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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 077 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 19 octobre 2017

[Enregistrement électronique]

(1305)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Nous allons amorcer la séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne, et ce sera notre dernière séance portant sur les droits de la personne entourant l’extraction des ressources naturelles en Amérique latine.
    Nous devons entendre plusieurs témoins aujourd’hui. Par conséquent, nous allons passer immédiatement à cette étape. Je souhaite vous présenter nos témoins, puis nous leur céderons la parole afin qu’ils puissent formuler leurs observations. Nous accueillons Leah Gardner et Shin Imai qui représentent le Justice and Corporate Accountability Project, ainsi que Francisco Ramirez Cuellar qui représente le mouvement national pour les victimes de sociétés multinationales et qui se joindra à nous par vidéoconférence. Nous recevons également Carlos Monge, directeur, Amérique latine, du Natural Resource Governance Institute.
    Je vous remercie tous de vous être joints à nous aujourd’hui. Nous allons commencer par Mme Gardner et M. Imai, et nous allons vous demander de parler, si possible, de sept à huit minutes chacun. Cela nous donnera amplement le temps de procéder aussi à une série de questions satisfaisante.
    Cela dit, veuillez commencer.
    Je vous remercie de nous avoir invités, Shin Imai et moi, à témoigner devant vous aujourd’hui. C’est un honneur d’être ici.
    Nous sommes tous deux membres du conseil d’administration du Justice and Corporate Accountability Project, ou JCAP. JCAP est une clinique de droit menée par des bénévoles et établie à l’Osgoode Hall Law School de Toronto. Shin est professeur de droit depuis plus de 30 ans, et je suis professeure stagiaire, même si, aujourd’hui, je ne m’exprime pas au nom de mon employeur.
    JCAP a pour mission d’appuyer les collectivités touchées par l’industrie extractive, et nos partenaires sont établis principalement en Amérique latine. Nous aimerions vous parler d’un rapport d’étude que nous avons publié et qui s’intitule The 'Canada Brand': Violence and Canadian Mining Companies in Latin America. L’étude nous a permis de compiler et d’analyser des déclarations accessibles au public portant sur la violence associée à l’exploitation minière canadienne dans la région, de 2000 à 2015.
    Cette étude est restreinte. Nous avons compilé seulement les incidents qui pouvaient être vérifiés par deux déclarations indépendantes semblant indiquer de façon crédible que la présence d’un projet minier contribuait à la violence. Notre budget ne nous a pas permis de mener des enquêtes sur le terrain qui, selon nous, auraient très bien pu révéler un surcroît de violence, en particulier au Mexique. Dans le cadre de l’étude, nous n’avons pas examiné globalement les conflits ou les violations des droits de la personne, et nous n’avons pas étudié les effets à long terme de la violence. Enfin, nous n’avons pas enregistré les déclarations de menaces de mort, de campagnes de salissage, de destruction environnementale, de dépossession de terrains, de répercussions sur les fermes ou de militarisation de collectivités rurales. Nous n’avons pris rien de cela en considération.
    Nous avons pris note des déclarations de violence sexuelle, mais nous reconnaissons que les cas de violence sexuelle sont rarement signalés. Il vaut mieux envisager notre rapport comme un aperçu de quelques-unes des pires manifestations de conflit, plutôt que comme un constat représentatif de l’ampleur actuelle des répercussions que ces projets peuvent avoir sur la vie des gens. Avant de publier le rapport, nous avons communiqué avec les sociétés minières qui y sont mentionnées. Dix d’entre elles nous ont répondu, et nous avons apporté certaines modifications au rapport compte tenu de leurs commentaires.
    De 2000 à 2015, nous avons recensé 34 conflits violents auxquels étaient mêlées 28 sociétés minières, petites et grandes, dans 13 différents pays. Il y a eu 44 décès et quatre disparitions. Trente de ces décès semblent être le résultat de meurtres ciblés. Nous avons enregistré 403 blessures physiques qui vont d’une blessure mineure à une invalidité permanente. Il est difficile de comprendre ce que signifient ces chiffres sans parler des gens et de leur histoire. Par conséquent, j’aimerais vous communiquer aujourd’hui quelques-uns de ces détails.
    L’un des cas que nous avons examinés était lié à la mine Escobal au Guatemala, qui appartient à Tahoe Resources. Ce conflit est permanent. Selon les déclarations, des préoccupations environnementales ont poussé les municipalités entourant la mine à organiser un certain nombre de référendums depuis 2011. Une filiale de Tahoe Resources et ses partisans ont intenté plusieurs poursuites au Guatemala afin de stopper ou d'invalider ces votes, mais leurs efforts ont été infructueux. En 2012, la société a intenté une poursuite dans laquelle elle accusait les autorités publiques du Guatemala, dont le ministre de la Défense et la police nationale, d’avoir failli à leur devoir de protéger la mine. Le tribunal a rejeté la requête au début de 2013.
    De 2013 à 2015 — la dernière année que nous avons comptée —, nous avons trouvé des déclarations crédibles qui signalent sept décès liés à des troubles et des interventions de la police autour de la mine, y compris les meurtres ciblés de trois militants. En mars 2013, quatre dirigeants autochtones ont été kidnappés alors qu’ils revenaient chez eux après avoir observé la tenue d’un scrutin référendaire. L’un d’eux a été retrouvé mort le lendemain. Environ une année plus tard, la fondatrice d'un organisme pour les jeunes, âgée de 16 ans, qui s’élevait contre la mine a été tuée par balle alors qu’elle voyageait en voiture avec son père. Ce dernier a failli mourir au cours de l’attaque, mais il a survécu. En 2015, on a tiré encore sur lui alors qu’il revenait du bureau du maire local. En avril 2015, un autre militant a été assassiné alors qu’il attendait l’autobus près de chez lui. Toutes ces personnes avaient participé à l’organisation des référendums.
