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CACN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur les relations sino-canadiennes


NUMÉRO 002 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 26 octobre 2020

[Enregistrement électronique]

(1210)

[Traduction]

    J'aimerais formuler quelques observations au profit des témoins.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de vous exprimer. Lorsque vous êtes prêts à intervenir, vous pouvez cliquer sur l'icône du microphone pour activer le son. Je vous rappelle que toutes les observations doivent être formulées par l'entremise de la présidence.
    L'interprétation de cette vidéoconférence fonctionnera d'une façon très semblable à celle d'une séance de comité ordinaire. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir le canal anglais ou le canal français. Lorsque vous prenez la parole, veuillez parler lentement et clairement afin que les interprètes puissent faire leur travail. Lorsque vous n'intervenez pas, veuillez, s'il vous plaît, mettre votre microphone en sourdine.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons Mme Angela Gui, fille de Gui Minhai, qui comparait à titre personnel, ainsi que M. Nathan Law, militant de Hong Kong et ancien législateur.
    Je vous remercie tous les deux infiniment de comparaître devant nous aujourd'hui.
    Madame Gui, pourrions-nous commencer par entendre votre déclaration préliminaire? Vous disposez de cinq minutes. Ensuite, nous passerons à M. Law.
     Merci, monsieur le président, merci, chers membres du Comité.
    Je suis reconnaissante au Comité de se préoccuper de la situation à Hong Kong, et je me sens honorée d'être invitée à témoigner devant vous aujourd'hui. Je suis la fille du ressortissant suédois, Gui Minhai, l'un des cinq libraires établis à Hong Kong qui ont été enlevés et détenus en Chine continentale vers la fin de 2015. Au cours des cinq années qui se sont écoulées depuis que mon père a été enlevé, alors qu'il était en vacances en Thaïlande, je me suis efforcée d'exhorter les gouvernements à prendre des mesures plus décisives pour exiger sa libération et pour empêcher que de tels enlèvements extraterritoriaux ne se reproduisent à l'avenir.
    Mon père a été kidnappé par des agents du gouvernement chinois à trois reprises. Il purge actuellement une peine de 10 ans de prison. Après avoir été mis en détention sur le continent chinois, il a été tenu au secret sans avoir accès à une aide juridique. Il a été forcé de refuser tout contact avec les agents consulaires suédois, ce qui a permis à la Chine de contourner en fait la Convention de Vienne sur les relations consulaires, et il a aussi été forcé d'avouer des crimes à la télévision chinoise.
    En octobre 2017, il a de nouveau disparu pendant six jours après que les autorités chinoises ont affirmé l'avoir libéré. Il a refait surface à Ningbo, dans la province du Zhejiang, dans une sorte de résidence surveillée où il était autorisé à communiquer avec moi, mais où il était fortement surveillé et n'était pas autorisé à quitter la Chine. Au cours de nos conversations, il est aussi devenu évident qu'il avait été soumis à la torture.
     Mon père a de nouveau été enlevé en janvier 2018 et, cette fois-ci, cela s'est produit alors qu'il voyageait dans un train avec des diplomates suédois. Depuis, il est de nouveau détenu au secret. En février de l'année courante, il a été condamné en secret à 10 ans de prison pour avoir fourni illégalement des renseignements à des pays étrangers. Les autorités chinoises n'ont pas expliqué à quels actes particuliers elles faisaient allusion et, en outre, elles affirment que mon père a renoncé à sa citoyenneté suédoise et a demandé que sa citoyenneté chinoise lui soit restituée. Le ministère suédois des Affaires étrangères s'est donc vu refuser toute information, même en ce qui concerne son état de santé. Je ne lui ai pas parlé depuis le début de 2018, et je n'ai aucun moyen de savoir s'il est toujours en vie.
    Le cas de mon père est de plus en plus fréquemment décrit comme un signe précurseur de la répression des libertés à Hong Kong que la Chine entreprendra par l'intermédiaire de sa récente loi sur la sécurité nationale. Bien qu'elle aille à l'encontre de la Loi fondamentale de Hong Kong et du droit international, cette loi est le moyen utilisé par le gouvernement chinois pour garantir que ce qui est arrivé à mon père puisse désormais être imposé légalement à tout citoyen de Hong Kong.
    L'article 38 de la loi indique que sa portée est censée s'étendre au-delà du territoire de Hong Kong afin de s'appliquer à toute personne, quel que soit l'endroit où elle se trouve. La Loi sur la sécurité nationale a institutionnalisé l'enlèvement extraterritorial de dissidents politiques par la Chine. Cela semble indiquer que, si les efforts déployés par des pays comme le Canada et la Suède pour répondre aux violations des droits de la personne commises par Pékin ont été importants, ils n'ont malheureusement pas été suffisants.
    Le Canada abrite une importante communauté de Chinois, en général, et de Chinois de Hong Kong, et je me demande combien de ces personnes se sentent obligées, comme moi, de prendre quotidiennement des mesures de sécurité supplémentaires pour se protéger contre le harcèlement du gouvernement chinois.
     Pour honorer son engagement à l'égard des droits de la personne, le Canada devrait donc veiller à ce que ses citoyens et résidents puissent exprimer en toute sécurité leurs opinions sur la Chine sans avoir à craindre d'être harcelés, intimidés ou enlevés. Cette mesure est particulièrement importante, car les militants de Hong Kong s'installent au Canada par crainte pour leur sécurité. Le Canada devrait également agir de toute urgence pour protéger les citoyens canadiens à Hong Kong dont la santé et la sécurité ont été menacées par l'ambassadeur chinois la semaine dernière. Comme nous l'avons constaté dans le cas de mon père, la Chine revendique maintenant le pouvoir de changer unilatéralement la nationalité des citoyens étrangers, ce qui compromet complètement la protection que la citoyenneté étrangère offrait auparavant.
    En prenant ces mesures, le Canada établira une norme importante que d'autres pays pourront adopter, et il fournira les fondements d'une coopération transnationale accrue en tenant Pékin responsable. Pour éviter que ce qui est arrivé à mon père ne devienne la norme, la communauté internationale doit agir plus rapidement et d'une façon plus coordonnée qu'elle ne l'a fait jusqu'ici.
    Je veux donc également exhorter le Canada à travailler avec la Suède et d'autres pays en exigeant clairement et publiquement l'adhésion de Pékin au droit international, en affirmant son refus de collaborer avec la Chine à l'application extraterritoriale de la Loi sur la sécurité nationale, ainsi qu'en exigeant la libération de mon père. Comme les condamnations du Canada n'ont pas été efficaces dans le passé, il est primordial que ses demandes comportent également des conséquences. Je comprends que le réexamen de ses relations avec la Chine n'est pas une décision que le Canada peut prendre à la légère. Cependant, étant donné que les enlèvements extraterritoriaux de dissidents politiques sont en train de se normaliser, ce devrait être un prix que nous sommes prêts à payer.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'entretenir avec vous. Je serais heureuse de répondre à toutes vos questions.
(1215)
     Merci beaucoup.
    Monsieur Law, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C'est un honneur pour moi de pouvoir témoigner devant le Comité spécial sur les relations sino-canadiennes.
    Comme nous le savons tous, le Hong Kong que nous connaissions a disparu. Après une année de manifestations et une horrible réaction de la part des autorités, la polarisation du gouvernement de Hong Kong est tombée à un niveau historiquement bas, et la confiance que le cadre « un pays, deux systèmes » inspirait à la population de Hong Kong a pratiquement disparu.
