:
Nous vous remercions, madame la présidente, de nous avoir invités à comparaître devant votre comité, qui siège sur le territoire traditionnel et non cédé des Algonquins.
[Français]
Je m'appelle Ian Scott et je suis président et premier dirigeant du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou CRTC.
[Traduction]
Comme vous avez déjà présenté mes collègues, je ne vais pas recommencer, afin de ne pas perdre de temps.
[Français]
Nous vous remercions de nous donner l'occasion de participer à l'étude du Comité sur les appels frauduleux que reçoivent les Canadiens, notamment les appels automatisés et les autres types d'appels non sollicités.
Le mandat du CRTC est notamment d'aider les Canadiens à réduire le nombre d'appels de télémarketing non sollicités qu'ils reçoivent. Pour y parvenir, nous imposons des règles aux télévendeurs, nous supervisons la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus du Canada et nous menons des activités d'information et de mise en application. Même si certains appels non sollicités sont de nature frauduleuse et ne sont pas dans la portée du mandat du CRTC, nous avons la responsabilité collective de protéger les Canadiens.
[Traduction]
Nous sommes ravis d'être ici aujourd'hui pour vous parler de ce que nous faisons pour protéger les Canadiens. Nous sommes conscients que ces appels non sollicités touchent tout le monde et sont un fléau pour notre société. Pour certains, tout particulièrement les personnes vulnérables, ils représentent un grave problème, parce qu'il s'agit souvent d'activités criminelles ayant pour but, par exemple, de commettre une fraude ou un vol d'identité.
Étant donné que ce problème évolue constamment, sa résolution exige une vaste collaboration concertée. C'est pourquoi le CRTC travaille en étroite collaboration avec l'industrie ainsi qu'avec ses partenaires nationaux et internationaux pour trouver et mettre en oeuvre des solutions.
[Français]
En 2008, le CRTC a créé la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus, un outil qui trouve un juste équilibre entre les préoccupations des consommateurs à l'égard des appels non sollicités et le désir légitime des entreprises de communiquer avec les clients actuels ou potentiels. Il est important de reconnaître que l'établissement et le maintien d'un équilibre entre les deux nécessitent tant la participation des consommateurs que celle des télévendeurs.
Depuis que nous avons créé la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus, plus de 14 millions de numéros y ont été inscrits par des Canadiens qui veulent que les télévendeurs respectent leur vie privée. L'année dernière, les Canadiens ont inscrit en moyenne 858 numéros chaque jour, signe qu'ils croient à l'utilité de la Liste. Plus de 20 000 télévendeurs se sont également abonnés à la liste.
Nous surveillons et analysons de près les plaintes concernant les appels indésirables. Les données ainsi récoltées aident à orienter nos activités de sensibilisation et nos mesures de mise en application. Le CRTC impose régulièrement des sanctions pécuniaires aux télévendeurs et à leurs clients qui enfreignent les règles, et il prend d'autres mesures d'application, comme l'envoi de lettres d'avertissement, d'avis de violation et de procès-verbaux de violation.
J'ai le plaisir de dire que la majorité des entreprises sont honnêtes et respectent les règles. Le défi qui se pose à nous en ce moment — et je suis sûr que ce comité en est bien conscient — est que des personnes malveillantes utilisent le système téléphonique pour profiter des Canadiens. Dans beaucoup de cas, ces personnes ne résident pas au pays, n'ont aucune raison de respecter les règles et utilisent la technologie pour masquer leur identité.
[Traduction]
Pour combattre ce problème, le CRTC a exigé des fournisseurs de services qu'ils mettent en place, au plus tard le 31 décembre 2019, un système pour bloquer certains types d'appels dans leurs réseaux. Si le numéro de l'appelant comporte plus de 15 chiffres ou ne correspond pas à un numéro qui peut être composé, par exemple 000 000 000, l'appel est bloqué. En fait, l'appel est bloqué avant même que le téléphone de l'abonné ne sonne. Les fournisseurs qui offrent aux clients ce service de filtrage des appels, qui comprend des fonctions de gestion des appels plus avancées, ont été exemptés de cette exigence.
Bien que le système de blocage des appels soit utile, il n'empêche évidemment pas tous les appels illicites d'être acheminés aux consommateurs. Pendant des années, les Canadiens se sont fiés à la fonction d'identification de l'appelant pour reconnaître et ignorer les appels indésirables. Mais, maintenant, certaines personnes malveillantes exploitent la technologie pour générer de faux renseignements d'identification et ainsi masquer leur identité et leur intention. On qualifie communément cela d'usurpation de l'identification de la ligne appelante.
Or, je suis heureux d'annoncer qu'il existe une nouvelle arme dans notre lutte permanente contre ce phénomène: la norme STIR/SHAKEN. STIR est le sigle de Secure Telephone Identity Revisited, ou nouvelle approche relative à la sécurité de l'identité de l'appelant. SHAKEN signifie Signature-based Handling of Asserted Information Using Tokens, ou traitement de l'information fournie en fonction de la signature au moyen de jetons. Le CRTC s'attend à ce que les fournisseurs de services de télécommunications au Canada adoptent cette norme d'ici septembre 2020.
La norme STIR/SHAKEN permet aux fournisseurs de services de déterminer si l'identité d'un appelant est digne de confiance par l'authentification et la vérification de l'information sur l'identité de l'appelant pour les appels vocaux sur protocole Internet. Elle permettra aux Canadiens de savoir, avant de répondre au téléphone, si un appel est légitime ou s'ils devraient s'en méfier.
En décembre dernier, nous avons uni nos forces à celles de notre homologue américain, la FCC, pour organiser le premier appel transfrontalier officiel conformément à la norme STIR/SHAKEN. Ce projet a mis en lumière l'engagement conjoint de nos deux organisations à réduire le nombre d'appels indésirables et à mieux protéger les consommateurs. L'adoption rapide de la norme STIR/SHAKEN améliorera la sécurité des citoyens des deux côtés de la frontière.
