Passer au contenu
Début du contenu

SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 018 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 8 mai 2007

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

[Français]

    Bonjour, chers collègues. Je déclare ouverte cette réunion du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Traduction]

    Nous poursuivons aujourd'hui nos audiences dans le cadre de notre étude sur la situation des droits de la personne à Cuba. Nous recevons deux témoins que Marcus avait proposés à notre comité.
    L'un des témoins avait été recommandé par Mme St-Hilaire.

[Français]

    Nous avons avec nous aujourd'hui Mme Dulce-Maria Cruz-Herrera, chercheure associée au Centre de recherche sur l'immigration, l'ethnicité et la citoyenneté de l'Université du Québec à Montréal, et le professeur Archibald Ritter, de la Faculté des sciences économiques et affaires internationales à l'Université Carleton.

[Traduction]

    Nous avons envoyé le mémoire de Mme Cruz Herrera à la traduction ce matin.
    Je vais demander à Mme Cruz Herrera de commencer. Vous avez environ dix minutes pour nous présenter votre exposé, ensuite nous vous poserons des questions.

[Français]

    Madame, vous avez la parole.
    Je remercie tous les parlementaires de m'avoir invitée à venir partager mes connaissances et mon avis sur la situation des droits de la personne à Cuba. J'ai préparé un texte que j'ai intitulé « Situation des droits de la personne à Cuba: Contexte et perspectives ». Je vais en faire un résumé pour respecter mon temps et, à la fin, je vous ferai quelques recommandations, que j'ai établies à l'intention du gouvernement du Canada et proposées dans le cadre de l'étude amorcée par le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    Je vais faire une mise en contexte. D'abord, il faut comprendre que l'évolution de la situation des droits de la personne à Cuba doit être examinée à la lumière de deux événements majeurs. Le premier est d'ordre global, soit la mondialisation de l'économie, et il a un certain impact sur la protection et la mise en oeuvre de l'ensemble des droits humains. Le deuxième est plutôt d'ordre régional. Il s'agit de la politique étrangère des États-Unis à l'égard de Cuba, qui est axée sur des mesures de contraintes économiques variées et caractérisées par une intervention accrue dans ses affaires intérieures.
    L'évolution de ce conflit a eu, par conséquent, une incidence déterminante sur l'élaboration des politiques étatiques destinées à encadrer et à assurer la protection et la mise en oeuvre des droits de la personne dans l'île. La politisation excessive et incessante de cette question a eu parfois comme résultat d'escamoter une règle universelle dont la primauté n'a plus à être démontrée, et je parle notamment de l'indivisibilité, de l'universalité et de l'interdépendance de l'ensemble des droits de la personne.
    En vertu de ces principes, les droits civils et politiques ne sont pas supérieurs aux droits économiques, sociaux et culturels, et ces derniers ne sont pas, non plus, plus importants que les premiers. Il faut analyser la situation des droits de la personne à Cuba dans son ensemble. Il faut toujours analyser l'intégralité, la réalisation et la jouissance de l'ensemble des droits de la personne, et non pas certains droits au mépris ou au détriment d'autres droits.
    Il faut avoir à l'esprit que le respect des droits de la personne est un défi majeur pour l'ensemble des pays qui composent la communauté internationale. Aucun État n'a réussi, jusqu'à présent, à s'acquitter de toutes ses obligations internationales en vertu des textes juridiques internationaux relatifs aux droits de la personne.
    En dépit du très fort consensus international autour de la protection inconditionnelle de la paix et de la sécurité internationales, le conflit perdure, et Cuba reçoit chaque semaine 2 200 heures d'émissions de radio financées par le gouvernement des États-Unis. Je parle de cet événement parce qu'il est à la source de certains problèmes de violations présumées des droits civils et politiques des citoyens cubains, qui sont très réceptifs à de telles émissions sur le territoire cubain. De telles émissions sont jugées comme illégales et subversives par le gouvernement cubain.
    En conséquence, le gouvernement cubain a développé une stratégie défensive pour échapper à l'emprise médiatique bien ciblée de l'hyperpuissance voisine. En plus d'effectuer des manoeuvres de brouillage des ondes radiophoniques et des télécommunications, les autorités cubaines ont mis à jour leur législation afin de punir les citoyens réceptifs aux messages d'appel à la déstabilisation politique véhiculés à l'intérieur de ces espaces médiatiques.
    L'adoption de la Loi de protection de l'indépendance nationale et de l'économie de Cuba, la loi 88, qui prévoit de lourdes peines de prison pour les opposants, s'inscrit dans cette logique. Cette stratégie de défense de la souveraineté de l'État cubain entre notamment en conflit avec l'exercice de certains droits civils et politiques des citoyens cubains engagés dans des organisations politiques opposées au régime castriste, financées et soutenues par le gouvernement ou par des entités ou des organisations américaines. C'est dans ce contexte de conflit bilatéral perpétuel et caractérisé par l'interventionnisme politique et économique étatsunien qu'il convient d'analyser sérieusement la situation de la jouissance des droits de la personne à Cuba.
    Je recommande au comité qu'au moment de se pencher sur la situation des droits de l'homme à Cuba, il évalue également la performance de l'État cubain en ce qui a trait à la mise en oeuvre des textes juridiques internationaux de protection des droits de la personne.
    Comme vous le savez, il y a des comités de contrôle et de mise en oeuvre de ces textes. Je parle notamment des différents comités de l'ONU, dont le Comité des droits de l'homme, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, le Comité des droits de l'enfant et le Comité contre la torture, qui surveille l'application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est important de voir les analyses et les recommandations des organes de contrôle de ces textes à la suite de l'étude des rapports présentés par les représentants gouvernementaux cubains, lesquels sont d'une grande valeur pédagogique et juridique.
    Nous accordons aussi une importance particulière aux travaux et aux rapports des activités de plusieurs organisations intergouvernementales, telles que l'Organisation mondiale de la santé, l'Organisation panaméricaine de la santé, le Fonds des Nations Unies pour la population, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, le Programme alimentaire mondial, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et le Fonds international de développement agricole. Je vous invite également, au moment d'amorcer votre étude, à aller vérifier ce que ces organisations ont écrit au sujet de la réalisation et de la jouissance des droits de la personne à Cuba.
    Je vais présenter très rapidement certains rapports, dont ceux sur la situation des droits de la personne à Cuba du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qui est l'ancienne Commission des droits de l'homme. Les travaux sur la situation des droits de la personne, sous les auspices de l'ancienne Commission des droits de l'homme, rebaptisée Conseil des droits de l'homme l'année dernière, ont suscité beaucoup d'attention depuis la nomination de rapporteurs spéciaux sur la situation de l'ensemble des droits de la personne à Cuba. Il s'agit, en l'occurrence, du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, du Rapporteur spécial chargé d'examiner les questions se rapportant à la torture et du Représentant spécial du Secrétaire général pour la question des défenseurs des droits de l'homme. S'ajoute à cette liste l'Avis no 9 contenu dans le document présenté par le Groupe de travail sur la détention arbitraire lors de la 60e session de l'ancienne Commission des droits de l'homme et concernant la situation à Cuba.
    En septembre 2005, la Représentante personnelle de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mme Christine Chanet, a présenté devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU le dernier rapport portant sur la situation des droits de la personne à Cuba. Les autorités cubaines n'ont jamais reconnu le mandat de la représentante de la Haut-Commissaire, ce qui a rendu les échanges extrêmement difficiles, voire inexistants.
    Pour mieux comprendre l'échec de cette démarche, il faut aussi se reporter aux débats qui ont suivi la présentation du rapport, en septembre 2006, alors que les membres du Conseil des droits de l'homme étaient de toute évidence profondément divisés non seulement lors de la création de ces postes, mais aussi lors du débat sur le contenu du rapport. Les vives discussions qui ont suivi la lecture du rapport rappellent les confrontations idéologiques perpétuelles durant la guerre froide entre les anciens pays socialistes et les pays en développement, d'un côté, et les pays occidentaux industrialisés, à l'autre extrême. De toute évidence, ces divergences se sont poursuivies jusqu'à aujourd'hui.
    En consultant ces débats, vous constaterez que les représentants de la Corée, de la Russie, du Bélarus et du Zimbabwe, entre autres, ont émis des réserves à l'égard du contenu du rapport.
    Je suis loin de remettre en cause un des piliers fondamentaux des Nations Unies, soit la protection internationale des droits de la personne. Je suis particulièrement en faveur de la création et du développement des postes de rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de la personne dans le monde. Ces postes sont importants, car ils appliquent et mettent en oeuvre le principe de la protection intégrale des droits de la personne, conformément à la Charte des Nations Unies.

  (1115)  

    Toutefois, il faut prendre acte de la profonde division qui régnait parmi les membres de la Commission des droits de l'homme en 2002, lors de la création du poste, et en septembre 2006, au moment de la présentation de son rapport.
    Enfin, toute étude rigoureuse de la situation des droits de la personne à Cuba doit se poursuivre en prenant acte également des changements environnementaux importants et de leurs graves conséquences sur les sols de l'île depuis une dizaine d'années. Certains phénomènes naturels, comme les cyclones et la sécheresse, ont entraîné des dégâts économiques et matériels importants. Ces dégâts ont un impact et des conséquences sérieuses sur la protection et la défense, donc sur la réalisation des droits de la personne à Cuba.
    Malgré la réponse rapide des autorités cubaines, qui ont mis en place des mécanismes adéquats en matière d'alerte rapide et d'intervention, la gravité croissante et la récurrence de ces catastrophes naturelles entravent les efforts de relèvement et de reconstruction. Selon toutes les prévisions, les effets cumulés des catastrophes naturelles et des périodes de sécheresse chronique devraient continuer de s'aggraver. Cette situation a une incidence non négligeable sur la jouissance des droits économiques et sociaux de la personne à Cuba.
    Pour finir, j'ai préparé quelques recommandations. La première vise la transition démocratique qui est déjà amorcée à Cuba depuis un certain temps. Je recommande que le gouvernement du Canada encourage le gouvernement de Cuba à favoriser le pluralisme politique et le pluripartisme, dans la mesure où différents partis politiques puissent être représentés au sein de l'assemblée nationale de La Havane dans le respect des lois cubaines, y compris les règles de financement des partis politiques.
    Cette question est importante dans la mesure où le gouvernement de Cuba, comme n'importe quel gouvernement souverain, ne peut tolérer la présence de partis politiques ou d'organisations politiques financés et soutenus par un État étranger ou par une entité ou des organisations étrangères. Imaginez si, à la Chambre des communes, vous aviez à côté du Bloc québécois, du Parti libéral, du Parti conservateur et du NPD, un nouveau parti politique financé intégralement par le gouvernement australien ou afghan, par les talibans, ou encore par Oussama ben Laden. C'est antidémocratique et va à l'encontre de toute règle démocratique.
     Les partis politiques d'un État doivent être financés selon les règles de financement ou les lois en vigueur concernant le financement des partis politiques et ne doivent pas être soutenus et financés par un État étranger. Non seulement cela va à l'encontre de la démocratie, mais cela empiète sur le développement démocratique dans la mesure où la joute démocratique doit défendre la souveraineté d'un État.
    Je recommande également que le gouvernement du Canada intervienne auprès du gouvernement des États-Unis pour mettre fin à la politique étrangère de ce pays à l'égard de Cuba, qui est axée sur des mesures de contraintes économiques unilatérales depuis 1959.
    Je vous rappelle que cette politique a été condamnée par l'Assemblée générale des Nations Unies. Quatorze résolutions ont été adoptées depuis 1992, en plus des rapports exigés par l'Assemblée nationale à l'endroit du secrétaire général des Nations Unies pour mettre en application ces résolutions.

