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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 4 décembre 2002




¹ 1535
V         Le vice-président (M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.))
V         M. François Bérard (criminologue, Association des services de réhabilitation sociale du Québec inc.)
V         M. Donald Beaudoin (criminologue, Association des services de réhabilitation sociale du Québec inc.)

¹ 1540
V         M. François Bérard

¹ 1545

¹ 1550
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne)
V         M. François Bérard
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard

¹ 1555
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ)
V         M. Donald Beaudoin
V         M. Richard Marceau

º 1600
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard

º 1605
V         M. Richard Marceau
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)
V         M. Donald Beaudoin
V         M. Derek Lee

º 1610
V         M. Donald Beaudoin
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard

º 1615
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.)
V         M. François Bérard
V         M. Donald Beaudoin
V         M. Ivan Grose
V         M. Donald Beaudoin
V         M. Ivan Grose
V         M. Donald Beaudoin
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau

º 1620
V         M. François Bérard
V         M. Richard Marceau
V         M. François Bérard
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.)
V         M. François Bérard
V         M. Paul Harold Macklin
V         M. François Bérard
V         M. Paul Harold Macklin
V         M. François Bérard
V         M. Paul Harold Macklin
V         M. François Bérard
V         M. Paul Harold Macklin
V         M. François Bérard
V         M. Paul Harold Macklin
V         M. François Bérard
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         M. Vic Toews
V         M. François Bérard
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Ivan Grose
V         M. François Bérard

º 1625
V         M. Ivan Grose
V         M. François Bérard
V         M. Ivan Grose
V         M. François Bérard
V         M. Ivan Grose
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. François Bérard
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Richard Marceau
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Derek Lee

º 1630
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         M. François Bérard
V         M. Derek Lee
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)
V         Le vice-président (M. John McKay)










CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 4 décembre 2002

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.)): La séance est ouverte.

    Nous accueillons aujourd'hui François Bérard et Donald Beaudoin de l'Association des services de réhabilitation sociale du Québec.

    C'est tout un nom à prononcer.

    Nous poursuivons notre examen des peines avec sursis et des questions connexes. Comme le greffier et moi-même vous l'avons déjà dit, chacun de vous aura plus ou moins 10 minutes pour faire ses remarques liminaires. Il y aura ensuite une période de questions.

    Je suis désolé que si peu de députés soient présents, mais ils arriveront dans les minutes qui viennent. Je suis certain qu'ils seront plus nombreux quand le moment sera venu de passer aux questions. N'oubliez pas que votre témoignage figurera aussi au compte rendu.

    Nous vous écoutons.

[Français]

+-

    M. François Bérard (criminologue, Association des services de réhabilitation sociale du Québec inc.): Bonjour, messieurs, mon nom est François Bérard. Avec Donald Beaudoin, je vais vous faire part d'informations visant à alimenter votre réflexion à l'égard de l'emprisonnement avec sursis.

    J'aimerais vous présenter rapidement l'Association des services de réhabilitation sociale. Cette dernière existe depuis 1962, soit depuis plus de 40 ans. Elle regroupe une cinquantaine d'organismes communautaires qui oeuvrent au Québec et qui travaillent auprès d'une clientèle de délinquants ou de contrevenants adultes.

    L'association, pendant plusieurs années, a défendu une idée semblable à celle de l'emprisonnement avec sursis, et l'adoption de cette mesure représentait pour elle un outil additionnel valable, parmi l'arsenal du système de justice pénale, permettant d'exprimer clairement la réprobation sociale à l'égard des gestes commis tout en permettant une réinsertion sociale relativement sécuritaire pour la clientèle visée par ce type de mesure.

    M. Beaudoin va vous parler pendant quelques minutes de la façon dont on fonctionne au Québec en ce qui a trait à l'emprisonnement avec sursis. Je vais ensuite revenir vous parler de certains éléments qui semblent causer problème et qui pourraient vous éclairer sur la situation qui existe au Québec.

+-

    M. Donald Beaudoin (criminologue, Association des services de réhabilitation sociale du Québec inc.): Bonjour.

    En fait, je commencerai en vous disant qu'à partir du moment où le juge prononce, à l'égard d'un individu, une ordonnance avec sursis, le dossier de cette personne est acheminé immédiatement aux agents de liaison de la cour, et ces derniers font suivre le dossier ou déterminent quel type d'intervenant assumera le suivi.

    Dans l'organisme où je travaille, nous avons un case load de 64 cas. On a donc 64 clients assujettis à une ordonnance d'emprisonnement avec sursis. Ces dossiers-là nous sont acheminés entre 24 et 48 heures après le prononcé de la sentence. Dès qu'on reçoit un dossier, on a 24 heures pour envoyer une lettre de convocation à la personne la priant de se présenter à une première rencontre de prise en charge dans le cadre de son suivi clinique.

