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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 19 octobre 2000

• 0915

[Traduction]

Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Nous semblons avoir le quorum, c'est-à-dire que nous sommes cinq. Nous serions plus à l'aise si un député d'un parti quelconque de l'opposition était aussi présent. En fait, nous en avons un maintenant.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Parfois, je ne sais pas quoi penser.

Le président: Si nous mettons un peu de temps à avoir le quorum ce matin, c'est qu'au lieu de débuter à 10 heures, la Chambre a commencé ses travaux à 9 heures, et nous devons avoir le quorum là-bas. Certains de nos députés sont à la Chambre pour que le quorum soit atteint, mais il se pourrait qu'ils arrivent très bientôt.

Si vous le permettez, peut-être pourrions-nous attendre encore quelques minutes simplement pour que nous ayons un député qui soit vraiment de l'opposition, plutôt qu'un caméléon.

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): C'est moi l'opposition dont vous devez vous inquiéter.

• 0916




• 0919

Le président: Nous avons maintenant le quorum.

Nous vous souhaitons la bienvenue à notre comité, monsieur Green, ainsi qu'à MM. Festa-Bianchet, Boates et Fraser. Nous sommes très heureux de vous voir ici à cause du rôle capital que vous jouez dans la mise en oeuvre du projet de loi C-33. Nous serons très heureux de vous entendre.

M. David M. Green (président, Musée Redpath, université McGill; président, Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC)): Merci beaucoup. C'est un honneur d'être ici aujourd'hui, et je remercie le comité permanent de nous avoir invités à lui présenter un exposé.

• 0920

Je vais vous présenter le mémoire que nous vous avons soumis. Je tiens à signaler que, dans ce mémoire, nous présentons des opinions et des recommandations qui ne touchent pas l'ensemble du projet de loi. Elles ne touchent que le COSEPAC, sa structure, sa mission et les résultats de ses délibérations. De nombreux membres du COSEPAC sont des fonctionnaires fédéraux et, étant donné le devoir d'impartialité de la fonction publique, nous vous demandons de ne considérer aucun élément du mémoire comme reflétant l'opinion personnelle de ces membres.

Tout d'abord, le COSEPAC s'occupe efficacement depuis au-delà de deux décennies maintenant—environ 23 ans—d'évaluer la situation des espèces sauvages du Canada, et il jouit du respect et de la confiance des Canadiens. Le comité est non pas fédéral, mais national, et il n'est pas un organe ou un service de quelque gouvernement que ce soit. Le comité est devenu avec les années un modèle en son genre, et c'est l'organisme tout désigné pour s'acquitter des fonctions détaillées dans le projet de loi C-33, la Loi sur les espèces en péril, pour ce qui est d'évaluer le risque de disparition des espèces.

Dans notre mémoire, nous décrivons la fonction et la composition du COSEPAC de même que les principes directeurs essentiels à sa réussite, et nous proposons aussi des amendements détaillés, accompagnés d'une justification, relativement au COSEPAC.

Tout d'abord, la fonction du COSEPAC ou son unique tâche consiste à évaluer la situation des espèces sauvages au Canada afin de déterminer si elles sont en péril, ou s'il n'y a pas suffisamment de données pour faire une évaluation. Qu'entendons-nous par espèces en péril? Toute espèce qui risque de disparaître du Canada. Quand il s'agit d'une espèce qui n'existe qu'au Canada, nous parlons alors de risque de disparition, car si l'espèce disparaît du Canada, elle disparaît complètement. Sinon, nous parlons de disparition du Canada. Voilà ce que nous évaluons.

Nous avons recours à six catégories pour définir le risque d'extinction ou de disparition du Canada d'une espèce donnée. Il y a extinction quand l'espèce est complètement disparue. Elle peut aussi être disparue du Canada, même si elle est toujours présente dans d'autres régions du monde. Elle peut aussi être en voie de disparition, menacée, préoccupante ou non en danger actuellement. Voilà les six catégories. Il y en a aussi une septième, qui ne définit pas comme tel le risque d'extinction d'une espèce donnée, à savoir la catégorie «Insuffisance de données». Cette catégorie ne constitue pas en soi une classification du risque mais signale l'insuffisance d'information accessible.

Le comité travaille à partir de rapports détaillés sur la situation des espèces commandés et étudiés par ses groupes spécialisés en diverses espèces. J'en ai ici quelques exemplaires—si vous en voulez, vous pouvez les demander au secrétariat—pour vous montrer à quoi ressemble ces rapports. Celui-ci porte sur la marmotte de l'Île de Vancouver, et on y trouve toutes les données disponibles sur la marmotte de l'Île de Vancouver. C'est à partir de ces rapports que nous en arrivons à une désignation donnée, et on trouve dans les rapports toutes les données qui justifient nos décisions. Tout y est soigneusement et méticuleusement documenté.

Ces rapports contiennent les meilleurs renseignements disponibles. Les décisions du comité sont prises par consensus à partir de ces renseignements. Pour aider à atteindre le consensus quand il n'y a pas d'unanimité claire et évidente sur un cas donné, les évaluations sont déterminées par un vote qui suit une discussion. Une majorité des deux tiers est nécessaire à l'adoption. Ainsi, personne n'a de droit de veto; personne ne peut annuler une décision du comité ni l'empêcher d'en arriver à une décision.

Cette procédure fonctionne efficacement. Toutes les parties sont entendues et tous les membres acceptent les résultats. À l'issue de nos réunions, nous nous accordons tous à dire que la décision que nous avons prise était la bonne. Tous recourent aux mêmes données et appliquent les mêmes critères.

• 0925

Voici en quoi consiste la structure du COSEPAC. Nous avons des sous-comités. Le COSEPAC compte actuellement huit sous-comités taxonomiques, appelés groupes spécialisés, qui préparent des rapports de situation sur les espèces qu'étudiera le COSEPAC. Les sous-comités sont vitaux au COSEPAC et à son fonctionnement. Un sous-comité du savoir collectif et traditionnel autochtone sera bientôt ajouté, ce qui enrichira la capacité du COSEPAC d'accéder à cette importante information et à l'intégrer. Nous avons aussi un comité central constitué de représentants experts, qui comprend les présidents de tous les sous-comités, des représentants d'organismes gouvernementaux et non gouvernementaux ainsi que des zones de compétences territoriales et des indépendants. Pour appuyer toute cette structure, nous avons un comité permanent composé des présidents des sous-comités et un secrétariat qui assure le soutien administratif.

Je vais maintenant vous parler des principes qui sous-tendent notre action. Tout d'abord, le COSEPAC a une mission bien définie. Son unique raison d'être consiste à évaluer le risque d'extinction ou de disparition du Canada des espèces sauvages canadiennes. Aucune autre fonction ne devrait lui être confiée que celles qui lui permettent directement d'accomplir sa mission. Il ne faudrait pas imposer d'autres fonctions au COSEPAC.

Le COSEPAC ne fait pas bloc avec un gouvernement ni avec un organisme gouvernemental. Il fonctionne comme organisme indépendant. Il évalue la situation biologique des espèces sauvages qui se trouvent au Canada en se fondant sur les renseignements accessibles et ne subit pas l'influence de facteurs sociaux, économiques ou politiques. Nous ne tenons pas compte de ces facteurs.

Le COSEPAC englobe une vaste plage d'expertise sur la situation des espèces sauvages en voie de disparition et compte parmi ses membres des gens compétents en taxonomie, en travail scientifique, en biologie de conservation, en gestion des ressources, en gestion des espèces sauvages, etc. Tous ceux qui prennent part aux décisions du COSEPAC sont accrédités et qualifiés et il n'y a pas de mandataires. Nous n'acceptons pas que des mandataires viennent voter par procuration. Le COSEPAC compte suffisamment de membres pour assurer l'étendue, la portée et l'équilibre d'expertise nécessaires pour s'acquitter de sa mission.

Le COSEPAC atteint le consensus par les efforts de collaboration de ses membres provenant d'organismes gouvernementaux et non gouvernementaux ainsi que du milieu scientifique. Vous voyez ici que les délégués qui comparaissent devant vous proviennent de deux gouvernements provinciaux et deux autres du milieu universitaire.

Les évaluations du COSEPAC ne sont pas effectuées rapidement, superficiellement ou en l'absence de données détaillées. Le COSEPAC est en fait un appareil assez lourd. Il est méticuleux, et son efficacité tient à la minutie et à l'exhaustivité de son travail de documentation. Les évaluations apolitiques du COSEPAC constituent les meilleurs conseils possible pour tous les Canadiens sur la situation des espèces sauvages canadiennes. Le COSEPAC rend des décisions fondées uniquement sur des données pertinentes aux espèces étudiées et sur l'analyse scientifique. Il ne tient aucun compte des frontières politiques internes, des ententes, des traités, des questions économiques ni des coutumes sociales, sauf dans le mesure où ces éléments influent sur la situation de l'espèce sauvage à l'étude.

Je voudrais maintenant passer en revue avec vous nos recommandations.

Le président: Oui, allez-y, mais il serait utile que vous accélériez le rythme.

M. David Green: Désolé.

Premièrement, la définition du terme «individu» au paragraphe 2(1) du projet de loi est la suivante:

    «individu» Individu d'une espèce sauvage.

etc. Nous proposons d'inclure dans cette définition les termes «les larves» et «les propagules asexuées» afin qu'elle soit complète. Cette définition modifiée reconnaît mieux la gamme des étapes de la vie et des modes de propagation des espèces sauvages.

Il y a ensuite la définition de l'expression «espèces préoccupantes». La définition contenue dans le projet de loi est différente de celle que le COSEPAC utilise. Nous suggérons donc la définition suivante: «espèce sauvage qui peut devenir menacée ou en péril en raison d'une combinaison de caractéristiques biologiques et de menaces identifiées». Cette définition élimine la redondance du qualificatif «préoccupant» et décrit mieux la catégorie selon la définition du COSEPAC.

• 0930

Dans la définition «espèce sauvage», nous suggérons également d'inclure d'autres mots dans cette expression, notamment «variété», «population biogéographiquement définie d'animaux ou de plantes», et en anglais, d'utiliser le mot «bacterium» plutôt que «bacteria», car «bacterium» est le singulier et «bacteria» est une erreur grammaticale.

Nous incluons par ailleurs une définition du nom «espèce» qui correspond davantage aux définitions reconnues sur le plan scientifique. Nous parlons ici d'espèces. Nous pouvons préciser, comme nous le suggérons, ce qu'est une espèce sauvage. Il est bon de savoir ce qu'est une espèce, alors nous voulons l'inclure. Voici donc ce que nous proposons pour «espèce sauvage»:

    2. (5) Aux fins de l'utilisation du terme «espèce»,

...qui a une signification scientifique...

    la référence à une «espèce» dans la présente loi renvoie à une «espèce sauvage» telle que définie au paragraphe 2(1).

Cela ajoute une certaine clarté.

Comme recommandation no 6, nous voulons présenter l'amendement suivant à l'article sur la constitution du COSEPAC.

    Est constitué le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada dans le but de s'acquitter de ses fonctions découlant de la présente loi, en se basant uniquement sur les meilleurs renseignements accessibles, à l'inclusion du savoir scientifique, du savoir traditionnel autochtone, et de l'analyse de la situation biologique des espèces en danger.

Cela ajoute plus de clarté dans la fonction et l'objet du COSEPAC dès le départ et cela précise que le COSEPAC est, et doit être, apolitique. Cela définit mieux le rôle que doit jouer le COSEPAC.

En ce qui concerne les missions du COSEPAC, nous voulons ajouter le mot «susceptible», car nous «évaluons la situation de toute espèce qu'on estime susceptible d'être en péril». Nous ne savons pas encore qu'elles sont en péril; c'est pour cette raison que nous évaluons leur situation. Nous évaluons si elles sont en péril, de sorte que «susceptible» est un mot utile.

En ce qui concerne les catégories de la classification, «non en péril» constitue également une catégorie de péril et ne devrait pas être considérée comme telle. C'est seulement la catégorie «insuffifance de données» qui ne constitue pas une classification du risque. On peut donc supprimer le sous-alinéa 15(1)a)iii), car «non en péril» est aussi une catégorie.

À l'alinéa 15(1)b), soit l'établissement des priorités et la notion d'urgence, on demande au COSEPAC de déterminer l'ordre selon lequel doit être effectuée l'évaluation des espèces sauvages. Nous préférerions qu'on dise «d'évaluer les espèces sauvages en donnant priorité à celles qui sont susceptibles d'être le plus en péril», pour la même raison. Nous ne savons pas qu'une espèce est en péril tant que nous ne l'avons pas déterminé.

Par ailleurs, toujours à l'article 15 du projet de loi, nous proposons de remplacer le libellé actuel, soit «de réévaluer la situation des espèces en péril et, au besoin, de les reclassifier ou de les radier de la liste» par «de réévaluer la situation des espèces en péril et, si c'est opportun, de les reclassifier ou de les radier de la liste». La situation est toujours déterminée par le COSEPAC, comme il convient, à la lumière des renseignements contenus dans le rapport de la situation. «Insuffisance de données» est l'unique situation que l'on devrait considérer comme se soldant par la radiation de certaines espèces de la liste.

La recommandation suivante concerne les conseils au ministre et au conseil. Voici le libellé actuel du projet de loi: «de fournir des conseils au ministre et au Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril et d'exercer les autres fonctions que le ministre, après consultation du conseil, peut lui confier». Nous proposons le libellé suivant: «de fournir des conseils au ministre et au Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril sur la situation des espèces sauvages au Canada». C'est la fonction du COSEPAC et c'est sa seule fonction. On ne devrait pas lui demander de faire autre chose. Cela n'empêche pas le ministre de demander conseil aux membres du COSEPAC en tant qu'experts, mais la fonction du COSEPAC est clairement définie et nous sommes d'avis que qu'elle ne devrait pas changer.

• 0935

Nous proposons d'ajouter un alinéa au paragraphe qui porte sur l'actualité de la taxonomie. Dans le domaine scientifique, les noms changent à mesure qu'on obtient de l'information. Il s'agit tout simplement d'ajouter que le COSEPAC doit se tenir à jour et «modifier les noms scientifiques et communs qui figurent sur la liste des espèces en péril en conformité avec la nomenclature zoologique et botanique acceptée à l'heure actuelle».

