Je vous souhaite la bienvenue à la 18e séance du Comité spécial sur les relations sino-canadiennes.
Conformément à l’ordre de renvoi du mercredi 23 septembre 2020, le Comité se réunit pour étudier les relations entre le Canada et la Chine.
[Français]
Il s'agit d'une réunion hybride, conformément à la motion adoptée par la Chambre le 25 janvier 2021.
[Traduction]
Avant de donner la parole à nos témoins, puis-je proposer que nous réservions les 15 dernières minutes de la séance d’aujourd’hui pour discuter du rapport du Sous-comité et du plan de travail concernant les aspects de sécurité nationale des relations sino-canadiennes? Cela vous convient-il?
J’aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins d’aujourd’hui: l’honorable Bill Blair, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, ainsi que Rob Stewart, sous-ministre; Brenda Lucki, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada; John Ossowski, président de l’Agence des services frontaliers du Canada; David Vigneault, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité; et Shelly Bruce, cheffe du Centre de la sécurité des télécommunications.
Pardonnez-moi si j’ai écorché des noms.
[Français]
Je vous remercie tous d'être ici ce soir.
[Traduction]
Monsieur le ministre, nous sommes prêts à entendre votre déclaration préliminaire.
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Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de m'avoir cordialement invité parmi vous aujourd'hui.
Je tiens d'abord à remercier le Comité de l'excellent travail qu'il mène depuis sa création, il y a de cela un an. Nous avons, bien entendu, suivi étroitement les délibérations du Comité, qui ont été très utiles pour jeter la lumière sur les innombrables enjeux liés à notre relation avec la Chine.
Comme le président l'a mentionné, je suis accompagné aujourd'hui des hauts fonctionnaires compétents de mon ministère, ainsi que de Mme Shelly Bruce, du Centre de la sécurité des télécommunications. Ils pourront, je l'espère, répondre à toutes vos questions sur les activités de leurs organismes respectifs.
Comme vous le savez, le Canada abrite une importante communauté sino-canadienne, qui est présente dans tous les coins du pays, notamment dans ma ville. Les Canadiens d'origine chinoise forment une trame très importante du tissu social canadien. Nous reconnaissons tous, bien sûr, que la Chine est un joueur important pour le Canada sur le plan des enjeux mondiaux, sans compter qu'elle offre des possibilités économiques aux entreprises canadiennes.
Je tiens à souligner qu'aucune de mes remarques ne vise les Canadiens d'origine chinoise. D'ailleurs, j'aimerais signaler que nous avons assisté, partout au pays, à une augmentation alarmante de comportements racistes et discriminatoires ne visant les personnes d'origine asiatique pour aucun autre motif que leur ethnicité. Cela est odieux et répréhensible; je crois que tous les membres du Comité et le gouvernement partagent cet avis. C'est inacceptable, et il faut dénoncer de tels actes le plus vigoureusement possible.
Il est également important que nous fassions très attention aux mots que nous utilisons dans cette discussion. Nous sommes ici pour parler des relations du Canada avec le gouvernement chinois. Lorsque celui-ci faillit à ses obligations internationales, nous devons certainement riposter de façon ferme, mais il ne faut pas oublier que nous parlons du gouvernement chinois.
Personne, monsieur le président, n'a oublié que le gouvernement chinois continue de détenir arbitrairement les Canadiens Michael Kovrig et Michael Spavor. En fait, plus tôt cette semaine, lors de sa rencontre avec le , le président des États-Unis, Joe Biden, a exprimé le soutien de son gouvernement pour les deux Michael et s'est engagé à entreprendre des efforts pour leur libération.
Nous savons que l'ingérence étrangère au Canada est une triste réalité pour beaucoup de gens. En décembre, dans une lettre à l'intention de tous les députés ici présents et à la Chambre — lettre qui a ensuite été déposée à la Chambre des communes —, j'ai franchi une étape importante en décrivant publiquement les menaces liées à l'ingérence étrangère, ainsi que le travail essentiel effectué par les collectivités de la sécurité et du renseignement au Canada.
