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Je remercie tous les parlementaires de m'avoir invitée à venir partager mes connaissances et mon avis sur la situation des droits de la personne à Cuba. J'ai préparé un texte que j'ai intitulé « Situation des droits de la personne à Cuba: Contexte et perspectives ». Je vais en faire un résumé pour respecter mon temps et, à la fin, je vous ferai quelques recommandations, que j'ai établies à l'intention du gouvernement du Canada et proposées dans le cadre de l'étude amorcée par le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
Je vais faire une mise en contexte. D'abord, il faut comprendre que l'évolution de la situation des droits de la personne à Cuba doit être examinée à la lumière de deux événements majeurs. Le premier est d'ordre global, soit la mondialisation de l'économie, et il a un certain impact sur la protection et la mise en oeuvre de l'ensemble des droits humains. Le deuxième est plutôt d'ordre régional. Il s'agit de la politique étrangère des États-Unis à l'égard de Cuba, qui est axée sur des mesures de contraintes économiques variées et caractérisées par une intervention accrue dans ses affaires intérieures.
L'évolution de ce conflit a eu, par conséquent, une incidence déterminante sur l'élaboration des politiques étatiques destinées à encadrer et à assurer la protection et la mise en oeuvre des droits de la personne dans l'île. La politisation excessive et incessante de cette question a eu parfois comme résultat d'escamoter une règle universelle dont la primauté n'a plus à être démontrée, et je parle notamment de l'indivisibilité, de l'universalité et de l'interdépendance de l'ensemble des droits de la personne.
En vertu de ces principes, les droits civils et politiques ne sont pas supérieurs aux droits économiques, sociaux et culturels, et ces derniers ne sont pas, non plus, plus importants que les premiers. Il faut analyser la situation des droits de la personne à Cuba dans son ensemble. Il faut toujours analyser l'intégralité, la réalisation et la jouissance de l'ensemble des droits de la personne, et non pas certains droits au mépris ou au détriment d'autres droits.
Il faut avoir à l'esprit que le respect des droits de la personne est un défi majeur pour l'ensemble des pays qui composent la communauté internationale. Aucun État n'a réussi, jusqu'à présent, à s'acquitter de toutes ses obligations internationales en vertu des textes juridiques internationaux relatifs aux droits de la personne.
En dépit du très fort consensus international autour de la protection inconditionnelle de la paix et de la sécurité internationales, le conflit perdure, et Cuba reçoit chaque semaine 2 200 heures d'émissions de radio financées par le gouvernement des États-Unis. Je parle de cet événement parce qu'il est à la source de certains problèmes de violations présumées des droits civils et politiques des citoyens cubains, qui sont très réceptifs à de telles émissions sur le territoire cubain. De telles émissions sont jugées comme illégales et subversives par le gouvernement cubain.
En conséquence, le gouvernement cubain a développé une stratégie défensive pour échapper à l'emprise médiatique bien ciblée de l'hyperpuissance voisine. En plus d'effectuer des manoeuvres de brouillage des ondes radiophoniques et des télécommunications, les autorités cubaines ont mis à jour leur législation afin de punir les citoyens réceptifs aux messages d'appel à la déstabilisation politique véhiculés à l'intérieur de ces espaces médiatiques.
L'adoption de la Loi de protection de l'indépendance nationale et de l'économie de Cuba, la loi 88, qui prévoit de lourdes peines de prison pour les opposants, s'inscrit dans cette logique. Cette stratégie de défense de la souveraineté de l'État cubain entre notamment en conflit avec l'exercice de certains droits civils et politiques des citoyens cubains engagés dans des organisations politiques opposées au régime castriste, financées et soutenues par le gouvernement ou par des entités ou des organisations américaines. C'est dans ce contexte de conflit bilatéral perpétuel et caractérisé par l'interventionnisme politique et économique étatsunien qu'il convient d'analyser sérieusement la situation de la jouissance des droits de la personne à Cuba.
Je recommande au comité qu'au moment de se pencher sur la situation des droits de l'homme à Cuba, il évalue également la performance de l'État cubain en ce qui a trait à la mise en oeuvre des textes juridiques internationaux de protection des droits de la personne.
Comme vous le savez, il y a des comités de contrôle et de mise en oeuvre de ces textes. Je parle notamment des différents comités de l'ONU, dont le Comité des droits de l'homme, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, le Comité des droits de l'enfant et le Comité contre la torture, qui surveille l'application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est important de voir les analyses et les recommandations des organes de contrôle de ces textes à la suite de l'étude des rapports présentés par les représentants gouvernementaux cubains, lesquels sont d'une grande valeur pédagogique et juridique.
Nous accordons aussi une importance particulière aux travaux et aux rapports des activités de plusieurs organisations intergouvernementales, telles que l'Organisation mondiale de la santé, l'Organisation panaméricaine de la santé, le Fonds des Nations Unies pour la population, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, le Programme alimentaire mondial, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et le Fonds international de développement agricole. Je vous invite également, au moment d'amorcer votre étude, à aller vérifier ce que ces organisations ont écrit au sujet de la réalisation et de la jouissance des droits de la personne à Cuba.
