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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 26 septembre 2000

• 0949

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.)): Je déclare la séance ouverte, et je souhaite la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui qui représentent Parcs Canada. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions la question de la protection des espèces sauvages en péril au Canada relativement au projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.

Je souhaite la bienvenue à Bruce Amos, directeur général de la Direction générale des parcs nationaux; à Nikita Lopoukhine, directeur exécutif à la Division de l'intégrité écologique, Direction générale des parcs nationaux; et à M. Gilles Seutin, biologiste principal, Division de l'intégrité écologique, à la Direction générale des parcs nationaux. Notre comité est heureux de vous recevoir.

• 0950

Veuillez nous présenter votre exposé.

[Français]

M. Bruce Amos (directeur général, Direction générale des Parcs nationaux, Agence Parcs Canada): Merci beaucoup, madame la présidente. Mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour.

[Traduction]

Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs du comité permanent. Nous sommes heureux de comparaître aujourd'hui pour vous faire part du point de vue de Parcs Canada sur le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.

Vous avez présenté mes collègues, Nik Lopoukhine et Gilles Seutin.

Parcs Canada reconnaît le besoin d'adopter une loi assurant la protection et le rétablissement des espèces en péril. De nombreuses espèces en péril au Canada habitent nos parcs nationaux. Le projet de loi C-33 nous permettra de mieux les protéger sur l'ensemble des terres dont nous avons la gestion et de favoriser leur rétablissement. Il permettra aussi le développement et l'adoption de mesures appropriées par toutes les parties dont les compétences et les intérêts pour les espèces en péril se recoupent. Nous sommes donc heureux d'apporter notre appui à l'actuel projet de loi.

La protection et le rétablissement des espèces en péril au Canada sont des priorités de premier ordre. Chaque année, le Comité sur le statut des espèces en péril au Canada (COSEPAC) relève de nouvelles espèces dont la situation est précaire et qui méritent une attention particulière. La liste du COSEPAC compte maintenant 173 espèces en voie de disparition et menacées et 153 espèces dont la situation est préoccupante.

Parcs Canada est l'un des organismes du gouvernement fédéral ayant un mandat légiféré de conservation. Depuis de nombreuses années, nous travaillons à protéger et à rétablir la faune et la flore dans les parcs nationaux. Toutefois, pour que cela soit efficace dans le cas des espèces en péril, il faut un cadre législatif qui permet à tous les gouvernements et aux groupes intéressés de conjuguer leurs efforts. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec le ministère de l'Environnement, le ministère des Pêches et des Océans et d'autres ministères fédéraux à élaborer ce projet de loi pour veiller à ce qu'il respecte les responsabilités de Parcs Canada relativement à la gestion des espèces sauvages se trouvant dans les parcs et les lieux historiques nationaux, et pour accroître notre capacité de protéger et de rétablir les espèces en péril en collaboration avec d'autres.

[Français]

J'aimerais dire quelques mots au sujet de l'Agence Parcs Canada. En 1885, le premier parc national du Canada voyait le jour à Banff. En 1911, nous étions le premier pays au monde à établir un Service national des parcs. L'Agence Parcs Canada a été créée en 1998 par une loi du Parlement, entrée en vigueur en avril 1999. Dans l'ensemble, le mandat de l'agence est de protéger et de mettre en valeur les aspects significatifs du patrimoine naturel et culturel du Canada, afin d'en favoriser la compréhension, l'appréciation et la jouissance par le public, de manière à en assurer à long terme l'intégrité écologique et commémorative.

La ministre du Patrimoine canadien est responsable de l'agence et fixe pour elle les orientations à suivre. L'agence gère présentement 39 parcs nationaux et réserves de parcs nationaux, 3 aires marines de conservation, 132 lieux historiques nationaux et 9 canaux historiques. Ce réseau couvre près de 250 000 kilomètres carrés et représente plus de 2 p. 100 de l'assise territoriale du pays.

[Traduction]

Pour mettre les choses en perspectives, sachez que le territoire que gère Parcs Canada équivaut à la superficie totale de Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard.

[Français]

Parcs Canada cherche à étendre ses réseaux marins et terrestres pour faire en sorte que plus de terres et d'espèces se retrouvent sous la protection de notre loi.

• 0955

En vertu de l'actuelle Loi sur les parcs nationaux, nous sommes tenus de gérer les parcs de manière à en assurer l'intégrité écologique. Selon cette loi et ses règlements, la faune, la flore et les ressources naturelles des parcs jouissent d'une protection, qu'elles soient ou non en péril. Le projet de loi C-27, la nouvelle Loi sur les parcs nationaux du Canada, qui se trouve maintenant devant le Sénat, renforce notre mandat de protection de l'intégrité écologique. On y mentionne que «la préservation ou le rétablissement de l'intégrité écologique par la protection des ressources naturelles et des processus écologiques sont la première priorité du Ministre pour tous les aspects de la gestion des parcs». Il ressort clairement de cette disposition que les parcs nationaux doivent être gérés de façon à protéger les espèces en péril.

[Traduction]

Les parcs nationaux abritent un grand nombre d'espèces en péril. Des 173 espèces menacées ou en voie de disparition figurant sur la plus récente liste du COSEPAC, 70 se rencontrent dans un ou plusieurs parcs. Quelques espèces en péril se trouvent même exclusivement, ou presque, dans un parc national. Les experts ont déterminé que c'était le cas de sept espèces, dont la physe des fontaines de Banff et la population orientale de la tortue mouchetée. Parcs Canada prendra les devants pour définir les mesures nécessaires pour la protection et le rétablissement de ces espèces.

Il n'est pas cependant étonnant de constater que la grande majorité des espèces en péril ont une aire de répartition plus étendue que les seuls parcs nationaux. Le faucon pèlerin, la grue blanche, la chevêche des terriers et le chardon de Pitcher en sont des exemples. Le projet de loi C-33 fournit un mécanisme clair de collaboration des ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux, ainsi que des organismes autochtones et d'autres intéressés en vue de protéger et de rétablir les espèces menacées.

Compte tenu du mandat de conservation imposé par la loi à Parcs Canada, des vastes territoires que nous gérons et de l'importance que revêtent les aires protégées pour les espèces en péril, il convient parfaitement que la ministre du Patrimoine canadien soit nommée ministre compétente en vertu du projet de loi sur les espèces en péril et participe au débat du Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril avec les autres ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la faune et de la flore.

Comme nous l'avons mentionné, la Loi sur les parcs nationaux et ses règlements permettent la protection de toutes les espèces animales et végétales ainsi que des ressources naturelles des parcs nationaux. Mais nous estimons que la loi proposée, qui porte spécifiquement sur les espèces en péril, améliorera notre capacité à protéger efficacement et à rétablir les espèces en péril sur les terres que nous administrons. Voici en quoi le projet de loi C-33 y contribuera: Il resserrera les mesures de protection des espèces en péril dans les parcs nationaux et autres lieux que nous gérons; il établira de nouvelles exigences pour la délivrance de permis autorisant des activités pouvant porter atteinte aux espèces en péril; et il exigera la préparation de stratégies de rétablissement et de plans d'action, de concert avec d'autres intervenants. Laissez-moi vous expliquer brièvement en quoi consistent ces avantages.

Le projet de loi C-33 renforcerait les dispositions sur la conservation de la Loi sur les parcs nationaux et de ses règlements en resserrant les mesures de protection des espèces en péril. Les interdictions générales prévues par le projet de loi s'ajouteraient aux interdictions déjà prévues par la Loi sur les parcs nationaux. En outre, les peines prévues dans le projet de loi pour les contrevenants sont beaucoup plus sévères que les peines prévues par la Loi sur les parcs nationaux, fournissant un meilleur moyen de dissuader les actes illégaux pouvant porter atteinte aux espèces en péril présentes dans les parcs.

Deuxièmement, le projet de loi C-33 fixe de nouvelles exigences qui baliseraient mieux notre pouvoir d'autoriser des activités sur les terres que nous gérons, lorsque ces activités peuvent nuire aux espèces en péril, à toute partie de leur habitat essentiel, ou aux lieux où vivent des espèces. Le projet de loi permettrait de limiter la portée de ces activités et d'établir des conditions préalables ainsi que des modalités d'obtention d'un permis ou de conclusion d'une entente. Les exigences législatives proposées relativement aux espèces visées sont conformes à nos politiques et pratiques actuelles et renforcent l'application.

• 1000

Troisièmement—et c'est peut-être là l'aspect le plus important—le projet de loi exigerait la préparation de stratégies de rétablissement et de plans d'action pour les espèces en péril, à l'intérieur d'échéances claires et en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les autres ministères fédéraux, les organisations autochtones et toutes les autres parties intéressées. Il est entendu que Parcs Canada prendra les devants dans la préparation de certaines de ces stratégies et participera activement à d'autres, selon la mesure dans laquelle chaque espèce vit sur les terres qu'administre l'Agence. Ces stratégies de rétablissement détermineront l'habitat essentiel des espèces et les mesures à prendre pour le protéger, mesures dont les plans de gestion des parcs et les décisions opérationnelles tiendront compte en retour.

Les nouvelles exigences relatives aux stratégies de rétablissement et aux plans d'action feront en sorte que les efforts visant à protéger les espèces en péril et leur habitat ne se limitent pas aux parcs nationaux, mais s'inscrivent dans le cadre d'un projet collectif sur l'ensemble des territoires fréquentés par les espèces visées. C'est là le meilleur moyen non seulement de protéger et de rétablir ces espèces, mais aussi de contribuer à conserver ou à rétablir l'intégrité écologique des parcs nationaux, conformément aux recommandations récentes de la Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux du Canada.

Madame la présidente, j'aimerais terminer en vous parlant de la sensibilisation du public et des communications. Ce faisant, j'aborderai brièvement un des aspects du projet de loi.

