Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Je vous souhaite la bienvenue à la sixième réunion du Comité spécial sur les relations sino-canadiennes. Conformément à la motion adoptée le mercredi 23 septembre, le Comité se réunit pour étudier les relations entre la Chine et le Canada.
[Français]
La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à la motion adoptée par la Chambre, le 23 septembre. La réunion est également télévisée et sera accessible sur le site Web de la Chambre des communes.
[Traduction]
Voici quelques règles à suivre pour assurer le bon déroulement de la séance.
Les députés et le témoin peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts et vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le son du parquet, l'anglais ou le français.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro.
Comme il a déjà témoigné devant d'autres comités, le témoin sait probablement qu'il n'a pas besoin d'attendre que je le nomme pour répondre à la question d'un député.
[Français]
Je vous rappelle que toutes les interventions des membres du Comité ainsi que des témoins doivent être adressées à la présidence. Veuillez parler lentement et clairement.
[Traduction]
Lorsque vous n'avez pas la parole, votre microphone doit être en sourdine.
Je vous prie maintenant d'accueillir M. Shawn Steil, qui est directeur exécutif, Politique et coordination de la Chine élargie, pour le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.
Nous vous remercions de témoigner devant nous aujourd'hui. Vous pouvez procéder avec votre déclaration préliminaire de cinq minutes.
Je suis très heureux d'avoir l'occasion de m'adresser au Comité au sujet du Tibet aujourd'hui.
J'aimerais tout d'abord vous faire une mise en garde: le Comité a demandé à entendre un expert d'Affaires mondiales Canada sur la question du Tibet. Malheureusement, l'accès restreint des représentants canadiens à la Région autonome du Tibet en Chine signifie que très peu d'entre eux ont une connaissance directe de la situation au Tibet.
L'accès au Tibet demeure rigoureusement contrôlé par le gouvernement chinois, et les rares visites des représentants permises sont très convenues. Au cours des dernières années, le gouvernement central du Tibet a rendu la tâche plus difficile aux diplomates, aux journalistes et aux étrangers qui souhaitaient visiter la région. Il faut un permis de voyage et une invitation. Le Canada demande souvent un droit de visite dans la Région autonome du Tibet. Le permis n'est pas nécessaire pour visiter les régions tibétaines des autres provinces chinoises, mais ces visites peuvent elles aussi être très restreintes.
La présente session est particulièrement opportune. L'ambassadeur du Canada en Chine, Dominic Barton, vient de rentrer d'une visite dans la capitale tibétaine de Lhasa et la préfecture de Shannan, à l'invitation du gouvernement chinois. Un groupe de diplomates a pris part au voyage, qui s'est déroulé du 26 au 30 octobre. Il s'agissait de la première visite d'un représentant canadien depuis 2015.
L'absence d'un accès réel au Tibet émane des restrictions sévères imposées par les autorités chinoises au peuple tibétain. Le gouvernement du Canada se préoccupe grandement de la situation des droits de la personne au Tibet. Selon les rapports des ONG et du Comité de l'ONU sur l'élimination de la discrimination raciale, les enjeux en matière de droits de la personne comprennent des restrictions relatives à la liberté d'expression, à la liberté de religion et à la liberté de croyance, de même qu'à la protection des droits linguistiques et culturels.
Nous maintenons notre engagement envers les membres de la diaspora tibétaine, y compris les Canadiens d'origine tibétaine, de même qu'à l'égard des organisations qui étudient et appuient la communauté tibétaine à l'étranger. La communication avec la communauté est importante pour le gouvernement du Canada, puisqu'elle oriente notre approche en matière de défense des droits et liberté au Tibet.
Le Canada a accordé la citoyenneté honoraire au chef spirituel tibétain, Sa Sainteté le dalaï-lama en 2006. Bien que nous reconnaissions les différends de longue date entre le gouvernement chinois et l'Administration centrale tibétaine ou le gouvernement en exil et Sa Sainteté, le Canada encourage un dialogue significatif entre les partis en vue de résoudre les enjeux d'une manière acceptable pour tous.
Les tensions entre le gouvernement chinois et les Tibétains demeurent élevées et durent depuis plusieurs décennies; les 10 dernières années n'y font pas exception. Le gouvernement a continué d'intensifier la répression contre les Tibétains par l'entremise d'une surveillance accrue et de l'éducation patriotique forcée. Les Tibétains qui manifestent risquent la détention ou pire encore. Plus de 150 bouddhistes tibétains se sont immolés au cours de cette période, sous les yeux horrifiés du monde entier.
Le Canada appuie depuis longtemps les Tibétains. Le gouvernement a entrepris son travail pour réinstaller certains des premiers réfugiés tibétains au Canada dans les années 1970. De nombreux autres immigrants et réfugiés se sont installés au pays depuis.
Au cours des 10 dernières années, le gouvernement du Canada a mis en place des mesures spéciales pour faciliter le parrainage privé et l'émigration de près de 1 000 Tibétains déplacés de l'Inde. La Société Projet Tibet a permis le jumelage entre les Tibétains et leurs parrains, ce qui a permis la réinstallation de 1 000 réfugiés en 2017.
Ces Tibétains et plus de 7 000 autres — en fait, selon le recensement de 2016, plus de 8 000 Canadiens s'identifiaient à titre de Tibétains — contribuent à l'enrichissement du tissu multiculturel de notre pays, notamment par leur participation à la vie publique.
Dans le cadre de ses relations diplomatiques, le Canada reconnaît la République populaire de Chine à titre d'entité gouvernante de la Région autonome du Tibet. En vertu des propres constitutions de la Chine et de ses obligations internationales, nous demandons au gouvernement de respecter les libertés religieuses et de mettre fin aux politiques de répression au Tibet. Bien que le Tibet connaisse des développements économiques, cela n'élimine pas le besoin de protection des droits politiques et civils.
