JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la justice et des droits de la personne
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 6 février 2003
¿ | 0905 |
Le président (L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.)) |
Me Marie-France Bureau (membre du conseil d'administration, Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec) |
¿ | 0910 |
Me Jacques Papy (membre du conseil d'administration, Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec) |
Me Marie-France Bureau |
¿ | 0915 |
Le président |
M. Richard Hudon (Association des familles chrétiennes) |
¿ | 0920 |
¿ | 0925 |
Le président |
Mme Monica Perazzo (coordonnatrice, Association des mères lesbiennes du Québec) |
Mme Gabriel Pinkstone (coordonnatrice, Association des mères lesbiennes du Québec) |
¿ | 0930 |
¿ | 0935 |
Le président |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
¿ | 0940 |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
M. Richard Hudon |
M. Richard Marceau |
¿ | 0945 |
Me Marie-France Bureau |
Le président |
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) |
¿ | 0950 |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
¿ | 0955 |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.) |
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.) |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
À | 1000 |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
Mme Monica Perazzo |
M. Pat O'Brien |
Mme Gabriel Pinkstone |
Mr. Pat O'Brien |
Mme Gabriel Pinkstone |
Le président |
M. Richard Marceau |
À | 1005 |
Me Jacques Papy |
Me Marie-France Bureau |
M. Richard Marceau |
Le président |
M. John McKay |
À | 1010 |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. John McKay |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. John McKay |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. John McKay |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. John McKay |
Mme Gabriel Pinkstone |
Le président |
M. Svend Robinson |
M. John McKay |
M. Svend Robinson |
À | 1015 |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
M. Svend Robinson |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
Me Marie-France Bureau |
M. Pat O'Brien |
M. Richard Hudon |
À | 1020 |
M. Pat O'Brien |
Le président |
M. Richard Marceau |
Me Jacques Papy |
Le président |
Me Jacques Papy |
Le président |
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.) |
Me Marie-France Bureau |
À | 1025 |
M. John Maloney |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. John Maloney |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. John Maloney |
Mme Gabriel Pinkstone |
Le président |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
À | 1030 |
Le président |
M. Réal Ménard |
Me Marie-France Bureau |
Le président |
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.) |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Derek Lee |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Derek Lee |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Derek Lee |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Derek Lee |
Mme Gabriel Pinkstone |
À | 1035 |
M. Derek Lee |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Derek Lee |
Le président |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Richard Hudon |
À | 1040 |
Le président |
M. Richard Hudon |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Vic Toews |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Vic Toews |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Vic Toews |
Mme Gabriel Pinkstone |
M. Vic Toews |
Mme Gabriel Pinkstone |
Mr. Vic Toews |
Mme Gabriel Pinkstone |
Me Marie-France Bureau |
Le président |
M. John McKay |
À | 1045 |
Me Jacques Papy |
M. John McKay |
Me Jacques Papy |
M. John McKay |
Me Jacques Papy |
Le président |
M. Svend Robinson |
À | 1050 |
M. Richard Hudon |
M. Svend Robinson |
Le président |
M. Svend Robinson |
Mme Monica Perazzo |
M. Svend Robinson |
Le président |
M. Svend Robinson |
Le président |
M. Pat O'Brien |
À | 1055 |
Le président |
Mme Monica Perazzo |
Le président |
M. Pat O'Brien |
Mme Monica Perazzo |
Le président |
M. Richard Hudon |
Le président |
M. Richard Marceau |
Mme Monica Perazzo |
Mme Gabriel Pinkstone |
Mme Monica Perazzo |
Mme Gabriel Pinkstone |
Le président |
Me Marie-France Bureau |
Me Jacques Papy |
Le président |
Me Marie-France Bureau |
Le président |
Mme Monica Perazzo |
Le président |
Á | 1100 |
M. Richard Hudon |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la justice et des droits de la personne |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 6 février 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare ouverte la 14e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude du mariage et de la reconnaissance des unions de conjoints de même sexe.
Aujourd'hui, nous accueillons trois groupes de témoins: de la Table de concertation des gais et lesbiennes du Québec, Me Marie-France Bureau et M. Jacques Papy, de l'Association des familles chrétiennes, M. Richard Hudon, de l'Association des mères lesbiennes, Monica Perrazo et Gabriel Pinkstone.
Je crois qu'on vous a déjà priés de limiter vos remarques liminaires à 10 minutes. Je vous ferai signe peu de temps avant que votre temps de parole ne soit épuisé, mais je vous encourage à ne pas dépasser les 10 minutes afin que nous ayons le plus de temps possible pour la période de questions.
Je m'en tiendrai à l'ordre qui figure à mon ordre du jour; je cède donc immédiatement la parole à la Table de concertation des gais et lesbiennes du Québec.
[Français]
Me Marie-France Bureau (membre du conseil d'administration, Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec): Merci beaucoup de cette invitation à témoigner devant le comité permanent à l'occasion de ces consultations.
Je m'appelle Marie-France Bureau. Je suis avocate et membre du Barreau du Québec depuis 1997, ainsi que membre du conseil d'administration de la Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui de mon confrère Jacques Papy, qui est également membre du Barreau du Québec et membre du conseil d'administration de la Table.
La Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec, qui existe depuis près de 10 ans, est un organisme qui regroupe l'ensemble des organisations gaies et lesbiennes du Québec, ce qui représente plus d'une soixantaine d'organisations communautaires et de défense des droits des gais et lesbiennes.
L'accès au mariage est une préoccupation et une revendication centrale des communautés lesbiennes et gaies du Québec et a été un cheval de bataille important pour la Table. La Table a notamment été à l'origine d'une large coalition formée de diverses organisations de la société civile, y compris des principaux syndicats du Québec, de la Fédération des femmes du Québec et de nombreuses organisations de défense des droits des gais et lesbiennes. Cette coalition a été nommée la Coalition québécoise pour la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe et a été, entre autres, intervenante dans le dossier Hendricks/Leboeuf devant la Cour supérieure du Québec, dossier de mariage qui est présentement en cour d'appel. Elle a aussi été très active dans les consultations publiques sur la Loi instituant l’union civile et établissant de nouvelles règles de filiation au Québec.
Notre présentation d'aujourd'hui portera principalement sur deux thèmes. Dans un premier temps, mon collègue exposera les raisons pour lesquelles l'établissement d'un statut parallèle au mariage ou le maintien du statu quo sont inacceptables d'un point de vue juridique et constitutionnel et sur le plan des valeurs d'égalité au sein de la société canadienne. Dans un deuxième temps, j'exposerai pourquoi il nous semble que l'élargissement du mariage aux conjoints de même sexe est l'option à suivre et en quoi cette solution profiterait à tous les Canadiens. Je cède donc la parole à mon confrère pour qu'il vous expose notre premier point et, à la suite de nos deux présentations, nous serons ravis de répondre à vos questions en anglais ou en français.
¿ (0910)
Me Jacques Papy (membre du conseil d'administration, Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec): Monsieur le président, l'organisme que nous représentons s'oppose fermement à la création d'un registre fédéral. Ce serait, quant à nous, une initiative malheureuse pour trois séries de raisons différentes: juridiques, pratiques et surtout symboliques.
Le droit constitutionnel de notre pays est complexe, surtout lorsqu'il s'agit de division des pouvoirs. Même s'il apparaît que formellement, le gouvernement fédéral posséderait la compétence pour créer un tel registre, en réalité, celui-ci aurait une nature et un objectif tels que sa substance relèverait du domaine provincial. La jurisprudence constante de la Cour suprême du Canada à ce sujet tend à nous indiquer qu'un tel registre serait certainement considéré comme étant ultra vires.
Sur le plan pratique, outre qu'il provoquerait un enchevêtrement législatif compliqué, ce registre nécessiterait une collaboration étroite entre les différents gouvernements provinciaux et fédéral. L'histoire récente de nos institutions nous montre plutôt la fragilité d'une telle initiative.
Enfin, sur le plan symbolique, si le registre était ouvert à tous, sans distinction de sexe, la discrimination persisterait puisque les couples de même sexe auraient toujours une option de moins que les couples de sexes différents, qui auraient toujours la possibilité de se marier. Si le registre est fermé aux couples de sexes différents, la conséquence est encore plus insupportable puisqu'il s'agira alors de la mise en place d'un régime de ségrégation, d'un registre officiel et public des homosexuels canadiens. Nous sommes d'avis qu'il vaudrait mieux ne rien avoir plutôt qu'une institution fédérale nouvelle consacrant notre statut ainsi que celui de nos enfants comme citoyens de seconde catégorie.
La proposition de retrait de l'État dans la définition du mariage ne nous paraît pas non plus envisageable. Il s'agit d'une question débordant largement le droit à l'égalité et à la dignité. Cela touche la répartition des compétences entre les différentes autorités publiques, l'étendue du pouvoir normatif des autorités religieuses dans la sphère publique et la définition de la laïcité dans un État démocratique.
De plus, ce débat permet la dérive vers une réflexion sur les formes alternatives de reconnaissance de liens d'interdépendance économique, tel que, par exemple, la Commission de réforme du droit a pu l'évoquer. Quant à nous, ce discours est aujourd'hui, dans le cadre de cette commission, complètement inacceptable. Nous adhérons au modèle conjugal dominant du couple en tant que cellule sociale de base destinée à élever et à protéger nos enfants, ainsi qu'à assurer le bien-être de ses membres et de la communauté en général.
Nos époux et épouses ainsi que nos enfants méritent d'obtenir les mêmes protections et la même reconnaissance sociale que les autres familles. Ramener nos familles à de simples liens d'interdépendance économique constitue la pire forme de discrimination, la négation de notre existence, c'est-à-dire «l'invisibilisation» de qui nous sommes vraiment.
Je vous remercie.
Me Marie-France Bureau: Je voudrais enchaîner sur la proposition qui consiste à demander au Parlement d'élargir la définition du mariage afin d'y inclure les conjoints de même sexe, qui nous apparaît clairement comme l'option qui correspond le mieux aux principes d'égalité, de liberté de choix et de religion, et qui répond le mieux aux exigences constitutionnelles d'une société démocratique et pluraliste.
Au-delà des considérations d'égalité, qui sont assez claires--la Cour suprême s'est prononcée sur la question--, cette solution permettrait à l'État d'assurer son rôle laïque dans la réglementation du mariage de façon conforme aux valeurs contemporaines canadiennes. Le mariage en tant qu'institution séculière devrait être accessible à tous les Canadiens, sans discrimination fondée sur le sexe. En effet, le rôle de l'État à l'égard du mariage est de faciliter l'ordonnancement de rapports privés entre individus. Il s'agit de fournir un cadre juridique stable pour réglementer l'interdépendance économique et affective entre adultes. Il est désormais clair que le désir de s'unir, la volonté de faire vie commune dans un cadre juridique stable, à travers une symbolique et un rituel publics, n'ont rien à voir avec l'orientation sexuelle.
Il a été reconnu, ici comme dans la plupart des pays occidentaux, qu'il n'y a aucune raison maintenant de maintenir une hiérarchie entre les sexualités, entre les divers types d'unions conjugales stables. Bien sûr, lorsqu'il est question du mariage, on s'insurge et on considère que c'est une institution qui, de par son essence même, consacre l'union monogame hétérosexuelle. À cet égard, l'influence religieuse colore encore le débat sur le mariage dans une société séculière et laïque. Cependant, il faut réaliser que l'institution a évolué et continue d'évoluer, et qu'elle s'est transformée avec les époques. On n'a qu'à songer au divorce, à la responsabilité parentale partagée, à la liberté de reproduction, au partage du patrimoine familial, etc. Donc, il est clair que le mariage est une institution dont les règles n'ont pas été fixées à jamais.
Par contre, une discrimination qui perdure depuis si longtemps et l'attachement à certaines traditions peuvent faire apparaître l'exclusion des gais et lesbiennes du mariage comme étant naturelle, comme allant de soi. On a pu naturaliser cette exclusion et cette discrimination, mais c'est une pente dangereuse que de naturaliser de telles exclusions.
Mais c'est évidemment une question émotive, et certains groupes religieux hésitent à modifier la notion de mariage. Il faut se rappeler que le mariage civil entre personnes de même sexe n'interfère en rien avec la liberté de religion. Cela vous a certainement été mentionné plusieurs fois. Les confessions religieuses maintiendront toujours, en vertu du principe de la liberté de religion, le choix de célébrer certaines unions ou non.
En terminant, je voudrais rappeler le rapport de la Commission du droit du Canada, Au-delà de la conjugalité, que vous avez tous certainement eu le loisir de confirmer, où l'une des conclusions claires à l'égard du mariage était que si les gouvernements maintenaient une institution appelée «mariage», ils ne pouvaient le faire de manière discriminatoire. Après toutes leurs années de travaux et leurs consultations à travers le pays, je crois que c'est une question claire.
Maintenant, je voudrais aussi rappeler que la Table de concertation des lesbiennes et des gais du Québec a identifié une série d'avantages que la modification de la définition du mariage procurerait à l'ensemble des citoyens québécois. Vous pouvez le voir dans notre mémoire aux pages 13, 14 et 15. Les avantages pour les gais et lesbiennes sont assez évidents. Il y a aussi de clairs avantages pour les enfants. Les avantages pour le Canada, pour l'État, sont la promotion de la solidarité intrafamiliale, la responsabilisation et la solidarité des couples et des familles, et certainement le dégagement du fardeau social de l'État. L'uniformité et l'harmonisation de la législation à l'échelle nationale sont tout à fait dans l'intérêt de l'État. Cela provoquerait aussi, évidemment, une réduction des conflits de lois et des contestations judiciaires nombreuses ayant trait à la reconnaissance de la conjugalité et de la parentalité homosexuelles, et cela contribuerait certainement à augmenter la cohésion sociale et confirmerait le rôle de leader du Canada en matière de protection des droits de la personne. Il faut rappeler que la Belgique est passée à l'action la semaine dernière.
