Pour garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais vous faire part de certaines règles.
Ceci s'adresse à ceux et celles qui participent à la réunion à distance.
[Traduction]
J'aimerais profiter de l'occasion pour rappeler à tous les participants à cette réunion qu'il est interdit de faire des captures d'écran ou de prendre des photos de votre écran, comme l'a mentionné le Président de la Chambre, M. Rota, le 29 septembre 2020.
[Français]
Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts pendant la réunion. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir entre le parquet, l'anglais ou le français.
[Traduction]
Avant de parler, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Lorsque vous avez fini de parler, veuillez mettre votre micro en sourdine pour minimiser les interférences.
[Français]
Je vous rappelle que toutes les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence.
[Traduction]
Lorsque vous parlez, exprimez-vous lentement et clairement, s'il vous plaît.
[Français]
À moins de circonstances exceptionnelles, tous les participants à distance doivent utiliser un casque d'écoute et un microperche.
[Traduction]
En cas de difficultés techniques, veuillez en informer le président. Veuillez noter qu'il se peut que nous devions suspendre la séance pendant quelques minutes, car nous devons nous assurer que tous les membres sont en mesure de participer pleinement.
[Français]
J'aimerais maintenant accueillir les témoins.
En première partie, nous recevons d'abord M. Yvon Barrière, le vice-président exécutif régional du Québec pour l'Alliance de la fonction publique du Canada.
Monsieur Barrière, vous disposerez de sept minutes et demie pour faire votre présentation, qui sera suivie de questions de la part des membres du Comité.
J'aimerais dire à tous les témoins et aux membres du Comité que, quand il restera une minute à leur temps de parole, je le leur indiquerai. Quand ils verront le carton rose, cela voudra dire que le temps est écoulé. Il leur faudra donc conclure au cours des cinq ou dix secondes suivantes.
Mesdames et messieurs, sur ce, je vais inviter M. Barrière à prendre la parole.
:
Monsieur le président, membres du Comité permanent des langues officielles, je tiens d'abord à vous remercier de m'avoir invité à témoigner sur les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur la capacité du gouvernement à fournir de l'information dans les deux langues officielles.
L'Alliance de la Fonction publique du Canada, ou AFPC, représente plus de 200 000 travailleuses et travailleurs partout au pays et ailleurs dans le monde. Nos membres travaillent dans des agences et des ministères fédéraux, des sociétés de la Couronne, des entreprises de sécurité, des universités, des casinos, des organismes de services communautaires, des communautés autochtones ainsi que des aéroports. En plus de son siège social à Ottawa, l'AFPC compte 23 bureaux régionaux. Nous représentons près de 50 % des fonctionnaires fédéraux.
La pandémie de COVID-19 a amené son lot de défis pour nos membres. Du jour au lendemain, bon nombre d'entre eux se sont retrouvés en télétravail à domicile, ne se côtoyant plus que virtuellement. Ils ont fait des pieds et des mains pour offrir des services d'urgence aux Canadiennes et aux Canadiens dans des délais extrêmement courts. Je pense particulièrement à l'instauration de la Prestation canadienne d'urgence, un outil qui a aidé des milliers de personnes et qui a vu le jour grâce au travail acharné de nos membres.
D'emblée, il est important de reconnaître que tous les travailleurs et toutes les travailleuses ont le droit de parler et de travailler dans la langue officielle de leur choix au sein de la fonction publique fédérale. Bien que cela soit vrai sur papier, force est de constater qu'il y a toujours une iniquité dans la place qu'occupent le français et l'anglais dans nos institutions, et que la pandémie a accentué les nombreux problèmes existants. Je me permets même d'aller jusqu'à dire qu'il existe bel et bien une discrimination systémique profondément ancrée dans l'appareil gouvernemental fédéral. En effet, on tient pour acquis que tout se passe en anglais d'abord, et ensuite en français.
Vous savez que le commissaire aux langues officielles, M. Raymond Théberge, a conclu dans son dernier rapport qu'il existait des lacunes dans les communications gouvernementales en français en temps de crise, comme en ce moment avec la pandémie de COVID-19. Il a insisté sur la nécessité de moderniser la Loi sur les langues officielles, qui a fêté son 50e anniversaire l'an passé. Il affirme qu'une refonte en profondeur de la Loi s'impose, sinon, nous continuerons à avoir les mêmes problèmes.
L'AFPC est entièrement d'accord avec le commissaire Théberge. Nous devons absolument réformer la Loi sur les langues officielles.
La pandémie a fait ressortir davantage les iniquités en matière de langues officielles. La plupart des fonctionnaires, qui travaillent maintenant à domicile et ne se côtoient plus que virtuellement, se sont souvent plaints du fait que les gestionnaires ne leur envoient pas les informations importantes dans les deux langues officielles. J'ai moi-même été en mesure de le constater. Par ailleurs, la pandémie a rendu plus difficile le travail de nos membres en français. Le fait que les réunions sur Zoom, Teams et Skype se déroulent souvent en anglais et que l'accès à des services d'interprétation soit malheureusement plutôt rareen est un exemple flagrant.
Sans réunions en personne pour briser la glace, les barrières linguistiques deviennent plus que jamais un obstacle à une communication efficace. Souvent, les francophones ont l'impression qu'ils doivent s'exprimer dans leur deuxième langue pour ne pas laisser de côté leurs collègues, soit parce que l'interprétation n'est pas disponible, soit parce qu'elle n'est pas assez rapide. Les anglophones, quant à eux, ne se sentent pas à l'aise de parler en français, de peur d'être jugés. Deux lacunes importantes ressortent donc: d'une part, le manque d'informations transmises dans les deux langues aux employés et, d'autre part, l'absence d'outils et d'espaces d'échange qui faciliteraient l'utilisation des deux langues, particulièrement dans le contexte du télétravail.