Je vais présenter très rapidement certains rapports, dont ceux sur la situation des droits de la personne à Cuba du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qui est l'ancienne Commission des droits de l'homme. Les travaux sur la situation des droits de la personne, sous les auspices de l'ancienne Commission des droits de l'homme, rebaptisée Conseil des droits de l'homme l'année dernière, ont suscité beaucoup d'attention depuis la nomination de rapporteurs spéciaux sur la situation de l'ensemble des droits de la personne à Cuba. Il s'agit, en l'occurrence, du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, du Rapporteur spécial chargé d'examiner les questions se rapportant à la torture et du Représentant spécial du Secrétaire général pour la question des défenseurs des droits de l'homme. S'ajoute à cette liste l'Avis no 9 contenu dans le document présenté par le Groupe de travail sur la détention arbitraire lors de la 60e session de l'ancienne Commission des droits de l'homme et concernant la situation à Cuba.
En septembre 2005, la Représentante personnelle de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mme Christine Chanet, a présenté devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU le dernier rapport portant sur la situation des droits de la personne à Cuba. Les autorités cubaines n'ont jamais reconnu le mandat de la représentante de la Haut-Commissaire, ce qui a rendu les échanges extrêmement difficiles, voire inexistants.
Pour mieux comprendre l'échec de cette démarche, il faut aussi se reporter aux débats qui ont suivi la présentation du rapport, en septembre 2006, alors que les membres du Conseil des droits de l'homme étaient de toute évidence profondément divisés non seulement lors de la création de ces postes, mais aussi lors du débat sur le contenu du rapport. Les vives discussions qui ont suivi la lecture du rapport rappellent les confrontations idéologiques perpétuelles durant la guerre froide entre les anciens pays socialistes et les pays en développement, d'un côté, et les pays occidentaux industrialisés, à l'autre extrême. De toute évidence, ces divergences se sont poursuivies jusqu'à aujourd'hui.
En consultant ces débats, vous constaterez que les représentants de la Corée, de la Russie, du Bélarus et du Zimbabwe, entre autres, ont émis des réserves à l'égard du contenu du rapport.
Je suis loin de remettre en cause un des piliers fondamentaux des Nations Unies, soit la protection internationale des droits de la personne. Je suis particulièrement en faveur de la création et du développement des postes de rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de la personne dans le monde. Ces postes sont importants, car ils appliquent et mettent en oeuvre le principe de la protection intégrale des droits de la personne, conformément à la Charte des Nations Unies.
Toutefois, il faut prendre acte de la profonde division qui régnait parmi les membres de la Commission des droits de l'homme en 2002, lors de la création du poste, et en septembre 2006, au moment de la présentation de son rapport.
Enfin, toute étude rigoureuse de la situation des droits de la personne à Cuba doit se poursuivre en prenant acte également des changements environnementaux importants et de leurs graves conséquences sur les sols de l'île depuis une dizaine d'années. Certains phénomènes naturels, comme les cyclones et la sécheresse, ont entraîné des dégâts économiques et matériels importants. Ces dégâts ont un impact et des conséquences sérieuses sur la protection et la défense, donc sur la réalisation des droits de la personne à Cuba.
Malgré la réponse rapide des autorités cubaines, qui ont mis en place des mécanismes adéquats en matière d'alerte rapide et d'intervention, la gravité croissante et la récurrence de ces catastrophes naturelles entravent les efforts de relèvement et de reconstruction. Selon toutes les prévisions, les effets cumulés des catastrophes naturelles et des périodes de sécheresse chronique devraient continuer de s'aggraver. Cette situation a une incidence non négligeable sur la jouissance des droits économiques et sociaux de la personne à Cuba.
Pour finir, j'ai préparé quelques recommandations. La première vise la transition démocratique qui est déjà amorcée à Cuba depuis un certain temps. Je recommande que le gouvernement du Canada encourage le gouvernement de Cuba à favoriser le pluralisme politique et le pluripartisme, dans la mesure où différents partis politiques puissent être représentés au sein de l'assemblée nationale de La Havane dans le respect des lois cubaines, y compris les règles de financement des partis politiques.
Cette question est importante dans la mesure où le gouvernement de Cuba, comme n'importe quel gouvernement souverain, ne peut tolérer la présence de partis politiques ou d'organisations politiques financés et soutenus par un État étranger ou par une entité ou des organisations étrangères. Imaginez si, à la Chambre des communes, vous aviez à côté du Bloc québécois, du Parti libéral, du Parti conservateur et du NPD, un nouveau parti politique financé intégralement par le gouvernement australien ou afghan, par les talibans, ou encore par Oussama ben Laden. C'est antidémocratique et va à l'encontre de toute règle démocratique.
Les partis politiques d'un État doivent être financés selon les règles de financement ou les lois en vigueur concernant le financement des partis politiques et ne doivent pas être soutenus et financés par un État étranger. Non seulement cela va à l'encontre de la démocratie, mais cela empiète sur le développement démocratique dans la mesure où la joute démocratique doit défendre la souveraineté d'un État.
Je recommande également que le gouvernement du Canada intervienne auprès du gouvernement des États-Unis pour mettre fin à la politique étrangère de ce pays à l'égard de Cuba, qui est axée sur des mesures de contraintes économiques unilatérales depuis 1959.
Je vous rappelle que cette politique a été condamnée par l'Assemblée générale des Nations Unies. Quatorze résolutions ont été adoptées depuis 1992, en plus des rapports exigés par l'Assemblée nationale à l'endroit du secrétaire général des Nations Unies pour mettre en application ces résolutions.
