:
Kwe kwe, ullukkut, tansi,
hello, bonjour.
[Traduction]
Monsieur le président, je tiens à souligner que je m'adresse à vous depuis le territoire visé par le Traité no 6 à Edmonton, territoire traditionnel de nombreux peuples autochtones, notamment les Cris, les Saulteaux, les Niitsitapi, les Pieds-Noirs, les Métis et les Sioux Nakota.
Je suis accompagné par de hauts fonctionnaires de mon ministère, ainsi que la sous-ministre déléguée des Services aux Autochtones du Canada, Valerie Gideon. Nous répondrons aux questions sur la santé mentale et les soutiens à la santé.
[Français]
J’aimerais commencer par rendre hommage aux survivants des pensionnats, à leurs familles et à leurs collectivités, et reconnaître les répercussions continues des traumatismes intergénérationnels.
Aujourd’hui, nous sommes de tout cœur avec les Tk'emlups te Secwepemc, les survivants, les familles et les communautés autochtones de l’île de la Tortue qui pleurent la perte de ces enfants innocents.
Malheureusement, le cimetière de Kamloops n’est pas un cas isolé. La Commission de vérité et réconciliation a répertorié plus de 4 100 décès d’élèves des pensionnats dans l’ensemble du pays. Il y a d’autres cas connus de tombes non marquées au pays, et beaucoup d’autres, des milliers même, seront repérées. C’est la triste réalité des pensionnats.
En réfléchissant à cette perte, nous devons reconnaître qu’il ne s’agit pas d’un événement purement historique. Il y a des parents qui vivent encore et qui ont perdu des enfants, peut-être même parmi ceux qu’on trouve à Kamloops.
[Traduction]
Il y a des frères, des sœurs, des nièces, des neveux et d'autres membres de la famille qui survivent et qui se demandent si leurs proches font partie de ceux qui ont été retrouvés. Nous sommes résolus à suivre la volonté des collectivités et à offrir notre soutien, au besoin, aux personnes touchées, afin de commémorer ces âmes innocentes.
Les récents événements survenus à Kamloops nous rappellent l'importance de reconnaître les séquelles des pensionnats et leurs répercussions tragiques sur les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Il est difficile d'imaginer la douleur qu'éprouvent tant d'enfants autochtones, leurs familles et leurs communautés. On dit que l'un des enfants trouvés au pensionnat de Kamloops n'avait peut-être que trois ans. Une vie qui a été volée et probablement enterrée sans cérémonie appropriée. C'est troublant et cela n'aurait jamais dû se produire. Mais cela s'est produit.
De nombreux élèves qui sont allés au pensionnat ne sont jamais revenus. Ils ont été perdus à tout jamais pour leurs familles. Leur taux de mortalité était beaucoup plus élevé que celui de la population d'âge scolaire en général. Leurs parents n'étaient souvent pas informés de leur maladie et de leur mort. Ils étaient enterrés loin de leurs familles dans des tombes longtemps négligées.
Même si c'est douloureux, nous devons continuer à chercher des réponses. Les Canadiens ont la responsabilité de connaître l'histoire et les séquelles des pensionnats, et d'honorer les survivants des pensionnats, leurs familles et leurs communautés.
Avant les audiences de la Commission de vérité et réconciliation, des recherches archéologiques et historiques ont été menées sur des lieux de sépulture et des cimetières potentiels d'anciens pensionnats partout au Canada. Tous les documents fédéraux connexes disponibles ont été remis au Centre national pour la vérité et la réconciliation, qui héberge maintenant les rapports sur le décès d'élèves. À mesure que la technologie évoluera, il est probable que d'autres lieux de sépulture seront découverts.
[Français]
Il est essentiel de déterminer les lieux de sépulture des enfants qui sont morts dans les pensionnats pour permettre aux familles de tourner la page. Des progrès importants sont réalisés grâce aux 94 appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. Environ 80 % des appels à l'action relevant de la responsabilité exclusive ou partagée du gouvernement fédéral sont terminés ou sont bien avancés.
Nous savons que nous pouvons faire mieux; en fait, nous devons faire mieux. Collectivement, nous devons tracer une nouvelle voie vers un Canada qui honore, respecte et inclut entièrement les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Des relations renouvelées sont essentielles à la croissance et à la prospérité de notre pays.
Meegwetch, qujannamiik, marci, thank you, merci.
:
Je vous saluais et vous remerciais de convoquer une réunion spéciale pour ce moment important, mais malheureusement très triste, afin de pouvoir honorer et immortaliser l'esprit de la vie de ces enfants, ce qui est très important dans notre culture.
[Le témoin s’exprime en cri ainsi qu’il suit:]
Mahikan Pimohtêw nisihkason. Maskwacîs ohci.
[Les propos en cri sont traduits ainsi:]
Je m'appelle Walking Wolf, et je viens de Hobbema.
[Traduction]
Je m'appelle Loup qui marche, et je viens de Maskwacis en territoire cri, et je tiens tout d'abord à vous remercier encore une fois d'avoir convoqué cette réunion spéciale.
Je veux nous ramener au premier rapport de la Commission. Nous avons conclu très tôt, à partir des récits que nous entendions, qu'il s'agissait d'une attaque directe. La politique des pensionnats autochtones ou des pensionnats indiens était une attaque contre nos langues, nos familles, nos communautés et, surtout, notre spiritualité. Je veux parler des répercussions de cette conclusion sur les familles et les communautés du point de vue non seulement de nos lois traditionnelles et de nos lois coutumières, mais aussi de nos lois sacrées, notamment en ce qui concerne notre pratique lorsque nous perdons un membre de notre communauté.