Cela fait suite aux mesures que le a prises pour permettre au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, ou CPSNR, de désigner, pour la première fois, dans les versions non classifiées et publiques de son rapport, des pays particulièrement actifs au Canada, y compris le gouvernement de la Chine. À titre d'organisme d'examen indépendant, doté d'un mandat de portée générale, le CPSNR joue un rôle important pour la sécurité nationale. Il compte parmi ses membres des sénateurs et des députés qui possèdent tous des autorisations de sécurité de niveau « Très secret », ce qui leur permet de recevoir des séances d'information et des documents classifiés concernant les travaux de leur comité.
Monsieur le président, nous continuerons de sensibiliser les Canadiens, les entreprises et les universitaires afin qu'ils disposent des informations et des outils nécessaires pour se protéger, alors que nos organismes recueillent des renseignements à l'appui des enquêtes. Cette sensibilisation a lieu d'être, car les activités d'ingérence étrangère, peu importe leur nature, viennent miner nos valeurs et nos institutions démocratiques, en plus de menacer notre souveraineté, notre prospérité économique, ainsi que la sécurité et les intérêts des Canadiens. Ces activités sont inacceptables et ne seront pas tolérées.
Nous surveillons activement et attentivement la situation, en cernant notamment les nouvelles méthodes d'ingérence étrangère qui pourraient être utilisées pour menacer notre pays. Plusieurs organismes appartenant à mon portefeuille — en particulier le Service canadien du renseignement de sécurité, la Gendarmerie royale du Canada et Sécurité publique Canada — participent à ce travail et veillent à combattre l'ingérence étrangère sous toutes ses formes. Le SCRS et la GRC emploient l'ensemble des mesures dont ils disposent en vertu de leur mandat pour non seulement enquêter sur les risques pour les intérêts canadiens, mais aussi pour contrer les menaces et garder les Canadiens à l'abri des dangers et de l'intimidation.
Le SCRS et la GRC ont aussi des mécanismes de signalement en place pour toute personne qui souhaiterait signaler une menace à la sécurité nationale, notamment en matière d'ingérence étrangère.
Je peux assurer aux membres du Comité et à tous les Canadiens que nos organismes de sécurité, de renseignement et d'application de la loi resteront vigilants pour protéger les intérêts des Canadiens. Nous sommes prêts à agir, et nous agissons, contre les menaces qui pèsent sur les intérêts canadiens à l'intérieur de nos frontières et qui sont causées par les activités hostiles d'acteurs étatiques. Nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec nos partenaires nationaux et internationaux, y compris le Groupe des cinq et nos autres alliés, afin de contrer l'ingérence étrangère.
Cela dit, si l'ingérence étrangère constitue un enjeu prioritaire de mon portefeuille, il est loin d'être le seul qui nous préoccupe.
Il est bien connu que la Chine est l'une des principales sources de fentanyl et de produits chimiques précurseurs utilisés pour fabriquer ce puissant opioïde synthétique, qui peut être mortel. Le fentanyl illicite et d'autres substances semblables sont mélangés à d'autres drogues, ce qui les contamine. Tout cela continue de contribuer de façon importante à la crise de surdoses qui a tragiquement écourté la vie de nombreuses personnes au Canada.
L'Agence des services frontaliers du Canada, ou ASFC, s'appuie sur les renseignements et une variété d'outils de détection, de techniques et de technologies scientifiques pour prévenir la contrebande transfrontalière de drogues illicites, ce qui comprend des substances toxiques comme le fentanyl. Au cours des quatre dernières années, l'ASFC a procédé à 335 saisies, pour une quantité totale de 42,2 kilogrammes. Dans 129 de ces saisies, la Chine était le pays d'achat désigné.