Par ailleurs, le CRTC continue de travailler en collaboration avec l'industrie canadienne des télécommunications à l'élaboration d'un processus de dépistage des appels importuns à leur point d'origine dans le réseau.
[Français]
Aucune organisation, peu importe sa taille ou sa puissance, ne peut éliminer à elle seule les conséquences négatives des appels illégitimes. C'est pourquoi le CRTC travaille avec certains ministères et organismes fédéraux, dont la GRC, le Centre antifraude du Canada, l'Agence du revenu du Canada, le Bureau de la concurrence, Services partagés Canada, Emploi et Développement social Canada ainsi que le Centre de la sécurité des télécommunications. Un objectif important de cette collaboration est de communiquer rapidement l'information pertinente aux Canadiens pour les aider à ne pas être victimes d'une fraude.
J'aimerais mentionner que, pour l'instant, nous ne pouvons pas communiquer toute l'information que nous voudrions à nos partenaires nationaux et que cela constitue pour nous un obstacle. Pour régler ce problème, l'intervention serait mieux coordonnée si nous avions plus de flexibilité.
En cette ère de mondialisation, le problème que constituent les appels illégitimes est de plus en plus international. Nous reconnaissons l'importance de définir une approche mondiale coordonnée pour éliminer ces appels ainsi que les menaces qu'ils représentent pour les consommateurs et la confiance de ces derniers à l'égard des systèmes de communication critiques.
Afin de mieux protéger les Canadiens contre les appels indésirables provenant de l'extérieur de nos frontières, le CRTC a conclu des protocoles d'entente avec des homologues aux États-Unis, au Japon, au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Ces ententes nous permettront d'échanger de l'information et des connaissances, de collaborer à des activités de sensibilisation et de formation, et de fournir un soutien aux enquêtes. Grâce à ces activités, nos enquêteurs comprennent mieux la nature du défi et la meilleure façon de le surmonter.
[Traduction]
Le CRTC entretient aussi des partenariats avec des organismes d'application de la loi et des groupes du secteur privé pour que la mise en application, la collecte de renseignements et la promotion de la conformité soient plus efficaces. Par exemple, vous verrez dans notre document que nous sommes membres d'un certain nombre d'organisations internationales. Ces réseaux travaillent à promouvoir la collaboration internationale pour contrer les pourriels et faire appliquer les lois en matière de téléphonie, ainsi qu'à résoudre des problèmes liés aux communications nuisibles comme la fraude, la tromperie, l'hameçonnage et la propagation de virus.
Les Canadiens sont, avec raison, fiers du système de communications de notre pays. Mais lorsque des criminels abusent de ce système, la confiance des Canadiens en celui-ci s'en trouve minée.
:
Merci, madame la présidente. J'ai le plaisir de comparaître devant vous dans le cadre de la présente étude sur les appels frauduleux au Canada, surtout que nous sommes en mars, le Mois de sensibilisation à la fraude.
Je suis Eric Slinn, commissaire adjoint et responsable du programme Opérations criminelles de la Police fédérale.
Celui qui m'accompagne aujourd'hui est Guy Paul Larocque, inspecteur intérimaire, responsable du programme de la GRC visant à lutter contre la fraude par marketing de masse.
Dans le cadre de notre mandat consistant à protéger l'intégrité économique du Canada, la criminalité financière, y compris la fraude, est depuis longtemps une priorité de la Police fédérale à la GRC.
[Français]
La GRC travaille avec des partenaires de l'ensemble du Canada, tant du secteur public que du secteur privé.
[Traduction]
Nous travaillons aussi avec des organismes d'application de la loi du monde entier pour poursuivre les auteurs de fraude, comme l'a démontré notre travail dans le cadre du Projet Octavia, ici en Ontario. Cette gamme de partenaires démontre à quel point il est nécessaire de se partager la responsabilité de la lutte contre la fraude, non seulement au Canada, mais partout dans le monde. Il s'agit véritablement d'un enjeu mondial qui exige une intervention mondiale.
La technologie facilite de plus en plus les échanges dans un monde interconnecté et sans frontières, ce qui procure des avantages considérables aux Canadiens et aux Canadiennes. Cependant, les criminels en profitent également. Ils s'adaptent rapidement à l'évolution du paysage technologique et utilisent cette technologie pour cibler les Canadiens et les Canadiennes.
Je tiens à préciser que personne n'est à l'abri de ces appels frauduleux. La preuve, c'est qu'il y a à peine deux semaines, j'ai reçu, en l'espace d'une heure, trois appels de fraudeurs qui prétendaient travailler pour l'ARC et qui affirmaient que je faisais l'objet d'accusations criminelles et qu'un mandat d'arrestation allait être lancé contre moi. Tous ces appels ont été faits sur mon téléphone de la GRC. Ça m'a beaucoup amusé.
Les opérations frauduleuses sont si répandues et si rentables qu'il n'est pas suffisant de se fier uniquement à l'application de la loi pour lutter contre l'étendue de cette activité criminelle.
[Français]
L'Association canadienne des chefs de police a clairement indiqué dans les rapports de son comité sur le crime organisé que la prévention est un élément crucial de la lutte contre la fraude, et nous sommes d'accord.
[Traduction]
La GRC continue d'investir dans la prévention: elle a mis sur pied un grand nombre d'initiatives et de projets de portée locale et nationale en ce sens.
Après avoir reçu des signalements de particuliers et d'entreprises concernant des fraudes par cartes cadeaux, des agents de la GRC en Alberta ont par exemple préparé une fiche de conseils sur le sujet, qu'ils ont distribuée aux entreprises locales. Le commis d'une boutique a consulté cette fiche et est intervenu pour empêcher un individu âgé de faire un achat de cartes cadeaux d'une valeur de 50 000 $. Ces fiches de conseils sur la fraude sont distribuées dans les détachements de l'ensemble de l'Alberta.