Je voudrais commencer par une histoire concernant mon grand-père, Mahihgan Pimoteyw, dont je porte maintenant le nom. Lors d'une épidémie, alors qu'il était chef, il a dû enterrer 33 membres de la nation crie d'Ermineskin en une seule journée. Cette obligation a été transmise à ma mère, et maintenant à moi, afin d'aider notre communauté en période de deuil comme aujourd'hui.
Je voulais également rappeler qu'au cours de notre histoire et pendant les travaux de la Commission, nous avons vu de nombreuses tombes qui se trouvaient à l'extérieur du cimetière, parce qu'il s'agissait sans doute d'un jeune élève de l'école qui s'était suicidé, et qu'il n'était pas permis de l'enterrer dans le cimetière. Je tiens à le souligner également, car lorsque j'étais au pensionnat — dans trois pendant plus de 14 ans —, à l'âge de 10 et 12 ans, j'ai perdu mes deux grands-parents, qui étaient en fait ceux qui m'ont élevé, mais je n'ai pas eu le droit d'aller à leurs funérailles. Je n'ai pas eu l'occasion de dire adieu ni à ma grand-mère ni à mon grand-père. Je le fais maintenant, par cette occasion.
Je veux aussi mentionner que nous, les membres de la Commission, avions toujours un siège vide à côté de nous, et j'ai un siège vide à côté de moi en ce moment. Nous demandions à l'esprit de l'enfant de se joindre à nous lors des audiences pour qu'il nous guide, qu'il prie avec nous et qu'il soit simplement avec nous pour nous épauler. Puis, après l'audience, nous lui demandions de repartir vers le lieu du bonheur éternel, comme l'appellent souvent nos anciens.
Je veux aussi parler du rapatriement que nous avons eu ici de 17 dépouilles provenant d'un pensionnat. Tout ce qui était marqué sur le cercueil était « fille de 9 ans » ou « garçon de 12 ans ». Il y en avait un en particulier qui portait la mention « garçon de 6 ans », et j'ai choisi de porter ce cercueil au cimetière après nos cérémonies, parce que c'est l'âge que j'avais lorsque j'ai été placé dans un pensionnat.
Nous avons fait une cérémonie traditionnelle. Je veux dire par là que nous avons fait une veillée. Nous avons chanté nos 16 chants de voyage. Nous avons eu notre cérémonie du calumet. Nos aînés nous ont parlé pendant la veillée, et nous avons également donné notre dernier festin. Plus que de simples cérémonies, ces cérémonies traditionnelles s'inscrivent dans nos lois. Les Autochtones doivent les célébrer lorsqu'ils perdent quelqu'un de leur communauté. Le plus dur, c'est toujours quand on perd un enfant. Nous avons pu faire ce rituel. Ensuite, nous avons organisé un service commémoratif les quatre années qui ont suivi l'enterrement, à la date anniversaire.
Je voulais mentionner que les familles de 215 enfants et plus n'ont pas pu en faire autant. Dans ma propre communauté, il y a eu les 17 personnes que j'ai mentionnées. De plus, on a trouvé quatre petits squelettes dans l'ancienne école lors de son démantèlement, ce qui me touche de près, car notre école était autrefois la plus grande du Canada, avec plus de 500 élèves de partout dans la province.
Je veux remercier les leaders de ma communauté, les anciens qui ont organisé un service commémoratif. Nous avons organisé des cérémonies de prière tous les jours depuis que nous avons appris cette nouvelle, car l'une des prophéties mayas prévoit que la spiritualité doit revenir au leadership. Il s'agit de l'une des quatre prophéties qu'ils ont faites récemment.
Je tiens à remercier le sous-ministre Quan‑Watson, car je connais le témoin précédent, et il suit ces enseignements avec respect dans son travail.
En conclusion, je veux nous rappeler les enseignements sacrés, et dans ce cas, celui auquel je veux réfléchir est celui du respect. J'ai entendu dire plus tôt dans la séance que la communauté doit prendre l'initiative. Hier, j'ai participé à la conférence des Nations unies sur la prochaine décennie pour les langues autochtones. Comme vous le savez, c'est également l'un des éléments auxquels on s'en est pris.
Cela dit, on a suggéré de ne pas parler d'un projet dirigé par les Autochtones, mais plutôt d'un projet piloté par les Autochtones, car si le projet est piloté par les Autochtones, ils auront leur mot à dire et pourront façonner les résultats qu'ils souhaitent obtenir de manière positive. Nous devons également respecter cet enseignement.
[Le témoin s’exprime en cri ainsi qu’il suit:]
So, âhkamêyimok.
[Les propos en cri sont traduits ainsi:]
Alors, soyez persévérants.
[Traduction]
Continuez le bon travail que vous faites, et comme je l'ai fait dans notre communauté, je demande à tous ceux qui nous écoutent de s'arrêter un moment et de dire une prière pour ces enfants qui suivent maintenant un chemin lumineux qui les ramène au lieu sacré des ancêtres.
Merci beaucoup, monsieur le président. C'est tout ce que je voulais dire à ce stade.
Je m'excuse de m'être connecté tardivement. Les instructions qu'on m'a données pour me connecter n'étaient pas aussi complètes qu'elles auraient pu l'être, et j'ai donc passé les 25 dernières minutes avec vos techniciens à essayer d'accéder à ce forum pour me joindre à vous. Je présente également mes excuses à mes collègues, les commissaires Littlechild et Wilson, pour avoir manqué quelque chose qu'ils auraient déjà dit. Il aurait été bon que nous puissions entendre les témoignages de chacun.