    Alors que la situation de Hong Kong semblait sinistre, les autorités de Pékin l'ont aggravée en contournant tous nos processus de consultation et de législation afin d'imposer la fameuse loi sur la sécurité nationale, qui représentait, pour nous, le véritable dernier clou dans le cercueil du cadre « un pays, deux systèmes »...
    Monsieur Law, je suis désolé de vous interrompre.
    On me demande si vous pourriez rapprocher un peu votre microphone de votre bouche, car les interprètes ont du mal à vous entendre.
    Merci infiniment.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Est-ce mieux maintenant?
    Je pense que c'est beaucoup mieux. Merci.
    Merci beaucoup.
    En vertu d'une loi draconienne sur la sécurité nationale, Pékin a le pouvoir arbitraire de détenir, d'arrêter et de poursuivre tous les activistes politiques ou les manifestants qu'elle n'aime pas. Carrie Lam a dit que la loi ne visait que les manifestants violents. C'est un mensonge flagrant. Le seul but de la loi est d'anéantir notre liberté d'expression, nos désirs de changement politique et notre droit de protester. Elle a créé un climat de terreur psychologique généralisé dans toute la ville.
    Jusqu'à présent, plus de 30 personnes ont été arrêtées en vertu de la loi. En effet, les médias internationaux ont parlé de l'arrestation de ma grande amie, l'activiste Agnes Chow, et du vétéran démocratique Jimmy Lai, dont l'organe de presse fait la promotion de la démocratie à Hong Kong. Des activistes bien en vue comme eux ont été arrêtés en guise de représailles à la suite des sanctions imposées par le gouvernement des États-Unis à 11 représentants de Hong Kong et de la Chine responsables de violations des droits de la personne.
    Toutefois, les arrestations ne se limitent pas à ces personnes connues. Des jeunes ordinaires ont aussi été arrêtés uniquement parce qu'ils avaient en leur possession des drapeaux ou des autocollants avec des slogans de protestation, dans le cadre d'opérations de perquisition et d'arrestation arbitraires dans la ville. Ces cas démontrent que la loi est utilisée pour terroriser le peuple de Hong Kong et le priver des droits les plus fondamentaux, et qu'elle sert d'arme légale au gouvernement de Pékin.
    Ces événements et le recours abusif à une loi très vague ont donné lieu à un sentiment de peur et de terreur blanche dans toute la société. Certains de mes amis se retirent de la vie politique et suppriment leurs publications Facebook parce qu'ils ont peur de faire l'objet de poursuites en vertu de la loi sur la sécurité nationale. Les universitaires s'autocensurent et éliminent certains sujets de recherche qui pourraient être perçus à titre d'interdits. Les journalistes craignent de ne plus pouvoir aborder certains sujets sensibles.
    La situation ne se limite pas à Hong Kong. Des rapports récents montrent des signes d'autocensure chez les universitaires et les étudiants d'établissements d'enseignement occidentaux, parce qu'ils ont peur de ce qui pourrait leur arriver lorsqu'ils se rendent à Hong Kong ou en Chine, ou en raison des liens de financement étroits avec des donateurs du Parti communiste chinois. Hong Kong est tout simplement la première pièce de domino du monde libre qui a été renversée par une avalanche d'influences autocratiques.
    Comme le Canada fait partie des démocraties les plus respectées du monde, le peuple de Hong Kong y accorde une grande valeur et veut interagir avec lui. Lorsque Hong Kong a été rendue à la Chine en 1997, une vague de Hongkongais est venue au Canada en quête d'un endroit sécuritaire qui prône nos valeurs partagées de liberté, d'humanisme et de démocratie. Alors que les mesures de répression s'intensifiaient avec la loi sur la sécurité nationale, le peuple de Hong Kong était reconnaissant à l'égard du gouvernement canadien, qui a réagi rapidement pour protéger nos libertés, notamment en cessant l'exportation des biens destinés à une utilisation militaire et en suspendant le traité d'extradition avec Hong Kong. Votre programme des jeunes talents a également sauvé la vie de personnes qui sont en danger imminent de persécution politique chez eux, qui ont désespérément besoin de protection et qui doivent changer de pays.
    Il faut cesser de penser qu'un jour, le Parti communiste chinois deviendra un partenaire stratégique des démocraties libérales. L'histoire nous montre qu'il ne fait qu'abuser de l'ouverture de notre système et qu'il l'érode de toutes les façons possibles. Les démocraties doivent s'unir et travailler ensemble pour protéger les valeurs libérales, et empêcher la Chine de répandre son idéologie et son contrôle sur d'autres régions.
    Par conséquent, je recommande les orientations politiques suivantes pour réduire l'influence de l'autoritarisme chinois. Parmi les tactiques à court terme, il faudrait mettre en place des sanctions Magnitsky contre ceux qui bafouent les droits de la personne, surtout à Hong Kong, au Tibet et au Xinjiang. De plus, il faut interdire la participation de Huawei au développement de la technologie 5G, comme l'ont fait d'autres pays, et élaborer une politique cohérente en matière d'asile et de protection des réfugiés pour les Hongkongais qui fuient la persécution.
(1220)
    À moyen et à long terme, nous devrions échanger avec nos alliés aux vues similaires à travers le monde pour élaborer une stratégie de réplique contre les violations des droits de la personne par la Chine, sa diplomatie des otages et ses pratiques commerciales coercitives; tisser des liens plus serrés en matière d'économie, de politique et de sécurité avec Taïwan; et adopter des lois pour lutter contre les agents d'influence étrangers au Canada, en ciblant surtout les activités du Front uni. C'est essentiel.
    Nous espérons que les communautés démocratiques du monde pourront s'unir pour protéger nos valeurs démocratiques communes.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Law.
    Nous allons commencer la série de questions.
    Notre premier intervenant est M. Garnett Genuis, du Parti conservateur.
    Monsieur Genuis, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins pour leur engagement, leur courage et leur présence aujourd'hui.
    Madame Gui, je vais commencer avec vous. Votre situation familiale souligne deux éléments clés associés à l'émergence des enlèvements et de la diplomatie des otages en Chine: le déni de la citoyenneté et le risque réel d'enlèvement dans les tiers pays.
    Cela me rappelle le cas de M. Huseyin Celil que nous avons déjà abordé en comité. C'est un citoyen canadien dont le statut a été nié par la Chine et d'autres. Il n'a donc pas eu accès aux services du consulat lorsqu'il était en prison. Il a aussi été enlevé en Ouzbékistan, un tiers pays.
    Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Est-ce que nous devrions nous inquiéter de la possibilité que les citoyens canadiens détenus en Chine ou qui se trouvent à Hong Kong puissent être forcés de renoncer à leur citoyenneté? Dans quelle mesure devrions-nous nous inquiéter de l'enlèvement de citoyens canadiens dans les tiers pays? Quelle devrait être notre réponse pour protéger nos citoyens, qui y sont peut-être vulnérables?
    Ces questions sont très pertinentes, et je suis heureuse d'y répondre.
    Oui, il faut absolument s'inquiéter de la possibilité pour les citoyens canadiens d'être enlevés dans les tiers pays et de voir leur citoyenneté ignorée et même changée, comme c'est arrivé à mon père. Cet événement crée un précédent très inquiétant qui, à ma connaissance, n'a pas été répété, mais il est très important que les nations comme le Canada et d'autres aux vues similaires s'expriment publiquement et affirment clairement qu'ils n'accepteront pas de telles pratiques. Ces nations doivent aussi prévoir des conséquences claires en cas de récidive.