Toujours en Alberta, des agents ont créé des affiches pour informer le public des fraudes liées aux bitcoins et les ont placées à côté des guichets automatiques de bitcoins. La Police fédérale de la GRC travaille actuellement à étendre cette initiative de sorte qu'elle soit accessible à toutes les divisions du pays.
À l'échelle nationale, la GRC gère le Centre antifraude du Canada, en collaboration avec le Bureau de la concurrence Canada et la Police provinciale de l'Ontario depuis 2009.
Le CAFC est le dépôt central du Canada qui recueille de l'information sur les fraudes par marketing de masse et les autres arnaques qui touchent les Canadiens et les Canadiennes. Reconnaissant les répercussions importantes de ces fraudes et son rôle de mise en commun, le CAFC diffuse de l'information aux organismes d'application de la loi, aux industries du secteur privé et au public canadien en vue de les sensibiliser et d'éviter que les particuliers et les entreprises soient victimes de telles fraudes.
Le CAFC investit dans des campagnes de sensibilisation, notamment pour attirer l'attention du public sur les fraudes très médiatisées, comme l'arnaque liée à l'ARC, et il le fait par divers moyens, dont les médias sociaux.
[Français]
Au-delà de la simple prévention, le Centre antifraude du Canada, ou CAFC, en collaboration avec des partenaires du secteur privé, vise les outils des fraudeurs.
[Traduction]
Lorsqu'une personne qui soupçonne une fraude ou est victime de fraudeurs signale la situation au CAFC, les renseignements, comme les numéros de téléphone, qu'elle transmet sont partagés avec le fournisseur de services approprié, qui peut alors supprimer les comptes utilisés par les escrocs. De même, afin de mettre les partenaires appropriés au courant des activités frauduleuses, le CAFC leur communique les adresses électroniques ainsi que les renseignements relatifs aux comptes bancaires et aux commerçants.
Même si certaines victimes ont indiqué avoir de la difficulté à joindre le CAFC par téléphone, il est important que le public continue de signaler les cas à l'aide des outils en ligne. Ces signalements du public procurent des renseignements précieux au CAFC et offrent aux victimes la possibilité de récupérer l'argent perdu. Le CAFC travaille avec divers partenaires, par exemple Postes Canada, pour intercepter des colis, ou encore les établissements bancaires, pour éviter que l'argent soit déposé dans des comptes liés à des activités frauduleuses et qu'il soit plutôt retourné aux victimes.
Dans le cadre de l'une des priorités de la Police fédérale, soit la criminalité transnationale et la criminalité organisée grave, la GRC a le mandat de faire enquête sur les activités criminelles, y compris la criminalité financière, qui transcendent les frontières internationales et qui sont commises par des organisations criminelles ciblant les Canadiens et les Canadiennes. Dans le cadre de ce mandat, la GRC a fait enquête sur l'arnaque liée à l'ARC, soit le Projet Octavia.
Le Projet Octavia a été mis sur pied en octobre 2018 pour faire enquête sur une arnaque d'impôt par télémarketing, aussi appelée arnaque liée à l'ARC, dont vous avez certainement entendu parler. En février 2020, les enquêteurs de la GRC ont arrêté et accusé deux personnes relativement à l'arnaque liée à l'ARC. Entre 2014 et 2019, cette arnaque a entraîné des pertes qui ont totalisé, à notre connaissance, plus de 16,8 millions de dollars.
Du fait de la nature complexe et sans frontières des enquêtes sur les fraudes d'aujourd'hui, les enquêteurs de la GRC, y compris l'agent de liaison de la GRC à New Delhi, ont travaillé avec des organismes d'application de la loi de l'ensemble du Canada; avec d'autres partenaires d'organismes fédéraux comme l'ARC, l'Agence des services frontaliers du Canada et le CANAFE; et avec d'autres autorités étrangères, dont l'Indian Central Bureau of Investigation et les autorités américaines établies en Inde.
Les cas hors frontières qui supposent de longues procédures, comme le Projet Octavia, illustrent bien les défis auxquels la GRC continue d'être confrontée lorsqu'elle fait enquête sur les fraudes. Les criminels se camouflent derrière la technologie et les territoires sous compétence étrangère pour commettre leurs crimes au Canada. Cependant, là où il y a des défis, il y a des occasions à saisir. Une part du succès du Projet Octavia peut être attribuée à la campagne de sensibilisation menée par la GRC auprès du public par l'intermédiaire du CAFC. Depuis 2015, le CAFC et l'ARC ont tous deux diffusé de nombreux bulletins et documents de relations publiques pour informer les Canadiens et les Canadiennes de la fraude liée à l'ARC.
[Français]
Vous aurez sans doute remarqué que je parle beaucoup du CAFC. Il s'agit d'une initiative de pratique exemplaire qui fournit un service précieux, tant aux organismes d'application de la loi qu'au public canadien.
[Traduction]
Cependant, le Centre est surchargé en raison de l'augmentation du nombre de fraudes, téléphoniques ou autres, et du déferlement d'appels et de courriels qu'il reçoit chaque jour. Grâce à son modèle efficace et éprouvé pour lutter contre la fraude, le CAFC et son équipe dévouée de collaborateurs salariés et bénévoles fournissent de précieux services aux Canadiens, en particulier aux populations vulnérables, comme les personnes âgées et les nouveaux immigrants.
Les fournisseurs de services téléphoniques ont travaillé avec nous, et des mesures concrètes ont été prises pour aider les Canadiens à bloquer les appels frauduleux, c'est à dire composés à partir de numéros qu'ils savent associés à des activités possibles de fraude. Les fournisseurs de services téléphoniques et d'Internet comptent, du moins en partie, sur l'information qu'ils reçoivent du Centre antifraude du Canada. À son tour, l'efficacité du CAFC est tributaire des renseignements fournis par les Canadiens qui signalent des fraudes ou des arnaques.
