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Bonjour à tous. La séance est ouverte.
Bienvenue à la 10e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes. Conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 septembre 2020, nous siégeons aujourd'hui suivant une formule hybride.
Nos délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. Je vous rappelle que l'on présente toujours à l'écran la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du comité.
J'aimerais d'abord prendre un instant pour faire le point avec mes collègues députés concernant certains changements apportés au calendrier de nos travaux.
Pour faire suite à la motion que nous avons adoptée mardi dernier, je veux vous dire que les quatre témoins convoqués ont accepté notre invitation à comparaître. Il y a toutefois un problème avec le calendrier. Le greffier et moi-même nous sommes mis à la recherche de solutions dès que la motion a été adoptée. Voici où nous en sommes aujourd'hui. Je présume que notre comité continuera de siéger les mardis et les jeudis de 11 heures à 13 heures, mais n'oubliez pas que ces choses-là peuvent changer.
Pour cette étude sur la capacité nationale de fabrication d'un vaccin, nous allons accueillir le président de l'Agence de la santé publique du Canada le mardi 19 janvier. Ce sera une date supplémentaire ajoutée à notre calendrier si nous pouvons obtenir l'autorisation de tenir une séance hybride. Nous allons aussi accueillir la lors de cette même séance du 19 janvier si l'on nous permet de la tenir. Le n'était malheureusement pas disponible pour notre séance de jeudi, et il ne nous a pas été possible de siéger à un autre moment dans la journée. Nous avons même essayé de voir si nous aurions pu faire une permutation avec un autre comité ou même ajouter une autre période de séance cette semaine, mais rien de cela n'était malheureusement possible. Le ministre Bains nous a toutefois indiqué qu'il pourrait être des nôtres lors de l'une des trois premières séances que nous tiendrons à notre retour en janvier. La doit comparaître le jeudi 28 janvier.
Pour ce qui est de l'étude sur l'accessibilité et l'abordabilité des services de télécommunication, comme vous le savez, nous devions recevoir les représentants de Bell le 1er décembre, mais il a fallu reporter leur comparution étant donné que nous avons plutôt tenu une séance conformément au paragraphe 106(4) du Règlement. Ces témoins devraient maintenant comparaître le mardi 26 janvier.
Je tiens à vous transmettre toute l'information à ma disposition. Comme je l'ai indiqué, nous avons tenté de voir avec le greffier, le greffier principal et les whips s'il était possible d'ajouter des séances la semaine prochaine, soit celle du 14 décembre. Les négociations entre les différentes parties se poursuivent, notamment quant à la possibilité de tenir des séances hybrides prolongées.
J'ai également indiqué à tous nos témoins que nous allions communiquer avec eux si jamais la tenue de séances supplémentaires nous permettait de les accueillir plus tôt.
Je voulais faire ces mises au point au bénéfice de tous de telle sorte que vous puissiez planifier votre emploi du temps en conséquence. Dès que nous en saurons plus long, notre greffier va communiquer avec vous pour vous en informer.
Sur ce, je vais maintenant faire un rappel des règles à suivre pour le bon déroulement de la séance d'aujourd'hui.
Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Les services d'interprétation sont offerts pour cette réunion. Vous avez le choix au bas de votre écran entre les canaux « parquet », « français » et « anglais ». Si vous êtes dans la salle du Comité, vous procédez de la manière habituelle pour les réunions en personne en gardant à l'esprit les directives du Bureau de régie interne concernant le port du masque et les protocoles sanitaires.
Avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme. Si vous êtes en vidéoconférence, vous devez cliquer sur l'icône du microphone pour rétablir le son. Quant aux membres du Comité qui se trouvent dans la salle, leur microphone sera contrôlé comme à l'habitude par l'agent des délibérations et de la vérification.
Je vous rappelle que toutes les interventions des députés et des témoins doivent être transmises via la présidence et que votre micro doit être éteint lorsque vous n'avez pas la parole.
Nous allons faire de notre mieux, le greffier et moi, pour tenir à jour une liste des intervenants. S'il y a quelque changement que ce soit, veuillez en aviser le greffier qui me transmettra l'information.
Comme d'habitude, je vous montrerai un carton jaune quand il vous restera 30 secondes pour votre intervention et un carton rouge quand votre temps de parole sera écoulé. Je vous prierais de vous en tenir au temps alloué afin que tous les membres du Comité puissent poser leurs questions à nos témoins.
Le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes se réunit aujourd'hui pour poursuivre son étude sur l'accessibilité et l'abordabilité des services de télécommunication au Canada.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Pour gagner du temps, je ne vais pas répéter tous vos titres qui sont déjà indiqués dans l'avis de convocation.
Nous accueillons donc MM. Jay Thomson et Ian Stevens de la Canadian Communications Systems Alliance; M. John Lawford du Centre pour la défense de l'intérêt public; MM. Robert Ghiz et Eric Smith de l'Association canadienne des télécommunications sans fil, M. Andy Kaplan-Myrth de TekSavvy Solutions Inc.; M. David Brown, de FSET Information Technology; et M. Tamir Israel de la Clinique d'intérêt public et de politique d'Internet du Canada Samuelson-Glushko.
Chaque organisation aura droit à cinq minutes pour nous présenter ses observations préliminaires, après quoi nous passerons aux questions des députés.
Nous débutons par les représentants de la Canadian Communication Systems Alliance. Vous avez cinq minutes.
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Merci, madame la présidente, et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je m'appelle Ian Stevens et je suis membre du conseil d'administration de la Canadian Communication Systems Alliance (CCSA). Je suis également directeur général d'Execulink Telecom, une entreprise installée à Woodstock, en Ontario. Je suis accompagné aujourd'hui du directeur général de la CCSA, M. Jay Thomson.
Merci de nous donner l'occasion de participer à vos importantes délibérations concernant l'accessibilité et l'abordabilité des services de télécommunication. M. Thomson et moi-même avons comparu devant votre comité en mai dernier alors que vous vous penchiez sur les mesures prises par le Canada en réponse à la pandémie. M. Thomson avait alors présenté nos observations préliminaires. Aujourd'hui, c'est à mon tour.
Les membres de la CCSA sont des petites et moyennes entreprises de communication dotées d'installations qui desservent principalement les régions rurales du Canada. Nos membres aident le gouvernement à atteindre son objectif d'accès universel à large bande en offrant dans les communautés qu'ils desservent des débits qui atteignent ou surpassent l'objectif de 50/10 mégaoctets par seconde. Nos membres voudraient aussi que ces collectivités puissent bénéficier de la concurrence entre les fournisseurs de services mobiles, mais la plupart des titulaires de licence les empêchent de le faire.
La conjoncture économique fait en sorte que l'aide gouvernementale est nécessaire pour offrir l'accès à large bande aux Canadiens dans les collectivités non desservies ou mal desservies. Le soutien gouvernemental est également requis pour qu'un plus grand nombre de Canadiens puissent avoir accès à des services de téléphonie mobile rendus abordables par la concurrence. Mon travail à Execulink et mon rôle au sein de la CCSA m'ont permis de savoir vraiment à quoi m'en tenir quant aux mesures qui produisent des résultats et aux moyens qu'il faut encore mettre en œuvre pour rendre les services de télécommunication plus accessibles et abordables dans le Canada rural. Mon entreprise a bénéficié de différentes contributions financières du gouvernement qui l'ont aidé à étendre et à bonifier le service à large bande dans le sud-ouest de l'Ontario, y compris dans une communauté des Premières Nations. Aucun de ces projets n'aurait pu être réalisé de façon rentable sans l'aide financière du gouvernement.
Les programmes gouvernementaux de financement sont axés sur un objectif d'abordabilité. En général, on évalue l'abordabilité en comparant les prix facturés en milieu rural à ceux qui ont cours dans les secteurs urbains. Nous savons qu'il y a des Canadiens qui doivent payer plus de 200 $ par mois seulement pour devoir se contenter d'un service extrêmement médiocre. À nos yeux, on ne peut certes pas parler d'abordabilité en pareil cas. Cela dit, on ne devrait pas utiliser uniquement les prix facturés en milieu urbain comme base de comparaison pour mesurer l'abordabilité des services dans le Canada rural. Les membres du Comité qui représentent des circonscriptions rurales savent trop bien que les investissements et le temps à consacrer au porte-à-porte varient en fonction de la superficie du territoire à couvrir. Il en va de même pour nous. Pendant que les fournisseurs de services Internet en milieu urbain calculent le nombre de portes par kilomètre, nous devons considérer dans les secteurs ruraux le nombre de kilomètres entre chaque porte.
Les coûts par consommateur sont tout simplement plus élevés lorsqu'il s'agit de construire et d'entretenir les infrastructures nécessaires pour offrir le service à large bande dans les régions rurales. En l'absence d'un financement gouvernemental pour éponger ces coûts supplémentaires, les prix au détail en milieu rural sont donc souvent plus élevés qu'en milieu urbain, et ce, même avec les investissements non renouvelables offerts actuellement dans le cadre des programmes de financement des services à large bande. Si le gouvernement n'est pas disposé à subventionner les frais d'exploitation en milieu rural, il ne faudrait pas que ses programmes de financement pénalisent les fournisseurs qui doivent facturer des prix plus élevés à leurs consommateurs des secteurs ruraux.