    En avril 2013, des membres du personnel de sécurité de la mine ont tiré dans le dos six agriculteurs et un étudiant alors qu’ils fuyaient les lieux. Ils se réunissaient à la mine pour protester pacifiquement. Cet incident a été filmé.
    Une ONG appelée CALAS offre un appui juridique aux collectivités locales et a, entre autres, contesté la mine devant les tribunaux, ce qui a entraîné cette année la suspension temporaire de ses activités. Depuis des années, le directeur des services juridiques de CALAS reçoit des menaces de mort et fait l’objet de divers actes d’intimidation, y compris le fait qu'en avril dernier, des hommes en motocyclette ont tiré 8 à 12 balles dans un véhicule garé à l’extérieur de sa maison. En novembre 2016, un jeune homme qui occupait le poste d’adjoint du directeur de CALAS a été atteint par deux balles tirées par des assaillants non identifiés, et il est mort plus tard de ses blessures.
    Je devrais également mentionner que le directeur de CALAS a lui-même survécu miraculeusement à une tentative de meurtre en 2008. Autour de 2010, il est venu à Ottawa avant le vote sur le projet de loi C-300 afin d’exposer aux députés les répercussions sur les droits de la personne qu’ont les sociétés minières canadiennes en Amérique latine.
(1310)
    En ce qui concerne les assassinats, aucun suspect n’a été identifié, et Tahoe Resources nie toute implication.
    Je tiens à vous donner brièvement quelques exemples supplémentaires de déclarations liées à des femmes lors des conflits. Au Guatemala, en 2007, 11 femmes autochtones auraient été victimes de viols collectifs perpétrés par des soldats et des gardes de sécurité de la mine, au cours d’une expulsion visant à préparer la voie à un projet minier canadien. La société soutient que les expulsions se sont déroulées pacifiquement et que ces viols n’ont pas eu lieu.
    Au Salvador, en 2009, une femme farouchement opposée à un projet minier canadien a été abattue alors qu’elle revenait de faire la lessive dans une rivière voisine. Au moment de son décès, elle était enceinte de huit mois et portait dans ses bras son enfant de deux ans.
    Dans notre rapport, vous trouverez d’autres exemples de violence faite aux femmes.
    Nous ne sommes parvenus à aucune conclusion en ce qui concerne la question de savoir si des sociétés canadiennes ont commis des actes répréhensibles. Toutefois, nous avons trouvé partout sur le continent un nombre important de cas récents qui méritent que des enquêtes indépendantes soient menées afin de déterminer ce qui se passe et si des sociétés mêlées à ces événements devraient en être tenues responsables.
    Un ancien juge de la Cour suprême, Ian Binnie, a déclaré: « L’un des principes les plus fondamentaux de notre système judiciaire veut qu’il y ait une solution à toute injustice ». Le juge Binnie a parlé de la nécessité d’améliorer l’accès à la justice des personnes ayant subi un préjudice lié aux industries extractives qui exercent leurs activités à l’étranger. L’une des façons de le faire consisterait à créer un bureau de l’ombudsman indépendant ayant le pouvoir d’enquêter sur des cas comme ceux mentionnés dans notre rapport. Un ombudsman pourrait intervenir pour contribuer à mettre un terme aux violations des droits de la personne ou pour les stopper avant qu’elles surviennent. Il est crucial que le bureau soit indépendant parce que, pour être efficace, il doit être neutre et paraître neutre.
    Nous aimerions conclure en illustrant l’importance des enquêtes et la raison pour laquelle l’indépendance de cette fonction est primordiale.
    Monsieur le président, je limiterai mon intervention à deux minutes pour respecter votre emploi du temps.
    Je tiens à commenter la suggestion de l’Association minière du Canada selon laquelle les enquêtes devraient être mixtes, c’est-à-dire que la société minière en question devrait participer au processus d’enquête. Je vais vous donner un exemple de la raison pour laquelle je ne crois pas que cela fonctionnerait.
    En 2006, une société minière canadienne a acheté une mine et, immédiatement après, un grand nombre de gens ont commencé à soutenir que ses employés commettaient des viols collectifs. La société minière n’a mené aucune enquête. En fait, elle a nié vigoureusement ces accusations. Des étudiants en droit bénévoles de l’Université Harvard et de l’Université Columbia, ainsi qu’une ONG appelée MiningWatch au Canada, ont documenté les faits et se sont présentés aux assemblées générales de Barrick afin d’en informer les gens. Voici, selon le journal The Globe and Mail, la réaction du fondateur de l’entreprise:
....Il a déclaré qu’il serait impossible de surveiller le comportement de 5 550 employés, en particulier dans des pays où les viols collectifs sont une habitude culturelle. Bien entendu, on ne peut pas dire cela parce que c’est politiquement incorrect…
    C’est ainsi que le fondateur a réagi. Toutefois, après cinq années pendant lesquelles diverses ONG et des cliniques de droit ont attiré l’attention du public sur ces incidents, la société a finalement décidé de reconnaître que ses employés étaient impliqués dans ces viols collectifs de masse.
    Quelles sont les conséquences de cette inaction? Des centaines de femmes ont probablement été victimes de viols collectifs pendant que la société attendait de prendre des mesures. J’ai mentionné le nom de la société. Il s’agit de Barrick, qui était la deuxième société d’exploitation aurifère en importance de la planète à l’époque et qui est établie en Ontario. La personne qui a prononcé ces paroles est Peter Munk, dont bon nombre d'entre vous ont entendu parler, j'en suis certain.