Par l'intermédiaire du Projet Chameleon, des établissements financiers du Canada travaillent avec la GRC à identifier les auteurs de stratagèmes de rencontres en ligne et communiquent directement avec les victimes pour protéger leur argent. Et il ne faut pas oublier nos partenaires d'application de la loi à l'étranger, comme le Groupe des cinq pays sur l'application de la loi. Les membres de ce groupe ont collectivement entrepris des travaux axés sur les populations vulnérables, désignées pour nos besoins comme les personnes âgées et les migrants. Ces groupes ne sont pas toujours à l'aise à l'idée de communiquer avec les organismes d'application de la loi et sont souvent la cible d'arnaques. D'autres travaux et partenariats en ce sens avec l'étranger et avec les secteurs public et privé pourraient se révéler d'une grande valeur pour lutter contre les fraudes comme l'arnaque liée à l'ARC. De plus, ils nous donnent des renseignements sur les moyens utilisés par les fraudeurs pour soutirer aux Canadiens et aux Canadiennes leur argent durement gagné.
En conclusion, je voudrais dire que la fraude touche les Canadiens et les Canadiennes de diverses façons: perte financière, perte possible de biens, perte de la capacité obtenir du crédit et, plus grave encore, perte de confiance envers les établissements qui font du Canada un endroit où il fait bon vivre. J'ai souligné que la lutte contre la fraude était une responsabilité partagée, et c'est une responsabilité à laquelle nous n'allons pas nous soustraire. La GRC continuera de travailler avec les secteurs public et privé et avec ses partenaires d'application de la loi de l'étranger pour repérer et prévenir la fraude et pour mieux assurer la sécurité et la sûreté du Canada, des Canadiens et des Canadiennes.
[Français]
Je remercie le Comité de m'avoir offert l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. C'est avec plaisir que je répondrai aux questions des membres du Comité.
:
J'aimerais vous souhaiter la bienvenue au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie pour le deuxième groupe.
[Français]
concernant l'étude des appels frauduleux au Canada.
Aujourd'hui, nous recevons M. Jonathan Daniels, vice-président, Droit réglementaire, chez Bell Canada; M. Howard Slawner, vice-président, Affaires réglementaires, chez Rogers Communications; ainsi que Mme Deborah Evans, chef de la protection de la vie privée.
De la Société TELUS Communications, nous recevons M. Jérôme Birot, vice-président, Développement et exploitation, et M. John MacKenzie, directeur, Affaires réglementaires.
[Traduction]
Mesdames et messieurs, comme nous recevons trois groupes aujourd'hui, nous vous demanderons de limiter votre exposé à huit minutes, après quoi nous passerons aux questions.
[Français]
Quand vous voyez le carton jaune, cela veut dire qu'il vous reste 30 secondes pour terminer votre présentation.
[Traduction]
Nous commencerons par Bell Canada. Monsieur Daniels, vous avez huit minutes.
:
Bonjour, madame la présidente.
Je m'appelle Jonathan Daniels. Je suis le vice-président, Affaires juridiques et réglementaires, de Bell Canada.
Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour vous faire part des mesures que nous avons prises et que nous continuons de prendre pour lutter contre les appels frauduleux et indésirables. Nous sommes de fervents partisans de la protection des Canadiens contre ce genre d'appels
Plus précisément, je parlerai des trois questions dont vous nous avez demandé de parler dans votre invitation: la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus, les appels frauduleux et indésirables, et les protocoles STIR/SHAKEN.
Pour commencer, j'aimerais parler de la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus. Nous convenons qu'il s'agit d'un bon outil pour réduire le nombre d'appels de télémarketing que reçoivent les Canadiens, et nous sommes heureux d'y avoir accès au Canada, mais cet outil a ses limites. Notamment, la liste n'est efficace que si tout le monde y adhère. Malheureusement, la grande majorité des appels indésirables que reçoivent les Canadiens viennent d'appelants à l'étranger qui ne respectent pas la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus. Nous devons donc continuellement trouver de nouvelles façons d'arrêter les appels indésirables.
Cela m'amène à la question du volume récent d'appels indésirables et frauduleux auxquels font face les Canadiens. Il est important de noter qu'il y a une différence entre les appels indésirables et les appels frauduleux. Les appels indésirables sont des appels que vous ne voulez pas recevoir. Ces appelants tentent généralement de vous vendre un service, comme le nettoyage des conduits. Ces appels sont une nuisance, et probablement non sollicités, mais ils ne sont pas nécessairement illégitimes ou frauduleux. Les appels frauduleux sont bien pires que les appels indésirables, car ils visent précisément à frauder les Canadiens. Par exemple, on va vous proposer de réparer votre ordinateur, mais en fait, on cherche à y installer un virus qui vous empêchera de l'utiliser, après quoi vous recevez une demande de rançon. D'autres escroqueries visent les cartes de crédit. J'ai perdu le compte du nombre de fois où j'ai reçu un appel d'un prétendu centre Visa-Mastercard, sans oublier la fameuse arnaque à l'ARC. Ces fraudeurs sont ingénieux et intelligents, et il ne sera pas facile de les arrêter.
L'industrie collabore avec le CRTC sur plusieurs fronts afin de réduire le nombre d'appels indésirables et frauduleux. À cet égard, je suis heureux de faire partie aujourd'hui du même groupe que les représentants de Rogers et Telus. Je n'ai pas l'habitude de saluer deux de mes concurrents, mais il est important de souligner que dans les efforts déployés pour lutter contre les appels indésirables et frauduleux, Bell et plusieurs autres acteurs travaillent ensemble. En fait, nos experts se rencontrent au moins une fois par semaine, et souvent plusieurs fois, pour examiner ces questions importantes.
Lorsque nous acheminons un appel, nous affichons souvent le numéro qui vous appelle. Il s'agit de la présentation de l'identification de la ligne appelante ou PILA. En décembre dernier, le CRTC a ordonné aux entreprises de télécommunications de commencer à bloquer les appels dont la PILA ne ressemblait pas à un vrai numéro. Nous qualifions ces appels d'appels non conformes. Par exemple, si un appel arrive sur notre réseau et que la PILA dépasse 15 chiffres ou n'est formé que de zéros, nous bloquerons l'appel. Pour être clair, un appel non conforme n'est pas nécessairement un appel indésirable ou frauduleux, mais une PILA non conforme est un très bon indicateur que ce peut être un appel problématique. À l'heure actuelle, sur notre réseau, nous bloquons environ 220 millions d'appels par mois.