Madame la présidente, nous sommes d'avis, comme d'autres témoins qui ont comparu avant nous, que le Canada a besoin d'une stratégie coordonnée en matière de services à large bande. Il existe actuellement toute une variété de programmes de financement municipaux, provinciaux et fédéraux. Tous ces programmes ont des objectifs similaires et bénéficient d'un soutien bien senti. Ils gagneraient cependant à être mieux harmonisés quant à leur calendrier, aux objectifs fixés et aux engagements de mise en œuvre. Dans l'état actuel des choses, les bénéficiaires éventuels doivent faire un choix entre ces programmes compte tenu du peu de temps et de ressources à le disposition. Nous pensons donc que l'efficacité combinée de ces programmes pour régler le problème de l'accès aux services à large bande en milieu rural serait plus grande s'ils étaient mieux coordonnés.
Par ailleurs, étant donné les niveaux de consommation qui augmentent sans cesse et le temps qu'il faut pour construire des réseaux à large bande évolués, les investissements prévus dans le cadre des programmes gouvernementaux doivent viser à satisfaire non pas aux besoins actuels, mais à ceux de 2030 et après. Dans ce contexte, la fibre optique devrait toujours être le premier choix lorsqu'il est possible de l'utiliser. Toutes les autres technologies vont exiger des réinvestissements constants en espérant que de nouvelles avancées vont permettre de satisfaire aux besoins des Canadiens. Dans notre secteur d'activité, l'espoir n'est pas une stratégie. La fibre optique va continuer de nous permettre de bien servir les Canadiens pendant des générations à venir.
Nous vous remercions encore une fois de nous avoir permis de prendre la parole devant vous, et nous serons ravis de répondre à toutes vos questions.
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Merci, madame la présidente.
Le Centre pour la défense de l'intérêt public est un organisme de bienfaisance sans but lucratif qui offre des services juridiques et de recherche dans l'intérêt des consommateurs, et plus particulièrement des consommateurs les plus vulnérables. Nous intervenons activement dans le domaine du droit des communications depuis plus de 40 ans.
Nous avons bel et bien un problème d'accès aux services à large bande au Canada. Notre centre a multiplié les démarches auprès du CRTC afin d'améliorer les choses à ce chapitre. Nous avons notamment soumis des mémoires au gouvernement et formulé des demandes au nom des Canadiens à faible revenu et des aînés dans le cadre de partenariats avec ACORN Canada et la Fédération nationale des retraités. Dans le contexte de la pandémie, nous avons réalisé en collaboration avec OpenMind un projet intitulé Get Canada Connected. Les progrès demeurent toutefois bien minces, à un point tel qu'il nous est difficile de garder espoir.
Le taux de pénétration des services Internet à large bande est de seulement 70 % pour les Canadiens à faible revenu, comparativement à 98 % pour les mieux nantis. De même, les possibilités d'accès dans les régions rurales et éloignées sont nettement inférieures, surtout pour les services à haute vitesse, comme ceux atteignant l'objectif de 50/10 mégaoctets par seconde fixé par le CRTC pour les services Internet à large bande. Le taux d'accès en milieu rural est inférieur à 40 %, et passe même sous la barre des 30 % dans les communautés autochtones, alors qu'il est de 80 % pour l'ensemble du Canada, en incluant les secteurs urbains.
On nous promet une couverture complète des régions rurales et éloignées du Canada seulement en 2030. À ce moment-là, le débit visé de 50/10 mégaoctets par seconde sera sans doute devenu désuet par rapport aux possibilités qu'offriront les services à large bande en milieu urbain. C'est tout simplement trop tard.
Selon le Centre pour la défense de l'intérêt public, le problème de l'accès à des services à large bande à un coût abordable pourrait être réglé si l'on prenait les quatre mesures suivantes.
Premièrement, le Canada devrait adopter une obligation de service universel claire, comme on l'a fait aux États-Unis. C'est d'ailleurs ce que recommandait le groupe d'experts chargé d'examiner la législation en matière de radiodiffusion et de télécommunications dans son rapport rendu public en janvier dernier. Le Canada n'a jamais adopté une telle obligation qui serait prescrite par la loi. Une véritable obligation de service universel fait en sorte que les entreprises de télécommunication, les autorités réglementaires et le gouvernement doivent conjuguer leurs efforts pour que les services soient accessibles à tout le monde. C'est alors prescrit par la loi. On peut déterminer dans quelle mesure l'objectif est atteint et prendre les dispositions nécessaires pour que l'obligation soit respectée. C'est un changement que le Parlement pourrait apporter. Rien n'est vraiment possible sans ce fondement juridique.
Deuxièmement, notre centre a recommandé, dans deux rapports de recherche à ce sujet, que les services de télécommunications soient jugés abordables lorsque leurs coûts n'excèdent pas de 4 % à 6 % du revenu d'un ménage. À l'heure actuelle, les gagne-petit doivent assumer des coûts correspondant à environ 8 % à 10 % du revenu de leur ménage, souvent pour des services moindres que ceux dont bénéficient les autres Canadiens. Ceux-ci sont d'ailleurs disposés à accepter un léger prélèvement sur leur facture de télécommunications pour que tous leurs concitoyens puissent avoir accès à ces services à un coût abordable. Nous avons demandé à Environics Analytics de mener un sondage auprès des Canadiens aux fins d'un mémoire que nous avons soumis au CRTC dans le cadre des importances audiences qu'il a tenues en 2016 concernant les services à large bande. Ce sondage a révélé que la plupart des Canadiens étaient prêts à voir un montant de 0,50 $ par mois être ajouté à leur facture Internet pour financer l'accès aux services à large bande au bénéfice de leurs concitoyens à faible revenu. En l'absence d'une obligation de service universel prescrite par la loi qui serait assortie d'un objectif clair en matière d'abordabilité, le CRTC a toujours refusé de subventionner l'accès aux services à large bande. C'est un enjeu qui divise les Canadiens.
Troisièmement, le CRTC a contrecarré les efforts déployés pour étendre l'accès à ces services en prenant récemment la décision d'éliminer progressivement le Fonds de contribution national. Depuis des décennies, ce fonds permet de financer l'offre de services téléphoniques en milieu rural en assurant des revenus supérieurs aux coûts engagés. On devrait le transformer en fonds de contribution pour les services à large bande. Dans bien des secteurs ruraux, l'exploitation d'un réseau à large bande va toujours entraîner des coûts excédentaires. Les États-Unis ont mis en place un mécanisme de soutien semblable pour la large bande. Sans cela, nous allons nous retrouver avec des réseaux qui n'auront pas les moyens d'offrir leurs services à l'extérieur des villes.
Quatrièmement, le Canada continue d'investir des milliards de dollars pour construire l'infrastructure nécessaire aux services à large bande. Tous les intervenants du secteur — de la plus petite coopérative jusqu'à la grande entreprise de télécommunication, en passant par les groupes de défense des consommateurs et les députés — se plaignent de la gestion fragmentée de ces fonds par le gouvernement du Canada. On devrait confier le tout à une seule et unique instance qui prendrait en charge tout le dossier des services à large bande.
C'était donc nos réflexions à ce sujet. Nous serons ravis de répondre à vos questions.
Merci.
:
Voilà. Tout fonctionne bien.
Merci beaucoup. Nous sommes très heureux d'être des vôtres aujourd'hui pour représenter le secteur des télécommunications sans fil.
[Français]
La pandémie a changé la vie des Canadiens. Elle a changé la façon dont nous travaillons et accédons à nos services essentiels. Cette situation illustre bien à quel point les services de télécommunications sont vitaux pour notre santé et notre sécurité et pour soutenir les activités économiques et sociales de notre pays.
[Traduction]
Depuis le début de la crise au Canada, les fournisseurs dotés d'installations se sont employés en priorité à faire en sorte que les Canadiens puissent continuer à compter sur les réseaux et les services de grande qualité auxquels ils sont habitués. Grâce à des années d'investissement dans les infrastructures, nous avons maintenant des réseaux pouvant incroyablement bien résister à une intensification du trafic et à une transformation des modes d'utilisation. Ainsi, 90 % des répondants à un sondage réalisé par Accenture ont indiqué que leur fournisseur de services avait réagi à la pandémie d'une manière qui correspondait à leurs attentes ou qui les surpassait.
La vaste majorité des Canadiens ont accès à des services de télécommunication de pointe sur lesquels ils peuvent compter, mais les répercussions de la COVID-19 n'ont pas manqué de nous rappeler que certaines collectivités demeurent mal desservies. Il est primordial de corriger ces iniquités en matière de connectivité parce que l'avenir de nombreuses collectivités et de leurs membres repose sur l'accès à Internet et la possibilité de participer à l'économie numérique. C'est ce qui incite les entreprises dotées d'installations au Canada à continuer à travailler avec tous les ordres de gouvernement pour étendre les réseaux de télécommunication jusque dans les collectivités difficiles à desservir.
