PACP Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des comptes publics
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 7 décembre 2004
º | 1600 |
Le président (M. John Williams (Edmonton—St. Albert, PCC)) |
L'hon. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.) |
Le président |
L'hon. Walt Lastewka |
Le président |
L'hon. Walt Lastewka |
Le président |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC) |
Le président |
M. Mario Parent (ancien coordonnateur du programme de publicité, SPROP et DGSCC, TPSGC, À titre individuel) |
Le président |
Mme Huguette Tremblay (ancienne chef, responsable des projets spéciaux, DGSCC, TPSGC, À titre individuel) |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. Mario Parent |
º | 1605 |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. Brian Fitzpatrick |
º | 1610 |
M. Mario Parent |
M. Brian Fitzpatrick |
M. Mario Parent |
M. Brian Fitzpatrick |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
M. Mario Parent |
M. Brian Fitzpatrick |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
º | 1615 |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
Mme Huguette Tremblay |
M. Brian Fitzpatrick |
M. Mario Parent |
M. Brian Fitzpatrick |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. Sébastien Gagnon (Jonquière—Alma, BQ) |
M. Mario Parent |
º | 1620 |
M. Sébastien Gagnon |
Mme Huguette Tremblay |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Jean-Yves Roy (Haute-Gaspésie—La Mitis—Matane—Matapédia, BQ) |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
º | 1625 |
M. Jean-Yves Roy |
Mme Huguette Tremblay |
M. Jean-Yves Roy |
Mme Huguette Tremblay |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
Le président |
L'hon. Shawn Murphy (Charlottetown, Lib.) |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
º | 1630 |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
L'hon. Shawn Murphy |
Le président |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Mario Parent |
L'hon. Shawn Murphy |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Shawn Murphy |
Le président |
M. David Christopherson (Hamilton-Centre, NPD) |
º | 1635 |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
M. David Christopherson |
Mme Huguette Tremblay |
M. David Christopherson |
Mme Huguette Tremblay |
M. David Christopherson |
Mr. Mario Parent |
M. David Christopherson |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. David Christopherson |
Mme Huguette Tremblay |
M. David Christopherson |
Mme Huguette Tremblay |
º | 1640 |
M. Mario Parent |
M. David Christopherson |
M. Mario Parent |
M. David Christopherson |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Mario Parent |
M. David Christopherson |
M. Mario Parent |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
º | 1645 |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
Mr. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC) |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
M. Dean Allison |
º | 1650 |
Mme Huguette Tremblay |
M. Dean Allison |
Mme Huguette Tremblay |
M. Dean Allison |
Mme Huguette Tremblay |
M. Dean Allison |
M. Mario Parent |
M. Dean Allison |
M. Mario Parent |
M. Dean Allison |
M. Mario Parent |
M. Dean Allison |
Mme Huguette Tremblay |
M. Dean Allison |
M. Mario Parent |
M. Dean Allison |
M. Mario Parent |
M. Dean Allison |
º | 1655 |
M. Mario Parent |
M. Dean Allison |
M. Mario Parent |
Le président |
L'hon. Walt Lastewka |
M. Mario Parent |
L'hon. Walt Lastewka |
M. Mario Parent |
L'hon. Walt Lastewka |
M. Mario Parent |
L'hon. Walt Lastewka |
M. Mario Parent |
L'hon. Walt Lastewka |
M. Mario Parent |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
» | 1700 |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
M. Mario Parent |
L'hon. Walt Lastewka |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Le président |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Mme Huguette Tremblay |
L'hon. Walt Lastewka |
Le président |
» | 1705 |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
M. Jean-Yves Roy |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
» | 1710 |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
M. Mario Parent |
Le président |
M. Mario Parent |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
Mme Huguette Tremblay |
Le président |
CANADA
Comité permanent des comptes publics |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 7 décembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
º (1600)
[Traduction]
Le président (M. John Williams (Edmonton—St. Albert, PCC)): Bonjour.
À l'ordre du jour aujourd'hui, conformément à l'alinéa 108(3)g) du Règlement, la gouvernance et l'imputabilité dans la fonction publique fédérale, en mettant l'accent sur la responsabilité des ministres et sous-ministres.
Nous recevons aujourd'hui, à titre individuel, M. Mario Parent, ancien coordonnateur du programme de publicité du SPROP et de la DGSCC de TPSGC, ainsi que Mme Huguette Tremblay, ancienne chef des projets spéciaux à la DGSCC de TPSGC.
Puis, si nous avons le temps, nous passerons au point suivant, conformément à l'alinéa 108(3)g) du Règlement, Comptes publics du Canada 2004, renvoyés au comité le 21 octobre 2004; nous étudierons le projet de rapport. Cette partie se déroulera à huis clos.
Je crois que la greffière vous a distribué à tous une lettre, dans les deux langues officielles, du leader du gouvernement à la Chambre, l'honorable Tony Valeri, sur la question des nominations. Cette lettre fait suite au plan d'action pour la réforme démocratique, déposé à la Chambre des communes le 4 février dernier, et elle porte plus particulièrement sur l'examen préalable des nominations aux postes de direction des organismes, des sociétés d'État et autres entités.
La seule nomination qui relève du mandat du Comité des comptes publics est celle du vérificateur général. Nous n'avons jamais eu par le passé l'occasion de conduire une entrevue ou un processus quelconque préalablement à la nomination. Il m'apparaît tout à fait normal, si le gouvernement poursuit dans cette direction, que le comité participe au processus préalable à la nomination d'un vérificateur général.
Êtes-vous d'accord pour que je demande à la greffière de rédiger une lettre, qu'elle soumettra à l'approbation du comité? Cela vous convient-il?
Des voix: D'accord.
Le président: Très bien. Je vais demander à la greffière de rédiger une lettre en ce sens, qui sera soumise au comité pour discussion.
Le délai de réponse est le 17 décembre, ce qui est très bientôt. Je vais instruire la greffière de distribuer la lettre à tous les membres à l'avance afin que le comité puisse en discuter.
Êtes-vous d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Nous allons procéder ainsi.
Monsieur Lastewka.
L'hon. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le président, avez-vous dit que vous feriez distribuer la lettre que vous avez reçue?
Le président: C'est déjà fait, je crois.
L'hon. Walt Lastewka: C'est déjà fait?
Le président: Il reste des exemplaires.
L'hon. Walt Lastewka: J'aimerais en avoir un.
Quand a-t-elle été distribuée?
Le président: La semaine dernière.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC): Oui, la semaine dernière, je crois.
Le président: Monsieur Lastewka, la greffière m'informe qu'elle fait partie d'un paquet de documents.
Quoi qu'il en soit, nous allons rédiger un projet de lettre. Il sera également distribué dans les deux langues officielles, et je le soumettrai à l'avance au comité à cause de l'échéance. Le gouvernement souhaite recevoir une réponse avant le 17 décembre.
Avant de commencer, puisque nous continuons notre examen de la question des commandites et que nous maintenons notre procédure usuelle...
Madame Tremblay—je m'adresse à vous aussi, monsieur Parent—, tout comme c'était le cas lors de votre dernière comparution, je vous informe que le refus de répondre aux questions ou la falsification des faits peuvent donner lieu à une accusation d'outrage à la Chambre, que le témoin ait été assermenté ou non. En outre, le fait de mentir sous la foi du serment peut mener à des accusations de parjure.
J'ai vu qu'on avait mis une bible à votre disposition. Je vous demande à tous deux de prêter serment—puisque nous avons convenu d'assermenter tous les témoins.
Monsieur Parent, si vous avez une bible, je vous prie de prêter serment.
[Français]
M. Mario Parent (ancien coordonnateur du programme de publicité, SPROP et DGSCC, TPSGC, À titre individuel): Je jure de dire dans mon témoignage la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Ainsi Dieu me soit en aide.
Le président: Merci beaucoup.
Mme Huguette Tremblay (ancienne chef, responsable des projets spéciaux, DGSCC, TPSGC, À titre individuel): Je jure de dire dans mon témoignage la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Ainsi Dieu me soit en aide.
Le président: Merci beaucoup.
[Traduction]
Avez-vous des exposés préliminaires, monsieur Parent et madame Tremblay?
Mme Huguette Tremblay: Oui.
Le président: Très bien. Nous allons débuter avec M. Parent. S'il vous plaît.
[Français]
M. Mario Parent: Monsieur le président, membres du comité et madame la greffière, j'aimerais prendre quelques minutes afin de vous présenter ma déclaration préliminaire qui, je l'espère, vous aidera à me connaître.
Diplômé de l'Académie commerciale de Québec en administration des affaires avec concentration en administration publique, j'ai joint la fonction publique fédérale en juin 1970 en tant que stagiaire en approvisionnements au ministère des Approvisionnements et Services. Ce ministère fut fusionné en 1989 avec le ministère des Travaux publics et est devenu Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.
De juin 1970 à janvier 1987, j'ai évolué à ce ministère dans les domaine de l'approvisionnement, des commodités et des services suivants: les biens électroniques et électriques, les textiles, les vêtements, les produits pharmaceutiques, les services et le transport outre-mer ainsi que les communications.
L'année 1987 en fut une de transition. Après 17 ans passés dans le secteur de l'approvisionnement, j'ai effectué un changement et joint la Direction des services de gestion de la publicité en tant que coordonnateur de programmes de publicité et ce, pour une période de huit ans, de janvier 1987 à mars 1995. Ma supérieure immédiate était Mme Andrée Larose, directrice du secteur de la publicité, qui relevait de M. Joseph Charles Guité, directeur général et, plus tard, directeur exécutif.
En tant que coordonnateur de programmes de publicité, je devais en quelque sorte réviser, recommander ou approuver toute demande de publicité provenant des différents ministères en octroyant un numéro d'autorisation, ce qu'on appelait dans notre jargon un numéro ADV. Sans cette autorisation, aucun ministère ne pouvait faire de publicité.