  (1120)  

    Excusez-moi, madame. Pourriez-vous conclure, s'il vous plaît?
    Oui, je présente mes recommandations.
    Je recommande que le gouvernement du Canada intervienne auprès des autorités cubaines et américaines afin de favoriser le rétablissement de leurs relations bilatérales; que le gouvernement du Canada s'abstienne de participer à toute politisation de la situation des droits de l'homme à Cuba, comme l'ont suggéré les membres de la commission et du Conseil des droits de l'homme; que le gouvernement du Canada tienne compte de l'impact de la mondialisation de l'économie sur la réalisation, la protection et la jouissance effective des droits de l'homme à Cuba; que le gouvernement du Canada prenne acte des conséquences sérieuses de la politique étrangère américaine à l'égard de Cuba sur la jouissance effective des droits de l'homme à Cuba et qu'il tienne compte non seulement des conclusions avancées par le gouvernement cubain, mais aussi des rapports et des travaux sérieux fournis par les organisations intergouvernementales que j'ai nommées un peu plus tôt.
    En fin de compte, je recommande aussi que le gouvernement du Canada ou votre sous-comité, au moment de préparer son travail, tienne compte de l'impact de changements environnementaux et climatiques, qui ont des conséquences importantes sur la réalisation et la jouissance de l'ensemble des droits de la personne à Cuba.

  (1125)  

    Merci, madame.

[Traduction]

    Nous allons maintenant donner la parole à M. Ritter.
    Allez-y, monsieur Ritter.
    Merci beaucoup de cette occasion qui m'est donnée de comparaître devant votre comité. Comme je ne l'ai su que dimanche, je suis désolé, mais je n'ai pas de mémoire écrit à vous remettre.
    Je dois dire que je suis heureux que mon nom soit Ritter aujourd'hui, et non pas Radler, bien que je sois certain que les questions que vous me poserez seront toutes aussi difficiles que celles auxquelles il doit répondre.
    Essentiellement, mon point de vue diffère de celui du témoin précédent. À mon avis, Cuba est un État de type totalitaire comme ceux d'Europe de l'Est, dont les structures et les institutions sont plutôt identiques à celles qui existaient en Europe de l'Est. C'est peut-être un État totalitaire léger, avec de la belle musique, de jolies plages, etc., mais le pays est contrôlé par un régime autocratique, dirigé par un seul parti qui a le monopole; au sein de ce parti, il y a un comité central; et au sein du comité central, un bureau politique; et au sein du bureau politique, Fidel. Je dirais que le pays est contrôlé en grande partie sinon en totalité par le parti et par Fidel.
    Les sources que j'utiliserai au cours de mon exposé sont Amnistie internationale, Human Rights Watch, Reporters sans frontières et la Commission cubaine pour les droits de la personne et la réconciliation nationale.
    Je vous recommanderais un livre en particulier. C'est une publication de Human Rights Watch qui s'intitule Cuba's Repressive Machinery. Ce livre présente en détail la façon dont la société cubaine est contrôlée de façon tout à fait totalitaire par le parti.
    Essentiellement, au sein du régime politique cubain, la Charte est déterminée par sa Constitution et par son code pénal. La majeure partie de la Constitution se lit comme un document occidental normal informé par la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies. Cependant, il y a quelques articles dans la Constitution qui annulent d'autres déclarations donnant l'impression d'encourager la liberté d'expression, etc.
    L'un de ces articles est l'article 5. L'article 5 de la Constitution garantit la domination et le monopole du Parti communiste dans la vie cubaine et, implicitement, rend ainsi illégal tout autre type de parti politique. Par conséquent, le Parti communiste domine les forces armées, les ministères et les universités. Il est très puissant. Il a une structure parallèle à celle de l'administration à l'université. Je le sais pour en avoir fait l'expérience sur place, lorsque notre université, l'Université Carleton, offrait un programme d'économie à l'Université de la Havane au niveau de la maîtrise, un programme d'économie à l'occidentale, ce qui est intéressant, mais nous nous sommes colletés avec le Parti communiste qui surveillait de très près ce que nous faisions dans nos salles de classe.
    L'article 62 de la Constitution stipule qu'aucune des libertés, des libertés assez normales, reconnues dans la Constitution pour les citoyens ne peut être exercée si elle va à l'encontre des dispositions de la Constitution des lois, ou encore à l'encontre du socialisme et du communisme. Les infractions à ce principe sont punissables. Une nouvelle partie de la Constitution, un amendement de 2002, déclare le socialisme comme étant irrévocable. Par conséquent, si quelqu'un fait valoir que le régime actuel devrait changer, cette personne aura des problèmes.
    Le code pénal définit en détail ce qui constitue un crime. C'est en grande partie assez normal, mais il y a certains aspects intéressants. Desacato, ou le manque de respect... si quelqu'un manque de respect à l'égard des institutions, des fonctionnaires ou du chef, de la direction, ou de Fidel, cette personne risque l'emprisonnement. Il y a des gens qui sont emprisonnés pour cette raison. Peligrosidad, la dangerosité... les gens vont en prison pour cela en particulier, etc.
    En ce qui concerne les droits fondamentaux à Cuba, on peut dire que la liberté d'expression et la liberté d'association entre autres n'existent pas au sens où nous reconnaissons ces droits au Canada.
    En ce qui concerne la liberté d'expression, eh bien, comme nous le savons, le Parti communiste de Cuba a le monopole de toute la presse électronique et écrite. Il est interdit de critiquer le parti, la direction, la politique publique et d'adopter toute position qui n'est pas celle approuvée par le parti. Les publications, l'enseignement dans les universités et les cercles de réflexion sont gravement limités. La liberté universitaire telle que nous la connaissons n'existe pas, je peux vous l'assurer.

  (1130)  

    Les professeurs se font congédier pour ce qu'ils disent. Les journalistes sont emprisonnés — il y a 29 journalistes en prison parce qu'ils ont dit des choses que le parti n'aimait pas. La liberté d'association? À ce moment-ci, il y a 278 prisonniers politiques. Le monopole du parti unique ne tolère pas d'autres partis politiques.
    Et je ne suis pas d'accord : certains membres de l'opposition à Cuba se sont mêlés aux Américains et les Américains ont bêtement appuyé les membres de l'opposition. C'est une chose très stupide à faire. La grande majorité de l'opposition à Cuba a déclaré vouloir une solution cubaine, et ne veut pas avoir quoi que ce soit à faire avec l'ambassade américaine.
    Je pourrais parler de la liberté de mouvement, qui est limitée; du droit au travail, qui est limité selon le point de vue politique de chacun. Il y a essentiellement un système de passeport interne à Cuba, un système d'identité. Si vous vous trouvez dans une région du pays alors que vous vivez dans une autre, la police peut vous renvoyer chez vous. Cela se produit.
    Si le temps le permet, j'aimerais dire quelques mots au sujet de la politique du Canada à l'égard de Cuba. Depuis 1994, et même avant qu'on la qualifie ainsi, nous avons une politique « d'engagement constructif ». Les objectifs de cet engagement constructif, énoncés par Christine Stewart et élaborés par Axworthy, étaient d'appuyer une évolution positive, pacifique vers une société qui respecte pleinement les droits de la personne et qui représente vraiment les institutions gouvernementales. C'est un objectif louable. Je l'appuie tout à fait.
    Cela devait être possible grâce au commerce normal et à l'investissement étranger, au tourisme et à l'immigration, aux relations diplomatiques respectueuses et correctes et à une aide au développement qui visait des activités de développement démocratique et de promotion des droits de la personne.
    L'engagement constructif a-t-il eu du succès? À certains égards, pour ce qui est de promouvoir les droits de la personne et le développement démocratique, il est évident que cela n'a pas été un succès. Cependant, je dirais qu'il était extrêmement naïf de notre part de nous attendre à ce que nos relations normales en plus de quelques petits programmes d'aide puissent influencer le régime cubain de quelque façon que ce soit.
    Nous avions une variété de programmes, de tout petits programmes, qui visaient à promouvoir les droits de la personne et le développement démocratique. Je pense qu'ils ont été utiles, mais ils étaient très peu nombreux. Le budget total de ces programmes s'élevait à environ 1,3 million de dollars et nous ne pouvions pas vraiment nous attendre à ce qu'ils aient un impact considérable. Et ils n'ont pas eu un tel impact.
    Le Canada devrait-il poursuivre l'engagement constructif? Je dirais oui, à certains égards, mais en ayant une attente plus réaliste de ce que nous pourrions accomplir. Je pense qu'il est toujours positif d'être constructif. Je pense que le Canada a bien fait de maintenir des relations économiques et diplomatiques normales, correctes, avec Cuba au fil des ans; je suis fier de cela. Cela a beaucoup mieux fonctionné que la politique américaine.
    On ne pouvait cependant pas s'attendre à ce que l'engagement constructif permette de réaliser la démocratisation et le respect total des droits de la personne. Je pense que c'était réellement naïf de notre part.
    Devrions-nous maintenir une relation de type constructif? Eh bien, je dirais oui très certainement, mais il faut reconnaître que cela ne va pas changer le statu quo politique à Cuba. À long terme, cela pourrait être avantageux car cela garde les Cubains au courant de la réalité canadienne, de ce qu'est le Canada, et je pense qu'à Cuba, on ne connaît pas très bien notre pays malheureusement — en fait, là-bas on ne connaît aucun autre pays vraiment à part Cuba, à l'exception de Miami — et en connaître davantage au sujet de notre pays ne peut être qu'une bonne chose. Je recommanderais donc de maintenir des relations normales et correctes avec Cuba, sans nous attendre toutefois à ce que nous ayons beaucoup d'impact à court terme.
    Je voudrais ajouter qu'à mon avis Cuba n'a plus besoin maintenant d'aide canadienne au développement. Ce pays accepte l'aide canadienne au développement, mais notre aide est assez mineure. En fait, Cuba fournit sa propre aide au développement à de nombreux autres pays. Le Canada est intervenu à un moment où, je pense, il était très important de montrer à Cuba qu'elle avait un ami et de tenter de lui donner une aide économique et humanitaire, au plus profond de sa crise entre 1992 et 1996.