Toujours à l'article 15, sous la rubrique meilleure information accessible, on le dit déjà dans le changement que nous recommandons à l'article 14 et cela est donc redondant, de sorte que nous acceptons l'amendement précédent. C'est donc à supprimer.

Le paragraphe 15(3) dit que «pour l'exécution de sa mission, le COSEPAC prend en compte les traités et les accords sur les revendications territoriales applicables». Nous en proposons respectueusement la suppression.

Le COSEPAC a pour fonction d'évaluer la situation des espèces sauvages en se fondant sur la meilleure information accessible, à l'inclusion du savoir scientifique et du savoir autochtone traditionnel, tel que mentionné. Comme je l'ai déjà dit, l'organisme est national et apolitique et il ne tient compte ni des frontières politiques internes du Canada ni de la propriété des terres dans l'évaluation de la situation des espèces sauvages. La seule frontière dont le COSEPAC tient compte est la frontière territoriale du Canada. Donc, les traités, qu'ils portent sur les droits de pêche et de chasse ou sur la protection permise par l'intendance des terres cédées en vertu de ces traités font, par nécessité, partie du savoir utilisé dans l'évaluation de la situation, mais ces circonstances s'appliquent dans la perspective de leurs effets sur le bien-être des espèces sauvages en question, et non précisément en raison de leur nature de droits issus de traités ou d'accords sur des revendications territoriales. Nous allons en respecter l'esprit, mais nous ne pouvons pas tenir compte des accords sur les revendications territoriales à la lettre. Ce paragraphe fait allusion à des considérations politiques plutôt que scientifiques, et c'est quelque chose que nous ne pouvons pas faire.

Recommandation no 16. Il n'y a rien à l'heure actuelle dans le projet de loi dans le sens de la recommandation suivante:

    Aucune mesure fondée en droit, poursuite ou procédure légale ne peut être lancée ou intentée contre le COSEPAC ou contre un membre du COSEPAC pour, ou relativement à, tout geste posé ou omis par le COSEPAC ou par ledit membre pendant le cours et pour les fins d'une évaluation de la situation d'une espèce par le COSEPAC.

C'est un véritable jargon de juriste pour moi, mais cela signifie que le COSEPAC devrait pouvoir faire son travail sans craindre des poursuites. Nous pourrons ainsi remplir nos fonctions sans craindre des menaces.

L'organisation du COSEPAC prévoit la nomination de membres suppléants, et c'est quelque chose qu'il faut mentionner ici, car on ne le mentionne pas à l'heure actuelle dans le projet de loi. Afin de respecter l'organisation du COSEPAC, nous proposons d'ajouter ce qui suit:

    Chacun des membres peut désigner un délégué qui pourra participer, au besoin, aux fonctions et aux décisions du COSEPAC en son nom et auquel tous les critères d'admission précisés aux paragraphes 16(1) à 16(6) s'appliqueront également. Personne d'autre que le membre ou son substitut désigné

...qui passe par le même processus d'accréditation et de nomination...

    tel que décrit, ne peut prendre part au processus décisionnel du COSEPAC.

Il faut reconnaître qu'il peut arriver à l'occasion qu'un membre ne soit pas en mesure d'assister à une réunion du COSEPAC et qu'il soit nécessaire qu'un membre suppléant puisse alors occuper sa place, mais ce membre suppléant doit être agréé.

L'article 20 porte sur le personnel et les installations et précise que: «Le ministre peut fournir au COSEPAC», etc. En réalité, nous devons faire ce travail. On nous demande de faire ce travail et on doit nous fournir les installations pour le faire. Si la loi nous oblige à faire ce travail, nous devons avoir les moyens de nous acquitter de notre mission. «Ce personnel se trouvera sous la direction fonctionnelle du COSEPAC» afin qu'il puisse s'acquitter de sa mission à titre d'organisme non gouvernemental, non politique.

• 0940

La recommandation no 19 porte sur l'établissement de la Liste des espèces en péril. Je dois ajouter quelques précisions.

Je répète encore une fois que le COSEPAC n'est pas un organisme politique. Il s'agit d'un principe si important pour les membres du COSEPAC que bon nombre d'entre eux hésitent à exprimer un avis sur les politiques contenues dans le projet de loi. Quoi qu'il en soit, nous devons reconnaître qu'il s'agit naturellement ici d'un processus politique et que le COSEPAC en fait partie. Dans ce contexte, on ne peut pas ne pas avoir d'opinion. Le fait de taire quelque chose est l'expression d'une opinion. Si nous reconnaissons cette opinion, nous devons également reconnaître qu'un nombre égal de membres du COSEPAC ont exprimé des opinions, donc ce qui s'ensuit c'est cette autre opinion. Une opinion consiste à ne rien dire; l'autre est ce qui s'ensuit.

Le travail accompli par le COSEPAC en vertu de la LEP sera de peu d'utilité si les espèces qu'il désigne ne sont pas inscrites dans la liste officielle. Les dispositions du projet de loi concernant le rétablissement et la protection sont insignifiantes si elles ne se rapportent pas à une liste officielle. En l'absence de liste, ce ne sont que de belles paroles. Il faut établir la liste officielle des espèces sauvages en péril. Cette liste devrait contenir les espèces désignées par le COSEPAC et pouvoir faire l'objet de modifications. Les évaluations du COSEPAC étant approfondies, elles représentent les meilleures données disponibles.

Tous les membres du COSEPAC qui ont exprimé leur opinion, à l'exception de quelques-uns, conviennent que le ministre devrait avoir le pouvoir discrétionnaire d'exclure une espèce de la liste même si le COSEPAC l'a désignée comme étant en péril. Comme le COSEPAC, j'estime que cette exclusion ou cette exemption de la liste devrait se faire ouvertement, à l'issue de consultations, de façon entièrement transparente et avec preuves à l'appui. Cela permettrait de tenir des consultations publiques sur le contenu de la liste officielle en faisant valoir toutes les préoccupations politiques, sociales et économiques dont le COSEPAC ne tient pas compte. Cela ne compromettra pas pour autant l'indépendance des décisions du COSEPAC. Ce dernier conservera son champ d'action tandis que le côté politique en établissant et modifiant la liste gardera le sien, les deux éléments étant ouverts et transparents.

Cela dit, pour en revenir à notre mémoire, le projet de loi dit que «sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par règlement», etc. Nous suggérons simplement qu'il dise que «le gouverneur en conseil doit, par règlement, établir la liste des espèces en péril».

La teneur de la liste peut être spécifiée séparément en disant «la liste des espèces en péril se constituera des espèces sauvages classifiées par le COSEPAC» selon la catégorie dans laquelle elles entreront. Cela définira le contenu de la liste. Cela fait suite—et fait partie d'un tout—à l'idée voulant que la liste puisse être modifiée.

Nous suggérons d'insérer le paragraphe suivant:

    27(3) Là où le COSEPAC désigne une espèce sauvage comme disparue, disparue du pays, en péril ou menacée au Canada, modifie une classification ou reclassifie une espèce sauvage dans une catégorie autre que disparue, disparue du pays, en péril ou menacée au Canada, le ministre doit, dans les 60 jours de cette modification, recommander au gouverneur en conseil de modifier en conséquence la Liste des espèces en péril. Le ministre doit donner avis de l'amendement au registre public.

Cela précise simplement les modifications à la liste. C'est assez simple.

• 0945

La dernière recommandation permet au ministre d'exempter certaines espèces de la liste. La liste est établie puis modifiée. Le ministre peut en soustraire certaines espèces ou décider de ne pas en inscrire certaines sur la liste et il peut recommander au gouverneur en conseil qu'une espèce sauvage classifiée par le COSEPAC comme disparue, disparue du pays, en voie de disparition ou menacée au Canada ne figure pas sur la liste des espèces en péril en vertu du paragraphe 27(3).

Avant de recommander une dispense, le ministre peut tenir des consultations, prendre en compte l'évaluation du COSEPAC, communiquer avec les conseils de gestion et justifier la dispense—qu'il peut faire de toute façon—de même qu'inclure la justification dans le registre public. Cela à notre avis garantit que le processus demeure ouvert et que quiconque peut le consulter.

Cela confère au ministre le pouvoir discrétionnaire de recommander des modifications à la Liste des espèces en péril, après consultation, à l'encontre des désignations du COSEPAC. Cela permet la tenue d'un processus public, ouvert et transparent sur la teneur de la liste en tenant compte d'éventuels désaccords de nature politique, sociale ou économique qui n'entrent pas dans les considérations du COSEPAC. L'indépendance des décisions de ce dernier n'est pas compromise pour autant.

Nous soulignons dans le mémoire que les opinions diffèrent à ce sujet, comme je l'ai expliqué. Ce que nous recommandons ne correspond pas exactement à ce que prévoit le projet de loi ou à ce qui a été préconisé par de nombreux groupes non gouvernementaux. Les membres du COSEPAC qui sont pour cette dispense estiment qu'il s'agit là d'une concession viable et acceptable.

J'ai deux autres choses à ajouter. En ce qui concerne les espèces sur lesquelles il n'existe pas suffisamment de données, rien dans le projet de loi ne correspond à ce que nous avons recommandé. Si la classification «Insuffisance de données» a été attribuée à une espèce sauvage, le ministre compétent peut prendre des mesures de correction des lacunes de l'information sur l'espèce afin de permettre l'évaluation de sa situation. Selon nous, cette classification prolonge trop souvent l'indécision à propos d'une espèce. L'insuffisance de données devrait signaler que nous devons en apprendre plus sur l'espèce en question et devrait avoir un effet positif.

Enfin, en ce qui concerne les annexes 1 et 2, soit les listes du COSEPAC, comme on y fait continuellement des ajouts et parfois des soustractions, il serait préférable de dater la liste. Nous nous réunirons de nouveau en novembre et nous modifierons la liste encore une fois. C'est ce que nous faisons.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Green.

Nous allons donner la parole à M. Reed, M. Lincoln, Mme Redman et M. Knutson. Mais auparavant, quelqu'un a-t-il autre chose à ajouter?

M. J. Sherman Boates (gestionnaire, Biodiversité, ministère des Ressources naturelles de Nouvelle-Écosse; Comité sur la situation des espèces en péril au Canada): Pas pour le moment.

Le président: Très bien.

On m'a dit que, dans son exposé, M. Boates parlera de la législation de sa province sur les espèces en voie de disparition.

M. Sherman Boates: Je pourrais le faire maintenant si vous avez une minute, ou je peux le faire plus tard.

Le président: Faites-le maintenant, brièvement, s'il vous plaît.

M. Sherman Boates: En fait, je suis ici à deux titres. Je suis membre du COSEPAC, mais également l'un des artisans de la Loi sur les espèces en voie de disparition de la Nouvelle-Écosse, qui a été adoptée il y a deux ans environ. Si j'ai cru important d'en parler, c'est parce que c'est la première loi sur les espèces en voie de disparition qui a été adoptée au Canada après la conclusion de l'accord. Cette loi repose sur les mêmes fondements que le projet de loi fédéral. Le projet de loi de Nouvelle-Écosse est donc parallèle au projet de loi fédéral à plusieurs égards.

• 0950

Une chose qu'il vaut peut-être la peine de mentionner est que nous avons une procédure d'inscription directe. Les espèces sont examinées par un petit organisme comparable au COSEPAC qui, une fois ses décisions prises, les communique aux ministres qui prennent immédiatement des règlements sans autre examen.

Quant aux raisons pour lesquelles nous l'avons fait, lorsque l'accord a été conclu, nous avons tous convenu d'avoir une liste indépendante. La nature de cette liste était simple au départ et s'est seulement compliquée par la suite. C'est une des raisons.

Une autre raison de notre succès est que nous avons beaucoup moins d'espèces. Elles se chiffrent par dizaines plutôt que par centaines. C'est donc plus facile à faire.

La loi comprend également toutes les composantes de la planification du rétablissement. Les habitats essentiels sont désignés bien que le ministre ait des pouvoirs discrétionnaires à cet égard. Il y a également une disposition relative au dédommagement.

Je veux m'assurer que les gens connaissent l'existence de cette loi et sachent que les provinces peuvent élaborer des lois qui atteindront la plupart des objectifs que vise le projet de loi fédéral.

Si vous avez des questions concernant la loi de Nouvelle-Écosse ou notre expérience, je me ferai un plaisir d'y répondre.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Boates. Vous comptez de nombreux admirateurs de ce projet de loi au comité.

Nous allons commencer par M. Reed, M. Lincoln, Mme Redman et M. Knutson.

M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.

Pourriez-vous m'expliquer la différence entre une espèce susceptible d'être en péril et une espèce non en péril. Je ne suis pas spécialiste en la matière, mais chaque espèce n'est-elle pas susceptible d'être en péril?

M. David Green: Oui, dans un certain sens. Des organismes comme l'UICN estiment que toutes les espèces sont plus ou moins en péril. L'UICN n'a même pas de désignation «non en péril». Nous en avons une. Nous estimons que des espèces comme le rouge-gorge et l'épinette noire ne sont probablement pas en péril.

Ce que j'entends par «susceptible d'être en péril», est une espèce qui n'a pas encore fait l'objet d'un rapport. Nous possédons des données comme quoi que le groupe spécialisé connaît cette espèce, cet animal ou cette plante, et est conscient qu'elle fait peut-être l'objet de certaines menaces. Dans de tels cas, le groupe spécialisé connaît la taille de son rayon d'action et possède des renseignements sur le nombre d'individus, sans pour autant qu'un rapport ait été préparé pour le COSEPAC. Voilà pourquoi l'espèce est susceptible d'être en péril. Il se peut que nous décidions de faire figurer cette espèce dans notre liste, mais l'investigation n'a pas encore été faite.

Une fois qu'elle est faite, une fois que nous sommes rassurés, nous préparons un rapport qui désigne l'espèce «non en péril». L'expression «susceptible d'être en péril» n'est pas une désignation; c'est un qualificatif que nous utilisons avant d'engager la démarche. Cela nous permet d'établir un ordre prioritaire et nous indique qu'il faut nous en occuper.

