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Je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite à tous la bienvenue à la séance no 18 du Comité permanent des ressources naturelles.
Comme tout le monde le sait, cette séance se déroule sur Zoom. Nous devrons donc nous montrer un peu patients, essayer d'éviter de parler en même temps et veiller à ce que les traducteurs aient le temps d'assimiler et de traduire les questions et les observations. La patience de tous est grandement appréciée.
Avant de présenter les témoins, j'aimerais faire un retour en arrière.
Tout d'abord, je souhaite la bienvenue à M. Fast, qui remplace quelqu'un aujourd'hui.
Je souhaite la bienvenue à notre nouveau secrétaire parlementaire, M. Serré, qui est ici aujourd'hui à titre d'observateur seulement. Nous avons hâte de travailler avec vous. C'est un retour pour vous. Vous avez fait vos débuts à ce comité. M. Cannings, Mme Stubbs et moi faisions partie de l'équipe initiale en 2015. Je vous souhaite donc un bon retour.
Madame Stubbs, c'est un plaisir de vous voir aujourd'hui. Bon retour. Je pense que vous êtes ici pour une heure seulement; donc, il faudra maximiser ce temps. Nous sommes très contents de vous voir, comme toujours.
Sur ce, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins.
Nous accueillons aujourd'hui trois personnes et deux groupes. Nous avons M. Eggert, professeur à la Colorado School of Mines, M. Heffron, professeur en droit de l'énergie mondiale et durabilité, et Jean Monnet, professeur en transition juste, à la University of Dundee, et Jeffrey Kucharski, professeur à la Royal Roads University. Nous accueillons également des représentants d'Investissement Québec et de l'Institut de recherche en mines et environnement.
Chacun de nos témoins, qu'il soit ici à titre individuel ou fasse partie d'un groupe, aura cinq minutes pour faire une déclaration d'ouverture. Je souligne que c'est cinq minutes et que je pourrais devoir vous interrompre si vous dépassez ce temps. Nous observons des limites de temps strictes ici. Une fois que tous les témoins auront fait leur déclaration d'ouverture, je donnerai la parole aux députés pour qu'ils puissent poser des questions.
Alors, sans plus tarder, je vais procéder selon l'ordre d'apparition dans l'ordre du jour et commencer par M. Eggert.
Je souligne que vous êtes libres de parler dans la langue officielle de votre choix ou les deux et je vous y encourage. Vous avez une fonction de traduction au bas de votre écran. Vos micros et votre matériel ont été testés. Il ne devrait donc pas y avoir de problème.
Monsieur Eggert, vous avez la parole.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître aujourd'hui.
Je suis professeur d'économie et de commerce, avec spécialisation en économie minérale, à la Colorado School of Mines.
Depuis 2013, je suis directeur adjoint du Critical Materials Institute, un consortium de recherche public-privé créé par le département américain de l'Énergie. Il mène des recherches en collaboration avec des universités, des entreprises et des laboratoires nationaux et vise à accélérer l'innovation pour faciliter l'obtention de matières premières et l'établissement de leurs chaînes d'approvisionnement et assurer le développement et le déploiement de technologies d'énergie propre.
J'ai axé mes observations préliminaires sur une question centrale et, vers la fin de mon discours, j'offrirai quelques réflexions préliminaires sur les collaborations possibles entre les États-Unis et le Canada.
Ma question centrale est la suivante: quel type de politiques industrielles les États-Unis et le Canada devraient-ils adopter, indépendamment de l'un et l'autre, sur les chaînes d'approvisionnement en matières premières? Veuillez noter que j'ai parlé de politique industrielle. Je l'ai fait délibérément. La façon dont un pays tire parti de sa richesse minérale en tant que producteur et la façon dont il gère les risques liés à sa chaîne d'approvisionnement en tant que consommateur reflètent fondamentalement ses choix en matière de politique industrielle.
Je tiens à faire remarquer qu'il existe souvent une fausse dichotomie dans les discussions sur la politique publique qui a trait à deux approches stratégiques caricaturales qui s'excluent mutuellement. D'un côté, il y a l'approche sectorielle neutre qui vise à laisser le marché décider et, de l'autre côté, il y a l'approche qui vise à laisser le gouvernement choisir les gagnants et les perdants. En réalité, la plupart, voire la totalité, des gouvernements opèrent dans une zone intermédiaire plus confuse entre ces deux extrêmes.
Les vraies questions sont les suivantes: premièrement, comment les gouvernements peuvent-ils et doivent-ils appuyer des solutions axées sur le marché qui attirent l'attention sur des choses comme l'éducation et la recherche fondamentale préconcurrentielle; et deuxièmement, comment les gouvernements peuvent-ils et doivent-ils agir plus rapidement afin que le marché puisse diriger les activités commerciales vers des secteurs et des technologies particuliers?
Dans le contexte des chaînes d'approvisionnement en matières premières, l'approche fondée sur l'éducation et la recherche fondamentale serait axée sur un avenir à long terme — soit 5 ans, 10 ans ou plus — et ne fournirait qu'une analyse stratégique de mise en contexte. Cependant, elle se concentrerait sur les intrants importants des activités commerciales, comme les gens instruits et les connaissances recueillies à l'aide de recherche fondamentale préconcurrentielle.
En ce qui concerne la deuxième question, c'est-à-dire la nécessité d'agir plus rapidement à court et moyen terme, nous pourrions nous concentrer sur des secteurs précis. Dans le contexte des chaînes d'approvisionnement en matières premières, nous pourrions notamment établir des partenariats publics-privés pour encourager et accélérer le déploiement de technologies et l'activité commerciale dans une chaîne d'approvisionnement particulière qui est plus étroitement définie, dont celle des aimants, des moteurs, des véhicules électriques, des aimants et des moteurs à base de terres rares, des matériaux de batterie, des anodes, des cathodes et les batteries.
Essentiellement, la politique industrielle nationale devrait consister à trouver la bonne combinaison d'activités gouvernementales qui appuient les solutions privées à long terme et aident à orienter les activités commerciales particulièrement prioritaires de manière plus active et plus agressive à court et moyen terme.
En ce qui concerne les domaines de collaboration possibles — et je dirais que la liste n'est pas exhaustive —, il existe des possibilités pour les États-Unis et le Canada. Des échanges de renseignements, des analyses stratégiques générales et prospectives liées aux matières premières, des programmes de coopération entre universités et des échanges d'étudiants et de professeurs sont certainement des possibilités. Cela pourrait également inclure des partenariats entre gouvernements pour évaluer les ressources primaires non conventionnelles, le potentiel de récupération de minéraux précieux à partir de flux de déchets traités provenant d'une ancienne mine ou d'une mine actuelle, et la possibilité de rendre circulaire les cycles de vie des matériaux.
Quoi qu'il en soit, d'après mon horloge, cela fait maintenant cinq minutes que je parle. Je vais donc m'arrêter et j'ai hâte de discuter de ces questions, d'autres collaborations possibles et de tout autre sujet que vous pourriez vouloir aborder à la période des questions.