Si nous voulons créer une fonction publique fédérale dynamique, diversifiée et bilingue, nous devons instaurer une atmosphère où les employés sont à la fois capables de travailler dans la langue de leur choix et encouragés à le faire. Le travail à domicile devrait être une bougie d'allumage qui incite le gouvernement à agir pour améliorer le bilinguisme dans la fonction publique fédérale afin de lui permettre d'offrir de meilleurs services à la population et ainsi garantir que chaque travailleuse ou travailleur se sent à l'aise de travailler dans la langue de son choix.
Il est du devoir du gouvernement fédéral de fournir les outils nécessaires pour y arriver. La fonction publique canadienne devrait être un endroit de prédilection où le bilinguisme est encouragé et soutenu par l'employeur. Il ne faut jamais oublier qu'il y a aussi des francophones et des personnes bilingues dans toutes les provinces et les territoires du pays, pas seulement au Québec.
Ces personnes ont le droit de travailler dans la langue de leur choix, et la population a le droit de recevoir les services en français ou en anglais. Il est de la plus haute importance que les employés fédéraux aient accès à des communications et à de la documentation dans les deux langues. Cela s'applique autant à eux qu'aux Canadiennes et aux Canadiens qui reçoivent des services. Dans un contexte de pandémie, c'est très souvent une question de santé et de sécurité.
L'amélioration du bilinguisme doit absolument être une priorité pour le gouvernement fédéral. Un des exemples les plus concrets de l'immobilisme du gouvernement face aux langues officielles dans la fonction publique est la prime au bilinguisme. Les postes actuellement bilingues sont assortis d'une prime de 800 $. Or ce montant n'a pas été revu depuis les années 1990. Nous avons poussé le gouvernement à revoir cette politique à maintes reprises, mais celui-ci a toujours refusé de bouger. Pire encore, en 2019, le gouvernement a proposé d'éliminer la prime au bilinguisme. C'est en quelque sorte ajouter l'insulte à l'injure.
Les fonctionnaires bilingues qui reçoivent cette prime risible sont de plus en plus enclins à la refuser en raison de la surcharge de travail que cela occasionne. Je vous le répète: on parle ici de 25 cents l'heure après impôt. Le bilinguisme devrait être reconnu comme une compétence de qualité supérieure. Il existe des pistes de solutions pour améliorer la place du français au sein de la fonction publique. Nous devons augmenter la prime au bilinguisme afin de reconnaître la valeur du travail dans les deux langues officielles.
L'AFPC revendique également une prime en vue de reconnaître et de rémunérer les employés qui, dans l'exercice de leurs fonctions, s'expriment à l'oral ou à l'écrit dans une langue autochtone. Comme le Parlement a pris des mesures législatives afin de faire progresser la reconnaissance des langues autochtones, le gouvernement fédéral, en tant qu'employeur, devrait montrer l'exemple et reconnaître officiellement la contribution de son personnel qui utilise les langues autochtones dans l'exercice de ses fonctions en lui offrant une prime au bilinguisme.
En outre, il faut offrir plus de formation linguistique pour encourager les travailleuses et les travailleurs anglophones et francophones à développer leur langue seconde.
Le Conseil du Trésor doit également cesser toute forme de sous-traitance en matière de formation linguistique et se focaliser sur la création de son propre programme de formation, composé de travailleuses et de travailleurs de la fonction publique qui se concentrent sur des demandes spécifiques de la fonction publique fédérale.
Le gouvernement doit également prendre en considération le fait que la pandémie de COVID-19 affecte énormément l'accès à l'information dans les deux langues officielles et s'employer à corriger le tir immédiatement.
Je tiens à dire, en terminant, que je fonde des espoirs quant au projet de loi de la ministre . C'est un pas dans la bonne direction. Cela dit, pour établir une législation ainsi qu'un système solidement établis et respectés, il reste encore beaucoup de travail à faire.
Je vous remercie de votre attention. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
:
Je vous remercie de votre question, monsieur Blaney.
Je me souviens très bien que, dans une autre vie, vous étiez un fonctionnaire fédéral sur la Rive-Sud, en face de Québec. J'ai entendu parler de vous. Il n'y a pas de soucis, c'était relativement positif.
En ce qui concerne la discrimination, je peux certainement vous fournir quelques exemples. Il y a beaucoup de situations dans la fonction publique fédérale. D'entrée de jeu, j'ai mentionné que nous sentions très souvent que l'appareillage de la fonction publique fédérale était concentré d'abord et avant tout sur les anglophones et, ensuite, sur les minorités.
En ce moment, toute une iniquité prévaut dans la situation que vivent les fonctionnaires francophones. Je ne parle pas uniquement de ceux qui habitent au Québec, mais aussi de ceux de la région de capitale nationale ou du Nouveau-Brunswick, de deux personnes du Manitoba et de la communauté de Saint-Boniface, à côté de Winnipeg. Il y a plusieurs situations où les fonctionnaires francophones se sentent indéniablement défavorisés.
La dotation est un exemple parmi tant d'autres. Si vous prenez le temps de regarder les avis de processus de dotation, vous constaterez qu'il y a beaucoup de postes de haute direction bilingues ou unilingues anglophones, mais qu'il n'y a pas de poste unilingue francophone. Plusieurs exemples de ce type démontrent ce que les fonctionnaires fédéraux francophones vivent jour après jour. Ils se sentent toujours dans l'obligation de se forcer à parler en anglais, soit pour ne pas retarder les travaux, soit pour bien se faire comprendre. Ils ont toujours un souci d'efficacité au détriment de leur langue, qu'ils aimeraient pouvoir parler.
Si je comprends bien, le fonctionnaire fédéral francophone est comme un fonctionnaire de second ordre, puisque les postes de haute direction — vous venez de le dire — sont uniquement anglophones ou bilingues.