Le Canada continuera de demander un accès libre à la région, accès particulièrement important en raison des dernières mesures de répression qui ont été prises. Bien qu'on porte une attention accrue à la répression qui s'opère au Xinjiang et à Hong Kong, il ne faut pas oublier que la situation au Tibet demeure très préoccupante.
Je remercie le Comité de se pencher sur cette question ce soir.
Je vous remercie pour votre témoignage, monsieur. Vous peignez un portrait assez sombre de la situation au Tibet, non seulement pour son peuple, mais aussi en ce qui a trait à la capacité du gouvernement du Canada de voir et de comprendre ce qui s'y passe.
En août dernier, le Comité a entendu M. Lobsang Sangay, qui est le président de... Je vais les appeler les Tibétains à l'étranger ou la diaspora tibétaine en dehors du territoire. Il a parlé de l'approche de la voie du milieu en vue de réconcilier le mode de vie de son peuple à celui de la Chine continentale. L'approche vise à conférer une autonomie authentique au peuple tibétain dans le cadre de la constitution chinoise.
Pourriez-vous nous parler de la position du gouvernement du Canada à l'égard de cette approche et des mesures qui ont été prises pour faciliter sa mise en œuvre?
Je connais très bien la proposition de l'Administration centrale tibétaine en vue d'une approche de la voie du milieu. Selon ce que nous comprenons, elle vise à mettre de côté la question de l'indépendance pour plutôt accroître l'autonomie au sein de la Chine. Je tiens à souligner que sur le plan de la politique canadienne, nous reconnaissons que la République populaire de Chine est l'entité gouvernante de la Région autonome du Tibet.
Nous n'avons pas de position particulière à l'égard de l'approche de la voie du milieu, mais nous avons toujours milité pour que le gouvernement de la Chine entretienne un dialogue significatif avec le dalaï-lama et ses représentants au sein de l'Administration centrale tibétaine. Nous n'avons pas pris position sur le contenu de ce dialogue, mais nous reconnaissons certainement que cette approche réfute la plainte récurrente du gouvernement chinois voulant que le dalaï-lama et sa « clique » soient des séparatistes et des fauteurs de trouble qui tentent de diviser le pays. Si le gouvernement chinois écoutait ce que Lobsang Sangay et les autres ont à dire au sujet de l'approche de la voie du milieu, il comprendrait que la division du pays n'est pas l'objectif souhaité.
Il semble que la politique du Canada à l'égard du Tibet n'ait pas vraiment changé depuis l'époque du gouvernement Mulroney. Elle reconnaît que le Tibet fait partie de la Chine continentale. Est-ce bien le cas ou est-ce que j'oublie quelque chose? Y a-t-il eu une évolution relative à la vision de la région tibétaine au cours de cette période ou est-ce que la politique que j'ai décrite est demeurée la même?
Je crois que c'est assez juste, monsieur le président. Je ne crois pas qu'il y ait eu un grand changement dans l'approche politique du Canada au fil du temps. Le gouvernement chinois m'en voudra peut-être d'avoir des mots aussi durs à ce sujet, mais ce n'est pas tant la politique du gouvernement canadien qui a changé au fil du temps; c'est la politique de la République populaire de Chine qui a changé. Nous avons constaté une augmentation de la répression et une limitation accrue des droits.
Je crois que c'est tout à fait exact. Qu'il s'agisse du défaut de respecter ses engagements, ce que nous avons constaté non seulement au Tibet, mais aussi ailleurs... En fait, lors d'une entrevue qu'il a accordée à l'Agence France-Presse le 7 juillet 2020, M. Sangay a comparé le défaut de la Chine de respecter l'accord en 17 points avec le Tibet à l'imposition de la loi sur la sécurité nationale à Hong Kong. Il a fait valoir que la situation à laquelle nous assistions à Hong Kong s'était déjà produite au Tibet.
Selon vous, quels sont les parallèles entre le Tibet, la Chine et d'autres régions autonomes?
Je crois que la tendance observée au Tibet est celle d'autres régions de la Chine également. Vous avez évoqué certains pans de l'histoire.
De façon plus récente — depuis 2008, je dirais —, le gouvernement exerce une répression violente contre les manifestants, et au cours de la dernière décennie, il a eu recours à des mécanismes de contrôle et de surveillance beaucoup plus durs au Tibet. Certains de ces mécanismes de contrôle sont maintenant reproduits dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, par exemple. Il y a de moins en moins de place pour l'opposition au Parti communiste.
Je vais simplement faire un commentaire. J'ai visité le Tibet en 2007 et j'ai constaté la complexité du contrôle des médias exercé par la Chine. J'ai parlé à de nombreux Tibétains qui étaient assoiffés de nouvelles. La jeune génération à qui j'ai parlé n'avait jamais entendu parler du massacre de la place Tiananmen, ce qui m'avait choqué.
Je crois que nous souhaitons tous entendre cette histoire, mais je ne peux vous laisser dépasser les six minutes qui vous sont accordées. J'espère que les membres du Comité me pardonneront.
Nous allons maintenant passer à M. Fragiskatos. Vous disposez de six minutes.
Monsieur le président, je peux vous brosser un portrait général de la visite de l'ambassadeur, mais il serait évidemment mieux placé que moi pour vous parler des détails et des nuances de son voyage.
Comme je l'ai dit plus tôt, nous demandons de façon constante aux autorités chinoises de pouvoir visiter la région et il a été le premier diplomate canadien à pouvoir s'y rendre en cinq ans. Je crois que la visite de l'ambassadeur précédent remonte à plus loin encore, en 2013.
Il a visité la région avec un groupe de diplomates, après d'autres ambassadeurs. Les visites des autres pays sont elles aussi restreintes, mais les diplomates et ambassadeurs d'autres pays avaient pu s'y rendre en septembre. Je crois qu'il s'agissait de la deuxième visite en une période relativement courte.
