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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 021 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 juin 2007

[Enregistrement électronique]

(1115)

[Traduction]

    Bonjour à vous tous. Je souhaite la bienvenue à tous les membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    Nous accueillons aujourd'hui deux témoins: Kim Pate, directrice générale de l'Association canadienne des Sociétés Elizabeth Fry; et Dominique Larochelle, qui représente cette même association.
    Kim sera la première à faire un exposé liminaire.
    Je voudrais, tout d'abord, vous remercier de nous avoir invitées à comparaître aujourd'hui.
    Maître Lucie Joncas est malheureusement empêchée. Elle devait venir, mais en raison de problèmes de calendrier, elle n'a pas pu être des nôtres. Par contre, je suis ravie que Me Dominique Larochelle ait pu se joindre à nous.
    En plus d'être présidente du conseil d'administration de la Société Elizabeth Fry du Québec, Me Larochelle est également avocate travaillant au service d'aide juridique qui connaît donc très bien ce domaine.
    Nous avons également beaucoup de chance de pouvoir profiter de conseillers du calibre de Me Joncas et de Me Larochelle. Pour ceux et celles qui peuvent ne pas le savoir, ces dernières font des milliers d'heures de bénévolat pour la promotion des questions auxquelles nous nous intéressons tous.
    En conséquence, je voudrais saisir l'occasion de remercier publiquement Mme Larochelle et tous les autres membres de notre conseil d'administration pour leurs conseils et leur dévouement à notre cause.
    Pour ceux et celles d'entre vous qui peuvent ne pas le savoir, l'Association canadienne des Sociétés Elizabeth Fry a été conçue en 1969 et a officiellement obtenu le statut d'organisme national à but non lucratif en 1978. Nous sommes une fédération de 26 organismes communautaires qui assurent des services aux femmes et aux filles détenues qui sont marginalisées, criminalisées et victimisées. Nous avons à la fois du personnel rémunéré et des bénévoles, qui participent à la régie de nos organismes d'un bout à l'autre du Canada. Ils se chargent également des programmes et de la prestation des services à l'échelle de l'Association — c'est-à-dire, auprès de nos 26 membres — et les programmes que nous avons élaborés sont exécutés à la base et englobent des activités d'intervention précoce et de prévention, des interventions pré- et postcarcérales, et des interventions dans les établissements proprement dits, qu'elles soient de nature judiciaire ou liées à la santé mentale, à la détention des immigrants ou aux installations carcérales ou de détention.
    Au cours de la dernière année, nos bénévoles, qui sont plus d'une trentaine, y compris les administrateurs, ont fait plus de 6 000 heures de bénévolat afin de favoriser l'exécution d'initiatives nationales, ce qui permet de compléter le travail que nous accomplissons, moi et ma collègue — puisque nous ne sommes que deux — au bureau national. Les membres du comité seront probablement intéressés à savoir qu'au sein de nos 26 sociétés membres, plus de 1 500 bénévoles font environ 110 000 heures de bénévolat par année, ce qui permet de compléter le travail exécuté par notre personnel à temps plein et à temps partiel d'un bout à l'autre du Canada.
    Au niveau national — je travaille justement au bureau national — nous mettons l'accent sur les initiatives liées à la politique et à la réforme du droit, et à cet égard, nous prenons évidemment appui sur les initiatives prises par nos organismes membres. S'agissant du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, depuis un certain temps, nous travaillons de pair avec Amnistie Internationale et l'Association pour la prévention de la torture à encourager le gouvernement canadien à mettre en oeuvre et à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
    Comme vous l'aurez remarqué dans notre réponse aux quatrième et cinquième rapports soumis par le Canada, le manque important de conformité, par moments, aux protections très importantes et fortement appréciées que renferme notre charte et nos lois sur les droits de la personne suscite énormément de préoccupations, si bien que nous, aussi, nous avons des inquiétudes en ce qui concerne notre conformité aux conventions des Nations Unies.
    L'un des éléments sur lesquels nous insistons, par rapport tout particulièrement aux programmes des femmes, est le travail accompli aux Nations Unies, et notamment par la Sous-commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme. Mme Florizelle O'Connor a été recrutée pour faire des recherches, et elle a conclu que la situation des femmes détenues dans le monde entier permettait de conclure à la perpétration de violations flagrantes de presque tous les principes reconnus des droits de l'homme.
    Le traitement des femmes dans les prisons canadiennes ne constitue certainement pas une exception et, en ce qui concerne les politiques et pratiques fédérales liées aux délinquantes sous responsabilité fédérales, depuis longtemps nous exprimons nos préoccupations au sujet des diverses façons dont ce traitement contrevient aux dispositions de la Convention contre la torture, ce que nous examinons dans notre mémoire.
    Je crois savoir qu'il sera prêt bientôt. Étant donné le peu de préavis que nous avons reçu, nous n'avons pas pu le faire traduire en français en prévision de la réunion d'aujourd'hui, mais il va être distribué en français aussi.
    L'Assemblée générale des Nations Unies exhorte les États membres à s'attaquer aux problèmes critiques auxquels sont confrontées les femmes détenues dans divers contextes. Certains éminents organismes canadiens ont également publié des rapports sur la situation des femmes détenues qui ont fait de nombreuses recommandations concrètes sur les moyens que le gouvernement fédéral peut prendre et devrait prendre afin d'améliorer le traitement des détenues.
    À cet égard, on peut citer l'exemple du rapport de Louise Arbour. Louise Arbour est actuellement Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme. Dans le cadre de sa commission d'enquête sur certains événements survenus à la Prison des femmes de Kingston, elle a cité plusieurs exemples du type de protection qui est nécessaire et des violations qui pourraient plus facilement être repérées grâce à cette convention, ce qui permettrait également de protéger le gouvernement du Canada contre tout risque potentiel.
    De plus, la Commission canadienne des droits de la personne, dans un rapport intitulé Protégeons leurs droits : Examen systémique des droits de la personne dans les services correctionnels destinés aux femmes purgeant une peine de ressort fédéral, rapport qui a été diffusé publiquement en janvier 2004, indique également que —
    Excusez-moi de vous interrompre, madame Pate.
    Je voudrais simplement vous signaler ainsi qu'aux membres du comité que nous avons en ligne, à Genève, M. Philippe Tremblay, responsable du programme Asie-Pacifique de l'Association pour la prévention de la torture. Il va prendre la parole un peu plus tard.
    Je voulais m'assurer que vous et les membres du comité sachiez que M. Tremblay nous attend en ligne.
(1120)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    À cet égard, je me contente donc de vous faire remarquer qu'au fur et à mesure que les problèmes se présentent, nous continuons à exprimer nos préoccupations à ce sujet. Dans son plus récent rapport, l'Enquêteur correctionnel du Canada a également fait part de ses préoccupations au sujet des violations des droits et du traitement discriminatoire des prisonniers. Tous les groupes de ce genre, y compris celui de M. Tremblay, ont exprimé leurs inquiétudes et ont parlé de la nécessité pour le Canada de ratifier le Protocole facultatif.
    En ce qui nous concerne, c'est un exemple de la réticence du gouvernement à prévoir le genre de mécanismes de surveillance et de contrôle qui est nécessaire afin d'éliminer les politiques pratiques discriminatoires et préjudiciables dont nous avons fait état dans le mémoire que nous avons soumis à l'examen des Nations Unies en 2005.
    En fait, le 10 décembre 2005, Aministie Internationale, l'Association pour la prévention de la torture et notre organisme ont enjoint le gouvernement d'adopter le Protocole facultatif. De plus, c'était la Journée des droits de l'homme, comme vous le savez certainement. Il s'agissait également du 57e anniversaire de l'adoption par les Nations Unies de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Le vice-président (M. Mario Silva):
    Madame Pate, excusez-moi de vous interrompre encore une fois, mais le greffier voudrait que nous nous assurions que M. Tremblay peut bien vous entendre et suivre les délibérations du comité.
    Monsieur Tremblay, entendez-vous bien?
    Oui, tout va bien. Merci beaucoup.
    Excusez-moi, madame Pate. Veuillez donc continuer.
    À l'époque, comme les Nations Unies, nous reconnaissions la nécessité de s'assurer que les protections qui sont prévues dans la Déclaration universelle des droits de l'homme soient élargies et soient garanties grâce à la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture.
    En fait, dans ses deux derniers rapports annuels, l'Enquêteur correctionnel a également enjoint le Canada de ratifier le Protocole facultatif et a fait remarquer que le Canada faisait partie du groupe qui a rédigé le texte et voté en faveur de son adoption à l'Assemblée générale des Nations Unies en décembre 2002. L'Enquêteur correctionnel signale également que l'un des avantage du Protocole est le système de visites régulières qu'il établit, ces visites devant être effectuées par des organes internationaux et nationaux indépendants à des endroits où les gens sont privés de leur liberté, et ce afin de prévenir la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
    Il a également précisé que la ratification du Protocole facultatif renforcerait la longue tradition qui existe au Canada en ce qui concerne la promotion et la défense des droits de la personne ici et à l'étranger. Elle permettrait également de réexaminer le rôle et le mandat des organismes de surveillance chargés de contrôler et d'inspecter les lieux de détention et de renforcer ces mécanismes de surveillance, si besoin est.
    À notre avis, le besoin du Protocole facultatif au Canada est manifeste. De plus, le Canada ferait bien de jouer un rôle de chef de file à l'échelle internationale en ratifiant cette convention dès maintenant. Nous avons de nombreux exemples de ce besoin dans la lutte qui est menée pour éliminer la torture et les mauvais traitements, qui demeure l'un des plus importants défis auxquels est confronté le monde actuel et le Canada en ce qui concerne les droits de l'homme.
    Dans cette lutte mondiale et dans l'ensemble de luttes mondiales qui sont significatives pour les Canadiens, nommons les cas récents de Zarha Kazemi en Iran, de William Sampson en Arabie saoudite, du professeur Kunlun Zhang en Chine, de Maher Arar, d'Abdullah Almalki et d'Ahmad El-Maati en Syrie; tous ces cas nous rappellent brutalement que les citoyens canadiens peuvent faire l'objet de torture à l'étranger également.
    Comme je l'ai déjà mentionné, il y a eu aussi des difficultés au Canada, telles que les abus fort inquiétants perpétrés dans les années 1990 à la Prison des femmes de Kingston, et à l'Hôpital psychiatrique Robert-Giffard à Québec en 2003; parlons également du recours actuel à de longues périodes de ségrégation pour les femmes qui font l'objet de ce que le Service correctionnel du Canada qualifie d'un « protocole de gestion » dans les nouvelles prisons des femmes, ce qui souligne la réalité des traitements discriminatoires et de la torture, actes qui sont perpétrés en ce moment au Canada.
    Le Protocole facultatif présente un cadre prévoyant des inspections régulières, à l'échelle tant nationale qu'internationale, des centres de détention en vue de repérer et de corriger les conditions qui favorisent et encouragent la torture et les mauvais traitements. L'appui de la communauté internationale vis-à-vis du Protocole facultatif continue à croître. Le 29 avril 2007, comme le sait certainement le comité, le Cambodge est devenu le 34e État à adopter et à ratifier la Convention contre la torture.
    Le PFCCT est entré en vigueur le 22 juin 2006, et ce après que 20 pays sont devenus parties au Protocole. La première réunion du Sous-comité de la prévention de la torture s'est réunie à Genève en février.
    Selon moi, et selon les membres de notre organisme, le fait que le Canada, qui a joué un rôle de premier plan dans l'introduction de ce protocole, n'ait pas été parmi les premiers États à mettre sur pied cet organe novateur et à définir ses méthodes de travail est une source d'embarras sur la scène internationale.
    Mais il n'est pas trop tard pour agir. Le premier comité vient tout juste de se réunir. Je pense qu'il est très important que le Canada prenne sa place parmi ces autres États en décidant de ratifier le Protocole. En ce qui nous concerne, il est très important que le sous-comité, qui est le premier groupe d'experts ayant compétence pour effectuer des inspections des centres de détention à être établi par la communauté internationale, soit ratifié par le comité.
    De plus, cela permettrait potentiellement au Canada de démontrer qu'il prend au sérieux ses propres rapports internes, comme ceux de Louise Arbour, de l'Association canadienne des droits de l'homme, et de l'enquête sur Maher Arar, ainsi que les enquêtes qui sont toujours en cours, y compris les multiples enquêtes qui sont effectuées au sujet de la GRC et de la possibilité de prévoir la surveillance par une autorité internationale des pratiques d'isolement cellulaire de la GRC et d'autres forces policières.
(1125)
    Donc, en prenant appui sur son rôle bien établi de chef de file international dans la protection des droits de la personne, le Canada devrait, à notre avis, déployer tous les efforts nécessaires dès maintenant pour participer aux travaux préliminaires du sous-comité et, à cette fin, nous estimons que le Canada doit de toute urgence ratifier le Protocole facultatif sans plus tarder.
    Je vous remercie. Voilà qui termine notre exposé. Nous serons à votre disposition pour répondre aux questions des membres quand M. Tremblay aura terminé son exposé.
    Merci beaucoup.
    Vous avez la parole, monsieur Tremblay.
    Avec la permission du comité, je voudrais faire mon intervention en français, pour être sûr de m'exprimer clairement.