  (1135)  

    C'était une bonne chose, mais je pense que le moment est venu pour nous de nous rendre compte que Cuba n'a plus besoin de notre aide, car son économie s'est considérablement rétablie. Cuba est passée de la 79e à la 50e place au rang des pays dans le cadre du PNUD selon l'indice du développement humain. Cela est principalement attribuable à un rétablissement du revenu par habitant pour ce qui est du pouvoir d'achat. Les choses ne se sont pas entièrement rétablies — il y a toujours de nombreux problèmes — mais la reprise a été considérable. Donc, je pense que nous devons reconsidérer notre aide au développement à Cuba à ce moment-ci.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur, d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer surtout étant donné le peu de préavis que vous avez reçu.
    Nous allons commencer notre premier tour de questions avec M. Silva.
    Merci beaucoup aux deux témoins d'être venus ici dans le cadre de notre examen de cette question très importante.
    Je suis heureux que vous ayez mentionné, monsieur Ritter, l'approche de l'ancien gouvernement pour des objectifs d'engagement constructif et jusqu'à quel point cela est réaliste. Je me rends compte que les gouvernements se donnent ces objectifs très nobles mais ne mettent pas toujours en place les mécanismes et les ressources nécessaires, et parfois les attentes vont au-delà de ce qui est possible.
    À mesure que nous examinons cette question, il y a un élément qui me préoccupe considérablement. Au sein de la communauté internationale, il y a toujours un débat au sujet des droits politiques et civils, droits qui, je pense, nous préoccupent beaucoup en Occident, et vis-à-vis des droits sociaux et économiques. Bien des gens diraient qu'à Cuba il y a très eu de droits civils et politiques, mais qu'il existe dans une plus grande mesure des droits sociaux et économiques. Par exemple, Cuba a un excellent système d'éducation et de santé. Je ne dis pas cela de quelque façon pour justifier la nature répressive du régime. Je dis tout simplement qu'on a mis davantage l'accent sur un type civique de droits, plutôt que sur d'autres types de droits. Vous pourriez peut-être nous dire ce que vous en pensez.
    Enfin, je veux poser cette question-ci car je ne suis pas certain qu'il y ait un deuxième tour. J'ai entendu dire qu'on utilisait des puces pour surveiller les gens qui étaient libérés des prisons. J'ai entendu dire cela et j'aimerais tout simplement savoir si vous avez entendu quoi que ce soit à ce sujet également.
    Merci beaucoup.
    L'opinion générale veut que les droits sociaux et économiques aient été renforcés, et c'est vrai en grande partie. Grâce à la révolution, l'accès à l'éducation et aux soins de santé a été très rapidement étendu à Cuba, qui s'est ainsi retrouvée, d'une certaine façon, en tête des autres pays d'Amérique latine dans les années 60 dans les domaines de l'éducation, de l'espérance de vie et de tout ce qui découle d'un bon régime de soins de santé. Cuba a remporté un grand succès à cet égard. Cuba a également réduit le chômage officiel pour le convertir en chômage caché, ou en « chômage au travail », si l'on peut dire.
    Je ne veux pas minimiser les réalisations de Cuba, mais je tiens à souligner qu'à l'heure actuelle, Cuba est au sixième rang parmi les pays d'Amérique latine en ce qui concerne l'indice du développement humain et l'indicateur de la pauvreté humaine.
    Autrement dit, dans les 40 ans qui se sont écoulés depuis 1959, les autres pays d'Amérique latine, notamment le Chili, le Costa Rica, l'Uruguay, l'Argentine et la Barbade — j'en oublie quelques autres — ont progressé en fonction de l'indice du développement humain, qui se mesure par les réalisations dans l'éducation et la santé ou l'espérance de vie. Cuba a aussi eu de bons résultats, mais elle a été dépassée par d'autres pays d'Amérique latine, dont certains étaient au départ bien à la traîne par rapport à Cuba.
     Il est également intéressant de noter que l'indicateur de la pauvreté humaine, qui tient compte de facteurs comme l'accès à l'eau potable, l'analphabétisme, le nombre d'enfants qui meurent avant l'âge de cinq ans, etc., place Cuba également au sixième rang. Cuba n'est plus au premier rang des pays les moins pauvres; elle est au sixième rang, et les pays que j'ai nommés figurent plus haut que Cuba dans la liste.
    Les politiques révolutionnaires de Cuba, surtout dans les domaines de l'éducation et de la santé, ont permis d'obtenir des résultats rapides, résultats qui persistent encore. Mais rien n'est parfait, et nous avons des problèmes dans notre régime de santé. Bien sûr, Cuba a de grandes difficultés dans son régime de santé — et aussi dans son système d'éducation. Cuba a maintenu ses progrès, mais d'autres pays ont réalisé davantage et surpassé Cuba.
    Pour ma part, je ne crois pas que l'on puisse compenser l'absence de droits humains d'une nature politique et civile par l'existence de droits sociaux et économiques. Il est possible d'avoir les deux, comme d'autres pays d'Amérique latine l'ont démontré.
    En ce qui concerne les puces, je suis désolé, mais je ne suis pas au courant de cela. Je n'en ai jamais entendu parler auparavant.
    Merci.

  (1140)  

    Je ne sais pas si M. Cotler a des questions à poser maintenant, mais...

[Français]

    J'aimerais réagir à la question que vous venez de poser. Vous avez mentionné qu'on suivait les personnes qui sortaient de prison à Cuba. Est-ce exact?
    Une voix: Oui.
    Mme Dulce-Maria Cruz-Herrera: Vous avez lu cela dans des études faites par des organisations non gouvernementales, et il est possible que cela se passe. Cependant, cela se passe un peu partout dans le monde, même au Canada.
    Le site Web de l'ONU, à la section de la Commission des droits de l'homme, contient les rapports présentés par les États en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de la Convention internationale contre la torture et de la Convention internationale des droits de l'enfant. Je vous invite aussi à consulter les rapports du Canada, qui provoquent parfois de vifs débats et exaspèrent souvent les membres du comité de l'ONU. Vous verrez que même les États et les gouvernements des pays industrialisés ont de la difficulté à protéger efficacement les droits de la personne.
    Les États-Unis, comme vous le savez, n'ont pas reconnu le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale des droits de l'enfant. De plus, ils n'ont pas reconnu le Protocole de Kyoto, et j'en passe. C'est aussi le cas d'autres États.
    Pour cette raison, la situation est très délicate. Quand on étudie la question de la situation des droits de la personne à Cuba, on tombe trop souvent dans la politisation facile, dans un discours qui s'apparente trop souvent à la propagande des États-Unis et, malheureusement, on manque d'objectivité. Effectivement, il y a probablement des prisonniers à Cuba qui sont libérés, suivis et qui ont de la difficulté à trouver un logement et un travail, mais c'est la même chose à Montréal et dans toutes les provinces du Canada.
    Il faut examiner le décalage qui existe à Cuba entre les droits économiques et sociaux et les droits civils et politiques en les mettant en contexte. Il faut regarder la situation dans son ensemble. Je vous rappelle qu'en 2004, les États-Unis ont créé la Commission for Assistance to a Free Cuba, qui est sans précédent dans l'histoire de l'humanité. La loi Helms-Burton et la loi Torricelli n'ont pas non plus de précédent dans l'histoire de l'humanité. Non seulement les États-Unis exercent des pressions diplomatiques et politiques auprès des États dans le cadre des Nations Unies et de l'Organisation des États américains, mais en plus, ils adoptent une loi nationale.
     L'article 3 de cette loi définit minutieusement comment le gouvernement de Cuba devait s'organiser et comment cette transition devait s'opérer. Cette loi a été condamnée par le gouvernement du Canada et celui-ci a adopté une loi pour contrer les mesures extraterritoriales. De plus, lorsqu'il y a eu l'incident de citoyens canadiens qui se sont vu refuser l'ouverture d'un compte par la Banque Royale, le gouvernement du Canada a été obligé d'intervenir et de dire que les dispositions de la loi Helms-Burton n'avaient pas force de loi sur le territoire canadien et qu'il fallait faire attention.
    Malheureusement, la mise en oeuvre des droits civils et politiques à Cuba doit s'analyser dans ce contexte. Les libertés démocratiques sont permises et autorisées dans la mesure où les citoyens ne violent pas la souveraineté de Cuba et ne portent pas atteinte à la stabilité politique du régime.

  (1145)  