Au fil des ans, j'ai aussi participé au comité de sélection d'agences de publicité et de firmes de communications. En tout, j'ai participé à une quarantaine de sélections en tant que membre et, à quelques occasions, en tant que président du comité.
D'avril 1995 à mars 1997, on a ajouté à mes tâches le volet des approvisionnements en me nommant directeur intérimaire, sans salaire, avec la responsabilité contractuelle des services de publicité, de commandites et de recherche d'opinion publique. C'était toute une charge de travail pour trois ou, la plupart du temps, deux personnes.
Du 1er avril 1997 au 30 juin 1998, je fus nommé directeur par intérim du service à la clientèle tout en gardant mes autres fonctions d'approvisionnements et celles de coordonnateur de programmes de publicité. De plus, on me demandait à l'occasion de gérer quelques activités de commandites.
J'ai quitté la fonction publique le 21 août 1998 après une carrière d'un peu plus de 28 ans. Pendant les 10 dernières années, M. Joseph Charles Guité fut mon directeur, directeur général ou encore directeur exécutif. M. Guité était un homme d'action, de décision, doué d'un sens hors du commun pour le service à la clientèle. L'âme dirigeante, c'était lui. Nous étions un minuscule groupe à l'écart des quartiers généraux du ministère, tout près de la Colline parlementaire.
Je n'ai pas la prétention d'avoir été un joueur d'importance ni d'avoir été indispensable, mais j'ai la satisfaction d'avoir accompli mon devoir et ce, au meilleur de mes compétences.
Monsieur le président, merci de votre attention. Je suis disposé à répondre aux questions de votre comité.
º (1605)
Le président: Merci beaucoup, monsieur Parent.
Madame Tremblay, veuillez faire votre déclaration d'ouverture.
Mme Huguette Tremblay: Monsieur le président, membres du comité, au risque de répéter ce qui a été dit devant ce comité lors de mon témoignage du 25 mars dernier, j'aimerais dresser un court bilan de ma carrière au sein de la fonction publique.
Je suis fonctionnaire depuis le mois d'octobre 1975. J'ai toujours oeuvré au même ministère, quoique ce dernier ait changé de nom à quelques reprises: Approvisionnement et Services Canada en 1975, il est devenu Travaux publics et Services gouvernementaux Canada en 1989, puis Communication Canada en 2001; il est finalement redevenu Travaux publics et Services gouvernementaux Canada en 2004.
De 1975 à 1987, j'ai occupé le poste de secrétaire pour quatre différentes personnes. En 1987, toujours à titre de secrétaire, je travaillais à la Direction des services de gestion de la publicité pour M. Joseph Charles Guité. J'ai travaillé pour M. Guité de 1987 jusqu'à son départ de la fonction publique en 1999.
En 1997, mon poste a été reclassé et j'ai assumé d'autres fonctions dans le cadre du Programme de commandites du gouvernement du Canada, au sein de la Direction générale des services de coordination des communications. Lors du départ de M. Guité, au mois d'août 1999, je relevais de M. Pierre Tremblay.
En 2001, un nouveau ministère, connu sous le nom de Communication Canada, a été créé. Pendant quelques mois, mon superviseur immédiat a d'abord été Mme Catherine Oliva-Labine, puis ce fut Mme Diane Viau.
Du mois d'avril 2003 au mois d'avril 2004, j'ai été détachée auprès d'Environnement Canada. Actuellement, je travaille à la nouvelle Direction générale des services d'information du gouvernement à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.
Lorsque j'ai travaillé au Programme de commandites, deux personnes relevaient directement de moi: une commis et une agente de projets de commandites.
Voilà qui résume ma carrière. Je serai heureuse de répondre à vos questions. Merci.
Le président: Merci beaucoup, madame Tremblay.
[Traduction]
Monsieur Fitzpatrick, vous avez huit minutes. Je vous en prie.
M. Brian Fitzpatrick: Merci à vous deux de participer à cette réunion. Je sais que ce n'est pas la première et qu'elles sont toutes un peu semblables.
Vous avez tous les deux une très vaste expérience de la fonction publique et, dans un cas au moins, une très vaste expérience de l'approvisionnement et de l'impartition des marchés gouvernementaux. Je vous demande d'éclairer ma lanterne, si cela vous est possible. Je vous assure que j'ai le plus grand respect à l'égard de votre expérience.
Quand vous travailliez dans la fonction publique, vous avez sans doute été témoins d'actes qui contrevenaient aux règles, ou qui n'y étaient pas conformes, dans le domaine des marchés publics et de l'approvisionnement, ou en tout cas de choses pas très catholiques. Je suis simplement curieux. À titre de fonctionnaire, dans les postes que vous occupiez tous les deux, quand on constate que quelque chose n'est pas correct—je vais lancer trois questions et vous pourrez peut-être me dire quelle serait votre réponse à ces trois questions.
Je viens d'une petite ville de la Saskatchewan, alors je me sens un peu perdu. La première chose à faire me semblerait de dénoncer publiquement, d'informer la population canadienne que des choses anormales se trament, de parler aux médias. C'est une possibilité. Était-ce quelque chose qui était à votre portée, selon votre compréhension du fonctionnement courant dans ce petit milieu? Sans risquer de perdre votre emploi, d'être congédiés, rétrogradés ou pénalisés, est-ce quelque chose que vous pouviez faire?
º (1610)
M. Mario Parent: Ce n'est pas un geste que j'aurais envisagé. Dans tous les ministères, il existe une espèce de processus étape par étape. On ne commence pas par la dénonciation en public.
M. Brian Fitzpatrick: Qu'est-ce qui serait arrivé si vous l'aviez fait? Je suis simplement curieux.
M. Mario Parent: J'aurais eu la trouille de perdre ma place, en tout premier lieu.
M. Brian Fitzpatrick: Et vous, madame Tremblay?
Mme Huguette Tremblay: Très honnêtement, ce n'est pas quelque chose que j'aurais pensé faire, à cause de la chaîne de commandement qui existe dans tous les bureaux du gouvernement. Il faut la suivre.
M. Brian Fitzpatrick: D'accord. Cela m'amène à mon deuxième point.
M. Allan Cutler a déposé un grief. Il a passé par la filière du système. Je suis certain que vous avez suivi le dossier.
Mme Huguette Tremblay: Oui.
M. Brian Fitzpatrick: Qu'est-il advenu de son grief?
Mme Huguette Tremblay: Je crois que M. Cutler est passé par son représentant syndical. Je ne connais pas tous les détails de l'issue du grief, mais je sais que sa plainte a donné lieu à une vérification. Il s'est adressé à son syndicat parce qu'il s'est senti attaqué personnellement, je crois.
M. Brian Fitzpatrick: Avez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Parent?
M. Mario Parent: Je crois que c'est ce qu'il a fait. Je crois aussi qu'il a suivi le processus interne en parallèle. Il s'est tourné vers le syndicat, à mon avis, parce qu'il voulait protéger son emploi. Je crois qu'il avait entendu dire que M. Guité avait l'intention de le transférer ou de le réinstaller. Par mesure de sécurité, M. Cutler a décidé de s'adresser au syndicat. Il a peut-être tenté d'utiliser la filière interne, mais je n'en suis pas certain.
M. Brian Fitzpatrick: Subsiste-t-il une possibilité que, au sein de la fonction publique, même s'il s'est prévalu de la procédure de grief, il soit étiqueté comme n'étant pas loyal, fiable ou quelque chose du genre, qu'il subisse des sanctions? Est-il possible qu'il soit mis de côté ou pénalisé de façon officieuse à cause de ses gestes?
Mme Huguette Tremblay: Je crois effectivement que cet étiquetage est possible parmi les employés de la fonction publique.
M. Brian Fitzpatrick: Si vous aviez passé par-dessus vos superviseurs immédiats pour vous adresser à quelqu'un d'autre au ministère, pour dénoncer des agissements qui selon vous ne pouvaient plus durer, ne serait-ce pas une procédure qui vous aurait permis de grimper dans la fonction publique?
Mme Huguette Tremblay: Non, ce n'est pas du tout la procédure recommandée. La procédure à suivre est établie.
M. Brian Fitzpatrick: Là où je deviens confus après des discussions avec quelques fonctionnaires, c'est quand je constate que la peur semble dominer le climat dans la fonction publique et empêche de dénoncer les agissements douteux.
M. Parent nous a parlé de sa formation en administration des affaires. Si je me fie à tout ce que j'ai lu jusqu'ici au sujet de ce qui fait la qualité d'une organisation ou d'un système, il est primordial d'éliminer la peur au sein de l'organisation afin de permettre aux employés de faire leur travail avec professionnalisme, pour qu'ils puissent atteindre les résultats souhaités. C'est primordial. Il faut éradiquer la peur dans le milieu de travail, au profit des fonctionnaires et de tous les autres types d'employé. Si j'entends bien ce que vous m'avez dit tous les deux, s'il y a un geste frauduleux dans la fonction publique, si les règles ne sont pas suivies, les fonctionnaires ne voient pas d'issue possible. Ils sont étouffés dans un nuage de peur.
º (1615)
Mme Huguette Tremblay: Je parlerais plutôt d'une appréhension. Le mot « peur » est sans doute un peu fort.
M. Brian Fitzpatrick: Vous appréhendez quoi au juste? Le congédiement?
Mme Huguette Tremblay: Je n'ai jamais eu peur d'être congédiée. Il m'est arrivé à quelques reprises au cours de ma carrière d'avoir des démêlés moins qu'agréables avec des superviseurs, mais je n'ai jamais eu peur d'être congédiée.
M. Brian Fitzpatrick: J'ai quelque chose à ajouter à ce sujet, si vous me le permettez.
Oui, monsieur Parent.