Pour freiner le déclin des espèces au Canada, il faut sensibiliser la population à l'importance de la conservation de la biodiversité et obtenir qu'elle appuie une action concertée. Parcs Canada a l'occasion de jouer un rôle prépondérant de sensibilisation et d'éducation sur le sort des espèces en péril grâce aux programmes d'interprétation que nous offrons chaque année à nos 20 millions de visiteurs et au nombre encore plus élevé de personnes qui rejoignent notre site Web. Nous avons hâte d'unir nos efforts à ceux des autres intervenants dans ce domaine.

Madame la présidente, et mesdames et messieurs du comité, voilà qui conclut mes observations. Merci de m'avoir permis de m'adresser à vous relativement à cet important dossier. Je répondrai avec plaisir à vos questions.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci beaucoup.

Madame Girard-Bujold et monsieur Herron, cinq minutes chacun pour le premier tour de table.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Merci, madame la présidente. Je vous ai écouté avec attention, monsieur Amos. Tout au long de votre exposé, je me suis posé la question suivante: pourquoi pensez-vous que la nouvelle loi proposée, le projet de loi C-33...

Vous nous dites disposer déjà d'une loi qui s'appelle la Loi sur les parcs nationaux. Vous savez également que les organismes environnementaux vous ont attribué une cote D- pour ce qui touche les territoires domaniaux sur lesquels vous avez pleine juridiction. Vous dites que cette nouvelle loi va vous permettre de mieux protéger et de protéger plus efficacement les espèces en péril et d'en établir la liste.

Vous dites que vous avez déjà une loi et que vous voulez que la nouvelle loi soit sous la juridiction de votre ministre. Pourtant, vous avez déjà une loi et vous ne la mettez pas en application chez vous. Je pense que vous avez déjà les moyens pour le faire dans le cadre de votre loi. Je ne sais pas ce que vous obtiendriez de plus. En effet, vous appliquez si peu ou si mal la loi qui concerne vos terres à vous que les groupes environnementaux vous ont donné une cote D-.

Je pense que vous avez les moyens de faire mieux et je ne comprends pas comment une loi additionnelle va vous permettre d'agir mieux quand vous n'utilisez pas chez vous celle que vous avez déjà à votre disposition. C'est là ma première question, madame la présidente.

M. Bruce Amos: Merci, madame. C'est vrai que la Loi sur les parcs nationaux nous donne les outils nécessaires pour protéger la faune, la flore et les ressources naturelles dans les parcs nationaux.

• 1005

Comme je l'ai expliqué dans mon exposé, à notre avis, cette loi améliorera et renforcera les outils qui sont actuellement à notre disposition, surtout en ce qui a trait à la nécessité d'élaborer des plans et des stratégies visant les espèces en péril, non seulement dans les parcs nationaux mais dans tout l'habitat de ces espèces.

Cela pourra se faire en collaboration avec d'autres ministères et d'autres gouvernements, ce qui constitue un pas en avant. Pour nous et selon les recommandations de la Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux, c'est un des moyens les plus importants.

En ce qui concerne la position des organismes non gouvernementaux, ceux-ci appuient fortement le projet de loi C-27, qui est devant le Sénat. Comme je l'ai expliqué, cette loi renforce notre mandat visant l'intégrité écologique. J'ai expliqué les trois éléments qui sont importants et qui renforceraient notre capacité de travailler avec d'autres, surtout à la protection des espèces en péril.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Reparlons du projet de loi C-27, qui est actuellement devant le Sénat. Vous dites que, dans le cadre de ce projet de loi, vous aurez tous les moyens nécessaires pour agir chez vous. C'est ce que vous dites, si j'ai bien compris. Alors, pourquoi voulez-vous avoir une autre loi comme le projet de loi C-33? Ne pensez-vous pas que le projet de loi C-33 permettra au gouvernement canadien d'exercer une influence dans des champs de compétence qui ne lui appartiennent pas?

La semaine dernière, des témoins nous ont parlé du COSEPAC, qui existe déjà. Le COSEPAC réunit les territoires, les provinces, enfin tout le monde autour d'une même table. Chacun a vraiment la possibilité de s'exprimer au sein du COSEPAC. On a déjà la structure qu'il faut et vous dites que le projet de loi C-27 va vous donner encore plus de moyens. Alors, pourquoi faudrait-il le projet de loi C-33, si ce n'est pour faire de l'ingérence dans le domaine des provinces par dessus ce que permet la Constitution, monsieur?

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci, madame Girard-Bujold.

Veuillez répondre, s'il vous plaît.

[Français]

M. Bruce Amos: En ce qui concerne nos responsabilités dans les parcs nationaux, il s'agit de terres fédérales qui sont sous la juridiction du gouvernement fédéral et de la ministre du Patrimoine canadien. En ce qui concerne nos responsabilités et l'autorité de gestion, il ne s'agit pas pour nous d'acquérir une responsabilité directe en dehors de celle des parcs nationaux. Mais le mandat nous donnerait la possibilité et l'obligation de travailler avec les partenaires dans la région des parcs nationaux afin de préparer des stratégies. Ce serait pour nous beaucoup plus efficace que de travailler seulement à l'intérieur des frontières d'un parc national.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Cela veut dire que le projet de loi C-33 va vous donner la possibilité d'agir à l'extérieur des parcs nationaux.

Je m'excuse, madame la présidente, mais ce serait bien qu'il me le dise.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Au prochain tour de table, madame.

Monsieur Herron.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Vous avez certainement entendu parler de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Vous savez que les règles et les règlements qui s'appliquent aux terres domaniales sont différents de ceux qui s'appliquent aux terres qui ne sont pas de compétence fédérale, n'est-ce pas?

M. Bruce Amos: Aux termes de cette loi ou en général?

M. John Herron: Aux termes de cette loi.

M. Bruce Amos: Je ne connais pas cette loi dans les détails. Peut-être que nous...

M. John Herron: Mais il y a des choses que l'on peut faire sur les terres domaniales et d'autres que l'on ne peut pas faire. C'est un peu comme si la Loi canadienne sur la protection de l'environnement était un système à deux niveaux. Êtes-vous au courant?

M. Nikita Lopoukhine (directeur exécutif, Division de l'intégrité écologique, Direction générale des parcs nationaux, Agence Parcs Canada): Pas spécifiquement, non.

• 1010

M. John Herron: Peut-être autre que spécifiquement? Pas du tout? Très bien.

Vous savez que les lois provinciales sur la protection des espèces en péril comportent des règles et des règlements quant à ce qu'il est possible de faire sur les terres provinciales par rapport aux terres qui n'appartiennent pas à la province. Vous devez tout au moins être au courant de cela, puisque c'est le projet de loi dont nous parlons. Donc, un régime à deux paliers est assez courant pour protéger les espèces en péril dans le contexte provincial. Cela n'a pas été contesté de quelque façon que ce soit en vertu de la Constitution, n'est-ce pas?

Ma question est donc la suivante: Lorsque le ministre de l'Environnement est venu ici l'autre jour et qu'il s'est lancé dans une diatribe au sujet de règles et de règlements différents pour la protection obligatoire des terres domaniales par rapport à d'autres types de terres, il devait sans doute se tromper lorsqu'il a dit qu'il y aurait eu d'autres précédents juridiques, n'est-ce pas?

M. Bruce Amos: Je suis désolé, monsieur Herron, mais je ne suis pas en mesure de faire des observations sur ce qu'a dit M. Anderson ou sur l'exactitude de ce qu'il a dit. Je ne suis pas au courant du témoignage auquel vous faites allusion.

M. John Herron: Je peux peut-être vous aider. Il a dit que la protection obligatoire des espèces en péril sur les terres domaniales par rapport aux terres qui ne sont pas de compétence fédérale, c'est-à-dire les parcs, pourrait faire l'objet d'une contestation en vertu de la Constitution, que la légalité même de la loi pourrait être contestée. C'est ce qui était prévu dans le projet de loi C-65. Pourquoi ne voudrions-nous pas tout au moins protéger les espèces en péril sur les terres domaniales, y compris dans les parcs, faire en sorte que ce soit une protection obligatoire? Est-ce que cela vous poserait des problèmes?

M. Bruce Amos: Comme je l'ai expliqué, nous avons une protection en place pour...

M. John Herron: Une protection obligatoire.

M. Bruce Amos: Toute la flore et la faune et les choses naturelles se trouvant dans les parcs nationaux, qu'elles figurent ou non sur la liste des espèces en péril, sont protégés par la Loi sur les parcs nationaux et son règlement.

M. John Herron: Donc, dans ce cas, vous ne croyez pas que cela déstabiliserait le projet de quelque façon que ce soit si nous avions une protection obligatoire des espèces en péril sur les terres domaniales, particulièrement dans les parcs. Ça ne vous poserait pas de problème, car vous nous dites que vous avez déjà cette protection.

M. Bruce Amos: Je ne fais pas d'observation, monsieur Herron, sur...

M. John Herron: J'ai posé au départ une question très courte et très spécifique parce que je ne veux pas que l'on esquive ma question. Je pose une question très directe. Je vous demanderai, avec tout le respect que je vous dois, de bien vouloir répondre à ma question directement. À votre avis, est-ce qu'une protection obligatoire des espèces en péril sur les terres domaniales, du moins en ce qui concerne les parcs, déstabiliserait le projet de loi? Oui ou non.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Permettez-moi d'invoquer le Règlement, madame la présidente. Je pense que cette question met les hauts fonctionnaires dans une position difficile. Il leur demande leur opinion pour ce qui est de savoir si cela déstabilise ou non le projet de loi.

M. John Herron: J'ai dit «à leur avis». C'est exactement cela. Rien de plus. Ils sont ici pour ça.

Mme Karen Redman: Je trouve que cette question est injuste.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Un instant, s'il vous plaît. Cette question a été posée à d'autres témoins.