    M. Law a soulevé de très bons points lorsqu'il a parlé des mesures précises qui pourraient être prises. À court terme, et dans le but de protéger les citoyens canadiens qui prévoient se déplacer vers les régions sous influence chinoise — ce genre de choses peut se produire en Thaïlande, comme c'est arrivé à mon père — il faudrait veiller à ce que la technologie chinoise ne soit pas utilisée au-delà de ce qui est déjà fait au Canada.
    Comme nous le savons tous, la Chine espionne les gens, surtout ceux qui se trouvent en situation de vulnérabilité. Je suis certaine que l'une des raisons pour lesquelles mon père a été enlevé, c'est que les autorités chinoises ont été en mesure de suivre ses habitudes, ses déplacements et ses plans.
(1225)
    Permettez-moi de vous poser une autre question.
    C'est intéressant de vous entendre défendre une approche et une réponse vigoureuses à la menace que présente la République populaire de Chine dans le but de nous protéger, et de protéger nos citoyens. Au Canada, il y a un débat , en quelque sorte, au sujet de notre propre situation relative à la diplomatie des otages. Certains défendent une approche de concession, c'est-à-dire qu'en situation de prise d'otage, il faudrait faire des concessions, comme dans le cas de Meng Wanzhou, pour encourager les bons comportements.
    Selon vous, il faut utiliser la force pour protéger les autres. J'ai tendance à être d'accord avec vous et à penser que c'est la bonne approche à adopter.
    Pourriez-vous parler aux personnes qui sont au Canada et qui sont personnellement affectées par la diplomatie des otages, pour qui ces sujets sont très crus et très réels? Pourriez-vous leur dire pourquoi vous préconisez une telle approche plutôt qu'une approche de concession?
    Merci. C'est une question importante.
    Je crois qu'elle est multidimensionnelle. D'une certaine façon, ma décision d'être ici et de prendre la parole en mon nom personnel touche plusieurs niveaux; c'est pourquoi j'en parle.
    Je ne crois pas que les concessions encourageront les bons comportements auxquels certaines personnes s'attendent. Certains membres de ma famille ont choisi... ou n'ont pas vraiment choisi, peut-être... Ils avaient l'impression de ne pas avoir le choix et lorsqu'on les a contactés après l'enlèvement de mon père pour leur demander de ne pas en parler, ils ont accepté. Bien que je ne puisse pas vous expliquer en détail ce qui s'est passé, je peux vous dire qu'ils se trouvent dans une situation beaucoup plus difficile que la mienne. Je crois que c'est un enjeu plus global, en ce sens que la Chine n'a jamais montré qu'elle répondait bien à la méthode douce. Comme l'a fait valoir Nathan Law dans sa déclaration préliminaire, de nombreuses économies mondiales d'importance espéraient depuis longtemps que la Chine aurait envie de s'ouvrir.
    Madame Gui, je suis désolé de vous interrompre, mais le temps de parole de M. Genuis est écoulé. Je vais devoir passer au prochain intervenant, mais vous aurez l'occasion de nous en parler davantage plus tard.
    Nous passons maintenant à M. Peter Fragiskatos. Vous disposez de six minutes. Allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins.
    Je vais poser ma question à M. Law d'abord, mais j'aimerais aussi que Mme Gui la commente. Elle vise l'idée selon laquelle les pays — les démocraties libérales, pour être plus précis — doivent travailler en collaboration et trouver des façons de démêler leurs relations avec la Chine. Les pays ne peuvent pas agir seuls à cet égard — ils peuvent bien essayer, je suppose — et l'opinion émergente veut qu'ils doivent se regrouper et travailler ensemble.
    C'est une belle proposition. J'aimerais vous entendre tous les deux sur cette question, puisque vous y travaillez depuis longtemps et que vous vous y êtes investis. Quelle serait la meilleure façon pour les pays de collaborer? Sur quelles questions devraient-ils centrer leurs efforts et quelle est la meilleure façon pour eux de se faire entendre, à votre avis?
    J'aimerais que M. Law me réponde en premier et que Mme Gui nous donne son avis ensuite.
(1230)
    Je vous remercie pour votre question.
    Je crois tout d'abord que nous devons aborder la question du consensus, qui représente la façon la plus importante de réclamer des changements politiques.
    J'ai étudié à Yale l'année dernière, à une période où Hong Kong connaissait un mouvement important. On en parlait partout et on a vu un processus de concertation se mettre en place parmi les partis politiques.
    Monsieur Law, excusez-moi de vous interrompre, mais n'oubliez pas de tenir votre microphone plus près de vous, s'il vous plaît.
    Excusez-moi.
    L'année dernière, les divers partis politiques des États-Unis sont parvenus à un consensus, et la question de Hong Kong est l'une des rares questions sur lesquelles les deux partis ont pu s'entendre et qu'ils ont pu traiter. Je travaille pour la défense des droits à l'échelle internationale, mais surtout en Europe, et je crois qu'on a recours à ce type de processus depuis quelques mois maintenant. Pour travailler ensemble à titre de démocraties libérales, il faut regrouper nos politiques sur la Chine, voir le pays comme une puissance expansionniste et adopter des mesures comme celles relatives à Huawei et aux entreprises d'État de la Chine, et aussi prendre position sur des enjeux imminents comme le boycott des Jeux olympiques d'hiver. Nous pourrions envoyer un message clair et faire comprendre à la Chine que nous n'allons pas continuer sur la voie de l'engagement et des politiques d'apaisement, mais que nous allons plutôt nous affirmer et être proactifs, ce qui...
    Monsieur Law, excusez-moi. Pourriez-vous répéter ce point? Le problème vient peut-être de mon côté.
    Je vous ai entendu dire « boycott », mais je n'ai pas entendu le reste de votre phrase.
    Excusez-moi.
    Je parlais de boycotter les Jeux olympiques d'hiver de Pékin, en 2022, pour créer une relation fondée sur les conséquences avec la Chine, plutôt que de la laisser faire ce qu'elle veut. Je crois que les alliances avec d'autres démocraties libérales et la création de politiques pourraient nous aider à restreindre l'expansion autoritaire de la Chine.
    Madame Gui, allez-y.
    Merci.
    Je suis tout à fait d'accord avec ce qui vient d'être dit. Je crois aussi qu'il est très important de former des alliances entre les démocraties libérales aux vues similaires. Pour que ce soit réaliste — et que ces alliances aient une incidence —, il faut déployer beaucoup plus d'efforts en vue du regroupement des hauts fonctionnaires de chaque pays intéressé pour discuter activement des politiques que nous voulons mettre en oeuvre afin de freiner l'influence chinoise et son développement.
    Le problème, c'est que les pays sont très enclins à signer des lettres conjointes, ce qui est très bien. Je crois qu'il est positif de connaître l'intention de ces nombreux pays, mais comme nous l'avons vu par le passé, ces déclarations d'intention n'ont rien donné. J'aimerais que les démocraties libérales puissent profiter de l'occasion pour discuter en des termes plus réalistes et constructifs de ce que nous allons faire ensemble.
    Il vous reste 45 secondes, monsieur Fragiskatos.
    Merci beaucoup. Je crois que vous avez tous deux mis le doigt sur les points de pression qui feraient réagir la Chine et ses dirigeants.
    J'ai posé la question simplement parce qu'il y a divers éléments sur lesquels l'alliance des démocraties libérales pourrait se centrer... et j'espère qu'elle le fera. Nous avons besoin de points très précis à proposer à notre gouvernement au Canada, et auxquels il faut réfléchir.
    Je vais en rester là. Je vous remercie de défendre les droits de la personne. Vous faites un excellent travail.
(1235)
    Merci beaucoup, monsieur Fragiskatos.