Monsieur le président, j'ai trouvé le témoignage de notre témoin très intéressant. Je me demande s'il ne pourrait pas servir à l'étude que nous menons actuellement sur la situation du français au pays. Je le porte à votre attention. Nous pourrons en discuter plus tard.
Monsieur Barrière, je vous remercie. Je veux vous rendre la pareille. J'ai la plus haute estime pour la fonction publique fédérale et ses représentants, particulièrement ses représentants francophones.
J'ai appris aujourd'hui que le président du Conseil du Trésor et député de Québec M. Jean-Yves Duclos a souffert d'une embolie pulmonaire. S'il nous écoutait, j'aurais envie de lui dire que nous lui souhaitons un prompt rétablissement et que les pensées de tous les parlementaires sont avec lui.
Souvent, quand je fais du ski de fond, on me confond avec lui parce que nous avons peut-être un physique comparable.
Monsieur Barrière, nous avons reçu M. Duclos au Comité. Il nous a dit que, pendant la pandémie, il avait essayé de corriger le tir sur le plan des lacunes. Vous avez dit que cette iniquité ou cette discrimination avait été accentuée par la pandémie.
De la part des instances gouvernementales et du Conseil du Trésor en particulier, avez-vous senti qu'on tentait de corriger le tir? Était-ce plutôt des coups d'épée dans l'eau?
J'aimerais vous entendre à cet effet. Il ne doit pas me rester beaucoup de temps de parole, mais nous avons un bon président indulgent.
:
J'ai été fonctionnaire fédéral pendant un peu plus de 25 ans, c'est-à-dire pendant un peu plus longtemps que M. Blaney. J'étais grandement étonné de voir que nous recevions toujours les directives et les règlements en anglais. Il y avait toujours un petit mot, moyennement bien écrit, pour nous aviser que la traduction allait être disponible bientôt. Parfois, cela prenait quelques jours, parfois, cela prenait quelques semaines. Cela dit, il y a des choses qui m'ont quand même marqué. Pour répondre à vos questions en lien avec la discrimination, j'ai aussi longtemps fait partie du Comité national de santé et de sécurité.
Vous allez comprendre d'où viennent mes propos et l'introduction du discours que j'ai fait plus tôt. J'ai fait partie du Comité national de santé et de sécurité, où siégeaient des représentants de l'employeur et du syndicat. Trois syndicats y étaient représentés: l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, l'UCCO-SACC-CSN et l'AFPC.
Nous représentions les employés et les employeurs. Nous discutions des enjeux de sécurité en lien avec nos membres. À un moment donné, j'ai fait le tour de la table et j'ai remarqué que, par coïncidence, les trois représentants syndicaux étaient des francophones du Québec. En fait, il faut dire que, pour deux de ces personnes, dont moi-même, le niveau de bilinguisme était plutôt moyen. Quant à la présidente et aux deux directeurs qui représentaient l'employeur, ils étaient parfaitement bilingues ou venaient du Québec ou de la région de la capitale nationale; leur français était impeccable. Il y avait aussi une personne unilingue anglophone, qui venait de Winnipeg. Toutes les rencontres du comité se faisaient en anglais et elles étaient traduites de l'anglais vers le français.
À un moment donné, j'ai levé la main et j'ai demandé si nous pouvions tenir la réunion en français, parce que nous étions 11 personnes sur 12 qui parlions français. Or, par défaut, on commençait toujours chaque réunion en anglais. Même la présidente, une francophone qui parlait très bien anglais, commençait toujours les réunions en anglais. C'était une façon de faire et une culture très instaurée, très pratique. Par défaut, cela se passait en anglais. Cependant, nous avions accès à l'interprétation.
Pour en revenir à la pandémie, je me suis informé tout récemment et les rencontres du Comité de santé et de sécurité de ce même ministère se font actuellement par visioconférence. Elles se déroulent en anglais, sans aucune interprétation.
Malgré l'évolution du Comité, je vous assure que si un membre francophone parle en français, les membres unilingues anglophones ne comprennent pas ce qui est dit. C'est pour cette raison que ceux qui représentent le syndicat au Québec ou dans l'Est du Canada se sentent obligés de parler en anglais.
:
C'est une très bonne question, monsieur Beaulieu
La somme de 800 $ a été instaurée dans les années 1990. Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons souvent demandé une augmentation, mais cela a toujours été refusé. On a même voulu enlever la prime complètement en 2019 pour peut-être offrir un peu plus de formation. C'est assurément un problème actuellement. La somme de 800 $ apporte une charge de travail supplémentaire.
Par exemple, encore dans le cadre de la pandémie, les collègues demandent souvent à ceux qui reçoivent le fameux montant de 800 $ de leur traduire ce qui vient d'être dit. Ainsi, ils finissent par endosser un double rôle, dont celui de traducteur, ce qui ne devrait pas être le cas.
Je pense, par exemple, aux personnes qui travaillent dans les centres d'appels. Ces gens ont deux lignes, une française et une anglaise. Ils ont une lourde charge de travail, puisqu'ils doivent interagir en anglais la plupart du temps, à cause du nombre d'appels.
Je pense aussi aux agents de libération conditionnelle du Service correctionnel du Canada, qui ont ce que l'on appelle communément un certain volume de travail. Quand ils reçoivent la prime de 800 $, leur volume de travail... Sur 25 détenus incarcérés dans les pénitenciers du Québec, 17 ou 18 détenus sont des anglophones qui viennent de l'Ouest ou de l'Ontario. Pour les agents, cela entraîne une surcharge de travail, parce qu'ils doivent communiquer et écrire en anglais, afin de répondre adéquatement aux demandes des langues officielles.
:
Monsieur Barrière, soyez le bienvenu au Comité permanent des langues officielles. Je suis très heureux de vous entendre ce soir. Votre témoignage est extrêmement précieux et va nous aider dans le cadre de notre étude.