Sa visite était concentrée à Lhassa, la capitale, mais il a aussi pu voir certaines parties de la préfecture de Shannan. Il a pu visiter un monastère et une école, et rencontrer les hauts représentants du gouvernement tibétain. Il a aussi visité certaines régions à l'extérieur de Lhassa. Mais la visite était très convenue, comme je l'ai dit plus tôt.
Je crois qu'elle lui a permis de faire certaines observations personnelles avec le peu de temps libre qu'il avait. Il en a profité pour entrer en contact avec les Tibétains ordinaires. Pour nous, ce temps a une très grande valeur. Je crois que nous nous préoccupons toujours de l'instrumentalisation de ces visites — qui peuvent être utilisées à des fins de propagande, par exemple —, mais de rares occasions comme celle-là d'observer la population de près permettent d'équilibrer les choses. C'était aussi une occasion importante pour le Canada et son gouvernement de montrer aux Tibétains que nous sommes là et qu'ils comptent pour nous, par la simple présence de l'ambassadeur.
Monsieur Steil, croyez-vous que le Comité pourrait profiter du témoignage de l'ambassadeur, qui pourrait nous transmettre des renseignements et répondre à nos questions au sujet de son voyage au Tibet?
Oui, tout à fait. J'ai eu la chance d'avoir une courte séance d'information avec lui également. Je crois que les nuances et les observations qu'il pourrait vous transmettre vous seraient très utiles, surtout que les visites dans la région sont très rares.
J'aimerais poser une autre question à M. Steil. Où se situe l'approche du Canada relative au Tibet par rapport à celle d'autres démocraties à puissance moyenne comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni? Je n'énumérerai pas toutes les puissances moyennes auxquelles nous pourrions penser, mais pourriez-vous nous parler des comparaisons et des contrastes entre les diverses approches?
Bien sûr. Je crois que notre position est assez similaire. Je tiens à souligner que les approches sont de plus en plus coordonnées. Nous avons la chance de travailler au niveau opérationnel et aux niveaux supérieurs — jusqu'au ministre — pour échanger avec les démocraties aux vues similaires au sujet d'enjeux critiques afin de veiller à ce que notre approche soit complète et à coordonner les efforts en matière de défense des droits de la personne.
Bien sûr, nous ne sommes pas les seuls à subir les conséquences de ces efforts. Je crois qu'on pourrait dresser une longue liste de puissances moyennes, comme vous le dites, et de démocraties amies qui ont été punies à un moment ou à un autre pour avoir autorisé une visite du dalaï-lama, par exemple. Je crois que bon nombre d'entre nous ont subi les foudres du gouvernement chinois pour avoir entretenu des liens avec le Tibet.
J'aimerais vous poser une dernière question, monsieur Steil.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je vois qu'il me reste quelques minutes.
Il s'agit d'une question plus générale au sujet de l'approche de la Chine relative au Tibet. Je sais d'après d'autres conflits... Je ne connais pas très bien ce conflit en particulier, je dois l'admettre; je remercie donc les analystes de la Bibliothèque du Parlement pour leur analyse toujours très exhaustive, qui m'est très utile.
Ce que je sais, d'après l'étude d'un conflit passé — de la question kurde — que l'une des façons pour la Turquie, l'Irak et l'Iran d'intégrer les dissidents kurdes à la structure de l'État était de leur conférer une position d'autorité de haut niveau. Est-ce que la Chine a pris de telles mesures pour dissiper les dissidents tibétains?
Oui, je crois que c'est une évaluation juste de la situation. En fait, j'ai écouté le témoignage de Lobsang Sangay devant le Comité, et je sais qu'il en a parlé. La cooptation de l'élite est peut-être un facteur.
Je crois que les Tibétains qui ont accès aux postes de haut niveau au sein de la République populaire de Chine sont très, très rares, mais la Région autonome du Tibet compte une association de leaders hans et tibétains au sein du système politique.
J'ai eu la chance d'échanger avec lui sur d'autres sujets associés à la politique étrangère canadienne lors de réunions d'autres comités, monsieur le président. Nous sommes très chanceux de pouvoir l'entendre ce soir.
Je vous remercie, M. Steil, d'être des nôtres à une heure si tardive. Nous apprécions de ne pas être les seuls à être toujours au travail à une telle heure.
À la suite de la comparution de M. Sangay au Comité, il y a de cela quelques semaines, le Comité a produit un rapport qui a été déposé à la Chambre des communes.
Affaires mondiales Canada a-t-il donné suite à la motion adoptée par le Comité et déposée à la Chambre des communes?
En effet, nous avons pris bonne note de la motion adoptée par le Comité visant à encourager le dialogue; cette motion s'harmonise tout à fait avec la politique du gouvernement. Je tiens à féliciter le Comité d'avoir adopté cette motion, parce que bien que nous saisissions les occasions de faire avancer notre position, je crois qu'il est important pour le gouvernement chinois de comprendre que le Parlement adopte lui aussi cette position.
Cette motion est un appel au dialogue. Le fait que Pékin réponde de façon aussi indifférente à cette ouverture au dialogue de la part des autorités tibétaines en exil nous déconcerte tous et toutes.
Comment le ministère des Affaires étrangères voit-il cette réponse indifférente de Pékin alors qu'il y a une volonté de la part des autorités tibétaines de rentrer dans le rang et de conclure une nouvelle entente?
Monsieur le président, c'est un problème important avec le gouvernement actuel de la République populaire de Chine: il rejette de plus en plus la critique — aussi constructive soit-elle — de ses positions et politiques dans certaines régions, comme le Tibet.
Sur le plan de la politique étrangère, il est important pour le Canada de faire preuve de constance et de continuer à invoquer ces enjeux. Je crois que les arguments que donne le gouvernement chinois pour ne pas entamer ce dialogue se sont endurcis au fil du temps. Étant donné cette rigidité, il est difficile pour le gouvernement de trouver une façon de reculer doucement et de trouver une nouvelle position plus souple.