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Merci beaucoup de cette occasion qui m'est donnée de comparaître devant votre comité. Comme je ne l'ai su que dimanche, je suis désolé, mais je n'ai pas de mémoire écrit à vous remettre.
Je dois dire que je suis heureux que mon nom soit Ritter aujourd'hui, et non pas Radler, bien que je sois certain que les questions que vous me poserez seront toutes aussi difficiles que celles auxquelles il doit répondre.
Essentiellement, mon point de vue diffère de celui du témoin précédent. À mon avis, Cuba est un État de type totalitaire comme ceux d'Europe de l'Est, dont les structures et les institutions sont plutôt identiques à celles qui existaient en Europe de l'Est. C'est peut-être un État totalitaire léger, avec de la belle musique, de jolies plages, etc., mais le pays est contrôlé par un régime autocratique, dirigé par un seul parti qui a le monopole; au sein de ce parti, il y a un comité central; et au sein du comité central, un bureau politique; et au sein du bureau politique, Fidel. Je dirais que le pays est contrôlé en grande partie sinon en totalité par le parti et par Fidel.
Les sources que j'utiliserai au cours de mon exposé sont Amnistie internationale, Human Rights Watch, Reporters sans frontières et la Commission cubaine pour les droits de la personne et la réconciliation nationale.
Je vous recommanderais un livre en particulier. C'est une publication de Human Rights Watch qui s'intitule Cuba's Repressive Machinery. Ce livre présente en détail la façon dont la société cubaine est contrôlée de façon tout à fait totalitaire par le parti.
Essentiellement, au sein du régime politique cubain, la Charte est déterminée par sa Constitution et par son code pénal. La majeure partie de la Constitution se lit comme un document occidental normal informé par la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies. Cependant, il y a quelques articles dans la Constitution qui annulent d'autres déclarations donnant l'impression d'encourager la liberté d'expression, etc.
L'un de ces articles est l'article 5. L'article 5 de la Constitution garantit la domination et le monopole du Parti communiste dans la vie cubaine et, implicitement, rend ainsi illégal tout autre type de parti politique. Par conséquent, le Parti communiste domine les forces armées, les ministères et les universités. Il est très puissant. Il a une structure parallèle à celle de l'administration à l'université. Je le sais pour en avoir fait l'expérience sur place, lorsque notre université, l'Université Carleton, offrait un programme d'économie à l'Université de la Havane au niveau de la maîtrise, un programme d'économie à l'occidentale, ce qui est intéressant, mais nous nous sommes colletés avec le Parti communiste qui surveillait de très près ce que nous faisions dans nos salles de classe.
L'article 62 de la Constitution stipule qu'aucune des libertés, des libertés assez normales, reconnues dans la Constitution pour les citoyens ne peut être exercée si elle va à l'encontre des dispositions de la Constitution des lois, ou encore à l'encontre du socialisme et du communisme. Les infractions à ce principe sont punissables. Une nouvelle partie de la Constitution, un amendement de 2002, déclare le socialisme comme étant irrévocable. Par conséquent, si quelqu'un fait valoir que le régime actuel devrait changer, cette personne aura des problèmes.
Le code pénal définit en détail ce qui constitue un crime. C'est en grande partie assez normal, mais il y a certains aspects intéressants. Desacato, ou le manque de respect... si quelqu'un manque de respect à l'égard des institutions, des fonctionnaires ou du chef, de la direction, ou de Fidel, cette personne risque l'emprisonnement. Il y a des gens qui sont emprisonnés pour cette raison. Peligrosidad, la dangerosité... les gens vont en prison pour cela en particulier, etc.
En ce qui concerne les droits fondamentaux à Cuba, on peut dire que la liberté d'expression et la liberté d'association entre autres n'existent pas au sens où nous reconnaissons ces droits au Canada.
En ce qui concerne la liberté d'expression, eh bien, comme nous le savons, le Parti communiste de Cuba a le monopole de toute la presse électronique et écrite. Il est interdit de critiquer le parti, la direction, la politique publique et d'adopter toute position qui n'est pas celle approuvée par le parti. Les publications, l'enseignement dans les universités et les cercles de réflexion sont gravement limités. La liberté universitaire telle que nous la connaissons n'existe pas, je peux vous l'assurer.
Les professeurs se font congédier pour ce qu'ils disent. Les journalistes sont emprisonnés — il y a 29 journalistes en prison parce qu'ils ont dit des choses que le parti n'aimait pas. La liberté d'association? À ce moment-ci, il y a 278 prisonniers politiques. Le monopole du parti unique ne tolère pas d'autres partis politiques.
Et je ne suis pas d'accord : certains membres de l'opposition à Cuba se sont mêlés aux Américains et les Américains ont bêtement appuyé les membres de l'opposition. C'est une chose très stupide à faire. La grande majorité de l'opposition à Cuba a déclaré vouloir une solution cubaine, et ne veut pas avoir quoi que ce soit à faire avec l'ambassade américaine.
Je pourrais parler de la liberté de mouvement, qui est limitée; du droit au travail, qui est limité selon le point de vue politique de chacun. Il y a essentiellement un système de passeport interne à Cuba, un système d'identité. Si vous vous trouvez dans une région du pays alors que vous vivez dans une autre, la police peut vous renvoyer chez vous. Cela se produit.