Évidemment, je veux tout de suite joindre ma voix à ceux qui ont souhaité un prompt rétablissement au ministre Duclos. C'est important. Je tenais à le dire, parce que nous sommes tous collègues, ici, mais aussi parce que je ne voulais pas qu'on croie que je suis insensible à sa situation.
Lorsqu'il est venu nous parler, récemment, il nous a dit qu'au sujet des langues officielles, aucun compromis n’était acceptable. Or, compte tenu de tout ce que vous nous racontez, je constate qu'il y en a eu, et peut-être même plus qu'à l'habitude, pendant la pandémie. Il y a des réunions où il n'y a pas d'interprétation, et il arrive qu'on nous parle en anglais alors qu'il y a une majorité de francophones à la table, comme vous venez de le souligner.
J'aimerais que vous nous parliez de deux choses.
D'abord, est-ce qu'on a aussi envoyé des documents écrits qui étaient uniquement en anglais?
Ensuite, j'aimerais entendre vos commentaires sur la qualité de la traduction lorsqu'elle est faite par des sous-traitants.
:
Dans le cadre de ma préparation, j'ai communiqué avec plusieurs représentants de plusieurs ministères. J'ai leur ai demandé de toujours faire des vérifications des faits. Pour répondre à votre première question, nos fonctionnaires ne reçoivent pas toujours la version française des documents dans un délai raisonnable. C'est quelque chose que nous avons souvent soulevé et que j'ai soulevé moi-même lorsque j'étais au ministère.
Encore là, on constate deux façons de voir les choses et deux façons d'agir. Certains ministères, lorsqu'ils terminent une étude ou qu'ils viennent de revoir des directives, disent qu'ils attendent la traduction avant d'envoyer les documents à tout le monde. Je les félicite pour cela. Cependant, il y a d'autres ministères qui envoient des documents en anglais dans un premier temps, puis, quelques jours ou quelques semaines plus tard, des fonctionnaires sont obligés de faire un rappel disant qu'ils n'ont pas reçu les documents en français. Ils n'ont pas vraiment le goût de payer pour les faire traduire.
Comme vous le savez, dans le cadre des conventions collectives, des directives et de la réglementation, l'anglais prime le français. Or, si on veut offrir aux Canadiens et aux Canadiennes un service dans les deux langues, il faut que nos fonctionnaires francophones puissent être bien informés et savoir ce qu'il en est exactement. C'est d'autant plus important dans le cadre de la pandémie, car l'information concerne souvent la santé et la sécurité.
Maintenant, pour ce qui est de savoir si la traduction est toujours bien faite, je ne peux pas vous répondre, puisque je n'ai pu vérifier les deux modèles. Par contre, très souvent, quand des gestionnaires unilingues anglophones s'adressaient à un groupe de francophones et d'anglophones, on m'a rapporté que le patron disait « bonjour, comment ça va? », et poursuivait en anglais. C'était comme s'il venait de cocher sa case de participation en français et qu'il pouvait passer à autre chose.
Également, très souvent, il y a des adjoints administratifs qui, eux, sont bilingues et traduisent les communiqués dans les courriels ou les notes de service. Sinon, parfois, comme je le disais d'entrée de jeu, on remarque qu'il s'agit d'une traduction un peu boiteuse. Vous savez comme moi que, lorsqu'on utilise des applications comme Google Traduction, cela ne donne pas toujours de bons résultats et cela peut porter à confusion dans plusieurs cas.
:
Je vous remercie, monsieur Dalton.
Dans un premier temps, j'aimerais vous remercier des efforts que vous faites pour parler en français. Vous auriez pu vous contenter de parler en anglais et d'avoir recours à l'interprétation. J'admire ceux qui font ces efforts.
Effectivement, près de Vancouver, il y a des communautés, des villages aux prises avec des problèmes linguistiques. J'ai entendu dire que des combats sont menés actuellement pour maintenir ou fonder des écoles en français dans votre belle province. Je vois que Mme Lalonde n'est pas tout à fait d'accord.
J'ai parlé de discrimination. Je pense que, dans l'Ouest et en Colombie-Britannique, il s'agit plutôt d'un acquis. Tout se fait en anglais. Si, dans le cadre des comités ou de conférences, une personne levait la main et voulait parler en français, je pense qu'elle ne serait même pas prise en considération. Dans l'Est du Canada, lorsqu'un ministère veut embaucher quelqu'un représentant un dossier en particulier, il choisit très souvent un employé bilingue en vue de sa participation à un comité d'étude ou à un comité qui vise à améliorer certaines pratiques, par exemple.
Dans votre cas, on sait que la majorité des gens dont la langue maternelle est le français parlent aussi anglais. C'est une façon de faire très bien établie dans l'Ouest. Tout se fait immanquablement en anglais. Les gens n'ont aucune occasion d'exercer leur français, à moins de faire partie d'un comité national et d'échanger à l'occasion avec des gens de la région de la capitale nationale, du Québec ou du Nouveau-Brunswick.
:
Merci, monsieur le président.
Même si je n'ai pas beaucoup de temps à ma disposition, je vais prendre quelques secondes pour saluer mon collègue de la région de Québec . Au-delà de la partisanerie, il y a des êtres humains qui sont au service de notre Parlement. J'ai une bonne pensée pour M. Duclos, qui est un gentleman et à qui je souhaite une bonne convalescence.
Monsieur Barrière, vous avez parlé de discrimination systémique. C'est une expression choquante, mais qui reflète probablement la réalité. Vous avez parlé de la prime au bilinguisme. Je constate qu'elle ne fonctionne pas et qu'elle n'a pas été augmentée depuis plusieurs années.
Ne pourrions-nous pas aborder le problème dans le sens contraire en exigeant que les hautes instances soient soumises à une obligation de résultat, à défaut de quoi, on réduirait éventuellement leur salaire, leur traitement ou leur prime?