     Quand cela se produit, malheureusement, ils sont annihilés. Est-ce une bonne chose? Non, ça ne l'est pas.
    Nous devons passer à Mme St-Hilaire. On a dépassé de quatre minutes le temps accordé à M. Silva.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous deux, madame et monsieur. C'est très intéressant.
     Au cours de la dernière réunion du comité, certains témoins nous ont beaucoup parlé des prisonniers, à savoir s'ils étaient des prisonniers politiques ou non. Qu'en pensez-vous?
    Ma deuxième question fait suite à ce que vous direz sur ces prisonniers, à savoir s'ils sont politiques ou non. Monsieur, vous avez abordé cette question par rapport à l'aide publique au développement. En fait, vous suggérez que le Canada cesse son aide à Cuba. D'autres témoins ont suggéré de suspendre l'aide publique à Cuba tant et aussi longtemps que ces prisonniers seront incarcérés. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
    Madame Cruz-Herrera, j'aimerais connaître votre opinion. À juste titre, vous semblez défendre la souveraineté de Cuba. J'ai cru comprendre que vous souhaitiez, bien que le Canada n'ait pas nécessairement de leçon à donner à qui que ce soit sur le plan des droits humains, qu'il fasse des pressions par la voie démocratique. Recommandez-vous essentiellement que ces pressions se fassent par voie démocratique ou si elles doivent aller jusqu'à l'embargo?
    Ce n'est pas moi qui défends la souveraineté des États. C'est l'ensemble des pays qui ont reconnu la Déclaration universelle des droits de l'homme. La souveraineté des États est l'un des piliers du système des Nations Unies: c'est l'article 1 de la Charte des Nations Unies. C'est l'article 1 de deux pactes. Les États-Unis, le Canada et Cuba l'ont reconnu. Je mentionne ces trois pays parce qu'on est au Canada et qu'on parle des États-Unis et de Cuba. La force de ce principe n'est plus à démontrer.
    Je pense que je me suis mal exprimée. Je n'ai pas dit que le Canada n'avait pas de leçons à donner. Le bilan du Canada en matière de protection des droits de l'homme est remarquable. Ce que je recommandais, c'est que...
    Je suis capable de faire la part des choses. Il y a un problème à Cuba. D'une certaine façon, c'est une nation assiégée. C'est un pays qui est en guerre depuis 50 ans. On n'y lance pas de bombes, parce qu'on n'a pas pu le faire. On l'a fait en 1961, quand on a envahi Cuba. Après, il y a eu la guerre froide, l'ex-Union soviétique et l'effondrement du bloc communiste. Mais à partir de 1990, on a adopté des lois pour renforcer l'embargo. On ne va pas attaquer Cuba, mais on va l'étouffer économiquement, puis il s'effondrera. Malheureusement, l'effondrement n'a pas eu lieu et l'embargo se poursuit. Il faut comprendre que Cuba, pour se protéger... Les États-Unis reprochent à Cuba de ne pas avoir adopté une économie de marché.
    La beauté de l'ONU, créée en 1945, c'est la pluralité des démocraties. D'ailleurs, un des comités des Nations Unies étudie la question des démocraties renouvelées et rétablies. Tous les ans, on produit des rapports très intéressants sur l'importance de favoriser la pluralité des démocraties dans le monde.
    La démocratie néo-libérale, qui est en vigueur au Canada et aux États-Unis, n'est pas la meilleure démocratie au monde. Donc, les États-Unis ne peuvent pas l'imposer. De quel droit les États-Unis se permettent-ils d'adopter une loi pour dire à Cuba quelle forme de démocratie adopter, soit la démocratie néo-libérale, fondée sur tel type d'économie? De quel droit le font-ils, alors que la Charte des Nations Unies dit que tous les États sont égaux? L'égalité souveraine, c'est cela. Les États ne peuvent pas intervenir dans les affaires intérieures des autres États. Le droit à l'autodétermination d'un peuple, ce n'est pas rien. C'est le pilier du système des Nations Unies.
    Pour se défendre, Cuba dit à ses citoyens qu'ils peuvent s'exprimer, mais que s'ils passent aux actes, s'ils concrétisent les messages qu'ils reçoivent sur Radio Martí, on appliquera les lois. Cuba fait-il la bonne chose et de la meilleure façon? Peut-être pas.
    Le peuple cubain est mature et est prêt pour le pluripartisme. À Cuba, plusieurs partis politiques peuvent coexister au sein de l'assemblée nationale, dans le mesure où ces partis politiques participent au débat démocratique, font avancer la démocratie et sont financés selon les lois cubaines. Une loi sur le financement des partis politiques, comme celle qui existe au Canada et ailleurs, sera éventuellement adoptée par Cuba.
    J'aurais de sérieuses difficultés avec le fait qu'un parti politique financé par la Fondation cubano-américaine ou en vertu du chapitre 3 du rapport présenté par la Commission for Assistance to a Free Cuba siège à l'assemblée nationale de La Havane.

  (1150)  

     Je vous rappelle que ce rapport de 400 pages, qui a été présenté par Colin Powell en 2004 et ensuite par Condoleezza Rice l'année dernière, a porté à une quarantaine de millions de dollars le financement des organisations de la société civile cubaine, sans définir ce qu'est cette société civile. Cela se fait ouvertement. Essayons d'imaginer que le gouvernement iranien ou une organisation islamique quelconque décide de financer ouvertement un parti politique au Canada, à coups de millions de dollars, dans le but de faire avancer la cause des droits des Arabes ou des talibans. Ce ne serait vraiment pas beau.

  (1155)  

    Merci. C'est comparable à ce qu'ont fait les États-Unis quand ils ont subventionné Solidarité en Pologne, au cours des années 1980. C'était épouvantable. Monsieur Khan.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame, êtes-vous en train de nous dire que Cuba est une société parfaite, un pays parfait, et qu'on n'y trouve aucun problème de droits de la personne? J'ai bien de la difficulté à le croire.
    J'ai aussi une question pour M. Ritter au sujet de l'augmentation du bien-être économique dans ce pays. Cela a-t-il permis d'améliorer la situation des droits humains, ou ces droits sont-ils encore bafoués?
    On fait souvent valoir avec raison que lorsque l'économie cubaine s'améliore, sa situation politique se resserre. Il suffit d'examiner l'histoire pour voir que c'est vrai en partie. Par exemple, au début des années 1990, l'économie cubaine était confrontée à de grandes difficultés, et le gouvernement cubain cherchait de nouvelles idées. Il était réceptif à de nouvelles idées. L'une des nouvelles idées auxquelles il se montrait ouvert était la mise en place d'un régime économique à l'occidentale, mais cette idée a fait l'objet d'une grande opposition au sein du pays. Puis, lorsque l'économie s'améliore, le gouvernement se sent plus confiant et il peut serrer la vis.
    Je ne crois pas qu'il existe un lien direct entre la prospérité économique et les droits de la personne. À mon avis, ce rapport n'est ni inversement proportionnel, ni directement proportionnel. Ce sont des choses distinctes.
    À ce propos, je dois avouer que je ne suis pas d'accord avec l'opinion qui veut que les États-Unis soient la source de toutes les irrégularités politiques à Cuba. C'est l'argument que fait valoir le gouvernement à Cuba. C'est l'argument que Castro a toujours défendu. Il dit qu'il faut faire fi des libertés civiles fondamentales telles que nous les définissons. Il dit qu'il faut supprimer ces libertés parce qu'elles sont utilisées par la mafia de Miami, par les États-Unis, pour pervertir le régime. Il est certain que les États-Unis ont fait des choses stupides. Sa politique de désengagement destructif a été loin d'être productive, mais je ne peux pas blâmer les États-Unis entièrement pour le maintien du régime à caractère totalitaire que l'on trouve à Cuba.
    Permettez-moi de revenir à une question que Mme St-Hilaire a posée au sujet des prisonniers politiques. On pourrait discuter de la question de savoir si ceux qu'on appelle des prisonniers politiques sont vraiment des prisonniers politiques ou non. Cependant, d'après la Commission cubaine des droits de la personne... J'ai ici sous les yeux une liste de toutes les personnes que cette organisation reconnaît ou accepte comme étant des prisonniers politiques. Amnistie internationale mène une campagne épistolaire à l'endroit de 78 des personnes qui figurent à cette liste. Cela signifie qu'Amnistie internationale reconnaît que ces personnes sont des prisonniers politiques. À mon avis, la vaste majorité d'entre elles ne sont pas des agents des États-Unis. Ce sont des personnes qui ont peut-être commis des actes stupides. D'autres personnes, qui ne sont pas incarcérées, ont accepté de l'aide des États-Unis —
    Monsieur Ritter, combien y a-t-il de prisonniers en détention à l'heure actuelle? En connaissez-vous le nombre? Il doit y en avoir beaucoup plus que 78.
    Voici la liste. D'après cette liste, que vous pouvez consulter, il y en a 283.
    Des prisonniers politiques?
    Une voix: Oui, monsieur.
    Une voix: Puis-je avoir un exemplaire de ce document?
    Le président: Il vous reste encore du temps.
    Comment souhaitez-vous répondre à cette observation? Les États-Unis servent-ils de prétexte? Vous n'avez pas mentionné quelles améliorations ont été apportées en matière de droits de la personne, du moins je ne vous ai pas entendu en parler. La liberté de presse existe-t-elle comme elle le devrait? Les journalistes sont-ils jetés en prison s'ils s'expriment librement? Prétexte-t-on qu'ils ont été appuyés par les Américains?
    Il doit bien y avoir de meilleures solutions. Si vous avez des propositions à nous faire, nous aimerions les entendre.

  (1200)  

[Français]

    J'aimerais aborder la question des prisonniers politiques à Cuba. Au début de mon intervention, j'ai dit qu'il fallait analyser la situation des droits de l'homme à Cuba en lien avec le conflit cubano-américain. La situation des droits de l'homme a toujours été utilisée comme argument par les États-Unis pour justifier sa politique à l'égard de Cuba. Ils ont toujours présenté Cuba comme un État totalitaire qui réprime les droits humains. En conséquence, les personnes à Cuba qui s'opposent au régime castriste deviennent des prisonniers politiques.
    Est-ce qu'il y a des prisonniers politiques? Je pense que oui, dans la mesure où des personnes ont commis des actes qui, selon le gouvernement cubain, ont déstabilisé le régime politique.
    Il faudrait se référer, par exemple, au rapport que Cuba a présenté lorsque le Groupe de travail sur la détention arbitraire est allé travailler à Cuba. Il est allé faire une visite à Cuba pour connaître les conclusions du rapport de ce comité.
    Cuba a-t-il agi selon les normes internationales? C'est bien ce que vous voulez savoir, n'est-ce pas? Dans la mesure où ces prisonniers politiques ont subi des procès équitables, ont été représentés par des avocats et ont été punis selon les lois cubaines ou selon la partie du Code criminel qui définit l'activité de ces prisonniers, je dirais qu'officiellement, l'État a agi selon les lois. Maintenant, il faut considérer toutes les questions subjectives.
    Quand je lis tous ces rapports concernant les prisonniers politiques... D'ailleurs, je veux attirer votre attention sur la diversité des arguments, la profusion des rapports qui portent sur cette question. Personnellement, je suis un peu confuse, parce que chaque organisation avance des arguments parfois différents, parfois contradictoires. C'est un peu difficile de s'y retrouver, mais il est certain qu'il y a des questions subjectives. De toute évidence, il y a des prisonniers qui clament leur innocence. Ils disent être innocents et ne pas avoir agi contre la sécurité de l'État. D'un autre côté, on a un procès, des témoins et même, paraît-il, des agents de l'État qui se sont infiltrés au sein de ces mouvements pour vérifier ce qui s'y passait. Ils ont témoigné. Il y a donc des questions subjectives auxquelles il faut porter attention.
    J'aime faire la comparaison et considérer les choses sous différentes perspectives. Ici, au Canada, et aux États-Unis, il y a des prisonniers politiques. Aux États-Unis, surtout, il y a beaucoup de prisonniers politiques. La situation des prisonniers politiques est complexe. Il faut faire très attention lorsqu'on veut analyser la situation des prisonniers politiques à Cuba.
    Avant qu'on passe à M. Marston, pouvez-vous préciser qui sont les prisonniers politiques au Canada? Vous venez d'affirmer qu'il y a eu des prisonniers politiques ici, au Canada, et aux États-Unis. Qui sont les prisonniers politiques au Canada?
    Je ne sais pas s'il y a des prisonniers politiques au Canada. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a des prisonniers politiques un peu partout dans le monde. Il y en a certainement aux États-Unis.
    Y a-t-il des prisonniers politiques au Canada?
    Je n'ai pas l'information nécessaire pour répondre à votre question.
    Il y a deux minutes, vous disiez qu'il y avait eu des prisonniers politiques au Canada. D'accord.
    Monsieur Marston, c'est à vous.
    Une voix: Eh bien oui, il y en a eu en octobre 1970.
    Le président: Oui, je suis d'accord, mais cela fait 37 ans.

  (1205)  

    Il y a eu des prisonniers politiques. La situation des prisonniers politiques québécois était très complexe à l'époque. Chaque situation demande une analyse particulière, tout simplement.
    Il me semble que vous changez constamment d'opinion.
    Monsieur Marston, allez-y.