Si le temps le permet, j'aimerais dire quelques mots au sujet de la politique du Canada à l'égard de Cuba. Depuis 1994, et même avant qu'on la qualifie ainsi, nous avons une politique « d'engagement constructif ». Les objectifs de cet engagement constructif, énoncés par Christine Stewart et élaborés par Axworthy, étaient d'appuyer une évolution positive, pacifique vers une société qui respecte pleinement les droits de la personne et qui représente vraiment les institutions gouvernementales. C'est un objectif louable. Je l'appuie tout à fait.
Cela devait être possible grâce au commerce normal et à l'investissement étranger, au tourisme et à l'immigration, aux relations diplomatiques respectueuses et correctes et à une aide au développement qui visait des activités de développement démocratique et de promotion des droits de la personne.
L'engagement constructif a-t-il eu du succès? À certains égards, pour ce qui est de promouvoir les droits de la personne et le développement démocratique, il est évident que cela n'a pas été un succès. Cependant, je dirais qu'il était extrêmement naïf de notre part de nous attendre à ce que nos relations normales en plus de quelques petits programmes d'aide puissent influencer le régime cubain de quelque façon que ce soit.
Nous avions une variété de programmes, de tout petits programmes, qui visaient à promouvoir les droits de la personne et le développement démocratique. Je pense qu'ils ont été utiles, mais ils étaient très peu nombreux. Le budget total de ces programmes s'élevait à environ 1,3 million de dollars et nous ne pouvions pas vraiment nous attendre à ce qu'ils aient un impact considérable. Et ils n'ont pas eu un tel impact.
Le Canada devrait-il poursuivre l'engagement constructif? Je dirais oui, à certains égards, mais en ayant une attente plus réaliste de ce que nous pourrions accomplir. Je pense qu'il est toujours positif d'être constructif. Je pense que le Canada a bien fait de maintenir des relations économiques et diplomatiques normales, correctes, avec Cuba au fil des ans; je suis fier de cela. Cela a beaucoup mieux fonctionné que la politique américaine.
On ne pouvait cependant pas s'attendre à ce que l'engagement constructif permette de réaliser la démocratisation et le respect total des droits de la personne. Je pense que c'était réellement naïf de notre part.
Devrions-nous maintenir une relation de type constructif? Eh bien, je dirais oui très certainement, mais il faut reconnaître que cela ne va pas changer le statu quo politique à Cuba. À long terme, cela pourrait être avantageux car cela garde les Cubains au courant de la réalité canadienne, de ce qu'est le Canada, et je pense qu'à Cuba, on ne connaît pas très bien notre pays malheureusement — en fait, là-bas on ne connaît aucun autre pays vraiment à part Cuba, à l'exception de Miami — et en connaître davantage au sujet de notre pays ne peut être qu'une bonne chose. Je recommanderais donc de maintenir des relations normales et correctes avec Cuba, sans nous attendre toutefois à ce que nous ayons beaucoup d'impact à court terme.
Je voudrais ajouter qu'à mon avis Cuba n'a plus besoin maintenant d'aide canadienne au développement. Ce pays accepte l'aide canadienne au développement, mais notre aide est assez mineure. En fait, Cuba fournit sa propre aide au développement à de nombreux autres pays. Le Canada est intervenu à un moment où, je pense, il était très important de montrer à Cuba qu'elle avait un ami et de tenter de lui donner une aide économique et humanitaire, au plus profond de sa crise entre 1992 et 1996.
C'était une bonne chose, mais je pense que le moment est venu pour nous de nous rendre compte que Cuba n'a plus besoin de notre aide, car son économie s'est considérablement rétablie. Cuba est passée de la 79e à la 50e place au rang des pays dans le cadre du PNUD selon l'indice du développement humain. Cela est principalement attribuable à un rétablissement du revenu par habitant pour ce qui est du pouvoir d'achat. Les choses ne se sont pas entièrement rétablies — il y a toujours de nombreux problèmes — mais la reprise a été considérable. Donc, je pense que nous devons reconsidérer notre aide au développement à Cuba à ce moment-ci.
Merci beaucoup.
L'opinion générale veut que les droits sociaux et économiques aient été renforcés, et c'est vrai en grande partie. Grâce à la révolution, l'accès à l'éducation et aux soins de santé a été très rapidement étendu à Cuba, qui s'est ainsi retrouvée, d'une certaine façon, en tête des autres pays d'Amérique latine dans les années 60 dans les domaines de l'éducation, de l'espérance de vie et de tout ce qui découle d'un bon régime de soins de santé. Cuba a remporté un grand succès à cet égard. Cuba a également réduit le chômage officiel pour le convertir en chômage caché, ou en « chômage au travail », si l'on peut dire.
Je ne veux pas minimiser les réalisations de Cuba, mais je tiens à souligner qu'à l'heure actuelle, Cuba est au sixième rang parmi les pays d'Amérique latine en ce qui concerne l'indice du développement humain et l'indicateur de la pauvreté humaine.
Autrement dit, dans les 40 ans qui se sont écoulés depuis 1959, les autres pays d'Amérique latine, notamment le Chili, le Costa Rica, l'Uruguay, l'Argentine et la Barbade — j'en oublie quelques autres — ont progressé en fonction de l'indice du développement humain, qui se mesure par les réalisations dans l'éducation et la santé ou l'espérance de vie. Cuba a aussi eu de bons résultats, mais elle a été dépassée par d'autres pays d'Amérique latine, dont certains étaient au départ bien à la traîne par rapport à Cuba.