Merci beaucoup.
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Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler ici aujourd'hui.
Je suis professeur de droit de l'énergie mondiale et durabilité à l'Université de Dundee. Nous avons l'un des plus vieux centres de droit de l'énergie; il célèbre son 44e anniversaire cette année. Je suis également titulaire de la Chaire Jean Monnet sur la transition juste, qui est un prix décerné par la Commission européenne.
Je vais vous parler de certains de mes travaux de recherche et d'élaboration de politiques. Ils sont axés sur la question des minéraux critiques et de la justice.
Une question cruciale à l'exploitation continue des minéraux critiques consiste à déterminer la vision pour l'industrie. Dans le monde d'aujourd'hui, la justice doit être au cœur de cette vision. À mesure que l'industrie des minéraux critiques se développe au Canada, la justice doit être prise en considération au cours de la planification, de la construction, de l'exploitation et du déclassement d'un projet de minéraux critiques.
Il est important que la société comprenne bien que, premièrement, des années de développement de projets ont permis à l'industrie des minéraux critiques de tirer des leçons des erreurs commises dans le secteur de l'énergie; deuxièmement, l'industrie des minéraux critiques a de la valeur pour la transition énergétique; et troisièmement, l'industrie des minéraux critiques contribuera à la transition équitable du Canada vers une économie à faibles émissions de carbone.
L'industrie des minéraux critiques joue manifestement un rôle vital et il est nécessaire que les intervenants conviennent tous du fait que l'industrie a besoin de ce que nous pouvons qualifier d'« acceptabilité sociale » de la part des citoyens canadiens.
En ce qui concerne l'examen des risques, il sera essentiel de réduire le profil de risque de l'industrie des minéraux critiques à mesure qu'elle se développera au Canada. Cette approche présente des avantages évidents. Elle réduira les coûts de financement, assurera le maintien des activités sur place sans arrêt, contribuera à la croissance économique, créera de bons emplois et contribuera à la transition énergétique. Pour ce faire, le rôle de la justice doit être clair afin que tous les intervenants soient satisfaits.
Le nombre croissant de demandes pour plus d'équité, d'égalité et d'inclusion, c'est-à-dire plus de justice, est en train de changer le programme international en matière de politique, d'affaires et de société. Il est donc important que le Canada reste à l'avant-garde de ces changements et dispose d'une politique souple qui permet de s'y adapter.
Nous pouvons constater ces demandes pour plus de justice si nous faisons le suivi des changements attribuables à l'Accord de Paris de 2015, à la lutte contre les changements climatiques, aux objectifs de développement durable de l'ONU et aux questions de fiscalité, de divulgation et de transparence comme l'investissement dans les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance, les règles des investissements étrangers, l'économie, les évaluations environnementales, l'assurance, le financement de projets et l'essor de l'imagerie et des données.
Le président Joe Biden est allé encore plus loin et a nommé une directrice de la justice énergétique au sein du département américain de l'Énergie.
Tous les secteurs que j'ai énumérés réclament plus de justice et tentent d'établir et d'améliorer des résultats justes au sein de la société. Pour l'industrie des minéraux critiques, le fait que la justice soit au cœur de son développement ne peut être que positif. Cela garantira le développement de ses activités avec moins de risques et assurera la viabilité de l'industrie à l'avenir. Autrement dit, l'industrie n'aura pas à interrompre ses activités en raison d'un manque d'assurance disponible et ainsi de suite.
Par conséquent, de quoi est-il question lorsque nous parlons de ces formes de justice? Nous pouvons examiner le sujet en fonction, par exemple, d'un cadre juste. Cela nous oblige à examiner le problème selon quatre perspectives.
La première perspective vise à assurer une justice distributive, procédurale et réparatrice. Je vais les expliquer brièvement.
La justice procédurale devrait être claire. La justice réparatrice concerne la nécessité de déclasser les projets, c'est-à-dire de nettoyer les sites correctement. La justice distributive est essentielle, car l'industrie des minéraux critiques devrait entraîner une distribution plus équitable de la richesse. Il n'y a aucune raison pour que les sociétés minières continuent à réaliser des profits supernormaux.
La deuxième perspective d'analyse porte sur la reconnaissance et la justice cosmopolite. Il s'agit essentiellement de l'inclusion. La reconnaissance consiste à faire en sorte, par exemple, que les communautés autochtones sont reconnues. La justice cosmopolite nous permet d'avoir des répercussions au-delà des frontières; par exemple, quelle sera la contribution des minéraux critiques à la transition énergétique mondiale? Quelles seront ses répercussions sur les objectifs énergétiques et climatiques du Canada dans le cadre de l'Accord de Paris et d'autres engagements internationaux?
La troisième perspective d'analyse concerne l'espace. Où seront situées ces exploitations de minéraux critiques au Canada? Se trouveront-elles dans des grappes, ce qui pourrait avoir des impacts environnementaux excessifs? Contribueront-elles de façon positive au développement régional dans l'ensemble du Canada?
La quatrième perspective porte sur les échéances et la planification de différents scénarios en 2030, 2035, 2040, 2050 et ainsi de suite. Dans ce contexte, on peut se poser la question suivante: d'ici quand le Canada veut-il avoir une industrie des minéraux critiques opérationnelle, juste et durable? Si c'est d'ici 2030, par exemple, quels types de lois et de politiques...
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Monsieur le président, je tiens à vous remercier et à remercier les membres du Comité de l'invitation. C'est un réel plaisir pour moi de témoigner aujourd'hui devant votre comité. Je suis professeur à l'Université Royal Roads, à Victoria. Je fais de la recherche et je publie des ouvrages sur des sujets liés à l'énergie, à la géopolitique et au commerce international.
Le Canada dispose d'une abondance de ressources stratégiques dont tous les pays, en particulier ceux de la région indo-pacifique, ont besoin pour développer et soutenir leurs économies. Au cours des prochaines décennies, la région indo-pacifique, stimulée par une croissance économique et démographique continue, fera augmenter la demande mondiale d'énergie et de minéraux critiques. Selon l'Agence internationale de l'énergie, la région sera responsable d'environ 60 % de la croissance mondiale de la demande en énergie d'ici 2040, ce qui nécessitera des investissements annuels en infrastructures énergétiques de plus de 1 billion de dollars américains.
Dans l'ouvrage que j'ai publié, j'explique que les ressources stratégiques englobent les ressources énergétiques du Canada, comme les combustibles fossiles et l'uranium, ainsi que les minéraux critiques, comme les éléments des terres rares. Je dis que les minéraux critiques sont stratégiques parce qu'ils sont relativement rares, qu'on ne peut les trouver qu'à certains endroits, qu'ils sont essentiels à l'économie moderne et qu'ils font partie intégrante de la transition énergétique. L'accès aux ressources minérales critiques est une question de sécurité nationale pour de nombreux pays et est de plus en plus essentiel à la croissance économique, à la paix et à la sécurité.
