SNUD Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 15 avril 2002
¾ | 0840 |
La présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)) |
¾ | 0845 |
¾ | 0850 |
¾ | 0855 |
¿ | 0900 |
La présidente |
M. Sorenson |
La présidente |
M. Kevin McKinnon (coordonnateur des programmes pour la jeunesse et la famille, ministère de la Santé et des Services sociaux (Île-du-Prince-Édouard)) |
¿ | 0905 |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Wayne Clark (directeur, Talbot House) |
¿ | 0910 |
La présidente |
¿ | 0915 |
Sergent d'Administration Rick Gibbons (Application conjointe de la législation antidrogue, Gendarmerie royale du Canada) |
¿ | 0920 |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Caporal Ken Murray (coordonnateur, Service de la sensibilisation aux drogues, Île -du-Prince-Édouard, Division L et coprésident, Comité de l'hépatite C, Gendarmerie royale du Canada) |
¿ | 0925 |
¿ | 0930 |
La présidente |
M. White (Langley--Abbotsford) |
Mme Maureen McIver |
M. Randy White |
Cpl Ken Murray |
M. Randy White |
Cpl Ken Murray |
¿ | 0935 |
La présidente |
¿ | 0940 |
Mme Maureen McIver |
M. Randy White |
M. Wayne Clark |
M. Randy White |
Sgt/A Rick Gibbons |
M. Randy White |
Sgt/A Rick Gibbons |
¿ | 0945 |
M. Randy White |
La présidente |
M. Randy White |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
Ms. Davies |
¿ | 0950 |
Mme Maureen McIver |
Mme Davies |
Cpl Ken Murray |
¿ | 0955 |
Mme Davies |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
M. Kevin McKinnon |
Mme Davies |
M. Kevin McKinnon |
Mme Libby Davies |
À | 1000 |
La présidente |
Mme Davies |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.) |
Sgt/A Rick Gibbons |
Mme Carole-Marie Allard |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Maureen McIver |
M. Wayne Clark |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Maureen McIver |
À | 1005 |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Maureen McIver |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Maureen McIver |
Mme Carole-Marie Allard |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
À | 1010 |
Mme Maureen McIver |
M. Wayne Clark |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Sorenson |
À | 1015 |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Sorenson |
Sgt/A Rick Gibbons |
M. Sorenson |
Cpl Ken Murray |
M. Sorenson |
Cpl Ken Murray |
À | 1020 |
M. Sorenson |
La présidente |
M. Sorenson |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
À | 1025 |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
À | 1030 |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
À | 1035 |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
M. Randy White |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Randy White |
À | 1040 |
La présidente |
À | 1045 |
M. Kevin McKinnon |
M. Randy White |
La présidente |
M. Wayne Clark |
À | 1050 |
M. Randy White |
Sgt/A Rick Gibbons |
Cpl Ken Murray |
À | 1055 |
M. Randy White |
La présidente |
Ms. Davies |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
Mme Libby Davies |
Á | 1100 |
Mme Maureen McIver |
Ms. Davies |
Mme Maureen McIver |
Ms. Davies |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
Ms. Davies |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Wayne Clark |
Á | 1105 |
Ms. Davies |
M. Wayne Clark |
Ms. Davies |
M. Wayne Clark |
Ms. Davies |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
M. Wayne Clark |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Carole-Marie Allard |
La présidente |
Mme Carole-Marie Allard |
La présidente |
Mme Carole-Marie Allard |
La présidente |
Á | 1110 |
M. Wayne Clark |
La présidente |
Á | 1115 |
Mme Carole-Marie Allard |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Kevin McKinnon |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Kevin McKinnon |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Kevin McKinnon |
Á | 1120 |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mr. Sorenson |
Á | 1125 |
La présidente |
Mr. Sorenson |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
La présidente |
Á | 1130 |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
Mme Maureen McIver |
M. Kevin McKinnon |
Mme Maureen McIver |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
Á | 1135 |
M. Kevin McKinnon |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Sgt/A Rick Gibbons |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
La présidente |
Cpl Ken Murray |
Á | 1140 |
La présidente |
CANADA
Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le lundi 15 avril 2002
[Enregistrement électronique]
¾ (0840)
[Traduction]
La présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)): Bonjour. Je déclare la séance ouverte.
Merci beaucoup d'avoir accepté de nous parler ce matin.
Le Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments se réjouit d'être à Charlottetown. Vous devrez être indulgents envers la plupart d'entre nous, car nous sommes dans un fuseau horaire différent. Et si c'est déjà difficile pour ceux d'entre nous qui viennent de Montréal et de Toronto, pour Libby, il est 4 h 30 du matin parce qu'elle vient de Vancouver. Pour Randy et Kevin, il est environ 5 h 30 du matin. Nous nous réjouissons beaucoup d'être ici et de recevoir Maureen McIver, du ministère de la Santé et des Services sociaux de l'Île-du-Prince-Édouard. Elle est consultante en toxicomanie pour les services de l'enfant, de la famille et de la collectivité. Kevin McKinnon est coordonnateur des programmes pour la jeunesse et la famille. Soyez les bienvenus. Le représentant de Talbot House est Wayne Clark, son directeur. En outre, la GRC est représentée par le sergent d'état-major Rick Gibbons, de la police des drogues et le caporal Ken Murray, coprésident du Comité sur l'hépatite C.
Pourquoi ne pas vous demander de prendre la parole dans l'ordre où je viens de vous présenter? Si vous ne faites pas de présentation conjointe, la première personne peut commencer.
Madame McIver.
Mme Maureen McIver (consultante en toxicomanie, ministère de la Santé et des Services sociaux (Île-du-Prince-Édouard)): Madame la présidente, monsieur le vice-président, membres du comité, je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui. S'il y a une telle différence de fuseau horaire, vous serez peut-être plus indulgents avec nous.
Je voudrais d'abord parler de l'éducation, de la prévention et du traitement des toxicomanes dans l'Île-du-Prince-Édouard. Deuxièmement, je passerai en revue les programmes de prévention et de traitement que nous avons à offrir dans la province. Troisièmement, j'aimerais dire quelques mots au sujet du principe de la réduction des méfaits. Enfin, je voudrais vous parler des mesures essentielles que le gouvernement fédéral devrait prendre dans le domaine de l'éducation, de la prévention et du traitement des abus de drogues et de médicaments et de la toxicomanie. Quand je parle de drogues, cela comprend aussi bien l'alcool et la nicotine que les drogues illicites.
Les Services de toxicomanie de l'Île-du-Prince-Édouard croient que les personnes chez qui l'on diagnostique une pharmacodépendance ou qui sont des joueurs pathologiques, souffrent d'une maladie chronique, évolutive et qui peut être mortelle. Nous avons adopté un modèle bio-psychosocial pour le diagnostic et le traitement de la pharmacodépendance et du jeu pathologique. L'utilisation d'un modèle bio-psychosocial permet de tenir compte des effets que les facteurs biologiques, génétiques, psychologiques et socio-culturels ont sur la manifestation et la progression de cette maladie. Cela nous permet également d'examiner les manifestations psychosociales telles que les difficultés relationnelles, les problèmes d'emploi, les difficultés juridiques, les troubles mentaux et les troubles de santé qui sont souvent évidents avant que l'intéressé ne commence à éprouver de graves problèmes médicaux.
Le modèle bio-psychosocial fournit un cadre général pour la compréhension des dépendances qui englobe à la fois le modèle médical, le modèle cognitivo-comportemental et les programmes communautaires en 12 étapes.
La dépendance est une maladie qui cause de nombreux problèmes médicaux, sociaux et économiques. Elle fait beaucoup de dégâts en engendrant des troubles physiques et mentaux, de la violence familiale, des foyers brisés, des emplois perdus, des accidents, des activités illégales, le syndrome de l'alcoolisme foetal ainsi que des coûts pour notre économie et nos services de santé.
L'Île-du-Prince-Édouard cherche à traiter cette maladie en se fixant l'abstinence comme objectif à long terme. Nous croyons qu'il s'agit là du but ultime de la réduction des méfaits.
Nous reconnaissons également qu'il s'agit d'une maladie récidivante et nous soutenons les personnes dépendantes et leurs familles pour les aider à parvenir à l'abstinence et à s'y maintenir.
Nous croyons aussi qu'il peut y avoir des abus de drogues sans dépendance, ce qui exige une approche différente, par exemple, des programmes d'éducation et de sensibilisation.
En ce qui concerne les programmes que nous offrons dans la province, en 1999, nous avons effectué un examen de nos services. L'Île-du-Prince-Édouard a maintenant un programme provincial pour les personnes souffrant de dépendance qui offre un vaste éventail de services d'éducation, de traitement et de soutien aux résidents de la province dans le but de prévenir, réduire et éliminer les effets potentiels et nuisibles de l'alcool, de la drogue et du jeu.
Parmi les principales initiatives incluses dans ce nouveau programme provincial figure la construction d'un centre pour abriter des services de désintoxication et de réinsertion. Nous avons donc maintenant des services centralisés de traitement en établissement, mais nous avons également élargi et amélioré nos services externes dans les quatre régions sanitaires. Wayne et Kevin vous en diront davantage sur ces programmes.
L'élargissement des programmes externes nous permet d'offrir des services de dépistage, d'intervention et de traitement à la clientèle locale.
Toutes les régions sanitaires de l'Île-du-Prince-Édouard offrent maintenant sur demande les programmes de traitement qui s'adressent aux femmes et aux joueurs pathologiques, des services d'évaluation, de counselling et d'aiguillage; des programmes pour les adolescents y compris des programmes d'aide aux étudiants dans les écoles ainsi que des services externes de désintoxication et de suivi. Nos services externes de désintoxication comprennent des programmes de renoncement au tabac ainsi que des programmes externes de réinsertion et de soutien familial. Nous offrirons également des traitements à l'acupuncture à partir du mois de mai.
Le centre provincial de désintoxication en établissement comprend 25 lits de désintoxication, 15 lits de réinsertion et deux lits de stabilisation pour adolescent. Ce centre abrite également le programme itinérant de traitement des joueurs pathologiques ainsi que le programme itinérant de traitement qui s'adresse spécialement aux femmes. Ce sont des programmes provinciaux qui se déplacent vers les régions où se trouve la demande.
Parmi les autres programmes provinciaux, je citerai les soins prolongés pour hommes dont Wayne vous parlera ainsi que les soins prolongés pour femmes.
Il y a une bonne communication entre les services provinciaux en établissement et les services régionaux externes afin d'assurer des soins coordonnés aux clients et à leurs familles.
¾ (0845)
La réduction des méfaits est un concept qui ne signifie pas la même chose pour tout le monde et qui est source de grande confusion. En toute franchise, j'aimerais mieux qu'on ne l'utilise pas. Pour certaines personnes, cela signifie réduire la consommation de drogue dans l'espoir de diminuer les problèmes. Pour d'autres, cela signifie empêcher la toxicomanie grâce à l'éducation ou les problèmes liés à la toxicomanie; par exemple, grâce au programme d'échange de seringues, à la promotion de la sexualité sans risque, au programme de conducteur désigné et aux lois relatives à la conduite avec facultés affaiblies.
À notre avis, la réduction des méfaits a sa place dans tous nos programmes, tant en ce qui a trait à l'abus d'intoxiquants qu'au traitement des dépendances. Par exemple, lorsqu'un toxicomane qui fait continuellement des rechutes est admis à nouveau dans un centre de désintoxication ou des programmes de prévention des rechutes, ou les deux, nous réduisons les méfaits pour la personne en question, sa famille et sa collectivité.
Nous avons des services de liaison entre les services de toxicomanie et les soins actifs, les services de toxicomanie et la santé mentale, les services sociaux et la justice, aux fins d'évaluation, d'intervention précoce et de recommandation.
Nous offrons aux étudiants du secondaire et de collège un programme de sensibilisation aux dangers de la drogue. Tous les ans, nous organisons une importante campagne pour la semaine de sensibilisation aux drogues. Nous appuyons un modèle de réduction des méfaits dans les programmes de traitement des dépendances lorsqu'il englobe un objectif d'abstinence.
En revanche, il nous est difficile de conseiller aux personnes dont le diagnostic de pharmacodépendance est évident de réduire leur consommation. Des toxicomanes ont essayé à maintes reprises, mais en vain, de limiter leur consommation. À notre avis, nous rendons un mauvais service aux gens lorsque nous leur conseillons de réduire leur consommation en leur faisant croire que c'est possible. Je parle des personnes pharmacodépendantes. Lorsque ces personnes connaissent un nouvel échec, nos clients éprouvent un sentiment accru de faiblesse et de désespoir.
À notre avis, nous devons expliquer aux clients qui sont diagnostiqués comme ayant une dépendance qu'ils sont atteints d'une maladie chronique, évolutive et éventuellement mortelle. Les services de toxicomanie sont là pour leur faire comprendre l'existence du problème et les aider à cesser la drogue. C'est une maladie récurrente et il faut parfois subir plusieurs séances de désintoxication et de traitement.
Certaines personnes veulent conseiller aux toxicomanes invétérés de réduire leur consommation de drogues et appellent cela réduction des méfaits. Mais est-ce bien cela en réalité? Pensez au toxicomane qui a essayé à maintes reprises de réduire sa consommation et dont la famille qui l'a imploré et sermonné pour qu'il arrête de se droguer est en train d'éclater. Le client commence un traitement et on lui conseille de réduire sa consommation. À notre avis, c'est lui rendre un bien mauvais service, ainsi qu'aux membres de sa famille et de sa collectivité.
Pour ceux qui utilisent des drogues injectables et qui ne peuvent pas s'arrêter, ou ne sont pas prêts à le faire, on peut envisager des programmes d'échange de seringues pour réduire les méfaits pour la personne et la collectivité dus aux infections de VIH/SIDA et d'hépatites.
Dans The Journal of the American Medical Association, au sujet de l'examen interne du gouvernement américain relatif aux programmes d'échange de seringues, on signale que ces programmes sont rentables et peuvent empêcher la transmission du VIH. Ces programmes permettent—preuves à l'appui—de réduire le nombre de seringues jetées. Il n'existe aucune donnée prouvant un accroissement de la consommation de drogues dû aux programmes d'échange de seringues, en tout cas jusqu'ici. Ces programmes ont permis de réduire—et là encore, preuves à l'appui—les taux de fréquence d'hépatites B et C. Les programmes d'échange de seringues sont peut-être pour les toxicomanes qui se piquent un premier pas vers le traitement de la toxicomanie.
Il faudrait entreprendre une vaste campagne d'éducation publique au sujet des programmes d'échange de seringues avant de mettre en place un tel programme à Île-du-Prince-Édouard, pour s'assurer que la population en comprend bien la raison d'être, les avantages éventuels et les risques pour la collectivité et les particuliers.
¾ (0850)
Il serait très important que les programmes d'échange de seringuessoient en relation étroite avec les services de toxicomanie afin d'offrir aux clients, au besoin, des services d'évaluation, de counselling, de traitement et de soutien. Il vient de se créer à l'Île-du-Prince-Édouard un comité chargé d'instaurer une alliance intersectorielle sur la réduction des méfaits, et les services de toxicomanie sont représentés au comité.
Venons-en à la méthadone: le nombre de toxicomanes qui utilisent des drogues injectables est restreint à l'Île-du-Prince-Édouard. Les principales drogues utilisées sont le Dilaudid et la cocaïne. La province n'est pas en mesure, à l'heure actuelle, de mettre sur pied ou d'envisager un programme d'entretien à la méthadone pour les consommateurs d'opiacés.
Avant d'envisager de mettre sur pied un programme d'entretien à la méthadone à l'Île-du-Prince-Édouard, il faudrait résoudre les problèmes suivants: trouver des médecins ayant reçu la formation voulue en traitement des toxicomanies et d'entretien à la méthadone; éduquer et sensibiliser la population pour qu'elle accepte ce genre de chose; établir un système de dosage précis en fonction des besoins cliniques du client; déterminer la durée du programme d'entretien à la méthadone en fonction des besoins cliniques du client, en partenariat avec une équipe chargée du traitement; confier au personnel des services de toxicomanie la surveillance et le soutien des clients qui participent à ce programme et évaluer les coûts-avantages de la mise en oeuvre d'un tel programme.
Le ministère de la Santé et des Services sociaux a entrepris un examen exhaustif de la documentation pour analyser les options de traitement des héroïnomanes. Ce travail va prendre du temps. Toutefois, nous savons qu'il existe d'autres possibilités.
L'acupuncture auriculaire, ou de l'oreille: il existe de bonnes preuves selon lesquelles l'acupuncture auriculaire est efficace pour réduire les symptômes de sevrage, l'état de besoin, les sautes d'humeur, l'anxiété et la dépression chez les cocaïnomanes et les héroïnomanes. En fait, l'acupuncture auriculaire s'est révélée un élément utile d'un programme de traitement des dépendances. Cette méthode s'est également révélée efficace pour faire participer les clients au traitement et les inciter à le poursuivre. Le mois prochain, le personnel des bureaux provinciaux et régionaux recevra une formation en acupuncture auriculaire. Cette méthode servira ensuite comme élément complémentaire des programmes déjà en vigueur et sera offerte sur demande à tous les clients des services de toxicomanie. Nous espérons que l'acupuncture auriculaire sera aussi efficace que l'ont prouvé les résultats des programmes entrepris en Nouvelle-Écosse ainsi que dans divers États américains.
Voici les questions auxquelles il faut s'attaquer, selon nous, au niveau fédéral. Il faut mettre fin à la consigne du silence entourant les toxicomanies. C'est la seule façon de s'attaquer aux préjugés qui entourent ce problème. Il faut mettre sur pied des programmes intensifs d'éducation du public pour expliquer les effets sur la santé de la population de la consommation excessive et à mauvais escient de drogues et de médicaments. Les établissements d'enseignement doivent offrir une formation intensive dans ce domaine aux médecins, aux infirmiers, aux travailleurs sociaux, aux psychologues et aux autres professionnels.
Il faut que les statistiques fédérales dressent un tableau exact de l'effet des drogues sur l'utilisation des systèmes de soins actifs. Malheureusement, il n'existe pas de bonne base de données au niveau fédéral et je crois qu'aucune enquête n'a été faite depuis 1996 à ce sujet. Nous savons toutefois que bon nombre de lits de soins actifs sont occupés par des personnes qui ont un problème de toxicomanie primaire non confirmé par des tests de dépistage ou des évaluations.
Il faut effectuer des recherches au Canada au sujet de la toxicomanie. Il faut créer un nouveau service à Santé Canada qui se consacre à la recherche, la prévention, l'éducation et la politique en matière de toxicomanie.
¾ (0855)
Il faut parler au grand jour de la toxicomanie et des problèmes connexes. Il faut entreprendre une campagne d'éducation pour expliquer aux gens comment mener une vie saine exempte de drogues. À notre avis, le gouvernement fédéral doit débloquer des fonds supplémentaires pour aider la province à offrir des programmes à l'intention des toxicomanes.
Enfin, compte tenu des répercussions qu'ont les dépendances sur l'épanouissement de nos enfants et le lien étroit existant entre l'abus de substances et la violence familiale, nous vous demandons d'examiner les recommandations pertinentes du document intitulé For Our Children: A Strategy for Healthy Child Development, la stratégie quinquennale de la province relative au développement sain de l'enfant. Vous trouverez un exemplaire de ce document sur la table à l'extérieur de la salle. Nous sommes tout particulièrement préoccupés par le manque de ressources fédérales allouées à la GRC pour les initiatives de prévention et d'éducation, les opérations et les mesures d'application de la loi. Je vous ai fourni le texte complet du document en français et en anglais, car la stratégie est disponible dans les deux langues.