[Français]

    L'Association pour la prévention de la torture voudrait d'abord remercier le sous-comité de lui donner la possibilité d'intervenir dans le cadre de cette consultation.
    Je voudrais d'abord faire une brève présentation de notre organisation et de son travail en faveur du protocole, pour ensuite exposer l'état des lieux en ce qui a trait à la mise en oeuvre du Protocole facultatif sur le plan international et les raisons pour lesquelles nous considérons que la ratification du protocole par le Canada revêt une grande importance, non seulement pour les citoyens et les citoyennes du Canada, mais pour la réussite de ce système au-delà des frontières du pays.
    L'association ou l'APT, comme nous l'appelons, est une organisation non gouvernementale basée à Genève, en Suisse, et qui oeuvre depuis maintenant 30 ans en faveur de la prévention de la torture. L'association a été intimement liée au long processus de négociation et d'adoption du protocole. La paternité de l'idée à la base du protocole, c'est-à-dire l'idée qu'on puisse prévenir la torture et les autres types de mauvais traitements par la mise en place d'un système de visites préventives effectuées sur une base régulière, a été exposée pour la première fois en 1973 par le fondateur de notre association.
    Depuis décembre 2002, depuis l'adoption du protocole, l'APT mène, en coordination avec plusieurs organisations non gouvernementales internationales et régionales, une campagne internationale en faveur de ce protocole. Dans le cadre de cette campagne, nous avons entrepris des actions de sensibilisation dans divers forums auxquels participe activement le gouvernement canadien, forums qui ont adopté des résolutions ou des déclarations enjoignant à leurs membres d'adhérer à cet instrument. Je pense notamment au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies et à la Commission interaméricaine des droits de l'homme.
    Il est vrai que je suis maintenant responsable du programme régional de l'APT pour la zone Asie-Pacifique, mais auparavant, entre septembre 2004 et janvier 2007, j'ai assumé la fonction de coordonnateur de la campagne internationale en faveur de ce protocole. J'ai donc été associé d'assez près à ce genre de discussion dans plusieurs pays.
    Je voudrais d'abord rappeler que, comme le disait Mme Pate, en date d'aujourd'hui, 34 États sont parties au protocole et 31 autres l'ont, à tout le moins, signé. Le Canada n'a fait ni l'un ni l'autre. Il n'a toujours pas signé et, évidemment, pas ratifié le protocole. Ces chiffres peuvent sembler modestes, mais il faut se rappeler que le protocole n'est ouvert à la ratification que depuis septembre 2003. Il s'agit en fait d'un rythme très rapide si on le compare à d'autres traités de même nature.
    À la suite de l'entrée en vigueur du protocole en juin 2006, le Sous-comité de prévention de la torture des Nations Unies a été élu en décembre dernier par les 20 premiers États parties au protocole. Ce sous-comité est composé de 10 experts indépendants. Le sous-comité entend entreprendre ses premières visites avant la fin de cette année. Ses moyens d'action, pour le moment, sont assez limités, mais ils seront accrus dès lors que 50 États auront ratifié le protocole. À ce moment-là, le nombre d'experts au sein du sous-comité passera à 25. Celui-ci sera, par conséquent, en mesure de faire davantage de visites.
    Bien que les membres du sous-comité n'aient pas encore mis la touche finale à leurs règles de procédure, on peut deviner que ce comité opérera de manière plus ou moins similaire au Comité européen pour la prévention de la torture, un organe régional qui effectue des visites périodiques de même nature dans les 47 États membres du Conseil de l'Europe depuis 1989.
    La plupart des États qui ont ratifié le protocole à ce jour, et même plusieurs autres États qui l'ont signé et qui sont en voie de le ratifier, ont déjà engagé la procédure qui mènera à la mise en oeuvre du protocole sur le plan interne. Comme vous le savez, le protocole prévoit que les États parties s'engagent à désigner ou à mettre en place un ou plusieurs mécanismes de prévention. Même lorsque le sous-comité comptera 25 experts, il ne sera en mesure d'effectuer que quelques visites par année, ce qui laisse présager qu'il ne visitera les États parties qu'une fois tous les quatre ou cinq ans, dans le meilleur des cas, ce qui rend le travail effectué au plan national d'autant plus important.
    Les États disposent d'un an à partir du moment de la ratification pour compléter cette démarche de notification du mécanisme national de prévention en vertu du protocole. Pour les 20 premiers États parties, ce délai arrivera à terme le 22 juin prochain.
    Le protocole laisse aux États toute la latitude requise pour qu'ils déterminent eux-mêmes la forme que prendra dans leur pays le mécanisme national. Cependant, peu importe la configuration du mécanisme, il est évident que celui-ci doit respecter un certain nombre de garanties qui sont énoncées dans la quatrième partie du protocole.
    Il est intéressant pour les États de regarder ce qui se fait ailleurs afin de puiser de l'inspiration, surtout dans les pays qui sont dotés de caractéristiques similaires, notamment sur le plan de la justice criminelle. Dans le cas du Canada, il serait intéressant de savoir ce que les autres pays, par exemple du Commonwealth, sont en train de mettre en place, mais il est évident qu'il n'y a aucun modèle qui pourrait être pris tel quel, parce que chaque État est différent.
    Nous n'avons pas tellement le temps d'aborder les modèles proposés, mais l'APT est prête à mettre cette information à la disposition des membres du sous-comité, s'ils le désirent.
    En ce qui concerne le Canada, j'aimerais simplement exposer les arguments qui militent en faveur de la ratification et j'espère ne pas répéter ce qui a été dit par Mme Pate, dont j'ai quand même écouté une partie de l'intervention.
    Tout d'abord, quelque chose qui nous apparaît évident : le Canada a toujours donné un appui indéfectible aux instruments et aux mécanismes internationaux chargés de la lutte contre la torture, notamment au Protocole facultatif. Le Canada a envoyé des signes clairs à l'effet que cet engagement devait mener à l'adhésion au protocole.
    La lutte contre la torture, on le sait, s'inscrit depuis plusieurs années parmi les priorités de la politique étrangère du gouvernement canadien en matière de droits de la personne. Le Canada a fréquemment parrainé les projets de résolution sur la torture, qui ont été soumis à la Commission des droits de l'homme. Le Canada est l'un des principaux contributeurs au Fonds des Nations Unis pour les victimes de torture. Le Canada fut un des premiers États à ratifier la Convention contre la torture. Le Canada a même fait partie du groupe de travail qui a oeuvré, entre 1992 et 2001, à l'élaboration du projet de protocole facultatif. Finalement, le Canada a voté en faveur du protocole à la Commission des droits de l'homme en avril 2002 et, subséquemment, à l'Assemblée générale, en décembre 2002.
    On sait également que lorsqu'il a posé sa candidature pour l'obtention d'un siège au nouveau Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, en mai 2006, le Canada s'est engagé à envisager la signature ou la ratification ultérieure d'autres instruments des droits de la personne, tel que le Protocole facultatif à la Convention contre la torture. Le Canada a finalement été élu et il siégera jusqu'en 2009. À notre sens, il doit, conséquemment, donner suite à ses promesses.
    Par ailleurs, la ratification, nous semble-t-il, va redorer le blason du pays sur la scène internationale. On sait, pour être basés à Genève, que le Canada a toujours joui d'une réputation somme toute enviable en matière de respect et de promotion des droits humains dans le monde. Mais on sait également que récemment, des incidents regrettables, que ce soit l'affaire Maher Arar, les allégations de mauvais traitements à l'encontre de détenus capturés par les Forces canadiennes dans le sud de l'Afghanistan et remis aux autorités afghanes, ont entaché cette réputation en donnant l'impression aux observateurs internationaux que le Canada ne traite peut-être plus ces questions hautement sensibles avec tout le sérieux qu'elles méritent.
    Par ailleurs, le Canada est quand même un acteur de poids au sein de plusieurs organismes multilatéraux. Évidemment, on pense à l'ONU, mais on pense également au Commonwealth, à l'Organisation internationale de la Francophonie, à l'Organisation des États américains, à l'APEC, à la Communauté économique de l'Asie-Pacifique. S'il ratifiait le protocole, le Canada pourrait user de l'autorité morale que cela lui conférerait pour promouvoir cet instrument dans de nombreux États membres de ces instances, notamment auprès de ceux qui sont véritablement aux prises avec un problème aigu de mauvais traitements. Pour le moment, le Canada, n'ayant pas ratifié ni même signé le protocole, n'est pas en mesure de faire ce travail.
    Un autre argument important, à notre sens, est que la ratification et la mise en oeuvre du protocole aideront le Canada à respecter ses obligations internationales. En ratifiant la Convention contre la torture, le Canada s'est engagé à prendre les mesures nécessaires pour empêcher que des actes de torture ou d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ne soient commis sur son territoire. Cette obligation est énoncée à l'article 2 de la convention.
    Bien que l'établissement de systèmes de visites préventives ne saurait garantir que des sévices ne se reproduiront plus, il est clair que cette mesure en diminue clairement le risque. Les visites préventives, on le sait car cela a été rappelé par de nombreux experts internationaux, y compris les rapporteurs spéciaux des Nations Unies sur la torture, ont un effet dissuasif.