[Traduction]

    Le Canada veut favoriser la démocratie à Cuba, et je ne peux qu'être d'accord avec ceux qui disent que l'approche américaine est mauvaise. Cela me rappelle une analogie que j'ai entendue il y a plusieurs années au sujet de deux dirigeants de la mafia qui essayaient de mettre fin à une guerre de territoire. La vérité se trouve généralement au milieu, dans de tels cas.
    Je suis même prêt à reconnaître que certains détenus au Canada peuvent être considérés comme des prisonniers politiques, car ils sont détenus en vertu de certificats. Ils ne sont pas vraiment en prison. Mais nous pourrions en débattre à un autre moment.
    Monsieur Ritter, comment l'embargo imposé par les États-Unis influe-t-il à votre avis sur l'indice du développement humain?
    Je pense que l'embargo a fait du mal à Cuba et, qu'en général, la relation avec les États-Unis lui a aussi fait du mal. J'insisterais davantage sur la seconde. La relation générale avec les États-Unis a placé Cuba dans une sorte de mode de conflit de bas niveau avec les États-Unis qui l'a forcée à investir beaucoup dans son armée dès 1960. Le plus gros tort que les États-Unis ont fait à Cuba, c'est le climat d'hostilités générales qui a obligé Cuba à renforcer son armée et à investir énormément à perte.
    En ce qui concerne le volet économique de l'embargo, la production de l'île est en difficulté. Quel que soit le produit, les approvisionnements sont limités par la nature de l'économie. Cuba pourrait exporter d'énormes quantités de sucre, mais la production s'est effondrée et est passée de 8,5 millions de tonnes à 1,2 million de tonnes cette année. C'est le secteur socialiste. Le nickel a prospéré avec Sherritt. Il rapporte beaucoup. La grande contrainte de l'économie cubaine, c'est sa capacité d'approvisionnement, plus que le volet économique de l'embargo sur le plan des échanges.
    Cuba peut obtenir tout ce qu'elle veut des autres pays qu'elle aurait pu obtenir des États-Unis, si bien que ce n'est pas une grosse perte. En revanche, si vous considérez le tourisme, les États-Unis seraient une source majeure de touristes pour Cuba. Ça l'était déjà il y a deux ans, avant que l'administration Bush resserre encore les restrictions. Si le tourisme était libéralisé, l'île profiterait énormément d'un immense afflux de touristes américains, venant des hospices pour vieillards, de touristes médicaux, d'amateurs de soleil et de sable, de congressistes, etc. L'embargo a fait beaucoup de mal à Cuba car il a empêché les Américains de s'y rendre.
    Je dirais que les conséquences sont très mitigées. Cuba a souffert de l'embargo mais pas autant qu'elle le laisse entendre. Je ne pense pas que l'embargo soit à l'origine de tous les problèmes de l'île. Beaucoup d'entre eux ont été créés par les Cubains eux-mêmes. L'absence de commerce n'a pas été l'effet le plus nuisible de l'embargo; ils sont dans d'autres secteurs.
    Merci.
    Quand on connaît les touristes américains à Hawaii et à Cancun, je ne suis pas sûr que c'est ce que je voudrais voir à Cuba. J'y suis déjà allé deux fois.
    Madame Cruz-Herrera, dans votre exposé, vous avez mentionné plusieurs rapports. J'aimerais en avoir la liste pour pouvoir les consulter.
    Qu'est-ce qu'avait à voir avec cela votre commentaire sur le tourisme?
    C'était en réponse au fait qu'il a dit qu'il serait avantageux pour Cuba si des touristes américains s'y rendaient. Je ne suis pas convaincu que ce serait avantageux.
    Les touristes canadiens sont plus aimables que les touristes américains.
    Tout à fait. Je n'en ai aucun doute.
    Vous avez parlé d'un environnement en évolution et de la mondialisation et de leur effet sur les droits de la personne à Cuba? Pourriez-vous nous en dire davantage?

  (1210)  

[Français]

    La question de la mondialisation est si complexe que je n'aurai pas le temps de le faire. Je vous rappelle tout simplement que nous vivons dans un monde extrêmement « connecté ». Les États-Unis, qui sont les maîtres de la mondialisation et qui guident la mondialisation depuis quelques années, disent justement aux pays du Sud, aux pays en développement, d'ouvrir leurs frontières, de libéraliser leur commerce, d'être flexibles, qu'il faut commercer avec tout le monde, être ouvert au commerce et qu'ensuite ces pays vont se développer, produire plus de richesses et sortir de la pauvreté. Or, dans le cas de Cuba, c'est exactement le contraire. On bloque les frontières. Dans le cas de Cuba, cela ne s'applique pas. Cuba et les États-Unis sont à 90 milles de distance, je crois. Autrefois, ils étaient des partenaires. En 1959, les États-Unis étaient le premier partenaire commercial de Cuba. Ce serait très intéressant pour les deux de redevenir des partenaires commerciaux.
     Il y a des choses qui sont déjà faites. Vous savez que les agriculteurs ont fait énormément de pressions auprès du gouvernement américain et que maintenant, grâce à cette loi, l'Agricultural... — je l'ai ici dans mon texte, je peux vous fournir les détails de cette loi —, Cuba est devenu le 25e acheteur en importance de produits agricoles américains. Les agriculteurs américains ont fait beaucoup de pressions auprès du congrès parce que pour eux, Cuba représente un marché fantastique. Il y a beaucoup d'échanges qui se font à ce niveau. Maintenant, en ce qui a trait aux produits agricoles, ça va. Il y avait des restrictions. Souvent, les Cubains devaient payer comptant quand ils allaient acheter les produits agricoles et cela provoquait beaucoup de problèmes parce, généralement, tout le monde peut acheter à crédit. Les Cubains devaient payer comptant et il y a eu des assouplissements parce que, bien évidemment, souvent, ils devaient passer par des banques de pays tiers. C'était extrêmement coûteux pour les Cubains et, en plus, ils avaient moins de liquidités. Donc, il y a des choses qui ont été faites pour assouplir la situation.
     Je parlerai maintenant des conséquences de la mondialisation sur les droits de l'homme à Cuba. J'y fais référence dans mon texte, mais dans un monde où nous sommes tous « connectés », comment une île, un tout petit pays, avec des ressources limitées, peut-il survivre dans un monde où, pour survivre et se développer, il faut commercer constamment et avoir des échanges continuels avec le reste de la planète? Dans le cas de Cuba, le pays est constamment bloqué et isolé. C'est clair que la mondialisation va avoir un impact local à Cuba, d'autant plus que la mondialisation est contrôlée ou guidée par les États-Unis.
    En ce qui concerne l'impact sur les droits de la personne de l'embargo, de la politique économique américaine à l'égard de Cuba, j'ai ici quelques exemples, mais si vous ne voulez pas...
    Nous n'en avons pas le temps.
    C'est parfait, je vais résumer.
    Vous pouvez continuer, mais on a déjà dépassé de trois minutes le temps alloué. On va passer à M. Sorenson, please.
    Si vous ne voulez pas la version officielle du gouvernement cubain parce qu'elle vous semble —
    Madame, excusez-moi. Malheureusement, chaque tour de table dure sept minutes. On a presque pris 10 minutes pour ce tour-ci et, selon la règle du comité, il faut qu'on passe au prochain député. Vous pourrez peut-être livrer vos informations prochainement. Monsieur Sorenson, c'est à vous.

[Traduction]

    Pardonnez-moi mes allées et venues; j'ai dû répondre à quelques appels.
    Je vous remercie tous les deux de vos exposés. Nous entendons quantité de points de vue sur ce qui se passe à Cuba, mais chacun admet, je crois, qu'il y a des atteintes aux droits de la personne. Des gens qui dans une société démocratique normale ne seraient pas en prison sont détenus là-bas. Tout l'Occident et tous les pays démocratiques voient dans Cuba l'occasion un jour d'appliquer les principes et les valeurs de la démocratie que nous jugeons importants. Je pense que c'est important dans notre intérêt national et dans l'intérêt de Cuba.
    Nous sommes un sous-comité du Comité des affaires étrangères. Le Comité des affaires étrangères effectue actuellement une étude sur le développement démocratique, sur la façon dont le Canada peut être présent et ce qu'il peut faire pour changer les choses.
    Nous savons que tôt ou tard à Cuba l'occasion se présentera d'apporter des changements. La plupart des gens comprennent que tant que Fidel tient les rênes du pays, les options sont limitées, mais la plupart des pays libres et démocratiques pensent que Cuba a des chances de changer à son départ.
    Le Canada a recours à divers moyens pour favoriser le développement démocratique ou apporter son aide, peu importe comment vous voyez cela. Vous avez tout à fait raison, monsieur Ritter, quand vous dites que le Canada n'est pas un gros bailleur de fonds pour Cuba. On parle d'une dizaine de millions de dollars par année. Je ne sais pas si ce sont les derniers chiffres, mais c'est celui que j'ai. Il est un des plus grands pays donateurs; le Canada est encore un donateur majeur.
    Le Canada donne aussi aux pays qui ont une économie forte, qui la renforcent, mais il y a des régions dans ces pays où nous pouvons changer les choses. Peut-être est-ce de l'aide humanitaire ou de l'aide à la gouvernance. Le Canada est à Cuba pour aider les Cubains à parvenir à un développement durable à long terme, peut-être dans le secteur de la gouvernance.
    Le comité permanent a fait une étude assez approfondie d'Haïti, pour sûr un État déliquescent. C'est un pays dans lequel nous avons balancé des centaines de millions de dollars, quasiment en pure perte. Une des choses que nous avons apprises en comité, c'est que peu importe qui détient le pouvoir, on ne sait pas gouverner. On peut bien élire un député mais il ne sait pas s'acquitter de ses fonctions. Il ne sait pas ce qu'on attend de lui ou comment faire son travail. Les députés n'ont pas de moyens. À l'Assemblée nationale, il y a un téléphone au bout du couloir pour tout l'immeuble : un seul téléphone, pas de papier, rien.
    Même si Mme Cruz-Herrera a dit que l'on ne devrait pas se mêler de quelque forme de développement des partis politiques, c'est un jugement difficile. J'admets qu'on peut s'y prendre de travers. On peut essayer de montrer aux gens comment gouverner et ce n'est pas à nous de financer des partis politiques, mais je n'ai vraiment pas apprécié votre analogie quand vous avez dit : Vous avez le Bloc, le NPD, les conservateurs, les libéraux et que diriez-vous s'il y avait un autre parti politique financé par l'Australie? Ce n'est pas le cas. Nous sommes un pays démocratique et eux ne vivent pas en démocratie. C'est un régime autocratique. Il n'y a personne là-bas qui soit prêt à prendre les rênes et à s'acheminer vers la démocratie et, je crois, dans la démocratisation. Il est très rare que deux pays démocratiques s'en prennent l'un à l'autre et on voit très rarement le genre d'atteintes aux droits de la personne que l'on observe là-bas.