Le problème des dépendances nous touche tous à un moment ou à un autre de notre vie. Comme l'a dit Helen Keller, si nous n'avions pas d'obstacles à surmonter, la merveilleuse richesse de l'expérience humaine ne serait pas aussi gratifiante.
Je vous remercie encore une fois de nous avoir invités à participer à vos délibérations. Nous vous souhaitons de réussir dans votre entreprise, dans l'intérêt des Canadiens. Merci.
¿ (0900)
La présidente: Merci beaucoup, madame McIver.
Je signale à l'intention de mes collègues que nous distribuerons les documents en anglais et en français lorsque nous aurons eu le temps de les photocopier.
Avant de donner la parole au témoin suivant, c'est peut-être parce qu'il est très tôt, mais j'ai oublié de présenter mes collègues autour de la table. Comme je l'ai déjà dit, je m'appelle Paddy Torsney et je suis députée de Burlington, en Ontario, tout près de Toronto. Randy White est député de l'Alliance canadienne de Langley--Abbotsford, en Colombie-Britannique, près de Vancouver. Quant à Kevin Sorenson, il...
Je n'ai pas encore eu l'occasion de vous présenter au groupe de témoins. Quelle est votre circonscription, déjà?
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): C'est Crowfoot, dans le centre de l'Alberta.
La présidente: Bien sûr. Je devrais le savoir.
Libby Davies est députée du Nouveau parti démocratique et vient de Vancouver-Est; Carole-Marie Allard représente Laval-Est, au nord de Montréal; Chantal Collin est notre attachée de recherche; Carol Chafe, que vous avez tous rencontrée, est notre greffière. Nous avons derrière nous une formidable équipe qui assure les services d'interprétation en anglais et en français et s'assure que tous les microphones sont bien branchés lorsque nous en avons besoin. Nos délibérations sont également enregistrées et transmises à Ottawa, pour être versées au compte rendu officiel de notre comité.
Je donne maintenant la parole à M. McKinnon.
M. Kevin McKinnon (coordonnateur des programmes pour la jeunesse et la famille, ministère de la Santé et des Services sociaux (Île-du-Prince-Édouard)): Bonjour à tous. Je m'appelle Kevin McKinnon et je suis conseiller à la jeunesse et à la famille aux services de toxicomanie, dans la région de Queens.
Tout d'abord, merci de m'avoir invité à témoigner devant votre comité. Je vous souhaite à tous la bienvenue dans notre province.
Ce matin, je vais vous dire quelques mots au sujet des services à la jeunesse et à la famille. Je parlerai de ces services à l'échelle provinciale, car ils sont offerts dans toute l'île. Je vais vous expliquer de façon plus précise ce que nous faisons ici, dans la région de Queens.
J'aimerais dire tout d'abord quelques mots au sujet des programmes à la jeunesse. Nos programmes se fondent essentiellement sur un modèle de réduction des méfaits. Notre objectif final, toutefois, est l'abstinence, et nous essayons de faire progresser les jeunes vers ce but. Comme le savent tous ceux d'entre nous qui ont travaillé avec des jeunes, il est un peu plus difficile de faire atteindre cet objectif final d'abstinence aux adolescents, mais notre modèle se fonde sur la prévention, l'éducation et le traitement. Nous menons de nombreuses activités dans les écoles secondaires, dans le cadre des programmes d'aide aux étudiants, depuis le niveau élémentaire jusqu'au secondaire, tant premier cycle que niveau supérieur.
Nous sommes présents dans trois secteurs scolaires, où nous offrons des programmes à l'intention des adolescents qui ont commencé à se droguer. Il s'agit d'une intervention au premier niveau puisque la plupart des adolescents auxquels nous avons affaire commencent à peine à faire l'expérience de la drogue ou ont commencé à consommer des drogues de façon régulière, plutôt que sporadique. La plupart des jeunes que nous rencontrons dans les écoles ne sont pas considérés comme des toxicomanes. Certains d'entre eux, mais pas tous, participent à des programmes de traitement plus intensifs offerts au centre provincial. J'y reviendrai dans un instant.
Au niveau scolaire, toutefois, nous offrons, je le répète, le programme d'aide aux étudiants. Bon nombre de nos activités avec les jeunes élèves, au niveau élémentaire, visent les enfants de parents toxicomanes ou alcooliques. Ce sont des programmes qui visent à expliquer aux enfants comment les dépendances touchent non seulement les personnes dépendantes elles-mêmes, mais aussi tous ceux qui les entourent--principalement les membres de leur famille--et nous essayons d'expliquer aux enfants comment faire lorsqu'on vit avec une personne dépendante.
En ce qui concerne les services offerts dans toute l'île, nous avons un programme de prévention, d'éducation et de traitement pour les jeunes qui a une portée provinciale, sauf erreur. C'est un programme de traitement ambulatoire, de deux heures par semaine pendant quatre semaines. Nous n'offrons aucun service de traitement en établissement pour les jeunes dans l'île. Si une personne doit être hospitalisée, nous l'envoyons à l'extérieur de la province.
Maureen vous a sans doute dit qu'il y a au centre de désintoxication deux lits réservés aux jeunes patients hospitalisés pour de courtes durées. Nous avons donc deux lits disponibles dans ce centre.
Nous participons également de près à l'éducation des parents sur la façon de réagir lorsqu'ils constatent que leurs enfants commencent à consommer des substances illicites ou, s'ils sont déjà dépendants, sur les mesures et les précautions à prendre s'ils veulent essayer de résoudre ce problème au niveau familial. Nous considérons la dépendance comme une maladie familiale dans la mesure où elle touche tous les membres de la famille. Nous sommes très actifs pour inciter les parents et l'ensemble des familles à participer à ce programme d'éducation. J'aimerais maintenant vous parler des mesures de soutien familial que nous offrons.
Dans le cadre des services de toxicomanie, nous offrons un programme d'éducation de huit semaines offert une fois par semaine pendant deux heures dans la soirée. En un mot, il s'agit d'expliquer aux familles en quoi consiste toute cette question de la pharmacodépendance, ce que représente la maladie qu'est la dépendance, afin de leur faire mieux comprendre de quoi il s'agit. Maureen a parlé entre autres choses d'accroître le niveau d'acceptation de la toxicomanie et c'est l'une des solutions que nous utilisons pour les membres de la famille.
Nous essayons également d'enseigner aux familles ce que l'on peut faire pour faire face au problème et pour les responsabiliser davantage. Depuis deux ans environ, on a eu tendance à essayer de mieux expliquer aux membres de la famille en quoi la dépendance les touche. Les programmes étaient lacunaires à ce chapitre, par le passé. Nous partions du principe que si la personne dépendante allait mieux, tout serait parfait. Nous savons tous maintenant que ce n'est pas le cas.
Nous offrons également un programme familial de post-intervention. Nous offrons des conseils personnalisés aux jeunes et à leur famille, et recommandons la participation assidue au groupe d'entraide, avec parents et enfants.
Voilà pour les programmes que nous offrons. Nous pourrons évidemment répondre à d'autres questions à ce sujet par la suite.
¿ (0905)
La présidente: Puis-je préciser une chose? Vous expliquez aux familles ce qu'est la dépendance au cours d'une séance de huit semaines. Ce programme est-il offert aux deux parents ainsi qu'aux frères et soeurs de l'enfant concerné?
M. Kevin McKinnon: C'est possible. En fait, le programme s'adresse plutôt aux adultes, mais nous offrons également un programme pour les enfants de 6 à 12 ans, en même temps que le programme d'éducation familiale. S'il s'agit d'adolescents, ils peuvent effectivement participer au programme pour adultes. Nous offrons également le programme «Alateen», dans le même immeuble. Les adolescents ont le choix de participer également à ce programme.
La présidente: Je suis sûre que mes collègues auront d'autres questions à vous poser.
Merci beaucoup, monsieur McKinnon.
Nous passons maintenant à M. Clark.
M. Wayne Clark (directeur, Talbot House): Je m'appelle Wayne Clark et, ce matin, je vais principalement vous parler du programme de réadaptation que nous offrons dans la région de Queens. J'ai été membre de l'équipe pendant sept ans. Pour expliquer notre programme de traitement, il faut d'abord définir les termes que j'utiliserai aujourd'hui: l'abus de substances psychoactives et la réduction des méfaits. Comme l'a dit Maureen, nos principes de traitement établissent ces distinctions. Les objectifs peuvent donc être bien différents selon le cas. Si, à votre comité, on parle indifféremment d'abus des substances psychoactives et de pharmacodépendance, nous craignons qu'il y ait malentendu. En effet, notre définition de l'abus des substances psychoactives n'inclut pas la pharmacodépendance ou la toxicomanie, et le traitement peut donc être bien différent de celui qu'on attendrait. Selon nos principes, l'abus peut ou non nécessiter l'abstinence, mais la pharmacodépendance l'exige absolument si le client doit parvenir à l'objectif d'un mode de vie plus sain.
Pour ce qui est du deuxième terme, la réduction des méfaits, elle peut avoir pour objectif, selon notre interprétation, le contrôle de l'absorption d'alcool, par exemple. En se servant de notre modèle, on voit bien que ce ne serait pas un objectif valable en cas de toxicomanie. Nous pouvons commencer par tâcher de réduire l'absorption de substances par notre client, mais si le diagnostic de toxicomanie ou de pharmacodépendance est établi, l'objectif ultime devient l'abstinence. Nous estimons avoir un programme qui permet à nos clients d'atteindre ce résultat.
Un des avantages du recours au modèle de l'abstinence est que nous apprenons à nos clients qu'ils sont en traitement parce qu'ils sont malades et qu'ils essaient de recouvrer la santé, plutôt que de leur dire que leur comportement est répréhensible et qu'ils devraient essayer de s'amender. Nous éliminons donc en grande partie le sentiment de culpabilité et de honte qui est associé à cette maladie.
Un de nos principaux modes de traitement est un programme de réadaptation de trois semaines que nous offrons soit en consultation externe, soit avec hospitalisation. Il est axé sur la pédagogie curative et la thérapie de groupe. Il permet d'expliquer au malade sa maladie, la pharmacodépendance et les effets physiques, mentaux et spirituels qu'elle a sur une personne. Les clients apprennent à reconnaître les symptômes de la maladie et de sa progression des premiers aux derniers stades.
La réadaptation est un programme thérapeutique qui donne à nos clients divers outils qui devraient leur permettre de parvenir à une vie d'abstinence et de s'y maintenir. Le programme leur permet de faire leur auto-examen, afin de mieux comprendre leur maladie. Il s'agit d'une approche holistique qui ne se concentre pas uniquement sur la cessation de l'absorption d'alcool ou de drogue, mais aussi sur les aspects biologiques, psychologiques et sociaux. Nos clients ont ainsi l'occasion d'améliorer leurs relations dans tous les domaines, y compris les relations personnelles, familiales, au travail et en société. Il est entendu que, s'ils sont en bonne santé et qu'ils réussissent à fonctionner, ils ne sont plus un fardeau pour la médecine, la justice, ou les services de bien-être social et d'emploi de la province.
Un autre aspect de notre programme consiste à encourager les clients à recourir à un système de soutien communautaire, tel que les groupes de rétablissement en 12 étapes, pour les aider encore mieux à maintenir un mode de vie plus sain. Une fois la réadaptation terminée, la plupart de nos clients sont renvoyés à un programme de postcure dans le cadre duquel ils rencontrent un groupe une fois par semaine pour y obtenir un soutien supplémentaire. Toutefois, si le client, le conseiller ou les deux ensemble décident, pendant la réadaptation, que le client a besoin de traitement prolongé, nous disposons des installations de suivi nécessaires pour offrir un environnement sûr, structuré et thérapeutique qui devrait permettre aux malades d'acquérir d'autres connaissances pratiques et de leur permettre de retourner plus graduellement à leur milieu social. Voilà donc ce qu'est Talbot House, et j'en suis le directeur actuel.
Je me rends compte que j'ai fait un survol très général de notre programme, faute de temps. En fait, j'ai appris vendredi après-midi, à 15 heures, que je devais me présenter ici. Cela dit, nous estimons que, quel que soit l'endroit où vit un client pharmacodépendant, qu'il s'agisse de Victoria en Colombie-Britannique ou de St. John's, à Terre-Neuve, il devrait avoir la possibilité de profiter d'un programme de traitement de la maladie axé sur l'abstinence.
Merci.
¿ (0910)
La présidente: Merci, monsieur Clark. J'espère que nous n'avons pas gâché votre week-end.
M. Wayne Clark: En fait, pas du tout.
La présidente: Nous passons maintenant au sergent d'état-major Rick Gibbons.
¿ (0915)
Sergent d'Administration Rick Gibbons (Application conjointe de la législation antidrogue, Gendarmerie royale du Canada): Bonjour, je m'appelle Rick Gibbons. Je suis responsable du programme antidrogue de la GRC pour l'Île-du-Prince-Édouard.
Ce matin, j'ai cru bon de vous présenter un bref aperçu de ce que nous considérons être le problème des drogues à l'Île-du-Prince-Édouard, en commençant par un historique, pour passer ensuite à la situation actuelle et à une description de la montée des problèmes. Je terminerai par un rapide survol de nos efforts en matière de lutte antidrogue.
Traditionnellement, les stupéfiants privilégiés à l'Île-du-Prince-Édouard ont été les produits du cannabis, les principales sources d'approvisionnement pour l'île se trouvant dans les grands centres de l'est du Canada, c'est-à-dire Montréal, Toronto et Halifax.
Il y a eu très peu de cas prouvés d'importation de ces substances à l'Île-du-Prince-Édouard. Il y a environ 12 ans, on a saisi un aviso en provenance d'Europe, à bord duquel se trouvaient près de sept tonnes de marijuana. Cela s'explique de bien des façons. Nous sommes une île, et une province relativement petite, mais dont la côte est très longue. Toutefois, comparativement à celles de Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve, par exemple, la côte de l'Île-du-Prince-Édouard est très découverte. Nous pensons que cela explique en partie pourquoi ce n'est pas un lieu d'importation très prisé, surtout si l'on songe qu'il s'agit d'une île et que les drogues devront ensuite en sortir pour parvenir au reste du Canada.
Vers la fin des années 1980 et au début des années 1990, nous avons constaté un intérêt croissant pour la culture locale de marijuana, à ciel ouvert. La plupart de ces cultures étaient relativement grossières et servaient à la consommation personnelle. Elles étaient généralement d'assez mauvaise qualité. Le haschich liquide était populaire. Même si son utilisation diminuait dans le reste du Canada, on a continué à en consommer à l'Île-du-Prince-Édouard, nous ne savons trop pourquoi. La psilocybine, un champignon hallucinogène, croît avec abondance sur notre île et continue d'être cultivée. Elle semblait être plus populaire dans d'autres régions du Canada, et ne pas être destinée à la consommation locale. À une certaine époque, les gens venaient d'autres provinces pour cueillir ces champignons ici, et nous avons appréhendé des personnes qui venaient depuis le Québec pour en cueillir.
Le LSD a toujours été présent, mais, pour une raison qui m'échappe, il n'occupe pas une place importante et n'est pas très prisé. Les méthamphétamines et l'héroïne étaient pratiquement introuvables sur l'île, il y a 10 ans. L'utilisation illégale des médicaments d'ordonnance a également suscité des interventions antidrogues, mais cela s'est limité principalement à quelques cas de cumul d'ordonnances médicales et de trafic commis par une poignée de personnes.
Depuis l'ouverture du pont de la Confédération, en 1997, la ville de Moncton est devenue la principale source des drogues que l'on trouve à l'Île-du-Prince-Édouard. Il est donc évident que nous travaillons en étroite collaboration avec nos homologues de la division J.
La marijuana cultivée localement est devenue un grand problème ici. Plus particulièrement, la culture à l'intérieur des logements s'est considérablement raffinée; elle est très lucrative et il y a eu des saisies et des démantèlements d'installations en très grand nombre ces dernières années.
On constate de façon accrue la tendance à importer la marijuana, particulièrement de la Colombie-Britannique—puisqu'elle est connue dans tout le pays comme étant de bonne qualité—soit directement des trafiquants localisés ici soit de personnes se rendant régulièrement en Colombie-Britannique. Il faut croire qu'elle est très en demande et que c'est un marché rentable pour ceux qui se rendent aussi loin en partant de l'Île-du-Prince-Édouard.
Le haschich liquide est toujours en demande et semble être facilement disponible n'importe quand.
Ces dernières années, la cocaïne s'est révélée la drogue de choix dans notre région. Nous avons constaté une augmentation marquée de sa consommation et de son trafic, qui sont liés à bon nombre des crimes connexes que nous avons connus ici. La cocaïne se retrouve dans toutes les couches socio-économiques, et nous faisons face maintenant à des trafiquants bien organisés et à des systèmes de blanchiment d'argent.
La province fait face de façon accrue à la consommation illégale et au trafic de médicaments d'ordonnance, et je pense particulièrement au Ritalin, aux stéroïdes et au Dilaudid. C'est tout un défi pour notre section de la répression.
Tout comme dans la plupart des régions de l'Amérique du Nord, on a constaté une augmentation constante de la consommation de MDA, mieux connue sous le nom d'Ecstasy, qui semble être utilisée essentiellement dans les parties raves des grandes municipalités fréquentées surtout par les jeunes.
Il n'y a apparemment pas de demande de champignons magiques. À dire vrai, je ne me rappelle même plus quand nous avons effectué notre dernière saisie de psilocybine.
Nous avons encore quelques cas, très rares, de consommation de LSD. Quant à l'héroïne, elle ne semble m'être utilisée ni vendue de façon commerciale.
Notre division de lutte antidrogue est chargée principalement d'enquêter sur les groupes criminels organisés et sur leurs activités de trafic. Les enquêtes menées ici sont d'envergure nationale et exigent souvent que nous travaillions de concert avec d'autres divisions et d'autres corps policiers. Les opérations conjointes de longue date menées avec les municipalités de Charlottetown et de Summerside exigent une certaine répression dans la rue, si nous voulons répondre aux obligations de nos partenaires.
J'ai été très bref, comme je vous l'avais expliqué au début, et je ne vous ai dressé qu'une esquisse de la situation que nous connaissons ici et des utilisations les plus courantes de drogues.
Merci.
¿ (0920)
La présidente: Merci.
Juste avant de céder la parole à l'agent Murray, vous avez dit qu'il y a 12 ans, vous aviez effectué une saisie massive de sept tonnes de ...
Sgt/A Rick Gibbons: Pardon, il s'agissait de marijuana.
La présidente: Merci.
Caporal Murray.
Caporal Ken Murray (coordonnateur, Service de la sensibilisation aux drogues, Île-du-Prince-Édouard, Division L et coprésident, Comité de l'hépatite C, Gendarmerie royale du Canada): Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs du comité spécial.
