LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 juin 2021
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à la 39e séance du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.
[Français]
Conformément à l'article 108(3)(f) du Règlement, le Comité se réunit pour entendre des témoins dans le cadre de l'étude intitulée « Soutien fédéral pour les institutions postsecondaires de langue française ou bilingues en situation minoritaire ».
Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts pendant la séance. Je vous rappelle que toutes les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence. S'il y a un problème technique, n'hésitez pas à m'en informer.
[Traduction]
Je rappelle enfin à tous les participants et à l'assistance qu'il est interdit de prendre des photos ou de faire des captures d'écran.
[Français]
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Je les remercie d'avoir accepté notre invitation à comparaître devant le Comité.
Pour la première heure, nous accueillons, à titre personnel, M. Jean Poirier, ancien député provincial et ancien président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, ainsi que Mme Lynn Brouillette, présidente-directrice générale, et M. Martin Normand, directeur de la recherche stratégique et des relations internationales, tous deux de l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne. Nous recevons aussi M. Luc Bussières, recteur de l'Université de Hearst.
Je vois que Mme Marie-France Lalonde a la main levée.
Madame Lalonde, vous avez la parole.
Je vous remercie beaucoup. Excusez-moi, monsieur le président.
Je ne veux pas retarder les comparutions, mais nous avons reçu de la greffière une demande de comparution de l'Université d'Ottawa, en lien avec l'étude. J'ai parlé avec des représentants de l'Association des universitaires de la Faculté Saint‑Jean, qui ont rencontré M. Blaney et M. Godin pour demander une comparution. J'aimerais bien, si cela est possible, savoir ce qu'en pensent mes collègues.
Je vous remercie, Madame Lalonde.
Nous allons commencer par M. Godin, puis M. Blaney pourra s'exprimer.
Monsieur Godin, vous avez la parole.
En ce qui a trait à l'intervention de ma collègue Mme Lalonde, nous avons reçu la copie d'une demande que vous avez reçue, à titre de président, de l'Association des universitaires de la Faculté Saint‑Jean, afin d'ajouter Mme Chiara Concini comme témoin.
Le Comité a-t-il pris une décision quant à savoir si nous allons répondre à l'Association pour l'informer de la décision du Comité? Si le Comité accepte, cela se passera-t-il en comité ou en sous-comité?
Je serai bref, monsieur le président.
Hier, j'ai rencontré Mme Chiara Concini, de l'Association des universitaires de la Faculté Saint‑Jean. Je lui ai dit qu'il serait sans doute difficile de l'accueillir comme témoin.
Je lui ai quand même dit que j'allais à tout le moins suggérer aux membres du Comité qu'elle nous soumette un mémoire écrit, qu'il pourrait être intéressant d'examiner dans le cadre de notre étude. Nous pourrions faire de même pour l'autre témoin proposé par Mme Lalonde.
Nous pourrions aussi décider de tenir des réunions additionnelles, mais il semble que les travaux en Chambre pourraient rogner sur le temps de réunion en comité déjà prévu, du moins la semaine prochaine. Il faudra peut-être prendre cinq minutes, sans les témoins, pour en discuter entre nous.
Je vous remercie.
Je vais consulter la greffière, mais je veux tout simplement vous rappeler que nous avons prévu quatre séances pour cette étude en comité et que c'est aujourd'hui la dernière séance.
Si nous avons le consentement des membres du Comité pour donner suite à la suggestion de M. Blaney, nous pourrions en discuter à huis clos et décider à quel moment la tenue de réunions supplémentaires pourrait être possible. C'est un peu compliqué, sur le plan de la technologie, puisque nous devons arrêter et que, pour revenir à huis clos, il faut de nouveaux mots de passe.
Je vais donc en discuter avec la greffière, puisque cela ne peut pas se faire maintenant. À la suite de cette rencontre, vous recevrez un courriel vous informant de ce qui peut être fait, si cela est le souhait de tous les membres du Comité. Cela convient-il à tous? D'accord.
Nous allons donc poursuivre la séance. Je tiens à rappeler aux témoins qu'ils disposent de cinq minutes pour faire leur déclaration d'ouverture et que je les avertirai lorsqu'il leur restera une minute pour leur présentation ou s'il ne leur reste plus de temps de parole, que ce soit pendant la présentation ou pendant la période de questions.
Monsieur Poirier, vous avez la parole pour cinq minutes.
Je vous remercie, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les députés, je tiens à vous remercier de l'occasion que vous m'avez offerte de m'adresser à vous.
Vous avez entendu, devant ce comité, de nombreuses statistiques sur la disparité du financement parmi les établissements d'enseignement postsecondaire au Canada ainsi qu'entre les établissements de langue française et de langue anglaise.
Je désire plutôt mettre l'accent sur les raisons pour lesquelles le gouvernement fédéral doit appuyer plus directement les collectivités de langue française hors Québec et repenser la méthodologie utilisée pour accorder du financement aux collectivités. En effet, répondre à cette question permet de mieux comprendre les enjeux liés à ce sujet.
Je milite depuis plus de 50 ans en faveur de la promotion et de la défense de la langue et de la culture françaises d'ici, à l'échelle locale et internationale. Je l'ai fait en tant que député à Queen's Park pendant quatre mandats. Je l'ai aussi fait à titre de président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, d'agent de développement communautaire, et ainsi de suite.
En tant que Franco-Ontarien de quatrième génération, je crois être en mesure de bien évaluer la situation passée, actuelle et à venir du français hors Québec.
Depuis plus de 262 ans, les francophones du Canada aspirent à une égalité réelle entre les deux groupes de langue officielle de ce pays. Cependant, cette égalité réelle tarde à se concrétiser. Il n'est pas nécessaire de détenir un doctorat en la matière pour comprendre la réalité de notre vécu. Il suffit d'éviter les textes d'histoire édulcorés parus au fil des ans, textes qui ont reçu la bénédiction des gouvernements, voire de l'Église, et qui ont fait l'objet de caviardage. Ces textes ont plané au-dessus de notre réalité, qui n'était pas toujours rose. Je parlerais même d'une francophobie institutionnelle et individuelle. Dans ces textes, on a évité soigneusement de décrire les obstacles réels auxquels nous devions faire face continuellement, cette réalité et cette francophobie, une génération après l'autre.
Des provinces ont même adopté des lois et des règlements pour bannir l'enseignement du français. Par exemple, nous, les Franco-Ontariens, avons été assujettis pendant des décennies à l'infâme Règlement XVII du gouvernement de l'Ontario.
Le symbole qui nous unit, en tant que francophones, est la fleur de lys. Cependant, si nous laissions à certains membres de la majorité le soin d'adopter un symbole qui représente davantage la façon dont ils perçoivent notre quête d'égalité, je suis certain qu'ils choisiraient un code barres, comme sur les produits. En effet, on nous perçoit comme un coût injustifiable, une dépense frivole ou un gaspillage de fonds publics. C'est ce que j'ai souvent entendu.
En ces temps où nous déplorons tous vivement l'horrible racisme qu'ont subi et subissent toujours les peuples des Premières Nations, les Noirs, les Asiatiques, les musulmans, et combien d'autres encore, il faudrait également comprendre et accepter que les francophones du Canada méritent eux aussi un slogan comme « French lives also matter ».
Vous avez été témoins de la façon dont le gouvernement de l'Ontario a cessé d'appuyer la mise sur pied de l'Université de l'Ontario français et de la manière dont il a aboli le poste de commissaire indépendant aux services en français. Vous avez vu comment l'Université Laurentienne, pourtant bilingue, a sabré de façon peu équitable et honteuse les programmes en français; comment le Campus Saint‑Jean, à Edmonton, se trouve au bord du gouffre; et comment un comité consultatif, à Terre‑Neuve‑et‑Labrador, a même proposé d'abolir les conseils scolaires francophones et anglophones.
Les gouvernements provinciaux refusent toujours de comprendre, d'accepter et de mettre en œuvre leur rôle, leurs devoirs et leur engagement envers leurs propres collectivités de langue française. Voilà pourquoi le gouvernement fédéral, dans sa mission pour atteindre une égalité linguistique réelle au pays, doit s'investir et assurer que les collectivités francophones peuvent bénéficier pleinement de programmes en français au niveau postsecondaire.
La Loi sur les langues officielles doit mieux refléter les besoins réels de nos collectivités de langue française. Puisque nous ne bénéficions toujours pas d'un statut de pleine égalité linguistique, il faut que les changements à la Loi puissent être appliqués de façon asymétrique, s'il le faut, pour se conformer à nos besoins distincts et urgents, car nous sommes toujours en mode de rattrapage.
Je vous remercie de votre attention.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Poirier.
J'en profite pour vous féliciter de vos services en tant que député pendant quatre mandats. Bravo!
Madame Brouillette, de l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, je vous cède maintenant la parole pour cinq minutes.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui.
L'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, ou ACUFC, regroupe les 22 établissements d'enseignement postsecondaire francophones ou bilingues situés dans huit provinces au Canada. Notre mission est d'accroître l'accès à l'enseignement postsecondaire en français dans les communautés francophones en situation minoritaire, et de représenter l'intérêt collectif de nos membres auprès des institutions fédérales.
Dans le temps alloué, je veux présenter quatre idées principales au Comité. Le mémoire que nous avons remis au Comité en donne les détails.
Première idée: Les communautés francophones et la clientèle étudiante sortent perdantes lorsque les gouvernements se lancent la balle concernant le financement de l'éducation postsecondaire. Aujourd'hui, je veux présenter notre point de vue sur ce que peut et doit faire le gouvernement fédéral pour agir directement sur les enjeux de financement.
Deuxième idée: Selon nous, le gouvernement doit penser à d'autres façons de faire les choses pour fournir le soutien fédéral aux établissements d'enseignement postsecondaire. Le principal véhicule utilisé par le gouvernement fédéral pour appuyer les établissements d'enseignement postsecondaire dans nos communautés est le Programme des langues officielles dans l'enseignement, ou PLOE. Comme vous le savez, ce programme s'ajoute au financement fourni par les provinces. Il y a beaucoup de bonnes choses dans ce programme qui doivent être maintenues. Toutefois, ce programme a plus de 50 ans, et il est opportun de voir s'il répond toujours aux besoins des établissements d'enseignement postsecondaire.
Troisième idée: Nous n'avons aucun doute que le gouvernement fédéral a le droit d'offrir un soutien direct aux établissements d'enseignement postsecondaire francophones et bilingues en situation minoritaire sans porter atteinte aux compétences provinciales en éducation. Je m'explique. Nos établissements desservent les minorités francophones au Canada. Ils ont une mission civique différente des établissements qui desservent la majorité. Ils doivent assumer des responsabilités et remplir des fonctions supplémentaires. Les initiatives que doivent mettre en œuvre nos établissements d'enseignement postsecondaire pour accomplir cette mission civique relèvent directement des compétences fédérales. Je vous donne trois exemples.
Premier exemple: Nos établissements d'enseignement postsecondaire doivent contribuer de façon particulière à la vitalité des minorités francophones. Le gouvernement fédéral est fiduciaire de cette vitalité, et il a l'obligation d'agir à cet égard. C'est un champ de compétence fédérale.
Deuxième exemple: Nos établissements doivent accroître le taux de bilinguisme français et anglais au pays. La croissance du taux de bilinguisme individuel est un objectif du gouvernement fédéral, et ce dernier doit trouver des moyens novateurs pour le réaliser. C'est un autre champ de compétence fédérale. Nos établissements peuvent aider le gouvernement à réaliser cet objectif.
Troisième exemple: Nos établissements offrent les structures nécessaires pour accueillir la clientèle internationale. Ils nouent des partenariats avec des organismes d'établissement dans la transition vers la résidence permanente. Le gouvernement fédéral occupe le champ de compétence de l'immigration francophone, parce qu'il s'est fixé une cible à atteindre. Là encore, c'est un champ de compétence fédérale.
Quatrième idée: Nous faisons le constat que la volonté politique évolue plus rapidement que les véhicules administratifs, c'est donc sur ce plan que le gouvernement doit agir. À cette fin, nous vous demandons de faire trois recommandations dans votre rapport au gouvernement.
Première recommandation: Que le gouvernement adopte un règlement d'application de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Deuxième recommandation: Que le gouvernement fédéral adopte un énoncé de politique publique qui appuie le secteur postsecondaire en contexte francophone minoritaire dans ses sphères de compétence.
Troisième recommandation: Que le gouvernement élabore un programme permanent d'appui aux établissements d'enseignement postsecondaire en contexte francophone minoritaire afin d'agir sur les catégories de besoins en lien avec les compétences fédérales.
