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SNUD Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 22 mai 2002




¾ 0840
V         La présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.))

¾ 0845
V         Mme Julie-Ann Miller (PARTY Coordinator, St. Albert Association for People with Disabilities)
V         

¾ 0850
V         

¾ 0855
V         

¿ 0900
V         

¿ 0905
V         La présidente
V         
V         

¿ 0910
V         

¿ 0915
V         La présidente
V         
V         

¿ 0920
V         

¿ 0925
V         La présidente
V         Mme Cathy Wood (gestionnaire, Aventa)
V         

¿ 0930
V         

¿ 0935
V         

¿ 0940
V         La présidente
V         Mme Debra Williams (présidente, DARE Evaluation Committee of Alberta)
V         La présidente

¿ 0945
V         Mme Debra Williams
V         La présidente
V         M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.)
V         La présidente
V         Mme Cathy Wood
V         

¿ 0950
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Cathy Wood
V         M. Dominic LeBlanc
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         Mme Kathy Landry
V         La présidente
V         Mme Julie-Ann Miller
V         

¿ 0955
V         La présidente
V         M. Dominic LeBlanc
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         Mme Kathy Landry

À 1000
V         Mme Cathy Wood
V         La présidente
V         Mme Julie-Ann Miller
V         La présidente
V         M. Dominic LeBlanc

À 1005
V         Mme Kathy Landry
V         

À 1010
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Cathy Wood
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Cathy Wood
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Cathy Wood

À 1015
V         La présidente
V         Mme Julie-Ann Miller
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner

À 1020
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner

À 1025
V         La présidente
V         Mme Kathy Landry
V         La présidente
V         Mme Kathy Landry
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner

À 1030
V         La présidente
V         Mme Debra Williams
V         La présidente
V         Mme Debra Williams
V         La présidente
V         Mme Debra Williams
V         La présidente
V         Mme Debra Williams
V         M. Howard Faulkner

À 1035
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         Mme Julie-Ann Miller
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         Mme Cathy Wood

À 1040
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         Mme Kathy Landry
V         La présidente
V         M. Howard Faulkner
V         La présidente
V         La présidente

À 1055
V         Mme Marliss Taylor (gestionnaire, Streetworks)
V         

Á 1100
V         

Á 1105
V         La présidente
V         Mme Kate Gunn (directrice intérimaire, HIV Edmonton)
V         

Á 1110
V         

Á 1115
V         
V         Mme Deborah Foster (gestionnaire de programme, HIV Edmonton)
V         

Á 1120
V         La présidente
V         Mme Deborah Foster
V         La présidente
V         Mme Faye Dewar (intervenante sur le terrain, Boyle Street Co-op)
V         

Á 1125
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett (gestionnaire, Services de counselling et de prévention pour adultes, Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission)
V         

Á 1130
V         

Á 1135
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         M. Dominic LeBlanc
V         

Á 1140
V         Mme Marliss Taylor
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Marliss Taylor
V         

Á 1145
V         Mme Faye Dewar
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         Mme Deborah Foster

Á 1150
V         La présidente
V         Mme Kate Gunn
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Marliss Taylor
V         

Á 1155
V         M. Dominic LeBlanc
V         Mme Marliss Taylor
V         Mme Faye Dewar
V         

 1200
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente

 1205
V         Mme Deborah Foster

 1210
V         La présidente
V         Mme Kate Gunn
V         La présidente
V         Mme Marliss Taylor
V         

 1215
V         La présidente
V         Mme Faye Dewar
V         La présidente
V         Mme Faye Dewar
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         

 1220
V         Mme Deborah Foster
V         Mme Beth Lipsett
V         Mme Deborah Foster
V         La présidente
V         Mme Marliss Taylor
V         

 1225
V         La présidente
V         Mme Deborah Foster
V         La présidente
V         Mme Faye Dewar
V         La présidente
V         Mme Marliss Taylor
V         La présidente

 1230
V         Mme Marliss Taylor
V         La présidente
V         Mme Marliss Taylor
V         Mme Faye Dewar
V         

 1235
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett

 1240
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         La présidente
V         Mme Beth Lipsett
V         Mme Deborah Foster
V         La présidente
V         Mme Kate Gunn
V         La présidente










CANADA

Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments


NUMÉRO 044 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 22 mai 2002

[Enregistrement électronique]

¾  +(0840)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Nous sommes le Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments et nous sommes très heureux de siéger ici à Edmonton, en Alberta.

    Le comité a été formé suite à un ordre de renvoi adopté par la Chambre des communes le 17 mai 2001, avec pour mandat d'examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments. On nous a chargé également, le 17 avril de cette année, d'étudier l'objet du projet de loi C-344, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, en particulier la marihuana. Le comité conduit des audiences itinérantes à travers le pays afin de se rendre compte de la situation. D'habitude, nous avons des représentants de tous les partis politiques mais, pour une combinaison bizarre de raisons, il n'y a aujourd'hui que Dominic LeBlanc et moi. Nous représentons tous deux le Parti libéral, mais nous allons suppléer aux absents et poser des questions selon différentes perspectives.

    Pour notre panel sur l'éducation, la prévention et le traitement, nous sommes très heureux d'accueillir Julie-Ann Miller, coordonnatrice PARTY de la St. Albert Association for People with Disabilities--et j'espère que vous nous indiquerez ce que signifie ce sigle PARTY. Nous entendrons également Howard Faulkner, directeur général des services de prévention et de traitement de l'Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission, et Kathy Landry, directrice du Northern Addiction Centre. En outre, nous recevons Cathy Wood, représentant Aventa, et Debra Williams, présidente du comité d'évaluation DARE de l' Alberta.

    Je vais vous donner la parole dans l'ordre où je vous ai présentés. Julie-Ann, vous nous avez un exposé avec une projection PowerPoint.

¾  +-(0845)  

+-

    Mme Julie-Ann Miller (PARTY Coordinator, St. Albert Association for People with Disabilities): Oui.

    Bonjour. Ceci est une merveilleuse occasion pour nous de vous expliquer notre programme, qui est un programme d'éducation sanitaire. Il s'intitule PARTY--prevent alcohol and risk-related trauma in youth. Je suis travailleuse sociale depuis cinq ans et auparavant j'ai travaillé pendant 25 ans dans le secteur de la santé. Vous vous demanderez peut-être en quoi ce programme se rapporte à votre sujet d'étude. Notre agence prend en charge les personnes qui souffrent des séquelles de lésions ou des conséquences de mauvais choix, par exemple des bébés nés de mères toxicomanes et alcooliques. Cela fait que nous nous intéressons de très près à la prévention. C'est à notre initiative que ce programme a été introduit dans notre ville et je le coordonne aujourd'hui.

+-

    Le programme fait appel à des méthodes expériencielles et multisensorielles de sensibilisation à la réalité dans le but d'amener les étudiants à opérer des choix avisés à l'égard de leurs activités et comportements. Tout au long de la journée, les messages sont renforcés par une appréciation des risques qu'ils prennent. Nous visons à réduire la fréquence des accidents des jeunes liés à la prise de risques. Nous voulons les amener à faire des choix en connaissance de cause au sujet des activités sportives ou sociales auxquelles ils se livrent, activités qui peuvent aussi englober la consommation d'alcool ou de drogue. Nous voulons qu'ils assument davantage leurs responsabilités personnelles à l'égard de leurs actes.

    Je vais vous dire quelques mots sur l'origine du programme PARTY car vous vous demandez probablement d'où il vient. En 1986, l'Hôpital de Calgary et l'Hôpital Sunnybrook se sont mis à réfléchir tous deux à des programmes de sensibilisation des adolescents. C'est ainsi que l'Hôpital Sunnybrook a conçu le programme PARTY en 1986. Quarante-cinq de ces programmes sont maintenant en place à travers le pays, dont 31 en Alberta. Calgary a commencé en 1988. En 1992, nous quatre, Edmonton, St. Albert, Red Deer et Lethbridge avons emboîté le pas. Nous fêtons notre dixième anniversaire cette année. Chaque année, nous joignons entre 800 et 1 000 adolescents.

    Le volet éducatif est primordial. La raison pour laquelle ce programme a été lancé dans les hôpitaux est que le personnel des salles d'urgence voyait arriver trop de jeunes blessés et mourants. Ce personnel s'est demandé ce que l'on pouvait faire pour changer les statistiques. La raison pour laquelle les adolescents sont si souvent concernés, comme vous le savez sans doute, est qu'ils manquent d'expérience et de jugement. Ils veulent vivre à fond et sont portés à prendre des risques. Nous mettons l'accent sur les lésions du cerveau et de la moelle épinière. En effet, les blessures traumatiques, comme celles causées par les accidents de la route et les activités sportives, ou encore des lésions cérébrales et médullaires liées à l'activité, représentent les blessures les plus graves que l'on voie. Nous parlons des lésions cérébrales causées par l'ingestion de drogue. Cela surprend parfois les gamins. Ils ne réalisent pas qu'ils peuvent endommager leur cerveau de cette façon. Nous mettons l'accent sur la responsabilité qu'ils ont envers eux-mêmes et autrui. Nous leur donnons la faculté de faire des choix intelligents.

    Pour vous donner une idée du contenu pédagogique de notre programme, nous leur montrons des images réalisées par tomographie d'émission monophotonique qui révèlent le flux sanguin et l'activité cérébrale. Le cerveau jaune et rose que vous voyez au milieu est un cerveau sain. Les autres qui l'entourent présentent des perturbations. L'un montre les dérèglements causés par la marihuana, les autres respectivement ceux causés par la cocaïne, l'alcool et l'héroïne. Vous pouvez imaginer les difficultés de fonctionnement que peuvent avoir des personnes dont le cerveau est ainsi altéré.

    Comme je l'ai dit, nous mettons l'accent aussi sur les blessures traumatiques. Nous enseignons qu'il faut porter des casques protecteurs. Nous leur montrons un cerveau sain, puis des cerveaux avec des lésions causées par un accident de bicyclette, un accident de football,un accident de moto et un accident de patins à roulettes.

    L'un de nos procédés est très expérienciel. Nous examinons un cerveau de veau, expliquons les différentes parties du cerveau et faisons ressortir à quel point ce cerveau ressemble au cerveau humain. La première chose que je leur demande de faire est de mettre leur deux poings côte à côte et de les regarder. C'est la taille du cerveau humain. Les gens pensent toujours que notre cerveau est énorme. Je ne sais pas pourquoi, c'est ce que tout le monde croit. Le cerveau de veau est de taille très similaire au cerveau humain. Cela impressionne fortement les jeunes.

    L'une de nos démonstrations consiste à reproduire ce que font les infirmiers lors de l'extraction d'une personne d'un véhicule accidenté. On les fait se coucher sur une planche dorsale et on les y attache jusqu'à l'immobilité totale. Un élève sert de cobaye pour cela. C'est toujours une partie très appréciée de la journée.

¾  +-(0850)  

+-

    Dans le courant de la journée,on leur fait manger le déjeuner comme s'ils étaient handicapés. On leur pose des minerves, on leur attache les mains, on leur fait porter différentes lunettes. Ils peuvent ainsi constater ce que serait leur vie comme victimes d'un accident qui aurait pu être évité.

    L'une des activités les plus populaires de la journée consiste à leur faire porter des lunettes dont le verre est un prisme brouillant la vision. La GRC nous donne un coup de main avec cela. Ces lunettes simulent l'affaiblissement des facultés résultant de la consommation d'alcool, au niveau de la limite légale et au double de ce niveau. Nous jouons un peu avec leur cerveau pour les amener à comprendre de quelle manière leurs réflexes et perceptions deviennent altérés et rendent difficiles quelque chose d'aussi simple que la marche, et leur disons quelles autres facultés sont altérées.

    C'est un programme très populaire. Je trouve qu'il est très utile auprès des adolescents. J'aimerais vous montrer la séance de motivation, avec chevaux et poneys, mais je pense que vous vous intéressez davantage à nos objectifs et résultats et j'ai donc décidé de me concentrer là-dessus.

    Nous utilisons un modèle de réduction des accidents, axé sur l'éducation et l'évaluation qui couvre jusqu'au rôle de la police et des ingénieurs, c'est-à-dire tout l'éventail depuis la façon dont les routes sont construites et les voitures conçues. Nous cherchons à réduire les méfaits, à amener des changements de comportement et, par ce biais, de réduire le fardeau pour la société.

    Nous recherchons toujours l'efficacité. Nous réexaminons sans cesse notre programme du point de vue des priorités et des résultats. Nous espérons que ces jeunes qui le suivent s'engageront à faire cinq choix intelligents, et j'en parlerai dans un instant. Nous voulons que les élèves apprécient les expériences et réfléchissent à leur avenir. Beaucoup de jeunes se croient indestructibles. Ils n'imaginent pas qu'un mauvais choix peut changer toute leur vie en quelques secondes. Le programme est conçu de telle façon que les avantages qu'il apporte à la société soient supérieurs au coût.

    Nous utilisons un modèle de modification des comportements, qui vise d'abord une sensibilisation générale, puis une auto-évaluation et une prise de responsabilité, par des changements graduels de comportement et d'attitude. Nous voulons amener les élèves à comprendre le problème et nous utilisons pour cela différentes techniques de marketing social. Nous faisons appel aux techniques multimédias. Nous utilisons différents modes de communication au cours de la journée, tels que présentations avec démonstrations et témoignages de survivants d'accidents. Nous cherchons à intéresser et à distraire. Nous savons que nous nous adressons à des adolescents qui n'appréhendent pas les choses de la même façon que nous et il s'agit donc d'éveiller leur intérêt.

    Nous ciblons les adolescents car c'est majoritairement ce groupe d'âge qui est victime des accidents dont nous parlons, et nous voulons en réduire la fréquence. Il s'agit également de les toucher avant qu'ils commencent à former les habitudes qui vont se répercuter sur le reste de leur vie. Nous voulons les amener à remettre en question leurs croyances et attitudes vis-à-vis des problèmes dont nous parlons. Pour cela, nous leur donnons la faculté d'opérer des choix intelligents et nous renforçons sans cesse ces messages: Attachez votre ceinture, la ceinture de sécurité sauve des vies, et ne buvez pas si vous conduisez. Tout le monde pense que le problème de l'alcool au volant est compris par tous, mais nous leur montrons également que le manque de sommeil est un gros problème et que la privation de sommeil réduit également les facultés.

¾  +-(0855)  

+-

    Nous parlons de la consommation de médicaments et de drogues et des effets qu'ils peuvent avoir sur la faculté de conduire, ou de marcher ou de rouler à bicyclette. C'est réellement un message prioritaire.

    Le troisième message met l'accent sur les équipements de protection contre les traumatismes, tels que casques, genouillères et coudrières, lunettes, ce genre de choses. Nous avons réellement salué l'adoption de la loi en Alberta qui rend le casque obligatoire pour les moins de 18 ans.

    Ensuite, il y a le message «Regardez d'abord» qui amène à évaluer le risque d'une situation. Cela couvre la sensibilisation aux drogues. Souvent, les adolescents copient leurs camarades et sont influencés par la mode, tout ce qui paraît être une bonne idée, d'après leur expérience, d'après ce qu'ils voient dans les médias et leur expérience de vie.

    La partie formation est centrée sur les activités, et englobe les premiers soins et la capacité à effectuer des choix sûrs dans toutes les situations.

    Nous espérons modifier les comportements par la prise de responsabilité personnelle de chacun pour ses actes et d'une responsabilité sociale à l'égard de la résolution du problème. Nous leur montrons les coûts sociaux des comportements dangereux, la diminution de qualité de vie s'ils deviennent handicapés ou les années de vie qu'ils risquent de perdre, ainsi que les effets sur leurs familles et la collectivité.

    Nous espérons donc modifier les comportements et cela n'est possible que par la sensibilisation et des stratégies positives qui induisent un changement de mentalité. L'altruisme est une marque de maturité. Nous essayons de partir de l'idée qu'une fois qu'ils ont confiance en eux, ils peuvent prononcer ces jugements. Et, bien sûr, le changement de mentalité est une conséquence générale des modifications de comportement au fil du temps. Un bon exemple de cela est notre sensibilisation aux problèmes écologiques.

    Comme je l'ai dit, nous pensons que notre programme est rentable. Le coût en est réduit parce qu'il est dispensé par des organismes communautaires--nous sommes un organisme sans but lucratif--et par des bénévoles. Le rendement doit être supérieur à un, et d'ailleurs--vos chercheurs pourront rectifier si je me trompe--un dollar de prévention économise environ sept dollars d'intervention, et peut-être même plus. Nous considérons donc cette action comme une mesure d'économie pour la société.

    Nous considérons qu'il y a dans notre action une relation de cause à effet continue. Nous visons à changer les comportements individuels, avec tous les choix intelligents que cela suppose. Nous voulons aussi un transfert de l'apprentissage, afin que non seulement ceux qui ont suivi le programme changent de comportement, mais aussi qu'ils assurent une dissémination parmi leurs amis et leur entourage. Grâce aux méthodes de marketing social et à nos styles de communication, nous sommes très efficaces auprès de notre auditoire cible. Ensuite, il y a la participation communautaire. J'ai entendu une présentation d'un spécialiste de la prévention de CDC qui parlait des programmes de prévention dans le monde et il était tout à fait d'avis que le soutien de la collectivité est nécessaire à l'efficacité.

    Enfin, sur le plan des besoins généraux, nous pensons réellement qu'il faut considérer le coût d'un programme comme le nôtre comme un investissement car les gens ne réalisent pas suffisamment que la prévention coûte beaucoup moins cher à la société que le traitement. De même, il faut effectuer davantage de marketing social et mieux sensibiliser le public aux problèmes et aux changements de comportement nécessaires.

¿  +-(0900)  

+-

    Par le biais des programmes PARTY, DARE, et ceux d'AADAC et beaucoup d'autres moyens, notre ville de St. Albert entreprend toutes sortes d'action de sensibilisation. Nous réfléchissons depuis peu à un programme de sensibilisation à la drogue à l'échelle de la collectivité. On est toujours surpris que tant de gens, en dépit de tout, continuent de croire que nous n'avons pas de problème de drogue à St. Albert. Elle est partout. Il en résulte non seulement des coûts financiers, mais des effets et des coûts sociaux pour toute la collectivité.

    Je sais qu'il n'y a pas habituellement de crédits fédéraux pour des programmes communautaires, mais il faut trouver le moyen d'appuyer les programmes de première ligne qui donnent des résultats. Comme je l'ai dit, il y a un effet amplificateur et l'on peut faire beaucoup à la base. Nous sommes toujours en quête d'un dollar de plus pour essayer de faire davantage, mais nous ne pouvons pas tout faire. Enfin, je pense qu'il faut un soutien pour évaluer l'efficacité des programmes existants. Cela semble être l'une des responsabilités de la commission des drogues. Il est très important de pouvoir comparer les pommes aux pommes et les oranges aux oranges et de comprendre la logique de ce qui se passe.

    C'est tout.

¿  +-(0905)  

+-

    La présidente: Merci.

    Je donne maintenant la parole à Howard Faulkner et Kathy Landry.

+-

    M. Howard Faulkner (directeur exécutif, Services de la prévention/traitement, Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission): Merci beaucoup.

    Je tiens à remercier le Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments de cette occasion de faire un survol de nos services de traitement, prévention et information.

    L'AADAC est chargée, aux termes de l'Alcohol and Drug Abuse Act, de fournir et de financer des services pour lutter contre l'alcoolisme, la toxicomanie et la passion du jeu et mener des recherches dans ces domaines. Ces services sont dispensés à l'échelle de la province et sont actuellement disponibles dans plus de 40 localités.

    L'AADAC est un organe du gouvernement de l'Alberta et est régi par un conseil de 12 commissaires nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil. Le président est un membre de l'assemblée législative de l'Alberta. Notre conseil donne des avis sur le plan des politiques à suivre et fait rapport au ministre de la Santé provincial, l'honorable Gary Mar. Nous avons un budget de fonctionnement d'environ 58 millions de dollars par an, dont 62 p. 100 destinés au traitement, 17 p. 100 à la prévention et 21 p. 100 à l'information.

    Environ 77 p. 100 des Albertains de plus de 15 ans boivent de l'alcool, 23 p. 100 fument du tabac et 8,4 p. 100 disent avoir consommé du cannabis dans les 12 derniers mois, et moins de 2 p. 100 déclarent avoir consommé d'autres drogues illégales, telles que cocaïne, LSD ou héroïne. L'alcool est clairement la drogue de choix de la plupart des Albertains et la consommation annuelle équivaut à 512 bouteilles de bière pour chaque habitant de plus de 15 ans.

    En moyenne, l'AADAC enregistre plus de 35 000 admissions pour services de traitement, 133 000 admissions pour services d'urgence et 180 000 contacts pour nos services de prévention et d'éducation. Notre vision consiste à faire une différence dans la vie des gens en les conduisant vers un avenir libre de dépendance.

    Il existe un certain nombre de perspectives et défis. Les problèmes de dépendance surviennent à tous les niveaux de la société et dans toutes les collectivités de la province. De nombreux Albertains vont connaître à un moment de leur vie des problèmes personnels liés à l'alcool, à la drogue et au jeu et beaucoup d'autres seront touchés par la dépendance d'un proche. Pour être efficace, la prévention et l'intervention exigent une collaboration étroite entre les services de traitement spécialisé et d'autres intervenants, par exemple les responsables de la santé, de l'éducation et de la justice, ainsi que des stratégies globales visant les sujets et leur environnement.

    S'agissant de fournir aux Albertains des programmes et services en matière de dépendance, AADAC prête attention à la fois aux défis et aux possibilités qui existent. La commission doit savoir s'adapter pour répondre à l'évolution des besoins, priorités et situations de sa clientèle, en isolant et analysant les nombreux facteurs qui contribuent à la dépendance et les nombreuses conséquences qui en résultent, et qui constituent l'un des facteurs clés de la santé publique, et en collaborant avec d'autres afin de coordonner les services en vue d'améliorer la santé et le bien-être.

+-

    Nous devons trouver le juste équilibre entre prévention et traitement, en continuant à fournir des soins immédiats et compassionels aux victimes de l'abus de substances et de la passion du jeu. Pour le long terme, nous devons privilégier les stratégies de prévention ciblant la jeunesse et d'autres sous-populations particulièrement exposées à ces problèmes.

    Nous devons être en mesure, grâce à une planification et à des partenariats stratégiques, de répondre à la demande croissante de nos services. Nous devons mener une action efficace au moyen de programmes cohérents fondés sur la recherche et les meilleures pratiques dans le domaine de la toxicomanie et faire rapport de nos résultats et réalisations par le biais de mécanismes de reddition de comptes au public.

    Nous devons opter pour des méthodes de prestation de services novatrices de façon à joindre les groupes clients difficiles à toucher tels que les jeunes à risque, les personnes âgées et les sans-abri. Nous devons promouvoir des solutions communautaires au moyen de consultations et de la collaboration avec le public et les intervenants, de façon à élaborer une approche stratégique et globale de l'abus de substances et du jeu compulsif. Nous devons également mettre à profit les technologiques informatiques.

    J'aimerais dire quelques mots du cadre de service de la commission. Notre activité fondamentale englobe toutes les mesures prises pour combattre les effets et les influences en rapport avec la consommation et l'abus d'alcool, d'autres drogues, ainsi que le jeu compulsif. Tout notre travail vise trois objectifs: retarder le commencement, réduire la prévalence et atténuer les méfaits associés à l'alcoolisme, à la toxicomanie et à la passion du jeu. Notre modèle de service est une représentation schématique de l'éventail complet des services de la commission, depuis la dissémination de l'information jusqu'à des services de prévention ciblés et, finalement, des thérapies adaptées à une population très spécifique. Chacun de nos grands domaines d'activités est influencé par des facteurs externes, tels que la conjoncture économique, le chômage, l'environnement physique, la politique gouvernementale, la culture, la démographie et les besoins des clients. Tous ces facteurs environnementaux externes se répercutent sur le processus de planification de l'activité de la commission et, en fin de parcours, sur les modalités de prestation de nos services et la clientèle visée.

    Bien qu'il y ait un chevauchement entre les services fournis à l'intérieur de chacune de ces activités fondamentales, le but poursuivi par chacune diffère. Notre première activité élémentaire est l'information, qui a pour but de disséminer des renseignements scientifiques sur l'alcoolisme, la toxicomanie et le jeu compulsif et informer les Albertains de nos programmes et services. Nous considérons qu'un public informé est celui qui sait où s'adresser pour trouver les services d'AADAC et possède l'information voulue pour prendre des décisions concernant la consommation d'alcool et d'autres drogues ou le jeu. Ainsi, nous tenons les Albertains et d'autres intervenants au courant des renseignements scientifiques les plus récents sur les enjeux, les tendances émergentes, les recherches et les mesures de performance en rapport avec la dépendance. Le travail d'information de la commission sous-tend tout le travail que nous faisons en matière de prévention et de traitement. Nous nous efforçons d'établir des services d'information qui positionnent l'AADAC comme source crédible et appréciée de savoir faire en matière de dépendance. Comme exemple de nos activités d'information sur le plan de la sensibilisation publique, citons notre contribution à la semaine nationale de sensibilisation à la toxicomanie et notre campagne dans les médias à cet égard. Nous produisons également un certain nombre de publications, de vidéos et d'affiches renseignant sur les programmes et services de la commission et nous avons un site Internet, dont l'adresse est www.aadac.com.