Vous avez parlé tout à l'heure de gens qui commencent une conférence en disant « bonjour et bienvenue ». Ils ont l'impression que c'est suffisant et passent immédiatement à l'anglais.
Le fait d'offrir une prime ne fait-il pas en sorte qu'on sous-estime l'importance des francophones? Ne devrait-on pas aborder le problème dans le sens contraire en exigeant des résultats de la part des hautes instances et en leur imposant des obligations en matière d'application?
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie, monsieur Barrière, d'être parmi nous ce soir.
J'aimerais, moi aussi, saluer mon collègue M. Duclos et toute sa famille. Je lui souhaite de se rétablir et de revenir parmi nous rapidement, peut-être même à ce comité. Pourquoi pas?
J'aimerais d'abord émettre un bref commentaire sur la discrimination systémique. J'aurais plutôt tendance à parler d'une culture organisationnelle au sein de laquelle il faudrait vraiment développer des réflexes quant à la question du français et de l'anglais. Ces réflexes n'existent probablement pas en ce moment. La notion de discrimination systémique donne lieu à plus d'un questionnement. Je me permets de faire à ce sujet un commentaire qui, je vous le dis bien honnêtement, me met un peu mal à l'aise.
Monsieur Barrière, plusieurs organisations syndicales, dont l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada et l'Association canadienne des employés professionnels, ainsi que le président de la Commission de la fonction publique, recommandent une meilleure formation linguistique dans la deuxième langue officielle. Vous en avez parlé amplement, mais j'aimerais quand même revenir sur cette question, parce que je suis convaincue que, pour promouvoir la dualité linguistique au sein de la fonction publique, il faudrait que la révision linguistique passe par un nouveau cadre de formation en langue seconde.
Que pensez-vous de l'idée d'établir un nouveau cadre de formation en langue seconde?
:
Nous reprenons nos travaux.
Aujourd'hui, le Comité se réunit pour discuter des défis du service d'interprétation parlementaire dans le contexte de la pandémie de COVID-19.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins.
[Traduction]
Avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme, et lorsque vous êtes prêt à parler, vous pouvez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro.
[Français]
Je vous rappelle que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
[Traduction]
L'interprétation dans cette vidéoconférence fonctionnera comme dans une réunion de comité ordinaire. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais et le français.
[Français]
Lorsque vous parlez, exprimez-vous lentement et clairement, s'il vous plaît.
[Traduction]
Lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être en sourdine.
[Français]
Je voudrais souhaiter la plus cordiale bienvenue à nos témoins pour cette deuxième partie de notre réunion.
Vous disposerez de sept minutes et demie pour faire votre discours d'ouverture. Il y aura ensuite une ronde de questions de la part des membres du Comité.
M. Beaulieu invoque le Règlement.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole devant le Comité aujourd'hui.
Je suis ravie d'avoir l'occasion d'expliquer comment Santé Canada satisfait aux exigences de la Loi sur les langues officielles pendant qu'elle tient les Canadiens au courant des mesures de lutte contre la pandémie de COVID‑19.
Je m'appelle Pam Aung‑Thin. Comme vous l'avez dit, je suis sous-ministre adjointe par intérim à la Direction générale des communications et des affaires publiques, qui fournit des services à Santé Canada et à l'Agence de la santé publique du Canada.
Je suis accompagnée de Mme Manon Bombardier, sous-ministre adjointe déléguée par intérim à la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada.
Nos directions générales jouent un rôle très important dans la réponse globale du gouvernement à l'éclosion de la COVID‑19 au Canada.
Je désire tout d'abord souligner que, pour nous, communiquer dans la langue officielle de choix des Canadiens n'est pas seulement une obligation juridique ou stratégique. Il s'agit d'une pratique essentielle en communications.
En temps de crise, la clarté et l'efficacité des communications revêtent une importance encore plus grande, car le fait d'être mal compris peut compromettre la santé et la sécurité des Canadiens. Nous prenons cette responsabilité très au sérieux, et c'est ce qui guide nos activités quotidiennes.
Les attentes concernant l'usage des langues officielles dans les communications du gouvernement sont très claires. Selon la Loi sur les langues officielles, les institutions fédérales sont tenues de communiquer avec le public et de lui offrir des services dans les deux langues officielles.
La Politique sur les communications et l'image de marque du gouvernement du Canada fournit des directives supplémentaires. Elle exige que les ministères fournissent des renseignements dans les deux langues officielles, conformément à la Loi, et qu'ils tiennent compte, dans leurs communications, des besoins des communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada.
Au sein du portefeuille de la Santé, nous nous efforçons de satisfaire à ces exigences dans toutes nos communications. À titre d'exemple, chaque fois que nous publions un communiqué, une déclaration ou un autre document, nous le faisons en anglais et en français en même temps. Les informations mises en ligne sur notre site Web sont aussi publiées simultanément en français et en anglais.
Pendant la pandémie, nous mettons également à la disposition du public des informations clés sur la COVID‑19 et sur les actions menées par le gouvernement pour réduire la propagation de la maladie en de nombreuses autres langues, dont plusieurs langues autochtones.
Lorsque nous tenons des points de presse et des séances d'information technique, il y a toujours des experts de Santé Canada et de l'Agence de la santé publique du Canada qui s'expriment dans les deux langues officielles.
Enfin, au ministère et à l'Agence, les communications avec le personnel se font dans les deux langues officielles et les employés sont invités à travailler dans la langue de leur choix.
Les employés et les gestionnaires font l'objet d'une évaluation, au milieu et à la fin de l'exercice, en fonction d'objectifs de rendement liés aux exigences linguistiques énoncées dans leur entente de rendement.
Ce sont des pratiques de communication qui ont cours au gouvernement du Canada, des pratiques que nous nous efforçons d'observer en tout temps. Bien sûr, en temps de pandémie de COVID‑19, cela n'a pas changé. Cette crise sans précédent a apporté son lot de défis supplémentaires, mais nous respectons toujours les langues officielles.