Pour sa part, la GRC a établi, en collaboration avec l'ASFC et Postes Canada, le Centre des opérations conjointes sur le crime organisé afin de détecter et de retracer l'importation d'opioïdes illicites et de prendre les mesures d'application de la loi qui s'imposent. En 2017, nous avons adopté une loi qui permet à nos agents, lorsqu'ils ont des motifs raisonnables, de fouiller le courrier international pesant moins de 30 kilogrammes. La GRC collabore également avec les partenaires internationaux d'application de la loi afin d'enquêter sur l'importation illégale de fentanyl et de produits chimiques précurseurs au Canada et d'y mettre fin. En ce qui concerne la Chine, la GRC, l'ASFC et leurs homologues ont tous convenu de collaborer afin de cibler le trafic de fentanyl.
Permettez-moi maintenant de me pencher sur un autre enjeu d'intérêt pour le Comité. Je sais que la technologie 5G a été mentionnée lors de vos audiences et que le gouvernement du Canada ne se fait aucune illusion quant aux problèmes de sécurité que pose cette décision...
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Merci beaucoup, madame Yip.
Je pense qu'il s'agit là d'une question très importante. Je vous dirais que nos organismes nationaux de renseignement de sécurité et les forces de l’ordre — qui se joignent à moi de façon admirable aujourd'hui — font un travail extraordinaire. En même temps, je pense qu’il est tout aussi important... J’ai suivi très attentivement l'important travail que fait ce comité. Ce comité a soulevé un certain nombre de questions vraiment importantes qui, je le sais, préoccupent également les Canadiens et, assurément, nos collègues du Parlement. J’ai donc pensé qu’il était tout à fait approprié et nécessaire — en grande partie pour répondre aux questions et préoccupations soulevées au sein de ce comité — de fournir à tous nos collègues et par leur entremise, de fournir aux Canadiens une description plus détaillée des menaces qui existent actuellement dans ce pays et de leur expliquer certains des travaux importants que font en leur nom nos agences de renseignement de sécurité nationale et nos organismes d’application de la loi.
Comme toujours, nous essayons d’être aussi transparents et ouverts que possible. Je suis par ailleurs certain que ce comité reconnaît que les renseignements de sécurité... les renseignements que ces organismes recueillent, leurs techniques d’enquête et une grande partie de leurs activités ne peuvent pas et ne doivent pas être rendus publics puisque cela pourrait compromettre l’important travail qu'ils effectuent pour assurer la sécurité des Canadiens.
En même temps, je pense que les Canadiens ont besoin d’être assurés que le gouvernement reconnaît l’environnement de la menace, qu'il prend des mesures appropriées et énergiques pour y répondre et qu'il fera tout ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts canadiens. Les Canadiens qui pourraient être victimes d’intimidation ou d’une influence inappropriée dans la société canadienne doivent savoir que nous sommes là pour eux et que nous sommes là pour les soutenir. S’ils ont besoin de notre aide, nous avons la capacité et les outils nécessaires pour intervenir de manière appropriée.
C’est la raison pour laquelle nous nous sommes ouverts au public à ce sujet. Je pense que les Canadiens veulent savoir que leur gouvernement veille à leurs intérêts supérieurs, et j'espérais leur transmettre cela grâce à cette lettre et avec la collaboration de chacun d'entre vous.
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J'aimerais d'abord saluer les témoins et les remercier d'être parmi nous ce soir.
Monsieur le ministre, à une autre époque, nous aurions probablement eu l'occasion de nous croiser dans le cadre d'une conférence fédérale-provinciale des ministres de la Sécurité publique, mais c'était évidemment à une autre époque, comme je viens de l'évoquer.
Je vous remercie d'être des nôtres.
Nous abordons aujourd'hui des sujets extrêmement sensibles et extrêmement importants. Je sais que, comme cette réunion est diffusée publiquement, il y a un certain nombre d'informations que vous ne pourrez pas nous communiquer. Peut-être alors voudrez-vous nous faire parvenir, sur une base confidentielle, les réponses à certaines questions auxquelles vous pourriez ne pas pouvoir répondre de vive voix aujourd'hui même.