    La prévention représente notre deuxième pôle d'activité, le but étant de prévenir l'alcoolisme, la toxicomanie et le jeu compulsif par des actions planifiées auprès des populations cibles et leurs mécanismes de soutien immédiats. Nous fournissons des programmes et services qui accroissent la capacité des individus, des familles et des collectivités à s'attaquer efficacement aux problèmes potentiels liés à l'alcool, à d'autres drogues et au jeu. La prévention vise à renforcer les facteurs de protection et à réduire les facteurs de risque clairement associés à l'apparition d'une dépendance. Les services de prévention englobent l'intervention précoce, l'éducation communautaire et la formation professionnelle. Les services sont fournis par l'intermédiaire d'un réseau de 26 bureaux régionaux dans toute la province, ainsi que de 25 organismes communautaires disséminés à travers la province.

¿  +-(0910)  

+-

    Nous définissons trois catégories de prévention. La prévention universelle vise la population générale et vise à promouvoir la santé ou à retarder l'apparition de l'abus de substances ou du jeu. Ces activités de prévention peuvent engendrer une plus grande sensibilisation aux problèmes de dépendance et une meilleure acceptation de la nécessité d'une prévention plus ciblée. La prévention universelle met l'accent sur les facteurs de protection, en particulier le développement des aptitudes et connaissances. Comme exemple on peut citer l'éducation sanitaire, les programmes scolaires et le mentorat informel. Les efforts de prévention universelle vont également toucher les groupes cibles du modèle de prévention, en mettant l'accent sur les mêmes facteurs de protection.

    La prévention ciblée concerne les groupes de population présentant des facteurs de risque particuliers sur le plan de l'alcoolisme, de la toxicomanie et du jeu. Le but est de réduire l'influence de ces facteurs de risque et de prévenir ou retarder l'apparition du problème. La prévention ciblée vise ainsi à réduire l'influence des facteurs de risque et à accroître les facteurs de protection dans une population ne consommant pas actuellement d'alcool ou d'autres drogues ni ne se livrant au jeu. Comme exemple on peut citer les programmes de prévention dispensés avec des alliés tels que les écoles, les services à l'enfance, les services de santé et de justice.

    La prévention indiquée s'adresse aux personnes qui ont déjà un problème mais ne sont pas prêts ou en mesure de suivre un traitement en règle. Elle peut comporter un élément d'extension de façon à identifier les sujets, nouer le contact et travailler avec eux afin de minimiser les effets associés à leur mode de vie. Les objectifs de la prévention indiquée sont d'aider les sujets à entreprendre une démarche de changement, les renseigner et réduire les problèmes et méfaits associés au comportement. Comme exemple de ces stratégies on peut citer le programme d'entretien à la méthadone, la protection des enfants livrés à la prostitution, l'action auprès des délinquants en probation ou des élèves renvoyés de l'école pour abus de substance.

    L'activité de traitement a pour objectif premier de fournir des services de traitement permettant aux Albertains de surmonter la dépendance et les séquelles de l'alcoolisme, de la toxicomanie et du jeu compulsif. Nous fournissons des programmes et services à cet effet, qui englobent le counselling communautaire ambulatoire, des programmes de jour et des traitement en résidence, et ce dans un milieu structuré qui aide les clients à surmonter leur dépendance. Nous avons environ 750 lits dans la province. Nous offrons également une ligne téléphonique secours générale et une pour joueurs compulsifs. Les programmes spécialisés sont offerts aux jeunes, aux Autochtones, aux sujets qui nous sont envoyés par les entreprises et aux toxicomanes.

    En conclusion, j'ajouterais que le problème de la dépendance continue manifestement de sévir. La bonne nouvelle est qu'elle peut être traitée et prévenue, mais la mauvaise nouvelle est que c'est un problème très sérieux et complexe. Nos services offrent la possibilité de retourner à une vie plus saine. Je pense que nous faisons une différence, mais nous devons travailler en collaboration si nous voulons effectivement réduire les nombreux coûts associés à la dépendance dans notre société.

¿  +-(0915)  

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    La présidente: Merci beaucoup, monsieur Faulkner.

    Madame Landry.

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    Mme Kathy Landry (gestionnaire, Northern Addiction Centre, Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission): Je remercie la présidente et le comité de son invitation à vous parler du Northern Addiction Centre.

    Le Northern Addiction Centre est un établissement polyvalent de lutte contre la dépendance situé à Grande Prairie. La ville de Grande Prairie se trouve à environ 500 kilomètres au nord-ouest d'Edmonton et compte une population d'environ 37 000 habitants. Notre zone de captage compte environ 168 000 habitants, mais je n'ai pas pu trouver les chiffres de recensement les plus récents. Le centre a été ouvert en juin 1991 par l'Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission. Bien qu'il soit destiné expressément aux habitants du nord de l'Alberta, nous constatons souvent que notre réputation nous attire des patients venant de toute la province et d'au-delà.

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    Le Northern Addiction Centre de l'AADAC--que nous appelons par le sigle NAC--offre un vaste éventail de services en matière de dépendance. Nous offrons des services de traitement ambulatoire et de prévention, localisés dans notre bureau régional de Grande Prairie, qui sert les Albertains vivant à Grande Prairie et dans les environs. Ce bureau assure le counselling ambulatoire aux adultes et adolescents. Il est souvent assuré en tête à tête, mais nous offrons également un counselling de groupe pour le traitement des problèmes liés à l'alcool, à la drogue et au jeu. Cette unité fournit également des services thérapeutiques ambulatoires aux jeunes à risque, ainsi que de prévention et d'information.

    Notre unité de désintoxication compte 20 lits. Elle offre un environnement sûr et propice au sevrage. L'unité est ouverte 24 heures par jour et est dotée d'infirmières. Elle dispose également d'un médecin à contrat qui répond aux besoins médicaux des patients. Les patients peuvent se présenter de leur propre initiative.

    Nous disposons également de 43 lits qui sont l'assise de nos programmes de traitement à demeure. Nous avons trois programmes thérapeutiques en établissement. Le programme NAC en est un de 20 jours qui vise à aider les clients à formuler des stratégies pour surmonter les problèmes liés à l'alcool et à d'autres drogues. Nous avons le programme AADAC des cliniques pour entreprises, qui est un programme thérapeutique à demeure de 30 jours utilisant le modèle thérapeutique des 12 étapes. Nous offrons également un programme ambulatoire de suivi de cinq mois. En outre, nous avons un troisième programme thérapeutique à demeure spécifiquement destiné aux cocaïnomanes, et qui se compose d'un programme en établissement de 50 jours doublé d'un programme de suivi de sept mois.

    J'aimerais dire quelques mots plus particulièrement de la clinique pour entreprises, étant donné son caractère distinctif. Nous l'avons ouverte en 1994. À l'époque, différentes personnes des milieux professionnels de l'Alberta préconisaient un programme résidentiel spécialisé répondant aux besoins des employeurs. Des spécialistes de l'aide aux employés, de la santé professionnelle et des ressources humaines représentant les employeurs albertains ont été consultés dans la perspective de la création d'un programme de traitement résidentiel des toxicomanies. Ces professionnels ont été consultés car ils connaissent le mieux les problèmes en milieu de travail et les coûts liés à l'alcoolisme et à la toxicomanie. Nous leur avons demandé quel type de programme ils recherchaient plus particulièrement. Cette consultation nous a également permis de déterminer que les employeurs étaient prêts et disposés à payer pour des programmes et services répondant à leurs besoins.

    Nos consultations ont révélé que les employeurs apprécient l'admission immédiate, la désintoxication à demeure et l'approche fondée sur l'abstinence, l'accès à des renseignements sur les progrès et la participation des clients qu'ils ont référés, ainsi que des programmes plus longs afin de vaincre la résistance. Aussi, la clinique initialement a instauré un programme de traitement de l'alcoolisme et de la toxicomanie de 30 jours. Les employeurs ont réagi positivement et, de ce fait, ont préconisé qu'il soit élargi spécifiquement à la dépendance à la cocaïne. Les services ont été ultérieurement élargis en 1998 avec la mise en place d'un programme de 50 jours.

    Les deux programmes de la clinique pour entreprises sont payants, les droits couvrant une partie du coût. Une approche de service à la clientèle s'est avérée être un ingrédient essentiel du succès et de l'expansion ultérieure de la clinique, et de gros efforts sont déployés pour assurer que les programmes répondent aux critères spécifiques formulés par les employeurs.

    Parmi les clients de la clinique pour entreprises de l'an dernier, 43 p. 100 ont volontairement demandé de l'aide, 27 p. 100 étaient là sur le conseil de leur employeur et 30 p. 100 y étaient obligés par leur employeur.

¿  +-(0920)  

+-

    Grâce à la concertation avec les milieux de travail albertains, nous avons pu constater que les employeurs portent intérêt à la santé de leurs effectifs et à la capacité des employés de fonctionner en toute sécurité. Les employés le comprennent bien et c'est pourquoi même les clients qui éprouvent des problèmes admettent que l'employeur a un rôle légitime s'agissant de l'accès à l'évaluation et au traitement et est en droit d'escompter que les clients participent pleinement au traitement. Les employeurs peuvent contribuer à motiver le client et exercer une pression en faveur du changement. L'accès rapide fait que le client dispose sans délai des ressources requises, ce qui leur permet de guérir plus vite et de réintégrer leur emploi, ce qui minimise le coût pour l'employeur. Le milieu de travail privilégie une approche de la toxicomanie axée sur l'abstinence. Les employeurs tiennent à ce que le message soit clair, de façon à ce que les difficultés, les risques et les dangers soient levés ou prévenus. Il n'y a pas de niveau sûr de consommation de drogue dans le milieu de travail.

    On se préoccupe de plus en plus de la santé et de la sécurité du personnel en milieu de travail. Les employeurs ont de plus en plus conscience de leur responsabilité civile à l'égard d'employés qui boivent et se droguent. Les entreprises albertaines mettent en place dans le milieu de travail une large gamme de stratégies de traitement et de prévention de la toxicomanie. Le type de stratégie mis en oeuvre dépend souvent de la taille de l'entreprise et des ressources disponibles.

    L'expérience du nord de l'Alberta ne diffère guère de celles des autres régions nordiques ou rurales du Canada. L'éloignement des centres de services y pose toujours un problème. Cependant, avec son réseau de bureaux, établissements et organismes financés par elle, l'AADAC assure à la population de la province un accès raisonnable à une gamme de services en matière de toxicomanie.

    L'alcool reste la principale cause de dépendance. Nous commençons à voir également des consommateurs de substances multiples, combinant l'alcool et d'autres drogues. Un nombre croissant de clients de notre centre de désintoxication sont dépendants de la cocaïne. Nous constatons un accroissement du nombre de jeunes se droguant principalement à la méthamphétamine. Nos clients tendent à présenter des problèmes de santé physique et mentale plus complexes, combinés à leur toxicomanie. Nous avons un afflux régulier de gens consommant le THC ou des produits à base de cannabis dans le cadre de leur polydépendance, considérant cette substance comme moins nocive que d'autres.

    Le Northern Addictions Centre est sans équivalent en Alberta, voire dans tout l'Ouest du Canada. Il a été conçu pour fournir toute la gamme des services de traitement de la toxicomanie sous un même toit. Nous assurons la désintoxication des sujets avant de les envoyer directement dans un programme de traitement résidentiel et les mettre ensuite en rapport avec les services de soins ambulatoires dans leur localité d'origine. Ce modèle constitue une approche multidisciplinaire de l'information, de la prévention et du traitement. Nous avons constaté au fil des ans les avantages qu'il y a à travailler dans un tel cadre, qui nous permet de faire appel à l'expérience et aux connaissances d'autres parties, au sein de l'établissement et des diverses collectivités que nous servons.

    Merci.

¿  +-(0925)  

+-

    La présidente: Merci, madame Landry.

    Nous entendons maintenant Mme Wood, d'Aventa.

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    Mme Cathy Wood (gestionnaire, Aventa): Merci.

    C'est un plaisir de comparaître devant vous ce matin. Je tiens à souligner spécialement les efforts de la greffière du comité, Carol, qui a beaucoup insisté pour que je comparaisse aujourd'hui. Elle m'a adressé quantité de courriels pour m'inciter à venir.

    Permettez-moi de vous décrire Aventa et vous donner un aperçu de notre action. Comme mes autres partenaires ici, nous sommes un service financé par l'AADAC et fournissons des services spécialisés aux femmes depuis plus de 31 ans. Nous sommes le seul programme s'adressant exclusivement aux femmes en Alberta. Notre principal mandat est de fournir des services résidentiels et ambulatoires aux femmes adultes. Nous offrons toute une gamme de services et plus de 1 700 femmes et membres de leur famille ont été en contact avec Aventa cette année. Cela vous donne une idée du nombre de clientes qui viennent nous voir à Calgary. Et 70 p. 100 de celles qui nous contactent viennent du sud de l'Alberta, le restant venant d'ailleurs de la province et aussi d'autres provinces.

    Étant donné que notre service de traitement du jeu compulsif est sans équivalent, on nous envoie des femmes de tout le Canada. Il est bon de pouvoir parler de l'alcool et des drogues ce matin, mais le jeu compulsif est un sujet qui mérite un peu plus d'attention. Je vais concentrer mon propos ce matin plus particulièrement sur l'alcoolisme et la toxicomanie chez les femmes.

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    J'aimerais dire quelques mots de notre programme de base. C'est un programme de quatre semaines que les femmes sont obligées de suivre. Elles peuvent le faire à titre résidentiel ou ambulatoire. Nous n'avons que 16 lits et une liste d'attente de trois à quatre mois pour nos services résidentiels réservés aux femmes. Nous sommes en train de nous agrandir et nous disposerons l'an prochain de 36 lits. Cependant, à ce stade nous n'avons que 16 lits. Les femmes peuvent séjourner chez nous pendant 90 jours, le minimum imposé étant de 30 jours. Nous offrons également un éventail de services ambulatoires, allant du suivi post-thérapeutique au soutien collatéral à la famille, aux programmes d'éducation et d'intervention individuelle d'urgence. Nous admettons les femmes en situation de pré-traitement et nous admettons les femmes enceintes dans un délai de 24 heures--elles sont prioritaires, étant donné les graves risques qu'elles présentent. C'est là pour nous une problématique permanente.

    Voyons un peu les types de substances dont abusent nos clientes. J'ai extrait hier les chiffres les plus récents de notre base de données, et ils sont donc à jour. Sur les quelque 1 300 visites à Aventa répertoriées dans notre base de données, 75 p. 100 concernent l'alcool, 34 p. 100 la marihuana ou le cannabis, et un nombre à peu près équivalent la cocaïne. Je n'ai pas recherché les chiffres sur les médicaments sur ordonnance. L'abus de médicament est un gros problème chez les femmes, mais j'ai décidé de laisser cet aspect de côté ce matin. Les femmes viennent se faire soigner chez nous pour trois raisons principales.

    Notre programme de quatre semaines est axé sur les raisons pour lesquelles les femmes abusent de substances. Plus de 75 p. 100 de nos clientes ont des antécédents de traumatisme psychologique. Elles ont été victimes de violence familiale, de sévices sexuels et ont vécu des traumatismes considérables au cours de leur vie. On ne peut traiter ces femmes sans parler de ces troubles parallèles. Nombreuses sont celles qui nous arrivent avec un diagnostic psychiatrique, c'est-à-dire une maladie mentale. Nous constatons également une diminution de l'âge auquel l'abus de substances commence.

    Un élément clé sur le plan du traitement de la dépendance est l'âge auquel ces femmes ont commencé à consommer. Nous constatons que la toxicomanie commence aujourd'hui à un âge plus précoce, entre 13 et 14 ans, et dure pendant toutes les années de la vie féconde, jusqu'à la fin de la trentaine. Cela présente des problèmes physiques et sanitaires considérables pour ces femmes sur le plan de leur santé reproductive, car ce sont là leurs années les plus fécondes.

    Nous constatons également que les femmes nous arrivent avec des problèmes de santé plus complexes. Les recherches montrent que les femmes réagissent différemment des hommes à l'abus des drogues et de l'alcool et c'est ce que nous constatons quotidiennement dans notre bureau.

    D'autres facteurs de l'abus de substances par les femmes sont la famille d'origine, un chagrin ou deuil non surmonté, et aussi l'auto-médication au moyen de médicaments pour traumatisme psychologique et troubles psychiatriques. Nous constatons que ces femmes ont une faible capacité à faire face, des ressources limitées, un faible niveau d'instruction, un accès limité aux possibilités éducatives et de piètres antécédents professionnels. Elles sont également marquées par des retards de développement. Lorsqu'elles ont commencé à abuser de substances à un âge précoce, leur développement a stagné. Cela exclut toute possibilité de formation jusqu'à ce qu'elles soient sevrées et guéries.

    Le syndrome et les effets de l'alcoolisation foetale sont un énorme problème chez les femmes. Nous avons mis en place, sous l'impulsion de l'AADAC, un projet de services renforcés aux femmes de l'Alberta. Nous avons obtenu pour cela le soutien de Santé Canada afin d'identifier et d'offrir les services spécialisés et particuliers dont les femmes ont besoin aux fins de la prévention du SAF et des EAF. La crainte de perdre les enfants est un gros problème pour les femmes qui viennent suivre un traitement. Elles sont moins susceptibles de faire appel aux services lorsqu'elles sont enceintes ou mères, de crainte d'être privées des enfants. C'est une énorme barrière pour les femmes, qui existe depuis longtemps et n'a pas été surmontée.

    S'agissant de l'approche thérapeutique la plus efficace pour les femmes, je dois parler du continuum des services. Howard a parlé de la réduction des méfaits et c'est certainement dans ce sens que nous allons aussi à l'égard des femmes. Le programme d'Aventa est fondé sur l'abstinence, mais nous assurons certainement un continuum de soins pour faciliter le mouvement des femmes vers l'abstinence. Nous autorisons l'admission précoce au traitement résidentiel pour réduire les séquelles chez les femmes enceintes. Nous offrons des services ambulatoires aux femmes jusqu'à ce qu'elles soient prêtes pour le soutien résidentiel. Nous acceptons également les femmes sous méthadone comme autre approche de réduction des méfaits et de traitement de la toxicomanie.

¿  +-(0930)  

+-

    Nous croyons qu'une relation thérapeutique et de soutien à long terme est nécessaire pour parvenir à la guérison. À mes yeux, c'est essentiel. Après 22 années de travail, tant aux États-Unis qu'au Canada dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie, nous commençons à savoir ce qui marche et ne marque pas. Ce que nous constatons chez Aventa, et les études scientifiques le prouvent, est qu'il faut des services de soutien à long terme pour obtenir de bons résultats chez les femmes.

    J'ai dit quelques mots au sujet des barrières. On ne peut négliger les problèmes particuliers, culturels et raciaux, des femmes autochtones. Nous en tenons compte chaque jour dans les services que nous offrons.

    Les femmes mères ont certainement besoin d'un soutien sur le plan de la garde des enfants. Plus de 57 p. 100 des femmes qui viennent chez Aventa ont des enfants de moins de 18 ans. Elle se heurtent sans cesse à des difficultés, par manque de soutien financier pour la garde et le manque de services dans ce domaine. Aventa peut recevoir en résidence des femmes accompagnées d'enfants. Quantité de programmes donnant de bons résultats en Amérique du Nord offrent un soutien résidentiel aux femmes accompagnées d'enfants. Cela me paraît être la voie du succès mais nous manquons aujourd'hui de ressources pour cela. Nous n'avons pas les moyens financiers voulus mais nous ne renonçons pas à la possibilité et considérons cela comme un besoin prioritaire.

    J'aimerais parler quelque peu des recherches indiquant que les femmes sont moins susceptibles de s'abstenir de substances et constituent une proportion décroissante de la population. Je pense que c'est un problème à l'échelle de tous les services. Certains groupes de femmes, d'un certain âge, semblent plus exposées à l'alcoolisme et à la toxicomanie. Il s'agit donc de bien cerner quels sont ces âges spécifiques, effectuer une étude épidémiologique complète auprès de ces femmes pour cerner les problèmes. On constate chez les femmes un risque élevé de suicide et de décès. Nous sommes amenés chaque jour à effectuer des interventions urgentes auprès de femmes intoxiquées présentant des risques de suicide et de mort.

    Lorsque j'ai parlé avec Carol, elle m'a suggéré de formuler deux recommandations au comité. Elle était très organisée. J'y ai pas mal réfléchi. La première de mes recommandations aujourd'hui vise le maintien des ressources pour le traitement et la prévention de la dépendance.

    Une approche multidisciplinaire est nécessaire, de façon à offrir des services complets aux femmes. Lorsque je parle d'approche multidisciplinaire, j'entends par là un traitement tant de la toxicomanie que des troubles mentaux. Nous avons eu le luxe merveilleux, ces deux dernières années, chez Aventa, d'avoir un psychiatre offrant des consultations chez nous pour les femmes présentant des troubles mentaux concurrents. Ces cas sont extrêmement complexes et difficiles à évaluer. Le psychiatre peut apporter un appui énorme aux interventions. Il est crucial que les soins infirmiers, la thérapie antidrogue et les consultations psychiatriques aillent de pair. Donc, ma première recommandation est d'assurer les ressources nécessaires au traitement et à la prévention.

    L'autre aspect que je veux aborder est tout l'élément recherche que j'ai déjà mentionné brièvement. Il est indispensable de conduire des recherches continues sur l'abus de substances chez les femmes, sa progression et son commencement, sur les types d'intervention efficaces et la comorbidité, soit les troubles concomitants et leur impact sur l'abus de substances. Les spécialistes au sein de l'AADAC et ailleurs au Canada avec lesquels j'ai parlé depuis mon arrivée sont pleinement résolus à réévaluer sans cesse nos méthodes et nos résultats. Chez Aventa, nous ne cessons de rechercher de meilleures façons de servir les femmes. Le modèle de réduction des effets nous a réellement contraints à rechercher la meilleure approche possible avec les ressources limitées dont nous disposons, et c'est une problématique permanente.

¿  +-(0935)  

+-

    La troisième question, à l'échelle nationale, serait l'opportunité de créer un centre d'information--de préférence non gouvernemental, si je peux me permettre cette opinion--sur le plan des thérapies et de la recherche, qui pourrait être localisé au sein d'une organisation nationale, et qui permettrait aux professionnels à l'échelle du pays, tant dans les régions rurales qu'urbaines, de constituer des réseaux. Lorsque je parle aux professionnels dans les autres provinces, certainement sur le plan des services aux femmes, nous parlons des avantages des télécommunications et de l'opportunité de mieux collaborer et de mettre en commun nos ressources thérapeutiques, de façon à pouvoir nous soutenir les uns les autres dans les régions du pays où les ressources sont plus limitées et les besoins de soutien plus grands.

    Voilà donc les trois recommandations que je peux formuler à votre comité aujourd'hui. Je vous remercie de votre invitation.

¿  +-(0940)  

+-

    La présidente: Merci, madame Wood, et merci à vous, Carol, pour votre insistance.

    La dernière intervenante ce matin sera Debra Williams, qui a travaillé sur l'évaluation du programme DARE.

+-

    Mme Debra Williams (présidente, DARE Evaluation Committee of Alberta): Merci.

    Sachez que je suis membre d'Alberta Learning et que nous conduisons l'évaluation du programme DARE en Alberta. Pour situer le contexte, l'éducation en matière d'abus de substances en Alberta est actuellement couverte dans le programme d'enseignement sur la santé depuis le jardin d'enfants jusqu'à la neuvième année, puis dans le cadre de notre programme de préparation à la vie quotidienne au niveau de l'école secondaire. Cet enseignement vise à donner aux élèves l'aptitude de faire des choix personnels réfléchis. Bien entendu, comme Howard l'a mentionné, l'AADAC dispense également des programmes de prévention scolaire. En outre, les écoles ont le choix d'offrir d'autres programmes élaborés par le secteur privé, tels que DARE.

    Le programme DARE, comme vous le savez, a été conçu aux États-Unis dans les années 80, introduit en Alberta dans les années 90 et est actuellement dispensé par les services de police à Edmonton, Camrose, Medicine Hat, Lethbridge et St. Albert et par la GRC dans diverses localités rurales de la province. Donc, encore une fois, l'exécution du programme DARE est à la discrétion des conseils scolaires locaux, de la municipalité et des services de police de la localité.

    Le gouvernement albertain a entrepris d'effectuer une recherche en règle sur l'efficacité du programme DARE. À cette fin, le solliciteur général provincial vient de terminer une étude documentaire sur l'efficacité de DARE et je vous en ai apporté une copie. Alberta Learning et les intervenants du milieu scolaire ont également eu la possibilité de faire un apport à ce document. En outre, l'Alberta désirait réaliser une évaluation directe du programme DARE. À cette fin, nous participons à une étude canadienne en collaboration avec la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick, c'est-à-dire que nous ne sommes plus les meneurs de l'étude d'évaluation formelle, ayant cédé ce rôle au ministère de la Justice fédéral.

    Un élément qui complique l'évaluation de DARE tient au fait que le 15 février de l'an dernier, les responsables américains de DARE ont annoncé publiquement que leur programme n'a pas d'effet notable à long terme sur la prévention de la consommation et de l'abus de substances par les jeunes, si bien qu'ils en révisent de nouveau le contenu. Ce nouveau programme d'enseignement, ciblant les élèves de la cinquième à la huitième année, devrait être prêt en 2003. L'échéancier provisoire au niveau fédéral--et je suis sûr que le ministère de la Justice à Ottawa pourra vous en dire plus--prévoit maintenant une étude documentaire plus poussée jusqu'à ce que le nouveau programme d'études soit mis en oeuvre, à l'automne 2003 espère-t-on, et de reprendre ensuite l'évaluation directe dans ces trois provinces.

    De toute évidence, il est crucial de mener des recherches sur la prévention si l'on veut déterminer quelles méthodes dissuadent effectivement les gens de consommer des substances en premier lieu, et je pense donc que ce projet, avec l'étude documentaire plus poussée et l'évaluation directe du programme DARE, pourra nous éclairer.