Il est également intéressant de noter que l'indicateur de la pauvreté humaine, qui tient compte de facteurs comme l'accès à l'eau potable, l'analphabétisme, le nombre d'enfants qui meurent avant l'âge de cinq ans, etc., place Cuba également au sixième rang. Cuba n'est plus au premier rang des pays les moins pauvres; elle est au sixième rang, et les pays que j'ai nommés figurent plus haut que Cuba dans la liste.
Les politiques révolutionnaires de Cuba, surtout dans les domaines de l'éducation et de la santé, ont permis d'obtenir des résultats rapides, résultats qui persistent encore. Mais rien n'est parfait, et nous avons des problèmes dans notre régime de santé. Bien sûr, Cuba a de grandes difficultés dans son régime de santé — et aussi dans son système d'éducation. Cuba a maintenu ses progrès, mais d'autres pays ont réalisé davantage et surpassé Cuba.
Pour ma part, je ne crois pas que l'on puisse compenser l'absence de droits humains d'une nature politique et civile par l'existence de droits sociaux et économiques. Il est possible d'avoir les deux, comme d'autres pays d'Amérique latine l'ont démontré.
En ce qui concerne les puces, je suis désolé, mais je ne suis pas au courant de cela. Je n'en ai jamais entendu parler auparavant.
Merci.
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J'aimerais réagir à la question que vous venez de poser. Vous avez mentionné qu'on suivait les personnes qui sortaient de prison à Cuba. Est-ce exact?
Une voix: Oui.
Mme Dulce-Maria Cruz-Herrera: Vous avez lu cela dans des études faites par des organisations non gouvernementales, et il est possible que cela se passe. Cependant, cela se passe un peu partout dans le monde, même au Canada.
Le site Web de l'ONU, à la section de la Commission des droits de l'homme, contient les rapports présentés par les États en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de la Convention internationale contre la torture et de la Convention internationale des droits de l'enfant. Je vous invite aussi à consulter les rapports du Canada, qui provoquent parfois de vifs débats et exaspèrent souvent les membres du comité de l'ONU. Vous verrez que même les États et les gouvernements des pays industrialisés ont de la difficulté à protéger efficacement les droits de la personne.
Les États-Unis, comme vous le savez, n'ont pas reconnu le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale des droits de l'enfant. De plus, ils n'ont pas reconnu le Protocole de Kyoto, et j'en passe. C'est aussi le cas d'autres États.
Pour cette raison, la situation est très délicate. Quand on étudie la question de la situation des droits de la personne à Cuba, on tombe trop souvent dans la politisation facile, dans un discours qui s'apparente trop souvent à la propagande des États-Unis et, malheureusement, on manque d'objectivité. Effectivement, il y a probablement des prisonniers à Cuba qui sont libérés, suivis et qui ont de la difficulté à trouver un logement et un travail, mais c'est la même chose à Montréal et dans toutes les provinces du Canada.
Il faut examiner le décalage qui existe à Cuba entre les droits économiques et sociaux et les droits civils et politiques en les mettant en contexte. Il faut regarder la situation dans son ensemble. Je vous rappelle qu'en 2004, les États-Unis ont créé la Commission for Assistance to a Free Cuba, qui est sans précédent dans l'histoire de l'humanité. La loi Helms-Burton et la loi Torricelli n'ont pas non plus de précédent dans l'histoire de l'humanité. Non seulement les États-Unis exercent des pressions diplomatiques et politiques auprès des États dans le cadre des Nations Unies et de l'Organisation des États américains, mais en plus, ils adoptent une loi nationale.
L'article 3 de cette loi définit minutieusement comment le gouvernement de Cuba devait s'organiser et comment cette transition devait s'opérer. Cette loi a été condamnée par le gouvernement du Canada et celui-ci a adopté une loi pour contrer les mesures extraterritoriales. De plus, lorsqu'il y a eu l'incident de citoyens canadiens qui se sont vu refuser l'ouverture d'un compte par la Banque Royale, le gouvernement du Canada a été obligé d'intervenir et de dire que les dispositions de la loi Helms-Burton n'avaient pas force de loi sur le territoire canadien et qu'il fallait faire attention.
Malheureusement, la mise en oeuvre des droits civils et politiques à Cuba doit s'analyser dans ce contexte. Les libertés démocratiques sont permises et autorisées dans la mesure où les citoyens ne violent pas la souveraineté de Cuba et ne portent pas atteinte à la stabilité politique du régime.
Quand cela se produit, malheureusement, ils sont annihilés. Est-ce une bonne chose? Non, ça ne l'est pas.
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Ce n'est pas moi qui défends la souveraineté des États. C'est l'ensemble des pays qui ont reconnu la Déclaration universelle des droits de l'homme. La souveraineté des États est l'un des piliers du système des Nations Unies: c'est l'article 1 de la Charte des Nations Unies. C'est l'article 1 de deux pactes. Les États-Unis, le Canada et Cuba l'ont reconnu. Je mentionne ces trois pays parce qu'on est au Canada et qu'on parle des États-Unis et de Cuba. La force de ce principe n'est plus à démontrer.
