CIIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent du commerce international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 27 mars 2014
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
Je tiens à remercier tous nos témoins d'être ici aujourd'hui.
Au cours de la première heure, nous allons entendre Ailish Campbell, du Conseil canadien des chefs d'entreprise. Merci de votre présence. Vous avez déjà comparu devant le comité, et nous avons hâte d'entendre votre témoignage.
Nous accueillons également Jim Keon et Jody Cox, de l'Association canadienne du médicament générique. Merci à vous deux d'être ici aujourd'hui.
Je tiens à préciser que je siège au comité depuis longtemps et que je n'ai jamais vu autant de nouveaux visages autour de la table. C'est formidable. Cette séance s'annonce très intéressante.
C'est exact. Ils déraillent. Voyons voir s'ils vont bien se comporter. Nous allons les mettre à l'épreuve.
Quoi qu'il en soit, nous allons commencer par l'Association canadienne du médicament générique.
Monsieur Keon, la parole est à vous.
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Au nom de l'Association canadienne du médicament générique et de nos compagnies, j'aimerais remercier le comité et ses membres de l'occasion de participer à son étude sur le Partenariat transpacifique.
Je suis accompagné de Mme Jody Cox, vice-présidente de l'association et vice-présidente des Affaires fédérales et internationales. Elle s'occupe de la propriété intellectuelle et aussi du libre-échange pour notre association.
[Traduction]
L'industrie du médicament générique comprend les plus grandes sociétés des sciences de la vie en Ontario et au Québec. Nous sommes les principaux fabricants et exportateurs de produits pharmaceutiques au Canada, et nos dépenses dans la recherche et le développement sont parmi les plus élevées de tous les secteurs industriels.
Les fabricants de médicaments génériques procurent directement de l'emploi à plus de 12 000 Canadiens, principalement en Ontario et au Québec, mais aussi au Manitoba, dans des postes de recherche, de développement et de fabrication hautement spécialisés.
Notre industrie croit fermement en la liberté du commerce. Nous exportons nos médicaments génériques de qualité dans plus de 110 pays, y compris un grand nombre de pays de l'Asie-Pacifique et la plupart des pays membres du PTP. Nous importons aussi de la région de l'Asie-Pacifique beaucoup de matières premières et d'autres constituants de nos médicaments.
L'industrie du médicament générique est tournée vers le marché mondial, et les fabricants canadiens participent tous aux chaînes d’approvisionnement mondiales de plus en plus haut de gamme de leurs sociétés.
En plus de revêtir une grande importance pour l'économie canadienne, cette industrie joue aussi un grand rôle dans le contrôle des coûts des soins de santé au Canada: 65 % des médicaments prescrits au Canada, soit près des deux tiers, sont génériques, mais ils représentent moins de 24 % de la somme totale consacrée annuellement aux médicaments délivrés sur ordonnance au pays.
Nous nous intéressons vivement au PTP depuis le début des négociations. Nous avons pris part aux consultations préliminaires par le truchement du processus de la Gazette du Canada , et nous assistons aux webinaires présentés par la négociatrice en chef. Des membres de l'ACMG, en particulier Jody, ont également participé à certaines rondes de négociations du PTP et aux journées des intervenants tenues pendant les rondes de négociations, dont la négociatrice en chef a parlé un peu plus tôt cette semaine lors de son témoignage. Nous avons également eu des réunions avec des négociateurs de tous les pays membres du PTP.
Nous sommes conscients qu'il ne sera pas facile d'en arriver à un consensus avec 12 parties à la table des négociations. La dynamique est unique. Les politiques, les priorités et les motivations varient d'un pays à l'autre, ce qui rend le processus complexe. Même si les négociations offrent des possibilités dans de nombreux secteurs, cette dynamique présente aussi des risques non négligeables.
Nous avons porté une attention particulière au témoignage de la négociatrice en chef, qui a comparu devant le comité plus tôt cette semaine. Elle a énoncé les objectifs du gouvernement du Canada en ce qui a trait aux produits pharmaceutiques ainsi que sa position actuelle — que nous appuyons — qui est de ne pas outrepasser les lois et politiques canadiennes actuelles. Kirsten Hillman a également indiqué qu'elle et son équipe travaillaient très fort pour atteindre cet objectif.
Il ne serait clairement pas dans l'intérêt des Canadiens d'excéder les limites prévues par les lois et les politiques canadiennes actuelles sur les produits pharmaceutiques, surtout compte tenu de l'équilibre qui a été difficilement et soigneusement établi relativement aux produits pharmaceutiques aux fins de la conclusion d'une entente de principe, annoncée il y a à peine quelques mois, dans le cadre des négociations de l'AECG. Nous serions heureux de vous en parler.
Il y a un large éventail de propositions qui font l'objet de négociations du PTP, et d'autres propositions dont nous avons discuté, mais qui n'ont pas été officiellement présentées. L'industrie du médicament générique craint que certaines de ces propositions permettent des monopoles excessifs qui dépassent les normes canadiennes déjà élevées en matière de propriété intellectuelle. D'autres respectent les droits de propriété intellectuelle sans créer de nouvelles obligations pour les pays membres du PTP.
L'ACMG appuie la position du gouvernement du Canada dans les négociations du PTP à l'égard du régime de PI pour les produits pharmaceutiques. Nous demandons précisément au gouvernement du Canada de refuser de signer un PTP ou tout autre accord commercial s'il renferme des dispositions qui surpassent nos lois, nos politiques et nos obligations issues de traités, y compris les obligations récemment annoncées en vertu de l'AECG à l'égard de la propriété intellectuelle dans le domaine pharmaceutique. Nous prions également les membres du comité d'inclure cette recommandation dans leur rapport sur le PTP.
Quels sont les intérêts de l'industrie du médicament générique dans ces négociations? Du point de vue du marché intérieur, nous voulons nous assurer qu'aucune disposition dans le texte final n'a pour effet de retarder la concurrence des médicaments génériques au Canada. Un accès retardé au marché aurait un impact direct sur la capacité de nos membres d'attirer de nouvelles initiatives de R. et D. et des mandats de production, surtout pour nos principales installations industrielles en Ontario et au Québec. De plus, la concurrence dans le secteur pharmaceutique permet aux Canadiens d'économiser entre 75 et 80 % sur chaque achat. Par conséquent, de longs délais se traduisent par une augmentation du prix des médicaments au Canada.
Étant donné que près de la moitié de notre production nationale de médicaments génériques est exportée, il est crucial de veiller à ce qu'aucune nouvelle barrière commerciale ne soit érigée contre notre industrie. Le résultat final du PTP ne doit en aucune façon miner l'engagement du gouvernement du Canada, pris dans le cadre des négociations de l'AECG, d'autoriser l'exportation sans entraves de médicaments génériques après l'expiration d'un brevet de 20 ans, mais pendant la période de protection accordée par le brevet.
Nous avons examiné le PTP d'un point de vue mondial. Tout comme nos collègues de l'International Generic Pharmaceutical Alliance, avec qui nous travaillons en étroite collaboration, nous nous intéressons au précédent que l'issue des négociations pourrait créer pour les futures négociations. Nous sommes d'avis qu'il faudrait accorder moins d'importance aux dispositions sur la propriété intellectuelle dans les négociations commerciales et davantage à d'autres secteurs, comme l'harmonisation et la coopération en matière de réglementation et la reconnaissance mutuelle des normes d'inspection. Ces secteurs permettent de réduire les coûts et de réaliser des gains d'efficacité et profitent à tout le secteur des sciences de la vie, et non pas à un seul segment.
En plus de réclamer un niveau raisonnable de dispositions sur les DPI dans le domaine pharmaceutique, l'industrie du médicament générique encourage également les négociateurs à déposer des propositions visant à établir des mesures de protection contre l'abus et la mauvaise utilisation des DPI. En pénalisant les contrevenants, les pays contribueront ainsi à assurer un équilibre entre la récompense de l'innovation et la stimulation de la concurrence.
Nous préconisons aussi des dispositions qui permettraient de favoriser la concurrence et d'appuyer les régimes de la propriété intellectuelle efficaces pour les produits pharmaceutiques. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais parmi ces mesures, mentionnons la mise en place d'une solide disposition Bolar, qui est une exception relative à la fabrication anticipée; une meilleure divulgation des brevets, de façon à ce que l'information soit indiquée de manière claire et efficace; et des incitatifs visant à encourager les fabricants de médicaments génériques à contester les brevets et à mettre leurs produits en marché. Je serai heureux de répondre à vos questions à ce sujet.
J'aimerais terminer sur quelques réflexions à propos de la propriété intellectuelle dans le domaine pharmaceutique et des négociations commerciales. Négocier la propriété intellectuelle pour des produits pharmaceutiques, ce n'est pas comme négocier une réduction de tarifs. Une ligne tarifaire peut être réduite bilatéralement ou multilatéralement. Les obligations en matière de propriété intellectuelle dans un accord commercial, quant à elles, font l'objet d'un traitement national. Vous apportez des modifications à vos lois nationales et vous accordez une protection à toutes les inventions peu importe leur origine. Cela ne s'applique pas à un seul pays.
Ensuite, sachez que le Canada avait déjà des niveaux élevés et concurrentiels à l'échelle internationale sur le plan de la propriété intellectuelle pour les produits pharmaceutiques avant l'annonce de l'entente de principe relative à l'AECG. La mise en oeuvre des dispositions de l'AECG sera cruciale.
L'ACMG est conscient que l'industrie des médicaments de marque essaie de saper les engagements importants du gouvernement du Canada qui sont de mettre fin aux doubles litiges en vertu de notre régime sur les liens entre les brevets. Nous craignons qu'elle rende l'exception relative à l'exportation lourde et inapplicable, ce qui ferait en sorte de ne pas préserver les emplois dans le secteur manufacturier au Canada — un objectif que s'était fixé le gouvernement du Canada.
Dans le cadre du PTP, certains pays ont proposé des normes excessives en matière de propriété intellectuelle dans le domaine pharmaceutique, et ces normes désavantageraient les usines de fabrication de médicaments génériques des pays membres du partenariat, dont le Canada. Elles nous placeraient dans une situation désavantageuse par rapport aux pays qui ne sont pas membres du PTP, comme l'Inde et la Chine.
Je termine en disant que des normes excessives en matière de propriété intellectuelle iraient à l'encontre des objectifs du gouvernement du Canada et d'autres pays d'amener d'autres pays, la Corée, entre autres, à adhérer au PTP après l'aboutissement des négociations. Selon nous, cette situation créerait un obstacle majeur que les pays de l'Asie-Pacifique ne seraient pas prêts à accepter.
Je vous remercie de nous avoir donné cette occasion de témoigner. C'est avec plaisir que ma collègue et moi répondrons à vos questions.
Merci.
Très bien.
Madame Ailish Campbell, du Conseil canadien des chefs d'entreprise, la parole est à vous.
Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant le comité dans le cadre de votre étude importante sur les bienfaits pour le Canada de l'accord de partenariat transpacifique.
[Français]
Le Conseil canadien des chefs d'entreprise est un organisme sans but lucratif et non partisan composé de 150 chefs d'entreprise des sociétés les plus importantes au Canada. Nous sommes responsables d'un programme actif de recherche, de consultation et de défense en matière de politiques publiques. Le Conseil canadien des chefs d'entreprise est à l'origine de commentaires bien réfléchis et fondés sur la perspective des affaires et sur des questions d'importance nationale liées à la structure économique et sociale du Canada.
[Traduction]
Au nom du Conseil canadien des chefs d’entreprise, je vais aujourd’hui répondre à trois questions concernant le Partenariat transpacifique. Premièrement, pourquoi le Canada devrait-il adopter une approche ambitieuse à l’égard du PTP? Deuxièmement, en quoi consisterait un résultat favorable dans le cadre des négociations du PTP? Troisièmement, quelles autres mesures les entreprises et les gouvernements canadiens devraient-ils prendre pour tirer parti des débouchés que leur offre l’Asie?
Premièrement, pourquoi le Canada devrait-il adopter une approche ambitieuse à l’égard du PTP
Le PTP est un partenariat qui, avec ses membres actuels, générerait annuellement près de 28 billions de dollars en production économique. La région représente 40 % de la production économique mondiale. Un résultat ambitieux permettrait de réduire les obstacles pour les sociétés canadiennes qui auront accès à un marché d’environ 800 millions de consommateurs. Si le PTP demeure ouvert à d’autres membres, comme le recommande le CCCE, ce marché pourrait prendre encore plus d’expansion.
Pourquoi le Canada devrait-il prendre part au PTP et avoir une stratégie à l’égard de l’Asie? La réponse est simple. L’Asie est un moteur puissant de la croissance mondiale. Il est essentiel que les sociétés canadiennes et le gouvernement canadien s’engagent pleinement avec la région pendant cette période remarquable de transition économique et géopolitique.
Les exportations de marchandises canadiennes dans les 10 pays de l’ANASE, en plus de la Chine, de Hong Kong, de l’Inde, du Japon et de la Corée, ont doublé au cours de la dernière décennie et représentent maintenant 2,2 % du PIB canadien. Toutefois, le Canada ne saisit pas toutes les occasions. Les exportations du Canada en Asie — encore une fois, 2,2 % du PIB — sont dérisoires par rapport à celles de l’Allemagne, 5,7 %, et de l’Australie, 10,8 %. Il y a manifestement place à l’amélioration dans divers secteurs, en particulier, dans le secteur de l’énergie.
Le prix du gaz en Asie est trois à quatre fois supérieur à celui de l’Amérique du Nord. Même si on atteignait un prix qui se rapproche des niveaux de l’Europe pour les exportations de gaz naturel liquéfié, l’incidence sur le PIB du Canada pourrait être de plus ou moins 28 milliards de dollars par année. Cela ajouterait 6 milliards de dollars en recettes pour tous les ordres de gouvernement, selon une étude publiée en 2013 par Kevin Lynch et Karen Miske.