[Français]

     Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour six minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    À mon tour, j'aimerais commencer par remercier Mme Gui et M. Law de leurs commentaires extrêmement éclairants pour les travaux de ce comité. Je les félicite d'avoir eu le courage d'accepter d'être avec nous en dépit des craintes légitimes qu'ils peuvent avoir à la suite de ce qui leur est arrivé à eux et à leurs proches. Je les remercie infiniment et les félicite.
    L'une des préoccupations que nous avons depuis le début a trait à cette crainte qu'auraient certains témoins à venir comparaître devant ce comité. Cela nous amène à réfléchir au modus operandi de la République populaire de Chine à l'extérieur de ses frontières.
    M. Gui et un certain nombre de ses collègues ont été enlevés soit à Hong Kong, en contravention de l'autonomie sécuritaire de Hong Kong, soit ailleurs dans le monde. Dans le cas de M. Gui, c'était en Thaïlande.
    Il y a trois questions qui se posent ici.
    Premièrement, la République populaire de Chine dispose-t-elle d'un certain nombre d'agents à l'étranger? J'imagine que c'est une question qui va intéresser grandement notre collègue M. Paul-Hus, qui souhaite que nous nous penchions rapidement sur la question de la sécurité et sur celle de l'influence de la République populaire de Chine sur le territoire canadien. La République populaire de Chine dispose-t-elle d'agents à l'étranger pour faire de l'intimidation ou carrément procéder à des arrestations?
    Deuxièmement, cela requiert-il la complicité des États sur le territoire desquels s'effectuent ces enlèvements? Je pense à la Thaïlande, par exemple. A-t-on des indications que la Thaïlande a pu être complice de l'enlèvement de M. Gui sur son territoire?
    Troisièmement, il y a l'impuissance des pays à faire respecter les dispositions consulaires lorsque leurs propres ressortissants sont incarcérés par la Chine. On l'a bien vu dans le cas d'un citoyen canadien qui avait la double citoyenneté; on en avait abondamment discuté dans ce comité. La République populaire de Chine ne reconnaît pas la citoyenneté canadienne de ce ressortissant. Dans le cas de M. Gui, la Chine ne reconnaît pas la citoyenneté suédoise. Je pense qu'il y a un certain nombre de pistes concernant ce qui doit être fait par les États pour tenter de ne pas se retrouver isolés face à la Chine.
    Pour en revenir au modus operandi de la Chine pour agir à l'étranger, qu'auriez-vous à nous dire pour nous éclairer dans nos travaux, madame Gui et monsieur Law?