Le CRTC a une autre initiative, celles des normes STIR/SHAKEN, troisième sujet dont le Comité nous a spécifiquement demandé de parler. Ces normes permettent aux consommateurs de savoir qu'ils peuvent avoir confiance dans le numéro qui s'affiche. Autrement dit, avec les normes STIR/SHAKEN, on saura si l'identité de la ligne appelante qui s'affiche est bien celle du numéro qui appelle.
Le CRTC a sollicité dernièrement des observations sur une proposition visant à obliger tous les opérateurs à mettre en œuvre les normes STIR/SHAKEN. Nous soutenons cette proposition. Nous pensons que Bell et tous les autres opérateurs devraient être tenus d'appliquer ces normes. Cependant, nous y voyons une solution à long terme, car différents problèmes doivent être réglés avant de pouvoir en retirer les avantages. C'est pourquoi nous avons proposé, avec la plupart des représentants de l'industrie, que le CRTC reporte le mandat relatif aux normes STIR/SHAKEN jusqu'à ce que toutes les règles du régime soient établies. Il y a beaucoup à faire et nous sommes prêts à faire ce travail, mais l'industrie et le CRTC doivent prendre le temps de le faire correctement, sinon la solution sera imparfaite.
Laissez-moi vous donner un exemple. Je crois que c'est un aspect important des normes STIR/SHAKEN. Il s'agit d'une solution à long terme plus qu'une solution rapide. La plupart des téléphones aujourd'hui ne peuvent pas afficher les protocoles STIR/SHAKEN. Pensez à votre ligne fixe à la maison: où pourriez-vous voir un crochet sur votre téléphone pour confirmer que la PILA affichée est le vrai numéro qui vous appelle? En fait, même la plupart des téléphones portables ne sont pas capables d'afficher les protocoles STIR/SHAKEN, mais cela changera au cours des prochaines années.
Même si nous sommes d'avis qu'un mandat devrait être conditionnel à la mise au point des détails techniques, Bell compte toujours mettre en oeuvre les protocoles STIR/SHAKEN sur une partie de son réseau en septembre prochain. Cela ne signifie toutefois pas que la plupart des consommateurs canadiens pourront les utiliser. Il faut remplir un certain nombre de critères pour que ces protocoles tiennent leurs promesses.
Les protocoles STIR/SHAKEN sont, en effet, prometteurs, et nous entendons bien les mettre en oeuvre, mais c'est loin d'être la seule solution et ils ne résoudront pas vraiment le problème des appels indésirables ou frauduleux à court terme. Permettez-moi de passer à quelque chose qui changera, à mon avis, la donne.
En plus des initiatives dirigées par le CRTC, Bell s'est engagée à protéger ses clients contre les appels frauduleux. Bien que nous ne puissions pas identifier tous les appels frauduleux, nous avons mis au point une technologie moderne qui nous permet d'en repérer des millions.
Pour identifier ces appels, nous travaillons en étroite collaboration avec le Centre antifraude du Canada, qui est lié à la GRC. Cependant, même lorsque nous sommes convaincus qu'un appel est frauduleux, nous ne sommes pas autorisés à le bloquer sans l'autorisation du CRTC.
Par conséquent, l'an dernier, nous avons demandé au CRTC l'autorisation de mettre à l'essai pendant trois mois un processus que nous avons mis au point pour identifier et bloquer les appels frauduleux. Il me semble que c'est à ce processus que le président faisait allusion lorsqu'il mentionnait qu'une demande est à l'étude. C'est la nôtre.
Nous n'en avons pas rendu les détails publics afin de ne pas donner aux fraudeurs un manuel expliquant la meilleure façon de contourner le processus dont nous proposons l'essai. Cependant, nous les avons fournis au CRTC, et nous les avons également communiqués à nos concurrents, aux groupes d'intérêt public et aux personnes qui ont signé une entente de non-divulgation approuvée par le CRTC.
Si nous obtenons l'autorisation, nous prévoyons que ce processus bloquera 120 millions d'appels frauduleux par mois sur notre réseau. Cela s'ajoute aux 220 millions d'appels que nous bloquons déjà parce que les numéros sont non conformes. Cependant, nous soupçonnons que la plupart des 220 millions d'appels non conformes bloqués sont des appels indésirables plus que des appels frauduleux.
Le processus dont nous proposons l'essai ne bloquera que les appels frauduleux afin de protéger les Canadiens contre les acteurs malveillants qui veulent les escroquer. Nous avons hâte de lancer notre essai dès que nous aurons reçu l'autorisation du CRTC.
Les appels frauduleux et indésirables sont un problème pressant et croissant pour les Canadiens. Chez Bell, nous sommes tout à fait résolus à nous y attaquer, notamment en demandant au CRTC l'autorisation de mettre en œuvre notre nouvelle proposition visant à bloquer activement les appels frauduleux. Cependant, il n'y a pas de solution unique. Nous continuerons de collaborer avec le CRTC, nos concurrents et les groupes de consommateurs pour trouver des solutions nouvelles et novatrices à ce problème.
Voilà qui conclut mon exposé.
Je vous remercie.
:
Bonjour, madame la présidente. Je m'appelle Howard Slawner, vice-président, Affaires réglementaires, Télécommunications, chez Rogers Communications. Je suis accompagné aujourd'hui par ma collègue, Deborah Evans, chef de la direction de la protection de la vie privée chez Rogers. Nous sommes reconnaissants de cette occasion de nous adresser au Comité pour contribuer à l'étude sur les appels frauduleux au Canada.