M. Julian Reed: Comme je ne sais pas vraiment de quoi il retourne à bien des égards, je dois m'en remettre à des experts comme vous, Il me semble, et je le sais par expérience et à cause de l'endroit où j'habite que le cycle de régénération de certaines espèces est plutôt rapide, car il semble qu'une espèce qui aurait quasiment disparu, réapparaisse en abondance, le cycle démarrant de nouveau.

Dans ma région, la grenouille léopard en est un exemple. Depuis vingt ans, cette espèce était en déclin. Cette année, j'en ai vu plus de 25, par un soir d'orage alors que j'étais en voiture. D'où venaient-elles?

M. David Green: Nous savons cela. Nous savons que l'abondance de ces espèces varie.

Je m'intéresse professionnellement aux grenouilles. Les grenouilles sont ma spécialité. La première chose que je vous dirai, c'est que chaque grenouille femelle qui est féconde, pond des milliers d'oeufs. Une grenouille léopard femelle pondra de six à dix milles oeufs, si bien que le taux de mortalité est astronomique. La moindre petite variation dans l'éclosion de ces oeufs se traduit par une grande quantité de petites grenouilles. Il de 1 p. 100 pour avoir mille grenouilles de plus. Inversement, une variation de 1 p. 100 à la baisse produit le résultat contraire.

• 0955

La biologie même de ces espèces, de celles qui pondent de grande quantité d'oeufs explique les fluctuations de leur nombre car elles sont très menacées et les taux de mortalité sont très élevés.

Depuis un grand nombre d'années je m'intéresse aux crapauds et j'ai réuni de bons renseignements. Nous avons vu la population des crapauds grimper puis chuter et grimper de nouveau pour rechuter.

Nous tenons donc compte de cela. Nous avons une notion que nous désignons «la taille effective de la population». Nous calculons ainsi la véritable population, ce qui est important pour nous sur le plan biologique. Il se peut que la population grimpe en flèche mais, effectivement, nous interprétons cela comme une exception. Nous nous disons que cette année-là il y avait une grosse population. Effectivement, c'est ce que nous considérons comme le point zéro. Si la chute n'atteint pas zéro, il y a encore des grenouilles. Lorsque l'on atteint zéro, il n'y en a plus. La taille de la population des grenouilles peut augmenter mais elle ne peut jamais augmenter à tel point qu'elle ne pourra pas baisser de nouveau. Le point zéro pourra être encore être atteint, sans qu'il y ait augmentation.

Il faut donc tenir compte de cela. La population effective, dans le cas d'une espèce fluctuante, c'est la taille minimale, et non maximale. Nous reconnaissons cela car le phénomène est propre à quantité d'espèces. Nous en tenons compte. Cela fait partie de notre évaluation.

M. Julian Reed: Merci.

M. Sherman Boates: Puis-je ajouter quelque chose?

Au COSEPAC, il faut toujours adapter nos conclusions à la spécificité de l'organisme. Pour une tortue, nous adopterons une perspective de 50 ans. Dans le cas d'un insecte, cela peut être moins d'un an. Dans nos délibérations pour déterminer si une espèce est en péril ou non, tous ces petits facteurs propres à la vie de l'animal ou de la plante sont pris en compte.

M. Julian Reed: Merci. Cela est très instructif. Ces dernières années, on a beaucoup entendu parler de la disparition des amphibiens...

M. David Green: C'est exact.

M. Julian Reed: ...et jusqu'à cet automne j'avais tendance à être d'accord.

M. David Green: J'ai joué un rôle d'avant-garde dans ce domaine au Canada. Je suis administrateur du groupe de travail international qui étudie le déclin des amphibiens. De plus, j'ai mis au point un livre sur le déclin des amphibiens au Canada en 1997, donc je connais bien le sujet.

Il est vrai que la population très variable d'amphibiens qui se reproduisent dans les étangs est à la baisse, mais si on la suit pendant quelques années, on voit que cette diminution n'est pas très importante à long terme.

Ce qui nous inquiète c'est la perte de populations. Si les populations sont réduites à zéro et ne sont pas renouvelées d'autre part, comme on voit dans l'Ouest—en Colombie-Britannique et en Alberta, par exemple—là, on peut parler d'un déclin de ces espèces. C'est la diversité et le nombre de populations qui diminuent. Cette diminution est permanente, et c'est là le problème. Ce n'est pas le nombre d'animaux au sein d'une seule population qui diminue, c'est le nombre de populations qui diminue.

La situation pour les animaux qui ont des populations très stables est différente. Par exemple, il y a des populations de salamandres très stables, mais ce sont des animaux qui se reproduisent un peu comme les mammifères. Leurs pontes ne sont pas énormes, seulement une ou deux dizaines d'oeufs, non des milliers. Ce sont des chiffres qui se rapprochent plus du cycle de vie des mammifères.

Si un caribou est né, il y a un caribou de plus. Si un caribou meurt, il y a un caribou de moins. Vous pouvez le noter. Dans ces circonstances-là, le nombre d'animaux dans une population est important sur le plan biologique. Si ce chiffre baisse beaucoup, on est en présence d'un phénomène. Mais pour ce qui est des animaux qui ont des cycles de vie tout à fait différents, il faut penser en termes différents.

M. Julian Reed: Merci.

Le président: Monsieur Lincoln.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Comme nous n'avons pas beaucoup de temps et que j'ai quelques questions à vous poser, vous pourriez peut-être les noter pour y répondre après que je les aurai toutes posées. Les questions s'adressent à vous et au Dr Boates.

• 1000

Vous avez établi une comparaison entre la loi en Nouvelle-Écosse et le projet de loi C-33; l'aspect le plus important serait une liste indépendante de tous, bien sûr. Le Dr Boates a dit qu'en Nouvelle-Écosse il y a quelques dizaines d'espèces à inscrire sur la liste, tandis qu'au niveau fédéral, il y en a des centaines. Mais d'après les faits à notre disposition, à peu près 125 espèces ont déjà été revues au niveau fédéral. D'après la lettre que nous a envoyée le ministre, l'étude devrait être presque terminée au printemps 2001. Est-ce que cela ne démolit pas l'argument invoqué à savoir qu'il y a des dizaines d'espèces en Nouvelle-Écosse et des centaines au niveau fédéral, puisque la liste—ou au moins la moitié—est presque étudiée?

Deuxièmement, sauf erreur, les membres du COSEPAC ne sont pas du tout d'accord quant à savoir si cette liste devrait être établie de façon indépendante par le COSEPAC ou selon la formule du gouverneur en conseil adoptée dans le projet de loi. Est-ce que votre décision de suivre la méthode du projet de loi C-33 était unanime, ou est-il vrai que les membres du COSEPAC ne sont pas du tout d'accord là-dessus?

Ma troisième question: si je ne m'abuse, dans vos modifications vous proposez aussi que la liste actuelle soit incluse au début du projet de loi, dans ses dispositions essentielles, comme dans le projet de loi C-65. La liste n'est pas là en ce moment. Nous commençons sans liste. On a proposé de modifier l'article 129 pour inclure la liste initiale, comme dans le projet de loi C-65. Mais si je ne m'abuse, vous n'avez pas proposé qu'on ait de liste initiale. En d'autres mots, le projet de loi resterait le même après vos modifications. Je veux que vous confirmiez cela.

J'ai aussi une quatrième question, qui porte sur la liste même. Vous êtes d'accord avec ceux qui disent que le pouvoir discrétionnaire du ministre est inacceptable et qu'on ne peut pas permettre de discrétion. En vertu de l'article 30 du projet de loi C-65, le gouvernement devait signifier dans le registre public son intention de modifier la liste ou son refus de la modifier dans un délai de 90 jours. Mais voici l'aspect intéressant c'est que gouverneur en conseil devait le faire. Le Cabinet devait inscrire les changements.

Le projet de loi C-33 ne contient aucune limite. Aucun délai n'est prescrit. Tout est laissé à la discrétion du ministre. Vous avez proposé un amendement à l'article 27 et je cite:

    [...] le ministre doit, dans les 60 jours de cette modification, recommander au gouverneur en conseil de modifier en conséquence la Liste des espèces en péril. Le ministre doit donner avis de l'amendement au registre public.

C'est certainement une amélioration par rapport à la disposition du projet de loi C-33, j'en conviens. Toutefois, c'est toujours à la discrétion du gouverneur en conseil. Il incombe au ministre de recommander, dans les 60 jours, que le gouverneur en conseil agisse mais, à moins que je ne me trompe, le gouverneur en conseil n'en a pas moins la discrétion de dire: «très bien, le ministre m'a fait une recommandation et il a signifié son intention dans le registre public, en respectant les 60 jours réglementaires, mais nous n'allons rien faire pour l'instant...»

M. David Green: C'est bien que vous le signaliez. Cela nous avait échappé. On pourrait l'ajouter.

M. Clifford Lincoln: Je pense quant à moi que c'est une distinction capitale car s'il incombe au ministre de signifier son intention dans le registre public dans les 60 jours et que l'on laisse cela sur la table du conseil des ministres, nous ne serons pas plus avancés.

Voici ce que je voulais signaler. Vous ou M. Boates pourriez peut-être, pour commencer, nous parler de la liste indépendante du COSEPAC. Si selon le raisonnement de votre comité, c'est uniquement une question de nombre, la vitesse de l'examen suffit.

Deuxièmement, il y a la liste actuelle. Devrions-nous la faire figurer dans la loi? Certains d'entre nous sont convaincus qu'elle devrait y figurer.

Troisièmement, on se demande si le mécanisme va demeurer le recours au gouverneur en conseil—quant à moi, je préférerais une liste indépendante—comment pourrons-nous exiger que le gouverneur en conseil signifie son intention au registre public dans un délai précis? Si nous retenons 60 jours plutôt que 90, j'en serai ravi.

M. David Green: Cela fait beaucoup.

• 1005

Tout d'abord, le COSEPAC a procédé à des réévaluations, et comme il ne s'agissait pas de nouvelles évaluations, les choses sont allées très vite. Cela signifiait qu'il n'y avait pas de nouveaux rapports. Il faut beaucoup de temps pour rédiger des rapports. C'est une contrainte pour nous. Ce rapport ne peut pas être préparé en un mois. Il faut un an, dix-huit mois, parfois deux ans. Il faut beaucoup de temps. C'est un travail méticuleux.

Dans nos réévaluations, nous avons posé la question: Y a-t-il de nouvelles données qui pourraient faire changer la désignation qui existe? Y en a-t-il suffisamment pour justifier une mise à jour, un nouveau rapport? Non. Y a-t-il de nouvelles données qui permettraient d'ajouter quelque chose, une nouvelle information? Parfois oui, parfois non. S'il n'y a pas de nouveaux renseignements, tout va bien. Nous diffusons le rapport. Nous nous sommes dit que nous pourrions procéder de front, afin de posséder une évaluation cohérente à la lumière des nouveaux critères. Pour cela, nous n'avions pas besoin de faire préparer de nouveaux rapports. Cela nous a permis de faire vite.

Nous allons procéder à une nouvelle fournée de réévaluations. Il s'agit des cas qui n'ont pas été classés la première fois, pour lesquels on possède de nouvelles données. Ce sont ceux qui exigent parfois des addenda volumineux. Nous allons travailler à ces cas-là. Parfois nous attendrons le printemps. Ensuite, resteront les cas qui exigent de nouveaux rapports, dont nous nous occuperons quand les rapports seront prêts.

Voilà ce qui explique pourquoi nous avons pu travailler rapidement. Ce n'est parce qu'il s'agissait de la Nouvelle-Écosse ou d'une liste indépendante ou d'autre chose. Nous possédions déjà ces rapports et ils sont toujours utiles. Ils remontaient à quelques années, et il y avait moins de données supplémentaires à prendre en compte. Donc ce n'était peut-être pas ce que vous croyez.

Quant à cette notion de liste initiale, c'est une idée à explorer. Qu'est-ce qui constituerait cette liste initiale? J'avais l'impression que nos réévaluations—la réévaluation l'année dernière de toutes les espèces en voie de disparition et menacées sur la base des nouveaux critères conformément aux directives et aux délais imposés—nous permettraient soit de reprendre la liste à zéro et d'en faire une liste initiale, soit comme le prévoit le projet de loi, nous donner 30 jours pour le faire tout en nous permettant de revenir deux ans arrière pour en tenir compte. À ce moment-là nous pourrons le faire. Nous aurons pris suffisamment d'avance pour fournir cette liste dans les 30 jours requis. Nous n'avions pas d'idée arrêtée, nous voulions simplement être prêts.

M. Clifford Lincoln: Vous ne voyez pas d'objection à recommander que cette liste initiale soit la liste modifiée que vous avez déjà, qu'elle soit de 125 ou de 150 espèces.

M. David Green: Je n'y vois pas d'objection.

M. Sherman Boates: Je crois qu'une des choses à rappeler à ce sujet, c'est qu'à l'origine lorsque nous avons commencé, le COSEPAC voulait simplement faire le travail nécessaire d'adaptation par rapport à la nouvelle loi. Certains craignaient que les réévaluations ne retardent le dépôt du projet de loi fédéral. Mais grâce au progrès dans la rédaction du projet de loi et le travail acharné du COSEPAC, je crois que la majorité de ces évaluations est maintenant faite et donc que notre situation est supérieure à ce qu'elle était lorsque nous avons commencé à en parler. Cela vient donc confirmer...

M. Clifford Lincoln: Est-ce que cela veut dire que vous êtes en faveur de cette liste initiale modifiée?

M. David Green: Ni pour ni contre. Cela ne nous pose pas de problème. Quelle que soit la liste, dans les trente jours de la proclamation ou le jour de la proclamation, nous serons prêts. Nous aurons une liste qui pourra servir de liste initiale. Elle sera prête. C'est à cet objectif que nous tendons.

• 1010

M. Sherman Boates: Il y a deux raisons qui pourraient retarder l'établissement de cette liste initiale. Premièrement, le COSEPAC pourrait ne pas avoir terminé ses évaluations et deuxièmement il se pourrait que le projet de loi ne soit pas immédiatement fonctionnel. Il pourrait y avoir d'autres raisons pour que cette liste ne soit pas établie, non imputables au COSEPAC.