Nous devons reconnaître que des risques sont liés à la stabilité et à la sécurité des chaînes d'approvisionnement en matière de ressources stratégiques. Dans le cas des minéraux critiques, l'offre mondiale limitée, la révolution numérique et les efforts de décarbonisation entraînent la rareté des ressources et, par conséquent, une concurrence pour l'obtention d'un accès ininterrompu à ces minéraux. Le principal risque réside dans l'interruption des approvisionnements, que ce soit en raison de pénuries, d'embargos, de guerres commerciales, de conflits ou, comme on l'a vu récemment, d'une pandémie mondiale.
Outre la concurrence, l'utilisation de la position de force sur le marché comme outil d'influence économique peut également être une source de risque. Dans le passé, la Chine a montré qu'elle était prête à utiliser son quasi-monopole sur les éléments des terres rares transformés comme un levier politique contre les pays avec lesquels elle a des désaccords. En 2010, la Chine a privé le Japon d'approvisionnements importants en terres rares en réaction à un conflit territorial concernant les îles Senkaku ou Diaoyu. De plus, en mai 2019, le président chinois Xi Jinping a visité l'une des usines d'aimants à terres rares de la Chine dans un avertissement à peine voilé à l'intention des États-Unis en raison de tensions commerciales grandissantes.
Dans ses documents de stratégie économique, la Chine continue de parler d'utiliser son pouvoir sur le marché des terres rares en réponse aux conflits géopolitiques. Le Canada et ses partenaires doivent donc miser en priorité sur les efforts visant à trouver d'autres sources d'énergie et à les exploiter dès que possible.
Je trouve encourageant de voir les efforts que déploient les gouvernements fédéral et provinciaux pour élaborer une stratégie sur les minéraux critiques, dresser une liste de ces minéraux et conclure des accords avec des alliés et des partenaires clés comme les États-Unis et le Japon. La mise en place d'une chaîne d'approvisionnement viable pour les minéraux critiques au Canada sera la priorité absolue. Au bout du compte, le Canada doit également avoir une stratégie qui nous permettra de tirer parti de nos capacités et de nos ressources pour établir des relations plus étroites sur le plan économique, politique et de la sécurité avec des régions importantes du monde.
Il est manifestement dans l'intérêt du Canada d'appuyer la sécurité économique et régionale de nos partenaires et alliés, c'est-à-dire les pays qui respectent l'ordre international fondé sur des règles dans la région indo-pacifique, notamment le Japon, la Corée du Sud, l'Australie et l'Inde. Le Canada doit bien se positionner pour être en mesure de répondre à la demande croissante de ressources énergétiques et d'autres ressources stratégiques, et de se tailler une réputation de fournisseur stable et fiable et de partenaire pour la région. Les intérêts du Canada dans la préservation de la paix et la stabilité dans la région indo-pacifique sont importants, car notre prospérité future dépendra de plus en plus de la stabilité du commerce et des relations en matière de politique et de sécurité dans cette région. Les minéraux critiques peuvent être un atout important pour le Canada dans le cadre de ces efforts.
L'avenir économique du Canada dépend en grande partie de notre positionnement face aux possibilités qui s'offriront à nous et aux défis qui se poseront dans la région indo-pacifique. J'espère que les gouvernements fédéral et provinciaux veilleront à coordonner leurs stratégies sur les minéraux critiques dans le cadre global de la stratégie indo-pacifique plus vaste qui est, je crois, actuellement élaborée à Affaires mondiales. Il importera de tirer parti des avantages que procurent les capacités et les ressources du pays relativement aux minéraux critiques afin de promouvoir les intérêts généraux du Canada et de soutenir le développement économique, la pérennité de l'environnement et la sécurité dans cette importante région.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous.
Mon nom est Karim Zaghib. J'occupe actuellement deux fonctions: je suis professeur praticien à l'Université McGill et conseiller pour Investissement Québec. J'ai auparavant été chercheur pendant 26 ans et directeur du Centre d'excellence en électrification des transports et en stockage d'énergie d'Hydro-Québec. Je possède 35 ans d'expérience dans le domaine de l'énergie. J'ai développé de la recherche, en particulier sur le plan de l'économie circulaire, en m'intéressant aux matériaux, et ce, de la mine à la mobilité jusqu'au recyclage.
Les minéraux critiques et les métaux rares sont très importants pour le secteur de l'énergie, particulièrement pour la transition énergétique, la santé, l'économie et les applications militaires. Plusieurs pays, dont la Chine et les États-Unis, classent les matériaux critiques et les métaux rares comme des questions relevant de la sécurité nationale. Selon le site Web du département américain du Commerce, les États-Unis ont ainsi classé 35 minéraux en 2018.
Nous avons presque tous ces minéraux au Québec, notamment l'aluminium, l'indium, le titanium et le niobium. Le Canada a aujourd'hui de belles possibilités devant lui.
Je parlerai plus particulièrement de batteries, car c'est mon domaine. Dans les batteries, en particulier les batteries lithium-ion, on a une anode, une cathode et un électrolyte. Les matériaux de l'anode comme le graphite, le silicium et le cuivre sont là, dans le sol canadien. C'est aussi le cas de la cathode avec l'aluminium, le nickel, le cobalt et le manganèse, notamment. Ce sont donc des matériaux que l'on retrouve vraiment au Canada.
Le plus important est ce qui suit.
[Traduction]
Il faut que le Canada dispose d'une chaîne d'approvisionnement stable et fiable sans émissions de CO2. Il faut une collaboration entre les provinces et également avec les États-Unis.
Les possibilités sont fantastiques. À l'heure actuelle, 85 % des batteries au lithium-ion sont fabriquées en Chine, au Japon et en Corée. Il y a des fabricants de matériel d'origine en Ontario, aux États-Unis et également ici, au Québec.
La chaîne d'approvisionnement stable au Canada respecte les droits de la personne; aucun enfant ne travaille dans les mines. Nous devons réfléchir à un plan stratégique avec le gouvernement et aussi à la relation entre le secteur privé et le secteur public.
Il y a une occasion à saisir, et nous ne voulons pas que le Canada devienne comme l'Afrique et qu'il vende simplement ses ressources naturelles. Nous devons faire la première transformation ici, puis la deuxième, et ainsi de suite.
Il ne faut pas oublier que nous avons ici des ingénieurs de talent et les meilleures universités. Les universités canadiennes sont comparables à celles de Boston ou de la Silicon Valley. Nous avons aussi de la créativité. Nous possédons l'un des portefeuilles de brevets les plus importants et nous attribuons des licences pour les technologies à de nombreuses entreprises dans le monde.