    Cette situation illustre la raison pour laquelle des enquêtes mixtes ne fonctionnent pas. Si une personne indépendante au Canada avait pu dire « Cela nous est égal, Barrick, que vous souhaitiez ou non mener des enquêtes sur ces incidents. Nous le ferons nous-mêmes », elle aurait découvert la vérité plus tôt, et elle aurait pu stopper ces viols collectifs. Mais non, nous avons laissé Barrick décider quand elle souhaitait prendre des mesures à ce sujet. C’est là le point faible d’une enquête mixte.
    Merci.
(1315)
    Merci beaucoup.
    Nous entendrons maintenant Francisco Ramirez Cuellar, qui est au téléphone, je pense.
    Monsieur Cuellar, veuillez commencer votre exposé. Si vous pouviez vous en tenir à sept ou huit minutes, cela nous laisserait amplement de temps pour les questions.
    Merci, monsieur.
    Je voudrais tout d'abord vous remercier de m'avoir invité. J'aurai aimé que d'autres associations qui luttent contre la violence en Colombie participent aussi à la rencontre.
    Au cours des 30 dernières années, des lois ont été élaborées avec la collaboration du Canada dans le cadre de ce qui s'appelle le dialogue panaméricain, qui réunit des avocats. Ces lois sont très favorables aux multinationales et, dans ce climat, sont très tolérantes envers les sociétés minières, compte tenu des difficultés auxquelles ces dernières sont confrontées.
    L'organisme de coopération, les avocats et les politiciens ont modifié les contrats de travail et ont créé des obligations précises à l'intention des travailleurs. Ces obligations se fondent sur la collaboration technique qu'ils ont pu obtenir des travailleurs; le contrôle des mesures de sécurité est donc source de préoccupation. Par exemple, la Drummond Company a appliqué ces mesures, ce qui a entraîné de nombreux décès. Le droit aux négociations collectives n'existe plus et a été mis entre parenthèses. Ce droit est suspendu, comme vous le savez. Environ 4 000 personnes ont été assassinées, la plupart étant des dirigeants syndicaux.
    Dans le secteur de l'énergie et de l'exploitation minière, trois groupes travaillent dans des conditions horribles. Seul le profit intéresse les compagnies. Il y a de la violence. Les pauvres et, de fait, tous ceux qui gravitent autour des activités minières sont victimes de marginalisation.
    En 2010, des mesures illégales ont été prises et un grand nombre de travailleurs ont été mis à pied. Les entreprises ont profité d'investissements de nombreux Canadiens. Quelque 1 500 travailleurs ont vu leurs droits violés, ont été malades et ont été victimes de confrontation. Un grand nombre d'entre eux n'avaient aucun contrat et ont tout simplement été exploités. Ils ne peuvent faire partie d'un syndicat ou participer à des négociations collectives. Ils ne bénéficient pas des mêmes conditions de travail que leurs pairs. Il n'y a pas de stabilité sociale. Ces travailleurs ont des contrats déterminés de courte durée et doivent payer eux-mêmes leur sécurité sociale et leur régimes de retraite.
    En outre, les entreprises ne versent pas la moindre prestation ou subvention aux travailleurs qui doivent payer ces sommes. Elles leur versent donc un salaire 10 fois moins élevé que le salaire moyen payé dans les mêmes secteurs ailleurs dans le monde.
(1320)
    Ces entreprises ne paient pas d'impôt, ne paient pas pour la sécurité sociale et ne respectent pas les mesures de sécurité qui devraient être en place. Pourtant, les travailleurs s'affairent sous terre avec de la machinerie très lourde afin d'extraire les minerais à traiter. Presque réduits à l'esclavage, ils travaillent dans des conditions lamentables qui ont été décriées par une organisation canadienne qui voulait faire modifier les lois dans les industries de l'extraction.
    À hauteur de 3 millions de dollars, l'article 227 a été adopté en 2015, à l'avantage de la famille du président. De mains canadiennes, la société est passée à des intérêts colombiens. Entre le Canada et la Colombie, des mesures ont été prises pour faciliter le transport de personnes au Canada. Cela s'est passé quand M. Martin était premier ministre.
    Comme je l'ai expliqué, les conditions sont très précaires pour les travailleurs. Des manifestations ont été organisées et des gens ont été expulsés du territoire. Des groupes militaires sont intervenus et ont exercé des pressions illégales sur les familles. Des gens ont dû abandonner leurs démarches, sinon ils s'exposaient à des représailles avec leur famille.
    En outre, la Colombie a demandé une garantie de 700 millions de dollars pour les activités dans les zones où les autorités gouvernementales savaient que des activités illégales étaient en cours et que des criminels étaient actifs. Sachez que des violations des droits de la personne ont été commises par des personnes qui se trouvent maintenant aux États-Unis et en Angleterre. Des groupes paramilitaires ont aussi mis à prix la tête de nombreuses personnes et ont des relations avec l'armée; 82 % des travailleurs ont été victimes de ces exactions, particulièrement dans la région où est extraite la plus grande partie du charbon destiné au Canada.
    Un institut de recherche a été établi. Nous voulons demander aux Canadiens de venir en Colombie pour examiner toutes ces irrégularités. Des fonctionnaires du gouvernement du Canada, des employés de l'ambassade et des représentants des multinationales dont le siège social se trouve au Canada devraient préparer un rapport détaillé sur la situation pour que des mesures puissent être élaborées et prises afin de vous permettre d'évaluer ce qu'il se passe dans notre pays, et ce, pour que nous puissions faire régner la paix et la justice sociale dans un pays qui a connu d'importants bouleversements, des mouvements de population, des assassinats et d'autres problèmes.