M. David Green: Quant à votre dernière question concernant le pouvoir du ministre par opposition à celui du gouverneur en conseil, je ne suis ni législateur ni juriste et je n'y ai pas réfléchi.

Nous y avons réfléchi? Mes souvenirs sont un peu confus.

Oui, je conviens avec vous que le ministre a un calendrier à respecter, je crois que pour tout cet exercice, il y a un calendrier à respecter, comme vous l'avez dit, et ce petit détail nous a échappé.

Le président: Merci.

Madame Redman, s'il vous plaît.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Pour revenir un instant à cette question des réévaluations, qui a inventé les nouveaux critères d'évaluation utilisés? Parmi les espèces réévaluées, y a-t-il eu beaucoup de changements de classification?

M. David Green: C'est nous qui avons conçu les nouveaux critères. Nous nous sommes souvent rencontrés et l'exercice a été long. M. Boates a présidé un sous-comité spécial chargé de cette question. Nous avons rencontré des représentants de l'UICN, nous avons discuté avec des représentants de la Société canadienne pour la conservation de la nature et d'autres groupes qui ont des critères, nous avons étudié la loi américaine et d'autres régimes et nous avons décidé que la méthode de l'UICN était la plus appropriée même si nous ne l'avons pas adoptée à 100 p. 100. Nous l'avons modifiée et adaptée à notre propre usage.

Pour ce qui est des critères que nous avons conçus et approuvés, nous avons commencé par les approuver nous-mêmes, les alignant sur la liste de l'UICN, qui est internationale, mais en utilisant ce qui marche pour nous. Pour ce qui est de la nomenclature, nous avons écarté une des catégories de l'UICN: «Les espèces en danger grave de disparition». C'est une catégorie que nous n'utilisons pas. Nos catégories «en voie de disparition» et «menacée» sont très analogues aux catégories «en voie de disparition» et «vulnérable» de l'UICN. Notre catégorie «menacée» correspond à leur catégorie «vulnérable», la correspondance est maintenant facile à faire. Nous avons donc adopté cette liste. Nous l'avons envoyée au Comité de la direction générale de la faune qui l'a approuvée sous réserve de quelques petites modifications au niveau des termes, que nous avons acceptées de bonne grâce. C'est l'origine des critères.

Mme Karen Redman: Merci. Et parmi celles que vous avez réévaluées, combien ont vu leur classification changée?

M. David Green: Il y en a eu un certain nombre, mais dire que c'était dû aux nouveaux critères serait une erreur. C'était une réévaluation de l'information. Ces critères servent à maintenir une constante d'une année sur l'autre et d'un groupe taxonomique à l'autre. Nous nous sommes rendu compte avec les changements de personnel et au fil des ans que sans série de critères, le point de passage d'un groupe à un autre peut vaciller d'une année sur l'autre. Nous avons donc introduit un peu plus de fermeté si bien que certaines espèces d'une année sur l'autre sont passées d'une catégorie à une autre.

Il y a donc eu un réalignement. Un certain nombre d'espèces «menacées» se sont retrouvées «en voie de disparition», et il y aura de nouveau des réalignements mais les choses se feront d'une manière plus rigoureuse et plus conséquente.

M. David Fraser (spécialiste en espèces en voie de disparition, ministère de l'Environnement, des Terres et des Parcs, gouvernement de la Colombie-Britannique; Comité sur la situation des espèces en péril au Canada): Il est difficile de faire des belles petites catégories claires et nettes. Il est arrivé qu'une espèce se trouve dans une situation beaucoup plus grave que lorsque le rapport avait été rédigé il y a quelques années, si bien que nous avions de nouvelles données sur une menace supplémentaire ou sur une population qui avait encore plus déclinée.

Donc dans certains cas, on ne peut même pas faire de traduction directe et dire que c'est fondé sur les critères, car nous n'avons pas fait ce genre de distinction.

• 1015

M. Sherman Boates: Pour une réévaluation, il est tout simplement impossible de comparer l'ancienne liste à la nouvelle. Il ne faut pas oublier qu'avant ces réévaluations, il n'y avait pas de critères. Donc, même s'il s'agit d'une réévaluation, c'est la première fois que les critères sont appliqués.

M. David Green: En fait, il y avait des critères. Nous ne travaillions pas dans le vide. Mais il n'y avait pas de critères numériques fixés...

M. Sherman Boates: Oui. Il y avait des critères de définition par opposition à des critères numériques.

Mme Karen Redman: Je crois que ce que je veux savoir, c'est si oui ou non la majorité des espèces que vous avez réévaluées a changé. Est-ce qu'il y a eu 10 p. 100 de changement? Est-ce que c'est 5 sur...?

M. David Green: C'est plutôt de l'ordre de 5 p. 100 ou de 10 p. 100. Nous avons fixé les points de passage, les points critiques dans le système que nous adoptions et nous nous sommes assurés qu'il s'alignaient sur ce que nous pensions être les niveaux appropriés pour nos catégories préexistantes. Nous avons pensé, très bien, c'est la manière dont cela a l'air de se présenter. Il a pu y avoir quelques petits ajustements à la hausse ou à la baisse, mais nous avons adopté ces critères parce qu'ils correspondaient à ce que nous faisions déjà. Nous ne nous attendons pas à des réalignements généralisés et à des centaines de nouvelles espèces devenant menacées. Cela ne se passera pas ainsi.

Mme Karen Redman: Dans votre douzième recommandation, vous dites que le COSEPAC devrait avoir pour fonction «de fournir des conseils au ministre et au Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril sur la situation des espèces sauvages au Canada». Cette recommandation ne contredit-elle pas votre recommandation sur l'établissement de la liste des espèces en péril? Les membres du COSEPAC sont-ils d'accord avec votre proposition concernant cette liste? J'essaie de concilier ces deux propositions car il me semble que cette douzième recommandation exercerait une énorme pression sur les membres du COSEPAC les incitant à prendre en compte des considérations socio-économiques dans le cadre de leurs évaluations scientifiques.

M. David Green: Je répète encore une fois que je ne suis ni législateur ni juriste, mais selon mon interprétation de cette douzième recommandation, si le ministre ou le conseil nous demande de nouveaux renseignements sur les ours polaires ou sur la condition des ours polaires, nous sommes là pour lui donner des conseils. Nous sommes là pour en discuter et pour informer le ministre ou le Conseil de ce que nous savons. En plus des évaluations périodiques, nous ferons ces évaluations ponctuelles. Si le ministre et le Conseil veulent des renseignements complémentaires, il y a le rapport ou, si nous avons appris quelque chose d'autre, nous nous ferons un plaisir de coopérer et de transmettre ces renseignements.

L'amendement proposé retrancherait du projet de loi l'expression «d'exercer les autres fonctions». Ce sont ces «autres fonctions» que nous ne croyons pas pouvoir accepter. Que signifie «les autres fonctions»? Notre rôle c'est de fournir des conseils et d'évaluer la situation des espèces en péril. C'est tout ce que nous pouvons faire. Il serait inapproprié de nous demander d'assumer d'autres fonctions.

Voilà à quoi cela se résume, outre les évaluations elles-mêmes que nous sommes tenus de faire et que nous sommes déterminés à faire.

Mme Karen Redman: On peut donc conclure que la majorité—vous avez mentionné les deux tiers—des membres du COSEPAC sont du même avis.

Si vous me le permettez, j'aurais une dernière question, monsieur Boates. Je vais vous demander de changer de casquette pour un instant.

M. Sherman Boates: D'accord.

Mme Karen Redman: Nous avons étudié le modèle de la Nouvelle-Écosse et le président a mentionné qu'il compte de nombreux partisans. Ce projet de loi, la LEP, tout entier, et je sais bien que vous comparaissez aujourd'hui au nom du COSEPAC—vise à mobiliser de très nombreux intervenants et d'en arriver à un équilibre quelconque. Très souvent, certains expriment un certain malaise en ce qui a trait aux relations fédérales-provinciales, bien que je ne sais pas si nous pourrions aller jusqu'à dire qu'ils ne sont pas convaincus que les provinces feront ce qu'elles doivent.

Qu'est-ce qui a incité la Nouvelle-Écosse à prendre les décisions que l'on sait? Croyez-vous que les Canadiens qui étudient ce projet de loi ont des raisons de craindre que les provinces ne fassent pas ce qu'elles doivent?

• 1020

M. Sherman Boates: Nos propositions reflètent notre détermination à mettre en oeuvre l'accord et je crois que les provinces et les territoires sont empressés d'en faire autant. Ces derniers ont toutefois le choix, dans une certaine mesure, des moyens à mettre en oeuvre. Nous avons opté pour une loi distincte sur la protection des espèces en péril car nous avons jugé à ce moment-là que c'était la meilleure option.

Cela dit, il est difficile de déterminer la nécessité de lois fédérales et provinciales. Nous ne savons pas au juste comment notre projet de loi cadrera avec le projet de loi fédéral, mais il est manifeste que les deux sont nécessaires. Le problème surgira, à mon sens, si les gens estiment que les mesures, législatives ou autres, mises en place par une province donnée n'englobent pas tous les éléments de l'accord comme ils l'auraient souhaité. C'est très délicat. Je pense toutefois qu'il faut des lois fédérales et provinciales rigoureuses si nous voulons assurer la protection des espèces en péril, et nous ne devons pas l'oublier.

Mme Karen Redman: Merci.

Le président: Le suivant est M. Knutson, suivi de Mme Kraft Sloan, le président, peut-être, et M. Lincoln encore une fois.

M. Gar Knutson: Vous avez dit que tous les gouvernements tiennent beaucoup à mettre en oeuvre l'accord. Je me demande si c'est aussi vrai pour l'Ontario.

M. Sherman Boates: Je ne peux pas parler au nom de l'Ontario.

M. Gar Knutson: Vous avez dit que tous ont bien hâte de mettre en oeuvre l'accord.

M. Sherman Boates: Oui, je le crois.

M. Gar Knutson: À quand remonte l'accord?

M. Sherman Boates: Il a d'abord été signé en 1996, je crois.

M. Gar Knutson: Sergio Marchi était ministre à l'époque. Il y a de cela combien d'années? Quatre?

M. Sherman Boates: Oui.

M. Gar Knutson: De nombreux groupes environnementaux craignent que l'adoption d'une loi fédérale rigoureuse n'incite les provinces désireuses de défendre leur champ de compétence à adopter aussi des lois provinciales rigoureuses. Si nous n'avons pas une loi fédérale rigoureuse, les provinces ne placeront pas la barre aussi haut. Il s'agit aussi de savoir jusqu'où une loi fédérale peut empiéter sur ce que certains considèrent être un domaine de compétence provinciale.

J'aimerais aborder la question de la protection obligatoire des habitats. Vous avez dit qu'elle est discrétionnaire en Nouvelle-Écosse.

M. Sherman Boates: Oui.

M. Gar Knutson: Elle est discrétionnaire dans ce projet de loi. Le gouvernement a dit que si la protection de l'habitat reste discrétionnaire, c'est en partie en raison de la difficulté de donner une définition. Qu'en pensez-vous, vous ou vos collègues?

M. Sherman Boates: Je peux vous dire pourquoi, dans notre loi, la protection des habitats essentiels reste discrétionnaire. C'est essentiellement parce que, quand nous avons entrepris d'élaborer un régime juridique de protection des espèces et des habitats, nous avons constaté une si grande variété dans la biologie et les habitats qu'il nous a semblé impossible de mettre en place des mesures générales de protection des habitats essentiels. Il fallait absolument procéder espèce par espèce, habitat par habitat, cas par cas. Voilà ce qui explique notre choix.

M. Gar Knutson: Pourquoi n'avez-vous pas dit dans la loi que la protection des habitats essentiels, espèce par espèce, cas par cas, serait obligatoire?

M. Sherman Boates: L'autre élément c'est que si bien des espèces sont en péril pour des raisons liées à l'habitat, ce n'est pas le cas de toutes les espèces. Il y a diverses façons d'interpréter le caractère discrétionnaire de cet article.

M. Gar Knutson: D'accord. Pourriez-vous préciser dans la loi que les habitats essentiels seront protégés si le besoin existe?

M. Sherman Boates: Oui, ce serait un bon libellé.

• 1025

M. Gar Knutson: Pour ce qui est de la liste, on a dit que si certains scientifiques ne veulent pas se prononcer sur les facteurs socio-économiques, c'est que seuls leurs travaux scientifiques les intéressent. Ils veulent pouvoir dire si une espèce est en péril ou non. Ils ne voulaient pas avoir à se préoccuper de savoir s'ils allaient faire disparaître tout un secteur de l'économie si l'on signalait dans la loi qu'une espèce est en péril. Les scientifiques veulent se tenir à l'écart d'un débat sur les conséquences socio-économiques de la mise en oeuvre de la loi.

Or, après avoir lu vos recommandations, je ne suis plus certain que ce soit le cas.

M. David Green: Nous souhaitons en fait un compromis entre deux positions diamétralement opposées. Si la liste du COSEPAC fait automatiquement partie de la loi, comme l'ont préconisé certains groupes, alors ceux qui ont des préoccupations d'ordre social, politique et économique n'auraient aucun recours que tenter d'exercer des pressions sur le COSEPAC ce qui colorerait la nature de tous ces travaux.

Le COSEPAC s'efforce tout simplement d'évaluer la condition des espèces. Dès que le COSEPAC cédera à un groupe de pression politique et acceptera de faire ce qu'il souhaite, alors la fiabilité des résultats sera compromise. Pour faire plaisir à un groupe, on risque de déplaire à plusieurs autres groupes. Nous ne voulons pas jouer ce jeu-là.

Il faut que le COSEPAC puisse travailler en toute indépendance pour que chacun possède les mêmes informations, peu importe qu'elles leur plaisent ou qu'elles les incitent à agir de telle ou telle façon. Le COSEPAC et tous les autres intéressés sauront quelles seront les conséquences si les habitats continuent d'être exploités de telle ou telle façon, ou si la pression de la chasse ou de toute autre activité est maintenue. Vient ensuite la question de savoir ce que nous pouvons faire concrètement. Ce sont les meilleurs conseils que nous pourrons vous fournir en nous appuyant sur nos recherches, réalisées en toute indépendance, sur les espèces et leurs habitats. Ce sont les meilleurs renseignements que vous pourrez obtenir sur la condition des espèces. Voilà pourquoi nous disons que les résultats de ces travaux doivent servir à la préparation de la liste qui figurera dans la loi. Vous ne pourrez pas faire mieux.