Je vous remercie.
¿ (0915)
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Hudon, à vous la parole.
M. Richard Hudon (Association des familles chrétiennes): Je vous ferai part d'abord de la raison manifeste qui m'a amené ici. L'Association of Christian Families est pour le statu quo. En fait, nous préconisons un renforcement du statu quo. Mon vieux dictionnaire Webster's Collegiate définit le mariage comme suit: l'institution sociale permettant aux hommes et aux femmes de s'unir dans une forme de dépendance juridique et sociale particulière dans le but de fonder une famille.
En français, le Quillet Flammarion définit le mariage comme étant «l'union légitime d'un homme et d'une femme». On ne saurait être plus clair.
Étant donné qu'il existe déjà une définition juridique du mariage, je n'insisterai pas là-dessus; je dirai simplement que cette définition juridique combine les deux énoncés précédents et les exprime en termes juridiques.
Pourquoi voudrait-on modifier cette définition tout à fait sensée pour accéder au souhait d'un pourcentage infinitésimal de notre population, soit environ 0,02 p. 100? Acquiescer aux demandes des activistes homosexuels qui veulent être inclus dans la définition du mariage est de la pure folie. C'est une aberration, tout comme la légalisation de la mort sous forme d'avortement.
Le mariage est une institution tout à fait bien comme elle est. Le mieux qu'on pourrait faire serait de la renforcer. Déjà, certaines mesures fiscales sont anti-famille; certaines institutions corrompent et détruisent le mariage; ce qu'on appelle les unions de fait se sont vues conférer les mêmes privilèges matrimoniaux et constituent un affront aux lois matrimoniales. C'est cela qu'il faut changer, et non pas la définition du mariage.
Le mariage est peut-être en déclin, mais il n'est pas encore mort. Le mariage est encore le mode de vie que préfèrent les familles. Des études de l'Institut Vanier, de REAL Women of Canada et de Vie humaine internationale le prouvent. Les statistiques font état de l'augmentation du taux de divorce et de la prévalence du concubinage qui mène à la désintégration de l'ordre social.
Le mariage reste le choix le plus fréquent pour la formation d'une famille—et j'insiste sur la formation de la famille, car sans mariage, il n'y a pas de véritable famille—bien davantage que ces autres formes répugnantes de vie commune.
Je maintiens qu'il incombe à notre société non seulement de conserver le statu quo, mais de le renforcer. De nombreuses études ont démontré que les enfants élevés dans une famille même dysfonctionnelle s'en tirent mieux que ceux qui vivent dans des soi-disant familles monoparentales ou dans d'autres milieux qui perpétuent la fornication. Ainsi, si nous maintenons et renforçons le statu quo, si nous aidons les couples mariés, notre société n'en sera que meilleure.
Toutefois, si nous persistons à expérimenter avec l'institution du mariage, notre société est vouée à la disparition. Nous ne pouvons prospérer socialement et financièrement que dans le cadre de la famille sanctionnée par le mariage et renforcée dans sa bonté. Vous connaissez tous le vieil adage qui dit que le mieux est l'ennemi du bien.
Même les adolescents et les préadolescents savent que le mariage et la famille sont d'une importance suprême dans notre société. Vous voulez des preuves? En voici. Vous vous souvenez sans doute du tohubohu qui avait entouré le sondage qu'avaient mené Élections Canada et l'UNICEF auprès d'enfants d'âge scolaire au Canada en 1999. Il semble qu'on tentait de prouver que la famille, et par conséquent, le mariage, n'était pas une priorité pour les enfants. Les résultats du sondage ont prouvé qu'ils avaient tort et on n'en a plus entendu parler. On s'est réfugié dans le silence en constatant cet échec.
Saviez-vous que, de tous les droits qu'on a présentés à ces enfants, le droit de vivre dans une famille est celui qui a obtenu le plus de voix? Le silence assourdissant des opposants au mariage et à la famille ne m'étonne pas, mais pourquoi a-t-on passé sous silence les résultats de cette enquête?
¿ (0920)
Dans notre société, comme jadis, le mariage et la famille ont toujours servi à renforcer la nation. Pour notre information à tous, je cite le délégué de l'Iran qui, devant le Conseil des dirigeants mondiaux réunis à New York en janvier 2001, a déclaré que la famille est l'unité fondamentale de la société où, nous convenons tous, les valeurs humaines, morales et éthiques sont inculquées aux enfants et où les enfants apprennent à devenir des adultes responsables.
La famille est en effet l'unité fondamentale de la société, et le mariage a toujours été la meilleure façon de s'assurer que les familles sont générées d'une famille et au sein d'une famille. Du mariage proviennent les héros fidèles, les saints et les saintes, les braves.
Les activistes homosexuels réclament maintenant à corps et à cris une définition du mariage qui inclurait le mariage d'un homme à un autre. Quelle idée ridicule. Ne faisons pas l'erreur d'accéder à une demande si absurde. Dans la bougrerie et la fellation, de leurs pratiques sexuelles aberrantes, deux hommes ne peuvent procréer. Si nous osons modifier l'institution du mariage et la corrompre dans nos lois, nous assisterons à la corruption de notre société aussi.
La loi sert à éduquer et si elle permet les comportements autres que les comportements naturels, elle entraîne l'effondrement de la civilisation. L'homme et la femme ont été créés pour se compléter, même si tout n'est pas toujours rose quand ils exercent leur complémentarité dans le lit matrimonial. Mais c'est encore ce que nous avons de mieux et toute tentative de modifier l'institution du mariage est vouée à l'échec. Si vous changez la loi de façon à permettre les mariages homosexuels, vous contribuez à la destruction de notre civilisation. Mes propos sont-ils prophétiques? Peut-être. Sont-ils choquants? Je l'espère.
Voici ma dernière remarque au nom de l'Association of Christian Families. Si nous changeons la loi, changeons-la pour le mieux, ne la corrompons pas pour faire plaisir au nombre minuscule d'homosexuels activistes.
Merci.
¿ (0925)
Le président: Mesdames Perazzo et Pinkstone, vous avez la parole.
[Français]
Mme Monica Perazzo (coordonnatrice, Association des mères lesbiennes du Québec): Bonjour et merci de nous avoir convoquées et de nous permettre de faire une présentation ce matin. Nous sommes ici pour représenter l'Association des mères lesbiennes du Québec. Donc, nous représentons plus de 200 familles qui habitent le Québec.
Je m'appelle Monica Perazzo. Moi et ma conjointe, Gabriel Pinkstone, sommes ensemble depuis neuf ans. Nous sommes toutes deux membres du conseil d'administration de l'Association des mères lesbiennes du Québec.
J'aimerais rappeler la position de l'association, soit son soutien à la proposition de mettre fin à la discrimination dans la Loi sur le mariage et donc d'y inclure les couples de même sexe ainsi que ceux de sexes opposés.
Le mariage est important pour nous parce qu'il est un rituel. Le mariage permettrait la reconnaissance de notre union et de notre amour face à l'État et à notre communauté, mais il nous permettrait aussi de faire allégeance de notre union, de nos droits et de nos devoirs face à l'État et à notre communauté. C'est un acte public qui sortirait nos unions et nos amours du silence ou de la honte. Le mariage public reconnu par l'État nous offrirait le même soutien symbolique et juridique dont les couples hétérosexuels bénéficient présentement.
Cela fait neuf ans que Gabriel et moi sommes interdépendantes émotivement et financièrement, mais notre union reste toujours bafouée par la Loi sur le mariage actuelle et fait l'objet d'une discrimination. De plus, nous prévoyons avoir des enfants bientôt et nous les imaginons faisant face à la discrimination qui existe dans la société, mais surtout à l'école. Nous les imaginons revenant de l'école et se faisant dire que leur famille n'est pas normale ou qu'eux-mêmes ne sont pas normaux parce qu'ils ont deux mères plutôt qu'une mère et un père. Nous pourrions leur dire à ce moment-là que c'est faux, qu'ils sont égaux aux autres, normaux vis-à-vis des autres, compte tenu du fait que nous sommes mariées comme tous les autres parents et qu'il n'y a donc pas de raisons de faire de discrimination et de continuer à souffrir de la violence qui émane de la discrimination causée par l'homophobie.
L'accès au mariage contribue à éradiquer la discrimination que subissent nos familles, nos enfants et chacun d'entre nous. Cela fera de nous des citoyens canadiens à part entière plutôt que des citoyens de deuxième classe, comme nous nous sentons présentement. Je laisse maintenant la parole à Gabriel.
[Traduction]
Mme Gabriel Pinkstone (coordonnatrice, Association des mères lesbiennes du Québec): Comme l'a indiqué Monica, l'Association des mères lesbiennes recommande au gouvernement canadien de ne retenir que la position prévoyant l'accès au mariage pour les couples de gais et de lesbiennes. Ce n'est pas seulement pour les raisons symboliques qu'a énoncées Monica. Cela aurait aussi des répercussions bien pratiques. À l'heure actuelle, nos droits et responsabilités comme couples et parents varient beaucoup d'une province à l'autre et nous devons souvent faire appel aux tribunaux pour les obtenir. Les règles d'adoption, par exemple, varient beaucoup, comme la situation des parents non biologiques. Au Québec, nous avons la chance d'avoir accès à l'union civile depuis 2002, ce qui nous confère les mêmes droits et responsabilités que les couples mariés, mais pas la reconnaissance sociale dont a traité Monica. Mais dès que nous quittons le Québec, cette protection ainsi que la protection de nos enfants disparaît. Il y a des provinces qui ont une institution semblable, mais, encore une fois, les caractéristiques varient beaucoup.
Actuellement, les gais et les lesbiennes, ainsi que leurs familles, doivent compter sur le courage politique des gouvernements provinciaux. Or, les droits ne devraient pas être à la merci des changements en politiques provinciales et nous ne devrions pas en théorie devoir nous fier au courage du gouvernement fédéral. Il s'agit ici de droits. En accordant le droit au mariage, on indiquerait très clairement aux provinces que la discrimination contre les homosexuels est inacceptable. Dans un tel contexte, il serait bien difficile pour les provinces de ne pas corriger leurs lois pour supprimer ce genre de discrimination.
Pourquoi sommes-nous contre les autres propositions? Le mariage est un symbole social très puissant, l'état conjugal suprême. Refuser aux couples homosexuels l'accès à cet état, c'est dire que nos relations ne le méritent pas. Comment peut-on justifier une telle situation? Ce n'est rien d'autre que de la discrimination. Je ne suis pas moins engagée, moins aimante ou moins responsable que mon frère ou que ma belle-soeur. Pourquoi ma relation fait-elle de moi une citoyenne de seconde zone? Pourquoi n'ai-je pas droit au même choix? Pourquoi mes enfants sont-ils moins bien protégés que les autres enfants canadiens? Pourquoi sont-ils moins bien protégés que leurs cousins? Bien des hétérosexuels décident de ne pas se marier. Ils ont ce choix, quelle que soit leur aptitude de conjoints ou de parents. Moi, je n'ai pas ce choix.
Le mariage est un symbole social extrêmement important qui a une longue histoire. Certains invoquent cette raison pour s'opposer aux changements de la définition. C'est un raisonnement vicié. Selon cette logique, les femmes n'auraient jamais eu le droit de vote et l'esclavage serait encore légal. La société a évolué. Un droit fondamental reste un droit fondamental. Parfois, il faut attendre que la société rattrape son retard.
Ce n'est pas parce que nous sommes l'objet de discrimination qu'on doit se ranger dans le camp des auteurs de cette discrimination. Plutôt, cela devrait nous motiver à éradiquer cette discrimination. Le fait que nous soyons victimes de discrimination ne justifie pas la confirmation de notre statut inférieur, surtout quand on se fonde sur la perception et non sur la réalité. Au contraire, c'est précisément parce que nous sommes victimes de discrimination sociale et juridique que le gouvernement devrait une fois pour toutes supprimer cet obstacle au traitement égal. Si nous ne respectons pas notre propre Charte, que vaut-elle?
Certains membres de notre société sont intimement convaincus que cette discrimination doit se poursuivre. Toutefois, ce n'est pas parce que leurs voix sont fortes que leur conviction est justifiée, pas plus qu'un groupe de racistes n'auraient raison tout simplement parce qu'ils le clament haut et fort. Il ne s'agit pas de sondages ou de croyances religieuses. Le Canada est une démocratie séculaire, pas un concours de popularité. C'est une question de droit et de discrimination.
En théorie, en vertu de la Charte, j'ai les mêmes choix, le même statut et la même reconnaissance sociale que tous les autres Canadiens. En réalité, ce n'est malheureusement pas le cas. Ma partenaire, nos futurs enfants et moi souffrirons tous d'être considérés comme des citoyens de seconde zone.
Je ne peux concevoir que le gouvernement canadien envisage de maintenir le statu quo ou de créer un régime distinct pour les couples homosexuels. Ces deux options ne supprimeraient nullement la discrimination dont nous sommes victimes quotidiennement; bien pire, elles ne feraient que renforcer l'idée selon laquelle nous sommes inférieurs et que nous ne méritons pas d'être considérés comme des égaux.
La Commission canadienne des droits de la personne, la Commission du droit du Canada, ainsi que les tribunaux ontariens et québécois ont tous déclaré que rien ne justifie le maintien de la distinction actuelle. Il incombe maintenant au gouvernement de changer cette situation plutôt que de s'en remettre à la procédure judiciaire.
¿ (0930)
Il importe de noter que donner aux gais et lesbiennes le droit de se marier ne changera rien pour les hétérosexuels. Cela n'enlèvera rien aux autres ni n'empiétera sur leurs droits. Par contre, si on continue de dénier ce droit aux couples homosexuels, on ne fait qu'enchâsser la discrimination.