Nous ne pouvons qu'espérer qu'en maintenant notre politique et en proposant cette solution, le gouvernement chinois fera preuve d'ouverture à un moment donné et mettra de côté sa position rigide pour entreprendre une certaine forme de dialogue. Ce ne serait pas la première fois. Dans les années 1950, le dalaï-lama a entretenu un dialogue avec le président Mao. Ce n'est qu'après le soulèvement de 1959, lorsque la communauté tibétaine en a eu assez et que le dalaï-lama s'est exilé, que le dialogue a pris fin.
Il faut créer des occasions de dialogue pour l'avenir. Nous croyons sincèrement qu'il s'agit de la meilleure façon d'assurer la stabilité au Tibet et en Chine, et d'assurer le bien-être des Tibétains à l'intérieur comme à l'extérieur de la Chine.
Je sais que cela a été abordé par des collègues, il y a quelques instants, mais M. Sangay nous avait signalé que l'accord en 17 points et l'échec de ce même accord préfiguraient l'échec de cette prétention de « un pays, deux systèmes », qui annonce peut-être lui-même l'échec d'un éventuel accord avec Taïwan.
Comment voyez-vous la chose? Vous parliez d'espoir, un peu plus tôt.
C'est une question que nous avons posée à M. Sangay; peut-être avez-vous jeté un coup d'œil à nos échanges. Il nous a répondu tout simplement que l'espoir est au cœur de la religion bouddhiste et qu'il faut donc continuer à entretenir cet espoir. Personnellement, j'ai un peu d'inquiétude quant au fait qu'on ne peut pas penser à une solution simplement basée sur l'espoir.
Que peut donc faire la communauté internationale dans les circonstances?
Vous pourrez reposer la question à M. Steil au prochain tour.
Je vous remercie, monsieur Bergeron.
[Traduction]
En parlant de l'heure tardive, il est maintenant 20 h 33 à Terre-Neuve-et-Labrador, où se trouve M. Harris, qui aura la parole pour les six prochaines minutes.
Il est effectivement 20 h 30 ici, un peu plus tard que chez vous.
J'aimerais néanmoins poser quelques questions à M. Steil.
Nous avons eu une rencontre très intéressante avec M. Sangay. Ce que j'ai trouvé remarquable chez lui, surtout à la fin de son discours préliminaire, lorsqu'il a parlé de toutes les difficultés que connaît son peuple, c'était son optimisme. Il croit que l'avenir de la Région autonome du Tibet et des Tibétains sera positif, et je crois qu'il nous encourage à partager cet espoir, et aussi à faire tout en notre possible pour faciliter le processus.
Je crois qu'il n'y a pas très longtemps, une discussion semblait possible, mais qu'elle n'a jamais eu lieu. Pourriez-vous nous parler de cela? C'était il y a quelques années.
À ma connaissance, monsieur le président, il n’y a pas d’ouverture pour la tenue d’un dialogue. Je pense qu’il y en avait pendant la période de Hu Jintao, avant que Xi Jinping ne devienne président. Je crois que l’ancien président de la Chine, Hu Jintao, avait des liens avec la région tibétaine. Toutefois, je n’ai pas connaissance qu’il y ait eu quelque chose de concret récemment.
Par ailleurs, nous avons appuyé l’idée de la voie du milieu et l’idée de progresser vers l’autonomie dans le cadre de la constitution chinoise.
Savez-vous ce qu’on entend par « travailler dans le cadre de la constitution chinoise »? Savez-vous en quoi consiste une région autonome dans le cadre de la constitution chinoise? À quoi peut-on s’attendre dans le contexte de la constitution actuelle?
La législation chinoise actuelle comporte des dispositions qui accordent aux régions autonomes — peu nombreuses — une certaine autonomie gouvernementale et une voix au chapitre quant à leur fonctionnement. La constitution chinoise prévoit aussi, en théorie, la liberté de religion et la liberté de croyance. Je pense que les autorités chinoises vous diraient que tout cela existe vraiment au Tibet, pour autant que ce soit conforme aux autres aspects de la loi, avant d'attirer votre attention, peut-être, sur la notion très élastique de loi sur la sécurité nationale, par exemple, qui interdit tout ce qui s'apparente à la sédition.
Je sais que le Comité a fait une étude sur Hong Kong et sa loi sur la sécurité nationale. Vous avez donc une bonne idée de l'interprétation large de la notion de sécurité nationale qui, à certains égards, l'emportera sur d'autres dispositions de la constitution et de la loi qui permettent la liberté de religion par exemple.
Certains de nos collègues ont posé des questions sur la liberté de la presse et la liberté de religion. Dans le contexte chinois, à ma connaissance, ce n'est pas un phénomène qui concerne l'ensemble du pays, bien que cela figure dans la constitution.
Pouvez-vous faire un commentaire à ce sujet? Y a-t-il une particularité quant à la façon d'aborder la question au Tibet, ou pensait-on qu'ils s'attendraient, en tant que région autonome, à plus de libertés?
Absolument tout, même dans les régions autonomes, est de plus en plus assujetti aux orientations et à la supervision du Parti communiste chinois. Je pense que cette conception de l'autonomie est très différente de la compréhension commune qu'on puisse avoir du terme. Il n'y a pas de processus électoral auquel participer, et tous les dirigeants de la Région autonome du Tibet doivent être approuvés par l'intermédiaire du système du Parti communiste.
Par exemple, si vous voulez être membre du Parti communiste, il vous est interdit de pratiquer une religion. Donc, dans la région tibétaine, cela exclut beaucoup de gens qui voudraient participer d'une façon quelconque à la vie politique.
Cela découle peut-être du fait qu'ailleurs en Chine, en raison de la nature du parti, l'activité politique est contrôlée par les membres du Parti communiste, mais si la religion constitue un obstacle, il devient impossible d'exercer une autonomie quelconque.