J'aimerais vous poser trois questions concernant la révélation selon laquelle un centre de réception des demandes de visas du Canada à Pékin avait été géré par une société chinoise appartenant au bureau municipal de la sécurité publique de la Chine.
Ma première question est bien simple: comment sommes-nous arrivés à sélectionner cette entreprise?
Ma deuxième est la suivante: quelle garantie avons-nous que les informations recueillies auprès des gens qui font appel à ce bureau de demandes de visas, qu'il s'agisse de passeports ou de données biométriques, ne seront pas utilisées par le gouvernement de la République populaire de Chine?
Ma troisième question est celle-ci: quelles mesures faut-il prendre pour que la République populaire de Chine n'exerce pas, par l'entremise de ce bureau de demandes de visas, un contrôle sur de possibles dissidents qui voudraient quitter le territoire chinois?
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Je pense qu’ils pourront aborder ce sujet plus tard. Je dirais que c’est quelque chose que les Canadiens veulent vraiment que vous sachiez.
J’ai une question à propos de ce partenariat de 4,8 millions de dollars — de l'argent provenant des impôts — entre le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et Huawei, que vous ne cessez de qualifier d’entreprise, mais qui est bien sûr une ramification du régime communiste chinois.
Le a déclaré que ce partenariat était basé sur « des recommandations éclairées... de grands analystes de la sécurité », mais bien sûr, les propres analystes de la sécurité du Canada déconseillent de permettre aux entités du Parti communiste d'avoir accès à la recherche intellectuelle canadienne. En fait, les chercheurs disent que ce que le régime communiste chinois recherche, c’est « l’aide du Canada en matière d’intelligence artificielle, de biotechnologie... d’informatique quantique, c'est-à-dire dans tous les domaines qui peuvent les aider sur le plan militaire ».
Pouvez-vous nous dire qui a conseillé au de s’associer avec Huawei? De plus, en tant que ministre de la Sécurité publique, étiez-vous au courant de ce partenariat qui porte atteinte à la sécurité publique et nationale du Canada? Dans la négative, pourquoi les décisions concernant l'utilisation de fonds publics et touchant la sécurité publique vous sont-elles cachées?
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Je vous remercie, monsieur le président. Je vais essayer de procéder rondement.
Je veux revenir sur les questions que j'ai amorcées. Il reste à savoir si d'éventuels dissidents voulant sortir du territoire de la République populaire de Chine ne se retrouveront pas en danger en passant par ce centre de réception des demandes de visa.
Monsieur le ministre, je dois dire que je ne suis pas vraiment rassuré par les réponses que vous nous avez données. Peut-être y a-t-il des informations que vous ne pouvez pas dévoiler, ce que je peux comprendre, et peut-être pouvez-vous simplement dire que, ce qui semble inquiétant, c'est le fait que c'est une société chinoise. Or, je tiens à vous rappeler que, en vertu de la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong, toutes les entreprises chinoises doivent collaborer à la sécurité nationale de la République populaire de Chine.
On sait notamment que Huawei a communiqué des informations de l'Organisation de l'unité africaine lorsqu'elle a été sollicitée pour travailler pour ladite organisation.
On sait également qu'une fuite de données de la part de l'entreprise Shenzhen Zhenhua Data Information Technology Co a été révélée récemment. Il y a lieu d'être inquiet de la sous-traitance à une entreprise chinoise des données personnelles d'un certain nombre de personnes qui souhaitent se prévaloir d'un visa pour venir sur le territoire canadien.
De grâce, monsieur le ministre, pouvez-vous me rassurer?
Monsieur le ministre, le Comité a entendu beaucoup de résidants canadiens, principalement d'origine chinoise, déclarer qu'ils font l'objet d'intimidation. Ils ont essayé d'obtenir de l'aide, mais ils ont l'impression que les autorités se renvoient la balle. Ils vont voir les services de police locaux, comme vous l'avez souligné, où on leur dit qu'ils doivent communiquer avec le SCRS. Ils se rendent au SCRS, où on leur dit qu'ils doivent communiquer avec les services de police locaux ou la GRC, s'il n'y a pas de force de l'ordre locale. Il me paraît absurde qu'il n'y ait pas de point de contact général, un service que certains d'entre nous jugent nécessaire.