Je m'appelle Ken Murray et je suis ici à double titre: je représente ce matin le comité directeur de l'alliance pour la réduction des méfaits qui vient d'être créé et je comparais également à titre de coordonnateur de la GRC pour la sensibilisation aux drogues à l'Île-du-Prince-Édouard. J'appartiens à la section de lutte antidrogue de la GRC, dont le mandat est la répression et la prévention.
Je suis coordonnateur provincial des programmes de prévention de la GRC en matière de sensibilisation aux drogues, et ce depuis octobre 2000. J'ai pour rôle d'informer les agents de première ligne de l'évolution des tendances en matière de nouvelles drogues, de consommation de drogues et de coordonner les divers programmes de prévention dans l'Île-du-Prince-Édouard, en partenariat avec les écoles, les conseillers en toxicomanie, les groupes communautaires et les parents. Comme on vous l'a dit, il ne s'agit pas d'un problème d'organisation mais un problème communautaire.
Dans le cadre de notre rôle de prévention de la consommation de drogues, l'un des programmes mis sur pied dans notre province est le programme DARE, d'éducation à la résistance contre la consommation de drogues, lancé il y a à peine un peu plus d'un an dans six écoles de l'Île-du-Prince-Édouard. Ce programme d'information vise principalement les jeunes élèves de 5e et de 6e année.
Ce programme a été mis sur pied à la suite d'une recommandation faite dans le cadre d'un sondage sur la consommation de drogues chez les étudiants de l'Île-du-Prince-Édouard, effectué en 1998 et dans lequel on ciblait l'alcool, le tabac et le cannabis comme étant les trois grandes substances d'intoxication dans l'île. Je crois qu'il s'effectue actuellement un nouveau sondage sur la consommation de drogues chez les étudiants, mais celui sur lequel je me fonde remonte à 1998.
L'une des trois recommandations proposées par les étudiants de l'Île-du-Prince-Édouard, c'était de commencer notre travail de prévention très tôt. On ne voulait pas nous voir visiter des classes d'élèves de 11e et de 12e année pour leur donner pendant 45 minutes un cours sur les drogues, puis s'attendre à ce qu'ils changent de comportement. Voilà pourquoi le programme DARE répond à la recommandation, à mon avis, en ciblant les élèves de 5e et de 6e année.
Je sais que le programme DARE existe déjà depuis quelque temps partout au Canada; toutefois, les critiques sont partagées. De nombreuses recherches le portent aux nues, disant qu'il donne des résultats, alors que d'autres le critiquent pour son inefficacité. Les opinions sont donc partagées.
Toutefois, je me suis rendu récemment à une fête de fin de programme pour les élèves de 5e année de Georgetown, dans l'Île-du-Prince-Édouard. Or, j'ai été très encouragé de voir la réaction des enfants qui, sans le programme DARE, n'auraient sans doute jamais eu de contact positif avec les agents de police et de voir aussi les parents ovationner l'agent de police qui avait suivi leurs enfants pendant 17 semaines.
Ce programme est-il la solution pour lutter contre la drogue chez les étudiants? On sait bien que plusieurs facteurs influenceront les jeunes et feront qu'ils consommeront de la drogue avant d'atteindre l'âge adulte, et c'est pourquoi il est difficile de prédire si c'est là la solution. Les résultats sont difficiles à mesurer.
Nous avons également utilisé d'autres programmes dans le système scolaire comme la course contre les drogues; le programme à double sens qui met en contact des parents avec d'autres parents; et le programme de la drogue dans les sports que nous incorporons au système scolaire pour lutter contre la consommation de drogue dans les sports et pour atteindre les jeunes. Ces programmes seraient impossibles à appliquer n'eut été les bonnes relations de travail que nous avons avec nos divers partenaires, en particulier avec le ministère de l'Éducation ainsi que les services de lutte contre la toxicomanie.
Je fais depuis peu partie du comité directeur de l'alliance sur la réduction des méfaits, qui compte des représentants de diverses professions ainsi que des services de première ligne qui traitent des problèmes de consommation abusive. Je parle ici des services de police, de lutte contre la toxicomanie, de santé publique, SIDA IPE et des services correctionnels. Notre objectif est de formuler une stratégie qui mette en oeuvre les recommandations proposées lors d'un atelier qui s'est tenu récemment le 14 mars à Charlottetown sur les drogues injectables par voie intraveineuse.
Voici ce qu'on recommandait: des initiatives principales de prévention, notamment l'incorporation de la sensibilisation à l'hépatite C dans le programme des écoles et la sensibilisation de la population par voie de diffusion dans les médias écrits et visuels d'information sur l'hépatite C; un partenariat entre les organisations principales telles que SIDA IPE et d'autres professionnels de la santé et des services sociaux, le gouvernement, les systèmes d'éducation et les groupes judiciaires, afin de cibler les populations à risque par l'identification des préjudices causés à la santé chez ceux qui utilisent des drogues injectables.
Travailler sans relâche à la réduction des méfaits, notamment en concevant et en mettant en oeuvre des stratégies qui incitent les individus à risque et leurs familles à adopter des styles de vie plus sains.
En troisième lieu, on recommandait de fournir des services locaux aux utilisateurs de drogues injectables en collaborant avec l'initiative SIDA IPE et en imitant sa stratégie, c'est-à-dire en mettant en oeuvre des programmes de réduction des méfaits dans toute la province, avec la possibilité d'inclure un programme d'échange de seringues dans au moins une région administrative en matière de santé.
¿ (0925)
Quant au rôle de prévention de la toxicomanie, nous nous inspirons essentiellement de l'enquête menée auprès des étudiants en 1998, qui porte sur les trois principales drogues de prédilection. D'autres drogues ont cours à l'Île-du-Prince-Édouard et on en a déjà parlé du point de vue du rôle d'exécution: il s'agit de la cocaïne et du Dilaudid. Les jeunes les citent comme étant des drogues injectables.
Les jeunes de l'Île-du-Prince-Édouard nous disent que l'usage de drogues multiples est courant. On a découvert que quelques médecins prescrivaient généreusement des médicaments d'ordonnance comme le Valium, le Dilaudid et le Ritalin. Cela est vrai pour d'autres provinces et je pense qu'on s'est penché là-dessus à Terre-Neuve. On a découvert que le Dilaudid était une des principales drogues de prédilection. Depuis qu'il y a un système de surveillance de la délivrance des ordonnances, je pense qu'il y a eu une baisse, mais que je sache, un tel système de surveillance n'existe pas à l'Île-du-Prince-Édouard pour l'instant.
En ce qui concerne les entraves aux bons résultats du programme de sensibilisation antidrogues, il y aurait l'opinion du grand public en ce qui concerne le risque éventuel de la toxicomanie. Pour l'instant, on constate que le grand public redoute moins ces risques, moyennant quoi la toxicomanie est à la hausse. Pour l'instant, le grand public pense que le risque est faible, et après avoir constaté une baisse dans l'usage des drogues, on assiste à une nouvelle flambée.
Deuxièmement, les jeunes reçoivent des messages contradictoires hauts et forts. Les médias transmettent des messages embrouillés, provenant de la scène politique, ainsi que de l'Internet concernant l'utilisation médicale de la marijuana, la légalisation en rapport à la décriminalisation. Quand je m'adresse à un auditoire scolaire, l'utilisation du terme «marijuana médicinale» donne lieu à de la confusion ou à la réception de messages embrouillés. Par exemple, un article a paru dans le journal la semaine dernière--en date du 4 avril:
«Que doit penser le fumeur de marijuana? Un matin, les journaux titrent: «L'utilisation intensive de la marijuana abaisse le QI,--conclusion d'une étude», «Effets de la marijuana sur le QI temporaires», alors que dans un autre grand journal national il peut lire à la une: «Fumer de la marijuana est sans danger pour le QI». |
Voilà un exemple des messages contradictoires que nous recevons, et les étudiants les absorbent. Cela nous nuit dans l'application du programme de prévention de la toxicomanie.
Le message essentiel qu'il nous faut transmettre aux enfants est que les drogues sont illégales parce qu'elles sont dangereuses et non pas qu'elles sont dangereuses parce qu'elles sont illégales.
Merci.
¿ (0930)
La présidente: Merci, caporal Murray.
Je donne la parole à mes collègues qui vous poseront des questions. Je vais les présenter en rappelant leur affiliation politique mais je dois vous dire que notre comité est sans doute le comité le moins sectaire de la Chambre des communes. Chacun aborde le sujet sous un angle différent et ceux qui les écoutent s'intéressent vivement à chacun des sujets.
Je donne la parole à Randy White pour 10 minutes.
Si un député vous pose une question directement, vous voudrez bien, nous l'espérons, y répondre. Vous n'êtes pas forcé de le faire mais nous espérons que vous le ferez. Si la question ne s'adresse pas à vous mais que vous voulez ajouter quelque chose, vous n'avez qu'à me faire un petit signe. Je vous donnerai alors la parole. Il est souhaitable que les questions et les réponses soient brèves.
M. Randy White (Langley--Abbotsford, Alliance canadienne): Merci.
Merci d'être venus. Je sais qu'on vous a donné un court préavis mais c'est intéressant... c'était pour voir si vous étiez bien préparés.
Maureen, je pense que j'ai traversé le pays pour entendre le message le plus important que j'aie jamais entendu jusqu'ici concernant la réduction des méfaits, à savoir que l'abstinence était un objectif à long terme. Lors des nombreuses discussions que nous avons eues, les gens qui s'occupent de la réduction des méfaits n'invoquent pas cela volontiers.
Voici ma question. Dans les mesures de réduction des méfaits, on cite les endroits où l'on peut se piquer en sécurité, par exemple. Pensez-vous que cela cadre bien avec la notion de réduction des méfaits?
Mme Maureen McIver: Je suppose que cela dépend de votre lieu de résidence. Si vous viviez à Vancouver et que vous deviez vous attaquer au problème... Je crois qu'il faut être conscient du fait qu'il ne s'agit pas simplement d' un problème de dépendance personnelle, mais aussi d'un problème de santé publique. Je suppose que pour protéger le grand public de maladies comme l'hépatite C, l'hépatite B et le VIH/SIDA, il faut avoir recours à des mesures draconiennes.
Ce n'est qu'une opinion personnelle, mais je suis préoccupée par la promotion qui est faite de l'utilisation de drogues dans des endroits sécuritaires. Nous ne disposons pas de beaucoup de données au Canada, ou nous n'avons pas fait suffisamment de recherche pour savoir quels sont les risques qui s'y rattachent. D'autres pays ont de telles données. Je crois qu'il faut être très prudent. Je me demande parfois quels programmes de réduction des méfaits seront nécessaires pour réduire les méfaits que causeront ces programmes.
Je crois sincèrement qu'il faut mettre en place un vaste programme d'information publique à l'échelle nationale. Nous avons vu quel effet les programmes de publicité pouvaient avoir sur la consommation de tabac. Peut-être est-il temps de mettre au point des programmes de sensibilisation du public sur les drogues toxicomagènes dans l'espoir de pouvoir éviter l'apparition de ces sites d'injection d'un bout à l'autre du pays.
M. Randy White: J'ai souvent décrit la réduction des méfaits comme une diffusion des méfaits dans certains endroits. Je ne suis pas encore convaincu que ce ne soit pas...
Pouvez-vous me donner une estimation du nombre de toxicomanes à l'Île-du-Prince-Édouard? Je parle des utilisateurs fréquents de marijuana, d'héroïne, de cocaïne, d'une de ces drogues.
Cpl Ken Murray: Je crois que pour l'usage de drogues injectables, on estime le nombre des utilisateurs à 400, et je crois que ce sont les statistiques les plus pessimistes. Leur nombre se situe entre 250 et 400, c'est du moins ce que l'on estime pour les utilisateurs de drogues intraveineuses. En ce qui concerne les autres statistiques, je ne les connais pas.
M. Randy White: Je suppose que si vous êtes un utilisateur de drogues injectables, vous participez sans doute à divers actes criminels, que ce soit la prostitution ou le vol, ce genre de choses. Est-ce que cette affirmation vous paraît juste?
Cpl Ken Murray: Oui. On dit qu'environ 80 p. 100 des crimes commis à l'Île-du-Prince-Édouard sont associés à la toxicomanie, que le crime soit commis sous l'effet d'une de ces substances ou qu'il y soit tout simplement associé. Je crois que le pourcentage est sans doute à peu près le même pour les vols et agressions.
Une Voix: Avez-vous dit 80 p. 100?
Cpl Ken Murray: Oui, nous estimons que 80 p. 100 des actes criminels commis à l'Île-du-Prince-Édouard sont associés à un certain degré à la toxicomanie.
¿ (0935)
La présidente: Puis-je avoir des précisions sur la question que M. White a posée à propos de l'usage de drogues à l'Île-du-Prince-Édouard? Madame McIver, vous avez inclus l'usage d'alcool, de nicotine et de drogues illicites. Vous avez parlé de 400 utilisateurs de drogues injectables. Mais dispose-t-on d'autres statistiques pour expliquer la situsation?
¿ (0940)
Mme Maureen McIver: Les principales drogues utilisées à l'Île-du-Prince-Édouard par la plupart des gens sont l'alcool, le tabac et le cannabis. Il y a aussi un nombre important d'utilisateurs de médicaments d'ordonnance. On s'inquiète aussi du mauvais usage de médicaments fait par les personnes âgées.
M. Randy White: Je voulais justement en parler.
Wayne, vous avez parlé de réduction des méfaits et aussi de la consommation responsable d'alcool dans le cadre d'un programme de réduction des méfaits et d'injection de drogues non supervisée mais aussi d'un programme d'abstinence de drogues injectables qui est le contraire d'un programme supervisé. Pouvez-vous nous expliquer à quoi vous faites référence?
M. Wayne Clark: Oui. Je n'ai jamais parlé d'un programme d'administration de drogues injectables. Lorsque l'on parle de réduction des méfaits, nous voulons dire que nous utilisons cette approche dans nos programmes de traitement, dans la mesure où nous allons rencontrer le client là où il vit au moment où il fait appel à nos services. Lorsque nous faisons du counselling de motivation ou du counselling de transition, il est possible que nous entamions le processus pendant que le client est encore toxicomane. Mais nous travaillons d'arrache-pied pour permettre au client d'accepter son état de toxicomane, de façon à l'acheminer vers un programme d'abstinence, et c'est là que commence la désintoxication--soit un programme de désintoxication thérapeutique de trois semaines.
M. Randy White: D'accord. Nous y reviendrons peut-être un peu plus tard.
J'ai une question à poser à Rick. Si la marijuana de culture locale représente un problème à l'Île-du-Prince-Édouard, seriez-vous d'accord pour procéder à une dépénalisation--par exemple, punir la possession par procédure sommaire--, ou croyez-vous plutôt que, puisque...?
Je viens de la Colombie-Britannique, notre culture principale est la marijuana, malheureusement; là-bas, beaucoup soutiennent qu'on n'y peut rien pparce que cette culture est partout. Elle est partout, même dans ma collectivité, dont la population est environ l'équivalent de celle de l'Île-du-Prince-Édouard. Beaucoup proposent de légaliser tout simplement la substance, en la réglementant, puisqu'on ne peut rien pour empêcher le phénomène.
Sgt/A Rick Gibbons: Je comprends ce point de vue. Au fil de mes échanges avec mes homologues de partout au pays, j'en viens à croire que, oui, peut-être qu'un agent de la paix de la Colombie-Britannique pourrait voir la chose ainsi, étant donné l'ampleur du problème auquel on fait face là-bas. Néanmoins, ce n'est pas le point de vue de notre organisation. Nous ne sommes pas du tout en faveur de la légalisation de la marijuana à l'heure actuelle.
Dans l'exécution de nos opérations, je n'accorde pas plus d'importance au trafiquant de cocaïne qu'au trafiquant de marijuana. Je sais que la cocaïne, puisqu'il s'agit d'une drogue dite dure, engendre plus de problèmes. De plus, cette substance engendre des niveaux de toxicomanie différents. Il n'empêche que, pour nous, tout cela constitue un seul grand projet--la lutte contre l'usage de drogues en général.
M. Randy White: Que pensez-vous des déclarations de culpabilité par procédure sommaire pour la possession, par opposition à la procédure pénale?
Sgt/A Rick Gibbons: Nous utilisons déjà ce système dans une certaine mesure, depuis l'entrée en vigueur de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Cela dépend de la quantité, s'il s'agit ou non d'une infraction punissable par procédure sommaire, si des empreintes digitales sont relevées et versées à un casier judiciaire permanent, et ainsi de suite. Si la quantité est faible, cela n'entre plus en jeu.
Si votre question a trait à la légalisation, je peux vous dire que c'est déjà une infraction punissable par procédure sommaire. Manifestement, la loi est déjà en place. Je présume donc qu'il y a eu des demandes en ce sens, qui ont mené à l'adoption d'une telle loi.
¿ (0945)
M. Randy White: Merci.
La présidente: Avez-vous terminé, Randy?
M. Randy White: Oui. J'y reviendrai plus tard.
La présidente: D'accord. Puis-je vous demander de me préciser quelque chose?
Vous êtes contre la légalisation. Êtes-vous contre la dépénalisation? Croyez-vous qu'il y ait une différence entre les deux?
Sgt/A Rick Gibbons: Non, pas vraiment. À mon avis, je crois que c'est la même chose. S'il y a une définition officielle, je ne la connais pas.
La présidente: D'accord.
Cpl Ken Murray: Puis-je intervenir?
La présidente: Oui.
Cpl Ken Murray: Je reviens aux messages contradictoires qui circulent. Lorsque le grand public entend une définition de «dépénalisation» ou de «légalisation», je crois que cela confond l'homme de la rue. Le citoyen moyen essaie de suivre le débat à la télévision, par exemple, et il est assez difficile de lui expliquer que, essentiellement, nous avons déjà en place une forme de dépénalisation, à savoir, la procédure sommaire...
Je crois que beaucoup de gens raisonnent ainsi: puisque nous avons une loi fédérale, appliquons-la de façon équitable partout. En Colombie-Britannique, si un jeune se fait prendre avec un joint, devra-t-il comparaître devant la Cour provinciale? Probablement pas. Mais si ce même jeune est pris au volant en train de fumer un joint dans une région rurale de l'Île-du-Prince-Édouard, sera-t-il obligé de comparaître devant les tribunaux? Il est probable que oui. Il faut que les règles soient les mêmes pour tout le monde.
La présidente: En fait, pour compliquer la situation davantage, si les jeunes sont en voiture en Colombie-Britannique, ils devront probablement comparaître devant les tribunaux. S'ils ne sont pas pris dans une voiture, ils ne comparaîtront pas.
Si des jeunes sont pris en possession de mari mais qu'ils ne sont pas en voiture, à Île-du-Prince-Édouard comme en Colombie-Britannique, qu'arrive-t-il alors?
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Dites-vous que les règles sont bel et bien les mêmes?
Cpl Ken Murray: Non, je crois qu'elles devraient l'être. Puisque nous avons une loi fédérale, l'application devrait en être la même, que l'on soit en Colombie-Britannique ou en milieu rural à l'Île-du-Prince-Édouard.
À propos de la dépénalisation, l'infraction est déjà dépénalisée jusqu'à un certain point, pour certaines quantités. Je sais qu'il y a un débat en ce moment entourant la dépénalisation, l'élimination de la comparution devant le tribunal provincial, ou encore l'imposition d'une amende, par opposition à la comparution devant le tribunal provincial. Je crois qu'il faut accroître...