M. Mario Parent: C'est la même chose pour moi. Tout au long de ma carrière, il m'est arrivé de ne pas trop aimer ce que je voyais—je ne parle pas de publicité— et d'avoir à quitter. Si je n'aimais pas ce que je voyais, mais je savais que je n'y pouvais rien, alors je demandais un transfert. Le ministère regroupait toutes sortes de secteurs qui m'intéressaient, et je me servais de cela non pas comme d'une excuse, mais comme d'une occasion de découvrir autre chose.
M. Brian Fitzpatrick: Le problème dans cela, du point de vue du contribuable et de l'intérêt public, c'est que la cause du mal n'est jamais supprimée. Vous ignorez le problème en déménageant dans un autre ministère. Mais je ne veux pas vraiment m'étendre sur le sujet.
L'autre point que je souhaite soulever est que, même si la fonction publique voulait changer quoi que ce soit aux modes d'opération à Ottawa, elle est absolument impuissante. Si nous voulons changer le système, il faut viser beaucoup plus haut que les fonctionnaires. Il faudra un leadership extraordinaire, au-dessus de la mêlée, capable d'insuffler des façons nouvelles et plus efficaces de fonctionner. Sans ce leadership, les fonctionnaires ne peuvent rien faire. Ils sont condamnés à l'appréhension ou à la peur des conséquences dès qu'ils font quelque chose pour dénoncer. Est-ce une vision juste de ce qui se passe dans notre fonction publique?
Le président: Vous devez dire quelque chose, monsieur Parent. Vous ne pouvez pas simplement hocher la tête.
M. Mario Parent: Je sais.
Oui, je suis plutôt d'accord. Vous tracez un résumé assez juste de la situation, je l'avoue.
Le président: Madame Tremblay?
Mme Huguette Tremblay: C'est vrai, mais selon moi, c'est beaucoup plus vaste.
Il règne à mon avis un climat de nonchalance parmi les fonctionnaires. C'est là actuellement, mais ce n'est pas nouveau. Nous en sommes parvenus à un point où plus rien ne nous dérange. Nous faisons notre travail, en regardant le train passer. Nous avons l'impression que personne ne s'intéresse à nous, alors pourquoi devrions-nous nous préoccuper de ce qui arrive ou non?
Le président: Voilà un exposé philosophique qui mérite sans doute réflexion.
Monsieur Gagnon, si j'ai bien compris, vous partagez la période qui vous est allouée avec M. Roy? Je ne vous interromprai pas après quatre minutes. Je vous laisse le soin de passer le flambeau vous-même.
[Français]
M. Sébastien Gagnon (Jonquière—Alma, BQ): Outre le Programme de commandites, y avait-il d'autres programmes sous votre responsabilité ou auxquels vous avez participé?
M. Mario Parent: Les commandites étaient indépendantes de la publicité et la publicité l'était aussi de la recherche sur l'opinion publique. Mais étant responsable d'un service commun--je parle des achats--, je devais en quelque sorte rendre des services sur les plans des commandites, de la publicité et de la recherche sur l'opinion publique.
Je crois que cela intéressera le comité: le fait que mon patron était mon client était l'un des problèmes auxquels j'avais à faire face. Je ne sais pas si vous me comprenez, mais M. Guité, au fond, était un client. Au fil des ans, au ministère, il est arrivé que je ne sois pas d'accord avec un ministère client. Il y avait des rencontres pendant lesquelles on frappait sur la table et on discutait. Disons que c'était un petit peu, je ne dirais pas plus difficile... On ne voit pas cela souvent, un patron qui est en même temps le client.
Quant aux autres services, mon équipe a fait preuve de la même compétence. La recherche sur l'opinion publique était un peu plus structurée, parce que les coûts étaient partie intégrante de l'appel d'offres. En matière de publicité et de commandites, c'était un petit peu différent.
º (1620)
M. Sébastien Gagnon: Vous êtes là depuis un bon nombre d'années. Avez-vous vu un changement de comportement pendant la période où on a instauré le Programme de commandites? Y a-t-il eu un changement de comportement quant à la marche à suivre, à la vérification, ou est-ce toujours la même façon de procéder depuis que vous travaillez dans ce service?
Mme Huguette Tremblay: Des changements ont été effectués à la suite de vérifications. Mais j'ai l'impression que si elles n'avaient pas eu lieu, ça aurait été le statu quo.
Tous les changements qui ont été effectués au Programme de commandites--parce que je n'ai oeuvré que là et que je ne peux parler ni de la publicité ni de la recherche sur l'opinion publique--se sont faits à la suite de la vérification de 2000. Lorsque, dans les médias, il a été question des trois rapports, d'autres changements ont été apportés. Puis, après la vérification de Mme Fraser, il y a eu un remaniement complet du programme.
On dirait qu'il fallait que le ciel nous tombe sur la tête pour que quelque chose change, sinon c'était le statu quo.
M. Mario Parent: J'ai été impliqué dans la vérification faite par Ernst & Young: c'est moi qui devais répondre aux vérificateurs. Cela a demandé à peu près trois ou quatre mois de mon temps, et ce, presque tous les jours.
Le rapport a été mis sur une tablette quelque part et il n'y a pas eu de changements majeurs ou draconiens. Il y a eu quelques petits mesures correctives, c'est sûr et certain, mais dans l'ensemble, on n'a pas vu de changements majeurs.
Le président: Monsieur Roy, c'est à vous.
M. Jean-Yves Roy (Haute-Gaspésie—La Mitis—Matane—Matapédia, BQ): Merci, monsieur le président.
Madame Tremblay et monsieur Parent, je vais peut-être vous apprendre quelque chose: j'ai déjà été adjoint ministériel à Approvisionnements et Services Canada à l'époque où le ministère s'appelait comme cela. Il a changé de nom par la suite et s'est appelé Travaux publics et Services gouvernementaux.
Voici comment le système fonctionnait à l'époque, et je voudrais savoir si c'est encore ainsi. Lorsque le gouvernement souhaitait avoir une offre de services de la part d'entreprises, il y avait un avis public. À ce moment-là, les entreprises qui étaient intéressées s'inscrivaient. Si elles n'étaient pas inscrites au registre des fournisseurs du gouvernement du Canada, elles étaient invitées à le faire. En bout de ligne, selon les critères que les fonctionnaires déterminaient, on se retrouvait habituellement avec à peu près trois entreprises.
Au bout du compte, qui choisissait, d'après vous?
M. Mario Parent: C'était le client.
M. Jean-Yves Roy: Est-ce que c'est cela qui se passait? C'est le client qui choisit, je suis d'accord avec vous; mais y avait-il une quelconque tentative d'influence dans la sélection des trois entreprises qui restaient à la fin?
M. Mario Parent: Je ne comprends pas votre question.
M. Jean-Yves Roy: Y avait-il une quelconque intervention de la part de vos supérieurs quant au choix de l'une des trois entreprises qui demeuraient, jusqu'à la fin, des fournisseurs potentiels?
M. Mario Parent: Non. Si je me reporte à la publicité--j'y suis obligé parce que cela couvre quand même une période de 10 ans--, il y avait un concours en bonne et due forme. L'offre était publiée. À la fin, on utilisait le MERX et c'était d'un bout à l'autre du pays. Cela prenait la forme d'une lettre d'intérêt. Tous les fournisseurs intéressés devaient en envoyer une, dans des délais précis et spécifiques. Les firmes qui le faisaient recevaient un questionnaire. On faisait une courte liste de celles qui retournaient le questionnaire; les firmes de cette liste qui se qualifiaient étaient invitées à présenter leur offre.
Selon la taille d'un ministère, on retenait généralement une, parfois deux firmes. Notre ministère, lui, en a retenu 10 à un moment donné.
M. Jean-Yves Roy: C'est-à-dire qu'il y en a 10 qui se sont inscrites?
M. Mario Parent: Il y en a 10 qui se sont qualifiées. Nous avons retenu 10 agences.
M. Jean-Yves Roy: Ce qui est incompréhensible, c'est que c'étaient toujours les trois mêmes agences qui étaient finalistes.
M. Mario Parent: Je ne suis pas en mesure de le dire. Je ne le sais pas.
º (1625)
M. Jean-Yves Roy: Je vais laisser Mme Tremblay répondre.
Mme Huguette Tremblay: Je n'ai pas participé aux comités de sélection des firmes, ni en publicité ni en commandites. Cependant, du côté du Programme de commandites, on avait une banque de firmes qui s'étaient déjà qualifiées. Quand on approuvait un événement, une firme était choisie dans cette banque.
M. Jean-Yves Roy: J'ai une autre question.
Est-ce que ces firmes étaient inscrites au registre des fournisseurs du gouvernement du Canada?
Mme Huguette Tremblay: Je ne saurais vous le dire.
M. Jean-Yves Roy: Est-ce que cela a été vérifié de votre part?
M. Mario Parent: Au tout début, je ne saurais vous le dire. À la fin, elles devaient en faire partie.
M. Jean-Yves Roy: Une firme ne peut pas faire affaire avec le gouvernement du Canada si elle n'est pas inscrite au registre des fournisseurs.
M. Mario Parent: Oui.
M. Jean-Yves Roy: Le premier rôle d'un fonctionnaire est de vérifier si la firme est inscrite au registre des fournisseurs. Vous me dites que cela n'avait pas été vérifié.
M. Mario Parent: On parle de 1994, 1995 et 1996. Les choses ont changé. Moi, j'ai quitté en 1998...
M. Jean-Yves Roy: Je m'excuse, monsieur Parent. J'étais là en 1986, 1987 et 1988, et cela existait. On vérifiait si la firme était inscrite.
M. Mario Parent: Non, je ne le sais pas. J'ai pris la direction des achats en 1996. Donc, je n'étais pas... Avant, c'était effectivement ainsi. Je suis d'accord avec vous.
Le président: D'accord. Merci beaucoup.
[Traduction]
Monsieur Murphy, je vous prie.