+-

    La présidente: Excellent. Tout le monde a une copie du sommaire. Le premier paragraphe est un choc, sachant que dans certaines régions du pays on considère ce programme comme ce que l'on a inventé de mieux depuis le fil à couper le beurre.

¿  +-(0945)  

+-

    Mme Debra Williams: C'est intéressant, car certaines recherches, comme nous l'ont dit nos propres intervenants scolaires, donnent à penser... Vous avez dit que les spécialistes de la toxicomanie veulent des recherches, veulent savoir ce qui marche, mais ce n'est pas nécessairement... Au niveau de la sphère politique, il y a tellement d'autres facteurs pesant sur la prise de décisions.

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    La présidente: À qui le dites-vous.

    Monsieur Leblanc, posez quelques questions.

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    M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Merci.

    Merci au témoin, encore une fois. C'était un panel intéressant. J'ai beaucoup retiré de chacun des exposés. Vous avez manifestement longuement réfléchi à ce que vous alliez dire au comité. Je sais que mes collègues qui ne sont pas là, mais qui liront la transcription de vos interventions, en feront leur profit aux fins de la rédaction de notre rapport. Merci d'avoir pris le temps de faire ce travail et de venir nous rencontrer ce matin.

    J'ai plusieurs questions et je sais que Paddy en a également. Nous pourrions peut-être avoir une discussion à bâtons rompus, sachant que nous sommes si peu nombreux. L'après-midi d'hier a été intéressante à cet égard.

    Lorsque le comité produira son rapport, les médias vont inévitablement s'attarder sur la question de la décriminalisation de la marihuana, une option qui a ses partisans. Nous avons entendu à ce sujet des avis contradictoires. D'aucuns disent que la marihuana provoque une dépendance et d'autres affirment que non et d'autres encore pensent que c'est une drogue d'introduction. Vu l'expérience que vous avez tous du traitement, de l'éducation et de la recherche, j'aimerais connaître votre opinion sur le caractère toxicomanogène de la marihuana. Une chose me frappe: les toxicomanes que nous avons rencontrés dans les divers centres de traitement ont tous, presque sans exception, commencé par se droguer à la marihuana. Ils ont fini par prendre des drogues beaucoup plus dures et plus destructrices. J'aimerais connaître votre avis sur le caractère toxicomanogène de la marihuana et si vous seriez ou non en faveur de la dépénalisation du cannabis.

    J'aimerais avoir votre avis à tous. J'ai conscience que dans certains cas ce pourra être votre opinion personnelle et non la position officielle de l'organisation que vous représentez.

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    La présidente: Madame Wood.

+-

    Mme Cathy Wood: Une conférence sur la réduction des méfaits a été tenue récemment à Red Deer. La question de la dépénalisation de la marihuana est venue sur le tapis. Il y a eu quelques très bonnes interventions sur ce sujet. Du point de vue thérapeutique, et selon mon expérience, de façon générale beaucoup de gens font de l'auto-médication en prenant diverses substances. Nous voyons arriver des femmes dépendantes de la marihuana. Elles fument de la marihuana toutes les heures avant de demander un traitement. Aussi, chez Aventa, nous ne partageons pas l'avis qu'elle ne crée pas de dépendance.

    Dans le cas des femmes enceintes, la recherche et l'expérience démontrent que la marihuana exerce un effet sur le foetus. Il est avéré que le cannabis, tout comme le tabac et l'alcool, affectent les enfants en gestation. De ce point de vue, nous considérons que la consommation de substances telles que la marihuana est nocive pour les femmes et leur bébé.

+-

    Pour ce qui est de la décriminalisation, j'ai l'impression--et j'exprime là mon opinion personnelle, pas nécessairement celle de mon organisation--que les mesures de lutte contre la drogue ne donnent pas les résultats voulus. Je pense qu'il y a de bons arguments à faire valoir en faveur d'une dépénalisation qui priverait les trafiquants de leur profit, mais il faudrait réfléchir aux conséquences qui en résulteraient du point de vue de la consommation de drogue et d'alcool et des effets sur les individus. Il y a un problème de nature économique qui fait que nous ne gagnons pas cette guerre. Cela devrait amener les responsables, tant au niveau de la juste pénale que du traitement, à se demander ce qu'il faudrait faire autrement.

    Voilà mes réflexions initiales à ce sujet.

¿  +-(0950)  

+-

    M. Dominic LeBlanc: Votre opinion personnelle est que ce ne serait pas une erreur de décriminaliser?

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    Mme Cathy Wood: Je ne dis pas cela. Je dis qu'il y aura un usage médicinal de la marihuana, que l'on décriminalise ou non. Cela ne va pas s'arrêter. Les médecins qui traitent des patients atteints de lésions médullaires savent bien qu'ils prennent chaque jour du THC pour soulager la douleur. Cela va continuer de toute façon. Je ne recommanderais probablement pas de décriminaliser la marihuana, à cause des conséquences sur le plan de la santé, de la prévention et du traitement chez les femmes qui consomment. Mais ce n'est pas une opposition catégorique.

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    M. Dominic LeBlanc: Merci.

+-

    La présidente: Monsieur Faulkner.

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    M. Howard Faulkner: Notre conseil médical a étudié la question très à fond, car c'est un sujet controversé. Il a pris sa décision selon la perspective de l'organisation de prestation de services que nous sommes. Le fait est qu'un certain nombre de nos clients nous arrivent dépendants du cannabis ou de la marihuana. De ce point de vue, nous ne sommes pas en faveur de la dépénalisation de la marihuana.

    Je pense qu'il faut considérer le cannabis sous l'angle du continuum des services. À notre sens, s'il y avait dépénalisation--et il y a beaucoup de raisons de décriminaliser, tel que le coût pour le système judiciaire--il en résulterait une consommation accrue de marihuana, car c'est une substance toxicomanogène. Dans l'esprit de certains, sa consommation pourra devenir chose normale. C'est également l'un des problèmes que pose la réduction des méfaits. Le seul emploi de l'expression réduction des méfaits, par opposition à l'abstinence, fait que beaucoup de gens pensent que nous approuvons la consommation. Évidemment, ce n'est pas du tout ce que nous recommandons.

    Nous ne sommes donc pas en faveur de la dépénalisation de la marihuana. Cependant, si on va le faire, il sera très important de consacrer des ressources à la prévention, au traitement et au contrôle, afin que cet effort soit maintenu, et d'annoncer très clairement qu'il n'est pas acceptable de consommer de la marihuana.

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    La présidente: Madame Landry.

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    Mme Kathy Landry: Nous qui travaillons sur le terrain voyons évidemment arriver des clients dépendants de la marihuana. Il se produit une réaction de sevrage. Les clients eux-mêmes ne considèrent pas cette substance comme réellement nocive, mais en tant que professionnels, nous devons tenir compte de l'histoire. J'assimile la marihuana au tabac. J'espère que nous avons tiré les leçons du tabagisme généralisé et de ses méfaits. Pourquoi recommencer cela? Nous commençons tout juste à surmonter les méfaits du tabac. Pourquoi faire cela?

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    La présidente: À écouter les témoins, on se demande parfois pourquoi nous avons légalisé l'alcool, mais cela ne va certainement pas changer.

    Madame Miller.

+-

    Mme Julie-Ann Miller: De mon point de vue, du point de vue de la santé, je dirais que ce ne serait pas une bonne idée de décriminaliser. Les effets toxicomanogènes et tous les facteurs dont tout le monde parle, tels que l'effet sur les familles et sur la santé, sont tout simplement incroyables. Mais du point de vue médical, je suis déchiré entre l'idée d'autoriser un analgésique utile pour les lésions médullaires ou travailler avec la Société de la sclérose en plaques. C'est un autre groupe qui est en faveur de l'emploi à titre de médicament. Je pense donc qu'il faut réfléchir à la valeur thérapeutique de cette drogue. Je ne suis pas sûre que le tabac et l'alcool aient jamais été considérés comme ayant une valeur médicinale. Mais certaines des autres drogues ont certainement une valeur médicinale. Elles ne sont pas légales, sauf pour usage médical. Je suis en faveur de cela.

+-

    Mais je ne vois pas l'intérêt de légaliser la marihuana. Aujourd'hui, nous avons toujours le choix de boire de l'alcool, de fumer ou de boire du café ou de nous en abstenir. Ce sont des choses que nous connaissons. La caféine, par exemple, fait partie de notre mode de vie, mais beaucoup de gens ne parviennent pas à en contrôler leur consommation. Je pense que nous avons la responsabilité de légiférer pour le bien de la société.

¿  +-(0955)  

+-

    La présidente: Monsieur LeBlanc.

+-

    M. Dominic LeBlanc: Une autre problématique dont on parle beaucoup est celle de la réduction des méfaits. Nous entendrons un autre groupe plus tard dans la matinée. Je sais que nombre d'entre vous administrez des programmes fondés sur l'abstinence. L'abstinence est l'objectif ultime de nombreux programmes thérapeutiques, j'en ai conscience. Mme Wood a indiqué que sur le chemin de l'abstinence, sur le chemin d'un traitement abouti, selon la situation particulière du sujet, quelques approches de réduction des méfaits sont justifiées et utiles. J'ai conscience que les besoins diffèrent d'une collectivité à l'autre du pays. L'abus de substances se manifeste différemment selon que l'on est en région rurale ou urbaine. Différentes collectivités vont rechercher des approches différentes de la réduction des méfaits. J'en ai conscience. Nous sommes un grand pays.

    L'un des éléments les plus controversés est celui des sites d'injection sûrs et les programmes d'entretien à la méthadone. Que pensez-vous de l'efficacité de ce type d'approche? J'ai appris que beaucoup de collectivités ont des programmes d'échange de seringues qui donnent de bons résultats. Nous sommes allés à Halifax. On ne penserait pas que Halifax ou des villes plus petites de la côte Est auraient besoin de centres d'échange de seringues. Cela a été un choc pour nous, ou en tout cas pour moi. Certains collègues au sein du comité préconisent les sites d'injection sûrs et les programmes d'entretien à la méthadone. Que pensez-vous de l'efficacité de ces options de réduction des méfaits? Quel message enverrait le gouvernement s'il recommandait que certaines collectivités aient accès à ce genre d'options?

+-

    La présidente: Monsieur Faulkner.

+-

    M. Howard Faulkner: La réduction des méfaits a manifestement sa place en matière de toxicomanie. Je pense qu'il est très important d'approuver la réduction des méfaits comme élément de toute la gamme des services touchant les drogues injectées, en particulier les lieux d'injection. La recherche n'a pas encore prouvé que ces méthodes font une différence. Je pense qu'il faut appuyer les projets pilotes de centres d'injection et évaluer les résultats.

    À cet égard, il faut considérer toute la problématique de la toxicomanie, en quelque sorte. Si le but est d'amener une personne à modifier ses comportements, ce peut être là la seule possibilité d'entrer en contact avec elle. Il est très difficile d'amener ces personnes dans des centres de thérapie. Elles ne réagissent pas à certaines des formes de traitement les plus courantes. On protège aussi la population générale, surtout dans le cas de la consommation par injection. Ce peut être une occasion de les orienter vers d'autres services. On sait que pour beaucoup ce sera un échec, mais c'est néanmoins un moyen de contrôler quelque peu la situation. Je pense qu'il faut effectuer des recherches à ce sujet.

+-

    Mme Kathy Landry: Je partage l'avis de Howard, et pas seulement parce qu'il est mon patron. Je pense que le gouvernement a un rôle manifeste s'agissant d'établir ce que nous considérons être la norme sociale. Il faut être sûr que les orientations choisies soient fondées sur la recherche et que l'on n'entraîne pas la société dans une direction néfaste. On peut considérer la réduction des méfaits du point de vue des programmes d'échange de seringues et des lieux d'injection sûrs, ce genre de chose, mais il ne faut pas non plus négliger la dimension d'ensemble, qui ne se limite pas à la seule consommation de substances et la survie des drogués. Il faut prendre en compte certains des déterminants plus larges de la santé. Si les pouvoirs publics aux niveaux fédéral et provincial--ou même les chercheurs--considéraient certains des facteurs plus larges déterminant la santé, l'emploi, et la simple santé physique, on arriverait beaucoup plus à réduire les méfaits au niveau de l'individu et de la société. Sur le plan des stratégies de réduction des méfaits, il ne faut pas se limiter à la toxicomanie, il faut considérer d'autres facteurs.

À  +-(1000)  

+-

    Mme Cathy Wood: J'ajouterais un mot sur la question sanitaire. La réduction des méfaits vise également à prévenir la transmission de maladies contagieuses et du VIH. C'est un vaste problème, du point de vue des lieux d'injection sûrs. L'exposition au VIH et à l'hépatite est un problème majeur dans le cas des femmes enceintes.

    Un autre facteur à considérer s'agissant de réduction des méfaits, qu'il s'agisse de lieux d'injection sûrs, d'entretien à la méthadone ou de tout ce que vous voudrez, c'est que la médecine en toxicomanie a énormément évolué. L'approche axée sur l'abstinence découle de la méthode des 12 étapes de l'AA, un mouvement parti de la base, et pendant des années on a beaucoup hésité à contester ce qui donnait des résultats depuis longtemps. Aujourd'hui, nous avons la médecine spécialisée en toxicomanie, des programmes spécialisés plus larges, des professionnels offrant des services spécifiques pour certaines dépendances et des organismes provinciaux offrant une gamme complète de services. Cela nous a permis d'opter pour des méthodes autres que le programme intensif à 12 étapes, des méthodes qui sont efficaces.

    Pour moi, l'abstinence ne passe pas par 12 étapes. Pour moi, l'abstinence est une question de bien-être et de santé, et c'est réellement vers quoi nous tendons, soit donner la possibilité à une femme de vivre mieux et en meilleure santé. Voilà le but de l'abstinence chez Aventa. Nous arrivons finalement au point où nous pouvons prôner une méthode plus ouvertement à travers l'Amérique du Nord, et ne plus être limités au mode historique du traitement de la dépendance et annoncer qu'il existe d'autres méthodes efficaces de traiter le problème.

+-

    La présidente: Madame Miller.

+-

    Mme Julie-Ann Miller: J'aimerais ajouter que, selon la perspective sociale, il faut adopter une approche plus holistique, c'est certain. Je n'ai pas d'expérience en matière de traitement de la toxicomanie, mais je sais, d'après les autres domaines dans lesquels j'ai travaillé, que parfois il ne suffit pas de régler un seul problème. Il peut y avoir beaucoup d'autres facteurs qui comptent autant ou plus si l'on vise l'efficacité. Je suis sûre que nos spécialistes de l'AADAC pourraient défendre ce point de vue beaucoup mieux que moi, mais je pense qu'il faut adopter une approche plus holistique qui tienne compte également de ces autres facteurs.

+-

    La présidente: Monsieur LeBlanc.

+-

    M. Dominic LeBlanc: J'aimerais avoir votre avis sur deux questions. Certains préconisent un traitement obligatoire, par exemple, dans le cas de toxicomanes endurcis ayant commis une série de délits criminels en raison de leur dépendance. Dans certaines villes, le tribunal offre à la personne condamnée pour un acte criminel le choix entre l'incarcération dans un pénitencier et la participation à un programme thérapeutique. Je sais que c'est un problème complexe, vu les listes d'attente pour être admis en traitement. Selon votre expérience, cela peut-il être efficace? Possède-t-ton des études ou des recherches prouvant que l'approche coercitive peut être un bon outil pour le système judiciaire--et j'ai conscience que la diversité des personnes ayant besoin de traitement est probablement aussi grande que celle des établissements qui l'offrent? Pensez-vous que c'est une méthode prometteuse?

    La deuxième question, que certains d'entre vous avez évoquée, est la dichotomie rurale-urbaine. J'ai dit tout à l'heure que nous sommes un grand pays, et les problèmes diffèrent selon la région. La dynamique dans une localité rurale à 50 kilomètres de distance peut être très différente de celle d'un grand centre urbain. Du point de vue de l'éducation et du traitement--et vous tous avez une vaste expérience de ces domaines--quelles sont les difficultés particulières s'agissant de toucher les petites localités rurales? Ai-je raison de penser que les problèmes y sont différents de ceux rencontrés dans un grand centre urbain? J'ai l'impression que bien souvent les gens qui se droguent dans des petites localités rurales sont plus difficiles à joindre ou n'ont pas un accès facile aux services. La plupart n'ont pas les moyens de prendre l'avion ou même le car pour se rendre dans une grande ville, séjourner à l'hôtel et rencontrer un spécialiste, et je songe par exemple à quelqu'un qui vivrait dans un petit village de pêche du nord de Terre-Neuve. J'aimerais avoir votre avis sur les méthodes à utiliser dans les petites localités rurales.

À  +-(1005)  

+-

    Mme Kathy Landry: J'aimerais parler du traitement imposé. Nous avons ce que nous appelons des clients obligés, et je dois dire que, sur le plan thérapeutique, ils sont les plus difficiles. Les programmes de la clinique pour entreprises sont quelque peu coercitifs, mais ces clients viennent parce que leur employeur le leur demande et que leur emploi en dépend. Ce petit effet de levier auprès du client est bénéfique. Je crois que cette clinique a un taux de réussite d'un peu plus de 70 p. 100, défini comme l'abstention pendant un an. Nous sommes en train de mener une étude de résultats sur trois ans des programmes de la clinique, mais les premières indications sont que ce petit moyen de pression, que nous utilisons avec nos clients pour les amener à changer et à guérir, donne des résultats.

    La situation est toute autre s'agissant des clients obligés, en ce sens que tout autre client à qui l'on donne le choix entre une thérapie résidentielle et l'incarcération va évidemment choisir la première. C'est parce que nous sommes beaucoup plus gentils, ai-je entendu dire. Il y a un certain intérêt à offrir un traitement contraignant, mais il faudrait des recherches plus poussées pour savoir quelle méthode marche.

+-

    Nous prenons les clients tels qu'ils arrivent et lorsqu'ils nous sont envoyés par le système judiciaire, nous laissons de côté les antécédents criminels et leur demandons ce que nous pouvons faire pour que la cure réussisse, pour qu'il en retire un profit. Certains clients sont réceptifs à cette attitude, d'autres non. Il y a toutes sortes de comportements sous-jacents.

    Pour ce qui est de votre deuxième question, la population albertaine est concentrée à hauteur d'environ 80 p. 100 dans les centres urbains, les 20 p. 100 étant très dispersés. Il est difficile de fournir les services à ces derniers. Je pense que la technologie nous facilite la dissémination de l'information dans les campagnes, mais c'est néanmoins un défi. Le système de réseau que nous avons mis en place à l'AADAC, qui fait que nous avons des établissements situés stratégiquement dans les grands et petits centres, et le réseau des bureaux régionaux sont extrêmement efficients à cet égard, particulièrement s'agissant de fournir les services aux petites localités rurales. C'est un défi. Nous sommes limités par le manque de ressources mais je pense que le nombre de clients que nous recevons dans nos services, tant dans le volet traitement que le volet prévention, est un bon indicateur de notre succès.

    Au niveau des clients obligés, nous sommes en rapport avec le ministère de la Justice depuis de nombreuses années afin qu'il fournisse des lits pour le traitement à demeure des femmes sortants de prison. Nous recevons donc des clients obligés depuis très longtemps. Nous recevons des clients également du système d'aide à l'enfance, lorsque des enfants sont placés en garde temporaire. La mère est obligée de suivre un traitement si elle veut récupérer ses enfants. Mais beaucoup sont placés également en tutelle permanente. Et on nous envoie des clients par le biais du mécanisme de probation et d'autres encore. Je pense qu'il est très important de collaborer avec la justice pour remédier aux problèmes qui se posent tels que le surpeuplement des prisons et le nombre de détenus incarcérés pour des délits touchant la drogue et l'alcool. La réalité est que, lorsqu'on considère la pathologie des types de personnes incarcérées, la dépendance figure au premier rang des problèmes. Ainsi, le traitement obligé peut donner de bons résultats chez certains, et nous l'avons constaté.

    J'ai participé à un projet pilote aux États-Unis consistant en un programme de traitement carcéral de six semaines et d'un suivi d'un an. Il n' a pas enregistré des taux de réussite meilleurs que les programmes de traitement obligé hors prison. Nous avons effectué quelques recherches comparatives à ce sujet au milieu des années 80. Ces programmes peuvent donner de bons résultats mais ils exigent souvent davantage de ressources thérapeutiques car les intéressés souffrent de toutes sortes de problèmes.

À  +-(1010)  

+-

    M. Dominic LeBlanc: Je me souviens avoir lu dans la presse, il y a quelques années--c'était peut-être au Manitoba--que certaines femmes incarcérées s'étaient vu imposer un programme de traitement parce qu'elles étaient enceintes et qu'il y avait un risque de séquelles pour le foetus. Je sais que toute la question des droits juridiques d'un enfant en gestation est un problème beaucoup plus complexe, mais en laissant de côté cet aspect, y a-t-il un rôle, selon votre expérience, à l'égard des femmes enceintes toxicomanes pour le système judiciaire, ou pour une forme de traitement imposé, au moins pendant la durée de la grossesse?

+-

    Mme Cathy Wood: Idéalement, le système judiciaire devrait rester en dehors de la thérapie, en ce sens qu'il faut rechercher les raisons pour lesquelles les femmes commettent des délits et usent de substances en général. Mon sentiment est qu'il est regrettable, de façon générale, d'être pénalisé ou puni pour cela.

    Pour ce qui est de la grossesse, nous ne sommes certainement pas en faveur de l'incarcération générale des femmes enceintes.

+-

    M. Dominic LeBlanc: Non, pas toutes les femmes enceintes, uniquement celles qui se droguent.

+-

    Mme Cathy Wood: Oui, qui usent de substances.

+-

    M. Dominic LeBlanc: Je ne préconisais pas d'incarcérer toutes les femmes enceintes.

+-

    Mme Cathy Wood: Dans mon esprit, il était entendu que nous parlions de femmes enceintes sous dépendance. Il faudrait plutôt privilégier la prévention précoce, afin de ne pas arriver à ce stade. Beaucoup de femmes vous diront que leur grossesse constitue une motivation majeure d'arrêter la drogue. Mais dès que l'enfant est né, elles recommencent. C'est une mécanique intéressante. Elles ne veulent pas faire de mal à l'enfant qu'elles portent, mais elles vont se faire du mal à elles-mêmes. La majorité des femmes sont des délinquantes non violentes. J'aimerais mieux rechercher d'autres solutions pour combattre leur dépendance que le système judiciaire.

    Pour ce qui est de la dichotomie rurale-urbaine, je n'ai pas mentionné que nous recevons chez Aventa ,en moyenne, 15 femmes par an venant du Territoires du Nord-Ouest. La raison est que nous sommes le seul service spécialisé pour les femmes disponible et leur gouvernement les envoie donc à Calgary. Ce n'est pas idéal, car deux problèmes se posent. Elles ont de la difficulté à quitter leur réserve, principalement à cause des enfants, et cela les empêche souvent de venir à Calgary, qui est très éloigné. Deuxièmement, elles retournent ensuite dans le même environnement. Notre traitement n'a donc que peu d'effet, car il n'y a pas moyen de nouer une relation à long terme avec elles et de continuer à les soutenir. Elles retournent dans leur réserve, où elles n'ont ni ressources ni soutien.

    Il y a très peu de possibilités pour les femmes de sortir du milieu de violence qu'elles connaissent dans la réserve, pour trouver les services de soutien requis, être au contact d'autres femmes, car elles sont extrêmement isolées. Donc, l'isolement rural, du point de vue des femmes, est un gros problème. Nous faisons notre possible pour les garder au moins 90 jours, mais c'est la durée maximale du séjour financé par le gouvernement.

À  +-(1015)  

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Miller.

+-

    Mme Julie-Ann Miller: J'aimerais dire un mot sur le traitement imposé par opposition à l'incarcération. En tant que comportementaliste, je suis toujours en faveur d'une incitation positive, mais j'admets que parfois les toxicomanes présentent des troubles mentaux qui les empêchent de réellement faire le point de leur situation et choisir entre les options. Donc, parfois, il est réellement difficile de savoir quelle est la meilleure solution. Il serait très précieux qu'un médiateur puisse examiner le dossier et recommander un choix.

    Pour ce qui est des écarts entre ville et campagne, on relève entre les deux de grandes différences culturelles. J'ai vécu dans les deux milieux, grandi dans les deux et, pour ce qui est de la consommation de drogue, je sais qu'il y a une différence d'attitude. Et je conviens que la technologie offre un très bon outil à l'appui de l'éducation et de la prévention, et l'intervention précoce est certainement la clé en milieu rural. Il faut donc aller dans ce sens.

+-

    La présidente: Monsieur Faulkner, souhaitez-vous répondre?

+-

    M. Howard Faulkner: J'ajouterais, pour ce qui est du traitement imposé par un tribunal, que la thérapie est quelque chose d'individuel. Les gens arrivent chez nous par de nombreux chemins différents. Certains clients viennent de leur propre initiative, mais sans le vouloir réellement et en étant terrifiés. D'autres clients nous sont envoyés par la justice pénale et c'est soit aller en prison soit suivre un traitement. Ce peut être la motivation pour une thérapie. Mais tous nos services sont facultatifs et le client doit commencer sur cette base. Ces clients tendent à être plus difficiles à manier, mais s'ils peuvent surmonter cette barrière initiale et y mettre du leur, ils peuvent très bien réussir. Tout dépend de la personne: elle doit être désireuse de changer. Bien entendu, la rechute est toujours possible. Pour de nombreux clients, plusieurs séjours thérapeutiques sont nécessaires.