Des relations plus étroites entre les gens, les sociétés et les gouvernements, dans le cadre d’une stratégie pour l’Asie, permettraient forcément d’élargir les débouchés pour nos produits énergétiques. Le PTP est un élément clé — parmi d’autres — d’une stratégie canadienne à l’égard de l’Asie.
Deuxièmement, en quoi consisterait un résultat favorable dans le cadre des négociations du PTP?
Un résultat favorable se traduirait par l’adoption d’une liste tarifaire qui élimine tous les droits de douane. Ce serait aussi l’établissement de règles d’origine simples favorisant le cumul à l’échelle de la région. Ainsi, un producteur pourrait produire un produit exempt de droits à l’intérieur de la région du PTP et l’acheminer aux consommateurs.
Des règles d’origine simples sont essentielles pour le Canada, étant donné que de nombreuses sociétés importent des intrants, y ajoutent de la valeur, créent un produit final, puis l’exportent. Il est important d’avoir des règles d’origine simples, particulièrement pour les petites entreprises qui ne bénéficient pas de services juridiques ou d’équipes de conformité. Des règles complexes représentent des coûts.
Par bon résultat, on entend aussi la libéralisation des services et l'élaboration de règles communes relatives aux biens de consommation, à l’industrie agroalimentaire, à la santé et à la sécurité, ainsi qu’à la réglementation, comme Jim l’a indiqué dans sa déclaration. Les barrières non tarifaires doivent également être transparentes, et les pays membres du PTP doivent travailler à les éliminer. Un résultat ambitieux signifie aussi l'imposition de mesures disciplinaires aux sociétés d’État, de sorte que les sociétés axées sur le marché peuvent se faire concurrence, de manière équitable, à l’intérieur de la région du PTP. Il est également indispensable d’établir de solides règles communes en matière d’investissement et de propriété intellectuelle.
Ensuite, le PTP devrait inclure un accès total au marché agricole. Le PTP promet un accès à un marché de 800 millions de consommateurs et à un nombre croissant de consommateurs de la classe moyenne. Ces consommateurs achèteront des produits agroalimentaires et des fruits de mer de qualité. La conclusion d’un accord ambitieux, qui comprend un accès aux secteurs protégés au Japon, aux États-Unis et ailleurs, obligerait le Canada à ouvrir ses marchés agricoles. Si les droits élevés sur nos produits agricoles et nos quotas ne sont pas éliminés, l’accès du Canada aux autres pays s’en trouvera en retour réduit. Tout dépend, encore une fois, du niveau d’ambition de l’accord final du PTP.
Troisièmement, le PTP devrait renfermer des mesures de protection environnementales et des lois du travail rigoureuses.
Le PTP ne doit pas être une compilation des accords bilatéraux conclus entre chacun des partenaires. Il ne doit pas non plus être un accord en étoile dans lequel un pays jouit d’un meilleur accès que tous les autres partenaires. Par exemple, une élimination plus rapide des tarifs agricoles pour un pays mais pas pour les autres serait très néfaste. Certains économistes qualifieraient ce résultat de sous-optimal; je préfère employer le terme « néfaste ».
Cela pourrait également se traduire par des règles d’origine plus libérales pour des produits provenant d’un pays et pas des autres. Ce serait néfaste. Une plus grande libéralisation dans le secteur de l’automobile pour un pays, mais qui ne s’applique pas aux autres partenaires, serait tout aussi défavorable. Un mauvais résultat donnerait lieu à un fouillis de règles incompréhensibles que les entreprises pourraient ignorer en raison des coûts qu'elles engendreraient. Dans le pire des cas, de tels résultats pourraient nuire aux échanges commerciaux avec la région du Pacifique. En bref, le PTP doit être ambitieux, simple et facile à mettre en œuvre pour les sociétés, inclure la libéralisation des produits agricoles et renfermer des lois rigoureuses sur l’environnement et le travail.
Troisièmement, quelles autres mesures les entreprises et les gouvernements canadiens devraient-ils prendre pour tirer parti des débouchés que leur offre l’Asie?
En termes simples, le Canada a besoin d’une stratégie plus claire et mieux coordonnée à l’égard de l’Asie, assortie d’objectifs à court et à long terme en ce qui a trait aux échanges commerciaux, aux investissements et aux personnes. Un PTP ambitieux est un élément clé de cette stratégie, mais selon le CCCE, il ne peut pas être le seul élément de notre engagement avec l’Asie, et il ne l’est pas. Tout d’abord, il manque des pays essentiels aux chaînes de valeur mondiales, comme la Chine, qui abrite des millions de consommateurs. Ensuite, le PTP pourrait progresser à un rythme plus lent que prévu. Par conséquent, le Canada doit accorder la priorité à ses négociations avec le Japon et l’Inde, et il faut se réjouir de l’accord de libre-échange avec la Corée du Sud. L’ALE avec la Corée doit être mis en œuvre le plus rapidement possible afin que les sociétés canadiennes ne soient plus désavantagées.
Le Canada devrait former un partenariat stratégique avec la Chine, semblable à celui de l’Australie, afin de renforcer le commerce dans des secteurs d’intérêt mutuel, ou faire comme la Nouvelle-Zélande et conclure un accord de libre-échange avec la Chine qui a fait quadrupler les exportations entre ces deux pays.
Pour ce qui est de la stratégie à l’égard de l’Asie, le Canada devrait également se pencher sur ce que font ses compétiteurs qui possèdent des structures économiques et politiques semblables. En plus des accords bilatéraux que je viens de décrire, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont ce que j’appelle un plan B pour la région, le partenariat économique exhaustif régional, ou PEER, avec les 10 pays de l’ANASE en plus du Japon, de la Corée, de l’Inde et de la Chine. J’encouragerais le comité à examiner les négociations du PEER, qui vise trois milliards de personnes.
J’encouragerais le comité à s’interroger sur le plan B du Canada. Le Canada doit-il se contenter des négociations actuelles ou prendre d’autres mesures pour intensifier son engagement auprès de pays comme la Chine? En ce qui les concerne, des sociétés de toutes les tailles exigent des stratégies pour des marchés asiatiques précis: pays, régions et même villes.
En 2011, le Conseil canadiens des chefs d’entreprise a lancé une initiative pluriannuelle destinée à sensibiliser les Canadiens à l’influence et au pouvoir économique grandissants de l’Asie et à trouver des solutions stratégiques qui permettraient à notre pays de se tailler une place dans une économie mondiale en pleine évolution. Les résultats de cet exercice sont affichés sur notre site Web à l’intention du public, des chercheurs en politiques et des sociétés. Nous poursuivons cette étude. En partenariat avec Deanna Horton, de la Munk School of Global Affairs, et ses étudiants à la maîtrise, nous avons créé une carte Canada-Asie qui indique la présence des milliers de sociétés canadiennes dans la région de l’Asie. Nous avons entrepris ce travail, et une partie des résultats sera publiée bientôt.
Je tiens à souligner qu’il ne suffit pas d’examiner les exportations de marchandises canadiennes pour comprendre l’activité commerciale du Canada. Le comité aurait intérêt à demander à Statistique Canada de faire le point sur sa façon de mesurer le commerce et les services, les ventes des sociétés étrangères affiliées, les coentreprises et d’autres nouvelles formes de relations commerciales entre les sociétés canadiennes et asiatiques, ainsi que sur les ventes actuelles des sociétés canadiennes sur les marchés asiatiques.
Pour conclure, des marchés ouverts, une réglementation rigoureuse, une main d’oeuvre saine et qualifiée et d’excellents produits font du Canada une destination de choix pour l’investissement et la production. Le Canada est une économie ouverte dont les droits de douane sont déjà peu élevés. Par conséquent, les accords commerciaux ont tendance à abaisser les barrières des autres pays de façon disproportionnée.
En plus de nos accords robustes avec les États-Unis, le Mexique, et maintenant avec l'Union européenne, par l'intermédiaire de l'AECG, la mise à jour de nos relations commerciales avec les États-Unis et le Mexique doit demeurer une priorité. Toutefois, je dirais qu'en plus de ces deux théâtres d'engagement — l'Amérique du Nord et l'Europe —, le Canada doit adopter une troisième stratégie afin de s'engager davantage auprès de l'Asie.
Un dénouement ambitieux des négociations du PTP n'est qu'un élément parmi d'autres. Ce serait une erreur monumentale que de ne pas élaborer de stratégie à l'égard de l'Asie. Mettons les choses au clair: le PTP n'est pas le résultat. C'est le processus qui permet au gouvernement de prendre position en encourageant l'investissement au Canada et la vente de produits canadiens sur des marchés asiatiques, en créant des emplois et en stimulant l'économie canadienne.
Merci.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à la période des questions.
Nous allons commencer par Mme Liu. La parole est à vous.
Merci, monsieur le président. Merci également aux témoins d'être ici aujourd'hui.
Je vais adresser ma première question à M. Keon. Tout d'abord, le MAECI a-t-il consulté votre association concernant le PTP? Si oui, de quelle façon s'y est-il pris?
Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration, nous avons participé dès le départ au processus de la Gazette du Canada. Nous avons suivi les présentations grâce aux webinaires. Nous avons eu la possibilité d'exprimer nos points de vue aux négociateurs. De plus, nous faisons partie de l'International Generic Pharmaceutical Alliance, alors nous échangeons des renseignements avec nos homologues de l'industrie du médicament générique d'autres pays. Donc oui, grâce à ces mécanismes, nous avons eu la possibilité de présenter nos opinions.
Le procès-verbal de vos réunions avec... [Note de la rédaction: inaudible] est-il disponible? Ces réunions sont-elles publiques ou tenues à huis clos?
Non, nous avons présenté nos opinions lors de ces réunions. Le mémoire que nous avons soumis au gouvernement se trouve sur notre site Web. Nous avons toujours eu les mêmes positions.
Merci beaucoup.
Comme vous l'avez dit, à l'instar de l'AECG, le chapitre sur la propriété intellectuelle du PTP pourrait entraîner une augmentation du coût des médicaments. Est-ce vrai? A-t-on mené une étude dans le contexte du PTP afin d'évaluer l'incidence du chapitre sur la PI sur le coût des médicaments au Canada?
En vertu de l'AECG, il y aura une prolongation de la période de protection des brevets au Canada. Cela a fait l'objet de discussions. L'entrée tardive sur le marché de médicaments génériques, qui sont beaucoup moins chers, pourrait faire augmenter les coûts.
Comme on l'a indiqué plus tôt cette semaine lors de la comparution de la négociatrice en chef canadienne, la position du Canada, telle que nous la comprenons, est que nous ne devrions pas accorder davantage de protection en ce qui concerne la propriété intellectuelle dans le cadre du Partenariat transpacifique. Le Canada a déjà des dispositions de propriété intellectuelle dans le domaine pharmaceutique qui vont bien au-delà de ce que demandent nos partenaires commerciaux, alors nous sommes convaincus qu'il ne faut pas prolonger la durée de validité des brevets au Canada. Si c'est le cas, à ce moment-là, on ne devrait pas imposer de coûts supplémentaires au système pharmaceutique canadien.
Pour résumer, nous croyons savoir que les récentes versions du chapitre sur la PI comprennent plus d'une dizaine de mesures qui limiteraient la concurrence et qui pourraient faire augmenter le coût des médicaments, y compris, comme vous l'avez indiqué, des dispositions qui auraient pour effet de prolonger la durée des brevets au-delà de 20 ans et d'affaiblir les normes pour obtenir un brevet. Par conséquent, quelle en serait l'incidence sur les patients canadiens et le régime d'assurance-maladie?
Encore une fois, nous sommes d'avis que le Canada ne devrait pas aller plus loin que ce qui a été récemment conclu avec les Européens. Nous avons une protection des brevets, mais dans cet accord, en vertu de l'accord de principe et selon des déclarations très claires du gouvernement du Canada, la protection des brevets sera prolongée de deux ans. Il est très important pour notre industrie que durant cette période, les fabricants génériques puissent développer des produits à des fins d'exportation vers des pays où les brevets ont expiré ou ne sont pas en vigueur. C'est essentiel si nous voulons soutenir la concurrence et attirer des investissements au Canada. Nous avons beaucoup insisté là-dessus dans le cadre des négociations. Nous aimerions que le comité formule des recommandations en ce sens.
Si je puis me permettre, sachez qu'il y a un vaste éventail de propositions qui font l'objet de négociations. Certaines pourraient avoir un impact négatif si toutes les parties les approuvaient. Il y a 12 pays qui prennent part aux négociations. Il y a aussi de bonnes propositions qui ont été présentées. À ce stade-ci, il est très difficile de dire quelle sera l'issue des négociations et, comme l'a dit la négociatrice en chef mardi, le Canada négocie fort pour s'assurer que le résultat final de l'AECG n'outrepasse pas les lois ni les politiques canadiennes.
Merci.
Madame Campbell, l'industrie aérospatiale est très importante pour ma circonscription, qui se trouve sur la rive nord de Montréal. On y trouve également un important fabricant d'autobus hybrides. Selon vous, qu'est-ce que le PTP représente pour ces industries?
Ces industries pourraient déplacer plus de gens, étant donné qu'on parle d'un marché de 800 millions de personnes.
Il y a des villes qui recherchent des solutions de transport de pointe... nous voyons de plus en plus d'aéroports régionaux, donc lorsqu'il s'agit de la série C de Bombardier, par exemple, et d'autres aéronefs, on vise des marchés régionaux, on ne cherche pas nécessairement à traverser le Pacifique. Le commerce interrégional en Asie croît à un rythme très rapide en raison du développement. On veut des solutions de train léger, des autobus et tout ce qui fait appel à des technologies propres, comme les autobus à hydrogène qui ont permis de déplacer les gens lors des Jeux olympiques de Vancouver. Pourquoi ne pas rejoindre un plus grand nombre de consommateurs qui pourraient ainsi bénéficier de ces merveilleux produits canadiens?