Je voudrais qu'il y ait une grande collaboration et qu'on pense aussi au transport de nos matières premières, entre autres. Comme vous le savez, la base du lithium-ion est le lithium. Nous avons au moins six endroits au Québec où il y a du lithium. En ce qui concerne les batteries, par exemple, Elon Musk dit qu'il faut du nickel. Il se trouve que nous avons du nickel ici, au Canada. Nous avons tout ce qu'il faut ici.
J'aimerais conclure en énumérant simplement les éléments importants: un approvisionnement stable et fiable, moins d'émissions de CO2, la traçabilité de nos ressources naturelles et la création d'emplois en Amérique du Nord.
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Bonjour à toutes et à tous.
Je vous remercie de votre invitation. On m'a demandé de comparaître pour présenter l'expertise de l'organisation que je représente en matière de développement responsable des ressources minérales, ainsi que pour me prononcer sur le soutien que le gouvernement fédéral devrait apporter à la recherche.
Je suis directrice administrative de l'Institut de recherche en mines et en environnement de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, ou UQAT. L'Abitibi-Témiscamingue est une région historiquement minière. L'UQAT est reconnue mondialement pour son expertise en mines et en environnement. Depuis sa création, il y a de cela 35 ans, l'UQAT a fait de l'exploitation responsable des ressources minérales, à la fois sur les plans social et environnemental, un élément central de son développement.
Grâce à nos nombreux partenariats avec les entreprises minières, les ministères du gouvernement du Québec et d'autres universités québécoises, canadiennes et internationales, à l'expertise de très haut niveau de nos professeurs, à la création de l'Institut de recherche en mines et en environnement et à nos chaires de recherche, nous pouvons nous présenter fièrement comme un acteur incontournable dans le domaine.
L'Institut de recherche en mines et en environnement a déjà accompli de nombreuses réalisations pour illustrer notre volonté et notre capacité d'agir comme un acteur de premier plan dans l'exploitation responsable des minéraux critiques et stratégiques.
Par exemple, en 2014, déjà, un de nos professeurs, M. Benoît Plante, qui est maintenant titulaire d'une chaire, obtenait ses premiers financements collaboratifs pour travailler sur la géochimie des rejets miniers de terres rares. Depuis ce temps, il a obtenu des financements privés et gouvernementaux de plus de 1 million de dollars pour développer les connaissances en géochimie environnementale des ressources minérales stratégiques, particulièrement en ce qui concerne les mines de lithium, de terres rares et de graphite.
En 2015, l'UQAT déposait pour la première fois, conjointement avec le Cégep de l'Abitibi-Témiscamingue et son centre affilié, une demande de financement à hauteur de 7,5 millions de dollars au ministère de l'Économie et de l'Innovation du gouvernement du Québec pour développer sa capacité de recherche et d'innovation en ce qui concerne l'exploitation des métaux stratégiques à partir de l'Abitibi-Témiscamingue, un financement qui fut finalement accordé en 2018.
Avant même d'obtenir ce financement, nous y croyions tellement que nous recrutions au sein de notre organisation la professeure Lucie Coudert, spécialiste en valorisation des métaux stratégiques par procédé hydrométallurgique. Elle est spécialisée dans le recyclage des batteries, notamment.
Avec le financement que nous avons obtenu du ministère de l'Économie et de l'Innovation, nous avons contribué à la création du Centre d'excellence sur les métaux stratégiques Éléments08. De ce financement de 7,5 millions de dollars qui a été obtenu, 3,1 millions de dollars ont été accordés à l'UQAT. Cela nous a permis de recruter deux professeurs au sein de cette équipe pour compléter son expertise sur l'ensemble du cycle de vie d'une mine. Nous avons ainsi accueilli Jean-François Boulanger, spécialiste en traitement des minerais stratégiques, et M. Marc Legault, spécialiste en géologie des ressources minérales stratégiques.
Ces nouvelles arrivées à l'UQAT ont permis de bonifier l'équipe de spécialistes, qui compte aujourd'hui 16 professeurs spécialisés dans l'ensemble du processus du développement minéral. Notre département est l'un des plus importants en mines et en environnement au Canada. Il est capable d'intervenir sur l'ensemble du processus, de l'exploration jusqu'à la restauration des sols.
Finalement, nous avons aussi récemment créé la Chaire de recherche institutionnelle en géochimie environnementale des ressources minérales critiques et stratégiques.
On m'a demandé de me prononcer sur le soutien que le gouvernement fédéral devait offrir dans ce secteur. Je dois dire que j'abonde dans le même sens que M. Zaghib. On a une...
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Merci. Je crois que nous sommes tous d'accord. Je représente une circonscription du nord de la Colombie-Britannique et on y trouve justement des mines. Il s'y produit aussi du pétrole, du gaz et des produits forestiers. Bon nombre des secteurs des ressources naturelles y sont présents, alors nous avons soif d'investissements, mais encore faut-il que ce soit les bons.
J'aimerais maintenant revenir à ce que disait M. Zaghib. Selon vous, nous devons exploiter nos ressources et tirer parti des emplois qui s'ensuivent, partout en Amérique du Nord. Que nous conseillez-vous de faire, exactement? Je veux dire, vous nous avez déjà donné des conseils aujourd'hui, mais nous aimerions aller encore plus loin. Nous voyons bien tout le potentiel des minerais critiques. Beaucoup de Canadiens ignorent que le sous-sol du pays en regorge et que nous pouvons en tirer quelque chose.
Monsieur Zaghib, que nous conseillez-vous de faire afin que ce secteur s'oriente de manière plus positive? Que nous conseillez-vous de faire, à nous qui sommes ici, à Ottawa?
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Je vous remercie, monsieur le président.
[Français]
Je remercie tous les participants d'être là.
[Traduction]
Le groupe que nous recevons aujourd'hui est encore une fois très intéressant. Je suis vraiment content.
Je vous parle en direct de Sudbury, que l'on surnomme la capitale mondiale de l'innovation minière. On la surnomme aussi la capitale mondiale du nickel. On compte pas moins de 9 mines en activité près de chez moi et 350 PME qui œuvrent dans le secteur minier.
Cette étude s'est révélée emballante. Comme d'autres l'ont dit avant moi, la question est de savoir comment on peut doter le Canada d'une chaîne d'approvisionnement ou protéger celle qui existe déjà. Qu'il s'agisse de prospection, d'exploration, d'extraction, de transformation, de fabrication ou de commercialisation de minerais rares, les possibilités sont nombreuses, des aimants aux moteurs en passant par les anodes et les cathodes. Comment créer une chaîne d'approvisionnement en sol canadien et garder tous ces emplois ici?
Nous avons entendu de nombreux témoins dernièrement et nous avons certainement un rôle important à jouer, mais nous ne pouvons pas tout faire tout seuls. Nous avons besoin de partenaires et d'alliés.