    Pour ce qui est du problème rural, je précise que nous nous sommes efforcés de placer stratégiquement nos agents à travers la province, de telle façon que personne ne soit à plus d'une heure de route d'une clinique de consultation externe. Nous avons 26 bureaux régionaux, lesquels se composent généralement de deux conseillers et d'un employé de soutien administratif. Ils offrent des consultations externes, de même que des services d'éducation communautaire et de prévention. Nous avons 17 offices régionaux de la santé et nous avons maintenant au moins un bureau régional dans chacun de ces districts. Mais je suis d'accord, il est évident que les problèmes sont différents dans les villes et les campagnes.

À  +-(1020)  

+-

    La présidente: Merci. Merci, monsieur LeBlanc.

    J'ai quelques questions pour vous, monsieur Faulkner, concernant l'AADAC. Je vois dans votre plan d'activité, à la première page, que vous commencez réellement à dépenser beaucoup plus, en pourcentage, pour la prévention que le traitement. Il semble qu'il y ait là une inversion de tendance remarquable. Est-ce dû à la réalisation du fait qu'il faut fermer le robinet si l'on veut jamais régler le problème?

+-

    M. Howard Faulkner: Certainement, la prévention est prioritaire pour nous, particulièrement auprès des jeunes. Mais dans le même temps, je suis sûr que vous l'avez entendu à maintes et maintes reprises, nous avons le client qui frappe à la porte et demande de l'aide. Donc, en période de réduction budgétaire, et lorsque nous devons prendre des décisions, nous avons quand même le client devant la porte. Aussi, nous avons dû réduire quelque peu nos services de prévention et d'information. Mais c'est néanmoins là une grande priorité pour nous. Les augmentations que vous voyez sont liées à l'initiative antitabac que nous avons lancée cette année, la stratégie albertaine antitabac. Neuf millions de dollars ont été ajoutés à notre budget cette année, mais le surcroît est entièrement destiné à cette campagne. Vous voyez donc l'évolution des chiffres, et la prévention est un élément clé de cela.

+-

    La présidente: Est-ce que cette augmentation majeure des crédits pour la prévention et l'information--et peut-être même le traitement, en fait--serait financée spécifiquement avec les gains du jeu? La province a bénéficié d'énormes augmentations de revenu provenant du jeu.

+-

    M. Howard Faulkner: Nos programmes sont tous intégrés. Je pense qu'environ 4,2 millions de dollars sont consacrés au jeu, si vous totalisez tous les services dans la province. Nous avons accepté le mandat pour le jeu compulsif en 1994 et nous avons formé à cet effet un certain nombre d'employés. Nous les avons ensuite affectés à des postes, puis formé tout le reste du personnel, si bien que tous nos conseillers connaissent la problématique du jeu compulsif et peuvent intervenir dans ce domaine. Il s'est avéré que les clients passionnés de jeu se sont présentés en plus grand nombre dans les centres urbains.

+-

    La présidente: Vous avez pour objectif d'accueillir 95 p. 100 des demandeurs de traitement. Est-ce exact? L'objectif est-il tenu? Vous avez 35 000 admissions pour traitement par an. De combien de lits disposez-vous?

+-

    M. Howard Faulkner: Environ 750 pour toute la province. C'est là le chiffre pour tous les services, sans ventilation entre traitement interne et ambulatoire. Ce sont là les objectifs de satisfaction de la clientèle, d'accès aux services et d'efficacité que nous nous sommes fixés. Nous faisons un suivi des clients après leur départ et ce sont là les chiffres recensés. Mais, oui, nous remplissons nos objectifs.

+-

    La présidente: D'accord, mais Mme Wood a indiqué qu'il y a une liste d'attente de trois à quatre mois. Peut-être uniquement pour le programme féminin, mais est-ce un problème ailleurs dans la province que les gens qui ont besoin de traitement ne puissent l'obtenir?

+-

    M. Howard Faulkner: La demande de nos services est certainement importante. Les listes d'attente varient, selon le lieu, l'époque de l'année ainsi que le service. Ce dont je fais état là, c'est les foyers en hiver. À Calgary et Edmonton, il y a une longue liste d'attente rien que pour l'accès aux foyers. Voilà donc un volet. Les chiffres que nous indiquons dans notre plan d'activité sont pour l'ensemble des services et représentent donc une moyenne.

À  +-(1025)  

+-

    La présidente: Madame Landry, combien de temps doivent-ils attendre pour être admis dans vos programmes résidentiels?

+-

    Mme Kathy Landry: L'admission à nos programmes résidentiels est très rapide, mais la clinique est une exception. L'attente est de deux jours, je dirais, à partir de l'aiguillage. Pour le programme de traitement résidentiel dans notre centre même, l'attente est de trois à quatre semaines. La demande est forte pour le programme destiné aux femmes, car il est spécialisé. Mais le traitement ne se limite pas aux services en résidence. Les clients ont également accès à des soins ambulatoires.

+-

    La présidente: Ils bénéficient donc d'une certaine intervention.

+-

    Mme Kathy Landry: Absolument. Le traitement n'est pas limité aux lits résidentiels. Certains clients pensent que c'est le seul traitement possible, mais ceux qui utilisent les services ambulatoires, avec counselling individuel, réussissent également très bien.

+-

    M. Howard Faulkner: Nous essayons également de faire entrer les clients immédiatement dans des groupes d'entraide. Ils vont peut-être devoir attendre un mois un lit, mais nous essayons de les mettre en rapport immédiatement avec AA ou NA ou, comme Cathy l'a mentionné, de leur offrir des consultations externes.

+-

    La présidente: Vous tous avez plus ou moins indiqué que la plupart des gens qui aboutissent en centre de traitement disent que leur premier problème était avec l'alcool, et non le cannabis. L'alcool joue un rôle beaucoup plus important, mais l'abus de médicaments, sur ordonnance ou non, l'auto-médication, est d'envergure assez phénoménale à travers tout le pays. Vous avez indiqué que vous disposez de nouveaux crédits réservés à la prévention du tabagisme, mais ne faudrait-il pas faire un effort pour arrêter la compartimentation de ces différents programmes et adopter plutôt une approche comme celle de Mme Miller, consistant à amener les gens à faire de meilleurs choix et à comprendre toutes leurs activités? L'Alberta est comme la plupart des autres provinces, où beaucoup de gens consomment toutes sortes de substances sans vraiment les comprendre. Ici, la consommation d'alcool est certainement plus forte qu'ailleurs. Elle avoisine deux bières par jour par habitant de plus de 15 ans. C'est beaucoup, et ce sont là des substances légales. Et encore, on ne parle là même pas de substances pouvant être combinées à la bière, telles que le Robaxacet, le Tylenol et toutes sortes d'autres choses.

+-

    M. Howard Faulkner: Nos services sont intégrés. J'ai mentionné la stratégie antitabac de l'Alberta, mise sur pied par un comité interministériel regroupant les ministères de la Justice, des Ressources humaines et de l'Emploi, et de la Santé. Nous avons présidé ce comité et présenté un plan au gouvernement. Une fois approuvé, nous avons été chargé de la coordination, mais tous ces autres ministères continuent à jouer un rôle car la dépendance recoupe beaucoup de domaines différents.

+-

    La présidente: Mais le message sera-t-il uniquement de ne pas fumer, ou bien sera-t-il de faire de meilleurs choix?

+-

    M. Howard Faulkner: Il incitera certainement à faire des choix plus avisés. Dans le cas du tabagisme, nous avons multiplié nos initiatives auprès de la jeunesse l'an dernier, si bien que nous allons dans les écoles, mais nous n'y parlerons pas seulement de tabac. Nous parlerons de toutes les drogues pour amener les jeunes à faire de meilleurs choix, les doter de ces facteurs de protection et aptitudes.

    Au niveau plus général, nous avons également mis en train en Alberta une initiative à l'échelle du gouvernement, du nom de «health sustainability initiative». Il s'agit de passer en revue tous les programmes de prévention et de promotion de tous les ministères. Nous décidons alors quels éléments peuvent être mis en commun, de telle façon que lorsque nous présentons un message, relatif à la santé, par exemple, nous en soyons tous partie prenante, afin justement de démanteler ces compartiments. Je pense que nous avons réalisé de bons progrès ces dernières années à cet égard mais il reste encore beaucoup à faire. C'est important.

À  +-(1030)  

+-

    La présidente: Madame Williams, est-ce qu'Alberta Learning se compose de spécialistes de l'élaboration de programmes d'enseignement?

+-

    Mme Debra Williams: Oui, pour le ministère de l'Éducation. Nous élaborons les programmes.

+-

    La présidente: Vous avez indiqué que vous dispensez une éducation sur l'abus de substances et les choix depuis le jardin d'enfants jusqu'à la neuvième année, mais lorsque nous parlons aux jeunes, ils nous disent qu'ils n'ont jamais eu cela. Dans quelle mesure est-ce institutionnalisé? Pouvons-nous avoir une copie de ce que vous enseignez aux élèves? Ce serait utile.

+-

    Mme Debra Williams: Oui, vous pouvez. J'en ai une copie ici. Je peux vous la laisser, et vous trouverez cela également sur notre site Internet.

    Encore une fois, c'est l'approche des choix avisés. Par exemple, le programme enseigne à discerner les conséquences néfastes de la consommation et de l'abus de substances, par exemple le syndrome d'alcoolisation foetale, et la conduite en état d'ébriété. Voilà donc les résultats escomptés et cet enseignement doit obligatoirement être dispensé dans les écoles albertaines, de par la loi, si bien que tous les élèves devraient y être exposés. Si vous demandez à un jeune s'il a suivi un tel cours ou non, je ne sais pas dans quelle mesure on peut se fier à sa mémoire. Je suppose que cela dépend de l'âge.

+-

    La présidente: Existe-t-il un mécanisme d'évaluation pour vérifier l'efficacité de ces cours dispensés du jardin d'enfants à la neuvième année?

+-

    Mme Debra Williams: Nous avons un programme de test scolaire provincial, qui couvre les matières fondamentales, mais non le programme d'enseignement en santé.

+-

    La présidente: Mais même avec l'évaluation du programme PARTY, c'est bien joli que les jeunes affirment qu'ils feront de meilleurs choix, mais il faut encore savoir s'ils le font vraiment.

    Je pense que la problématique comporte plusieurs facettes. J'entends les jeunes dire qu'ils ne boivent pas avant de prendre le volant par peur de se faire attraper. Dans ma province, cela s'appelle le programme RIDE--je ne me souviens plus de son nom ici--qui permet à un agent de police de vous arrêter à tout moment pour un alcootest. Donc, les jeunes ne veulent pas courir ce risque. Mais il s'agit surtout, comme vous l'avez mentionné, madame Miller, de comprendre que l'on pourrait causer un accident, qu'il ne faut pas porter les lunettes à vision floue et perdre ses facultés. C'est pour cette raison qu'il ne faut pas boire ou se droguer avant de conduire. Il semble que les jeunes, surtout dans la vingtaine, optent pour la marihuana parce que l'agent de police ne peut la détecter, si bien que ce comportement restera impuni. Ils vont à leur soirée, s'amusent et oublient les conséquences.

    Y a-t-il une évaluation du programme à ce niveau?

+-

    Mme Debra Williams: Comme Howard l'a mentionné, l'AADAC intervient également dans les écoles. Je sais, Howard, que vous dirigez un nouveau programme pilote dans les écoles en ce moment, qui comporte un volet évaluation.

+-

    M. Howard Faulkner: Ce programme mérite d'être signalé. En fait, nous mettons au point le contenu pédagogique avec Alberta Learning. Nos conseillers font le tour des écoles et dispensent cet enseignement, mais le matériel pédagogique sera également présenté de telle façon que les enseignants pourront assurer les cours aussi. Nous ferons également appel à l'Internet comme outil de prestation du service.

    J'aimerais également revenir sur votre remarque lorsque vous disiez que les jeunes ne veulent pas de l'alcool au volant par crainte d'être pris. Ils commencent à réaliser que ces décisions ont des conséquences, et les conséquences judiciaires n'en sont qu'un type. Il y a également des conséquences pour la santé. Je pense que c'est une expérience pédagogique, certainement pour les jeunes. Leur développement est jalonné de points de transition, si bien qu'il importe de leur donner l'occasion d'acquérir ces aptitudes. Je pense que c'est ce que font nos programmes.

    L'évaluation que vous avez mentionnée est un élément clé de tout cela. Mais lorsque nous parlons de résultats et d'indicateurs, il faudra attendre certains résultats bien plus que deux ans. Dans le cadre de cette initiative, sur la viabilité des services de santé que j'ai mentionnée, nous commençons à définir quels indicateurs décennaux il faudrait définir. La question est très complexe car la dépendance n'est qu'un élément parmi d'autres. Nous ne réclamerons jamais tout le crédit car nous sommes associés à d'autres partenaires, mais l'élément clé est qu'il faut examiner les indicateurs à long terme, sur dix ans, pour réellement savoir si l'on fait une différence.

À  +-(1035)  

+-

    La présidente: Est-ce que dans le cadre de cet effort vous visez une réduction de la consommation de bière par rapport aux 512 bouteilles que boit chaque Albertain?

+-

    M. Howard Faulkner: Ce serait merveilleux, n'est-ce pas?

+-

    La présidente: Sauf si vous êtes brasseur, auquel cas vous êtes ravi de la situation actuelle.

    Madame Williams, vous avez chiffré le coût du programme DARE à 237 $ par élève. Existe-t-il des chiffres comparables pour le programme PARTY? Quels sont-ils?

+-

    Mme Julie-Ann Miller: C'est variable. Nous faisons appel au bénévolat. Je suis financée par un organisme sans but lucratif et mon salaire est couvert. En outre, plusieurs professionnels font don de leur temps et il y a aussi des bénévoles de la base. Donc, le coût d'exécution du programme tombe à environ 35 $ par élève. La différence entre les programmes DARE et PARTY, est que le premier s'étend sur plusieurs semaines alors que le nôtre est un programme d'une journée. Il y a donc cette différence.

    J'aimerais parler du contenu du programme scolaire, car il est bon et sous-tend ce que nous faisons nous-mêmes. Mais l'intérêt de notre programme est qu'il est généralement plus expérienciel. Il est dispensé dans les hôpitaux, par des gens en uniforme. C'est le côté marketing social qui frappe les jeunes. Ils reçoivent ces messages dans un programme d'enseignement et de toutes sortes d'autres façons, mais chez nous il est très direct. Nous faisons venir des gens qui ont survécu à des blessures, qui racontent leur vie quotidienne aujourd'hui, l'effet sur leur famille. C'est le caractère frappant des témoignages qui fait la différence. Lorsque les agents de police racontent une intervention sur les lieux d'un accident ou la scène lorsqu'ils doivent annoncer à des parents que leur enfant est mort d'une surdose, ce genre de chose, cela a réellement un impact et c'est un peu différent d'un cours scolaire. J'ai parlé de différents styles de communication. Une bonne part de notre enseignement est fondé sur des témoignages. Nous cherchons à varier ces derniers et nous sommes sûrs de l'efficacité pour cette raison.

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    La présidente: Avez-vous des programmes, ou commence-t-il à y avoir une préoccupation concernant spécifiquement les personnes ayant des comportements à risque qui viennent d'un milieu d'alcoolisme ou de toxicomanie--c'est évidement un facteur causal, mais qui ont souffert de SAF ou d'EAF et qui de ce fait ont besoin d'un type de programme entièrement différent, vu leur façon d'apprendre ou leurs séquelles? Existe-t-il quelque chose de cette sorte dans la province?

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    M. Howard Faulkner: Il y a toute l'initiative concernant le syndrome ou les effets de l'alcoolisation foetale menée de concert avec les services d'aide à l'enfance et, oui, absolument, les victimes éprouvent ces problèmes et sont plus difficiles à soigner.

    Cathy, avez-vous quelque chose à ajouter?

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    Mme Cathy Wood: Nous voyons davantage de femmes adultes en thérapie qui souffrent des séquelles du SAF ou des EAF c'est pourquoi nous recherchons des façons de leur présenter de manière plus abordable pour elles le contenu pédagogique. Elles nous arrivent certainement avec quelques handicaps cognitifs et comportementaux et la psychothérapie et la thérapie de groupe traditionnelles ne donnent pas nécessairement de bons résultats dans leur cas et nous cherchons à adapter le modèle traditionnel. Nous n'effectuons pas nous-mêmes des tests poussés, mais nous pouvons prendre en considération les déficits cognitifs et essayer de faire les choses de manière un peu différente, côté thérapie, afin d'obtenir de meilleurs résultats dans ces cas particuliers.

    Je ne connais pas de programme thérapeutique spécialement conçu pour les adultes victimes de SAF ou d'EAF. Et vous, Howard?

À  +-(1040)  

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    M. Howard Faulkner: Il y a l'initiative sur le développement de la petite enfance qui vient de démarrer, avec un financement fédéral, en fait.

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    La présidente: L'adulte toxicomane pourrait ne pas avoir sa place chez Aventa, à cause des troubles d'apprentissage et de la trop grande difficulté à adapter le programme. Peut-être faudrait-il un centre spécialisé ou un programme spécifique destiné aux personnes souffrant de SAF ou d'EAF. En est-il question?

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    M. Howard Faulkner: Il n'y a pas de programme spécialisé destiné spécifiquement aux adultes atteints de SAF.

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    Mme Kathy Landry: Nos interventions sont fondées sur une évaluation individuelle des clients, du point de vue de leur dépendance et de leur capacité de fonctionnement, disons. Ce n'est pas une évaluation aussi approfondie qu'un examen psychiatrique des fonctions mentales et cette sorte de choses. Mais nous choisissons alors l'approche thérapeutique la mieux adaptée à ce client. Les clients souffrant de SAF sont moins susceptibles de réussir dans une thérapie de groupe. Cependant, un traitement hautement structuré et individualisé, une formation en dynamique de la vie, ce genre de choses, feront partie d'un programme individualisé taillé sur mesure pour ce client. Nous n'avons pas de programme résidentiel pour clients adultes touchés au stade foetal.

    C'est le même problème que nous rencontrons avec nos clients présentant des troubles concomitants. Nous voyons un nombre considérable de personnes souffrant de troubles mentaux en sus de leur toxicomanie. Mais du fait que nous effectuons des évaluations préalables, nous pouvons déceler certaines des subtilités de quelques maladies mentales et offrir une approche thérapeutique à cette personne. Grâce à notre réseau et à nos relations, nous pouvons nous mettre en rapport avec d'autres organismes et ministères.

    L'une des grandes difficultés est d'obtenir pour ce client les autres types de services dont ils ont besoin. Nous souffrons de ressources limitées, mais les autres organismes manquent autant de moyens que nous, voire plus. Chez nous, à Grande Prairie, si nous voulons obtenir une évaluation de santé mentale, psychiatrique, l'attente est de huit semaines, ce qui est énorme, à moins que le client ne soit en crise, psychotique ou hautement suicidaire.

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    La présidente: Et chaque jour qui passe, vous courez le risque qu'il s'enfuie.

    Madame Wood, vous avez mentionné que des clients vous arrivent sous traitement à la méthadone. J'imagine qu'ils viennent d'Edmonton, car il n'y a pas de programme d'entretien à la méthadone à Calgary. Est-ce que l'on envisage à l'AADAC de mettre en place davantage de programmes de traitement à la méthadone?

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    M. Howard Faulkner: Absolument. Il y a quelques années, le consortium sur l'usage non prescrit de seringues a rédigé un rapport qui recommandait d'étendre le programme de méthadone à diverses régions de la province. Il n'existe actuellement qu'à Edmonton. Les gens venant d'ailleurs peuvent y accéder, mais cela signifie qu'ils doivent déménager et leur charge de travail augmente. Je sais que Beth Lipsett en parlera dans le prochain panel. Nous avons conscience de la nécessité d'élargir le programme. Notre première priorité sera Calgary, encore une fois à cause de sa population importante, mais il y aura aussi Red Deer, Lethbridge et Grande Prairie. Le manque de ressources est un problème mais nous y travaillons. L'élargissement est nécessaire.

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    La présidente: Le comité continuera à entendre des témoins pendant encore quelques semaines et puis formulera ses recommandations à la Chambre des communes en novembre 2002. Donc, si vous apprenez quelque chose de nouveau, si une baguette magique capable de régler les problèmes fait son apparition, nous aimerions en être informés. Carol Chafe sera la meilleure personne à contacter car elle pourra distribuer la documentation à tous les membres dans les deux langues officielles. S'il est une personne dont vous pensez que nous devrions l'inviter ou un programme avec lequel nous devrions nous familiariser, faites-nous le savoir. Vous savez quels aspects nous intéressent. En outre, les comptes rendus de toutes les audiences peuvent être consultés sur le site Internet, si cela vous intéresse. Et si vous tombez là sur une personne que vous jugez folle et que nous ne devrions pas écouter, ou un aspect sur lequel nous devrions nous pencher, faites-nous-le savoir également.

    Nous apprécions réellement l'effort et le temps que vous avez consacré à venir nous rencontrer et à rédiger une présentation, ainsi que tout le travail que vous faites et le dévouement que vous mettez à la tâche. Nous vous souhaitons bonne chance, dans l'intérêt des Albertains et de tous les Canadiens. Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui.

    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes.

À  +-(1041)  


À  +-(1050)  

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    La présidente: Nous allons reprendre la séance.

    Notre prochain panel sera consacré à la réduction des méfaits, ce qui est excellent, car il en a souvent été question.

    Pour ceux d'entre vous qui n'étiez pas dans la salle lorsque j'ai indiqué cela précédemment, nous sommes le Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments, formé en mai dernier pour examiner les facteurs sous-jacents. Nous avons également été saisis en avril dernier de l'objet du projet de loi C-344, qui vise à dépénaliser la possession de petites quantités de marihuana.

    Nos témoins sont Marliss Taylor, directrice de Streetworks, Kate Gunn, directrice par intérim de HIV Edmonton et Deborah Foster qui est gestionnaire de programme. Nous avons en outre Faye Dewar, de Boyle Street Co-op et Beth Lipsett, directrice des service de counselling et de prévention aux adultes, de l'AADAC--nous avons un représentant de l'AADAC à chaque panel.

    Je vous présente les personnes ici. Chantal Collin et Marilyn Pilon sont nos chargés de recherche, Eugene est notre greffier suppléant et Dominic LeBlanc est un collègue député, du Nouveau-Brunswick. Je suis Paddy Torsney, et je viens de la banlieue de Toronto. Le comité compte des membres des cinq partis, mais tous ne sont pas présents aujourd'hui. Nous sommes reconnaissants à nos collègues de l'opposition de nous avoir permis de siéger sans quorum, car nous devrions autrement être trois au minimum, car nous avions déjà dû annuler une réunion antérieure avec vous. Nous avons eu de nouveau un petit problème d'organisation hier, mais nous avons pu siéger néanmoins.

    Nous allons donc commencer avec Marliss Taylor, de Streetworks.

À  +-(1055)  

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    Mme Marliss Taylor (gestionnaire, Streetworks): Mon plan était de vous donner un aperçu général de ce que nous faisons chez Streetworks, des personnes avec lesquelles nous travaillons, et d'aborder certains des problèmes que nous constatons.

    Streetworks est le programme de réduction des méfaits ici dans la ville et qui s'occupe du programme d'échange de seringues. Ce programme existe depuis environ 1989. Il est géré par un groupe d'agences que l'on appelle le conseil. Nous n'appartenons en vérité à personne. Nous sommes un programme sans but lucratif. Notre financement nous vient de l'Alberta Community Council on HIV, un organe provincial, et tous les programmes d'échange de seringues dans la province sont financés par cet organisme. Il y a un gâteau et c'est à nous de décider du partage que nous en faisons. Voilà en gros ce qui se passe.

    Notre programme est doté de cinq infirmières et de cinq travailleurs des services d'approche. Nous avons également la chance d'avoir un travailleur de soutien administratif à temps partiel, un poste de recherchiste, ainsi qu'un médecin, le Dr Trish Murphy, qui est rattachée à notre programme. Je pense que cela nous distingue un petit peu de nombre d'autres programmes qui existent ailleurs. Malheureusement, ce n'est qu'un projet pilote, alors nous ne savons pas encore si nous allons garder le Dr Murphy au-delà du mois de juin. Notre personnel a en fait été doublé il y a un an et demi. Le financement y correspondant va être épuisé à la fin de l'année en cours et nous reviendrons peut-être donc à 4,8 postes en tout.

    Nous avons six centres de jour où les gens peuvent aller pour recevoir aide, soutien, échange de seringues, services infirmiers--mais les services infirmiers ne sont pas disponibles à chacun de ces endroits. Nous avons par ailleurs une petite fourgonnette qui fait sa tournée le soir. Nous travaillons avec les utilisateurs de drogues injectables et les travailleurs du sexe, et c'est sur eux que nous concentrons nos efforts. Nous nous concentrons sur une zone qui fait 20 pâtés de maisons par 30, car c'est là que nous trouvons les populations les plus vulnérables.

    Notre programme lui-même comporte plusieurs éléments. Il y a les services infirmiers. Il y a l'éducation en matière de santé. Il y a un programme d'affaires, dans le cadre duquel nous travaillons avec des propriétaires de station-service, de pharmacies, et autres, qui autorisent les gens à aller s'injecter dans leurs toilettes, par exemple. Nous essayons d'aider le personnel de ces commerces à rester en sécurité et en santé.

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    Nous avons d'autre part un programme de co-patrouille. Il y a en effet un certain nombre de représentants d'agences qui nous accompagnent dans notre fourgonnette lors de nos tournées nocturnes, ce qui leur donne l'occasion d'offrir des services d'action sociale en dehors de leurs heures de travail habituelles.