Vous pouvez poursuivre. Il vous reste une minute.

M. John Herron: Merci.

Pour ce qui est de cette question précise, selon vous, du moins en ce qui concerne les parcs, cela ne changerait rien. Vous me dites, en effet, que vous le faites déjà. Parcs Canada ne trouverait donc pas que cela déstabilise le projet de loi, en ce qui concerne les terres domaniales... Je ne parle pas des terres de compétence fédérale, mais des terres domaniales, car si l'on parle de compétence, il faut inclure les zones aquatiques, les pêcheries et le reste. Il s'agit d'une question très précise. Oui ou non?

M. Bruce Amos: Je ne peux pas dire si cela déstabilisera le projet de loi ou non. Cela dépasse ma compétence.

M. John Herron: Auriez-vous un problème à répondre du point de vue de Parcs Canada?

M. Bruce Amos: Parcs Canada estime que la protection que prévoit la Loi sur les parcs nationaux, qui, comme je l'ai dit, a récemment été examinée et adoptée par la Chambre des communes, permet de protéger toutes les espèces, y compris les espèces en péril, de façon adéquate.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): John, votre temps est écoulé. Vous allez devoir y revenir le tour suivant.

Dans l'ordre, j'ai M. Reed, M. Lincoln, Mme Catterall, Mme Redman. Je pense que les eaux bouillonnent ce matin.

• 1015

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, madame la présidente.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Je sais que M. Reed va poser une question très diplomatique.

M. Julian Reed: Je n'en suis pas si sûr.

Je suppose que c'est M. Seutin qui pourra répondre à cette question. La liste des 123 espèces en voie de disparition et des 153 espèces préoccupantes comprend à la fois des espèces qui subissent l'incidence des activités humaines et celles qui ne la subissent pas. La question qui me tracasse c'est de savoir comment faire la différence entre les deux. Comment identifiez-vous les espèces qu'une activité humaine rend plus vulnérable et celles dont le sort relève plutôt de l'évolution naturelle? Des espèces sont nées et disparues depuis des milliers d'années. Une nouvelle espèce arrive et en élimine une autre. J'ai vraiment de la difficulté à démêler cet écheveau.

M. Gilles Seutin (biologiste principal, Division de l'intégrité écologique, Direction générale des parcs nationaux, Agence Parcs Canada): J'enseigne la biologie de la conservation et je pourrais remplir un semestre complet à traiter de ce sujet.

Il y a deux choses.

Une voix: Nous aimerions avoir la version abrégée, s'il vous plaît.

M. Gilles Seutin: Oui. Il est vrai que toute espèce est assujettie à un certain nombre de menaces qui, en puissance, la poussent vers l'extinction. Ce n'est que dans de très rares cas que l'on peut limiter le danger à une seule menace. Cela se produit dans certains cas. Cela peut être la chasse ou d'autres processus, mais cela peut également être des parasites naturels. La menace peut donc provenir de la nature ou des êtres humains, mais, dans la plupart des cas, de nombreux facteurs sont en cause. Je ne pense donc pas que l'on puisse clairement scinder la liste en deux parties bien distinctes et considérer chacune d'elles séparément. Voilà donc une première observation générale.

Dans ses travaux, le COSEPAC a identifié les différentes menaces qui pèsent sur les espèces. Les équipes qui s'occupent du rétablissement, qu'il s'agisse des équipes actuelles ou de celles que propose le projet de loi, devront approfondir les recherches sur ces diverses menaces. Il existe donc des mécanismes pour les identifier. Voilà donc la réponse à votre question sur les aspects biologiques et les aspects touchant le processus.

M. Julian Reed: Merci.

Dans sa déclaration au comité, le ministre a clairement dit qu'il se préoccupait des espèces que menace essentiellement l'activité humaine. C'est pourquoi je pose la question: comment faites-vous la différence? Il est évident qu'il n'existe pas de réponse simple et que de nombreux facteurs entrent en ligne de compte.

M. Gilles Seutin: En fait il y a... Le son ne me parvient plus. J'espère qu'il ne s'agit pas d'un problème général et que les autres peuvent m'entendre.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Oui, d'accord.

M. Gilles Seutin: Le COSEPAC ne se limite pas à étudier et à examiner la condition des espèces qui ont été ou qui pourraient être touchées par des activités humaines. Pas dans ce sens. Actuellement, ou dans le contexte du projet de loi, il examinerait toutes espèces sauvages au Canada qui existent ou qui semblent avoir existé ici depuis plus de 50 ans. Il n'y a donc pas de limite à la portée de ce qu'examine le COSEPAC.

Du point de vue d'un biologiste, je dirais que c'est une bonne chose. Du point de vue de Parcs Canada, il est très important pour nous de tout considérer, car notre mandat va en fait plus loin que simplement les espèces en péril. Il s'agit d'intégrité écologique et toutes les espèces font partie de cette intégrité, quelle que soit l'origine de la menace.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Il n'y a pas de traduction.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Vous ne recevez pas la traduction. Nous allons devoir suspendre la séance une minute. Je prie les témoins et les membres du comité de nous excuser. Il semble que nous ayons un problème technique.

• 1020




• 1031

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Nous reprenons. J'espère que le problème technique est réglé.

Monsieur Reed, aviez-vous encore des questions à poser?

M. Julian Reed: Non.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Monsieur Lincoln c'est votre tour.

M. Lincoln a toute une réputation à notre comité. Les témoins et nos observateurs pourront en juger. La présidence suit loyalement la voie Lincoln.

Monsieur Lincoln, vous avez cinq minutes.

[Français]

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Je voudrais poser une question au Dr Seutin. Docteur Seutin, vous avez été membre du COSEPAC. L'êtes-vous toujours?

M. Gilles Seutin: Oui, j'en ai été membre pendant quatre ans. Je le suis encore, mais pas à titre de représentant de Parcs Canada. On m'a donné une indépendance comme chercheur à titre d'expert des oiseaux.

M. Clifford Lincoln: En tous cas, vous avez une grande expérience du COSEPAC. Vous y avez travaillé. On est en train de réviser la liste des espèces menacées, et je pense qu'on a fait la révision de 123 ou 125 des 353 espèces qui étaient sur la liste initiale. Le travail continue. Ce sera sans doute terminé au printemps, d'après ce que dit le ministre.

Ne pensez-vous pas qu'il aurait été préférable d'inscrire la liste de départ dans la mesure législative, que ce soit la liste révisée de 123, de 150 ou de 200 espèces, plutôt que d'attendre que nous fassions des règlements, ce qui reportera sans doute la publication de la liste à six mois ou un an après la proclamation de la loi? Ne pensez-vous pas qu'il aurait été préférable d'avoir la liste dans la loi au départ?

M. Gilles Seutin: Premièrement, il est vrai qu'on révise la liste. On a révisé environ le tiers de cette liste en prenant d'abord les espèces prioritaires, celles qui sont classées comme étant le plus en danger.

Le travail avance et il pourrait être presque fini au printemps, en effet. C'est quelque chose dont je suis évidemment fier. Cela représente énormément de travail, mais je pense que le travail est bien fait malgré la pression et le peu de ressources qu'on a eu jusqu'à présent pour le faire.

Votre question porte sur l'adoption automatique de cette liste comme liste de départ pour la protection. J'avoue que je pourrais avoir une opinion de biologiste de la conservation, mais je pense que c'est vraiment une question technique et juridique, et j'avoue que mes compétences au niveau juridique sont assez limitées. Je ne suis donc pas en mesure de répondre à cette question.

M. Clifford Lincoln: En tant que biologiste de la conservation, quelle est votre opinion?

• 1035

M. Gilles Seutin: Comme biologiste de la conservation, j'espère que s'il y a une mesure législative, le processus d'obtention d'une liste qui tiendra la route au plan juridique sera le plus rapide possible. Quels sont exactement les mécanismes juridiques qui assureraient cela? J'avoue que c'est du ressort des experts en ce domaine. Toutefois, les menaces étant imminentes dans plusieurs cas, il faut un mécanisme qui assure une rapidité maximale tout en assurant que les consultations nécessaires aient lieu et que cette liste tienne d'un point de vue juridique.

J'aimerais ajouter qu'il y a certainement différents mécanismes dans différentes provinces et dans d'autres pays qui ont été mis à l'épreuve. Il serait intéressant d'avoir une étude sur ce qui existe et sur ce qui a été fait. On remarque que, très souvent, les processus sont longs.

[Traduction]

M. Clifford Lincoln: Monsieur Amos, pourriez-vous me dire combien de parcs nous avons au nord du 60e parallèle?

M. Bruce Amos: Nous avons dix parcs nationaux et réserves de parc national au nord du 60e parallèle ou qui incluent des terres au nord du 60e parallèle, comme Wood Buffalo.

M. Clifford Lincoln: Savez-vous que notre projet de loi ne s'applique pas aux régions au nord du 60e parallèle ou ne s'y applique que de façon très limitée? En fait, il n'y a rien qui s'applique automatiquement l'heure actuelle au nord du 60e parallèle pour les terres domaniales.

M. Bruce Amos: D'après ce que je sais, il s'applique certainement aux terres domaniales qui sont des parcs nationaux puisqu'il s'applique à tous les parcs nationaux.

M. Clifford Lincoln: Dans le contexte de la Loi sur les parcs nationaux.

M. Bruce Amos: Oui.

M. Clifford Lincoln: Mais je parle de la Loi sur les espèces sauvages en péril.

M. Bruce Amos: Oui.

M. Clifford Lincoln: Autrement dit, si l'on prétend que la Loi sur les espèces sauvages en péril renforce le projet de loi C-27, comme vous l'avez dit, il faut savoir que cette loi ne s'applique pas à l'heure actuelle au nord du 60e parallèle.