L'hon. Shawn Murphy (Charlottetown, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos témoins. J'imagine que vous auriez eu mieux à faire aujourd'hui que de venir ici.
Je vais vous poser à tous deux une question générale. Je sais que vous vivez avec cette affaire depuis trois années et demie, que vous suivez le dossier de près. Mme Tremblay a déjà comparu devant nous. J'imagine tout le stress que cette affaire a dû causer dans vos vies.
Cela étant dit, il existe des problèmes fondamentaux concernant l'établissement, la mise en oeuvre et la supervision de l'ensemble du Programme des commandites.
J'aimerais revenir sur une de vos remarques voulant que ce n'est pas la façon dont le gouvernement fonctionne et ce n'est pas la façon dont les contribuables souhaitent que le gouvernement fonctionne. Mais si nous revenons en arrière, selon vous—je me fie à votre expérience et à votre bon jugement—, quelles sont les deux ou trois plus grosses erreurs commises par le gouvernement au moment de l'établissement et de la mise en oeuvre du programme? Autrement dit, pourquoi le déraillement a-t-il été si magistral?
Permettez-moi de vous adresser ma question en premier, madame Tremblay.
Mme Huguette Tremblay: La politique.
L'hon. Shawn Murphy: Mais encore?
Mme Huguette Tremblay: C'était sous les commandes des politiciens.
Notre équipe était très minimale. Elle était composée de M. Guité, qui relevait directement du ministre—c'est un secret de polichinelle. C'est connu publiquement, on l'a répété ad nauseam—et du CPM. Puis il y avait moi, M. Parent et le greffier. C'était un tout petit programme, qui a connu une croissance très rapide. Ce qui devait arriver est arrivé, nous avons arrondi les coins. C'est selon moi le noeud du problème.
[Français]
Ce n'était pas un programme qui avait été entériné par le Conseil du Trésor.
[Traduction]
Ce n'était pas un programme pour lequel il y avait des approbations, des notes au registre, aux livres. Les choses se déroulaient sans laisser de trace. Et quand les choses se déroulent sans laisser de trace... Nous connaissons la suite.
L'hon. Shawn Murphy: Et vous n'aviez jamais rien vu de tel ailleurs au gouvernement, dans un autre ministère, au cours de votre carrière de fonctionnaire?
Mme Huguette Tremblay: Je n'ai jamais travaillé ailleurs, malheureusement, donc...
L'hon. Shawn Murphy: Si je peux résumer vos propos, madame Tremblay, c'est que le programme avait été établi hors des normes courantes du gouvernement en matière de compte rendu et de fonctionnement, et c'est pourquoi il a complètement déraillé. Non seulement est-il devenu plus gros que prévu, mais encore a-t-il continué de dérailler encore plus.
Mme Huguette Tremblay: C'est exact.
L'hon. Shawn Murphy: Avez-vous autre chose à ajouter, avec le recul, concernant votre expérience?
Mme Huguette Tremblay: Non. Selon moi...
L'hon. Shawn Murphy: C'est le problème de fond.
Mme Huguette Tremblay: ... c'est le problème de fond, en effet.
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur Parent.
[Français]
M. Mario Parent: Moi, je ne fais pas de politique, mais la situation en 1995 a peut-être amené le gouvernement à réagir d'une façon assez rapide. À mon avis, le Programme de commandites est une réaction directe au résultat du référendum. Je crois que c'est un contrecoup qui s'est concrétisé comme cela. On aurait peut-être eu intérêt à mieux l'encadrer. J'écoutais la Commission Gomery aujourd'hui et on y disait que nous aurions peut-être dû agir autrement. C'est facile à dire 10 ans plus tard, mais en 1995, il fallait trouver une solution rapidement, car nous étions en train de perdre le Québec. Que devait-on faire?
Nous avons pris des mesures que nous croyions correctes, mais cela a grossi tellement vite que nous n'avions pas les outils nécessaires.
º (1630)
[Traduction]
Nous manquions de ressources. Le budget était de 40 millions de dollars par année, vous savez, et nous étions 3 ou 4 à décider... Nous étions un petit groupe isolé du coeur du ministère, près de la colline. Tous les ingrédients étaient réunis...
[Français]
les politiciens voulaient s'impliquer, en quelque sorte. J'abonde dans le sens du témoignage de Mme Tremblay. C'est ce qui est arrivé, et ça a duré longtemps.
[Traduction]
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur Parent, pour poursuivre sur ce point, il existe normalement au gouvernement des procédures législatives—la Loi sur la gestion des finances publiques, les Lignes directrices du Conseil du Trésor et tant d'autres freins et contrepoids. Bien entendu, le responsable de l'application de ces freins et contrepoids est normalement le sous-ministre.
Je m'adresse à vous deux : Aviez-vous des liens avec le sous-ministre? Où se trouvait-il pendant le déraillement du train?
M. Mario Parent: À l'époque, je parle des années 95 et 96, nous savions que M. Guité transigeait directement avec M. Dingwall ou M. Gagliano. Il ne faisait pas affaire avec Mme Marleau par choix. Nous savions, et nous en avons eu la preuve cette semaine à la Commission Gomery, que M. Quail, le SM en poste à l'époque, était pleinement au courant de cela, et qu'il l'admettait. Je crois qu'il aurait pu s'impliquer plus directement.
Cette façon de fonctionner est tout à fait unique dans l'histoire de la fonction publique. Il est très singulier que le directeur, ou le directeur général, transige directement avec le bureau du ministre et le CPM.
L'hon. Shawn Murphy: Je suis perplexe. Monsieur Parent, votre déclaration...
Le président: Vouliez-vous entendre la réponse de Mme Tremblay?
L'hon. Shawn Murphy: Je suis désolé. Bien entendu.
Mme Huguette Tremblay: Je suis d'accord. Cela s'est passé avec le Programme de commandites, mais je suis assez convaincue que cela ne se reproduira pas.
L'hon. Shawn Murphy: J'espère que non.
Je suis étonné, monsieur Parent, quand vous dites que M. Guité, pour vous paraphraser, était extrêmement efficace au service à la clientèle. C'est ce que vous avez dit, je crois.
Je m'interroge sur ses clients. Qui étaient-ils? Ce n'était certainement pas des contribuables canadiens. Qui étaient ses clients pendant ces événements?
M. Mario Parent: D'autres ministères clients.
L'hon. Shawn Murphy: Tels que...?
M. Mario Parent: La plupart, sinon la totalité, des autres ministères sont nos clients.
L'hon. Shawn Murphy: Mais pour ce qui était du Programme de commandites, qui étaient ses clients? Certainement pas les autres ministères—Pêches et Océans ou le ministère de la Défense!
M. Mario Parent: Non, non, mais les commandites n'étaient pas le seul programme relevant de notre direction. C'était une partie seulement de nos activités.
L'hon. Shawn Murphy: Je vais restreindre ma question au Programme de commandites. Quand M. Guité était responsable de la Direction, qui était ses « clients »?
M. Mario Parent: Je dirais le BCP, le Bureau du ministre et le CPM. Ne me demandez pas si j'ai vu M. Guité avec le ministre. La réponse est non, mais il était admis dans notre bureau que M. Guité transigeait avec lui.
L'hon. Shawn Murphy: Avez-vous subi vous-même des pressions politiques?
M. Mario Parent: Absolument jamais, monsieur.
L'hon. Shawn Murphy: Et vous, madame Tremblay?
Mme Huguette Tremblay: Non.
L'hon. Shawn Murphy: Je n'ai pas d'autres questions, monsieur le président.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Murphy.
Monsieur Christopherson, vous disposez de huit minutes.
M. David Christopherson (Hamilton-Centre, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie également, tous les deux, d'être revenus et de vous mettre de nouveau la tête sur le billot. Nous l'apprécions énormément.
Lors de notre dernière réunion, nous avons reçu trois autres témoins et nous avons passé un certain temps sur le fait que le Programme des commandites était—vous avez aussi utilisé ce terme—unique. Il était si unique qu'il était soustrait au processus usuel de la consignation du courrier entrant. Normalement, tout le courrier entrant est inscrit dans un journal et enregistré—c'est la norme. J'ai moi-même confirmé que c'est ce qui se passait dans mon bureau et dans mon ministère, à l'époque où j'étais ministre provincial. Je sais donc de quoi je parle. Dans ce cas précis, une directive politique émanant du personnel politique instruisait le personnel de la fonction publique de ne pas enregistrer quelque courrier que ce soit ayant trait aux commandites.
Il s'est avéré par la suite, une information assez intéressante et tout à fait nouvelle pour beaucoup d'entre nous, que le Programme du millénaire avait fait l'objet d'instructions semblables concernant son fonctionnement. Il y avait deux programmes, pas un mais deux, pour lesquels la correspondance entrant dans le bureau n'était pas enregistrée, comme c'était le cas pour tout le reste. Cette pratique, des témoignages nous l'ont confirmé, résultait d'une instruction ferme émanant de personnel politique haut placé.
Je me demande si l'un d'entre vous a quoi que ce soit à ajouter à cet égard. Le saviez-vous? Tout d'abord, je vous demande de me dire si vous saviez que le projet du millénaire jouissait d'un statut aussi unique que le Programme de commandites?
º (1635)
M. Mario Parent: Non.
Mme Huguette Tremblay: Non.
M. David Christopherson: Étiez-vous au courant des affaires du Programme du millénaire qui se tramaient dans le bureau?
Mme Huguette Tremblay: Je sais que le Programme du millénaire existait, et je sais que des fonds ont été transférés du Bureau pour le millénaire au Programme de commandites pour commanditer—je vous donne un exemple seulement—l'Encyclopédie du Canada, un projet du millénaire. Ces fonds étaient transférés du Bureau du millénaire jusqu'à notre secteur. C'est l'une des choses dont j'étais au courant.