Lorsque j'ai été invité à participer à cet événement, je me suis demandé pendant un certain temps, soit environ une journée et demie, si je voulais y participer ou non, principalement parce que je ne souhaite pas que quelque chose d'aussi important, d'aussi personnel et d'aussi bouleversant que ce qui est arrivé puisse devenir un enjeu politique ou une question qui soit intégrée à l'action politique en cours à Ottawa. J'ai été heureux de voir et d'entendre que le et le se sont unis pour affirmer qu'ils allaient élaborer un plan sur la façon d'avancer dans ce dossier. Je tiens également à féliciter chacun d'entre eux d'avoir pris contact avec moi pour me dire qu'ils souhaitaient discuter de ce que cette démarche pourrait impliquer. J'en ai informé mes collègues.
La couverture médiatique dont cette question fait l'objet est à la fois une bonne et une mauvaise chose. J'en ai déjà parlé. Il est bon pour le Canada de comprendre que nous devons encore accepter une grande partie de ce qui s'est passé à l'époque des pensionnats indiens et qu'il y a encore beaucoup de vérités non révélées sur lesquelles nous devons nous pencher. C'est l'une des vérités que nous avons relevées au cours des travaux de la Commission de vérité et de réconciliation. En même temps, je reconnais que cette découverte a vraiment ébranlé les survivants.
J'ai coupé mon téléphone à toutes les demandes des médias — à l'exception de quelques-unes, principalement en raison du nombre élevé de demandes — et j'ai permis aux survivants de me joindre. Je dois dire que j'ai parlé à environ 200 survivants qui ont communiqué avec moi au cours des derniers jours pour exprimer leur réaction, leur chagrin, leurs sentiments de colère et de frustration, mais aussi leur immense émotion et leur ressenti face à l'ampleur de ce qu'ils contemplent et essaient d'accepter. Il y a très peu de programmes de ressources de guérison à la disposition des survivants, voire aucun à certains endroits. Malheureusement, l'engagement du gouvernement du Canada à leur fournir des centres et des programmes de guérison a pris fin avec le travail de la Commission de vérité et de réconciliation. J'en ai parlé dans la déclaration publique que j'ai publiée cette semaine.
Je pense que nous devons vraiment prendre cette question à cœur. J'ai comparé la situation à celle des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale à qui le Canada a fourni des services de rassemblement et des ressources à leur retour. Nous avons veillé à ce qu'ils aient des endroits où se réunir et parler entre eux, car personne n'aide mieux les survivants à guérir que d'autres survivants.
Les survivants des pensionnats souffrent maintenant beaucoup à cause de cette histoire, et ils souffriront encore plus, car, au fil du temps, je suis sûr que nous découvrirons d'autres endroits où des corps sont enterrés et d'autres lieux de sépulture non marqués. D'autres informations vont être mises au jour. Je vais commencer par ces réflexions.
L'une des questions que les gens me posent en privé est la suivante: qu'a fait le gouvernement à ce sujet jusqu'à maintenant? J'attire l'attention sur les appels à l'action que nous avons lancés — les appels à l'action 71 à 75, je pense — dans lesquels nous avons souligné qu'il s'agissait d'un problème majeur qui devait être réglé.
Le volume que nous avons publié dans le cadre du rapport final de la commission, le volume 4, recense les travaux que nous avons pu mener dans le cadre de la commission. Même avec la quantité limitée de recherches que nous avons effectuées, nous avons pu dire avec certitude que nous sommes d'avis qu'il existe plusieurs lieux de sépulture inconnus qui peuvent être découverts et localisés avec l'aide de chercheurs et d'experts qualifiés en géologie. Scott Hamilton, qui a fait ce travail pour nous, a indiqué sur les cartes et dans la base de données qu'il a pu élaborer où il pense que ces sites se trouvent actuellement.
Le gouvernement n'a rien fait pour y donner suite, et nous pensons que c'est un constat navrant de l'engagement du gouvernement — ou de son manque d'engagement — à essayer de clore l'histoire des pensionnats. Même si cette question n'est pas importante pour certains Canadiens et peut-être pour les représentants du gouvernement, elle est d'une importance capitale pour les survivants des pensionnats et pour les familles de ceux qui n'en sont pas revenus.
Lors des travaux de la Commission de vérité et de réconciliation et de l'audition des témoignages, de nombreux survivants nous ont relaté des récits horribles sur les décès survenus dans les écoles. Nous avons entendu les témoignages de survivants qui ont parlé de ce qu'ils croyaient être des meurtres et des actes de négligence. Nous n'avons pas été en mesure de prouver ces allégations en examinant les éléments de preuve et en cherchant d'autres renseignements. Nous avons simplement permis aux survivants de raconter leur histoire, parce que nous savions que la profondeur de leurs sentiments à ce sujet et ce qu'ils nous racontaient était un énorme fardeau dont ils avaient besoin de se libérer — et dont on devait leur permettre de se libérer — et nous voulions qu'ils aient la possibilité de le faire.
En outre, nous savons que les dossiers qui ont été perdus au cours du processus contenaient des renseignements supplémentaires, car la plupart de nos renseignements sur les dossiers qui pourraient exister montrent que les dossiers scolaires ont été détruits. Certains de ces documents qui nous auraient permis d'obtenir ces informations ont été perdus dans des inondations ou des incendies, mais nombre d'entre eux ont été détruits.