Je pense que je me suis mal exprimée. Je n'ai pas dit que le Canada n'avait pas de leçons à donner. Le bilan du Canada en matière de protection des droits de l'homme est remarquable. Ce que je recommandais, c'est que...
Je suis capable de faire la part des choses. Il y a un problème à Cuba. D'une certaine façon, c'est une nation assiégée. C'est un pays qui est en guerre depuis 50 ans. On n'y lance pas de bombes, parce qu'on n'a pas pu le faire. On l'a fait en 1961, quand on a envahi Cuba. Après, il y a eu la guerre froide, l'ex-Union soviétique et l'effondrement du bloc communiste. Mais à partir de 1990, on a adopté des lois pour renforcer l'embargo. On ne va pas attaquer Cuba, mais on va l'étouffer économiquement, puis il s'effondrera. Malheureusement, l'effondrement n'a pas eu lieu et l'embargo se poursuit. Il faut comprendre que Cuba, pour se protéger... Les États-Unis reprochent à Cuba de ne pas avoir adopté une économie de marché.
La beauté de l'ONU, créée en 1945, c'est la pluralité des démocraties. D'ailleurs, un des comités des Nations Unies étudie la question des démocraties renouvelées et rétablies. Tous les ans, on produit des rapports très intéressants sur l'importance de favoriser la pluralité des démocraties dans le monde.
La démocratie néo-libérale, qui est en vigueur au Canada et aux États-Unis, n'est pas la meilleure démocratie au monde. Donc, les États-Unis ne peuvent pas l'imposer. De quel droit les États-Unis se permettent-ils d'adopter une loi pour dire à Cuba quelle forme de démocratie adopter, soit la démocratie néo-libérale, fondée sur tel type d'économie? De quel droit le font-ils, alors que la Charte des Nations Unies dit que tous les États sont égaux? L'égalité souveraine, c'est cela. Les États ne peuvent pas intervenir dans les affaires intérieures des autres États. Le droit à l'autodétermination d'un peuple, ce n'est pas rien. C'est le pilier du système des Nations Unies.
Pour se défendre, Cuba dit à ses citoyens qu'ils peuvent s'exprimer, mais que s'ils passent aux actes, s'ils concrétisent les messages qu'ils reçoivent sur Radio Martí, on appliquera les lois. Cuba fait-il la bonne chose et de la meilleure façon? Peut-être pas.
Le peuple cubain est mature et est prêt pour le pluripartisme. À Cuba, plusieurs partis politiques peuvent coexister au sein de l'assemblée nationale, dans le mesure où ces partis politiques participent au débat démocratique, font avancer la démocratie et sont financés selon les lois cubaines. Une loi sur le financement des partis politiques, comme celle qui existe au Canada et ailleurs, sera éventuellement adoptée par Cuba.
J'aurais de sérieuses difficultés avec le fait qu'un parti politique financé par la Fondation cubano-américaine ou en vertu du chapitre 3 du rapport présenté par la Commission for Assistance to a Free Cuba siège à l'assemblée nationale de La Havane.
Je vous rappelle que ce rapport de 400 pages, qui a été présenté par Colin Powell en 2004 et ensuite par Condoleezza Rice l'année dernière, a porté à une quarantaine de millions de dollars le financement des organisations de la société civile cubaine, sans définir ce qu'est cette société civile. Cela se fait ouvertement. Essayons d'imaginer que le gouvernement iranien ou une organisation islamique quelconque décide de financer ouvertement un parti politique au Canada, à coups de millions de dollars, dans le but de faire avancer la cause des droits des Arabes ou des talibans. Ce ne serait vraiment pas beau.
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J'aimerais aborder la question des prisonniers politiques à Cuba. Au début de mon intervention, j'ai dit qu'il fallait analyser la situation des droits de l'homme à Cuba en lien avec le conflit cubano-américain. La situation des droits de l'homme a toujours été utilisée comme argument par les États-Unis pour justifier sa politique à l'égard de Cuba. Ils ont toujours présenté Cuba comme un État totalitaire qui réprime les droits humains. En conséquence, les personnes à Cuba qui s'opposent au régime castriste deviennent des prisonniers politiques.
Est-ce qu'il y a des prisonniers politiques? Je pense que oui, dans la mesure où des personnes ont commis des actes qui, selon le gouvernement cubain, ont déstabilisé le régime politique.
Il faudrait se référer, par exemple, au rapport que Cuba a présenté lorsque le Groupe de travail sur la détention arbitraire est allé travailler à Cuba. Il est allé faire une visite à Cuba pour connaître les conclusions du rapport de ce comité.
Cuba a-t-il agi selon les normes internationales? C'est bien ce que vous voulez savoir, n'est-ce pas? Dans la mesure où ces prisonniers politiques ont subi des procès équitables, ont été représentés par des avocats et ont été punis selon les lois cubaines ou selon la partie du Code criminel qui définit l'activité de ces prisonniers, je dirais qu'officiellement, l'État a agi selon les lois. Maintenant, il faut considérer toutes les questions subjectives.