Ce sont de bonnes nouvelles.
Vous avez également parlé du fait que le PTP pourrait nous donner accès à de nouveaux marchés, même si le Canada a déjà conclu des accords commerciaux avec bon nombre des pays qui font partie de ce partenariat.
Selon vous, quelle serait l'éventuelle part du marché du Canada si ces négociations se révélaient être un succès?
Nous avons conclu une entente avec chacun de ces pays dans le cadre des négociations de l'Organisation mondiale du commerce, les systèmes commerciaux multilatéraux, et à bien des égards, je pense que nous aurions préféré que les négociations du cycle de Doha de l'OMC permettent d'établir des règles communes, de sorte que nous ayons tous accès au marché asiatique et que ces mêmes règles s'appliquent à la Chine, par exemple. Toutefois, il y a des aspects importants de l'approvisionnement du gouvernement, des services et de l'investissement qui ne sont pas couverts par les règles de l'OMC. Sans une entente régionale comme le PTP, nous ne pouvons pas percer dans ces nouvelles formes de services et, entre autres, amener des gens hautement qualifiés pour mener à bien des projets précis et d'ingénierie au Québec, par exemple, ce qui est très important.
Pourriez-vous nous dire quelle est la part du marché que nous obtiendrions ou s'il n'y a pas de chiffre...
Étant donné que nous ne connaissons pas encore la teneur de l'accord, il est difficile de faire des prévisions, mais nous pourrions certainement les modéliser en fonction des diverses options qui s'offrent à nous.
Merci, monsieur le président, et merci encore une fois à vous deux d'être ici aujourd'hui et de nous transmettre votre sagesse et vos connaissances et merci aussi aux négociateurs qui continuent leur excellent travail, au nom des Canadiens, dans le but d'établir des règles équitables pour nos débouchés commerciaux partout dans le monde. La négociatrice en chef a comparu la semaine dernière et a fait allusion aux consultations avec les intervenants.
Lorsque Mme Hillman a parlé de la rétroaction des groupes... On entend beaucoup parler du manque d'ouverture et de transparence. Mme Hillman a dit qu'elle n'avait jamais vu auparavant de telles journées consacrées aux intervenants qui permettent aux parties intéressées de consulter, non seulement les négociateurs canadiens, mais aussi les négociateurs d'autres pays.
Je demanderais donc à chacun d'entre vous de nous en parler davantage. Croyez-vous qu'on a un bon équilibre entre la confidentialité et la transparence et qu'on répond aux besoins de l'industrie?
Je vais commencer, puis je vais laisser Jody vous dire quelques mots, étant donné qu'elle a participé aux journées des intervenants dans le cadre des négociations.
Comme je l'ai dit précédemment, nous avons eu la possibilité de faire connaître nos positions. Je pense que les négociateurs étaient ouverts et ont mis de l'avant les principes de négociation du Canada, donc d'une certaine façon, oui, nous avons pu nous exprimer. Nous n'avons pas vu de texte officiel. Il y a souvent des fuites, et les textes se retrouvent sur Internet. Toutefois, comme ils ne sont pas datés, on ne sait pas s'ils sont à jour et ils ne nous sont pas nécessairement utiles. Pour ce qui est des principes et de l'approche globale, l'ACMG considère qu'elle a été entendue et que ses opinions ont été prises en considération.
Maintenant, comme je vous l'ai dit, je vais laisser Jody parler des séances consacrées aux intervenants.
Merci, Jim.
J'ai eu la possibilité de participer à deux des journées des intervenants dont Mme Hillman a parlé. L'un de ces événements s'est déroulé à Brunei et l'autre à Kota Kinabalu — je ne sais pas si je l'ai bien prononcé —, en Malaisie. Je pourrais vous donner un peu d'information sur l'organisation de ces journées et sur mon expérience.
En matinée, il y avait des présentations de différents intervenants. Si on voulait faire un exposé, il fallait en informer le pays hôte et le Canada. Les exposés duraient 10 minutes. J'ai eu la possibilité d'en faire un lors des deux différentes rondes. Dans la salle — la négociatrice en chef avait raison —, il y avait quelques intervenants, évidemment, mais il y avait probablement 100 ou 150 personnes de différentes équipes de négociation de tous les pays membres du PTP. Après les exposés, les gens pouvaient poser des questions et ils voulaient connaître le point de vue de l'industrie, ses propositions et ce genre de choses.
Encore une fois, étant donné que tous ces gens sont réunis dans une même salle, c'est une expérience incroyable de pouvoir rencontrer les différents négociateurs en chef et les négociateurs en matière de propriété intellectuelle des différents pays afin d'entendre leurs opinions.
Somme toute, ces journées des intervenants ont été une expérience très enrichissante, et j'espère qu'on continuera d'utiliser ce modèle à l'avenir.
Merci.
Je vais dire deux choses. Tout d'abord, je considère que les vastes consultations sont essentielles. Le CCCE, par exemple, appuie fermement la récente conclusion de l'accord de libre-échange avec la Corée du Sud. Ce ne sont toutefois pas toutes les sociétés membres du CCCE qui y sont favorables. Certains de nos représentants du secteur de l'automobile ont exprimé clairement leurs préoccupations à l'égard de cet accord, entre autres. Nous devons tenir compte de ces opinions divergentes et travailler avec nos homologues américains et européens sur la levée des obstacles non tarifaires dans le marché sud-coréen. Cela nous préoccupe.
Je dirais qu'il est important de rejoindre beaucoup de gens et de tenir des consultations les plus larges possible afin de permettre à des sociétés, ainsi qu'à des associations comme la nôtre, de se faire entendre.
Ensuite, en plus de ces journées consacrées aux intervenants et de la grande ouverture dont fait preuve le gouvernement dans le cadre de ses consultations, je recommanderais fortement de créer un conseil consultatif ministériel, composé non seulement du ministre du Commerce, mais aussi d'autres ministres étroitement liés au développement rural, notamment le ministre des Finances et le ministre de l'Agriculture. On a déjà vu ces tables ministérielles par le passé, et le CCCE estime qu'on devrait remettre sur pied ces conseils qui pourraient alimenter les futurs dialogues et discussions.
Merci.
Ma prochaine question concerne l'ampleur de cet accord.
Comme vous l'avez indiqué, madame Campbell, nous parlons d'un marché de 20 billions de dollars et de près de 800 millions de personnes. Nous avons aussi l'AECG, qui représente environ 17,5 billions de dollars et 500 millions de consommateurs. L'ALENA, quant à lui, donne accès à plus de 450 millions de consommateurs et à une activité économique de 17 billions de dollars. Si le Canada parvient à conclure cette entente, il s'agira de l'accord de libre-échange le plus impressionnant jamais conclu à ce jour. Je suis très emballé par toutes les possibilités que cet accord nous offrira.
Le problème, comme vous l'avez dit, c'est que plus nous avançons, plus nous devons y aller étape par étape afin de nous assurer que cet accord est dans le meilleur intérêt de tous les Canadiens. Au moment de conclure l'AECG, les fabricants de médicaments génériques étaient préoccupés par le coût des médicaments. Le Conference Board avait publié un rapport qui révélait que les dépenses des entreprises canadiennes dans la R-D dans le domaine pharmaceutique n'atteignaient pas la moitié de la moyenne. Nous devons fournir des possibilités plus attirantes et adopter une approche raisonnable et équilibrée.
Toutes ces ententes sont bien belles, mais nous devons encourager les entreprises canadiennes à saisir ces occasions. Le gouvernement doit établir des règles équitables et éliminer la bureaucratie pour ensuite laisser le champ libre aux entreprises. Que pouvez-vous faire pour aider le gouvernement et les entreprises à tirer profit de ces accords de libre-échange?
Tout d'abord, nos 150 membres sont responsables de la grande majorité des exportations canadiennes et de la R et D. La solution, c'est d'engager davantage de sociétés canadiennes. Il faut qu'il y ait davantage de petites et moyennes entreprises canadiennes qui soient au courant des possibilités qui s'offrent à elles. À cet égard, le Service des délégués commerciaux du Canada, Exportation et Développement Canada et la Banque de développement du Canada sont des outils essentiels. Le gouvernement ne peut pas nécessairement espérer couvrir toutes ces régions dont vous avez parlé avec les ressources actuelles. Nous estimons qu'il serait bon d'avoir davantage de ressources, en particulier pour le marché asiatique, de sorte qu'on ne sacrifie pas l'excellent travail d'EDC, de la BDC et du Service des délégués commerciaux du Canada en Europe et en Amérique du Nord.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier les témoins d'être avec nous aujourd'hui. Vous aviez déjà comparu au sujet de l'UE, et vous aviez une perspective un peu différente de celle du PTP.
Je présume que je vais vous poser ma première question, monsieur Keon. Parmi les pays du PTP, lesquels ont probablement les droits ou les règlements les plus généreux en matière de protection des brevets? Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n'avez pas dites, mais quel pays pourrait vous poser un problème? Quel pays conserve son droit d'avoir des règlements généreux en matière de brevets?
Je crois que les règlements varient énormément entre les pays, et qu'ils diffèrent de plusieurs façons.
Par exemple, on considère habituellement que les États-Unis représentent le pays agressif en matière de propriété intellectuelle, et qu'ils souhaitent qu'on applique des niveaux de protection plus élevés. Si nous comparons les États-Unis au Canada, dans le secteur pharmaceutique, le Canada profite actuellement — ou il en profitera après l'AECG — de la prolongation de la durée des brevets. Les États-Unis ont aussi la prolongation de la durée des brevets. Au Canada, le régime sur les liens entre les brevets est très restrictif et très coûteux, et nous espérons l'améliorer.
Ce que j'essaie de faire valoir, c'est qu'on considère que les États-Unis défendent énergiquement la protection de la PI, mais je crois que le Canada a déjà un solide régime en matière de PI, et que nous ne sommes pas autant visés que d'autres pays.
C'est ce que je pensais que vous alliez dire au sujet des États-Unis, mais n'avons-nous pas déjà une entente de libre-échange avec ce pays?
Eh bien, l'Accord de libre-échange nord-américain contient un chapitre sur la propriété intellectuelle et des obligations que le Canada respecte évidemment. En théorie, si certains éléments sont présents, le Partenariat transpacifique pourrait aller plus loin et exiger des niveaux de protection de propriété intellectuelle plus élevés fondés sur des propositions qui ont été formulées par quelques pays.
Pourquoi donc les États-Unis demanderaient-ils une protection en matière de brevets plus généreuse s'ils ne l'ont pas déjà...?
Eh bien, ils ont... Ils font des choix. Je dirais qu'ils font du picorage. Je ne crois pas que les États-Unis soient prêts à modifier sensiblement leurs lois sur la propriété intellectuelle en raison du PTP. Je ne crois pas que cela va arriver. Toutefois, l'industrie des produits biologiques et l'industrie des produits pharmaceutiques sont très puissantes et exercent une grande influence auprès des représentants de commerce américains, et elles adoptent donc leur position...
D'accord. J'ai une dernière question, et je m'adresserai ensuite à Mme Campbell. Vous disiez que la propriété intellectuelle n'avait rien à voir avec les droits de douane. Dans votre industrie, qu'est-ce qui est le plus important? Les droits de douane ou la propriété intellectuelle?
En général, les droits de douane liés aux produits pharmaceutiques ne représentent pas un gros obstacle au commerce. Notre industrie a besoin d'un accès rapide aux produits destinés à l'exportation. Ce qui nous préoccupe, c'est de maintenir un accès rapide.
Merci.
Madame Campbell, c'était un exposé intéressant, mais qu'est-ce qui est le plus important pour vos membres? Les droits de douane? Les règlements? Je crois que vous avez également parlé de règles d'investissement. Parmi tous ces éléments immatériels ou tous ces points, lequel serait le plus important pour vos membres?
Je crois que c'est une excellente question. Nos membres viennent de tous les secteurs de l'économie, et cela dépend donc de chaque secteur.
Pour nos exportateurs de produits agroalimentaires et nos producteurs d'énergie qui ont des ressources qu'ils ne peuvent pas déplacer dans la région, sauf par l'entremise de formes d'exportation traditionnelles, les droits de douane et les obstacles non tarifaires comme les normes représentent l'élément le plus important.
Nous constatons qu'un grand nombre de nos entreprises de services ont leur siège social à Toronto, à Vancouver, à Calgary et ailleurs, et qu'ensuite elles établissent leurs bureaux de vente, que ce soit par l'entremise de coentreprises ou d'autres initiatives, dans les régions. C'est à ce moment que la mobilité des personnes devient importante, ainsi que diverses formes de libéralisation des services.
Cela dépend vraiment de chaque secteur.
D'accord.
En ce qui concerne les avantages, lorsque nous étions à Vancouver, nous avions l'impression que le PTP était plus important que l'AECG sur la côte Ouest. À Halifax, il nous semblait que l'AECG était plus important que le PTP. Est-ce également l'impression que vous donnent vos membres?
J'ai l'impression que les provinces sont plus préoccupées par les ententes qui correspondent à leurs exportations.
Par exemple, la Colombie-Britannique a plus de 50 % de ses exportations... Encore une fois, nous parlons de commerce des marchandises, et je crois que ces données ne sont plus à jour et ne reflètent pas l'empreinte économique réelle du Canada à l'échelle mondiale, mais de toute façon, 50 % des marchandises exportées par la Colombie-Britannique sont envoyées en Asie, et il est donc évident que cet accord préoccupe davantage la province. Mais si vous allez sur la côte Est, vous constaterez que Clearwater, le plus gros producteur de fruits de mer au Canada, aimerait beaucoup vendre plus de produits en Asie. Je pense donc que les choses ne sont pas si simples à l'échelle macro.