M. David Christopherson: Je suis désolé, mais pourriez-vous reprendre vos explications? Je n'ai pas bien saisi la première fois.
Mme Huguette Tremblay: Le Bureau pour le millénaire voulait commanditer L'Encyclopédie du Canada, un projet du millénaire produit par Les Éditions Alain Stanké de Montréal. Le Bureau du millénaire a donc transféré les fonds au Programme de commandites, pour que notre bureau assure la gestion de ces fonds. C'était leur argent, mais il était géré par Travaux publics.
M. David Christopherson: C'est tout ce que vous en savez. Vous ne saviez rien du fonctionnement. Comment était-ce possible? Est-ce que d'autres personnes s'en occupaient?
Mr. Mario Parent: J'ai quitté en 1998. Je ne sais donc pas précisément quand cela s'est passé.
M. David Christopherson: Le programme n'existait probablement pas quand vous y étiez.
Madame Tremblay, je vous pose la même question. Vous y étiez.
Le président: J'ai une petite remarque. Comme vous n'étiez pas là, monsieur Parent, et que vous étiez au courant, madame Tremblay, avez-vous une idée du moment où la transaction a eu lieu? Vous avez parlé d'une transaction ou d'un transfert du Fonds du millénaire. Savez-vous quand il a eu lieu?
Mme Huguette Tremblay: Je crois que c'est au cours de l'exercice 1999-2000.
Le président: Désolé de vous avoir interrompu, monsieur Christopherson.
M. David Christopherson: Je n'ai pas été ici assez longtemps pour savoir si c'est inhabituel ou si c'est dans les règles.
Mme Huguette Tremblay: Ce n'est pas inhabituel. À chaque exercice financier, nous recevions des fonds d'autres ministères qui souhaitaient participer à un événement commandité mais qui n'avaient pas de tel programme au sein de leur organisation, et qui devaient donc nous transférer des fonds. L'argent était intégré à notre budget, et nous assurions la gestion de l'événement commandité en leur nom.
M. David Christopherson: Je vois. Il reste encore des ficelles à tirer! Nous avons été assez surpris de découvrir, à notre dernière réunion, que le Programme de commandites n'était pas le seul à recevoir un traitement de faveur!
L'autre sujet que j'ai soulevé, à l'instar de certains de mes collègues, concerne ce que j'ai appelé les « rumeurs de bureau ». Je suis certain que le président n'a pas manqué de le rappeler au début, nous voulons comprendre comment les choses étaient perçues dans le bureau. Comment ceux qui faisaient le travail quotidien en parlaient-ils entre eux? Je vais poser ma question plus directement : Quelle était l'attitude générale à l'égard du Programme de commandites quand vous discutiez entre collègues autour d'une tasse de café ou dans les corridors, au hasard des rencontres ou que vous tuiez le temps à l'extérieur et que le sujet venait dans la conversation?
Je vous donne un exemple de ce que je cherche au juste. Personne n'a jamais mentionné que quelque chose de bizarre se passait? Y avait-il une entente tacite de secret? En parliez-vous seulement à de très proches amis, en chuchotant, sans jamais entrer dans les détails? Aviez-vous un pressentiment que quelque chose de louche se passait mais qu'il fallait vous tenir loin en raison de la position des principaux acteurs? Dans quelle mesure les employés du bureau, qui faisaient leur travail quotidien et repartaient ensuite à la maison, pouvaient-ils entretenir ce genre d'impression vague?
Mme Huguette Tremblay: À vrai dire, la gestion quotidienne du Programme, comme je l'ai déjà mentionné, incombait à une poignée de personnes, malgré la taille assez imposante de l'organisation elle-même. Nous étions plus d'une centaine d'employés. Cependant, au sein de la DGSCC, il était acquis que trois ou quatre personnes—ou quelques personnes, peu importe—administraient le Programme, et les autres s'occupaient de la Gazette du Canada, de la publicité, de la recherche sur l'opinion publique, de l'édition et de tout le reste, sans jamais s'intéresser vraiment à ce qui se passait avec les commandites. Je ne sais pas s'ils ne voulaient pas le savoir. Je suis certaine qu'ils auraient été intéressés à le savoir, mais il y avait une espèce d'entente tacite voulant que nous faisions ce que nous avions à faire, que nous étions à part du reste de l'organisation.
Nous avions l'impression—je parle pour moi-même, je ne devrais pas dire « nous »... J'avais l'impression de travailler pour le secteur privé. Je ne sentais même pas que je faisais partie du gouvernement fédéral. C'était comme si je travaillais dans une petite organisation complètement à part de tout. Je travaillais avec 150 autres personnes, mais je m'occupais de commandites, donc tout ce qui se passait ailleurs dans l'organisation n'avait aucune importance. Cela n'avait en tout cas aucune importance pour nous.
º (1640)
M. Mario Parent: Je ne peux pas vous en dire beaucoup au sujet de la DGSCC parce que j'ai quitté au milieu de 1998, alors qu'elle existait depuis seulement 6 ou 8 mois—moins d'une année en tout cas. Auparavant, pour le SPROP... Quoi qu'il en soit, j'ai commencé à travailler dans cette organisation. C'était alors le GGP, le Groupe de gestion de la publicité, sous le règne des Conservateurs.
[Français]
Sous le gouvernement conservateur, il y avait de l'ingérence politique tous les jours. On avait deux présidents qui nous disaient qui inviter, etc. Les choses ont changé un peu en 1993. Cependant, nous étions un petit groupe et nous n'étions pas au coeur de l'action du ministère. Nous étions entre 10 et 12 personnes.
[Traduction]
Je vais revenir au français, d'accord?
M. David Christopherson: Pas de problème. J'ai un écouteur, et grâce à l'interprète, je comprends très bien ce que vous dites, alors ne vous en faites pas pour ça.
M. Mario Parent: Nous étions un groupe tellement minuscule que nous nous trouvions à l'écart des quartiers généraux. Nous n'avions pas à parler à qui que ce soit de ce que nous faisions. Environ la moitié du personnel s'occupait de la recherche sur l'opinion publique, et l'autre moitié de la publicité. Nous parlions entre nous, et c'était très agréable, mais en même temps, c'était stressant à cause de la charge de travail. Chacun d'entre nous avait plusieurs casquettes, mais l'atmosphère était agréable, nous avions du plaisir...
M. David Christopherson: Désolé de vous interrompre. Il me reste moins d'une minute, mais j'aimerais revenir un peu en arrière. Vous venez de dire quelque chose au sujet des Conservateurs, vous avez mentionné qu'il y avait déjà eu certaines ingérences politiques au sein du GGP et que, par conséquent, vous avez déjà vécu ce genre de choses. Que vouliez-vous dire par là?
Je vous le dis dans mes mots, en passant.
M. Mario Parent: Sous le gouvernement conservateur, le personnel comptait quelques nominations politiques. Il ne s'agissait pas de fonctionnaires, mais de personnes ayant été nommées de façon discrétionnaire : il y avait un anglophone et un francophone. Ils nous conseillaient sur les agences que nous devions inviter à soumissionner.
Le président: Vraiment?
M. Mario Parent: Oui.
M. David Christopherson: Merci beaucoup.
M. Mario Parent: C'était comme ça, et nous devions nous en arranger, vous savez.
Le président: Je trouve étonnante cette séparation totale que vous mentionnez, comme quoi vous étiez à l'écart pour vous occuper de vos propres projets, à l'extérieur du ministère pour ainsi dire, et même de la DGSCC. Nous avons entendu le témoignage de Janice Cochrane, la sous-ministre aux Travaux publics de l'époque—elle y était avant M. Marshall, qui est l'actuel titulaire—et nous avions sous les yeux l'organigramme des Travaux publics. On y voyait une structure hiérarchique normale, avec la sous-ministre en tête et puis l'ensemble du ministère, et complètement à côté, on retrouvait le programme des commandites et je pense, la DGSCC.
Je lui avais posé la question—parce qu'elle était incapable d'expliquer comment cela avait pu se faire, étant donné qu'il était totalement irrégulier de voir une telle structure dans l'organigramme, c'est-à-dire un service complètement indépendant du reste—pouvez-vous éclairer ma lanterne et m'expliquer comment vous vous êtes retrouvés complètement indépendants sur l'organigramme officiel des Travaux publics?
Mme Huguette Tremblay: Je pense que c'est parce que M. Guité avait atteint le niveau de directeur exécutif, qui est l'équivalent d'un sous-ministre adjoint, à mon avis.
Le président: Oui, mais il y avait beaucoup d'autres sous-ministres adjoints. Même Janice Cochrane, la sous-ministre, était incapable d'expliquer pourquoi ce service se trouvait à part. Pourquoi il ne relevait pratiquement de personne et était pour ainsi dire autonome, ce qui était très irrégulier, tout en faisant partie de la structure officielle. De toute évidence, quelqu'un avait approuvé cette structure, parce que c'était la structure officielle du ministère qui était très irrégulière—je pense que je cite les paroles de la sous-ministre Janice Cochrane—mais elle ne pouvait l'expliquer. Est-ce que quelqu'un peut nous dire pourquoi quelqu'un a approuvé votre mise à l'écart?
º (1645)
Mme Huguette Tremblay: Sur le plan administratif, nous devions de toute évidence rendre des comptes à un ministère, pour des raisons de comptabilité. Bien entendu, nous aurions pu relever de n'importe quel ministère, mais il se trouve que ce fut des Travaux publics. Donc, sur le plan administratif, M. Guité relevait d'un sous-ministre adjoint lorsqu'il était directeur général, et d'un sous-ministre pour toutes ses fonctions administratives.