    Nous demandons à ce que des organisations de travailleurs et des ONG présentes en Colombie fassent partie de ce groupe afin de décrire les répercussions des actes commis par les sociétés canadiennes. Nous voulons que les parlementaires tiennent compte des recommandations formulées.
    Nous pourrions recommander la création d'un bureau d'ombudsman qui discuterait des lois relatives à l'environnement et au travail avec la population de la Colombie.
    Merci beaucoup.
(1325)
    Merci beaucoup, monsieur Cuellar.
    Nous entendrons maintenant notre dernier témoin, Carlos Monge, directeur, Amérique latine, du Natural Resource Governance Institute, qui témoigne depuis New York. Vous avez la parole.
    Nous vous saurions gré de limiter votre exposé à sept ou huit minutes, monsieur Monge.
    Merci beaucoup de m'avoir invité à participer à ce débat, qui est le bienvenu.
    Je veux commencer en disant que [Note de la rédaction: difficultés techniques] dans l'ensemble de l'Amérique latine, les [Note de la rédaction: difficultés techniques] mis en lumière dans les témoignages précédents de MM. Haslam et Webber. Je suis aussi entièrement d'accord avec les résultats du rapport sur la marque Canada au sujet de la responsabilité directe des sociétés minières canadiennes dans les divers cas de violations des droits de la personne dans la région. Je n'en dirai pas davantage à ce sujet, car je veux plutôt traiter de quatre domaines où des sociétés minières canadiennes et d'autres parties prenantes pourraient contribuer davantage au respect des droits de la personne et cesser de violer ces droits dans la région.
    Le premier domaine concerne le droit d'accès à l'information intégrale. Vous savez que des progrès ont été réalisés à cet égard à l'échelle mondiale. Le Canada a pris les devants, aux côtés de l'Union européenne, en adoptant des règlements qui obligent les entreprises qui obtiennent des capitaux sur les marchés des titres à divulguer, de manière ventilée, tous les renseignements sur les sommes qu'elles versent aux gouvernements. Les États-Unis ont fait de même, mais ont récemment fait marche arrière en abrogeant le règlement Dodd-Frank. Il importe également de souligner que l'Initiative pour la transparence dans les industries d'extraction commence à s'appliquer au Pérou, au Guatemala, au Honduras, en Colombie, en République dominicaine, à Trinité-et-Tobago, et maintenant au Mexique.
    J'ajouterais toutefois qu'il est crucial de raffermir les mesures qui ont été prises pour consolider le concept de divulgation des renseignements entièrement ventilés, entreprise par entreprise, projet par projet, paiement par paiement. Il est tout aussi important d'élargir la portée de l'Initiative pour la transparence dans les industries d'extraction et d'autres mécanismes de transparence afin d'inclure les renseignements relatifs aux effets sur l'environnement et la société.
    Pour les gens sur place, ce n'est pas qu'une question d'argent. La divulgation intégrale des mouvements financiers est très importante, mais celle des renseignements relatifs aux effets sur l'environnement et la société des activités sur place l'est tout autant. Le gouvernement du Canada devrait continuer de montrer la voie sur la scène mondiale, élargissant la portée des mécanismes de transparence et incitant les gouvernements d'Amérique latine — par des moyens diplomatiques, bien entendu — à adhérer à l'Initiative pour la transparence dans les industries d'extraction ou à élaborer leurs propres mécanismes de transparence. Dans tous les cas, il devrait insister pour que ces mécanismes incluent les renseignements relatifs aux effets sur l'environnement et la société. Il pourrait en outre offrir du soutien aux citoyens vivant dans les territoires exploités pour qu'ils puissent accéder aux renseignements et les utiliser.
    Vous n'ignorez pas que la transparence ne se limite pas à la communication d'information; il faut également renforcer les capacités de la population locale à accéder aux renseignements et à les utiliser. Le gouvernement du Canada devrait intervenir à cet égard quand il favorise les investissements des sociétés minières canadiennes afin de permettre aux citoyens d'accéder à tous les renseignements relatifs aux effets sur l'environnement et la société, et à les comprendre pleinement. Il ne faut pas se limiter à la réalité fiscale.
    Le deuxième domaine où l'activité minière est associée aux violations des droits de la personne concerne le droit des Autochtones et des citoyens en général à participer à des mécanismes de consultation et de consentement préalables libres et éclairés. Peut-être savez-vous que la plupart des pays d'Amérique latine où des sociétés canadiennes sont en activité adhèrent à la Convention 169 de l'Organisation internationale du travail, certains intégrant même les droits de consultation dans leur Constitution. Il n'empêche que dans ces mêmes pays, on n'entreprend pas de consultations ou on les met en oeuvre de manière très limitée; ainsi, dans certains cas, on procédera à une consultation dans le secteur pétrolier, pas dans l'industrie minière, comme c'est le cas au Mexique actuellement.
(1330)
    En outre, l'article 15 de la Convention 169, lequel stipule que les gens ont le droit de profiter de l'exportation des ressources naturelles extraites de leur territoire, n'est pas complètement appliqué dans la plupart des pays. Non seulement les gens ne sont-ils pas consultés, mais ils ne profitent d'aucune retombée, tout en devant supporter les inconvénients et le fardeau social des investissements.
    Enfin, sachez que ce ne sont pas que les Autochtones vivant dans les territoires exploités, mais les citoyens en général qui exigent des consultations préalables libres et éclairées. C'est notamment le cas en Colombie, où les autorités locales organisent maintenant des consultations auprès de la population, même si ce n'est pas dans un territoire autochtone. La demande devient donc universelle.
