour à traiter à la fin de cette réunion.
Monsieur Maung, je vous remercie d'avoir accepté de témoigner devant nous aujourd'hui.
J'ai une question rapide à vous poser. La dernière constitution a été rédigée par les militaires, et elle a été soumise à un référendum. En nous fiant aux rapports qui ont été publiés, 92 % des électeurs ont accepté cette constitution. Toutefois, celle-ci réservait encore 25 % des sièges aux militaires. Est-ce bien exact?
C'est donc exact.
Maintenant qu'un nouveau gouvernement est en place, et qu'il est probable que des tensions apparaissent entre les militaires et le gouvernement civil, ne croyez-vous pas qu'il serait temps à nouveau de réviser la constitution ou de tenir un autre référendum pour éliminer cette réserve de 25 % des sièges pour les militaires?
Quant à moi, j'adhère pleinement à votre idée parce que nous ne voulons pas voir des personnes non élues siéger au Parlement, des personnes qui ne sauraient pas comment se comporter.
La constitution de 2008 précise que les députés doivent être élus. Cette réserve de 25 % des sièges pour les militaires risque d'être difficile à supprimer. Nous aimerions beaucoup le faire mais, au bout du compte, c'est le chef militaire du Myanmar qui en décidera, parce que tous les députés qui siègent au Parlement s'expriment, proposent des choses et posent des questions en suivant explicitement les instructions de ce dernier.
Si ces « députés militaires » ne veulent pas d'une telle révision de la constitution, elle ne sera pas possible parce qu'elle nécessite plus de 75 % des voix.
Si je suis bien informé,votre constitution de 2008 prévoit la nomination, dans certains États, où réside une proportion plus faible de groupes ethniques, d'un ministre des Minorités. Cela s'est-il avéré un outil efficace de représentation des minorités ethniques, ou pensez-vous que c'est là une forme de placebo destiné à apaiser la population?
En droit, c'est une disposition utile. C'est même une bonne idée, mais il ne faut pas oublier que le régime militaire précédent avait pour stratégie de diviser pour régner. C'est ainsi que, dans l'État de Shan, ils ont mis en place un certain nombre de zones autogérées. Depuis leur apparition, un certain nombre de différends y sont apparus. Cette mesure s'est avérée utile dans certaines régions, mais dans l'État de Shan, elle a fait apparaître un plus grand nombre de problèmes.
Il ne me semble pas que la nomination de ministres des minorités soit si importante. Ce qui importe le plus est d'assurer le même traitement à tous les habitants du Myanmar en appliquant à tous la même norme. C'est ce qui est le plus important.
Merci.
Je tiens à me faire l'écho des sentiments exprimés par tous les membres de ce Comité. Nous vous remercions très sincèrement de vous être tenu à notre disposition aujourd'hui.
Nous vous remercions également de défendre les droits de la personne et de veiller à faire connaître partout dans le monde les souffrances dont les Rohingyas sont victimes. Il était de la plus haute importance pour nous de l'entendre directement de votre bouche.
Votre courage et votre persévérance dans la défense des Rohingyas sont extrêmement précieux. Je vous remercie d'avoir pris le temps de témoigner devant nous aujourd'hui.
Monsieur le président, je vous remercie infiniment de m'avoir fourni l'occasion de témoigner devant votre Comité des souffrances des Rohingyas et du non-respect de leurs droits fondamentaux.
Encore merci, monsieur le président.
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