En ce qui concerne les activités courantes liées aux commandites, je pense que la raison pour laquelle la DGSCC en faisait partie, est parce que les commandites elles-mêmes relevaient de la Direction. Si les commandites avaient été ailleurs, l'autre organisation en aurait fait partie, et la DGSCC aurait figuré dans la voie hiérarchique. Je pense que la seule raison pour laquelle nous avons été mis à l'écart est que nous nous occupions des commandites. Ce n'était pas quelque chose dont le reste du ministère devait être tenu au courant.
Le président: Vous comprenez que votre situation à l'écart dépendait des commandites, mais vous n'avez pas la moindre idée de la personne qui aurait décidé qu'il en serait ainsi avec les commandites, et qu'à ce titre vous deviez être mis à l'écart?
Mme Huguette Tremblay: J'ignore qui en a décidé ainsi.
Le président: Monsieur Parent.
M. Mario Parent: Je ne peux pas vous dire grand-chose au sujet de la DGSCC.
Mais, pour ce qui est du SPROP, le fait que nous nous trouvions tout près de la Colline parlementaire... J'ai toujours pensé que c'était en raison de la nature de nos services, et peut-être aussi à cause du système de reddition de comptes auquel était astreint notre DG ou notre directeur exécutif, parce que c'était plus pratique.
Le président: Étiez-vous très près de la Colline?
M. Mario Parent: Nous étions sur la rue Sparks.
Le président: Vous étiez sur la rue Sparks. Et où se trouvait le reste du ministère?
Mr. Mario Parent: À Hull.
Mme Huguette Tremblay: À l'époque, nous nous appelions le SPROP.
M. Mario Parent: Oui, le SPROP. C'est la raison pour laquelle j'ai exprimé des réserves. Je ne peux pas vous dire grand-chose au sujet de la DGSCC parce que je n'en ai fait partie que durant huit mois.
Le président: Quelqu'un a décidé de rapprocher ce service de la Colline. Bien entendu, aujourd'hui, nous savons que vous étiez sous la supervision directe d'un ministre, et c'était peut-être cela la justification. Nous devrions peut-être tenter d'en savoir plus à ce sujet.
M. Mario Parent: Je ne sais pas.
Le président: Monsieur Allison, s'il vous plaît, huit minutes.
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC): Merci, monsieur le président.
Merci d'être venus témoigner devant nous aujourd'hui.
J'aimerais obtenir des précisons concernant deux ou trois choses qui ont été abordées auparavant.
Monsieur Parent, vous avez mentionné que M. Guité était à la fois un patron et un client. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous vouliez dire en affirmant qu'il était à la fois votre patron et votre client?
M. Mario Parent: J'ai 56 ans, aussi, je suis de la vieille école.
[Français]
le client a toujours raison.
[Traduction]
Je pense que nous essayons toujours de faire plaisir au client. Et il arrive que l'on en paie le prix, mais il faut que le client soit satisfait.
Je me rappelle deux ou trois occasions où j'étais allé rencontrer M. Guité. Nous étions un groupe tellement minuscule, et il ne faut pas oublier non plus que nous avions plusieurs casquettes. Et M. Guité aussi en portait plusieurs.
Donc, je suis allé le voir un jour et je lui ai dit : « Chuck, vous avez signé la demande selon l'article 33 ». Sur le contrat, il se trouvait être à la fois, le chargé de projet et l'autorité contractante. J'ai supposé qu'il allait aussi signer la facture, et je lui ai demandé s'il ne trouvait pas cela un peu bizarre. J'ai utilisé à la blague l'expression « homme-orchestre », amicalement. Il m'a dit que j'avais raison. C'était tout à fait cela.
La relation avec la clientèle était différente de celle que nous avions avec les clients habituels. Par exemple, le ministère de la Défense pouvait nous appeler au sujet d'une demande, s'informer de l'état de la situation, et demander pourquoi certaines choses n'avaient pas été faites, et bla bla bla. Il n'y avait de rapport. Les choses étaient différentes. Comment voulez-vous pincer vos clients? Comment voulez-vous...?
Mme Huguette Tremblay: Je pense que l'on peut dire que nous avons retenu nos propres services à l'interne. Plutôt que d'expédier le formulaire 9200 en vue de faire produire un contrat ailleurs dans le ministère, nous le produisions nous-mêmes, à l'interne.
M. Dean Allison: Donc, vous vous occupiez de l'obtenir, de le remplir,...
º (1650)
Mme Huguette Tremblay: J'établissais le formulaire 9200, et M. Guité le signait. Je le remettais à M. Parent qui préparait le contrat. Le contrat revenait ensuite à M. Guité pour signature. Le travail était effectué, une facture était envoyée, et M. Guité la signait conformément à l'article 34 comme quoi les biens et les services avaient été reçus. Donc, une seule et même personne voyait à toutes les étapes.
M. Dean Allison: Comment les choses se passent-elles normalement dans les autres ministères? Je suppose que l'on envoie ce formulaire à la comptabilité ou à une tierce personne du ministère.
Mme Huguette Tremblay: Un autre ministère, Santé Canada, par exemple, enverrait un formulaire 9200 signé par un de ses fonctionnaires. M. Parent établirait le contrat. Le chargé de projet serait un représentant de Santé Canada—il ne serait pas aux Travaux publics—et il ne serait probablement pas non plus la même personne qui aurait signé le formulaire 9200. Ce serait quelqu'un d'autre. Puis une autre personne de Santé Canada, à un niveau subalterne, possédant l'autorisation financière, signerait la facture une fois qu'elle aurait...
M. Dean Allison: Donc, si je vous comprends bien, M. Guité avait l'autorisation d'émettre le contrat et aussi de le signer.
Mme Huguette Tremblay: Oui.
M. Dean Allison: Autrement dit, il pouvait déclarer : « J'ai besoin de x dollars pour telle et telle chose, et en passant, c'est moi qui vais signer le chèque ». Et ensuite, on ferait le nécessaire.
M. Mario Parent: Oui. Il autorisait les dépenses. Il avait les commandes. Et il aurait très bien pu, à certaines occasions, agir comme chargé de projet, approuver et signer le contrat tout à la fois. Il possédait l'autorisation de signer les factures aussi. Ce n'est pas illégal, c'est seulement...
M. Dean Allison: C'est seulement irresponsable.
M. Mario Parent: C'est différent.
M. Dean Allison: Exact.
M. Mario Parent: Dans mes activités courantes, j'éprouvais parfois de la difficulté à accepter cela. Mais lorsque le patron vous demande de faire quelque chose, et bien...
M. Dean Allison: Bien sûr. Vous vous faisiez du souci pour votre emploi.
Vous avez mentionné, madame Tremblay, que selon vous, l'une des raisons pour lesquelles le programme n'a pas fonctionné, est qu'il était dirigé par des politiciens et n'avait pas été approuvé par le Conseil du Trésor. Donc, nous sommes forcés de constater une fois de plus qu'il ne comportait pas de freins et contrepoids, parce qu'il avait été placé, en quelque sorte, en dehors de ces paramètres.
Mme Huguette Tremblay: Des vérifications internes étaient faites au sein du programme. Je les effectuais moi-même auprès des finances, parce que nous avions un budget et que nous devions le respecter. Donc, il existait des mécanismes de vérification interne, et ces vérifications étaient effectuées auprès du service des finances, mais à part ça—je n'en vois pas d'autres.
M. Dean Allison: Donc, pour en revenir à ce qu'a avancé le président, ce programme aurait pu très bien s'administrer de façon autonome, parce qu'il ne répondait à aucune caractéristique établie. Il en avait seulement les apparences.
Ce qui m'amène à ma question suivante au sujet de la vérification qui a été effectuée. Vous dites avoir consacré pas mal de temps à collaborer à une vérification, monsieur Parent, mais que par la suite, le rapport a été mis sur une tablette. À quel moment cette vérification a-t-elle eu lieu?
M. Mario Parent: C'était en 1996. Cette vérification a été effectuée à la suite des allégations de M. Cutler comme quoi des irrégularités étaient commises, et ainsi de suite. C'était très bien. C'était correct.
En premier lieu—je ne sais pas si je devrais m'aventurer sur ce terrain—je n'ai jamais compris pourquoi la fonction des achats avait été transférée chez nous, au SPROP. J'en ignore les raisons. En ce qui me concerne, cela ne pouvait que nous attirer des ennuis, en raison de ce que nous venons tout juste d'évoquer—les mesures de contrôle... Mais quelqu'un au ministère avait dû prendre la décision. Ce n'est pas Chuck Guité qui a décidé de son propre chef : « Je veux ceci, et je vais l'avoir ». Ça ne marche pas comme ça.
M. Dean Allison: Bien sûr.
M. Mario Parent: Ce fut une expérience très pénible à traverser. Néanmoins, j'y ai participé volontiers, et j'en ai approuvé les conclusions, et notamment la première recommandation qui disait : « La fonction des achats doit revenir aux services centraux du ministère ». Oui, allez-y, reprenez-la, ou donnez-leur le personnel et les ressources nécessaires pour faire du bon travail.
M. Dean Allison: J'aurais bien aimé disposer d'un autre huit minutes, mais je ne les ai pas.
Le processus mental a donc quelque chose à voir avec la recommandation des vérificateurs. Au départ, il y avait M. Cutler, qui a éprouvé certaines difficultés ou exprimé des doléances, à la suite de quoi, on a procédé à une vérification.
º (1655)
M. Mario Parent: Je dois vous avouer, monsieur, que c'est M. Guité qui a demandé la tenue de la vérification.
M. Dean Allison: Ah bon, d'accord. Je comprends, mais qu'a-t-on fait ensuite de la vérification? Pourquoi le rapport a-t-il atterri sur une tablette? Pourquoi n'a-t-il pas été déposé au Parlement? Comprenez-vous ce que je vous demande?
M. Mario Parent: J'ai quitté le ministère en 1998, et je travaillais toujours aux achats. Les choses s'étaient légèrement améliorées, mais sur le fond, il n'y a pas eu de grands changements.