Avant d'aller plus loin, j'aimerais revenir sur ce que vous disiez au début, monsieur Kucharski, sur l'état des lieux actuels concernant les terres rares et les minerais critiques ainsi que sur les agissements d'un autre pays et sur le fait qu'il est dangereux qu'un seul pays détienne ainsi le monopole. Qu'arrivera-t-il si nous poursuivons dans cette voie et si les pays comme le Canada ne font rien pour protéger les minerais critiques? Nous avons resserré hier les règles sur les prises de contrôle d'entreprises canadiennes par des intérêts étrangers afin de mieux protéger les minerais critiques. C'est le genre de chose qui est du ressort du gouvernement fédéral. Rapidement, à quel point est-ce important de protéger les chaînes d'approvisionnement dans une économie de marché comme la nôtre, par opposition, disons, à une économie contrôlée par l'État?
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Monsieur Lefebvre, je vous remercie de votre question et de la possibilité que vous me donnez de me prononcer à ce sujet.
Au Québec et au Canada, un savoir-faire important a été acquis sur le plan de l'exploitation responsable des métaux usuels et précieux connus. Nous ne partons donc pas de zéro.
Comme M. Zaghib l'a dit, je pense qu'il est important de ne pas tenter de réinventer la roue, mais de plutôt faire une cartographie de l'expertise au Canada, de la cibler et de la soutenir.
Comment soutenir la recherche maintenant?
Il faut prendre conscience que, en raison des conditions du marché et des monopoles existants, la compétitivité et les modes de financement de la recherche dans le secteur des minéraux critiques et stratégiques ne sont pas du tout les mêmes que ceux d'autres secteurs. Pour aller chercher des leviers de financement pour la recherche, l'industrie a besoin, au Québec comme au Canada, notamment de la part du gouvernement fédéral, d'investissements en espèces.
Il va donc falloir revoir les modes de financement, parce que les entreprises sont toutes au même endroit et sont bien en amont du processus de développement minéral. On parle d'entreprises d'exploration dont les moyens financiers sont précaires. Pour aller de l'avant sur ce plan, il va donc falloir soutenir la recherche de façon différente, c'est-à-dire à l'aide d'investissements davantage publics que privés. Il va aussi falloir soutenir les infrastructures de recherche et le développement des plateformes, parce que les besoins d'innovation technologique y sont très grands.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie l'ensemble des témoins.
Je suis content de vous retrouver, monsieur Zaghib. Nous avons déjà eu quelques conversations sur d'autres sujets.
Dans votre présentation, un élément a piqué ma curiosité. Vous avez dit que la mise en place d'une chaîne de valeurs stable et sécurisée pourrait être un élément prépondérant en ce qui concerne les minéraux critiques.
Dans la mise en place de cette chaîne de valeurs, sur quelles faiblesses et quels points à améliorer le gouvernement fédéral pourrait-il agir?
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Je vous remercie de votre question, monsieur Simard.
Nous avons les matériaux, les mines et les talents. Concernant ce qu'il manque, je vais vous donner un exemple.
Nous avons une mine de graphite et nous voulons rendre ce matériau commercialisable. À partir de la mine, nous allons produire une sphère, que nous allons purifier. Malheureusement, nous n'avons pas, au Canada, l'industrie nécessaire au processus de transformation. Il faut donc acheter des machines de la Chine, du Japon, ou d'ailleurs.
Il faudrait donc que le gouvernement fédéral, en collaboration avec des instituts d'innovation, accélère le développement de cette industrie afin qu'on puisse fabriquer les machines à proximité et être indépendants, non seulement dans la chaîne d'approvisionnement, mais aussi dans la fabrication. Il y a les secrets de fabrication, la propriété intellectuelle, et le reste. C'est donc un maillon très faible. Avec un investissement approprié du gouvernement, nous serions capables de résoudre le problème. Pour cela, il faut que la transformation se fasse chez nous, au Canada.
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En effet, il s'agit d'un modèle canadien qui est envié partout dans le monde, puisqu'il permet à l'industrie de s'impliquer en recherche-développement. Il permet aussi aux universités de faire une recherche qui est appliquée au secteur en question.
Concernant le secteur des minéraux critiques et stratégiques, en ce moment, il n'y a pas de mine de lithium ni de mine de terres rares en exploitation, par exemple. Cette industrie-là n'a pas les mêmes moyens financiers pour soutenir la recherche. Il est donc vrai que nous ne sommes pas du tout au même niveau sur le plan de la capacité de la recherche.
Aussi, comme nous vivons dans un monde axé sur le marché et que nous sommes en concurrence — non pas entre mines —, mais plutôt avec des pays qui ont le monopole du marché de ces substances, la propriété intellectuelle et les brevets, donc des aspects de confidentialité visant les résultats de la recherche, seront des questions importantes à considérer.
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Merci, monsieur le président.
Merci aussi aux témoins d'avoir pris le temps de venir répondre à nos questions aujourd'hui.
Monsieur Eggert, vous avez parlé des deux types de soutien: à long terme, sous forme d'éducation et de recherche, et à court terme, par des actions concrètes.
Nous vivons une crise climatique. La Chine est sur le point de nous dominer tous, ce qui nuit considérablement à l'électrification des réseaux énergétiques. Tout évolue rapidement et il faut agir rapidement aussi. Pourriez-vous nous en dire plus sur les politiques que le gouvernement du Canada pourrait mettre en œuvre afin que ce changement ait lieu le plus tôt possible?
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Je crois que vous avez raison. Il faut s'attaquer de toute urgence aux changements climatiques et à ce genre de chose. Dans un autre ordre d'idées, il ne faut pas non plus oublier les questions de sécurité nationale, qui rendent certaines personnes mal à l'aise, dont moi, car j'ai le réflexe, en tant que scientifique, de compter instinctivement sur le gouvernement pour trouver des solutions à long terme qui misent sur les forces du marché. Pourtant, ce qu'on a appelé la « crise des terres rares » a vu le jour il y a une dizaine d'années, en 2010-2011. Bien qu'il y ait eu un certain déplacement des activités de la chaîne d'approvisionnement en terres rares et en produits connexes, les changements prennent beaucoup de temps. La question qui se pose n'est donc pas de savoir si le gouvernement devrait se doter d'une politique industrielle plus proactive, mais sur quels mécanismes celle-ci devra reposer.
Selon moi, en finançant conjointement les projets pilotes et les installations de démonstration, le gouvernement peut très certainement faciliter la transition ou la conception d'une technologie pendant ce qu'on pourrait appeler les premières étapes — essentiellement la recherche privée ou fondamentale — et jusqu'à la réalisation d'une étude de faisabilité détaillée.
S'il est au contraire question de miser davantage sur la commercialisation d'un produit, comme un précurseur à batterie — les anodes et les cathodes —, ou d'en améliorer les méthodes de fabrication, je crois que la collaboration entre les multinationales des alliés et des partenaires pourrait alors produire des résultats plus rapidement. Car quoi qu'on en dise, certains pays sont mieux placés pour produire des minéraux, alors que d'autres ont plutôt avantage à se concentrer sur la transformation, qui ne nécessite pas seulement une grande quantité de minéraux, mais aussi de l'énergie à faible prix, l'accès aux réactifs et toutes sortes d'autres choses.