M. Bruce Amos: Je crois savoir qu'elle s'applique aux parcs nationaux et aux réserves de parc national au nord du 60e.

M. Clifford Lincoln: Je crois qu'il serait bon de vérifier parce que le libellé me semble un peu confus. Il y en a qui disent clairement que tout ce qui est au-delà du 60e n'est pas couvert parce que cela relève de l'autorité des gouvernements territoriaux ou du conseil de gestion. Autrement dit, il faudrait que le ministre consulte le ministre territorial si cela touche ce territoire. Je me demandais donc si cela pouvait être clarifié.

M. Bruce Amos: Je me ferai un plaisir, monsieur Lincoln, de demander l'avis de nos conseillers juridiques.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci beaucoup. Pourriez-vous aussi vous assurer que le greffier reçoit copie de cet avis, s'il vous plaît?

M. Bruce Amos: Oui.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci.

Madame Catterall, madame Redman et madame Carroll.

M. Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): J'aimerais poser une question complémentaire à la suite de celle de M. Lincoln. Je voudrais en effet savoir précisément en quoi vous estimez que ceci renforce vos pouvoirs. Vous nous avez dit que votre loi vous confère tous les pouvoirs nécessaires pour protéger les espèces en péril, pour préparer des plans d'action, pour imposer des conditions au permis d'activités, pour faire ce que vous vouliez. Est-ce bien cela?

M. Bruce Amos: Oui.

Mme Marlene Catterall: Pourquoi vous faut-il alors le projet de loi C-33?

M. Bruce Amos: J'ai souligné trois domaines précis dans mon exposé. Peut-être puis-je ajouter à ce que j'ai dit.

Mme Marlene Catterall: Je demande des précisions parce que j'avais cru comprendre que vous avez également déclaré que vous aviez tout le pouvoir nécessaire, aux termes de la loi actuelle qui s'applique à vous pour protéger les espèces en péril. Ces nouvelles dispositions renforcent peut-être vos pouvoirs, mais d'après ce que je peux voir, elles n'ajoutent vraiment rien au pouvoir de portée générale que vous avez actuellement.

M. Bruce Amos: Je pense que «renforcer» et «compléter» sont les mots clés dans le cas des parcs nationaux. En ce qui concerne les sanctions, celles proposées dans ce projet de loi sont beaucoup plus sévères que les sanctions minimes prévues dans la Loi sur les parcs nationaux pour des infractions visant des objets naturels, qu'ils figurent ou non sur la liste. Donc il y a renforcement à ce niveau.

• 1040

Le projet de loi prévoit également une série de conditions pour l'obtention de permis ou d'accords dans le cas des activités autorisées.

Mme Marlene Catterall: Vous pouvez déjà fixer de telles conditions de votre propre chef, n'est-ce pas?

M. Bruce Amos: Oui, en effet, et c'est notre politique actuelle et la pratique en général. Mais le genre de conditions définies ici ne se retrouvent pas expressément dans la loi actuelle en ce qui concerne les permis et les accords.

Il y a un avantage supplémentaire puisque le projet de loi prévoit des exigences en matière de préparation de programmes de rétablissement et de plans d'action. C'est manifestement quelque chose que nous voulons faire et nous aimerions être en mesure de disposer des ressources, des partenaires et du temps nécessaires. Le fait que le projet de loi prévoit la préparation de programmes de rétablissement, selon certaines échéances, et la collaboration des gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi que d'autres va nous servir dans la gestion des parcs nationaux puisque nous disposons ainsi d'une bien meilleure tribune pour planifier le rétablissement des espèces en péril.

C'est donc à ces trois niveaux que nous estimons que le projet de loi va augmenter notre capacité à faire notre travail.

Mme Marlene Catterall: Est-ce que cela pourrait également entraîner des problèmes en ce sens que vous pourriez décider de mettre en place un plan de rétablissement pour une espèce exclusive à un parc national, mais s'il s'agit d'un parc qui empiète sur le territoire d'une autre instance, lorsque viendra le moment de négocier le programme de rétablissement, vous risquez de devoir faire moins que ce que vous auriez normalement fait sur votre propre territoire?

M. Bruce Amos: Je ne le pense pas.

Nik, voulez-vous dire quelques mots à ce sujet?

M. Nikita Lopoukhine: Il me semble que nous aurons la possibilité de continuer à faire ce qui relève de notre responsabilité dans notre parc national, mais grâce à la Loi sur les espèces sauvages en péril, nous serons en mesure d'aller au-delà de notre parc national afin de travailler de concert avec nos partenaires qui entourent le parc pour protéger les espèces en péril et pour tenter d'élaborer une stratégie, quelles que soient les limites du territoire, si on peut dire, et afin de tenter de travailler en collaboration au rétablissement des espèces, l'objectif global de toutes les instances.

Mme Marlene Catterall: J'ai une dernière question qui vient du fait que j'hésite toujours s'il y a risque de confusion sur l'identité des responsables. Je vois ici que le ministère des Pêches et des Océans est responsable, disons, de l'habitat du poisson. Comment règle-t-on les questions de juridiction si l'habitat du poisson se trouve dans un parc national? Vous pourriez peut-être nous dire également quels autres ministères ont des responsabilités aux termes de ce projet de loi.

M. Nikita Lopoukhine: La relation serait sans doute assez semblable à celle que nous avons actuellement avec le ministère des Pêches et des Océans, le Service canadien de la faune et Environnement Canada dans le cas des oiseaux migrateurs. Un bon exemple serait la grue blanche d'Amérique dont l'habitat essentiel se trouve dans le parc national Wood Buffalo. Lorsque l'oiseau se trouve dans le parc, nous sommes responsables, mais c'est le Service canadien de la faune qui est responsable de la gestion globale des relations avec les États-Unis. Nous travaillons donc en étroite collaboration. Cela n'a pas nui au rétablissement de cette espèce; en fait, cela l'a favorisé. Pareillement, en ce qui concerne le poisson, il y a des cas où nous nous tournons vers le ministère des Pêches et des Océans qui établit la réglementation. Par exemple, dans certains de nos parcs, la population locale a des droits de pêche et c'est le ministère des Pêches et des Océans qui établit la réglementation à cet effet.

• 1045

Mme Marlene Catterall: Merci.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Madame Redman.

Mme Karen Redman: Merci, madame la présidente.

Monsieur Seutin, vous avez plus tôt mentionné l'excellent travail effectué par le COSEPAC. Pourquoi réévalue-t-on à l'heure actuelle la situation des espèces désignées? Est-ce qu'on a changé les critères en vertu desquels cette liste est établie ou est-ce qu'on réévalue le document et la désignation pour chaque espèce?

M. Gilles Seutin: La situation des espèces évolue. Les choses évoluent continuellement. Il faut réévaluer périodiquement la situation des espèces. De façon générale, à moins qu'on ait l'impression que la situation évolue très rapidement, on réévalue la situation des espèces tous les dix ans. C'est la règle générale.

Comme le gouvernement comptait légiférer dans ce domaine, il a voulu établir une liste à jour. Comme ces évaluations ont lieu à des intervalles assez longs, elles ne sont pas nécessairement menées par les mêmes personnes. C'est toujours une question de jugement. Rien n'est jamais noir ou blanc. Il est vrai que parfois c'est vraiment noir, mais il y a toujours des zones grises. On peut toujours soutenir que la situation s'est un peu améliorée ou s'est un peu détériorée pour certaines espèces. Nous avons donc estimé qu'en réévaluant la situation des espèces, nous pourrions établir une liste plus à jour.

Mme Karen Redman: J'avais cru cependant comprendre que les critères de désignation avaient changé au fil du temps. Est-ce le cas?

M. Gilles Seutin: Il est assez intéressant de constater que les critères ont quelque peu changé. Il sont maintenant plus clairs. Nous procédons maintenant de façon plus structurée et suivons une grille. Nous nous conformons aux critères établis par l'UICN, c'est-à-dire l'Union internationale pour la conservation de la nature. Il s'agit de critères de base auxquels se reportent des centaines de biologistes et qui ont été avalisés par des centaines de biologistes de la conservation. Voilà comment nous avons procédé. Nous avons quelque peu adapté cette structure aux besoins du Canada. Les critères sont simplement plus clairs, ils ne sont pas vraiment nouveaux. Seulement 18 espèces sur 123 ont reçu une nouvelle désignation et aucune n'a changé complètement de catégorie pour devenir en péril ou cesser d'être en péril, par exemple. Seul le niveau de risque a changé.

Je pense donc que nous faisons du bon travail et que nous nous améliorons tous les jours.

M. Karen Redman: Voilà un autre point que je voulais soulever. Le fait que ce projet de loi reconnaisse officiellement le COSEPAC est-il une bonne chose?

M. Gilles Seutin: À titre de membre du COSEPAC, je parle ici en mon nom personnel, je dois dire que l'étape de l'élaboration du projet de loi m'a causé une certaine frustration. Vous pourrez poser la même question aux autres membres du comité lorsqu'ils comparaîtront devant vous. Notre rôle consiste essentiellement à établir cette liste. Au fil des ans, la liste est devenue de plus en plus importante. Il s'agit dans le cadre de toute évaluation environnementale d'établir si les espèces figurent sur la liste du COSEPAC. Cette liste revêt donc de plus en plus d'importance.

À titre de membre du comité, je suis heureux qu'on accorde l'importance qu'elle mérite à cette liste.

Mme Karen Redman: Je vous remercie. Je serais heureuse que M. Amos nous donne ces précisions. Je crois comprendre que les parcs au nord du 60e Parallèle sont visés par ce projet de loi. J'attends avec impatience vos précisions à cet égard.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Je vous remercie.