Quel effet aurait l'octroi du droit de se marier aux gais et lesbiennes? Cela mettrait fin à la discrimination juridique dont sont victimes les couples homosexuels, une discrimination qui est censée être déjà interdite par notre Charte. Cela nous donnerait les mêmes droits relativement à notre situation conjugale que les hétérosexuels et, par conséquent, la même liberté de choix que les autres Canadiens.
Ce serait un message très convaincant sur la valeur et l'égalité de nos relations et de nos familles. Les couples homosexuels et leurs familles jouiraient des mêmes droits et de la même protection dans tout le pays et seraient ainsi des citoyens égaux aux autres. Ce serait un symbole très fort de notre désir de ne plus accepter l'homophobie et la discrimination qu'elle entraîne au Canada.
En dépit des réactions émotives que suscite ce débat, le problème n'est pas insoluble. Il est extrêmement simple. En vertu de la Charte, les gais et les lesbiennes ont les mêmes droits que tous les autres Canadiens. L'exclusion actuelle des gais et lesbiennes du mariage va directement à l'encontre de ce principe. Le gouvernement canadien n'a qu'un choix: permettre aux couples homosexuels de se marier. Toute autre solution ne ferait qu'enchâsser une discrimination injustifiable.
Merci.
¿ (0935)
Le président: Merci à tous de vos exposés.
Je cède maintenant la parole à M. Toews, pour sept minutes.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Nous avons aujourd'hui un exemple frappant des vues contraires qui existent au Canada concernant l'institution du mariage. Nos opinions se fondent sur les présomptions morales et autres de chacun, et je ne crois pas que les questions que je poserai aux témoins pourraient changer cela.
En dernière analyse, le Parlement devra trancher en fonction de ce que nous aurons entendu et des croyances personnelles de chacun d'entre nous, les parlementaires. Il n'incombe pas aux tribunaux de trancher; c'est nous qui devrons prendre cette décision.
Après avoir entendu les témoignages d'aujourd'hui, j'estime que nous ne pouvons qu'écouter les divers groupes pour ensuite prendre la décision qui nous semble la plus juste. Par conséquent, je n'ai pas de question qui pourrait aider notre comité dans ses délibérations.
Le président: Est-ce qu'un autre député allianciste voudrait prendre la parole?
Monsieur Marceau, vous avez sept minutes.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président.
D'abord, merci beaucoup pour vos présentations, que j'ai trouvées fort intéressantes. Ce sont toujours des enjeux fort délicats. En revanche, je dirai que je suis en désaccord avec mon collègue Vic Toews, de l'Alliance canadienne, qui affirme que ce n'est pas un enjeu juridique; je pense que c'est fondamentalement un enjeu juridique. Je commencerai par poser des questions à M. Hudon.
Monsieur Hudon, est-ce que vous êtes marié?
M. Richard Hudon: Oui, monsieur.
M. Richard Marceau: Moi aussi, je suis marié avec une femme.
Si Mme Perazzo et Mme Pinkstone avaient le droit de se marier, est-ce que cela enlèverait quelque chose à votre union avec votre épouse?
M. Richard Hudon: La réponse immédiate est que ça n'enlèverait rien à notre union, mais que ça enlèverait à la société une stabilité qui n'existe pas en dehors du mariage dit normal.
M. Richard Marceau: Ne croyez-vous pas qu'en reconnaissant aux homosexuels le droit de se marier, on ajouterait, au contraire, de la stabilité? Ils ou elles célébreraient leur mariage et concluraient un contrat légal défini de façon assez précise dans toutes les lois du pays. Donc, au lieu d'enlever de la stabilité, ça en ajouterait.
M. Richard Hudon: Pas du tout. C'est une corruption de l'état de mariage. Le mariage est établi pour un couple de personnes de sexes opposés. C'est ce qui a été ordonné dès une époque précédant la chrétienté. Pourquoi? Parce qu'on nous a donné la possibilité, dans cette liaison particulière, de fonder une famille avec deux personnes de sexes différents, ce qui démontre que l'union est stable. L'homme et la femme sont conçus pour se compléter. La femme n'est pas conçue pour se faire compléter par une autre femme. L'homme n'est pas conçu pour se faire compléter par un autre homme.
M. Richard Marceau: Je suppose que c'est parce que vous êtes un représentant des Familles chrétiennes que vous pensez que c'est donné par Dieu.
¿ (0940)
M. Richard Hudon: Assurément.
M. Richard Marceau: Je suis catholique. Je ne sais pas si vous l'êtes, mais ce n'est peut-être pas pertinent. L'Église catholique ne permet pas le divorce. L'État, donc le gouvernement laïque, a dit qu'il n'avait pas à appliquer des normes d'une religion particulière en matière de divorce. Jamais l'État n'a pris quelque moyen que ce soit pour forcer l'Église catholique à marier des gens divorcés.
J'ai un autre exemple. L'Église catholique ne veut pas ordonner de femmes prêtres. Jamais l'État n'a forcé l'Église catholique à ordonner des femmes prêtres même si, en surface, c'est discriminatoire.
Est-ce qu'en permettant aux homosexuels et aux lesbiennes de se marier... J'essaie de comprendre en quoi cela vous enlève quelque chose, monsieur Hudon, vous qui êtes hétérosexuel et marié, ou en quoi cela briserait la société au lieu de la renforcer.
M. Richard Hudon: C'est une très longue question, mais la discrimination est nécessaire dans notre société. Est-ce qu'on va mettre un meurtrier en prison ou si on va le laisser libre? Il faut faire de la discrimination. Un meurtrier ne doit pas être libre dans la société.
M. Richard Marceau: Attendez un instant. Est-ce que vous faites une analogie entre un homosexuel et un meurtrier?
M. Richard Hudon: Non, j'y arrive. Je veux dire que le mariage est conçu pour fonder une famille, pour avoir des enfants. Il y a une façon très spéciale de concevoir des enfants à laquelle deux femmes ne peuvent pas avoir recours; ça prend un homme. La biologie elle-même nous l'indique.
M. Richard Marceau: La procréation est un point important. Si c'est la base du mariage, qu'est-ce qu'on fait avec une femme infertile ou avec une femme qui n'est plus capable de concevoir un enfant? Si le but du mariage est la procréation, est-ce qu'on doit empêcher ces femmes-là de se marier?
M. Richard Hudon: C'est une question à laquelle il n'y a pas de réponse. C'est une question idiote.
M. Richard Marceau: Pourquoi?
M. Richard Hudon: Parce que lorsque la femme ou l'homme est infertile dans un mariage, le couple peut toujours adopter un enfant.
M. Richard Marceau: Oui, mais qu'est-ce qui empêcherait des femmes ou des hommes d'adopter un enfant?
Vous me permettrez de vous signaler que je pose mes questions avec le plus grand respect, que je n'ai pas qualifié vos réponses de quelque façon que ce soit. Je n'ai pas dit qu'elles étaient intelligentes ou idiotes. Je vous demande, par respect pour les députés, de faire la même chose.
M. Richard Hudon: Je dois vous dire que le fait que l'État n'intervient pas dans la religion est une bonne chose; c'est une forme de discrimination. Si l'Église, par le passé, s'ingérait dans les affaites de l'État, c'était parce que l'État était faible. Maintenant, nous avons un État fort, une Église forte. Il faut savoir vivre ensemble. Il doit y avoir, comme vous dites, le respect de l'un envers l'autre. Si l'État civil permet des choses qui ne sont pas permises par la religion ou par Dieu... Moi aussi, je suis un catholique, un vrai. Je ne sais pas si vous êtes un vrai catholique. Je crois dans tout ce que l'Église enseigne. C'est très important. Les préceptes moraux de la religion catholique sont infaillibles.
M. Richard Marceau: Merci, monsieur Hudon.
Maître Bureau et maître Papy, certains groupes disaient qu'on avait peur que les organisations homosexuelles--c'est la question qui a été posée--forcent ou tentent de forcer les Églises à marier des couples homosexuels.
Si on décidait de se diriger vers le mariage homosexuel, est-ce que vous seriez à l'aise si ce comité proposait d'inclure dans une loi un article semblable à l'article 367 du Code civil du Québec, qui stipule que l'État ou un ministre du culte ne peut être forcé d'unir des gens si cela va contre les croyances de sa religion? Je ne crois pas que ce soit nécessaire, compte tenu de la protection concernant la liberté de religion prévue à l'article 2 de la Charte, mais si on proposait cela, est-ce que vous seriez à l'aise?
¿ (0945)
Me Marie-France Bureau: Tout à fait. Du point de vue d'une assurance que le pluralisme religieux existe, cela ne me pose aucun problème. Je crois aussi que ce n'est pas nécessaire en ce qui concerne la Charte. Je pense que le droit de ne pas subir de discrimination et la liberté de religion peuvent coexister, et ils coexistent très bien. En fait, il y a beaucoup de conflits dans une société pluraliste. Il y a des points de vue divergents, et en général, les conflits se résolvent souvent en faveur de la liberté de religion au détriment du droit de ne pas subir de discrimination, pour les gais et lesbiennes. On pense notamment aux divers cas d'éducation, etc. qui ont été soumis à la Cour suprême du Canada. On pourrait très bien réitérer, comme on l'a fait dans le Code civil lors de l'adoption de l'union civile, qu'aucun ministre du culte ne peut être contraint de célébrer des unions contre sa volonté. Je pense que cela pourrait rassurer tout le monde et que personne dans les différentes communautés gaies et lesbiennes n'aurait d'objection à cela.
Le mariage laïque, dans une société séculière, peut être ouvert à tout le monde, et ce fait peut contribuer au pluralisme religieux et au pluralisme de la société, à la diversité en général, puisque je crois que le mariage et la célébration du mariage peuvent se décliner d'autant de façons qu'il y a de Canadiens et de groupes au Canada. L'État n'a pas le contrôle de ce qu'est le mariage ou la célébration du mariage. Je pense qu'il appartient à chacun des Canadiens de définir ce qu'est le mariage pour lui. Un couple peut choisir quelque chose de laïque, de juridique et simplement aller à l'hôtel de ville pour se marier. Pour un autre, ce sera quelque chose de profondément religieux, de spirituel, qui aura lieu dans son église, dans sa synagogue, dans sa congrégation. Pour d'autres, ce sera simplement une cérémonie entre amis avec un officier de l'État civil. Je crois qu'il y a toutes sortes de façons de vivre le mariage, et c'est ce qu'il y a de merveilleux dans cette idée de changer le mariage.
L'État a un rôle séculier, une obligation d'avoir un certain minimalisme moral, parce qu'on est dans la sphère publique et qu'on doit avoir un compromis citoyen afin que tous les Canadiens puissent accéder aux mêmes protections, aux mêmes droits.
Est-ce que cela empêche les gens de vivre leur vie privée, spirituelle, religieuse, amoureuse à leur façon? Non, au contraire. D'ailleurs, on voit que le mariage devient presque désuet maintenant. Au Québec, il y a 30 p. 100 d'unions libres. C'est peut-être parce que l'institution est en train de se nécroser. L'institution a changé. Lorsqu'on parle du fait que l'institution a toujours été, depuis la chrétienté, faite d'une telle manière, cela me fait un peu sourire. Si on pense simplement aux 30 dernières années, à la puissance paternelle... La mère, en l'absence du père, ne pouvait consentir à quoi que ce soit pour ses enfants. Est-ce qu'on peut concevoir cela maintenant? Est-ce qu'on peut concevoir que le mari contrôle tous les biens et que la femme mariée devienne comme une incapable ou une mineure? On ne peut plus concevoir cela. L'institution a profondément changé, et je crois qu'il faut continuer à la modifier de façon à ce que les Canadiens y croient encore. Donc, l'inclusion des conjoints de même sexe pourrait contribuer à la rendre moins agressive, à la débarrasser du bagage dont une grande partie des gens ne veulent plus maintenant.
[Traduction]
Le président: Merci.
C'est maintenant au tour de M. Robinson, qui a sept minutes.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci monsieur le président. Sachez que j'ai écouté les témoins avec beaucoup d'attention et, parfois, avec douleur et colère.
[Français]
J'aimerais remercier tous les témoins que nous avons entendus ce matin.
[Traduction]
Pour une rare fois, je suis essentiellement d'accord avec M. Toews: les points de vue présentés ce matin sont fortement contrastés. J'aimerais que tous les Canadiens aient l'occasion d'écouter et de voir la séance de ce matin, et je suis convaincu qu'ils seraient alors en grande majorité en faveur de la reconnaissance du droit au mariage pour les gais et les lesbiennes. On est saisi par le contraste entre la dignité, l'éloquence et le respect des témoins de la Table de concertation des gais et lesbiennes du Québec et l'Association des mères lesbiennes du Québec et la diatribe haineuse et vitriolique de l'Association of Christian Families.
Monsieur Hudon, vous nous avez fait un bien bel étalage des valeurs chrétiennes, ce matin!
Je croyais revenir 18 ans en arrière, lorsque le premier comité parlementaire s'est penché sur la question de l'égalité pour les gais et lesbiennes. Je faisais partie du comité. Nous étions sept: cinq conservateurs, une libérale du Québec, Sheila Finestone, et moi-même. Nous étions à Burnaby. Les tout premiers témoins étaient un groupe de mères lesbiennes. Elles avaient apporté des photos de leur famille et le comité était bien étonné.
Si je ne m'abuse, Philip Rosen était à ces audiences. Il s'en rappellera sans doute. C'était un moment extraordinaire, parce que des membres du comité n'avaient jamais songé que les lesbiennes avaient des enfants, qu'il existait des familles lesbiennes.
Quand j'entends M. Hudon, par exemple, dire qu'il faut un homme pour fonder une famille, sauf le respect que je lui dois, je dois lui dire: «Monsieur Hudon, vous avez tort. Il suffit d'une poire à jus, comme celles avec lesquelles on arrose les dindes».