Se plaint-on du fait qu'il faut transporter des biens d'un bout à l'autre bout du pays pour les amener sur chaque côte? Est-ce que vos membres vous ont parlé de cela?
La logistique et les ports demeurent essentiels, peu importe les accords commerciaux signés par le Canada.
Merci, monsieur le président. J'aimerais également remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
Je vais d'abord m'adresser à l'ACMG.
Monsieur Keon, on m'a dit que dans vos commentaires, vous aviez exprimé certaines préoccupations sur les négociations en cours. J'aimerais que vous approfondissiez ces préoccupations et que vous nous précisiez les obstacles non tarifaires auxquels l'ACMG fait face actuellement dans les pays du PTP et qui pourraient être résolus grâce à ces négociations.
Merci.
En tant qu’industrie des produits pharmaceutiques génériques du Canada et en tant qu'industrie pharmaceutique générique à l'échelle mondiale, notre objectif général est d'augmenter les occasions d'exportation. Nous voulons exporter des médicaments de bonne qualité partout dans le monde. Le Canada a une bonne réputation en ce qui concerne les médicaments génériques. Nous sommes dans ce domaine depuis des décennies, et Santé Canada a des normes réglementaires très élevées. Partout dans le monde, les médicaments génériques approuvés par le Canada sont en demande et on considère qu'il s'agit de médicaments de qualité.
Maintenant, de temps en temps, on soulève des questions sur les médicaments qui viennent de plusieurs pays. Il s'ensuit que l'une des choses que nous aimerions voir dans le PTP, au-delà de la propriété intellectuelle et des droits de douane — et je répondrai plus tard à la question sur les droits de douane —, c'est, dans les négociations commerciales en général, un mouvement vers le renforcement et l'harmonisation des normes réglementaires et la réduction des coûts, l'amélioration de l'efficacité et une plus grande coopération dans le cadre des inspections entre les organismes. Santé Canada ne peut pas vérifier toutes les agences du monde. L'organisme doit avoir l'assurance que les usines sur lesquelles nous comptons livrent des produits de qualité. C'est un élément important.
En ce qui concerne les droits de douane, comme je l'ai mentionné, en général, ils ne sont pas très élevés dans le domaine pharmaceutique et ils ne représentent pas vraiment un obstacle. Nos entreprises membres ne sont pas particulièrement préoccupées à cet égard. Nous appuyons l'élimination des droits de douane en tant que principe général. Nous importons des produits de partout dans le monde et nous vendons nos produits à l'échelle mondiale. Nous aimerions que les droits de douane sur les produits pharmaceutiques soient complètement éliminés, mais ils ne représentent pas un obstacle.
En ce qui concerne la propriété intellectuelle, encore une fois, notre industrie est axée sur l'exportation. Environ 50 % de notre production nationale est exportée. Nous croyons qu'il est essentiel que les entreprises canadiennes aient rapidement et légalement accès à la fabrication de produits, afin que nous ne retardions pas leur mise en marché, car il s'agit vraiment de marchés internationaux et les investissements dans les produits pharmaceutiques génériques seront effectués dans les pays où il est légal de fabriquer des produits rapidement.
J'aimerais brièvement ajouter quelque chose en réponse à votre question sur les préoccupations particulières, car elles varient grandement selon le point de vue adopté. Encore une fois, certains pays ont présenté de très bonnes propositions, tandis que d'autres font l'objet de discussions et peuvent soulever des préoccupations importantes. En raison de la nature complexe de la propriété intellectuelle, nous pourrions peut-être vous faire parvenir un document qui expliquerait ces préoccupations plus en détail.
Oui, merci. Nous serions heureux de recevoir ce document par l'entremise du président.
Madame Cox, j'allais vous poser une question au sujet de votre participation à la journée des intervenants qui, comme vous l'avez dit, s'est déroulée à Brunei et en Malaisie. Quels points clés avez-vous fait valoir au nom de l'ACMG au cours de ces présentations?
Merci beaucoup.
Parmi les points clés, j'ai d'abord parlé de notre industrie et de l'importance de la fabrication et de l'exportation des produits pharmaceutiques pour le Canada, ainsi que pour un grand nombre d'autres pays. Il est important de veiller à ce que le PTP ne crée pas de nouveaux obstacles au commerce des produits pharmaceutiques génériques pour les entreprises canadiennes et pour les pays membres du PTP. Ensuite, j'ai fourni certains des renseignements que Jim a malheureusement été forcé d'escamoter dans son exposé, notamment des éléments que nous aimerions voir dans les accords commerciaux au-delà de la coopération et de l'harmonisation en matière de réglementation, c'est-à-dire des éléments liés à la propriété intellectuelle, par exemple l'exception relative à la fabrication anticipée.
Le Canada, par exemple, a prévu une importante exception relative à la fabrication anticipée pour les médicaments génériques, ce qui permet de les mettre sur le marché aussitôt que le brevet est expiré et d'éviter les retards supplémentaires. J'ai parlé de la divulgation des meilleures utilisations dans les brevets, afin que le moyen le plus efficace de créer une invention soit divulgué dans le brevet.
De plus, j'ai souligné que les mesures incitatives à l'égard des médicaments génériques permettaient d'attirer l'attention sur les brevets douteux ou inutiles, car encore une fois, les pays comptent sur l'industrie des produits pharmaceutiques génériques pour contester ces brevets douteux et inutiles, afin de favoriser la concurrence sur le marché. Il est donc très important pour notre industrie de fournir des mesures incitatives qui permettent aux entreprises de faire cela.
Madame Campbell, dans votre exposé, vous avez présenté plusieurs scénarios pour résumer ces préoccupations, y compris le résultat de la configuration en étoile que vous n'appuyez pas. Votre organisme est-il réellement préoccupé par le fait que les négociateurs pourraient se retrouver avec un résultat qui profiterait à un seul pays et non à tous les États membres?
J'ai présenté cela sous la forme d'un scénario pour le comité. Nous ne devrions jamais oublier que notre pays n'a pas grand poids dans ces négociations. Sur le plan géopolitique, nous ne possédons pas les mêmes moyens de projection militaire et la même puissance brute que les autres participants. Ces éléments peuvent parfois représenter un avantage immatériel dans les négociations. Nous devrions garder cela à l'esprit jusqu'à ce que nous soyons certains qu'une liste trafifaire unique est négociée.
Actuellement, comme vous le savez peut-être, d'après ce que je comprends, les négociations sont menées de façon bilatérale, et l'objectif est de transformer ensuite ces gains en gains multilatéraux pour toutes les parties. En attendant, nous devrions simplement admettre qu'il est possible que nous nous retrouvions avec une série d'ententes bilatérales rassemblées sous le titre de PTP. À notre avis, ce ne serait pas une bonne chose, car comme je l'ai dit, les entreprises trouveraient très difficile de respecter 11, 12 ou 13 listes tarifaires et de déplacer leurs produits dans la région.
Nous espérons certainement que ce ne sera pas le cas.
D'accord. Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions. Il reste environ 10 minutes avant que nous devions nous préparer pour la prochaine séance, et c'est pourquoi vous avez chacun quatre minutes.
Allez-y, monsieur Côté. Vous avez la parole.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame Campbell, c'est un vrai plaisir de vous écouter.
Dans votre présentation, vous avez dit que le Canada doit faire preuve d'ambition et établir une stratégie pour son approche concernant les pays asiatiques. Vous avez parlé entre autres de l'Australie. Le gouvernement travailliste a d'ailleurs développé un livre blanc sur l'Asie. Je trouve que c'est une approche intelligente.
Comment qualifieriez-vous l'approche du Canada et son degré de préparation à l'égard du PTP?
[Traduction]
À mon avis, le Canada a une stratégie très énergique en ce qui concerne l'Asie. Nous avons créé des liens interpersonnels très solides. En plus des éléments autochtones et européens qui constituent notre patrimoine, notre pays devient de plus en plus asiatique en raison de nos excellents liens interpersonnels, de nos liens dans le domaine de l'éducation et, encore une fois, parce que les entreprises continuent de faire des échanges commerciaux que le gouvernement ait signé une entente ou non.
L'activité du Canada dans l'APEC doit être chaleureusement accueillie et encouragée. Notre engagement bilatéral avec le Japon est, je l'espère, une entente de grande qualité, surtout parce que le Japon a énormément investi au Canada, notamment dans notre secteur de l'automobile. Nous voulons vendre des produits énergétiques au Japon.
À mon avis, l'élément le plus important de notre stratégie pour l'Asie, c'est l'effort national fourni pour créer la meilleure infrastructure sur le plan environnemental pour exporter nos produits vers l'Asie et saisir cette excellente occasion.
De plus, nous encourageons la création d'un partenariat stratégique avec la Chine qui serait similaire à celui de l'Australie. Le processus du livre blanc que vous avez décrit est très important, car il fait participer la population à la discussion sur les liens interpersonnels, sur les droits de la personne et sur les liens politiques qui s'engage chaque fois que nous discutons de la Chine et des occasions économiques énormes offertes par ce pays.
[Français]
Cela m'amène à aborder un autre sujet.
Mardi dernier, les fonctionnaires nous ont dit que le gouvernement avait fait des études sur les possibles gains et pertes associés au PTP. Malheureusement, nous n'avons pas pu avoir accès à ces études. Cela me rappelle quelque chose. Il y a deux ans, alors que je siégeais à un comité dans le cadre de l'entente avec l'Europe, mes collègues européens ont été surpris d'apprendre que même à huis clos nous n'avions pas accès à ce document.
D'abord, le fait que ce ne soit pas révélé à l'ensemble des membres du comité est-il selon vous problématique? Pour votre part, avez-vous eu accès à ces études sur les possibles gains et pertes associés au PTP?
[Traduction]
Au sujet de cette étude en particulier, non, mais nous travaillons avec un économiste, Dan Ciuriak, et dans quelques semaines, nous publierons un autre exercice de réflexion sur ce qui arriverait si le Canada libéralisait unilatéralement tous les droits de douane, et les avantages qui en découleraient. Je suis certaine que nous aimerons tous deux lire cette étude lorsqu'elle sera publiée.
[Français]
Enfin, quand on parle de commerce international, on parle aussi d'appui à nos entreprises. J'ai été porte-parole de mon parti en matière de petites entreprises et de tourisme et je me souviens des difficultés qu'avaient les PME à faire du commerce transfrontalier avec les États-Unis. En fait, les structures étaient inadaptées en comparaison aux grandes entreprises et aux multinationales.
Considérez-vous que la structure actuelle, dont celui du Service des délégués commerciaux, est adéquate et peut répondre aux besoins des petites et moyennes entreprises ou croyez-vous plutôt qu'elle est surtout utile aux grandes entreprises ou aux multinationales?
Pensez-vous que des mesures pourraient être prises pour améliorer le soutien offert à nos petites et moyennes entreprises?
[Traduction]
J'aimerais faire valoir trois points principaux à cet égard.
Tout d'abord, les petites et moyennes entreprises exportent dans la chaîne de valeurs des plus grandes entreprises, et les grandes entreprises sont donc essentielles pour l'écosystème de l'économie canadienne, car elles permettent aux petites et moyennes entreprises de faire des exportations.
La deuxième chose que j'aimerais préciser, c'est que les coentreprises dans ces régions — c'est-à-dire trouver un bon partenaire dans la région — sont essentielles pour les petites et moyennes entreprises.
Troisièmement, dans ce cas, je crois que les outils qui sont fournis par le gouvernement du Canada — le Service des délégués commerciaux, la BDC, c'est-à-dire la Banque de développement du Canada, et EDC, c'est-à-dire Exportation et développement Canada — sont essentiels, en particulier pour les petites et moyennes entreprises.
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Je remercie également tous nos témoins d'être ici avec nous aujourd'hui.
[Traduction]
J'aimerais d'abord m'adresser à Mme Campbell, si vous me le permettez. J'aimerais vous remercier pour la clarté de votre exposé. J'aime que les gens fassent clairement la distinction entre les bons et les mauvais éléments.
Le premier ministre et le ministre Fast ont toujours soutenu que nous négocions des accords commerciaux dans les meilleurs intérêts de tous les Canadiens. C'est notre intention. Je m'en remets à mes collègues, mais je crois que nous sommes passés de 5 à 42 accords commerciaux depuis que nous sommes au pouvoir, et il est donc évident que nous avons l'intention d'en faire profiter tous les Canadiens.
Pourriez-vous approfondir l'idée que nous agissons dans le meilleur intérêt des Canadiens en nous précisant les mauvais choix et la façon de les éviter? Vous avez énuméré quelques exemples.
Permettez-moi de vous faire part de quelques observations.
Premièrement, le détournement des courants commerciaux n'est pas souhaitable. Ce détournement veut dire que même s'il existe un excellent fournisseur d'un produit, d'un service ou d'un produit agricole, s'il y a des tarifs ou des obstacles non tarifaires, les règles ont un effet de détournement sur le client, qui n'achète pas ce qui est réellement le produit du fournisseur le plus efficace.
En ce qui concerne l'OMC, le PTP et nos initiatives bilatérales, nous voulons nous assurer que les gouvernements ne mettent pas de bâtons dans les roues et que les règles ne gênent pas les consommateurs qui souhaitent obtenir les meilleurs produits. Tout facteur qui exerce un effet sur le marché de façon à ce que des producteurs inefficaces puissent vendre leurs produits aux consommateurs est à éviter.