Madame Carroll, comme vous venez de vous joindre au comité, je voudrais vous souhaiter la bienvenue. Voudriez-vous poser une question?

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): J'aimerais poursuivre dans la même veine que ma collègue. Comme j'ai raté le vol de 8 heures, je ne voudrais pas poser une question qui a déjà été posée.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Même si vous le faisiez, je suis sûre que cela permettrait à tous de mieux comprendre...

• 1050

Mme Aileen Carroll: Vous avez parlé, monsieur Seutin, de l'utilité de la liste établie par le COSEPAC et Mme Redman a parlé de l'importance que revêt maintenant cette liste. Contrairement à la Loi sur les espèces en péril adoptée par la Nouvelle-Écosse, ce projet de loi-ci n'incorpore pas cette liste. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a décidé d'inclure cette liste dans sa loi, contrairement à ce qu'a fait le gouvernement dans le projet de loi. Faut-il conclure que la loi adoptée en Nouvelle-Écosse comporte une lacune ou que c'est le projet de loi dont nous sommes saisis qui en comporte une?

M. Gilles Seutin: Je le répète, je ne suis pas constitutionnaliste et je n'ai pas non plus de formation en droit.

Mme Aileen Carroll: Je m'adresse plutôt à vous en votre qualité de membre du COSEPAC.

M. Gilles Seutin: En ma qualité de membre du COSEPAC, je peux vous dire que la liste actuelle est bonne et que la nouvelle liste est encore meilleure. En tant que biologiste, c'est tout ce que je peux vous dire. Pour que la liste soit plus utile, on veut maintenant l'inscrire dans la loi. Comment s'y prendre... Je suppose que ce sera à vous, dans votre sagesse, de nous dire quelle est la meilleure façon de procéder et de vous assurer, le plus rapidement possible, que cette excellente liste que les scientifiques ont produite puisse être utilisée à bon escient.

Mme Aileen Carroll: Vous devriez vous méfier, car je suis originaire de la Nouvelle-Écosse et, à l'occasion du récent séjour que j'y ai fait, j'ai eu l'occasion de discuter de la loi qui a été mise en place dans cette province. Comme vous le savez, la Nouvelle-Écosse a inscrit la liste dans sa loi. Les espèces inscrites sur la liste sont dorénavant considérées comme des espèces en voie de disparition en Nouvelle-Écosse. Ce n'est toutefois pas ce qu'on a fait au niveau fédéral. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi on ne l'a pas fait. Je ne demande pas mieux que d'entendre quelqu'un m'expliquer pourquoi la Nouvelle-Écosse se trouvera dans une situation problématique parce qu'elle a fait quelque chose que nous n'avons pas fait—ou encore l'inverse, pourquoi nous allons nous retrouver dans une situation problématique, alors que ce ne sera pas le cas de la Nouvelle-Écosse. Il me semble qu'on a consacré beaucoup de temps, de recherche et d'énergie à l'élaboration des deux mesures législatives et, pourtant, on en est arrivé à des conclusions très différentes.

M. Gilles Seutin: Encore là, je suis mal placé pour répondre à cette question. Je crois vous avoir entendu dire qu'on avait consacré beaucoup d'efforts en vue de produire une bonne mesure législative. Ne me confiez pas le mandat de rédiger un projet de loi, car il ne pourra pas résister à l'examen par les tribunaux. Je peux toutefois produire une bonne liste. C'est aux juristes qu'il appartient d'en faire une loi.

Mme Aileen Carroll: Je comprends votre situation, si bien que je me contenterai de vous faire part de la conclusion à laquelle j'arrive, à savoir que je pense que les fonctionnaires du ministère des Parcs ont une expertise qui pourrait peut-être aider notre comité à se prononcer sur une mesure législative qui, du fait qu'elle n'incorpore pas le travail des scientifiques—ce groupe qui a énormément de crédibilité à l'échelle internationale—revient en fait à réinventer la roue.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci beaucoup, madame Carroll.

Si la présidence avait droit à une petite question, nous pourrions ensuite passer à Mme Girard-Bujold, à M. Reed, puis à M. Lincoln pour un deuxième tour.

Je crois savoir qu'aux termes de la Loi sur les parcs nationaux, le gouverneur en conseil a le pouvoir de prendre des règlements en ce qui a trait à la préservation, à la gestion et à l'administration des parcs, et que ce pouvoir s'étend aussi à la protection de la faune ainsi qu'à la destruction et à l'extirpation d'espèces dangereuses ou surabondantes, etc. Je me demande simplement à quelle fréquence ce pouvoir est exercé.

• 1055

M. Bruce Amos: Ces questions sont visées par des règlements qui font partie de la réglementation générale relative aux parcs nationaux et de la réglementation relative à la faune et à la flore des parcs nationaux. Les autorités ont donc systématiquement exercé leurs pouvoirs et ont pris les règlements voulus. Ainsi, la réglementation générale interdit d'extirper, d'altérer, d'endommager ou de détruire tout élément de la flore ou tout objet naturel qu'on trouve dans un parc. La réglementation relative à la faune et à la flore interdit de même de chasser, de déranger, de garder en captivité, de détruire ou d'enlever quelque individu appartenant à la faune d'un parc.

Voilà les deux principaux règlements qui existent. Nous disposons aussi d'autres instruments qui nous permettent de contrôler les activités dont il est question ici: le règlement sur les animaux domestiques, le règlement sur la pêche et le règlement sur le camping. Ce sont toutefois ceux que j'ai cités qui visent plus particulièrement la faune et la flore qui pourraient être en péril.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Pourriez-vous photocopier ces règlements... avec la date à laquelle ils ont été présentés et approuvés par le gouverneur en conseil? Est-il possible qu'il y ait des règlements en cours d'élaboration dont vous pourriez nous parler? Je vous demanderais d'en envoyer une copie au greffier, s'il vous plaît.

J'aimerais aussi comprendre... Le gouverneur en conseil est le seul à avoir le pouvoir d'émettre des règlements. Je m'intéresse particulièrement à la protection des espèces. Comment ce pouvoir s'appuie-t-il sur des connaissances scientifiques? Comment procède-t-on, notamment quand il s'agit de compétence scientifique? Comment établit-on ces règlements?

M. Bruce Amos: D'une manière générale, je dirais qu'il s'agit d'interdictions générales conformes à la clause de vocation de la Loi sur les parcs nationaux qui stipule que ces parcs nationaux doivent être préservés pour les générations futures. J'ai aussi dit que l'article concernant l'intégrité écologique était une considération de premier plan.

Les règlements actuels ont donc dans l'ensemble un caractère d'interdiction, mais par conséquent une vocation plus stratégique que scientifique puisqu'ils ont une application très générale. Il y a certaines exceptions, par exemple la réglementation de la pêche—et M. Lopoukhine voudra peut-être vous parler un peu des considérations scientifiques dont on tient compte à cet égard—car on autorise la pêche amateur dans les parcs nationaux. On réglemente donc les prises et les zones dans lesquelles on autorise la pêche, les espèces, les saisons de pêche, et tous ces règlements se fondent sur des informations scientifiques, sur les données concernant l'activité en question et les prises au cours des années récentes.

Ce sont donc là deux types d'exemples. Disons que certains règlements sont des interdictions à vocation manifestement stratégiques. D'autres, comme les règlements sur la pêche—et c'est l'exception qui me vient spontanément à l'esprit—sont spécifiquement fondés sur des considérations scientifiques.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Très bien. Merci.

Monsieur Lopoukhine.

M. Nikita Lopoukhine: On effectue des évaluations précises de la capacité de charge pour déterminer les objectifs de conservation, c'est-à-dire la quantité de poissons qu'on peut pêcher dans un lac ou dans une rivière, s'il s'agit de pêche, mais aussi la quantité d'animaux qui peuvent être chassés si leur population est excessive dans nos parcs. Étant donné la situation du parc, qui est isolé, il y a une population animale surabondante. Nous évaluons les répercussions de cette surabondance sur d'autres composantes de l'écosystème et s'il y a un problème, nous intervenons en conséquence.

Nous faisons donc régulièrement des évaluations.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Dans tout votre document, vous parlez de collaboration avec les intervenants. Ces intervenants ont-ils un rôle dans l'élaboration des règlements?

M. Bruce Amos: Oui. Le gouvernement du Canada a une politique d'ensemble pour l'élaboration des règlements, et nous la suivons comme le font les autres ministères. Cette politique énonce les processus d'élaboration des déclarations d'évaluation d'impact et les consultations publiques en vue de la rédaction de tous les règlements. C'est la pratique en vigueur au gouvernement du Canada et c'est celle que nous suivons normalement. Pour ce qui est des règlements de pêche, par exemple, les ajustements apportés à ces règlements font l'objet de consultations, notamment avec les gens de la région qui pêchent dans les parcs.

• 1100

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Et les énoncés d'impact des activités commerciales sont rédigés conformément aux lignes directrices du Conseil du Trésor et à ce genre de chose. Merci.

Madame Girard-Bujold, vous avez la parole.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Messieurs, je pense que Mme Catterall a dit la vérité tout à l'heure. Je pense que nous en sommes au point où nous vous demandons de réinventer la roue. Nous avons déjà tout ce qu'il faut au Canada pour agir en ce sens, mais nous ne le faisons pas. Pourtant, le ministère de l'Environnement, vous et nous avons les moyens d'agir. Nous avons aussi des accords pancanadiens. En 1996, tous les ministres du Canada et des provinces se sont rencontrés et ont décidé d'un commun accord de protéger les espèces en péril.

Le COSEPAC a bien travaillé, de même que toutes les provinces et tous les territoires. Des organismes environnementaux siègent. Nous avons tout ce qu'il faut présentement sur la table, mais nous n'avons pas la volonté de ce gouvernement de faire respecter les lois. Il y a même six lois dans six provinces différentes au Canada portant sur les espèces en péril.