Pour conclure, je dirai que le gouvernement doit agir, parce qu'il énonce sans équivoque, dans son document sur la réforme des langues officielles, que les communautés ne peuvent être fortes que si les institutions le sont aussi. Il faut éviter qu'un affaiblissement des établissements d'enseignement postsecondaire en contexte francophone minoritaire au Canada n'entraîne avec lui la vitalité des communautés.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Je vous remercie beaucoup, madame Brouillette.
Je rappelle aux membres du Comité que Mme Brouillette est accompagnée de M. Normand.
Nous accueillons maintenant le recteur de l'Université de Hearst.
Monsieur Bussières, vous avez la parole pour cinq minutes.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie les vice-présidents et tous les membres du Comité de m'avoir invité à comparaître devant eux aujourd'hui.
D'entrée de jeu, je sens le besoin de vous tracer un portrait rapide de l'Université de Hearst, qui reste, aujourd'hui encore, relativement méconnue en dehors des frontières du Nord de l'Ontario et de l'Ontario. L'Université de Hearst a pourtant 68 ans d'histoire de services aux francophones derrière elle. Pour l'illustrer, on peut retenir quelques dates marquantes. D'abord, la fondation du Séminaire de Hearst en 1953, pour rendre, à l'époque, les études secondaires accessibles aux francophones. Il y a ensuite le changement de nom et de statut, en 1959, où le Séminaire devient le Collège de Hearst, cette fois, pour permettre la poursuite d'études universitaires en français. En 1972, au cours de la troisième étape, l'établissement s'est transformé et est devenu le Collège universitaire de Hearst, et il sera dorénavant reconnu par la province comme un établissement public. Depuis lors, nous recevons notre financement directement de la province, sans passer par l'intermédiaire de l'Université Laurentienne avec qui nous sommes affiliés depuis 1963. Notre affiliation à l'Université Laurentienne est donc, depuis cette date, de nature universitaire et non financière. En 2014, la province nous a autorisés à adopter le nom officiel, soit Université de Hearst.
Finalement, tout récemment, le 3 juin dernier, l'Assemblée législative de l'Ontario a adopté le projet de loi 276, qui accorde une charte universitaire autonome à l'Université de Hearst. Une fois ce processus arrivé à son terme, notre entente d'affiliation avec l'Université Laurentienne sera caduque. Nous rejoindrons alors le groupe de la vingtaine d'universités autonomes de l'Ontario.
L'Université de Hearst est donc fortement enracinée dans le Nord-Est ontarien avec ses trois campus, soit Hearst, Kapuskasing et Timmins. Notre contribution au développement éducationnel, social, culturel et économique des francophones y est largement reconnue depuis très longtemps par nos multiples partenaires.
Une organisation comme la nôtre se doit en plus d'être très bien connectée à son environnement et prête à s'adapter sous peine de ne pouvoir survivre aux changements sociaux, démographiques, économiques et politiques. En ce sens, en 2014, nous avons complètement renouvelé notre modèle d'offre de services postsecondaires. Je vous en résume les résultats. D'abord, une augmentation de 125 % de nos inscriptions, de 2014 à aujourd'hui, et ce, malgré une démographie qui joue contre nous dans le Nord de l'Ontario. Deuxièmement, une clientèle internationale, recrutée dans 25 pays, qui représente aujourd'hui 60 % de toute notre population étudiante. Troisièmement, tout cela avec l'offre de seulement 3 programmes de 1er cycle.
Malgré notre histoire de près de 70 ans, et malgré notre résilience et notre capacité d'innover, notre situation financière a toujours été, et demeure, une source permanente d'inquiétude. De 2011 à 2021, par exemple, nous avons connu sept budgets déficitaires. Notre budget annuel est de l'ordre de 8,5 millions de dollars. Nous générons à peu près le tiers de nos entrées de fonds. Le reste provient essentiellement de subventions, soit 5,8 millions de dollars. La part du fédéral, par l'intermédiaire du Programme des langues officielles dans l'enseignement, nous apporte à peu près 450 000 $. Ce montant n'a pas varié depuis 2003, et il représente moins de 8 % du total de nos subventions.
Cela étant dit, pour jouer le rôle que l'on attend de nous, nous avons besoin d'être beaucoup mieux soutenus par le gouvernement fédéral, en particulier, qui doit investir pour consolider les piliers institutionnels des communautés francophones. Nous sommes les alliés naturels du fédéral pour assurer la vitalité des communautés minoritaires, la formation d'une main-d'œuvre bilingue et l'atteinte des cibles en matière d'immigration francophone, notamment. La responsabilité fédérale en matière de protection, de promotion et d'épanouissement de la dualité linguistique est ici en jeu. En conséquence, nous avons besoin que le Programme des langues officielles dans l'enseignement soit plus généreux et que des mesures de réparation soient créées pour redresser les effets du gel prolongé de cette contribution fédérale. Nous avons aussi besoin que de nouveaux programmes permanents soient mis en place en appui aux établissements d'enseignement postsecondaire en contexte minoritaire.
En conclusion, je dirai qu'il devient impératif d'agir pour éviter que l'affaiblissement de nos établissements communautaires n'entraîne avec lui l'érosion de la vitalité de nos communautés, comme l'a souligné Mme Brouillette. Une intervention rapide et musclée du gouvernement fédéral, par sa réforme de la Loi sur les langues officielles, peut avoir, au contraire, un effet structurant et durable sur l'avenir de la dualité linguistique au pays.
Nous comptons sur vous pour nous aider à y contribuer.
Je vous remercie de votre attention.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Bussières.
Tous les témoins ont respecté le temps de parole qui leur était alloué.
Je souhaite aussi la bienvenue à cette séance à notre collègue M. Arif Virani.
Nous passons maintenant à la période de questions de six minutes.
Je présume que c'est M. Blaney qui va commencer. Veuillez nous indiquer à qui s'adressent vos questions.
Monsieur Blaney, vous avez la parole.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je vais poser la même question aux trois témoins, selon leur ordre de comparution, mais je veux d'abord leur dire que chacun de leur témoignage était de la musique à mes oreilles.
Madame Brouillette, je sais que vous avez parlé à mon adjoint. Je n'ai pas eu l'occasion de vous rencontrer virtuellement, mais je suis content de pouvoir le faire aujourd'hui.
Monsieur Poirier, je vous remercie de votre militantisme. Ce qui m'a vraiment plu dans votre allocution, c'est que vous avez parlé d'une égalité réelle pour les communautés en situation minoritaire, mais vous avez dit qu'une approche asymétrique peut être nécessaire.
Je vais être à la Chambre tout à l'heure, et nous réalisons ce que vivent vos communautés. Je suis Québécois et je réalise que nous vivons, vous et moi, la même chose et que la réalité nous rattrape.
Madame Brouillette, vous dites que le fédéral doit s'engager de façon concrète. Nous ne sommes pas ici pour faire le procès des provinces. Elles ne sont pas parfaites et elles ont des contraintes.
Au fédéral, nous devons voir comment nous pouvons élaborer, dans le cadre de la Loi sur les langues officielles et de nos responsabilités constitutionnelles, des mécanismes permettant de financer davantage cet élément fondamental qu'est notre dualité linguistique. Cela était justement le sujet dont a parlé M. Bussières, qui attend un meilleur soutien structurel de la part du gouvernement fédéral.
Ma question s'adresse donc à chacun d'entre vous. Je commence par M. Poirier.
Monsieur Poirier, avez-vous déterminé des mécanismes, des cibles, des coûts? Entrevoyez-vous une formule de financement au prorata des étudiants? Comment le fédéral peut-il, selon vous, remplir de façon asymétrique son obligation constitutionnelle de soutenir les établissements d'enseignement?
Avant que vous répondiez à ma question, je veux vous dire que notre comité a commencé l'étude sur l'Université Laurentienne, qui vivait une crise. Or, cette crise n'est que la pointe de l'iceberg. Quand nous écoutons les gens de Moncton, nous entendons le même discours préoccupant. Le Campus Saint‑Jean vit la même réalité.
Nous sentons donc vraiment que cette étude va être utile.
Ainsi, comment le fédéral peut-il structurer son aide? Quels mécanismes pouvons-nous mettre en place pour obtenir une formule de financement stable et équitable, qui répond aux besoins des collectivités en situation minoritaire?
Monsieur Poirier, vous avez 30 secondes pour répondre.
J'ai arrêté le chronomètre, parce que je veux aviser les membres que, compte tenu de l'heure, nous n'aurons qu'un tour de questions, de six minutes par groupe.
Je redémarre le chronomètre.
Monsieur Poirier, vous avez la parole.
Je vous remercie, monsieur le président.
Ce que vous proposez, monsieur Blaney, c'est un changement de philosophie qui puisse mener à une refonte en profondeur de la façon d'aider les collectivités francophones hors Québec.
Je ne peux pas vous dire aujourd'hui comment y parvenir exactement. Je vous demande cependant de vous pencher sur la question pour que vous puissiez, à la fin de vos travaux en comité, soumettre une proposition qui obtiendra l'appui des collectivités francophones, puisqu'elles auront senti et compris qu'elles ont réellement un appui.
Je le dis sincèrement, il va falloir que vous pensiez à une approche asymétrique, parce que la même approche pour tous les groupes, cela ne fonctionne pas. Les résultats et les statistiques du recensement de la démographie canadienne le démontrent. Comme l'aurait dit l'ancien animateur du Téléjournal, M. Bernard Derome, si la tendance se maintient, vous n'aurez plus d'étudiants et d'étudiantes dans les établissements d'enseignement postsecondaire de langue française.
Je n'ai pas à vous dire comment le faire, mais, de grâce, faites-le.
Je vous remercie, monsieur Poirier.
Madame Brouillette, j'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.
Je vous remercie beaucoup de la question.
Selon nous, il est évident que le fédéral a un rôle important à jouer. Ce qui est important dans ce rôle, c'est de bien définir les compétences du fédéral à l'égard des établissements d'enseignement postsecondaire.
Le gouvernement fédéral a le pouvoir d'agir, et il pourrait mettre en place un nouveau programme, ce que nous recommandons fortement, et revoir également le PLOE qui est en place.
Je vous remercie.
Cela tombe bien, car c'est exactement ce que notre chef veut proposer, soit un nouveau mécanisme de financement.
Monsieur Bussières, avez-vous des suggestions un peu plus concrètes à nous faire? Avez-vous un montant en tête pour votre université?
Quelle pourrait-être la contribution du gouvernement fédéral, laquelle pourrait peut-être être établie au prorata?
En plus d'une révision du PLOE, nous aurions besoin d'un nouveau programme qui aurait plus d'une facette ou plus d'un volet. En fait, cela prendrait une combinaison.
La situation des 22 établissements dont Mme Brouillette parlait tout à l'heure est assez différente. J'ai envie de dire que, pour les très petits établissements d'enseignement comme le nôtre, la formule établie au prorata n'est pas toujours le meilleur véhicule. Les grands établissements d'enseignement n'ont pas besoin de la même forme d'aide ou des mêmes volets d'aide.
Vous proposez donc, monsieur Bussières, un financement de base pour tenir compte de la taille de l'établissement d'enseignement.
Monsieur le président, il me reste une minute, et j'aimerais céder tout de suite la parole à mon collègue, même s'il reste peu de temps. Au moins, il pourra mettre son grain de sel.
Je vous remercie, monsieur le président et monsieur Blaney.
Ma question s'adresse à M. Bussières.
Monsieur Bussières, je comprends que votre université est de petite taille. Toutefois, pour ce qui est du financement, pourrait-il être déterminé en fonction d'un taux de performance?
Selon ce que je comprends de votre intervention et de celle des représentants des autres universités, c'est que ce n'est pas l'achalandage qui vous pose un problème. Il y a un intérêt pour le français.
Ne pourrait-on pas mettre sur pied un programme d'aide basé sur le taux de francisation? Cela ne constituerait-il pas un levier intéressant pour mettre en place un nouveau programme afin de motiver les gens?
Dieu sait qu'il existe quand même une concurrence entre les universités, mais il y aurait peut-être là une possibilité d'appuyer le développement et de protéger la langue française.
Qu'en pensez-vous?
Nous n'avons jamais eu de problème. Nous n'avons jamais reculé devant des défis pour ce qui est de devoir rendre des comptes. Par contre, notre population étudiante est complètement francophone. Nous pouvons difficilement la franciser mieux, mais nous pouvons contribuer au bilinguisme.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Bussières.
Nous allons passer à M. Lefebvre pour les six prochaines minutes.
Monsieur Lefebvre, vous avez la parole. Vous pouvez partager votre temps de parole.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je vais effectivement partager mon temps de parole avec Mme Lalonde.
Bonjour, monsieur Bussières.