Ce qui n'est guère souhaitable non plus, c'est de voir nos concurrents conclure des accords plus rapidement que le Canada. À titre d'exemple, je suis sûre que les États-Unis nous jalousent beaucoup à cause de l'AECG. Nous sommes très enthousiastes face à la possibilité de créer un véritable marché transatlantique, réunissant l'ALENA et l'AECG sous l'égide de normes réglementaires communes qui permettront aux gouvernements de tous ces pays de protéger les consommateurs et leur public grâce à leur propre réglementation intérieure, constituant ainsi un marché commun.
Mais lorsque nos concurrents concluent des accords plus rapidement que nous, par exemple avec la Corée du Sud, le Canada est obligé de conclure un accord bilatéral de façon à ne pas être évincé par l'Australie, l'Union européenne ou les États-Unis qui ont déjà des accords avec ce pays.
Nous allons devoir nous pencher sur la question au fur et à mesure que certains pays tissent des rapports plus proches avec la Chine. La Chine est le troisième marché en rang d'importance pour nous après les États-Unis et l'Union européenne. Les Chinois ont remplacé les produits canadiens du marché américain. C'est une question qui nécessite beaucoup d'attention. Nous devons disposer d'une stratégie pour la Chine. Les enjeux sont trop importants pour ne pas le faire.
Oui, votre temps de parole s'est écoulé et je vais mettre fin à la série, car nous allons recevoir le prochain groupe de témoins et nous devons leur accorder le temps qu'il faut.
J'aimerais remercier Mme Cox, M. Keon et Mme Campbell d'être venus témoigner devant nous. Vos propos furent fort intéressants.
Sur ce, nous allons lever la séance et entendre le prochain groupe de témoins.
Nous allons reprendre avec un peu de retard mais je suis sûr que nous pourrons nous rattraper.
Nous accueillons M. Alex Neve d'Amnestie internationale et Mme Sarah Kutulakos du Conseil commercial Canada-Chine.
Madame Kutulakos, c'est vous qui commencerez. Nous vous écoutons avec intérêt.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci au comité d'avoir invité le Conseil commercial Canada-Chine à comparaître aujourd'hui.
Notre conseil est une association indépendante et non partisane, à but non lucratif. Nous avons vu le jour il y a 35 ans pour aider nos membres à mieux réussir sur le plan du commerce et des investissements entre le Canada et la Chine. Nous comptons quelque 225 membres, chez lesquels travaillent 2 000 personnes. Parmi ces membres, 90 % sont Canadiens, essentiellement des entreprises, mais on y retrouve également un bon nombre d'établissements éducatifs ainsi que certains organismes gouvernementaux. Les trois quart de nos adhérents sont des petites et moyennes entreprises, c'est-à-dire que 75 % de nos membres ont un chiffre d'affaires annuel de moins de 50 millions de dollars. Nous avons des bureaux à Toronto, c'est notre siège d'ailleurs, ainsi qu'à Montréal, à Calgary, à Vancouver, à Beijing et à Shanghaï. Grâce à ce réseau de bureaux nous constituons une organisation bilatérale ayant une présence dans les deux pays.
Nous oeuvrons sur bien des fronts pour nos membres, notamment pour les réunir afin de les informer et de les aider à se constituer des réseaux lors d'événements tenus dans les deux pays, et pour les aider à établir des relations commerciales avec la Chine et à revendiquer un environnement commercial plus convivial. C'est la raison pour laquelle nous cherchons toujours des façons qui nous permettraient de réduire les obstacles au commerce et aux investissements dans les deux sens. Dans bien des cas, il faut conclure un accord quelconque afin de réaliser des progrès significatifs. Nous avons beaucoup profité de l'OMC, par exemple, lorsque la Chine est devenue membre en 2001 et lorsque d'autres secteurs y ont adhéré en 2005, mais depuis quelque temps, nous n'avons guère eu d'occasions pour vraiment progresser.
Notre conseil est en faveur de toute politique qui vise à accroître l'accès au marché et à constituer des systèmes axés sur les règles pour aider nos entreprises à être concurrentielles dans un pays qui offre certes des défis mais également d'énormes possibilités de croissance. Il y a deux ans, nous avons accueilli avec joie la conclusion de l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, tout particulièrement, car nous y voyions les avantages de l'accord pour les sociétés canadiennes qui investissent et font affaire en Chine. Il se peut que cet accord offre certains avantages aux entreprises chinoises au Canada, mais puisque nous sommes un pays avec un meilleur régime de règles dans l'ensemble, l'incidence sera plus grande pour les entreprises canadiennes qui sont actuellement présentes en Chine que ne le serait le cas en l'absence d'un tel accord.
En ce qui concerne le Partenariat transpacifique, je ne suis point experte en la matière, mais je suis obsédée par la Chine et les occasions qu'elle nous présente. J'ai consacré toute ma carrière à la Chine, soit plus de 25 ans. Je parle chinois. J'ai fait plusieurs séjours en Chine. Notre organisme est voué à la Chine.
Les occasions qu'offre la Chine ont été bien couvertes par la presse. Je suis sûre que votre comité en est bien conscient. La Chine est le deuxième partenaire commercial du Canada après les États-Unis. Nous sommes le treizième partenaire commercial de la Chine, il y a donc un léger décalage. La Chine sera l'économie la plus grande du monde d'ici cinq ans. Même si la Chine affichait un taux de croissance plus lent de 7,7 % l'année dernière, elle offre les meilleures opportunités au monde.
Les échanges commerciaux du Canada avec la Chine en 2012 se chiffraient à environ 70 milliards de dollars. Lorsque l'on tient compte de tous les pays asiatiques réunis, on constate que ce chiffre représente la moitié des échanges avec cette région. Seul le Japon se rapproche de ce chiffre d'affaires, soit 25 milliards de dollars contre 70 milliards. Vient ensuite la Corée du Sud, avec un total de 10 milliards de dollars, soit 7 fois moins que nos échanges actuels avec la Chine.
Nous bénéficions d'un joli taux de croissance. Nos échanges se chiffraient à 11 milliards de dollars en 2001 et à 65 milliards de dollars en 2011. Je vais être bien franche, c'est sans trop s'efforcer. Comme vous l'a dit Mme Ailish Campbell, les entreprises canadiennes pourraient tirer avantage d'encore plus de possibilités. Le taux de croissance de 7 % est acceptable pour 2012. Nos exportations ont progressé de 13 % en 2012, ce qui est encore mieux, mais nous trouvons que nous accusons encore un retard. Si on se compare au transport, nous avons l'impression de prendre le bus express, ce qui est déjà pas mal, mais la Chine avance à la vitesse d'un TGV. Bien souvent, c'est un défi de maintenir le rythme, surtout parce que d'autres pays poursuivent la Chine de façon plus agressive et plus coordonnée.
Au contraire d'autres marchés, les mesures gouvernementales chinoises aident les entreprises, quelle que soit leur taille. La qualité des rapports qu'entretient notre gouvernement fédéral avec le gouvernement central chinois se fait ressentir même par les plus petites entreprises. Les représentants de ces entreprises se font dire par leurs homologues en Chine: « Vous savez, votre gouvernement n'est pas d'accord avec le nôtre », ou encore « Tout tourne au ralenti, donc je ne peux pas en faire autant avec vous ». Il faut en tenir compte. Nous devons nous rappeler que bien que les entreprises doivent se débrouiller toutes seules, le gouvernement occupe néanmoins un rôle important. Les messages qui proviennent d'en haut ont toute leur importance.
Nous nous penchons sur les volumes des échanges commerciaux globaux et les raisons pour lesquelles ce commerce est avantageux pour le Canada. Il y a quelques années, l'Institute for Competitiveness & Prosperity, un groupe de réflexion établi à Toronto, a publié une étude. Le groupe a indiqué qu'en plus d'offrir les avantages économiques habituels, le commerce favorise grandement l'innovation et la réussite économique. L'innovation dépend de la combinaison du soutien et de la pression, et le commerce international contribue à ces deux phénomènes. Il faut donc retenir que le soutien et la pression sont importants.
Le soutien évoque les conditions d'aide à toutes les entreprises et aux particuliers qui cherchent à être concurrentiels et à se développer. Ils peuvent donc profiter de meilleures possibilités commerciales et plus facilement se procurer du matériel, de la main-d'oeuvre et des capitaux, qui sont d'une importance cruciale pour ce qui est de l'innovation. Ce soutien, grâce à des accords comme le PTP, peut être offert par les délégués commerciaux et par des organisations comme la nôtre. Les diverses ressources dont disposent des entreprises dans leurs coffres à outils peuvent également être utiles.
À mon avis, la pression est encore plus importante. Elle provient des concurrents agressifs et compétents qui menacent la complaisance et des clients bien exigeants qui demandent des biens et services innovateurs à des prix intéressants. Grâce au PTP qui offre un meilleur accès aux marchés des pays asiatiques, on peut joindre des clients plus exigeants, ce qui aide nos entreprises à s'améliorer. Le commerce international impose ces pressions bénéfiques à nos entreprises et à nos cadres, ce qui les pousse à innover.
Quel que soit le pays, il y a des intérêts contradictoires qui peuvent nuire à la libéralisation des échanges. Prenons l'exemple de notre politique de gestion des approvisionnements en produits laitiers et Saputo, la société laitière québécoise qui est en train d'acheter la société Warrnambool australienne pour quelque 520 millions de dollars. Dans les articles qui ont été rédigés au sujet de l'acquisition, une déclaration clé a été faite, Saputo ayant indiqué qu'elle achetait l'entreprise australienne du fait qu'elle offrait la possibilité de percer le marché chinois. Saputo ne cherche pas à percer le marché chinois directement depuis le Canada. On peut en conclure que les chaînes de valeur sont réellement mondiales, mais également qu'il existe des obstacles au commerce.
Je suis mal placée pour me prononcer sur les avantages et les inconvénients des concessions en matière de gestion des approvisionnements dans le cadre d'un accord comme le PTP, mais le désaccord qui entoure un sujet si controversé ressemble à celui qui a eu lieu en Chine avant son adhésion à l'OMC en 2001. L'accord de l'OMC a opposé les internationalistes chinois à ceux qui ne voulaient aucune ouverture sur le monde. Ce sont les internationalistes qui ont gagné, et la Chine en a grandement profité.
Le PTP, comme vous le savez, ne comprend pas la Chine parmi ses 12 pays membres actuels, mais notre conseil est néanmoins en faveur du PTP, notamment parce qu'il existe la possibilité d'inclure la Chine. Si le PTP est une réussite, il se peut que la Chine veuille en devenir membre. Le Centre de développement et de la recherche, un groupe de réflexion qui relève du Conseil d'État de la Chine, a invité récemment des universitaires à Pékin pour les renseigner sur l'accord. J'ajouterais que la République démocratique de la Chine, en collaboration avec la Banque mondiale, a publié d'excellents rapports qui indiquent clairement que la Chine comprend réellement les changements qui doivent être apportés aux structures chinoises afin de maintenir le taux de croissance actuel. Ils savent qu'il y a bon nombre de réformes à apporter, et je suis encouragée de voir la Chine inviter des universitaires à parler du PTP.
Des déclarations récentes nous montrent que la Chine pense à devenir membre au fur et à mesure qu'elle prend connaissance des dispositions du PTP. La Chine pourrait se servir du PTP pour redresser certains de ses problèmes structurels internes. Tout comme l'OMC, lorsqu'il était fort utile de montrer du doigt les étrangers, en disant « il nous ont obligés à devenir membre » et « ils nous ont obligés à apporter ces changements à la structure de notre pays », c'est bien souvent un prétexte utile pour réaliser des changements difficiles. La Chine a donc tendance à reconnaître la valeur du multilatéralisme, notamment lorsqu'il peut aider à restructurer son économie.
Je voudrais également souligner la prédominance des chaînes de valeur mondiales, comme je l'ai évoqué avec l'exemple de Saputo. Plus le Canada conclura de tels accords de coopération avec des pays, plus il sera facile d'établir des chaînes de valeur productives et efficientes sur le plan mondial, car les accords multilatéraux sont beaucoup plus efficaces que les accords bilatéraux si nous voulons vendre nos produits sur les marchés étrangers.
Il y a également un avantage considérable pour le Canada, comme l'a signalé le Peterson Institute for International Economics dans un rapport en 2012. Les auteurs du rapport ont entre autres indiqué que le PTP offrait un passage vers le libre-échange dans les régions de l'Asie-Pacifique ainsi que des avantages économiques potentiels considérables, même pour le Canada. Les auteurs ont parlé des effets non quantifiables tels que le « renouvellement du mouvement vers l'intégration économique mondiale ».
Comme je l'ai indiqué au début, il n'y a pas eu beaucoup d'évolution en ce qui concerne les accords qui facilitent les activités des entreprises. On peut le constater si l'on regarde le succès, ou l'absence de succès, de la ronde de Doha de l'OMC. Il est peu probable que l'on réussisse à conclure un accord ambitieux d'envergure mondiale. Des accords comme celui dont nous sommes saisis, qui nous permettent néanmoins de progresser, sont utiles. J'ai indiqué qu'un tel accord pourrait mener à de meilleures règles pour le commerce en Asie-Pacifique, voire même le commerce mondial. Ces règles nous aident beaucoup.
En dernier lieu, les gens pourraient se demander pourquoi nous ne négocions pas un accord de libre-échange avec la Chine. Ne serait-ce pas le but ultime du conseil? Même si nous sommes certainement en faveur d'un tel accord, il faut se demander si c'est réaliste.
Les relations bilatérales entre nos deux économies vont continuer d'évoluer. Il y a deux ans, le ministère des Affaires étrangères du Canada et le ministère du Commerce de la Chine ont rédigé un excellent rapport sur les aspects complémentaires économiques dans divers secteurs, mais ces opportunités découlaient du plan quinquennal de la Chine et certains de ses objectifs déclarés liés à la modernisation de ses industries. Ce sont des fenêtres ouvertes, c'est mon expression, qui se fermeront au fur et à mesure que la Chine tentera d'accroître ses capacités. Pendant que l'on négocie un accord compréhensif, ces fenêtres ouvertes pourront changer complètement. D'autres pays qui sont en train de négocier des accords de libre-échange bilatéraux avec la Chine ont constaté que le processus n'est pas rapide.