    Les mécanismes de visite, s'ils agissent de manière préventive, pourront donc agir en amont et permettront d'effectuer des visites avant que des plaintes soient émises. Cela permettra donc aux autorités responsables de la gestion de ces établissements de savoir quels correctifs doivent être apportés.
    Par ailleurs, comme le disait Mme Pate, le Comité contre la torture, en novembre 2005, recommandait explicitement au Canada d'adhérer au Protocole facultatif. Il nous semble que le Canada a la responsabilité de donner suite à cette recommandation.
    J'en viens au quatrième point. Il existe un risque de torture ou d'autres mauvais traitements tant au Canada qu'ailleurs dans le monde. La mise en oeuvre du protocole contribuera à réduire ce risque. On le sait, et Mme Pate l'a dit, il est évident que le Canada ne figure pas en tête de liste des États où des mauvais traitements sont pratiqués, mais il y a quand même des événements qui devraient nous rappeler à la vigilance. On pense évidemment aux allégations de mauvais traitements à la prison des femmes de Kingston et à la commission d'enquête qui a été dirigée par Mme Arbour. Mme Pate faisait référence aux mauvais traitements au Centre hospitalier Robert-Giffard de Québec. On peut penser également aux mauvais traitements de prisonniers qui avaient été détenus par le contingent canadien déployé en Somalie en 1993. Le Canada n'est pas à l'abri de ce risque.
    D'ailleurs, on n'a qu'à regarder ce qui se fait en Europe. En Europe, ce ne sont pas non plus des États reconnus pour pratiquer la torture de manière systématique. Ces États, dans leur vaste majorité, ont déjà des mécanismes agissant sur le plan national. Le Comité européen pour la prévention de la torture auquel je faisais référence fait des visites périodiques. Néanmoins, la majorité de ces États ont reconnu la pertinence de signer ou de ratifier le protocole pour envoyer un signal politique fort que la torture est inacceptable en toutes circonstances, que le risque existe et qu'il est toujours préférable d'avoir davantage de systèmes de visite.
    On retrouve, au nombre des États qui ont signé et ratifié le protocole, pas moins de 20 États membres de l'Union européenne, dont les pays les plus influents. La Grande-Bretagne, la Pologne et l'Espagne l'ont ratifié, et la France, l'Italie et l'Allemagne ont signé le protocole et s'apprêtent à le ratifier.
    Par ailleurs, en pratique, la mise en oeuvre du protocole au Canada ne devrait pas poser énormément de problèmes. Évidemment, il y a des questions qu'il faut analyser en profondeur, mais le concept de visites aux lieux de détention par des experts indépendants n'est pas inconnu au Canada. On le sait, il y a plusieurs mécanismes qui font déjà ce travail. On pense au Bureau de l'enquêteur correctionnel, qui visite les établissements correctionnels sous juridiction fédérale, et aux commissions des droits de la personne dans la plupart des provinces ou territoires, qui font également ce travail de surveillance.
    Il y a également d'autres agences spécialisées, par exemple le Mental Health Patient Advocate for the Province of Alberta et l'Office of the Police Complaint Commissioner de la Colombie-Britannique. On pense à la Société canadienne de la Croix-Rouge, qui visite les personnes détenues en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et à certaines organisations non gouvernementales, dont celle représentée par Mme Pate. C'est un concept qui est accepté, qui est reconnu. Le Canada n'a absolument rien à craindre, si je peux me permettre de dire cela. Cela va de soi au pays.
    J'aimerais simplement compléter mon intervention en disant quelques mots sur les défis qui sont posés par la mise en oeuvre au Canada et sur lesquels on pourra revenir.
    Il y a évidemment la nature fédérale du pays. Notre association reconnaît d'emblée que les États fédéraux et décentralisés font face à des défis particuliers lorsque vient le temps de mettre en oeuvre le protocole. Il faut s'y atteler. Par ailleurs, nous sommes persuadés que ces défis ne sont pas insurmontables. Il suffit de regarder, encore une fois, la liste des États parties. Le Royaume-Uni, l'Espagne, le Mexique et l'Argentine ont ratifié le protocole, de même que le Brésil, qui est également une fédération. On sait par ailleurs que l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse, l'Afrique du Sud, d'autres fédérations, ont signé le protocole. C'est dire que si la volonté politique existe, on peut avancer.
    Évidemment, il y a la question des ressources financières qui seront allouées à la mise en oeuvre du protocole. L'APT a constaté, au Canada et ailleurs, que les officiels gouvernementaux veulent avoir une idée des coûts qui seront engendrés par la mise en oeuvre du protocole, ce qui est légitime. Il faut voir, dans le cas du Canada, que celui-ci, comme je le disais plus tôt, n'est pas obligé de créer un nouveau mécanisme. Il peut très bien désigner en tant que mécanisme national de prévention un ou plusieurs organes préexistants, dans la mesure où ces organes se conforment aux garanties qui se trouvent dans le protocole.
    Par ailleurs, il est probable que le nombre de visites effectuées doive être augmenté, dans la mesure où les visites qui sont effectuées au Canada par des organes indépendants, pour le moment, sont plutôt de nature réactive et non préventive. Il faudra également que les mécanismes permettent d'effectuer des visites inopinées, des visites surprises, si la situation l'exige.
(1140)
    Monsieur Tremblay, je suis vraiment désolé, mais vous avez déjà dépassé votre temps. Pouvez-vous terminer ou résumer votre discours? Merci.
    On aura évidemment le temps d'y revenir pendant la période de questions.
    Oui, bien sûr. Des membres de notre comité poseront certainement des questions. Vous pourrez utiliser ce temps pour compléter vos différents points.
    J'aimerais conclure en 30 secondes.
    Si le Canada devait pencher en faveur de la désignation d'un mécanisme multiple, il est probable que le mandat de certaines des composantes devra être modifié. Il faudra également faire attention au fait que certaines composantes de la fédération ne sont pas dotées d'un mécanisme de visite indépendant. À l'heure actuelle, je pense à l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple. Il faudra évidemment combler cette lacune.
    Il faudra évidemment faire attention à la question très importante de la coordination du travail effectué par les différentes composantes du mécanisme. Le Canada, à ce qu'on sache, n'a jamais remis en question publiquement son soutien au Protocole facultatif. Pourtant, on a l'impression que les discussions sur cette question, entre les différents services, n'ont pas tellement progressé dans les derniers mois. Compte tenu de l'importance de cette question et du poids du Canada, nous croyons qu'il serait très important de remédier à cette situation.
    En somme, l'APT recommande au sous-comité de recommander au gouvernement du Canada de signer le Protocole facultatif dans les meilleurs délais et d'indiquer de cette façon qu'il a l'intention de mener à terme le processus de ratification. Nous recommandons également au sous-comité de demander aux autorités responsables des discussions sur la ratification de lui signifier l'état réel d'avancement des discussions, afin qu'on puisse avoir l'heure juste et savoir quels gestes doivent être posés pour compléter ce processus.
(1145)
    On commence le premier tour avec Mme St-Hilaire.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, mesdames, de votre témoignage.
    Monsieur Tremblay, mes salutations. En fait, ma question s'adressera essentiellement à vous, monsieur Tremblay, mais j'invite aussi mesdames à y répondre.
    Votre témoignage était très éloquent, monsieur Tremblay, quant aux raisons pour lesquelles il fallait signer et ratifier le protocole. Par contre, je pense que nous sommes nombreux à nous interroger sur les raisons pour lesquelles ce n'est pas déjà fait. C'est à ce sujet que j'aimerais vous entendre.
    Selon vous, qui êtes impliqué dans le processus, quelles sont les raisons pour lesquelles le Canada ne l'a pas déjà fait? Comment voyez-vous, justement, l'intervention du sous-comité pour faire pression auprès du gouvernement afin qu'il ratifie le protocole?
    L'APT a eu, au cours des dernières années, des contacts avec des fonctionnaires du gouvernement du Canada. Des discussions interministérielles sont en cours. Il est vrai que les contacts ne sont pas réguliers. Nous nous demandons également pourquoi le protocole n'a, à tout le moins, toujours pas été signé. Peut-être est-ce en raison du changement de gouvernement qui est intervenu au début de 2006, ou peut-être que la situation actuelle, qui est celle d'un gouvernement minoritaire, complique également ces discussions. Comme notre organisation est internationale, elle n'est pas basée au Canada. Nous n'avons donc pas une connaissance approfondie des discussions.
    En fait, nous regrettons de constater que nous ne sommes pas sollicités autant que nous pourrions l'être. Plusieurs États nous demandent des conseils techniques et de les aider à résoudre certaines questions. Nous avons déjà, à de nombreuses reprises, offert notre assistance et notre disponibilité afin de faciliter le processus. La décision finale à savoir si le Canada doit ratifier le protocole et quelle forme prendra le mécanisme national de prévention au pays revient aux autorités canadiennes et, par ricochet, aux autorités provinciales, étant donné que le Canada est une fédération.
    Ce n'est donc pas vraiment à nous, car nous ne sommes pas en mesure de faire pression. Mais il est évident que nous souhaitons ardemment que cette situation soit corrigée.