Nous savons que le rapport Bryce a révélé, bien sûr, que le taux de mortalité dans les écoles de la Saskatchewan se situait entre 25 % dans certaines écoles — dans une école — et 49 % dans une autre école. On peut en déduire que si c'était là le taux de mortalité de l'époque dans ces écoles, et si un taux approchant ne serait‑ce que 25 % continuait d'être le taux de mortalité dans les pensionnats sur une certaine période, alors il s'agissait d'un problème gigantesque. Le gouvernement du Canada n'a pas accepté son rapport. Il ne lui a pas permis de poursuivre ses études et l'a même exclu de la fonction publique en raison des renseignements qu'il a fournis et du fait qu'il insistait pour continuer à en parler.
On a fait beaucoup pour étouffer l'affaire, et c'est un aspect de cette histoire qui doit vraiment faire l'objet d'une enquête. Le fait qu'il existe encore des dossiers de l'Église qui n'ont pas été révélés — qui n'ont pas été mis à la disposition du centre national ou de la Commission de vérité et de réconciliation — témoigne du manque d'engagement de l'Église catholique à nous permettre de poursuivre notre enquête. Nous devons également examiner cette question.
Je comprends qu'en Colombie-Britannique... J'ai reçu un appel tôt ce matin, en fait, disant que la GRC a maintenant déclaré qu'une enquête majeure allait être menée sur les corps qui ont été retrouvés à Kamloops, et qu'elle commence maintenant à interroger ceux qui ont fait connaître cette histoire. Malheureusement, à la manière typique de la police, lourde et maladroite, elle ne fait qu'intimider les gens au lieu de les aider. Nous devons avoir une discussion avec la police sur la façon dont elle gère la situation, car elle ne devrait pas poursuivre ceux qui révèlent l'information. Elle devrait, en fait, examiner et chercher ces dossiers. Elle devrait examiner ce que nous savons au lieu d'essayer de poursuivre les témoins.
La jeune femme qui a fait des recherches au moyen du géoradar, par exemple, est très effrayée par l'approche que la GRC a adoptée à son égard, et je ne la blâme pas. Je lui ai conseillé, ainsi qu'à d'autres, de s'assurer qu'elle dispose d'un conseiller juridique afin de ne pas être maltraitée à l'avenir.
Il nous reste une tâche énorme à accomplir, et nous l'avons définie comme une tâche à terminer dans le cadre des travaux avec la Commission de vérité et de réconciliation. Pour que nous puissions traiter cette question correctement, nous devons nous assurer qu'une étude indépendante est effectuée sur la question de ces lieux de sépulture, leur emplacement et ce que les chiffres nous diront. Cette enquête ne devrait pas être menée sous les auspices du gouvernement fédéral, mais être supervisée par un comité parlementaire qui veillera à ce qu'elle soit menée de manière appropriée. Il est préférable de procéder ainsi plutôt que de charger quelqu'un du ministère de la Justice ou du ministère des Affaires autochtones de contrôler le processus.
Je vous encourage à y réfléchir au fur et à mesure que nous avançons, car je pense qu'il y a encore beaucoup de questions qui restent sans réponse. Je pense que les survivants des pensionnats ne sont pas les seuls à avoir besoin de le savoir. Ceux qui ont survécu aux personnes qui travaillaient dans les pensionnats ont également besoin de savoir ce qui s'est passé, parce que cette affaire les touche également. Nombre d'entre eux m'ont fait part de l'angoisse qu'ils ressentent en sachant qu'un de leurs proches — leur grand-père, leur grand-mère, leur père ou leur mère — travaillait dans l'école sans savoir ce qui se passait, ou sans en parler s'il savait quelque chose. Ils veulent savoir ce qu'ils peuvent faire pour les aider eux aussi.
Je suis sûr que vous aurez beaucoup de questions à nous poser, alors je vais m'arrêter là. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour à tous. Je tiens à saluer les membres du Comité et, si je puis me permettre, monsieur le président, j'honore également l'expression de vos remords et ce que vous avez partagé avec nous au sujet de votre femme dans une conversation très personnelle. Je pense que cela témoigne de notre humanité commune alors que nous abordons cette question.
Je tiens également à saluer le sous-ministre Quan-Watson pour [difficultés techniques] être venu vous parler depuis le territoire visé par le Traité no 8 [difficultés techniques] des peuples de la Nation dénée. Je sais que M. Quan-Watson a vécu ici, mais il a également travaillé avec nous et nous a suivis tout au long des travaux de notre commission.
Je tiens également à saluer mes collègues commissaires. Bonjour à vous deux. C'est bon de vous voir tous les deux. Merci beaucoup, chef Littlechild, pour votre témoignage très personnel également.
Je salue nos proches du Centre national pour la vérité et la réconciliation. Je les désigne ainsi, car c'est grâce à la Commission de vérité et de réconciliation que ce centre a vu le jour. Sa création faisait partie du mandat de notre commission. Ils poursuivent le travail très important et respectueux de conserver tout ce que nous avons appris et tout ce qui nous a été donné sous forme d'enseignements et d'effets pendant les travaux de la commission.
Je tiens également à saluer les survivants ou les survivants intergénérationnels qui se trouvent dans la salle, qui font partie de ce comité ou qui se joignent à nous d'une autre manière et dont les voix et, je dois le dire, les efforts et le plaidoyer incessants nous ont amenés au point où nous en sommes aujourd'hui.