    Je considère que le gouvernement du Canada devrait demander à ce que tous les pays d'Amérique latine riches en ressources naturelles adhèrent pleinement à la Convention 169 de l'Organisation internationale du travail et la mettent réellement en oeuvre, adoptant les règlements nationaux nécessaires à cette fin.
    Le gouvernement du Canada devrait en outre veiller à ce que les investisseurs canadiens n'investissent que dans des projets recueillant l'approbation locale dans le cadre de consultations efficaces, et respectent la décision de la population lorsqu'elle se prononce contre un projet. C'est très important. Personne ne devrait promouvoir les investissements canadiens dans des projets miniers dans des territoires où la population n'a pas été consultée ou, pire encore, où elle a dit non.
    En troisième lieu, il y a la question du droit à un environnement propre et sain. L'industrie minière contribue indirectement au réchauffement climatique en consommant des énergies fossiles. Dans bien des cas, elle aggrave également les effets déjà néfastes du réchauffement climatique et la raréfaction de l'eau, particulièrement dans le cas de l'exploitation à ciel ouvert, qui détruit les ressources hydriques. Bien souvent, elle pollue les cours d'eau et monopolise la consommation d'eau dans des territoires densément peuplés et là où l'eau devient une ressource rare justement en raison du réchauffement climatique.
    L'industrie minière menace aussi parfois de délicats écosystèmes, non seulement dans des zones protégées, mais également dans d'autres endroits qui offrent à notre région et à l'humanité des services environnementaux essentiels. Prenez, par exemple, le bassin de l'Amazone, lequel constitue depuis toujours le plus grand puits de carbone dont l'humanité dispose pour compenser l'effet accéléré du réchauffement climatique. Ce bassin est aussi la principale source d'eau douce de l'humanité; il fait néanmoins l'objet d'une exploitation minière qui, dans bien des cas, cause la pollution de cours d'eau et la déforestation associées à ces activités et à la présence accrue de gens qui y participent.
    Je me dois d'ajouter qu'en réaction à la chute des prix du pétrole et des produits miniers, les exploitants de mine d'or d'Amérique latine se sont engagés dans ce que nous qualifions de nivellement par le bas, réduisant les normes sociales et environnementales pour continuer d'attirer les investissements. Ces tendances sont totalement négatives.
    À cet égard, le gouvernement du Canada, même s'il favorise les investissements dans le secteur minier, devrait préconiser le renforcement des normes et des procédures environnementales plutôt que leur relâchement. Il devrait aussi fournir de l'aide technique et promouvoir l'établissement de zones interdites afin de protéger les écosystèmes essentiels et les services environnementaux qu'ils fournissent, particulièrement le bassin de l'Amazone et ce que nous appelons les zones productrices d'eau.
    Enfin, le quatrième domaine de préoccupation est le droit de contestation. Les projets d'exploitation des mines et des hydrocarbures constituent la plus grande source de conflit en Amérique latine, comme l'ont indiqué des ONG indépendantes comme l'OCMAL. Je reçois de l'information de divers rapports indépendants, lesquels sont en grande partie confirmés par les renseignements officiels fournis par le bureau de l'ombudsman du Pérou, qui affirme que les conflits ont considérablement augmenté en ce qui concerne le super-cycle des produits de base. Les conflits relatifs aux projets miniers sont ceux qui ont augmenté le plus.
    Aujourd'hui, les conflits sociaux et environnementaux relatifs aux projets d'extraction constituent plus de 70 % des conflits au Pérou, et on parle de la fièvre mondiale qui s'accroît de manière exponentielle au fil des ans alors que les activités minières prennent de l'expansion à l'échelle mondiale. Malheureusement, le monde a réagi en réprimant et en criminalisant les contestations sociales.
(1335)
    Au Pérou, le gouvernement a adopté plusieurs lois autorisant les forces de police à utiliser des armes de guerre et prévoyant des mécanismes qui permettent aux agents de police participant à des violations des droits de la personne de bénéficier de l'impunité...
    Monsieur Monge, vous parlez depuis maintenant un peu plus de 10 minutes. Comme je veux garder du temps pour un tour de questions, je peux vous accorder encore 30 secondes, en espérant que nous pourrons vous laisser du temps pendant une de vos réponses. Je veux simplement donner à tous les côtés l'occasion de poser des questions.
    Bien sûr.
    Le gouvernement du Canada devrait proposer l'abrogation de ces règlements et soutenir l'élaboration et la mise en oeuvre de mécanismes de prévention et de gestion des conflits plutôt que la criminalisation des contestations sociales.
    Enfin, je pense que la nomination d'un ombudsman canadien auquel les citoyens d'Amérique latine pourraient s'adresser pour formuler des plaintes à propos de violations est une excellente idée. Je ne sais rien à ce sujet, mais maintenant que j'en entends parler, je pense que c'est une initiative que nous devrions tous appuyer.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Passons maintenant aux questions.
    Nous accorderons d'abord la parole à M. Anderson.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos témoins de comparaître aujourd'hui.
    Madame Gardner, j'aimerais commencer par vous. Le Comité a entendu des avis divergents à propos de votre rapport. J'ignore si vous avez suivi les témoignages ou non, mais je ferai référence à deux témoins qui avaient des opinions différentes au sujet de votre rapport.
    Duane McMullen, qui travaille pour Affaires mondiales, a traité de vos constats, indiquant que le rapport fait état de neuf projets à l'origine d'incidents depuis 2014, neuf projets sur les 930 que le ministère connaît en Amérique latine. Il a précisé qu'un de ces projets a été vendu à des Chinois, trois concernaient des travailleurs miniers ou des sous-traitants, et deux avaient donné lieu à des arrestations et à de la violence.