Vous savez probablement que je suis originaire de Kapuskasing. Ma mère est une diplômée de l'Université de Hearst et de l'Université Laurentienne et elle était travailleuse sociale. Nous sommes très fiers de cela. Cela lui a permis de travailler de la maison. Je comprends donc l'importance des petites universités dans nos petits villages, et Hearst est reconnu comme étant le village gaulois de l'Ontario.
J'aimerais que vous nous parliez un peu de la résilience de votre petite université.
Comment avez-vous fait pour traverser les années difficiles?
De plus, que représente pour vous, potentiellement, l'aide supplémentaire de 121 millions de dollars sur les deux prochaines années et demie qui vient d'être annoncée dans le budget de 2020‑2021?
Comment cet investissement pourrait-il vous aider?
Je vous remercie de la question, monsieur Lefebvre.
En ce qui concerne la résilience, j'ai souvent dit que, si l'Université de Hearst est encore là près de 70 ans après sa fondation, c'est à cause de la force de l'impulsion donnée par les fondateurs de l'établissement. Deuxièmement, c'est à cause de la résilience de toutes les équipes qui se sont succédé. Troisièmement, c'est dû à notre capacité à innover et à rebondir. Cela est aussi de la résilience. Il a donc fallu déployer des trésors d'imagination pour y arriver tout en faisant preuve de beaucoup d'entêtement et de détermination.
L'idée d'avoir une aide potentielle supplémentaire de la part du gouvernement en lien avec les langues officielles est très encourageante. J'ai parlé de sept budgets déficitaires au cours des 11 dernières années. Notre façon d'y arriver, à part le travail acharné, c'est souvent d'aller chercher, du côté du gouvernement provincial ou ailleurs, des subventions ponctuelles, qui ne nous aident pas à assurer notre fonctionnement de base. C'est là que l'on s'ajoute du travail. Nous pouvons parfaire certaines facettes de notre établissement, mais nous ne sommes pas capables d'assurer le fonctionnement de base avec cela. C'est là que nous avons besoin d'un soutien supplémentaire, et pour nous, c'est la meilleure forme que cela pourrait prendre.
C'est important que les membres du Comité connaissent un peu votre réalité quant au manque à gagner que vous constatez en ce qui a trait au financement accordé par la province et le fédéral. Vous avez dit que vous aviez un budget de 8 millions de dollars. Seriez-vous plus à l'aise avec un budget de 9 millions de dollars?
Comment pouvez-vous agrandir votre université et favoriser son épanouissement?
Pourriez-vous nous parler des ressources dont vous disposez et de ce que vous seriez en mesure de faire si vous en aviez davantage?
En me fondant sur les calculs du Conseil des gouverneures et des gouverneurs, j'estime que nous avons un déficit structurel qui se situe probablement entre 600 000 $ et 1 million de dollars.
Ce montant nous permettrait de faire les choses correctement et de nous développer. Nous venons d'obtenir notre charte. Il est certain que tous les gens s'attendent à ce que nous développions notre programmation et nos services. Or, nous ne pourrons pas le faire avec les moyens dont nous disposons présentement. Nous continuons de peiner à assurer notre survie, année après année.
Je vous remercie encore une fois et je vous félicite pour votre charte. Je sais que vous attendiez cela. Je suis très fier de vous. Continuez votre beau travail.
Je cède maintenant la parole à Mme Lalonde.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Lefebvre.
Ma question s'adresse à Mme Brouillette.
Comme nous l'avons entendu dire, les provinces et les territoires présentent au fédéral des plans d'action dans lesquels ils précisent les champs d'action quant au financement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, ou CLOSM.
J'aimerais savoir où en sont les consultations entre les communautés issues de la minorité et leurs gouvernements provinciaux et territoriaux. J'aimerais aussi que vous nous parliez des groupes des conseils scolaires francophones, au primaire et au secondaire, de même que dans le milieu des études postsecondaires.
Savez-vous si le processus de consultation est le même auprès du milieu francophone?
C'est une bonne question, mais ce sont peut-être des membres de l'Association, comme M. Bussières, qui pourraient mieux vous parler des consultations avec les provinces.
Comme nous représentons les 22 établissements membres, je crois qu'il est important de retenir que les défis sont très variés, et ils sont multiples et profonds. Notre rôle consiste à trouver des solutions. Or, nous espérons que le fédéral appuiera notre réseau au cours des prochaines années.
Je pense qu'il en a été question plus tôt. Mon collègue a effectivement parlé du budget, soit des 121 millions de dollars destinés aux études postsecondaires. Dans le document sur la réforme de la Loi sur les langues officielles, on parle du continuum de l'éducation.
Madame Brouillette, quelques témoins ont souligné la nécessité d'établir un financement asymétrique dans l'intérêt des communautés de langue officielle en situation minoritaire. On fait valoir, en effet, que les systèmes anglophone et francophone ne devraient pas être financés de la même manière.
À part une augmentation du financement fédéral, quels changements cela entraîne-t-il pour le système d'études postsecondaires des provinces et des territoires?
On fait valoir la nécessité d'établir un financement asymétrique dans l'intérêt des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
À part une augmentation du financement fédéral, quels changements cela entraîne-t-il pour le système d'études postsecondaires des provinces et des territoires?
Je ne peux pas nécessairement me prononcer sur ce que cela peut représenter pour les provinces, étant donné que notre interlocuteur est plutôt le fédéral. C'est notre champ d'expertise, en quelque sorte.
Comme je le disais dans mon allocution, l'important sera de revoir les mécanismes administratifs. La volonté politique est là, c'est évident. Nous avons pu le constater. Il y a aussi l'aide supplémentaire de 121 millions de dollars dans le Plan d'action pour les langues officielles 2018‑2023. Les sommes sont intéressantes, mais ce sont les mécanismes administratifs qui doivent être mis en place.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie également tous nos témoins d'être des nôtres.
Ma première question s'adresse à M. Poirier.
Monsieur Poirier, vous osez nommer un phénomène qui est plutôt tabou, un peu comme l'éléphant dans la pièce, c'est-à-dire la francophobie. Or, toute l'histoire du Canada a été ponctuée de lois anti-français. Même aujourd'hui, le français est constamment mis de côté. Les établissements d'enseignement postsecondaire en français sont sous-financés.
Pourriez-vous nous donner plus d'exemples et nous dire ce que vous entendez par « francophobie »?
Je note que la francophobie est surtout présente dans les médias anglophones. Comme vous toutes et vous tous, je lis les articles qui sont publiés. Certains commentaires des lecteurs sont épouvantablement francophobes. Je ne comprends pas que la société anglophone permette de tels commentaires.
J'ai vécu cela pendant 50 ans. Même à Queen's Park, je me sentais comme un extraterrestre. Je ressemble au Colonel Sanders, le promoteur de la chaîne Kentucky Fried Chicken, mais il reste que je me sentais comme un extraterrestre. On entend toujours des questions et des commentaires désobligeants.
[Traduction]
Qu'est‑ce que le francophone veut? Vous ne parlez pas le véritable français.
[Français]
J'ai entendu des choses de la part de tous les partis, à tous les niveaux, des choses que je ne pourrais pas répéter. On avait oublié qu'il y avait un militant francophone dans la pièce. C'est toujours la même chose, et ce phénomène persiste. C'est comme si, au Canada anglais, toutes les phobies, sauf la francophobie, étaient absolument épouvantables. On tolère, on cautionne des attaques contre les francophones. Ce que j'ai vu à Queen's Park m'a vraiment déboussolé. Je pensais y trouver des appuis, mais j'ai passé mon temps à essayer d'expliquer ce qu'est la francophonie hors Québec, ce qu'est la francophonie au Québec, combien elles sont différentes et ont leurs propres particularités. J'ai compris qu'il y a deux sortes d'aveugles sur la planète. J'ai un immense respect pour les aveugles avec les cannes blanches. Pourtant, il y a des aveugles volontaires qui ne veulent pas voir ni accepter que nos besoins sont différents.
Comme M. Godin le disait, il faut que les établissements d'enseignement de langue française puissent avoir une attractivité égale à celle des établissements de langue anglaise. Si l'on faisait la liste des programmes offerts en français hors Québec et en anglais hors Québec, vous y verriez toute une disparité. Cela décourage bien des francophones.
Je reviens à la francophobie. Je n'accepte pas que l'on tolère cela aujourd'hui. Aucune phobie ne doit être tolérée, qu'elle soit dirigée contre les francophones, contre les musulmans ou contre les Noirs, peu importe. Il faut la condamner fermement.
Si la majorité ne veut pas comprendre que nos besoins sont différents, il va falloir que vous nous aidiez à le leur faire comprendre. On est en mode de rattrapage. Des petites universités comme celle de Hearst ont besoin d'une aide spéciale pour les aider à lancer des programmes variés, de qualité et en grand nombre. Quand vient le temps pour les jeunes de choisir une université, ils doivent pouvoir se dire que cela vaut la peine d'aller étudier dans une université de la francophonie.
Que pensez-vous du fait que, au Québec, les universités et les cégeps anglophones sont surfinancés? Les universités anglophones ont reçu, de 2010 à 2017, 38,4 % des subventions fédérales.
Quand vous parlez d'asymétrie, parlez-vous de cela?
Je parle de cela, entre autres choses.
J'ai lu le rapport que l'un des témoins vous a présenté la semaine passée et j'y ai vu les statistiques. Ces montants font rêver les francophones hors Québec. J'aimerais bien mettre la main sur ce type de montants. Malgré tout le respect que j'ai pour les universités de langue anglaise, il y a une disproportion évidente, d'où mon souhait que l'on adopte une approche asymétrique pour aider les francophones à atteindre cette égalité ou cette réalité dont tout le monde parle et pour laquelle tout le monde se pète les bretelles.
Il faut mettre cela en pratique. Si cela signifie prendre un peu d'argent des grands établissements d'enseignement qui ont des réseaux anciens depuis bien longtemps, faisons-le. Ils sont établis depuis bien longtemps, et ils ont de grands réseaux qui financent ou qui aident à financer leur établissement. Nous n'avons pas ces réseaux. Nos établissements sont récents, ils sont nouveaux. Nous partons de zéro, dans certains cas.
Quand j'ai vu ces chiffres, la tête me tournait. Je me demandais ce que je voyais. C'était comme un billet de loterie gagnant.
La différence entre ce qui est donné aux anglophones du Québec et ce qui est accordé aux francophones hors Québec est énorme. Il faut revoir cela. Je vous invite à le revoir.
Je vous remercie, monsieur Poirier.
J'aimerais poser une question à M. Bussières.
Si je comprends bien, l'Université de Hearst vise à devenir une université par et pour les francophones. C'est un peu comme dans le cas de l'Université de Sudbury.
Pouvez-vous nous parler de l'importance des établissements d'enseignement postsecondaire par et pour les communautés francophones et acadienne?
Je vous remercie de la question.
D'abord, dans notre section de l'Ontario, c'est le Grand Nord. Quand on parle de Sudbury, c'est le Moyen-Nord. Plusieurs témoins en ont fait mention.
Si l'on posait la question ici, dans le Grand Nord, nous répondrions que, évidemment, cela a changé bien des choses. Dans le cadre des consultations sur la création de l'Université de l'Ontario français, qui se sont déroulées à partir de 2017, on nous a demandé ce que nous en pensions. Nous avions répondu à ce moment-là que, si nous n'avions pas eu ce type d'établissement d'enseignement dans le Grand Nord, nous aurions grandement revendiqué le droit d'avoir quelque chose comme cela. Nous allions certainement appuyer la création d'une entité équivalente pour le Centre-Sud-Ouest, qui n'avait vraiment pas beaucoup de services. Voilà deux exemples. Maintenant, on se pose la question à Sudbury à cause de ce qui est arrivé quant à l'Université Laurentienne. Potentiellement, cela sera un troisième exemple.
Les francophones ont le réflexe et le droit de revendiquer, de mener les choses à leur manière et de s'assurer de répondre à leurs besoins.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Bussières, mardi dernier, nous avons demandé de but en blanc à certains de vos collègues du Campus Saint‑Jean de l'Université de Moncton si ce qui est arrivé à l'Université Laurentienne pourrait aussi leur arriver à court ou à moyen terme. Ils ont brossé un portrait assez sombre de la situation.
Dans le cas de votre propre université, partagez-vous leur point de vue?
Je vous remercie de la question.
En 2017, lorsque les conservateurs sont arrivés au pouvoir en Ontario, il y avait évidemment une ambition de regarder la situation dans tous les secteurs et tous les ministères. À ce moment-là, une réunion a été convoquée par le bureau du premier ministre Ford, qui portait sur notre université et sur sa pérennité, à cause de nos difficultés financières. Comme je le disais plus tôt, un peu trop d'années de déficit s'étaient accumulées. À une époque, nous avions des réserves, mais, à ce moment-là, nous n'en avions plus.