Dans votre lettre de décembre adressée au Comité, vous parlez du Réseau info-sécurité nationale de la GRC et de son numéro sans frais. Vous affirmez que le SCRS a un numéro de téléphone ou un formulaire en ligne qui permet de signaler un incident, pourtant on nous dit constamment que les gens sont renvoyés d'une institution à l'autre. Ils n'obtiennent aucune aide.
S'il s'agit là de points de contact nationaux… La semaine dernière, un ressortissant saoudien, un réfugié au sens de la Convention qui est au Canada depuis plus d'un an, a disparu. L'un de ses amis, qui était fort inquiet, a communiqué avec votre ministère, et on lui a dit de téléphoner aux services de police locaux. Ces services n'ont aucune méthode pour traiter ce type d'incident ou de circonstances.
D'où vient toute cette confusion? Y a-t-il un point de contact national qui veille à ce que ces détails soient clairs? Pourquoi votre ministère envoie-t-il les gens vers les services de police locaux?
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Merci, monsieur le président.
Je vais simplement démarrer ma minuterie ici, afin de ne pas déborder.
Merci, monsieur le ministre, de comparaître devant le Comité.
À titre de premier Canadien d'origine chinoise de l'Ontario élu à la Chambre des communes, je suis très bien placé pour savoir ce qu'est la discrimination anti-asiatique, et je sais que tous les députés à la Chambre et au sein de ce comité seront d'accord pour dire que la discrimination anti-asiatique est inacceptable.
Mais je ne veux pas mettre l'accent là-dessus. J'aimerais plutôt me concentrer sur les risques relatifs à la sécurité nationale et à la propriété intellectuelle, de même que sur les questions des droits de la personne entourant l'entreprise Huawei. Le SCRS a précisé que la Chine constitue une menace pour le Canada en matière de technologie 5G. Par le passé, il a indiqué qu'elle est une menace pour notre sécurité nationale ainsi que pour notre propriété intellectuelle, qu'elle dérobe. Huawei représente maintenant un autre volet de cette menace, soit la menace contre nos croyances fondamentales dans les droits de la personne et dans la dignité de tous les peuples. Il devient on ne peut plus évident que Huawei participe à un génocide dans la province chinoise du Xinjiang. Les documents officiels chinois obtenus par le Consortium international des journalistes d'investigation révèlent que Huawei joue un rôle direct dans le déploiement de la technologie utilisée dans le Xinjiang pour brimer le peuple ouïghour et commettre un génocide.
En outre, il y a à peine deux mois, le Washington Post rapportait que Huawei met actuellement à l'essai un logiciel d'intelligence artificielle qui peut instantanément, en une milliseconde, reconnaître un membre de la minorité ouïghoure et le faire arrêter en alertant les forces de l'ordre. Le Washington Post a obtenu des documents internes de Huawei qui précisent de quelle façon l'entreprise collaborait en 2018, il y a seulement trois ans de cela, avec une entreprise spécialisée en reconnaissance faciale pour mettre à l'essai un système de vidéosurveillance qui intègre de l'intelligence artificielle et balaie instantanément les visages dans une foule pour, à l'aide de programmes ultramodernes d'intelligence artificielle, établir le sexe et l'ethnicité de chaque personne. Si le système détecte le visage de membres de la minorité musulmane ouïghoure, il déclenche une « alarme au Ouïghour », puis le programme d'intelligence artificielle établit s'il doit signaler cette personne aux forces de l'ordre chinoise à des fins d'arrestation dans le cadre de leur répression brutale. De plus, des documents officiels publiés l'an dernier dans le New York Times révèlent que dans une seule ville chinoise, ce système de surveillance a balayé le visage d'Ouïghours un demi-million de fois en un mois.