Je vais maintenant m'adresser à M. Heffron.
Vous avez beaucoup parlé de l'importance d'assurer une transition équitable et de veiller à ce que la justice soit prise en considération à toutes les étapes. Lorsqu'il s'agit des minéraux critiques et de l'industrie minière au Canada, je pense que le Canada a fait beaucoup de chemin ces cinquante dernières années pour ce qui est d'intégrer la justice à l'extraction des minéraux. On a réalisé d'immenses progrès dans ces domaines.
Toutefois, en ce qui concerne le déclassement, dont vous avez parlé, la situation actuelle laisse à désirer. Nous avons entendu de véritables histoires d'horreur au sujet du déclassement de certaines mines. Apparemment, le gouvernement fédéral devra investir pour l'éternité dans la mine Giant, à Yellowknife, pour éviter qu'elle n'empoisonne davantage la région. Dans l'Ouest du Canada, des sociétés mises sous séquestre ont abandonné leurs puits de pétrole, laissant ainsi au gouvernement la responsabilité financière des puits.
Je me demande si vous avez des exemples de politiques qui se sont révélées efficaces ailleurs dans le monde et qui garantissent que les coûts liés au déclassement sont imputés au projet et à l'entreprise et que les contribuables n'ont pas à payer la facture du nettoyage d'une mine ou d'un puits à la fin de son cycle de vie.
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Oui. Je pense notamment à l'obligation de se doter d'une réserve financière. Autrement dit, les sociétés doivent déposer de l'argent dans un compte bancaire pour être en mesure d'assumer les coûts du déclassement. Par exemple, ici au Royaume-Uni, peu importe si l'entreprise était vendue à une autre société, lorsqu'elle faisait faillite, avant ou tout juste avant la fin du cycle de vie de la mine en question, l'obligation de décontaminer incombait au gouvernement.
Les sociétés ont de plus en plus souvent l'obligation de constituer une réserve financière. Elles doivent mettre de côté 200, 300 ou 500 millions de dollars, en fonction de la taille du projet, de sorte que si elles font faillite, elles pourront quand même s'acquitter de leurs obligations de déclassement.
Il faut se pencher sur cette question si on souhaite que cette industrie canadienne prenne de l'expansion. Le cas échéant, l'industrie des minéraux critiques aura besoin de ce soutien public dans 5, 10, 15 ou 20 ans pour se développer et devenir une industrie sur laquelle on peut compter.
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Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Kucharski.
J'observe ce qui se passe ailleurs dans le monde. Vous avez parlé des intrants nécessaires à l'exploitation des minéraux critiques. Nous savons qu'un des principaux intrants est l'énergie, c'est-à-dire l'essence, le diesel, le mazout de chauffage, pour bon nombre de ces sites miniers. Je pense à des pays, comme la Chine, qui subventionnent les combustibles fossiles à hauteur d'environ 18 milliards de dollars, par rapport à des pays comme le Canada, où on augmente les taxes.
La taxe sur le carbone passera à 170 $ la tonne d'ici 2030. Pouvez-vous nous dire comment nous allons pouvoir soutenir la concurrence dans cette industrie alors que nous taxons les intrants et que le reste du monde semble les subventionner?
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Je vais le faire avec plaisir.
Je pense qu'il est naturel que le Canada et les États-Unis soient des partenaires dans ce domaine, non seulement à cause de leur proximité géographique, mais aussi parce que nos deux pays ont des attitudes semblables à l'égard du rôle général de l'État dans les activités commerciales. Je préconise une collaboration à deux volets.
Le premier volet est celui de la formation, du développement de la main-d’œuvre et de la recherche. Par exemple, les deux gouvernements pourraient collaborer pour évaluer le potentiel de la récupération des matières premières non conventionnelles. Quel serait le potentiel de la récupération, dans les résidus miniers, des matières à usage spécialisé, comme le gallium, l'indium et le tellure, qui ne sont pas récupérées à l'heure actuelle? Serait-il possible que des politiques commerciales, du financement public et des efforts de collaboration axés sur des projets pilotes et des installations de démonstration puissent accélérer davantage la mise en œuvre de nouvelles technologies?
La collaboration pourrait également être menée par l'industrie. Des entités des deux pays pourraient se concentrer sur les chaînes d'approvisionnement en matières premières, en s'inspirant peut-être du rôle qu'a joué le consortium SEMATECH, aux États-Unis, dans les années 1980 et 1990: sceller la collaboration dans l'industrie autour de la priorité stratégique qu'étaient les semiconducteurs.
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Oui, c'est une piste importante. Cependant, il faut aussi faire attention. Il ne faut pas bousculer les clients qui ont une voiture à essence. Je pense surtout aux familles de la classe moyenne.
En plus de la taxation, il faudrait une stratégie hybride comprenant des mesures de stimulation, où les deux paliers de gouvernement, fédéral et provincial, injectent de l'argent pour aider les familles moyennes à acheter de tels véhicules. Il faut éduquer les gens. Les jeunes connaissent aujourd'hui l'existence de la voiture électrique. Cependant, si l'on commence à forcer les gens de la classe moyenne à changer à tout prix, ils vont refuser de le faire.
Or, tout doucement, avec des changements modérés, les gens vont adhérer à l'idée. Le fait que les deux gouvernements mettent en place un stimulus comme on le voit aujourd'hui est important.
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Merci, je vais continuer avec M. Zaghib, puisque la glace est brisée.
J'aimerais dire une chose. Vous avez mentionné que la transition vers les véhicules électriques pourrait être ralentie en raison des personnes d'âge moyen, plus âgées. Or, KPMG vient de publier un sondage selon lequel 60 % des gens au Canada affirment que leur prochain véhicule sera électrique. La transition pourrait donc se produire beaucoup plus rapidement qu'on ne le pense, et je crois que ce sera probablement le cas.
Je veux vous poser une question sur l'économie circulaire, dont vous avez parlé. Lorsque l'on parle des véhicules électriques ou de l'électrification, il est souvent question des batteries et du recyclage des batteries.
Dans ma circonscription, il y a des entreprises qui sont des chefs de file dans cette technologie. D'après vous, quelles sont les perspectives offertes par ce secteur de l'économie circulaire?
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C'est une excellente question.
Il y aura un équilibre entre les mines urbaines et les mines naturelles. Les mines urbaines travailleront au recyclage. Il y a trois types de recyclage.
Pour ce qui est du recyclage direct, avec la fabrication des cellules de nos jours, entre 5 % et 10 % des cellules ne sont pas utilisées. Il faut donc les recycler. En ce moment, il existe un énorme marché pour le recyclage direct.