Je ne suis pas certain que ce soit aussi clair et net, mais il y a toutes sortes d'obstacles, officiels ou non, à l'exercice d'une véritable autonomie.
Permettez-moi de vous donner un exemple, pas de la sphère politique, mais de la sphère économique. La plupart des investissements au Tibet — les taux de croissance du PIB sont en effet statistiquement plus élevés au Tibet — sont le fait d'investisseurs externes, souvent par l'intermédiaire d'entreprises d'État. Certains affirment que cela a créé un circuit fermé d'avantages économiques. Les Tibétains, qui ont été des nomades, du moins provisoirement et historiquement, sont exclus de ce circuit économique.
Il y a une compagnie chinoise qui s'appelle Nuctech, qui est déployée partout en Chine. Cette compagnie fournit des outils de surveillance et de monitoring pour le Bureau de sécurité au Xinjiang. On sait que les citoyens sont suivis.
Selon vous, cet outil de surveillance est-il utilisé sur les Tibétains?
Désolé, monsieur le président. J'ai peut-être manqué le nom de l'entreprise, mais cela ne me dit rien, à première vue. Je devrai peut-être vous revenir là-dessus plus tard.
Oui, je reconnais que c'est une priorité pour les comités parlementaires en ce moment.
Je n'ai pas de renseignements de première main sur l'entreprise elle-même et sur ses activités dans d'autres pays. Je ne pourrai donc pas commenter, malheureusement. Je serais heureux de consulter certains de mes collègues qui suivent la situation d'un peu plus près et de vous donner une réponse plus tard.
Selon vous, parmi les équipements de protection contre la COVID-19 que le Canada a achetés récemment, comme des blouses, est-il possible que certains aient été fabriqués dans des camps de travail au Tibet, à notre insu?
De plus en plus de rapports font état de l'existence de camps de travail en Chine et du recours possible au travail forcé. Évidemment, beaucoup de ces rapports sont liés à la situation des Ouïghours dans la Région autonome ouïghoure du Xinjiang, mais comme le député l'a souligné, on rapporte aussi que des camps de travail ont été établis au Tibet.
Il y a moins de renseignements sur la situation des camps de travail au Tibet, mais nous savons qu'il y a eu, même avant cette période, des réinstallations forcées hors des terres des nomades. Des nomades ou bergers tibétains qui exploitaient la terre selon le mode traditionnel ont été relocalisés pour faire place à des projets miniers ou d'infrastructures, notamment, et ont ensuite été formés pour travailler en usine.
Il semble y avoir des preuves significatives que cela a eu lieu au Tibet, et que cela se poursuit.
Malheureusement, il se pourrait donc que des équipements fabriqués par des personnes dans des camps de travail forcé aient été achetés par le gouvernement canadien.
On sait que le Canada considère actuellement de rénover l'ambassade à Pékin. Selon vous, le Canada a-t-il pris des mesures pour s'assurer qu'il n'y ait pas de travailleurs forcés qui viennent du Tibet ou d'ailleurs en Chine?
Le gouvernement canadien a-t-il donné des directives à cet égard?
Notre principale préoccupation, par rapport au Tibet en particulier, est moins liée à la sécurité des diplomates qui voyagent au Tibet qu'à la surveillance dont ils font l'objet lorsqu'ils s'y rendent. Au Tibet, et je pense que l'ambassadeur peut en témoigner, il est très difficile de se défaire des responsables et de la surveillance constante dont on peut faire l'objet.
Je souligne, comme je l'ai indiqué dans mon exposé, qu'aucun permis n'est requis pour les secteurs tibétains hors du Tibet, par exemple dans la province du Sichuan ou la province de Qinghai. Nous avons constaté que par le passé, les diplomates qui se rendaient dans ces régions faisaient l'objet de surveillance et de filature.
Trouvez-vous cela normal que des ambassadeurs, des diplomates et des journalistes soient surveillés de cette façon, alors que des membres du Parti communiste chinois peuvent venir au Canada et se promener en toute liberté?
Monsieur Steil, je voulais poser quelques questions générales sur l'état du dialogue sino-tibétain, de votre point de vue. Je m'excuse d'avoir manqué la première partie de votre discussion avec les membres du Comité.
Nous savons que le dialogue s'est poursuivi pendant un certain temps, environ du milieu des années 2000 à la fin des années 2000. Puis, vers 2010, il a été interrompu.
Pouvez-vous nous dire quels sont, selon vous, les obstacles à la reprise du dialogue sino-tibétain et l'importance des discussions au sujet de la voie du milieu qui, comme vous le savez évidemment, est l'approche préconisée par Sa Sainteté pour assurer un compromis entre l'apparente indépendance du Tibet et la notion de l'intégration complète du Tibet dans la fédération chinoise? Il s'agit d'établir un compromis, qui ressemble beaucoup à la façon dont la fédération canadienne a été établie. Il s'agit simplement d'accorder une plus grande autonomie linguistique, culturelle et religieuse à une région, mais au sein de la fédération chinoise et de la constitution chinoise au sens large.
Pouvez-vous nous donner une mise à jour sur cet aspect et sur votre compréhension de la situation, du point de vue d'Affaires mondiales Canada?
Il y a des raisons d'être pessimiste quant à l'ouverture de la République populaire de Chine d'engager ce dialogue pour le moment. Rien ne semble le démontrer, du moins de notre point de vue. Il serait plaisant de penser qu'il y ait en coulisses, derrière l'apparente rigidité et la position inflexible du gouvernement, un peu plus d'ouverture au dialogue, mais ce n'est pas ce qu'on observe. L'opposition au dalaï-lama et au Sikyong, M. Lobsang Sangay lui-même, démontre simplement qu'il n'y a pas beaucoup d'intérêt.