  (1215)  

    Dans une certaine mesure, je ne suis pas d'accord pour dire que nous ne devrions plus les financer, mais comment pouvons-nous mieux nous positionner ou comment pourrions-nous mieux diriger ce financement de façon à ce que, lorsque la possibilité se présente, nous puissions obtenir l'effet voulu?
    Monsieur Sorenson, malheureusement, nous limitons ce tour à des interventions de cinq minutes et vous avez pris cinq minutes et demie pour poser votre question.
    Je peux donc considérer que c'était une observation ou je peux être généreux et permettre aux témoins de répondre très brièvement s'ils le souhaitent.

  (1220)  

    Oui, ça va.
    C'est la question à 10 millions de dollars. Comment pouvons-nous intervenir dans les affaires internes d'un autre pays d'une façon légitime, d'une façon acceptable? Je ne le sais pas.
    Essentiellement, je pense que notre engagement constructif résolvait la quadrature du cercle ou nous permettait de faire ce que nous pouvions faire poliment. Je ne pense pas que c'était bien reçu par Cuba. J'ai l'impression qu'ils se moquaient bien de certains de nos programmes bien intentionnés.
    Voulez-vous parler des programmes de l'Université Carleton ou de ceux du Canada?
    Des programmes du Canada dans le domaine des droits de la personne. Et nous avions des choses intéressantes. Les 14 points, dont certains portaient sur les droits de la personne étaient utiles — l'échange de parlementaires, etc. Je ne suis pas certain que l'échange de parlementaires ait vraiment servi à quelque chose, mais il a peut-être eu certains avantages. Il a peut-être permis d'ouvrir les yeux de certains Cubains.
    J'ai l'impression qu'il n'y a pas de solution magique, mais qu'il est valable de maintenir des communications constructives, continues, normales, sans s'attendre à ce qu'il y ait quelque conversion miraculeuse que ce soit, mais que l'on continue tout simplement à faire des progrès en maintenant un dialogue poli et respectueux.
    Très bien.
    Madame Cruz-Herrera, avez-vous une brève réponse à donner?

[Français]

    Vous avez demandé ce que le Canada pouvait faire. Je reviens aux recommandations que j'ai déjà formulées. Le gouvernement canadien peut communiquer avec les gouvernements cubain et américain pour tenter de rétablir la relation bilatérale. Il y a des moyens de le faire.
    Je vous rappelle que Bill Clinton ne voulait pas l'adoption de la loi Helms-Burton de 1996. Il a été obligé d'accepter en raison de la pression et du lobby des Cubains qui habitaient à Miami. Bill Clinton ne voulait pas, mais il a cédé parce qu'il voulait être président des États-Unis.
    Le Canada peut encourager le gouvernement des États-Unis à cesser sa politique hostile à l'égard de Cuba. D'ailleurs, même la Rapporteure spéciale sur les droits de l'homme, Christine Chanet, a bien dit dans son rapport sur la situation des droits de l'homme à Cuba que ce climat de tension était peu propice à la jouissance des droits civils et politiques à Cuba. Je ne dis pas que c'est l'unique cause et je n'approuve pas chacune des décisions que prend le gouvernement cubain en ce qui concerne les prisonniers politiques, mais il y a un contexte.
    Tout à l'heure, au sujet de l'exemple que j'ai donné, vous avez dit que cela ne s'appliquait pas ici parce que c'est un pays démocratique et que ce n'était donc pas la question. Je vous ramène au cas de Cuba, qui est particulier. Il y a une situation particulière et, malheureusement, même si le gouvernement cubain voulait laisser tous ses citoyens faire ce qu'ils veulent, il serait un peu mal pris. Comme n'importe quel gouvernement qui est assiégé et bloqué, il craint une déstabilisation politique majeure.

[Traduction]

    Merci, monsieur Sorenson. Vous avez déjà dépassé de quatre minutes le temps qui vous était alloué.
    Monsieur Cotler.
    Je vais faire une faveur à Kevin. Je vais tout simplement reprendre sa question, en la formulant peut-être d'une autre façon, et la poser à M. Ritter.
    Une bonne partie de votre témoignage portait sur le fait que l'engagement constructif ne changera pas vraiment le statu quo, mais qu'il ne peut nuire et qu'il pourrait même avoir certains avantages. Je pense que le thème auquel vous avez fait allusion dans votre réponse, monsieur Ritter, est encore une fois celui de la stabilité pour ce qui est de la politique du Canada — maintenir les communications, un dialogue respectueux, et cela pourrait permettre d'apporter certaines améliorations.
    Y a-t-il quoi que ce soit en particulier que le Canada pourrait faire pour améliorer la situation en ce qui concerne les droits de la personne, que ce soit en insistant sur la libération de dissidents politiques ou sur l'abrogation de certaines lois concernant la criminalisation des dissidents, etc.? Y a-t-il quoi que ce soit en particulier que nous devrions faire et qui pourrait nous permettre d'avoir un impact?

  (1225)  

    C'est une bonne question. Ici, je reviendrais à ce qu'a dit ma collègue. On pourrait entre autres faire des pressions auprès des États-Unis pour que ce pays normalise ses relations avec Cuba. Je pense que si quelque chose peut mener à une lame de fond à Cuba pour amener la démocratisation, ce serait certainement cela. Le prétexte qu'utilise le gouvernement pour maintenir le régime actuel c'est les États-Unis, sa politique à l'égard de Cuba.
    Un détail que j'aimerais mentionner, c'est qu'il semble qu'à plusieurs reprises les États-Unis ont tenté de sonder la situation pour voir s'il serait possible de changer leurs relations avec Cuba — à l'époque de Jimmy Carter, par exemple, et sous Clinton également. La réponse des Cubains a été la crise de Mariel au cours de laquelle ils ont vidé les prisons et où les détenus sont partis aux États-Unis. Sous Clinton, ils ont abattu les avions des Frères du secours. Cela a été la réponse du gouvernement cubain.
    On pourrait faire valoir que même si le gouvernement cubain veut blâmer les États-Unis pour tous ses problèmes, en fait l'embargo américain et ses relations avec les États-Unis sont le meilleur ami de Fidel. C'est pour lui un moyen de maintenir sa légitimité.
    Vous avez posé une très bonne question, mais je n'ai pas de bonne réponse à vous donner pour ce qui est de ce que nous pourrions faire exactement. Il serait peut-être utile de maintenir l'échange de parlementaires. Le Parlement cubain est tout à fait différent du nôtre. Il est dominé par le Parti communiste. Il ne siège que de quatre à six jours par an. C'est tout. C'est essentiellement un Parlement qui approuve automatiquement les décisions du parti qui le domine. Les ministres sont essentiellement des membres du parti et sont du bureau politique ou du comité central. Cependant, il se peut fort bien que ce genre d'échanges puisse être utile à long terme. Encore une fois, il n'y a peut-être pas d'impacts à court terme.
    Je suis désolé, ce n'est pas une très bonne réponse.

[Français]

    Je vais aussi demander à Mme Cruz-Herrera s'il y a des démarches spécifiques que le Canada pourrait entreprendre pour améliorer la condition des droits de la personne à Cuba.
    Je vous rappelle que plusieurs prisonniers politiques, d'après ce que j'ai pu lire, ont été libérés en 2005. Il y en a moins, paraît-il. Je me perds quand je commence à m'informer sur cette question parce qu'il y a beaucoup de renseignements. Certains disent que ces prisonniers sont maltraités, d'autres qu'ils sont très biens traités. Les prisonniers politiques à Cuba pourraient avoir des liens avec des organisations religieuses européennes, par exemple, mais — et je ne sais pas pourquoi — c'est toujours avec des organisations américaines ou avec le gouvernement américain qu'ils en ont. Étant donné que Cuba est perpétuellement en guerre avec les États-Unis, ces gens deviennent automatiquement suspects. Malheureusement, c'est un dialogue de sourds.
     Toutes ces tentatives d'attentat contre Cuba, orchestrées à partir du territoire américain et, au cours des années 1990, ces commandos envoyés des États-Unis sur le territoire cubain pour commettre des attentats dans des garderies et des cinémas ne sont pas des choses normales. Le gouvernement cubain reste campé sur ses positions et ne veut pas céder de terrain. C'est donc très politique.
    C'est pourquoi il serait important, à mon avis, qu'il y ait un rapprochement entre les deux gouvernements et que l'embargo, de même que toutes ces contraintes et pressions exercées par le gouvernement des États-Unis, soient levés, non seulement au moyen des lois et de la politique américaines, mais également par l'entremise de divers organismes des Nations Unies. Il faudrait un changement d'approche de la part des États-Unis à l'égard de Cuba.
    On serait alors mieux placés pour exiger quoi que ce soit de Cuba. Beaucoup de gens se sont levés sur la scène internationale pour dire qu'il s'agissait vraiment de la politique de deux poids deux mesures. Ça inquiète beaucoup de gens au sein de la communauté internationale.

  (1230)  

    Merci.
    Je vais prendre cinq minutes.

[Traduction]