De la même façon que la performance de nos réseaux actuels est le fruit des décisions stratégiques prises par le passé, il faudra cependant, pour que tous les Canadiens puissent avoir accès à des services de télécommunication de qualité à un coût abordable, que l'on puisse s'appuyer sur un cadre réglementaire bien adapté qui assurera un juste équilibre entre les trois grands objectifs que sont la qualité, la couverture et l'abordabilité. Ce n'est pas d'hier que les politiques canadiennes en matière de télécommunications reconnaissent l'importance de miser la concurrence entre les fournisseurs dotés d'installations pour rendre le secteur dans son ensemble plus concurrentiel tout en suscitant un niveau suffisant d'investissements privés pour pouvoir développer des réseaux de calibre mondial.
Au sein de l'industrie canadienne des services mobiles sans fil, la concurrence fondée sur la mise à disposition d'installations a été à l'origine d'une féroce compétition entre les exploitants de réseaux nationaux et régionaux. Il en a résulté des prix constamment revus à la baisse, des services de meilleure qualité et une plus vaste couverture. À titre d'exemple, les chiffres du CRTC nous apprennent que le prix par gigaoctet des services de données mobiles a chuté de 56 % entre 2015 et 2018. De plus, Price Waterhouse Coopers a récemment estimé que l'offre de forfaits avec données illimitées devrait réduire de 50 % le prix par gigaoctet d'ici la fin de l'année par rapport au niveau de 2018.
Il importe aussi de noter que les entreprises canadiennes dotées d'installations continuent d'investir afin d'améliorer et d'étendre la couverture des réseaux sans fil au Canada. Ainsi, ces entreprises ont déjà investi plus de 50 milliards de dollars en immobilisations dans les réseaux sans fil et dépensé plus de 20 milliards de dollars pour les coûts liés au spectre.
[Français]
Grâce à ces investissements, les Canadiens bénéficient des réseaux sans fil mobiles les plus rapides au monde. Même dans les régions rurales, nos réseaux sont plus rapides que la plupart des réseaux mondiaux, y compris tous les pays du G7, sauf un.
[Traduction]
Le CRTC signale que la couverture 4G LTE était accessible à 99 % des Canadiens où ils habitaient à la fin de 2018. Les données du CRTC révèlent également que la couverture 4G LTE en milieu rural a rapidement progressé au cours des dernières années, passant de 35 % en 2013 à 95 % des Canadiens habitant dans une collectivité rurale en 2018.
Nous savons qu'il faudra davantage de travail et d'investissements pour élargir nos réseaux et offrir la technologie 5G, mais à un moment où il est plus important que jamais d'investir dans l'élargissement et la modernisation de l'infrastructure numérique du Canada, on envisage de prendre des mesures de réglementation qui, si elles sont mises en œuvre, décourageront les investissements du secteur privé.
En ce qui concerne le secteur des communications sans fil, le CRTC délibère actuellement sur la possibilité d'obliger les exploitants de réseaux sans fil à donner accès aux revendeurs ou aux exploitants de réseau mobile virtuel à leurs réseaux à des tarifs réglementés. Le ministère des Travaux publics a estimé que cela aura un impact majeur sur les dépenses en immobilisations et que les collectivités qui seraient touchées de manière disproportionnée par ces réductions sont celles qui sont les plus difficiles à servir.
Alors que d'autres pays développés mettent en œuvre des politiques et des stratégies visant à accélérer le déploiement de la technologie 5G, on estime qu'imposer l'accès aux exploitants de réseau mobile virtuel au Canada réduirait de 20 % la couverture effective de la 5G au Canada d'ici 2030. Selon les estimations, ce retard entraînerait une perte cumulée d'au moins 57 milliards de dollars en contribution au PIB. En d'autres termes, l'accès obligatoire, et en particulier l'accès obligatoire à des tarifs négociés en deçà du prix de pleine concurrence, a des répercussions négatives sur la capacité des exploitants de réseau à investir dans l'infrastructure numérique.
Renforçons ensemble l'économie numérique du Canada.
Je vous remercie.
:
Je vous remercie, madame la présidente. J'aimerais également remercier les vice-présidents et les membres du Comité. Je vous suis reconnaissant de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
Je m'appelle Andy Kaplan-Myrth et je suis vice-président, Affaires réglementaires et distributeurs chez TekSavvy, un fournisseur canadien indépendant de services Internet et téléphoniques dont le siège social se trouve dans le Sud-Ouest de l'Ontario et à Gatineau, au Québec.
TekSavvy est au service de ses clients depuis plus de 20 ans. Aujourd'hui, nous comptons plus de 300 000 clients dans chaque province.
TekSavvy a toujours prôné certaines valeurs très importantes liées à Internet. En effet, nous croyons que l'accès à Internet devrait être abordable et concurrentiel, et nous faisons la promotion de la neutralité du réseau et du droit à la vie privée de nos clients.
Sur notre territoire d'origine, dans le Sud-Ouest de l'Ontario, nous connectons les clients au moyen d'installations de réseau que nous construisons. Pour offrir nos services aux clients des régions dans lesquelles nous n'avons pas construit nos propres réseaux, nous achetons des services de gros aux exploitants titulaires.
Les concurrents qui misent sur les services de gros comme nous le sommes desservent plus d'un million de foyers et d'entreprises. Il y a sept mois, j'ai dit à votre comité que tout le cadre de la concurrence dans les télécommunications était sur le point de s'effondrer, et que les concurrents risquaient de disparaître. La situation actuelle est catastrophique. En effet, si nous ne protégeons pas la concurrence sur le marché de la large bande, en particulier dans le contexte incertain de la pandémie, il en résultera des services Internet moins abordables et moins d'investissements dans les collectivités mal desservies.
Depuis ma dernière comparution devant votre comité, TekSavvy et les concurrents de l’industrie de la large bande ont remporté quelques victoires et subi quelques revers en ce qui a trait aux tarifs de gros et à notre accès aux réseaux modernes de fibre optique.
Lorsque le CRTC a fixé les tarifs définitifs en août 2019, corrigeant ainsi des tarifs gonflés depuis quatre ans, TekSavvy a fait profiter les consommateurs de ces tarifs réduits en baissant ses prix. Toutefois, les exploitants titulaires ont obtenu un sursis qui empêche l'entrée en vigueur de ces tarifs. Ils ont également présenté plusieurs demandes d'appel.
En août dernier, le gouverneur en conseil a répondu et, bien qu'il n'ait pas annulé la décision du CRTC, sa décision reflète la position erronée de l'exploitant titulaire selon laquelle il faut équilibrer l'investissement et la concurrence.
En septembre 2020, la Cour d'appel fédéral a rejeté à l'unanimité les appels des exploitants titulaires, en déclarant que le bien-fondé de leurs revendications était douteux.
Malgré cette décision, les concurrents ont subi un autre revers lorsque le CRTC a suspendu ses propres tarifs définitifs, laissant en place des tarifs gonflés que le CRTC lui-même avait déjà jugés injustes et déraisonnables.
Entretemps, les exploitants titulaires nous ont ciblés avec des prix de détail anticoncurrentiels qui sont inférieurs aux tarifs de gros qu'ils ont eux-mêmes gonflés. En février, TekSavvy a déposé une plainte auprès du Bureau de la concurrence pour demander la tenue d'une enquête sur certains de ces comportements anticoncurrentiels.
Après avoir été mis à rude épreuve par les exploitants titulaires pendant des années et avoir baissé nos prix en attendant que le CRTC mette en œuvre ses tarifs définitifs, TekSavvy perdait de l'argent à la fin de 2019. Par conséquent, l'entreprise a dû prendre la difficile décision d'augmenter ses prix deux fois au cours de l'année dernière. Dans certains cas, de façon absurde, nous avons dû fixer des prix plus élevés que ceux des mêmes exploitants titulaires qui nous vendent des services de gros. Donc maintenant, au lieu de perdre de l'argent, nous perdons des clients.
Nous espérons toujours que le CRTC réaffirmera ses tarifs antérieurs et que le gouvernement fera confiance aux experts qui ont passé des années à examiner des milliers de pages de preuves. Ces tarifs qui représentent une correction rétroactive pour des années de trop-payés sont essentiels non seulement pour les concurrents, mais également pour connecter les personnes dans les zones mal desservies.
Malgré la rhétorique générale, TekSavvy et d'autres concurrents investissent dans des installations de réseau. Le plan d'investissement quinquennal de TekSavvy, qui est financé par la propriété et des capitaux privés, totalise plus de 250 millions de dollars, dont plus de 100 millions de dollars pour des installations de réseau à haute vitesse qui permettent à 60 000 résidants et entreprises dans les collectivités mal desservies du Sud-Ouest de l'Ontario d'avoir accès à une connexion.
Aussi importantes soient-elles, toutes ces questions relatives aux tarifs de gros concernent l'accès à des technologies vieillissantes. Il y a cinq ans, le CRTC a déterminé que les concurrents doivent avoir accès aux réseaux résidentiels modernes de fibre optique, mais nous n'y avons toujours pas accès, sans parler du secteur de la téléphonie mobile où nous n'avons pas de concurrence fondée sur les services et où les tarifs de téléphonie mobile sont parmi les plus élevés au monde.