Enfin, je tiens tout particulièrement à saluer et à honorer tous ceux qui, à la grandeur du pays, sont en deuil et qui, parallèlement, sentent qu'on commence à tenir compte de tout ce qu'ils nous ont dit et qu'on commence à écouter.
Je me disais, si seulement je pouvais vous souhaiter un bon anniversaire, mais nous ne sommes pas ici pour célébrer. Nous sommes plutôt ici pour mettre en lumière les choses que nous connaissons depuis des années, mais que nous avons jusqu'à présent niées ou ignorées ou auxquelles nous n'avons pas accordé suffisamment d'attention, de ressources ou d'urgence pour que des mesures soient prises.
Que s'est‑il passé il y a six ans aujourd'hui — il y a six ans, exactement, hier? En fait, des milliers de survivants des pensionnats et d'autres personnes de partout au pays étaient réunis à Ottawa pour connaître, entendre et célébrer les conclusions de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada. Nous, les trois commissaires, nous sommes réunis pour rendre public le rapport sommaire de nos conclusions, volume complet de témoignages de survivants — dont certains ont précisément parlé de cette question —, qui contenait 10 principes fondamentaux de la réconciliation et lançait 94 appels à l'action. Aujourd'hui, nous n'avons fait allusion qu'aux appels à l'action dans les 70, qui portent particulièrement sur cette question, mais d'autres appels à l'action sont interreliés, comme le numéro 82, qui demande la création d'un monument national, en partie pour avoir un lieu commémoratif pour les enfants inconnus — ceux que nous n'avons pas encore trouvés et que nous ne trouverons peut-être jamais.
Le rôle que j'ai joué dans ces discours finaux ce jour‑là concernait, en fait, les enfants disparus. Nous en avons beaucoup parlé à l'époque, et c'était il y a six ans.
Quelques mois plus tard, nous avons publié notre rapport complet en plusieurs volumes, et notre président, M. Sinclair, vient de vous renvoyer au volume 4, qui est entièrement consacré aux enfants disparus et aux lieux de sépulture non marqués.
Le commissaire Littlechild vous a parlé des chaises vides que nous avions, généralement au nombre de deux, soit une pour tous les petits garçons et une pour toutes les petites filles, afin qu'ils soient toujours présents à l'esprit dans notre réflexion et notre travail.
Les conclusions de nos rapports ne sont pas tombées du ciel. Elles sont tirées de documents historiques, de nouvelles recherches que nous avons commandées et de 7 000 témoignages enregistrés d'anciens élèves survivants des pensionnats, qui étaient, chacun, les experts de leur propre vécu, de ce qui leur était arrivé, de ce qui était arrivé à leurs amis et aux membres de leur famille, de ce dont ils avaient été témoin et de ceux qu'ils n'avaient jamais revus.
C'était il y a six ans. Que s'est‑il passé il y a neuf ans? Lors d'audiences publiques ouvertes à tous ceux qui voulaient bien y prêter attention, car toutes nos activités étaient publiques et la plupart étaient diffusées sur le Web, des femmes survivantes de Chisasibi, dans le nord du Québec, m'ont confié ce hochet de bébé, le shiishiikun. Elles m'ont chargée d'une responsabilité particulière en tant que femme commissaire, parfois appelée mère commissaire, soit celle de faire tout ce qui était en notre pouvoir pour retrouver et libérer les esprits des enfants disparus.
Que s'est-il passé il y a 11 ans? Lors de l'un des tout premiers événements de la Commission de vérité et réconciliation, à Winnipeg, nous étions assis en rond, avec le ministre conservateur des Affaires autochtones de l'époque et un ancien chef, lequel nous implorait de retrouver un membre de sa famille, qui n'était jamais rentré du pensionnat.
Que s'est-il passé il y a 13 ans? Les chefs de chacun de vos partis politiques ont pris la parole à la Chambre des communes pour présenter des excuses officielles pour le rôle que leur parti et leurs gouvernements respectifs avaient joué dans l'imposition et la perpétuation du système des pensionnats. Autre fait très important, chacun d'entre eux a promis de travailler ensemble afin de rectifier les choses, dans un esprit de réconciliation.
Nous sommes de nouveau réunis aujourd'hui dans le cadre de ce que vous avez appelé une session d'urgence. J'ai réfléchi à la question suivante: quand le connu ou l'atroce devient-il une urgence? Je vous suis extrêmement reconnaissante de cette expression d'urgence, mais je suis consternée qu'elle soit formulée en utilisant le langage pauvre avec lequel nous devons travailler, qu'elle soit appelée « découverte de restes humains ». Il ne s'agit pas d'une découverte, et c'est la raison pour laquelle je vous ai rappelé ces faits historiques. C'est la validation de tout ce que l'on nous a dit et répété précédemment et à maintes reprises. Il ne s'agit pas de statistiques. Nous connaissons les chiffres, mais ce ne sont pas des statistiques. D'ailleurs, il ne s'agit pas non plus de tous les enfants dont nous étions conscients qu'ils étaient morts dans les pensionnats. Nous savions déjà qu'il y en avait 52 dans nos dossiers existants. Ce ne sont pas des statistiques; ce sont de petits enfants, dont certains resteront peut-être à jamais inconnus. Toutefois, ils ont tous été aimés, et aucun d'entre eux n'a jamais été oublié.
Que peut faire le Canada?