Votre intervention à vous se situe dans un autre domaine. Des gens viennent vous dire de ne pas inscrire tout de suite sur la liste l'espèce en question, parce que leur entreprise risque de faire faillite et qu'ils ne pourront pas nourrir leurs enfants ou parce que c'est important pour eux à certains autres égards. On peut alors discuter pour savoir si c'est dans le domaine du rétablissement, on peut discuter des solutions possibles aux problèmes que nous avons identifiés. Cela n'est pas de notre ressort. Je n'ai pas ce qu'il faut pour cela. Je n'ai aucun savoir-faire dans ce domaine. Je ne suis pas un élu. Je ne peux pas parler au nom de la population ni au sujet d'anciens règlements. Je ne peux pas le faire.

Nous devons donc séparer l'élément production de renseignements, ce qui doit être à la base de la création de la liste, du processus d'établissement même de la liste, qui incombe au gouvernement. C'est au gouvernement de le faire.

Cela dit, le gouvernement devrait aussi recueillir ces conseils, lorsqu'il dresse la liste préliminaire, et il devrait également justifier sa décision lorsqu'il choisit de ne pas inscrire une espèce sur la liste.

Nous estimons—et cette opinion est très catégorique au sein du COSEPAC—que le pouvoir discrétionnaire du gouverneur en conseil, quant aux espèces à inscrire sur la liste, est trop vaste, que la liste devient légale, mais il est possible de décider de ne pas inscrire une espèce et de le justifier. Dites-le-nous, et tout le monde sera au courant. Il est probable que si le ministre ou le gouverneur en conseil le fait, il faudra de toute manière qu'il s'explique. Disons-le donc dès le départ.

• 1030

On nous a dit—et nous sommes d'accord—qu'il faut être ouvert et transparent. Bien sûr, soyons ouverts et transparents dans tout ce processus.

M. Gar Knutson: Pourrais-je demander à M. Fraser de dire ce que la Colombie-Britannique fait pour mettre en oeuvre l'accord?

M. David Fraser: Je commencerai par dire que je suis ici à titre de membre du COSEPAC, et non à titre de représentant de la Colombie-Britannique, mais je peux vous dire que nous avons examiné certains des programmes, des lois et des politiques actuellement en vigueur. J'ai identifié un certain nombre d'éléments qu'il faudra modifier, mais nous n'avons pas choisi de dire comme la Nouvelle-Écosse que nous aurons probablement besoin d'une loi concernant spécialement les espèces en voie de disparition.

M. Gar Knutson: Au cours des quatre dernières années, qu'avez-vous fait?

M. David Fraser: Nous avons mis en oeuvre un programme appelé Stratégie d'identification de la faune dans le cadre de notre Code d'exploitation forestière. Il nous permet d'identifier des endroits spécifiques qui constituent l'habitat d'espèces en voie de disparition. Nous avons changé notre Loi sur les réserves écologiques pour en renforcer les dispositions et assurer une plus grande protection de ces habitats et nous l'avons alignée sur notre Loi sur les parcs étant donné qu'un bon nombre de nos réserves écologiques ont été constituées spécifiquement en vue de gérer des habitats essentiels pour des espèces en voie de disparition. Nous avons pris également toute une série d'autres initiatives, renforçant notamment notre centre de données sur la conservation afin qu'il soit mieux en mesure d'évaluer les espèces et de nous donner un avertissement préalable.

L'un des problèmes inhérents au processus du COSEPAC est qu'il est très prudent et très lent. Il y a un certain nombre d'espèces en péril dont le COSEPAC ne pourra pas s'occuper avant quelque temps. Ainsi, pour ce qui est de certaines dispositions de l'accord visant à faire en sorte que d'autres espèces ne deviennent pas en péril, nous tentons de les identifier au moyen de certaines de ces initiatives.

M. Gar Knutson: Merci.

Le président: Merci.

Mme Kraft Sloan, la présidence et M. Lincoln.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président. Je m'excuse de mon retard.

Vous avez peut-être déjà répondu à ces questions, mais vous pourriez peut-être m'aider en apportant certaines précisions.

Quand je regarde votre liste, j'y vois six catégories. Jetons un coup d'oeil à la rubrique «en voie de disparition». Quand vous déclarez qu'une espèce est en voie de disparition, vous vous fondez sur des critères biologiques, n'est-ce pas?

M. David Green: En effet.

Mme Karen Kraft Sloan: Si vous identifiez une espèce comme étant en voie de disparition, vous vous fondez donc sur des critères biologiques, c'est ainsi que le COSEPAC fonctionne actuellement.

M. David Green: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Et d'après le libellé actuel du projet de loi, je suppose qu'on se fonderait également sur des critères biologiques.

M. David Green: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Si la liste que le COSEPAC a dressée devenait la liste officielle, comment se pourrait-il qu'une espèce désignée comme étant en voie de disparition ne le soit pas à partir de critères biologiques?

M. David Green: Nous espérons qu'il n'en sera pas ainsi. Nous estimons cependant qu'il y a un grand risque que si les gens veulent avoir leur mot à dire, ils le feront. Si le COSEPAC est autorisé à dresser une liste officielle—nous devons y être autorisés—nous deviendrons alors un organisme de réglementation; nous adopterons des mesures qui auront immédiatement force de loi. Cela sera toute une initiative constitutionnelle.

Les gens méritent de se prononcer sur les règlements et les lois qui les touchent et ils ont le droit de le faire. Ils vont exiger de pouvoir intervenir auprès du COSEPAC, d'avoir la possibilité de nous parler afin d'essayer de nous convaincre de leurs points de vue. Ils auraient le droit de le faire. Ils pourraient ainsi entraver notre travail.

Nous pouvons maintenant dire: «Merci d'être venus, mais nous ne tiendrons pas compte de votre opinion». Plus tard, nous ne pourrons cependant pas le faire. C'est une conséquence que nous craignons de voir découler du fait que la liste du COSEPAC obtiendrait immédiatement force de loi. Ce serait agréable, ce serait bien. Je pense qu'il serait très bon que cela se produise, car c'est cette information qui entrerait dans la liste officielle de toute manière. Alors voilà. C'est ainsi que les choses devraient être. Mais nous ne pouvons pas faire cela. On ne devrait pas nous conférer cette responsabilité. Personnellement, je ne me sentirais pas à l'aise. C'est pourquoi je ne suis pas législateur et je ne m'occupe pas de réglementation.

Mme Karen Kraft Sloan: Non, je sais que vous n'êtes pas législateur, et vous n'êtes pas économiste...

M. David Green: Je ne suis pas économiste.

Mme Karen Kraft Sloan: ...et vous n'êtes pas sociologue. Vous êtes biologiste.

• 1035

M. David Green: Je suis biologiste et je sais comment il faut faire. C'est ce que je fais et c'est ce que nous faisons au COSEPAC.

Mme Karen Kraft Sloan: Je pense qu'un certain nombre de personnes sont préoccupées de voir que le projet de loi accorde énormément de pouvoir discrétionnaire au gouverneur en conseil, quand il décidera s'il écoutera vos recommandations avant d'établir une liste ayant force de loi, et donc s'il utilisera ces recommandations pour établir la liste en question.

M. David Green: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Si la décision de désigner une espèce comme étant en voie de disparition est une décision fondée sur des données biologiques—et c'est toujours le cas—la décision quant aux initiatives concernant cette espèce, si elle est en voie de disparition, est une décision d'une nature tout à fait différente.

M. David Green: En effet. Je suis complètement d'accord avec vous.

Mme Karen Kraft Sloan: Comment pourrions-nous modifier le projet de loi de manière à faire en sorte que les décisions fondées sur des données biologiques seront prises par des gens qui connaissent ces questions et ont une expérience en la matière?

Nous devons nous assurer d'avoir une liste officielle, parce que rien ne se fera à moins que nous ayons des espèces inscrites sur une liste. Vous aurez beau faire le meilleur travail biologique dans le monde entier—et je sais que nous avons un grand nombre d'excellents scientifiques dans notre pays, parce que j'ai travaillé avec beaucoup d'entre eux—vous aurez beau faire tout cet excellent travail, rien n'en résultera à moins que les espèces concernées figurent sur une liste officielle.

Si la décision de désigner une espèce comme étant en voie de disparition est fondée sur des données biologiques, il faudrait identifier cette décision comme telle. Pour ce qui est de la décision d'intervenir, c'est une décision d'une tout autre nature.

Je me demande donc quelles recommandations vous feriez pour que nous puissions modifier le projet de loi de manière à permettre que les décisions fondées sur des données biologiques soient prises par des spécialistes en biologie, et que les autres décisions, concernant les initiatives à prendre au sujet des espèces en question, soient prises en tenant compte également d'autres considérations.

M. David Green: Je suis d'accord avec vous, et plus tôt, peut-être avant votre venue, j'ai dit exactement cela. Le COSEPAC peut dresser sa liste, et si cette liste n'a pas force de loi, alors le reste du projet de loi n'est plus qu'encre et papier.

Mme Karen Kraft Sloan: Exactement. Il semble donc qu'il y ait une légère contradiction.

M. David Green: Donc les recommandations que vous trouverez dans notre mémoire rejoignent vos propos.

Comme M. Lincoln l'a dit, nous avons omis d'arrêter un délai pour les décrets en conseil. Je n'y avais pas pensé. Ce serait une bonne chose.

Nous avons donc dans notre texte une recommandation qui donnerait à la liste du COSEPAC force de loi. Ce n'est pas nous qui la lui donnerions, ce serait le gouverneur en conseil. Il faudrait aussi une disposition autorisant un débat public dans les cas où l'on voudrait demander une exemption motivée.

Mme Karen Kraft Sloan: Mais comment le gouverneur en conseil va-t-il donner force de loi à la liste? Comment allons-nous nous assurer qu'elle devienne la liste officielle, que toutes vos recommandations soient retenues parce qu'elles sont fondées sur des données biologiques?

Il me semble que nous devons créer un pare-feu. Je dois être à l'écoute d'un grand nombre de gens, et cela comprend les simples citoyens. Lorsque je siège au comité permanent, je représente l'intérêt public...

M. David Green: C'est exact.

Mme Karen Kraft Sloan: ...et lorsque je siège à la Chambre des communes, je représente l'intérêt public. Je dois donc écouter tout le monde. Vous faites valoir pour votre part le point de vue des biologistes, et j'en tiens compte.

M. David Green: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Donc, ce que je veux savoir, et il faudra peut-être en discuter plus longuement, c'est comment nous pourrions créer un pare-feu qui permettrait à des gens comme vous de prendre les décisions voulues relativement aux espèces, tout en prévoyant un processus qui nous permettrait de créer une liste dont la valeur au sens de la loi serait incontestable.

Vous dites que cela pose un gros problème, affirmation qui contredit à nombre d'égards vos déclarations concernant ceux qui devraient établir la liste. Il nous faut une sorte de pare-feu qui permettra à des gens comme vous de prendre ces décisions et qui donnera force de loi à cette liste, et il faut prévoir aussi les autres processus, qui ont trait à la protection des espèces, aux plans de rétablissement et le reste, et tout cela se déroulerait dans un cadre de discussion plus large.

M. David Green: J'aimerais que cela se fasse.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui, monsieur Fraser.

M. David Fraser: Je pense que les modèles que nous avons créés pour les plans de rétablissement, toutes ces mesures, rejoignent cela à certains égards.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui.

M. David Fraser: L'équipe de rétablissement a pour responsabilité de déterminer la capacité biologique qu'a l'espèce de se rétablir et les éléments requis pour ce faire. La première étape est la création d'une stratégie de rétablissement. Il faut ensuite définir les mesures biologiques.

• 1040

Rien dans ce projet de loi n'interdirait aux ministres ou aux autorités de prendre cette mesure, peu importe si l'espèce figure sur la liste des espèces en péril, la liste officielle, ou non. On pourrait donc en fait mettre en oeuvre cette stratégie initiale, que l'espèce figure sur la liste ou non. Si l'espèce figure sur la liste du COSEPAC, je pense que la plupart des autorités vont se pencher sur le potentiel biologique de rétablissement de l'espèce.

Mme Karen Kraft Sloan: Mais le problème tient au fait que si nous avons un texte de loi qui énonce certaines choses, dont l'une est la liste officielle qui déclenche toute une série d'autres mesures, si l'espèce ne figure pas sur cette liste, on ne fera rien, parce qu'on invoquera un texte de loi qui stipule ce que nous devons faire.

M. David Green: Absolument. Et c'est à cela que nous voulons en venir ici, dans nos recommandations. Vous trouverez ici des recommandations et des amendements à cette partie du projet de loi. Nous ne disons pas dans notre mémoire qu'il faut accepter cette partie telle quelle.

J'aimerais qu'il y ait ce mur pare-feu. J'aimerais que notre liste ait force de loi. J'aimerais m'assurer que le gouverneur en conseil y voie. Je dois lui donner une certaine marge de manoeuvre—il va l'exiger de toute façon. J'aimerais que cela se fasse.

Il existe un moment où, nous, au COSEPAC, devons mettre un terme à notre réflexion. Nous ne cessons de répéter: le COSEPAC ne s'occupe pas de rétablissement des espèces. Nous ne faisons rien du genre. Dès qu'il s'agit de rétablissement, notre action s'arrête. Bon nombre de ces dispositions se retrouvent sous cette rubrique.

Alors que faites-vous? On a désigné une espèce en péril, elle figure sur la liste officielle, alors que faites-vous? À ce moment-là, vous pouvez nous demander notre avis à nous, les scientifiques, mais hors du cadre du COSEPAC, car à partir de ce moment-là, le COSEPAC lui-même cesse ses travaux. Donc nous nous arrêtons.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien. Je crois donc que vous devez dire comment on va ériger ce mur pare-feu.