Depuis ce temps, nous avons réussi à redresser la situation, mais, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est surtout grâce à deux solutions qui sont seulement temporaires, soit la course aux subventions ponctuelles pour boucler l'année et le recours à un effort monumental de recrutement à l'international.
En 2013, nous n’avions aucun étudiant international, et maintenant, les étudiants internationaux représentent 60 % de notre population étudiante. Cela a pris tout un effort pour en arriver là. Nous avons dû mettre sur pied un paquet de nouveaux services et faire preuve d'une nouvelle sensibilité. Nous sommes très contents et très fiers de ce que nous avons fait, mais nous avons un peu atteint les limites de notre capacité à réagir.
La situation a toujours été inquiétante, ici, comme je l'ai dit, et elle le demeure. Elle est fragile, et si l'on y ajoute une situation comme la pandémie de COVID‑19 ou n'importe quelle autre situation imprévisible de la sorte, cela devient encore plus inquiétant.
Au cours de votre présentation, vous avez parlé du besoin d'être mieux soutenus par le gouvernement fédéral. Vous avez aussi parlé du besoin de nouveaux programmes permanents. Je veux juste être certain de bien comprendre.
Vous parlez bien de programmes de soutien de la part du gouvernement fédéral, et non de programmes de formation dans votre université, n'est-ce pas?
En fait, l'un peut être lié à l'autre. L'un peut provoquer l'autre. N'est-il pas vrai?
Oui, c'est tout à fait cela.
Nous aurions besoin de développer la programmation à l'Université. J'ai fait allusion au fait que nous sommes une petite université qui offre trois programmes de spécialisation. Nous voudrions bien développer cela davantage. Quand on parle d'une université comme celle de la communauté de Hearst, de Kapuskasing et de Timmins, on la juge un peu comme celles des grandes communautés, où on est fier d'avoir une université et où il y a des attentes. On crée des attentes, mais nous, nous les décevons, d'une certaine façon, parce que nous ne sommes pas capables de développer ces services à la hauteur des attentes des gens de nos régions et des communautés en situation minoritaire.
Nous avons donc besoin de programmes de soutien financier permanents pour nous sortir de cette situation de carence de financement. Lorsqu'il s'agit de financement ponctuel, il faut travailler pour aller chercher une subvention, et, ensuite, il faut répondre aux attentes qui y sont associées. Cela ne nous permet donc pas de travailler sur le développement à long terme de l'Université.
C'est la différence entre la mission de base et les projets particuliers. J'imagine que le financement par projet devient aussi fatigant sur le plan administratif, puisque cela crée des hauts et des bas.
Madame Brouillette, vous avez parlé de la responsabilité du gouvernement fédéral, notamment en ce qui concerne les langues officielles et la dualité linguistique. Vous avez dit que les collèges et les universités que votre association représente sont dans un contexte particulier et qu'elles ont des obligations particulières, lesquelles entraînent des coûts particuliers.
Je reviens à l'idée mentionnée par M. Poirier plus tôt, soit celle d'avoir un mécanisme asymétrique. Mme Adam en parlait également, au cours d'une récente réunion de notre comité. Il s'agit de sortir de la logique comptable, où il n'y a que le nombre qui compte, et de tenir compte de la mission et de l'importance de l'établissement d'enseignement pour la vitalité de la communauté francophone.
J'imagine que vous voyez aussi d'un bon œil ce mécanisme asymétrique. N'est-ce pas?
C'est exact.
Je pense qu'il faut envisager les choses sous plusieurs angles si l'on veut mettre en place des mécanismes qui appuieront le réseau des collèges et universités francophones, dont les défis sont très différents d'une région à l'autre.
Pour revenir à certains éléments abordés par des témoins, j'aimerais aussi souligner que les programmes d'études offerts en français à l'extérieur du Québec ne représentent que 10 % de ceux qui y sont offerts en anglais.
C'est pour cette raison que les programmes offerts en anglais ont un pouvoir d'attraction si important. C'est de cela qu'il s'agit quand nous parlons de la vitalité des communautés. Nos établissements doivent mettre en place toutes sortes de programmes et de services pour appuyer les communautés. Mme Dyane Adam en parlait aussi, mardi dernier. Tous ces services ont des coûts, qui sont en lien avec la vitalité des communautés.
Selon nous, il ne fait aucun doute que l'offre de tels programmes et services rejoint les compétences du fédéral. S'il arrive à bien définir ses compétences, le fédéral pourra s'en servir pour mettre en place des mécanismes susceptibles d'appuyer les communautés.
C'est très bien. C'est ce que j'aurais voulu faire, mais il ne reste plus de temps pour lui permettre de poser une question.
C'est tout le temps que nous avons pour la première partie de la séance, chers témoins et chers membres du Comité.
Au nom de tous les membres du Comité et des spécialistes qui nous accompagnent, je tiens à vous remercier, chers témoins, pour votre contribution et à vous dire que, s'il y en a parmi vous qui n'ont pas présenté de mémoire, ils peuvent encore le faire et le transmettre à la greffière.
Je remercie M. Poirier, qui était ici à titre personnel comme ancien député provincial et ancien président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, ainsi que Mme Lynn Brouillette, présidente-directrice générale de l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, qui était accompagnée de M. Martin Normand, directeur de la recherche stratégique et des relations internationales. Je remercie aussi M. Luc Bussières, recteur de l'Université de Hearst.
Je vais suspendre la séance pendant quelques instants, le temps d'accueillir les nouveaux témoins et de faire les tests de son.
Je souhaite une bonne fin de journée à nos témoins.
Nous reprenons la séance.
Je vous souhaite la bienvenue à cette 39e rencontre du Comité permanent des langues officielles. Nous sommes en train de faire l'étude intitulée « Soutien fédéral pour les institutions postsecondaires de langue française ou bilingues en situation minoritaire ».
Je veux de nouveau souhaiter la bienvenue à tous les membres du Comité et aux témoins.
Dans l'intérêt des témoins qui viennent de se joindre à nous, je vais répéter quelques consignes.
Vos interventions doivent être adressées à la présidence. Vous pouvez intervenir dans la langue officielle de votre choix, parce qu'il y a des services d'interprétation.
S'il y a un problème technique, faites-nous signe et nous allons y remédier rapidement.
[Traduction]
Je rappelle à tous les participants et à l'assistance qu'il est interdit de prendre des photos ou de faire des captures d'écran.
[Français]
Je souhaite donc la bienvenue aux témoins et je les remercie d'avoir accepté l'invitation de participer à cette deuxième heure de la séance.
Nous accueillons Mme Linda Cardinal, professeure émérite à l'Université d'Ottawa, à titre personnel, M. Daniel Giroux, président du Collège Boréal, ainsi que M. François Hastir, administrateur agréé et directeur général du Regroupement étudiant franco-ontarien.
Vous disposerez de cinq minutes chacun pour faire votre présentation. Vous avez sûrement vu le petit carton, qui servira à vous aviser qu'il ne vous reste plus beaucoup de temps.
Madame Cardinal, vous avez la parole pour cinq minutes.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Chers membres du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, distingués invités et chers collègues, bonjour.
À titre d'introduction, j'aimerais souligner que, dans mon domaine de recherche, qui est notamment celui des politiques linguistiques, la question de l'éducation est un objet privilégié de recherche pour de nombreux chercheurs, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde. L'enseignement dans la langue de la minorité est aussi un droit très cher aux minorités. C'est par cet enseignement que passe une part importante de la production et de la reproduction du milieu minoritaire, de son identité ainsi que de ses aspirations et de ses perspectives de développement.
L'Université de Moncton est un bon exemple d'université qui participe pleinement au développement de sa communauté. Il ne faut pas non plus oublier l'Université Sainte‑Anne, située en Nouvelle-Écosse, l'Université de Saint‑Boniface, au Manitoba, et l'Université de Hearst, dont le recteur nous a d'ailleurs parlé tout à l'heure. C'est avec le même espoir que l'on s'attend à ce que l'Université de l'Ontario français joue le même rôle.
Il faut aussi rappeler le rôle clé que jouent les collèges francophones de partout au Canada, mais en particulier au Nouveau‑Brunswick et en Ontario, dans le développement des communautés francophones. Un enjeu important a aussi été soulevé quand on a parlé de l'enseignement supérieur en français, soit la gouvernance par et pour les francophones. C'est sans doute ce type de gouvernance qui distingue la majorité de nos établissements.
D'autres établissements ont fait le choix de se nicher dans de grandes universités, comme le Campus Saint‑Jean de l'Université de l'Alberta ou le Collège universitaire dominicain, à l'Université Carleton. Il y a aussi le Bureau des affaires francophones et francophiles à l'Université Simon Fraser et, enfin, l'Université d'Ottawa et l'Université Saint‑Paul, qui ont de leur côté fait le choix du bilinguisme institutionnel. En général, on parle actuellement d'une gouvernance par et pour les francophones. C'est un choix qui est privilégié par les principaux établissements d'enseignement de la francophonie canadienne.
Aujourd'hui, mon propos servira à voir avec vous les moyens qui permettent de favoriser cette gouvernance ainsi que de s'assurer que les établissements d'enseignement supérieur en français du Canada peuvent contrôler davantage leur développement. En outre, j'ai une recommandation à porter à votre attention, soit que le gouvernement canadien se dote d'une politique d'appui aux établissements d'enseignement supérieur en milieu minoritaire francophone, conformément à la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Le reste de ma présentation visera à vous expliquer cette politique.
D'abord, je dirai quelques mots sur le contexte qui est le nôtre aujourd'hui. Ce contexte est caractérisé par un alignement des acteurs qui est favorable aux langues officielles à la suite, notamment, de la prise de conscience concernant la difficile situation du français tant au Québec que dans le reste du Canada, en particulier en période de pandémie. Par ailleurs, des élections fédérales et provinciales sont en vue, et certaines questions liées au futur discours sur la rigueur budgétaire risquent de modérer nos ardeurs. Toutefois, un mouvement important pour la modernisation de la Loi sur les langues officielles a cours depuis quatre ans, et le document « Français et anglais: Vers une égalité réelle des langues officielles au Canada » a récemment été publié. Voilà des éléments importants à souligner.
De plus, on pourrait ajouter le rapprochement historique des francophones du Québec et du Canada et l'éventuelle adoption d'une politique, par le gouvernement du Québec, en faveur de la francophonie canadienne, le Sommet sur le rapprochement des francophonies canadiennes, qui aura lieu la semaine prochaine, et le projet de loi no 96, qui vise à moderniser la loi 101. On le voit, les possibilités d'action sont nombreuses.
Le gouvernement canadien et les minorités francophones s'accordent pour reconnaître que le principe d'égalité réelle doit guider la relance et la progression de l'égalité du français et de l'anglais. Je n'ai pas besoin de dire à quel point ce principe d'égalité est important, car vous en avez parlé tout à l'heure. Il s'applique de façon indéniable au domaine de l'enseignement supérieur en français au pays. Je mettrais par ailleurs l'Université d'Ottawa dans une catégorie à part en raison de sa taille, mais, dans l'ensemble, tous les établissements d'enseignement supérieur en français au Canada, hors Québec, sont des établissements qui ne comptent pas plus de 3 500 étudiants. Sur le plan financier, cela donne donc lieu à des enjeux très importants. L'Université d'Ottawa, quant à elle, fait partie du Regroupement des universités de recherche du Canada, ou U15. Quand elle parle de ses problèmes financiers, elle parle de problèmes qui ne sont pas du tout du même ordre que ceux des autres établissements.
Comme il me reste une minute...
Vous pourrez donc me poser la question.
La politique que je vous propose comporte trois dimensions. Ses fondements sont le premier élément, car une politique publique comprend trois éléments, soit une vision ou les fondements, des instruments de politique et des publics cibles. Les fondements consistent à reconnaître fondamentalement le rôle clé des universités et des établissements d'enseignement supérieur dans le développement des communautés. Une politique prendrait appui sur cette démarche.
J'attends vos questions avec impatience.
Je vous remercie, madame Cardinal. On va en effet vous poser des questions au cours de la prochaine heure.
Nous allons maintenant passer à M. Daniel Giroux, du Collège Boréal.
Monsieur Giroux, vous disposez de cinq minutes pour faire votre présentation.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais d'abord saluer Mme Marie‑France Lalonde et M. Paul Lefebvre, qui sont des amis de longue date du Collège Boréal.