Le Canada doit accélérer le déploiement de réseaux dans les zones mal desservies. Pour y parvenir, il doit se doter d'un plan pour la large bande qui inclut la concurrence par défaut, et il doit rejeter la fausse dichotomie entre l'investissement et la concurrence.
TekSavvy démontre qu'il est possible d'avoir les deux.
Je vous remercie. J'ai hâte de répondre à vos questions.
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Bonjour à tous. Je suis heureux d’être ici pour parler du travail que nous avons accompli et de certains des défis que nous devons relever dans le Nord-Ouest de l’Ontario.
Je m’appelle David Brown. Je suis président-directeur général et copropriétaire de FSET. Nous sommes une entreprise de services d’information et de technologie dont le siège social est situé à Kenora, en Ontario. Nous fournissons des services et des solutions aux secteurs public et privé. Nous avons plus de 50 ans d’expérience combinée dans le domaine de l’application de la loi et plus de 40 ans dans le domaine des soins de santé.
Nous avons des clients en Ontario, au Manitoba et au Québec. Nous effectuons d’autres travaux, non seulement ici au Canada, mais également ailleurs.
J’ai passé les deux dernières décennies à relever des défis liés à l’infrastructure et aux communications pour les collectivités autochtones du Nord-Ouest de l’Ontario, et à défendre leurs intérêts. En septembre 2020, j’ai communiqué avec l’exploitant de services de télécommunications de la région pour tenter d’acheter et de mettre à niveau la bande passante dont la collectivité de la Première Nation de Pikangikum a grand besoin.
À la discrétion et sous la direction de la collectivité, et avec les fonds nécessaires, on m’a demandé de faire tout ce qu’il fallait pour améliorer la situation de la collectivité. C’était la première fois que je tentais d’améliorer la situation de ces gens, mais ce n’était certainement pas la première fois qu’ils tentaient de faire la même chose. En effet, le manque de bande passante utilisable empêche l’exécution de programmes et la prestation de services dans la collectivité, que ce soit dans le secteur de la santé, de l’éducation, de la santé mentale, de la justice, du gouvernement local, des finances, des services juridiques, etc. Nous ne parlons pas d’une utilisation récréative. Nous parlons ici de la qualité de vie des habitants de ces collectivités.
Les tentatives que j’ai entreprises par des moyens traditionnels, comme cela a souvent été le cas au cours des 20 années où j’ai tenté d’aider les collectivités autochtones, n’ont pas été fructueuses. Des services traditionnels, des solutions terrestres, des télécommunications... C’est le lot des collectivités autochtones qui tentent de travailler avec les trois grandes entreprises qui se trouvent au Canada.
Ce n’est pas parce que ces entreprises fournissent les meilleurs services ou les services les plus fiables. Ce n’est pas parce qu’elles sont économiques. Ce n’est pas parce qu’elles sont rapides et adaptables. En fait, elles sont tout le contraire. Leur processus est lent et laborieux, et elles n’ont aucun sentiment d’urgence en ce qui concerne leurs produits livrables. Les conditions et les contrats sont interminables et ils visent généralement une période de sept à dix ans. Ces entreprises demandent des frais de résiliation anticipée allant de 50 à 100 % pour ces sept à dix ans. La tarification est incertaine et des frais de service supplémentaires s’appliquent souvent.
Lorsque nous nous adressons à une entreprise de télécommunications, le processus, du dialogue initial à la prestation effective du service, prend des années. Je n’ai jamais participé à une situation, à un dialogue ou à un projet dans lequel le processus n’a pas pris deux ou trois ans. Parfois, les choses peuvent être encore plus difficiles. Il ne s’agit pourtant pas de construire quoi que ce soit, mais simplement de discuter pour faire avancer les choses.
C’est le processus habituel. Là encore, il n’y a tout simplement pas d’autres options. Ces entreprises n’ont pas besoin d’être efficaces, elles doivent simplement être le seul fournisseur en ville. C’est donc la seule option avec laquelle les services autochtones peuvent travailler. Mais cela ne fonctionne pas, et rien n’a encore changé.
Après avoir tenté pendant huit mois de suivre ce processus pour la collectivité de Pikangikum, l’entreprise de télécommunications est revenue et a offert 10 % de la bande passante que cette collectivité avait déjà. Toutefois, la totalité de la bande passante qu’ils possédaient déjà avant le début de ce processus n’était pas suffisante. Il y avait un gigabit de fibre optique que devaient se partager 400 foyers et entreprises et 2 000 résidants de la collectivité dans le cadre d’un plan de câblage.
Je compare cette situation à un immeuble d’appartements ou à un hôtel dans lequel des centaines d’utilisateurs ouvrent le robinet en même temps, mais où l’eau sort d’une conduite principale d’un demi-pouce. Dans une telle situation, personne ne peut obtenir de l’eau. Dans notre cas, personne n’avait accès à Internet.
Cela nous a poussés à adopter une approche différente. J’ai donc commencé à tenter de communiquer avec des intervenants de SpaceX pour réfléchir au problème et trouver d’autres solutions. Après 20 ans, j’étais prêt à chercher des solutions ailleurs.
Les services par satellite sont souples, adaptables et rapides. Avec SpaceX Starlink, le coût et le prix peuvent être facilement calculés par foyer, par collectivité et par région. Cela reste vrai qu’il s’agisse d’un, de 100 ou de 1 000 foyers. Du moment de l’achat à la mise en service, le processus prend quelques jours, et non des années. L’installation est simple. Il faut quelques minutes avant d’être en ligne, et pratiquement tout le monde peut y arriver.
Les consommateurs ne sont soumis à aucune obligation, il n'y a pas de contrat et d'engagement, il n'y a pas de frais de résiliation anticipée et l'utilisation saisonnière est offerte.
Je vous remercie. J'ai hâte de répondre à vos questions et de vous parler du travail que nous avons accompli à Pikangikum.
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Je vous remercie, madame la présidente et membres du Comité.
Je m'appelle Tamir Israel et je suis avocat-conseil à la Clinique d'intérêt public et de politique d'Internet du Canada Samuelson-Glushko. Il s'agit d'une clinique juridique d'intérêt public sur les technologies dont le siège social se trouve à la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa. Je comparais devant vous aujourd'hui depuis mon domicile d'Ottawa, qui se trouve sur le territoire non cédé de la nation algonquine.
Je remercie le Comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui et d'avoir entrepris cette importante étude. La pandémie actuelle a mis en évidence le caractère essentiel de la connectivité au Canada. Aujourd'hui plus que jamais, il est essentiel de veiller à ce que les Canadiens puissent non seulement avoir accès aux services de données, mais que ces derniers soient également abordables.
Le Canada continue d'éprouver des problèmes de connectivité, surtout dans les régions éloignées. Notre organisme de traitement des plaintes liées aux communications a récemment cerné les problèmes liés à la qualité du service comme étant la troisième source de plaintes formulées contre les entreprises de téléphonie fixe et mobile. Une meilleure définition des défis actuels et permanents représente une étape importante pour offrir la connectivité à haute vitesse à tous les Canadiens.
De plus, les contributions continues du gouvernement à l'amélioration des réseaux à large bande du Canada sont encourageantes. Toutefois, cet investissement est loin d'être à la hauteur des programmes ambitieux entrepris par d'autres gouvernements, par exemple celui de l'Australie.
Même si les investissements effectués par l'entremise de programmes tels que le Fonds pour la large bande universelle permettront certainement d'améliorer la capacité des Canadiens de se connecter à Internet, une approche nationale pourrait permettre un investissement gouvernemental plus stratégique et une coordination plus efficace entre les différents programmes de financement.
Un plan national en matière de large bande pourrait également permettre une gestion plus stratégique et coordonnée des principaux intrants tels que le spectre et l'accès aux poteaux. Il serait préférable de confier l'élaboration d'un tel plan au CRTC, même si certains éléments de sa mise en œuvre pourraient dépendre d'autres organismes gouvernementaux.
La Clinique d'intérêt public et de politique d'Internet du Canada trouve encourageant que l'accessibilité financière soit reconnue comme étant un élément central dans l'étude du Comité. Dans le secteur de la téléphonie mobile en particulier, les Canadiens reçoivent une proposition de valeur médiocre par rapport aux normes mondiales. En fait, depuis des années, les coûts liés à la téléphonie mobile au Canada sont constamment plus élevés que ceux offerts dans d'autres pays semblables et il est important de comprendre les différentes façons dont cela nuit à l'adoption.
Tout d'abord, de nombreux Canadiens ne s'abonnent pas du tout aux services de données mobiles, malgré une couverture nationale relativement étendue. Sur 37 pays de l'OCDE, le Canada occupe le 31e rang en ce qui concerne le nombre d'abonnés par habitant.
Deuxièmement, même chez les abonnés, les coûts élevés empêchent les Canadiens de réaliser le plein potentiel de la connectivité mobile des données. Sur 36 pays de l'OCDE, le Canada se classe au 30e rang pour la quantité de données utilisées par un abonné moyen au cours d'un mois moyen. De plus, les Canadiens n'utilisent que la moitié de la moyenne des données utilisées dans les pays de l'OCDE.
Nous continuons à prendre du retard sur nos homologues en ce qui concerne ces deux paramètres, car la moyenne des abonnements à la téléphonie mobile et l'utilisation des données augmentent plus rapidement dans l'ensemble des pays de l'OCDE qu'au Canada.