J'écoutais tout à l'heure le Dr Gilles Seutin qui disait que présentement, le COSEPAC est en train de réévaluer sa liste. C'est peut-être bien ou mieux. Mais vous dites que vous ne voulez pas vous engager sur les plans constitutionnel et juridique. Cela peut poser problème, car cette loi va donner le pouvoir d'accepter une liste, ce qui va entraîner des délais supplémentaires.

Ainsi, c'est le gouverneur en conseil qui va accepter la loi. Pendant ce temps, vous ne pourrez pas vous servir de tous les mécanismes que vous avez présentement sur la table parce qu'il va falloir attendre. Étant donné ce que vous disiez tous les trois concernant nos moyens d'agir, je me demande pourquoi on n'agit pas avec tout ce qu'on a sur la table. Est-ce qu'on veut se donner un autre moyen de ne pas respecter les autres lois? On a déjà des accords et on ne les respecte pas.

Je vous demande pourquoi vous ne prenez pas les moyens pour agir chez vous, dans vos parcs nationaux. Comme le disait M. Amos, il y a le projet de loi C-27 qui s'en vient. Il y a déjà tout ce qu'il faut pour protéger les parcs et les autres lieux sous sa juridiction. Alors, donnez-moi une autre réponse parce que, selon moi, tout le monde perd son temps ici. La vie ne nous permet pas de réinventer la roue. Il faut embarquer dans le train quand il passe. Merci.

M. Bruce Amos: Premièrement, il serait inacceptable que nous n'agissions pas. On a les moyens déjà décrits dans la loi et dans nos règlements. On dépense à peu près 3 millions de dollars par année directement pour les espèces en péril. On prend nos responsabilités dans les parcs nationaux pour toutes les espèces, surtout celles qui sont en péril. Notre argument, c'est que ce projet de loi nous donne d'autres avantages et renforce notre capacité d'agir en collaboration avec d'autres.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Alors, pourquoi est-ce que les groupes environnementaux vous accordent D- dans vos propres champs de compétence? Si j'avais eu un D- à l'école, je n'aurais pas passé et je ne serais pas ici aujourd'hui. Vous n'avez pas la note de passage. Je me fie à ces groupes environnementaux parce que ce sont des gens compétents qui ont une certaine expérience dans votre domaine.

Comment se fait-il qu'ils vous accordent D- alors que vous prétendez agir? Selon moi, si vous aviez agi, vous auriez eu un A+. Vous dites 3 millions de dollars, mais ce n'est pas beaucoup pour vous permettre d'agir. Alors, pourquoi est-ce que l'argent destiné au nouveau projet de loi ne vous reviendrait pas afin que vous agissiez encore plus? C'est ce qui me semble aberrant présentement.

On est en train de parler de quelque chose alors qu'on devrait plutôt agir. Présentement on parle et on n'agit pas.

• 1105

Je ne vous donne pas de fausse note et je ne vous accuse pas de ne pas faire votre travail. Je suis consciente du fait que vos ressources financières sont peu élevées et que, si elles étaient accrues, vous pourriez faire de grands pas vers l'avant. Vous disiez que les 3 millions de dollars qu'on se propose d'investir pour la mise en oeuvre du projet de loi C-33 représentent une somme modeste.

Pourquoi ne vous confierait-on pas cette somme puisque vous semblez dire que vous seriez alors en mesure d'agir au niveau de tous les parcs nationaux? Je crains que par ce projet de loi, on ne dilue les vraies choses, ce qui nous empêchera d'agir tout de suite. On nous propose un projet de loi qui nous fera accuser un recul dans le temps.

On devrait pouvoir agir immédiatement en vue de protéger les espèces en péril plutôt que d'attendre la mise en application d'un projet de loi de cette envergure. Comme l'indiquait M. Seutin, il faut du temps pour procéder à la mise en oeuvre des dispositions d'une loi. Un projet de loi doit franchir les étapes de la première lecture, de la deuxième lecture—nous n'y sommes pas encore arrivés—et ainsi de suite. Nous ne devrions pas avoir le droit d'en débattre à ce moment-ci, mais nous sommes en train de le faire. Nous devrions nous limiter à débattre du principe du projet de loi parce qu'il n'a pas encore franchi l'étape de la deuxième lecture. Viendront ensuite les étapes de l'étude en comité et du rapport contenant les amendements proposés par le comité, puis la troisième lecture. Le projet de loi devra également être adopté par le Sénat. Tout ce processus nous amène quasiment «deux ans plus tard dans les Laurentides». À mon avis, vous devriez pouvoir disposer de ces sommes d'argent dès aujourd'hui. Ce projet de loi vous fait accuser un retard, alors que c'est aujourd'hui, et non pas dans deux ans, qu'il faut protéger les espèces menacées. Merci.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci, madame Girard-Bujold. Vous tenez remarquablement bien le fort toute seule face à toute l'opposition aujourd'hui.

En général, je suis très pointilleuse sur le temps alloué, mais j'ai estimé que Mme Bujold avait droit à un peu plus de temps pour son deuxième tour. Si vous voulez répondre, nous en serons ravis.

Mme Aileen Carroll: A-t-il le temps, madame la présidente?

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Oui, nous allons vous laisser le temps de répondre.

[Français]

M. Bruce Amos: Vous avez soulevé plusieurs questions. J'ai cru comprendre que vous vouliez savoir si je croyais que ce projet de loi dilue d'une certaine façon notre capacité de faire notre travail. Je vous répondrai que ce n'est pas le cas, et cela d'aucune façon.

Vous me demandiez également si nous avions fait des progrès à la suite des recommandations formulées par la Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux, ce à quoi je répondrai oui, certainement et directement. Nous avons déjà entrepris une série d'actions en réponse à ce rapport auquel notre ministre a répondu très positivement. En novembre prochain, nous répondrons de façon détaillée à toutes les recommandations qu'a formulées cette commission. Nous travaillons de façon acharnée afin d'améliorer nos interventions dans les parcs nationaux. Nous souhaitons également travailler de concert avec d'autres partenaires en vue de la mise en oeuvre des dispositions de ce projet de loi qui vise la protection des espèces en péril.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci. Monsieur Reed, puis monsieur Lincoln.

M. Julian Reed: Merci, madame la présidente.

Je tiens à souligner que ces systèmes de classement sont à tout le moins subjectifs et ne m'énervent pas trop.

On a l'impression qu'il s'agit d'une liste permanente, et je suis sûr que vous reconnaîtrez avec moi que la liste du COSEPAC devrait être quelque chose de dynamique, susceptible d'évoluer en fonction des enquêtes etc., une liste à laquelle on pourrait ajouter ou retrancher des espèces.

J'ai retenu ce que Mme Carroll a dit au sujet de la loi de la Nouvelle-Écosse qui comprend une liste, et je me demande si l'on peut nous dire dans quelle mesure cette liste facilitera l'application de cette loi.

• 1110

M. Gilles Seutin: Observation technique. Je sais que je ne peux pas en parler, mais dans leur sagesse, les auteurs de cette mesure législative ont retenu les sages conseils du COSEPAC, qui consistent entre autres à réviser cette liste au moins à tous les dix ans. La mesure comprend donc la procédure que propose le COSEPAC, qui consiste à procéder à une révision au bout de dix ans ou avant. Et c'est obligatoire ici. Oui, comme je l'ai dit, il existe une disposition d'urgence. Il y a moyen d'établir une liste abrégée pour les espèces qui sont vraiment en danger et dont nous venons de découvrir...

M. Julian Reed: Sans que l'on soit obligé de modifier la loi ou de prendre des mesures semblables. D'accord.

Merci, madame la présidente.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci beaucoup.

Monsieur Lincoln, s'il vous plaît.

M. Clifford Lincoln: Tout d'abord, je dois admettre que vous et Mme Redman aviez parfaitement raison de dire que les parcs sont... ce qui relève de la compétence du ministre est définitivement protégé. Ce qui m'inquiétait lorsque j'ai posé ma question, c'était que si l'on excluait tout au nord du 60e parallèle dans la loi—autrement dit, la protection n'est pas du tout automatique, même si l'on admet que les parcs sont visés, ce qui est préoccupant, c'est que toutes les régions à l'extérieur des parcs, par exemple, la mine qui vient d'ouvrir à l'extérieur de l'un des parcs les plus récents, Aulavik... Mais je dois admettre qu'il n'y a pas de différence entre ce qui se fait au nord et au sud. Nous avons exactement le même problème dans la loi: il n'y a pas de protection obligatoire pour les habitats fédéraux. Je suis donc très heureux de voir que les parcs ne sont pas inclus et que le projet de loi C-67 s'applique.

Cela peut répondre à votre question pour ce qui est de la production d'un texte, parce que je suis d'accord pour dire que la protection voulue y est.

Pour ce qui est de l'exécution de la loi, le problème du braconnage et ainsi de suite s'est posé lorsque nous avons tenu nos audiences sur le projet de loi C-27. Le projet de loi C-65 contenait un article complet qui donnait aux citoyens le droit de se plaindre et d'agir en vertu de la loi, en vertu de l'ancienne LEP, qui est maintenant exclue. À votre avis, ne serait-il pas fort utile que l'on prévoie des poursuites intentées par les citoyens dans la LEP, comme cela était le cas dans les versions antérieures des projets de loi traitant des espèces en péril?

M. Bruce Amos: Il est très difficile pour un fonctionnaire de Parcs Canada de répondre à cette question parce que nous n'avons jamais eu de disposition semblable dans la Loi sur les parcs nationaux, et personne, que ce soit nous-mêmes ou un comité parlementaire, à ma connaissance, monsieur Lincoln, n'a jamais jugé que ce genre de disposition était essentielle dans la Loi sur les parcs nationaux. Voilà comment je comprends nos responsabilités pour ce qui concerne les parcs nationaux.