Rogers soutient pleinement le gouvernement du Canada et le CRTC dans les efforts qu'ils déploient pour régler le problème des appels importuns et frauduleux. Au mieux, ces appels perturbent la tranquillité et la vie privée des Canadiens. Au pire, ils constituent des crimes et les victimes sont souvent les personnes les plus vulnérables. Collectivement, ces appels nuisent à l'intégrité de notre système de télécommunications national.
Les Règles sur les télécommunications non sollicitées, y compris l'obligation de s'inscrire auprès de l'administrateur de la Liste nationale de numéros de télécommunication exclus ou la LNNTE, sont devenues des pratiques bien établies dans la communauté légitime du télémarketing canadien. Au cours des 10 années qui se sont écoulées depuis le lancement de la LNNTE, plus de 18 000 télévendeurs et leurs clients se sont inscrits auprès de l'administrateur, ce qui a permis de respecter la vie privée de plus de 13 millions de titulaires de numéros de téléphone canadiens inscrits.
Il existe toutefois une distinction importante entre les appels importuns et les appels frauduleux. De nombreux appels importuns sont passés par des parties légitimes, y compris des organismes à but non lucratif et des organisations commerciales. Bien que nous comprenions l'exaspération des consommateurs canadiens face à ce type d'appels, c'est la croissance des appels frauduleux qui est la plus préoccupante aujourd'hui.
Les auteurs d'appels non sollicités, d'appels frauduleux et d'appels provenant manifestement de numéros usurpés se montrent agressifs et persistants, malgré les règles établies pour protéger les consommateurs. Comme ils agissent sans crainte de représailles ou de sanctions, la simple existence de la LNNTE ne suffira pas à éliminer le problème. Rogers, comme ses pairs, fait donc tout son possible pour éliminer ces types d'appels de son réseau. En fait, Rogers s'efforce de débarrasser son réseau de toutes les formes d'appels de masse importuns. Au cours des cinq dernières années, Rogers a joué un rôle de premier plan dans le secteur en contribuant à la mise en œuvre de plusieurs initiatives visant à lutter contre ce problème.
Depuis 2015, nous travaillons avec la division Conformité et enquêtes du CRTC pour fournir des ressources de réseau, y compris des numéros de téléphone actifs et l'acheminement des appels, dans le cadre du projet Pot de miel téléphonique canadien. Cette initiative permet de recueillir des données sur les appels frauduleux visant des Canadiens afin d'établir quelles méthodes sont utilisées et de contribuer à l'application de la loi. De plus, depuis quatre ans, Rogers participe activement aux travaux du Comité directeur du CRTC sur l'interconnexion soit le CDCI afin d'examiner les solutions de blocage et de dépistage des appels, et les normes STIR/SHAKEN. Rogers joue un rôle de premier plan dans bon nombre de ces processus, notamment en coprésidant plusieurs groupes de travail du CDCI.
En 2017 et 2018, Rogers a également pris l'initiative d'étudier et de définir la portée d'une solution de filtrage des appels à l'échelle de l'industrie pour réduire le nombre d'appels indésirables. Pendant 18 mois, Rogers a dirigé un comité composé de 12 grands opérateurs chargé d'évaluer différentes options. Cette initiative a abouti à la publication d'une demande de propositions visant à trouver une base de données nationale de moteurs d'analyse, ainsi qu'à une demande de propositions de Rogers visant à mettre éventuellement à niveau notre réseau.
Enfin, en 2019, Rogers a travaillé avec d'autres fournisseurs de services de télécommunications canadiens pour élaborer et mettre en service le blocage universel des appels au niveau des réseaux.
Plus récemment, Rogers a commencé à mettre en œuvre les normes STIR/SHAKEN. Ces normes, qui permettront d'authentifier l'identité de l'appelant, devraient être prêtes pour le réseau d'ici la fin de 2020. Rogers a dirigé de nombreux comités intersectoriels pour établir les pratiques exemplaires et les mécanismes qui soutiendront ce déploiement, y compris la création de l'Autorité canadienne de gouvernance des jetons sécurisés, l'ACGJS, pour assurer la gouvernance de l'application des normes STIR/SHAKEN au Canada. En fait, nous avons financé le travail initial de l'ACGJS.
Malheureusement, il faut beaucoup de temps pour mettre en œuvre ces solutions complexes. Les réseaux de télécommunications sont conçus pour permettre l'acheminement des appels, et non pour l'empêcher, et il est encore plus difficile de bloquer le flux d'appels illégitimes sans gêner des appels légitimes. Par exemple, l'industrie des télécommunications s'efforce de mettre en place les normes STIR/SHAKEN cette année, mais elles sont encore loin d'être lancées sur une base commerciale. Certaines normes restent à définir, notamment la manière d'afficher l'information conforme aux normes STIR/SHAKEN sur les appareils des utilisateurs finaux. L'application des normes STIR/SHAKEN nécessite également une interconnexion IP de bout en bout, ce dont on est encore loin.
De plus, même si l'industrie adopte de plus en plus de contre-mesures, les criminels ne baissent pas les bras. Leurs tactiques et techniques évoluent et changent continuellement, de sorte qu'il devient encore plus difficile de mettre fin aux appels de masse non sollicités. Surtout, ces malfaiteurs se trouvent presque tous à l'étranger.
On peut, cependant, beaucoup faire pour lutter contre les appels de masse non sollicités. Il faut pour cela la coopération de l'industrie, du CRTC et du gouvernement du Canada.
Premièrement, l'industrie des télécommunications doit poursuivre son travail actuel d'instauration du blocage universel des appels et des normes STIR/SHAKEN. Même si ces mesures ne mettront pas fin aux appels importuns et frauduleux, et qu'il faudra du temps pour les mettre pleinement en œuvre, elles constituent une base sur laquelle d'autres efforts peuvent s'appuyer.
Deuxièmement, l'industrie doit continuer de mettre au point de nouvelles méthodes pour cibler ces types d'appels. Les appels de masse non sollicités ne sont pas sans rappeler une course aux armements où chaque partie redouble sans cesse d'efforts. De nouvelles technologies et de nouveaux procédés sont mis au point chaque année, et les opérateurs doivent s'adapter et les adopter rapidement.