Enfin, les abonnés canadiens sont trop souvent forcés de choisir entre le maintien de leur forfait de services mobiles et d'autres besoins de première nécessité. Une enquête menée en 2019 révèle que 20 % des répondants de Toronto qui ont dû sauter des repas ont indiqué que leur facture mensuelle de téléphone en était la cause, le loyer et le transport étant les deux autres causes principales.
La connectivité est essentielle, et le Canada doit s'efforcer davantage d'améliorer l'accessibilité et l'abordabilité de ses services. Tout d'abord, il est essentiel que nous appliquions aux services mobiles le modèle de gros que le Canada a élaboré dans le contexte des services filaires. Il y a une limite au nombre de concurrents qui émergeront naturellement dans le secteur des services sans fil. Rendre obligatoire l'accès virtuel aux réseaux mobiles sur le principe de recouvrement des coûts est la seule façon d'accroître la connectivité. De la même façon, les parties du spectre qui ne sont pas utilisées dans les régions rurales doivent être retournées ou offertes aux concurrents sur le principe du recouvrement des coûts de la vente en gros.
Deuxièmement, nous devrions envisager de modifier les objectifs de la politique en matière de télécommunications, afin de mettre l'accent sur des facteurs tels que le caractère abordable. Trop souvent, des mesures essentielles d'accessibilité financière sont rejetées par crainte qu'elles n'aient un impact sur les investissements dans la large bande en milieu rural. Il s'agit en grande partie d'une fausse dichotomie.
Les marges de profits des fournisseurs de services titulaires au Canada sont élevées par rapport aux normes mondiales. Une analyse menée en 2014 par le groupe Brattle a révélé que les fournisseurs canadiens de services sans fil obtenaient généralement des rendements supérieurs à la normale pour leurs investissements. Ces marges de profits sont suffisamment élevées pour absorber un marché plus concurrentiel régi par la vente en gros sur le principe du recouvrement des coûts, et ce, tant pour les services sans fil que pour les services filaires.
À l'heure actuelle, notre modèle de réglementation pour connecter les régions éloignées repose sur une combinaison d'objectifs en matière de services et d'un fonds de contribution pour encourager les projets qui permettraient d'atteindre ces objectifs. Si les fournisseurs titulaires continuent de réagir aux pressions exercées par la réglementation en favorisant des marges de profits et des dividendes d'actionnaires de premier ordre au détriment de l'investissement en milieu rural, le CRTC devrait augmenter les montants du fonds de contribution en conséquence ou envisager d'imposer l'obligation de service direct.
Enfin, il faudrait explorer la possibilité de mettre en œuvre un mécanisme plus équitable pour imposer des tarifs de gros temporaires. En effet, le processus d'établissement des tarifs est intrinsèquement complexe et il est important que le processus soit exact au bout du compte. Cependant, le processus actuel incite les exploitants titulaires à proposer des tarifs avantageux dès le départ, ce qui désavantage durablement les concurrents.
Vu qu'un système de réglementation dépend beaucoup de mécanismes de prestation en gros, il est fondamentalement important, pour imposer une discipline tarifaire, de faciliter une offre de tarifs de gros plus justes, pendant que le processus de fixation de tarifs définitifs se décide.
Merci. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Je vous remercie aussi de votre patience malgré les difficultés avec la qualité du son.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Tous les témoignages de ce matin semblent dire qu'il existe un profond fossé entre la réalité plus ou moins complexe du terrain et les promesses du gouvernement ou des entreprises de télécommunication d'étendre la couverture de la large bande. C'est bien l'un des sujets de notre étude. Nous nous échinons depuis des années à conférer une sorte de certitude à ce dossier. Les témoignages d'aujourd'hui sont diversifiés.
Je pose ma première question au représentant de TekSavvy.
Comme vous l'avez fait remarquer, au début de 2019, le CRTC a annoncé un examen de l'industrie canadienne du sans-fil. L'objectif était de favoriser la concurrence grâce à des services en gros obligatoires pour les concurrents connus sous l'appellation d'exploitants de réseau mobile virtuel, ou ERMV. Bien sûr, le même processus a visé les fournisseurs d'accès Internet.
Dans votre mémoire définitif au CRTC, en juillet 2020, vous écriviez:
La valeur du service que les ERMV peuvent fournir aux Canadiens ne provient pas simplement de l'abaissement des prix mais, plutôt, de la création de services innovants, qui visent des segments du marché qui reçoivent un mauvais service ou qui n'en reçoivent aucun des joueurs actuels.
D'autre part, il paraît que ces exploitants causent des problèmes à d'autres groupes.
Je me demande d'abord si vous pouvez en dire un peu plus sur le concept, c'est-à-dire comment les exploitants de réseau mobile virtuel peuvent fournir de meilleurs services sans fil dans des régions comme, disons, le centre de l'Alberta, que les entreprises titulaires?
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Merci pour la question.
Le CRTC a tout d'abord été d'avis, à titre provisoire, que les exploitants en question sont un moyen nécessaire d'introduire plus de concurrence sur le marché des communications entre appareils mobiles et, en ce moment même, nous attendons sa décision.
Bien sûr, ces exploitants, en leur qualité de concurrents à qui on pourrait s'adresser, devraient exercer une pression sur les tarifs, ce qui, visiblement, est bon pour les consommateurs. TekSavvy a également mis en relief que les ERMV fournissent un service à des marchés particuliers, en règle générale dans des pays où ils opèrent. De fait, c'est ce qui s'est produit au Canada, non avec les ERMV, mais avec de petits fournisseurs propriétaires ou exploitants d'installations comme WIND. Je fouille dans mes souvenirs de plusieurs années pour me rappeler ces concurrents fournisseurs de services mobiles qui sont arrivés sur le marché — peut-être Public Mobile. Ces propriétaires ou exploitants d'installations ont fait leur apparition dans les grandes villes. Ils ont créé de la concurrence, avant d'être avalés par les joueurs dominants du secteur.
Les ERMV fournissent des services aux communautés, mais, bien sûr, dans le territoire où leurs réseaux existent. Dans les régions rurales de l'Alberta, bien sûr, un tel exploitant, qui fournit des services de gros, ne pourra les offrir que dans les communautés où un fournisseur dominant a déjà installé un réseau avec services. Mais quand on parle de communautés de recensement dont les besoins ne sont pas satisfaits, il s'agit davantage de sous-populations culturelles ou de groupes créés par des différences d'abordabilité. Il peut s'agir de sous-secteurs de la société à qui les forfaits actuellement offerts ne conviennent pas.
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Oui. Pour quitter le terrain des services mobiles et, bien sûr, revenir aux services de gros, notre gagne-pain, la plainte visait les pratiques anticoncurrentielles de Bell et de Rogers qui, d'une part, à la connaissance du CRTC, ont gonflé pendant des années les tarifs de gros imposés à leurs concurrents comme nous, qui offrent des services de gros. Nos tarifs restent ainsi élevés et nous empêchent de leur imposer une discipline tarifaire, ce qui maintient élevés tous les tarifs Internet de détail partout au Canada.
En même temps, à compter de 2016 environ, Bell et Rogers ont lancé des marques dérivées, prétendument concurrentes, des marques à eux. Leurs tarifs étaient plus intéressants que ceux des concurrents. Donc, d'un côté, les tarifs qu'ils nous imposaient restaient élevés et, de l'autre, leurs tarifs sur le marché étaient plus intéressants que les nôtres.
Notre plainte se fonde sur l'argument de l'abus de position dominante, par lequel, depuis quelques années, on nous asphyxie vraiment. Nous sommes incapables d'abaisser suffisamment les tarifs de nos services pour discipliner leurs propres tarifs, ce qu'un concurrent devrait pouvoir faire, et si nous élevons nos tarifs pour fonctionner aux tarifs qu'ils ont fixés, nous perdons alors des clients, parce que les marques dérivées offrent leurs services à des tarifs inférieurs.
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Merci, madame la présidente.
D'entrée de jeu, j'aimerais vous remercier, madame la présidente, ainsi que M. MacPherson, le greffier, d'avoir tenté de faire entrer un carré dans un cercle, si je peux le dire ainsi. Merci beaucoup des travaux que vous avez faits en ce sens.
J'invite les témoins à me donner des réponses courtes, parce qu'il y aura beaucoup d'interventions. Énormément de choses sont très intéressantes dans ce que vous avez dit, notamment en ce qui a trait à la concurrence.
Je vais commencer par vous, monsieur Stevens.
Mon équipe et moi avons rencontré différents membres de votre réseau au Québec. Vous avez mentionné que l'aide financière du gouvernement est importante pour garantir les mêmes prix en milieu urbain qu'en milieu rural. L'abordabilité du service n'est pas le seul facteur. Il y a aussi le facteur géographique. Or, pour pallier cela, nous avons besoin d'aide complémentaire du gouvernement, à moins que le gouvernement subventionne directement des coûts opérationnels, ce qui fera en sorte qu'ultimement les utilisateurs paieront plus cher.