La protection de la santé et de la sécurité de la population canadienne est notre priorité absolue. Dans le contexte actuel, nous devons mettre tout en œuvre pour contrôler la propagation de la COVID‑19, et c'est ce que nous faisons depuis le début de la pandémie. Entre autres, nous facilitons l'accès aux produits nécessaires pour ralentir la propagation de la maladie.
Au début de la pandémie, en mars 2020, il y a eu une demande jamais vue en produits visant à limiter la propagation de la COVID‑19, notamment des antiseptiques pour les mains, des désinfectants, des produits d'entretien ménager, des produits d'entretien utilisés au travail et des savons pour les mains et pour le corps. Les étiquettes sur ces produits sont pour les Canadiens une précieuse source d'informations sur la façon de les utiliser. En principe, tous les produits vendus au Canada doivent avoir une étiquette bilingue.
Au début de la pandémie, la demande a augmenté de façon exceptionnelle, à un point tel qu'il était souvent très difficile de trouver un grand nombre de ces produits en magasin ou de s'en procurer auprès de détaillants en ligne.
Des fournisseurs étrangers d'antiseptiques pour les mains et de désinfectants ont indiqué que les produits qu'ils fabriquaient portaient une étiquette qui était exclusivement en anglais et qu'ils ne les expédieraient qu'aux pays acceptant l'étiquetage en anglais.
À la lumière de la demande exceptionnelle et en vue d'assurer l'accès continu des Canadiens à ces produits, Santé Canada a mis en œuvre des politiques provisoires en mars et en avril 2020 pour faciliter l'accès, de façon provisoire et urgente, à certains produits étiquetés dans une seule langue officielle. Il est à noter que les antiseptiques pour les mains fabriqués au Canada et dont l'étiquette était unilingue ne pouvaient être vendus que dans les régions unilingues, en fonction de la langue utilisée à cet endroit.
Santé Canada a suivi de près l'approvisionnement en antiseptiques pour les mains et en désinfectants. Quand les stocks ont commencé à se stabiliser, l'initiative d'amorcer un retour à l'étiquetage bilingue a été prise le 9 mai 2020, avec une période de transition autorisée se terminant le 8 juin 2020 pour les produits existants. Santé Canada obligeait les importateurs à fournir des informations dans les points de vente, orientant les consommateurs vers un site Web où ils peuvent trouver du contenu bilingue.
Les mesures provisoires que nous avons prises ont permis de suffire à la demande élevée de produits de santé nécessaires au ralentissement de la propagation de la COVID‑19.
Par ailleurs, les mesures qui s'appliquaient aux produits fabriqués au Canada ont favorisé l'importante mobilisation du monde des affaires canadien pour soutenir la lutte contre la COVID‑19. Partout au pays, nous avons pu voir la collaboration remarquable des entreprises et des industries, qui ont répondu à l'appel et ont offert leur soutien, leur expertise et leurs ressources pour répondre aux besoins critiques en matière d'approvisionnement.
En conclusion, la pandémie de la COVID‑19 a changé tellement de choses pour les Canadiens depuis la dernière année. Elle n'a toutefois pas eu d'effet sur l'engagement du portefeuille de la Santé à communiquer avec les Canadiens et à leur offrir des services dans la langue officielle de leur choix.
Malgré les circonstances exceptionnelles que nous vivons, j'ai l'assurance que le portefeuille de la Santé n'a pas cessé de remplir ses obligations au titre de la Loi sur les langues officielles tout au long de cette crise qui se prolonge.
Nous nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Madame la sous-ministre de la Santé, je vous souhaite la bienvenue à notre comité.
Je veux d'abord vous féliciter pour votre gestion de la pandémie à bien des égards. Vous avez fait preuve de flexibilité.
Deux entreprises de ma circonscription ont également participé aux efforts de collaboration pendant la pandémie, soit Plastiques Moore, qui fournit de l'équipement pour la distribution de vaccins, et la Distillerie des Appalaches, qui a troqué le gin pour du désinfectant. Il a été facile pour eux d'obtenir un numéro d'autorisation. Il y a eu beaucoup de flexibilité.
Là où je trouve que vous avez failli à la tâche, c'est en matière de langues officielles. Votre témoignage m'a déçu, madame la sous-ministre. Je me serais attendu à ce que vous fassiez preuve de plus de transparence.
Le commissaire aux langues officielles a été très critique. Selon lui, « il est d'autant plus crucial dans des conditions de crise que le gouvernement fédéral s'assure que l'ensemble de la population ait accès en tout temps aux renseignements essentiels dans la langue officielle de son choix, peu importe où les personnes se trouvent au pays ».
Étant donné que les communications initiales en matière de santé se sont faites uniquement en anglais et que, dans votre présentation, vous avez reconnu que la langue est un enjeu de sécurité, vous donnez un peu raison au commissaire aux langues officielles selon lequel, en temps de crise, les langues officielles prennent le bord. Je me serais attendu à plus de transparence.
Pourquoi ne pas reconnaître que vous auriez pu faire mieux, par exemple, en communiquant davantage en français pendant cette période critique? Vous pourriez ainsi, justement, corriger le tir lorsque surviendrait une prochaine situation d'urgence.
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Merci, monsieur le président.
Je peux répondre en premier et je céderai ensuite la parole à ma collègue.
La communication dans les deux langues officielles est toujours une priorité pour nous, à Santé Canada. Au début de la pandémie de COVID‑19, la situation était nouvelle pour tous, et c'était certainement un défi que de répondre à toutes les demandes de production de documents.