[Traduction]

    Je regrette de ne pas pouvoir vous fournir plus d'information sur les raisons pour lesquelles cela n'a pas été fait. À cet égard, mon opinion rejoint tout à fait celle de M. Tremblay. J'ai sous les yeux une copie de la lettre envoyée par le ministre en réponse à un document qui a été soumis par notre organisme, celui de M. Tremblay et Aministie Internationale. Dans cette lettre, le ministre indique qu'il appuie en principe le Protocole facultatif, mentionne notre participation aux discussions qui sont actuellement en cours et insiste sur notre appui à l'égard des éléments fondamentaux du Protocole facultatif.
    Donc, si le comité pouvait faire pression sur le gouvernement et l'exhorter à passer à l'étape suivante, qui est la signature du Protocole, ce serait formidable. Comme nous l'avons déjà dit, nous favorisons la ratification. À notre avis, il ne serait pas très difficile de mettre en oeuvre le Protocole au Canada, malgré la nature de notre fédération, comme l'a mentionné M. Tremblay. Il existe déjà des mécanismes qui permettraient de donner les pouvoirs nécessaires aux autorités dans les domaines en question. Il y a très peu de domaines où cette situation risquerait de poser problème. Mais, à mon avis, nous pouvons trouver des solutions.

[Français]

    Il n'y a pas d'autres questions? D'accord.
    Monsieur Sorenson.

[Traduction]

    Je voudrais remercier nos deux témoins pour leur participation et pour leurs exposés. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir accepté de prendre part à cette étude très importante qui est menée par le comité.
    Très rapidement, je voudrais dire que je suis un père et je viens de recevoir un courriel de ma fille. Elle est en 9e année, et comme elle n'a pas eu une bonne note à certains travaux scolaires, sa mère menace de ne pas lui permettre de partir faire du camping avec ses camarades de classe. Elle me dit donc dans son courriel: « C'est de la torture, papa. C'est tout simplement de la torture. » Donc, les gens ont forcément des interprétations différentes de ce terme. Mais je m'empresse d'ajouter que je ne voulais surtout pas sous-estimer le travail que vous effectuez.
    Nous reconnaissons néanmoins qu'il y a des cas désolants de pays et d'endroits où on torture les détenus, et ces cas sont tout à fait réels. Le Canada doit pouvoir s'assurer de faire son possible pour atténuer ces problèmes et pour éviter que les gens soient assujettis à ce genre de choses.
    Madame Pate, vous avez dit que le fait que le gouvernement du Canada n'ait pas agi plus rapidement est une source d'embarras. Il me semble que notre invité de Genève avait peut-être une explication partielle, en ce sens que nous avons eu trois gouvernements différents au cours des quatre dernières années. Quand cela s'est présenté vers la fin de 2002, et au début de 2003, il y avait à l'époque un certain nombre de problèmes, comme c'est sans doute encore le cas, et je suis donc content de savoir que notre ministre a répondu de façon très positive au principe et à l'objectif de ce protocole.
    Ma question porte sur les exigences fédérales et provinciales. Quelles conditions doivent être remplies afin de mettre en oeuvre ce protocole facultatif? À votre connaissance — et il serait peut-être préférable de poser cette question au ministre — des discussions sont-elles en cours à l'heure actuelle — et là je songe à la situation des pénitenciers et à tout ce qui se passe dans ce contexte, étant donné qu'il a été question de la Prison des femmes à diverses reprises — avec les provinces ou les territoires au sujet de la mise en oeuvre de ce protocole? Il ne s'agit pas simplement de signer un document. Pensez-vous que, par respect pour les provinces, nous devrions en discuter avec elles dans ce cas-ci?
(1150)
    Je ne suis pas au courant de discussions de ce genre. Si j'ai bien compris, il a dû y avoir des discussions de cette nature. Donc, vous devriez être au courant, même si moi, je ne le suis pas.
    Mais, à mon avis, il faut absolument qu'il y ait de telles discussions. Il est évident qu'il existe déjà un certain nombre de mécanismes qui permettent aux dirigeants des services correctionnels, aux autorités policières et aux responsables fédéraux-provinciaux-territoriaux de se réunir régulièrement.
    Je serais donc très surprise que cette question n'ait pas été à l'ordre du jour de leurs réunions. À cet égard, je pense qu'il serait bien utile que le comité encourage la tenue de discussions sur la mise en oeuvre.
    Je souhaite que notre invité de Genève réponde également à cette question.
    Je n'ai pas encore lu le protocole. Donc, je ne me suis peut-être pas aussi bien renseigné que j'aurais dû le faire. Y a-t-il des conséquences financières? On peut supposer que le Service correctionnel et d'autres organes auraient à se conformer à un plus grand nombre d'exigences. À votre avis, quelles sont les conséquences financières de ce protocole pour le gouvernement du Canada et les provinces?
    Il peut y avoir des conséquences financières. Par contre, étant donné les mécanismes qui existent actuellement — par exemple, l'Enquêteur correctionnel, les organes policiers et d'autres possibilités qui ont été évoquées par M. Tremblay — il est possible qu'une partie de ce travail soit déjà prévue. Par contre, prévoir la possibilité d'une intervention proactive, par l'entremise de visites-surprises dans le cadre desquelles on peut vraiment voir ce qui se passe, permettrait peut-être au Canada de faire des économies en évitant des poursuites pour incarcération injustifiée qui sont liées à la torture.
    Je comprends ce que vous dites au sujet de la définition de la torture. Si j'ai parlé de l'existence de la torture en ce moment, c'est parce qu'il est bien établi que le recours fréquent à la ségrégation constitue une forme de torture, et le fait est que l'on a déjà eu recours et on continue d'avoir recours à ce genre de pratique au Canada. Je pense que vous, en tant que parlementaires, devriez vous en inquiéter, surtout étant donné les conséquences humaines et financières potentielles à long terme.
    Quand on a recours à l'isolement cellulaire dans toute la prison ou lorsque quelqu'un — je vais employer l'expression « se conduit mal » — je me rends bien compte que c'est beaucoup plus que cela — et qu'on lui impose l'isolement cellulaire, à votre avis, s'agit-il d'une forme de torture?
    Je pense qu'il convient dans ce contexte de se demander qui fait l'objet d'isolement cellulaire. Autrefois je travaillais avec les jeunes, et avec les hommes. Mais, depuis une quinzaine d'années, je travaille avec les femmes. La majorité des personnes qui font l'objet d'isolement cellulaire sont des personnes qui ont des problèmes de santé mentale.
    C'est donc une forme de torture, et un aspect du problème est justement la responsabilité du gouvernement canadien à cet égard. Je vous dirais que ce n'est pas parce que les autorités souhaitent torturer quelqu'un. Par contre, si, en forçant quelqu'un à rester quelque part, parce que c'est le seul endroit où vous pouvez le surveiller en milieu carcéral, alors que cela devient une torture pour lui, vous devez vous en préoccuper. J'ai l'impression que c'est déjà le cas. Cela ne se produit pas uniquement, comme beaucoup de gens peuvent le croire, quand une personne se conduit mal.
    Quand Mme le juge Arbour s'est penchée sur la question, elle a recommandé que la période pendant laquelle on peut garder les gens en isolement cellulaire soit limitée, étant donné les conséquences importantes que cela peut avoir sur les personnes — c'est-à-dire, sur les détenus eux-mêmes et sur leur comportement plus tard, lorsqu'ils sont réintégrés dans la collectivité. Il vaut mieux éviter de renvoyer dans la collectivité des gens qui ont connu l'isolement cellulaire. Comme je vous l'ai déjà dit, les conséquences humaines et financières de ce genre de traitement sont énormes.
(1155)
    Si nous craignons que la vie d'un détenu soit en danger ou que son bien-être dans nos pénitenciers soit menacé, je suppose que le Service correctionnel ou les agents correctionnels voudront à ce moment-là s'assurer que ces personnes soient isolées. C'est-à-dire que quelqu'un qui risquait d'être victimisé par d'autres détenus ferait l'objet à ce moment-là d'isolement cellulaire.
    D'une part, ce genre de traitement peut être motivé par le désir de les protéger — pour leur propre bien — mais, d'autre part, ceux et celles qui font l'objet de ce genre d'isolement peuvent estimer que c'est de la torture. Donc, une fois de plus, nous revenons sur la question de la définition de ce genre d'actes.
    J'ai deux commentaires à faire à ce sujet.
    Premièrement, un mécanisme comme celui-ci et l'existence d'un organe international indépendant qui ferait des visites et qui pourrait donc faire une évaluation de la situation aideraient peut-être le gouvernement à ne pas passer pour un gouvernement qui favorise la torture. Voilà donc mon premier point.
    Deuxièmement, si je me fonde sur mon expérience, les personnes qui travaillent dans le milieu correctionnel — c'est-à-dire, les hauts fonctionnaires et les agents correctionnels qui travaillent sur la première ligne — sont généralement d'accord pour dire que ce genre de situations n'est pas bénéfique. En fait, ils voudraient disposer de mécanismes supplémentaires qui leur offriraient une solution de rechange. Donc, je pense que les personnes concernées seraient généralement assez favorables à l'idée de prévoir de telles solutions de remplacement.
    Il m'arrive fréquemment de tenir ce genre de discussions. Au cours des derniers jours, j'ai visité trois prisons des femmes où nous avons justement discuté de ces questions.
    Je me demande si M. Tremblay a quelque chose à dire en réponse aux questions qui ont été posées.