[Traduction]

     Madame Gui, vous pouvez répondre.
     Je vous remercie.
    Je pense que ce sont toutes d'excellentes questions et observations. Je peux commencer en abordant la question de l'enlèvement de mon père en Thaïlande en 2015. Oui, je pense personnellement que même si cela n'a pas été démontré de manière concluante, les autorités thaïlandaises ont été complices de l'enlèvement de mon père. Par exemple, quand il a été enlevé, il a laissé derrière lui son passeport et il a dû le renouveler pendant sa période de détention à domicile, en 2017. À ce que je sache, tout ce que les autorités thaïlandaises ont dit au sujet de cet incident, c'est que rien dans leurs dossiers n’indiquait qu'il avait quitté la Thaïlande. Elles ne semblent pas disposées à contribuer à une enquête sur ce qui était arrivé à mon père, ce qui me préoccupe grandement.
    En ce qui concerne l'autre question sur les ressortissants ayant la double nationalité qui pourraient potentiellement subir le même traitement que mon père, je ferais simplement remarquer que mon père ne possède que la citoyenneté suédoise et n'est pas citoyen chinois. Il s'est activement astreint au processus de renonciation, qui est très long et ardu. Cela n'a pas semblé avoir d'importance. Voilà qui peut, selon moi, avoir des implications très angoissantes pour les citoyens canadiens également.
(1240)
    Monsieur Law, vous disposez d'une minute.
    Je vous remercie.
    Oui, je considère certainement que cela s'applique particulièrement aux activistes comme moi. Je m'adonne à l'activisme politique depuis environ six ans, et j'évite de me rendre dans des pays qui entretiennent des relations fort amicales avec la Chine. C'est notamment le cas de la Thaïlande. Pour moi, il est évident que les possibilités de collusion et de collaboration entre ces régimes autoritaires sont fort élevées. Les activistes comme moi doivent donc se montrer très prudents.
    Il y a effectivement une raison à l'absence d'activistes de Hong Kong toujours présents là-bas lors de séances comme celle-ci et d'autres audiences: ils s'exposent à de nombreuses conséquences.
    Je vous remercie beaucoup.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Bergeron.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Harris. Il a six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins de comparaître aujourd'hui. Je tiens à vous féliciter tous les deux du courage dont vous avez fait preuve face à une situation très difficile, alors que le gouvernement est très puissant et exerce son pouvoir de main de fer, notamment contre votre père, madame Gui, et contre vous personnellement, monsieur Law.
    Monsieur Law, vous avez évidemment quitté Hong Kong la veille de l'imposition de la Loi sur la sécurité nationale. Vous vivez maintenant au Royaume-Uni. Nous entendons dire de temps en temps qu'on s'attendait à ce que le Royaume-Uni impose ce qu'on appelle souvent les sanctions Magnitski. Je pense qu'après un long débat et moult tergiversations, le gouvernement a enfin adopté une loi semblable à celle d'autres pays, même si ces derniers sont peu nombreux, bien entendu.
    Que prévoit-on que le Royaume-Uni pourrait faire dans un avenir prévisible?
    En effet, nous espérons tous que les sanctions prévues dans la loi Magnitski s'appliqueront aux fonctionnaires chinois. Pour l'instant, ce n'est pas le cas. Nous tentons de promouvoir la mise en application des sanctions pour que ces fonctionnaires soient tenus responsables de leurs actes. Je pense qu'un mécanisme de sanctions semblable pourrait être instauré par l'Union européenne dans l'avenir. J'espère qu'il s'appliquera également aux fonctionnaires chinois en ce qui concerne les camps de concentration ouïghours et d'autres violations des droits de la personne perpétrées en Chine.
    Pour ce qui s'en vient dans l'avenir, le gouvernement britannique s'est penché sur le programme relatif aux citoyens des territoires britanniques d'outre-mer, lequel permet à des millions de Hongkongais d'entrer au Royaume-Uni et d'y obtenir la citoyenneté à long terme. Ce programme est considéré comme très bénéfique pour les gens de Hong Kong. Pour ma part, je m'active auprès du gouvernement pour élargir ce programme aux jeunes dont les besoins sont les plus criants. Il existe d'autres mécanismes, comme la surveillance étroite des entreprises chinoises au Royaume-Uni et d'autres politiques qui permettent réellement de contrer l'influence du Parti communiste chinois à l'étranger. Je pense que ce sont là des directions vers lesquelles le gouvernement britannique se dirige, et j'espère que les autres pays européens pourront aussi s'engager dans cette voie.
     Peut-être devrais-je être plus précis, car vous avez manifestement exprimé l'espoir que cela se produirait. Le Royaume-Uni a modifié ses politiques pour aider les gens qui détiennent déjà un passeport britannique et peuvent donc entrer au Royaume-Uni au titre de passeports existants. Le gouvernement a apporté à ses politiques des modifications qui, si j'ose dire, sont très faciles à faire.
    Vous exprimez l'espoir que le gouvernement impose des sanctions. Or, il a eu amplement le temps de le faire. Je me demande si vous avez des attentes réalistes que le gouvernement britannique impose réellement des sanctions, car je n'ai rien entendu récemment qui indique qu'il en fera plus qu'il ne l'a déjà annoncé.
    Le gouvernement a maintenant laissé entendre qu'il faciliterait les choses pour les étudiants qui viennent étudier au Royaume-Uni pour leur permettre de rester plus longtemps. Voilà une autre modification de politiques très bénéfique.
    Je m'intéresse à la question des sanctions, car il n'y a que sept ou huit pays qui se sont dotés de ce genre de loi, et d'autres se joindront peut-être à eux. Je cherche à savoir quels mécanismes pourraient être utilisés quand vous parlez de... Il est question, au Canada, de former une alliance de pays qui cherchent à compliquer les choses pour les autorités qui violent des droits de la personne et qui agissent de la manière dont nous parlons et que nous voudrions influencer.