Quand je lis tous ces rapports concernant les prisonniers politiques... D'ailleurs, je veux attirer votre attention sur la diversité des arguments, la profusion des rapports qui portent sur cette question. Personnellement, je suis un peu confuse, parce que chaque organisation avance des arguments parfois différents, parfois contradictoires. C'est un peu difficile de s'y retrouver, mais il est certain qu'il y a des questions subjectives. De toute évidence, il y a des prisonniers qui clament leur innocence. Ils disent être innocents et ne pas avoir agi contre la sécurité de l'État. D'un autre côté, on a un procès, des témoins et même, paraît-il, des agents de l'État qui se sont infiltrés au sein de ces mouvements pour vérifier ce qui s'y passait. Ils ont témoigné. Il y a donc des questions subjectives auxquelles il faut porter attention.
J'aime faire la comparaison et considérer les choses sous différentes perspectives. Ici, au Canada, et aux États-Unis, il y a des prisonniers politiques. Aux États-Unis, surtout, il y a beaucoup de prisonniers politiques. La situation des prisonniers politiques est complexe. Il faut faire très attention lorsqu'on veut analyser la situation des prisonniers politiques à Cuba.
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La question de la mondialisation est si complexe que je n'aurai pas le temps de le faire. Je vous rappelle tout simplement que nous vivons dans un monde extrêmement « connecté ». Les États-Unis, qui sont les maîtres de la mondialisation et qui guident la mondialisation depuis quelques années, disent justement aux pays du Sud, aux pays en développement, d'ouvrir leurs frontières, de libéraliser leur commerce, d'être flexibles, qu'il faut commercer avec tout le monde, être ouvert au commerce et qu'ensuite ces pays vont se développer, produire plus de richesses et sortir de la pauvreté. Or, dans le cas de Cuba, c'est exactement le contraire. On bloque les frontières. Dans le cas de Cuba, cela ne s'applique pas. Cuba et les États-Unis sont à 90 milles de distance, je crois. Autrefois, ils étaient des partenaires. En 1959, les États-Unis étaient le premier partenaire commercial de Cuba. Ce serait très intéressant pour les deux de redevenir des partenaires commerciaux.
Il y a des choses qui sont déjà faites. Vous savez que les agriculteurs ont fait énormément de pressions auprès du gouvernement américain et que maintenant, grâce à cette loi, l'Agricultural... — je l'ai ici dans mon texte, je peux vous fournir les détails de cette loi —, Cuba est devenu le 25e acheteur en importance de produits agricoles américains. Les agriculteurs américains ont fait beaucoup de pressions auprès du congrès parce que pour eux, Cuba représente un marché fantastique. Il y a beaucoup d'échanges qui se font à ce niveau. Maintenant, en ce qui a trait aux produits agricoles, ça va. Il y avait des restrictions. Souvent, les Cubains devaient payer comptant quand ils allaient acheter les produits agricoles et cela provoquait beaucoup de problèmes parce, généralement, tout le monde peut acheter à crédit. Les Cubains devaient payer comptant et il y a eu des assouplissements parce que, bien évidemment, souvent, ils devaient passer par des banques de pays tiers. C'était extrêmement coûteux pour les Cubains et, en plus, ils avaient moins de liquidités. Donc, il y a des choses qui ont été faites pour assouplir la situation.
Je parlerai maintenant des conséquences de la mondialisation sur les droits de l'homme à Cuba. J'y fais référence dans mon texte, mais dans un monde où nous sommes tous « connectés », comment une île, un tout petit pays, avec des ressources limitées, peut-il survivre dans un monde où, pour survivre et se développer, il faut commercer constamment et avoir des échanges continuels avec le reste de la planète? Dans le cas de Cuba, le pays est constamment bloqué et isolé. C'est clair que la mondialisation va avoir un impact local à Cuba, d'autant plus que la mondialisation est contrôlée ou guidée par les États-Unis.
En ce qui concerne l'impact sur les droits de la personne de l'embargo, de la politique économique américaine à l'égard de Cuba, j'ai ici quelques exemples, mais si vous ne voulez pas...
Pardonnez-moi mes allées et venues; j'ai dû répondre à quelques appels.
Je vous remercie tous les deux de vos exposés. Nous entendons quantité de points de vue sur ce qui se passe à Cuba, mais chacun admet, je crois, qu'il y a des atteintes aux droits de la personne. Des gens qui dans une société démocratique normale ne seraient pas en prison sont détenus là-bas. Tout l'Occident et tous les pays démocratiques voient dans Cuba l'occasion un jour d'appliquer les principes et les valeurs de la démocratie que nous jugeons importants. Je pense que c'est important dans notre intérêt national et dans l'intérêt de Cuba.
Nous sommes un sous-comité du Comité des affaires étrangères. Le Comité des affaires étrangères effectue actuellement une étude sur le développement démocratique, sur la façon dont le Canada peut être présent et ce qu'il peut faire pour changer les choses.
Nous savons que tôt ou tard à Cuba l'occasion se présentera d'apporter des changements. La plupart des gens comprennent que tant que Fidel tient les rênes du pays, les options sont limitées, mais la plupart des pays libres et démocratiques pensent que Cuba a des chances de changer à son départ.
Le Canada a recours à divers moyens pour favoriser le développement démocratique ou apporter son aide, peu importe comment vous voyez cela. Vous avez tout à fait raison, monsieur Ritter, quand vous dites que le Canada n'est pas un gros bailleur de fonds pour Cuba. On parle d'une dizaine de millions de dollars par année. Je ne sais pas si ce sont les derniers chiffres, mais c'est celui que j'ai. Il est un des plus grands pays donateurs; le Canada est encore un donateur majeur.