    Voici ce qu'il a indiqué:
En aucune circonstance, une allégation précise n'a été avancée contre une société canadienne. Il n'est indiqué nulle part non plus dans ce rapport qu'une société canadienne aurait été la cause des incidents en question. Au lieu de cela, le rapport fait référence à des dossiers très complexes et difficiles rattachés à ces neuf projets.
    Nous avons également entendu Jeffery Webber, de l'Université Queen Mary de Londres, qui a indiqué que le rapport faisait la preuve d'un conflit systémique relatif aux projets miniers canadiens.
    Je me demande qui a raison. Où vous trouvez-vous entre ces deux interprétations? Qui a fait une lecture juste de votre rapport?
    Shin, voudriez-vous répondre?
    Oui.
    J'ignore où M. McMullen voulait en venir exactement en parlant de neuf projets après 2014. Bien entendu, nous ne pouvons faire d'allégations précises au sujet d'une entreprise donnée. Voilà pourquoi nous pensons qu'un enquêteur indépendant doit se pencher sur la question.
    Nous nous sommes intéressés aux assassinats ciblés entourant les activités de Tahoe. Ils étaient liés aux référendums. Nous savons que Tahoe s'est adressée aux tribunaux pour tenter d'empêcher la tenue de référendums et que ses agents de sécurité ont tiré dans le dos de paysans qui fuyaient. La société a donc pris part aux violences. Aucune arrestation n'a eu lieu. J'ignore comment les enquêtes se déroulent au Guatemala, mais je sais que le chef de la sécurité de Tahoe a été arrêté. Alors qu'il était en détention à domicile, il s'est miraculeusement échappé et a fui au Pérou.
    Nous composons avec des situations très difficiles. Si M. McMullen dit que nous n'avons rien prouvé, eh bien, c'est certain que nous n'avons rien prouvé. Mais regardez le nombre de cas. C'est comme le tabagisme. Les compagnies de tabac nient encore les liens entre le tabagisme et la santé, alors que les données montrent qu'il en existe un. Voilà ce que nous disons. Compte tenu de la somme de données, nous ne savons pas quels cas sont concernés, mais il y a en suffisamment pour que nous enquêtions.
    Je pense que vous posez une bonne question, monsieur Anderson. Je ne sais pas si j'y ai répondu ou non.
(1340)
    Je pense que oui. Nous voulons préparer un rapport; nous devons donc bien comprendre les témoignages et les interpréter correctement. Merci pour votre réponse.
    Monsieur Cuellar, j'aimerais que vous nous parliez de la Colombie. Quel est le meilleur modèle d'extraction des ressources pour votre pays? Votre organisme a travaillé avec des syndicats. D'après vous, les sociétés internationales ont-elles un rôle à jouer dans la mise en valeur des ressources? Je sais qu'il y a des mines illégales en Colombie. Elles appartiennent, par exemple, à des intérêts locaux.
    Selon vous, quel est le meilleur modèle d'extraction des ressources pour votre pays?
    [Difficultés techniques] Nous ne devons pas agir de la sorte. Il ne peut pas y avoir de mines qui violent les lois du travail ou les droits de la personne et qui ont des effets néfastes sur l'environnement, tel que nous en avons vu ailleurs comme au Canada. S'il y avait un équilibre entre les investissements étrangers et les droits fondamentaux conférés à la population, nous pensons que ce serait possible. C'est pour cette raison que notre syndicat espère forger une alliance avec les sociétés minières dans le but de créer une mine où les travailleurs seraient aussi gagnants, ce qui permettrait de prévenir la corruption.
    Si nous y arrivions, nous aurions un exemple d'une mine qui fonctionne sans avoir de répercussions négatives, sans violer les droits de la personne et en respectant les droits des travailleurs. Nous pourrions avoir des mines responsables. C'est ce que nous croyons.
    Avez-vous des exemples de ce que vous considérez comme des sociétés minières responsables, des entreprises qui ont réussi à faire ce qui, selon vous, devrait être fait?
    Je ne connais pas d'exemples précis, mais je sais que si nous suivions l'exemple de la Bolivie, qui a tenté l'expérience d'instaurer des mesures de contrôle social, environnemental et international, ce serait possible. Je ne connais pas d'entreprises qui l'ont fait à l'échelle mondiale, mais je pense que c'est possible d'y arriver avec des investisseurs responsables, ce qui nous permettrait d'avoir des mines responsables.
    Des efforts ont été déployés pour suivre les chaînes d'approvisionnement, surtout dans le but de déceler la main-d'oeuvre enfantine, et pour faire en sorte que les entreprises en aval agissent de manière responsable lorsqu'elles acceptent les produits issus des chaînes d'approvisionnement. Avez-vous fait du travail par rapport aux chaînes d'approvisionnement? Vous avez dit que les mineurs étaient presque réduits à l'esclavage. Avez-vous fait quelque chose dans ce domaine?
    Nous travaillons en collaboration avec le syndicat et les victimes des sociétés internationales, et nous visons à faire en sorte qu'il n'y ait pas de main-d'oeuvre enfantine. Nous comparons les conditions de travail dans ces entreprises à de l'esclavage parce qu'elles sont abominables. Les multinationales ont réussi à faire modifier les lois. Les réductions d'impôt leur permettent d'exploiter les travailleurs. Ce ne sont pas vraiment les entreprises qui le font, c'est plutôt la population colombienne; néanmoins, les travailleurs sont traités comme des esclaves. Parce que la population colombienne reçoit de l'argent, les travailleurs ne sont pas rémunérés adéquatement, et c'est très injuste.