Il y a à peine deux mois, dans la foulée de ces révélations, un haut dirigeant de Huawei, Tommy Zwicky, vice-président des communications pour le Danemark, a subitement remis sa démission en raison des activités de Huawei facilitant ce génocide dans la province du Xinjiang. Il déclare avoir démissionné parce qu'il est devenu évident pour lui que l'entreprise ne prend pas au sérieux les questions de surveillance publique et de droits de la personne dans le Xinjiang.
Ma question est la suivante: êtes-vous au fait du rôle que Huawei joue dans ce génocide dans le Xinjiang?
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Nous avons travaillé d'arrache-pied pour garder certains des précurseurs chimiques et ces drogues hors du pays. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, nous avons adopté une loi visant à donner à l'ASFC plus de pouvoir, par exemple, pour fouiller le courrier, qui était une méthode d'importation très courante et regrettable de ces produits au Canada.
La GRC travaille également en étroite collaboration avec des partenaires internationaux. Nous le faisons dans le cadre de différentes relations, notamment par l'intermédiaire de l'unité de lutte contre la criminalité transfrontalière, mais aussi en travaillant à l'échelle internationale, parce qu'il s'agit d'un effort mondial.
L'une des plus grandes enquêtes récemment menées en Asie du Sud-Est a permis de distinguer une organisation responsable de l'expédition de drogues d'une valeur de plusieurs milliards de dollars dans le monde entier, y compris au Canada, et je sais que la GRC participe pleinement à ces enquêtes.
Nous travaillons en étroite collaboration non seulement avec nos partenaires du Groupe des cinq, mais aussi avec tous nos partenaires internationaux afin de nous attaquer à ces questions, et nous rétablissons les ressources de l'ASFC, c'est-à-dire certains des outils et des technologies dont elle a besoin pour garder ces produits chimiques et ces drogues hors du pays.
L'interdiction de l'offre est le premier pilier de la Stratégie nationale antidrogue du Canada, au même titre que la réduction de la demande, la réduction des méfaits, la prévention et le traitement.
Nous sommes très conscients de cette responsabilité, et nous travaillons avec diligence à garder ces drogues hors du pays.
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Je vous remercie, monsieur le président.
C'est à mon tour de saluer tous les témoins qui sont ici avec nous. J'en ai rencontré plusieurs déjà parce que j'étais membre du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR. Je veux aussi vous féliciter pour tout le travail que vous faites pour protéger les Canadiens, ici et ailleurs.
J'aimerais poser une question, à laquelle M. Vigneault voudra sans doute répondre.
Je ne veux pas jouer sur les définitions ou sur le vocabulaire, mais, au sein du CPSNR, nous parlions aussi d'influence étrangère, d'ingérence étrangère, de cybermenace et d'espionnage.
Dans le contexte de la Chine, est-ce que ces autorités jouent sur tous ces paliers, ici, au Canada?
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Je vous remercie beaucoup, monsieur Dubourg. Je suis heureux de vous revoir de manière virtuelle.
Je vous dirai que le gouvernement chinois est effectivement impliqué à tous ces niveaux. En matière d'influence diplomatique, il est tout à fait normal que ces relations entre États aient lieu.
En matière d'interférence, comme je l'ai dit publiquement, les entités du gouvernement chinois interfèrent avec la vie démocratique canadienne. Elles interfèrent avec des gens au Canada en utilisant des gens de la Chine, en utilisant des cybermenaces et en utilisant également des gens ici, au Canada, qui sont cooptés pour travailler avec le gouvernement chinois.
C'est un élément que l'on étudie. Avec la Chine, mais également avec d'autres pays, nous devons absolument rester sur nos gardes, prendre des mesures très concrètes pour protéger les Canadiens et les Canadiennes et le faire de façon coordonnée avec nos alliés.
C'est seulement de cette façon que nous pourrons, à mon avis, protéger les Canadiens.