Nous sommes donc d'avis qu'il sera peut-être plus avantageux de négocier une série d'accords qui accroissent la confiance et qui créeraient un mouvement de libéralisation au fur et à mesure que ces accords entrent en vigueur et aident à bâtir la structure de l'avenir. Parallèlement, le PTP peut aussi favoriser ce mouvement.
Au final, nous avons besoin d'une stratégie plutôt que de la libéralisation ad hoc du commerce. Dans bien des cas, ces accords bilatéraux à caractère unique semblent avoir des caractéristiques de plus en plus ad hoc. Le PTP est donc une façon très efficace de faire participer de nombreux pays asiatiques en même temps, avec comme dernier recours les négociations bilatérales pour lesquelles le Canada est trop souvent un trop petit joueur pour faire avancer les choses rapidement.
Nous voyons donc le PTP comme étant absolument nécessaire sans pour autant négliger notre stratégie visant la Chine. Le PTP ferait partie d'une stratégie asiatique et la stratégie du Canada vis-à-vis de la Chine devrait en constituer une partie essentielle. Les deux stratégies peuvent se renforcer mutuellement.
Je recommande au comité de constituer éventuellement une commission qui travaillerait en parallèle de votre étude portant sur le PTP, et ce afin d'étudier les rapports commerciaux avec la Chine. Notre conseil sera ravi de vous aider dans ce domaine.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je souhaite le bonjour à tous les membres du comité.
Amnistie Internationale est heureuse de pouvoir vous parler aujourd'hui pour vous faire part de notre point de vue et de nos recommandations en ce qui concerne le PTP. Je ne parle pas au nom d'Amnistie Internationale, car notre organisation ne s'intéresse pas au commerce, à la politique commerciale ou aux priorités en la matière. Nous n'avons pas d'expertise dans ces domaines. Nous avons cependant de très solides connaissances en ce qui concerne les droits de la personne et de plus en plus d'expérience relativement au rapport entre les droits de la personne et le commerce, la politique commerciale et les pratiques commerciales. C'est donc de ce domaine que je vous parlerais aujourd'hui.
Lorsque nous songeons à quelque chose comme le PTP, nous commençons bien évidemment à penser aux pays qui y participent ou pourraient y participer, une liste qui, dans le cas du PTP, continue de grandir. Outre les quatre premiers adhérents, il y a maintenant huit autres pays qui participent aux négociations, et nous savons qu'au moins 10 autres pays s'intéressent à divers degrés à devenir membres du PTP. Amnistie Internationale a des préoccupations, qui varient d'un pays à l'autre, par rapport à la défense des droits de la personne dans chacun de ces 22 pays.
Je vais commencer en soulignant certaines de ces préoccupations dans quatre des pays, et ce ne sont pas les exemples les plus inquiétants. Ce sont des pays dont les rapports ou les implications vis-à-vis des Canadiens ont été soulignés par Amnistie Internationale.
Je vais vous interrompre une seconde. Je veux être sûr que vous parlez au nom d'Amnistie Internationale. C'est bien le cas? D'accord. Vous avez dit que vous ne parliez pas au nom d'Amnistie Internationale en ce qui concerne le PTP, il me semble.
Non, je disais qu'évidemment, nous ne formons pas une association commerciale, mais bien une organisation.
Je voulais seulement dire clairement ce que nous faisons.
Au Vietnam, la répression exercée contre des adversaires du gouvernement et des activistes s'est considérablement aggravée au cours des dernières années. Les libertés d'expression, d'association et de réunion sont restreintes rigoureusement, et de nombreux dissidents pacifiques, dont des blogueurs et des auteurs-compositeurs, ont été condamnés à de longues peines d'emprisonnement après avoir subi un procès inéquitable. Des membres de groupes ethniques et religieux du pays sont les cibles de violations des droits de la personne, et plus de 500 personnes ont écopé de la peine de mort dans le pays.
L'un des prisonniers est un blogueur bien connu et populaire qui s'appelle Nguyen Van Hai. Je veux parler un peu de sa situation, car il y a un lien avec le Canada. Sa fille est une citoyenne canadienne qui vit à Vancouver. Par pure coïncidence, elle a communiqué avec moi ce matin et nous avons parlé des dernières préoccupations que soulève le sort de son père.
Son père est un membre fondateur du Club des journalistes libres du Vietnam. Il a été condamné à une peine de 12 ans de prison, qui sera suivie de cinq années de détention à domicile à sa sortie de prison. Son procès n'a duré que quelques heures, un procès pendant lequel les membres de sa famille ont été harcelés et détenus pour les empêcher même d'y assister, et un procès qui était inéquitable sur toute la ligne.
Ses conditions de détention sont intolérables et sa santé suscite de plus en plus d'inquiétudes. Dans le message qu'elle m'a envoyé ce matin, elle m'a donné quelques nouvelles. Elle a mentionné que son père est maintenant emprisonné dans une zone isolée et qu'il ne peut pas sortir de sa cellule. Il est comme un animal en cage. On lui amène de la nourriture et il ne peut pas manger avec les autres prisonniers parce qu'on craint que de l'information sur son sort soit communiquée à l'extérieur de la prison. Dans son message, sa fille m'a très nettement dit, comme si elle savait que j'allais comparaître devant votre comité, que selon sa famille, des liens d'affaires et des pressions économiques constituent le meilleur moyen de faire libérer son père.
Au Mexique, la primauté du droit et le respect des droits de la personne sont sérieusement menacés. Dans bon nombre de régions du pays, la situation alarmante de la sécurité et les répercussions des combats militaires, du crime organisé et des cartels de la drogue ont aggravé radicalement la situation d'insécurité et de violence, ce qui laisse de nombreuses collectivités sans protection et menacées par tous les camps des conflits. Les disparitions forcées, la torture et les séquestrations se poursuivent. Les défenseurs des droits de la personne et les journalistes qui, souvent, essaient de soutenir les victimes et de dénoncer les actes de violence, font de plus en plus l'objet d'attaques. Des femmes, des autochtones et des migrants sont victimes de discrimination et de violence.
En Colombie, malgré les pourparlers de paix, les atteintes aux droits de la personne se poursuivent, surtout à l'endroit des autochtones, des personnes de descendance africaine, des paysans, des femmes, des défenseurs des droits de la personne et des demandeurs de terres. Les autochtones du pays font face à une grave crise, qui a été confirmée et clairement documentée dans un jugement de la Cour constitutionnelle du pays, qui a conclu que le tiers des nations autochtones de la Colombie risquent l'extermination. Les facteurs liés à cette crise des droits de la personne sont nombreux: notamment, le ciblage incessant par toutes les parties durant des décennies de conflit armé, et plus récemment, les répercussions de l'arrivée massive de sociétés minières étrangères, dont de nombreuses sociétés canadiennes, dans les territoires autochtones.
En Chine, les autorités maintiennent leur emprise sur les activistes politiques, les défenseurs des droits de la personne et les activistes du Web en leur faisant subir du harcèlement et de l'intimidation, en les séquestrant, en les torturant et en forçant leur disparition. Les musulmans, les bouddhistes et les chrétiens qui pratiquent leur religion en dehors des réseaux sanctionnés, ainsi que les adeptes du Falun Gong, sont torturés, harcelés, séquestrés et emprisonnés. Les Ouïgours et les Tibétains sont toujours victimes de répressions sévères.
Encore une fois, il y a des liens avec le Canada. Un citoyen canadien d'origine ouïgoure, Huseyin Celil, purge une peine d'emprisonnement à vie après avoir subi un procès tout à fait inéquitable. Les autorités chinoises sont restées sourdes aux supplications du Canada.
Les frères, les soeurs et les enfants de l'activiste pro-démocratie et prisonnier politique chinois Wang Bingzhang, qui sont tous des citoyens canadiens, continuent d'exercer des pressions pour le faire libérer. La semaine dernière, sa fille, Ti-Anna Wang, une citoyenne canadienne, s'est rendue à Genève pour exercer des pressions pour son père devant le Conseil des droits de l'homme. Ce faisant, dans le cadre d'une séance publique du conseil, elle a été photographiée — notamment, des photos ont été prises à partir de l'écran de son ordinateur portatif —, de façon à l'intimider, par des agents qui étaient clairement liés au gouvernement chinois.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est le plus bref aperçu des problèmes de respect des droits de la personne qui sévissent dans quatre pays de la région.
Je veux souligner qu'Amnistie internationale n'adopte aucune position quant à la nature des échanges commerciaux et des investissements que le Canada devrait faire dans le cas de ces quatre pays, ou de tout pays qui fait présentement partie de la liste de membres potentiels du PTP. Toutefois, nous trouvons essentiel que dans le cadre des échanges commerciaux, des investissements, des politiques et des accords, dont le PTP, le Canada tienne vraiment compte des droits de la personne.
Si l'on agit de façon responsable et durable, le commerce et les investissements ainsi que les activités commerciales qu'ils génèrent peuvent évidemment favoriser la protection des droits de la personne, contribuer à l'amélioration des moyens d'existence, offrir des possibilités d'emploi aux groupes marginalisés dans la société et favoriser leur émancipation, améliorer l'accès à l'éducation et au développement des compétences, etc.
Cependant, le commerce, les investissements et les activités commerciales peuvent aussi causer beaucoup de torts en ce qui concerne les droits de la personne si l'on agit de façon irresponsable ou sans se soucier des conséquences. C'est particulièrement le cas si aucune norme n'oblige les entreprises à rendre des comptes sur les conséquences qu'ont leurs activités sur les droits de la personne, ou si les normes ne sont pas rigoureuses.
Évidemment, nous voulons donc nous assurer que le commerce, les investissements et la présence et les activités commerciales du Canada favorisent au maximum la défense des droits de la personne et réduisent au minimum, voire empêchent, les violations des droits de la personne. Cela dit, permettez-moi de faire trois recommandations sur des mesures essentielles que le Canada devrait prendre d'abord et dans le cadre de la conclusion de nouvelles ententes dans la région transpacifique et ailleurs.
Premièrement, il faut énoncer clairement que la protection des droits de la personne dans le monde est un volet important des stratégies du Canada qui visent à accroître la libéralisation des échanges commerciaux et les investissements dans la région transpacifique et à l'échelle mondiale. Nous avons trouvé très déplorable que ce volet ne soit pas intégré dans le nouveau plan d'action sur les marchés mondiaux, qui a été annoncé l'automne dernier. En fait, il ne traite nullement des droits de la personne et ne comprend pas de mesures visant à favoriser leur protection.
Deuxièmement, dans le cadre des négociations sur la représentation dans le PTP, ou dans tout autre accord, il faut s'assurer que l'on mentionne explicitement la pertinence de rendre contraignants les traités internationaux sur les droits de la personne tant dans l'accord que dans les mesures nationales le mettant en oeuvre.
Troisièmement, il faut établir dans une loi une obligation selon laquelle le PTP et tous les accords sur le commerce et l'investissement sont assujettis à des évaluations exhaustives et indépendantes de la situation des droits de la personne avant leur entrée en vigueur et périodiquement par la suite. De telles évaluations doivent être rendues publiques. On doit exiger que les faiblesses qui auront été signalées dans le cadre de l'évaluation soient corrigées et qu'on rende compte également des progrès réalisés à cet égard.
Permettez-moi de conclure en disant quelques mots sur le potentiel et les déceptions liés à l'approche qui a été adoptée pour l'évaluation des répercussions sur les droits de la personne de l'accord commercial entre le Canada et la Colombie, considérée comme l'un des pays qui souhaitent vivement devenir membre du PTP...
D'accord.
Les deux premiers cycles de négociation sur la façon d'effectuer l'évaluation de la situation des droits de la personne ont été décevants. Nous espérions qu'une meilleure approche soit adoptée cette année. Nos espoirs ont été anéantis la semaine dernière lorsque nous avons su de quelle façon les consultations allaient être menées dans le cadre de l'examen de cette année. Les consultations ont duré à peine six jours ouvrables, et il n'y a pas eu de grandes annonces à cet égard, y compris en Colombie, et aucune n'a été faite en espagnol.
Notre expérience liée aux droits de la personne et à l'accord entre le Canada et la Colombie peut nous être utile dans le cadre du processus du PTP. L'aspect très positif, c'est que cela démontre vraiment qu'il est possible d'évaluer les répercussions qu'ont les accords commerciaux sur les droits de la personne et que les gouvernements reconnaissent, comme le Canada et la Colombie, qu'il y a un lien important entre les droits de la personne et le commerce. Par contre, les problèmes et les faiblesses liés à la façon dont on a géré l'évaluation de la situation des droits de la personne dans le cas de cet accord montrent qu'il faut adopter une meilleure méthode, suivre une meilleure démarche et prendre un engagement plus ferme.
Nous espérons que dans le cadre du processus du PTP, le Canada jouera un rôle de premier plan dans le dossier des droits de la personne pour améliorer la démarche de façon substantielle. C'est bon pour les droits de la personne. Nous pensons que c'est également bon pour les affaires.
Merci, monsieur Neve.
Le temps presse, mais dans le cadre de votre témoignage d'aujourd'hui, vous nous avez montré brièvement à quel point les normes relatives aux droits de la personne des 12 pays du PTP et des pays qui s'intéressent au PTP peuvent être différentes.
De plus, comme vous l'avez dit, il y a trois jours, votre organisme a fait savoir publiquement que le gouvernement conservateur avait limité la durée du processus de consultation en ligne à six jours ouvrables pour le rapport sur les droits de la personne et l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie. Vous avez dit aussi qu'il n'avait fait aucune annonce publique à cet égard. Peut-on présumer qu'une période de six jours donne suffisamment de temps aux organismes pour préparer un mémoire dans le cadre d'une consultation semblable?