Troisièmement, le CRTC doit étendre son application des règles. En tant que principal organisme de réglementation du réseau téléphonique, il doit veiller à ce que les acteurs malveillants soient punis. Comme la Loi sur les télécommunications interdit aux opérateurs de simplement bloquer les appels, le CRTC doit être proactif et mettre fin aux appels frauduleux lorsqu'ils sont constatés.
Quatrièmement, le Conseil doit cibler les points d'entrée des appels malveillants. Une grande partie des appels internationaux importuns qui arrivent au Canada passent par un petit nombre de points d'entrée. Le Conseil devrait donc concentrer ses efforts sur les raisons pour lesquelles ces appels semblent entrer au Canada de cette manière et sur ce qui pourrait être fait pour les en empêcher. Il pourrait, par exemple, s'inspirer des efforts de la Commission fédérale des communications, du Département de la justice des États-Unis et de la Commission fédérale du commerce, qui ont récemment collaboré pour mettre un terme à l'arrivée des appels automatisés internationaux aux points d'entrée du trafic téléphonique national, c'est-à-dire à des points d'entrée particuliers des États-Unis.
Cinquièmement, le CRTC peut accélérer la mise en service des liaisons SIP. Les interconnexions SIP permettent aux opérateurs d'adopter de meilleures technologies pour lutter contre les appels malveillants, en particulier au moyen des normes STIR/SHAKEN. Toutefois, l'utilisation de la technologie SIP n'est pas obligatoire pour l'instant, et certains opérateurs la mettent en œuvre plus rapidement que d'autres. Le Conseil devrait insister pour son adoption généralisée.
Sixièmement, le gouvernement du Canada a un rôle crucial à jouer. L'immense majorité des appels importuns et frauduleux viennent de l'étranger. Le gouvernement, par l'intermédiaire d'Affaires mondiales Canada et de la GRC, doit travailler avec ses homologues étrangers pour fermer les centres d'appel et les plateformes d'appels automatisés qui sont à l'origine de ces appels frauduleux et indésirables. Tant que ces parties continueront à agir en toute impunité, elles trouveront tout simplement de nouveaux moyens de contourner les protections et les mesures mises en place par les fournisseurs de services de télécommunications pour contrer ce problème. Le meilleur moyen de mettre fin à ces appels, c'est de s'attaquer à leur source.
Enfin, il ne faut pas négliger l'aspect pédagogique. Chaque intervenant peut aider les Canadiens à prendre davantage conscience de la manière d'éviter les escroqueries qui motivent ces appels frauduleux. Rogers offre des ressources sur son site Web pour aider les consommateurs à repérer les arnaques au télémarketing, à se protéger contre l'usurpation de l'identité de l'appelant et les appels indésirables, et à comprendre comment le blocage universel des appels contribue à les protéger.
Parallèlement, des organisations telles que le Centre antifraude du Canada s'emploient à sensibiliser les consommateurs aux fraudes, y compris celles qui utilisent abusivement le réseau téléphonique, et à mieux faire connaître les techniques employées par les fraudeurs. Mais nous devons tous redoubler d'efforts dans ce domaine, en particulier auprès des personnes vulnérables et des immigrants.
Rogers est impatiente de travailler avec ses pairs, le CRTC et le gouvernement pour s'attaquer à ce problème crucial pour les Canadiens. Merci de nous donner l'occasion de participer à cet examen. Nous serons heureux de répondre à toutes vos questions.
Madame la présidente, honorables membres du Comité, je m'appelle Jérôme Birot. Je suis le vice-président du Développement de l'exploitation, des services de la téléphonie et de la valeur ajoutée chez TELUS.
Je souhaite tout d'abord vous remercier de l'occasion que vous m'avez offerte de m'adresser au Comité sur le sujet important des appels téléphoniques frauduleux. M. John MacKenzie, directeur des Affaires réglementaires chez TELUS, se joint à moi aujourd'hui pour cette discussion.
[Traduction]
Pour tenir ses promesses à ses clients, Telus consacre beaucoup de ressources depuis quelques années à la recherche d'une solution au problème des appels frauduleux. Ce n'est toutefois pas un problème facile à régler.
Des entreprises du monde entier essaient de trouver une solution. Les réseaux mondiaux de télécommunications ont évolué pour assurer des connexions transparentes entre les personnes et les données, où qu'elles se trouvent dans le monde. Avec l'émergence d'une économie vraiment mondiale, des voleurs et des criminels exploitent ces réseaux de chez eux et de l'étranger, décidés à escroquer des Canadiens par des appels téléphoniques frauduleux.
On me demande souvent pourquoi nous ne pouvons pas tout simplement bloquer les appels des escrocs. Malheureusement, les fraudeurs utilisent des méthodes très perfectionnées pour masquer l'origine de leurs appels. Ils réussissent très bien à passer leurs appels frauduleux au milieu du trafic réseau normal et légitime qui est acheminé dans le monde entier. Quand ils arrivent chez nous, il est très difficile de faire la différence entre un appel frauduleux et un appel légitime.
Comme nous sommes tenus par la réglementation d'autoriser les appels légitimes à aboutir sur notre réseau ou à transiter par lui, les appels sont acheminés jusqu'à leurs destinations supposées. Quand nous repérons des fraudeurs, nous faisons de notre mieux pour bloquer leurs appels. Nos méthodes sont souvent statiques et elles ne sont pas efficaces dans un environnement dynamique. Alors, que pouvons-nous faire?
Il existe des applications et des capacités tierces fournies par les fabricants de téléphones intelligents qui permettent aux utilisateurs de bloquer ou de filtrer leurs appels. Leur utilisation peut se révéler fastidieuse pour les consommateurs et il se peut qu'elles ne soient pas très efficaces. De plus, on utilise plusieurs types de systèmes dans les télécommunications pour limiter les appels frauduleux dans le réseau, comme le blocage et le filtrage des appels.