J'ai essayé de me faire une idée de ce que nous pourrions vous proposer à mesure que vos délibérations avancent. Le commissaire Sinclair en a déjà parlé, et je pense que c'est extrêmement important. Tout d'abord, il faut qu'il y ait une réponse non partisane continue et soutenue et une priorisation des ressources nécessaires pour effectuer ce travail et tout ce qui est abordé sous cette large bannière de la réconciliation. Nous n'avons cessé de répéter que la réconciliation est un enjeu exempt de partisanerie.
Ensuite, il faut qu'il y ait une responsabilisation, afin que nous, les Canadiens, nous conformions aux normes et aux attentes internationales que nous défendrions et que nous avons en fait défendues par le passé auprès d'autres pays, y compris en ce qui concerne la prise en compte des crimes, en général, et des crimes contre l'humanité, en particulier, qui ont été commis.
Je demanderais qu'un langage honnête soit utilisé et que nous ne nous réconfortions pas en employant des expressions comme « un triste chapitre de notre histoire ». S'agit-il de cela, ou s'agit-il d'une atrocité en matière de droits de la personne? S'agit-il d'une politique sociale erronée ou, dans le cas présent, d'un terrain propice à la criminalité et aux abus? Tout en appréciant votre comité, votre concentration et votre engagement, pour lesquels je vous suis très reconnaissante, je veux que vous exerciez des pressions afin que cette question soit de moins en moins considérée comme un problème uniquement lié aux affaires autochtones et du Nord. Il s'agit d'une question de droits de la personne et de justice qui revêt une importance cruciale pour tous les Canadiens et pour les principes mêmes de la démocratie.
C'est une question qui concerne l'ensemble du gouvernement, et je dirais même tous les gouvernements, comme nous le répétons sans cesse dans nos appels à l'action, et qui concerne le gouvernement fédéral, sa capacité, son influence et son pouvoir particulier de rassembler tous les gouvernements. L'appel à l'action numéro 75, en particulier, est très précis à ce sujet. Un grand nombre de ces pensionnats et de ces lieux de sépulture ne se trouvent plus sur des propriétés appartenant à l'Église ou même sur des propriétés publiques. Bon nombre d'entre eux appartiennent maintenant à des particuliers, et il faudra que les propriétaires privés, les municipalités, les dirigeants autochtones, ainsi que les gouvernements provinciaux et territoriaux, collaborent à cet égard.
Je demanderais ensuite de la transparence et des rapports complets, ce qui peut évidemment être réalisé plus facilement si vous disposez d'une stratégie globale qui a été communiquée et que nous connaissons tous. Ainsi, nous pourrions être informés des progrès réalisés sans avoir à dépendre du gouvernement qui pourrait prétendre avoir pris des mesures sans que personne d'autre ne le sache.
En fait, je suis au courant des initiatives que le ministère des Affaires autochtones a entreprises dans ce dossier. Ont-elles progressé suffisamment et assez vite?
Je pense que ce sont des nouvelles que nous devons communiquer de façon fréquente et complète, afin que nous comprenions comment ces efforts sont liés aux autres efforts qui sont mentionnés de manière indissociable dans nos appels à l'action. Je vous encourage vraiment, vous et tous les autres, à ne pas vous limiter aux appels à l'action dont les numéros sont dans les soixante-dix.
Prenez des mesures liées aux appels à l'action qui vont de soi. À titre d'exemple, prenons l'appel à l'action numéro 82, qui ne fait pas partie de l'ensemble des appels à l'action ayant des numéros dans les soixante-dix. Il demande que nous érigions un monument national en l'honneur de tous les élèves qui ont fréquenté les pensionnats, en tenant compte du fait qu'il est aussi censé servir de tombeau à l'enfant inconnu, si vous voulez, et en acceptant, comme nous le devons, le fait que certains des enfants que nous trouverons ne seront jamais identifiés. Saurons-nous jamais exactement d'où ils venaient et à qui ils étaient apparentés?
Je voudrais terminer en disant que j'aimerais que nous embrassions — sans faire de comparaisons grossières — les précieuses leçons tirées de la pandémie de la COVID-19, pendant laquelle nous avons démontré et nous nous sommes prouvé que nous savions comment intervenir rapidement. Nous savons comment prendre les mesures qui s'imposent, quoiqu'il en coûte, quand il s'agit de faire la bonne chose, quand il s'agit de prendre soin les uns des autres, et quand il s'agit de nous assurer que nous respectons les normes auxquelles nous disons croire, en tant que Canadiens.
Si vous le permettez, je voudrais terminer là où j'ai commencé, c'est‑à‑dire en rendant hommage à toutes les générations de petits enfants qui ont été arrachés à leur foyer et éloignés de tout qu'ils connaissaient et de tous ceux qu'ils connaissaient, et en reconnaissant les petits enfants qui reposent à Kamloops. La semaine dernière, ils se sont dressés et ont commencé à faire entendre leur voix dans tout le pays. Ils ont porté le Canada au premier plan de l'attention internationale. Je pense qu'il nous incombe collectivement de continuer à les écouter et à déployer tous les efforts possibles pour retrouver les autres personnes partout au pays qui sont toujours portées disparues.
J'attends avec impatience vos questions et la possibilité de dialoguer avec vous. Merci beaucoup.
Marsi cho.
:
Je vais commencer. Je tiens d'abord à souligner que je me joins à cette réunion depuis les terres d'origine des peuples anishinabe, cri, oji-cri, dakota et déné, dans le berceau de la nation métisse.
Au nom du Centre national pour la vérité et réconciliation, je tiens à dire merci, meegwetch, aux commissaires, que j'ai pu côtoyer pendant de nombreuses années au cours du mandat de la commission. Je tiens aussi à remercier l'honorable président et les membres du Comité d'avoir entrepris cette étude opportune et absolument nécessaire.