    Quels mécanismes pourrions-nous utiliser outre les sanctions du genre Magnitski, qu'aucun pays n'a encore appliquées à part des États-Unis?
(1245)
    Je vous remercie de nouveau de votre question.
    Je pense que le ministre des Affaires étrangères a aussi parlé de la question; le gouvernement a donc envisagé d'imposer ces sanctions et n'a pas dit que c'était impossible. Selon moi, il est essentiel de maintenir un dialogue constant avec ce gouvernement, et j'espère qu'il pourra agir dans l'avenir dans le cadre du deuxième ou du troisième tour de sanctions de la loi Magnitski.
     Il est, à mon avis, important de travailler ensemble, et pas seulement au sujet du mécanisme de sanction. Par exemple, si toutes les démocraties libérales décidaient d'agir en ce sens, alors que nous avons un accord commercial avec la Chine, il serait impossible pour cette dernière d'avoir la marge de manœuvre nécessaire pour tenter d'entretenir des relations et de faire des affaires avec un pays et pas avec les autres afin d'éluder ce genre d'effort commun déployé par toutes les démocraties libérales.
    L'ennui, c'est qu'il n'existe pas de mécanisme concret, comme Mme Gui l'a fait remarquer. Les dirigeants pourraient se réunir pour élaborer un plan afin de tenir la Chine responsable de ses actes. Selon moi, le problème, ce n'est pas de savoir quelles politiques nous pourrions suivre, mais l'intention et le mécanisme que tous ces pays pourraient établir ensemble.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Law et monsieur Harris.
    Nous commençons maintenant le deuxième tour.
    Monsieur Chong, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Madame Gui, je vous remercie de prendre le temps de nous raconter vos déboires avec Hong Kong. Votre récit m'a donné froid dans le dos.
    Mon défunt père était un Hongkongais qui est né, qui a grandi et qui a effectué ses études secondaires à Hong Kong. Il a entamé ses études universitaires dans le Sud du contient chinois il y a un peu plus de 70 ans, alors que les communistes entreprenaient leur marche vers le sud en 1948. Il a fui à bord d'un des derniers trains en partance pour Hong Kong.
    Comme votre père, il n'a jamais possédé la citoyenneté chinoise, étant plutôt titulaire d'un passeport britanno-hongkongais. Quand nous étions petits, il nous a déclaré que jamais il ne retournerait sur le continent chinois par crainte d'être enlevé. Votre récit m'a donc fait frissonner, et je vous remercie de nous en avoir fait part.
    Bonjour, monsieur Law. Je vous remercie de prendre le temps de témoigner. Il fait bon de vous revoir, et je suis enchanté de voir que vous vous portez bien et que vous êtes en sécurité.
    Ma première question s'adresse à Mme Gui. Le gouvernement suédois a-t-il fait quelque chose à propos de l'arrestation de votre père par les autorités thaïlandaises et à l'égard de la République populaire de Chine?
    Je vous remercie également de nous avoir raconté l'histoire de votre famille.
    Voilà qui a un lien avec la deuxième question qui m'a été posée, je pense, au sujet du fait qu'il faudra potentiellement faire des concessions. D'après ce que j'ai vu, la Suède hésite à réagir aux violations des droits de la personne de mon père, mais aussi en général. Comme nous l'avons constaté, cette approche n'est pas efficace.
    En ce qui concerne les communications avec la Thaïlande, je ne sais pas tout ce qu'il se fait au chapitre des communications bilatérales, bien entendu. Je sais que des questions sont posées, mais je pense qu'elles ne le sont pas en public, comme j'aurais espéré qu'elles le soient.
(1250)
     D'accord.
    L'Union européenne a-t-elle fait une déclaration publique à propos de la violation de la Convention de Vienne par la Chine dans le cas de votre père?
    Le Parlement européen a adopté une résolution, ou plutôt deux, je pense, sans toutefois faire précisément mention de la Convention de Vienne. Je me trompe peut-être, mais au mieux de mes souvenirs, je ne pense pas qu'il l'ait fait.
    Ces résolutions concernaient-elles votre père?
    Oui.
    Je vous remercie.
    Monsieur Law, vous avez été élu au conseil législatif de la région administrative spéciale de Hong Kong. Quelles répercussions l'absence de candidats prodémocratie a-t-elle eues sur le fonctionnement de ce conseil législatif et sur l'opinion qu'en ont les Hongkongais?
    Après une série de disqualifications de Cantonnais souhaitant être élus au conseil législatif et de parlementaires au cours des dernières années, je pense que les Hongkongais considèrent déjà que ce conseil n'est qu'un pantin à la solde du gouvernement chinois, car ils ne bénéficient pas du droit d'y faire élire leurs représentants de manière équitable.
    À mon avis, oui, la légitimité de ce conseil est fortement remise en doute et les habitants de Hong Kong croient de moins en moins à un changement de système. Voilà pourquoi il y a eu des manifestations aussi massives l'an dernier; ils ont cessé de croire que la participation au système se traduit par un changement concret.
    Je vous remercie.
    Je me souviens d'être assis à la table du Cabinet en 2006 quand nous avons dû évacuer des milliers de Canadiens lors du conflit au Liban. Je pose la question suivante en pensant aux 300 000 Canadiens qui vivent à Hong Kong. À votre avis, où se trouve le point de bascule à partir duquel il pourrait y avoir un exode massif de Hongkongais cherchant à quitter la région administrative spéciale?
    Je pense que, pour l'instant du moins, cet exode est peu probable dans un avenir prévisible, car Pékin ne cible pas encore un grand nombre de gens. Mais outre un plan d'évacuation, il est essentiel d'apporter une aide concrète aux habitants de Hong Kong; nous devons donc absolument établir un plan en ce sens.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie, monsieur Chong.