    Monsieur Ritter, vous recommandez de garder le cap et de mettre fin à l'intervention de l'ACDI, que vous avez qualifiée de mineure et d'inefficace.
    Parmi les témoins que nous avons entendus, certains partagent votre analyse de la situation à Cuba mais préconisent une offensive plus robuste sur le plan diplomatique. Ils ont également soutenu que le Canada devrait user de son influence auprès de Cuba pour encourager le régime à libérer les prisonniers politiques, particulièrement ceux qui ont été arrêtés en 2005.
    C'est la voie qu'ont préconisée la FOCAL, la Christian Labour Association, les représentants du Parti social-démocrate cubain au Canada de même que d'autres ONG. Êtes-vous d'accord avec cette recommandation? Tous ces organismes ont déclaré que le Canada ne s'était pas montré assez ferme en exhortant publiquement le régime cubain à libérer les prisonniers politiques. Partagez-vous ce point de vue? Croyez-vous que nous pourrions agir davantage dans ce sens? Brièvement, s'il vous plaît.
    Je suis persuadé que le Canada pourrait faire davantage, mais j'ignore si ses démarches auraient beaucoup d'effet en ce moment. Cependant, on peut s'attendre à des changements à Cuba, particulièrement quand Raoul ne sera plus dans le paysage, ce qui ne tardera pas beaucoup étant donné qu'il n'a que cinq ans de moins que Fidel. Enfin, il va un jour disparaître du paysage politique cubain et, en l'absence de Fidel et en l'absence ou la présence de Raoul, ce genre de pressions pourrait avoir plus d'effet.
    À mon avis cependant, en agissant de la sorte, nous épuiserions le capital politique que nous avons à l'heure actuelle à Cuba — et j'ignore combien nous en avons — pour obtenir des résultats minimes. Ce serait peut-être la bonne décision et nous devrions peut-être opter pour cette voie. Mais quant à savoir si cela donnerait des résultats —
    Je vous avoue que ce qui me dérange dans ce débat, et c'est ce que l'on constate aujourd'hui et dans de nombreux cas, c'est cette tendance typiquement canadienne à toujours envisager les choses selon le point de vue de nos voisins du Sud au lieu de réfléchir de façon indépendante. Nous semblons toujours être en réaction à la politique américaine.
    J'aimerais connaître votre avis au sujet de la question suivante. Sous l'impulsion de la République tchèque, l'Union européenne a adopté une approche réfléchie et indépendante dans le dossier des droits de la personne à Cuba, en accordant un traitement de faveur évident aux dissidents. Comme vous le savez, l'ambassade de l'Union européenne invite des dissidents notoires à des réceptions organisées au siège de la mission de l'UE à La Havane. La République tchèque invite des dissidents à des conférences et leur offre un soutien intellectuel et pratique qui ne peut être perçu par le régime castriste comme menaçant sa sécurité. Le Canada ne pourrait-il pas s'inspirer de l'approche tchèque, soit une défense indépendante et énergique des droits de la personne, en donnant son appui aux prisonniers politiques et aux dissidents? Voilà pour ma première question.
    Et voici ma deuxième. Je ne sais pas si vous connaissez Mme Christine Chenet. Mme Cruz-Herrera a fait de nombreuses références au rapport que Mme Chenet a présenté au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme au sujet de Cuba. Dans ce rapport, Mme Chenet formule des recommandations et j'en résumerai quelques-unes.
    Elle recommande au gouvernement de Cuba de prendre les mesures suivantes : mettre fin aux poursuites intentées contre les citoyens ayant exercé des droits garantis par la Déclaration universelle des droits de l'homme; libérer les prisonniers qui n'ont pas commis d'actes violents; revoir les lois qui permettent d'intenter des poursuites criminelles contre des personnes ayant exercé leur liberté d'expression, d'association ou de participation à des manifestations, par exemple; respecter, sans exception, le moratoire sur l'application de la peine de mort; réformer les règles régissant les poursuites criminelles pour les rendre conformes aux principes de la Déclaration universelle; créer un organisme indépendant habilité à recevoir les plaintes de personnes qui estiment qu'on a bafoué leurs droits fondamentaux; revoir la réglementation qui s'applique aux voyages à destination et en provenance de Cuba afin de garantir la libre circulation aux termes de la Déclaration universelle; autoriser les organisations non gouvernementales à se rendre à Cuba; favoriser le pluralisme dans les associations, les syndicats, les médias et les partis politiques; et enfin, adhérer au Pacte international relatif aux droits civils et politiques de même qu'à ses protocoles facultatifs.
    Premièrement, le modèle tchèque vis-à-vis de Cuba pourrait-il être pour le Canada un point de repère utile? Et deuxièmement, et cette question s'adresse à vous deux, êtes-vous contre certaines des recommandations de Mme Chenet que je viens de résumer?

  (1235)  

    Tout d'abord, je souscris à toutes ces recommandations. Je souhaiterais avoir une baguette magique pour qu'elles soient mises en oeuvre.
    Je pense que plutôt que le Canada fasse cavalier seul et adopte l'approche tchèque, si un grand groupe de pays —
    Mais acceptez-vous ma description générale de l'approche tchèque?
    Oui, absolument.
    Je pense que si le Canada, de concert avec l'Europe et certains pays d'Amérique latine ou peut-être du Japon et de l'Australie — L'effort unifié d'un groupe plus nombreux de pays pourrait aboutir à certains avantages. Cuba serait peut-être plus encline à écouter l'Europe et le Canada si nous avions un discours commun. Actuellement, l'Union européenne n'en a pas. Les positions européennes sont formulées et ensuite on constate que l'Espagne ou d'autres pays n'y adhèrent pas. Si l'approche était mieux coordonnée entre les pays de même mentalité que le Canada, nous pourrions exercer plus d'influence, et je souhaiterais que cela soit une plus grande influence. Il se peut que lorsque Fidel ne sera plus là, les choses aillent mieux.
    Le Canada devrait-il lui-même faire valoir ce point de vue — je pense que oui. Je pense que nous ne devrions pas cesser de faire connaître notre point de vue à Cuba. Nous devrions poursuivre les échanges constructifs, politiquement corrects, etc. Nous pourrions contrarier énormément le gouvernement cubain si, explicitement et en permanence, nous nous accrochions aux recommandations de l'observateur des Nations Unies. Donc, de façon générale, je pense assurément que ce genre de pressions serait utile, surtout si elles étaient coordonnées. Toutefois, la question de savoir si nous devons offrir de l'aide est connexe mais distincte.
    Merci.
    Malheureusement, je dois avoir pour moi les mêmes exigences que pour les autres et je pense que j'ai utilisé sept ou huit minutes pendant un tour de cinq minutes.
    Je tiens à remercier nos deux témoins. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir sur la Colline parlementaire nous faire part de vos opinions et de votre expérience. Merci à tous deux.
    Nous allons maintenant libérer nos témoins afin que le comité discute de ses travaux futurs.
    Tout d'abord, quelques rappels sur les travaux déjà accomplis.
    La greffière me dit, monsieur Cotler, que votre motion sur l'Iran ne précisait pas explicitement qu'elle devait être renvoyée au comité principal. Elle voudrait des précisions là-dessus. Je pense que nous avions nettement l'intention de la renvoyer au comité principal. Je pensais que cela avait été fait. J'ai découvert au début de la séance que cela ne l'avait pas été. Pourriez-vous formuler cela sous forme de motion? Je suis sûr que nous obtiendrons le consentement unanime vous permettant de proposer une motion sans respecter le préavis de 48 heures afin que le quatrième rapport du sous-comité, c'est-à-dire votre motion concernant l'incitation au génocide, soit déféré au comité complet.
    Voulez-vous demander le consentement unanime à cet effet?
    Oui.
    Y a-t-il consentement unanime?
    Puisque nous sommes tous d'accord, je mets la question aux voix.
    (La motion est adoptée.)

  (1240)  

    Je m'adresse à la greffière. Nous allons renvoyer cette motion au comité principal.
    Deuxièmement, s'agissant du comité principal, voyez-vous un inconvénient à ce que je soulève la question dont vous m'avez parlé hier, discrètement?
    Non, allez-y.
    Si je comprends bien, monsieur Sorenson, le rapport du sous-comité sur le dialogue entre le Canada et la Chine en ce qui concerne les droits de la personne sera étudié au comité principal, jeudi matin.
    Si je soulève la question, c'est pour proposer aux membres du comité de communiquer avec les membres de leur parti au comité principal pour souligner le sérieux de notre étude sur la question, étant donné qu'ils n'ont pas entendu tous les témoignages et que M. Sorenson subodore qu'il pourrait surgir des difficultés à cet égard.
    On ne peut jamais prévoir s'il y aura des difficultés ou non. Je sais qu'il pourrait très bien y en avoir. Je me demande s'il y a un précédent à cet égard.
    Je me demande s'il est jamais arrivé que les membres du sous-comité se présentent devant le comité permanent pour éventuellement répondre à des questions quant au sérieux d'une étude.
    Quant à moi, manifestement, je siège à ce comité. J'en suis le président. En tant que tel, je tiens à ce que l'on ne prenne pas trop rapidement à la légère les témoignages et la quantité de travail que nous avons accomplie — ce qui sera assez évident quand on prendra connaissance du rapport — tout simplement parce que nous constituons un sous-comité.
    Je pense que chacun d'entre nous a pris contact avec les membres du comité principal, et peut-être que certains — Je n'ai pas touché mot de cela à la greffière du comité principal ou à qui que ce soit d'autre et en fait je ne savais pas que vous alliez soulever la question. Toutefois, si vous vouliez présenter ce rapport et accepter de répondre à quelques questions, je trouverais cela tout à fait recevable.
    On m'a demandé... Allez-y, Marcus.
    Selon ce qui se fait d'ordinaire, il est habituel que le président d'un sous-comité soit présent à la réunion du comité principal.
    Je pense que M. Cotler a eu une expérience dans ce sens, mais je pense qu'il était membre des deux comités à l'époque. M. Bains également, et je pense que M. Kilgour aussi. Ainsi, le président d'un sous-comité assisterait à la séance du comité principal pour expliquer le travail du sous-comité, ses recommandations et répondre à des questions. C'est ainsi qu'on a procédé par le passé.
    Monsieur Cotler, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J'allais dire la même chose que Marcus, mais ajouter que j'ai déjà parlé à mes collègues au comité pour leur expliquer que l'enquête que nous avions entreprise était sérieuse, étant donné la profondeur et l'ampleur des témoignages entendus et l'importance des recommandations. Je reconnais que ces recommandations sont sévères, mais elles sont solidement fondées et méritent d'être appuyées.
    C'est exactement ce que je voulais dire. Vous vous souvenez qu'autrefois, c'était le comité des affaires étrangères et du commerce international. Le comité s'occupe peut-être encore un peu de commerce international. Toutefois, en l'occurrence, le sous-comité ne se préoccupait pas de questions de commerce ou d'autres choses. Il se préoccupait essentiellement des violations aux droits de la personne. Ainsi, j'apprécie avec encouragement que M. Cotler ait contacté ses collègues. J'espère que nous pourrons tous en faire autant.
    Marcus, dites-moi s'il est habituel que les comités permanents adoptent les rapports des sous-comités qu'ils ont constitués dans leur totalité ou est-il courant qu'ils apportent des modifications de fond à ces rapports?
    Je ne peux vous parler que d'après ma propre expérience. S'agissant des rapports de fond dont j'ai été l'un des auteurs, il est arrivé que le rapport du sous-comité soit changé... le comité principal peut parfois modifier un mot ou refléter —
     Le comité principal vient de terminer une étude majeure sur l'aide à l'accès à la démocratie si bien qu'il aura le souci de s'assurer que les recommandations des deux études vont dans le même sens. Ce genre de pratique est courante. Parfois, le comité principal consacre plus de temps que le sous-comité à l'étude d'un rapport.
    J'ai quelque chose à dire et je donnerai ensuite la parole à Wayne.
    Je propose une modification pour tenir compte d'un argument soulevé par Mme St-Hilaire à la toute fin de notre étude du rapport. Je ne vais pas vous donner trop de détails mais il s'agit d'inclure une référence précise sur le fait qu'il existe un accord consulaire bilatéral.
    Cet aspect a prêté à confusion. Je m'en excuse. J'ai présenté des excuses à Mme St-Hilaire personnellement, et j'en fais autant maintenant publiquement. Nous nous sommes attardés à la Convention de Vienne et nous avons oublié qu'il y a également une convention bilatérale, supplémentaire si vous voulez, à cet égard. Nous allons présenter cela en tant que modification.
    Je ne pense pas que cela divulgue trop de détails.
    Monsieur Marston.