(1345)
    Merci beaucoup, monsieur Cuellar.
    Je donne maintenant la parole à M. Tabbara.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins de leur présence.
    Ma première question s'adresse à Mme Gardner et à M. Imai.
    Vous avez parlé de la mine de Tahoe au Guatemala, du nombre d'assassinats qui ont été commis et du fait qu'aucun suspect n'a été reconnu coupable. Comment le gouvernement du Canada devrait-il régler le problème des sociétés minières canadiennes qui ne divulguent pas adéquatement les actes violents en Amérique latine? Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Au sujet de la divulgation?
    Oui.
    Nous nous sommes penchés sur la divulgation par les entreprises cotées en bourse pendant que nous préparions notre rapport. Je pense qu'environ 12 % des actes ayant entraîné la mort et 24 % des actes ayant entraîné des blessures ont été rapportés publiquement. Le manque de divulgation semble poser problème, et on pourrait modifier les règles en matière de valeurs mobilières pour encourager la divulgation des violations des droits de la personne liées aux projets d'exploitation minière à l'étranger.
    Oui. Je pense que M. Monge a mentionné que l'initiative pour la transparence devrait comprendre une plus grande divulgation des effets sur l'environnement et la société.
    Quel rôle le Canada peut-il jouer précisément? C'est ce que j'essaie de...
    En vertu de la Loi sur les valeurs mobilières, les entreprises cotées en bourse ont l'obligation de divulguer certaines informations, par exemple, combien elles estiment qu'elles feront l'année suivante. C'est comme une loi de protection des consommateurs, mais pour les investisseurs.
    C'est ce que Leah disait. En ce qui concerne l'environnement ou les droits de la personne, les entreprises divulguent très peu... Nous pourrions modifier la loi de façon à exiger une plus grande divulgation; ainsi, au moins les informations seraient rendues publiques. Je ne pense pas qu'une telle mesure aiderait les victimes guatémaltèques, mais il y aurait au moins une plus grande transparence par rapport aux activités de l'entreprise.
    Je peux vous dire tout de suite que le dirigeant de Tahoe affirme à la télévision que la population adore l'entreprise. Nous avons écrit à la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique pour lui transmettre toutes nos données concernant les référendums organisés dans les collectivités et les décès. Tahoe représente un problème de taille, et les investisseurs ont essuyé des pertes lorsque les activités de la mine ont été suspendues parce que ni l'État ni Tahoe n'avait consulté les Autochtones. La valeur des actions a chuté de 40 %.
    De telles situations ont des répercussions sur les investisseurs, et je trouve votre suggestion d'accroître la divulgation excellente. Elle fait partie de la gamme de solutions nécessaires dans ce dossier très complexe.
    On m'a demandé de déposer deux documents. Le premier est une lettre du Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises qui fait part de préoccupations concernant les témoins, et le deuxième est un rapport qui porte sur le point de contact national. Ces documents sont liés à votre question parce qu'il s'agit d'un dossier très complexe. Vous parlez maintenant des mesures législatives sur les valeurs mobilières. La responsabilité criminelle est un élément; les délits aussi. M. Ian Binnie parle des changements relatifs aux tribunaux; M. Monge, de la transparence.
(1350)
    Je veux revenir sur le premier point. Ma question est semblable à la première que j'ai posée. Un autre témoin a affirmé que des dirigeants syndicaux avaient aussi été attaqués. Quel rôle le Canada peut-il jouer pour aider les syndicats à se faire entendre et pour les empêcher d'être ciblés ou persécutés?
    D'après moi, le pays d'accueil a une part de la responsabilité, mais selon les objectifs du MAECD, le Canada fait notamment la promotion de la démocratie, des droits de la personne et du développement durable. Cela fait partie de la politique du gouvernement du Canada.
    Selon moi, les ambassades doivent jouer un plus grand rôle dans la surveillance des activités des entreprises de leur pays.
    Je suis désolé si je prends trop de temps, monsieur le président.
    Vous n'avez qu'à remettre les rapports à la greffière, et ils seront déposés.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Monsieur Fragiskatos, il vous reste environ une minute et demie, si vous souhaitez intervenir.
    Monsieur Imai, dans une lettre d'opinion que vous avez écrite pour The Globe and Mail il y a quelques années, vous avez parlé de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Choc c. Hudbay Minerals. À l'époque, vous étiez d'avis qu'en vertu de cet arrêt, des affaires de violation des droits de la personne survenues au Guatemala, en Colombie et dans d'autres territoires étrangers pourraient être examinées ici au Canada.
    Dans quelle mesure la décision a-t-elle permis de responsabiliser les entreprises par rapport à leurs activités à l'étranger?
    C'est une très bonne question. Merci d'avoir lu ma lettre d'opinion. Moi aussi, j'ai lu certaines de vos lettres, monsieur.
    Merci. Cela fait au moins une personne. Je me suis toujours posé la question.
    Des voix: Ah, ah!
    D'après moi, c'est une partie très importante de la solution. M. Ian Binnie, ancien juge de la Cour suprême du Canada, en a parlé avec beaucoup d'éloquence.
    Selon moi, ce problème très complexe comporte de nombreuses facettes. Nous venons de parler de la Loi sur les valeurs mobilières et du besoin de la modifier. J'ai parlé du rôle des ambassades. L'importance des tribunaux, c'est qu'il s'agit d'une instance où la vérité peut...
    Permettez-moi de demander, comme mon temps est limité...
    Monsieur Fragiskatos, c'est vrai que votre temps est limité. Nous devons laisser assez de temps pour notre collègue d'en face.
    Nous poursuivrons la discussion plus tard.