    Nous faisons par ailleurs un grand nombre de renvois. Nous nous occupons de distribuer les différents éléments relevant du programme d'échange de seringues--seringues, condoms, gelée lubrifiante, tourniquets, eau, tout ce qu'il vous faut pour favoriser l'injection en sécurité et le travail du sexe à risques réduits. Nous avons un programme de distribution de cartes: certaines agences prendront les seringues souillées et remettront en échange une petite carte. Les gens peuvent alors nous apporter la carte et nous leur donnerons le même nombre de seringues neuves.

    Nous faisons beaucoup de travail d'intervention, aidant les gens à se retrouver parmi les différents systèmes, car notre clientèle n'est pour la plupart pas très sophistiquée s'agissant des structures officielles. Nos clients possèdent de nombreuses compétences, mais ils ne sont pas très doués pour se frayer un chemin à l'intérieur des systèmes.

    Nous faisons par ailleurs beaucoup d'éducation de groupe et siégeons à un certain nombre de comités, ce dans le but d'essayer d'améliorer la situation des piquomânes dans cette ville et dans la province. Nous avons également un programme pour les détenus dans le cadre duquel nous faisons de l'extension ainsi que de la recherche et de l'évaluation.

    Les problèmes que nous voyons régulièrement sont liés à la vie. Pour nous, c'est un problème de pauvreté, de discrimination et de mauvaises conditions de logement. La santé mentale est un trouble concomitant, et son incidence est énorme au sein de la population que nous desservons. Nous voyons beaucoup de gens qui utilisent des drogues multiples. Ce qui différencie la situation ici de celle des plus grosses villes est la quantité de drogues consommées qui ont été délivrées sur ordonnance. Il se consomme dans cette région beaucoup d'opiacés prescrits, par opposition à de l'héroïne. Il y a de l'héroïne dans cette ville, mais pas autant que dans certains autres endroits.

    En ce qui concerne le programme lui-même, l'an dernier, à l'intérieur de notre zone de 20 rues par 30, nous avons échangé environ 836 000 seringues et vu près de 7 500 personnes. En ce qui concerne nos clients, 55,4 p. 100 d'entre eux sont d'origine autochtone, ce qui est, je pense, assez différent de ce que vous constaterez dans certains des autres centres, mais nous nous occupons également du noyau du centre-ville d'Edmonton. Les personnes d'origine autochtone sont les plus marginalisées, et ce sont donc elles que nous visons tout particulièrement. Quarante-deux pour cent sont de race blanche et le ratio hommes-femmes est d'environ 60:40.

    Ce sont la morphine et la cocaïne qui sont les drogues les plus populaires. Pendant une semaine en février dernier, nous avons, en vue d'avoir une bonne vue d'ensemble de la situation, demandé à chaque personne qui se présentait à l'échange de seringues quelle était sa drogue de prédilection. La coke et la morphine se situaient à peu près au même rang, représentant 28 p. 100 de la consommation. L'utilisation de Talwin et de Ritalin, qui semble être davantage un phénomène des Prairies, a fléchi, chose plutôt intéressante, passant à environ 18 p. 100. Étant donné les problèmes de santé liés à la consommation de Talwin et de Ritalin, que l'on appelle dans les prairies un « set », un certain nombre de personnes sont mortes ou sont en train de mourir, et je pense que c'est là l'une des raisons pour lesquelles la cocaïne plaît davantage aux jeunes. Il y a eu un virage quant aux drogues consommées. L'héroïne compte pour 13 p. 100, les autres 11 p. 100, et le speed et la métamphétamine tournent autour de 2 p. 100 ou 3 p. 100, mais cela fluctue. Nous avons constaté qu'il y a des fluctuations à différents moments de l'année et pour diverses raisons.

    L'une des choses auxquelles nous avons participé est le projet NPNU, qui a été mentionné plus tôt. J'ignore si vous êtes au courant de ce projet d'utilisation de seringues sans ordonnance qui a été lancé dans la province. Voici en gros ce qui s'est passé. Il y a environ sept ans, j'ai siégé au comité original, et l'Alberta Health and Wellness, le ministère de la province responsable de la santé, a réuni les responsables des programmes d'échange de seringues de Calgary, d'Edmonton, de Grande Prairie et de Red Deer. C'est ainsi que nous nous sommes rencontrés pendant trois ans. Le ministère nous réunissait, ce qui était fabuleux. Cela nous a permis de faire du réseautage et de relever les tendances. Cette initiative a débouché sur quantité de choses, par exemple pouvoir se rencontrer face à face et renvoyer des clients ailleurs personnellement, au lieu que cela se fasse de façon impersonnelle. Nous avons au cours de cette période de trois ans constaté que nous sommes tous confrontés aux mêmes questions, ou en tout cas, en discutant avec nos groupes clients, nous avons vu que tous les problèmes se rejoignent. Nous savions qu'il nous fallait une réaction plus large et systémique.

Á  +-(1100)  

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    Il faut faire remarquer à son honneur que c'est l'Alberta Health and Wellness qui a élaboré et lancé le projet. Le deuxième projet de trois ans à fait intervenir 35 à 40 agences de partout dans la province et nous nous sommes tous concentrés sur la consommation de drogues injectables, la réduction des méfaits étant le principal élément du programme. Y sont intervenus des organismes gouvernementaux, l'Alberta Medical Association, l'Alberta Pharmaceutical Association, des organismes à but non lucratif et quantité d'autres agences d'intervention sociale. Nous nous sommes répartis en huit groupes de travail différents, qui allaient devenir neuf, pour nous pencher sur des sujets bien précis. Nous avons oeuvré en vue de certains changements susceptibles de bénéficier à toutes les personnes que nous voyons.

    Il y a eu quelques réussites. Cela a été laborieux. J'ai toujours dit que nous n'avons pas dans notre groupe de bons enfants-vedettes d'affiche. Nous avons des drogués par injection intraveineuse et des travailleurs du sexe drogués. Les gens ne sont pas très nombreux à réellement vouloir leur venir en aide. L'attitude générale veut en tout cas que l'on rejette le blâme sur les intéressés. Quoi qu'il en soit, il y a eu certaines réussites et certains défis. Les autorités ont jugé que les résultats étaient suffisamment bons pour que l'on recommence. C'est ainsi qu'est en cours à l'heure actuelle le NPNU III. Il s'agit d'encore un autre projet sur trois ans, faisant cette fois encore intervenir les agences à but non lucratif et gouvernementales.

    Je pense que les programmes de réduction des méfaits, c'est-à-dire les programmes d'échange de seringues, ont toujours un très grand rôle à jouer dans la province. C'est une très bonne chose. Nous pouvons apporter à certaines des réunions la perspective de la rue. Peut-être que le langage utilisé n'est pas toujours ce qu'il y a de plus élégant, mais nous amenons dans tout cela la contribution de la rue.

    Je vais peut-être m'arrêter là. Ai-je réussi à boucler en moins de neuf minutes?

Á  +-(1105)  

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    La présidente: Vous avez réussi à faire votre exposé en huit minutes et 37 secondes. C'est vous qui remportez la palme.

    Nous allons maintenant entendre Kate Gunn, de HIV Edmonton.

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    Mme Kate Gunn (directrice intérimaire, HIV Edmonton): Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité. J'aimerais vous remercier, au nom de HIV Edmonton, de nous donner ainsi l'occasion de vous entretenir un petit peu du travail que nous faisons en matière de réduction des méfaits.

    HIV Edmonton appuie, éduque et défend les personnes vivant avec et touchées par le VIH et des problèmes de santé connexes dans la région métropolitaine d'Edmonton. Notre agence a célébré son 15e anniversaire en 2001. Notre personnel compte plus de 12 travailleurs d'approche et de soutien qui travaillent à temps plein dans un immeuble à bureaux du centre-ville d'Edmonton, juste en marge des vieux quartiers pauvres. Notre travail est informé, dans tous ses aspects en réalité, par la réduction des méfaits.

    En Alberta, l'on a enregistré en l'an 2001 159 nouveaux cas d'infection au VIH. Trois groupes sont ressortis comme étant de nouvelles catégories à haut risque. C'était trois groupes qui n'avaient pas été très représentés dans les premières années de cette épidémie. Un groupe était celui des jeunes, un autre celui des femmes et un autre celui des drogués par injections intraveineuses. Pour l'année en cours, les piquomânes se sont en effet avérés être la catégorie la plus à risque, comptant pour 42 p. 100 des nouveaux cas d'infection au VIH en Alberta. Je pense que cette tendance statistique a été confirmée ailleurs au pays également.

    Chez HIV Edmonton, nous voyons chaque jour de nombreux résidents du centre urbain. Plus de 60 p. 100 de nos clients sont d'origine autochtone, dont de nombreux adolescents et de nombreuses femmes, dont bon nombre consomment des drogues injectables. Notre tâche est de satisfaire les besoins de nos clients et nous nous débrouillons plutôt bien. Nous savons ce qui fonctionne pour nous et pour nos clients. Je peux dire, m'appuyant sur l'expérience de notre agence, que l'approche axée sur la réduction des méfaits est un aspect essentiel de nos services. Il s'agit en vérité là de la pierre angulaire de notre mode de fonctionnement.

    Je suis plutôt nouvelle chez HIV Edmonton et en définitive dans tout ce domaine. Au cours des quelques mois que je viens de passer au sein de l'agence, j'ai appris à comprendre ce qu'est la réduction des méfaits. J'ai beaucoup de respect pour ce principe et pour ce qu'il vise. J'ai appris deux choses importantes. Premièrement, la réduction des méfaits aide à réduire les risques et les conséquences de comportements risqués pour des personnes qui, dans un monde réel, existent à l'intérieur d'un continuum de changement. En d'autres termes, le fait que notre agence ait une approche axée sur la réduction des méfaits nous aide à aider les gens à prendre des mesures en vue de faire de meilleurs choix et de prendre des décisions plus saines dans leur vie au quotidien. Deuxièmement, cela nous donne un cadre qui nous aide à amener les gens à reconnaître la valeur de l'individu. Ce ne sont pas tous nos clients qui seront prêts en même temps à prendre des décisions différentes. Le principe qui nous guide nous amène, en gros, à être inclusifs et non pas exclusifs et à accepter les gens comme ils sont. Chez HIV Edmonton, bien sûr, nous ne détournons jamais de clients qui cherchent de l'aide et qui se présentent chez nous les facultés affaiblies par des drogues ou l'alcool. Par exemple, nous mettons des services à la disposition de ceux qui en ont besoin dans des conditions adaptées à eux. Je crois que cela assure à notre agence une approche axée sur le client. Nous nous concentrons sur les besoins des clients que nous avons pour mission de servir et, dans notre cas, il s'agit des personnes vivant avec le VIH ou touchées par le VIH et par des problèmes de santé connexes.

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    J'aimerais maintenant prendre quelques minutes pour vous donner un petit aperçu de ce que signifie la réduction des méfaits pour notre agence et de la façon dont cette approche est manifestée au jour le jour. J'ai ici six ou sept points à couvrir.

    Tout d'abord, il y a environ deux ans, HIV Edmonton a commencé à élaborer pour notre agence une politique de réduction des méfaits. Le texte de cette politique figure dans la trousse de réduction des méfaits dont je vais vous parler. J'en ai apporté suffisamment pour tous les membres du comité, et cela se trouve à la page 14 du livret de la trousse. Notre première étape a été d'élaborer cette politique.

    Deuxièmement, conformément à l'approche axée sur la réduction des méfaits, nous offrons un accès immédiat, adapté et non critique à nos services. Je pense que l'élément clé ici est que nous ne jugeons pas, nous ne critiquons pas. S'agissant de nos clients qui s'adonnent à des comportements risqués, l'approche axée sur la réduction des méfaits signifie que nous faisons la promotion de pratiques sexuelles et d'utilisation de seringues à risques réduits.

    Si vous vous présentiez aujourd'hui dans notre salle d'attente, vous y trouveriez des dépliants, des pamphlets et autres sur la réduction des méfaits et sur l'utilisation plus sûre de seringues. Notre personnel a cette documentation également. C'est là, donc, une autre façon dont le travail que nous faisons est manifesté. Notre personnel est au courant des services de traitement de la toxicomanie et de la façon dont nos clients peuvent y accéder. Un de nos employés est responsable de deux de nos portefeuilles, les services correctionnels et la toxicomanie, et a une vaste expérience dans ces domaines.

    Marliss vous a parlé de l'échange de seringues de Streetworks, et nous sommes heureux chez HIV Edmonton d'être l'un de ces six sites dans la ville qui offrent des services d'échange de seringues. Nous offrons cela dans nos locaux. Ce qui est à notre sens essentiel dans le cadre de ce service est qu'il offre un point de contact critique pour nos clients qui se présentent, point de contact à partir duquel peuvent se développer, ou pas, selon le cas, ces relations qui sont si importantes--les clients qui se présentent pour échanger des seringues ont l'occasion d'établir le contact avec un conseiller s'ils le désirent. C'est là l'une des plus importantes conséquences de l'offre de ce programme d'échange de seringues dans nos bureaux.

    Notre personnel s'occupe d'un très grand nombre de programmes d'éducation et d'extension. Je sais que vous avez parlé d'éducation plus tôt dans la journée. Nous avons six portefeuilles dans le cadre desquels oeuvrent nos employés. Tous dirigent des séminaires, des ateliers, travaillent avec des agences, répondent à des demandes émanant de groupes et d'organisations communautaires, participent à des foires commerciales et échangent tout simplement des renseignements au sujet de l'approche axée sur la réduction des méfaits.

    Enfin, et c'est peut-être le plus important, l'existence d'une approche de réduction des méfaits signifie que nous devons accepter que nous ne pouvons pas faire tout ce travail seuls, même si nous aimerions parfois essayer de tout prendre sur nous. Une si grosse part de notre travail important est réalisée avec des partenaires communautaires, qui sont tous assis à cette table, d'ailleurs--ils ne sont pas tous là, mais bon nombre d'entre eux sont ici--de partout dans la province. Il est très important, du fait que nombre d'entre nous nous inscrivons dans une approche axée sur la réduction des méfaits, que nous travaillions ensemble.

    Dans les six mois depuis que je suis à l'emploi de HIV Edmonton, j'ai pu oeuvrer à quelques très belles réussites en matière de réduction des méfaits et j'aimerais vous les mentionner.

    Tout d'abord, il y a Edmonton Safe Streets, programme qui a été lancé en mars de cette année. Il s'agit d'un projet communautaire d'installation de boîtes de dépôt de seringues pour protéger les enfants et les autres résidents de la ville contre le risque de blessure par seringue, et il a fallu un ou deux ans pour tout mettre en place. Le projet a été lancé en mars et nous espérons qu'il favorisera la récupération en toute sécurité des seringues souillées. Cela s'est avéré être une expérience très intéressante, avec la participation de quantité d'intervenants des services d'urgence, des services policiers, en fait de la plupart des agences représentées ici autour de cette table, et nous espérons que cela sensibilisera le public à la nécessité de se préoccuper de la récupération des seringues et de la réduction des méfaits.

    Enfin, ces derniers mois, j'ai présidé l'un des groupes de travail du consortium en matière d'utilisation de seringues non obtenues sur ordonnance dont a parlé Marliss. Ce groupe de travail est le groupe de travail de sensibilisation du public. Le consortium est un projet très enthousiasmant. Comme l'a expliqué Marliss, elle en est l'un des membres fondateurs. Aujourd'hui, il y a près de 35 ou 40 groupes de partout dans la province qui y siègent. J'estime que notre travail est réellement intéressant. Cette année, nous avons produit deux documents et lancé deux projets ayant pour objet de sensibiliser le public à ce qu'est la réduction des méfaits.

Á  +-(1110)  

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    La trousse sur la réduction des méfaits est en fait le premier projet lancé par ce groupe de travail, il y a de cela près de deux ans. Je pense que cette trousse a été produite en l'an 2000. Elle avait pour objet de fournir aux personnes oeuvrant dans la réduction des méfaits des renseignements quant à l'élaboration et l'exécution d'une politique en matière de réduction des méfaits. La trousse était réellement destinée aux professionnels oeuvrant dans le domaine, mais ce fut une très importante première étape. Nous sommes ensuite passés du support papier au vidéo et au film, et nous avons un message d'intérêt public de 30 secondes portant sur la réduction des méfaits qui va sortir cet été. Nous avons également un documentaire d'une demi-heure sur la réduction des méfaits, sur la façon dont cela peut sauver des vies, améliorer les conditions de vie des gens et sur l'application qu'en font différentes organisations de partout dans la province. Je pense même que certaines des personnes ici présentes sont interviewées dans le film.

    Y ayant joué un rôle, je pense pouvoir dire que le travail de ce groupe de travail est très important, car je ne pense pas que les Canadiens comprennent généralement ce qu'est la réduction des méfaits. Je pense que ces mots ne signifient pas grand-chose pour la plupart des gens, pour le commun des mortels. Par exemple, dans notre message d'intérêt public de 30 secondes on n'utilise même pas les mots «réduction des méfaits». Les gens verront l'image d'une jeune fille, d'une personne qui rencontre quelqu'un à la fourgonnette ou au centre d'échange de seringues, et une photo de son père. Ce communiqué d'intérêt public de 30 secondes n'est pas très bavard, ne contient pas de jargon, n'inclut même pas ces termes-là. Ce qu'il vise, c'est ouvrir l'esprit des gens au fait que la réduction des méfaits peut aider, qu'il s'agit là d'une importante solution de rechange que les gens doivent commencer à connaître et à comprendre. Et, comme l'a dit Marliss, il y a souvent cet aspect blâme.

    Je pense que c'est là, réellement, l'objet de notre groupe de travail, c'est-à-dire combattre cela en ouvrant l'esprit des gens. En fait, je pense que l'expression «réduction des méfaits» elle-même, étant nouvelle dans tout ce domaine, est très limitante. Il s'agit d'une expression très technique. Ce que j'ai constaté au sein de notre agence en matière de réduction des méfaits correspond en réalité à une attitude et à une approche face aux gens, et j'estime que c'est là un concept beaucoup plus inspirant. L'idée de réduire les méfaits est ce qui est en train d'être utilisé ici, et c'est là le but, mais nous espérons, grâce à notre message d'intérêt public et à notre film, faire passer ce message et l'esprit de ce qu'est la réduction des méfaits, au lieu d'expliquer aux gens les détails, d'utiliser les termes techniques, etc., car tout ce que nous voulons, c'est leur ouvrir un petit peu l'esprit en la matière.

Á  +-(1115)  

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    J'aimerais maintenant vous présenter notre gestionnaire de programme, Deb Foster, dont je suis vraiment très heureuse qu'elle soit ici aujourd'hui. Elle travaille chez HIV Edmonton depuis six ans et c'est elle qui est responsable de nos programmes. Elle pourra vous renseigner sur nos clients et je sais qu'elle se fera ensuite un plaisir de répondre à vos questions.

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    Mme Deborah Foster (gestionnaire de programme, HIV Edmonton): Merci.

    En plus de participer aux projets NPNU que Kate vient de mentionner, nous siégeons également au groupe de travail autochtone, au groupe de travail de soutien social, au groupe de travail sur les toxicomanies, au groupe de travail sur les services correctionnels et au groupe de travail pour les jeunes. Nous avons donc été très actifs dans tout le projet NPNU pour les phases II et III. Par ailleurs, HIV Edmonton préside le conseil de Streetworks dont Marliss vous a parlé. Nous siégeons également au comité des pathogènes à diffusion hématogène, un comité d'Edmonton réunissant des personnes qui s'intéressent aux pathogènes transmis dans le sang. Il s'agit d'une table de rencontre à laquelle nous voyons des personnes qui nous ne voyons nulle part ailleurs. La Fondation des maladies du foie, qui s'intéresse à l'hépatite, siège à cette table, ainsi que les services d'hygiène et de sécurité du travail de la police, des pompiers et des ambulanciers. Cela nous offre ainsi l'occasion, du point de vue de la réduction des méfaits, d'oeuvrer avec de nombreux intervenants que nous ne verrions pas autrement aux tables auxquelles nombre d'entre nous nous retrouvons.

    Un autre projet auquel nous avons récemment participé est une activité lancée à Edmonton par le centre de la communauté des gais et lesbiennes grâce à des fonds versés par l'Alberta community HIV fund. Les personnes bi-spirituelles à Edmonton sont les Autochtones gais, lesbiennes, bisexuels et transgenderistes. Il est clair que la majorité de nos clients sont autochtones et c'est également le cas d'une part importante de la clientèle de Marliss, comme elle l'a expliqué. Cette initiative a pour objet de rejoindre un groupe encore plus marginalisé que les autres, celui des Autochtones bi-spirituels, chez qui l'on relève un taux de toxicomanie élevé.

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    Même si HIV Edmonton s'intéresse tout particulièrement au VIH, nous sommes également très actifs en ce qui concerne l'hépatite. Près de 55 p. 100 de nos clients ont une co-infection hépatite C et VIH. Environ 45 p. 100 d'entre eux n'ont été infectés que par le VIH, tandis que 5 p. 100 d'entre eux ne souffrent que de l'hépatite C. Les personnes atteintes d'hépatite C ont tendance à être le partenaire ou un membre de la famille d'une personne co-infectée. Elles courent donc un très haut risque d'être elles-mêmes infectées par le VIH, du fait de comportements très risqués, notamment le partage de seringues.

    J'aimerais maintenant prendre quelques instants pour vous décrire le client type qui franchissait autrefois notre porte, par opposition à ceux qui viennent nous voir aujourd'hui, et pour vous expliquer ce que signifiait la réduction des méfaits il y a huit ans par opposition à ce que cela signifie aujourd'hui.

    Il y a huit ans, la majorité du personnel et des clients de HIV Edmonton étaient ce que j'appellerais des hommes gais de la classe moyenne. Lorsque nous parlions de réduction des méfaits, nous parlions d'un groupe appelé GMOC, gay men's outreach crew. Ce groupe d'approche de la communauté gaie avait une philosophie axée sur la réduction des méfaits. Il travaillait à Edmonton avec les hommes gais et bisexuels ainsi qu'avec les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes, ce pour réduire les méfaits en parlant de l'utilisation de condoms et d'autres activités sexuelles plus sûres. À Edmonton, nous constatons que nombre des hommes avec lesquels nous traitons ont des relations sexuelles avec d'autres hommes. Ils ont des femmes à la maison mais ils ont des relations sexuelles avec des hommes dans des bars et dans d'autres endroits publics. Ils ne se considèrent pas comme étant gais ou bisexuels. Ils sont passés à côté de nombre de nos messages antérieurs et c'est pourquoi nous visons aujourd'hui plus particulièrement ces hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes. À l'époque, la réduction des méfaits revenait à parler de condoms et du genre de gelée lubrifiante à utiliser.

    Aujourd'hui, notre client type est un homme autochtone âgé entre 30 et 35 ans avec un passé truffé de séjours en prison, de consommation de drogues injectables et de vagabondage. Ceux qui passent le plus de temps dans nos bureaux sont les drogués sans abri. Ils utilisent nos installations pendant l'hiver pour se réchauffer, pour prendre un café et peut-être pour dormir 20 minutes, parce qu'ils ont passé toute la nuit sous un pont. La deuxième catégorie de clients types qui franchissent nos portes est celle des femmes autochtones âgées de 30 à 35 ans qui ont elles aussi un passé marqué par des démêlés avec la police, la toxicomanie et la rue. La réduction des méfaits est dans ce contexte très différente. Il nous a fallu nous lancer dans tout le domaine de l'utilisation de seringues non prescrites et de réduction des méfaits. Nous sommes très heureux d'avoir dans nos bureaux un comptoir d'échange de seringues auxquels font appel nos clients.

    Je pense que je vais m'arrêter là et nous pourrons discuter davantage un peu plus tard.

Á  +-(1120)  

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    La présidente: Vos clients types des première et deuxième catégories sont en fait beaucoup plus vieux que je ne l'aurais pensé. Y a-t-il un groupe correspondant de jeunes gens également?

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    Mme Deborah Foster: Nous ne voyons pas dans nos bureaux autant de jeunes gens que ce à quoi l'on pourrait s'attendre. Certains des autres témoins pourront peut-être expliquer où se trouvent ces gens-là. Nous avons un travailleur d'approche qui va à l'Old Strathcona Youth Co-op, dans le sud de la ville. C'est un endroit où se retrouvent nombre des jeunes sans abri.

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    La présidente: Très bien, merci.

    L'intervenante suivante est Faye Dewar, de la Boyle Street Co-op.

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    Mme Faye Dewar (intervenante sur le terrain, Boyle Street Co-op): Bonjour. Je m'appelle Faye Dewar, et je travaille à la Boyle Street Co-op. Je suis travailleuse de santé mentale. Je m'occupe d'un projet appelé Street Reach qui m'amène à me promener dans la rue et à discuter avec les gens de la rue que j'y vois.

    Je ne vais pas vous parler des utilisateurs de drogues injectables, car Marliss vient d'en traiter. En tant que travailleurs d'action sociale, nous nous occupons des besoins essentiels, nous nous efforçons d'écouter et de donner des adresses et des renseignements aux gens dans la rue qui en ont besoin. J'aimerais vous parler de trois volets différents, la santé mentale, les personnes marginales à faible revenu et les jeunes, car l'on n'en a pas encore beaucoup parlé.