Le président: Merci de vos questions, monsieur Allison.
Monsieur Lastewka, s'il vous plaît, vous disposez de huit minutes.
L'hon. Walt Lastewka: Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'avoir accepté de venir témoigner.
J'aimerais poursuivre un peu sur la lancée de M. Allison. Ces choses se sont produites. Comme vous l'avez dit, je ne sais pas comment ça pu se faire, mais ça s'est produit.
Qu'a fait le sous-ministre à ce sujet? Qu'en est-il de la responsabilité du sous-ministre? Le sous-ministre est responsable de l'organisation et des systèmes dans son ministère. Quelle était la culture à l'époque où ces choses se sont passées?
M. Mario Parent: En toute sincérité, M. Quail était au courant des allégations et de la vérification, et du reste. Je me rappelle très bien que j'étais dans le bureau de M. Guité quand il a téléphoné à Ran Quail. Il lui a dit : « Ran, je veux une vérification et le plus tôt sera le mieux ». J'en ai été témoin. Je pense qu'avant cela M. Cutler avait écrit quelques lettres dans lesquelles il disait qu'il se passait des choses pas très orthodoxes.
L'hon. Walt Lastewka: En ce qui concerne la vérification réalisée par Ernst & Young en 1996, y avez-vous participé?
M. Mario Parent: J'étais le seul qui restait.
L'hon. Walt Lastewka: Est-ce que la vérification a été déposée, et qu'il ne s'est rien produit ensuite? On n'en a tenu aucun compte?
M. Mario Parent: Oui, en effet, il y a eu un plan d'action. Il a été élaboré en fonction des règles et des procédures établies. Il a été réalisé, mais un an plus tard, je m'occupais toujours des achats, et les choses n'avaient pas vraiment changé. Et c'est alors que je suis parti.
L'hon. Walt Lastewka: Est-ce que la vérification—et je ne sais pas exactement à quelle étape vous avez participé, s'agissait-il de la première ébauche, de la deuxième ou de l'étape définitive...
M. Mario Parent: J'ai collaboré quotidiennement avec les vérificateurs. J'étais en mesure de répondre à leurs questions. Je n'y ai pas participé. J'ai vu la première ébauche.
L'hon. Walt Lastewka: Est-ce que le rapport de vérification réalisé par Ernst & Young a été modifié pendant la période où vous étiez présent? Quels ont été les changements apportés?
M. Mario Parent: J'ignore si on l'a modifié.
L'hon. Walt Lastewka: J'aimerais maintenant changer de sujet. Il y a eu des commentaires à cet égard auparavant. Sous le précédent gouvernement—le gouvernement de M. Mulroney—j'ai cru comprendre d'après le témoignage de M. Dingwall que des personnes ayant été nommées politiquement participaient au processus. Pourriez-vous nous donner des explications à ce sujet? Quelles étaient les responsabilités de ces personnes?
Mme Huguette Tremblay: Elles avaient été nommées par le sénateur Lowell Murray, je crois, à l'époque. Ces personnes travaillaient dans le cadre d'un contrat de services professionnels d'une durée d'un an, d'un exercice à l'autre. Leurs responsabilités consistaient essentiellement—corrigez-moi si je me trompe, parce que je n'ai pas beaucoup travaillé avec la publicité—à choisir les agences de publicité qui seraient appelées à participer à des concours de sélection pour les divers programmes ministériels en matière de publicité.
L'hon. Walt Lastewka: Ces personnes travaillaient-elles directement au ministère?
Mme Huguette Tremblay: Oui, elles y avaient un bureau.
L'hon. Walt Lastewka: Elles avaient un bureau au ministère. Et elles avaient été nommées. Que voulez-vous dire par “elles choisissaient”?
Mme Huguette Tremblay: Elles disaient à M. Guité, qui était alors le directeur du GGP, et à Mme Larose, qui était, je crois, la coordonnatrice—je ne me souviens pas de son titre exact à l'époque—disons, pour Santé Canada, vous allez inviter cette agence-ci, et celle-ci et encore celle-là à soumissionner.
L'hon. Walt Lastewka: Ces personnes avaient-elles l'autorisation de décider si telle et telle agence pouvait être incluse ou non?
Mme Huguette Tremblay: Oui.
L'hon. Walt Lastewka: Quels étaient les critères suivis?
Mme Huguette Tremblay: Je ne pense pas qu'il y avait des critères.
L'hon. Walt Lastewka: Qui versait leurs salaires?
Mme Huguette Tremblay: Le ministère.
L'hon. Walt Lastewka: Donc, ces titulaires de nominations politiques étaient rémunérés par le Ministère pour choisir...
» (1700)
M. Mario Parent: Pour recommander.
Mme Huguette Tremblay: Oui, pour recommander les noms des agences qui seraient invitées à soumissionner.
M. Mario Parent: Mais une fois que nous avions les noms de six ou huit entreprises, en ce qui nous concernait, le reste du processus se déroulait de façon normale, équitable et habituelle. Ce n'est pas exactement ce que nous qualifierions dans notre jargon de véritable mise en concurrence. C'était plutôt une invitation à soumissionner.
L'hon. Walt Lastewka: Donc, la culture était...
Oh pardon, monsieur le président.
Le président: Permettez-moi de vous interrompre ici, pour obtenir des précisions.
Ces personnes choisissaient six ou huit noms et ensuite, on tenait un concours entre ces six ou huit agences mises en concurrence préalable afin de choisir celle qui serait retenue?
M. Mario Parent: Oui. Ensuite, nous faisions la sélection.
Le président: D'accord. Désolé pour l'interruption.
Mme Huguette Tremblay: Par l'entremise d'un comité.
L'hon. Walt Lastewka: Vous faisiez la sélection finale. Donc, ils choisissaient six entreprises parmi les Conservateurs, et ensuite vous pouviez vous-mêmes choisir la meilleure parmi ces six...
M. Mario Parent: Oui.
Mme Huguette Tremblay: Par l'entremise d'un concours normal.
Une voix: C'est ce que l'on appelle une présélection.
L'hon. Walt Lastewka: Donc, il n'y avait pas de critères en fonction desquels ces agences étaient présélectionnées...
Mme Huguette Tremblay: Non.
L'hon. Walt Lastewka: ...et ensuite, vous passiez aux étapes suivantes du processus. Ces gens étaient rémunérés par le ministère. Ils avaient leur bureau au ministère, mais il s'agissait de nominations politiques.
À quel moment les choses ont-elles changé?
Mme Huguette Tremblay: Les choses ont changé en 1993 lorsque le gouvernement libéral a pris le pouvoir.
L'hon. Walt Lastewka: Avec M. Dingwall?
Mme Huguette Tremblay: Oui.
L'hon. Walt Lastewka: Cela remonte à dix ans. J'ai un peu de difficulté. Je m'en excuse.
Très bien, je vais revenir en arrière et vous poser une dernière question.
Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
Le président: Deux ou trois minutes.
L'hon. Walt Lastewka: Merci.
J'aimerais parler du respect des procédures. Je pense, madame Tremblay que vous avez dit qu'il y avait une marche à suivre au ministère... dans l'éventualité où il se commettrait des irrégularités, il y a une procédure à suivre et vous devez en informer la voie hiérarchique, et ainsi de suite. Si cela devait se produire... non, revenons en arrière.
Voulez-vous expliquer, pour que tout le monde comprenne. Quelle était la marche à suivre dans le cas d'une irrégularité?
Mme Huguette Tremblay: Habituellement, la procédure consistait à informer le supérieur immédiat, et si cela ne donnait pas de résultats, alors il fallait aller plus haut dans la hiérarchie. Mais, si je remonte à quelques années en arrière, à l'époque des commandites, mon supérieur immédiat a toujours été M. Guité, et son supérieur immédiat était le ministre. Je ne pense pas que M. Gagliano m'aurait accueillie à bras ouverts dans son bureau, si je m'étais présentée à lui pour me plaindre que je « n'aimais pas la façon dont les choses se passaient ».
L'hon. Walt Lastewka: Bon d'accord. C'est parce qu'il ne relevait pas d'un SMA?
Mme Huguette Tremblay: Oui. Sur le plan administratif, c'était le cas, mais en fait...
L'hon. Walt Lastewka: Mais, vous ne pouviez pas vous adresser à ce SMA?
Mme Huguette Tremblay: Non, parce que nous savions tous que M. Quail était au courant de l'existence du programme. Il ne se mêlait pas des activités quotidiennes, cependant. Il laissait cela au ministre, et il l'a lui-même admis devant la Commission Gomery.
L'hon. Walt Lastewka: J'ai bien pensé que vous alliez dire cela.
Ce qui me ramène, monsieur le président et chers collègues, aux responsabilités des sous-ministres. Il faut trouver le moyen... les rôles des sous-ministres, leurs responsabilités et les mécanismes de reddition de compte doivent changer. Il n'y a aucun doute dans mon esprit... Tout ceci nous ramène à la responsabilité d'un sous-ministre, qu'il s'agisse du passé, ou même de maintenant.
Mme Huguette Tremblay: Le sous-ministre relève directement du ministre, donc son supérieur immédiat est le ministre qui lui répond : « Je vais m'en occuper ».
Je ne fais qu'émettre des hypothèses, mais quel recours peut-il avoir?
L'hon. Walt Lastewka: Est-ce qu'il ne relève pas du BCP?
Mme Huguette Tremblay: Je l'ignore.
L'hon. Walt Lastewka: Oh, absolument. Tout à fait.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.
Voici qui met fin à notre premier cycle. Il est 17 heures 5. Il ne reste que M. Roy pour la prochaine étape. Voulez-vous poursuivre, ou est-ce que nous passons au rapport sur les Comptes publics du Canada? C'est le deuxième point à l'ordre du jour. Nous pourrions accorder quelques minutes à M. Roy, et je poserais moi aussi quelques questions, et ensuite, nous passerions au point suivant.