La présidente: L'unanimité?
Cpl Ken Murray: Oui. Si une personne comparaît à maintes reprises devant les tribunaux, elle doit en subir les conséquences. Il faut imposer des limites très strictes. C'est ce qu'on envisage pour la dépénalisation. Je crois que c'est une possibilité à étudier.
La présidente: D'accord. Je vous remercie.
Merci, monsieur White.
Je remercie les membres de notre table ronde.
Je cède maintenant la parole à Mme Davies pour 10 minutes. Vous avez la parole.
Mme Libby Davies: D'abord, merci beaucoup d'être venus compte tenu qu'il est si tôt.
La présidente: Il n'est pas si tôt pour eux.
Mme Libby Davies: Peu importe le fuseau horaire dans lequel vous vous trouvez, la discussion a été très intéressante. J'aimerais donner suite à plusieurs sujets.
Je viens aussi de la Colombie-Britannique. Je suis députée de Vancouver Est. Contrairement à Randy, je ne considère pas la réduction des méfaits comme étant une prolongation des méfaits. Pour moi, il s'agit d'un élément très important d'une stratégie globale qui comprend en effet l'abstinence. Selon la situation, la réduction des méfaits peut constituer une mesure très importante pour atténuer les torts que subissent non seulement les usagers, mais la communauté entière.
Je parle des piqueries contrôlées. Dans ma circonscription se trouve en fait le quartier qui a connu une sorte d'épidémie. Depuis hier, la First United Church s'affaire à créer un projet-pilote de piquerie contrôlée. Le taux de mortalité imputable aux surdoses est désormais si élevé que l'ouverture de piqueries contrôlées est perçue comme une mesure sanitaire publique visant en fait à sauver des vies. Il s'agit d'empêcher les toxicomanes de se piquer dans la rue, dans les ruelles, dans les entrées de porte et ainsi de suite. Quoi qu'il en soit, j'imagine que c'est une question de point de vue.
J'ai quelques questions, pour vous d'abord, Maureen. Vous avez parlé quelque peu des échanges de seringues. En fait, vous citiez, je crois, le American Medical Journal. Cela a suscité chez moi une drôle de réaction que j'ai déjà eue au comité. À savoir, avez-vous une idée ou une certaine connaissance de la stratégie canadienne antidrogue? Nous croyons disposer-là d'une riche source d'information—peut-être avons-nous tort—émanant de Santé Canada, à propos des échanges de seringues, de la réduction des méfaits, de la prévention, de l'éducation. Tout ce corpus a-t-il une quelconque incidence sur votre travail, vous aide-t-il, est-ce pour vous une ressource à l'Île-du-Prince-Édouard?
¿ (0950)
Mme Maureen McIver: Absolument. Je suis au courant du document publié par Santé Canada. Les deux institutions auxquelles je me suis référée pour préparer cet exposé... Je dois vous dire que j'ai saisi tout ce que je pouvais pour étayer mes thèses; je n'avais pas assez de temps pour effectuer une recherche approfondie de ce qui existe. Je me suis tournée vers les États-Unis. Le gouvernement Clinton a mené un examen interne approfondi, j'ai donc cru qu'il s'agissait là d'une bonne étude pour me documenter. Cependant, vous avez raison, le Canada a beaucoup fait lui aussi dans ce domaine.
Mme Libby Davies: Justement, nous nous penchons là-dessus. Il y a beaucoup de documentation, mais nous essayons d'évaluer quelle devrait être la participation du gouvernement fédéral. Sur quoi devrait-il concentrer ses efforts? Vous parliez plus tôt de messages en sens divers. Je crois qu'il y a un manque d'orientation dans la stratégie canadienne antidrogue. Je ne dis pas que c'est parfait, mais je suis curieuse de savoir à quel point cela vous est utile dans votre région.
L'autre sujet que je voulais aborder, c'est l'éducation, tant en ce qui concerne le programme DARE, que de votre propre point de vue. Caporal Murray, je crois que vous avez dit que les drogues sont interdites parce qu'elles sont dangereuses; et pourtant, il me semble que les drogues les plus dangereuses sont probablement celles qui ne sont pas illicites, mais bien licites. Je m'interroge donc sur la valeur de l'éducation dispensée par les agents de police. Je ne peux pas concevoir que l'éducation sexuelle soit dispensée par des policiers. La plupart des gens s'entendraient pour dire que c'est un sujet qui devrait être enseigné par le personnel scolaire ou les professionnels de la santé, et je ne vois pas pourquoi il en est autrement pour les drogues. La seule différence, c'est qu'il s'agit de substances illicites. La question se résume donc au message dont parlait Wayne, à savoir que l'on peut soit insister sur l'aspect du bien et du mal, ce qui est l'aspect coercitif, soit sur l'aspect de la maladie et de la santé.
Je voulais vous demander votre opinion sur la prévention et l'éducation, et je voulais savoir si vous jugez sage de confier ces tâches aux responsables de l'application de la loi. Croyez-vous que le message passe lorsque l'on dit aux enfants: «Si vous fumez de la marijuana, vous finirez pas devenir cocaïnomanes», même si l'on sait que ce n'est pas vrai.
Cpl Ken Murray: En tant que policier, je me rends volontiers dans les écoles pour sensibiliser les jeunes aux dangers de la drogue. Je suis là en qualité d'officier de police, de père et de grand-père. Est-ce que je souhaite voir mes enfants fumer de la marijuana? Non. Du point de vue du policier, nous sommes là en première ligne. C'est moi qui me rends chez les gens et qui constate les perturbations que cela cause au sein d'une famille. C'est moi qui doit faire état des suicides. C'est moi qui doit me rendre sur les lieux d'un accident mortel. C'est moi qui vient chez vous si vous avez été cambriolé. C'est moi qui répond aux appels des victimes d'agressions, qu'il s'agisse d'agressions sexuelles ou de voies de fait graves.
Je crois qu'il est très important d'aller partager mon expérience concrète avec des élèves de cinquième et de sixième année. Le fait de pouvoir dire que j'ai vu tout cela de mes yeux me donne de la crédibilité. Je ne peux leur livrer le point de vue du consommateur de drogues qui connaît les effets de ces substances, par exemple, mais je peux leur parler de tout ce qui entoure la consommation. Je peux leur dire que, s'ils entrent dans le monde de la drogue et qu'ils s'endettent dans ce milieu, ce n'est pas comme avoir une créance auprès de Household Finance ou de voir un de ses biens repris. Je peux leur dire qu'ils risquent des dommages corporels non seulement pour eux mais aussi pour leurs familles.
Par conséquent, la réponse est non. Du point de vue de la police, je crois qu'il est très important que les services policiers soient vus comme des agents d'éducation dans le cadre du programme du ministère de l'Éducation. C'est là une autre recommandation des étudiants, c'est-à-dire d'inviter des gens qui parlent en connaissance de cause à tenir des séances d'information. En tant que policier, je considère que c'est très important parce que c'est moi qui ai vu, à 3 heures du matin, tous les méfaits qu'entraîne la toxicomanie. Je crois qu'il est très important de communiquer ce point de vue aux jeunes.
¿ (0955)
Mme Libby Davies: S'il s'agit d'un message éducatif, et que l'on encourage à faire des choix intelligents, à améliorer sa santé, ce qui comprend des choix par rapport au tabac, par exemple, je crois que nous envoyons là des messages dans des sens très divers. C'est particulièrement vrai lorsque le message porte sur le fait que c'est mauvais pour vous et que c'est interdit par la loi, plutôt que sur la façon de prendre soin de soi, d'exercer des choix judicieux quant à ce qu'on veut faire et ne pas faire. C'est un point de vue tout à fait différent.
Vous avez dit que les programmes DARE ne faisaient pas l'unanimité. Je me demande si c'est l'outil approprié pour livrer un message si large. Le programme a-t-il connu du succès?
Peut-être que Kevin souhaite...
La présidente: Monsieur Murray.
Cpl Ken Murray: Je peux dire que je ne peux pas entrer dans une école et--je suis d'accord là-dessus--présenter l'aspect médical, dire, par exemple, si vous fumez ceci ou cela... Question santé, on ne peut le présenter sous cet angle. Pour l'autre angle, pour ce qui est visible, il n'y a pas à sortir de là: c'est une réalité quotidienne de la société. En effet, j'estime que le message est très important quant au rôle d'un agent de police.
Quant au programme DARE, aller dans une école et voir l'interaction avec un agent de police, pouvoir inculquer la dynamique de la vie, à mon enfant ou au vôtre, leur apprendre à devenir de meilleurs citoyens... Tout ce que j'espère, c'est qu'ils ne consommeront jamais de drogues. Du point de vue de la police, c'est un message très fort.
La présidente: Avant que nous ne passions à M. McKinnon, puis-je vous demander si cela inclut l'alcool et le tabac?
Cpl Ken Murray: Certainement. Quand nous parlons de drogues, nous incluons l'alcool et le tabac.
La présidente: Monsieur McKinnon.
M. Kevin McKinnon: C'est quelque chose que je voulais signaler aussi, le fait qu'avec nos programmes, avec les sept conseillers en orientation de la jeunesse qui couvrent toute la province et s'occupent des programmes d'assistance aux élèves, on n'insiste pas sur le côté légal du problème, sur le fait que les drogues sont nocives et illégales. On insiste par contre beaucoup sur la santé. C'est la façon de réagir s'il y a un problème dans la famille. On parle aussi beaucoup des drogues dites légales telles que le tabac et l'alcool et de leurs effets nocifs.
Mme Libby Davies: Votre programme touche combien d'écoles par rapport, par exemple, au programme DARE?
M. Kevin McKinnon: Je ne puis répondre pour le programme DARE mais simplement pour le nôtre, dans la région de Queens, cette année nous sommes intervenus dans 18 écoles, du niveau primaire jusqu'au niveau secondaire supérieur.
Mme Libby Davies: Est-ce que cela représente la majorité des écoles de Queens?
M. Kevin McKinnon: La majorité, pas toutes mais la majorité, du niveau primaire jusqu'au niveau secondaire supérieur. Je pense qu'il y a environ 30 écoles dans l'ensemble de l'île. Là encore, cela ne représente pas toutes les écoles, mais une majorité. Dans la plupart des cas, ce sont les écoles qui nous demandent des informations et c'est ainsi que nous lançons ces programmes. Elles manifestent leur intérêt, nous offrons le service et c'est ainsi que cela fonctionne.
Mme Libby Davies: Ai-je davantage de temps?
À (1000)
La présidente: Vous avez une minute.
Mme Libby Davies: Je vais attendre le prochain tour.
La présidente: La minute aurait été généreuse parce que je vous ai interrompue.
Monsieur Clark.
M. Wayne Clark: Quand on dit que fumer de la marijuana ne rend pas toxicomane, je pense qu'il faut être prudent parce que beaucoup de gens avec lesquels nous traitons, des toxicomanes, ont commencé par fumer de temps en temps de la marijuana ou par prendre un verre de vin avec le repas avant de devenir toxicomane ou alcoolique.
La présidente: Madame Allard.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Je veux, en mon nom personnel, vous remercier d'être ici aujourd'hui. J'ai plusieurs questions. Comme vous pouvez le comprendre, c'est un sujet très intéressant pour nous, les membres du comité.
Je vais commencer par M. Gibbons. Est-ce que vous êtes en mesure de nous parler de la qualité des drogues qui sont vendues sur le marché? Selon vous, le manque de contrôle met-il en péril la santé des jeunes qui prennent de la drogue actuellement ?
[Traduction]
Sgt/A Rick Gibbons: Pour ce qui est de la marijuana, par exemple, et de la qualité, comme c'est une substance illégale, chaque fois que l'on en vend c'est évidemment un acte illégal si bien qu'il n'y a absolument aucun contrôle de la qualité.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Ma question est plus précise. Est-ce qu'il arrive ici, à l'Île-du-Prince-Édouard, comme il nous arrive régulièrement au Québec, que des jeunes ayant pris des drogues se retrouvent à l'hôpital parce qu'on met n'importe quoi dans ces pilules ou dans ces drogues, ce qui compromet la santé de celui qui en prend? Est-ce qu'il y a eu des cas, à l'Île-du-Prince-Édouard, où des jeunes se sont retrouvés vraiment mal en point parce qu'ils avaient pris certaines drogues ?
[Traduction]
La présidente: Monsieur Gibbons.
Sgt/A Rick Gibbons: Pas à ma connaissance. D'ordinaire, quand j'entends dire que quelqu'un doit être hospitalisé après avoir pris de la drogue, c'est habituellement une question de quantité. Cela ne veut pas dire que cela ne se soit pas produit avec certains types de drogues coupés d'autres substances. On peut par exemple couper la cocaïne avec un certain nombre de choses, peut-être une substance toxique ou autre, mais je ne suis pas au courant. Cela ne veut pas dire pour autant que c'est impossible, c'est simplement que nous n'en avons pas eu connaissance.
La présidente: Il faudrait peut-être le dire au ministère de la Santé.
Monsieur McKinnon, vouliez-vous faire un commentaire?
M. Kevin McKinnon: Non.
La présidente: Personne d'autre?
Madame Allard.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Madame McIver, est-ce que le problème des sans-abri, à l'Île-du-Prince-Édouard, est assez grave?
[Traduction]
Mme Maureen McIver: Nous avons un problème d'itinérance à l'Île-du-Prince-Édouard. Nous avons obtenu des chiffres récemment.
Wayne, pourriez-vous m'aider? Était-ce une centaine de personnes qui sont sans logis dans l'île? Je crois que c'est cela.
M. Wayne Clark: Oui, à peu près.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Est-ce que vous êtes en mesure de vérifier si ces gens ont un problème de santé mentale en plus d'un problème de consommation de drogues?
[Traduction]
Mme Maureen McIver: Je ne sais pas ce qu'il en est pour tous mais je sais qu'actuellement nous avons un abri à Charlottetown qui reçoit les alcooliques sans logis que l'on ramasse de temps à autre dans les rues. On ne les emmène pas en prison, mais à l'abri.
Certaines de ces personnes ont un autre problème. Je sais que certains de ceux qui ont d'autres troubles ne se sont pas retrouvés à cet abri. Il y en a parmi eux qui sont à la fois toxicomanes et malades mentaux.
À (1005)
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Est-ce que ceux qui ont des problèmes de santé mentale ont également des problèmes de toxicomanie? Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire cela?
[Traduction]
Mme Maureen McIver: Je laisserai Wayne répondre.
M. Wayne Clark: Pour beaucoup, en effet.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Madame McIver, vous avez dit qu'il y avait une conspiration du silence dans le cas de la drogue, et j'aimerais que vous élaboriez un peu là-dessus.
[Traduction]
Mme Maureen McIver: Ce que je veux dire, c'est que beaucoup de monde se retrouve dans nos établissements de soins aigus, dans les cabinets de médecins, les installations pour malades mentaux et les bureaux de services sociaux sans que l'on fasse grand-chose pour essayer de déterminer s'il y a en fait un problème d'alcool ou de drogue. Parfois, même les cas tout à fait évidents ne sont pas pris en considération. Personne ne veut en parler. On espère simplement que cela va disparaître.
C'est pourquoi je dis qu'il y a une conspiration du silence. Je ne crois pas que l'on ait encore accepté que la toxicomanie est une maladie. On considère que c'est quelque chose de mauvais, de stupide ou d'idiot. On juge le comportement de la personne touchée et on ne voit pas qu'il s'agit d'une maladie. Comme on pense que ce n'est pas une maladie, on n'en parle pas. On ne veut pas gêner les gens. On ne veut pas faire de la peine. Plutôt que d'en parler normalement comme d'un autre problème de santé ou d'une maladie, on n'en parle pas.
Je crois vraiment qu'il faut beaucoup mieux informer la population. Si l'on veut atteindre le nombre de gens que l'on doit atteindre, il faut que cela se fasse à l'échelle nationale. Il faut commencer par en parler. Il faut que cela devienne une discussion publique pour que l'on puisse envisager la toxicomanie différemment. Quelquefois, je me demande dans quelle mesure ce n'est pas la société et notre système de santé qui perpétuent le problème. On traite les problèmes médicaux mais on ne traite pas la toxicomanie si bien que les gens restent toxicomanes. On dit que les toxicomanes refusent d'accepter leur état mais je crois que malheureusement, beaucoup de nos professionnels de la santé et d'autres membres de la société refusent aussi de voir le problème.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Merci, madame McIver.
J'ai une question pour chacun d'entre vous, si vous voulez y répondre. Je veux vous demander votre opinion.
Est-ce que la permission d'utiliser la marijuana à des fins thérapeutiques a renforcé la confusion du message dans la population? Monsieur Murray, je vous demanderais de commencer à répondre parce que vous dites qu'on est de plus en plus confus et que le message au sujet de la drogue est de plus en plus contradictoire.
[Traduction]
Cpl Ken Murray: Je crois qu'il y a un message mixte, surtout du point de vue de la prévention ou de l'éducation. Quand nous allons dans une école, qu'est-ce que nous disent d'abord les jeunes? Quand on parle de médecine à propos de la marijuana, la première chose qu'ils nous répondent, quand on essaie de faire passer ce message, c'est que le gouvernement pense qu'on peut l'utiliser à des fins thérapeutiques. Il faut alors essayer d'expliquer ce qu'il en est, que ce n'est pas général et que tout le monde ne peut pas en demander. Quand on parle de fins thérapeutiques, les jeunes confondent tout et pensent que c'est bon pour la santé. Ils associent les deux.
La présidente: Autres commentaires?
M. Kevin McKinnon: Oui, je voulais simplement répéter ce que disait Ken, en fait. Avec les écoliers que je vois, c'est une des premières choses que j'entends. Il est certain que cela sème pas mal de confusion.
La présidente: Quelqu'un d'autre?
À (1010)
Mme Maureen McIver: Ma foi, je ne suis pas en contact direct avec les clients, mais j'entends ce que l'on dit dans les services, et il est certain que le message devient confus.
M. Wayne Clark: C'est évidemment quelque chose que l'on commence à voir poindre dans les services de réintégration sociale, des toxicomanes qui consomment du THC viennent nous dire que c'est à des fins thérapeutiques.
Sgt/A Rick Gibbons: C'est un concept relativement nouveau si bien que l'on peut probablement informer les gens. C'est peut-être la première fois que l'on a une drogue totalement illégale dont la consommation devient légale à certaines conditions. Des substances comme le tabac, l'alcool et certains narcotiques ont toujours été accessibles légalement mais c'est là quelque chose de totalement nouveau.
La présidente: Merci, madame Allard.
Avant de passer à M. Sorenson, on a beaucoup parlé du fait qu'un verre de vin rouge peut être bon pour la santé. Que cela réduit le niveau de stress ou autre chose. Est-ce que cela embrouille aussi le message en ce qui concerne l'alcoolisme?
Malheureusement, on ne peut enregistrer les signes de tête.
Mme Maureen McIver: Je ne crois pas. Je crois que la majorité des gens qui sont alcooliques savent qu'il y a des gens qui peuvent contrôler leur consommation d'alcool.
M. Wayne Clark: Mais ceux qui continuent à refuser d'admettre qu'ils sont alcooliques essaieront évidemment de prétendre que c'est bon.
La présidente: Le Ritalin est un produit contrôlé qu'on utilise à des fins médicinales précises mais beaucoup de jeunes l'utilisent de façon illégale. Est-ce que cela embrouille les gens?