    En ma qualité de travailleuse de santé mentale, j'ai deux types de clients. J'ai des gens, en règle générale des Autochtones, qui s'administrent eux-mêmes des médicaments. En règle général, ils ne reçoivent de diagnostic de leur problème qu'une fois qu'ils se retrouvent dans le système judiciaire, car on finit par les ramasser. Ces personnes commettent des crimes mineurs et plus graves pour quantité de raisons. Si leur problème n'a pas été diagnostiqué ou si elles ne profitent pas des occasions qui leur sont données pour se faire examiner, elles vont prendre des médicaments en vue de se soigner elles-mêmes, car elles savent qu'elles ont un problème, mais elles ne savent pas lequel. L'autre catégorie est celle des personnes qui souffrent de troubles mentaux, qui ont reçu un diagnostic mais qui n'aiment pas les effets secondaires des médicaments prescrits et qui s'auto-soignent pour calmer leurs psychoses, les voix qu'elles entendent ou autre chose.

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    J'aimerais vous parler des personnes marginales, des femmes autochtones à faible revenu qui se sont vu enlever leurs enfants, qui vivent dans la rue, etc. La situation économique que l'on constate dans la communauté est très troublante. Ces femmes finissent par utiliser tout l'argent qu'elles reçoivent des services sociaux pour payer leur loyer et leur dépôt en cas de dommages. Il ne leur reste plus alors d'argent pour se nourrir, alors elles s'adonnent à la criminalité. Elles se prostitueront peut-être. Il leur faut consommer des drogues et de l'alcool pour maintenir ce style de vie. Parfois c'est par choix, et c'est peut-être le seul choix qu'elles ont. L'autre élément est qu'elles utilisent certains types de drogues. Elles vont fumer du pot, utiliser du crack, inhaler des solvants ou des laques capillaires, utiliser des médicaments sur ordonnance comme le Tylenol 3 et le valium, ou prendre de l'acétaminophène, produit en vente libre. J'ai même entendu parler de clients qui utilisent des somnifères grand public. Ces gens utilisent ce qu'ils peuvent pour apaiser leurs douleurs et leurs problèmes. Lorsque vous n'avez pas d'argent, vous sombrez dans la criminalité. Ces personnes ont le sentiment d'être un échec, elles n'ont pas l'impression de réussir et elles pensent que personne ne les écoute.

    Les jeunes qui grandissent à l'intérieur de ce genre de famille voient ce qui se passe. Ils voient les difficultés que vivent leurs parents. Ils se font parfois enlever par les organismes de protection de la jeunesse. Ils n'ont pas le sentiment d'y avoir leur place. Ils ont hérité des problèmes de leurs parents et ils hériteront peut-être même de leur toxicomanie. Ils recourent eux aussi à la criminalité. Lorsqu'ils commettent des introductions par effraction, il leur arrive même de regarder dans l'armoire à pharmacie pour voir ce qui s'y trouve, et cela marquera peut-être le début de leur utilisation de drogues sur ordonnance. Ils font partie de bandes, et ces bandes seront peut-être leur seule famille, leur seule façon de se faire reconnaître comme appartenant à quelque chose. Ils ne restent pas à l'école. Ils se font en règle générale renvoyer lorsqu'ils sont en sixième ou en septième année.

    Les enfants SAF et EAF constitueront un gros problème pour le système judiciaire. Il n'existe pas grand-chose pour ces gens marginalisés. Il nous faut comprendre clairement où nous allons avec eux. J'espère que lorsqu'ils aboutiront dans le système judiciaire il y aura en place un meilleur plan que de tout simplement les relâcher dans la rue.

    Je pense qu'il nous faut établir de meilleurs liens entre l'appareil judiciaire, les organismes de santé mentale, la Capital Health Authority, le ministère des ressources humaines et de l'emploi de la province, les centres de traitement, et ainsi de suite. Je trouve qu'il y a d'énormes fossés entre tous ces intervenants. Il nous faut établir de meilleurs liens afin qu'il y ait des gens qui écoutent ces personnes et qui les aident à faire la transition et à se bâtir une meilleure vie.

    J'ai fait très vite.

Á  +-(1125)  

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    La présidente: C'est vous qui remportez le prix aujourd'hui. Merci. Vous nous avez parlé de quantité de choses au sujet desquelles nous aurons des questions.

    Nous allons maintenant entendre Beth Lipsett, qui représente l'AADAC.

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    Mme Beth Lipsett (gestionnaire, Services de counselling et de prévention pour adultes, Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission): Merci.

    Je vais vous donner une rapide vue d'ensemble. Je suis certaine que vous avez déjà entendu parler de ces questions. L'Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission offre des services de traitement de la toxicomanie aux Albertains depuis plus de 50 ans en tant qu'organisme du gouvernement albertain. Le travail de traitement et de prévention de la toxicomanie et les services d'information relèvent de l'Alcohol and Drug Abuse Act. Des stratégies de réduction des méfaits sont devenues une partie intégrante de la façon dont l'AADAC livre ses services de lutte contre la toxicomanie. Il s'est agi d'un élargissement des services de traitement et de prévention que nous offrions par le passé. Nous avons ainsi mis en place un continuum d'intervention de lutte contre la toxicomanie visant à réduire les risques et les conséquences de l'abus d'alcool ou de drogues et du jeu compulsif.

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    L'AADAC définit la réduction des méfaits comme étant une politique ou un programme destiné à réduire ou à contenir les conséquences néfastes sociales, économiques et de santé de l'abus d'alcool et de drogues ainsi que du jeu compulsif, sans forcément exiger une réduction de la consommation de substances ou l'abstinence de l'utilisation de substances ou du jeu. Nous considérons que la première priorité de la réduction des méfaits est d'engager activement les personnes, les groupes cibles et les communautés dans la satisfaction des besoins les plus pressants sur les plans de la santé et de la sécurité. Dans cette perspective, les personnes qui ont des problèmes du fait de la consommation d'alcool ou de drogues ou du jeu sont traitées avec respect en tant que membres légitimes de la collectivité ayant besoin d'aide et devant partager une part de responsabilité dans la recherche de solutions aux problèmes liés à l'abus de substances et au jeu compulsif.

    Même si nous croyons que la réduction des méfaits souligne la nécessité d'un changement en vue de l'adoption de pratiques ou de schémas de comportement plus sûrs, nous ne pensons pas que cela doive exclure un objectif à plus long terme d'abstinence si l'intéressé choisit cette voie. L'accent est mis sur des changements qui seront pertinents, bénéfiques et envisageables de façon réaliste pour le client. L'AADAC considère que la réduction des méfaits s'inscrit dans une réaction multidimensionnelle à l'utilisation mal avisée de substances et au jeu compulsif englobant traitement et prévention de la toxicomanie, politiques publiques sociales et d'hygiène favorables et recherche et évaluation. La réduction des méfaits n'offre pas une solution simple aux problèmes complexes susceptibles de frapper individus et collectivités du fait d'abus de substances ou de jeu compulsif.

    Dans la prestation de services de prévention, de traitement et d'information relativement à l'alcoolisme, à l'abus de drogues et au jeu compulsif, les stratégies de réduction des méfaits cadrent avec le mandat et les responsabilités de l'AADAC s'agissant d'appuyer la santé publique. Les stratégies de réduction des méfaits de l'AADAC peuvent être considérées comme étant des mesures de prévention secondaires dans le cas des groupes à risques élevés. Elles ont pour objet d'engager et d'éduquer les usagers actuels au lieu de prévenir l'usage initial.

    Comme cela a été mentionné par le groupe qui nous a précédés, le seul programme d'entretien à la méthadone offert à l'heure actuelle existe ici à Edmonton. Nous appelons cela le programme de dépendance d'opiacés, ou PDO. Près de 25 p. 100 de nos clients reconnaissent utiliser des drogues injectables. Cela ne signifie cependant pas pour autant qu'ils consomment des opiacés. Le programme de dépendance d'opiacés utilise de façon sûre et efficace l'entretien à la méthadone pour soigner la toxicomanie opiacée en Alberta depuis 1971. Le programme offre services d'évaluation, de stabilisation, d'entretien et de conseils aux clients qui ont une dépendance à l'égard d'opiacés. Nous offrons à l'heure actuelle des services de traitement à près de 400 clients répartis dans l'Alberta, ce en partenariat avec plus de 200 pharmacies partout dans la province.

    Bien que le traitement d'entretien à la méthadone soit en soi considéré comme une stratégie efficace de réduction des méfaits, l'AADAC continue de développer et d'élargir son programme de façon à ce qu'il satisfasse les besoins des clients en tenant compte de l'incidence du traitement sur la vie de l'individu. Le traitement d'entretien à la méthadone offert à Edmonton est très étroitement lié au programme d'échange de seringues représenté par Marliss et aux services de soins de santé primaires. D'autre part, le PDO est à la disposition d'actuels clients qui sont présentement à la charge du système de droit pénal.

    Notre expérience à Edmonton a été positive s'agissant de servir une vaste gamme de besoins en collaboration avec d'autres prestateurs de soins. Nous avons tous et chacun un rôle à jouer. En découvrant ce que chacun d'entre nous peut offrir, je pense que nous tendons vers un continuum exhaustif de soins pour les utilisateurs de drogues injectables. Notre but à tous, dans le cadre du consortium d'utilisation de seringues sans ordonnance, est de simplifier le continuum de soins pour les usagers de drogues injectables où qu'ils se trouvent dans la province.

    Il y a des défis. La réduction des méfaits est souvent mal comprise et certains l'interprètent même comme encourageant la consommation de drogues. Certains membres de la société épousent des valeurs telles qu'ils considèrent l'utilisation de substances psychoactives et le jeu comme étant contraires à leurs croyances. Souvent, les stratégies de réduction des méfaits supposent travailler avec des groupes très marginalisés de la population, dont certains ont déjà été mentionnés, notamment les personnes socialement et économiquement défavorisées, les sans-abri et les piquomânes. En Alberta, nous sommes confrontés à un défi particulier du fait que nous offrions le traitement d'entretien à la méthadone à partir d'un point central au lieu de sites multiples éparpilllés dans la province.

Á  +-(1130)  

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    Pour l'individu, reconnaître qu'il a un problème n'est pas facile, mais chercher de l'aide est plus difficile encore. Les gens sont souvent ambivalents et craignent d'être jugés par leurs propres groupes de soutien, qui continuent de consommer, ainsi que par la communauté, qui les stigmatise. La réduction des méfaits offre la possibilité d'une participation inclusive et non coercitive à l'intérieur de ce processus de changement.

Á  +-(1135)  

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    La présidente: Merci, madame Lipsett.

    Avant de donner la parole à M. Leblanc, j'aimerais vous demander pourquoi le programme n'est assuré qu'à partir d'un seul endroit?

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    Mme Beth Lipsett: À ce stade-ci, comme l'a mentionné tout à l'heure Howard, c'est principalement une question de ressources. Historiquement, cela avait peut-être également quelque chose à voir avec les communautés au sein desquelles nous avons exploré la possibilité d'élargir le programme. Nous cherchons à l'heure actuelle activement à élargir nos services pour englober Calgary.

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    La présidente: Combien de vos clients de 1971 sont toujours chez vous?

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    Mme Beth Lipsett: Je ne sais pas si nous en avons encore qui remontent à cette époque-là. Il y a un groupe de clients qui arrivent à un certain stade, auquel ils prennent une très faible dose, et qui restent là pendant de nombreuses années, pour ensuite passer à un stade où ils pensent pouvoir se sevrer complètement et passer à autre chose, et qui réussissent très bien, mais cela peut leur demander dix ans pour en arriver là.

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    La présidente: Les 400 personnes enregistrées à l'échelle de l'Alberta sont-elles des personnes qui ont été ici, qui sont passées par le programme, puis qui sont reparties?

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    Mme Beth Lipsett: Un client nous viendra de sa collectivité, ce qui fait partie du problème: la personne doit déménager ici pour que son état puisse être stabilisé. Selon la personne et ce qu'elle utilise, ce processus de stabilisation peut demander aussi peu que trois jours, mais, typiquement, cela demande trois mois, et si la personne est un usager de drogues multiples, il faut compter jusqu'à cinq mois pour que la stabilisation se fasse. Une fois cette étape atteinte, un lien est établi avec une pharmacie, de préférence dans la collectivité de l'intéressé, et la pharmacie s'engage à lui donner une dose quotidienne. La personne retourne dans sa collectivité et obtient sa dose auprès de sa pharmacie locale.

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    La présidente: Et reviendrait-elle alors ici pour être contrôlée par le médecin, ou bien travaillerait-elle avec son propre médecin?

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    Mme Beth Lipsett: Ce que nous aimerions c'est que des médecins partout dans la province envisagent l'entretien à la méthadone comme faisant partie de l'ensemble des soins de santé primaires. À l'heure actuelle, ce n'est pas la règle.

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    La présidente: Très bien.

    Monsieur LeBlanc.

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    M. Dominic LeBlanc: Merci, Paddy.

    Merci de vos présentations intéressantes. Cela a été toute une découverte pour moi, et pour certains de mes collègues qui ne sont pas ici aujourd'hui, de voir différentes régions du pays et d'y constater certains des défis auxquels vous êtes confrontés. Il existe de nombreux problèmes semblables, de Halifax à Edmonton à Vancouver, où la situation est la plus dramatique, peut-être, à cause de l'attention que lui portent les médias. Cela a été tout un processus d'apprentissage, et vos présentations de ce matin nous ont grandement éclairés. Je vous en remercie.

    J'aimerais examiner avec vous deux questions. La première est celle du rôle que vous voyez pour le gouvernement fédéral. Avant d'aborder cela, j'aimerais traiter d'une simple impression que j'ai, et qui est sans doute fondée sur beaucoup d'ignorance ainsi que sur des rapports anecdotiques que j'ai pu voir dans la presse. J'ai trouvé intéressant, lorsque vous parliez du profil de vos clients, que plus de la moitié d'entre eux sont autochtones et que plus de la moitié d'entre eux sont du sexe masculin. D'autre part, comme l'a souligné Paddy, vos clients sont plus âgés que ce à quoi je me serais attendu. Pourriez-vous nous parler un peu plus des différents types de clients, que ce soit à la coopérative ou dans le travail que vous faites, Marliss, ou chez HIV Edmonton? Je pense que les gens se font une idée fausse quant aux genres de personnes qui deviennent piquomânes. Beaucoup de gens ont pour réaction instinctive irréfléchie de dire: cela ne fait pas partie de ma communauté, je ne connais pas ces gens-là, je n'ai jamais connu quiconque qui ait souffert d'un tel problème. C'est une façon facile pour les gens de se fermer les yeux ou de détourner le regard.

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    Je comprends que vous devez protéger le caractère confidentiel des renseignements que vous avez sur vos clients, mais je serais curieux de savoir si vous avez des données anecdotiques sur qui sont ces gens. Je serais également curieux de savoir comment fonctionne la mini-fourgonnette. Vous sortez le soir avec une fourgonnette. Pourquoi avez-vous une fourgonnette? Comment se fait-il que les gens viennent vous y voir? Où va la fourgonnette? Je suis intrigué par la mécanique de tout cela, par ce travail d'approche. Ce n'est pas un monde auquel j'ai été très exposé, mais je pense qu'une grosse partie de l'ignorance de personnes comme moi, et d'autres, provient du fait que nous ne savons pas qui sont ces personnes, de quels genres de personnes il s'agit, quels facteurs les ont amenées à abuser de drogues. Chacun a sa propre histoire, et je suis en train d'apprendre beaucoup de choses au sujet des facteurs sociaux et économiques qui amènent les gens à prendre de la drogue et qui les plongent dans un monde qui est également souvent marqué par la criminalité, et ainsi de suite. Vous êtes plus au courant de cela que quiconque. Parlez-moi un peu des genres de personnes qui aboutissent chez vous comme clients.

Á  +-(1140)  

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    Mme Marliss Taylor: Je suis infirmière depuis pas mal d'années, et ce travail-ci est le plus intéressant et le plus difficile que j'aie jamais eu à faire. J'adore cela. Le groupe avec lequel nous travaillons est fascinant. Malheureusement, je pense que la plupart des médias se concentrent sur ce qu'il y a de négatif. Nous, nous avons tendance à mettre l'accent sur les forces des personnes avec lesquelles nous travaillons, car ce sont des personnes absolument incroyables qui possèdent des compétences que je ne pourrais jamais dans toute ma vie acquérir. Nous avons le bonheur d'avoir une équipe composée à une exception près de personnes qui ont toutes pris des drogues à un moment ou à un autre, et certaines plus que d'autres. Nous recherchons également lorsque nous recrutons un type de personnalité bien particulier, ce qui est intéressant. Si nous voulons par exemple aller à l'Hôtel York, nous asseoir au bar et faire des immunisations avec une infirmière et un travailleur d'approche, c'est formidable, car parfois ils connaissent très bien l'endroit et il arrive à l'occasion que ce soit même leur famille qui est assise là.

    Avec le volet action sociale, c'est largement une question de bouche à oreille et de confiance. La philosophie de la réduction des méfaits est telle que les gens n'ont pas à nous mentir. J'estime que cela est absolument essentiel. D'accord, tu prends de la drogue, mais qu'est-ce que tu fais d'autre dans ta vie? Voilà ce que nous disons, et nous commençons à nous occuper des autres aspects. Souvent, ce ne sont pas les drogues qui sont le plus gros facteur dans la vie de ces gens. Ce sera la drogue qui les aide à survivre pendant encore une autre journée. Le problème est qu'on vous a pris vos enfants, que vous n'avez pas de maison, que votre bonhomme vous cogne, etc., etc. Les travailleurs d'approche et les infirmières travaillent ensemble et comprennent cela, et j'estime que c'est essentiel. L'aspect confiance, dans le cadre des programmes de réduction des méfaits, est absolument primordial. Nous ne pouvons pas travailler sans.

    Il y a quelques années nous avons fait une étude et avons découvert que la plupart de nos clients qui se piquent, plus de 50 p. 100 d'entre eux, avaient commencé avant l'âge de 19 ans. L'âge le plus courant pour commencer, nous disent-ils, c'est entre 12 et 15 ans. Le plus jeune âge donné par un de nos clients était neuf ans.

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    M. Dominic LeBlanc: Vous parlez là de drogues injectables?

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    Mme Marliss Taylor: Oui, de la première injection. Souvent, ils étaient avec une personne plus âgée, un grand frère ou une grande soeur, par exemple, qui leur disait: viens, allons dans la chambre et piquons-nous. Mais lorsque vous examinez cela de plus près...

    Je vais prendre le cas d'un client type qui me vient à l'esprit. C'est une jeune femme de 22 ans, d'origine autochtone. Sa mère se piquait et son père se piquait. Lorsqu'elle a eu huit ans, sa mère l'a envoyée dans la rue pour lui acheter des drogues. Les dealers refusaient de lui en vendre. En fait, il y avait à l'époque un code que les gens suivaient et selon lequel elle était trop jeune. Elle a eu sa première expérience sexuelle avec son beau-père--en fait, cela se passait souvent avec elle et ses soeurs. Sa mère l'a envoyée faire le trottoir lorsqu'elle a eu 12 ans. C'est ainsi qu'elle a rencontré ce type. Il était assez méchant--il m'a couru après dans la rue un jour. En tout cas, il était très violent, alors elle n'a jamais rien connu d'autre que de se faire taper dessus. Elle m'a demandé un jour combien de fois je me faisais cogner. Il m'a fallu faire très attention dans la réponse que je lui ai donnée. Elle vient tout juste d'avoir son premier bébé, ce qui est intéressant, car elle est âgée de 22 ans. Nous étions là pour l'accouchement et nous l'avons appuyée pendant toute sa grossesse, pour essayer de l'aider à s'entendre avec les responsables de la protection de l'enfance, mais on lui prendra sans doute son enfant. Elle avait elle-même été enlevée à sa famille à un moment donné. On lui enlèvera certainement son enfant un jour ou l'autre. Nous nous penchons donc sur les problèmes intergénérationnels.

    La plupart de nos clients sont dans la trentaine lorsqu'ils viennent nous voir. Mais n'oubliez pas que l'utilisation de la cocaïne amène en soi une paranoïa, alors vous êtes au départ paranoïaque. Vous avez 12 ans et vous voulez que personne ne soit au courant, alors tout ce que vous faites c'est cacher et cacher encore. Malheureusement, je pense que c'est là la période la plus dangereuse pour ce qui est de la transmission de maladies, par exemple. Les pharmaciens ne vous vendront pas de médicaments et vous avez peur d'aborder telle ou telle personne même si vous avez entendu dire que c'est quelqu'un de bien. Au fur et à mesure que les gens sont sécurisés dans leur toxicomanie, qu'ils s'y installent, qu'ils ont à peu près fait le tour du problème, il y a de plus en plus de chances, avec le temps, qu'ils viennent nous voir.

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    La fourgonnette fait son petit tour. Elle contient diverses fournitures, fournitures de santé, fournitures médicales, fournitures de réduction des méfaits. Nous avons souvent à bord une infirmière ou un médecin--pas tous les soirs, mais la plupart des soirs--et nous pouvons donc faire des examens prénataux, par exemple. Nous permettons aux jeunes femmes qui attendent un enfant d'entendre le bruit du battement du coeur du bébé qu'elles portent, ce qui est toujours un moment merveilleux. Nous avons un téléphone cellulaire qui permet aux gens de nous appeler. Nous avons en quelque sorte un circuit, et nous nous arrêtons pendant une demi-heure à certains endroits.

    Nous connaissons beaucoup de ces gens de nom. Nombre d'entre eux font des échanges pour plusieurs personnes, jusqu'à 20 personnes à la fois. Ce sera peut-être une personne qui nous vient d'une planque de drogue. Si j'ai une personne-contact dans une fumerie ou une planque, cela m'attriste toujours un peu lorsque la police y fait une descente, car c'est là mon lien avec ces clients. Nous appelons ces gens des aidants naturels. Ce sont eux qui s'occupent des gens dans les planques. Si la police y fait une descente, tout le monde s'enfuie et nous reperdons la trace des gens. C'est là un aspect du problème et je me pose moi-même des questions au sujet de nos lois en matière de drogues.

    Je vais maintenant céder la parole aux autres.

Á  +-(1145)  

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    Mme Faye Dewar: Les personnes qui ne se font pas poser un diagnostic sont en règle générale les Autochtones souffrant de maladie mentale, et ils commencent à s'auto-soigner. Ils savent qu'ils sont différents, même encore enfants. Peut-être qu'à l'âge de sept ou huit ans ils sont tristes; ils vivent un état dépressif. Ils commencent à boire parce que leurs parents boivent. Leurs parents s'évanouissent et il y a une bouteille de vin qui traîne, ou alors, à cause de la pauvreté dans la réserve et la communauté, ils vont peut-être renifler du diluant de peinture, etc. Parce qu'ils n'ont pas suffisamment d'argent pour acheter de l'alcool, ils optent pour autre chose. En grandissant, leur toxicomanie est maintenue, parce qu'ils se sentent bien lorsqu'ils prennent quelque chose, car ils échappent ainsi à leur espace de pauvreté, de malnutrition, d'abus--physique et sexuel--et de stress et de pression exercés par leurs pairs à l'école. Ils vont poursuivre en s'auto-administrant des médicaments.

    La plupart des gens qui consultent et se font donner un diagnostic sont de race blanche. La famille est suffisamment stable pour décider d'envoyer l'enfant voir un psychiatre ou un médecin, qui prescrit des médicaments. Ce sont les effets secondaires qui comptent, lorsqu'ils ont le cou raide ou autre chose. Cela leur donne un petit peu un high lorsqu'ils souffrent d'une maladie mentale, et s'ils s'auto-soignent, cela les engourdit quelque peu, et ce sont des personnes qui ont en général un QI plutôt élevé.

    Que me faut-il vous dire d'autre? Il y a différents schémas, et ces personnes finissent en général dans la rue ou dans le centre-ville, parce qu'elles s'y sentent en sécurité. Les gens ne les y jugent pas. Elles ont accès au soutien et aux services dont elles ont besoin, et c'est là qu'elles trouvent leur source de drogues, et tout le reste.

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    La présidente: Madame Lipsett.

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    Mme Beth Lipsett: Le seul commentaire que je ferai est que le client que décrit Marliss est la même personne qui viendra nous voir après s'être sentie en sécurité, pensant qu'elle peut peut-être faire confiance au système. Il y a donc dans les limites de la ville un continuum de soins qui est assuré.

    Nous sommes une organisation formelle et les gens sont plus angoissés par l'idée de franchir nos portes que d'aller s'appuyer contre la fourgonnette, mais nous continuons néanmoins de voir les clients plus âgés. Nous n'avons pas beaucoup de jeunes, surtout dans le cadre de notre programme de traitement à la méthadone. C'est peut-être donc un peu un mythe que nos clients sont dans la vingtaine alors qu'ils sont peut-être en vérité dans la trentaine. C'est en tout cas ce que nous nous vivons.

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    Mme Deborah Foster: Il me faut appuyer ce qui a déjà été dit. Nombre de nos clients souffrent de troubles mentaux et ont commencé à consommer alors qu'ils étaient adolescents, mais il leur faut pas mal de temps avant de venir frapper à notre porte. Lorsqu'on parle du VIH en particulier, les personnes atteintes vivent toute une période de refus de la réalité; c'est alors qu'elles utilisent des drogues, beaucoup et pendant longtemps. En règle générale, ce n'est que lorsqu'elles sortent de cette phase ou qu'elles meurent que l'on entend parler d'elles. L'on apprend qu'elles sont mortes ou bien on les voit parce qu'elles sont sorties de cette phase de refus total. Le client type que décrit Marliss est notre client, mais souvent nous ne les voyons pas pendant encore cinq à dix ans après qu'ils soient pour la première fois venus nous voir à la fourgonnette. C'est parfois la fourgonnette qui est le point de rencontre. HIV Edmonton nous accompagne parfois lors de nos patrouilles; quelqu'un de chez eux montera dans la fourgonnette avec l'équipe de Streetworks. C'est souvent là que nous établissons le tout premier contact avec les gens. Ou alors, nous établissons le contact initial avec eux en milieu correctionnel, et la fois suivante, c'est à la fourgonnette que l'on se rencontre. Et au bout de 5, 10, 15, 30 fois, ils trouvent le courage d'aller frapper à la porte de nos bureaux.