[Français]

     Monsieur Dubourg, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je compte partager mon temps de parole avec ma collègue Mme Yip.
    D'abord, permettez-moi de remercier Mme Gui et M. Law de leur présence. Tout comme mes collègues, je veux vraiment leur dire que leur courage a été exceptionnel.
    Madame Gui, je voudrais surtout comprendre l'influence du gouvernement chinois au-delà des frontières. Je ne veux pas vous causer des problèmes de sécurité, mais pouvez-vous nous dire quelles mesures vous avez prises, personnellement, pour vous protéger? Par ailleurs, qu'est-ce que le gouvernement canadien peut faire pour vous accompagner dans cette démarche?

[Traduction]

     Je vous remercie.
    C'est quelque chose qui me préoccupe presque quotidiennement depuis cinq ans, soit depuis que je m'occupe de cette affaire. À l'instar de M. Law, j'évite de me rendre dans de nombreux pays où j'aimerais voyager, mais la Chine y est influente. J'ai été la cible de nombreuses tentatives d'intimidation ici, au Royaume-Uni, où j'habite, mais aussi en Suède, en Allemagne et dans d'autres pays. Ces tentatives ont principalement pris la forme de [Difficulté technique] photographie, mais aussi d'une tentative d'entrée par effraction. Au début de l'année dernière, j'ai fait l'objet d'une opération d'influence, à laquelle je soupçonne des agents chinois d'avoir participé. L'ambassadrice de la Suède alors en poste à Pékin m'a conviée à une rencontre à Stockholm avec deux hommes d'affaires chinois. Je suis restée dans le salon de l'hôtel pendant 72 heures, et on m'a fait comprendre que je ne pouvais pas partir et que je devais me tenir tranquille dans le dossier de mon père, sinon je ne le reverrais jamais. C'est ce qu'on m'a dit.
    Bien entendu, il est très difficile, en de pareilles circonstances, de savoir comment on peut se protéger. Ce n'est malheureusement jamais simple. Je dois m'assurer de transmettre le moins d'informations possible quand je communique. Même lorsque j'utilise des applications cryptées, je ne dis à personne où je me trouve. Je crains de communiquer avec des amis qui pourraient utiliser des téléphones ou des routeurs Huawei. C'est peut-être la recommandation la plus concrète à court terme que je pourrais formuler à ce sujet. À part examiner et suivre l'influence et l'intimidation chinoises au Canada, je recommanderais aussi que le Canada tente de limiter l'expansion de la technologie chinoise afin de protéger les personnes dans ma situation.
(1255)
    Je vous remercie beaucoup, madame Gui. Je sais que le temps file, mais il me reste juste une minute.