Nous avons quand même fait beaucoup d'efforts pour augmenter notre capacité afin de nous assurer de continuer de communiquer dans les deux langues officielles en tout temps. Nous avons notamment ajouté des services de traduction au sein du ministère. De plus, nous avons des offres à commandes avec plusieurs entreprises de traduction pour obtenir des services supplémentaires. Nous continuons d'examiner tous les moyens possibles pour faciliter la communication avec le public dans les deux langues officielles.
Je veux aussi mentionner que, quand nous publions des documents ou des communiqués à l'intention du public, que ce soit sur le Web ou ailleurs, ceux-ci sont toujours publiés dans les deux langues officielles, et ce, en même temps.
Je cède maintenant la parole à ma collègue.
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Merci, madame la sous-ministre.
En tant qu'organisme de réglementation en matière de produits de santé, Santé Canada doit communiquer de façon régulière, notamment avec les industries réglementées, par exemple, pour leur faire part des mesures d'assouplissement que nous avons mises en place rapidement afin d'accélérer l'accès aux produits de santé essentiels pour combattre la COVID-19.
Par ailleurs, nous devons communiquer rapidement avec les consommateurs, par exemple, s'il y a des produits qui posent un risque pour la santé. À cette fin, nous utilisons notre site Web. Nous devons également communiquer cela aux professionnels de la santé, ceux qui administrent ces produits de santé ou qui travaillent dans les hôpitaux et dans les centres de soins de longue durée, afin qu'ils aient l'information nécessaire pour se protéger eux-mêmes et protéger leurs patients.
Dans tous les cas, l'information est disponible sur notre site Web dans les deux langues officielles. Nous envoyons également par courriel l'information concernant les nouvelles politiques aux industries que nous réglementons, et ce, de façon bilingue.
Alors, je peux vous assurer que nous prenons au sérieux notre rôle de réglementer les produits de santé dans un environnement bilingue et que nous nous conformons aux exigences de la Loi sur les langues officielles.
Je sais que vous avez à cœur d'offrir des services aux consommateurs et aux industries dans les deux langues officielles, mais notre étude porte sur la pandémie. Dans ce cas, votre public, c'était la population canadienne qui était exposée à un risque, et qui l'est toujours, d'ailleurs. Comme vous le savez bien, nous sommes à la fin de la deuxième vague; nous ne souhaitons pas qu'il y en ait une troisième.
Or, durant cette période critique, la responsable des communications en matière de santé avait du mal à s'exprimer en français. Je vous propose de nous donner des solutions pour éviter qu'une telle situation se reproduise. Nous devons apprendre des erreurs qui ont été soulignées par le commissaire aux langues officielles. En situation de crise, comme vous l'avez reconnu, on se tourne vers ce qui nous rassemble, et notre langue maternelle est extrêmement importante.
Ce que je veux dire, c'est que, si vous communiquez dans les deux langues officielles en temps normal et que, en temps de crise, vous négligez une langue, on met à risque la santé et la sécurité de certains citoyens. C'est ce que nous avons entendu de la part du commissaire. Nous voulons éviter que cette situation se reproduise et que les francophones soient traités comme des citoyens de seconde classe au pays.
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Merci, monsieur le président.
Je note qu'il s'est écoulé 12 minutes entre la première et la dernière question de mon collègue, M. Blaney. J'aimerais qu'on m'alloue le même temps de parole, s'il vous plaît.
Madame Aung‑Thin, vous avez d'entrée de jeu dit une phrase qui m'a beaucoup marqué, moi qui suis un francophone hors Québec d'une province dite bilingue, le Nouveau-Brunswick. Dès le début, vous nous avez dit que, pour Santé Canada, communiquer dans les deux langues officielles est une pratique essentielle et non seulement une obligation juridique.
Cela me met dans le contexte d'une offre proactive, où on n'attend pas de se faire fouetter, pincer ou taper sur la main pour remplir ses obligations linguistiques. Vous le faites de façon proactive avant même d'avoir cette obligation juridique.
Pour revenir un peu sur les commentaires de mon collègue M. Blaney, le commissaire aux langues officielles a quand même pointé du doigt Santé Canada en ce qui a trait à sa capacité de communiquer dans les deux langues officielles dès le début de la pandémie. Toutefois, le commissaire nous a dit que Santé Canada avait très rapidement corrigé le tir et il en semblait satisfait.
Cela étant dit, qu'est-ce qui a flanché? Comment est-ce possible que des produits de base comme ceux mentionnés n'aient été étiquetés que dans une langue officielle?
Vous avez mentionné des désinfectants, de l'antiseptique, des désinfectants ménagers ou des savons corporels, entre autres. Comment se fait-il qu'on ait été incapable, même en temps de pandémie, de se procurer de tels produits de base auprès des fournisseurs habituels qui font de l'étiquetage bilingue?
Ma question s'adresse peut-être davantage à Mme Bombardier.
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Oui, en effet. Je vous remercie de cette question.
Je donnerai un peu plus de contexte. Comme ma collègue l'a mentionné, il y a eu au début de la crise une demande extraordinaire pour ces produits, et particulièrement pour les antiseptiques pour les mains. Comparativement à l'année 2019, pour la même période, en mars, la demande était 7 fois plus élevée; aux mois de mai et de juin, elle était 11 fois plus élevée.
Je suis sûre que vous avez remarqué que, sur les étagères des supermarchés et des magasins, il n'y avait pas de produits antiseptiques et qu'il y avait très peu de désinfectants pour les surfaces. Au même moment, des exportateurs étrangers voulaient exporter ces produits au Canada. Or ils refusaient de les exporter avec des étiquettes bilingues, parce qu'ils n'avaient pas la capacité de le faire à ce moment-là.