Chaque fois que M. Lobsang Sangay vient au Canada — ou participe virtuellement, je suppose, comme la dernière fois —, les autorités chinoises multiplient protestations et démarches en se plaignant que nous avons des liens avec un séparatiste et un terroriste.
J'ai rencontré M. Sangay. Chaque fois qu'il s'est rendu en Chine dans le passé, les Chinois nous ont demandé de refuser de lui délivrer un visa et se demandaient comment nous avons pu lui en donner un.
Il est possible que nous voyions la ligne dure officielle, tandis qu'il y a une plus grande ouverture quelque part. Toutefois, tous les signaux que nous recevons, que ce soit directement au Tibet, au Xinjiang ou à Hong Kong, semblent indiquer qu'on met l'accent sur la stabilité et la sécurité, et le fait que la direction unifiée du Parti communiste n'accepte absolument aucun compromis porte à croire que le temps n'est pas encore venu d'entreprendre ce dialogue.
Permettez-moi d'aborder la question d'un autre angle.
Il y a un débat sur l'affirmation des protections des droits de la personne et la défense minimale des règles ou normes juridiques qui existent en Chine, notamment la langue d'enseignement dans la région autonome du Tibet. Il existe des règles relatives aux minorités ethniques et à la langue d'enseignement qui, théoriquement, semblent être quelque peu robustes — ce n'est peut-être pas le meilleur mot — ou rigoureuses pour garantir que le tibétain soit une langue d'enseignement dans la Région autonome du Tibet.
Du point de vue d'AMC, que pensez-vous du respect, par les Chinois, de leurs propres règles, telles que définies dans la Région autonome du Tibet? La langue d'enseignement est un élément essentiel, non seulement pour les militants spécialistes des questions linguistiques comme M. Tashi Wangchuck — et je me réjouis que le gouvernement ait fait des démarches à ce sujet —, mais aussi pour le Comité Canada-Tibet qui exerce ses activités ici et qui milite pour qu'on respecte à tout le moins les lois en vigueur en Chine.
Pouvez-vous nous parler de la langue d'enseignement et de ce genre de stratégie?
Absolument. C'est l'une des bases sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour défendre les intérêts. Sur ces questions, c'est une chose d'invoquer les normes internationales et les droits universels de la personne, ce que nous faisons toujours, mais en réalité, ce sont les lois chinoises elles-mêmes qui servent de fondement au respect des droits linguistiques et culturels et des libertés religieuses. Comme je l'ai dit, les tendances ne sont pas très bonnes.
Je vais vous donner un exemple. Cela dépasse le Tibet; il y a eu une réinterprétation de l'éducation bilingue en Chine, y compris en Mongolie et au Tibet. Selon la loi chinoise, plus de choses pourraient être faites.
Monsieur le président, j'aimerais revenir très rapidement sur l'échec de l'accord en 17 points, qui préfigure l'échec du principe de « un pays, deux systèmes », lequel préfigure l'échec d'une éventuelle intégration de Taïwan, ainsi que sur toute la question de l'espoir. M. Virani a abordé un peu cette question.
Est-ce qu'on continue d'assister à ce qui se passe de manière impuissante, ou y a-t-il une action concertée de la part de la communauté internationale pour essayer de forcer un changement du côté de la République populaire de Chine?
Oui, monsieur le président, je suis reconnaissant d'avoir l'occasion de répondre à la question.
Je pense qu'un problème qui a été soulevé ici, à juste titre, est la nécessité pour le gouvernement chinois de comprendre qu'il doit tenir parole s'il veut que la communauté internationale le croie.
L'accord en 17 points, bien avant que le Canada n'établisse des relations diplomatiques avec la Chine... Pour nous, il est difficile de nous appuyer sur cet accord pour exiger des comptes à la Chine, mais dans le cas de Hong Kong, sans doute, comme vous l'avez mentionné, la Déclaration conjointe sino-britannique, un traité enregistré par les Nations unies, et la violation des obligations découlant de ce traité porte à réfléchir. La Chine doit se rendre compte que son comportement a une incidence sur la confiance de la communauté internationale à son égard.
Je vais y aller rapidement, monsieur le président, parce que je vois que vous me faites signe.
Monsieur Steil, il y a un nouveau projet de liaison ferroviaire qui a été annoncé par le président Xi Jinping lui-même dans la région autonome du Tibet. Comment voyez-vous ce nouveau projet?
Est-ce que l'objectif est le développement du Tibet?
Oui, en effet, et je pense qu'il y a des arguments des deux côtés. D'une part, cela représente des possibilités économiques considérablement accrues pour les Tibétains; d'autre part, cela accélérera l'assimilation culturelle au Tibet.
Ce serait plus clair pour nous si les Tibétains étaient libres de sortir du Tibet et d'y revenir, ce qui n'est pas le cas.
Monsieur Steil, au début de votre témoignage, vous avez indiqué que vous n'êtes pas un spécialiste du Tibet. Je vous pose donc la question suivante: le ministère des Affaires mondiales a-t-il une quelconque expertise sur le Tibet? Le ministère compte-t-il des gens qui ont des connaissances?
J'entends des commentaires généraux, mais je constate aussi que nous ne savons pas grand-chose sur ce qui se passe. Savons-nous quoi que ce soit sur les tendances migratoires, la population, les personnes de Chine continentale ou d'ailleurs qui sont amenées au Tibet? S'agit-il de spéculations, ou est-ce fondé sur des renseignements provenant d'autres personnes?
Quel est l'état des connaissances à ce sujet au ministère des Affaires mondiales? Est-ce que nous dépendons des rapports de la CIA?
En ce qui concerne l'expert culturel ou linguistique, nous avons des employés d'origine tibétaine à Affaires mondiales Canada, comme dans tout le pays.