[Français]

    Monsieur Law, je sais que vous faites partie des six personnes qu'on cherche à arrêter. Je me demande comment vous vivez personnellement cette situation au Royaume-Uni.

[Traduction]

    La réponse simple, c'est que je ne peux pas retourner à Hong Hong et que je vis une vie d'exil. Je consacre désormais ma vie au travail international de défense des droits de la personne pour le mouvement démocratique de Hong Kong.
    Je vous remercie beaucoup.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Dubourg.
    Nous poursuivons maintenant avec M. Bergeron pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais revenir sur la question qui a été posée par mon collègue M. Dubourg, car elle couvre l'un des aspects de la question que j'ai posée dans un premier temps et à laquelle on n'a pas tout à fait répondu.
    Je sais que les risques d'enlèvement ou d'arrestation extraterritoriale sont plus grands dans des États plus proches du régime communiste chinois. Diriez-vous qu'il y a malgré tout des risques d'enlèvement dans des pays qui sont moins proches du régime communiste chinois, par exemple le Canada ou le Royaume-Uni, ou est-ce que dans ces cas-là il est davantage question de harcèlement à l'endroit de dissidents chinois?
    Je crois que la question s'adresse à M. Law et à Mme Gui.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup de ces questions.
    Je dis toujours que je suis en parfaite sécurité. Nous comprenons toute l'étendue que pourrait avoir l'influence du Parti communiste chinois; je tente donc...
    Monsieur Law, je suis désolé de vous interrompre, mais veuillez tenir votre microphone.
    Je vous remercie.
    Veuillez m'excuser.
    Je dis donc aussi que je suis parfaitement en sécurité et que nous comprenons toute l'étendue que peut avoir l'influence de la Chine. Depuis que j'ai quitté Hong Kong, il y a deux mois, je vis une vie discrète, tentant de ne pas me faire remarquer. Je n'ai donc pas participé à des activités ou pris la parole en public.

[Français]

     Madame Gui, souhaitez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Je serai très brève.
    Ce qui est arrivé à mon père, enlevé en Thaïlande, était alors sans précédent. Je pense donc qu'en regard de l'expansion de la répression des droits de la personne par la Chine, il est raisonnable de présumer que des enlèvements pourraient effectivement survenir dans l'avenir dans des pays comme le Canada ou d'autres démocraties occidentales.
(1300)
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Bergeron.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Harris pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Madame Gui, vous venez d'exprimer vos préoccupations à propos d'enlèvements potentiels au Canada. Quand vous avez parlé de la Thaïlande, vous avez évoqué la complicité ou la complicité potentielle du gouvernement et l'absence de protection de la part de la Suède.
    Compte tenu des préoccupations soulevées par les Canadiens, qui se demandent s'ils devraient avoir peur — et notre comité en entendra bientôt quelques-uns —, que devrait faire le gouvernement du Canada pour protéger ses citoyens contre des situations potentielles semblables? Avez-vous des suggestions?
    Je me rends compte que vous n'êtes pas experte en la matière, mais j'ai l'impression qu'il existe là une vulnérabilité et que le gouvernement devrait peut-être faire quelque chose qu'il ne fait pas.
    Je vous remercie.
    Je ne suis pas experte en la matière, effectivement, mais des idées me viennent à l'esprit. La première est la suivante: assurez-vous que les consulats et l'ambassade du Canada en Chine élargissent leurs capacités pour surveiller les violations des droits de la personne. Veillez également à ce que les citoyens puissent s'adresser aux consulats ou à l'ambassade au sujet de leurs préoccupations en matière de sécurité.
    Je pensais aussi que...
    Oh, non. J'ai complètement perdu le fil de ma pensée. Pourriez-vous répéter la question, je vous prie?
    Oui, c'est quelque chose qui est important à Hong Kong ou en Chine. Je suppose que c'est le contraire que je demande.
    Vous affirmez que la Thaïlande et la Suède n'ont pas protégé votre père. Comment le Canada peut-il s'assurer que les gens qui se trouvent sur son territoire, les citoyens canadiens ou chinois qui sont au Canada... Que devrions-nous faire pour que pareille chose ne se produise pas en sol canadien?
    Je vous remercie de me rappeler la question. Désolée d'avoir eu un trou de mémoire.
    Je pense que le Canada peut émettre des avertissements ou des conseils aux voyageurs au sujet des voyages en Chine, une mesure que d'autres gouvernements prendront, j'espère.
    Je comprends également que votre question concerne les enlèvements au Canada. Je pense qu'en adoptant une position plus ferme en général contre la Chine en public, en imposant notamment des sanctions ciblées semblables aux sanctions inspirées de la loi Magnitski que d'autres pays ont parlé d'adopter, le Canada signifierait à la Chine qu'il n'acceptera pas de tels comportements.
     Je vous remercie, madame Gui.
    Merci, monsieur Harris.
    Mesdames et messieurs, nous avons maintenant dépassé le temps prévu. Je tiens à remercier nos témoins de tout cœur.
    Je sais que nous vous sommes tous reconnaissants d'avoir témoigné aujourd'hui et que nous avons tous été ébranlés par vos propos. Nous vous remercions beaucoup.
    La séance est levée.
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