La semaine prochaine, je déposerai un projet de loi, comme je le fais depuis de nombreuses années à l'occasion de la Saint-Valentin, pour faire reconnaître le droit des gais et des lesbiennes de se marier, appuyé par mon collègue, Réal Ménard, député ouvertement gai comme moi.
Je pourrais faire miens les commentaires de mon ami, M. Marceau. Cela ne menace en rien votre mariage, monsieur Hudon. Vous dites aussi que le mariage c'est une question de procréation. Or je n'ai rien vu qui me laisse croire que les couples hétérosexuels commenceraient à faire moins d'enfants si moi, un homme gai, je pouvais épouser mon partenaire Max. Nous n'avons pas décidé si nous nous marierons, si nous en avons la possibilité, mais nous voulons avoir ce choix.
J'ai une question pour M. Hudon: qu'est-ce qui laisse croire que les couples hétérosexuels commenceraient à avoir moins d'enfants? «Bonté divine, on a permis aux gais de se marier, cessons tout de suite de faire des enfants». Non, je ne crois pas que cela se produise.
Il faudra peut-être reconnaître que nous ne pouvons nous entendre, mais j'invite M. Hudon à se rendre compte que nous devrions célébrer la diversité des familles de ce pays. Ma famille est aussi valable et aussi forte... Je vous ai déjà montré ma carte de Noël, avec la photo de ma famille: mon partenaire, Max, notre filleule, Mireta, et son petit ami le dinosaure. C'est notre famille et de la reconnaître ne vous fera aucun mal.
Je veux signaler aussi que Mme Bureau, je crois, a éloquemment présenté cet argument. M. Hudon a parlé du fait que la famille hétérosexuelle existe depuis des milliers d'années, comme le mariage hétérosexuel, et qu'on ne peut rien y changer. Jusqu'à tout récemment, l'une des caractéristiques du mariage, c'était qu'on ne pouvait accuser un homme d'avoir violé sa femme, puisqu'elle était sa propriété. Pendant des milliers d'années, monsieur Hudon, c'était un élément du mariage, de votre conception du mariage.
Avons-nous eu tort de changer la loi? Oui ou non?
¿ (0950)
M. Richard Hudon: La seule réponse que vous méritez, tout d'abord, c'est que vous manquez de charité chrétienne en me traînant dans votre monde de l'homosexualité que j'abhorre et que je ne suis pas tenu de répondre, parce qu'aucune réponse n'est possible. Il faut encore un homme et une femme pour faire un enfant. D'où vient donc le sperme? Est-ce le sperme de la dinde? Tout de même!
M. Svend Robinson: Je vous demande: avons-nous eu tort de changer la définition du mariage quant au droit de la femme de ne pas être violée au sein même du mariage? Il en était ainsi, pendant des milliers d'années.
M. Richard Hudon: Votre question ne mérite pas de réponse.
M. Svend Robinson: Vous n'avez pas l'intention de répondre à ma question?
M. Richard Hudon: Pas du tout.
M. Svend Robinson: Il n'aurait donc pas fallu changer l'institution du mariage pour respecter le droit de la femme de ne pas être violée par son époux, parce qu'il en était ainsi depuis des millénaires.
M. Richard Hudon: Le viol dans le mariage est exceptionnel. Des études l'ont prouvé. Que voulez-vous de plus?
M. Svend Robinson: Pourriez-vous nous en dire davantage?
M. Richard Hudon: Nul besoin. Cela fait partie de notre société. L'homme n'a pas toujours opprimé les femmes. Ce sont les autorités civiles, et le droit civil, et non pas l'homme, qui ont opprimé les femmes en ne leur accordant pas le droit de vote et nous essayons de changer de nouveau la loi, pour faire précisément le contraire, pour corrompre le mariage.
M. Svend Robinson: Et je présume...
M. Richard Hudon: Et... Laissez-moi terminer.
M. Svend Robinson: Volontiers, allez-y.
M. Richard Hudon: Merci. Quand je dis corrompre le mariage, j'entends que notre société aura toutes sortes de problèmes. Un enfant pourra avoir jusqu'à trois mères ou jusqu'à trois pères, grâce à l'insémination artificielle. Je ne sais pas si vous avez envisagé ces options.
M. Svend Robinson: Je vais vous poser une question. On a dit plus tôt, je crois, que le Québec est la province où il y a le plus grand nombre d'unions de fait au pays—environ 30 p. 100, je crois. Ce sont des statistiques récentes.
D'après votre témoignage, monsieur Hudon, vous vous opposez fermement à la reconnaissance des unions de fait.
M. Richard Hudon: Certainement, c'est une aberration.
¿ (0955)
M. Svend Robinson: Bien. Et vous leur enlèveriez tous les avantages qui leur ont été consentis?
M. Richard Hudon: Non, je ne le ferais pas. Tout ce qu'il leur faut, c'est d'être reconnus comme vivant ensemble pour poursuivre. Ont-ils besoin d'aide? La société est là pour les aider. Même la religion peut les aider. La foi catholique a toujours aidé les opprimés, ceux qui ont des problèmes, les homosexuels, peu importe. La foi catholique aide tous ceux qui ont besoin d'aide, même si vous êtes homosexuel. Si vous avez besoin d'aide et que la seule personne qui peut vous l'offrir est catholique, cette personne a le devoir de vous aider.
M. Svend Robinson: Comme l'archevêque Law de Boston, par exemple?
M. Richard Hudon: Ce sont des exceptions.
M. Svend Robinson: Ah, ce sont des exceptions.
M. Richard Hudon: Oui, monsieur. Permettez. Vous sortez un cas de son contexte et vous l'appliquez à toute une religion. C'est une tactique diabolique. C'est une tactique dont vous vous servez pour démolir ce qui est logique et sain.
Le président: C'est maintenant M. O'Brien qui a la parole, pour sept minutes.
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Merci, monsieur le président.
Sans vouloir être facétieux, pendant quelques instants, je me croyais au Comité de l'agriculture, lorsqu'on parlait de dindes, de poires à sauce et tout le tralala.
Je ne formulerai pas de commentaires au sujet des témoins d'aujourd'hui. Je dois dire que j'ai parlé à beaucoup de gens, pour et contre, ici, à Ottawa, comme dans ma circonscription, et j'ai rencontré des porte-parole, pour les deux côtés, qui étaient très polis et éloquents et d'autres, très grossiers et simplistes et cela, je le répète, pour les deux côtés, monsieur le président. C'est du moins ce que j'ai personnellement constaté.
J'ai quelques commentaires et quelques questions. Je ne suis pas avocat et je ne prétends pas m'y connaître en droit, mais...
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Vous ne pouvez pas dire ce genre de chose à notre comité.
M. Pat O'Brien: On ne peut pas dire ça? Je m'y connais en histoire, toutefois, et je sais que dans les pays démocratiques, les tribunaux ont déjà trouvé des justifications à l'esclavage et à diverses formes de discrimination, par exemple. Je me demande si un appel aux tribunaux est vraiment le dernier bastion de la raison, pour quelque question que ce soit, bien franchement. Les avocats ici présents savent sans doute qu'il n'y a pas à aller bien loin du Canada pour trouver des pays démocratiques où les plus hauts tribunaux ont légitimé l'esclavage.
Des deux côtés, on a dit que... J'ai entendu des contradictions, monsieur le président, et j'aimerais fouiller un peu la question.
Pour commencer, je dirai moi aussi qu'il ne s'agit pas d'abord d'une question de nombres. Contrairement à M. Hudon, au sujet du nombre infinitésimal de personnes qui voudraient d'un mariage homosexuel, je peux dire bien franchement que là n'est pas la question. Je ne m'en cacherai pas, je l'ai dit en public, à bien des reprises, dans ma circonscription. Il faudrait m'en convaincre.
Mais ce n'est pas une question de petits nombres ou de volume des voix exprimées à ce sujet, comme un autre témoin l'a dit. Cela ne justifie pas la discrimination. Mais d'autres, Mme Bureau, que je peux citer, je crois ont dit qu'il fallait suivre le rythme de l'évolution des croyances des Canadiens. Si vous parlez d'un changement possible à la définition du mariage, je ne peux parler qu'au nom de ma circonscription. J'ai déployé beaucoup d'efforts pour connaître l'opinion de mes électeurs là-dessus. Ils sont très majoritairement opposés à un changement à la définition du mariage.
J'ai une question à ce sujet, pour vous. Si on doit suivre l'évolution des croyances des Canadiens, pourquoi tenons-nous ces audiences? Je vous dirai qu'il est assez clair que les Canadiens s'opposent très majoritairement au changement à la définition du mariage, du moins, dans ma circonscription.
Me Marie-France Bureau: Pour commencer, je dirais que tout dépend de la circonscription et de la région du Canada, bien entendu, mais ensuite, j'ajouterai que peu importe la popularité de la chose. Beaucoup de réformes ont été faites, en ce qui touche les minorités raciales et les femmes, qui n'étaient pas populaires et qui n'avaient pas la faveur d'une écrasante majorité. Souvent, les privilégiés et ceux qui ont le pouvoir s'opposent à ce que les avantages et les privilèges soient accordés aux défavorisés, mais ce n'est pas une bonne justification.
À (1000)
M. Pat O'Brien: Je le comprends, mais je vous citais. Je l'ai écrit soigneusement: «suivre l'évolution des croyances des Canadiens». Je crois que vous vous êtes contredite. Si nous voulons suivre l'évolution des croyances des Canadiens, le président peut tout de suite mettre fin à la séance, nous allons rentrer chez nous et garder le statu quo.
Me Marie-France Bureau: Je parlais plutôt de l'idée que se font les Canadiens du mariage, et de ce qu'ils veulent y voir. Il n'y a pas que le fait que les gais et les lesbiennes demandent l'inclusion dans le mariage, ce qui pourrait ne pas être populaire, mais si le mariage n'évolue pas, de moins en moins de Canadiens s'y intéresseront. C'est pourquoi la Cour suprême assimile maintenant les unions de fait au mariage.
M. Pat O'Brien: Merci pour cette réponse. Bien sincèrement, et respectueusement, je ne crois pas que c'était là l'un de vos meilleurs arguments puisque si nous suivons l'évolution des croyances des Canadiens, nous mettrions fin dès maintenant aux audiences, rentrerions chez nous et garderions intacte la définition actuelle du mariage.
J'aimerais poser une question à Monica.
Vous avez formulé un commentaire très intéressant pour moi. Encore une fois, je vais vous citer, au sujet de la crainte que vous avez que vos enfants soient l'objet de moqueries parce que la famille «n'est pas normale, parce qu'ils ont deux mères».
Je suis enseignant, et non avocat, et j'ai beaucoup de sympathie pour les enfants qui sont l'objet de la cruauté délibérée ou non de leur pairs, et qui en souffrent beaucoup. Comment un changement à la définition du mariage pourrait-il empêcher ce genre de moqueries? Si vous étiez soi-disant «mariées», qu'est-ce que cela changerait au fait que vos enfants auraient deux mères et pourraient être l'objet de moqueries? Je ne vois pas la logique, pouvez-vous m'aider?
Mme Monica Perazzo: J'en appelle au symbolisme du mariage et à l'égalité que cela nous conférerait. Les enfants sont des enfants et ceux des familles gais et lesbiennes feraient l'objet de discrimination à l'école et en dehors de l'école. Quand je dis que leurs familles ne seraient pas normales, je parle du point de vue discrimination. Nous voulons pouvoir dire à nos enfants: vos amis à l'école ne vous comprennent pas, par ignorance, par peur de la différence, ou pour d'autres raisons, mais nous sommes reconnus par le Canada, par nos lois, par notre communauté et notre famille a la même valeur que celles de vos amis».
M. Pat O'Brien: Si vous permettez cette interruption, j'avais bien compris que c'était ce que vous vouliez dire, mais ce que vous avez vraiment dit est très intéressant et c'est pourquoi j'en ai pris note.
Vous disiez que parce que vos enfants auraient deux mères, ils feraient l'objet de moqueries. Je dois vous dire que les tribunaux et les gouvernements ne peuvent rien changer à la réalité, vos enfants auront deux mères. Rien ne peut changer cette réalité, n'est-ce pas?
Mme Gabriel Pinkstone: Puis-je intervenir?
Mr. Pat O'Brien: Oui, s'il vous plaît.
Mme Gabriel Pinkstone: En fait, nous sommes comme un vieux couple marié.
La différence c'est que, par exemple, si un enfant noir se fait injurier, le gouvernement et la société civile disent clairement que le racisme n'est pas acceptable. Mais pour nos enfants et ceux de nos amis, lorsqu'ils sont dans cette situation, l'État n'est d'aucun secours. Il y a bien sûr la Charte, mais le gouvernement n'y a pas donné suite. En théorie, nos enfants ont les mêmes droits que les autres enfants canadiens, mais le gouvernement n'est pas allé plus loin.
Je suis d'accord avec vous, ce n'est pas aux tribunaux d'en décider mais au gouvernement.
Le président: Merci, monsieur O'Brien.
Monsieur Marceau, vous avez la parole.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci, monsieur le président.
Un des enjeux est le problème de la reconnaissance. Tout à l'heure, Mme Perazzo ou Mme Pinkstone a fait allusion aux problèmes de l'union civile au Québec et au fait que lorsqu'on sort du Québec, on n'a plus les mêmes protections. Le même problème se pose un peu à une échelle plus large, c'est-à-dire au niveau international.
J'aimerais avoir votre avis sur les complications juridiques qui peuvent naître de la reconnaissance du mariage des homosexuels au Canada et sur l'effet que cela peut avoir au niveau international. Mme Pinkstone m'a dit qu'elle était Australienne. Si un jour elle décidait de retourner en Australie avec sa conjointe, Mme Perazzo, ça pourrait causer certains problèmes. D'un point de vue juridique, qu'est-ce que vous pensez de ce problème?