En Ontario, il y a 24 collèges publics. Seuls deux collèges sont francophones, et le Collège Boréal est l'un des deux. Le Collège Boréal compte 38 centres d'accès, qui sont situés dans 26 communautés, partout en Ontario, de Windsor jusqu'à la petite communauté de Hearst, dont vous avez entendu parler tantôt lors d'une présentation. Nous couvrons donc un vaste territoire. Nous recevons chaque année un bulletin qui mesure cinq éléments, soit la satisfaction des étudiants, la satisfaction des diplômés, la satisfaction des employeurs qui embauchent nos étudiants, le taux d'obtention de diplôme et, une fois que les étudiants ont obtenu leur diplôme, s'ils se trouvent un emploi dans leur domaine. Il s'agit de cinq indicateurs de rendement.
Il y a 21 ans que les 24 collèges publics de l'Ontario reçoivent ce bulletin. Or, pour 19 de ces 21 années, le bulletin du Collège Boréal a été jugé le meilleur parmi ceux des 24 collèges de l'Ontario. C'est incroyable, dans le cas d'un aussi petit établissement. Cela démontre le pouvoir de la francophonie.
Il y a deux points que je veux aborder au sujet du Collège Boréal. Le premier concerne les bourses qui permettent d'étudier en français. Certaines ont été conçues pour les programmes d'immersion, dans les conseils scolaires anglophones. Ici, à Sudbury, se trouvent le campus principal du Collège Boréal et un collège anglophone. Or, les conseils scolaires francophones perdent encore des étudiants. En effet, 50 % d'entre eux choisissent encore d'étudier au collège anglophone, dans des programmes que le Collège Boréal offre également.
Je vous donne un exemple. Il y a plusieurs années, je me suis inscrit à un programme de commerce à l'Université Laurentienne. J'avais le choix d'étudier en français ou en anglais. J'avais alors 18 ans et je ne reconnaissais pas l'importance de poursuivre mes études en français. Ce qui m'a encouragé à le faire, c'est la bourse destinée aux études en français. Une fois diplômé, à l'âge de 22 ans, j'ai vraiment reconnu à quel point ces études m'avaient ouvert des portes, qu'il s'agisse de la culture, de la maîtrise de la langue ou des possibilités de carrière.
À l'âge de 18 ans, les étudiants sont bilingues. Ils peuvent choisir d'étudier en français ou en anglais. Cela peut s'avérer plus facile pour eux. La bourse destinée aux études en français, qui n'existe plus, serait absolument critique. Certains établissements peuvent se le permettre, mais ce n'est pas le cas des petits. C'est ma première recommandation. À mon époque, soit en 1988, cette bourse était de 1 000 $. Une bourse pour étudier en français qui représente moins de 3 000 $ changerait vraiment les choses pour les conseils scolaires francophones.
Le deuxième point concerne le financement de base. Je parle ici du Programme des langues officielles dans l'enseignement, ou PLOE. Nous recevons exactement le même financement depuis 2003. C'est donc dire que, 18 ans plus tard, en raison d'un taux d'inflation de 2 %, qui est cumulatif, le financement que nous recevons est pratiquement 45 % moins élevé que celui que nous recevions en 2003. Il y a donc du rattrapage à faire pour ce qui est du financement de base. Je ne parle pas ici de financement pointu, mais du financement de base qui nous permet de nous organiser, de nous préparer et de structurer de bons programmes. Le financement est absolument critique. Le financement de base, soit le PLOE, doit être augmenté de façon à suivre, au minimum, le taux d'inflation.
Je vous remercie de votre attention.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Giroux.
Je crois que tous les membres du Comité et tous les participants ont pu constater à quel point vous êtes fier du Collège Boréal.
Nous allons maintenant passer à M. François Hastir, du Regroupement étudiant franco-ontarien.
Monsieur Hastir, vous avez la parole pour cinq minutes.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je voudrais vous remercier de nous avoir invités aujourd'hui à représenter les étudiants francophones devant vous.
Le Regoupement étudiant franco-ontarien, ou RÉFO, est l'organisme porte-parole des plus de 22 000 étudiants francophones inscrits dans l'un des établissements d'enseignement postsecondaire francophones et bilingues de l'Ontario. Notre organisme a été créé en 2009 en réaction directe aux problèmes liés à l'assimilation vécue dans les établissements bilingues. Vous comprendrez donc que je parlerai beaucoup de ce sujet aujourd'hui.
En février dernier, la Laurentian University a annoncé qu'elle se plaçait à l'abri de ses créanciers en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, ou LACC, une loi conçue pour les entreprises privées. Elle a par la suite procédé à l'abolition de 28 programmes en français, au licenciement d'une centaine de professeurs et membres du personnel et à la résiliation de l'entente avec ses universités fédérées.
La Laurentian University a affirmé devant ce comité que seuls 10 % des étudiants seraient directement touchés par les coupes annoncées. Ce n'est pas l'opinion de notre organisme, et, en ce sens, j'aimerais vous raconter l'histoire de notre ancienne présidente, Mme Marie‑Pierre Héroux.
Marie‑Pierre est une étudiante engagée depuis son secondaire et en est à sa dernière année dans les programmes d'histoire et d'études françaises. Originaire de l'Est ontarien, elle a choisi la Laurentian University pour son modèle bilingue et elle a, au fil des années, développé un attachement profond à la communauté sudburoise.
Malheureusement, les deux programmes dans lesquels Marie‑Pierre étudiait ont été abolis. Tous les professeurs qu'elle a eus depuis son entrée à l'Université ont été licenciés. La résidence francophone dans laquelle elle habitait ferme également ses portes. De ses propres mots, ce sont tous les repères qu'elle s'était créés dans le milieu universitaire qui disparaissent du jour au lendemain.
Toutefois, Marie‑Pierre s'est fait confirmer par la Laurentian University qu'elle pourra obtenir les crédits qu'il lui reste parmi des offres très limitées de cours, dont le nombre et les sujets sont à ce jour inconnus. Elle n'est donc pas considérée, aux yeux de la Laurentian University, comme une étudiante directement touchée par les coupes. Cependant, je me permets de vous lancer ce sujet de réflexion: à titre de citoyens, d'anciens étudiants et de parents, considérez-vous vraiment que Marie‑Pierre ne subit aucune conséquence directe de ces coupes?
Poser la question, c'est y répondre.
Aujourd'hui, Marie‑Pierre envisage de transférer ses études à Ottawa et de quitter la région où elle aurait pu potentiellement faire sa vie. Elle vit avec une grande insécurité quant à la suite de ses études et à la valeur de son futur diplôme. Malheureusement, l'histoire de Marie‑Pierre n'est pas unique et elle démontre les limites des établissements d'enseignement bilingues, car non seulement la programmation francophone ne constitue pas toujours une priorité pour ces établissements, mais leur contexte bilingue fait en sorte que plusieurs programmes se retrouvent sous la direction de responsables venant de la communauté majoritaire, qui ne sont pas outillés pour comprendre la complexité des réalités francophones.
La culture de ces universités tend à analyser l'obsolescence des offres de cours en fonction de critères tels que le nombre d'inscriptions, les retombées économiques et les coûts de maintien. Ces critères, bien qu'importants, ne permettent pas d'évaluer l'apport réel de ces cours à la vitalité culturelle et linguistique chez les francophones ni leur capacité à contrer l'exode et l'assimilation. Ainsi, plusieurs des programmes aujourd'hui abolis ont été essentiels à la création d'initiatives et d'organismes vitaux pour la communauté franco-ontarienne.
Finalement, les établissements d'enseignement bilingues, bien qu'ils offrent leurs cours en français, offrent une vie universitaire et un campus où la majorité des activités se déroulent en anglais, ce qui contribue directement à l'assimilation des étudiants. Il est donc primordial que le gouvernement fédéral travaille de concert avec la province afin d'assurer le développement et l'autonomisation d'établissements universitaires gérés par, pour et avec les communautés francophones et étudiantes de l'Ontario.
Il est également crucial que le gouvernement fédéral agisse pour s'assurer qu'une situation comme celle de la Laurentian University ne se reproduise pas. Pour ce faire, il peut agir sur trois plans.
Sur le plan juridique, le gouvernement peut agir en adoptant une loi pour empêcher que d'autres établissements d'enseignement publics ne se placent sous la protection de la LACC. Il peut également s'assurer que la refonte de la Loi sur les langues officielles fait en sorte que celle-ci balise mieux les obligations des établissements qui reçoivent des fonds provenant du PLOE ou de programmes destinés aux CLOSM.
Sur le plan financier, le gouvernement doit veiller à demander une meilleure reddition de comptes en lien avec les transferts provenant du PLOE afin, notamment, d'assurer que l'argent distribué n'est pas dépensé à d'autres fins que celles prévues par le programme et la feuille de route. Il lui est également suggéré de prévoir une enveloppe spécifique dans cette entente pour les organismes francophones qui agissent dans le secteur de l'éducation. Cette enveloppe leur permettrait d'augmenter la portée de leurs initiatives pour contrer l'assimilation, renforcer la culture identitaire francophone chez les étudiants et créer des outils permettant de récolter plus de données probantes afin d'évaluer la vitalité linguistique sur les campus bilingues.
Finalement, en ce qui concerne la situation spécifique de la Laurentian University, il lui est demandé de mettre sur pied dès que possible un programme d'appui financier avec la province afin d'instaurer un moratoire sur les cours et les programmes offerts à la Laurentian University et afin d'appuyer financièrement la transition de ces programmes, cours et ressources vers l'Université de Sudbury, qui est un établissement entièrement francophone.
Le RÉFO va déposer un mémoire à votre intention pour donner suite à la comparution d'aujourd'hui et afin de traiter en profondeur des sujets discutés.
Je vous remercie de votre attention.
Je serai heureux de répondre à vos questions.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Hastir.
Nous allons passer à la période de questions. J'avise les membres du Comité que le premier tour de questions sera de six minutes, et que la durée du deuxième tour sera réduite.
Monsieur Dalton, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
Je vous remercie.
Je remercie tous les témoins de leur témoignage. Leur passion pour le sujet est très évidente.
La semaine passée, on nous a dit que, en 1982, quand la Charte canadienne des droits et libertés a été créée, 37 % des étudiants du niveau secondaire poursuivaient leurs études au niveau postsecondaire. À l'heure actuelle, ce pourcentage atteint 72 %. Beaucoup plus d'étudiants du niveau secondaire poursuivent leurs études au niveau postsecondaire.
Cependant, la Charte protège les droits linguistiques des étudiants du niveau secondaire, mais pas ceux des étudiants du niveau postsecondaire. Il s'agit d'un problème qui nous concerne tous.
Pourriez-vous nous parler davantage de la vitalité des communautés et du nombre d'inscriptions dans les établissements postsecondaires francophones en Ontario? Mardi passé, nous avons entendu les représentants du Campus Saint‑Jean, qui ont constaté une augmentation. Y a-t-il un déclin, est-ce stable ou y a-t-il une augmentation?
Madame Cardinal, avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
Je vous remercie de la question.
En Ontario, un rattrapage très important a été fait en matière d'accès à l'éducation en français. Toutefois, il y en a encore à faire. Quand on perd un établissement comme l'Université Laurentienne et qu'il n'y en a pas pour le remplacer, on s'attend à ce que soit fondé un établissement ailleurs, par exemple à Sudbury, pour les francophones, qui est géré par et pour les francophones. On constate que l'accès à l'éducation en français peut reculer.
À l'Université d'Ottawa, à peu près 15 000 étudiants francophones réussissent à accéder à l'enseignement supérieur, bien que ce ne soit pas toujours en français, nous en convenons. Or l'Université offre un ensemble de programmes en français et nous venons de créer un nouveau programme en pharmacologie au premier cycle.
Il s'agit d'un problème continuel. En Ontario, la question de l'accessibilité aux études supérieures est fondamentale à cause du Règlement XVII dont parlait M. Poirier. Ce problème existe partout au pays, notamment au Nouveau‑Brunswick et au Québec. Les francophones ont un rattrapage historique à faire en matière d'enseignement supérieur et la situation demeure fragile. On constate que l'accessibilité aux études postsecondaires en français recule très facilement.
Cela nécessite une action constante de la part des gouvernements, notamment des gouvernements provinciaux, parce que, comme on le sait, l'enseignement supérieur est un champ de compétence provinciale. C'est donc délicat pour le gouvernement fédéral d'intervenir dans ce domaine. Par ailleurs, certaines provinces doivent reconnaître leur rôle dans le financement de l'enseignement supérieur en français.
Le fédéral a un rôle à jouer et c'est pour cette raison que je vous ai proposé une politique tout à l'heure. Un aspect très important qui ne se retrouve pas ailleurs se retrouve dans les établissements en milieu minoritaire, et c'est le rôle que ces établissements jouent dans le développement et l'épanouissement des communautés. Les universités et les collèges sont devenus les nouveaux centres culturels de la francophonie canadienne. L'arrivée des immigrants et les rapports avec les employeurs passent par ces établissements.