Qu'en pensez-vous, chers collègues?
Monsieur Roy, s'il vous plaît, cinq minutes, et c'est tout.
» (1705)
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Merci, monsieur le président.
J'essaie de comprendre comment, lorsqu'on fait partie de la fonction publique et d'un petit groupe, on peut arriver à être conscient... Ou bien vous n'étiez pas conscient que les règles n'étaient pas respectées, ou bien vous l'étiez. Comment en arrive-t-on à accepter que les règles soient enfreintes, si on en est conscient? Voilà ma question.
M. Mario Parent: Je n'ai jamais vu de règlement violé. J'ai vu de légères entorses à des façons de procéder ou à des marches à suivre. Voici un exemple concret, même si je ne me souviens pas des montants: cela fait sept ans que j'ai quitté. Tout contrat de plus de un million de dollars devait passer par l'analyste des prix de revient et au service juridique. À chaque fois qu'il y avait un contrat de un million de dollars, je demandais à M. Guité, vu que c'est lui qui les approuvait, si on l'envoyait au service juridique et à l'analyste des prix de revient.
Chuck répondait qu'il n'y avait aucun avantage à le faire puisque ça prenait des semaines, parfois des mois. Chez nous, c'était assez expéditif. C'est un exemple que je vous donne. Je faisais part de la situation à mon supérieur immédiat, il regardait et vérifiait si la compagnie était la bonne, si les montants étaient exacts, si les budgets étaient là, et ensuite il mettait une petite note.
M. Jean-Yves Roy: Je vais vous arrêter. Vous dites qu'il est sûr que si on avait suivi la marche à suivre normale du ministère, cela aurait pris des semaines et des mois. Pourtant, c'est comme cela que fonctionne un gouvernement.
M. Mario Parent: Oui. Cependant, 75 p.100 des commandites sont demandées pour la période de juin à septembre; les budgets sont souvent approuvés au mois d'avril ou de mai, et parfois cela prend du temps. C'était toujours sous pression. Quand je recevais l'accord pour une commandite, disons le mardi, et que l'événement était le vendredi ou pendant la fin de semaine, devais-je aller au service juridique? Non, je regrette.
M. Jean-Yves Roy: C'est le fonctionnement normal et vous auriez dû y aller. Vous faisiez partie d'un système qui vous forçait à agir de cette façon et vous auriez dû le respecter.
Si quelqu'un me faisait une demande qui n'a pas de sens et que je devais prendre une décision immédiatement, je lui répondrais que malheureusement, la commandite étant pour la semaine prochaine, il aurait dû faire sa demande plus tôt.
Le système est là. On a déjoué le système en prétendant qu'il y avait urgence. C'est cela que vous me dites.
M. Mario Parent: C'est un exemple de un million de dollars.
M. Jean-Yves Roy: Des millions, il y en a eu plusieurs et c'est cela, le problème.
M. Mario Parent: Cela ne veut pas dire que tout était de travers.
M. Jean-Yves Roy: Je ne dis pas que tout était de travers, mais il y en a eu plusieurs.
M. Mario Parent: S'il y avait eu huit personnes avec moi, ça aurait mieux été. Quand on est seul et qu'on remplit trois fonctions, on tourne les coins rond et c'est normal.
Mme Huguette Tremblay: Quand le Programme de commandites a été refondu en 2001, sous la tutelle de Communication Canada, qui a décidé d'éliminer les agences, on est passés de trois à près de 30 employés. Ça fait toute une différence.
Ce n'était pas de travers dans la mesure où des agences s'étaient déjà qualifiées pour gérer les commandites. Quand une commandite était approuvée, le choix se faisait parmi ces agences. Je ne sais pas comment le choix était fait et je ne sais pas quels étaient les critères. Ce n'était pas moi qui faisais ce choix. On gérait 700 commandites par année. On ne pouvait pas lancer 700 appels d'offres. C'était impossible. Parfois il y avait quatre ou cinq commandites au cours de la même fin de semaine.
C'est pour cela qu'un système avait été mis en place pour qualifier des agences à l'avance. Elles s'étaient qualifiées et étaient capables de faire le travail. Le problème n'était pas là. Il est certain que si on achète une boîte de crayons, on va chercher trois devis, mais ce n'est pas la même chose.
» (1710)
Le président: Merci beaucoup, monsieur Roy.
[Traduction]
L'autre jour, des témoins qui venaient du cabinet du ministre ont mentionné qu'ils suivaient, environ une fois par année, une formation sur les règles à suivre, l'éthique et ainsi de suite. Est-ce que vous receviez une formation quelconque, chaque année ou peu importe la fréquence, concernant les règles, l'éthique et la façon dont les choses sont censées se passer?
Mme Huguette Tremblay: Non, je n'ai jamais reçu une telle formation.
Le président: Monsieur Parent?
M. Mario Parent: Non, absolument pas.
Le président: Vous n'avez reçu aucune formation ni instruction, ni cours de perfectionnement, alors qu'il existe une myriade de règles à suivre au gouvernement du Canada, et qu'il est impossible de se tenir continuellement à jour en ce qui les concerne. Mais, vous n'avez rien reçu de tout cela.
Mme Huguette Tremblay: Non.
M. Mario Parent: Non, rien du tout.
Le président: Je pense que les mots que vous avez utilisés, monsieur Parent, sont « jamais vu de règlement violé, mais certainement vu de légères entorses ». Vous saviez que vous enfreigniez les règles?
M. Mario Parent: Oui, parfois, mais c'était toujours avec l'autorisation de mon client, de mon patron, vous savez. Ce n'était pas facile.
Le président: Madame Tremblay, saviez-vous que vous enfreigniez les règles?
Mme Huguette Tremblay: Non, je ne savais pas que j'enfreignais les règles. Je ne pense pas avoir jamais fait d'entorses à quelque règlement que ce soit. Disons que je savais qu'il s'agissait d'un programme très différent, dont le mode de fonctionnement était très différent, et que les responsables étaient haut placés. Je veux dire, lorsque votre supérieur immédiat parle du ministre en l'appelant « le patron » et du premier ministre en l'appelant « le grand patron », vous ne posez pas de question.
Le président: Très bien.
Ça nous met dans de beaux draps, n'est-ce pas?
M. Mario Parent: Puis-je ajouter quelque chose, ça ne prendra qu'une minute tout au plus.
Le président: Oui.
M. Mario Parent: Nous disposions de règles et de règlements en vertu de la fameuse annexe Q; elle est devenue l'annexe U, et l'annexe U est devenue l'annexe Q, et ainsi de suite. Si vous lisez ça, vous constatez qu'une fois que la firme a été choisie, le processus est terminé. Vous devez—ou plutôt, vous deviez, parce qu'elle n'existe plus. Donc, vous deviez transmettre vos recommandations au cabinet du ministre de tel ministère pour son approbation. Ne trouvez-vous pas que...
Mme Huguette Tremblay: Pour la publicité.
M. Mario Parent: Bien entendu. Huguette précise que c'était pour la publicité.
Ne trouvez-vous pas que c'est une façon un peu différente de voir les choses?
Le président: Oui. C'était ma question. Aviez-vous l'impression de contourner les règles? Et si c'était le cas, est-ce que vous vous disiez : « Je ne devrais pas m'en faire, je m'en tiens à la routine, c'est comme ça que ça fonctionne dans ce ministère »?
Je sais, madame Tremblay, que vous avez dit que vous vous étiez plainte à votre patron, et qu'en fin de compte, mis à part le ministre, il n'avait pas de supérieur hiérarchique, donc vous ne pouviez pas vous adresser à un échelon supérieur. Vous ne vous imaginiez pas entrer dans le bureau du ministre, aussi vous vous sentiez coincée.
M. Mario Parent: C'était pareil pour moi.
Mme Huguette Tremblay: Lorsque je suis venue témoigner devant ce comité, au mois de mars, j'ai déclaré que j'avais bien posé quelques questions à deux ou trois reprises, lorsque je recevais des factures, sans aucune pièce justificative et pour un montant élevé. Je savais que lorsqu'il s'agissait de services de production, on devait fournir certaines justifications pour les services rendus. S'il s'agissait de dix drapeaux, qui les avait produits pour vous et quel montant vous avait-on facturé? Mais on m'avait dit de me contenter de payer les factures, que cela ne relevait de ma responsabilité. C'était M. Guité qui en avait la responsabilité. Il disposait des attestations selon l'article 34.
Vous posez des questions deux ou trois fois, et après un moment vous comprenez que c'est son travail à lui. Alors, j'ai décidé de le laisser faire son travail, et de faire le mien.
Le président: De toute évidence, vous connaissiez toutes les règles. Comme vous le dites vous-même, les attestations relèvent de l'article 34.
Mme Huguette Tremblay: Je savais que pour acquitter une facture pour des services de production, il me fallait des pièces justificatives.
Le président: Oui.
Je pense que nous allons nous arrêter maintenant. Je vous remercie tous deux de vous être joints à nous aujourd'hui—madame Tremblay, c'est votre deuxième visite devant notre comité—et nous vous sommes très reconnaissants de votre franchise et de votre sincérité alors que nous essayons de comprendre les raisons qui ont permis ce dérapage au ministère. Nous savons que le programme en question a dérapé; nous en avons parlé durant des heures et en avons débattu longuement. Mais nous essayons maintenant de comprendre la culture qui sous-tendait ces comportements, et c'est une question dont il va falloir que nous discutions.
De toute manière, merci d'être venus témoigner aujourd'hui. Nous apprécions votre collaboration.
Nous allons faire une pause de trois minutes environ jusqu'à ce que les caméras cessent de filmer. Ensuite, nous poursuivrons notre séance à huis clos et continuerons l'étude du rapport jusqu'à 17 h 30. Nous verrons bien où cela nous mènera.
Merci beaucoup.