Je suis de tout cœur avec les familles des enfants qui ont péri au pensionnat de Kamloops, et avec tous les enfants qui ne sont pas rentrés chez eux. Nous traversons une période de deuil en ce moment, mais nous avons aussi l'occasion de réaliser enfin le travail nécessaire pour retrouver les enfants qui ont été enlevés et qui ne sont jamais revenus chez eux.
Nous espérons sincèrement que ce que les Tk'emlúps te Sekwépemc ont accompli en localisant 215 enfants représentera un moment où tous les Canadiens accepteront la vérité et feront preuve d'un véritable engagement envers la réconciliation. Nous espérons que cette tragédie débouchera sur un effort national concerté visant à retrouver et à honorer tous les enfants métis, inuits et des Premières nations qui ont péri à cause du système des pensionnats. C'est une mesure qui s'impose de toute urgence et qui aurait dû être prise depuis longtemps.
En tant qu'ancienne responsable de la collecte des déclarations pendant l'enquête de la Commission de vérité et réconciliation, j'ai entendu des survivants parler du fait qu'ils ont été témoins du meurtre et du décès d'enfants pendant qu'ils vivaient dans des pensionnats. De nombreux parents n'ont jamais été informés du décès de leur enfant ni de l'endroit où il se trouvait. Nous continuons d'entendre ces récits au Centre national pour la vérité et réconciliation. Le quatrième volume du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation décrit les cimetières comme étant abandonnés et non protégés.
Le CNVR a été engendré par la Commission de vérité et réconciliation, et nous continuons de travailler en étroite collaboration avec les survivants afin de nous assurer que notre travail est guidé par leur vision et reflète leur vérité. Cinq des 94 appels à l'action demandent que les gouvernements et les institutions canadiennes travaillent en collaboration avec nous et appuient le travail que nous sommes en train d'accomplir.
L'appel à l'action 72 demande précisément au gouvernement fédéral de mettre suffisamment de ressources à la disposition du CNVR pour nous permettre de tenir à jour le registre national des décès des élèves de pensionnats. Grâce à la combinaison du travail de la Commission de vérité et réconciliation et celui du CNVR, nous avons confirmé 4 117 décès d'enfants dans les pensionnats. En raison de certaines lacunes dans les registres, nous n'avons pas été en mesure de trouver les noms de certains de ces enfants.
Les gens croient que le nombre d'enfants disparus est beaucoup plus élevé. La tenue des dossiers de ces écoles était loin d'être conforme aux normes actuelles, et les dossiers n'étaient pas cohérents. L'examen des dossiers déjà présents dans la collection du CNVR est toujours en cours, et nous trouverons d'autres enfants disparus.
Les survivants et leur famille jouent un rôle important dans la reconstitution des preuves. Aujourd'hui encore, des survivants continuent de se manifester et de raconter les décès dont ils ont été témoins. Bon nombre de ces enfants sont dans des lieux de sépulture non marqués. Il existe également des témoignages de corps emmurés, de corps enterrés dans des collines ou au bord de rivières, et de corps qui n'ont jamais été retrouvés après que des enfants sont morts en essayant de s'échapper de ces pensionnats. Ces sites sont en fait des scènes de crime, et la découverte à Kamloops a déclenché un besoin urgent que les survivants et leur famille nous fassent part de leur vérité pendant qu'ils le peuvent encore.
Nous ne savons pas ce que les communautés décideront de faire en ce qui concerne le rapatriement des enfants dans leur foyer. Ces décisions doivent être prises par les familles et les communautés. Je tiens cependant à souligner au Comité l'urgence de documenter ce dont les survivants ont été témoins ou ce que les familles ont communiqué au sujet de leurs proches disparus. Nous sommes engagés dans une course contre la montre. Les survivants nous disent souvent qu'ils ont moins de jours à vivre que de jours vécus.
Nous savons que le pensionnat de Kamloops n'est qu'une école parmi plus de 140 autres écoles qui existaient au Canada. Nous ne sommes qu'au début de la reconnaissance de l'étendue de cette horrible perte de vies précieuses. Le travail à accomplir est considérable.
Je pense qu'il est également important que le Comité reconnaisse qu'à l'heure actuelle, il n'y pas d'engagement fédéral permanent à l'égard du maintien du financement de base du CNVR, un financement qui est nécessaire pour poursuivre ce travail crucial.
Depuis notre ouverture en 2015, nous avons élaboré un registre commémoratif national des élèves, créé des stages en collaboration avec d'autres institutions afin d'élargir les archives numériques, et offert un meilleur accès aux vérités qui se trouvent dans les dossiers que nous détenons. Nous avons également établi un fonds de commémoration et de guérison en suivant les conseils des survivants des pensionnats. En établissant ce fonds, les survivants ont donné la priorité à l'accessibilité, parce que les communautés méritent de poursuivre leur guérison et leur commémoration de la manière qu'elles jugent appropriée pour elles-mêmes, sans devoir faire face à des formalités administratives et des obstacles bureaucratiques difficiles à surmonter.
Je vais maintenant demander à Mme Cynthia Wesley-Esquimaux, présidente du Cercle de gouvernance du CNVR, de parler de ce qu'il faut faire à l'avenir.
Meegwetch.
Je remercie également les commissaires pour le travail qu'ils ont accompli dans le passé et pour la vérité qu'ils ont révélée.