À (1005)
Me Jacques Papy: Vous avez abordé la question de la portabilité d'un régime d'union civile, ne serait-ce qu'à l'extérieur de la province. On pourrait même simplement rester au Canada pour s'apercevoir des difficultés que ça peut présenter. Les pays scandinaves, par exemple, ont passé un accord reconnaissant la validité de leurs régimes respectifs d'union civile, ce qui permet, à l'intérieur de la Scandinavie, la portabilité de ces régimes.
Pour ce qui est du mariage, la situation varie d'un pays à l'autre en fonction de la mise en oeuvre du droit international privé à l'intérieur de chacun de ces pays. Concrètement, ça veut dire la chose suivante. Si le mariage est ouvert aux conjoints de même sexe, au Canada, et que des conjoints de même sexe canadiens veulent faire reconnaître leur union en Belgique, ça ne posera pas de problème puisque la Belgique reconnaît maintenant cette institution. C'est la même chose aux Pays-Bas.
Maintenant, parlons de la reconnaissance d'un tel mariage en France. La question par rapport à la mise en oeuvre du droit international privé français dépendra de la nature de la revendication des conjoints. Par exemple, en France, alors que le mariage polygamique est interdit, il peut quand même y avoir des effets reconnus, à l'intérieur du territoire français, d'un mariage polygamique valablement contracté à l'étranger. Donc, ce sont des effets atténués. Il n'y a pas une pleine reconnaissance du mariage, mais il y a quand même une certaine reconnaissance. Donc, je dirais que des conjoints canadiens qui seraient ainsi mariés pourraient recevoir un certain nombre de bénéfices. Je pense, par analogie au mariage polygamique, au droit à la sécurité sociale, aux différents bénéfices sociaux qui en résulteraient.
Pour ce qui est de l'Australie, je ne connais pas le droit international privé australien. Je ne peux pas vous répondre, mais cela varie d'un pays à l'autre.
Me Marie-France Bureau: Je dirai qu'un mariage entre personnes de même sexe au Canada aurait des chances d'être reconnu au Vermont, où il y a une union civile identique au mariage, et certainement dans les pays scandinaves et dans d'autres pays européens. Donc, il y a de plus en plus de pays qui reconnaîtraient, quant à moi, l'institution. À mesure que les pays adopteront des lois similaires, il y aura de plus en plus de portabilité.
M. Richard Marceau: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Marceau.
Monsieur McKay, vous avez trois minutes.
M. John McKay: Si vous le permettez, monsieur le président, j'aimerais lire un échange entre un écrivain qui s'appelle Kurtz et un autre qui s'appelle Rauch—il s'agit de la réponse de Kurtz à un article intitulé Amour et mariage.
En sous-titre, l'article est intitulé: «Pour un mariage, il faut un homme et une femme, et un amendement»:
On peut dire que c'est le mariage même, et pas seulement les femmes et les enfants, qui domestique l'homme. |
Je pense que cet article veut faire ressortir que le mariage, comment dire, dompte la sexualité masculine...
À mon avis, le mariage n'y parvient qu'en s'appuyant sur la dynamique sous-jacente de la sexualité homme-femme. |
...en d'autres termes, il n'y a pas de mariage sans sexualité homme-femme, ce serait une contradiction, si on veut...
En effet, le mariage invoque une attente publique de fidélité et de soutien mutuel par des gestes rituels comme la cérémonie du mariage. Qu'il y ait ou non cérémonie, le public ne condamnera pas un homme qui trompe un autre homme ou qui ne soutient pas financièrement son partenaire masculin. La cérémonie du mariage symbolise et renforce les sentiments publics qui existent déjà au sujet de la responsabilité d'un homme à l'égard d'une femme; ce sentiment ne saurait être créé de rien. |
Et plus loin il ajoute:
...le mariage homosexuel représente une attaque radicale de premier plan sur les fondations mêmes du mariage. On isole ainsi le mariage de la dynamique particulière de la sexualité hétérosexuelle, séparant le mariage de son lien étroit avec la procréation, et on ouvre la voie à remplacer le mariage par une série d'arrangements contractuels d'une infinie variété. |
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Votre argument fondamental c'est qu'il s'agit d'une question de droit, d'une question de reconnaissance de l'égalité. L'argument contraire, c'est que ce n'est pas une question de droit, c'est plutôt que l'essence même du mariage c'est le sexe hétérosexuel.
À (1010)
Mme Gabriel Pinkstone: Je n'ai pas entendu la question. C'est à nous que vous vous adressez?
M. John McKay: À tout le monde.
Mme Gabriel Pinkstone: Je pense qu'il est important de dissocier l'idée de la famille de l'idée d'un homme, d'une femme et de leurs enfants dans le contexte d'un mariage.
Je ne vais pas me lancer dans les données statistiques car je ne suis pas une experte, mais nous savons qu'au Québec, 30 p. 100 des couples ne se marient pas. Nous savons qu'il y a de nombreuses familles monoparentales au Québec. Je crois que c'est de l'ordre de 25 p. 100. Il y a des familles divorcées, des familles reconstituées, de nombreux genres de familles.
Dans d'autres cultures...
M. John McKay: Excusez-moi un instant...
Mme Gabriel Pinkstone: Permettez-moi de finir cette idée.
Il y a de nombreux genres de familles. Donc, même dans le contexte hétérosexuel, c'est tout à fait absurde de dire qu'il n'y a qu'une seule sorte de famille.
Il est également absurde de penser qu'en empêchant les homosexuels de se marier, cela les empêche d'avoir une famille. Nous avons déjà des familles. Ce que nous avons, ce sont des familles qui ne jouissent pas des mêmes droits que les autres familles canadiennes. Nous avons des enfants qui n'ont pas les mêmes droits que les autres enfants canadiens. Ils ne jouissent pas de la même protection si l'un des parents meurt ou si les parents se séparent.
Ce que nous tentons de faire en fait, c'est de renforcer leur famille. Nous tentons de nous assurer que nos familles sont bien protégées, car elles existent et elles vont continuer à exister.
M. John McKay: Permettez-moi de vous faire remarquer que ce n'est pas un argument au sujet de la famille, c'est un argument au sujet du mariage.
Mme Gabriel Pinkstone: Oui, et le mariage sur la plan social...
M. John McKay: Nous sommes d'accord pour dire qu'il y a toutes sortes de formes de familles dans notre société, et que leur nombre augmente, peut-être tout à fait légitimement. Mais l'argument porte sur ce qu'est le mariage.
Mme Gabriel Pinkstone: Dans votre propre citation, le mariage est intimement lié au fait d'élever une famille.
Lorsque vous rencontrez quelqu'un, lorsque vous tombez amoureux, que vous soyez homosexuel, hétérosexuel, ou peu importe, il y a cette série de choses que les gens s'imaginent. Vous tombez amoureux. Vous commencez à sortir. Vous prenez des engagements. Vous achetez une maison. Et ensuite que faites-vous? Vous avez des enfants. Voilà ce que font les gens. C'est ce que nous faisons aussi.
Lorsque M. Hudon parle de la destruction de la société, je ne sais pas ce qu'il s'imagine que je fais. Je vais à l'épicerie. Je m'inquiète du fait que ma mère vieillit, voyez-vous? Je planifie ma retraite et je me dis est-ce que j'aurai suffisamment d'économies? Nous sommes les mêmes.
Je n'aime pas moins ma partenaire. Je ne veux pas des enfants moins que mon frère et ma belle-soeur. Nous sommes les mêmes. Nous vivons les mêmes vies, mais nous n'avons pas les mêmes protections, les mêmes droits.
Le président: Merci, madame Pinkstone.
Monsieur Robinson.
M. Svend Robinson: Merci beaucoup. Et merci de cette affirmation éloquente de ce que sont nos vies et du fait que dans certains cas, nos vies sont tout à fait ordinaires. Nous faisons face aux mêmes conflits, aux mêmes questions et aux mêmes défis que les autres familles.
C'est avec étonnement que j'ai écouté la question de mon ami M. McKay et cette idée que la colle qui tient ensemble un mariage hétérosexuel—je ne sais pas si j'interprète mal ce qu'il a dit—c'est le sexe hétérosexuel. La sexualité hétérosexuelle est...
M. John McKay: Svend, cela n'a rien à voir.
M. Svend Robinson: C'est ce qui maintient le mariage, a-t-il dit. N'est-ce pas? C'est le sexe hétérosexuel qui maintient un mariage. C'est ça la définition.
Ma foi, je n'y comprends rien... Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe, mais les homosexuels s'intéressent aussi à la sexualité. La sexualité, c'est une bonne chose. C'est sain. C'est beau. Et si dans le cadre de la célébration de notre sexualité, nous voulons que nos relations soient reconnues, je ne pense pas que ce soit nécessairement mauvais. Je pense que c'est bien. De dire: «Parce que vous ne pouvez pas avoir accès au sexe hétérosexuel, vous ne pouvez pas vous marier», cela ne nous mène pas très loin.
Je voulais obtenir d'autres précisions de M. Hudon. Je conclus que votre position—si je n'ai pas mal compris—, c'est que la sexualité hors du mariage est un péché et donc inacceptable. C'est bien cela?
À (1015)
M. Richard Hudon: C'est plus qu'un péché. Cela dévalue votre vie et ma vie.
M. Svend Robinson: Vous rejetez complètement le droit des homosexuels et des lesbiennes de se marier. Votre position c'est que les homosexuels et les lesbiennes ne devraient jamais, jamais avoir de relations sexuelles?
M. Richard Hudon: Ils peuvent avoir ce qu'ils ont, mais pas reconnu en droit comme légitime.
M. Svend Robinson: Devrait-il s'agir d'un crime?
M. Richard Hudon: Je ne dirais pas que c'est criminel. Vous pouvez avoir toutes les relations sexuelles que vous souhaitez avec quiconque. Vous pouvez faire l'acte sexuel avec des animaux si cela vous convient. Je ne vais pas vous arrêter.
M. Svend Robinson: Ça, c'est un délit criminel, monsieur Hudon.
M. Richard Hudon: Qu'est-ce?
M. Svend Robinson: Dites-vous qu'il faut abroger la loi qui interdit la bestialité?
M. Richard Hudon: Vous me faites dire des choses. Je n'aime pas ça.
M. Svend Robinson: C'est vous qui l'avez dit, monsieur Hudon. J'essaie simplement de comprendre.
Essentiellement, votre position c'est que puisque toute sexualité hors du mariage est plus grave qu'un péché encore, c'est vous qui l'avez dit—j'oublie exactement vos paroles—on peut présumer que c'est ce que devrait dire la loi.
M. Richard Hudon: Ces mots sont de vous, pas de moi.
M. Svend Robinson: Je vous pose la question.
M. Richard Hudon: Les lois n'ont à traiter que du mariage lui-même—non pas que certaines choses ne soient pas illégales dans le contexte d'une relation. La seule relation qui peut donner naissance à des enfants fait intervenir le sperme d'un homme et l'ovule d'une femme.
M. Svend Robinson: C'est exact. Pourquoi le mariage est-il nécessaire pour obtenir le sperme d'un homme?
M. Richard Hudon: Le mariage n'est pas nécessaire, mais il existe pour protéger la famille une fois qu'elle est conçue.
Le président: Merci, M. Hudon et M. Robinson.
M. O'Brien a la parole pour trois minutes.
M. Pat O'Brien: Merci, monsieur le président.
Je veux seulement poser une question à Mme Bureau au sujet de la modification de la loi. Pourquoi ne pas ouvrir les portes toutes grandes? Et si moi je veux cinq femmes, ou que ma femme veut avoir cinq maris ou un ménage à trois? Qu'est-ce qui m'empêche d'avoir une femme et un mari? C'est une question sérieuse. Si on ouvre les pertes, pourquoi ne pas les ouvrir toutes grandes? Est-ce vraiment ce que vous réclamez?
Me Marie-France Bureau: Non. Nous débattons ici de la question de savoir si les couples du même sexe devraient être autorisés à se marier. Le débat s'en tient à cela. C'est une question importante parce qu'il y a beaucoup de discrimination.
Cependant, il est sûr qu'on va poser d'autres questions, qui proviendront non pas des gais et des lesbiennes mais de la société de manière générale.
M. Pat O'Brien: Eh bien, j'en pose une justement. Je pose une question sérieuse.
Me Marie-France Bureau: Je sais. J'ai compris votre question et j'y réponds avec toute la sincérité dont je suis capable.
Je crois que le thème de notre débat est de savoir si les couples du même sexe doivent être autorisés à se marier. C'est ce que je réclame bien sûr. J'en ai fait état très clairement dans mon exposé. Toutes les questions dont nous discutons dans notre société... sont plus profondes et plus sérieuses peut-être que celle-là. Pour ce qui est de savoir maintenant si l'on peut autoriser plus d'une personne ou des relations non conjugales, ces questions ont été débattues à la Commission du droit du Canada. L'ancienne ministre de la Justice, l'honorable Anne McLellan, lui a ordonné de se pencher sur la conjugalité et l'interdépendance entre adultes.
Ce sont de bonnes questions, mais je pense que tout le monde doit être admis à bord—hétérosexuels et homosexuels—parce qu'une telle discrimination fondée sur l'orientation sexuelle est interdite dans notre pays en vertu de notre Constitution. Et si tout le monde a...
M. Pat O'Brien: Je m'en veux de vous interrompre, mais vous allez épuiser mon temps de parole. J'aimerais qu'on répondre directement à la question que j'ai posée directement.
Me Marie-France Bureau: Le débat ne porte pas sur cette question-là.
M. Pat O'Brien: Donc vous n'êtes pas disposée à y répondre. C'est très bien.
Me Marie-France Bureau: Je vous ai donné ma réponse. Je pense que votre question est étrangère à notre débat.