[Français]

     Oui, j'aimerais revenir brièvement sur la définition de la torture. En fait, en droit international, la torture peut être définie comme une souffrance aiguë infligée par un agent public, c'est-à-dire un agent du gouvernement, de manière intentionnelle ou avec l'approbation d'un agent du gouvernement, pour arracher une confession ou punir la personne détenue. Par contre, il ne faut pas oublier que le nom véritable de la Convention des Nations Unies contre la torture est la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ces traitements sont tout aussi interdits que la torture au sens strict du terme.
    Revenons brièvement au fameux cas de mauvais traitements à l'endroit de personnes souffrant de déficience intellectuelle au Centre hospitalier Robert-Giffard de Québec.  Si je me rappelle bien, le patient avait passé six ou sept jours dans ses excréments. On n'a pas posé la question au Comité contre la torture, mais pour avoir lu certains commentaires du comité, je peux vous assurer qu'il aurait considéré de pareils traitements comme étant cruels, inhumains ou dégradants, au sens de la convention, même s'il ne s'agissait pas de torture. Il est probable que le personnel hospitalier n'avait pas l'intention de faire subir une torture, au sens strict du terme, à cette personne, mais il s'agit d'une négligence condamnée et interdite par la Convention des Nations Unies contre la torture.
    Merci, monsieur Tremblay.

[Traduction]

    Avant de passer au prochain intervenant, je voudrais simplement signaler aux membres que, s'agissant de la définition de la torture, le Canada est déjà signataire de cette convention. Il existe une convention internationale contre la torture dont sont signataires un bon nombre de pays, et cette dernière comporte déjà une définition qui est bien établie.
    Donc, nous ne discutons pas de la définition de la torture Nous discutons ici du Protocole facultatif qui prévoit divers mécanismes relatifs aux visites des prisons, etc. Nous n'allons donc pas reprendre le débat sur ce qu'est ou non la torture. La définition est déjà bien établie, et le Canada accepte et appuie l'actuelle Convention contre la torture et la définition qu'on y retrouve.
    Monsieur Marston, c'est à vous.
(1200)
    Monsieur le président, étant donné les remarques que vous venez de faire, vous allez peut-être être intéressé par mon intervention.
    Puisque nous parlons de torture, je pense que les gens devraient prendre le temps de regarder un film qui s'intitule « The Road to Guantanamo », puisqu'il existe à présent de nouvelles formes sophistiquées de torture — par exemple, attacher quelqu'un au sol par les pieds en position accroupie dans une salle blanche où l'on joue de la musique très fort pendant des heures et des heures, de même que la privation de sommeil. Nous avons tendance à penser, dès lors qu'il est question de torture, à ce qu'on a pu voir dans un film au sujet de la Seconde Guerre mondiale et aux traitements de ce type-là.
    Les conventions des Nations Unies dont nous sommes signataire correspondent, en réalité au strict minimum que nous pouvons accepter, en tant qu'êtres humains. Il suffit de regarder la liste des signataires : l'Azerbaïdjan, le Chili, le Mexique — qui est l'un des États parties où les Canadiens ont connu de graves difficultés — la Sierra Leone et la Turquie. Quand on se rend compte que des pays de ce genre l'ont signé avant un pays progressiste comme le Canada, cela ne peut qu'être une source d'embarras.
    Lorsqu'on tient compte du traitement réservé à des Canadiens qui ont été incarcérés à l'étranger — soit, Almalki, Arar, et peut-être Huseyin Celil en Chine — on sait qu'au moins deux de ces personnes ont passé un certain temps dans des cellules du type « cercueil ». Et nous pouvons aussi parler des Canadiens au Mexique, lorsque la police fait enquête sur des crimes qui ont été commis là-bas, et du traitement qu'on leur réserve. À mon avis, les gens devraient réfléchir et comprendre qu'il y a actuellement 3 000 Canadiens qui sont incarcérés dans différentes régions du monde. Dans certaines régions, il y a eu des allégations de torture.
    J'ai une copie d'une lettre qui est très semblable à celle que vous avez reçue du ministre, dans laquelle on dit que le gouvernement du Canada participe activement aux négociations sur le Protocole facultatif. En fait, c'est même ce dernier qu'il a piloté aux Nations Unies. Il a également voté en faveur de son adoption, et le Canada affirme en appuyer les éléments fondamentaux. Il s'agit donc d'une lettre où l'on dit que nous devrions le signer.
    Mais, je crois savoir qu'il y a une divergence d'opinions entre le gouvernement actuel et les provinces. Je ne sais pas si c'est pour une question de coût, mais c'est ce que j'ai entendu dire. Avez-vous eu ces mêmes échos?
    Il est certain que nous entendons certaines rumeurs.
    D'ailleurs, nous recommandons au comité de faciliter ce processus en demandant au ministère de la Justice, qui est responsable de l'application et de l'adhésion aux instruments internationaux, de prendre les mesures qui s'imposent pour dialoguer avec les provinces et les territoires afin de connaître leurs besoins financiers et discuter d'autres mécanismes, si d'autres mécanismes s'imposent effectivement dans certains domaines, et ce pour obtenir tous les renseignements pertinents et pouvoir prendre une décision en toute connaissance de cause.
    Monsieur Marston.
    Il y a lieu de parler d'un autre phénomène au Canada, à savoir les gens qui sont détenus cinq ans en vertu d'un certificat de sécurité, alors que les lois du pays en question prévoient que l'on a le droit d'être présumé innocent jusqu'à preuve de culpabilité. Même si certains d'entre eux ont récemment obtenu le droit d'être assignés à résidence, chaque fois qu'ils veulent aller quelque part, il faut qu'ils s'organisent avec le ministère pour déterminer qui va les suivre. Quand ils sont dehors, leurs mouvements sont contrôlés à un point tel que s'ils ne passent pas le feu de circulation au bon moment, il peut y avoir des problèmes. S'ils veulent sortir dans leur cour arrière, il faut que quelqu'un les accompagne et les raccompagne dans la maison. Chacun de leurs mouvements est contrôlé. Il y a des gens qui seraient peut-être portés à remettre en question ce genre de pratiques.
    À mon avis, le Canada doit se prononcer sur la question et indiquer clairement, devant le monde entier, que nous prenons très au sérieux la définition de la torture, de même que les définitions que renferment nos propres lois canadiennes, que nous n'avons pas le droit de les contourner et qu'il ne convient pas qu'on les contourne. Personnellement, j'ai le profond sentiment qu'il s'agit là d'une erreur critique que nous avons commise au Canada.
    Je vous remercie.
    Vous avez la parole, Dominique.