Je n'ai pas vraiment d'opinion. Parcs Canada n'a pas d'opinion non plus sur une telle disposition dans la mesure où elle pourrait s'appliquer ou être utile ailleurs. Très franchement, je crois que cela dépasse notre compétence et même notre expertise aussi.

M. Clifford Lincoln: Lorsque ce texte de loi a été débattu entre les ministres, et votre ministère y a pris une large part parce que la ministre compétente en vertu de cette loi l'avait exigé, tout comme le ministre des Pêches aussi, on s'est sûrement interrogé sur la différence qu'il y a entre le projet de loi C-65, et vous avez pris part à sa facture au niveau des consultations et de la rédaction, et cette loi-ci—car l'on voit une différence frappante entre la protection obligatoire de l'habitat, et tout à coup, la protection de l'habitat devient discrétionnaire. Il se pose aussi la question de l'établissement automatique de la liste: tout à coup, l'établissement de la liste se fait désormais par voie réglementaire, et c'est le gouverneur en conseil qui décide. On avait prévu dans le projet de loi C-65 les poursuites intentées par les citoyens, et tout à coup, elles ne figurent plus dans le texte de loi actuel.

• 1115

Quelles sont les recommandations que vos fonctionnaires ont faites lorsqu'on a discuté de ces choses? Chose certaine, il s'agit de questions tellement importantes qu'on a dû en discuter. Il doit bien y avoir une raison pour qu'il y ait des différences aussi grandes entre les deux lois. Certains d'entre nous pensaient que le projet de loi C-65 n'allait pas assez loin à de nombreux égards, et l'on voit maintenant qu'une série de dispositions ont été ou bien omises ou bien modifiées radicalement. On se demande quelle est la part que les divers ministères ont prise. De toute évidence, votre ministère a dû jouer un rôle important.

M. Bruce Amos: Oui, nous avons été consultés et avons pris part à ces discussions. Nous avons essentiellement parlé des répercussions du projet de loi sur nos responsabilités en matière de gestion des parcs nationaux et des autres terres qui relèvent de notre compétence.

J'ai parlé de la question des poursuites intentées par les citoyens et un autre député m'a posé une question, à laquelle j'ai répondu, au sujet de la protection obligatoire. À notre avis, la Loi sur le parcs nationaux nous accorde une protection obligatoire suffisante.

Je ne connais pas en détail toutes les dispositions du projet de loi C-65 car je n'ai pas personnellement pris part aux discussions à l'époque. Bien entendu, les directives concernant la version définitive sont le fruit d'un effort concerté, ce qui relève du Conseil des ministres.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci, monsieur Lincoln.

Quelqu'un d'autre voulait-il intervenir au second tour? Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll: Je ne devrais peut-être pas trop insister sur ce point, mais pour pousser un peu plus loin les choses, lorsque vous élaborez une loi de cette importance, qui se fait attendre depuis longtemps, et que vous nous dites que vous avez participé aux discussions, ce qui paraît évident, je me demande si les autres témoins des autres ministères qui ont également participé vont nous dire: «Oui, en effet, nous y avons pris part mais nous n'avons pas parlé de choses qui sortaient de notre champ de compétence»?

Vers qui les Canadiens doivent-ils se tourner, grand Dieu, pour trouver des idées originales? Où peuvent-ils chercher des personnes qui font des efforts, au sein de la fonction publique, pour produire la meilleure politique possible pour notre pays? Qui est prêt à prendre des risques—seulement nous, autour de cette table? Est-ce qu'on nous fait les recommandations minimales, par excès de prudence, en attendant de voir ce qui peut se faire au niveau politique?

Je sais quel est mon travail au niveau politique. Je suis déçue par tant de timidité de la part de spécialistes comme vous.

M. Bruce Amos: Vous parlez de minimalisme fondé sur la prudence—je ne répondrai pas à cette observation.

Mme Aileen Carroll: Ne soyez pas timide!

M. Bruce Amos: Notre compétence s'exerce principalement dans la gestion des zones protégées des parcs nationaux, aux termes de la Loi sur les parcs nationaux. Vous le savez certainement et cela n'a rien d'étonnant que les fonctionnaires de Parcs Canada n'aient pas joué un rôle de leadership dans des dossiers comme les poursuites intentées par les citoyens dans le contexte général de la Loi sur les espèces sauvages en péril au Canada. À notre défense, je dirais qu'en effet, nous faisons peut-être preuve de prudence en nous limitant à notre champ de compétence et à notre mandat, mais je suppose que c'est ce que le ministre et les Canadiens attendent de nous: que nous participions à ces discussions en nous limitant à nos champs de compétence et au mandat de notre organisation.

Je ne prétends pas que le gouvernement du Canada n'ait pas examiné de façon minutieuse le projet de loi C-65 ou les événements qui l'entourent, ou qu'il n'ait pas consulté la population et bon nombre de parties prenantes sur ces questions, ou encore qu'il ait fait preuve d'une prudence ou d'un minimalisme excessif. Je dis simplement que pour ces questions précises, qui vont au-delà des compétences de l'Agence Parcs Canada, nous n'avons pas joué un rôle de chef de file. En témoignant devant votre comité, je ne me sens pas à même de donner mon avis sur les dispositions du projet de loi qui ne concernent pas précisément les parcs nationaux. Si je vous donnais un tel avis, ce serait uniquement dans le cadre du mandat de Parcs Canada.

• 1120

Je le répète, en ce qui concerne les poursuites intentées par les citoyens, nous n'avons jamais ressenti le besoin d'une telle disposition. La Chambre des communes n'a jamais prévu cela dans les lois, et les premières lois concernant les parcs nationaux ont été adoptées il y a déjà plus d'une centaine d'années. C'est donc la façon dont on voit les choses pour les parcs nationaux, mais je suis sûr que c'est très différent dans un contexte plus général, où des compétences et des lois différentes sont en place, et où des facteurs socio-économiques différents entrent en jeu.

C'est ce que j'essaie de vous dire. J'espère que vous ne considérerez pas comme un refus de prendre des risques le fait que nous nous limitions notre participation aux questions qui sont de notre compétence et relèvent de notre responsabilité. Cela traduit davantage notre respect à l'égard de notre champ de compétence et de celui des autres qui ont pour mandat d'examiner la question de façon plus générale.

Mme Aileen Carroll: Je reconnais et respecte votre compétence, et c'est pourquoi j'étais à la recherche d'un autre flot d'information.

J'admets volontiers que les poursuites intentées par un citoyen ne constituent pas l'un des domaines de spécialité des parcs. Cela ne fait aucun doute. Je pensais toutefois que la liste du COSEPAC et le processus et le résultat seraient utiles à votre ministère et que vous auriez fait preuve d'une plus grande confiance. Toutefois, ce n'est pas à moi d'en discuter et je n'ai pas l'intention de le faire. Je vais suivre votre excellent conseil et m'adresser aux responsables du ministère qui étaient les premiers responsables de ce projet de loi et qui manifestement auront des idées nouvelles à suggérer, ce qui me comblera d'aise.

Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Merci, madame Carroll.

J'écoute depuis ma place les interventions des témoins. J'écoute également les remarques des députés sur ce projet de loi dont notre comité n'a même pas encore été saisi. Trois d'entre nous qui siégeons actuellement au comité en étaient déjà membres lorsque le projet de loi C-65 lui a été renvoyé. Certains d'entre nous ont siégé au comité pendant toute l'étude de la LCPE. En fait, un certain nombre de membres du comité étaient déjà là pour l'étude de 1994-1995 et le rapport qui en a découlé, intitulé Notre santé en dépend.

Tout ce que j'entends me désole au plus haut point. C'est le genre de réaction que je constate. Je trouve extrêmement regrettable d'entendre encore une fois raconter les mêmes histoires. Je veux parler de la LCPE, dont les coupures répétées vont lentement entraîner une fin certaine.

Je trouve cela vraiment désolant, lorsque j'entends M. Lincoln soulever certaines questions et Mme Carroll parler des éléments qui se trouvaient dans le projet de loi précédent et qui semblent avoir d'un seul coup disparu. C'était la même chose pour la LCPE—la LCPE de 1996 et ensuite celle de 1998. Il y avait tout simplement des dispositions qui avaient disparu. C'est très regrettable. Même si certaines questions se sont posées au sujet de la LCPE 1996, et aussi au sujet du dernier projet de loi sur les espèces en péril, lorsqu'on constate que certaines des dispositions les plus progressives de ces mesures ont disparu, c'est vraiment déplorable. Et je ne critique en rien votre compétence ou votre contribution. Ma remarque porte plutôt sur le système proprement dit.

J'aimerais dire autre chose au sujet du système: J'ai entendu parler de «partie prenante». On entend toujours prononcer ce terme de «partie prenante». D'après mes renseignements, ce projet de loi est le fruit de négociations délicates avec les parties prenantes. On me dit que ce projet de loi a beaucoup de succès parce que les provinces, les territoires, les Autochtones et d'autres groupes d'intervenants ont participé aux discussions. J'aimerais que vous nous disiez qui sont ces parties prenantes et comment elles ont participé au processus, de façon très générale si vous le voulez bien.

• 1125

M. Nikita Lopoukhine: Il y a eu de vastes consultations menées principalement par Environnement Canada. Ensuite, divers groupes d'intérêt qui se préoccupent de ce qui se passe dans les parcs nationaux ont également participé aux discussions. La consultation principale au sujet du processus s'est faite par le biais de réunions et d'un processus bien organisé sous les auspices d'Environnement Canada et auxquels nous avons pris part.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Qui sont ces parties prenantes? Pouvez-vous nous indiquer des catégories—peut-être pas citer des noms, mais nous dire ce qu'on entend par partie prenante et comment l'on doit faire pour en faire partie. Comment définit-on une partie prenante? Qui sont les parties prenantes?