    Madame Hardcastle.
    Je serai ravi de parler à qui que ce soit après.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C'est dommage que nous n'ayons pas plus de temps avec vous. Ce dossier est très intrigant. Lorsque nous avons commencé notre étude, j'ai cru comprendre que tous les membres du Comité n'étaient pas au courant de la situation. Le mécanisme de reddition de comptes et le cadre législatif que nous avons en ce moment font partie du problème. Il peut y avoir un désaccord concernant l'État d'origine d'une entreprise qui investit et les responsabilités de cet État. D'après moi, c'est là le coeur du sujet aujourd'hui.
    Nous avons entendu les avis de M. Imai et de Mme Gardner. Monsieur Monge, j'aimerais vous entendre sur la question que mon collègue a posée: quel est le rôle du Canada? Quel est le rôle du gouvernement des pays d'origine des entreprises qui investissent, en particulier des sociétés minières canadiennes?
    Aussi, monsieur Cuellar, vous savez que dans d'autres pays, la reddition de comptes est obligatoire. Pouvez-vous nous parler de ce que nous pourrions faire, d'après vous, dans les prochaines...
    Je vais épuiser mon temps de parole. Je n'ai pas d'autres questions. Vous pouvez donc partager le temps qu'il me reste jusqu'à ce que le président vous interrompe. Merci.
(1355)
    Allez-y.
    D'après moi, le gouvernement canadien peut faire plusieurs choses.
    Premièrement, comme je l'ai déjà dit, le gouvernement devrait renforcer les dispositions en matière de transparence qui visent les entreprises cotées en bourse, de façon à inclure non seulement la divulgation des renseignements financiers, mais aussi la divulgation des renseignements relatifs aux effets sur l'environnement et la société, y compris les conflits et les problèmes liés aux droits de la personne, et ce, entreprise par entreprise et projet par projet. Cette mesure est très importante.
    Deuxièmement, quand une entreprise canadienne est impliquée dans une situation où des droits de la personne ont été violés, le gouvernement canadien devrait réagir de la même façon et dans la même mesure que lorsqu'un citoyen canadien est blessé dans un pays d'Amérique latine. Il faudrait exercer de solides pressions diplomatiques sur les autorités nationales pour que la situation soit éclaircie et pour que des enquêtes indépendantes rigoureuses soient menées. Dans le même ordre d'idées, j'appuie la proposition que l'ombudsman canadien, qui pourrait être l'agent de liaison, examine de telles situations chaque fois qu'elles se produisent dans des territoires d'Amérique latine où travaillent des entreprises canadiennes.
    Troisièmement, le gouvernement canadien devrait faire pression sur les gouvernements d'Amérique latine pour que les normes et procédures environnementales ne soient pas tirées davantage vers le bas. Cela arrive tous les jours au Pérou, en Bolivie, au Brésil, en Colombie et en Équateur parce que les pays qui dépendent des redevances sur l'extraction abaissent les normes afin de continuer à attirer ce genre d'investissements. C'est ce qu'on appelle le nivellement par le bas, et le gouvernement canadien devrait s'opposer activement à de telles mesures, même si, ce faisant, il va à l'encontre des intérêts des sociétés minières canadiennes.
    La semaine dernière, le Pérou a tiré vers le bas les normes et procédures afin de faciliter l'obtention de permis d'exploration. Cette mesure profite directement à quelques petites sociétés canadiennes qui mènent des activités d'exploration. Néanmoins, le gouvernement canadien devrait déclarer qu'il n'appuie pas ce type de politique. Il existe des mécanismes pour exposer de telles positions.
    Enfin, comme je l'ai déjà dit, le gouvernement canadien devrait exiger la mise en oeuvre stricte et exhaustive des droits de consultation des Autochtones et des citoyens en général pour veiller à ce que les investissements remplissent les critères de légitimité sociale.
    J'aimerais souligner une dernière chose concernant la main-d'oeuvre. Au Pérou, trois quarts des travailleurs du secteur minier, le secteur le plus productif de la région, sont sous-traités par ce qu'on appelle des entreprises de services. Les travailleurs sont fournis à bas prix, mais ils n'ont absolument aucun droit en vertu de leurs contrats temporaires de trois ou quatre mois. C'est tout à fait inacceptable. Les sociétés minières les plus rentables et les plus productives de la région devraient employer uniquement des travailleurs permanents jouissant de tous les droits conférés par la loi. Elles ne devraient pas être autorisées à avoir recours à des mécanismes indirects de sous-traitance par l'intermédiaire d'entreprises de services afin d'éluder la responsabilité d'accorder des droits à leurs travailleurs.
    Merci.
    Monsieur Cuellar, il me reste une minute ou peut-être 45 secondes.
    Prenez votre temps, monsieur Cuellar.
    Aimeriez-vous dire quelque chose?
    Nous aimerions demander au gouvernement canadien de condamner les crimes perpétrés par les multinationales dans des territoires tels que le Guatemala, le Honduras et d'autres comme la Colombie. En créant des mesures législatives, vous empêcherez les entreprises de violer les droits de la personne comme elles le font dans notre pays.
    Très bien.
    Merci beaucoup. Je remercie les quatre témoins de leur présence ici aujourd'hui et de leurs témoignages.
    À nos deux invités de l'étranger, merci d'avoir fait le nécessaire pour vous joindre à nous malgré le décalage horaire et tout le reste.
    À nos invités de Toronto, merci de vous être déplacés jusqu'à Ottawa pour venir nous parler. Je vous prie de remettre les rapports à la greffière, et nous veillerons à ce qu'ils soient inclus dans les témoignages.
    La séance est levée.
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