  (1245)  

    Je m'inquiéterais si l'on apportait une modification de fond à un rapport sans que le sous-comité ne lui donne son aval. Ceci est notre rapport que nous leur présentons, et comme il porte ma signature, je n'apprécierai pas beaucoup qu'ils le modifient.
    Je partage votre préoccupation. Si j'ai bien compris, le rapport est déposé à la Chambre au nom du comité permanent et non du sous-comité.
    Néanmoins, nous avons entendu des témoins, comme nous l'affirmons, et si on apporte une modification de fond à ce rapport, qu'on nous donne au moins la chance d'en prendre connaissance.
    D'après ce que j'ai entendu dire, ce ne sera pas le cas. Ce n'est pas prévu. Toutefois, si l'on apportait des modifications, cela pourrait avoir une incidence quelconque sur la réputation des gens réunis autour de cette table. Si nous n'avions pas la possibilité d'au moins en prendre connaissance, cela m'inquiéterait.
    Je vous incite à accepter l'invitation officieuse de M. Sorenson. Allez faire valoir votre point de vue et assurez-vous que votre collègue néo-démocrate au comité en fait autant.
    Oui, parlez à Alexa et assurez-vous qu'elle a lu le rapport et voyez si elle a les mêmes inquiétudes que vous.
    Wayne, c'est précisément pour cela que j'ai soulevé la question.
    Madame.

[Français]

    Monsieur le président, j'ai une question.
     Bien qu'on ne siège pas à huis clos, c'est la première fois que je suis à la fois membre d'un sous-comité et du grand comité. Ma question est peut-être naïve, mais je me demandais s'il serait approprié qu'on soit présents. Le Bloc québécois, par exemple, a deux sièges. Serait-il approprié que les membres du sous-comité y soient aussi?
    Pourquoi pas? C'est à votre parti de décider si vous pouvez être remplacés lors de cette réunion.

[Traduction]

    C'est à votre parti d'en décider. Nous constituons un sous-comité du comité principal. Si Mme Barbot, comme aujourd'hui...

[Français]

    Je sais bien, pour ce qui est de notre parti, que nous pouvons faire comme bon nous semble. Je veux simplement savoir s'il serait bon que l'ensemble des membres soient présents. Je ne parle pas seulement de nous. Serait-ce pertinent que M. Cotler ou M. Silva, par exemple, fassent la même chose?
    Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire que ce serait une bonne idée. Pour ma part, j'y serai, et je crois que M. Sorenson a invité les autres députés à y être également.
    C'est très bien. Merci.

[Traduction]

    Souhaitons-nous discuter des travaux futurs à huis clos?
    Une voix: Non.
    Le président: D'accord.
    Ce document a-t-il été distribué à tous?
    Oui, il a été traduit, etc. C'est simplement une courte liste que nous avons dressée hier.

  (1250)  

    D'accord. Il nous reste donc trois séances régulières, cinq peut-être. Nous avons jusqu'à présent tenu trois séances, une à l'automne et deux au printemps, sur Cuba. En outre, comme je l'ai rappelé, nous pouvons aussi nous en référer aux témoignages que nous avons entendus pendant la législature précédente. Comme l'a rappelé Marcus, nous pourrions envisager sans doute l'étude d'une ébauche de rapport d'après les témoignages entendus sur Cuba.
    En effet, — et je me reporte ici à une répétition en date du 16 novembre 2006 de la politique du Canada en matière de droits de la personne à Cuba — il a déjà préparé des éléments qui pourraient figurer dans un rapport, et à mon avis ce serait une base acceptable mais, bien entendu, depuis nous avons entendu d'autres témoignages.
    Allez-y.
    Nous avions invité un autre témoin qui n'était pas disponible parce qu'il était en fait à Cuba: le professeur John Kirk. C'est Mme St-Hilaire qui avait proposé son nom. Je crois qu'il sera absent jusqu'à la fin de la semaine mais nous pourrions envisager de le contacter. Au Canada, c'est l'un des experts les plus renommés sur Cuba et il y a également le professeur Dosman. Ce sont les deux seuls. Quand, dans le document, je parle d'universitaires ou d'experts, ce sont les deux possibilités à cet égard...
    Je ne verrais pas d'inconvénient à ce que nous tenions une autre séance là-dessus. Le cas échéant, je souhaiterais vivement que nous envisagions d'inviter Ed Broadbent, qui est un ex-membre du comité et un ex-président du Centre international des droits de la personne et du développement démocratique. M. Broadbent, à ce titre, a apparemment passé beaucoup de temps à Cuba. Je pense qu'il a des opinions très éclairées sur la situation. Il a toujours été un membre éminent du comité sur la question, pendant la législature précédente, et je pense qu'il a apporté une grande contribution à notre travail.
    Nous pourrions, si le comité le souhaite, tenir une dernière séance avec un groupe chevronné, la semaine prochaine.
    Marcus, où en est-on avec l'étude sur la responsabilité sociale des entreprises? Attend-on toujours la réponse du gouvernement?
    Nous attendons essentiellement la réponse du gouvernement. Le conseil consultatif, qui est le groupe d'intervenants, a préparé un rapport très détaillé et très long que l'on peut consulter sur le site Web. Le ministère des Affaires étrangères m'a dit en mars qu'une fois que le rapport aura été publié, le gouvernement préparerait une réponse au Parlement. Je ne sais pas encore quelle forme prendra ce rapport.
    Selon notre programme, nous attendons une réponse. Nous pouvons continuer ainsi.
    Si ce rapport pouvait nous être distribué, il vaudrait la peine de l'examiner.
    Vous pouvez voir d'autres points à l'ordre du jour qui ont été présentés.
    Marcus, permettez-moi de dire qu'une autre question qui ne figure pas ici est l'Iran, un dossier sur lequel vous avez travaillé par intermittence. Nous avons entendu trois témoins au cours d'une audience sur l'Iran en ce qui a trait aux droits de la personne.
    Nous avions ensuite la motion de M. Cotler sur l'incitation au génocide, qui ne constituait qu'un aspect de cette audience. Nous pourrions examiner davantage la situation des droits de la personne.
    Je viens tout juste d'apprendre aujourd'hui qu'il y a une conférence bizarre qui se tient dans une université canadienne où on a invité ce qu'on appelle la Fondation Ayatollah Khomeini à prendre la parole.
    C'est assez grave. La personne qui est invitée à participer à ce dialogue — j'ai reçu cela de mes collègues iraniens, Payam Akhavan — est quelqu'un qui, parmi les leaders iraniens, préconisait l'incitation au génocide. C'est très grave qu'on demande à une telle personne de venir participer à un dialogue sur ces questions.
    Quand est-ce que cette conférence est censée avoir lieu?
    Vers la fin du mois, vers le 25 mai.
    C'est à quelle université?
    À l'Université de Waterloo.
    Cette université se joint donc à la St. Francis Xavier University pour faire partie du « temple de la honte », en ce qui a trait à cette question. C'est un autre point.
    Je ne sais pas comment vous voulez organiser tout cela. Je tiens à la question des réfugiés nord-coréens, mais nous en avons déjà parlé dans un rapport.
    Étant donné que nous n'avons pas abordé la question de la responsabilité sociale des entreprises, pour des raisons que l'on peut bien comprendre, nous devrions peut-être prévoir une audience avant la fin de la session du printemps au sujet du protocole facultatif, question que vous avez soulevée comme étant un problème.
    Nous tentons de tout faire ici de façon consensuelle —
    Une voix: Qu'est-ce que le protocole facultatif?
    C'est le protocole des Nations Unies. Nous l'avons défendu aux Nations Unies et il n'a jamais été signé.
    Pour ma part, j'estime que cela est scandaleux. Je serais très heureux que ce protocole soit adopté.
    Monsieur Cotler.
    Je suis d'accord avec Wayne. À mon avis, c'est tellement scandaleux qu'il ne faudrait même pas tenir d'audience sur la question.
    L'une des dernières choses que j'ai faites en tant que ministre de la Justice a été de recommander que nous fassions cela. Je considère la tenue d'audiences sur cette question comme étant en quelque sorte un processus dilatoire pour quelque chose qui, à mon avis, devrait être clairement fait.
    Je ne vois pas pourquoi nous ne pouvons pas aller de l'avant et adopter une motion à cet égard, plutôt que de tenir des audiences sur quelque chose qui est clair et convaincant. Nous avons appuyé ce protocole initialement. Nous devrions pouvoir ratifier ce que nous avons aidé à appuyer et à faire adopter.
    Personne n'a présenté ce genre de motion.
    Wayne, nonobstant ce que M. Cotler a dit, aimeriez-vous quand même entendre des témoins ou la position du ministère des Affaires étrangères à cet égard?

  (1255)  

    Je serais très heureux que nous ayons une motion à ce sujet. À l'origine, j'ai adopté la tactique des témoins parce que je croyais qu'on ne voulait pas de motion.
    Certains députés voudront peut-être avoir davantage d'information à ce sujet.
    Je ne suis pas sûr d'avoir nécessairement besoin d'entendre de nombreux témoins sur cette question, mais j'aimerais quand même que nous ayons un préavis de 24 ou de 48 heures avant de recevoir la motion.
    Je ne veux pas une motion pour un appui unanime à cet égard, mais j'aimerais voir quelles pourraient être les raisons possibles.
    Qu'y a-t-il de mal à écouter des témoins?
    Une voix: Il n'y a aucun mal.
    M. Wajid Khan: Ce serait plus instructif. Il n'y a rien de mal à cela; nous les écoutons pour tout le reste.
    Voyons pourquoi ça n'a pas été signé et nous allons peut-être ensuite entendre des témoins. Je veux d'abord voir pourquoi ça n'a pas été signé.
    La semaine prochaine, nous aurons notre dernière audience sur Cuba.
    Entre-temps, peut-être, monsieur Marston, si vous avez l'intention de présenter une motion, que vous pourriez rédiger quelque chose en collaboration avec M. Sorenson. Ensuite, si vous voulez entendre des témoins avant d'examiner la motion, je suis certain que nous pourrions vous accommoder.
    Je présume que c'est le ministère des Affaires étrangères ou le ministère de la Justice qui a des objections; je ne sais pas quel ministère. Cela pourrait peut-être donner l'occasion aux hauts fonctionnaires de venir expliquer quelles sont leurs objections, avec les témoins — par exemple, Alex Neve — pour en expliquer la valeur.
    Monsieur Cotler, vous avez certaines connaissances dans ce dossier et vous avez un avantage par rapport à d'autres membres du comité pour qui il s'agit d'une question relativement nouvelle.
    Je pense que l'on peut entendre des témoins avec lesquels les gens se sentent à l'aise.
    Je comprends ce que vous voulez dire.
    Y a-t-il d'autres observations avant que nous levions la séance?
    Très bien. Merci beaucoup.
    La séance est levée.