[Français]

     La situation est également préoccupante en ce qui concerne l'utilisation des déclarations ou des témoignages obtenus sous l'effet de la torture. En ce qui concerne les certificats de sécurité, l'affaire Harkat et l'affaire Charkaoui se sont retrouvées devant les tribunaux canadiens ou le sont encore. Le gouvernement du Canada a déposé des éléments de preuve dans le cadre de causes, par exemple celle de Abu Zubaydah et de Maher Arar, où de sérieuses allégations de torture avaient été maintenues. De tels éléments de preuve peuvent se retrouver dans des dossiers traités par les cours de justice au Canada. C'est une situation préoccupante.
    J'aimerais ajouter que dans l'affaire Arar, le rapport du juge O'Connor a recommandé des mécanismes accrus de surveillance et de transparence dans le but de contrôler les activités de l'État. En outre, le Barreau du Québec a voté samedi dernier une résolution visant à encourager le gouvernement du Canada à mettre en oeuvre les mécanismes de surveillance recommandés par le juge O'Connor. Il y a donc une volonté bien établie, chez les juristes du Québec à tout le moins, d'accroître les mécanismes de surveillance et de contrôle.
(1205)
    Monsieur Marston.

[Traduction]

    Il vous reste une minute.
    J'ai un dernier commentaire à faire, mais je n'en ai pas pour longtemps.
    À mon avis, il est absolument essentiel que nous invitions un responsable du ministère de la Justice à venir nous parler de cette question. S'il y a une question que nous devons examiner directement, avant de présenter nos conseils au gouvernement, il serait très important de le faire, à mon avis.
    Je vous remercie.
    Madame Pate, vous avez quelques secondes.
    Je recommande qu'on demande au ministère de la Justice de faire rapport sur deux éléments précis, à savoir les mesures qui ont été prises en vue d'ouvrir un dialogue avec les provinces et les territoires sur cette question, et les éventuelles conséquences financières, le cas échéant.
    Merci beaucoup.
    Nous ouvrons maintenant le deuxième tour de questions.

[Français]

     Je vais maintenant céder la parole à M. Khan.
    Monsieur Sorenson.

[Traduction]

    Je voudrais poser une autre question.
    M. Marston a soulevé la question des certificats. Encore une fois, cette mesure a été prise en vue de protéger le Canada et d'assurer la sécurité du pays. C'est une mesure qui était nécessaire, et que revendiquaient les forces policières et bon nombre d'autres groupes. D'ailleurs, si nous refusons d'extrader les citoyens canadiens vers certains pays, c'est parce que nous avons signé des conventions en vertu desquelles nous refusons d'extrader un citoyen canadien vers un pays où ce dernier risque de faire l'objet de torture.
    Voici donc ma question: est-ce que le fait de signer ce protocole facultatif lierait les mains du gouvernement pour ce qui est des mesures que pourrait prendre ce dernier dans des cas semblables à ceux qui font l'objet d'un certificat actuellement? Dans un cas où la sécurité nationale est en cause ou des organismes de collecte du renseignement soupçonnent l'implication de certaines personnes, alors que nous ne pouvons les extrader en raison des lois qui existent, ce protocole supplémentaire pourrait-il avoir le même effet?
    Mme Larochelle est plus versée en la matière que moi, et M. Tremblay a peut-être —

[Français]

    Je peux répondre en français?

[Traduction]

    Commençons avec Dominique qui sera suivie de M. Tremblay.
    Vous avez la parole.

[Français]

    Je vais laisser M.Tremblay répondre.
    Monsieur Tremblay, vous voulez commencer?
    J'aimerais simplement vous dire qu'il s'agit d'un tout autre débat. En fait, le Protocole facultatif, les mécanismes qui agissent et les visites préventives ne remettent pas en question les raisons qui sont à l'origine de l'arrestation et de la détention des personnes se trouvant dans de tels lieux. L'idée est plutôt de voir de quelle manière ces détenus sont traités. Les questions évoquées par M. Sorenson, je crois, sont plutôt du ressort d'organismes tels que le Groupe de travail sur la détention arbitraire. Je parle ici du groupe des Nations Unies qui s'est rendu au Canada en juin 2005, je crois.
    Pour répondre à votre question, je dirai que le Protocole facultatif n'a rien à voir avec ce genre de débat. Il s'agit d'autre chose. Bien entendu, le Canada devra continuer à respecter ses engagements au sens de la Convention contre la torture. Le protocole n'est qu'une élaboration de l'obligation de prévenir la torture qui se trouve, comme je le disais, à l'article 2 de la convention.

[Traduction]

    Je ne sais pas si Mme Larochelle voulait répondre, mais j'ai une autre question à laquelle elle voudra peut-être répondre en même temps.
    Monsieur Sorenson.
(1210)
    En ce qui concerne nos Forces canadiennes à l'étranger, ce protocole risquerait-il de compromettre la capacité de ces dernières d'effectuer un interrogatoire dans des conditions parfaitement légales?
    À titre d'information, je vous signale que si j'annonce le nom de chacun avant de lui donner la parole, c'est pour permettre à M. Tremblay de savoir qui parle.
    Dominique.

[Français]

    Merci.
    Pour répondre à votre première question, d'après ce que je comprends du protocole, c'est davantage un mécanisme de surveillance qu'un outil donnant des droits aux personnes qui veulent alléguer la protection contre la torture. Le débat sur le renvoi de personnes dans des pays où elles risquent la torture a été réglé en partie par la Cour Suprême dans la décision de Suresh. Je sais qu'un nouveau pourvoi, présentement devant la Cour Suprême, est appelé à reconsidérer l'arrêt Suresh. Cette question est maintenant de nouveau devant la Cour Suprême du Canada. Indépendamment de l'entrée en vigueur du protocole, les personnes dont vous parliez sont déjà protégées par la Convention de l'ONU contre la torture.

[Traduction]

    Monsieur Sorenson.
    Ma deuxième question est celle-ci: en ce qui concerne les Forces canadiennes, quand on parle d'interrogatoires légaux, êtes-vous en train de nous dire que ce protocole n'est pas pertinent?

[Français]

    Je n'ai pas de réponse. M. Tremblay pourrait peut-être répondre.
    Monsieur Tremblay, voulez-vous répondre à cette question?
    Oui.
    J'aimerais simplement souligner que les mécanismes de visite portent la responsabilité de visiter les personnes privées de liberté dans les lieux étant sous la compétence ou le contrôle des États parties. Donc, si le Canada ratifiait le protocole, on peut imaginer que le mécanisme national de prévention du Canada aurait l'intention de visiter les personnes détenues par les Forces canadiennes en dehors du territoire canadien. Mais cela reste une question assez théorique, et je reviendrai plus tard sur les raisons pour lesquelles il s'agit d'une question théorique.
    De manière pratique, si on prend le cas de l'Afghanistan comme exemple, je ne crois pas que les Forces canadiennes détiennent des ressortissants afghans durant des périodes de temps prolongées. Cependant, si c'était le cas, les mécanismes nationaux canadiens devraient effectivement pouvoir ordonner la visite de ces personnes. Il faut se rappeler que la finalité du protocole n'est pas de juger et de condamner les États si on devait constater une violation de la Convention contre la torture. Il s'agit plutôt d'aider les États à corriger certaines pratiques. Donc, le Sous-comité de l'ONU pour la prévention de la torture, créé lorsque ce protocole est entré en vigueur, agit de manière confidentielle et dans un esprit de collaboration et de coopération. Il est important d'insister sur cette question pour ne pas croire que les mécanismes nationaux chercheront à dénoncer des pratiques. Ce n'est pas du tout ce qu'on cherche à faire. L'idée est plutôt d'améliorer la façon dont les détenus sont traités.
    Madame St-Hilaire. Vous n'avez pas de question. D'accord.
    Monsieur Marston.