Aujourd'hui, les universités en milieu minoritaire ne sont plus seulement des collèges religieux qui offrent des programmes en droit canonique. Maintenant, ces universités offrent un ensemble de programmes professionnels. On veut que les jeunes apprennent un vocabulaire en français et qu'ils puissent ensuite former la classe moyenne dans leur milieu.
Permettez-moi de vous interrompre. Je vous remercie beaucoup de votre commentaire.
Monsieur Giroux, vous avez parlé du financement du fédéral, qui n'a pas augmenté depuis 2003. Nous l'avons entendu d'autres intervenants. C'est frustrant. Cela me donne l'impression qu'il y a un manque de vision et d'effort de la part du gouvernement fédéral à l'égard des minorités francophones au Canada. Vous avez parlé de divers moyens susceptibles de les aider. Vous avez notamment mentionné une bourse et un financement de base, et nous l'avons également entendu de la part d'autres témoins.
On entend parfois dire que, si la province donne 4 millions de dollars au Campus Saint‑Jean, par exemple, on s'attend à ce que le fédéral lui donne aussi 4 millions de dollars.
Est-ce que vous pensez que la contribution financière du fédéral devrait être dissociée de la contribution de la province?
Sinon, avez-vous d'autres commentaires à faire à ce sujet?
Je vous remercie beaucoup.
Je suis aussi comptable de profession, et il ne fait aucun doute que, plus nous recevrons de transferts directs de la part de nos partenaires, mieux ce sera.
Nous avons d'autres ententes, notamment en matière de recherche, dans le cadre desquelles nous recevons du financement directement du fédéral. Selon le même principe, je crois que cela pourrait venir directement du fédéral. Il en va de même pour ce qui est des bourses. Nous travaillons directement avec nos partenaires du fédéral sur d'autres initiatives visant des conseils scolaires anglophones qui souhaitent mettre en place des programmes d'immersion en français.
Je pense qu'il y a plusieurs façons de travailler là-dessus pour avoir du financement direct.
Je vous remercie, monsieur Giroux et monsieur Dalton.
Madame Lalonde, vous avez la parole pour six minutes.
Je vous remercie beaucoup.
J'ai quelques questions à poser, et je vais commencer par Mme Cardinal.
Madame Cardinal, je vous remercie beaucoup d'être avec nous aujourd'hui.
En ce moment, quelles sont les obligations du gouvernement fédéral suivant la partie VII de la Loi sur les langues officielles?
Son obligation est de voir à l'épanouissement et au développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. C'est sa principale obligation, et, suivant la partie VII, il doit aussi prendre des mesures positives à cet égard. Le financement lié au Plan d'action pour les langues officielles 2018‑2023, par exemple, est une mesure positive lui permettant de s'acquitter de cette obligation.
On peut considérer que son engagement envers l'enseignement supérieur relève de la partie VII de la Loi, puisqu'il s'agit de mesures positives, notamment du financement, que ce soit du financement de base ou du financement ponctuel, pour s'acquitter de ses obligations en matière de langues officielles.
Est-ce que c'est rédigé exactement comme cela, ou est-ce que c'est une interprétation de l'obligation du gouvernement fédéral à l'égard de l'éducation postsecondaire selon la partie VII de la Loi?
Je pense que la partie VII est importante, parce que, quand on parle de mesures positives pour voir au développement et à l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, il peut s'agir de financer un centre communautaire, mais il peut aussi s'agir de financer des programmes de recherche dans une université. Le gouvernement fédéral intervient beaucoup dans le domaine de la recherche.
On ne peut pas demander au gouvernement fédéral, comme mesure positive, d'accréditer un programme de formation en services ambulanciers ou en services sociaux, parce que cela relève des provinces. Cependant, il y a quand même un ensemble de domaines dans lequel il peut intervenir, notamment en appuyant l'enseignement supérieur, parce que c'est une mesure positive.
Cela se voit dans le budget, justement, et dans l'ancien plan d'action, qui allouait 500 millions de dollars aux organismes communautaires exactement pour cela.
Je vous remercie beaucoup, madame Cardinal.
Monsieur Hastir, j'ai beaucoup aimé l'histoire de Marie‑Pierre. C'est certain qu'elle me touche beaucoup. On parle beaucoup de la Laurentian University et de ce qui se passe dans le Nord.
Quels sont les problèmes criants au sein des établissements d'enseignement postsecondaire francophones, d'après vous, les jeunes?
Si je peux vous relancer, trouvez-vous que la jeunesse est assez représentée à la table des décisions au sein des conseils d'administration et des sénats des universités francophones et bilingues?
En qui concerne la première question, il faut distinguer les problèmes relatifs aux établissements francophones de ceux des établissements bilingues, parce qu'ils sont quand même différents.
Dans les établissements bilingues, les problèmes criants se rapportent à la question de l'assimilation, même si les cours sont offerts en français. Parce que la vie étudiante est offerte majoritairement en anglais, bien souvent, l'étudiant qui arrive au niveau postsecondaire va se faire un réseau majoritairement anglophone, que ce soit son cercle d'amis, le réseau de professeurs ou le réseau universitaire. Cela va le suivre aussi.
Parallèlement, ce que l'on voit souvent et ce que l'on entend des étudiants, c'est que, dans ces établissements, les programmes ne sont pas toujours offerts en français, que cela dépend des programmes. À l'Université d'Ottawa, il y a des programmes offerts en français quand il y a une masse critique d'étudiants, mais, dans d'autres programmes, si l'Université considère qu'elle n'a pas la masse critique, l'étudiant va devoir suivre certains cours en anglais. S'il veut faire son cheminement en français, cela lui prendra cinq ou six ans, au lieu de quatre. Ce sont des problèmes qui sont quand même très importants pour les étudiants, et le fait d'aller suivre des cours en anglais favorise, encore une fois, l'assimilation.
Dans les établissements francophones, le problème est un peu différent. On en parlait tout à l'heure, en ce qui concerne la disparité de financement. Le financement est souvent fondé sur le nombre d'étudiants inscrits et sur le nombre de cours et de programmes offerts. Or, les établissements francophones sont souvent situés dans de petites communautés, des communautés en régions rurales et éloignées. Il faut donc prendre ce fait en considération.
Évidemment, l'autre aspect qu'il faut prendre en considération, c'est toute la question de la notoriété des universités. Dans le cas des universités francophones, comme l'Université de l'Ontario français, créée à partir de rien, ou même l'Université de Sudbury, qui existe, mais qui était moins connue, parce que chapeautée par la Laurentian University, ces établissements n'auront pas la même notoriété, sur le plan national et mondial, que des établissements comme l'Université York et l'Université Queen's.
Finalement, quand on parle de financement, il faut aussi que ce financement soit fait dans la recherche. Je suis sûr que Mme Cardinal pourra en parler aussi, parce que, le problème que nous avons, c'est que les professeurs sont souvent incités à publier en anglais parce que, de cette façon, on publie davantage et que cela rapporte plus d'argent à l'université. C'est le cas dans les établissements bilingues. Cela fait en sorte qu'il y a moins de matériel pédagogique en français.
Pour ce qui est de la question de savoir si les étudiants devraient avoir une plus grande place dans les universités, nous pensons que c'est évident. Cela permettrait d'avoir une meilleure reddition de comptes. Cela pourrait permettre aussi de favoriser le dialogue et la collaboration quant aux décisions à prendre. Dans le contexte des établissements bilingues, cela permettrait d'avoir des représentations francophone et anglophone distinctes, au lieu d'avoir un seul organisme commun, qui parle parfois davantage pour la majorité que pour la minorité.
Je vous remercie, monsieur Hastir.
Monsieur le président, s'il me reste quelques secondes, je demanderais à Mme Cardinal de nous faire des commentaires sur ce qu'a dit M. Hastir.
On parle d'établissements dont la gouvernance est par et pour les francophones. Quand je dis que les universités dans les milieux minoritaires sont les nouveaux centres communautaires des communautés, c'est justement parce qu'elles sont devenues des leviers pour le développement économique, social, culturel et artistique des communautés. Les centres culturels traditionnels ont joué un rôle important. Il y en a qui sont devenus des salles de spectacle, par exemple. Toutefois, en matière de développement, c'est par les universités que cela se passe. C'est pour cela qu'il faut redonner les commandes à ces universités.
Madame Lalonde, votre temps de parole est écoulé.
Je vous remercie, madame Cardinal.
Monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour six minutes.
Je vous remercie.
Ma première question s'adresse à M. Hastir.
Monsieur Hastir, je trouve vos propos vraiment intéressants.
Quand il s'agit des établissements primaires et secondaires, des intervenants m'ont souvent dit que les établissements d'immersion favorisent l'assimilation des francophones. Pour ce qui est de l'enseignement postsecondaire, je l'ai moins entendu. Mme Cardinal semble être du même avis.
Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu plus?
Pensez-vous que l'aide fédérale devrait favoriser vraiment les établissements postsecondaires par et pour les francophones?
Je peux en parler brièvement. Nous recevons des plaintes tous les ans à cet égard. Nous avons des congrès annuels où les étudiants sont présents, et ces discussions reviennent chaque fois.
Mentionnons, par exemple, le fait que les étudiants n'ont pas reçu leurs services en français. Ils ont accès au cours en français, mais tout le matériel didactique est en anglais, alors ils doivent s'adapter. Il y a des cours qui ne sont pas offerts parce qu'il y a sept ou huit étudiants francophones. Ces derniers sont donc transférés dans une classe où il y aura quatre ou cinq anglophones. Ce sont des anecdotes que nous entendons souvent et qui reviennent constamment.
Malheureusement, il est très difficile d'obtenir des données statistiques là-dessus parce que la province ne les recueille pas à l'heure actuelle, et nous, comme organisme, nous ne recevons pas les fonds pour les recueillir. C'est un problème. Même si nous avons les formulaires de plaintes et autres, comme cela fait partie de toutes les autres tâches pour lesquelles nous ne sommes pas financés, il est beaucoup plus difficile de recueillir ces données.
C'est pourquoi je disais plus tôt qu'il serait important qu'une enveloppe budgétaire soit allouée aux organismes communautaires en éducation afin de leur permettre de recueillir ces données et de faire toute la compilation relative aux établissements d'enseignement.
Pour répondre à votre deuxième question, à savoir comment le fédéral peut intervenir autrement que sur le plan financier, je peux vous dire que l'éducation est un champ de compétence provinciale. Demain matin, le fédéral peut donc difficilement arriver et dire vouloir créer des établissements par et pour les francophones.
Par contre, en balisant vraiment les obligations rattachées aux fonds provenant du PLOE ou d'autres programmes destinés aux CLOSM, il y a au moins une façon de s'assurer que cet argent n'est pas utilisé à d'autres fins. À l'heure actuelle, le fédéral transfère les fonds à la province, qui les utilise ensuite de diverses façons.
D'ailleurs, j'ai essayé de trouver des données statistiques concernant les montants que la Laurentian University reçoit de l'enveloppe du PLOE. C'est difficile d'avoir ces montants-là, parce que la majorité des établissements ne veulent pas les divulguer. Même la province ne veut pas les divulguer. Une fois transféré, cet argent peut être utilisé de diverses façons.
Nous avons vu, dans le cas de la Laurentian University, que l'argent était utilisé à des fins qui n'étaient pas directement liées au PLOE. Il est donc vraiment important de l'utiliser à bon escient.
À mon avis, l'argent versé doit être assorti d'obligations d'ordre juridique découlant de la réforme de la Loi sur les langues officielles. Nous devons dire à ces établissements qui reçoivent de l'argent du fédéral dans le cadre de programmes des langues officielles qu'il y a des obligations qui y sont rattachées en ce qui concerne les services offerts.
Je vous remercie.
Mme Brouillette, de l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, a dit tout à l'heure — je paraphrase ses propos — que les communautés ne peuvent être fortes que si leurs institutions le sont aussi. Cela renvoie un peu au concept de complétude institutionnelle. Au Québec, M. Frédéric Lacroix en a beaucoup parlé.
Nous savons que, au Québec, les universités anglophones reçoivent 30 % du budget provincial alloué aux établissements d'enseignement postsecondaire, et au-delà de 38 % des subventions de recherche fédérales sont versées aux universités anglophones. En Ontario, les francophones forment 4,7 % de la population, mais reçoivent seulement une part de 3 % de l'enveloppe, dont une bonne partie est éparpillée dans des universités bilingues.
Madame Cardinal, comment expliquez-vous ce déséquilibre? Que pensez-vous du concept de la double majorité? Nous savons que la Loi sur les langues officielles est basée là-dessus. On considère qu'il y a une majorité anglophone à l'extérieur du Québec et une majorité francophone au Québec. Sur le plan sociologique, la vitalité de la langue anglaise est majoritaire au Québec.