M. Pat O'Brien: Je respecte le droit que vous avez de ne pas répondre à la question.
M. Svend Robinson: Elle y a répondu.
M. Pat O'Brien: Sauf tout le respect que je vous dois, je ne crois pas que vous y ayez répondu.
Me Marie-France Bureau: Je ne réclame pas cela.
M. Pat O'Brien: Ma question était de savoir si la loi canadienne doit permettre à un mari d'avoir cinq femmes? Devrait-on autoriser cela à votre avis?
Me Marie-France Bureau: Je n'ai pas étudié cette question. Je ne suis pas venue ici pour ça aujourd'hui.
M. Pat O'Brien: D'accord, vous décidez donc de ne pas y répondre. Merci.
Me Marie-France Bureau: Ma réponse est ma réponse.
M. Pat O'Brien: D'accord, je comprends.
Je ne crois pas qu'il s'agisse ici de discrimination contre les gais et les lesbiennes, franchement. Je pense qu'il s'agit d'accorder une protection spéciale au couple marié tel qu'il est défini en ce moment par la loi canadienne, et à la famille traditionnelle. C'est mon opinion à moi. Je respecte les opinions des autres.
Monsieur Hudon, que pensez-vous du fait que la famille, telle que nous la connaissons maintenant, ou le couple marié tel que nous le connaissons maintenant, mérite une protection spéciale?
M. Richard Hudon: Il mérite une protection spéciale parce qu'un mariage qui est normalement fécond aura des enfants. La famille doit être protégée contre l'environnement, les pédophiles, les fous qui vont passer sur le corps des enfants avec leur voiture parce qu'ils ont le malheur de se trouver sur leur chemin. Et c'est arrivé. Il y a des fous dans le monde. Mais ces enfants méritent la protection de la loi, et les parents méritent d'être appuyés par les parlements et non par les tribunaux, pour protéger leurs enfants parce qu'ils sont mariés.
Je pense que c'est une question très importante que vous avez posée, mais je ne peux pas lui donner la réponse voulue parce que je n'y suis pas tout à fait préparé.
À (1020)
M. Pat O'Brien: C'est bien.
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Marceau.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci, monsieur le président. Trois minutes, c'est trop court, mais...
D'abord, je veux mentionner que des gens de Statistique Canada sont venus nous voir et nous ont expliqué que la famille traditionnelle, soit un homme, une femme et des enfants, constituait maintenant une minorité au Canada. Le modèle familial des années 1950 est désormais minoritaire. Ainsi, quand on parle de normalité, on peut se baser sur des études précises; c'est ce qu'on a constaté la semaine passée. Il est important de prendre cela en considération dans le cadre du présent débat.
Ensuite, je veux mentionner que malgré toute l'amitié et le respect que je porte à John McKay, je ne peux accepter son argument selon lequel by essence, marriage is between a man and a woman.
Si je me souviens bien, c'est à peu près les mots qu'il a utilisés. Je ne suis pas théologien; j'ai donc de la difficulté à définir la notion d'essence. En revanche, je suis juriste et législateur. C'est pourquoi les formes d'organisation sociétale que je connais ou sur lesquelles je peux me pencher sont nécessairement à caractère juridique.
Donc, malgré le grand respect qu'on peut avoir pour les gens qui, à cause de leurs croyances religieuses, n'acceptent pas le mariage entre personnes homosexuelles--et c'est un choix parfaitement correct--, le Comité de la justice ne doit pas se pencher sur la théologie ou sur l'essence du mariage. On doit prendre position en tant que législateurs.
Nous aurons à décider si, oui ou non, nous acceptons le mariage entre personnes de même sexe. C'est une question de nature juridique. À cet égard, je rappelle au comité qu'apparemment, toutes les cours ayant étudié la question--en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec, notamment--sont d'avis qu'en vertu de l'article 15, s'y opposer irait à l'encontre du droit à l'égalité. La question est donc de savoir si cette discrimination est justifiable dans une société libre et démocratique; ici, je fais allusion à l'article 1 de la Charte.
C'est une question juridique sur laquelle on devrait se pencher mais, à mon avis, si en tant que membres du Comité de la justice nous nous éloignons de ce principe, nous risquons de nous égarer dans des considérations sur lesquelles nous n'avons aucune prise. De fait, je ne voudrais pas être amené à légiférer sur la religion ou quoi que ce soit du même ordre.
Monsieur le président, c'était plus un commentaire qu'une question. Quelqu'un voudrait peut-être émettre une opinion. Veuillez excuser mon petit éditorial.
Me Jacques Papy: Oui, j'aimerais dire deux mots.
[Traduction]
Le président: Tâchez d'être bref. C'était une longue question.
Me Jacques Papy: Je serai très bref.
[Français]
Je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas uniquement d'une question de droit. Les valeurs mises de l'avant par notre État, la dignité et l'égalité, sont également en cause.
Le droit est avant tout un instrument de médiation auquel on a recours lorsqu'il y a divergence entre les valeurs de différents groupes qui composent notre pays. Notre position n'est pas purement légaliste; elle est aussi basée sur les valeurs du Canada d'aujourd'hui.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Vous aurez amplement la chance de répondre, monsieur Hudon. Je vais m'assurer que tous puissent poser leurs questions.
Monsieur Maloney.
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Madame Bureau, vous avez dit que le mariage est en train de tomber en désuétude. Vous avez dit également que le mariage a autant de formes diverses qu'il y a de couples qui célèbrent cette union. Est-ce qu'il n'y a pas de contradiction entre ces propos et le désir brûlant que vous avez de voir l'État reconnaître le mariage des couples du même sexe?
Me Marie-France Bureau: Je n'ai pas dit que le mariage était tombé en désuétude, mais que si nous voulons éviter cela, il faut que l'institution épouse les valeurs du Canada d'aujourd'hui. C'est ce que j'ai voulu dire.
Deuxièmement, le fait de donner aux gais et aux lesbiennes l'accès à l'institution ne détruira pas la société ou la civilisation; on en fera plutôt ainsi une institution moderne et tout à fait égalitaire. Je ne crois pas que les hétérosexuels fuiront le mariage pour autant; au contraire, je pense que le mariage deviendra moins patriarcal et moins religieux. Et je parle du mariage civil. Je ne crois pas qu'il appartienne à l'État laïc de définir le mariage.
En réponse à M. McKay, pour ce qui est du fait qu'il s'agit d'une institution hétérosexuelle fondée sur la sexualité hétérosexuelle, ce sont là des impératifs religieux et non laïcs. Dans la réglementation du mariage et de l'interdépendance entre adultes, le rôle de l'État consiste à protéger la famille et ceux qui sont vulnérables, à savoir les enfants. L'interdépendance n'a rien à voir avec l'orientation sexuelle. Je ne crois pas que l'État ait un rôle à jouer de ce côté.
Pour d'autres questions, l'État ne tient pas compte de l'orientation sexuelle. Par exemple, l'État a reconnu que si des avantages sociaux ou fiscaux sont accordés aux couples de fait, ces avantages doivent être accordés à tous. Quelle est la différence lorsqu'il s'agit du mariage?
À (1025)
M. John Maloney: Voici une question pour Mme Pinkstone, peut-être, plutôt que pour Mme Perazzo.
Vous dites que l'une des raisons pour lesquelles on peut se marier, c'est pour éviter la discrimination contre les enfants, et vous avez mentionné l'exemple des enfants dans la cour d'école. Est-ce que les enfants de couples hétérosexuels qui ne sont pas mariés vivent le même genre de discrimination? Quelle est la différence entre les deux?
Mme Gabriel Pinkstone: Peut-être que oui. En fait, j'ai voulu mentionner cela parce que M. O'Brien disait que le mariage devait accorder une protection spéciale aux enfants des couples mariés.
Je reviens au fait qu'il y a plusieurs genres de familles. Nos familles souffrent parce que l'homosexualité suscite encore de la discrimination, l'homophobie est très présente.
M. John Maloney: [Note de la rédaction: Inaudible]
Mme Gabriel Pinkstone: Les enfants qui ont une couleur de peau différente souffrent aussi. Cela ne veut pas dire que le racisme est tout à coup justifiable. Je ne vais pas refuser d'avoir des enfants parce qu'ils pourraient souffrir d'homophobie, tout comme un couple noir ne refusera pas d'avoir des enfants pour éviter à ceux-ci de souffrir dans la cour d'école parce qu'ils sont noirs.
M. John Maloney: [Note de la rédaction: Inaudible]
Mme Gabriel Pinkstone: Les enfants se taquineront toujours entre eux. Mais ce que je peux leur donner, c'est un environnement familial stable où ils se sentiront aimés, où ils apprendront à s'aimer eux-mêmes, où tout sera clair pour eux, où je n'aurai pas honte d'être ce que je suis, où je n'aurai pas honte de ma famille, où je n'aurai pas honte de les aimer, d'aimer ma conjointe, de la raison pour laquelle je les ai voulus, de notre cellule familiale.
Ce que je peux leur donner, c'est la confiance. Ce que je veux, comme Canadienne, c'est d'être appuyée par le gouvernement. Pourquoi les enfants des couples hétérosexuels jouiraient-ils d'une protection spéciale? Pourquoi ne devrait-on pas aussi, comme vous dites, protéger les enfants des couples hétérosexuels qui ne sont pas mariés?
Le président: Merci, monsieur Maloney.
Monsieur Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Si vous me le permettez, monsieur le président...
À (1030)
Le président: Vous avez trois minutes, monsieur Ménard.
[Traduction]
Ce n'est pas votre fête.
[Français]
M. Réal Ménard: Je comprends que vous trouviez que je manque parfois d'originalité, monsieur le président.
Étant en contact avec la Table depuis plusieurs années, je voudrais dire combien vos contributions au débat public sont importantes et combien il y a un risque de dérapage quand on aborde un discours comme celui-là. En même temps, il faut être sensible à l'ensemble des valeurs. J'accepte que, comme député, il me faille parfois rappeler des choses. Mais ce qui m'apparaît important, c'est d'expliquer pourquoi on veut se marier.
La raison pour laquelle on veut se marier est compatible avec des valeurs qui sont largement répandues dans la société québécoise comme dans la société canadienne, c'est-à-dire le droit à l'égalité. Cela n'a rien à voir avec la polygamie ou toute autre forme de pratique sexuelle ou d'allégeance à une forme de vie conjugale. S'il y avait un citoyen au Canada qui voulait se marier avec un partenaire de même sexe, le législateur devrait s'en préoccuper, et c'est encore plus vrai quand cela atteint les niveaux que l'on connaît.
Ma question est la suivante. Comment pouvez-vous convaincre ceux qui ne sont pas encore convaincus? On accepte que c'est un cheminement, et chacun parle avec son bagage. C'est ça, la vie politique. Les raisons fondamentales pour lesquelles les gens veulent s'engager dans une forme de reconnaissance explicite du mariage sont profondément liées à la question de la citoyenneté. Comment pouvez-vous débattre de cette question pour convaincre nos collègues?
Me Marie-France Bureau: Avec tout le respect que j'ai pour le député O'Brien, je me permettrai de dire que le fait que le mariage relève d'une protection spéciale, d'un maintien des privilèges d'une catégorie de la population est quelque chose qui me rend perplexe. Le maintien de privilèges parce qu'on appartient à tel sexe, qu'on a telle couleur de peau ou tel bagage ethnique ou parce qu'on appartient à la noblesse est quelque chose qu'on a aboli il y a peut-être 200 ans dans les sociétés occidentales, depuis la Révolution. Au Canada, de plus en plus, avec la Charte et notre avancement en matière de droits de la personne, j'ai de la difficulté à comprendre le maintien de privilèges. Qu'on ait une allégeance personnelle, qu'on ait des convictions religieuses, qu'on croie que le mariage par essence est ceci ou cela, c'est très bien, car je pense qu'il y a de la place pour la diversité au Canada. Il y en a énormément et dans tout le reste on l'accepte, je crois. Dans tous les autres domaines de la vie, on accepte qu'il y ait une diversité de vues, d'opinions morales ou religieuses. Mais le maintien de privilèges pour une certaine catégorie de population implique qu'on en enlève à d'autres. M. MacKay dit que l'essence du mariage même est le «heterosexual sex», to quote him precisely.
D'accord. Si c'est votre point de vue, il n'y a aucun problème. Mais cette définition n'appartient pas à l'État et ne peut appartenir à un État démocratique et libre. Donc, je vous pose à tous la question: qu'est-ce qui justifie l'exclusion des gais et lesbiennes, d'une catégorie de la population, de citoyens ordinaires et responsables? Qu'est-ce qui justifie leur exclusion d'une institution aussi fondamentale dans le cadre d'une société libre et démocratique?
[Traduction]
Le président: Je vais maintenant céder la parole à M. Lee.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.
Je ne crois pas que nous ayons épuisé la question des préjugés contre les enfants de parents monoparentaux ou des couples qui ont une autre forme.
Madame Pinkstone, vous avez dit qu'il y a de la discrimination, mais je ne crois pas que nous ayons réussi à définir le problème comme il faut. Pouvez-vous nous dire encore, pour que je puisse bien comprendre, en quoi consiste les préjugés à l'égard des enfants, des enfants de parents monoparentaux ou des enfants d'autres couples, qu'il s'agisse de gais, de lesbiennes ou d'hétérosexuels?
Vous avez allégué cela plus tôt, mais vous n'avez pas réussi à me convaincre qu'il y avait un type particulier de discrimination à l'égard...
Mme Gabriel Pinkstone: Vous ne croyez pas qu'il y a des enfants qui sont taquinés à cause de leurs situations familiales?
M. Derek Lee: Les enfants peuvent se taquiner à cause des vêtements qu'ils portent, de la façon dont ils se coiffent, de ce qu'ils mangent. Je ne sais pas. Le problème n'est pas là. Pouvez-vous s'il vous plaît établir le lien qu'il y aurait entre les couples du même sexe ou le couple hétérosexuel et le préjugé dont vous faites état, et dont vous dites qu'on pourrait y remédier en changeant la nature du «mariage».