M. Kevin McKinnon: Personnellement, je pense que la plupart des jeunes savent à quoi sert le Ritalin. Il savent qu'on le prescrit pour ceux qui souffrent de THADA. Ils le consomment pour être «high» mais ils en connaissent les indications thérapeutiques. L'information est là. Je ne sais pas s'il y a ce même genre d'information pour la marijuana.
La présidente: Monsieur Sorenson, 10 minutes.
M. Kevin Sorenson: Merci.
Tout d'abord, en réponse à la question posée par la présidente tout à l'heure, j'ai vu des gens à la messe, presque toute une rangée de gens, ne pas aller communier, du moins au vin, parce qu'ils reconnaissent, grâce à Alcooliques anonymes, qu'ils ne peuvent même pas goûter au vin. Donc, pour certains, le message de modération est parfait mais, pour d'autres, ce doit être un message d'abstinence.
C'est quelquefois là que la réduction des méfaits rate aussi son coup car, très souvent, notre message est que nous essayons simplement de réduire les méfaits, alors qu'il n'y a pas de méfait... et c'est mal interprété. Ces messages de réduction des méfaits sont mal compris quand on veut simplement abaisser la valeur du méfait.
Toutefois, je tiens à féliciter les témoins de leur présence. J'aurai simplement une ou deux questions en vitesse.
Tout d'abord, y a-t-il des problèmes uniques à l'Île-du-Prince-Édouard? Nous avons ici Talbot House, des représentants provinciaux, la GRC. La GRC nous a déjà dit que le fait d'être entouré d'une côte facilite l'accès aux drogues car c'est difficile à contrôler.
Quels sont les problèmes ou préoccupations spécifiques à une île? Peut-être n'y en a-t-il d'ailleurs pas. C'est peut-être très général...
À (1015)
Sgt/A Rick Gibbons: Du strict point de vue policier, je me suis occupé de drogues dans d'autres divisions. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de différence ici, quoi que ce soit d'unique, en ce qui concerne l'application de la loi ni les différents types de drogues. C'est comme tout le reste ici dans l'île, tout dépend de la population. Nous avons les mêmes problèmes ici qu'ailleurs mais peut-être pas autant parce que nous avons une faible population.
Cela ne veut pas dire que d'autres témoins ne peuvent pas voir les choses différemment.
La présidente: Où avez-vous été en poste ailleurs?
Sgt/A Rick Gibbons: J'ai travaillé en Saskatchewan et en Nouvelle-Écosse.
La présidente: Madame McIver, je crois que vous vouliez dire quelque chose.
Mme Maureen McIver: J'allais juste dire qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, nos principales drogues restent le tabac, l'alcool et le cannabis. Nous voyons les tragédies que provoque l'alcool dans les familles, les accidents, les problèmes médicaux et certains itinérants mais ce sont là je crois les principaux problèmes. Chez les jeunes, quand ils boivent trop, cela peut provoquer de graves problèmes, notamment des morts.
On s'inquiète aussi dans l'île du mélange des drogues et de l'alcool qui provoque parfois la mort.
Là encore, je crois qu'il faut informer la population et lui parler des drogues et de leurs dangers. Cela doit se faire à l'échelle nationale. Évidemment, le tabagisme est également un problème important pour les jeunes et les adultes de l'île.
M. Kevin Sorenson: Rapidement, est-ce que Charlottetown a son propre service de police ou utilise-t-elle uniquement les services de la GRC? Combien y a-t-il de membres de la GRC dans l'île? Ce nombre a-t-il diminué au cours des 10 dernières années, et de combien?
Sgt/A Rick Gibbons: Nous avons environ 100 membres de la GRC dans la Division L, c'est-à-dire l'Île-du-Prince-Édouard. Je crois que cela n'a pas beaucoup changé, du moins depuis 10 ans que je suis ici.
M. Kevin Sorenson: Cela représente probablement 20 détachements, ou peut-être 25?
Cpl Ken Murray: Non, cinq détachements distincts.
M. Kevin Sorenson: Et 100 gendarmes. D'accord.
Pensez-vous que nous avons fait le nécessaire du point de vue de la prévention? Ce dont nous parlons au sein du comité depuis deux mois, c'est du fait qu'on ne peut pas tout laisser à l'application de la loi.
Je fais grande confiance au programme DARE. Nous avons la GRC en Alberta et je reçois des lettres des élèves et de leurs parents. Vous avez dit que l'on vous applaudissait souvent. Je crois que les parents comprennent que, comme je le crois moi-même, la GRC fait ce qu'il y a de mieux dans les interventions auprès des écoles.
Il faut un certain équilibre. Il faut ceux qui sont confrontés directement aux problèmes, qui se rendent sur les lieux d'un accident et voient les bouteilles éparpillées partout dans la voiture, qui vont dans les maisons et constatent des traces de drogues et de sang, etc.
Les lettres que j'ai reçues sur le programme DARE sont très positives. Il faut atteindre cet équilibre. Il faut des gens, comme l'a dit Mme Davies, qui connaissent l'aspect social de la question et peuvent parler d'un aspect différent de la lutte contre la drogue et de la prévention ainsi que de la réduction des méfaits et de tout le reste.
Les cinq détachements appliquent-ils le programme DARE dans les écoles?
Cpl Ken Murray: Non. Nous avons commencé il y a environ un an et demi et à l'heure actuelle il n'y a que sept gendarmes de formés pour ce programme pour des raisons d'intendance et d'effectif. Les chiffres dans les autres divisions sont probablement très comparables.
Notre objectif est de former au moins cinq gendarmes chaque année. Notre prochain cours est prévu pour l'automne et nous espérons que trois ou quatre gendarmes de plus seront formés.
En outre, ce n'est pas un programme de la Gendarmerie royale mais un programme qui s'adresse à toutes les forces policières et il a été offert aux forces policières municipales de l'Île-du-Prince-Édouard, à celles de Summerside, de Kensington, de Borden PD et de Charlottetown. À l'heure actuelle, la seule force policière municipale avec un agent qui a suivi cette formation est celle de Charlottetown, et l'objectif c'est qu'il y en ait un dans chacune des autres municipalités dans un proche avenir.
Nous l'avons dans toutes les zones scolaires. Il y a trois districts scolaires et ce programme est offert dans l'école de l'est et dans l'école de l'ouest. Il y en a un aussi pour la commission scolaire francophone. Les documents sont désormais prêts à être communiqués à la commission scolaire francophone et notre objectif est de former un gendarme francophone.
À (1020)
M. Kevin Sorenson: Il n'y a pas d'échange de seringues à l'Île-du-Prince-Édouard. Ce n'est pas nécessaire, donc il n'y en a pas.
Je crois que c'est toutes les questions que je voulais poser pour le moment.
La présidente: Merci.
Avant de commencer une autre ronde de questions, pourrais-je moi-même en poser quelques-unes? Vous êtes d'accord? Très bien.
Le Canada a opté pour une approche équilibrée. L'objectif est de réduire la demande et de réduire l'offre. Cependant, la vérificatrice générale, dans son rapport le plus récent juste avant Noël, a indiqué que le gouvernement fédéral consacrait 95 p. 100 de ses dépenses à la réduction de l'offre.
C'est peut-être dû en partie au fait que la majorité des aspects sanitaires les plus évidents de la toxicomanie sont assumés par les provinces et que le système d'enseignement est pratiquement de compétence provinciale. De plus, bien entendu, ce sont les forces policières provinciales qui sont en première ligne pour réduire l'offre.
La province de l'Île-du-Prince-Édouard a-t-elle fait des analyses pour déterminer quelles activités avaient pour objectif la réduction de la demande et quelles activités la réduction de l'offre?
Mme Maureen McIver: Pas que je sache.
La présidente: Très bien. Nous pourrions peut-être envoyer une lettre à la vérificatrice générale concernant votre province car le représentant de la vérificatrice nous a dit qu'un des problèmes était d'embarquer toutes les provinces. Si nous ne savons pas ce que chacun fait, il est difficile d'évaluer nos programmes.
M. Sorenson voudrait ajouter quelque chose à ce sujet.
M. Kevin Sorenson: Une petite question pour M. Clark. Qui finance Talbot House? La province?
M. Wayne Clark: Oui.
M. Kevin Sorenson: C'est donc totalement provincial.
Merci.
La présidente: Deuxièmement, combien y a-t-il d'habitants aujourd'hui à l'Île-du-Prince-Édouard? Est-ce que ce chiffre dépasse 120 000 ou ...
Une voix: C'est 158 000.
La présidente: Donc votre nombre de lits pour la désintoxication est en fait fort impressionnant comparativement à d'autres endroits que nous avons vus, et pour la réadaptation c'est aussi relativement impressionnant comparativement à certains endroits où nous nous sommes rendus.
Vous avez parlé du rôle des médecins, des infirmières, des professionnels de la santé et autres qui s'occupent de ces gens et de cette conspiration du silence. Autrefois, on donnait, presque à perpétuité, des calmants à certaines gens pour les calmer et pour qu'ils se tiennent tranquilles. Certains s'inquiètent de la consommation de médicaments sur ordonnance, que cela soit du Prozac ou autre chose; de toute cette histoire de médecins qui prescrivent deux fois la même chose sans le savoir; et de ces pharmaciens qui deviennent des acteurs plus ou moins passifs.
Votre province fait-elle des efforts pour les associer à la solution pour être certaine qu'ils comprennent? Avez-vous un programme destiné à éduquer les médecins, les infirmières, les professionnels de la santé et les pharmaciens?
Mme Maureen McIver: Il y a quelques élèves infirmières qui font des stages dans des services de désintoxication.
À (1025)
La présidente: Seulement quelques-unes?
Mme Maureen McIver: Seulement quelques-unes.
La présidente: Ce n'est pas une matière obligatoire.
Mme Maureen McIver: Non, et je crois réellement qu'il faut qu'elle le devienne. Il faut que cela devienne une matière obligatoire.
J'ignore qui pourrait l'imposer. Je ne sais si la Société médicale canadienne ou si l'Association des infirmières et infirmiers du Canada pourrait faire quelque chose, mais il faut faire quelque chose.
À mon avis, c'est absolument indispensable car les coûts économiques et sanitaires liés à la consommation des drogues licites sont énormes.
La présidente: Y a-t-il une faculté de soins infirmiers à l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard?
Mme Maureen McIver: Oui.
La présidente: Mais il n'y a pas de faculté de médecine.
Mme Maureen McIver: Non.
La présidente: Peut-être que s'adresser à cette faculté serait un premier pas.
Vous avez parlé de mauvais usage de médicaments chez les personnes âgées. Je sais que chez nous il n'y a pas que le mauvais usage des médicaments sur ordonnance qui nous inquiète mais aussi l'interaction avec la consommation d'alcool et le nombre croissant de personnes âgées qui sont seules et qui consomment peut-être plus d'alcool qu'il ne faudrait sans s'en rendre compte.
Est-ce que c'est un programme ... Est-ce que c'est un problème pour vous ou existe-t-il des initiatives qui s'adressent aux personnes âgées, à leur santé et aux problèmes d'accoutumance?
Mme Maureen McIver: Peut-être au niveau communautaire. Pour les personnes âgées, il y a aussi un problème d'information sur les médicaments qu'elles consomment. Les pharmaciens demandent aux gens de leur rapporter les médicaments qu'ils n'ont pas consommés. Les personnes âgées adorent accumuler les médicaments et il leur arrive, un ou deux ans après avoir eu une ordonnance, de prendre un remède qu'elles croient bon pour elles alors que le médicament est probablement périmé et qu'il est peut-être incompatible avec d'autres médicaments qu'elles prennent.
Il est donc indispensable, à mon avis, qu'au niveau communautaire, dans le contexte de programmes à domicile ou de programmes en centre de soins, d'avoir une approche multidisciplinaire pour informer les personnes âgées sur la consommation de médicaments sur ordonnance. Pour les médicaments en vente libre, c'est un autre problème.
La présidente: Caporal Murray, vous avez dit être les premiers à rendre visite aux familles en cas de tragédie, d'incident ou de violence dus à la consommation de drogues. Je pense que vous pensiez surtout au LSD, à l'héroïne ou à des drogues de ce genre. Mais les appels que vous recevez ne sont-ils pas liés avant tout à des problèmes d'alcool plutôt qu'à des problèmes de drogue, si vous faites le compte? Je veux dire que ce ne sont certainement pas des appels pour des problèmes liés au tabac, mais que certainement... Sont-ils plus liés à l'abus d'alcool qu'à la consommation de drogues?
Cpl Ken Murray: Ils sont plutôt liés à l'alcool, mais il y a aussi des problèmes de drogues. L'alcool semble être une des drogues de choix dans la région.
La présidente: Nous avons un système de gouvernement qui engendre des recettes et qui fait de la publicité. Les messages portés par les médias sont contradictoires; dans les films tout le monde boit, tout le monde s'amuse et pour les jeunes ça doit être très difficile à comprendre. Dans presque toutes les maisons on boit un peu d'alcool. Les enfants voient plus ce genre de message, je crois, que... vous savez, les messages dans lesquels on me dit de ne pas fumer de marijuana, qui, entre parenthèses, a probablement des conséquences moins violentes et vous endort plus vite que l'alcool.
Lorsque vous parlez aux jeunes, est-ce qu'ils acceptent et est-ce qu'ils font la différence, quand leurs parents qui boivent régulièrement une bière ou deux tous les soirs les sermonnent sur la drogue?
Cpl Ken Murray: Les messages envoyés aux enfants sont parfois inappropriés lorsqu'ils émanent d'adultes qui disent en rentrant du travail: «J'ai vraiment eu une journée difficile, donne une bière à papa». Les jeunes le reçoivent comme un message. Qu'est-ce qu'on fait quand on a eu une journée difficile? On se prend une petite bière ou autre chose.
Les jeunes voient les messages de publicité sur les paquets de cigarettes. On insiste beaucoup sur le tabac, «Ne fumez pas». On met de belles images sur les cartouches, les paquets, et on fait la distinction entre le tabac léger, les cigarettes à bout filtre, etc., mais du point de vue sanitaire, un joint de marijuana c'est l'équivalent de 15 cigarettes. Et pourtant, on ne semble pas trop le rappeler à propos de la marijuana. Il y a confusion totale au niveau des messages pour les jeunes.
La cigarette c'est un gros problème, mais quand on fait la comparaison, quand les spécialistes font des comparaisons sur la base des recherches... Ce n'est pas le bon message.
À (1030)
La présidente: À ce propos, nous avons entendu un groupe de témoins nous dire que ces messages contradictoires les inquiétaient vivement. Certes, dans les cas aigus, pour ceux qui n'ont plus que six mois à vivre, on ne s'inquiète pas forcément des risques de cancer du poumon, mais pour ceux qui fument de la marijuana pour soulager des maladies chroniques--la sclérose en plaques, par exemple--il est un peu étrange de leur conseiller de fumer quelque chose qui risque de leur donner un cancer du poumon ou d'autres cancers. Ils nous ont fait un exposé intéressant sur cette question.
Nous avons entendu des médecins, lors de nos pérégrinations, qui se sont dits un peu inquiets des messages entourant la consommation médicale de marijuana et de la nécessité de trouver d'autres solutions qui soient moins dangereuses pour la santé.
Monsieur Clark.
M. Wayne Clark: À propos des effets relaxants de la marijuana qui, paraît-il décontracte, nous avons pu constater qu'il y avait un revers à la médaille.
La présidente: Vraiment?
M. Wayne Clark: Certains participants à nos programmes de traitement ont vécu des expériences avec des conséquences négatives très sévères résultant directement de leur consommation de THC.
La présidente: Comme quoi?
M. Wayne Clark: Perte de famille, d'emploi, difficultés financières. Ils fument des quantités énormes pour assouvir leur dépendance.
La présidente: Mais sur le plan physique, les gens perdent-ils leur emploi parce qu'ils deviennent paresseux, ou est-ce parce qu'ils...
M. Wayne Clark: Parce qu'ils ne viennent pas travailler.
La présidente: Mais généralement ce n'est pas le même genre de réaction que celle d'un alcoolique ou d'un buveur invétéré qui devient agité, bruyant ou violent.
M. Wayne Clark: Oui, mais je ne pense pas que vous puissiez dire qu'il y a problème simplement lorsqu'il y a violence.
La présidente: Non, je faisais directement allusion à ce qu'a dit M. Murray à propos des foyers où viennent d'être commis des actes de violence, ou d'agressivité--et la réaction des enfants ou leur compréhension des raisons de ce comportement.
M. Wayne Clark: C'est probablement plus du point de vue des services à la famille et aux enfants lorsqu'ils interviennent pour enlever les enfants pour des raisons...
La présidente: D'abus d'alcool ou de marijuana?
M. Wayne Clark: Des deux, ou de l'un ou l'autre.
La présidente: Madame McIver.
Mme Maureen McIver: Je crois qu'il faut aussi penser sérieusement à ceux et à celles qui prennent le volant et qui fument de la marijuana. Pour les jeunes, le message c'est: «Pas d'alcool au volant», mais est-ce à dire «Pas de cannabis au volant»?
La présidente: À cet égard, monsieur McKinnon, d'après ce que j'ai entendu certains jeunes dire, ce qu'ils comprennent du message sur l'alcool du volant, c'est «Ne vous faites pas prendre». Pour eux, il ne s'agit pas des conséquences de la conduite avec facultés affaiblies. Il ne s'agit pas de causer du tort à quelqu'un d'autre. Il s'agit de ne pas se faire prendre.
Dans notre province, il existe un programme RIDE. À l'heure actuelle, ce programme ne permet pas de déterminer la présence de THC, donc certains jeunes se disent, «Formidable, je vais plutôt fumer un joint; j'ai encore envie de faire la fête, mais je n'ai pas l'intention de me faire arrêter par les flics.»
En ce qui concerne l'argument présenté par Libby à propos de la réduction du risque et de comprendre pourquoi il pourrait être préférable de ne pas agir de certaines façons, il y a probablement un message plus efficace à transmettre ici, à savoir, vous ne voulez pas conduire avec des facultés affaiblies parce que vous risquez de vous faire du mal et d'en faire aux autres. Et en fait on a un peu de difficulté à faire passer ce message parce que certains aspects de la campagne actuelle de sensibilisation sur l'alcool au volant semblent mettre l'accent sur le fait de ne pas se faire prendre et non sur le fait d'éviter de faire du mal aux autres.
Est-ce que vous avez entendu ce genre de propos chez les jeunes?
M. Kevin McKinnon: Il ne fait aucun doute que les programmes SADD, Students Against Drunk Driving, et MADD, sur l'alcool au volant, sont des programmes très bien établis dans la province et, dans l'ensemble, les jeunes n'agissent pas ainsi aujourd'hui.
La présidente: Conduire en état d'ivresse.
M. Kevin McKinnon: Oui, d'après ce que je peux voir. Mais je constate effectivement qu'il y a une certaine confusion à cet égard. Beaucoup d'entre eux conduiront après avoir fumé de la marijuana. C'est ce que j'ai entendu.
Donc, effectivement, il existe peut-être certains messages contradictoires qui ilaissent entendre que cette façon d'agir est acceptable. Mais il ne fait aucun doute qu'un aspect de notre programme de sensibilisation et de prévention consiste à dire évidemment que ce n'est pas acceptable.