Non seulement Amnistie internationale, mais bien des organismes se sont exprimés et ont déclaré à quel point ils étaient déçus que la période de consultation soit aussi courte et qu'il n'y ait même pas eu d'annonce publique à cet égard. Il aurait fallu être capable de voir l'annonce qui a été affichée très discrètement sur le site Web du ministère pour même être au courant qu'elle était en cours. De plus, ce qui devait principalement être un exercice favorisant la participation des gens et des collectivités, soit ceux qui ont des expériences concrètes liées aux droits de la personne à communiquer, n'a même pas été annoncé dans leur langue, l'espagnol, et c'était donc décevant, évidemment.
Par conséquent, tous les organismes et tous les activistes que je connais qui suivent cette information ont eu l'impression que le processus de consultation ne pouvait pas être pris au sérieux. Ils ont donc décidé de ne pas y participer.
À ce sujet, combien de groupes ont été en mesure de présenter des mémoires dans cette courte période, à votre avis?
À ma connaissance, aucun groupe ne pensait avoir le temps de préparer quelque chose durant cette courte période.
C'est très préoccupant. À votre avis, qu’est-ce qui a poussé le MAECI à tenir des consultations de cette façon sur une question aussi importante que celle des droits de la personne?
Nous l'ignorons. Bien entendu, parce que nous ne savons pas pourquoi on a décidé d’offrir un processus aussi restreint et donc vraiment, du moins de l'extérieur, inutile, la conclusion que les groupes peuvent tirer, c’est qu’on ne souhaitait pas vraiment entendre le point de vue des organismes locaux qui avaient de l’information à communiquer. J’espère qu’il y a une autre explication, mais étant donné qu’on ne donne pas de raison et compte tenu du processus boiteux qui a été offert, on peut comprendre que les gens tirent de telles conclusions.
On peut comprendre qu’ils soient très contrariés par le processus.
Le MAECI a-t-il consulté Amnistie internationale sur les répercussions du PTP sur les droits de la personne, surtout dans des pays comme le Vietnam, dont les normes relatives aux droits de la personne sont moins rigoureuses que celles du Canada?
Le ministère ne nous a pas demandé notre point de vue sur la question des droits de la personne et le PTP, et c’est l’une des raisons pour lesquelles nous sommes très ravis de témoigner ici aujourd’hui.
En ce qui concerne le PTP, je veux ajouter que mardi, un témoin nous a parlé du mécanisme de consultation en ligne du MAECI. Est-il juste d’affirmer que compte tenu de la façon dont le gouvernement a géré le processus de consultations sur le rapport sur les droits de la personne et l’ALE entre le Canada et la Colombie, que les Canadiens ne sont pas absolument convaincus que le gouvernement fait vraiment des consultations de bonne foi?
Il est certain que notre organisme n’était au courant d’aucun processus en ligne en ce qui concerne le PTP. Je ne veux pas parler au nom d’autres membres de la société civile. Peut-être que d’autres organismes étaient au courant de cela et y ont participé, mais ce n’est pas notre cas.
Vous avez dit qu'il est important que le Canada produise des évaluations exhaustives des répercussions sur les droits de la personne dans le cadre des accords commerciaux. Qu’est-ce qui les rendrait exhaustives? Pourriez-vous nous expliquer le processus et nous dire ce que les évaluations devraient contenir?
Eh bien, je réponds à cette question dans une conférence que je donne, mais que vous n’avez évidemment pas le temps d’entendre aujourd’hui. Or, on peut dire sans se tromper qu’il existe des méthodes très bien conçues, notamment celles des spécialistes de l’ONU, qui sont maintenant bien reconnues comme des démarches complètes pour ce qui est de l’ensemble des droits de la personne qui sont évalués, la portée de la consultation et le nombre d'évaluations. Il y a une marge de manœuvre à cet égard selon l’accord, sa portée et les pays concernés, mais il y a beaucoup de renseignements dont on peut se servir.
Le comité serait ravi si, par l'intermédiaire de notre président, vous pouviez lui présenter un document qui en résume les éléments importants.
Comme nous l'avons constaté dans le cas de la Colombie, on n'applique pas les accords auxiliaires sur les risques pour l'environnement et les droits de la personne. À votre avis, cela serait-il également le cas dans le PTP et, de façon générale, quel est le point de vue d'Amnistie internationale sur les accords auxiliaires?
Dans le cas de l'accord entre le Canada et la Colombie, le problème ne vient pas tant de l'existence d'un accord parallèle. L'accord comporte un ajout secondaire, qui est venu s'y greffer vers la fin du processus ainsi qu'à la loi de mise en oeuvre, ce qui, bien sûr, est très important, parce que cela lui donne, au pays, force de loi. C'est maintenant un document juridique national contraignant.
En fait, cela nous semble une méthode importante pour un accord comme celui-là, parce que cela permet d'arrimer à une loi une obligation et des attentes, ce qui permet donc de clarifier les délais, les responsabilités, etc.
Nous recommanderions donc, aussi, de procéder de la sorte pour le PTP, pour que, dans les deux cas, des mesures soient prises pour qu'il soit question, dans l'accord même des droits de la personne... Beaucoup d'accords de libre-échange comportent de telles clauses, pas tellement les accords canadiens, mais ceux d'autres pays, particulièrement de l'Union européenne. Elles ne font que mentionner et reconnaître l'applicabilité des traités internationaux sur les droits de la personne. Ce n'est pas perçu comme un ensemble séparé de règles de droit sans rapport avec le traité. Ça en fait partie, et on en reconnaît l'applicabilité. C'est un excellent point de départ.
Mais, ensuite, pour donner tout son sens à l'exercice, nous pensons que le mieux est d'exiger des études d'impact sur les droits de la personne. C'est ce qui procure les outils et la possibilité de vraiment étudier et comprendre les conséquences d'un tel accord commercial sur les droits de la personne et, par la suite, de déterminer les recommandations qui permettront de dissiper les inquiétudes.
Merci, monsieur le président
Je suis heureux de vous revoir, monsieur Neve. C'est toujours un plaisir.
Madame Kutulakos, je vous souhaite la bienvenue à notre comité.
Je vous pose directement à vous, madame Kutulakos, ma première question. J'ai trouvé très intéressante votre notice biographique en ligne. Vous avez fréquenté l'Université du Wisconsin, où vous avez manifesté beaucoup d'intérêt pour le mandarin. Vous vous êtes promenée de Taïwan à Toronto. Vous possédez une expérience très diversifiée. J'apprécie donc votre contribution aux travaux du comité et je tenais à connaître un peu plus votre point de vue sur le PTP.
Vous avez mentionné que le Canada avait besoin d'une stratégie pour l'Asie. Nous avons le plan d'action sur les marchés mondiaux, le PAMM, qui met en relation la forte croissance économique du Canada, pas seulement celle d'aujourd'hui, mais celle aussi de demain, avec nos intérêts en Chine, en Asie. Plus tôt, ce mois-ci, nous avons reçu confirmation officielle de la fin des négociations entre le Canada et la Corée et, bien sûr, cela nous permet de prendre pied dans le marché asiatique et de participer aux discussions bilatérales actuelles, dont c'est le cinquième cycle, cette semaine, avec le Japon.
C'est donc notre objectif. Le comité a aussi accueilli M. Yuen Pau Woo de la Fondation Asie-Pacifique du Canada, qui a parlé des bienfaits du PTP. Pour moi, qui représente la circonscription de Kelowna—Lake Country, dans l'Okanagan, en Colombie-Britannique, il y avait les avantages manifestes pour l'industrie forestière et les fruits de mer. Nous avons parlé de la réduction des tarifs des produits agricoles, particulièrement horticoles, les bleuets, les cerises de ma circonscription, le vin de glace.
Fait intéressant, l'institut du vin m'a appris que la Corée possède le point de vente des vins rouges les plus chers au monde. Ce serait donc un excellent débouché aussi pour nous. Je me demande quels sont les liens de votre organisation avec la Fondation Asie-Pacifique? Collaborez-vous ensemble?
Nous collaborons très étroitement avec elle. En fait, elle possède une capacité de recherche très poussée, qui nous fait défaut. Voilà pourquoi nous collaborons. Nous la consultons souvent aussi sur des questions d'intérêt mutuel. De nombreuses questions qu'elle a soulignées dans sa conversation nationale sur l'Asie et une partie de son travail préalable énoncent une partie des éléments constitutifs d'une éventuelle stratégie asiatique ou chinoise. La fondation s'inspire d'une partie du bon travail qui a déjà été fait, par exemple le plan d'action sur les marchés mondiaux, mais en fouillant la question à fond, en ne se bornant pas au commerce et à l'investissement. Elle tient compte aussi des flux démographiques, de l'éducation. En fin de compte, cela aboutit peut-être à une attitude plus saine et mieux équilibrée à l'égard de certains pays asiatiques que celle qui, d'après certains de ses sondages d'opinions, peut exister au Canada.
L'une des constatations révélées par ses enquêtes est que, en général, le Canadien ordinaire a peur d'un endroit comme la Chine. Nous le voyons même dans de nombreuses entreprises qui disent craindre pour leur propriété intellectuelle ou qui soulignent la différence qui existe entre ce pays et leurs marchés traditionnels comme les États-Unis. Une partie de la stratégie globale, par exemple le livre blanc de l'Australie qu'Ailish a mentionné, consiste à contribuer à la réflexion sur l'attitude générale d'un pays à l'égard d'un endroit comme la Chine.
Il y a quelques mois, alors que j'étais en Nouvelle-Zélande, qui, bien sûr, est l'un des rares pays développés à avoir conclu un accord de libre-échange avec la Chine, j'ai écouté avec intérêt un dialogue très général et très sain sur la Chine. Dans cette conversation, on disait, sans que le propos soit négatif ou positif, ce qui arrivait aux investissements consacrés à l'agriculture ou à l'exportation de homards ou n'importe quoi d'autre. Je n'ai rien vu de semblable ici, au Canada. Je pense que le gouvernement peut prendre l'initiative à cet égard.
Je ferai aussi remarquer que le plan d'action sur les marchés mondiaux est très ambitieux. C'est important. Passer de 11 000 à 21 000 sociétés exportatrices, ce n'est pas rien. En plus de l'aide fédérale, il faudra aussi celle de nombreuses organisations, mais il faudra le faire.
D'accord, c'est très ambitieux. Nous sommes partis de 5 accords commerciaux avec autant de pays et nous sommes maintenant rendus à 43, tout en continuant d'en conclure un par jour. Le ministre Fast parcourt le monde, et j'ai remarqué que le premier ministre Harper est aujourd'hui en Europe. Nous avons l'accord économique et commercial le plus global auquel le Canada ait jamais adhéré.
Je passe maintenant à M. Neve. Je sais qu'une partie du processus a été consacré aux vastes accords sur la main-d'oeuvre, l'environnement et les droits de la personne. Je ne pense pas que personne, ici ou au Parlement, manque de compassion et ne tient pas à faire respecter les droits de la personne, que nous valorisons, partout dans le monde. En fait, un comité homologue du commerce va au Pérou, la semaine prochaine, pour visiter une mine. Nous tenons à nous assurer du respect de ces valeurs et à faire tout notre possible, comme Canadiens, pour faire respecter, partout dans le monde, notre réputation de fiers Canadiens. C'est donc avec beaucoup d'intérêt... et comment nous pouvons collaborer ensemble et continuer de respecter les accords.
Vous avez mentionné la Colombie. Quand M. Peter Julian, du NPD, faisait partie du Comité du commerce, nous sommes allés en Colombie. Nous avons visité des classes dans une école de l'ONU pour parler aux élèves. Ensuite, nous avons visité certains habitants d'un bidonville local. Une journaliste de la section anglaise de Radio-Canada, Connie Watson, nous suivait. Nous leur avons demandé s'ils estimaient que nous devions conclure l'accord commercial pour nous ouvrir sur l'extérieur ou nous abstenir tout simplement de le faire.
Alors, ma question, monsieur Neve, est la suivante: Pensez-vous qu'il est mieux d'inciter les pays en développement comme la Colombie et d'autres à adhérer au PTP, ou bien devons-nous nous isoler et ne commercer qu'avec les pays qui, pour les droits de la personne, adhèrent à des valeurs semblables à celles du Canada?
Je tiens à préciser qu'Amnistie Internationale ne préconise pas de couper tout lien commercial avec la Colombie et les pays du PTP. Sur cette question particulière, nous n'adoptons aucune position, ni dans un sens ni dans l'autre, sur les éventuels partenaires commerciaux du Canada ni sur les méthodes à employer ni sur les industries à privilégier. Nous demandons d'appliquer la politique commerciale et de conduire les affaires de manière à promouvoir, améliorer et sauvegarder le plus possible les droits de la personne et à au moins prévenir les situations où, nous le savons, les méthodes irresponsables de conduite des affaires, qui s'intensifient dans certains secteurs plus que dans d'autres, peuvent directement ou indirectement contribuer à la violation de ces droits.
Je pense que la Colombie constitue un excellent exemple. Nous ne nous sommes jamais opposés à l'accord de libre-échange. Nous avons cependant toujours dit qu'il fallait s'assurer de le doter de clauses qui permettront de veiller sans équivoque à ces problèmes des droits de la personne. C'est pourquoi nous avons salué l'ajout du processus innovant et sans précédent des études d'impact sur les droits de la personne. Comme j'ai dit, nous sommes un peu déçus de la mise en oeuvre de l'accord, mais nous espérons qu'on peut encore démentir cette impression. On n'a pas vraiment exploité tout le potentiel offert par cette mesure innovante, et c'est dommage.