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Je vous dirai, monsieur Dubourg, que c'est un travail sur lequel nous devons nous pencher constamment. En me basant sur l'expérience que j'ai acquise au fil des ans, je peux vous dire que le partage de l'information se fait très bien. Évidemment, nous avons des mandats différents, que nous devons respecter. Lorsque nous devons fournir certains de nos renseignements aux organismes d'application de la loi, par exemple, tout un processus est requis. Utiliser le renseignement comme preuve devient parfois extrêmement complexe.
Cela dit, des initiatives très précises ont été mises en œuvre. Par exemple, la GRC, Affaires mondiales Canada, le Centre de la sécurité des télécommunications et nous, au SCRS, avons mis sur pied le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections. Ce processus, qui traite spécifiquement des menaces relatives aux élections, nous permet de partager en temps réel des renseignements et des analyses et de donner des avis concrets au gouvernement.
Il est aussi très important, en fonction de nos mandats respectifs, de prendre des mesures concrètes et très directes pour réduire la menace. Cela concerne notamment nos collègues du CST, lorsqu'ils doivent bloquer des menaces cybernétiques, ou le SCRS, qui doit prendre des mesures très concrètes pour réduire la menace à l'égard du processus démocratique, qui touche les Canadiens et les Canadiennes.
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Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs, merci, madame Lucki, d'être restés avec nous. Je tiens à remercier également Mme Bruce.
J'ai une question à vous poser à propos de la dépendance des universités canadiennes à l'égard de la recherche collaborative ou du financement de la recherche par la RPC ou par des sources liées à la RPC. Il y a deux programmes qui ont été.... Un programme a changé de nom. Le gouvernement chinois joue un rôle dans le « programme mille talents » de la RPC, apparemment rebaptisé « programme national de recrutement d'experts étrangers de haut niveau ».
Je crois comprendre qu'en 2018, le SCRS a commencé à mettre en garde les universités contre les dangers d'une collaboration avec la Chine dans le domaine de la recherche. Nous savons qu'aux États-Unis, le FBI menait un programme semblable, et que des accusations ont été portées contre des universitaires américains et chinois pour fraude présumée, parce qu'ils avaient caché leur participation à ces programmes.
Je veux juste savoir, tout d'abord, quel genre de conseils vous donniez aux universités. De quoi les avertissiez-vous, et de quel type de programme s'agissait-il? De plus, avez-vous porté des accusations à cet égard? Des accusations ont-elles été portées — je suppose par la GRC — relativement à ce genre de travail universitaire?
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Je vous remercie, commissaire Lucki.
La question est fort complexe. La primauté du droit s'applique au Canada. Nous devons tenir compte du droit qu'ont les personnes accusées d'obtenir l'information. Mais quand nous avons l'information et utilisons des sources de nature très délicate, nous devons aussi protéger ces renseignements, à défaut de quoi nous ne pourrons poursuivre nous-mêmes nos activités de renseignement ou recevoir de l'information de nos partenaires.
C'est une question très complexe. Je ne voudrais pas donner au Comité l'impression que tout est résolu.
Sous la houlette de la commissaire Lucki, toutefois, nous avons accompli beaucoup de travail pour améliorer la situation. Le groupe de travail dont elle a parlé au sujet de l'examen opérationnel a proposé des idées très précises. Nous bénéficions de l'expertise d'un ancien sous-ministre de la Justice, qui supervise ces travaux, et d'un éminent avocat de la défense qui est à même d'examiner les processus et les problèmes de la GRC et du SCRS afin d'analyser tous les facteurs, notamment l'aspect culturel, qui entravent l'échange de renseignements.
Je dois dire que le processus est encore en cours. Il reste encore du travail à faire, malheureusement.
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Permettez-moi de récapituler.
Si je comprends bien, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, par l'intermédiaire de Services publics et Approvisionnement Canada, a négocié un contrat avec VFS Global, et ce, sans faire intervenir les agences de renseignements et de sécurité pour garantir la sécurité des informations qui sont recueillies sur place, à Pékin. De plus, VFS Global a sous-traité avec l'entreprise Beijing Shuangxiong Foreign Service Company.