Est-ce égal? Évidemment, la réponse est non. Est-ce juste et équitable? Je ne le crois pas non plus. Vous avez aussi mentionné que le gouvernement devait investir dans les besoins de l'avenir, notamment dans la fibre optique, ce qui est différent de la stratégie de SpaceX. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Vous avez dit que cela servirait plus longtemps aux Canadiens. Est-ce que le problème de l'accessibilité et de l'abordabilité d'Internet haute vitesse — ce que nous abordons aujourd'hui — du réseau cellulaire est dans les programmes mis en place par le gouvernement fédéral et ses différentes organisations?
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Je crois que la mise aux enchères du spectre devrait être assortie de plus de conditions de déploiement en milieu rural.
Il devrait aussi y avoir un mécanisme obligeant les acquéreurs à « utiliser le spectre sous peine de le perdre ». Souvent, rien ne bouge. Il y a de gros projets à mettre en branle, mais le ministère de l'Industrie n'y donne pas suite.
La question de savoir s'il faut modifier le processus en remplaçant la mise aux enchères par une sorte de concours de beauté, pour reprendre vos mots, me semble très épineuse. Il y a des années, le Centre pour la défense de l'intérêt public s'est opposé au modèle de mise aux enchères pour les raisons que vous donnez: vous perdez le contrôle dans une certaine mesure, et le processus devient un exercice économique. L'incitation économique à s'enrichir grâce au spectre l'emporte sur toutes les autres préoccupations.
Le Comité peut certainement recommander d'imposer des exigences très strictes en matière de couverture à ceux qui obtiennent le spectre, et aussi les obliger à « utiliser le spectre sous peine de le perdre ». Puisque ce principe n'a pas toujours été respecté par le passé, j'encourage vivement le Comité à envisager une telle recommandation.
Il est probablement un peu tard pour modifier le modèle de mise aux enchères.
Monsieur Ghiz, j'aimerais savoir ce que vous pensez du principe « d'utiliser le spectre sous peine de le perdre », et aussi de la mise aux enchères du spectre.
Selon moi, nous avons créé des postes de péage dans le ciel. Il est très important de reconnaître que, même avant la pandémie, l'accès à des services à large bande à un prix abordable était devenu un service essentiel pour les Canadiens. C'est d'autant plus vrai depuis que nous avons multiplié les services en ligne avant la COVID-19, et que nous avons fermé les services gouvernementaux traditionnels. Il y a ensuite eu plus de formations en ligne et d'initiatives semblables, une tendance qui s'est intensifiée avec la COVID.
Monsieur Ghiz, que pense votre association du principe « d'utiliser le spectre sous peine de le perdre »?
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Les États-Unis imposent une obligation d'offrir un service universel, qui a été enchâssée dans la loi il y a de nombreuses années. Ainsi, tous les citoyens américains doivent disposer d'une connexion abordable et à jour aux services de télécommunications, ce qui comprend les services à large bande et sans fil, selon l'interprétation de la Commission fédérale des communications des États-Unis, ou FCC. C'est pour cette raison que la FCC a lancé un certain nombre de mises aux enchères du spectre, ainsi qu'un certain nombre de programmes de déploiement dans des secteurs clés, comme l'éducation, les écoles, la médecine, ce qu'ils appellent les « terres tribales », et un autre programme rural. L'objectif était de brancher plus rapidement au réseau tous ceux qui ont des difficultés ou des besoins particuliers. Les États-Unis ont mis en place tout un plan pour les services à large bande.
J'ignore si les membres du Comité sont au courant que la conception du plan national de services à large bande des États-Unis a coûté un milliard de dollars il y a plusieurs années. Quoi qu'il en soit, les Américains ont une stratégie. Ils la suivent plus ou moins, mais ils ont réalisé de grands progrès.
Pour notre part, nous n'avons pas de plan national de services à large bande, et voici pourquoi. Même si la Loi sur les télécommunications contient un objectif stratégique en ce sens, qui vise à donner accès à tous les Canadiens des régions rurales et urbaines à des services abordables, il s'agit seulement d'un objectif parmi sept autres. Il est souvent supplanté parce que d'autres objectifs lui font concurrence quand vient le temps de retenir l'attention de l'organisme de réglementation.
La situation sape vraiment les efforts du CRTC, pour ce qui est de rendre obligatoire le déploiement de programmes dans les régions rurales, qu'ils soient à perte ou non, ou de créer des subventions et des fonds pour soutenir l'accès des utilisateurs ou des entreprises. Comme je l'ai dit, ces entreprises tentent d'exercer leurs activités dans des régions où — soyons réalistes — elles vont perdre de l'argent, étant donné qu'il n'y a pas assez de clients et que le transport des données vers les grands centres urbains coûte cher. Ce sera toujours ainsi.
Il nous manque un volet juridique clé. C'est pourquoi j'essaie d'inciter votre comité à recommander au Parlement — je sais que c'est difficile — de modifier la Loi sur les télécommunications.
Je crois qu'il s'agit de l'article 47 du Code des États-Unis... Je vais vous trouver l'article, mais c'est dans la loi américaine depuis longtemps.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je vais continuer en m'adressant à vous, monsieur Brown. D'abord, je vous remercie de vos recommandations. Je fais une lecture très semblable à la vôtre.
En complément, un des principaux problèmes des entreprises qui veulent déployer Internet en région est l'accès aux infrastructures, à savoir les poteaux et les réseaux des grands fournisseurs.
Cela ressemble beaucoup à un abus de position dominante visant à empêcher les concurrents, les gros comme les petits acteurs, de s'implanter. Cela ressemble à une pratique anticoncurrentielle au sens de la loi.
Selon vous, est-ce une pratique anticoncurrentielle?
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Je pense en effet que « l'entreprise par défaut » est essentiellement en situation de monopole, du moins ici, dans le Nord-Ouest de l'Ontario. Nous n'avons tout simplement ni de choix ni d'options.
Je pense que le recours à la technologie satellite Starlink de SpaceX est la seule voie à suivre, du moins pour les collectivités autochtones et peut-être aussi pour les municipalités rurales. À défaut d'avoir une solution terrestre, la mise en place dans les meilleurs délais de cette technologie modulable est probablement la seule façon d'utiliser efficacement l'argent des contribuables et d'investir dans un produit qui aidera ces milieux.
Je pense que c'est avantageux. Lorsque je regarde le Fonds pour la large bande universelle — et je suis loin d'être un spécialiste —, j'en comprends que seul le volet de réponse rapide pourrait être utile aux collectivités autochtones. Elles peuvent soumettre une demande dans le cadre du volet rapide étant donné que l'unité Starlink peut être installée sur place. Il faut toutefois respecter des délais serrés. Ces collectivités doivent comprendre ce pour quoi elles présentent une demande. La date limite est le 15 janvier.
Je pense vraiment qu'une grande partie des contraintes n'étaient pas nécessairement intentionnelles, mais le programme est destiné aux sociétés de télécommunications, et non pas à Starlink de SpaceX. L'objectif est de donner à ces collectivités autochtones un accès aux services Internet et à large bande. Or, les localités ferment généralement leurs portes deux semaines pour les Fêtes, comme beaucoup d'entre nous qui prenons des vacances. Elles doivent composer avec la COVID et avec les confinements communautaires. Enfin, nous leur demandons de faire une chose en ligne, ce qui est ironique puisqu'elles n'ont pas encore accès à Internet.
Nous espérons pouvoir obtenir un financement pour ces collectivités au moyen du volet de réponse rapide. Ce n'est pas nécessairement le principe du premier arrivé, premier servi, mais plutôt celui du premier entré, premier sorti. Je pense toutefois que ces collectivités sont désavantagées sur ce plan.
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Non, nous ne croyons pas qu’il y en ait une.
Lorsque la décision a été rendue publique en août 2019, les titulaires ont fait appel de trois manières différentes. La pétition du gouvernement a été arrêtée. Ils ont perdu dans le processus de la Cour d’appel fédérale. Maintenant, ils font appel devant la Cour suprême, mais nous devons voir si la Cour suprême acceptera même d’entendre leur appel. Bien sûr, ils ont également demandé au CRTC de revoir la décision.
Pour l'instant, ils ont demandé au CRTC de suspendre l’application de ces tarifs pendant qu’il les réexamine; le CRTC a accepté.
TekSavvy conteste actuellement cette décision devant les tribunaux. Nous avons demandé un examen judiciaire de cette décision de suspendre les tarifs parce que nous pensons qu’elle est déraisonnable. Ce n’est pas le fondement de notre plainte, mais à un niveau élevé, ce sont essentiellement les concurrents qui ont porté le fardeau de ces tarifs plus élevés pendant tout ce temps. Le CRTC a déjà décidé que ces tarifs allaient baisser. D’une décision à l’autre, les titulaires n’obtiennent pas gain de cause.
Nous pensons qu’il est clairement temps de mettre en œuvre ces taux ou au moins une partie de ces taux sur une base continue afin de pouvoir commencer à en voir les avantages sur le plan de la concurrence.
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La décision de la gouverneure en conseil n’a pas annulé les tarifs. Je tiens à le reconnaître. On a dit que le CRTC est déjà saisi de la question et qu’il devrait s’en occuper. En ce sens, c’est une bonne chose, mais il a également fait remarquer que les tarifs n’ont peut-être pas trouvé dans tous les cas le bon équilibre entre l’investissement et l’accessibilité financière.