[Traduction]

    Il est très difficile de tenir une telle discussion sans parler des différentes formes de torture qui sont pratiquées ou des traitements tout à fait inadmissibles qui ont été réservés à certaines personnes lorsqu'elles étaient détenues par tel ou tel autre pays. Abu Ghraib en est justement un bon exemple. Si vous avez vu les photos et les descriptions des activités qui s'y déroulaient, y compris les sévices et les traitements dégradants réservés aux prisonniers, et pire encore, en ce qui me concerne, ce protocole, comme vous venez de le dire vous-même, aidera les pays qui pourraient éventuellement avoir recours à ces pratiques à adopter de nouveau le genre de comportement qu'on attend d'un pays civilisé.
    L'autre problème auquel nous sommes confrontés — et je ne voudrais pas que l'on pense que le Canada fait ce genre de choses — concerne le renvoi des gens dans un pays tiers dont on connaît la propension à torturer les prisonniers et à se servir ensuite de leurs aveux comme éléments de preuve. Le juge O'Connor a justement indiqué que certains des témoignages de Maher Arar ont pu être obtenus sous la torture. Dans ce cas-là, ne faut-il pas supposer que tous les renseignements pouvant être communiqués au Canada par de tels pays ne sont pas fiables?
    Je ne veux pas trop insister sur la question des certificats de sécurité, si ce n'est de rappeler qu'ils existent depuis longtemps. Ils existaient avant les événements du 11 septembre. Les autorités avaient recours à ce mécanisme. Leur intention était de s'en servir contre des personnes devant être expulsées — de façon à pouvoir mieux les contrôler. Mais, d'après ce qu'on m'a dit récemment, des gens qui sont détenus depuis cinq ans au Canada se sont fait dire que s'ils souhaitaient aller dans un autre pays, ils seraient libres de le faire.
    Je trouve cela très inquiétant car, pour moi, ne pas prévoir une procédure équitable pour des personnes qui sont au Canada depuis cinq ans constitue une forme de torture. Ces personnes sont éloignées de leur collectivité et de leur famille; vous les mettez quelque part où on refuse de leur reconnaître le droit le plus fondamental que nous garantit notre système judiciaire, à savoir le droit de connaître les éléments de preuve et les personnes qui ont déposé les accusations.
    Donc, pour ce qui est du Protocole, cela peut vous sembler étrange, mais si nous ne sommes pas prêts à examiner directement toutes les différentes formes de torture, il nous sera difficile de bien évaluer la situation. D'ailleurs, j'ai du mal à comprendre comment il se fait que le Canada ne soit pas déjà signataire du Protocole.
    J'ai beaucoup apprécié vos suggestions sur les personnes dont il conviendrait de connaître l'opinion. Car, quand le travail du comité sera terminé, je voudrais m'assurer que nous allons tous insister énergiquement pour que le Canada signe cet important protocole. Encore une fois, si la communauté mondiale n'est pas en mesure de garantir son appui pour les conventions de l'ONU que nous réussissons à conclure, je me dis que tous les pays du monde vont en pâtir.
(1215)
    Madame Pate, voulez-vous intervenir?
    Je voudrais simplement insister sur ce qu'a dit M. Tremblay il y a quelques minutes, de même que sur les propos que M. Marston vient de tenir. Plus on croit que le Canada jouit d'une réputation irréprochable dans le domaine de la protection des droits de la personne, plus on doit estimer, me semble-t-il, qu'il y a lieu de signer ce protocole, car ce dernier permettrait de démontrer à ce moment-là que nous appliquons des normes très élevées — ou, du moins, certaines normes — normes que nous visons même si nous ne réussissons pas toujours à les respecter.
    Cela me rappelle qu'au cours des derniers jours, j'ai visité trois pénitenciers fédéraux pour femmes. Lors de mes visites, plus d'un membre du personnel, y compris un membre de la haute direction, m'a dit que mes visites les aident à toujours respecter les normes selon lesquelles on va porter un jugement sur eux. Ils savent que je vais venir visiter et documenter tout ce que j'observe. En ce qui les concerne, c'est quelque chose de positif — du moins, pour la plupart des gens.
    À l'occasion, les gens peuvent avoir des inquiétudes à ce sujet, mais il s'agit de maintenir ces normes et d'aspirer à les respecter — l'idée n'est pas de formuler des critiques. Lorsque des problèmes sont observés — et il y en a certainement eu; d'ailleurs, j'ai expliqué brièvement les éléments qui continuent à poser problème dans le cadre du système — les personnes qui font partie du système reconnaissent qu'un bon environnement de vie, si l'on peut dire, est aussi essentiel pour les détenus que pour les employés.
    Donc, aspirer à créer des conditions qui mettent l'accent sur le traitement humanitaire et non dégradant des détenus, de même que l'absence de torture… d'ailleurs, je tiens à remercier le président de nous avoir corrigés pour ce qui est d'éviter que nous cherchions à redéfinir la torture. Le fait est qu'en nous dotant de normes de ce genre, en tant que Canadiens, nous pouvons ensuite affirmer que nous nous y conformons, comme l'indique notre désir de ratifier et de défendre un document que nous avons contribué à créer. Pour moi, cela communique un message très clair, non seulement aux détenus, mais aussi aux personnes qui travaillent dans ce domaine. Ces dernières n'optent pas pour ce métier parce qu'ils souhaitent infliger des traitements dégradants ou inhumains aux autres; elles choisissent ce métier parce qu'elles veulent faire quelque chose de positif.
    Merci beaucoup.
    Ce sera à M. Khan de poser la dernière question.
    Merci infiniment pour votre présence parmi nous aujourd'hui. Comme vous le savez, les Canadiens sont fortement conscientisés aux difficultés dont nous discutons aujourd'hui.
    Je voudrais savoir en quoi ce document changerait les choses ou serait bénéfique — car il me semble que ce dont vous parlez est déjà couvert jusqu'à un certain point par les articles 2 et 11.
    L'article 11 se lit ainsi :
Tout État partie exerce une surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d'interrogatoire et sur les dispositions concernant la garde et le traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées de quelque façon que ce soit sur tout territoire sous sa juridiction, en vue d'éviter tout cas de torture.
    Donc, en quoi ce que vous proposez serait-il différent? En vertu de l'article 11, ne revient-il pas automatiquement à chaque État partie de suivre la procédure prévue?
    Et si cette procédure n'est pas suivie, en quoi ce nouveau protocole qui serait signé par le Canada et les autres pays du monde permettrait-il d'améliorer la situation dans des pays comme la Somalie ou d'autres parties de l'Afrique qui sont essentiellement des zones de non-droit? Comment sera-t-il possible de l'appliquer? Et quels sont les avantages pratiques de son application?
    Quels grands pays l'ont signé, et êtes-vous en mesure de me nommer quelques pays qui ne l'ont pas fait?
(1220)
    M. Tremblay travaille directement dans ce domaine et est beaucoup plus au courant des grandes questions internationales que moi, si bien que je vais lui laisser le soin de répondre à cette question-là.
    Au Canada, la grande différence que je vois — et c'est effectivement une différence non seulement très importante, mais essentielle — est que le Canada, en acceptant de signer et de ratifier le Protocole facultatif, pourrait inviter le rapporteur spécial à venir examiner la situation ici. Il est évident que ce dernier pourrait décider de venir de son propre chef. Étant donné l'importance que nous attachons à la protection des droits de la personne — C'est une protection de plus pour vous, en tant que parlementaires qui représentent le gouvernement du Canada, de pouvoir affirmer auprès de vos électeurs et de tous les citoyens canadiens : « Voici les protections que nous avons créées. Nous y croyons tellement que nous avons décidé de ratifier ce protocole et nous invitons les autres à venir voir ce que nous avons fait. Le principe de la transparence guidera l'ensemble de nos activités. »
    Si vous voulez savoir quelles pourraient en être les conséquences précises, vous devriez peut-être envisager d'inviter les responsables, non seulement du ministère de la Justice, mais du ministère de la Sécurité publique, à venir vous expliquer quelles mesures ils comptent prendre ou ont déjà prises pour évaluer la situation, et comment ils peuvent s'assurer que la protection des droits de la personne est vraiment appropriée.
    En ce qui nous concerne, il existe certaines lacunes. J'imagine qu'ils ont dû discuter de l'incidence de l'application du Protocole facultatif au Canada sur la surveillance des pénitenciers, de la GRC et des cellules de détention en général — et notamment des établissements de détention provisoire — et la possibilité de double emploi lorsque la GRC a des détenus provisoires.. Que serait son incidence sur la surveillance des initiatives de justice autochtone et ce genre de choses? Il y a tous ces éléments-là, de même que la question des cellules utilisées par les autorités de l'immigration, qui concluent souvent des accords de service avec des établissements de santé mentale. Vous pourriez également demander qu'on vous fournisse ce genre d'information également. Cela vous permettrait de vous faire une bien meilleure idée de la situation actuelle.
    Mais, selon moi, cette recommandation vise d'abord et avant tout à accroître notre capacité de surveiller l'éventuel respect de nos obligations internationales, qui sont bien importantes, et sont déjà une réalité.
    Voilà donc mon avis. J'ai la liste des pays signataires, mais M. Tremblay est beaucoup plus impliqué dans les activités internationales.
    Monsieur Tremblay.