Avec les systèmes de blocage des appels, comme le blocage universel des appels, ou BUA, le fournisseur de services de télécommunications bloque les appels suspects qui partent de son réseau, y aboutissent ou y transitent. Par exemple, un numéro d'appel composé uniquement de zéros sera bloqué. En revanche, les systèmes de filtrage des appels sont contrôlés par les clients. Ils filtrent les appels en fonction de leurs préférences et ces systèmes n'ont aucune incidence sur les appels destinés à d'autres personnes.
Chez Telus, nous offrons un service de contrôle des appels, qui est un système exclusif de filtrage des appels fourni gratuitement à la plupart de nos clients de téléphonie résidentielle. Le contrôle des appels est conçu de manière à ce qu'il soit simple pour nos clients de l'activer et de l'utiliser.
Pour vous expliquer comment il fonctionne, je prendrai un exemple hypothétique. Disons que j'essaie de vous appeler, madame la présidente. Vous êtes cliente de Telus. Vous avez activé la fonction de contrôle des appels sur votre téléphone. Si je compose votre numéro, mon appel sera intercepté par le réseau avant d'arriver chez vous. J'entendrai alors le message suivant: « La personne que vous tentez de joindre contrôle ses appels. Pour poursuivre, entrez le... » Ensuite, l'appelant, en l'occurrence moi, reçoit un message qui lui dit d'entrer à l'aide du clavier un numéro choisi au hasard entre zéro et neuf. Nous appelons cette étape « l'épreuve ». Si j'entre le bon numéro, mon appel sera connecté et votre téléphone sonnera. Si j'entre un mauvais numéro ou que je n'entre aucun numéro, mon appel sera rejeté. J'entendrai une voix enregistrée qui me dira que vous ne recevez pas les appels. Surtout, votre téléphone ne sonnera pas.
Ce système se révèle très efficace pour filtrer les appels frauduleux parce qu'ils sont généralement composés automatiquement par un système informatique et que les systèmes informatiques ne peuvent pas suivre les instructions de l'épreuve.
Il est possible aussi de personnaliser le contrôle des appels en utilisant des listes personnelles, par exemple d'appelants acceptés ou bloqués. Si un numéro de téléphone figure sur la liste des appelants acceptés par le client, il ne sera pas soumis à l'épreuve. En revanche, s'il se trouve sur la liste des appelants bloqués, il sera rejeté.
Nous avons aussi une autre liste particulière à chaque client que nous appelons la liste des appels récents. Cette liste, qui est contrôlée par Telus, contient les 10 derniers numéros de téléphone qui ont réussi l'épreuve. Les appels venant de ces numéros ne sont plus soumis à l'épreuve jusqu'à ce que d'autres appels plus récents les remplacent sur la liste.
Pour revenir à mon exemple, madame la présidente, cela voudra dire que vos amis et parents qui vous appellent souvent n'auront pas à se soumettre à l'épreuve chaque fois qu'ils vous appellent.
Les résultats du contrôle des appels sont impressionnants. Depuis son lancement en mai 2018, nous avons constaté qu'il est nettement plus efficace que le BUA, puisqu'il bloque 40 % des appels entrants des clients qui ont activé la fonction. Par ailleurs, le contrôle des appels est pratiquement à l'abri des usurpations de numéros où les fraudeurs cachent leur identité en empruntant un vrai numéro, comme celui que nous avons vu aujourd'hui ou un numéro avec un indicatif régional. Vu le succès du contrôle des appels, nous cherchons à l'offrir aussi à nos clients des services sans fil. Nous devrions pouvoir le faire dans les prochaines semaines.
J'aimerais pour conclure parler des normes STIR/SHAKEN. Ce n'est ni un système de blocage ni un système de filtrage. Il s'agit d'un ensemble de protocoles destinés à valider l'intégrité de l'identité de l'appelant et à donner au client qui reçoit un appel l'assurance que le numéro entrant appartient à l'appelant. Les fournisseurs de services vocaux qui ne soutiennent pas les normes STIR/SHAKEN courent probablement le risque d'être désavantagés face à la concurrence. Il est évident que les normes STIR/SHAKEN ont le vent en poupe en Amérique du Nord et je m'attends à les voir bientôt adoptées au Canada.
Telus fait partie des fournisseurs de services canadiens qui ont créé un nouvel organisme, l'Autorité canadienne de gouvernance des jetons sécurisés, afin de soutenir la mise en œuvre et l'application des normes STIR/SHAKEN au Canada. Cependant, il reste encore de nombreuses questions qui empêchent de régler tout à fait le problème des appels frauduleux au moyen des protocoles STIR/SHAKEN. La principale est que les normes STIR/SHAKEN s'appliqueront d'abord aux appels à l'intérieur du Canada et, au mieux, à l'intérieur de l'Amérique du Nord. Toutefois, beaucoup d'appels frauduleux viennent d'ailleurs. En outre, le système ne fonctionne pas s'il reste des équipements à commutation de circuits traditionnels où que ce soit sur le trajet que suit l'appel, ce qui est courant dans tous les réseaux en place depuis des décennies. Enfin, nous ne savons pas dans quelle mesure les fabricants de téléphones intelligents adopteront les normes STIR/SHAKEN ou afficheront les renseignements STIR/SHAKEN sur leurs appareils.
En raison de ces difficultés, et jusqu'à ce que les normes STIR/SHAKEN soient adoptées dans le monde entier, nous ne savons pas quand les protocoles STIR/SHAKEN répondront aux attentes élevées de beaucoup par rapport à la technologie. Indépendamment de ces questions, Telus est favorable aux protocoles STIR/SHAKEN. Nous croyons qu'ils continueront de s'améliorer. Il est probable que nous ne pourrons pas les offrir avant les États-Unis, mais nous pensons que le Canada suivra peu après. En attendant, nous sommes certains que le contrôle des appels protégera efficacement les clients de Telus.
Voilà qui conclut mes observations préliminaires. Je répondrai volontiers à vos questions.