Nous sommes en train de transmettre ce message mais je crois qu'il faut faire plus. Il ne fait aucun doute que les jeunes aujourd'hui savent qu'il n'est pas acceptable de conduire en état d'ébriété. Ce n'était pas le cas il y a 20 ans.
La présidente: Non.
M. Kevin McKinnon: Je suis donc en train de dire que ce programme fonctionne, mais il est peut-être nécessaire d'insister davantage sur le fait qu'il n'est pas acceptable non plus de conduire après avoir fumé de la marijuana.
À (1035)
La présidente: Et de se méfier aussi des médicaments sur ordonnance lorsque l'on conduit.
M. Kevin McKinnon: Oui.
La présidente: Caporal Murray, avez-vous un commentaire à faire?
Cpl Ken Murray: En ce qui concerne l'application de la loi, l'utilisation de la marijuana est une tendance constatée par les sociétés d'assurance lorsqu'il se produit des accidents, car un plus grand nombre de gens consomment de la marijuana. Peut-être pas dans cette province mais je sais que dans d'autres provinces, même si je ne peux pas vous citer les chiffres, les gens consomment de la marijuana et moins d'alcool. Pour ce qui est de l'application de la loi, nous n'avons aucune disposition qui nous permette de déterminer la présence de THC.
La présidente: Pour l'instant.
Cpl Ken Murray: Pour l'instant, oui. En Colombie-Britannique, il y a un programme spécialisé de reconnaissance des drogues mais j'ignore dans quelle mesure... Les policiers sont formés pour pouvoir reconnaître, selon un pourcentage très élevé, la drogue que la personne a consommée. Prenons, par exemple, un cas de conduite avec facultés affaiblies. Si nous administrons à cette personne un alcootest et que le résultat obtenu est très faible, les spécialistes qui ont suivi ce cours pourraient dire, oui, nous sommes sûrs à 88 ou 90 p. 100 que cette personne est sous l'influence du LSD ou de la cocaïne. Ils parviennent à déterminer la catégorie particulière de drogue.
Cependant, ce genre de cas peuvent être difficilement portés devant les tribunaux car tout d'abord on n'a aucun échantillon ni rien de tangible qui permette... que ce soit un échantillon de sang ou d'urine qui pourrait être analysé, et par ailleurs il n'existe aucune disposition en vertu du Code criminel, par exemple, autorisant le prélèvement d'un échantillon de sang ou d'urine pour déterminer la présence de drogues.
Je crois qu'on est en train de faire passer ce message, et qu'il est bien compris, aussi.
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur White.
M. Randy White: Vous savez, tout cela me fait très peur... [Difficulté technique--la rédaction]. J'ai grandi dans une région rurale de la Nouvelle-Écosse et quand nous étions jeunes nous n'hésitions pas à aller nous procurer une bouteille de vin ou quelques bières chez les trafiquants d'alcool, le vendredi soir pour boire ensemble en fumant des cigarettes. Mais aujourd'hui, si vous fumez de l'héroïne ou du crack, il suffit de recommencer quelques fois pour vous marginaliser pour le reste de votre vie.
Ce sont les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui. Les expériences que nous faisions lorsque j'étais jeune n'étaient pas les mêmes que celles que font les jeunes d'aujourd'hui. Si vous prenez l'Ecstasy, nous ne savons même pas si cela crée une dépendance. C'est une drogue relativement nouvelle. Mais vous ne savez même pas quelle substance vous absorbez vraiment. Cette drogue est fabriquée dans des garages et dans des sous-sols.
J'essaie de vraiment cerner le problème et de voir comment nous pouvons lutter, si ce n'est en éduquant les jeunes... C'est de ce côté-là qu'il faut dépenser plus d'argent.
La Chambre des communes ne s'est pas penchée sur le problème de la drogue depuis 1972, lors de la commission Le Dain. À l'époque, je crois que l'étude portait sur le cannabis et le cannabis était loin d'être aussi fort qu'il l'est maintenant. C'est en 2002 que nous étudions le problème de la drogue, ce qui arrive un peu tard selon moi. Nous sommes confrontés à ce problème depuis des années, mais c'est maintenant que nous l'étudions et nous devons formuler des recommandations d'ici le 30 novembre prochain. J'espère que ces recommandations auront un effet dans nos rues et se traduiront par des mesures concrètes et non pas de simples discours de la part du gouvernment.
Je voudrais poser quelques questions à chacun d'entre vous; c'est très important. J'aimerais savoir quelles seraient vos deux principales priorités. Nous devons adresser à la Chambre des communes des recommandations utiles. Nous voulons qu'on y donne suite. J'aimerais que chacun d'entre vous m'indique quelles seraient les deux mesures les plus efficaces et les plus utiles.
Je voudrais également vous demander si vous pensez... je ne veux pas vraiment parler de la marijuana. Personnellement, je m'intéresse davantage aux drogues qui créent une dépendance. Ça ne veut pas dire que la marijuana ne crée pas de dépendance, mais je voudrais parler de la cocaïne, du crack, de l'héroïne et de ce genre de drogues. Je voudrais savoir si, à votre avis, la marijuana est une drogue d'introduction à d'autres drogues, si elle y conduit, si elle crée une certaine dépendance qui vous mène vers d'autres drogues ou si ce n'est pas seulement... quand j'étais jeune, j'ai bu de la bière, ce qui m'a amené au rhum et au rye, et ainsi de suite. La marijuana vous conduit-elle sur le chemin de la toxicomanie? Se dit-on: «Je vais essayer une drogue plus puissante étant donné que celle-là ne m'a fait aucun mal».
Premièrement, chacun d'entre vous peut-il me dire s'il pense que la marijuana mène à la toxicomanie et, deuxièmement, pouvez-vous nous indiquer quelles sont les deux recommandations prioritaires que nous devrions formuler?
La présidente: Nous allons commencer par Maureen McIver.
Mme Maureen McIver: Pour ce qui est de ma première priorité, je crois qu'il faut éduquer le public au sujet de toutes ces drogues, des risques qu'elles représentent, etc.
Comme vous le savez, on a beaucoup parlé de légalisation et de dépénalisation, mais nos drogues licites, comme l'alcool et le tabac, coûtent à notre pays des milliards de dollars en soins de santé, en problèmes économiques, en problèmes sociaux, etc. Et ce sont des drogues licites. Si d'autres drogues devenaient licites ou étaient dépénalisées, cela ne rendrait-il pas d'autres drogues plus facilement disponibles ce qui entraînerait toutes sortes de problèmes pour la société?
L'éducation du public me paraît vraiment nécessaire. Nous devons aussi faire plus de recherches sur les dépendances au Canada. D'autre part, je suis convaincue qu'il faut accorder des moyens plus importants aux services spécialisés dans ce domaine. Les dépendances causent beaucoup plus de problèmes que nous n'osons l'imaginer. Nous savons tous qu'il y a bien d'autres problèmes au sein de notre société et que l'on sabre dans les programmes, mais les services de toxicomanie sont souvent victimes de ces compressions quand on a besoin d'argent.
Notre pays doit se pencher sur les problèmes que la dépendance et la toxicomanie posent dans notre société, et fasse en sorte qu'il y ait des programmes éducatifs, que l'on fasse de la recherche et que l'on accorde plus d'importance à ce problème.
M. Randy White: Votre première priorité est donc l'éducation du public et ensuite la recherche sur les dépendances.
Mme Maureen McIver: Oui.
M. Randy White: Et la marijuana; conduit-elle à la toxicomanie?
Mme Maureen McIver: Nous savons que le tabac est une drogue d'introduction à la marijuana. Je ne peux pas vous dire si les publications sur le sujet considèrent le cannabis comme une drogue d'introduction, mais je sais que l'alcool et la marijuana sont tous deux des sédatifs. Après une forte consommation de ces deux substances, un toxicomane recherchera une stimulation.
Cela peut donc conduire à d'autres stimulants comme la cocaïne et les amphétamines.
M. Randy White: Merci.
À (1040)
La présidente: Monsieur McKinnon.
À (1045)
M. Kevin McKinnon: Tout d'abord, en ce qui concerne la marijuana comme drogue d'introduction, un bon nombre des jeunes dont je m'occupe ne savent même pas ce que cela veut dire. Certains d'entre eux croient que s'ils fument de la marijuana, cela veut forcément dire qu'ils vont consommer de la cocaïne, de l'héroïne ou une autre drogue. Nous essayons de les informer. C'est ce que cela voulait dire il y a des années et c'est ce que le gouvernement a essayé de faire valoir.
Néanmoins, je suis convaincu que le cannabis est une drogue d'introduction, en ce sens que la plupart des personnes dépendantes de la cocaïne et de l'héroïne, les drogues dites dures, ou des médicaments sur ordonnance, commencent par fumer du cannabis. J'ignore quels sont les chiffres et quels sont les pourcentages, mais je dirais qu'un pourcentage élevé de toxicomanes commencent par le cannabis.
Si c'est ce qu'on entend par drogue d'introduction, je n'hésiterais pas à dire que ç'en est une. Vous ne vous réveillez pas un jour en disant: «Aujourd'hui je vais commencer à consommer de la cocaïne» si vous ne faites pas déjà partie du monde de la drogue. Il faut que vous fassiez déjà partie de ce milieu.
Pour ce qui est de mes recommandations, je commencerais également par l'éducation. Je prêche peut-être pour ma paroisse, mais j'estime que l'éducation des familles est certainement très importante étant donné les répercussions que cela a sur toute la famille. Maureen a parlé tout à l'heure du déni. Le déni des familles est parfois beaucoup plus fort que celui du toxicomane.
Il faudrait donc dépenser beaucoup plus d'argent ou sensibiliser davantage le public aux effets de la drogue non seulement sur le toxicomane, mais également sur son entourage.
Et il faudrait aussi faire de la recherche. Nous avons dit ce matin que la confusion régnait dans les esprits sur bien des plans. On semble faire beaucoup de recherche, mais je ne sais pas... Ken a notamment mentionné ce matin trois manchettes de journaux différentes qui parlaient de trois choses différentes. Il nous faut les moyens financiers voulus pour faire de la recherche dans l'ensemble du pays afin que tout le monde soit informé du problème, que nous sachions dans l'Île-du-Prince-Édouard quels sont les résultats des recherches effectuées en Colombie-Britannique et vice-versa. Il faut que tout cela se sache d'un bout à l'autre du pays.
M. Randy White: Merci.
La présidente: Monsieur Clark.
M. Wayne Clark: Je crois que le refus d'accepter la réalité de la part des membres de la famille du toxicomane dont parlait M. McKinnon n'est pas bien différent de ce que vit le toxicomane lui-même, en ce sens que des sentiments de honte et de culpabilité sont associés à la maladie. Je crois donc que l'information du public va aider les gens à voir la toxicomanie comme une maladie et non comme un trouble du comportement associé à un sentiment de honte.
L'année dernière, j'aidais mon fils de 11 ans à faire ses devoirs de cinquième année sur la santé. Je crois que le livre dont il se servait était publié aux États-Unis. Peu importe d'où venait ce livre, on y disait très clairement que le traitement offert par les Alcooliques Anonymes était le meilleur sinon le seul à pouvoir venir à bout de l'alcoolisme. Je crois que cela est un énorme progrès réalisé en matière d'éducation du public au sujet de cette maladie.
Quant à votre question au sujet de la marijuana comme drogue d'introduction, notre expérience dans le traitement des toxicomanes nous porte à le croire. Je le répète, nous travaillons avec des toxicomanes drogués au THC. Nous traitons aussi des cocainomanes et autres utilisateurs de drogues dures qui ont d'abord essayé le THC. Nous traitons toutefois des gens qui ont commencé avec la cocaïne et aussi de simples alcooliques.
L'autre élément, l'information et l'éducation qui doivent accompagner le traitement, puisque l'Île-du-Prince-Édouard s'enorgueillit d'être un chef de file dans la désintoxication de sa population, et avec des programmes de rééducation comme l'a dit Mme Torsney je crois, il faudra certainement que le gouvernement fédéral envisage d'autres façons de traiter les dépendances de produits chimiques grâce à des programmes de désintoxication, de rééducation et de séjour dans des établissements de soins prolongés.
La résidence Lacey qui est en fait la version pour femmes d'un établissement de soins prolongés est un des seuls établissements du genre dans l'est de Montréal, du moins selon nos constatations. Cet établissement compte huit lits. Talbot House est un établissement analogue. Je ne sais pas combien la ville compte de ces établissements de soins prolongés pour hommes, s'il y en a.
Il faut donc explorer cette voie. La prévention est très importante, mais il ne faudrait pas abandonner les programmes de traitement.
À (1050)
M. Randy White: Vos priorités sont donc l'information du public et davantage de traitements. Ce sont vos deux principales priorités. Merci.
La présidente:Monsieur Gibbons.
Sgt/A Rick Gibbons: Je crois que la consommation de marijuana peut constituer un tremplin pour l'usage d'autres drogues. Je sais qu'en 1979, lorsque j'ai commencé à travailler à plein temps comme agent de la lutte anti-drogue, les seuls crimes sur lesquels on enquêtait étaient reliés à la marijuana et au cannabis, et ce n'est que quelques années plus tard que la cocaïne est apparue. Je crois vraiment que c'est une décision personnelle; même si tous les consommateurs de marijuana ne vont pas passer à d'autres drogues, je crois que c'est un bon indice. Je dirai qu'on s'expose à plus de risques en consommant cette drogue.
Pour ce qui est de mes recommandations, la première—et elle a un aspect assez négatif—c'est que je ne voudrais pas que la loi fasse l'objet de nouveaux assouplissements en ce qui a trait au programme de lutte anti-drogue.
L'autre recommandation serait d'accorde plus de financement, de ressources et de personnel. J'aimerais bien avoir davantage de personnel à plein temps pour la lutte anti-drogue et aussi davantage de gens qui exercent les mêmes fonctions que M. Ken Murray. Je sais aussi que tout le monde cherche à obtenir plus de fonds, même au sein de la GRC, pour différents programmes. Tout le monde est dans le même bateau, et c'est aussi le cas de tous les ministères fédéraux. Mais vous m'avez posé la question, alors...
M. Randy White: J'ai effectivement posé la question. Merci.
Cpl Ken Murray: D'abord, vous demandez si la marijuana est une drogue d'introduction. Lorsque je rends visite aux écoliers, je me sers souvent d'une excellente bande vidéo faite par The Odd Squad de la Colombie Britannique qui s'intitule Flipping the World: Drugs Through a Blue Lens. Avant de faire jouer la bande, je commence par dire aux écoliers de ne pas simplement regarder la vidéo mais d' écouter ce que disent les toxicomanes, pas les policiers, sur leurs premières expériences parce que chacun d'entre eux dit avoir d'abord commencé avec l'alcool ou la marijuana.
Je crois que les statistiques révèlent que la marijuana n'est pas nécessairement un tremplin vers une autre drogue, mais l'utilisateur s'est déjà exposé à certains risques. Il s'est déjà montré prêt à expérimenter, ce qui le place dans une catégorie de risque plus élevée. C'est le message que j' e transmets aux enfants: «Passerez-vous à d'autres drogues? Non, rien ne prouve que vous le ferez, mais les risques sont plus grands.»
Pour ce qui est des priorités, il faut d'abord expliquer ce que nous allons faire, quelle sera la stratégie de lutte antidrogue afin de mettre fin à toutes les rumeurs que propagent les médias. Expliquons clairement ce que le Canada est prêt à faire, quelles dispositions se trouveront dans nos lois antidrogue afin qu'il n'y ait pas d'hésitation. Stabilisons les choses et disons bien clairement quelle est la position du gouvernement, c'est-à-dire que nous voulons garantir la sécurité des foyers et des collectivités.
De cette façon, nous dirons d'abord à la population ce que le gouvernement entend faire, quelle est sa position et que cette position n'est pas négociable à l'heure actuelle. C'est le plan du gouvernement.
Deuxièmement, nous devons appuyer davantage les initiatives de prévention, tant en ressources financières qu'en ressources humaines. Du côté de la prévention, nous luttons beaucoup contre les dépendances. Mais ce n'est pas seulement le travail des services policiers et nous devons investir davantage d'argent dans la prévention. Nos initiatives de prévention devraient être conjuguées au travail qui se fait au niveau des dépendances et à celui d'autres organisations de nos collectivités car nous devons tous travailler de concert à la sécurité de nos foyers et de nos collectivités.
À (1055)
M. Randy White: Merci beaucoup à tous.
La présidente: Merci.
Madame Davies.
Mme Libby Davies: Merci.
Pour aller plus loin dans les discussions actuelles, je suis d'accord sur le fait que l'éducation est, comme tout le monde l'a dit, la question la plus prioritaire, sinon la priorité absolue pour résoudre les problèmes que nous voulons corriger. À mon avis toutefois, l'éducation elle-même ne suffit pas; il faut voir quel message nous envoyons et quelle information nous transmettons.
Pour ce qui est de la question des drogues d'introduction, c'est une question très tendancieuse. Nous savons par exemple que toutes les personnes qui causent des accidents mortels de la route conduisent des voitures. Ce que nous faisons de plus dangereux, c'est peut-être de monter chaque jour dans notre automobile, et pourtant, tous les conducteurs de véhicule ne causent pas d'accidents mortels, n'est-ce pas? Il faut donc voir comment on présente les choses. À mon avis, il faut communiquer aux gens des renseignements réalistes sur les décisions que nous prenons tous et sur les effets de ces décisions sur nous, sur notre collectivité, sur notre santé, sur notre bien-être, etc.
L'idée de dire simplement aux jeunes que s'ils fument de la marijuana, ils deviendront dépendants de la cocaïne, eh bien, les jeunes savent que ce n'est pas vrai. Cela peut devenir très biaisé. J'estime que l'éducation donne aux gens la possibilité de faire des choix... et on veut réduire les préjudices. On a même soulevé les contradictions que pose l'utilisation médicale de la marijuana, par exemple, et comment cela peut être nuisible. Mais dans le traitement de beaucoup de cancers, les drogues utilisées peuvent être incroyablement nocives. Il faut toujours voir les circonstances. Cela dépend de la situation.
Nous avons donc eu une bonne discussion sur l'éducation, mais il me semble évident que notre société ne comprend pas quel message nous devrions transmettre.
Du point de vue des services policiers, plus particulièrement de la GRC, vous avez probablement plus de contacts à la grandeur du pays. Mais du point de vue de la santé, des recommandations que nous pourrions inscrire dans ce rapport sur ce que devrait être le rôle du Canada, avez-vous l'impression qu'il existe un lien entre votre travail et ce que font les intervenants en matière de santé qui oeuvrent dans le domaine de la toxicomanie partout au Canada? Chacun fait-il sa petite affaire dans sa province?
Ici, à l'Île-du-Prince-Édouard, vous semblez prendre d'excellentes mesures. Je suis heureuse de voir que vous accordez le traitement sur demande. Nous avons essayé d'exercer des pressions pour que cela se fasse également en Colombie-Britannique, mais en vain. Et il me semble que c'est absolument essentiel.
Faut-il donc qu'il y ait plus de continuité, de liaison ou d'information dans tout le pays, pas seulement pour l'éducation mais aussi pour les programmes de traitement, de façon à ce qu'on puisse voir ce que disent les documents sur le sujet ou qu'on puisse vérifier quelles recherches sont effectuées? J'ai l'impression que tout cela est très fragmenté. On entend des choses différentes selon l'endroit où l'on est.