Aidez-moi, s'il vous plaît.
Mme Gabriel Pinkstone: Nous sommes d'accord avec vous à 95 p. 100. Il est vrai que les enfants auront toujours des sujets de taquinerie. La différence, c'est qu'il y a des choses qui sont appuyées par l'État et d'autres non. Lorsqu'un enfant est taquiné parce qu'il est de race noire, l'État répond à cela que le racisme est inacceptable. Lorsqu'un enfant est taquiné parce que ses parents sont gais, ce qui n'a en fait rien à voir avec eux—on ne choisit pas ses parents—, l'État ne fait rien, en dépit de la Charte.
M. Derek Lee: Je dois dire que je ne suis pas d'accord avec vous. Il y a des tas de lois relatives aux droits de la personne ou qui interdisent la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, tout comme on interdit la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique.
Mme Gabriel Pinkstone: Je pense que nous nous perdons un peu dans les détails.
M. Derek Lee: Non, pas du tout. Je veux qu'on entre dans les détails. Je vous demande seulement d'être précise. Vous dites que l'État appuie ce qui constituerait un acte discriminatoire dans la société. Quels autres cas y a-t-il?
Mme Gabriel Pinkstone: Il y a un certain appui de l'État. Ce qui manque, c'est la reconnaissance du statut d'égalité de nos familles.
Bien sûr, la Charte existe, mais ce que cela veut dire concrètement, dans la vie de tous les jours, c'est que si je veux amener mon enfant—que j'ai décidé d'avoir avec la conjointe que j'ai depuis neuf ans parce que nous nous aimons et que nous voulons avoir une famille comme n'importe qui d'autre—rendre visite à sa propre grand-mère en Australie, mais qu'il se trouve que c'est ma conjointe qui a porté l'enfant, j'aurais du mal rien qu'à traverser la frontière. Même si nous sommes ensemble depuis plus de 20 ans.
Donc, vous pouvez me dire que j'ai l'appui de l'État, mais dans la vie pratique de tous les jours, cet appui n'existe pas. L'absence de cet appui signifie que nos relations sont encore considérées comme étant de seconde zone—notre amour a moins de valeur, le fait que nous voulons avoir des enfants a moins de valeur, le fait que nous voulons constituer une cellule familiale semble avoir moins de valeur—parce qu'on ne nous accorde pas la même protection spéciale que celle dont jouit la «vraie» relation.
M. Derek Lee: Mais, soyons juste, vous semblez imposer aux enfants les caprices de la sexualité de leurs parents. Votre enfant, mon enfant, ou l'enfant de n'importe qui est égal aux autres partout où il va, qu'ils franchisse une frontière ou qu'il s'agisse d'autre chose.
Vous avez essayé de vous expliquer, mais je n'arrive tout simplement pas à voir le rapport qu'il y a entre la définition de «mariage» et la discrimination dont souffrent les enfants, dites-vous. Si vous trouvez un autre exemple, veuillez m'en faire part plus tard.
Mme Gabriel Pinkstone: Si vous ne voyez pas le rapport entre le mariage et la famille, alors vous n'avez pas écouté ce que tous les autres disaient. La plupart d'entre nous ont fait état de la protection de l'idée que nous nous faisons de ce qu'est une vraie famille.
À (1035)
M. Derek Lee: Qu'est-ce qu'un vrai mariage?
Mme Gabriel Pinkstone: Essentiellement, nous disons que le mariage est lié au fait d'avoir des enfants.
M. Derek Lee: D'accord, mon temps de parole est malheureusement épuisé.
Le président: Il nous reste encore 20 minutes pour poser d'autres questions, mais j'aimerais moi-même poser une question à M. Hudon.
J'essaie de définir ou de comprendre la résistance à l'idée selon laquelle les couples du même sexe pourraient se marier. J'ai établi qu'un grand nombre de personnes croient que les couples du même sexe ne devraient pas avoir le droit de se marier étant donné qu'ils s'opposent à l'acte, à l'idée même, et ils citent des motifs religieux et autres. J'imagine que c'est ce que vous croyez aussi, monsieur Hudon, à savoir que l'acte homosexuel est en soi contraire à vos convictions. Je comprends cela.
Ai-je bien résumé votre pensée?
M. Richard Hudon: Presque. J'ajoute que l'État n'a pas sa place dans les chambres à coucher de la nation, selon le mot célèbre de M. Pierre Trudeau il y a longtemps de cela.
Si l'on veut donner à ceux qui ne sont pas hétérosexuels le droit de se marier, ça devient... Quel était ce mot que nous avons employé? Excusez-moi, je souffre d'une maladie qui m'empêche de bien m'exprimer en tout temps. Nous disons, vous pouvez faire tout ce que vous voulez dans votre relation, mais n'appelez pas ça un mariage.
Le président: Je ne veux pas vous isoler, mais vous avancez cette idée-là. D'autres vous répondront qu'il ne faut pas reconnaître ce genre de mariage parce que l'homosexualité en soi est condamnable. Mais l'État a déjà pris position sur cette question, et ce n'est pas sa position. C'est donc un élément de résistance, si je peux dire.
On dit ensuite qu'on impose à la religion la nécessité de sanctifier le mariage. Vous ne croyez pas que si cette loi est votée, l'Église catholique sera obligée de marier des gais même si elle refuse de le faire.
M. Richard Hudon: C'est exact. L'église ne fera jamais cela.
Le président: Donc l'argument selon lequel on impose la liberté de religion ne tient pas.
M. Richard Hudon: Si l'État veut que l'église bénisse des mariages qui ne sont pas hétérosexuels, ce serait attenter à la liberté de religion.
Le président: Donc cet argument ne marche pas non plus.
M. Richard Hudon: Ça ne tient pas debout.
À (1040)
Le président: Donc on dit que le mariage doit être préservé parce qu'il a un caractère religieux et ainsi de suite. Ma mère est croyante. Mon église est peut-être la plus grande confession protestante du pays, et j'imagine que lorsqu'on en viendra là, elle va dire que ça va. Dans le contexte de la laïcité, j'ai beaucoup de mal à admettre cet argument. Si vous dites que c'est là une affaire de religion et que par conséquent nous devrions rien faire, quelle religion allez-vous choisir?
M. Richard Hudon: Je vous répondrai comme suit: un des problèmes de cette analyse, c'est qu'on tente d'extirper différents éléments pour les mettre dans des cases distinctes, alors que le mariage est un concept entier. On prétend que le mariage n'est qu'une chose, mais ce n'est pas le cas. Le mariage, c'est toutes les choses dont nous avons discuté ici. L'homosexualité ne trouve sa place dans aucune des ces cases, nulle part dans le mariage. Elle ne s'inscrit pas dans le mariage.
Je ressens beaucoup d'hétérophobie de la part des gens ici présents. On parle souvent d'homophobie. Moi, je vous présente un nouveau mot, l'hétérophobie, qui est une réalité. Pourquoi s'attaque-t-on ainsi aux hétérosexuels? C'est une marque d'hétérophobie.
Mme Gabriel Pinkstone: Nous ne nous attaquons pas aux hétérosexuels, nous voulons nous joindre à eux.
M. Richard Hudon: Mais cela vous est impossible. Ce n'est pas normal.
Le président: Monsieur Toews, à vous la parole.
M. Vic Toews: J'ai une question très précise qui porte sur les problèmes juridiques qui peuvent surgir au moment de franchir la frontière pour aller en Australie, comme l'a dit Mme Pinkstone, ou aux États-Unis. Je suis un peu perplexe. Le fait de changer la définition du mariage au Canada changera-t-il le droit international ou les lois des autres pays? Pourquoi une loi civile ou un registre civil ne serviraient-ils pas tout aussi bien à faciliter le passage aux frontières? Si les lois du Canada reconnaissent certains genres de relations entre un enfant et une autre personne—que cette personne soit homosexuelle ou hétérosexuelle—, en quoi le mariage constitue-t-il une solution?
Mme Gabriel Pinkstone: Le mariage ne règle pas du tout ce problème précis.
M. Vic Toews: Je vois. C'est tout...
Mme Gabriel Pinkstone: Le mariage confère une reconnaissance sociale à nos relations. Toute forme de reconnaissance autre que le mariage qui n'encourage pas les provinces à régler les autres problèmes est...
M. Vic Toews: Je comprends. Je voulais simplement...
Mme Gabriel Pinkstone: Je vous prie de me laisser terminer.
M. Vic Toews: C'est que votre exemple m'a laissé perplexe. Mais c'est un enjeu beaucoup plus complexe.
Mme Gabriel Pinkstone: Oui, vous l'avez dit. Permettez-moi de terminer.
Mr. Vic Toews: D'accord, c'est un enjeu plus complexe.
Mme Gabriel Pinkstone: Le mariage a une force symbolique; il prouve que nos relations sont égales aux autres et de là découlera la solution aux autres problèmes. Je peux régler tous ces problèmes en dépensant beaucoup d'argent pour retenir les services d'un avocat. Or, je ne devrais pas avoir à faire cela. Ma relation n'a pas moins de valeur que celle d'un hétérosexuel. Je devrais avoir les mêmes choix.
Me Marie-France Bureau: J'aimerais faire une brève remarque.
Il est certain que les questions de filiation et de relations parents-enfants sont de la compétence des provinces. Mais je crois que Mme Pinkstone a donné cet exemple en réponse à la question de M. Lee pour illustrer la différence dans le soutien qu'accorde l'État aux relations homosexuelles et aux autres genres d'unions conjugales. Il faut tenir compte du contexte dans lequel cet exemple a été donné.
Mais il est vrai que, si vous dites que les enfants de couples homosexuels sont reconnus au même titre que ceux des autres couples, cela signifie que les lois sur la capacité parentale devraient être harmonisées et que les choix conjugaux qui s'offrent à tous les Canadiens devraient s'offrir à toutes les familles. En ce sens, il y a encore discrimination; à preuve, les tribunaux sont encore saisis de beaucoup de dossiers de parents qui revendiquent leurs droits.
Vous avez pris cette réponse hors contexte, car il est certain que si le mariage homosexuel était reconnu, l'application des lois serait plus uniforme et stable à l'échelle du pays.
Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Je cède la parole à M. McKay.
M. John McKay: J'aimerais revenir à l'argument selon lequel le mariage, pour être un mariage, doit unir un homme et une femme. Respectueusement, j'affirme qu'il ne s'agit pas d'un argument sur les familles et les diverses façons d'élever les enfants. Je reconnais volontiers que depuis 20 ou 30 ans, que ce soit une bonne ou une mauvaise chose, les Canadiens élèvent leurs enfants dans différents cadres, le plus perturbant étant probablement la famille monoparentale qui est de plus en plus commune. Je dirais même qu'il ne s'agit pas nécessairement de droits. Quant à l'argument fondé sur la religion, honnêtement, il n'est pas entièrement convaincant. Il existe diverses religions qui vont d'une extrême à l'autre, tout comme on peut aller d'une extrême à l'autre en droit.
Mais si le mariage n'existe pas uniquement qu'entre un homme et une femme, il n'est rien. S'il n'est pas l'union d'un homme et d'une femme, il cesse d'être un mariage et le mot n'a plus aucun sens et l'argument devient tautologique. Si vous avez gain de cause avec cet argument, vous aurez obtenu, en quelque sorte, une victoire à la Phyrrus, que vous aurez détruit le symbolisme que vous recherchez et que n'aurez rien gagné.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de cet argument, car il ne s'agit pas ici d'un droit fondamental. Les droits fondamentaux des couples de gais et de lesbiennes existent déjà. Les droits fondamentaux des conjoints de fait existent déjà. Il y a encore quelques questions liées à la propriété qu'il faut régler, et nous pourrions les examiner, mais, fondamentalement, ce dont il s'agit ici, c'est de symbolisme. J'aimerais savoir ce que vous pensez de mon impression selon laquelle si vous réussissez, il s'agira d'une victoire à la Phyrrus et qu'il se peut fort bien que vous ayez gain de cause, mais que le mariage cessera alors d'être porteur du symbolisme que vous recherchez.
On dirait que je viens de mettre fin au débat. Ma question s'adresse à tous les témoins.
À (1045)
[Français]
Me Jacques Papy: Je vais tenter de répondre à votre question. Mais avant de le faire, j'aimerais clarifier avec vous la base de votre question. Est-ce que votre argument de base est que le mariage repose sur l'hétérosexualité parce que le couple hétérosexuel reflète la « naturalité » des choses? Est-ce que c'est la base de votre question?
[Traduction]
M. John McKay: Non, il ne s'agit pas de naturalité ou non. La question porte sur le fait que le mariage ne peut exister qu'entre un homme et une femme.
[Français]
Me Jacques Papy: Oui, mais j'essaie de comprendre d'où vient votre affirmation pour pouvoir y répondre. Quelle est la base de votre affirmation?
[Traduction]
M. John McKay: Le mariage se définit comme l'union d'un homme et d'une femme. Il ne s'agit pas de savoir si c'est naturel ou non, en quoi c'est lié à l'orientation sexuelle ou à quoi que ce soit d'autre. C'est ce qu'est le mariage.
[Français]
Me Jacques Papy: C'est peut-être ce qu'est un mariage dans un lieu donné et à un moment donné. C'est donc situé sur le plan local et sur le plan temporel. Mais vous avez commencé votre question, tout à l'heure, en excluant la discussion juridique. Alors, je comprends que vous ne cherchez pas, en faisant cette affirmation, à donner une définition juridique du mariage. On doit parler nécessairement d'autre chose. C'est ça que j'aimerais comprendre pour être capable de faire le lien avec la victoire à la Pyrrhus que vous mentionniez.
[Traduction]
Le président: Nous allons y réfléchir pendant que M. Robinson prend la parole.