C’était une réelle préoccupation pour nous et pour l’industrie concurrentielle dans son ensemble, car cela indiquait que le gouvernement ne semble pas avoir reconnu ou admis que — lorsque nous obtenons ces tarifs réduits et les remboursements pour les montants que nous avons payés en trop pendant toutes ces années — les concurrents investiront cet argent dans l’économie, y compris dans les installations et dans nos réseaux.
Pour arriver à la conclusion que des tarifs bas signifient nécessairement de faibles investissements, il faut essentiellement croire que seuls les titulaires vont investir. Oui, les titulaires tirent des revenus moins importants des tarifs de gros que d’un marché de détail captif où ils peuvent faire payer ce qu’ils veulent. Bien sûr, c’est l’idée de la concurrence. Lorsque les concurrents sont en bonne santé, qu'ils participent à cette économie et que leurs revenus ne sont pas liés aux titulaires, ils peuvent également prendre cet argent et l’investir dans des installations et dans leurs communautés de différentes manières.
C’est ce qui nous préoccupait dans cette déclaration du gouvernement. Elle reflétait l’idée qu’il y a un équilibre ou un compromis entre l’investissement et la concurrence.
La raison pour laquelle il est fragmenté est qu’il n’est pas versé en une seule fois. Plusieurs programmes, tels que « Brancher pour innover », « Un Canada branché », le Fonds pour la large bande universelle et le financement de la Banque de l’infrastructure du Canada, sont apparus à des moments différents. L’autre partie principale du processus qui fait qu’il n’est pas coordonné, c’est qu’il repose sur les demandes. Je ne devrais pas utiliser le terme « concours de beauté », mais c’est bien de cela qu’il s’agit. Vous présentez une demande, et si elle est bonne, vous obtenez le financement.
Il existe d’autres moyens de procéder. Il existe des options inverses. Le nombre de catégories de critères que vous devez remplir est moindre, et vous pourriez probablement disposer d’un système plus efficace. C’est pour cette raison.
C’est aussi que le financement provient d’au moins deux sources du gouvernement fédéral: d’ISDE et du fonds permanent du CRTC pour un réseau à large bande. Enfin, il y a les fonds provinciaux, qui sont souvent de contrepartie ou non et dont les échéances diffèrent. Par conséquent, les défis de coordination sont très difficiles à relever, surtout pour un petit fournisseur communautaire.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Merci, madame la présidente, d’avoir essayé de faire venir les ministres ici le plus rapidement possible et d’avoir accepté que nous les voyions au cours de la nouvelle année.
Je voudrais prendre un bref moment avant de parler aux témoins pour présenter une motion. Voici ce qu’elle dit:
Que, dans le cadre de l’étude sur la capacité nationale de fabrication d’un vaccin contre la COVID-19, les membres du Groupe de travail sur les vaccins contre la COVID-19 soient invités à comparaître pendant une heure et demie, séparément des autres témoins, à la première occasion en janvier.
S’il n’y a pas d’accord sur ce point, vous pouvez le considérer comme un avis verbal de motion afin que nous puissions l’examiner lors de la prochaine réunion.
Sur ce, je vais poursuivre avec les témoins.
J’aimerais commencer par M. Brown. Félicitations pour le travail que vous avez accompli pour la Première Nation de Pikangikum. C’est vraiment remarquable parce que ce n’est pas vraiment votre domaine de travail principal que de fournir des installations sans fil et à large bande.
Je voudrais revenir sur un point que vous avez soulevé, votre lutte avec les grandes entreprises pour essayer de faire avancer les choses pour ce groupe. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les obstacles que vous avez rencontrés? Qu’avez-vous vu qui aurait pu être différent et qui aurait pu permettre de desservir ces communautés plus rapidement, plutôt que de proposer une alternative par satellite — même si cela semble être une solution très raisonnable?
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Oui, monsieur Cumming. Merci.
En fait, j'ai commencé à suivre cette voie en septembre 2019, donc il y a environ 14 mois. Lorsque j'ai vu les moyens habituels ou traditionnels de joindre la communauté, d'entrer en contact avec elle, j'ai été encouragé à faire tout ce que je pouvais pour changer sa situation. Je considère qu'elle était désespérée: les règles du jeu n'étaient pas équitables pour ces communautés — elles ne le sont toujours pas —, et elles étaient confinées et isolées.
Quand j'ai commencé à suivre cette voie, c'était avant la COVID, qui n'a fait qu'accélérer les choses.
Après huit mois d'engagement auprès de l'entreprise de télécommunications locale, on est revenu vers moi et on m'a offert 10 % du gigaoctet qui faisait partie du plan du câble. À ce moment-là, après l'avoir fait un certain nombre de fois, ma frustration face à mon incapacité à retourner dans la communauté avec le sentiment d'avoir fait le nécessaire pour résoudre ce problème avait atteint de nouveaux sommets.
Au fil des ans, ma rétroaction a généralement été accueillie avec indifférence. On nous a souvent dit qu'il n'était pas rentable d'offrir des services à ces communautés. Je pense que c'est Albert Einstein qui a dit qu'aucun problème ne peut être résolu à partir du même niveau de conscience qui l'a créé. Personnellement, je n'ai aucune sympathie pour les entreprises de télécommunications au Canada, compte tenu de ce que j'ai vécu et de ce que j'ai dû affronter, et de ce pour quoi je vois ces communautés se battre. Ces entreprises ont eu la possibilité d'être concurrentielles. Elles ont eu une longueur d'avance sur tous les autres. Bien qu'elles aient bénéficié du financement et du soutien des contribuables, des gouvernements provinciaux et des gouvernements fédéraux, elles n'ont pas réussi à offrir des solutions et des options de rechange aux communautés autochtones.
Ces communautés ne demandent pas un Netflix 4K, mais la possibilité d'organiser des procédures judiciaires chez elles. Pikangikum n'a pas eu de tribunal depuis neuf mois à cause des mesures de confinement. Nous avons fait une démonstration de faisabilité le jour même où nous nous sommes rendus dans cette communauté, et nous avons organisé une vidéoconférence à trois avec le tribunal de Kenora, le programme d'hébergement de Pikangikum pour les personnes en attente d'un procès et un représentant du groupe de justice autochtone de Toronto. La personne qui avait la plus mauvaise connexion était celle de Toronto.
En gros, nous en avons eu assez de nous cogner la tête contre le mur pour résoudre un problème, de l'aborder comme on l'a toujours fait, en utilisant les sociétés de télécommunications terrestres pour y arriver. Nous nous sommes tournés vers SpaceX et nous avons fait quelque chose comme de la création de contenu. Je travaillais avec des amis et des collègues, qui ont entrepris ce projet avec autant de passion et de désir que moi, et autant de besoin que la communauté. Ce n'est pas la même chose que de travailler avec des entreprises de télécommunications. J'ai écourté ma vie de plusieurs années, et je n'ai que 26 ans...
Des députés: Ha, ha!
M. David Brown: ... je ne peux donc pas faire la même chose à chaque fois pour chaque communauté. Mais je voulais le faire une fois, une seule fois, pour montrer à chaque communauté autochtone ce qui était possible, et qu'il y a une autre façon de faire des affaires et une autre option. On ne fait plus des affaires par défaut et il n'y a pas de monopole. Vous pouvez envisager d'autres options et d'autres voies.
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais remercier nos témoins d'être avec nous aujourd'hui pour répondre à nos questions.
Un des éléments frappants dans vos témoignages — un élément très évident en soi, mais qui est devenu encore plus frappant lorsqu'il a été mentionné —, c'est que de nombreux Canadiens qui sautent des repas le font souvent pour payer leurs factures de téléphone. C'est une situation injuste, bien entendu.
J'ai l'impression que pendant la COVID-19, l'écart entre les personnes, le fossé des inégalités, s'est encore élargi parce que beaucoup de gens ont besoin d'une bonne connexion pour jouer un rôle dans l'économie. Pensons au système d'éducation. Beaucoup de Canadiens s'en remettront à l'éducation en ligne au cours des prochains mois parce que nous ne savons pas exactement quelle sera la tournure des événements. C'est une question qui m'inquiète beaucoup.
On dit souvent que tous les Canadiens ont accès à l'éducation, mais si on se tourne de plus en plus vers l'enseignement en ligne, ce ne sera plus le cas, car l'accès ne sera plus égal pour tous puisque certains devront surmonter les obstacles auxquels ils se heurtent actuellement.
Cela étant dit, vous avez été nombreux à nous donner des exemples de moyens que peut prendre le gouvernement pour veiller à ce que les tarifs Internet et de téléphonie cellulaire soient plus abordables. Le s'est engagé à faire diminuer les coûts de téléphonie cellulaire de 25 % au cours des prochaines années.
Avez-vous d'autres suggestions que celles déjà envisagées pour rendre ces tarifs plus abordables pour les Canadiens à faible revenu? J'ai entendu quelqu'un dire que beaucoup de Canadiens seraient prêts à voir leur facture augmenter de 50 ¢ pour aider les moins fortunés. Y a-t-il autre chose qui n'a pas été mentionné et que le gouvernement pourrait mettre en œuvre pour rendre les tarifs plus abordables?