En outre, il y a le cobalt, le nickel et le manganèse. Comme on ne veut pas continuer à extraire ces minéraux, le recyclage devient un complément très important de l'exploitation minière, de l'exploitation des ressources naturelles, etc. Nous pouvons également créer et maintenir des emplois, parce que nous avons la technologie. Le processus existe au Canada. Par ailleurs, cela représente peut-être une excellente occasion de collaborer avec les États-Unis et de mettre en œuvre un projet d'économie circulaire en amont et en aval, et de recyclage des matériaux.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
Pour éclaircir la question des approbations réglementaires, je souligne que, parmi les grands exploitants miniers du monde, l'Australie affiche un délai moyen de deux ans pour l'approbation des projets miniers; aux États-Unis, le délai moyen pour l'approbation des projets miniers est sept ans; au Canada, le délai moyen pour l'approbation des projets miniers est de plus de 10 ans. À l'heure actuelle, il y a deux projets d'exploitation minière en attente au Canada, lesquels figurent sur une liste de projets d'exploitation des ressources d'une valeur de 20 milliards de dollars, qui attendent une décision du Cabinet avant de procéder à l'étape de l'évaluation.
J'invite les témoins à nous dire — bien que nous ayons déjà déterminé la réponse, je crois — s'il y a en fait un projet quelconque pour l'exploitation de minéraux rares en attente d'une approbation en ce moment au Canada.
Je ne sais pas si M. Kucharski sait la réponse ou...
La réponse est non. Il n'y a aucun projet d'exploitation de minéraux rares en attente d'une approbation et d'une évaluation. Naturellement, cela est directement lié à l'incertitude qui règne au Canada en matière de fiscalité et de réglementation, et à son effet négatif sur le secteur privé. Je salue le Comité d'avoir entrepris la présente étude. Je m'inquiète, cependant, du temps nécessaire pour que les choses aboutissent au Canada.
L'an dernier, au nom des conservateurs, j'ai réclamé des règles plus strictes sur les prises de contrôles par des intérêts étrangers de ressources naturelles et de projets de valeur stratégique, en particulier de la part de sociétés d'État et du Parti communiste chinois. Je tiens à féliciter le gouvernement de l'annonce qu'il a faite cette semaine.
Il n'en demeure pas moins que le Canada a toujours de la difficulté en raison de l'infrastructure exigée et du temps, trop long, qu'exige l'approbation des projets miniers. J'en veux pour exemple la mine Frontier de Teck, qui a consacré huit ans au processus d'approbation, pour ensuite retirer sa demande, en raison de signaux indiquant que les libéraux envisageaient de rejeter le projet. Cette incertitude a assurément un impact majeur sur les investissements et le développement, et elle n'a aucun sens. Je suis certaine que tous les membres du présent comité savent qu'une abondance de lithium se trouve dans les saumures de lithium et les champs de pétrole de subsurface en Alberta et que les sables bitumineux sont aussi des sources de titanium et de zirconium. Dans toute l'économie canadienne, le secteur des sables bitumineux est l'investisseur privé qui investit le plus dans les technologies propres.
Étant donné les ressources qui se trouvent là-bas et en Colombie-Britannique, les ressources abondantes de terres rares dans le Nord du Québec, les Territoires du Nord-Ouest et l'Ontario, est-ce que l'un d'entre vous, messieurs Eggert, Kucharski ou Zaghib, est au courant d'un projet pilote en cours en ce moment qui pourrait un jour passer au travers du processus de réglementation incertain du Canada?
Est-ce qu'un autre témoin serait au courant d'un projet pilote quelconque entrepris par le secteur privé en collaboration avec tous les ordres de gouvernement?
Assurément, pour réaliser le potentiel des sables bitumineux et de la troisième plus importante réserve de pétrole brut de la planète, il a fallu prendre des risques, innover et établir des partenariats véritablement proactifs entre les gouvernements, les établissements universitaires et de recherche et, évidemment, le secteur privé, qui est crucial dans tout cela.
J'aimerais entendre les observations de M. Eggert ou M. Kucharski sur les dispositions de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique concernant la période de trois ans où les fabricants d'automobiles peuvent bénéficier d'une franchise des droits de douane si 75 % du lithium utilisé provient de la région.
Je me demande si vous pensez que cela est faisable ou probable, ou si le Canada est capable d'intensifier ses efforts de production dans le temps qui reste, c'est-à-dire seulement deux ans.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous.
Je remercie les témoins de leur contribution exceptionnelle aujourd'hui.
Je suis la députée du Labrador. L'exploitation minière n'a rien de nouveau pour nous. Toutefois, pour ce qui est de la mise en valeur de nouveaux minéraux et des minéraux critiques, il y a de nombreux changements intéressants et un fort optimisme par rapport à l'avenir.
Ma question s'adresse à M. Kucharski. Elle porte sur un article publié par Reuters hier indiquant que le gouvernement du Canada a resserré les règles entourant les prises de contrôle par des intérêts étrangers, surtout en ce qui concerne notre chaîne d'approvisionnement en minéraux critiques.
Il y a quelque temps, le a annoncé une liste de 31 minéraux critiques. Il a mentionné que pour être inclus dans cette liste, les minéraux doivent notamment être importants pour assurer la sécurité nationale du Canada.
Pouvez-vous expliquer pourquoi il serait dangereux qu'un pays — qui n'est pas particulièrement amical de surcroît — détienne la chaîne d'approvisionnement en minéraux essentiels à la sécurité nationale et continentale? J'aimerais que vous abordiez la question dans le contexte historique d'une stratégie de défense continentale. Pourriez-vous en parler brièvement devant le Comité aujourd'hui?
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D'accord, le sujet est vaste.
Je vais parler des minéraux critiques, y compris des ressources stratégiques comme l'uranium. Prenons l'uranium comme exemple. C'est évidemment un minéral important qui est utilisé dans la production d'énergie nucléaire et le secteur de la défense. Il est soumis à des contrôles très stricts depuis de nombreuses années. Un régime et des protocoles sont en place pour notamment prévenir la prolifération.
Je ne sais pas si le gouvernement fédéral considère cet exemple comme un modèle d'une quelconque façon, mais je pense qu'il donne une perspective historique sur la protection de certains minéraux critiques. Maintenant que le Canada a une liste, il est bien que le gouvernement fédéral cible une partie de ces minéraux critiques. Il doit utiliser cette liste comme filtre lorsqu'il étudie les demandes d'investissements provenant d'industries critiques. Dans certains cas, nous pourrions y avoir recours pour empêcher certains pays qui ne partagent peut-être pas nos valeurs et la direction que nous souhaitons prendre de faire des investissements.
À mon avis, le fait que des pays comme la Chine investissent dans des mines ou des entreprises qui participent à la mise en valeur ou au traitement des minéraux critiques pourrait être dangereux. En détenant et en contrôlant de telles entreprises et ressources, ils pourraient restreindre ou ralentir l'approvisionnement de ces minéraux vers le Canada, ses partenaires et ses alliés. En ce qui concerne l'emprise sur le marché, je vais me concentrer sur l'économie. Un pays comme la Chine, qui a des entreprises d'État essentiellement subventionnées par l'État et sous le contrôle stratégique du Parti communiste, pourrait exercer une influence sur l'utilisation de ces ressources partout dans le monde.