Quant à la compréhension de la situation réelle sur le terrain, je pense que nous nous appuyons tous, y compris ceux qui étudient le Tibet plus ou moins à temps plein, sur les statistiques officielles chinoises, du moins en partie. On peut douter de leur fiabilité, mais c'est tout ce que nous avons. Cela pourrait être des statistiques sur la croissance économique, qui indiquent que l'économie du Tibet croît beaucoup plus vite que la moyenne — bien qu'à partir d'une base de référence peu élevée — ou des statistiques sur la population, qui révèlent qu'environ 90 % de la population du Tibet, en lente diminution, est d'origine tibétaine plutôt que Han, par exemple.
Gardant ce genre de choses à l'esprit, il convient de se rappeler que les travailleurs migrants ne sont pas nécessairement inclus dans ces statistiques officielles, de sorte qu'elles peuvent être faussées.
Dans mon tour précédent, j'ai posé des questions sur la religion, mais je tiens à souligner que c'est une question totalement distincte de l'idée que la religion est réprimée et que le gouvernement s'emploie activement à détruire les monastères bouddhistes. Est-ce bien votre compréhension?
Oui, absolument. Je vais vous donner un exemple. Le monastère de Séra, à Lhassa, peut accueillir 2 000 moines. En 2015, selon les informations que nous avons collectées, il y avait 600 moines. Lors de la visite de l'ambassadeur Barton, ils étaient 400. Cela s'explique en partie par le fait que l'éducation obligatoire, y compris l'éducation patriotique, doit être dispensée avant que les jeunes moines puissent entrer au monastère. Donc, le nombre de moines a chuté.
Je vais y aller en rafale parce que je tiens à aborder un certain nombre d'aspects différents.
Au début, vous avez dit que le gouvernement du Canada reconnaît la République populaire de Chine à titre d'entité gouvernante du Tibet. Pour moi, cela comprend non seulement la Région autonome du Tibet, mais aussi le Tibet historique, qui est plus vaste.
Pour moi, cette reconnaissance n'a rien de controversé. Cela reflète seulement une réalité politique, et si ce n'était pas de cette réalité politique, les Tibétains n'auraient aucun problème. Dois-je donc voir dans ce commentaire autre chose qu'une simple reconnaissance de la réalité, soit que le territoire est actuellement contrôlé par le gouvernement chinois?
Je crois vous avoir entendu dire à M. Bergeron que la motion qui a été adoptée est conforme à la politique du gouvernement. La motion que nous avons adoptée exprime notre appui au dialogue en vue de l'établissement de la voie du milieu, soit une véritable autonomie pour le Tibet dans le cadre de la constitution chinoise.
Je tiens à être clair. La motion dans son ensemble — le dialogue en vue d'une véritable autonomie — est-elle conforme à la politique du gouvernement?
Monsieur le président, je devrais probablement clarifier ma position. Si j'ai mal lu ou si j'ai oublié le texte exact de la motion... La politique canadienne ne réfère pas directement à la voie du milieu. Elle fait seulement référence à notre appui au dialogue, sans en préciser le contenu.
Très bien, c'est la position actuelle du gouvernement. Il ne s'agit pas de s'opposer à la voie du milieu ni de l'appuyer. On prône le dialogue, point. Très bien.
Nous pensons beaucoup aux droits de la personne de la population du Tibet, mais je pense qu'il y a une distinction importante à faire entre parler des droits de la personne au Tibet et parler des droits des Tibétains en tant que peuple. Je me demande si le gouvernement du Canada considère les Tibétains comme un groupe ayant certains droits en tant que peuple et, si oui, quels seraient ces droits.
Monsieur le président, c'est un excellent point à soulever, car, comme le Comité le sait, une importante population de Tibétains vit hors de la Région autonome du Tibet, notamment en Inde.
La meilleure façon de le formuler, c'est que notre préoccupation pour les droits de la personne et les droits culturels et linguistiques s'applique à l'ensemble de la population tibétaine, peu importe où elle se trouve.
Je suis désolé, monsieur Steil. Permettez-moi de préciser ma question. Je ne faisais pas tant référence à la communauté de la diaspora au sens large. Cependant, lorsque vous parlez des droits d'un peuple dans sa patrie historique, cela signifie qu'il a des droits qui comprennent peut-être l'autodétermination, qu'il a des droits qui diffèrent des droits individuels, qu'il a, en tant que peuple, certains droits politiques distincts.
Considérez-vous les Tibétains comme un peuple, dans le sens qu'ils ont certains droits qui pourraient être distincts des droits individuels, notamment en matière de liberté et ce genre de choses?
Non, je ne pense pas, pour ce qui est d'une entité politique... J'essaie seulement de comprendre la question un peu plus clairement. S'il fallait demander si nous reconnaissons l'Administration centrale tibétaine, l'ACT, ou le gouvernement en exil comme une entité politique distincte, alors la réponse est non.
Que l'ACT parle ou non au nom du peuple tibétain est peut-être une question distincte de celle de savoir si le peuple tibétain en tant que peuple a des droits. Je pense que la question a été posée et qu'on y a répondu, et n'hésitez pas à la clarifier plus tard si vous le souhaitez.
Je veux poser la question suivante également. Le gouvernement du Canada a-t-il une position précise sur la question de la réincarnation — la réincarnation du dalaï-lama — et sur les efforts du gouvernement chinois pour se prononcer sur une proposition selon laquelle il déterminerait la réincarnation? Le gouvernement du Canada a-t-il une position à ce sujet? Le gouvernement du Canada fait-il des démarches sur ces questions?
Monsieur le président, je suis reconnaissant que cette question particulière ait été soulevée, car c'est un sujet de préoccupation non seulement pour le Canada, mais aussi pour nombre de nos partenaires aux vues similaires.
Mais la position, si je peux l'exposer soigneusement ici, c'est que nous soutenons le droit des bouddhistes tibétains à choisir eux-mêmes leur chef.