M. Svend Robinson: Merci, monsieur le président.
Je viens de me rappeler un débat qui a porté sur des questions semblables, le débat qui a entouré la présence de gais et de lesbiennes dans les Forces armées canadiennes. Je me souviens avoir entendu les mêmes arguments selon lesquels cela entraînerait l'effritement du tissu moral et la perte de cohésion des forces armées, et ainsi de suite, de la part de députés et de la part de généraux.
Le Parlement n'a pas eu le courage d'agir. En fait, ce sont les tribunaux qui sont intervenus, et ce, grâce au courage d'une jeune femme, la capitaine Michelle Douglas, qui a fait valoir qu'il s'agissait du droit à l'égalité.
Toutes ces prédictions sur l'effondrement des Forces armées canadiennes étaient sans fondement. J'ai l'impression qu'il en sera de même pour le mariage.
J'espère que notre comité pourra aller aux Pays-Bas. Nous pourrons alors voir par nous-mêmes s'il y a eu effondrement de l'institution du mariage, si le mariage a cessé d'exister et a perdu toute pertinence, comme le prédit M. McKay, ce qui, bien sûr, n'est pas le cas. Les Néerlandais continuent de se marier et de fonder des familles. Tout ce qui a changé, c'est que les familles gaies et lesbiennes sont maintenant reconnues et ont accès au mariage.
Il ne faut seulement tenir compte de la théorie, des conjectures et des illusions, comme le suggère M. McKay; voyons voir ce qui s'est passé, dans les faits, dans les pays où l'on a reconnu le mariage homosexuel. Je crois que ce serait très révélateur.
J'aimerais maintenant revenir à la question de M. Lee sur les enfants. C'est une question importante. Nous devons reconnaître que la façon dont la société voit nos relations et reconnaît les relations des homosexuels a une incidence sur les enfants.
J'ai déjà parlé de mes rencontres avec les écoliers à Burnaby et ailleurs. Lorsqu'ils me posent des questions sur mon conjoint, ils me demandent toujours si nous sommes mariés. Je leur réponds que nous ne sommes pas mariés, que Max et moi n'avons pas le droit de nous marier. D'emblée, les enfants déclarent que ce n'est pas juste. Ils comprennent tout de suite.
Ils savent que ce qu'ils lisent dans les livres et ce que leur disent leurs enseignants ne traduit leur réalité. Ils se demandent comment cela se fait. Pourquoi, par exemple, les conseils scolaires de Surrey, en Colombie-Britannique, dans la circonscription de M. Cadman—et je suis certain qu'il n'est pas d'accord—demandent à la Cour suprême du Canada d'interdire l'utilisation de livres tels que Asha's Mums et One Dad, Two Dads, Brown Dads, Blue Dads.
À (1050)
M. Richard Hudon: Puis-je demander au président qu'il fasse un rappel à l'ordre?
M. Svend Robinson: Non. Vous n'êtes pas membre du comité.
Le président: Svend, un instant, je vous prie.
Le printemps qui approche s'annonce très intéressant; c'est un sujet sur lequel les gens ont des opinions bien arrêtées, mais si je donne une certaine latitude, je la donne à tous ou à personne. Bien des gens ont dit des choses qui m'ont personnellement troublé, des gens des deux camps.
Sur ce, monsieur Robinson, poursuivez.
M. Richard Hudon: Je vous présente mes excuses.
M. Svend Robinson: J'aimerais donner la chance aux témoins, surtout les représentantes de l'Association des mères lesbiennes, la chance de nous en dire plus à ce sujet. Puisque l'amour-propre des enfants dépend en grande partie de leur vision de leur famille, si les familles des gais et lesbiennes sont respectées, honorées et considérées comme égales aux autres, cela ne pourrait que contribuer à l'amour-propre de nos enfants, n'est-ce pas?
Mme Monica Perazzo: Je suis heureuse que vous ayez parlé des écoliers qui vous demandent si vous êtes marié, parce que des enfants me posent régulièrement cette question au sujet de moi et Gabriel. Au moins une douzaine de fois, des enfants de sept, huit ou dix ans m'ont posé la question et j'ai dû leur répondre que nous n'étions pas mariées parce que nous ne pouvions pas nous marier, j'ai dû tenter de leur expliquer.
Il en va de même pour nos enfants qui fréquentent l'école. Comment expliquer à un enfant de sept ans que notre famille a la même valeur que les autres, mais que nous, les parents, n'avons pas le droit de nous marier? Nous revenons encore une fois au symbolisme, au fait que l'État, le pays, nous dit que nous sommes différents, que nous sommes inférieurs, que nous n'avons pas les mêmes droits, que nous sommes des citoyens de seconde zone.
M. Svend Robinson: Lorsque les enseignants demandent aux enfants—on m'a dit que cela arrivait souvent...
Le président: Svend, soyez très bref.
M. Svend Robinson: D'accord, très brièvement.
Quand les enseignants demandent aux enfants de parler de leur mère et de leur père, ceux qui ont deux mères ou deux pères ne se disent-ils pas que leur famille n'a pas la même importance, n'a pas la même valeur?
Le président: Monsieur O'Brien, vous avez la parole.
M. Pat O'Brien: Merci, monsieur le président.
Je dirai d'abord brièvement que, en effet le printemps s'annonce intéressant et que j'ai bien hâte de participer à la discussion qui, je crois, peut être très civilisée.
M. John McKay: Vous êtes bien le seul à le penser.
M. Pat O'Brien: Peut-être. Je n'en pense pas moins que nous pourrions mettre fin à cette séance tout de suite. Si notre comité se fondait sur les vues des Canadiens, il pourrait très bien lever la séance et ne pas en tenir d'autres sur ce sujet, mais s'il y a un débat, je veux y participer.
La famille traditionnelle, le couple marié au sens de la loi, jouit d'une protection spéciale en droit canadien depuis la Confédération—du moins, c'est l'histoire du Canada telle que je la connais. Je crois que quelqu'un a demandé ce qui justifiait cela. Il faut poser la question autrement.
On a demandé ce qui justifie l'exclusion des couples homosexuels? Moi, je vais demander à tous les témoins de m'expliquer ce qui justifie leur inclusion. Je n'ai rien entendu aujourd'hui qui m'ait convaincu.
Je finirai sur ce qui suit, monsieur le président. J'ai peut-être déjà soulevé ce point avant que M. Lee ne se joigne à nous. Il s'agit de ce qu'a dit Mme Perazzo sur les enfants qui pourraient être victimes de railleries «sous prétexte que notre famille n'est pas normale parce qu'elle compte deux mères».
J'ai enseigné pendant 22 ans, et je peux vous dire que les autorités scolaires, si elles sont compétentes, agiraient immédiatement si on leur signalait un cas de raillerie ou d'intimidation, pour quelque motif que ce soit. Mais je veux surtout répéter que, même si un tribunal ou le Parlement change la définition du mariage comme vous le demandez, les enfants qui ont deux mères pourraient faire l'objet de railleries. Je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites que rien n'est prévu dans les écoles pour régler ce genre de situation. C'est un argument qui me semble très faible.
Je m'arrête là-dessus.
À (1055)
Le président: Madame Perazzo, vous avez la parole.
Mme Monica Perazzo: Merci.
Je connais des enfants qui ont été frappés, qu'on a injuriés parce que leurs parents sont deux femmes. Il pourrait s'agir de racisme ou d'une autre forme de discrimination, mais ce qui est différent dans leur cas, c'est que pour que leur situation s'améliore, il faut que les couples homosexuels soient égaux aux autres, que nos familles soient égales aux autres. Il s'agit de mettre fin à la discrimination. Il s'agit de faire en sorte que nos familles, nos vies et la vie de nos enfants soient égales à celles des autres.
Nous luttons encore contre le racisme aujourd'hui, mais, au moins, il est entendu dans les lois et les valeurs de la société canadienne que c'est inacceptable. Il en va de même pour un enfant qu'on frappe ou qu'on injurie ou qui est victime de violence parce que ses parents sont homosexuels. C'est inacceptable et nous devrions le dire.
Le président: À vous la parole, monsieur O'Brien.
M. Pat O'Brien: Vous n'avez pas compris où je veux en venir. C'est inacceptable, j'en conviens, mais cela ne change pas le fait que cet enfant a deux mères.
Merci, monsieur le président.
Mme Monica Perazzo: Mais là n'est pas la question. Ce qui compte, c'est que la discrimination ne disparaîtra pas... [Note de la rédaction: Inaudible]... mais si la loi nous reconnaît comme des égaux, ce sera un pas dans la bonne direction.
Le président: M. Hudon voudrait répondre. Je céderai ensuite la parole à M. Marceau pour la dernière question.
M. Richard Hudon: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je ne sais pas ce qu'il en est dans les autres provinces, mais je suis plutôt d'accord avec le député.
Dans les écoles d'Ottawa, je sais que quatre conseils scolaires ont adopté une politique de tolérance zéro à l'égard de l'intimidation. Que vous soyez noir, francophone, anglophone, gros ou petit, peu importe. C'est la tolérance zéro à Ottawa.
[Français]
Le président: Monsieur Marceau.
M. Richard Marceau: Merci, monsieur le président. J'ai une question pour Mme Perazzo ou Mme Pinkstone.
Je veux revenir à la victoire à la Pyrrhus à laquelle faisait allusion John McKay. Je présume que vous avez des connaissances et des amis qui sont hétérosexuels. Avez-vous une fois entendu un de vos amis ou une de vos amies hétérosexuels dire: « Si vous, les homosexuels, avez le droit de vous marier, je ne me marierai pas»? Avez-vous déjà entendu ça?
Mme Monica Perazzo: Non, mais j'ai entendu très souvent quelque chose d'autre, même quand je me préparais à venir ici: «Quoi, vous n'avez pas le droit de vous marier». Jamais le fait de nous marier ne mènerait nos amis hétérosexuels à ne pas se marier, mais combien de fois avons-nous entendu: «Comment se fait-il que vous n'ayez pas le droit de vous marier».
Mme Gabriel Pinkstone: Dans notre génération...
Mme Monica Perazzo: On ne parle plus d'enfants; on parle d'adultes, de nos amis.
Mme Gabriel Pinkstone: Ils sont plutôt étonnés qu'on n'ait pas déjà ce droit; ils pensaient que cette question était déjà réglée. Ils nous disent d'aller au Parlement pour en parler.
Le président: Madame Bureau.
Me Marie-France Bureau: M. Papy d'abord.
Me Jacques Papy: En fait, c'est une requête pour vous. Monsieur le président, nous sommes tout à fait d'accord que le printemps va être fort intéressant, et pour ceux qui n'ont pas le bénéfice de vivre à Ottawa, nous formulons une requête.
Il est en votre pouvoir de faire retransmettre ces débats par la chaîne CPAC, parce qu'ils ne le sont pas encore. Ce serait intéressant pour nous de pouvoir les regarder de chez nous. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci.
[Français]
Me Marie-France Bureau: M'accordez une minute pour répondre à MM. McKay et O'Brien?
Sur la question du symbolisme du mariage, est-ce que l'accès des gais et des lesbiennes enlèverait le symbolisme de l'institution? Je trouve cela absurde. Je ne vois pas pourquoi. Qu'est-ce que le symbolisme du mariage? Je crois que c'est une question d'union. C'est une union publique, une union devant sa communauté et sa famille. C'est une question de solidarité. L'idée de communauté de vie et l'idée de réunir deux familles, je crois que cela existe peu importe le sexe des partenaires. Peut-être que vous avez déjà vu des unions entre conjoints de même sexe qui sont célébrées par l'Église unitarienne ou, au Québec, l'union civile. Vous allez voir que la symbolique s'inscrit dans une symbolique millénaire de façon merveilleuse. Quand deux conjoints qui s'aiment se prennent les mains, je vous assure que la symbolique est puissante.
Je vais maintenant répondre brièvement à M. O'Brien.
[Traduction]
On a demandé ce qui justifie l'inclusion des homosexuels dans l'institution du mariage. Premièrement, la loi est un symbole très puissant. C'est dans ses lois que la société exprime ses valeurs les plus importantes. Quelles sont ces valeurs qui justifieraient l'inclusion? La Cour suprême a dit, sur cette question précise, que c'est l'égalité, la dignité, la liberté de choix et la protection des plus vulnérables.
Le président: Merci beaucoup.
Madame Perazzo, à vous la parole.
[Français]
Mme Monica Perazzo: Ce sera très court. J'entends encore dire que le mariage est une affaire de sexe et de sexe hétérosexuel. La raison pour laquelle je voudrais marier Gabriel en est une d'amour. Je ne pense pas au sexe quand je veux marier Gabriel. Et j'espère que les couples hétérosexuels qui sont en train de se marier aujourd'hui le font par amour et non par sexe. Voilà.
[Traduction]
Le président: J'aimerais dire deux ou trois choses, et j'en profite pour le faire maintenant puisque nous en sommes encore au début de nos consultations. Je rappelle aux membres du comité que les témoins comparaissent pour nous informer. Nous pouvons les interroger et exprimer des opinions, mais nous ne sommes pas ici pour les informer. Je le dis maintenant que les questions sont terminées, afin que personne ne se sente visé.
Á (1100)
M. Richard Hudon: Merci, monsieur le président.
Le président: En ce qui a trait à la télédiffusion de nos audiences, étant donné qu'il s'agit d'un Livre blanc, nos délibérations ne sont pas les plus prioritaires. Si, à l'issue de notre étude, un projet de loi est déposé, nos audiences seront plus prioritaires, mais je prends bonne note de la suggestion. Étant donné qu'il n'a pas encore été déterminé si nous pourrons voyager, il serait en effet souhaitable de rendre le débat le plus accessible possible au public.
Je remercie tous les témoins d'être venus. Je sais gré à tous, témoins et députés, de leur patience. Merci.
La séance est levée.