M. Nikita Lopoukhine: C'est un terme général, je suppose, qui regroupe divers intérêts. Si on me demandait d'établir une liste de catégories, il y aurait comme d'habitude les organisations non gouvernementales dans le domaine environnemental ainsi que des groupes représentant diverses associations professionnelles. Nous avons également eu... en fait, Environnement Canada surtout a tenu de vastes consultations avec les peuples autochtones. Les autorités provinciales ont participé au dialogue par le biais du Comité des directeurs de la faune.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Comment représente-t-on l'intérêt public à partir des parties prenantes? Existe-t-il un intérêt public?

M. Nikita Lopoukhine: Des audiences ont eu lieu dans un certain nombre de villes d'un bout à l'autre du pays et des propositions ont été présentées pour lancer le débat.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Croyez-vous que ce projet de loi est conforme à l'intérêt public? Pour des raisons que je ne vais pas vous exposer tout de suite, il m'apparaît très clairement que les parties prenantes et le grand public ne sont pas du tout la même chose. Ce projet de loi reflète-t-il l'intérêt public?

M. Nikita Lopoukhine: Je ne suis pas sûr que je sois bien placé pour répondre à cette question. C'est une question de jugement.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): L'un ou l'autre des témoins voudrait-il répondre? Je pose cette question parce que 85 p. 100 des citoyens disent que nous devrions imposer une protection obligatoire de l'habitat. Vous savez, dans ce sondage, on ne précise pas que 85 p. 100 ou 30 p. 100 des membres de l'Association forestière ou du Fonds mondial pour la nature ou de je ne sais quelle organisation se sont prononcés dans tel ou tel sens. Les répondants ne se sont pas identifiés. C'étaient de simples particuliers, des Canadiens qui parlaient en leur propre nom, en tant que membres du grand public. Ils ne parlaient pas à titre de membres d'une organisation en particulier ou d'un groupe d'intérêt particulier. C'est ce qui me préoccupe: Comment faire en sorte que nos lois reflètent l'opinion publique de façon générale, mais plus précisément, comment y parvenir dans le cas de cette mesure législative?

Je m'intéresse au processus qui se déroule ultérieurement, parce que vous avez identifié dans votre mémoire... et Dieu sait que vous n'êtes pas le premier groupe à en avoir parlé, puisque j'ai entendu d'autres ministères gouvernementaux en dire autant. Ils aiment ce projet de loi parce qu'il prévoit une bonne participation des parties prenantes. Eh bien, que pensez-vous de la participation du public dans cette mesure législative?

M. Bruce Amos: Je n'ai rien à ajouter à la description que Nik a faite des consultations qui ont été dirigées par Environnement Canada. Il est clair—et je ne fais ici qu'énoncer l'évidence; ce n'est pas une surprise et ce n'est pas censé l'être—que l'un des mécanismes importants pour évaluer l'intérêt public envers la mesure législative est le processus parlementaire, l'examen qui se fait à la Chambre et au comité et ensuite au Sénat. Le gouvernement a entrepris des consultations étendues et a recommandé un projet de loi et je sais que votre comité entendra des témoins qui s'intéressent à ce projet de loi sous de nombreux angles divers. Je dis que je le sais parce que M. Lincoln préside le Comité permanent du patrimoine canadien et que nos deux mesures législatives ont fait l'objet de ce processus et de cette discussion et j'ai le sentiment que le processus a été très efficace. Je parle du comité et de l'ensemble du processus parlementaire, puisque c'est là où nous en sommes actuellement.

• 1130

Je me sens donc mal à l'aise quand je dois me prononcer sur l'intérêt public alors même que je suis fonctionnaire du gouvernement du Canada et que vous vous apprêtez à inviter le grand public à venir vous donner son point de vue.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Je suis d'accord avec vous et je pense qu'en tant que parlementaires, nous représentons l'intérêt public et que c'est l'intérêt public et la voix du public que nous faisons intervenir dans la discussion et aussi dans la prise de décision. J'ajouterais que si nous tous, en partenariat—vous, en tant que fonctionnaires... et je précise que j'ai énormément de respect pour les fonctionnaires. Vous travaillez dans des conditions difficiles et vous manquez de ressources, de sorte que j'ai beaucoup de respect pour le travail que vous accomplissez. Vous avez certains rôles à jouer et nous, parlementaires, nous avons aussi notre rôle.

Mais pour ce qui est d'établir la responsabilité sur une base permanente à l'égard de ce projet de loi, il y a quelque chose qui manque, et l'on a notamment soulevé la question des poursuites intentées par des citoyens. Voici que nous avons l'occasion de veiller à établir une responsabilité permanente et d'obtenir l'adhésion du public et, si je suis certaine d'une chose, c'est bien que c'est un élément absolument nécessaire, en particulier dans le cas d'une mesure législative dans le domaine environnemental, parce qu'il faut qu'une telle mesure corresponde étroitement à l'intérêt public.

Je me demande si vous voudriez répondre à cela.

M. Bruce Amos: Si je puis me permettre, je n'ai rien d'autre à ajouter au sujet des poursuites par les citoyens. Je comprends ce que vous dites.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): D'accord. Merci.

Y a-t-il d'autres observations? Madame.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Vous avez dit tout à l'heure que le ministère de l'Environnement avait fait une vaste consultation et que des intervenants comme vous avaient été consultés, ainsi que des groupes environnementaux et l'industrie. Ne trouvez-vous pas curieux qu'après toute cette consultation dont vous avez parlé, les groupes environnementaux soient contre le projet de loi et les industries aussi? Ne pensez-vous pas que lors de ces consultations, le ministère de l'Environnement n'avait pas décidé des balises qu'il voulait établir et qu'il a été sourd et aveugle à toutes les modifications qu'on a apportées à ce projet de loi, même lorsqu'elles venaient des provinces?

M. Gilles Seutin: Ce ne sera pas une réponse à votre question, si question il y avait. Je sais qu'Environnement Canada a une liste de toutes les consultations qui ont été faites, sur laquelle on retrouve les noms des gens qui étaient présents, les dates où elles ont eu lieu et ainsi de suite. Je ne sais pas s'ils vous l'ont fournie, mais je sais qu'en tant qu'organisme public, le ministère est tenu de tenir cette liste. Donc, cet élément pourrait vous serait utile. Il faudrait le demander à Environnement Canada.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Nous avons déjà entendu le ministre, mais nous n'avons pas vraiment entendu les témoignages des fonctionnaires. Merci.

D'autres questions de ce côté-ci? Monsieur Reed.

M. Julian Reed: Il s'agit d'une observation, madame la présidente.

En séparant la question de l'intérêt public des intérêts des autres intervenants, je soumets respectueusement que nous donnons un peu l'impression que le public n'a aucune responsabilité envers les espèces en péril. Les habitants des villes du Canada devraient toujours se rappeler, par exemple, que chaque fois qu'ils tirent la chasse d'eau, ils mettent des espèces en péril. Il y a probablement plus d'espèces marines dans les eaux contaminées du lac Ontario qu'il n'y a d'animaux et d'oiseaux sur la terre ferme. Nous risquons de perdre ce degré de conscience si nous ne reconnaissons pas que la responsabilité est partagée également et que les espèces en danger de disparition ne sont pas seulement la chevêche des terriers et l'ours grizzli. Les citoyens doivent prendre conscience de toutes sortes de choses et savoir que leurs actes... nos actes, puisque cela nous concerne tous, ont des effets parce que nous vivons à un endroit et que nous exploitons cet endroit.

• 1135

M. Bruce Amos: Permettez-moi une brève observation. M. Reed fait valoir un argument très important qui souligne l'importance de l'information publique et des communications. Comme je l'ai dit dans mes remarques, je répète que nous sommes convaincus que les parcs nationaux offrent un excellent moyen d'informer le public sur l'état de nos espèces menacées en danger de disparition, entre autres en ce qui a trait à ce que vous dites, c'est-à-dire pourquoi certaines espèces sont en péril et quelles activités humaines contribuent au problème.

Parmi les choses que nous pouvons faire—et ce n'est pas directement lié au projet de loi puisque le projet de loi ne traite pas de cette question particulièrement, mais puisque M. Reed l'a mentionné... Nous souhaitons travailler en étroite collaboration avec d'autres organismes pour faire connaître au public l'importance des espèces en péril, dans les parcs nationaux ou par nos programmes de vulgarisation. Les gens qui fréquentent les parcs nationaux s'intéressent à la nature. C'est surtout pour cela qu'ils y viennent. Nous avons donc un auditoire réceptif et c'est l'endroit idéal pour amener cet auditoire à réfléchir au genre de questions que M. Reed a mentionnées, des questions essentielles pour le rétablissement et la protection des espèces en péril.

La vice-présidente (Mme Karen Kraft Sloan): Je me souviens avoir visité un parc national des Rocheuses il y a quelques années et on m'avait dit de ne pas sortir des sentiers. J'ai demandé pourquoi et on m'a répondu que je devais me limiter aux sentiers parce que l'environnement était fragile et qu'il fallait éviter d'écraser et de détruire ce qui se trouvait en dehors des sentiers. Je m'y suis prêtée de bon gré. Cela a été une bonne occasion pour moi d'apprendre quelque chose. Nous devons vous féliciter du travail que vous faites dans les parcs nationaux car vous enseignez de façon très efficace en renforçant l'apprentissage par l'expérience.

Nous avons eu une bonne séance ce matin, hormis les problèmes techniques, et je tiens à vous remercier de votre patience pendant que nous traitions les questions de quorum pour pouvoir continuer notre travail. Merci de votre patience, nous avons été heureux de vous entendre aujourd'hui.

La séance est levée. Nous nous réunissons de nouveau ce soir.