M. Marco Festa-Bianchet (coprésident, Département de biologie, Université de Sherbrooke, Comité sur la situation des espèces en péril au Canada): Je pense que ce que nous voulons dire ici, c'est que nous aimerions que notre liste devienne la liste officielle, et la liste du COSEPAC existera aussi. Je pense qu'il est important de le dire, à savoir que les gens peuvent aussi aller voir quelles sont les espèces que nous jugeons être en péril sur le plan biologique.

Ce que nous proposons ici, c'est une formule qui se situe à mi-chemin entre l'idée selon laquelle notre liste devrait automatiquement devenir la liste officielle, et la manière dont on semble avoir arrêté les choses dans le projet de loi, à savoir que le ministre décidera quelles espèces figureront sur la liste. Nous disons que le gouverneur en conseil doit décider quelles espèces de la liste du COSEPAC n'entrent pas dans la liste des espèces protégées et dire pourquoi.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui. Le problème tient au fait que vous parlez d'un système de reddition de comptes qui requiert la participation du public. Comme nous le savons tous, c'est très difficile. Il y a peu de gens qui font ce genre de travail, et ils sont au bout de leur rouleau.

Il est très difficile d'exiger des comptes des gouvernements sur le plan environnemental, sur à peu près n'importe quoi. Ce que nous devons donc faire, c'est nous assurer que le projet de loi contient un mécanisme de reddition de comptes, et nous devons nous assurer aussi qu'il existe de bonnes possibilités ainsi que des mécanismes qui faciliteront la participation du public, ce qui est très difficile.

Je pense que le plus simple encore, c'est peut-être de voir comment nous pourrions donner force de loi à la liste du COSEPAC, et de là ériger un mur pare-feu qui vous permettra de faire votre travail à l'abri des pressions.

M. Sherman Boates: J'aimerais faire une suggestion, qui ne reflète pas la position de qui que ce soit.

On pourrait songer à un scénario où l'exemption ne soustrairait pas l'espèce à l'application de tout le projet de loi. Je pense que les réserves des gens tiennent largement au fait que, dans certains cas, c'est l'article sur les interdictions qui est à l'origine du principe de l'exemption.

Par exemple—et je ne dis pas qu'on a tort ou raison, ce n'est qu'une suggestion—on pourrait exempter quand même une espèce d'une partie des interdictions mais exiger quand même que la planification du rétablissement prévue dans la loi s'applique à cette espèce, et cela pourrait s'appuyer éventuellement sur les interdictions, parce que si vous avez des gens qui cherchent une solution constructive à ce problème, cela pourrait aussi apaiser les préoccupations relatives aux interdictions.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui, et je crois que c'est important. Je pense que nous devons démontrer un peu plus d'imagination ici pour voir comment nous pourrons régler de vrais problèmes—non des problèmes politiques, mais de vrais problèmes.

M. David Fraser: Je suis d'accord, et je pense qu'il y a d'autres groupes, autres que le COSEPAC, à qui on devrait poser cette question.

Mme Karen Kraft Sloan: Absolument, et je le ferai.

M. David Fraser: C'est bien ce que j'ai pensé.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame Kraft Sloan.

• 1045

Monsieur Green, dans la réponse que vous avez donnée plus tôt à M. Knutson, vous avez dit que vous ne vouliez pas mettre les scientifiques dans une situation où ils seraient obligés de céder devant les groupes de pression. Est-ce exact?

M. David Green: Oui.

Le président: Connaissez-vous des scientifiques qui courberaient l'échine devant des groupes de pression?

M. Julian Reed: J'en connais.

Le président: Pouvez-vous les désigner?

M. David Green: Vous voulez savoir leur nom?

Le président: Oui.

M. David Green: Je ne veux pas les mettre dans cette position. Je ne peux citer aucun nom. Je ne veux pas être l'objet de lobbying de la part d'un groupe de... Je veux pouvoir prendre mes propres décisions. Je ne veux pas avoir à faire un choix. Je ne veux absolument pas me trouver dans cette situation. Je ne veux pas courber l'échine devant des groupes de pression. Je n'en ai pas l'intention et je ne me laisserais pas influencer, un point c'est tout.

Le président: Vous sous-entendez donc que des scientifiques pourraient oublier une réputation de toute une vie ainsi que le résultat d'enquêtes et d'études en cédant à l'influence d'un groupe de pression. Est-ce ce qui se passe dans la réalité?

M. David Green: La réalité?

Le président: Vous avez des collègues qui agissent ainsi?

M. David Green: La réalité, c'est un monde où vivent toutes sortes de gens.

Le président: Vous ne répondez pas à ma question.

M. David Green: Quelque part dans le monde réel, il y a des gens qui cèdent à l'influence.

Le président: Est-ce ainsi que travaille un scientifique?

M. David Green: Non, la plupart du temps, les scientifiques ne travaillent pas de cette façon.

Le président: Pourquoi dans ces conditions vous inquiétez-vous au sujet de scientifiques susceptibles de céder devant des groupes de pression?

M. David Green: Le problème, ce n'est pas le fait de céder devant ces groupes; c'est le temps que cela prend. Cela nous distrait des discussions qu'il faut tenir. C'est l'ingérence que cela représente dans les efforts en vue de mener de vraies activités scientifiques, de faire de vraies évaluations. Nous n'en avons pas besoin, surtout si nous ne comptons pas céder à ce genre de pression, et nous ne le ferons pas.

Le président: D'après votre document, vous semblez partagés sur ce point. Je ne pense pas que vous parliez au nom de tout votre groupe.

M. David Green: Non, nous n'étions pas partagés sur le fait que le COSEPAC doit rester apolitique et ne pas faire l'objet de lobbying. Il n'y a aucune dissension sur ce point.

Le président: Vous en êtes certain?

M. David Green: Oui.

Le président: Vous êtes tous d'accord sur ce point?

Les témoins: Oui.

Le président: Pourquoi? N'y a-t-il pas d'autres avis?

Croyez-vous également que des scientifiques pourraient céder à des pressions politiques pour une raison quelconque?

M. David Fraser: Il ne faut pas créer un système où nous n'obtiendrons pas la meilleure opinion scientifique indépendante quant à l'état de l'espèce. Il faut permettre à ces personnes d'en arriver à une décision sans devoir se demander si telle ou telle donnée scientifique a une incidence sur la question de savoir si un enfant vivant dans une collectivité tributaire de l'exploitation forestière mangera à sa faim ou non.

Le président: Puis-je vous rappeler que M. Leslie Harris de l'université Memorial n'a pas cédé aux pressions politiques lorsqu'il a préparé son rapport sur la morue.

M. Marco Festa-Bianchet: Si je peux ajouter quelque chose?

Le président: Et pourtant, il a fallu attendre deux ans, en raison de considérations d'ordre socio-économique, pour invoquer le moratoire.

Désolé, monsieur Festa-Bianchet.

M. Marco Festa-Bianchet: Lorsqu'on parle de s'incliner devant un groupe de pression, il ne s'agit pas d'un scientifique qui possède des renseignements et les utilise à mauvais escient parce qu'il cède aux pressions. Il s'agit de pressions susceptibles d'être exercées lors de toutes les étapes de la préparation d'un rapport du COSEPAC. Si un groupe souhaitait qu'un certain statut soit attribué—je parle de groupes qui ne recherchent pas nécessairement une protection—il faudrait éviter dans la mesure du possible que ces groupes puissent intervenir auprès de l'auteur du rapport, ou au niveau de la compétence provinciale qui est censée fournir l'information à l'auteur du rapport, au niveau du président qui choisit un auteur...

M. David Fraser: Ou même de savoir si le COSEPAC obtient seulement le financement nécessaire à la production du rapport.

M. Marco Festa-Bianchet: C'est exact. Il y a de nombreuses façons de s'ingérer dans le processus du COSEPAC. Il ne s'agirait pas de groupes de pression dans la mesure où ils mentiraient au sujet des conditions dans lesquelles se trouve l'espèce en question, mais ils risqueraient de battre en brèche notre accès à l'information nécessaire pour prendre une décision. C'est ce que nous voulons dire.

Le président: Vous voulez dire que l'industrie vous empêcherait d'avoir accès aux océans pour déterminer si une espèce est en voie de disparition?

M. Marco Festa-Bianchet: Non, mais les responsables pourraient exercer des pressions auprès des représentants provinciaux qui sont censés fournir ces renseignements; ils peuvent exercer des pressions sur l'auteur du rapport ou menacer de poursuivre certaines des personnes concernées. Voilà le genre de chose qui les préoccuperait.

Le président: J'ai peut-être une meilleure opinion que vous des scientifiques. Est-ce possible?

• 1050

M. Sherman Boates: Marco a voulu dire également que l'on peut tenter d'influer sur les scientifiques proprement dits, mais qu'il y a également ingérence dans le processus lors de l'évaluation. Je pense que nous mélangeons les deux.

Le président: À la recommandation numéro 20, s'agit-il d'un oubli ou est-ce de propos délibéré que l'on a omis dans cette liste les espèces préoccupantes?

M. David Green: Oui, on n'en fait pas état. C'est peut-être un oubli, je pense, lors de la rédaction de cette recommandation. Les espèces préoccupantes exigent un niveau de protection différent. Il s'agit de la liste des espèces en voie de disparition, des espèces en péril, et les espèces préoccupantes représentent une catégorie différente. Ces espèces n'ont pas le même statut. Cela représente donc la liste des espèces en voie de disparition, et les espèces préoccupantes constituent une autre catégorie.

M. Sherman Boates: En fait, vous avez laissé tomber l'annexe 2.

M. David Green: Il suffira de la rajouter au crayon au besoin. C'est un oubli. Merci de me l'avoir signalé.

Le président: Pouvez-vous nous présenter un cas où, dans le cadre de l'article 22, le ministre pourrait recommander de faire exactement le contraire de ce que vous avez demandé par voie de règlement? Dans quel cas cela se produirait-il?

M. David Green: J'espère que les choses se passeront comme on l'a proposé. La liste du COSEPAC est considérée... Il a établi la liste officielle. Sauf s'il s'agit d'une espèce qui suscite énormément de préoccupations d'ordre social, certaines interdictions une fois imposées compromettront les moyens de subsistance... Il faut en discuter davantage. Il faut réfléchir un peu plus longtemps aux répercussions de telles mesures. S'il existe une telle justification, après consultation et compte tenu du rapport du COSEPAC, et après avoir parlé aux personnes pertinentes, le ministre pourrait avoir ce pouvoir discrétionnaire.

Je n'enlèverais pas au ministre le droit de prendre cette mesure, d'agir avec prudence et de l'expliquer en détail, en disant que cela ne se trouve pas dans la liste—ainsi, nous serions au courant. C'est ce que font les gouvernements. Ils le font. Cela fait partie du rétablissement. Ce qui est important, c'est la façon dont on traite cette information.

Voilà le genre de chose que j'entrevois. Cela n'est pas de mon ressort. La décision appartient au ministre.

Je dis simplement que si l'on prend cette mesure... nous avons documenté de façon minutieuse, justification à l'appui, ce qui devrait se trouver sur la liste. Si vous n'avez pas l'intention de l'inscrire sur la liste, le document antérieur, expliquez pourquoi. C'est acceptable. Nous sommes donc au courant.

Le président: Le ministre agirait donc d'un point de vue entièrement différent du vôtre et serait motivé par des considérations qui ne sont pas scientifiques. Est-ce ce que vous voulez dire?

M. David Fraser: Je peux peut-être répondre à cette question. Disons que, par exemple, en se fondant sur les meilleurs renseignements biologiques dont il dispose, le COSEPAC décide que certaines espèces d'insectes sont en voie de disparition du point de vue biologique, mais que cette espèce est porteuse des maladies qui risquent d'être mortelles pour l'homme. On pourrait bien ne pas vouloir imposer d'interdiction contre l'élimination de cette espèce.

Le président: Pouvez-vous nommer cette espèce?

M. David Fraser: Non. C'est un exemple hypothétique, mais il n'est pas impossible d'imaginer ce genre de chose.

M. Sherman Boates: Il n'en demeure pas moins que cette espèce est en voie de disparition. Nous ne pouvons pas ne rien faire à ce sujet.

Le président: Eh bien, tant que nous n'aurez pas indiqué de quelle espèce il s'agit, tout cela reste hautement hypothétique, comme vous le dites.

• 1055

M. David Green: L'insecte porteur de la variole fait partie d'une espèce en voie de disparition.

Le président: Nous donnons maintenant la parole à M. Lincoln pour le deuxième tour de questions.

M. Clifford Lincoln: Monsieur Boates, vous connaissez bien la législation de la Nouvelle-Écosse et la situation dans cette province. En Nouvelle-Écosse, l'établissement d'une liste scientifique devient automatique et l'indépendance du comité est garantie par la loi. Sauf erreur, 17 espèces figurent sur la liste en Nouvelle-Écosse.

M. Sherman Boates: Il y en a dix actuellement, et une deuxième série est prête pour l'inscription. Ce sont...

M. Clifford Lincoln: Peu importe le nombre.

M. Sherman Boates: Bon, d'accord.

M. Clifford Lincoln: Êtes-vous membre du comité là-bas en Nouvelle-Écosse?

M. Sherman Boates: Oui.

M. Clifford Lincoln: Vous-même et vos collègues avez-vous fait l'objet de démarches de lobbying en Nouvelle-Écosse?

M. Sherman Boates: Non.

M. Clifford Lincoln: C'est intéressant. Il n'y a pas de lobbying en Nouvelle-Écosse, mais il y en aurait ailleurs. C'est devenu quasiment comme le Bonhomme Sept Heures, le lobbying. Je me demande dans quelle mesure c'est vrai. Chose certaine, c'est hypothétique, si je peux me permettre, car il n'y a aucune preuve qu'il y en aurait. En Nouvelle-Écosse, le seul endroit où l'inscription est faite automatiquement par un organisme indépendant, il a été prouvé au contraire qu'il n'y a pas de lobbying.

M. Sherman Boates: Puis-je répondre à cela, et aussi à une autre question que vous avez posée et à laquelle je n'ai pas eu l'occasion de répondre?