En fait, monsieur Beaulieu, je pense qu'il faut se référer en ce moment au document de Mme Joly intitulé « Français et anglais: Vers une égalité réelle des langues officielles au Canada », parce que le concept d'égalité réelle vient changer la donne.
Nous ne sommes plus dans le discours de la double majorité, et ainsi de suite. Il est reconnu que le français est une langue vulnérable au Canada et qu'elle a besoin de renforcement. Sans ce renforcement, c'est la progression de l'égalité du français et de l'anglais qui est remise en question. C'est l'égalité formelle qui est remise en question.
À cet égard, le rapport de Mme Joly donne des pistes pertinentes pour approfondir le rôle du gouvernement fédéral dans la promotion de l'égalité réelle, notamment dans la promotion du français, y compris hors Québec.
Il est intéressant aussi de mentionner que, dans le rapport de Mme Joly, on parle de l'importance d'institutions gérées par et pour les francophones. On parle de la complétude institutionnelle et des établissements d'enseignement postsecondaire.
À mon avis, dans ce rapport, tout y est pour mener une action rigoureuse.
J'examinerai ce rapport de plus près.
Je n'ai toutefois rien vu en matière d'action. Je n'ai constaté aucune intention de changer ni de reconnaître que le Québec devait être le maître d'œuvre de son aménagement linguistique. Je n'ai vu aucune action concrète qui mène à cette reconnaissance que le français est la langue minoritaire partout.
Je vous remercie, monsieur Beaulieu. Votre temps de parole est écoulé.
Monsieur Boulerice, vous avez la parole pour six minutes.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie tous nos invités d'être avec nous aujourd'hui.
Professeure Cardinal, à la fin de votre exposé, vous aviez extrêmement envie de nous expliquer votre proposition d'une politique d'appui en ce qui a trait à la partie VII de la Loi. Cette politique comprendrait trois volets, soit la vision, les instruments de politique et les publics cibles.
Pouvez-vous nous parler de cette proposition?
Je vous remercie beaucoup de la question, monsieur Boulerice.
Une politique publique s'appuie effectivement sur ces trois composantes.
Il y a d'abord la vision. Nous avons beaucoup demandé aux gouvernements provinciaux de reconnaître qu'il y a des besoins particuliers pour ce qui est de l'enseignement supérieur en français en milieu minoritaire. Nous nous attendons à cette reconnaissance de la part des provinces.
Comme je le disais tout à l'heure, le gouvernement fédéral devrait reconnaître que les établissements d'enseignement postsecondaire ne font pas que former des gens, mais qu'elles jouent un rôle clé dans leur milieu et qu'elles participent à la complétude institutionnelle. C'est pourquoi je fais allusion à la partie VII de la Loi.
Si l'on accepte cette vision, qui recadre un peu la réflexion sur l'appui offert aux établissements d'enseignement supérieur, on aura des instruments de financement, notamment. On pourra alors penser à créer un programme de financement de base pour stabiliser la situation des établissements.
On pourra aussi concevoir un programme d'appui à la recherche, parce que le gouvernement fédéral intervient beaucoup dans ce domaine. L'Association francophone pour le savoir, ou Acfas, vient d'ailleurs de proposer un programme d'appui aux chercheurs de la francophonie canadienne, soit le Service d'aide à la recherche en français, ou SARF. L'Association tentera d'obtenir de Patrimoine canadien qu'il finance ce service.
Par ailleurs, on pourrait aussi créer des pôles d'excellence en recherche dans tous les établissements francophones en milieu minoritaire du Canada. Ces pôles d'excellence permettraient justement à ces petits établissements de faire de la recherche qui serait au service de l'établissement. C'est un peu ce que veut faire l'Université de l'Ontario français. Certains chercheurs de l'Université de Moncton le font, d'ailleurs. À mon avis, cela fait partie d'une vision d'avenir pour les universités francophones.
J'ai aussi abordé le financement de projets ponctuels, comme on en a actuellement. De tels instruments de financement contribueront à donner plus de cohérence à l'action du fédéral en matière d'enseignement supérieur, en coiffant cette action de la compréhension que les établissements d'enseignement supérieur jouent un rôle clé dans le développement de leur communauté.
La troisième composante de la politique d'appui proposée concerne les publics cibles des universités, qui sont en train de changer. Habituellement, les publics cibles sont les étudiants et les professeurs. Toutefois, en ce qui concerne le nouveau rôle des universités, toutes les universités veulent jouer un rôle social, mais les petites universités le font de façon particulière, parce qu'elles doivent composer avec un défi qui est lié à la vitalité. Les publics cibles des petites universités deviennent alors les employeurs, les groupes communautaires, les groupes culturels, les artistes et les créateurs. Bref, c'est la communauté dans son ensemble.
Ces publics cibles deviennent donc de nouvelles parties prenantes dans le milieu de l'enseignement supérieur. Dans le cas de l'Université de l'Ontario français, qui crée un carrefour pour l'ensemble des groupes, nous avons constaté que les universités pouvaient jouer un rôle fédérateur de rassemblement d'une communauté. L'enseignement et la recherche iront de pair, et les étudiants vont travailler avec les groupes communautaires pour développer des projets au service de ces mêmes groupes.
Les grandes universités rêvent d'entreprendre ce genre d'action, mais elles ont de la difficulté à prendre les virages à cause de leur taille. Le réseau de l'Université du Québec est une référence vraiment importante dans ce domaine, parce que chacune de ses universités contribue au développement régional. Cela a été reconnu.
Le gouvernement fédéral pourrait aussi jouer un rôle vraiment intéressant au moyen d'une politique qui modulerait son action, qui lui donnerait une plus grande cohérence et qui ne le mettrait plus en conflit avec les provinces. Il y a tout un champ d'action en matière de relations fédérales-provinciales. Le sujet de l'enseignement supérieur en français devrait figurer en permanence à l'ordre du jour de la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne. Tout à l'heure, nous avons entendu le témoignage de Mme Brouillette, de l'ACUFC, qui tiendra un sommet sur l'enseignement supérieur en français. Ce dernier donnera peut-être lieu à un plan d'action.
Il y a une concordance à faire entre les divers types d'action pour s'assurer de leur cohérence. On doit également s'assurer que, si le français et l'anglais ont un sens au Canada et que l'on reconnaît le rôle des universités de la majorité, il faut le faire aussi pour celles de la minorité.
Vous avez aussi effleuré le rôle que les collèges et les universités peuvent jouer en ce qui concerne l'immigration.
Oui. Même les petits établissements cherchent à attirer des étudiants internationaux. À cet égard, l'exemple de l'Université de Hearst est fascinant.
Les étudiants internationaux sont une source importante de financement pour l'ensemble des universités. C'est d'ailleurs pour cette raison que, pendant la pandémie, l'ensemble des universités a décrié la perte des étudiants internationaux. C'est peut-être moins le cas au Québec, mais, en milieu minoritaire, la perte d'étudiants internationaux crée des déficits.
Cela dit, on ne peut pas penser les universités uniquement en fonction de la clientèle et du marché. En milieu minoritaire, non seulement les universités accueillent des professeurs et des étudiants issus de l'immigration, mais elles sont des lieux qui favorisent l'intégration des immigrants, notamment grâce aux activités d'accueil. En ce moment, on recrute des enseignants, car il y a un manque d'enseignants francophones dans les communautés hors Québec. On souhaite qu'il y ait plus d'immigration, parce qu'on veut que des personnes issues de l'immigration viennent combler ce manque de professeurs.
Ce que je verrais, c'est la mise sur pied d'un grand programme international de moniteurs de français et d'enseignement du français, pour recruter des enseignants prêts à venir travailler partout au Canada francophone, y compris au Québec. L'immigration, c'est tellement important pour l'avenir des communautés francophones, et les universités sont au cœur de ce recrutement.
En effet, Mme Cardinal est bien reconnue pour cela.
Merci, monsieur Boulerice.
Nous allons entamer un autre tour de questions, mais les interventions dureront moins longtemps, car j'aurai une intervention à faire à la fin de la séance. M. Godin et M. Lefebvre auront donc la parole pour quatre minutes, ensuite M. Beaulieu et M. Boulerice auront la parole pour deux minutes.
Monsieur Godin, vous avez la parole pour quatre minutes.
Je vous remercie de me donner la parole, monsieur le président.
J'aimerais remercier les trois témoins. Je n'aurai peut-être pas le temps de m'adresser à chacun d'eux, car je ne dispose que de quatre minutes.
Madame Cardinal, je trouve très intéressant ce que vous avez mentionné à mon collègue M. Boulerice. J'ai bien écouté votre présentation. Tout au long de l'étude que nous avons menée sur ce sujet, je faisais des observations. Je ne veux pas entrer dans la dimension politique, mais aujourd'hui j'en arrive malheureusement à la conclusion suivante: le gouvernement fédéral ainsi que les gouvernements provinciaux à la grandeur du pays ne démontrent pas la motivation, l'engagement et la volonté nécessaires pour promouvoir les communautés linguistiques et leur donner des outils afin d'améliorer l'accessibilité aux services et augmenter leur visibilité. Je parle ici du français, surtout. Pour ma part, je suis du Québec, mais il s'agit d'un problème majeur dans le reste du Canada.
Dans leurs témoignages, les gens nous ont confirmé que les étudiants souhaitaient faire leurs études en français. La clientèle existe, mais on ne lui offre pas les services. On ne lui donne pas accès à une variété de programmes, et c'est ce qui est malheureux. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Vous avez parlé tantôt de publics cibles. Or, je pense qu'on brûle les étapes. Comme vous l'avez dit, le premier volet d'une politique d'appui, c'est l'établissement des fondements et d'une vision.
Rendez-nous service et expliquez-nous comment nous pouvons nous assurer que la priorité des élus, autant au provincial qu'au fédéral, est de promouvoir et d'appuyer les deux langues officielles au Canada.
Vous devriez tous avoir la même préoccupation.
Les outils qu'on a en ce moment, c'est le rapport de Mme Joly et la modernisation de la Loi sur les langues officielles. Il y a aussi des lois dans toutes les provinces. Donc, on ne manque pas d'outils.
Certains de mes collègues dans le domaine du droit aimeraient bien qu'on fasse pression davantage pour inclure l'enseignement supérieur en français dans l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Cela dit, l'article 16 de la Charte guide l'action du gouvernement fédéral. Bref, on a beaucoup d'instruments au Canada. C'est la volonté politique...
Le problème, c'est que cela ne fonctionne pas. On fait des coupes, puis on essaie de reconstruire. Oui, des politiques existent aux niveaux fédéral et provincial, mais donnez-nous un moyen d'obtenir des résultats. En ce moment, nous n'obtenons pas de résultats.
L'Université Laurentienne, c'est un problème, mais tantôt ce sera le Campus Saint‑Jean, tantôt ce sera l'Université de Moncton. C'est le temps de réagir. Il faut arrêter de s'asseoir sur les programmes et les lois. Donnez-nous l'outil qui nous permettra d'être efficaces.
Ma politique serait un bon outil. Nous avons besoin de cohérence dans l'action. C'est peut-être cette cohérence qui fait défaut.
En fait, comment en est-on arrivé à une crise comme celle qui touche le Campus Saint‑Jean, l'Université de Sudbury ou l'Université de l'Ontario français, à Toronto? Il y a toujours le contexte politique. Comme je suis politologue, je ne peux pas m'empêcher de parler de politique. Cela dit, c'est toujours une question de contexte politique. Au prochain discours sur la rigueur budgétaire, nous risquons d'avoir de la difficulté à faire valoir nos préoccupations. Il va falloir...
Oui. Il va falloir continuer à marteler notre message, mais il faut de la cohérence dans l'action. Vous dites que vous ne voulez pas entrer dans l'aspect politique. C'est très bien, mais alors il faut que tous les acteurs s'assoient autour de la même table, affirment que c'est une priorité pour eux et s'entendent pour coordonner leurs efforts et travailler ensemble pour aller au-delà de leurs intérêts particuliers et viser un intérêt collectif, qui est la...
Merci, madame Cardinal.
Vous avez le Comité permanent des langues officielles comme forum. Nous avons tous le même objectif. C'est ce que je dis toujours à tous mes collègues.
Merci, monsieur le président.
Je vais céder un peu de mon temps de parole à mon collègue M. Arseneault.
M. Godin voulait des résultats, des preuves. Personnellement, malgré les difficultés rencontrées, j'ai pu faire toutes mes études en français en Ontario. Je suis donc la preuve que c'est possible. Nous avons des défis à surmonter, bien évidemment. Il va y en avoir pour mes enfants également.
J'aimerais poser quelques questions à M. Giroux, du Collège Boréal.
Vous avez parlé du succès que vous connaissez du côté du bulletin annuel remis aux collèges. Je vous en félicite. C'est une réussite qu'on célèbre à Sudbury ainsi qu'ailleurs en Ontario.