Merci beaucoup, monsieur Steil. Il est très intéressant d'entendre vos idées sur ce qui se passe. J'aimerais aussi beaucoup en savoir plus sur la vie sur le terrain en ce moment. Le Tibet a toujours été un pays où j'aimerais aller.
Diriez-vous qu'au cours des 30 dernières années, pour autant que vous le sachiez, il y a eu une migration à plus grande échelle de colons chinois vers la région tibétaine? De plus, le niveau de vie des habitants dans la Région autonome du Tibet, la RAT, a-t-il changé et s'est-il amélioré au cours des 10 dernières années?
Là encore, pour répondre à la question sur le niveau de vie, nous devons souvent nous référer ou nous fier aux statistiques chinoises en matière de croissance et de développement économiques. D'après ces mesures, il est clair que le niveau de vie économique a augmenté dans tous les domaines.
Notre rapport laisse entendre que ce développement économique au cours des 30 dernières années, ou même moins, a été inégalement réparti. Comme je l'ai mentionné, il y a une sorte de boucle économique fermée qui se produit là-bas. Je pense qu'en lien avec cela, il y a la question de la migration, du mouvement d'entrée. Oui, je pense que même les statistiques sur la population chinoise permettraient de reconnaître qu'il y a eu un afflux de citoyens chinois provenant d'autres régions du pays, principalement de l'ethnie Hans, qui se sont installés au Tibet.
Il est également difficile de déterminer les chiffres exacts, car il est arrivé que des fonctionnaires passent une partie de leur temps — de leur été — au Tibet, à Lhassa, puis déménagent et fassent résider leur famille à Chengdu, au Sichuan, dans les plaines, où le climat et la situation sont complètement différents. Il est difficile de déterminer, d'après les statistiques, l'ampleur exacte de la migration intérieure.
Est-ce considéré comme étant un lieu de vacances? Est-ce pour cette raison qu'ils y vont? Ils ont une place là et retournent ensuite travailler dans l'autre partie de la Chine?
Je pense que cela reflète les dures réalités du climat au sommet du monde et le développement économique relatif. Nombreux sont ceux qui ont commenté le paysage clairsemé. C'est une région de très haute altitude, où certaines personnes qui ne sont pas bien adaptées au faible taux d'oxygène en haute altitude peuvent souffrir de problèmes médicaux aggravés. De plus, le niveau de divertissement et d'urbanisation est plus faible que dans d'autres régions de la Chine. Je pense que c'est une préférence pour certains de passer une partie de leur temps dans des endroits comme Chengdu.
Nous avons parlé de certaines questions relatives aux droits de la personne. Quelle proportion des problèmes que les Chinois ont avec le Tibet, selon vous, sont attribuables à la religion par opposition à l'ethnicité, ou par opposition au désir d'indépendance? Nous savons évidemment que bon nombre des gouvernements communistes ne croient pas en Dieu, et qu'ils ne suivent pas ce genre de religion. J'imagine qu'ils ont probablement aussi un problème avec le bouddhisme. Quelle proportion des problèmes sont attribuables à cela et à leur peur de la religion par rapport à l'ethnicité ou au désir d'indépendance?
Monsieur le président, je pense que la religion est une cible particulière pour le Parti communiste en Chine. Il y a une longue histoire associée à cela. Ce que nous avons commencé à voir ces dernières années est, je dirais, à la fois une sinofication de la religion et une division, si je peux utiliser ce terme, de la religion. Il y a même des signes... Je vais utiliser l'exemple ici des minarets de l'Asie centrale dans la Région autonome ouïgoure du Xinjiang qui sont détruits dans les mosquées et remplacés par des pagodes de style chinois.
Mais le plus insidieux, je pense, c'est la division, y compris avec le bouddhisme. Il existe une association bouddhiste qui est reconnue et sanctionnée par le Parti communiste comme étant l'autorité en matière de bouddhisme en Chine. Par ailleurs, il n'y a pas de reconnaissance, et nous constatons de plus en plus que la doctrine du parti devient une exigence à intégrer dans la doctrine religieuse de toutes les religions, y compris le bouddhisme.
Merci beaucoup, monsieur Steil, d'avoir comparu devant le Comité aujourd'hui. Je crois que je peux parler au nom de tous les membres pour vous dire que nous vous en sommes très reconnaissants.
Je sais que les députés entendent votre message d'ajournement et veulent probablement que vous le mettiez à exécution. J'aimerais suggérer à mes collègues de nous réunir et de convenir d'inviter l'ambassadeur Barton au Comité à un moment qui conviendra à tout le monde. Il pourrait répondre à des questions concernant sa récente visite au Tibet, comme nous en avons entendu parler, la première visite d'un représentant canadien depuis 2015. Le Comité bénéficierait beaucoup de cette comparution. Je veux proposer cette idée, et nous pourrions peut-être prendre une décision à ce sujet ce soir.
Nous tenons une discussion sur les travaux du Comité, mais je pense que cette proposition est recevable. Je ne dis pas qu'elle est irrecevable. Est-ce une motion pour le Comité, ou cherchez-vous simplement à parvenir à un consensus? Je pense que nous serions intéressés.
Je veux obtenir un consensus d'abord, oui. Nous devrions l'avoir, mais si nous ne l'avons pas, je suppose que nous pouvons présenter cette proposition sous forme de motion.
Je pense que c'est une excellente idée, et nous devrions également donner à l'ambassadeur la possibilité de nous fournir d'autres mises à jour comme bon lui semble et allouer suffisamment de temps pour examiner tout ce dont nous avons précédemment mentionné.
Je pense que oui. C'est une directive donnée au sous-comité pour qu'il règle les détails ou pour qu'il travaille avec la greffière notamment, afin de voir ce que nous pouvons faire à cet égard. C'est la direction que prend le Comité, d'après ce que je comprends.
Merci, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je verrai certains d'entre vous dans quelques instants à notre réunion du sous-comité.