M. Clifford Lincoln: Oui.

M. Sherman Boates: Je trouve qu'il est très utile de comparer l'expérience de la Nouvelle-Écosse à l'expérience nationale, mais il y a quand même deux ou trois questions à laquelle il faut s'attarder, et que j'ai tenté de mentionner. Premièrement, nous avons lancé cela juste après la conclusion de l'accord et nous apprenions donc au fur et à mesure. C'est une première réserve.

Il faut aussi faire une autre réserve relativement à l'ordre de grandeur, et je pense que cela s'applique également à ce que vous dites au sujet du comité. Notre comité compte cinq scientifiques. Nous avons affaire à un plus petit nombre d'espèces, réparti sur un territoire plus restreint. Je ne dis pas cela en guise d'excuse. Je dis seulement que l'ordre de grandeur est important, parce que quand il s'agit d'un pays tout entier, de centaines d'espèces et d'un comité beaucoup plus important, tout cela a d'importantes conséquences pour le projet de loi fédéral, alors que ces considérations ne sont pas nécessairement aussi importantes au niveau local. Je trouve qu'il faut vraiment apporter quelques précisions là-dessus.

M. Clifford Lincoln: Combien de personnes font partie de votre comité?

M. Sherman Boates: Il y a cinq scientifiques. Le comité est présidé par moi-même et je n'ai pas droit de vote.

M. Clifford Lincoln: C'est un comité de cinq scientifiques. Le COSEPAC actuel comprend 27 ou 28 membres, si je ne me trompe.

M. David Green: Il y en a 28.

M. Clifford Lincoln: Combien d'entre eux représentent les pouvoirs publics?

M. David Green: Il y a des représentants de quatre organismes fédéraux, des dix provinces et des trois territoires, pour un total de dix-sept.

M. Clifford Lincoln: Il y a dix-sept représentants des pouvoirs publics.

M. David Green: Et il y a peut-être aussi des représentants des gouvernements parmi les autres, mais la plupart n'en sont pas.

M. Clifford Lincoln: D'après mes chiffres, il y en a 24 qui représentent des organismes gouvernementaux ou quasi-gouvernementaux, et quatre qui sont de l'extérieur complètement. Cela donne donc 24 et quatre.

M. David Green: Comment arrivez-vous à ces chiffres?

M. Clifford Lincoln: Ce sont les renseignements qu'on m'a donnés. Vous dites qu'il y en a dix-sept, mais vous ajoutez qu'il y en a peut-être parmi les autres qui représentent les gouvernements. Y en a-t-il ou n'y en a-t-il pas?

M. David Green: Il y en a dix-sept qui représentent certainement les pouvoirs publics. Parmi les autres, je vais passer en revue les groupes de spécialistes: pour les reptiles et les amphibiens, aucun représentant gouvernemental; pour les oiseaux, il y a actuellement des gens du gouvernement...

M. Clifford Lincoln: Bon, cela fait dix-huit.

M. David Green: ...pour les mammifères, personne du gouvernement...

M. David Fraser: Il y en a un du gouvernement.

M. David Green: Moitié-moitié.

M. Clifford Lincoln: Nous en sommes à dix-neuf.

M. Marco Festa-Bianchet: Il y a deux coprésidents. Je représente l'université...

M. Clifford Lincoln: Quoi qu'il en soit, d'après mes renseignements, il y en a vingt-quatre et quatre. Disons que c'est dix-neuf et sept.

M. David Green: Les représentants gouvernementaux sont plus nombreux que les autres.

M. Clifford Lincoln: Dans le projet de loi C-65, il y avait une disposition stipulant que la moitié viendrait de l'extérieur du gouvernement et que tous les membres seraient approuvés par la Société royale du Canada. Croyez-vous que nous devrions adopter la même formule en l'occurrence?

M. David Green: La formule actuelle fonctionne bien pour nous. Les représentants des diverses instances apportent tout un bagage d'information. Ce sont eux et les scientifiques de leur personnel qui font une bonne partie du boulot et qui trouvent l'information. Leurs instances respectives sont éventuellement visées par les plans de rétablissement.

• 1100

Qui est membre du COSEPAC? Peu m'importe, pourvu que les gens soient compétents, capables de faire le travail et qu'ils apportent un bagage d'information. Le modèle actuel répond bien à ces critères. Le fait qu'ils soient des représentants des instances gouvernementales ne joue pas vraiment, une fois que nous fermons la porte et nous assoyons autour d'une table. Le fait que Sherman vient de la Nouvelle-Écosse... quand nous nous réunissons, nous lui demandons ce qui se passe là-bas en Nouvelle-Écosse. Si nous demandons à Sherman quelle est l'opinion du gouvernement de la Nouvelle-Écosse, cela n'est pas pertinent. Qu'en pense votre directeur? Cela n'a pas d'importance. Si j'entends par contre quelqu'un discuter de populations de Nouvelle-Écosse qu'il connaît bien et au sujet desquelles il a recueilli des renseignements pertinents...

Il n'est pas là pour énoncer le point de vue de son gouvernement, pour être son porte-parole. Il est là à titre de scientifique, de spécialiste. Et cela fonctionne bien pour nous. Cela nous permet d'obtenir l'information qu'il nous faut. Nous pouvons compter sur les spécialistes dont nous avons besoin pour discuter de tout cela. Avec le temps, il y a eu autour de la table de plus en plus de gens de l'extérieur des gouvernements. Quand le COSEPAC a été créé il y a 20 ans ou plus, tous ses membres étaient des représentants des gouvernements. La situation a beaucoup changé. Les groupes spécialisés et les membres indépendants ne représentent pas les pouvoirs publics et ils apportent un bagage différent. Nous avons maintenant de plus en plus d'universitaires, ce qui n'était pas le cas il y a 10 ans.

Comment trouver les gens qu'il nous faut pour obtenir tout l'éventail de renseignements nécessaires pour traiter d'une immense diversité d'espèces... il y a une manière de le faire et il pourrait y en avoir d'autres. Pourvu que nous ayons les outils qu'il nous faut, nous n'avons pas d'objection.

M. Sherman Boates: Je veux intervenir exactement sur le même point, à savoir qu'il y a eu au sein même du COSEPAC tout un débat sur ce qui constituerait le comité idéal aux yeux des membres du comité. En bref, il a été décidé que le modèle actuel est essentiellement satisfaisant. Il suffirait de remédier à quelques lacunes, par exemple la question de l'influence gouvernementale sur le comité. Il nous semblait que c'était une meilleure solution que d'adopter un modèle complètement différent et d'aller chercher des scientifiques, très compétents mais dénués d'expérience, et d'écarter certains employés du secteur public qui sont justement les personnes les plus compétentes au pays pour se charger de ce travail. Nous avons donc fait des suggestions sur la façon de s'y prendre pour que les représentants gouvernementaux au comité soient mieux en mesure d'agir à titre de scientifiques et non pas de représentants de leurs instances politiques respectives.

Par ailleurs, il y a dans tout cela une dimension régionale. Les représentants des diverses instances constituent une proportion importante du comité: il y a quelqu'un de l'est, quelqu'un du milieu, quelqu'un de l'ouest. C'est un élément très important, parce que nous avons ainsi un tableau complet de l'ensemble de cet immense pays, et non pas seulement des villes universitaires.

M. Clifford Lincoln: Ne vous méprenez pas sur mon intervention. Je n'ai rien contre les employés du secteur public. Au contraire, j'ai beaucoup d'estime pour le comité. Il s'agit de savoir quelle est la meilleure formule pour en faire un organisme indépendant. C'est de cela qu'il s'agit. Dans le projet de loi C-65, il me semble qu'on proposait une excellente formule: la moitié des membres des pouvoirs publics, et l'autre moitié de l'extérieur, tous devant être approuvés par la Société royale du Canada, qui est au-dessus de tout soupçon, de manière à garantir qu'aux yeux du public, l'organisme soit à la fois le plus compétent possible et le plus indépendant possible.

Vous dites qu'il n'y a pas de problème, monsieur Green. Quand vous vous réunissez, vous n'avez plus aucun lien avec les gouvernements. Vous êtes des scientifiques. Mais en même temps, vous dites que vous n'avez plus rien à voir avec vos gouvernements respectifs quand vous vous réunissez, que vous n'êtes pas susceptibles d'être influencés. Mais en même temps, vous avez peur de faire l'objet de lobbying par l'industrie. Je ne comprends pas cela. C'est l'un ou l'autre. Si vous êtes vraiment indépendants, une fois nommés au COSEPAC par les pouvoirs publics à titre de scientifiques, de biologistes et de chimistes, c'est une chose, mais ensuite vous dites par ailleurs: oui, mais je ne veux pas de cette indépendance; je préférerais m'en remettre au Cabinet ou au ministre.

• 1105

Allez-vous me dire que n'importe lequel de ces Cabinets, qu'il s'agisse de celui de la Colombie-Britannique, de la Nouvelle-Écosse, du Québec ou encore du gouvernement fédéral, n'a aucune influence sur les représentants gouvernementaux et ne pourrait leur rappeler qu'ils font mal leur travail? On voulait avoir un organisme équilibré—tout au moins à mes yeux—composé pour moitié de représentants du secteur public et pour moitié du secteur privé afin d'éliminer ce genre d'influence.

M. David Green: Nous sommes quand même protégés par l'absence de droit de veto. Cela signifie que personne ne peut bloquer le processus sur l'ordre de son gouvernement. C'est tout simplement impossible. Il ne peut pas arriver qu'un représentant d'une province quelconque interdise que telle espèce soit autorisée, ou que telle autre ne le soit pas, qu'il dise qu'il faut voter non et ne rien accepter. C'est tout simplement impossible. Il n'existe aucun droit de veto. On ne peut renverser une décision déjà prise.

Cela dit, je conviens moi aussi qu'il serait très bon d'avoir un organisme dont feraient partie les gens qui sont les plus compatibles. La Société royale est une excellente organisation. Je connais bon nombre de ses membres. Ils ne savent pas tout, mais ils sont compétents.

Il n'empêche qu'à mon avis, le modèle actuel est satisfaisant. Pourquoi y toucher dans ces conditions? Si vous tenez absolument à l'améliorer, nous le ferons fonctionner aussi. Ce qui compte, c'est le principe de l'enquête scientifique indépendante, qui nous permet de décider en toute liberté des espèces qui nécessitent une enquête et de l'effectuer. Si les membres du COSEPAC procèdent ainsi et se conforment aux règles, et représentent un large éventail de disciplines et de régions du pays, c'est tout ce dont nous avons besoin. Je pense que la formule donne des résultats.

M. Clifford Lincoln: Une dernière et brève question.

À supposer que nous laissions le COSEPAC tel qu'il est, j'aimerais vous demander certaines choses car j'ai encore des interrogations malgré les amendements que vous avez proposés.

Nous avons inscrit sur une liste quelque 353 espèces. Vous avez déjà effectué un réexamen, y compris des espèces qui ne prêtent pas à controverse et en mettant à jour entre 125 et 130 d'entre elles. Est-ce que je me trompe en pensant que vous seriez tout à fait satisfaits de voir ces 125 espèces constituer une liste officielle de démarrage lorsque la loi sera promulguée?

M. David Green: Je ne m'y opposerais pas, non.

M. Clifford Lincoln: Non, vous ne vous y opposeriez pas, mais est-ce que vous ne préféreriez pas la voir? Il y a une nette distinction entre ne pas avoir d'objection à quelque chose et se réjouir qu'elle se produise. Il me semble que s'il s'agit de votre liste, c'est que vous l'avez autorisée, vérifiée et réexaminée, et que vous vous réjouissez qu'elle soit à jour. En revanche, quel argument peut-on invoquer pour ne pas la faire figurer dans le projet de loi comme liste de démarrage? Y en a-t-il?

M. Dave Fraser: Franchement, l'idée ne nous est jamais venue qu'elle ne constituerait pas la liste de départ du projet de loi.

M. Clifford Lincoln: Eh bien, elle n'y est pas. Il n'y a aucune liste de départ dans le projet de loi.

M. David Green: Nous avions 30 jours pour rédiger une liste, et nous nous sommes occupés de le faire et...

M. Clifford Lincoln: Dans sa forme actuelle, le projet de loi ne comporte aucune liste. Il revient entièrement au gouvernement de décider d'en insérer une et de choisir le moment de le faire.

M. David Green: Nous pensions que nous allions fournir une liste qui figurerait dans le projet de loi.

M. Clifford Lincoln: Elle n'y est pas.

M. Marco Festa-Bianchet: Cela nous étonne.

M. David Green: Dans ce cas, une liste de démarrage serait une bonne chose.

M. Clifford Lincoln: Monsieur Green, si vous permettez, j'aimerais dire quelque chose car le COSEPAC jouit d'une excellente réputation. À mon avis, il serait utile que vous écriviez une lettre au comité, où vous diriez avoir pensé qu'une liste de démarrage figurerait dans le texte de la loi, et que vous vous réjouiriez beaucoup d'en voir une dans le... Je ne parle pas des 353 espèces, car certaines personnes vont se plaindre du fait que certains des renseignements ne sont pas à jour. Quoi qu'il en soit, même si nous ne disposions que d'une liste mise à jour, cela représenterait un grand progrès. Ce serait vraiment très bien que vous fassiez cela.

M. David Green: Très bien.

Le président: Merci.

Mme Redman, M. Knutson, Mme Kraft Sloan et la présidence.

• 1110

Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

Je me demandais si le COSEPAC a réfléchi à l'examen au bout de cinq ans, en a discuté et voudrait peut-être nous parler de l'utilité d'intégrer à la LEP un examen de ce genre.

M. David Green: L'examen quinquennal de...?

Mme Karen Redman: De la loi, afin de vérifier si les processus donnent des résultats concrets, y compris les plans de rétablissement.

M. David Green: Cela déborde les attributions du COSEPAC et nous ne l'avons donc pas étudié.

Mme Karen Redman: Merci.

Le président: Merci.

Monsieur Knutson.