Le Canada donne aussi aux pays qui ont une économie forte, qui la renforcent, mais il y a des régions dans ces pays où nous pouvons changer les choses. Peut-être est-ce de l'aide humanitaire ou de l'aide à la gouvernance. Le Canada est à Cuba pour aider les Cubains à parvenir à un développement durable à long terme, peut-être dans le secteur de la gouvernance.
Le comité permanent a fait une étude assez approfondie d'Haïti, pour sûr un État déliquescent. C'est un pays dans lequel nous avons balancé des centaines de millions de dollars, quasiment en pure perte. Une des choses que nous avons apprises en comité, c'est que peu importe qui détient le pouvoir, on ne sait pas gouverner. On peut bien élire un député mais il ne sait pas s'acquitter de ses fonctions. Il ne sait pas ce qu'on attend de lui ou comment faire son travail. Les députés n'ont pas de moyens. À l'Assemblée nationale, il y a un téléphone au bout du couloir pour tout l'immeuble : un seul téléphone, pas de papier, rien.
Même si Mme Cruz-Herrera a dit que l'on ne devrait pas se mêler de quelque forme de développement des partis politiques, c'est un jugement difficile. J'admets qu'on peut s'y prendre de travers. On peut essayer de montrer aux gens comment gouverner et ce n'est pas à nous de financer des partis politiques, mais je n'ai vraiment pas apprécié votre analogie quand vous avez dit : Vous avez le Bloc, le NPD, les conservateurs, les libéraux et que diriez-vous s'il y avait un autre parti politique financé par l'Australie? Ce n'est pas le cas. Nous sommes un pays démocratique et eux ne vivent pas en démocratie. C'est un régime autocratique. Il n'y a personne là-bas qui soit prêt à prendre les rênes et à s'acheminer vers la démocratie et, je crois, dans la démocratisation. Il est très rare que deux pays démocratiques s'en prennent l'un à l'autre et on voit très rarement le genre d'atteintes aux droits de la personne que l'on observe là-bas.
Dans une certaine mesure, je ne suis pas d'accord pour dire que nous ne devrions plus les financer, mais comment pouvons-nous mieux nous positionner ou comment pourrions-nous mieux diriger ce financement de façon à ce que, lorsque la possibilité se présente, nous puissions obtenir l'effet voulu?
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Je vous avoue que ce qui me dérange dans ce débat, et c'est ce que l'on constate aujourd'hui et dans de nombreux cas, c'est cette tendance typiquement canadienne à toujours envisager les choses selon le point de vue de nos voisins du Sud au lieu de réfléchir de façon indépendante. Nous semblons toujours être en réaction à la politique américaine.
J'aimerais connaître votre avis au sujet de la question suivante. Sous l'impulsion de la République tchèque, l'Union européenne a adopté une approche réfléchie et indépendante dans le dossier des droits de la personne à Cuba, en accordant un traitement de faveur évident aux dissidents. Comme vous le savez, l'ambassade de l'Union européenne invite des dissidents notoires à des réceptions organisées au siège de la mission de l'UE à La Havane. La République tchèque invite des dissidents à des conférences et leur offre un soutien intellectuel et pratique qui ne peut être perçu par le régime castriste comme menaçant sa sécurité. Le Canada ne pourrait-il pas s'inspirer de l'approche tchèque, soit une défense indépendante et énergique des droits de la personne, en donnant son appui aux prisonniers politiques et aux dissidents? Voilà pour ma première question.
Et voici ma deuxième. Je ne sais pas si vous connaissez Mme Christine Chenet. Mme Cruz-Herrera a fait de nombreuses références au rapport que Mme Chenet a présenté au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme au sujet de Cuba. Dans ce rapport, Mme Chenet formule des recommandations et j'en résumerai quelques-unes.
Elle recommande au gouvernement de Cuba de prendre les mesures suivantes : mettre fin aux poursuites intentées contre les citoyens ayant exercé des droits garantis par la Déclaration universelle des droits de l'homme; libérer les prisonniers qui n'ont pas commis d'actes violents; revoir les lois qui permettent d'intenter des poursuites criminelles contre des personnes ayant exercé leur liberté d'expression, d'association ou de participation à des manifestations, par exemple; respecter, sans exception, le moratoire sur l'application de la peine de mort; réformer les règles régissant les poursuites criminelles pour les rendre conformes aux principes de la Déclaration universelle; créer un organisme indépendant habilité à recevoir les plaintes de personnes qui estiment qu'on a bafoué leurs droits fondamentaux; revoir la réglementation qui s'applique aux voyages à destination et en provenance de Cuba afin de garantir la libre circulation aux termes de la Déclaration universelle; autoriser les organisations non gouvernementales à se rendre à Cuba; favoriser le pluralisme dans les associations, les syndicats, les médias et les partis politiques; et enfin, adhérer au Pacte international relatif aux droits civils et politiques de même qu'à ses protocoles facultatifs.
Premièrement, le modèle tchèque vis-à-vis de Cuba pourrait-il être pour le Canada un point de repère utile? Et deuxièmement, et cette question s'adresse à vous deux, êtes-vous contre certaines des recommandations de Mme Chenet que je viens de résumer?