D'une part, quelle garantie avons-nous que VFS Global a vu à l'application des règles visant la communication des renseignements de façon aussi rigoureuse qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et Services publics et Approvisionnement Canada? D'autre part, monsieur Stewart, êtes-vous au courant que VFS Global est financé à même un fonds d'investissement chinois?
Comme un dit en bon québécois, « tout est dans tout ». J'ai l'impression que les Chinois se trouvent en amont et en aval du processus d'octroi des visas canadiens.
Est-ce que cela vous préoccupe?
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Monsieur le président, puisqu'on a décidé de se pencher sur les deux documents en bloc, j'aimerais simplement formuler un commentaire sur le rapport.
Les derniers commentaires de nos collègues conservateurs donnaient à penser qu'ils nous soumettraient une opinion complémentaire. Je me permets de leur signaler que cela m'a déçu. Cela dit, j'ai lu avec attention le contenu de leur opinion complémentaire et celui-ci ne m'a pas surpris. Je referme maintenant la parenthèse, étant donné que c'était leur privilège de présenter une opinion complémentaire.
Je croyais toutefois que, dans un souci d'unanimité, nous allions présenter un rapport unanime. Les collègues conservateurs n'avaient pas indiqué clairement leur intention. Nous l'avons découverte après coup. C'est une petite déception, mais pas tout à fait une surprise, étant donné que les derniers commentaires laissaient présager cette intention. Je n'ai rien d'autre à ajouter à ce sujet.
Pour ce qui est du plan de travail, je dois dire qu'aujourd'hui, contrairement à la dernière fois, je suis plutôt content que nous ayons un document complet sous les yeux. Cela me semble très intéressant. Le plan que nous avons ici ne me pose pas vraiment de problème. J'aimerais cependant formuler deux commentaires.
Je croyais que nous nous étions entendus pour entendre M. Michel Juneau-Katsuya. M. Paul-Hus, qui prendra la parole dans un instant, d'après ce que j'ai compris, pourra me dire si j'ai rêvé encore une fois. Par ailleurs,, j'ai cru comprendre que Mme Porteous avait attiré notre attention sur un professeur de l'UQAM qui s'exprime en français, parle le mandarin et est d'origine chinoise. Il s'agit du professeur Ting-Sheng Lin. Je serais d'accord pour ajouter ce témoin dans notre plan de travail. Par contre, comme il faudrait alors retirer un témoin de la liste, je ne sais pas lequel ce serait. Je vois le nom de M. Paul Evans, de l'Université de la Colombie-Britannique.
La contribution que peut apporter M. Evans — et je prends ce nom au hasard — est-elle plus pertinente ou moins pertinente que celle de M. Ting-Sheng Lin?
Les analystes sont peut-être en mesure de nous éclairer à ce sujet.
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Je suis ravi de répondre, très brièvement.
Chers collègues, je pourrais examiner le plan de travail et faire mes choix en fonction de mes propres préférences. Les analystes sont des experts indépendants qui nous présentent un plan de travail comportant un éventail équilibré de témoins proposés. Selon moi, nous avons déjà tenu beaucoup de séances à huis clos cette année, alors allons de l'avant.
Je suis disposé à mettre de côté tous les petits désaccords que je pourrais avoir au sujet du plan de travail et à proposer d'adopter le plan de travail que nous avons pour aller de l'avant. Je propose une motion à cette fin. Il n'y a aucune prise de contrôle. Les membres sont libres de voter contre la motion si elle ne leur convient pas, mais je propose une motion qui, selon moi, nous permettra d'aller de l'avant rapidement.
Pour ce qui est de dire que quelque chose relève du mandat du Sous-comité ou du Comité principal, tout ce que fait le Sous-comité revient devant le Comité principal, qui doit ratifier toutes les décisions. Je propose, dans l'intérêt public, que nous tentions de faire une utilisation optimale du temps, d'éviter d'autres débats à huis clos et de simplement adopter le plan de travail. Si certains ne l'aiment pas, ils peuvent voter contre lui, mais c'est ce que je propose de faire.
Je vous remercie.