J'aimerais que vous nous parliez de la situation financière du Collège Boréal et des défis qui se posent à vous. Comment tirez-vous votre épingle du jeu?
Je vous remercie de la question, monsieur Lefebvre.
En tant que président du Collège Boréal, je me fais souvent poser la même question: les gens me demandent comment j'arrive à gérer 38 sites répartis dans 26 communautés et comment cela peut être viable.
Comme Mme Cardinal l'a mentionné tantôt, les établissements scolaires font vraiment partie de la communauté. Le Collège Boréal n'offre pas seulement des programmes réguliers d'enseignement postsecondaire. Nous offrons aussi des services d'employabilité ainsi que des programmes d'immigration, qui touchent aussi bien l'établissement que la formation linguistique. Nous offrons de la formation dans le cadre de l'éducation permanente. Partout en Ontario, plus de 5 000 personnes par année suivent une formation en français langue seconde.
Lorsqu'il y a huit ou neuf différents programmes et services dans un site comme celui de London ou de Windsor, nous atteignons une masse critique. Cela signifie qu'il y a un intérêt pour la francophonie. Nous travaillons alors en partenariat avec les conseils scolaires. C'est à ce moment que nos activités deviennent rentables et viables. C'est beaucoup de travail.
Cependant, il n'y a pas que l'éducation postsecondaire. En raison du manque de financement et de croissance, ainsi que de la baisse des frais de scolarité, il nous serait impossible de survivre si nous comptions seulement sur les programmes réguliers d'éducation postsecondaire.
Il en résulte que plusieurs établissements d'enseignement postsecondaire, qu'il s'agisse de collèges ou d'universités, dépendent des étudiants internationaux pour équilibrer leurs budgets. Or, lorsqu'il y a des crises, comme ce fut le cas dernièrement, cela pose des difficultés non seulement aux établissements universitaires, mais également à certains grands collèges. Je pense notamment au Centennial College, au centre-ville de Toronto, dont 54 % de la clientèle est constituée d'étudiants internationaux. Lors d'une crise de ce genre, la viabilité financière est mise à rude épreuve.
La situation devient vraiment difficile. Je sais que vous êtes très diversifiés à Sudbury. Vous faites de l'excellent travail.
Monsieur Hastir, je vous remercie de votre présentation et de votre leadership. C'est excellent. Nous avons besoin de plus de leaders comme vous.
Vous avez parlé d'actions que le gouvernement fédéral pourrait faire sur le plan légal ou législatif. Vous avez parlé de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la LACC. À ce sujet, j'ai présenté un projet de loi d'initiative parlementaire.
J'aimerais que vous me disiez pourquoi vous pensez que ces démarches sont importantes.
En fait, c'est pour s'assurer qu'on n'a pas créé de précédent, dans ce cas-ci, et que d'autres universités ou établissements publics ne feront pas la même chose.
Il faut aussi que les provinces assurent la pérennité des établissements et voient à ce que ceux-ci soient bien financés. Je suis entièrement de votre avis là-dessus.
J'aimerais ajouter quelque chose. La prochaine fois qu'on vivra une crise de ce genre, il faudra s'assurer qu'il y a de la collaboration avant que l'édifice passe au bulldozer.
Je suis d'accord à 100 % avec vous.
Je crois qu'il ne reste plus beaucoup de temps pour mon collègue M. Arseneault.
Merci à tous.
Madame Cardinal, il semble y avoir une déresponsabilisation des provinces, dans l'objectif d'obtenir plus d'argent du gouvernement fédéral, et cela génère beaucoup d'inquiétude.
Qu'entendez-vous, de la part des responsables des divers établissements d'enseignement postsecondaire francophones éparpillés aux quatre coins du pays à l'extérieur du Québec, au sujet de la collaboration et de la négociation avec les provinces?
Le problème, c'est la grande disparité entre les provinces. La réalité est différente d'une province à l'autre. C'est pour cette raison qu'il faut asseoir tout le monde à la même table et établir une démarche cohérente. En ce moment, la priorité transversale, de l'est à l'ouest, en passant par le nord, c'est d'appuyer l'enseignement supérieur en français.
Merci, monsieur le président.
Je reviens au concept de complétude institutionnelle. Ce que je trouve étonnant, c'est que très peu d'études semblent avoir analysé la proportion de financement accordée aux institutions francophones par rapport au poids démographique des francophones dans les différentes provinces. J'ai lu une seule étude où cela avait été fait, soit celle de Frédéric Lacroix et de Patrick Sabourin.
Pensez-vous que ce serait une bonne chose qu'il y ait des études sur la complétude institutionnelle dans chaque province?
Il ne faut pas oublier que le concept de complétude institutionnelle est une création de la minorité francophone hors Québec et nous en sommes très fiers. C'est nous qui l'avons popularisé.
C'était bien avant cela, dans les années 1960, avec M. Breton. Je défends fièrement ce concept depuis longtemps. Je vous remercie de l'utiliser dans le contexte québécois.
Des études, il en faut. Je sais que l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne a une étude en cours sur le financement. Le problème, c'est la difficulté d'accéder à ces chiffres. Le financement est réparti un peu partout dans les provinces, et il faut abattre un travail considérable pour essayer de comprendre où va cet argent. Est-ce vrai que l'argent pour l'éducation postsecondaire est utilisé pour nettoyer des routes, par exemple?
Dans le livre blanc de Mme Joly, il y a l'idée que les provinces doivent rendre plus de comptes concernant le financement qu'elles reçoivent. Il ne faut pas permettre aux provinces de se déresponsabiliser. À cet égard, je suis assez favorable à ce qu'un dialogue s'établisse entre les provinces et le gouvernement fédéral pour mieux comprendre où va l'argent.
Cela dit, il y a des disparités entre les provinces. L'investissement en enseignement supérieur est moindre en Ontario que dans d'autres provinces. Tout est lié à la vision de l'enseignement supérieur qui est propre à chaque province. Est-ce que l'enseignement supérieur est considéré comme un marché ou comme un service social? Au Québec, c'est un service social; en Ontario, c'est un marché.
Merci, madame Cardinal.
Merci, monsieur Beaulieu.
La parole revient à M. Boulerice pour les deux dernières minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais poser une question à M. Giroux.
Moi aussi, j'ai été estomaqué d'entendre que, dès 2003, le financement par le PLOE avait été gelé par les gouvernements successifs. Cela représente une diminution de 45 %, si l'on considère le taux d'inflation jusqu'en 2021.
Que proposeriez-vous à cet égard? Quel échéancier faudrait-il viser pour faire le rattrapage nécessaire?
Vous risquez de me répondre que cela doit être fait tout de suite.
C'est une excellente question.
Je pense qu'il faut que ce soit bien planifié. Il doit y avoir une augmentation d'au moins 30 % du financement. Ensuite, il pourrait être question de rattrapage. On ne peut pas toujours reprendre cette discussion, tous les cinq ans, à propos du financement. Dans le financement de base, il y a une période de rattrapage à établir. Ensuite, l'augmentation doit suivre le taux d'inflation. Selon nos calculs et notre planification, une augmentation de 2 % nous permettrait de continuer à développer les programmes.
Tantôt, il a été question du développement du matériel pédagogique. Nous sommes un collège francophone, et pourtant il est impossible d'acheter 50 % des manuels en français. La moitié de nos livres sont en anglais. Le PLOE vient nous appuyer pour permettre la traduction du matériel, mais ce n'est pas facile. Par exemple, pour les programmes en électricité, les codes changent chaque année. Il faut en faire la traduction chaque année, et c'est extrêmement coûteux. Cette subvention nous donne l'appui pour offrir des services équivalents à ceux des collèges anglophones.
Je serais curieux de savoir une chose, monsieur Hastir. Quand des collèges et des universités ferment ou suppriment des programmes, les étudiants et les étudiantes que vous représentez vont-ils dans des universités anglophones ou sont-ils forcés de déménager au Québec ou à Ottawa, par exemple?
Cela dépend des programmes. Il y en a qui vont du côté anglophone. Il y en a qui vont aller au Québec ou dans d'autres régions. Dans ce cas, on assiste à un exode et à une augmentation des coûts pour les étudiants. Cela a aussi un coût sociétal, évidemment.
Merci beaucoup.
C'est tout le temps que nous avions.
Nous venons de terminer le dernier tour par cette réponse de M. Hastir. Il a dit qu'il allait nous soumettre aussi un mémoire, alors je veux l'en remercier. J'invite les autres témoins à en faire autant, s'ils le souhaitent.
Au nom des membres du Comité, je remercie tous les témoins de leur participation et de leur contribution à cette étude.
Je rappelle que nous avons entendu Mme Linda Cardinal, professeur émérite à l'Université d'Ottawa, qui a témoigné à titre personnel. Nous avons également entendu M. Daniel Giroux, président du Collège Boréal, et M. François Hastir, administrateur agréé et directeur général du Regroupement étudiant franco-ontarien.
Nous prenons le temps de saluer les témoins, mais je demande à mes collègues de rester, parce que je voudrais leur présenter une décision de la présidence.
Dans ce genre de contexte, nous avons l'habitude, chers membres du Comité, de débattre de ces questions lors de séances à huis clos. Cependant, la fin de la session parlementaire approche et il nous reste trois séances avant l'ajournement pour l'été. Comme vous le savez, nous avons essayé dernièrement de discuter de ce que nous devions faire de ces trois séances. La présidence a donc pris une décision à ce sujet, que la greffière va vous soumettre par courriel. J'aimerais que vous y réagissiez d'ici 14 heures demain.
En même temps, nous allons tenir compte de ce que vous avez présenté au début. Vous avez dit qu'il y avait un ou deux autres témoins qui souhaitaient comparaître devant le Comité. Donc, si c'est le vœu de tous les membres du Comité, c'est toujours une possibilité. Cependant, j'ai entendu à plusieurs reprises des gens dire qu'ils aimeraient avoir un rapport; il faudrait donc le terminer et le déposer. Il est également possible d'entendre d'autres témoins sur la motion que nous avons déjà commencé à traiter, parce qu'il restera une séance et demie.
Je n'avais pas cette information auparavant. Je l'ai eue au début de cette séance. Je vais vous présenter très rapidement ce dont nous avons convenu avec la greffière et l'analyste. Il faut dire que l'analyste a travaillé d'arrache-pied pour être en mesure de nous présenter un rapport sur cette étude concernant l'éducation postsecondaire dans les deux langues officielles. Ce rapport vous sera soumis le mardi 15 juin, vers midi. Puisque vous n'aurez pas nécessairement eu le temps d'en prendre connaissance, nous nous sommes dit que chaque paragraphe du rapport serait lu pendant la séance à huis clos et que nous allions en débattre. Ce sera un court rapport, d'environ 15 pages, et nous allons vous le soumettre le mardi 15 juin.
Afin d'accélérer le processus entourant le rapport, si nous souhaitons bel et bien le déposer, je vous demande, chers membres du Comité, d'envoyer les recommandations que vous souhaitez y inclure. Vous avez écouté tous les témoins qui ont comparu, donc il y a peut-être des recommandations particulières que vous souhaiteriez voir dans le rapport. Comme ce sera indiqué dans le courriel, nous vous demandons de nous envoyer ces recommandations d'ici 13 heures le lundi 14 juin. Nous pourrons alors en tenir compte dans les discussions.
Pour ce qui est des trois séances restantes, il est vrai que vous avez parlé de deux témoins éventuels. Cependant, même si ces témoins ont fait une demande, vous savez que la greffière doit entreprendre des démarches en ce qui concerne les casques d'écoute et tout cela. Donc, ce ne sera pas possible de recevoir de témoins mardi. Nous nous réunirons donc à huis clos mardi. Nous aurons en main le rapport sur l'étude concernant l'éducation postsecondaire, alors nous pourrons aller de l'avant.
Cela dit, aux fins de planification, j'aimerais que vous nous envoyiez par courriel, au plus tard demain, vos réactions à ce courriel que vous allez recevoir d'ici la fin de la journée.
Le temps prévu pour la réunion est déjà écoulé. Vous savez que nous devons maintenant arrêter à l'heure pile. Je sais que plusieurs d'entre vous aimeraient peut-être en débattre ou en discuter, mais malheureusement nous devrons essayer de trouver une façon d'en arriver à un consensus, à une décision de la présidence ou à une décision des membres du Comité.
Je veux encore une fois remercier les témoins qui ont participé à nos délibérations.
Je tiens également à remercier tous les membres du personnel qui nous accompagnent au Comité, notamment les techniciens, la greffière et l'analyste.
Sur ce, mesdames et messieurs, je vous souhaite une bonne fin de journée.
La séance est levée.
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