Ici, la GRC utilise la bande vidéo Odd Squad. Je puis vous dire que dans la collectivité, bien des gens n'aiment pas cette vidéo. Pour eux, c'est très négatif. C'est donc un point de vue différent.
La présidente: Madame McIver.
Mme Maureen McIver: Nous ne savons pas très bien ce qui se fait ailleurs au pays. Santé Canada, ou plutôt le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies, avait publié un profil, mais il y a déjà de cela bien longtemps.
Mme Libby Davies: De quel document s'agissait-il?
Á (1100)
Mme Maureen McIver: Il s'agissait simplement d'une liste des traitements offerts dans chaque province—désintoxication, counseling externe, réadaptation...
Mme Libby Davies: Y indique-t-on quels traitements donnent de bons résultats ou lesquels ne fonctionnent pas...
Mme Maureen McIver: Non, c'est simplement une liste des programmes offerts, sans réelle description de ce que comprennent ces programmes. Mais je siège au sein d'un comité avec des homologues fédéraux à Ottawa et ils nous font connaître bien volontiers les nouveaux programmes qui sont mis sur pied.
Pour ce qui est de l'éducation au sujet des drogues, il faut présenter les faits. Le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies a publié un excellent document intitulé Les drogues: faits et méfaits. À l'Île-du-Prince-Édouard, nous aimons bien ce document. Enfin, nous avons dû récemment en commander de grandes quantités à deux reprises.
Il faut donc quelque chose de semblable, le message doit être réel. Il doit être vrai. Il faut le faire passer dans les médias, à la télévision, etc. Cela donne de bons résultats dans le cas du tabac.
J'essaie de me rappeler vos autres questions.
Mme Libby Davies: Enfin, c'est une très bonne idée, j'allais le mentionner. Quand il s'agit de toxicomanie ou d'alcoolisme, que le produit soit licite ou non, en quoi le message est-il différent? À mon avis, le tabagisme est un bon exemple d'une activité licite dont les statistiques montrent une nette diminution grâce à des campagnes d'information publique axées sur la santé. Et pourtant, nous savons que de plus en plus de jeunes filles fument.
C'est un exemple qui ne met pas en cause l'exécution des lois, le fait de simplement dire non ou d'appliquer une interdiction; le message est axé sur la santé et on constate maintenant qu'il a un effet.
Mme Maureen McIver: Oui, c'est tout à fait cela.
Mme Libby Davies: Il semble pourtant que nous n'en faisons pas autant dans le cas des drogues. La plupart du temps, l'information porte davantage sur le bien et le mal, ce qui est licite ou non. À mon avis, cela ne rejoint pas du tout les jeunes.
La présidente: Monsieur McKinnon, vous avez une observation à faire?
M. Kevin McKinnon: Je ne suis pas d'accord au sujet de ce qu'on vient de dire sur l'information fournie aux jeunes. Il ne s'agit pas seulement de parler du bien et du mal, de ce qui est licite et illicite dans le travail que nous faisons dans les écoles.
Mme Libby Davies: C'est vrai, mais je pensais au programme PSED.
M. Kevin McKinnon: Je ne veux pas non plus qu'on retire de nos propos que nous disons aux jeunes dans les écoles que s'ils fument de la marijuana, ils passeront automatiquement à la cocaïne. Ce n'est pas du tout ce que nous leur disons. Nous leur disons simplement que cela pourrait être le cas, même si dans la majorité des cas, cela ne se produira pas.
Mme Libby Davies: Et je crois que c'est très important.
M. Kevin McKinnon: Nous ne disons pas non plus que c'est bien de fumer de la marijuana.
Comme l'a dit Mme McIver, il faut dire la vérité aux jeunes, leur fournir de l'information qu'ils peuvent croire. Ils sont au courant. Compte tenu de tout ce qu'on peut trouver sur Internet et ailleurs aujourd'hui, ils en savent probablement bien plus long que nous. Ils sont probablement plus au courant que nous des nouveautés.
Que ce soit vrai ou non, que l'information vienne d'Internet ou d'ailleurs, cela n'a pas vraiment... Ils l'utilisent de toute façon.
La présidente: Merci.
Monsieur Murray, voulez-vous ajouter quelque chose?
Cpl Ken Murray: Non, je suis désolé, je n'ai pas entendu la question; j'étais sorti...
La présidente: Très bien, vous n'êtes pas obligé.
M. Clark veut ajouter quelque chose.
M. Wayne Clark: Oui, je veux simplement dire que quand on parle d'accoutumance, il s'agit des 25 p. 100 de la population qui causent le plus de tort à leur famille, à eux-mêmes et à...
Excusez-moi?
Mme Libby Davies: Autant que cela?
M. Wayne Clark: On dit généralement que c'est de 20 à 25 p. 100. Bien sûr, dans le cas de la population du Canada, cela représente beaucoup de gens.
À mon avis, nous devons donc être prudents lorsque nous nous adressons aux enfants et nous devons leur montrer les faits, qu'il existe vraiment une possibilité qu'ils puissent être amenés à user de drogues dangereuses.
Mais cela touche également un grand nombre de nos institutions légales. Il y a deux ans, on a fait une enquête dans notre centre correctionnel provincial. Quatre-vingt-douze pour cent des détenus avaient un problème de dépendance à la drogue. On voit donc que c'est un fardeau important pour la société.
Á (1105)
Mme Libby Davies: Quand vous dites 25 p. 100, je suppose que cela inclut également les alcooliques, les toxicomanes—tout.
M. Wayne Clark: Oui.
Mme Libby Davies: Et quand on voit ces chiffres monter en flèche, nous devons sûrement tenir compte d'autres circonstances.
Par exemple, l'étude VIDUS a révélé que, parmi les utilisateurs de drogues par injection de Vancouver, un tiers de ceux qui ont récemment contracté le VIH/sida avaient été désinstitutionnalisés ou avaient subi un traumatisme quelconque. Il est certain qu'il faut également tenir compte d'autres facteurs de ce genre. Ces taux vont monter en flèche chez les personnes qui sont incarcérées et qui ont des problèmes si elles peuvent se procurer de la drogue. C'est un indice que quelque chose d'autre ne va pas.
Cela me pose un autre problème. Il semble que nous ne parlons jamais de ces autres facteurs. Nous mettons l'accent sur la dépendance, mais comme Maureen l'a dit au tout début, il y a d'autres facteurs sociaux et économiques en cause dans certains groupes plus à risque.
Êtes-vous d'accord avec cela?
M. Wayne Clark: Il est bien certain qu'il y a d'autres facteurs en cause, mais il ne faut pas non plus oublier que la dépendance en est un. La dépendance n'est pas causée par d'autres facteurs. C'est d'abord une maladie, et elle cause également bon nombre des autres problèmes.
Mme Libby Davies: Mais il est très important d'examiner pourquoi une personne est amenée à consommer cette substance si on veut comprendre le phénomène de la dépendance et le corriger.
M. Wayne Clark: Bien sûr.
La présidente: Merci.
Avant de donner la parole à Mme Allard, permettez-moi de poser une question au sujet de ces 20 à 25 p. 100 de gens. Cela inclut-il ceux qui ont réglé leur problème de dépendance et participent à un programme d'abstinence? Cela comprend-il, par exemple, ceux qui arrivent à se limiter à un verre de vin par jour mais qui, à un moment de leur vie, traversent une période où leur dépendance peut devenir un problème plus grave? Cela comprend-il également les gens qui souffrent d'une dépendance aiguë et reconnue? Le savez-vous?
M. Wayne Clark: D'après ce que je comprends, ce sont les gens qui souffrent de dépendance.
La présidente: Y compris les gens qui contrôlent cette dépendance.
M. Wayne Clark: Oui, probablement.
Quand vous dites ceux qui ont déjà souffert de dépendance, eh bien, cette dépendance ne disparaît pas.
La présidente: Non, je ne voulais pas dire...
M. Wayne Clark: Une fois dépendant, vous le demeurez.
La présidente: Je voulais plutôt parler des gens qui ont déjà contrôlé cette dépendance...
M. Wayne Clark: Leur dépendance n'est pas active.
La présidente: ...oui—et des gens qui n'ont pas encore reconnu leur dépendance. N'est-ce pas?
M. Wayne Clark: Oui.
La présidente: Ce sont des gens qui consomment de l'alcool, du Robaxacet ou encore des somnifères régulièrement et qui ne reconnaissent pas qu'ils en sont dépendants ou qui pensent bien contrôler leur dépendance, mais qui traversent une phase plus aiguë ou plus évidente qui les incitera à vouloir se faire désintoxiquer. Mais ces 20 à 25 p. 100 comprennent toutes ces personnes, celles qui sont peut-être en bonne santé ou...
M. Wayne Clark: Oui.
La présidente: Très bien.
Madame McIver.
Mme Maureen McIver: Nous n'avons plus de bonne base de données. Par le passé, 10 p. 100 de la population avait un problème d'alcoolisme. Puis j'ai vu des chiffres selon lesquels 7 p. 100 de la population avait un autre problème de drogue. Les données sont séparées, mais parmi les 7 p. 100, il y a peut-être aussi des alcooliques.
La présidente: Oui, des problèmes concurrents.
Mme Maureen Mclver: Ce chiffre de 25 p. 100 englobe peut-être l'ensemble des dépendances, mais il y a des gens qui font partie d'une catégorie ou d'une autre. C'est sans doute la raison pour laquelle ce chiffre semble si élevé.
Ces 25 p. 100 me paraissent assez élevés.
La présidente: Je suppose qu'il y aura de nouvelles recherches sur la dépendance au jeu et ses rapports avec la toxicomanie. Apparemment, on s'attend à un chiffre assez élevé étant donné que cela témoigne d'une propension à la dépendance.
Mme Maureen McIver: Exactement. Si l'on mesurait le pourcentage de joueurs pathologiques, on arriverait peut-être à 3 p. 100, mais si on leur demandait s'ils avaient également un problème d'alcool, ils entreraient sans doute aussi dans cette catégorie. Si vous séparez les données, vous pouvez voir pourquoi cela donne 25 p. 100 au total.
La présidente: Et vos centres de traitement s'occupent-ils...
Vous avez parlé de double dépendance, monsieur Clark. Cela fait-il partie de votre programme de traitement et de réinsertion?
M. Wayne Clark: Les dépendances croisées en font effectivement partie.
La présidente: Très bien. Merci.
Madame Allard.
Mme Carole-Marie Allard: Madame la présidente, avez-vous l'intention de suspendre la séance pour une pause?
La présidente: J'allais vous donner la parole, puis à M. Sorenson après quoi je poserai des questions et nous pourrons terminer un peu plus tôt.
Mme Carole-Marie Allard: Entendu.
M. Wayne Clark: Madame la présidente, je dois être à une autre réunion à 11 heures.
La présidente: Très bien.
Quelqu'un a-t-il des questions à poser à M. Clark?
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Moi, j'en ai une.
[Traduction]
La présidente: Allez-y.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Ce qui me frappe aujourd'hui, c'est que quand on parle de prévention, on parle toujours des jeunes. Est-ce qu'on n'oublie pas que les baby-boomers des années 1970--peace and love--sont encore accrochés à la marijuana? Je connais personnellement plusieurs de ces gens qui fument leur joint tous les jours. Vous seriez surpris d'apprendre que certaines de ces personnes sont même à la télévision nationale. Les enfants de ces gens-là voient leurs parents fumer leur joint tous les jours et ils voient bien que leurs parents fonctionnent.
Quel est le plan d'action pour ces gens qui ont 45 ans, 50 ans et même un peu plus et qui ne pensent pas qu'ils ont une dépendance aux drogues? Je vous entends parler d'abstinence totale. C'est difficile de convaincre des jeunes qui voient leurs parents fumer que leurs parents ont un problème de drogue. Est-ce que vous vous attaquez à une clientèle d'adultes également? Comment fait-on pour inciter ces gens à donner l'exemple aux plus jeunes? Ils n'arrêteront pas de fumer leur joint.
[Traduction]
La présidente: Inaudible--la rédaction ...les médias nationaux.
Monsieur Clark.
Á (1110)
M. Wayne Clark: Tout d'abord, il faut bien se dire que ce n'est pas tous les gens qui boivent un verre de vin ou de bière ou qui prennent une ou deux bières par jour qui deviendront alcooliques. Tous ceux qui fument un joint quotidiennement ne seront pas nécessairement dépendants. Mais il faut faire comprendre aux parents qu'ils doivent être davantage conscients de leurs responsabilités.
Les médias diffusent des annonces qui disent aux parents que leurs abus de boisson--je crois que c'est surtout pour la boisson--ont des répercussions négatives sur leurs enfants. Peut-être faudrait-il élargir ce genre de publicité en l'appliquant aux drogues et pas seulement à l'alcool.
La présidente: Avant que quelqu'un réponde à cela, j'aurais une brève question à vous poser, monsieur Clark. Y a-t-il des études à long terme sur le succès de votre programme et du programme Lacey? Vous pourrez nous les faire parvenir plus tard si vous en avez.
M. Wayne Clark: Je ne pense pas que nous ayons d'instrument pour mesurer ce succès, mais nous y travaillons.
La présidente: Très bien.
Merci beaucoup d'être venu. Si certaines idées vous viennent à l'esprit ultérieurement et que vous voulez nous les communiquer, n'hésitez pas à le faire.
M. Wayne Clark:: Merci.
La présidente: Merci beaucoup d'avoir pris le temps et la peine de venir nous voir ce matin. Désolée pour votre prochaine réunion.
[Français]
Est-ce que quelqu'un d'autre veut répondre à la question de Mme Allard?
Á (1115)
Mme Carole-Marie Allard: Au fond, est-ce qu'on est capable de documenter suffisamment les effets sur le plan médical? Est-ce que le problème n'est pas là? Si on arrivait avec des messages clairs au point de vue médical, en disant aux gens que s'ils fument de la marijuana, cela peut leur donner des problèmes de motricité, par exemple, est-ce que ce ne serait pas plus efficace? Mais on ne peut pas arriver avec des résultats médicaux probants comme ceux-là. Donc, on essaie de faire peur aux gens en leur disant que s'ils prennent de la marijuana, ils vont se retrouver en prison et avoir des pénalités légales. On a l'impression que les pénalités légales ne font plus peur à qui que ce soit. Au point de vue médical, on n'a pas de statistiques et d'études qui démontrent clairement les effets de la marijuana. Est-ce que le problème n'est pas là actuellement? Le message légal ne passe plus. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi?
[Traduction]
La présidente: Il y a là trois questions. J'accorderai la parole à quiconque voudra y répondre.
Madame McIver.
Mme Maureen McIver: Je crois qu'il existe d'assez bonnes preuves permettant de croire que certains problèmes de santé et autres sont associés à la consommation de cannabis. Encore une fois, comme l'a dit Wayne, ce ne sont pas tous ceux qui boivent de l'alcool qui sont alcooliques et tous ceux qui fument de la marijuana qui sont toxicomanes. Mais quand vous commencez à faire une forte consommation de ces substances, cela a des conséquences notamment pour la santé.
J'ai lu une étude sur la marijuana selon laquelle le risque de cancer du poumon est neuf fois plus grand. Il y a aussi des problèmes d'impuissance et d'infertilité. Il y a donc des conséquences, sans parler du fait que des cellules du cerveau sont détruites. Mais c'est en cas de forte consommation.
Nous savons donc que la marijuana a des effets sur la santé et je crois qu'il faudrait en parler, mais en même temps, il y a le fait qu'il s'agit d'une substance illicite. Comment un parent peut-il enseigner à ses enfants de ne pas fumer de la marijuana, de ne pas enfreindre la loi, s'il fume lui-même? Cela soulève donc plusieurs problèmes en même temps.
La présidente: Comme vous faites du counseling familial, vous parlez certainement aux parents et aux enfants.
M. Kevin McKinnon: Oui, et les parents à qui j'ai affaire vont dire parfois: «Au moins ce n'est que de l'alcool ou de la marijuana. Ce sont des paroles que nous entendons souvent. S'il s'agit seulement d'alcool, c'est son aspect licite dont on tient compte. Il y a une distinction très claire qui est faite entre l'alcool et les autres drogues, quelles qu'elles soient, en ce sens que l'alcool est licite et c'est ce que voient les parents.
Je suis d'accord avec M. Clark et Mme McIver pour dire que tous les gens qui boivent ne sont pas des alcooliques et tous ceux qui fument de la marijuana ne sont pas des drogués.
Je ne sais pas trop ce que je pourrais ajouter.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Mais vous êtes en mesure de dire que les parents à qui vous donnez des cours ne consomment pas de la marijuana. Ce ne sont pas ceux qui en fument qui viennent à vos cours.
[Traduction]
M. Kevin McKinnon: Je ne peux pas vous dire s'ils le font ou non. Dans le cas des jeunes dont nous nous occupons, nous invitons les parents à participer. Quant à savoir si ces parents fument ou non de la marijuana quotidiennement, je n'en ai aucune idée, sauf pour certains. Nous avons remarqué que certaines habitudes se transmettaient de génération en génération et que les parents avaient parfois eux-mêmes eu affaire à nous. Mais la plupart du temps, j'ignore totalement si les parents consomment ou non de la marijuana, à moins que les jeunes...
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Est-ce que ce ne serait pas quelque chose à connaître? Ce serait peut-être une question à leur poser.
[Traduction]
M. Kevin McKinnon: À poser aux parents ou aux jeunes?
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Les parents.
[Traduction]
M. Kevin McKinnon Oui, mais s'ils en consomment, vont-ils nous le dire?
Á (1120)
La présidente: Caporal Murray.
Cpl Ken Murray: L'un de nos programmes de prévention, qui s'accompagne de la brochure intitulée Two-Way Street: Parents, Kids and Drugs, concerne les éléments qui peuvent exercer une influence, comme les médias ou les modèles. Dans ce programme, nous insistons auprès des parents pour dire que ce sont sans doute eux qui ont le plus d'influence sur leurs enfants par ce qu'ils font et par ce qu'ils disent... Leurs enfants les considèrent comme la référence ultime. Les comportements comme la consommation de drogues ou d'alcool ou la conduite avec des facultés affaiblies envoient un message aux jeunes. Ce que fait papa ou maman exerce sur eux une influence déterminante.
Nous intervenons particulièrement auprès des collégiens dans différents secteurs. Quand nous leur parlons de toxicomanie, nous essayons d'interagir avec eux, et la façon dont ils accueillent cette information est très intéressante. Dans un collège qui accueille 1 000 étudiants, on entend souvent dire qu'il y a un problème de drogue, mais si nous organisons une rencontre avec les parents le soir même, nous n'arrivons à en attirer qu'une dizaine. Et cette tendance est constante. Si on n'en attire que huit, ce sont des parents connus et très respectés...
C'est très contrariant, mais c'est ce qui se produit lorsque nous nous adressons aux parents.
Nous avons un autre programme concernant la drogue en milieu de travail pour les employés, mais lorsque nous réussissons à leur donner de l'information sur la drogue à l'endroit où ils travaillent, ils ramènent ensuite cette information chez eux, et ce sont aussi des parents.
La présidente: Les parents très respectés dont vous parlez sont ceux qui ne présentent pas de problèmes de drogue connus.