M. Gar Knutson: Je n'ai pas de question à poser.

Le président: Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: Ceux qui préconisent l'adoption du projet de loi sous sa forme actuelle m'ont notamment dit au sujet de l'établissement d'une liste officielle et de gouverneur en conseil que si le gouverneur en conseil ne donne pas suite à vos recommandations, il y aura une véritable levée de boucliers partout au pays. On semble donc penser qu'il y aura de très vives protestations dans la population. Ce n'est pas nécessairement mon avis, et vous m'avez d'ailleurs entendu m'exprimer là-dessus un peu plus tôt.

Si toutefois cela devait arriver, cela signifie que votre liste a beaucoup d'importance, n'est-ce pas? Si ce qu'ils disent est vrai au sujet du libellé actuel du projet de loi et de la colère que cela déclenchera dans la population contre le gouvernement et ce genre de chose, on peut penser qu'ils seront aussi en colère si le gouverneur en conseil ne donne pas suite à vos recommandations. N'est-ce pas?

M. David Green: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Ce que vous faites est donc très important. Vous allez donc faire l'objet de pressions, n'est-ce pas?

M. David Green: Déjà, des gens nous ont demandé d'assister à nos travaux comme observateurs, ils nous ont laissé savoir ce qu'ils pensaient et ont essayé de nous influencer. Nous les avons remerciés de l'intérêt qu'ils portaient à nos travaux, mais leur avons dit que les considérations politiques n'avaient aucune prise sur nous. Ensuite nous sommes retournés à nos travaux. Il y a donc eu des tentatives de pression, mais nous leur rendons la monnaie de leur pièce.

Nous ne cédons pas aux pressions des lobbyistes, nous restons sur nos positions et nous présentons les recommandations et les évaluations que nous avions dit que nous ferions.

Mme Karen Kraft Sloan: Par conséquent, que votre liste constitue la liste officielle ou qu'elle se conforme au libellé du projet de loi, ce sera du pareil au même pour vous.

M. David Green: Il y a cependant une autre tribune à laquelle les gens pourraient s'adresser pour exercer des pressions sur vous plutôt que sur moi. C'est d'ailleurs votre travail. Le mien est différent. Conservons la distinction entre les deux.

Mme Karen Kraft Sloan: Ce que je veux dire, c'est que la liste du COSEPAC ne revêt pas autant d'importance maintenant qu'elle en aura une fois le projet de loi adopté.

M. David Green: Oui et non. À l'heure actuelle, la liste du COSEPAC est la seule qui existe.

Mme Karen Kraft Sloan: C'est juste.

M. David Green: Si le projet de loi est adopté, il y aura alors la liste du COSEPAC, que vous pouvez tous consulter puis la liste établie par la loi, et qui bénéficiera de tout le poids juridique que cela représente. La liste du COSEPAC existera encore mais à l'heure actuelle c'est la seule.

Mme Karen Kraft Sloan: Cependant, ainsi que je vous le disais précédemment, étant donné le libellé actuel du projet de loi, il y aura de très vives protestations partout au pays, tout au moins d'après ce qu'on m'a dit, si le gouverneur en conseil ne donne pas suite à vos recommandations. Par conséquent, la source, c'est-à-dire la liste du COSEPAC, aura davantage d'importance que maintenant, car à l'heure actuelle il n'existe pas de déclencheurs automatiques pour influencer le COSEPAC.

• 1115

M. David Green: Nous sommes bien conscients de l'importance de la liste que nous produisons et du travail que nous faisons. Nous travaillons très fort depuis deux ou trois ans pour nous assurer que ce que nous produisons soit bien documenté, vérifié et accessible à tous, pour nous assurer que les rapports que nous produisons soient effectivement publiés. Ils sont facilement accessibles à l'heure actuelle, mais nous ferons en sorte qu'ils le soient encore davantage, qu'ils soient publiés afin que chacun puisse se les procurer. Nous sommes bien conscients de l'importance de ce travail et de la nécessité de tout documenter, de réunir toutes les informations nécessaires afin d'en arriver à un produit irréprochable, et ce, plus que jamais. Nous en sommes conscients et c'est ce à quoi nous nous employons.

Mme Karen Kraft Sloan: Si nous revenons aux questions que vous posait tout à l'heure M. Lincoln, vous avez dit en réponse à ses questions que vous aviez eu des discussions avec le COSEPAC et que vous aviez décidé que la façon dont vous fonctionnez à l'heure actuelle est celle que vous voudriez retenir, pour ce qui est de la composition du COSEPAC. Vous pensez que c'est là une bonne...

M. David Green: Ce n'est pas mal.

M. Sherman Boates: On simplifie un peu trop les choses en disant cela. Ce que j'ai expliqué, c'est que nous avions discuté de la question et que nous étions arrivés à la conclusion que le mieux serait de conserver le modèle de base actuel, mais qu'il y avait toutefois des éléments et des aspects du COSEPAC et de son rapport avec le projet de loi qui devaient être rajustés ou améliorés. Même si nous avons décidé de conserver le modèle de base, nous n'avons pas pour autant maintenu le statu quo au COSEPAC. Nous avons apporté des améliorations considérables au fonctionnement du COSEPAC au cours des trois ou quatre dernières années, à tel point que bien des gens ne s'y retrouveraient pas.

Mme Karen Kraft Sloan: Mais comme votre liste va devenir plus importante—car aux termes du projet de loi tel qu'il est libellé à l'heure actuelle, le gouvernement sera jugé à l'aune de votre liste—si le gouvernement peut se tirer cette épine du pied... Je reviens ici en quelque sorte au raisonnement de M. Lincoln: savoir que si les fonctionnaires sont 19 à 8 ou 24 à 4 au COSEPAC, vont-ils commencer à changer d'attitude quand votre travail prendra plus d'importance et qu'il sera susceptible d'être une épine dans le pied du gouvernement?

M. David Green: J'espère que non. J'espère que nous aurons cette assurance grâce au pare-feu dont vous parliez.

Nous avons bien conscience de l'importance de notre travail. Aussi nous essayons de faire le meilleur travail possible. Je pense que nous faisons du très bon travail. Je pense que nous n'avons aucun doute quant à la fiabilité de nos évaluations. Si nous avons des doutes, nous le disons.

Nous aimerions que vous nous aidiez en cela. Je vous suis reconnaissant de l'aide que vous pourrez nous apporter. Je ne veux pas que ceux de nos membres qui sont des fonctionnaires soient soumis à des pressions de la part de leurs gouvernements qui les inciteraient à voter en bloc sur certaines questions. Cela serait notre arrêt de mort. Je ne veux pas d'une telle situation. Je ne veux pas que nous soyons en proie à des hordes de lobbyistes qui tenteraient de nous persuader de nous prononcer dans un sens ou dans l'autre. Je ne veux pas de cela non plus.

Je veux que le COSEPAC puisse faire son travail pour vous et pour la population canadienne, pour que nous fassions bien les choses et que tout le monde sache, dans toute la mesure du possible, quelle est la situation d'une espèce donnée, pour que toute la bonne foi, l'argent et l'énergie qui est consacrée à préserver les espèces en question et à protéger leurs habitats d'un bout à l'autre du pays reposent sur une assise solide. Aidez-nous à avoir cette assurance. Voilà ce que nous voulons faire. Ce que nous vous avons présenté, ce sont nos idées quant à la façon dont nous pourrons faire cela.

Nous déployons des efforts sincères pour en arriver précisément à ce dont vous parlez. Tout n'est pas parfait, mais nous demandons que les idées, suggestions et recommandations soient explicites—aussi explicites que possible—afin d'arriver à faire ce que vous demandez. Je veux donc travailler avec vous et je vous demande de nous aider.

Mme Karen Kraft Sloan: Vous aurez peut-être bien d'autres idées après notre discussion de ce matin.

M. David Green: Peut-être bien.

Mme Karen Kraft Sloan: En tout cas, si vous avez autre chose à soumettre au comité, vous n'avez qu'à le faire par l'entremise du président et du greffier.

Le président: Merci, madame Kraft Sloan.

Nous allons maintenant conclure. Permettez-moi simplement de poser deux petites questions.

Monsieur Festa-Bianchet, pourriez-vous faire le point sur les efforts du Québec pour en arriver à une loi vraiment efficace, étant donné que, dans l'actuelle loi, environ 24 p. 100, si je me souviens bien, des espèces inscrites ont été retenues par le gouvernement, alors que les autres ne l'ont pas été?

• 1120

M. Marco Festa-Bianchet: Je vis au Québec, mais je ne peux évidemment pas me prononcer sur ce qui se passe au Québec ni sur ce que fait le gouvernement du Québec. Le Québec a une loi visant à protéger les espèces. Il y a une liste des espèces qui sont protégées et une liste des espèces susceptibles de figurer sur la liste. Je ne peux vraiment pas vous dire ce que le gouvernement du Québec entend faire ni s'il prévoit d'apporter des changements à sa loi. Je ne fais qu'enseigner à l'université. Je n'ai rien à voir avec cela. En fait, je n'ai rien à voir avec le processus québécois d'inscription des espèces. J'ai des opinions personnelles, mais je ne pourrais rien vous dire à cet égard en tant que représentant du COSEPAC.

Le président: Avez-vous quelques commentaires à nous faire au sujet du fait que quelque 24 p. 100 des espèces désignées comme étant en voie de disparition ont été retenues par le gouvernement du Québec?

M. Marco Festa-Bianchet: Vous voulez dire au nom du COSEPAC...? Tout ce que je peux vous dire à ce sujet, c'est que, d'après ce que j'en sais, le processus d'inscription des espèces dans la loi québécoise est très lent. C'est ce qui pourrait expliquer cet écart. Évidemment, il ne devrait pas y avoir d'écart. Chaque province a sa façon de fonctionner.

Le président: Cela m'amène à la question suivante, à savoir si le COSEPAC en tant que tel fait des démarches auprès des gouvernements provinciaux afin d'obtenir un pourcentage de conformité plus élevé.

M. Marco Festa-Bianchet: Non, cela ne fait pas partie du mandat du COSEPAC.

M. David Green: Cela n'entre pas dans nos attributions.

M. Marco Festa-Bianchet: Nous ne disons pas aux provinces ce qu'elles doivent faire. Nous établissons une liste nationale avec une classification nationale de la situation des espèces, mais nous ne pouvons pas dire à telle province de faire ceci ou cela...

Le président: Monsieur Boates, cette discussion ne vise pas la Nouvelle-Écosse puisqu'elle a une excellente feuille de route à cet égard, mais les neuf autres provinces accusent un retard considérable pour ce qui est d'adopter sur le plan politique la recommandation; c'est-à-dire toutes les espèces recommandées par leurs organismes scientifiques respectifs.

M. Sherman Boates: J'ai un commentaire à faire à ce sujet, en ce qui concerne la façon dont nous considérons la loi comme un outil pour protéger les espèces en péril. Ce n'est qu'un des outils que nous avons dans notre coffre à outils. Le plus important déterminant de l'utilisation qui est faite de ce coffre à outils, c'est la liste des espèces que dresse le COSEPAC. Avant la conclusion de l'accord, avant l'adoption de la Loi de la Nouvelle-Écosse sur les espèces en péril, il se faisait beaucoup de travail sur les espèces en voie de disparition. On peut, bien sûr, dire que ce travail n'était pas suffisant ou qu'il n'était pas assez complet, mais il est important de se rendre compte que la loi n'est pas le seul outil dont on va se servir pour assurer la conservation des espèces en voie de disparition au Canada. La liste du COSEPAC sera utilisée par des organismes non gouvernementaux, par des collectivités, par bien d'autres personnes qui n'ont rien à voir avec l'application en tant que telle de la loi fédérale de protection des espèces en péril où cette liste est incluse.

C'est quelque chose qu'il est important de souligner à mon avis, et c'est une source de frustration même pour une province comme la Nouvelle-Écosse qui a une loi en place. On nous félicite souvent pour ce qu'on fait sur le plan juridique, mais il est très rare qu'on aille plus loin et qu'on examine les programmes et les progrès qui ont été faits sur d'autres plans.

Ainsi, j'estime que, quand on évalue ce que fait le Québec ou ce que fait la Colombie-Britannique, il est essentiel de dépasser le cadre strictement juridique.

Merci.

Le président: Merci.

La dernière question s'adresse à vous, monsieur Green. Elle porte sur l'article 40 qui, comme vous le savez, prévoit que le ministre compétent vérifie si le rétablissement de l'espèce sauvage inscrite est réalisable au point de vue technique et biologique. Il fonde sa conclusion sur la meilleure information accessible, notamment les renseignements fournis par vous, le COSEPAC. Pouvez-vous nous dire dans quelles conditions un rétablissement ne serait pas réalisable au point de vue technique?

M. David Green: Ce serait le cas d'une espèce qui est disparue.

Le président: Est-ce qu'il y aurait même un plan de rétablissement pour une espèce disparue?

M. David Green: Malheureusement, le rétablissement dépasse le mandat de COSEPAC. Je n'ai pas encore étudié cette disposition. Elle renvoie aux plans de rétablissement, et tout plan de rétablissement doit utiliser les renseignements fournis par le COSEPAC. Pour ce qui est du libellé exact, je n'ai pas de commentaires.

• 1125

Le COSEPAC a fait beaucoup de recherches préliminaires. Il est toujours nécessaire de faire d'autres recherches, négociations et calculs dans le cas de n'importe quel plan de rétablissement. C'est le COSEPAC qui démarre le processus, et après il n'a plus de rôle à jouer. L'intervention du COSEPAC s'arrête là. Donc, en ce sens, cela dépasse notre mandat.

Le président: D'accord. Je pensais que vous auriez peut-être des suggestions à nous faire à cet égard.

Nous sommes très heureux que vous ayez pu comparaître devant nous aujourd'hui. Nous trouvons vos remarques fort intéressantes.

Nous sommes également heureux de constater qu'ensemble vous avez découvert que dans sa forme actuelle, le projet de loi ne comprend pas la liste restreinte que vous pensiez être incluse. Vous aimeriez peut-être donner suite à la suggestion de M. Lincoln et envoyer une lettre au comité.

Nous allons peut-être vous voir de nouveau. Nous vous remercions de l'excellent travail que vous faites au nom de la communauté mondiale, et nous vous souhaitons bonne chance.

M. David Green: Merci beaucoup.

Le président: La séance est levée.