[Français]

    J'ai rapidement nommé plusieurs pays importants qui ont déjà signé ou ratifié le protocole. Je pense à l'Allemagne, à la Grande-Bretagne, à la Nouvelle-Zélande, qui l'a ratifié en mars dernier, à la France, qui l'a signé et s'apprête à le ratifier, au Brésil, à l'Argentine et à l'Afrique du Sud. Si vous posiez la question à savoir quels sont ceux qui ne l'ont pas ratifié et qui n'ont pas l'intention de le faire, j'aimerais simplement vous rappeler que lorsque le protocole a été adopté à l'Assemblée générale des Nations Unies, seulement quatre États s'y sont opposés.
    Vous savez que les États-Unis ont ratifié peu de traités internationaux, mais nous ne nous laissons pas abattre. Nous avons déjà voyagé à Washington, nous avons des entretiens avec des gens du département d'État pour leur rappeler l'importance, la finalité du protocole. Le Japon avait énormément de réticences. Finalement, au moment du vote, il s'est abstenu. Le Japon a été évalué par le Comité contre la torture il y a quelques semaines et a indiqué au comité que le protocole faisait l'objet d'un examen, donc qu'il examinait la possibilité de le ratifier. Le Nigéria, qui était un des quatre États à voter contre, a indiqué, lors du passage du rapporteur spécial sur la torture il y a quelques semaines, sa volonté d'aller de l'avant.
    Il semble donc qu'il y ait un changement politique. L'Australie ne l'a toujours pas ratifié. Nous avons prévu nous rendre en Australie en septembre prochain et travailler avec des partenaires australiens pour faire en sorte que l'Australie se joigne au groupe d'États parties. Il y a un véritable mouvement. Évidemment, la Russie, l'Inde et la Chine sont des États traditionnellement plus frileux, plus réfractaires, mais je ne crois pas que le Canada ait envie de faire partie de ces pays, qui sont à la traîne. Il a plutôt envie de démontrer un leadership.
    Rapidement, je vous mentionne deux avantages évidents, à mon avis, pour le Canada de ratifier le protocole. Cela permettrait d'assurer une couverture complète de l'ensemble des lieux de détention. Je disais plus tôt que l'APT n'a pas eu le temps d'effectuer une étude approfondie de la situation du contexte canadien, mais il me semble qu'il y a certains lieux de détention au pays qui ne font toujours pas l'objet de visites de la part de mécanismes indépendants. Donc, ratifier et mettre en oeuvre le protocole permettrait de corriger cette lacune.
    Le Sous-comité de l'ONU pour la prévention de la torture viendrait au Canada comme dans tous les autres États parties, mais seulement de manière très ponctuelle. On ne peut pas imaginer que 10 experts indépendants puissent visiter très fréquemment tous les États parties, mais même si le sous-comité ne se déplaçait au Canada qu'une fois tous les quatre ou cinq ans, il pourrait quand même formuler des recommandations utiles et pratiques. La présidente du sous-comité est une Britannique qui, auparavant, a été membre du Comité européen pour la prévention de la torture, une femme ayant énormément d'expérience. Je crois que les autorités canadiennes pourraient profiter des connaissances d'experts internationaux de cette stature.
(1225)

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Avant de remercier nos témoins pour leur présence aujourd'hui, je voudrais faire une brève observation, étant donné que je n'ai pas eu l'occasion de poser des questions.
    Je voudrais simplement dire aux témoins et aux membres du comité que, selon moi, c'est simplement une question de temps. Le Canada a toujours ratifié les conventions internationales et a toujours participé aux forums internationaux, si bien qu'un jour nous allons certainement ratifier ce document. Je ne peux pas croire que le Canada ne va pas ratifier ce protocole facultatif. C'est une simple question de temps.
    En tant que membres du sous-comité, qui fait partie du Comité des droits de la personne, si nous n'encourageons pas le gouvernement à ratifier le Protocole, je vois mal quel autre comité ferait ça au Parlement. À mon avis, il nous incombe d'inviter nos témoins à nous faire part de leurs préoccupations dans ce domaine. Nous allons recevoir les responsables du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Justice mardi prochain, de même qu'Alex Neve, d'Aministie Internationale Canada.
    En fin de compte, c'est une simple question de temps. Le Canada a toujours signé les grands traités internationaux comme celui-ci. Nous avons défendu avec énergie la Convention contre la torture. Je suis donc convaincu qu'il en sera de même pour le Protocole facultatif.

[Français]

    Je veux remercier M. Tremblay et Mme Larochelle.

[Traduction]

    Je désire également remercie Kim Pate pour sa présence devant le comité aujourd'hui.

[Français]

    Nous avons maintenant un avis de motion de Caroline St-Hilaire.
    Merci, monsieur le président.
    Vous voulez que je présente ma motion, n'est-ce pas?
    D'accord. Excusez-moi, j'étais en train d'essayer de convaincre mon collègue d'en face d'appuyer la motion.
    En résumé, monsieur le président, la motion concerne Munir Said Thalib. La plupart des membres du comité ont rencontré son épouse. Monsieur Munir est mort. Il y a eu une enquête en Indonésie. Je peux lire la motion en vous épargnant les attendus. En fait, ce qu'on demande c'est que :
Le Canada utilise les moyens diplomatiques appropriés afin d'exprimer publiquement au gouvernement de l'Indonésie son profond désaccord quant à la non publication du rapport de la Commission d'enquête [...]
    Il faut dire qu'il y a eu une commission d'enquête, mais l'information n'a pas été diffusée, et c'est ce qu'on souhaiterait obtenir par cette motion.
    Je souhaite donc l'appui de mes collègues.
    Y a-t-il un débat? Avez-vous des questions? Sommes-nous prêts à voter?
    Monsieur Sorenson.

[Traduction]

    Monsieur le président, j'ai une question. Quand avons-nous reçu cette motion?
    J'ai posé la question à la greffière. Elle m'a dit que le préavis de 48 heures a été donné le 31 mai.
    D'accord. Si le préavis a été donné, cette motion est certainement recevable.
    Mais, je vais être tout à fait honnête avec vous. Je n'ai pas vraiment étudié la question. Quand je regarde le texte de la motion, je vois qu'il est question de l'événement qui s'est produit et qui a donc suscité cette motion. Encore une fois, je trouve un peu inquiétant que le gouvernement du Canada exprime publiquement son désaccord au sujet de la non-publication d'un rapport. Je n'ai aucune information sur les raisons pour lesquelles il n'a pas été publié. Était-ce un document interne? Est-ce que c'était un facteur parmi d'autres? Le fait est que je n'ai pas eu l'occasion de me renseigner sur la situation.
    Le comité a déjà été saisi d'autres motions exprimant notre profonde frustration à l'égard de l'action d'autres gouvernements, d'autres gouvernements souverains, relativement à des questions internes. Mais cet incident-là n'est pas une simple question interne. C'est une question de droits humains. Nous parlons d'atrocité.
    Mais, pour ce qui est des raisons pour lesquelles ce document n'a pas été publié, nous nous contentons ici d'exprimer nos profonds désaccords quant à la non-publication du rapport en question. Je dois dire que je ne suis pas prêt à voter là-dessus, étant donné que je ne possède aucun autre renseignement, à part le fait que le rapport n'a pas été publié. Avons-nous d'autres documents à ce sujet? Est-ce qu'il en a été question dans les médias?
    Je voudrais donc demander à Mme St-Hilaire de nous expliquer pourquoi elle soumet cette motion à l'examen du comité.
(1230)

[Français]

    La veuve de Munir est venue ici, sur la Colline du Parlement et, comme je le disais, je pense qu'elle a rencontré beaucoup de parlementaires, surtout ceux du Sous-comité des droits internationaux de la personne. Je comprends bien votre malaise, mais en même temps, c'est la raison pour laquelle la motion est quand même douce, je dirais, puisqu'on parle de moyens diplomatiques. Je comprends bien qu'on ne demande pas nécessairement... Le Bloc n'est jamais trop en faveur de l'ingérence politique dans les autres pays. Cependant, il y a eu enquête de la part du président sur ce meurtre, et Munir Said Thalib n'est pas quelqu'un de banal. C'était quelqu'un de très important sur le plan des droits humains. Je pense que le sous-comité a le mandat de faire pression auprès du gouvernement pour que des moyens diplomatiques soient utilisés. En fait, on ne demande pas qu'il y ait une dénonciation, mais comme il existe déjà un dialogue bilatéral avec l'Indonésie, on demande que le rapport soit rendu public afin de savoir ce qui s'est passé.
     Je souhaiterais vraiment qu'on vote sur cette motion aujourd'hui.

[Traduction]

    Pourrais-je poser une question à Mme St-Hilaire? La veuve de cette personne qui a été assassinée, est-elle Indonésienne ou Canadienne? Elle est Indonésienne. Mais est-ce qu'elle était ici?

[Français]

    Elle n'est pas Canadienne.

[Traduction]

    D'accord.

[Français]

    J'aimerais ajouter qu'elle est venue durant la fin de semaine du 28 et du 29 mai parce qu'il y avait alors des dialogues bilatéraux annuels entre l'Indonésie et le Canada, à Vancouver. C'est pour cette raison qu'elle était de passage à Ottawa, entre autres, d'où la pertinence de cette motion, monsieur Sorenson.

[Traduction]

    Très bien. Y a-t-il d'autres questions?

[Français]

    La seule chose que je veux savoir, c'est s'il est possible d'apporter un petit amendement. Votre recommandation commence ainsi : « Le Canada utilise les moyens diplomatiques [...] » Or, quand on utilise les moyens diplomatiques, on ne peut pas s'exprimer publiquement. C'est soit une action diplomatique ou publique, mais on ne peut pas faire les deux. Une action diplomatique se fait entre deux gouvernements; ce n'est pas une action publique. Vous voulez une action publique de la part du gouvernement, ou une action diplomatique?

[Traduction]

    Monsieur le président, sans vouloir vous contredire, je pense que sa formulation est sans doute appropriée. Elle dit dans son texte que le Canada doit utiliser les moyens diplomatiques « appropriés ». Mais il ne s'agit pas uniquement de moyens diplomatiques, puisqu'il s'agit d'exprimer publiquement au gouvernement notre désaccord. Donc, ça laisse une certaine marge et ce libellé me rassure quelque peu, en ce sens qu'on dit que le Canada devrait utiliser les moyens diplomatiques appropriés afin d'exprimer publiquement, etc. Pour moi, ce terme « appropriés » est excellent, étant donné que certains moyens diplomatiques pourraient être appropriés, mais d'autres, non.
(1235)
    Très bien. Nous allons la mettre aux voix.
    (La motion est adoptée.)
    Nous n'avons plus de questions à débattre.
    La séance est donc levée. Merci beaucoup.