Madame Allard, voulez-vous poser une question complémentaire?
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Madame McIver, vous semblez dire qu'on a des études pour démontrer les effets néfastes de la marijuana, mais qu'on en entend très peu parler. Vous parlez de l'éducation du public. Il s'agit peut-être de mettre en évidence ces études sur les effets des drogues. Quand vous parlez de l'éducation, est-ce que vous voudriez qu'on mette en évidence la relation entre la drogue et les effets sur la santé?
[Traduction]
Mme Maureen McIver: Oui, je le pense. Il faut dire la vérité. Je ne pense pas qu'on s'abtienne de tel ou tel comportement simplement parce qu'il est illicite. Il faut donner une information complète. Grâce à cette information, on peut espérer que chacun choisira ce qui lui est le plus profitable.
Quelle que soit la substance, qu'il s'agisse d'alcool... Bien que la cocaïne, je dois dire, a un fort pouvoir d'accoutumance, comme certains opiacés. Mais il y a bien des gens qui boivent ou qui fument de la marijuana et qui ne présentent pas d'accoutumance. Je considère qu'il faut le reconnaître.
Néanmoins, lorsqu'on abuse de ces substances, on s'expose à des conséquences, et il existe des preuves pour le démontrer.
La présidente: Merci.
Monsieur Sorenson, c'est à vous.
M. Kevin Sorenson: Vous venez de dire que lorsqu'on abuse de ces substances, on s'expose à des conséquences, mais c'est la même chose pour la simple consommation. La conséquence, c'est qu'on passe dans une catégorie de risque beaucoup plus élevé—et nous avons déjà parlé tout à l'heure de la notion de seuil—qu'on va passer à d'autres drogues et qu'on risque de présenter une accoutumance.
Je pense donc qu'il y a différents niveaux d'accoutumance. Y a-t-il accoutumance pour la personne qui prend de la marijuana tous les jours? Je pense que oui. En tout cas, il y a certainement un facteur de risque élevé. Son cas est peut-être différent de la femme de la publicité pour Nicorette, que l'on voit assise entre deux personnes sur le siège arrière d'une voiture et qui, voyant quelqu'un fumer, en a des sueurs froides, mais c'est quand même une accoutumance.
Il faut aussi reconnaître et comprendre—même si j'ai l'air de dramatiser à l'excès—qui est le véritable ennemi. En réalité, lorsqu'on parle des drogues et surtout des drogues dures, y compris même de la marijuana, on parle de la pègre, n'est-ce pas? C'est la pègre qui fournit la plus grande partie des drogues dures. Nous avons assisté à la libéralisation de notre société, de notre pays et de certaines provinces par rapport à la législation et à nos priorités.
Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il faut faire un effort d'éducation. Je peux affirmer que personnellement, le facteur dissuasif, le fait de savoir que c'était illicite, que je risquais de me faire prendre, que quelqu'un allait m'appréhender, m'a empêché, au départ, de tomber dans la drogue.
Je connais certaines personnes qui, même pour le tabac, ont dit non à cause des effets nocifs et ont choisi de ne pas fumer. Moi, j'ai fait le même choix, car j'avais peur de me faire prendre par la police. J'ai choisi d'éviter la drogue parce que c'est illicite. C'est interdit.
Je pense qu'il faut reconnaître l'existence d'un certain équilibre, l'équilibre de la législation et l'équilibre que respecte la GRC dans l'application de la loi, car elle fait valoir l'élément dissuasif. Quelqu'un d'autre devra s'occuper de l'aspect plus libéral de cet équilibre. On peut espérer qu'en joignant nos efforts, nous pourrons atténuer les méfaits, réduire l'approvisionnement et empêcher l'effondrement de ces familles dévastées par la drogue.
En assistant à de nombreuses séances comme celle-ci, j'en viens à me demander si l'oeuf précède la poule ou si c'est le contraire. Est-ce la société qui s'effondre, ou la famille? Est-ce le stress qui en résulte qui provoque...? Je pense qu'il y a une corrélation entre tous ces facteurs. Parfois, c'est la drogue qui provoque l'effondrement de la famille. Parfois, c'est l'effondrement de la famille et de toute la structure qui engendre le recours à la drogue et à tout le reste. Le défi, c'est d'essayer de s'y retrouver et de déterminer ce que le gouvernement devrait faire.
Je n'ai pas vraiment de question à poser, à moins que vous souhaitiez faire un commentaire, mais je vous remercie de votre contribution.
Á (1125)
La présidente: Il se sent mieux maintenant.
Des voix: Ah, ah!
M. Kevin Sorenson: Oui.
Je vous remercie d'avoir contribué à nos travaux et en un sens, je suis déçu de notre gouvernement car au cours des 30 dernières années, nous n'avons pas entrepris d'étude approfondie du problème de la drogue. Je suis déçu que les effectifs de la GRC aient diminué de 2 200 agents en dix ans et la faute en incombe aux membres du gouvernement.
En tout cas, vous avez peut-être des commentaires à faire. Je ne veux pas vous contraindre à répondre à un tel...
Mme Maureen McIver: J'ai compris.
La présidente: Les représentants de la GRC veulent-ils intervenir?
Avant que vous ne partiez, j'aimerais poser quelques questions.
Madame McIver, est-il fréquent qu'on ne trouve aucun lit disponible pour la désintoxication ou la réinsertion?
Mme Maureen McIver: Pour la désintoxication, c'est tout à fait imprévisible. Parfois, l'établissement est complet et parfois, il peut être à moitié vide. Depuis un an, le taux d'occupation de ces 25 lits a été d'environ 60 p. 100.
La présidente: Parfois, c'est plein alors qu'à d'autres moments...
Mme Maureen McIver: C'est exact. Voilà pour la désintoxication.
La présidente: Mais le plus important, pour ceux qui veulent se désintoxiquer, c'est de trouver un lit disponible lorsqu'ils sont prêts à entamer leur cure. Cela signifie qu'un lit ne peut être utilisé qu'à 10 p. 100, mais il faut qu'il soit disponible pour ces 10 p. 100.
Est-ce qu'il vous arrive de renvoyer des candidats à la désintoxication?
Á (1130)
Mme Maureen McIver: Je ne crois pas qu'il y ait souvent un manque de places lorsque des toxicomanes demandent à recevoir un traitement.
La présidente: Acceptez-vous des gens d'autres provinces?
Mme Maureen McIver: Généralement non, mais je suppose que cela se produit parfois.
M. Kevin McKinnon: Parlez-vous d'un non-résident, de quelqu'un en voyage chez nous?
La présidente: Oui. Ou peut-être s'agirait-il de Moncton qui vous demanderait d'accueillir un toxicomane parce qu'ils n'ont pas de lits?
M. Kevin McKinnon: Non, cela ne se produit jamais. Enfin, je ne crois pas que cela se produise.
Maureen, cela arrive-t-il parfois?
Mme Maureen McIver: Je crois que cela s'est produit à l'occasion. Toutefois, je ne travaille pas sur place, mais j'ai entendu l'administration dire qu'elle avait parfois des demandes venant d'autres provinces. Ça n'arrive qu'à l'occasion; ce n'est pas du tout fréquent.
Il n'y a pas vraiment de délai d'attente pour un traitement de désintoxication à l'Île-du-Prince-Édouard.
La présidente: Et pour la réinsertion?
Mme Maureen McIver: Ce sont des programmes fermés. Il faut y rester du premier au dernier jour et les participants ne changent pas pendant toute la durée des trois semaines. Toutefois, cinq régions ont des centres de réinsertion en consultations externes, alors s'il n'y a pas de places au centre provincial et que le toxicomane est prêt à recevoir le traitement, il peut se rendre à Montague ou Summerside. C'est son choix. Toutefois, ceux qui préfèrent des services en consultations externes attendent souvent que...
La présidente: Qu'il y ait une place libre près de chez eux.
Mme Maureen McIver: Oui.
La présidente: Et combien de ces places de réinsertion sont réservées aux enfants?
Mme Maureen McIver: Ce ne sont pas des places de réinsertion, mais de stabilisation.
M. Kevin McKinnon: Ce ne sont pas des places de réinsertion, mais de désintoxication.
Mme Maureen McIver: Oui.
La présidente: D'accord. Donc vous n'avez pas de programme de réinsertion pour les enfants?
Mme Maureen McIver: Non.
M. Kevin McKinnon: En consultations externes.
La présidente: Seulement en consultations externes?
M. Kevin McKinnon: Il n'y a pas d'hospitalisation.
La présidente: Et à partir de quel âge accueille-t-on les enfants?
M. Kevin McKinnon: Disons vers 13 ou 14 ans.
La présidente: Avez-vous parfois besoin de plus de places réservées aux enfants?
Mme Maureen McIver: J'ai envoyé des patients à l'extérieur de la province, plus précisément à Halifax pour le programme CHOIX, mais aussi à Portage, à Moncton, au Nouveau-Brunswick.
La présidente: Ah, il y a un Portage à Moncton?
Mme Maureen McIver: Non, pas à Moncton; mais plutôt à Sussex ou Cassidy Lake.
La présidente: Je ne connais que le centre au nord de Montréal et à Elora. Excellent programme d'ailleurs.
Mme Maureen McIver: Peu d'enfants reçoivent des services à l'extérieur de la province.
M. Kevin McKinnon: On parle d'environ deux ou trois enfants par année.
Mme Maureen McIver: Nous essayons de traiter les enfants en consultations externes avec la participation de leur famille. C'est le meilleur moyen de s'y prendre.
La présidente: Monsieur McKinnon, quelle raison les enfants vous donnent-ils pour justifier leur usage de drogues ou de substances psychoactives?
M. Kevin McKinnon: D'abord, ils disent que c'est pour faire comme les autres, mais il semble que la situation change; c'est davantage une pression qu'ils s'imposent eux-mêmes plutôt que la pression exercée par leurs camarades.
La présidente: Donc, comme c'est le cas pour les relations sexuelles, c'est plutôt «Tout le monde le fait alors je crois que je devrais le faire aussi»?
M. Kevin McKinnon: C'est une partie du problème. C'est aussi pour s'intégrer à certains groupes. Vous savez qu'un certain groupe consomme de la drogue, alors cela peut être une raison de se joindre à ce groupe.
La présidente: Je veux dire, on entend tant d'enfants dire: «Eh bien, tout le monde a été dépucelé, alors il faut que je le sois aussi» et en fait ce n'est pas vrai. Si ces enfants pouvaient seulement comprendre qu'ils n'ont pas besoin de croire ceux qui disent que tout le monde le fait.
M. Kevin McKinnon: Ce que vous dites est tout à fait pertinent. Une bonne partie de notre clientèle de jeunes nous dit que tout le monde fait usage de la drogue, mais ce n'est pas le cas. La majorité des jeunes de l'Île-du-Prince-Édouard ne consomment pas de drogue, un point c'est tout.
La présidente: Mais ceux qui en consomment, vous disent-ils qu'ils le font pour faire comme leurs camarades, ou croient-ils que tout le monde le fait?
M. Kevin McKinnon: Ils nous disaient généralement que c'est pour le plaisir, ils le disent encore aujourd'hui. Ils consomment pour avoir du plaisir.
La présidente: Ce qu'ils nous ont dit dans l'Ouest, par exemple, c'est que c'était pour s'évader qu'ils consommaient de la drogue. C'est vraiment désolant.
M. Kevin McKinnon: Oui, c'est en partie le cas, mais seulement pour ceux qui sont prêts à y réfléchir, je trouve. Ceux que l'on rencontre nous sont envoyés par un orienteur ou les services de probation, par exemple, et ces jeunes-là n'ont aucune idée de la raison qui les pousse à consommer, c'est pourquoi ils répondent que c'est pour avoir du plaisir ou parce qu'ils s'ennuient. Je ne dis pas que ce ne sont pas des raisons valables, mais les jeunes n'ont souvent pas les capacités d'introspection nécessaires pour comprendre que la consommation constitue une évasion pour eux.
La présidente: Collaborez-vous avec les autorités locales responsables des jeunes contrevenants et avec les corps de police?
Á (1135)
M. Kevin McKinnon: Oui, nous travaillons étroitement avec la GRC. La plupart de nos clients nous sont envoyés par les services de probation évidemment. En dehors du système scolaire, ce sont effectivement les services de probation qui nous envoient la plupart de nos clients, à l'extérieur donc du cadre scolaire. La plupart des clients qu'on nous envoie aux établissements provinciaux, par exemple, nous viennent des services de probation.
La présidente: D'accord.
Sergent Gibbons, vous dites que vous voudriez avoir davantage d'agents de la GRC ou de ressources. Vous disposez de 100 agents. Il y a des policiers à Summerside, Charlottetown, Borden et où encore?
Sgt/A Rick Gibbons: À Souris, Montague, Charlottetown, Summerside et Alberton.
La présidente: Pour une population de 158 000 habitants, il me semble que cela représente beaucoup de policiers. Que se passe-t-il?
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Croyez-vous qu'une plus grande présence policière découragerait les gens comme M. Sorenson--je plaisante--parce que les risques de se faire prendre augmentent, ou est-ce parce que vous croyez que vous pourriez mettre un terme à plus d'activités illicites?
Sgt/A Rick Gibbons: Ce serait la deuxième de vos affirmations. Il faut remettre tout cela en contexte; nous disposons de 100 agents de la GRC à l'Île-du-Prince-Édouard, mais seul un très petit nombre--10 agents--sont affectés à la lutte antidrogue.
La présidente: Ces 10 agents consacrent-ils 100 p. 100 de leur temps à la lutte antidrogue?
Sgt/A Rick Gibbons: Oui, mais je dois préciser que sur ces 10 agents, trois sont détachés de services de police municipaux.
La présidente: Vous avez donc 103 agents de police plutôt que 100.
Sgt/A Rick Gibbons: Eh bien, oui, mais pour ce qui est des agents de la GRC... c'est au jugé que je vous dis qu'ils sont une centaine.
La présidente: Quel pourcentage des autres agents de la GRC est affecté à l'exécution des lois et quel pourcentage des heures de travail des autres agents de police est consacré à la réduction de la demande, aux programmes de sensibilisation comme ceux de M. Murray?
Sgt/A Rick Gibbons: Un.
La présidente: Vous voulez parler de M. Murray qui est responsable de la sensibilisation?
Sgt/A Rick Gibbons: Oui.
La présidente: Sur les 90 autres agents de la GRC, aucun ne participe aux questions d'exécution?
Sgt/A Rick Gibbons: Oh, oui, ils s'occupent de cet aspect au fur et à mesure lorsqu'ils patrouillent les routes ou dans le cadre des enquêtes habituelles.
La lutte contre la drogue, ici, à l'Île-du-Prince-Édouard s'inscrit dans le cadre national de notre mandat. Nous nous inquiétons principalement des organisations criminelles et de leurs activités liées à la drogue. C'est par ce biais que nous intervenons dans tout le pays.
Nous agissons également dans une certaine mesure auprès de la population, dans le cadre de notre collaboration avec les services de police municipaux. Ce sont habituellement eux qui répondent aux appels. Bien que nous nous préoccupions beaucoup du problème national, si quelqu'un vit dans une rue où il y a une fumerie de crack, pour cette personne, c'est probablement la forme la plus visible du problème de la drogue et cela nécessite aussi une intervention.
La présidente: Alors les services de police locaux vous confieraient plutôt ce genre de chose que...
Par exemple, dans ma région, les agents de police locaux s'occuperaient de la fumerie, mais quand ça devient un peu plus compliqué, pour savoir qui est fournisseur, qu'il faut une enquête plus importante—dans la région, par exemple, ou en coordination avec Toronto ou ailleurs—cela devient du ressort de la GRC, parce qu'elle a plus de ressources ou des ressources différentes.
Sgt/A Rick Gibbons: Essentiellement, oui.
C'est la même chose avec notre personnel en uniforme. Ils appréhendent quelqu'un qui a de la drogue en sa possession. Ils procèdent à l'arrestation et l'envoient à la Cour. Si dans le cadre de cette enquête, on s'aperçoit que cette personne fait partie d'une organisation plus vaste, provinciale, régionale ou nationale, il est probable que nous y jetterons un coup d'oeil.
La présidente: Bien.
Des commentaires?
Caporal Murray? La greffière me dit que vous vouliez ajouter quelque chose.
Cpl Ken Murray: Non, sauf que je suis le seul de la section de la prévention. Je relève du groupe de la lutte antidrogue, mais je ne m'occupe que de prévention.
La présidente: À 100 p. 100.
Vous vous intéressez donc davantage aux plus jeunes de nos citoyens, aux écoles primaires plus qu'aux écoles secondaires?
Cpl Ken Murray: Notre programme de base, le PSED, cible les groupes plus jeunes mais nous avons d'autres programmes à l'intention des autres élèves.
La présidente: Bien. C'est ce que l'on nous a dit, que le PSED et l'interaction avec les agents de police semblent efficaces auprès des jeunes élèves et permettent d'établir de bonnes relations, mais que les choses sont un peu plus difficiles avec les élèves des niveaux supérieurs et qu'il n'est pas forcément aussi efficace d'avoir des agents de police pour donner ces informations. Il peut par exemple être préférable que ce soit le groupe de M. McKinnon qui s'en occupe.
C'est ce que nous avons entendu dire dans tout le pays.
Cpl Ken Murray: Ce qu'on a constaté, c'est que le PSED est bon pour les groupes plus jeunes mais qu'il faut continuer à faire quelque chose dans les classes supérieures. L'interaction avec la police est utile à la fois au niveau primaire et au niveau secondaire. C'est très important. C'est ce que nous apprennent les groupes consultatifs d'étudiants. Lorsqu'ils ont une rencontre avec l'agent de prévention du crime ou le commandant, les étudiants disent aimer recevoir la visite des policiers à l'école. Ils tiennent à notre présence.
Á (1140)
La présidente: D'autres questions?
Mme Carole-Marie Allard: Oui.
J'aimerais savoir si le comité a vu ces programmes, le PSED et Two-Way Street. En connaissons-nous la teneur?
La présidente: Oui.
Mme Carole-Marie Allard: Merci.
La présidente: Merci à tous nos témoins ainsi qu'à M. Clark d'être venus nous parler de leur expérience et de leurs idées. Nos questions sont parfois un peu directes, mais c'est pour essayer d'obtenir un maximum d'information.
Nous sommes au milieu de cette étude. Comme l'a dit M. White, nous devons présenter notre rapport en novembre 2002. Nous allons probablement continuer à entendre des témoignages et recevoir des informations jusqu'à la fin juin. Si vous avez donc quelque chose à ajouter, je vous invite à nous le communiquer. Si vous connaissez des gens qui voudraient participer—par exemple, monsieur McKinnon, si vous connaissez des jeunes qui veulent participer—nous aimerions beaucoup avoir leurs points de vue sur ce que l'on pourrait faire différemment ou mieux. Il n'est pas nécessaire qu'ils aient un doctorat ou quoi que ce soit, ils peuvent simplement nous communiquer leurs idées. Ou si les parents ont des idées, nous serions tout à fait prêts à les entendre.
Merci donc à vous tous de la part de tous les citoyens du Canada pour tout ce que vous faites ici et pour le pays. Continuez! Nous vous savons gré de votre enthousiasme et de votre dévouement.
Merci beaucoup et bonne fin de journée.
La séance est levée.