En même temps, de petites entreprises canadiennes, telles que des distilleries et des brasseries, ont changé leur modèle d'affaires de façon temporaire pour aider la cause. La plupart d'entre elles étaient de petites entreprises qui distribuaient à l'échelle locale, dans leur quartier. On a alors permis à ces petites entreprises de distribuer les produits dans la langue officielle de leur région. Par exemple, si elles étaient situées à Saint-Jean-Port-Joli, elles pouvaient distribuer leurs produits avec des étiquettes en français. Si elles étaient établies dans une région bilingue, elles devaient obligatoirement avoir des étiquettes bilingues. Si elles étaient dans une région unilingue anglophone, les étiquettes pouvaient être uniquement en anglais.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, madame Aung‑Thin et madame Bombardier, d'être avec nous ce soir malgré l'heure tardive.
M. Barrière, de l'Alliance de la fonction publique du Canada, disait plus tôt qu'il y avait des problèmes relativement au bilinguisme et au respect du français, mais que cela variait d'une direction générale ou d'un ministère à l'autre. Il voulait séparer le bon grain de l'ivraie.
J'espère, mesdames, que votre ministère fait partie des bons élèves, et non des cancres. Nous lirons attentivement le rapport du commissaire aux langues officielles sur les résultats de son évaluation des différents ministères.
Je reviens sur la question de l'étiquetage. Vous deviez vous attendre à beaucoup de questions à ce propos aujourd'hui, puisque cela a fait les manchettes.
Comme le disait l'un des témoins, nous sommes tous pour le respect de la Loi sur les langues officielles, sauf quand il arrive un pépin technique, une crise ou une situation d'urgence. Pendant la crise liée à la pandémie, vous avez dû composer avec des besoins astronomiques quant à certains produits. Vous avez parlé de produits désinfectants et d'équipement de protection individuel, je crois.
Que prévoyez-vous faire pour éviter de mettre de côté le français chaque fois qu'il y a une situation urgence?
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Je vous remercie beaucoup de la question.
Je peux vous assurer que nous ne mettons pas le français de côté.
Comme je l'ai expliqué, plusieurs considérations entrent en ligne de compte au moment d'établir une nouvelle politique, particulièrement dans une situation d'urgence. Il y a notamment l'accès aux produits de santé pour prévenir les infections et aplatir la courbe. Nous savons que celle-ci a grimpé, surtout dans les premiers mois de la pandémie, et qu'elle a même continué de le faire plus tard.
Relativement à notre rôle de réglementation, il était important d'assurer que les produits de protection étaient offerts aux Canadiens, et particulièrement au personnel soignant de première ligne qui devait traiter des patients infectés ou considérés comme étant à risque au sein des populations vulnérables. Nous avons tenu compte de l'offre et de la demande, ce qui était très important. Nous avons d'ailleurs surveillé cela très étroitement. Dès que nous avons vu une stabilisation de la situation, nous avons rajusté nos politiques.
En aucun cas, nous n'avons permis que de l'information soit offerte seulement dans une langue. À partir du 8 juin, toutes les informations devaient être accessibles dans les deux langues officielles, que ce soit pour les produits désinfectants, les antiseptiques pour les mains, les savons ou les autres produits dont nous avons parlé jusqu'à présent.
J'ai été déçu et étonné de ce que vous avez dit plus tôt dans votre allocution, que vous nous avez d'ailleurs transmise et dont M. Arseneault a aussi pris connaissance. Vous avez écrit et dit: « [...] la langue officielle de choix des Canadiens n'est pas seulement une obligation juridique ou stratégique. Il s'agit d'une pratique essentielle en communications. »
Vous dites ailleurs: « [...] les institutions fédérales sont tenues de communiquer avec le public et de lui offrir des services dans les deux langues officielles [...] ».
Ailleurs encore, vous dites: « À titre d'exemple, chaque fois que nous publions un communiqué, une déclaration ou un autre document, nous le faisons en anglais et en français en même temps. »
Cela ne correspond pas à la réalité.
Cela n'a pas été la réalité à Vancouver. Je sais que la communauté francophone s'est retrouvée dans une situation difficile, beaucoup d'immigrants parlant seulement le français. Il y a eu beaucoup de frustration, parce que nous devions compter sur la province pour recevoir des informations. Heureusement, nous avons un ministre provincial qui parle les deux langues.
À mon avis, Santé Canada a vraiment failli à ses obligations à ce sujet.
Premièrement, mesdames, j'aimerais vous remercier de tout le travail qui a été fait.
Je représente la circonscription d'Orléans. Il faut dire que je suis une nouvelle élue au fédéral, alors les éléments que vous présentez me sont inconnus.
J'aimerais revenir en particulier sur un élément. Vous avez dit avoir accepté l'étiquetage en anglais dans les régions désignées unilingues. Pourtant, comme mes collègues l'ont mentionné, il y a des francophones partout au pays, même si le pourcentage n'est pas toujours suffisant pour que la région soit désignée bilingue.
D'une part, quelles leçons avez-vous tirées de la situation dont nous discutons aujourd'hui en matière de santé et de sécurité? D'autre part, comment allons-nous nous préparer pour l'avenir?
Je m'inquiète des règles que vous avez suivies pour la transmission de l'information dans les régions unilingues, où il y a peut-être aussi des francophones. C'est un enjeu qui a été soulevé dans la région et dans la circonscription d'Orléans.
J'aimerais vous entendre à ce sujet.
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Merci, monsieur Boulerice.
C'est tout le temps que nous avions en compagnie des représentantes du ministère de la Santé, soit Mme Pam Aung‑Thin, sous-ministre adjointe par intérim, Communications et affaires publiques, et Mme Manon Bombardier, sous-ministre adjointe par intérim, Direction générale des produits de santé et des aliments.
Mesdames, en mon nom et au nom des membres du Comité, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation et de vous être prêtées à l'exercice de témoigner devant nous ce soir. Je vous souhaite une excellente soirée.
Chers membres du Comité, je vous demande de rester ici pendant une dizaine de minutes.
Je vois que Mme Martinez Ferrada a la main levée.
Vous avez la parole, madame.