    Nous avons déménagé dans un immeuble où il y a d'autres services, comme par exemple Edmonton Housing et le bureau d'assistance sociale, pensant que ce serait un avantage de plus à offrir aux gens qui se présenteraient. Je pense cependant que cela a à certains égards été néfaste, car l'immeuble a d'autres connotations pour les gens et ils ont peur de franchir le seuil de la porte. Vu que nous sommes les seuls occupants du sixième étage, dès que la personne appuie sur le bouton dans l'ascenseur tout le monde sait tout de suite qu'elle se rend chez HIV Edmonton. Je crois que cela décourage certains des jeunes, qui ont cette image macho et qui ne veulent pas que leurs amis soient au courant.

Á  +-(1150)  

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    La présidente: Madame Gunn.

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    Mme Kate Gunn: J'aimerais juste dire une chose. Lorsque j'ai commencé chez HIV Edmonton il y a de cela quelques mois, j'ai assisté à l'un de nos cours de trois jours appelé «The Dynamics of HIV». C'est un cours que nous offrons plusieurs fois par an à tous ceux que cela intéresse. Il s'agit d'un programme de trois jours dans le cadre duquel l'on examine le VIH, la réduction des méfaits, les traitements, les options. Nous nous penchons également sur l'hépatite C et d'autres questions connexes.

    Dans le cadre de ce programme de trois jours on fait toujours venir quelques personnes, qui siègent à un panel, pour parler de leur propre vécu avec le VIH, de ce que c'est que de se faire donner le diagnostic, de vivre avec la maladie, de tout ce que cela signifie. Dans bien des cas, une grosse partie de leur histoire est la façon dont elles ont été infectées au VIH, leur passé, leur vie. En ce qui me concerne, cela m'a vraiment ouvert les yeux d'entendre plusieurs d'entre elles dire, comme l'a expliqué Marliss relativement à l'utilisation de drogues injectables, que le diagnostic du VIH n'est que l'un des nombreux problèmes qu'elles ont vécus et qu'elles vivent dans leur vie, et elles racontent leur histoire d'abus, de pauvreté et de vagabondage. Pour nombre d'entre elles, le fait de se faire dire qu'elles ont le VIH n'est pas un si dur coup, contrairement à ce que l'on pourrait s'imaginer lorsqu'on pense à ce genre de scénario. Ces personnes font face tous les jours à des questions plus pressantes, par exemple où vont-elles dormir cette nuit, où se trouve leur famille, où vont-elles se trouver à manger, etc.

+-

    M. Dominic LeBlanc: Merci beaucoup.

    L'autre question au sujet de laquelle j'aimerais beaucoup entendre vos opinions--et nous l'avons un peu abordée hier--concerne la dynamique fédérale-provinciale en matière de soins de santé. Cette province et le gouvernement du Canada n'ont pas toujours été sur la même longueur d'onde. C'est peut-être le luxe du fait d'être une province riche. Dans ma province, au Nouveau-Brunswick, si le gouvernement du Canada vous offre de l'argent, vous ne dites pas non. Mais la dynamique fédérale-provinciale est si complexe, et vous êtes sur les premières lignes quant à certaines de ces questions de santé. Vous appuyant sur votre expérience, que le gouvernement fédéral pourrait-il faire pour appuyer votre travail, autrement qu'en vous donnant tout simplement de l'argent? De nombreuses provinces diront: donnez-nous l'argent et nous donnerons ensuite l'argent aux groupes dans le besoin. J'ignore le détail de la situation de cette province, mais au Québec et ailleurs, ce que je viens de vous expliquer est la réaction automatique. Quelles mesures précises aimeriez-vous voir le gouvernement national prendre pour appuyer de façon tangible, concrète, le travail que vous faites?

+-

    Mme Marliss Taylor: J'ai en vérité été tout à fait ravie par les efforts déployés ces derniers temps par le gouvernement fédéral. Les comités fédéraux-provinciaux-territoriaux se sont réunis pour examiner le problème de l'abus de drogues injectables et ont décidé d'être courageux et novateurs. Les responsables de notre programme en sont ravis. Ils cherchent en tout cas des moyens différents de gérer l'utilisation de drogues. L'idée de piqueries sûres, par exemple, a été soulevée et l'on en parle très sérieusement. Je trouve cela fabuleux.

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    Je pense que la réduction des méfaits vous permet d'envisager les choses différemment. Peu m'importe ce qu'on me dit, il n'y a pas assez de cellules dans les prisons ni assez de lits en centre de traitement, où que ce soit, alors il nous faut être créatifs, car à mon sens il n'existe pour ces gens aucune autre possibilité, sauf continuer de se cacher dans des allées sombres, des sous-sols et des toilettes, et les laisser faire cela ne les aide guère. Je pense donc qu'il est extrêmement important de maintenir le cap et de continuer à chercher des moyens d'intervention novateurs.

    Nos clients ne meurent pas de leur toxicomanie. Nous desservons des personnes qui se droguent depuis 40 ou 50 ans. Ce ne sont pas les drogues qui les tuent, mais les traumatismes qu'elles vivent pour obtenir ces drogues. Vous allez mourir d'une overdose à cause d'une cargaison de drogue instable qui arrive sur le marché. Vous ne savez pas ce qui vient de Vancouver, dans quelle mesure cela été coupé, quelle est la pureté de ce que vous achetez, alors vous pouvez très vite et très facilement faire une overdose.

    Je n'ai jamais réussi à très bien comprendre pourquoi une personne choisit une drogue donnée. S'il y a une bagarre dans la rue et que je passe à côté à pied, je sais que c'est largement dû à la consommation d'alcool. Ce ne sont pas les héroïnomanes qui vont se bagarrer, car ils n'en ont pas l'énergie. Je ne sais pas pourquoi les gens choisissent telle ou telle drogue. Quoi qu'il en soit, nous ne serions pas du tout en faveur d'une légalisation pure et simple de tout. Je pense qu'il y aurait lieu d'adopter une approche raisonnable et réfléchie. J'applaudis aux efforts de ceux qui prônent l'autorisation de la consommation de la marihuana pour raisons médicales, mais je pense qu'il nous faut regarder plus loin encore.

    J'estime par ailleurs qu'envisager la réduction des méfaits comme étant purement une initiative de santé n'est pas la bonne voie. Les questions dont nous parlons et qui touchent les personnes avec lesquelles nous travaillons ne s'inscrivent pas sous une seule rubrique. Cette tendance au catalogage divise les gens en morceaux et, en vérité, il vous faut mentir en cours de route à la plupart de ces différents services, qu'ils soient provinciaux ou fédéraux ou autres. Il me semble que plus tous ces éléments peuvent être interreliés et entrecroisés... Je travaillais aux Territoires du Nord-Ouest lorsque la transition a été faite du ministère de la Santé au ministère de la Santé et des Services sociaux, et je pense que ce déplacement philosophique a beaucoup changé la façon dont les gens envisageaient les choses. Vous ne pouvez pas être en bonne santé si vous êtes isolé et pauvre, un point c'est tout.

    J'aimerais donc qu'il y ait beaucoup plus de chevauchements, qu'il y ait beaucoup plus de ministères qui comprennent qu'ils ont un rôle à jouer dans la lutte contre l'abus de substances. Le domaine qui m'intéresse personnellement est celui de l'utilisation de drogues injectables, mais il y a en la matière également un rôle pour le ministère de la Justice, pour le ministère du Logement et pour le ministère de la Santé. Chacun a bien un morceau du gâteau. Personne ne peut pointer quelqu'un d'autre du doigt.

Á  +-(1155)  

+-

    M. Dominic LeBlanc: Marliss, qu'en est-il, par exemple, de l'initiative fédérale pour les sans-abri? La Portland Hotel Society nous a dit à Vancouver que cela avait beaucoup changé les choses dans certains cas que le gouvernement fédéral se soit engagé à l'égard des sans-abri. Cela a-t-il changé quelque chose dans votre communauté?

+-

    Mme Marliss Taylor: C'est sans doute Faye qui connaît le mieux cet aspect-là. Je peux néanmoins dire que l'un des endroits qui a été retenu en tant que modèle est l'Urban Manor, ici dans cette ville. Ce qui continue de faire défaut ici c'est un endroit où les gens puissent se piquer en sécurité. S'ils se piquent depuis 40 ans, il est vraiment difficile de leur dire non, tu ne le peux pas si tu vis ici. Je continuerais donc de repousser encore les limites de la boîte.

    Je pense que cela a changé les choses. La situation est critique. Nous avons un client qui touche 402 $ par mois au titre de l'assistance sociale et il a un loyer de 395 $, car l'on ne peut rien trouver pour moins que cela. Cela lui laisse 7 $ pour vivre, et il n'est je pense guère étonnant que cette personne commette des crimes. J'ignore comment elle pourrait survivre autrement. Le marché du logement d'Edmonton est aujourd'hui parfaitement absurde. Si vous voulez une chambre avec un lavabo, vous allez devoir dépenser 300 $ à 350 $ par mois. C'est de la folie. La situation doit s'améliorer.

+-

    Mme Faye Dewar: J'appartiens au Edmonton Joint Planning Committee on Housing et à l'Edmonton Aboriginal Committee on Homelessness, alors je m'occupe beaucoup de questions de logement, et c'est sans doute ce pourquoi Marliss a mentionné mon nom. Je trouve que jusqu'ici à Edmonton l'argent fédéral continue de nous parvenir, et nos sommes vraiment heureux, mais cela ne suffit toujours pas. L'accent est mis sur les familles et les personnes qui ne souffrent pas de toxicomanie. Il y a quelques projets qui fonctionnent--Urban Manor en est un--mais ils s'adressent davantage aux alcooliques et non pas aux piquomânes, aux aspiromanes qui inhalent des solvants ou autres, les clients les plus difficiles. Mais tant et aussi longtemps qu'il s'ouvre d'autres endroits, plus beaux, les maisons de chambres resteront à la portée de ces gens--il n'en demeure pas moins que les loyers demandés sont très élevés. Il n'y a aucune subvention. Parce que l'argent nous parvient, nous n'obtenons pas la subvention à côté, et les loyers sont de ce fait élevés. Il n'y a aucun contrôle des loyers et il y a donc des problèmes de ce côté-là également. Même s'il se construit de nouveaux immeubles, etc., cela n'est pas tout à fait suffisant.

+-

    Il faut qu'il y ait une meilleure liaison, une meilleure imbrication entre les gouvernements fédéral, provincial et locaux. Les fonds sont versés au Department of Justice, et celui-ci dit, ce sont nos fonds, et nous n'avons aucun lien avec la Capital Region Housing Corporation, la Capital Health Authority ou l'Alberta Mental Health Board. Il n'y a donc pas de pont entre les différents services. L'un prend une décision, l'autre prend une autre décision, mais les décisions ne sont pas prises en commun, car les fonds sont distincts. Il nous faut bâtir de meilleurs ponts entre ces différents services afin d'être en mesure d'aider les gens, car leurs problèmes ne sont pas simples et bien tranchés. Ils ont peut-être des problèmes de santé mentale, des problèmes avec le système judiciaire, ils ont peut-être besoin d'assistance sociale. Tous les différents services doivent travailler main dans la main pour aider ces personnes. Lorsqu'ils ne travaillent pas ensemble, les gens finissent par passer entre les mailles du filet, et c'est ainsi qu'ils aboutissent dans la rue et qu'ils recourent à des drogues et à de l'alcool pour survivre au jour le jour.

  +-(1200)  

+-

    La présidente: Madame Lipsett.

+-

    Mme Beth Lipsett: J'aimerais vous décrire un programme que nous essayons de lancer et que j'aimerais beaucoup, sur le plan philosophique, voir émaner du gouvernement fédéral. Il existe à Edmonton ce que l'on appelle l'Eastwood project, qui englobe la Capital Health Authority, l'AADAC, les services d'aide à l'enfance, les services de santé mentale--j'oublie sans doute quelqu'un ici. Nous avons tous les mêmes clients et ce que nous voulons offrir c'est un lieu où les gens se sentent à l'aise pour obtenir de l'aide pour tous leurs problèmes et je sais que ce que je dis là est énorme. Pour l'AADAC, ce qui nous importe c'est d'y offrir un programme de traitement à la méthadone.

    Comment faire venir un client qui prend de la méthadone pour obtenir des soins de stabilisation et son traitement si le travailleur des services à l'enfance va lui demander s'il devrait même avoir ses enfants à la maison? Il s'opère d'énormes changements dans la façon dont nous autres professionnels réfléchissons et intégrons nos façons de travailler, de telle sorte que les clients se sentent tout à fait à l'aise de venir nous voir, sachant que tout le monde est sur la même longue d'onde, que nos objectifs sont les mêmes et que nous les abordons tout simplement de façon différente. L'idée de nous réunir, donc, est de déterminer comment avoir une approche commune, axée sur le client. J'aimerais vraiment voir beaucoup plus d'intégration du genre, et je pense que Faye et Marliss ont elles aussi parlé de ce besoin. Nous avons beaucoup de silos qui puisent dans différents pots d'argent. Nous obtenons tel pot d'argent pour telle période, puis il disparaît. Qu'advient-il des clients? Qu'advient-il du programme?

    Je pense qu'il faut qu'il y ait moyen de partager cet engagement. Le problème est si complexe. Il n'a pas commencé avec la première seringue. Alors où devons-nous commencer, nous? Nous devons commencer au tout début et offrir le service de la même façon, avec la même philosophie, jusqu'à ce que le client dise: savez-vous quoi, j'ai les aptitudes, j'ai maintenant la capacité de faire cela sans votre aide. C'est ce que nous voulons tous voir. Nous voulons tous voir nos clients sortir et se débrouiller sans avoir besoin de nos services. Notre but à tous est d'éliminer la nécessité du travail que nous faisons. Je ne pense pas que nous réussirons si nous ne sommes pas véritablement intégrés dans la livraison de ce service. Et j'aimerais que cette base et que ce message philosophiques découlent d'une perspective nationale, de telle sorte que le tout soit intégré, et ce jusqu'au niveau local.

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Foster.

  +-(1205)  

+-

    Mme Deborah Foster: La stratégie d'aide fédérale n'a pas augmenté les fonds distribués depuis dix ans. Or, il est clair que le nombre de clients a, lui, sensiblement augmenté. D'autre part, il y a dix ans, c'était les hommes gais qui nous occupaient. Aujourd'hui, nous avons les homosexuels, mais nous avons également les utilisateurs de drogues injectables, les femmes qui sont les partenaires d'utilisateurs de drogues injectables ou les partenaires d'hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes. Il nous faut donc partager le gâteau en plus de morceaux encore, ce qui rend les choses encore plus difficiles.

    Je vous ai parlé de l'incidence de co-infection à l'hépatite C. Nous avons le bonheur d'avoir à l'heure actuelle des fonds réservés à l'hépatite C, mais cela va disparaître. Qu'arrivera-t-il alors à ces clients? Devons-nous arrêter de les voir? Je ne veux pas que l'on ne parle que d'argent, mais l'argent est certainement un facteur.

    D'autre part, il y a à l'intérieur de la stratégie en matière d'aide une stratégie générale; il y a également une stratégie pour les affaires correctionnelles et une stratégie pour les Autochtones. La stratégie pour les affaires correctionnelles revient au Service correctionnel du Canada. Or, bien plus de 50 p. 100 de nos clients font des séjours en prison. Nous ne pouvons pas accéder à ce pot d'argent, car celui-ci est versé directement à Service correctionnel Canada. En même temps, le Service correctionnel veut que nous soyons présents dans les pénitenciers pour aider ceux qui sortent à faire la transition, dans l'espoir qu'ils ne retournent pas à la vie qu'ils avaient avant, mais le Service correctionnel n'est clairement pas prêt à nous payer, à même le budget de la stratégie d'aide, pour venir faire ce travail chez lui.

    Il en est de même avec la stratégie pour les Autochtones en ce sens que l'argent vient, mais il est distribué aux organisations autochtones. Il faut être une organisation autochtone pour avoir accès à cet argent. En Alberta, il existe une organisation autochtone provinciale, et, à y réfléchir, l'on comprend vite que si elle est provinciale elle ne peut pas être axée sur le client individuel. Ce sont les 15 autres organisations d'aide de la province et qui ne sont pas autochtones qui accueillent les clients autochtones mais, encore une fois, nous ne pouvons pas avoir accès à cet argent.

    Qu'en est-il des gens dans les pénitenciers, des Autochtones, des personnes atteintes de l'hépatite C, et jusqu'à quel point devrons-nous nous partager entre tous ces gens? En tant qu'agence, nous sommes passés d'un simple service d'éducation et de conseils à un service qui organise tout, en portefeuilles. Nous avons quelqu'un qui s'occupe des pénitenciers, quelqu'un qui s'occupe des toxicomanies. Or, nous avons un personnel limité. Au fur et à mesure qu'émergent de nouvelles clientèles, par exemple du côté de la santé mentale, nous allons manquer de personnel.

    C'est là un élément, l'autre étant l'aspect logement. Nous nous sommes nous aussi beaucoup intéressés au sort des sans-abri et aux problèmes de logement à Edmonton. Nous nous occupons notamment pour nos clients de dépôts en cas de dommages. Les propriétaires dans cette ville exigent le versement d'un dépôt pour dommages avant de vous laisser vous installer, et cela équivaut en règle générale à un mois de loyer. Les services sociaux de la province ne vous donnent pas d'argent pour couvrir ce genre de dépôt, alors que pouvez-vous faire? Si vous versez votre dépôt en cas de dommages, vous ne pouvez pas vous installer dans le logement parce que vous n'avez plus assez d'argent pour couvrir le premier mois de loyer. HIV Edmonton a eu un programme intermittent, utilisant encore une fois l'argent du projet, destiné à financer les dépôts en cas de dommages. Il s'agit là d'un obstacle énorme pour les personnes qui sortent de prison. Leur trafiquant de drogue les rencontrera à l'arrêt de TLR et leur donnera leurs premières drogues gratuitement; leur souteneur les reconduira tout de suite en ville pour les remettre sur le trottoir, mais personne n'est là à leur tendre l'argent nécessaire au dépôt en cas de dommages qui leur permettrait de changer leur vie, et je trouve que c'est là un énorme problème.

    Notre centre-ville est en train d'être revitalisé. Des gens plus riches s'y installent. Mais où vont donc se retrouver les clients qui utilisaient autrefois ces quartiers? Les logements bon marché sont en train de disparaître.

    Enfin, lorsque les travailleurs qui encadrent une personne apprennent qu'elle est séropositive, très souvent c'est à ce moment-là que nous recevons un coup de fil du foyer d'accueil, de l'école ou autre, pour nous dire: Jean Dupuis est maintenant séropositif; pourriez-vous me dire où il peut vivre, où il peut aller se chercher de la nourriture, où se trouve son groupe de soutien, et tout le reste? C'est comme si la séropositivité l'emportait sur tout le reste. La personne utilise des drogues injectables depuis des années et souffre de problèmes mentaux depuis des années, mais voici qu'on lui diagnostique le VIH et tout d'un coup c'est HIV Edmonton ou d'autres organisations d'encadrement de séropositifs qui doivent s'occuper de loger la personne. Le logement n'est pas notre domaine, mais les propriétaires ne veulent pas forcément louer aux personnes séropositives, et c'est là encore un gros problème. Comment font-ils pour le savoir? Jean connaît Paul qui connaît quelqu'un d'autre. Paul veut vraiment l'appartement et dit au propriétaire que Jean est séropositif. C'est Paul qui obtient alors le logement. C'est un gros problème pour nos clients qui se cherchent des logements adéquats.

  +-(1210)  

+-

    La présidente: Madame Gunn.

+-

    Mme Kate Gunn: Je pense que Deb a abordé la plupart des points que je voulais mentionner, mais j'aimerais néanmoins souligner que ce n'est pas simplement une question d'argent. Pour ce qui est du VIH, cette année, une organisation à l'échelle du pays a vu le jour et son objet est d'essayer d'obtenir des fonds fédéraux supplémentaires pour la stratégie fédérale de lutte contre le SIDA. Il s'agit de quelque chose d'important. Il nous faut vraiment, comme tout le monde l'a mentionné, un financement opérationnel, permanent et durable accru. Le problème n'est pas limité à cette région-ci. Il y a des fonds qui sont dégagés pour des projets, mais lorsque le projet n'est plus financé, cela crée quantité de problèmes. Nous faisons du travail que nous voulons faire et dont nos clients ont besoin. Cela est réellement important. Nous voulons continuer de faire notre travail, mais nous savons que l'argent cessera un jour de venir, alors que les attentes des gens seront toujours là.

    Nous continuons de travailler en vue d'obtenir des fonds fédéraux pour le VIH et le SIDA. Je pense, et j'ai entendu tout le monde le dire, que le travail qui réussit le mieux est le travail que nous faisons tous ensemble, comme par exemple notre consortium d'utilisation de seringues non prescrites. Cela ne veut pas dire que ce sont ces projets qui réussissent toujours le mieux. Ce sont peut-être les projets qui sont les plus difficiles à gérer car lorsque vous avez beaucoup de gens, cela complique les choses, et il est parfois plus simple de travailler seul dans son coin, mais je pense qu'un financement et un soutien continus du concept du travail collectif, pour revenir à l'idée des ponts dont Faye a parlé, sont vraiment importants. Lorsque nous travaillons les uns avec les autres, cela donne des résultats, et j'ose espérer que c'est une direction que le gouvernement fédéral appuierait. Je pense que c'est vraiment ensemble que nous faisons notre meilleur travail.

+-

    La présidente: M. Leblanc vous demandait ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour changer les choses. Il est clair qu'un domaine dans lequel nous avons un énorme rôle est celui de la santé et de l'éducation pour les Autochtones. Or, il semble que ce soit un domaine où il existe un certain nombre de problèmes réellement difficiles. Il importe d'obtenir des résultats bien supérieurs à ceux que nous constatons à l'heure actuelle. Y a-t-il quelque chose à l'intérieur de cette enveloppe qu'il nous faudrait faire? Y a-t-il un leadership au sein de cette communauté autochtone avec laquelle vous traitez qui est en train de vous aider à résoudre certains de ces problèmes? Toute la question des écoles résidentielles a beaucoup nui à un nombre important des personnes qui sont censées élever leurs propres enfants. Cela a créé beaucoup de problèmes de santé mentale et la nécessité de s'auto-soigner. Je me dis qu'il doit y avoir des personnes vraiment formidables qui ont réussi à passer de l'autre côté et qui pourraient assurer du leadership et de l'encadrement pour aider ceux qui sont dans le besoin.

    Hier soir, nous étions à Poundmaker's Lodge. Les quelques rares jeunes gens que nous y avons rencontrés nous ont dit que l'aspect spirituel leur faisait défaut. Cette province compte un grand nombre d'Autochtones. Ceux que nous avons rencontrés nous ont dit qu'ils étaient traités comme des citoyens de deuxième catégorie et qu'ils n'avaient le sentiment d'appartenir à rien. Se fait-il quelque chose dans tout ce domaine pour donner un peu d'espoir à ces gens? Importe-t-il que le gouvernement fédéral fasse plus là où il finance des activités?

+-

    Mme Marliss Taylor: En ce qui concerne l'échange de seringues, je dirais que la réduction des méfaits s'inscrit beaucoup mieux dans la façon de penser autochtone traditionnelle que les modèles d'abstinence: cela peut donner beaucoup de force d'être encadré par des personnes plus aimables, plus douces et plus compatissantes. Vous n'êtes pas un déchet à cause d'un morceau de votre vie. Cela est peut-être vrai, peut-être pas; je ne sais pas. Ce serait en tout cas une chose à laquelle réfléchir.

    Tous les intervenants dans le cadre du programme d'échange de seringues dans la province s'efforcent d'établir de bons contacts au sein de la communauté autochtone. Je pense pouvoir m'exprimer en leur nom à tous, car je les connais très bien. Un grand nombre des personnes dans la rue sont d'origine autochtone. Elles ont été marquées par la pauvreté intergénérationnelle et par les toxicomanies intergénérationnelles. Certaines personnes ne sont pas intéressées par le cadre traditionnel, tandis que pour d'autres cela est très important. Il est bon d'avoir des endroits comme Poundmaker's Lodge.

+-

    Je trouve qu'il y a une incroyable pénurie d'Autochtones en situation de pouvoir. Ce qui arrive parfois en Alberta, et un peu partout d'ailleurs, c'est qu'une personne dira: il nous faut une perspective autochtone, alors invitons une personne autochtone à siéger à la table et elle représentera tout le monde. Cela ne devrait jamais arriver. Nous avons vraiment eu de la chance dans le cadre de notre programme d'avoir un grand nombre d'employés d'origine autochtone, alors c'est donnant donnant, et l'on ne se retrouve pas avec une seule personne qui se voit donner un morceau du gâteau.

    La présidente: Tous les Autochtones n'ont pas à penser la même chose.

    Mme Marliss Taylors: Exactement. Deb a raison de dire qu'il y a un groupe provincial autochtone qui s'occupe de toxicomanie. Je pense que c'est un problème. L'utilisation de drogues injectables est un problème dans les réserves et dans les collectivités métisses, et ces gens-là ont sans doute un meilleur contrôle là-dessus que ce n'est possible dans le centre-ville, car l'on y en parle un peu plus facilement. Je ne suis cependant pas experte en la matière.