J'aimerais aussi remercier le Comité permanent de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
J'aimerais vous souhaiter un bon après-midi. Je suis une fière membre de la Première nation des Chippewas de Georgina Island, et je réside près du lac Simcoe.
De concert avec les Chippewas de Beausoleil et de Rama, et les Mississaugas d'Alderville, de Curve Lake, de Hiawatha et de Scugog Island, nous sommes tous signataires de plusieurs traités conclus au cours du XVIIIe siècle et XIXe siècle, qui couvraient des terres situées dans différentes parties du sud et du centre de l'Ontario. J'aimerais souligner que je m'adresse à vous aujourd'hui depuis les terres originales des Chippewas.
Tout d'abord, je tiens également à ce que vous sachiez que mes deux parents ont fréquenté un pensionnat et qu'ils y ont passé 20 ans à eux deux. Mon père y est allé à l'âge très précoce de quatre ans, il y a été élevé, et il en a subi les conséquences tout au long de sa vie.
Je pense qu'il y a deux choses qui doivent être faites.
Premièrement, il faut découvrir enfin la vérité — et j'entends par là la vérité avec un V majuscule, car nous avons entendu de nombreuses révélations, mais nous n'avons pas entendu la vérité finale — afin d'identifier finalement et complètement tous les enfants qui ne sont jamais rentrés chez eux. Pour ce faire, il est essentiel que toutes les parties à la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens divulguent tous les documents pertinents qui sont nécessaires pour documenter cette vérité.
Deuxièmement, il faut respecter les protocoles autochtones relatifs au deuil et veiller à ce que les communautés autochtones déterminent les cérémonies et les commémorations qui sont nécessaires et appropriées pour rendre hommage aux enfants qui sont décédés et à ceux qui ne sont jamais rentrés chez eux.
Pendant des années, le gouvernement canadien a refusé aux peuples autochtones la liberté d'organiser nos cérémonies sacrées et d'appliquer nos pratiques culturelles. Le système des pensionnats a joué un certain rôle, voire le rôle le plus important, dans le renforcement de cette situation. Les survivants ont déclaré que les pensionnats avaient eu un effet négatif sur leur capacité à faire leur deuil.
Il est donc nécessaire de soutenir les communautés afin qu'elles puissent faire appel à des gardiens du savoir et entreprendre les cérémonies qui ont été si longtemps refusées aux enfants disparus, à leurs familles et à leurs communautés. Il y a un processus de rétablissement en cours qui doit être soutenu pour aider nos prochaines générations.
Je tiens à souligner l'appel à l'action 76 de la Commission de vérité et réconciliation, qui indique que les peuples autochtones doivent être en mesure de diriger l'élaboration de stratégies visant à documenter, entretenir, commémorer et protéger les cimetières des pensionnats.
De l'avis du Centre national pour la vérité et réconciliation — et des survivants sur lesquels nous comptons pour nous guider —, le fait de cacher, d'endommager, de perturber ou de détruire les sépultures des enfants des pensionnats doit être reconnu comme un crime et doit faire l'objet de poursuites à ce titre.
En outre, des normes nationales doivent être mises en place concernant l'utilisation des technologies d'enquête, comme le radar de balayage terrestre, afin de garantir le respect de la vie privée des familles concernées et de ne pas compromettre les preuves d'actes criminels.
Enfin, toutes les mesures visant à enquêter sur les lieux de sépultures et à les protéger doivent respecter les droits des peuples autochtones en vertu du droit national et international, dont la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Hier, la a annoncé que les fonds affectés précédemment à l'enquête sur les lieux de sépulture seraient enfin mis à la disposition des gouvernements et des communautés des Premières nations, des Inuits et des Métis. En faisant cette annonce, la ministre a déclaré aux journalistes qu'auparavant, les peuples autochtones n'étaient pas prêts à ce que les fonds soient débloqués.
C'est tout simplement faux. Le Centre national pour la vérité et réconciliation, les survivants et nos partenaires travaillent dans un cadre de collaboration, de respect des divers protocoles autochtones et d'adhésion aux conseils des survivants et des gardiens du savoir depuis de nombreuses années — comme vous avez entendu l'ancien commissaire Wilson le dire.
Le gouvernement fédéral s'est fait dire à maintes reprises qu'il était urgent d'agir. Le centre national et les communautés autochtones ont désespérément cherché à prendre des mesures constructives pour localiser les lieux de sépulture, mais ils ont été grandement sous-financés. Nous avons fait des progrès sur le chemin de la vérité, de la réconciliation et de la guérison, mais il reste une vérité plus profonde à découvrir.
L'école de Kamloops met en évidence tout le travail que nous, les Canadiens, avons à réaliser. Il faudra que le gouvernement du Canada prenne des mesures véritables et soutenues pour s'acquitter de ses obligations et réparer cette horrible injustice. Les survivants n'ont cessé de dire qu'avant de pouvoir parler sérieusement de réconciliation, il faut que la vérité éclate et que la guérison ait lieu.
Le travail de la Fondation autochtone de guérison a été écourté, et il serait très approprié de la soutenir en ce moment. Tant que nous n'aurons pas identifié tous les enfants qui ne sont jamais rentrés des pensionnats, nous ne connaîtrons pas toute la vérité. Tant que ces enfants ne seront pas enfin rendus à leurs familles et à leurs communautés, le chemin de la guérison restera incomplet.
C'est une tâche collective qui nous attend, et nous devons la mener à bien sans plus tarder.
Meegwetch de votre attention.