Je crois que c'est une source de préoccupation pour le gouvernement, à juste titre d'ailleurs.
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Merci, madame. Il semble que je doive toujours interrompre un témoin plus que les autres. Aujourd'hui, c'était vous, et je m'en excuse.
Merci, madame Jones.
Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions pour entendre les témoins aujourd'hui. Je tiens à remercier, au nom des membres du Comité, tous les témoins qui sont venus et qui nous ont donné de l'information très précieuse. Comme vous le voyez, nous pourrions continuer bien au-delà de la période prévue, mais, malheureusement, c'est tout le temps dont nous disposons. Nous tenons encore une fois à exprimer toute notre reconnaissance.
Les témoins peuvent maintenant quitter la réunion, et nous passerons aux travaux du Comité. Il est prévu que nous poursuivions à huis clos. Toutefois, avant de le faire, je vais laisser les témoins partir, et nous aurons une brève discussion, si tout le monde est d'accord.
Merci.
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La réunion se poursuit.
Comme tout le monde peut le voir, selon l'ordre du jour, nous devons poursuivre à huis clos pour discuter de questions liées aux travaux du Comité, ce que nous ferons. Toutefois, il y a la motion de . Je ne veux pas présumer du désir de quiconque de prendre la parole, mais je crois comprendre qu'on s'opposera à poursuivre la réunion à huis clos afin d'étudier cette motion. C'est pourquoi je ne suis pas passé directement à cette portion de la réunion.
À moins que je me trompe à ce sujet, devrions-nous passer à l'étude de la motion de , qui a été distribuée peu après notre réunion de lundi? Tout le monde devrait l'avoir reçue.
Madame Stubbs, vous avez levé la main.
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Merci, monsieur le président.
Le manque de participation de l'actuel ministre aux réunions de ce comité est vraiment flagrant, n'est-ce pas? Je rappelle à mes collègues que le semble ne s'être donné la peine de témoigner devant le Comité qu'à deux reprises depuis qu'il a été élu en 2019. Il l'a fait une fois en décembre, puis il a finalement témoigné une deuxième fois cette semaine. Apparemment, pendant une heure qui devait être réservée à l'étude du Budget supplémentaire des dépenses, il a tenté de couvrir le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses.
Monsieur le président, voilà qui tranche avec les expériences précédentes des membres de ce comité en 2016. Le ministre de l'époque s'est présenté à trois reprises pour parler de la lettre de mandat, puis des deux budgets. En 2018, il a témoigné à deux reprises, et puis...
Je vais conclure bientôt. Je veux seulement expliquer pourquoi les membres du Comité devraient appuyer la motion, monsieur le président.
Il a témoigné deux fois en 2018 et deux fois en 2019. En tant qu'observatrice extérieure, j'ai cru comprendre que l'actuel ministre ne s'est pas présenté dans le cadre de l'étude sur le secteur forestier, malgré le fait que le Comité ait adopté une motion lui demandant de témoigner. Il n'est pas venu au Comité pour parler de sa lettre de mandat...
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Je vous interromps. C'est uniquement pour votre gouverne personnelle.
Je comprends et je respecte vos propos. Dans les faits, ce que vous dites au sujet des précédentes comparutions du ministre est exact. Toutefois, comme vous n'êtes pas membre du Comité, vous ignorez peut-être que le ministre a accepté toutes les invitations du Comité, et qu'il a chaque fois comparu devant celui-ci, sauf lors du décès de son père.
Par deux fois, il n'a pas pu se présenter. Voilà pourquoi il n'était pas là aux moments dont vous parlez. Chaque fois qu'une invitation lui a été faite, il l'a acceptée et a comparu devant le Comité, sauf à ce moment-là. Vous ne le saviez pas.
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J'ai vécu la même chose au cours de la dernière année, avec tout ce que cela représente en temps de pandémie. Merci de me le rappeler. J'avais d'ailleurs parlé personnellement au ministre lorsque c'est arrivé.
Il n'en demeure pas moins qu'il est du devoir du ministre de comparaître devant le Comité aussitôt qu'il en a la possibilité. Je pense qu'il y a une bonne raison à cela. Chers collègues, je suis certaine que nous sommes tous du même avis. Si les membres du Comité travaillent toujours dans l'intérêt de l'ensemble du pays, je suis convaincue que nous nous accordons tous pour dire que ce secteur est crucial à la reprise économique du Canada.
Le problème, c'est qu'il est confronté à une série de crises, avec la perte de 200 milliards de dollars dans des projets pétroliers et gaziers et le chômage qui frappe plus de 200 000 travailleurs du secteur de l'énergie. Cette situation touche l'innovation et les technologies propres et entraîne un exode des cerveaux, comme l'ont mentionné les témoins plus tôt. On a du même coup perdu des milliards de dollars prévus dans le cadre de dizaines d'ententes avec les Autochtones portant sur ces projets.
Le projet TMX est en retard et dépasse le budget prévu; le projet Keystone XL a été annulé; le projet visant la canalisation 5 est menacé, malgré les liens prétendument étroits entre le premier ministre et la nouvelle administration, et le projet de GNL à Kitimat ne verra pas le jour, même s'il était crucial à la réduction des émissions et au rôle du Canada dans le monde. Il y a des dizaines de projets du secteur privé, des projets d'une valeur de 20 milliards de dollars, qui attendent dans le cadre de l'évaluation d'impact en ce moment, tant ceux qui sont aux tout premiers stades que ceux qui sont simplement en attente d'une décision du Cabinet.
Je fais simplement valoir que par le passé des ministres ont comparu devant le Comité — merci, monsieur le président d'avoir mis les choses en contexte — et que ce secteur, qui est essentiel au pays, est confronté à de graves problèmes. Voilà pourquoi j'exhorte les membres du Comité à appuyer la motion présentée par le député de Cypress Hills—Grasslands.
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La seule chose qui est modifiée pour la mise aux voix, c'est la date du 14 qui passe au 28.
(L'amendement est adopté par 11 voix contre 0.)
Le président: L'amendement est adopté. Si quelqu'un veut intervenir au sujet de la motion telle que modifiée, c'est maintenant l'occasion. Autrement, nous pouvons mettre la motion aux voix. À la lumière du vote sur l'amendement, j'ose croire que le résultat du vote sur la motion ira dans le même sens.
Peut-être que, pour accélérer les choses, nous pouvons faire le vote au moyen de notre pouce. Tout le monde appuie la motion telle que modifiée?
(La motion modifiée est adoptée.)
Le président: Merci tout le monde. C'était facile.
Je vais maintenant suspendre la séance afin de la reprendre à huis clos. Dans le courriel que vous avez reçu plus tôt aujourd'hui, il y avait un second lien pour se connecter. Je vous retrouve dans un instant. Merci.
[La séance se poursuit à huis clos.]