La question s'adresse à quiconque veut y répondre.
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Au sujet des subventions dont nous discutons, elles ont été proposées, mais n'ont pas été mises en œuvre.
Le gouvernement a mis en place des programmes pour que les Canadiens à revenu modeste puissent obtenir des services Internet à 10 $, des services que les entreprises offrent sur une base volontaire. C'est une bonne idée, mais comme c'est sur une base volontaire, certaines entreprises ne participent pas. De plus, le programme ne s'adresse qu'aux Canadiens qui ont des enfants et qui reçoivent l'Allocation canadienne pour enfants.
Si ce programme mis en place par le , l'initiative Familles branchées, pouvait être élargi pour inclure tous les gens à faible revenu, qu'ils aient ou non des enfants, et s'il pouvait être obligatoire pour les entreprises de télécommunications, ce serait très utile. Je ne pense pas que cela ait été mentionné, mais ce serait simple à mettre en place, je pense, même si je sais que les entreprises voudraient avoir leur mot à dire. Il faudrait y injecter des fonds, mais cela améliorait grandement le programme.
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Il serait sans doute beaucoup plus facile de savoir où diriger les fonds en n'ayant qu'un seul programme ciblé, plutôt qu'en s'en remettant à des demandes de fonds dans les diverses enveloppes de financement.
Je vais vous donner un exemple de ce que le gouvernement actuel a fait dans le cadre d'une initiative de financement ciblée qui est extrêmement utile. Le gouvernement s'est engagé à relier Iqaluit, qui se trouve au Nunavut, à un câble transatlantique qui va donner à la ville un accès direct à la fibre. Il s'agit d'un investissement très ciblé que le gouvernement a décidé de faire dans une région où les fonds pouvaient servir à brancher la ville d'une façon directe pour améliorer la connectivité dans une région éloignée. Il a ensuite lancé un appel d'offres pour mener à bien ce projet jugé prioritaire.
Par contre, comme vous le savez, nous avons à l'heure actuelle une multitude de programmes de financement dans le cadre desquels des demandeurs peuvent proposer des projets et, en fonction des projets proposés et des priorités existantes, on choisira les meilleurs. Il n'y a pas, cependant, de plan global pour déterminer où se trouvent les régions dont les besoins sont les plus urgents à combler. Tout dépend donc en grande partie des propositions qui sont présentées.
Il y a aussi la question des gains d'efficacité potentiels dans l'utilisation du spectre. Par exemple, il se pourrait qu'une façon plus efficace de maximiser l'utilité du spectre serait de forcer les titulaires de licence qui ne bâtissent pas d'infrastructure dans les régions rurales à rendre le spectre disponible aux municipalités ou groupes autochtones locaux pour qu'ils bâtissent leur propre infrastructure et répondent aux besoins locaux, sur la base du recouvrement des coûts, afin d'éviter que le spectre ne soit pas utilisé.
En adoptant une approche plus globale et stratégique, on pourrait voir émerger ce genre de solution pour remédier aux problèmes là où ils se trouvent, plutôt que de s'en remettre à l'approche divergente qu'on utilise actuellement.
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Merci, madame la présidente.
Comme je siège à ce comité depuis tellement longtemps, j'en suis probablement à ma centième réunion sur le sujet. Je dois être honnête: nous avons beaucoup d'avantages en dépit des problèmes, et je comprends l'idée de demander aux consommateurs de payer plus pour en aider d'autres, mais encore une fois, on récolte des milliards de dollars aux enchères du spectre, puis on lance une panoplie de programmes différents, un salmigondis presque — j'ai utilisé le terme auparavant —, et on tente ensuite de trouver une façon de rabouter le tout ensemble.
Très honnêtement, madame la présidente, je n'ai pas de questions en ce moment. Je vais céder mon temps de parole. J'aime l'idée d'un tsar dans le contexte actuel pour mieux coordonner le tout. Cela pourrait servir non seulement dans la phase de construction liée au spectre, mais aussi pour le dur travail qui doit être fait sur le terrain, et le volet consommateurs, etc., afin que nous puissions coordonner à nouveau le tout et nous réorienter, notamment en raison des frustrations mais aussi des avantages, parce que tout cela est assujetti à la réglementation publique. Nous en retirons certains avantages. Nous avons d'excellents titulaires, et nous avons d'excellents nouveaux venus dans le marché, mais il faut que le tout soit fait de façon plus équitable.
Je m'arrête ici, madame la présidente. Je tiens à remercier nos invités, car leurs témoignages ont été très utiles aujourd'hui.
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Oui. Je vous remercie beaucoup de poser la question et de me donner l'occasion de répondre.
Je vais faire un lien avec mes dossiers. Je pense que vous pouvez voir qu'il y a une corrélation directe entre les ERMV missionnés et la décision concernant l'accès Internet de tiers. Il s'agit concrètement des prix, qui sont réglementés et qui peuvent se situer en deçà de la valeur marchande. Si quelqu'un doit vendre sous la valeur marchande, il ne sera pas incité à investir. S'il ne peut pas récupérer cet argent, à quoi bon? Deuxièmement, pour revenir à l'argument des ERMV au sujet du sans-fil, si vous êtes un ERMV et que vous pouvez vous greffer à d'autres réseaux, alors c'est encore moins intéressant d'investir dans ce cas.
J'ai déjà parlé de certains faits. Si vous regardez notre couverture, je sais qu'il y a encore du travail à faire, mais je dirais qu'elle est, somme toute, assez bonne. Si vous regardez la qualité de nos réseaux, nous avons les vitesses de téléchargement les plus élevées dans le monde. Tout cela est le fruit de la concurrence. Je crois fermement que si on veut avoir des réseaux de qualité et plus étendus pour brancher plus de Canadiens, la meilleure façon de procéder est de permettre la concurrence dotée d'installations.
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Je vais rajouter quelques éléments et revenir sur d'autres. N'hésitez pas à me le dire si certains éléments ne sont pas clairs.
Concernant notre plainte au Bureau de la concurrence, le problème est précisément que Bell et Rogers ont gonflé les prix pendant des années devant le CRTC. Ils se sont ainsi assurés que les coûts des concurrents resteraient élevés, tout comme leurs tarifs de détail.
En parallèle, en particulier au cours des dernières années, ils ont mis en place des marques défensives, qui visent essentiellement à faire concurrence à leurs concurrents. Ce sont en réalité des marques de Bell et Rogers. Nous parlons ici de Virgin et Fido. Ces entreprises se comportent comme des concurrents. Les gens dans le marché les perçoivent même comme des solutions de rechange aux grands fournisseurs. Elles ont été créées expressément pour faire concurrence aux grossistes. Elles offrent des tarifs inférieurs aux nôtres.
Pour ce qui est leur façon de faire, ces entreprises savent exactement quels sont nos coûts. Nous achetons des services de Bell et Rogers aux tarifs de gros, dont certains sont réglementés et d'autres non. Elles savent exactement quels sont nos coûts et nous coupent l'herbe sous le pied en partant. Si les tarifs définitifs du CRTC d'août 2019 étaient mis en œuvre, cela mettrait un terme à cette stratégie. Nous disposerions alors de la marge de manœuvre pour fixer des prix plus bas, et nous pensons que tous les prix de détail diminueraient aussi. Dans les faits, c'est nous qui régirions leurs tarifs, alors qu'à l'heure actuelle, c'est l'inverse qui se produit.
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Oui, monsieur. Je vous remercie de votre question.
Cela ne rapporte pas d’argent à ces entreprises de télécommunications. Telle est leur approche. Bien qu’elles soient financées, dans bien des cas, par les contribuables pour construire des infrastructures, elles n’ont tout simplement pas la volonté de le faire. Il s’agit de maximiser les profits, plutôt que de maximiser la prestation des services et la couverture.
Hier, j’ai eu un entretien avec un représentant d’une entreprise de télécommunications pour essayer, une fois de plus, d’uniformiser les règles du jeu. Je me suis fait dire qu’il y a Vancouver, Toronto et, entre les deux, Calgary, où il y a quelques ralentisseurs, et que le reste ne compte pas vraiment.
Cette approche explique justement pourquoi nous sommes ici et pourquoi ces communautés se trouvent dans la situation actuelle. Il a fallu une approche différente pour résoudre ce problème, notamment grâce à des solutions par satellite.
Je vous remercie.
Voilà qui met fin au troisième tour, et c’est tout le temps dont nous disposions aujourd’hui.
Je tiens à remercier encore une fois les témoins de leur présence, ainsi que l’équipe informatique et les interprètes de leur travail impeccable, comme toujours.
À titre d’information pour les membres du Comité, jeudi, nous examinerons le projet de rapport sur la Loi sur Investissement Canada. Si vous n’avez pas eu l’occasion de le lire, assurez-vous de le faire.
S’il y a des changements à l’horaire, nous ne manquerons pas de vous les communiquer par l’entremise du greffier.
Je vous confirme à nouveau que les représentants de Bell seront parmi nous le mardi 26 janvier.
Encore une fois, merci beaucoup. La séance est levée.