  +-(1215)  

+-

    La présidente: Un gros morceau du défi semble être l'aspect troubles mentaux. Ce n'est pas que les Autochtones s'auto-soignent; c'est qu'il y a tous ces problèmes de santé mentale. Y a-t-il un certain leadership au sein de la communauté autochtone en matière de santé mentale pour en quelque sorte empêcher le problème?

+-

    Mme Faye Dewar: Je n'ai pas de réponse à vous donner là-dessus et je ne voudrais pas parler pour le compte de tous les Autochtones, car là n'est pas mon rôle ici. Je pense qu'il nous faut commencer à la base et traiter avec la communauté et faire en sorte que celle-ci participe activement. S'il s'agit d'une réserve, alors vous devez discuter avec tous les habitants de la réserve et élaborer une stratégie. C'est lorsqu'on commence par le haut que le système ne fonctionne pas. Si nous commencions à la base pour remonter, je pense que nous réussirions mieux, car les gens en feraient directement partie, seraient des participants actifs.

+-

    La présidente: Y aurait-il dans la province des exemples que vous pourriez nous citer? Vous avez parlé du centre de coordination. Existe-t-il certaines pratiques exemplaires chez les communautés autochtones? Y a-t-il de belles réussites dont vous êtes au courant? Vous n'avez pas à parler au nom de tout le monde, mais y a-t-il un Paul Dupont quelque par que nous devrions contacter?

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    Mme Faye Dewar: Un bon exemple serait l'Edmonton Aboriginal Committee on Homelessness. Je pense qu'il est entièrement composé de personnes qui travaillent, mais toutes font leur possible pour aider les sans-abri et soulignent bien qu'elles travaillent pour eux.

    Encore une fois, c'est difficile, car les Autochtones doivent lutter pour survivre au jour le jour. Il est parfois difficile d'intervenir, car ces gens-là veulent savoir où ils vont dormir, où ils vont se trouver un repas. Il leur faut faire la queue avant telle ou telle heure. Il y a donc toutes sortes d'éléments qui interviennent ne serait-ce que pour survivre dans la rue jour après jour. Il est parfois très difficile pour eux de participer à un projet.

+-

    La présidente: Quelqu'un d'autre aimerait-il faire un commentaire?

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    Mme Beth Lipsett: Nous avons une ou deux choses ici chez nous à Edmonton, à la clinique dont je suis responsable. Il y a tout d'abord Poundmaker's, qui compte un ou deux employés qui vivent avec nous dans ce bureau. Lorsqu'un client passe par la porte de devant, il a un choix à faire. Il peut choisir d'aller chercher de l'aide chez Poundmaker's, mais je pense que c'est là encore une autre impression fausse, car il y a des Autochtones qui ne souhaitent pas être traités par le biais d'une organisation autochtone. Les gens ont néanmoins le choix.

    D'autre part, nous aurons à compter de l'automne un cercle de guérison pour les femmes. Nous ne sommes pas parties à la recherche de cela. Nous avions une jeune femme autochtone qui souhaitait ardemment faciliter ce processus pour certaines des personnes. Elle avait vécu cela dans le cadre d'un programme auquel elle avait participé avec nous. Nous avons donné le feu vert. Je pense qu'il y a un manque flagrant de services qui soient culturellement adaptés.

+-

    Sur une plus grande échelle, au-delà de mes connaissances à l'interne, ma perspective d'ensemble est que nous parlons assez facilement de la spiritualité autochtone. En tant que société, je ne suis pas convaincue que nous soyons sérieux. Si nous l'étions, nous intégrerions cette composante dans tout notre travail, surtout dans une province comme celle-ci, où un si grand nombre de nos clients sont autochtones. En règle générale, nous en parlons. J'ai entendu ce que vous avez dit au sujet du fait que les jeunes gens chez Poundmaker's pensaient qu'il n'y avait rien, et ils ont tout à fait raison. Cet élément n'existe pas dans la plupart des organisations formelles. Peu importe les efforts que nous déployons pour intégrer cela, cela devient trop formel face au besoin des gens. Je pense que cela doit être un autre élément de ce continuum de soins qui doit couvrir la totalité des besoins. Ce n'est pas un silo en soi, mais comment faire pour intégrer cela dans le tableau d'ensemble? Je ne connais pas la réponse à la question. Je pense simplement qu'il faut que cela y figure.

  +-(1220)  

+-

    Mme Deborah Foster: Je suis convaincue que c'est intergénérationnel, que cela commence avec les cours d'éducation parentale et de soins prénatals et en travaillant avec les jeunes mères. C'est au niveau de la famille que l'éclatement commence, et c'est pourquoi un si grand nombre de nos clients sont Autochtones. Ils n'ont pas se soutien social, ce filet de sécurité. Des études montrent que s'il y a dans la vie d'un enfant une personne qui peut lui apprendre à réagir, alors cet enfant aura de meilleures chances de se sortir du milieu dysfonctionnel dans lequel il a été élevé. Insister davantage sur les programmes de mentorat et mettre des services de mentorat à la portée des familles au lieu de les laisser s'éclater est une idée qui me vient à l'esprit.

+-

    Mme Beth Lipsett: Même dans le cas des communautés, il me semble. Je ne sais comment vous vous y prendriez pour élaborer cela, mais il me semble que la création d'un programme de mentorat à l'échelle communautaire serait un formidable atout pour tout le monde, les mentors et ceux qui bénéficieraient du programme.

+-

    Mme Deborah Foster: Je ne suis par ailleurs pas convaincue que la création d'une filière parallèle pour les Autochtones soit vraiment la solution à privilégier. Je suis convaincue que c'est une question d'intégration et que les organisations non autochtones doivent faire un effort pour compter parmi leur personnel des Autochtones, offrir des programmes autochtones et offrir à toutes les personnes qui franchissent le seuil de leur porte, qu'elles soient noires, asiatiques, autochtones ou blanches, le choix quant à l'intervenant qu'elles veulent voir et à la façon dont elles veulent accéder aux services proposés. Je connais beaucoup trop de cas de systèmes parallèles, que l'on parle éducation, santé ou autres. Ayant beaucoup travaillé en milieu autochtone, je sais que le niveau de soins dans le système parallèle, par opposition au système principal, n'est souvent pas aussi bon.

+-

    La présidente: Il a été très affligeant d'entendre ces jeunes gens dire qu'au moins une partie de leurs problèmes découlent du fait qu'ils ont le sentiment de n'avoir aucune valeur propre. Il s'agit là d'un problème systémique. Si nous tous avons d'une façon ou d'une autre communiqué ce message, alors nous avons tous et chacun pour responsabilité d'apporter des changements. C'était triste à voir.

    Marliss.

+-

    Mme Marliss Taylor: Vous avez mis le doigt sur la raison pour laquelle de nombreux participants au programme de réduction des méfaits vous diraient que les drogues jouent dans la vie un rôle utile. Si vous êtes une femme autochtone âgée de 19 ans, qu'on vous a enlevé vos enfants, que votre bonhomme vous tabasse une fois de temps en temps et que vous devez faire le tapin parce que vous ne recevez pas suffisamment d'argent de l'assistance, vous vous sentez plutôt impuissante. Je pense que dans le cas d'une telle personne, la cocaïne lui donne un répit. Pendant une très courte période de temps, vous avez le sentiment d'être puissant, d'être important, de dominer la situation, vous êtes confiant, parce que lorsque vous n'êtes pas sous l'influence, vous n'êtes rien de tout cela.

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    Je pense qu'il faut comprendre que bien que ce ne soit pas ce que vous choisiriez comme solution pour aider les gens à confronter la réalité, si c'est tout ce que vous avez, les changements nécessaires doivent s'inscrire dans une perspective très large. Nos clients qui utilisent des opiacés nous en parlent. Lorsqu'ils se piquent, c'est comme si de l'amour courait dans leurs veines. Ce sont des personnes qui sont poursuivies par des démons et qui n'ont pas vécu le sentiment de réalisation que nombre d'entre nous ont le bonheur de vivre parce que nous avons des maisons, des emplois, des voitures, des chiens, des enfants et tout le reste. Je ne voudrais pas vous donner l'impression que seuls les habitants du noyau du centre-ville d'Edmonton prennent des drogues car, croyez-moi, les gens en prennent partout; c'est tout simplement que nous nous occupons de ce front-ci. Il nous faut traiter des questions plus vastes, examiner le rôle que jouent les drogues dans la vie de l'individu. J'ai déjà dit à certaines personnes: si c'est ça ou sauter d'un pont, alors prends des drogues. Si c'est la seule chose qui va t'empêcher de sauter dans la rivière, alors vas-y, prends des drogues, car je ne veux pas que tu te tues. Je ne peux pas corriger tes problèmes tout de suite aujourd'hui. Mais on essaiera de trouver quelque chose pour demain.

    Il s'agit de savoir quelle place occupent les drogues, et je pense que le problème est notre société. Il y a un plus grand fossé entre les riches et les pauvres, surtout dans cette province, et les personnes qui ne sont pas assises à la mangeoire sont celles qui sont le plus à risque et les plus marginalisées. Le problème, ce n'est pas la drogue, c'est la vie.

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    La présidente: Envisagez-vous dans le cadre du projet pilote la création de piqueries sûres?

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    Mme Deborah Foster: Nous y avons en quelque sorte été entraînés. Au départ, ils avaient dit que Vancouver, Toronto et Montréal étaient les endroits retenus, alors nous n'y avions jamais réfléchi, n'avions jamais envisagé cela pour notre ville. Puis le chef du service de police a déclaré l'été dernier que oui, c'était faisable, ce qui nous a tous pris de court, mais la nouvelle m'avait ravie. Nous avons une assez bonne relation de travail avec les échelons supérieurs du service de police d'Edmonton. Notre maire est ensuite allé à une réunion des municipalités et a donné son accord, et nous avons une nouvelle fois été pris de court et surpris. Tout d'un coup, voilà qu'on m'invitait à Ottawa à cette réunion de municipalités et qu'on nous demandait quand nous allions commencer la chose. Nous avons eu beaucoup de chance côté drogues injectables. Nous avons ce groupe réunissant de nombreux organismes, dont l'Edmonton Police Service, HIV Edmonton, l'AADAC, Capital Health, la Boyle Street Co-Op, le Boyle McCauley Health Centre, les services sociaux catholiques et le Northern Alberta HIV Clinic. C'est, je pense, ce groupe qui est le mieux placé pour examiner et évaluer cela. J'estime que ce doit être un effort collectif.

    Nous n'avons pour l'instant mis dans cet océan que notre gros orteil. Ce n'est pas parce que cela ne nous intéresse pas. Notre crainte, encore une fois, est que quelque chose soit lancé pour ensuite disparaître. Si le financement s'étiole au bout de quelques années, qu'arrivera-t-il à ces gens? Vous ne leur aurez pas rendu grand service. Cela me bouleverse chaque fois.

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    La présidente: Est-il question d'un tribunal consacré aux drogues? Plusieurs d'entre vous avez mentionné le manque de coordination, et lorsque nous avons visité le tribunal spécialisé dans la drogue à Toronto, nous y avons vu, peut-être pas forcément pour toutes les bonnes raisons, des personnes qui intégraient les services, car il fallait trouver un logement, trouver un emploi, obtenir l'assistance sociale, tout le monde devait travailler ensemble et les médecins y jouaient un rôle eux aussi. C'était peut-être une façon différente de réunir tout le monde dans une même salle, mais ce tribunal semble fonctionner.

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    Mme Faye Dewar: Marliss et moi-même siégeons toutes les deux à ce comité. L'un des problèmes que nous voyons est que c'est une obligation; l'intéressé n'a pas de choix. Il doit ou aller en prison ou accepter le traitement. Il s'agit en quelque sorte d'un programme forcé. En tant que membre de la communauté et intervenante convaincue que les communautés devraient intervenir, je pense qu'il devrait y avoir certains choix avec ce genre de choses, et j'y vois donc des problèmes. C'est pourquoi je siège à ce comité. J'aimerais apporter certains changements afin que ce ne soit pas imposé, car, la plupart du temps, lorsqu'une personne est forcée à subir un traitement, cela ne fonctionne pas.

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    La présidente: Êtes-vous en train d'essayer de monter la même chose à Edmonton?

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    Mme Marliss Taylor: Oui, nous avons lancé ce processus à la toute fin de l'année dernière. La ville de Vancouver vient de lancer le sien. Chose intéressante, il y a des gens de Vancouver qui nous ont mis en garde, qui nous ont dit de faire très attention. Il y a des gens là-bas qui ne sont pas très heureux de la façon dont cela fonctionne, ce que je trouve très intéressant.

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    La présidente: Vous devriez parler aux gens à Toronto, car le tribunal y est actif depuis quelque temps déjà. Ils sont plutôt heureux des services rendus aux gens et des résultats obtenus. Nous avons en fait entendu une personne qui avait eu quelques démêlés avec la loi qui a dit au juge: vous savez, monsieur le juge, j'irais dans l'autre sens et j'aurais déjà terminé le programme. Il est beaucoup plus difficile de rester ici et de travailler à ces questions. Je suis toujours ici. Nous avons été plusieurs à être un petit peu méfiants, mais nous avons été extrêmement impressionnés par la coopération dont ils ont fait preuve.

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    Mme Marliss Taylor: Je pense que cela dépend du groupe cible. À Edmonton, ce tribunal pour les drogues a décidé de cibler les personnes d'origine autochtone. Nous visons donc les groupes les plus marginalisés, ceux qui ont le plus de problèmes, qui souffrent le plus de pauvreté et de discrimination et qui sont les plus défavorisés au départ. Il existe très peu de filets de sécurité pour les gens. C'est pourquoi j'hésite. Nous verrons bien. J'aurais presque voulu choisir un groupe un peu moins vulnérable, car si cela ne fonctionne pas, sur qui va-t-on rejeter le blâme, qui va-t-on pointer du doigt?

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    La présidente: Enfin, se fait-il beaucoup de travail de réduction des méfaits avec des médecins et des dentistes dans cette province? Pour les personnes qui utilisent des médicaments en vente libre ou sur ordonnance, différentes provinces ont en place différents systèmes. Il a été quelque peu choquant de voir quels systèmes ne sont pas en place dans certaines provinces. S'est-on beaucoup attaché à intégrer dans le programme médecins, dentistes et pharmaciens?

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    Mme Marliss Taylor: C'est sans doute davantage là le domaine de spécialisation de Beth. Comme le savent très bien Beth et l'AADAC, l'une des difficultés a été une période d'attente de quatre ou cinq mois pour avoir de la méthadone. Certaines personnes qui sont vraiment prêtes à commencer à combattre leur toxicomanie ne parviennent pas à entrer dans le programme. Il y a donc un certain nombre de médecins qui s'occupent de la transition. Ils sont sur un terrain très glissant. L'association médicale ici ainsi que le collège ont travaillé avec nous et avec eux pour les aider avec le programme en triple afin qu'ils ne perdent pas leur licence. Mais c'est une position très difficile pour eux. Je ne leur en veux pas de nourrir quelques inquiétudes. Ils essaient de maintenir leurs patients en sécurité et en santé et, dans certains cas, je pense qu'ils risquent leur licence de médecine.

    Avec le projet NPNU pour les jeunes, les responsables du programme d'échange de seringues viennent tout juste de donner une série de conférences à l'échelle de la province pour expliquer ce qu'est la réduction des méfaits. Le titre de la série était «The Essentials of Harm Reduction». Nous avons offert un service sur place à 280 pharmaciens en activité. C'était un programme accrédité, ce qui était formidable. Nous allons régulièrement à la faculté de pharmacologie. Nous intégrons dans nos programmes des étudiants en médecine, en soins infirmiers, en travail social et en pharmacologie. Je constate un réel virage et je dirais que les jeunes qui participent commencent, faute d'un autre terme, à comprendre qu'il y a différentes façons d'exercer.

    Nous autres de la vieille école, infirmières et médecins de mon âge et d'autres, avons un réel combat à mener ici. Je pense qu'il est plus facile de travailler lorsque vous avez devant vous quelqu'un qui vous dresse la liste de ce que vous faites mal, qui vous dit ce que vous devez faire et qui vous réexpédie. S'ils ne le font pas, alors ils ont manifestement un problème, un défaut. Les médecins commencent maintenant à comprendre que la réduction des méfaits c'est le fait d'être honnête, de ne pas avoir à mentir, de ne pas avoir à fournir toute une liste des choses que vous faites mal. Il s'agit de regarder ce que vous faites bien. Je pense que ces changements d'attitude s'en viennent. Nous y arriverons, avec les départs en retraite et l'attrition naturelle.

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    Mme Faye Dewar: En tant que travailleuse de santé mentale, je dois dire que cela a été très difficile pour moi d'oeuvrer dans le monde médical, car celui-ci fait une séparation entre la santé mentale et la toxicomanie. Si le client a des problèmes de toxicomanie, les services de santé mentale n'y toucheront pas, car les médecins ne vont pas traiter une personne qui est toxicomane. Il y a donc eu une absence de connexion entre les deux, s'agissant de traiter les deux problèmes.

    Il existe un certain nombre de bons programmes. Il y a un bon programme à Ponoka, qui s'intéresse à la schizophrénie ou à la santé mentale et aux toxicomanies. Mais le participant doit se porter volontaire. Il n'y a dans le cadre du programme que 18 lits et il y a une longue liste d'attente.

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    J'ignore comment l'AADAC traite de certaines de ces situations, mais je constate que mes clients qui souffrent de problèmes de santé mentale ne se font pas, de ce fait, soigner dans les centres de traitement de la toxicomanie. Il y a eu certains rapprochements, mais si le patient va à Henwood ou à Poundmaker's, il ne peut pas prendre de médicament pour soigner son problème mental, car ces centres ne s'occupent que de toxicomanie. Il y a donc eu certains problèmes de part et d'autre. Pour les gens de la rue qui inhalent des solvants et d'autres choses du genre, il ne se fait cependant rien du tout.

    Je pense que les cas SAF et EAF vont être un gros problème. J'ignore comment nous allons faire, car ces personnes ne sont pas intellectuellement équipées pour comprendre les résultats en bout de ligne et autres choses du genre. Ils vivent pour aujourd'hui et pour maintenant; c'est ainsi qu'ils se font attirer par tout ce qui brille sans se rendre compte de ce qui peut leur arriver. Il y a donc des problèmes de ce côté-là et il faudrait investir beaucoup plus dans ces gens-là.

  +-(1235)  

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    Mme Beth Lipsett: Je préside le groupe de travail sur les toxicomanies qui relève du NPNU. Nous nous intéressons tout particulièrement à l'éducation des médecins, car il y a clairement des problèmes de ce côté-là. À l'heure actuelle, un médecin qui est par exemple intéressé par le méthadone doit suivre un cours et prendre une décision délibérée, étant donné l'infrastructure requise pour pouvoir soigner ce segment de la population. Il y a très peu de médecins ainsi équipés à l'échelle de la province et très peu à Edmonton même. C'est là un aspect qui commence tout juste à être examiné, et cela sera sans doute très étroitement lié au travail que fait le groupe de travail auquel siège Marliss.

    Les pharmaciens avec lesquels nous oeuvrons à l'échelle de la province sont très au courant de la réduction des méfaits et du traitement d'entretien à la méthadone. Il s'agit d'une perspective étroite et non pas large.

    À part cela, je dirais que nous avons beaucoup de chance au site d'Edmonton. Cela fait près de dix ans que nous avons deux psychiatres qui viennent trois fois par semaine à la clinique pour voir des clients de l'AADAC. On est en train de se pencher sur le trouble concomitant. En tout cas, il y a sur place une capacité d'examen de cela conjointement avec le conseiller en toxicomanie. Nous organisons par ailleurs deux groupes conjointement avec les Alberta Mental Health Services. Un groupe de clients de l'AADAC qui souffre de troubles mentaux se réunit chaque semaine avec un conseiller en toxicomanie et un travailleur en santé mentale, et, chaque semaine, des clients des Alberta Mental Health Services qui ont été identifiés comme souffrant principalement de problèmes de santé mais qui sont également toxicomanes sont vus par les deux mêmes personnes. Ce n'est pas exhaustif, mais il s'offre néanmoins un certain nombre de choses à l'intérieur de notre cadre.

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    La présidente: Est-ce qu'à l'AADAC vous participez à l'éducation des médecins? Franchement, nous avons entendu dire à certains endroits que ce sont eux le problème. Ils donnent des ordonnances pour 90 comprimés de Dilaudid à des drogués.

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    Mme Beth Lipsett: Si nous sommes au courant d'un problème, nous prenons contact avec l'intéressé, mais souvent nous n'en savons rien. Le client ne va pas nous en parler.

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    La présidente: Non, mais dans un cas, nous avons rencontré un gamin dans un programme de maintien à la méthadone. Il avait été hospitalisé et avait reçu des analgésiques, mais personne n'avait vu que ces médicaments créaient un problème pour lui. Il a disparu de l'hôpital un samedi soir et il a maintenant une méchante toxicomanie parce que personne ne lui a dit: tu prends un peu trop d'analgésiques et peut-être qu'ils ne font pas que gérer ta douleur.

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    Mme Beth Lipsett: Je pense que cela doit commencer à la faculté de médecine. La toxicomanie n'est pas un grand sujet de préoccupation à l'école de médecine. Il ne s'y fait pas beaucoup d'éducation en la matière. Personnellement, je ne comprends pas comment les médecins peuvent terminer leurs études sans comprendre cela, étant donné que ce sont eux qui vont prescrire ces produits. Il y a définitivement des lacunes dans le programme d'études de médecine.

  -(1240)  

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    La présidente: Vous avez ici deux écoles de médecine.

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    Mme Beth Lipsett: Nous avons l'University of Alberta et--

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    La présidente: Est-ce que Calgary a une faculté de médecine?

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    Mme Beth Lipsett: Oui.

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    La présidente: Mais existe-t-il à votre connaissance un programme qui diffuse les renseignements que vous possédez?

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    Mme Beth Lipsett: Il existe un cours, mais il est plutôt maigre. Nous allons rencontrer les étudiants en soins infirmiers et les étudiants en médecine, mais c'est un total de deux heures sur un cours de combien d'années? C'est rien du tout. C'est un problème énorme.

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    Mme Deborah Foster: L'intervention de HIV Edmonton s'est pour la plupart résumée à prendre des étudiants, surtout des étudiants en pharmacologie, des étudiants en soins infirmiers, un peu comme Marliss vous a expliqué les choses. Nous n'avons pas eu de programme adressé à ceux qui oeuvrent déjà dans le domaine.

    J'aimerais maintenant vous dire autre chose relativement à l'histoire du type avec le Dilaudid. Ce que nous constatons dans le cas de nombre de nos clients est qu'ils ne partent pas à la recherche d'aide médicale car on leur donne une ordonnance pour un médicament qui devrait les aider, mais vu qu'ils sont des drogués de la rue, le médicament en question ne fait rien du tout contre leur douleur. Je pense qu'il nous faut également faire de l'éducation dans ce domaine et faire en sorte que les utilisateurs de drogues injectables et autres puissent dire à leurs médecins et à leurs pharmaciens: écoutez, voici ce que j'utilise tout simplement pour survivre et pour faire taire les voix que j'entends, alors vous devez me donner tant de plus pour ma rage de dent.

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    La présidente: Oui, dans l'un des centres on nous a parlé de la question des quantités. Bien sûr, si l'un quelconque d'entre nous autour de la table avait absorbé ne serait-ce que la moitié de ce qu'ils prennent, cela nous aurait tué. C'était plutôt effrayant.

    Madame Gunn.

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    Mme Kate Gunn: J'aimerais dire quelques choses relativement au travail avec les pharmaciens, par exemple. Je pense que l'association des pharmaciens siège au NPNU, et nous espérons que le film documentaire auquel nous travaillons sera largement distribué et utilisé avec les étudiants, dans les salles de classe. Deborah et Beth ont dit que nous allons rencontrer les étudiants, mais on ne peut pas les rencontrer tous, et souvent la discussion n'est pas aussi approfondie qu'on le voudrait.

    Chez HIV Edmonton, nous avons également la chance d'accueillir à intervalles réguliers des étudiants qui sont placés chez nous pour travailler d'égal à égal avec des travailleurs sociaux pour un stage de trois ou de six mois. J'ignore si nous avons déjà eu des étudiants en médecine. C'est une merveilleuse occasion pour nos jeunes gens qui s'intéressent au travail social de vivre la situation au jour le jour pendant six mois et de constater les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Ce genre de chose est certainement bénéfique.

    Nous travaillons très étroitement et de façon individuelle avec des médecins dans la clinique du nord de l'Alberta et dans diverses cliniques pour séropositifs. En fait, il y a des membres de notre conseil d'administration qui oeuvrent dans ce domaine. Nous avons donc de bonnes relations individuelles, mais pour ce qui est d'une initiative d'ensemble, je pense qu'il reste encore beaucoup de travail à faire en la matière.

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    La présidente: Merci à vous tous pour le temps que vous avez consacré à la préparation de vos mémoires et à vos témoignages ici aujourd'hui. Merci également pour tout le travail que vous faites jour après jour, pour votre passion et pour votre désir d'apporter de grands changements. J'ai également trouvé votre optimisme très rafraîchissant. Je ne sais pas comment vous faites certains jours. Nous vous sommes reconnaissants de votre participation et s'il y a des choses auxquelles vous songez au cours des mois à venir et dont vous aimeriez nous entretenir ou si vous trouviez la solution magique, nous serions ravis d'avoir de vos nouvelles. Encore une fois, nous apprécions beaucoup le temps que vous nous avez consacré.

    Nous allons reprendre à 13 heures. La séance est levée.