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être ici. Par les différents points de vue émis de tous les côtés, la discussion est intéressante, mais c'est ça, le Canada.
Ma première question est pour vous, monsieur Neve.
Je suis peut-être un peu naïf, mais vous pouvez peut-être m'aider. Quand vous dites que, en fait, les procès sont iniques, comment le déterminez-vous? Avez-vous des représentants là-bas? Je vous le demande parce que, ce matin, à Radio-Canada, on a présenté des statistiques mondiales sur la peine capitale. On l'applique dans moins de pays, mais, dans certains, comme l'Iran et l'Irak, le nombre d'exécutions augmente. Pourtant, on ne dispose d'aucune statistique sur la Chine. Comment, alors, prouver ou montrer l'iniquité de ces procès?
En fait, le reportage que vous avez entendu se fondait sur notre rapport d'aujourd'hui. Je connais donc la question à fond. La situation, en Chine, est, je pense, très intéressante. Nous répétons l'exercice chaque année. Nous publions ce que nous appelons les statistiques annuelles de la peine de mort. De toute évidence, le sujet est sinistre.
Nous avions l'habitude d'inclure la Chine dans les statistiques. C'était toujours une estimation faite à tout hasard, au jugé, du nombre d'exécutions, parce que, en Chine, chaque exécution est une question de sécurité nationale. Aucun communiqué ni rapport officiel n'est publié sur le nombre d'exécutions.
C'en était rendu au point où nous avions l'impression que nos estimations n'étaient pas...
J'ai peu de temps, pas autant que d'autres. Je me demande simplement comment on détermine si les procès sont justes ou iniques?
Nous nous fondons sur des critères internationaux, tous consacrés par des traités internationaux sur les droits de la personne.
Cela diffère d'un pays à l'autre. Certains pays n'autorisent pas la présence, sur place, d'Amnistie Internationale, comme la Chine, qui n'autorise pas la présence de nos attachés de recherche.
Plus précisément, par exemple, les trois pays qui, dites-vous, font partie du groupe qui négocie pour adhérer au PTP sont le Vietnam, le Mexique et la Colombie. Auriez-vous quelqu'un...?
Nous pouvons aller dans ces trois pays. En fait, nous avons une équipe sur place, en ce moment même, au Vietnam.
Comme j'ai dit, nous appliquons des critères très détaillés que les gouvernement eux-mêmes ont fixés dans des traités internationaux sur les droits de la personne.
Dans un autre ordre d'idées, vous dites que les accords de libre-échange devraient mettre en évidence des situations touchant les droits de la personne. Avez-vous essayé d'obtenir l'appui d'autres joueurs, par exemple de groupes d'entreprises ou de quelqu'un pour qui le libre-échange est un enjeu? Ou bien faites-vous bande à part?
Nous ne faisons sûrement pas bande à part. C'est un vaste territoire. Les syndicats, beaucoup d'organisations de la société civile, des groupes religieux, des organismes qui militent pour les droits de la personne, ils ont tous préconisé cette approche qui consiste d'abord à consacrer les obligations à l'égard des droits de la personne dans l'accord même, puis à étayer le tout par un processus d'étude d'impact sur ces mêmes droits.
La mobilisation des entreprises a été mitigée. Je précise que, très souvent, leur réaction est positive. Au plus haut niveau, bien sûr, on s'accorde à dire que les échanges commerciaux doivent respecter les droits de la personne. Il a été plus difficile pour nous d'obtenir un accord sur certains éléments précis, concrets, qui donneraient du pouvoir au processus, comme l'étude d'impact sur les droits de la personne.
Une entreprise canadienne doit respecter certaines normes, contrairement à ses concurrentes de l'étranger. Je ne vois pas pourquoi elle épouserait votre cause ou vous aiderait à la défendre. Je suis un peu préoccupé par le fait que vous n'étiez même pas au courant des processus de consultation et des webinaires qui ont eu lieu pendant les négociations sur le PTP et auxquels tous pouvaient participer. Je me demande si le gouvernement fait son travail. Je ne vous jetterai pas la pierre, mais quelque chose ne tourne pas rond. Les communications ne passent pas.
Je pense qu'on pourrait considérablement améliorer la circulation de l'information.
Je tiens à souligner que, bien sûr, notre recommandation ne vise pas seulement les entreprises canadiennes. Notre action est mondiale, parce que nous pensons que, en matière de droits de la personne, les règles du jeu doivent être les mêmes pour tous, dans le monde entier, pour que tous les pays aient les mêmes obligations que leurs partenaires commerciaux.
J'ai une question pour Mme Kutulakos.
Vous avez mentionné que peu de pays ont conclu des accords de libre-échange. Savez-vous lesquels?
Je crois qu'il s'agit de la Nouvelle-Zélande et de l'Islande, qui ne sont pas des géants. Ils font partie des pays développés.
Mais vous avez déclaré que d'autres pays courtisent plus activement la Chine. En quel honneur? Que font-ils de plus que le Canada? À part le fait que notre premier ministre ne visite pas régulièrement la Chine...
En fait, on a publié dernièrement des statistiques intéressantes sur le nombre de visites du premier ministre et de ministres de différents pays, ce genre de choses. Le Royaume-Uni, par exemple, emploie pour la Chine une approche globale. Les deux pays ont des différends, mais cela n'a pas empêché les Britanniques de faire de Londres une plaque tournante pour les échanges payables en renminbi, et, dernièrement, on s'est intéressé à la mise en place d'un accord de crédit croisé, qui vient d'être signé, cette semaine.
Quand leur premier ministre se rend là-bas, il s'entoure de beaucoup plus de compagnies, et les Britanniques se fixent des objectifs très ambitieux. Nous, par exemple, qui sommes un pays relativement petit, nous avons voulu attirer l'attention de la Chine. En octobre dernier, à notre assemblée générale annuelle à Beijing, nous avons invité environ 300 personnes à nos activités, mais nous avons estimé qu'environ 600 Canadiens se trouvaient cette semaine-là dans cette ville: l'orchestre du Centre national des arts, les délégations provinciales du Québec et les délégations municipales d'Ottawa et de Calgary, les ministres Baird et Oliver ainsi que le gouverneur général, en visite officielle. Dans le même temps, le chancelier de l'Échiquier et le maire de Londres étaient là, et ils ont quand même fini par nous voler la vedette auprès de la presse de Beijing.
Ça ne fait que montrer que nous devons continuer à augmenter et à coordonner nos efforts.
Merci.
Nous pouvons poursuivre cette discussion, car je comptais m'engager dans la même veine.
Madame Kutulakos, je vous souhaite la bienvenue.
Vous avez parlé du Royaume-Uni et de sa stratégie. C'est honnêtement ce que j'allais demander. Qu'est-ce qu'une stratégie visant la Chine comporte? Vous avez dit qu'une stratégie visant l'Asie serait une bonne chose, mais qu'une stratégie visant la Chine serait meilleure. Vous avez suggéré la réalisation d'une étude sur les rapports commerciaux avec la Chine. Pouvez-vous nous en dire plus sur l'orientation que le gouvernement devrait prendre dans ces différents secteurs?
Eh bien, si nous regardons du côté de certains pays qui ont adopté des stratégies plus précises concernant la Chine, c'est l'Australie qui ressort très souvent. Une stratégie transcende les gouvernements individuels et contribue dans une grande mesure à faire progresser certaines politiques. On a établi un objectif — de 12 %, je crois — pour les diplômés des écoles australiennes qui parleront une langue asiatique. Ce sont là des objectifs qui contribuent à raffermir la perspective de l'ensemble du pays à ce sujet, et on a accompli du travail sur ce plan.
Récemment, une étude a été réalisée sur les compétences touchant la Chine, et c'est David Mulroney, notre ancien ambassadeur, qui en a assumé le rôle prépondérant. L'une de ses constatations, c'est qu'il est plus difficile de convaincre des étudiants canadiens d'aller étudier ou vivre en Chine que de convaincre des étudiants chinois de venir ici. Quand ils ont exploré un peu plus cette question, ils ont découvert que, selon les étudiants, s'ils posent leur candidature à un poste, une fois qu'ils ont obtenu leur diplôme, les entreprises qui envisagent de les embaucher ne leur disent pas que c'est une expérience précieuse que d'avoir passé un semestre ou une année à l'étranger. Vous voyez qu'une démarche plus globale pourrait aider.
J'ai entendu certains commentaires à propos du Royaume-Uni ou de l'Europe. Par exemple, j'ai remarqué dernièrement que l'Union européenne a financé un très gros projet que nous relevons avec intérêt, car nous avons une initiative d'incubation dont le but est d'aider les PME à faire des affaires avec plus d'efficacité en Chine. Ils l'avaient fait pour l'Europe, et les résultats avaient été très bons. Le Royaume-Uni a lui-même bien plus de bureaux commerciaux en Chine que le Canada, par exemple. Il a aussi financé assez directement certaines des associations bilatérales nécessaires.
Nous sommes un conseil complètement indépendant. Notre homologue britannique ne l'est pas. Je ne demande pas d'argent au gouvernement, mais je vous signale simplement une différence dans la méthode.
Vous avez mentionné — pas dans votre exposé, mais dans une réponse à une question — le principe d'une plaque tournante pour les échanges payables en renminbi. Je sais que vous avez travaillé à faire la promotion de cela au Canada. Quelle incidence cela aurait-il sur le plan des investissements ou des affaires des entreprises canadiennes en Chine?
J'ai dit qu'il y aurait plusieurs effets. De bien des façons, il s'agit davantage d'une initiative de marketing que d'un grand changement par rapport à la situation actuelle.
Les banques nous disent qu'elles font des échanges en renminbi, et que cela augmente sans cesse. Cependant, en Amérique du Nord, aucune ville n'a manifesté le désir de devenir une plaque tournante pour les échanges payables en renminbi. Singapour le fait, Londres le fait, mais New York, par exemple, n'a pas décidé de le faire. Si le Canada choisissait l'une de nos villes à cette fin, et ce, assez rapidement — on ne peut arriver en retard à la fête, car il n'y a alors aucun avantage à le faire —, cela ferait augmenter les échanges au Canada.
Il y aurait quelques avantages à cela. Par exemple, en ce moment, certaines des grandes banques travaillent déjà à donner à leurs employés la capacité de comprendre les avantages du renminbi et la façon de l'utiliser pour les échanges, mais si nous avions une plaque tournante, la capacité se développerait au sein d'un bien plus grand nombre de nos institutions financières. De plus, bon nombre de petites et moyennes entreprises canadiennes qui peinent à trouver des moyens d'aller au delà des États-Unis pour s'attaquer à un marché d'exportation plus difficile, comme la Chine, pourraient comprendre comment utiliser le renminbi dans leurs stratégies de soumission pour réussir à vendre. Par exemple, elles pourraient éviter les coûts qu'elles doivent assumer pour faire des soumissions en dollars américains — passer du dollar canadien au dollar américain, puis au renminbi — et procéder plus directement.
Rien de tout cela ne correspond à des avantages spectaculaires, mais globalement, les résultats seraient là. Honnêtement, de toutes les questions de nature politique dont nous pouvons discuter avec la Chine, en voilà une qui susciterait relativement peu de controverse. Si vous pensez à des manières de faire des progrès dans nos rapports politiques avec la Chine, voilà une mesure qui serait aisée, dans nos efforts pour resserrer notre stratégie relative à la Chine.
Monsieur Neve, vous avez souligné certaines des préoccupations de divers pays membres du PTP. Pour ce qui est des consultations, cela devait être la troisième consultation au sujet de la Colombie, n'est-ce pas?
Le troisième examen... La première fois, il n'y a pas eu de consultations. La deuxième fois, il y a eu des consultations très restreintes en ligne, et la plupart des groupes ne s'en sont rendu compte qu'après.
C'est donc la troisième expérience d'examen, et je viens de vous décrire le genre de consultations lancées.
En effet. Étant donné qu'il s'agit du troisième examen, je pense dans une certaine mesure qu'il serait juste d'attendre des organisations qu'elles préparent des rapports. Elles savent que cela se fait annuellement et qu'elles ont l'occasion de les soumettre. Ce n'est pas une surprise. C'est prévu.
J'aimerais me concentrer maintenant sur vos commentaires au sujet du Vietnam. Vous avez parlé de blogueurs emprisonnés, dont Dieu Cay. Pouvez-vous nous parler de ce qu'il diffusait et de ce qui explique pourquoi il a été emprisonné et pourquoi il représentait une telle menace pour le gouvernement?
C'est un blogueur très connu et très populaire — un journaliste indépendant, en fait — au Vietnam. Il y a au Vietnam des médias très fermement contrôlés par l'État. Depuis quelques années, on y trouve une communauté florissante de journalistes alternatifs qui essaient de créer un espace indépendant à cette fin. Il est un véritable leader sur ce plan. Il a mis sur pied une association de journalistes indépendants dont le but est de promouvoir la liberté de presse et la liberté d'expression.
D'après ce que je sais de son blogue, que je ne suis pas parce que je ne lis pas le vietnamien, on y parle beaucoup de justice sociale et de démocratie. Il compte aussi parmi ceux qui soulèvent énergiquement des questions critiques et parfois très difficiles au sujet de la nature des rapports du Vietnam avec la Chine. C'est une question politique très délicate au Vietnam. On sait que le gouvernement va très souvent réprimer les personnes qui cherchent à provoquer le débat et la discussion à ce sujet.
Selon l'évaluation réalisée par Amnistie Internationale à son sujet, absolument rien de ce qu'il fait n'a quoi que ce soit de criminel. Nous estimons qu'il est un prisonnier d'opinion. C'est la raison pour laquelle nous faisons campagne, depuis maintenant deux ou trois ans, pour qu'il soit libéré sans condition.
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