    Tous nos clients ont, entre autres, comme conditions sur l'ordonnance avec sursis, l'obligation de respecter un couvre-feu, lequel peut varier généralement entre 18 heures et minuit. C'est variable, mais dans tous les cas, il y a un couvre-feu. Certains clients ont aussi une assignation à résidence, c'est-à-dire qu'ils doivent être en tout temps à leur domicile. Afin de faire respecter ces conditions, les Services correctionnels du Québec ont engagé des agents additionnels pour faire des vérifications téléphoniques au domicile des clients ainsi que des visites à leur résidence.

    Au niveau clinique, notre organisme couvre divers volets avec ces personnes. En fait, on les aide à s'organiser au niveau des ressources financières. On couvre l'aspect des activités occupationnelles en rapport à la recherche d'emploi et à des activités structurées. On regarde aussi leur environnement immédiat, leur réseau social, pour voir s'il est fonctionnel ou pas et ce qui doit être modifié en rapport à ce milieu, le cas échéant. On voit aussi avec eux la gestion du stress, la résolution de problèmes et la toxicomanie, évidemment.

    On a aussi un CRC où on héberge une clientèle, c'est-à-dire qu'on a un contrat avec les Services correctionnels du Québec qui nous permet d'accueillir 30 détenus en hébergement. C'est évident que cette ressource-là nous a permis de développer des services. Nos clients qui ont une ordonnance de sursis peuvent donc en bénéficier. Si l'un d'entre eux, par exemple, traverse une période de désorganisation et a besoin d'un hébergement, on peut, à ce moment-là, l'intégrer dans notre ressource communautaire. S'il se trouve dans une situation précaire, il y sera hébergé et encadré 24 heures par jour. On peut aussi lui fournir une aide alimentaire, étant donné qu'on a déjà une ressource qui fonctionne en ce sens-là. On a un service 24 heures où une personne qui est désorganisée à l'extérieur peut contacter le personnel en poste dans la ressource dont je viens de parler. On a aussi un comptoir vestimentaire où on peut aider les gens. On offre un service d'accompagnement bénévole lorsque les clients sont dans des périodes de fragilité ou qu'ils doivent se déplacer à l'extérieur.

    Si un de nos clients se retrouve tout à coup dans un état de désorganisation, on peut faire émettre assez rapidement un mandat de suspension, un mandat d'arrestation par le substitut du procureur de la Couronne. Nous avons un contact direct avec cette personne. Alors, il est possible d'avoir un mandat dans les plus brefs délais et assurer ainsi une meilleure protection par rapport à cette action.

    Il y a aussi l'article 495 du Code criminel qui peut permettre aux policiers d'intervenir sans mandat. Dans une situation d'urgence, on peut donc faire appel aux policiers, qui seront mis au courant des faits de façon claire et informés de la dangerosité accrue du client. À ce moment-là, ils pourront agir et réincarcérer la personne.

¹  +-(1540)  

+-

    M. François Bérard: Je vais poursuivre en vous présentant rapidement quelques problèmes qui peuvent survenir dans l'application comme telle de la mesure d'emprisonnement avec sursis au Québec.

    Ce qu'il est important de savoir, c'est que globalement, au Québec, en 1999-2000, les Services correctionnels du Québec supervisaient 2 800 personnes dans un contexte d'emprisonnement avec sursis. L'année précédente, il y en avait 2 400. On peut voir, au niveau des données statistiques, qu'il y a une progression, et cette mesure semble de plus en plus populaire auprès des juges. Elle a même eu un impact en termes du taux d'incarcération des personnes; on a pu sentir une réduction du taux d'incarcération au Québec.

    Alors, rapidement, je vous parlerai de quelques éléments qui sont, semble-t-il, problématiques. Le premier, c'est que la question du calcul des sentences des gens qui ont parfois plusieurs sursis concurrents peut être très compliqué, c'est-à-dire que lorsqu'une personne est en emprisonnement avec sursis et qu'elle a deux ou trois emprisonnements avec sursis concurrents, il y a des conditions qui sont émises par le juge. Parfois, parce qu'une des conditions en question n'est pas respectée, il y a une suspension de l'ordonnance avec sursis. Donc, les autres sursis se poursuivent, mais c'est un peu comme si on arrêtait l'horloge pour le sursis qui a fait l'objet d'un bris de condition. Lorsque la personne passe en cour et que le juge lui donne un nouveau sursis et lui impose de nouvelles conditions, on reprend à ce moment-là le temps qui n'avait pas été purgé.

    Donc, pour les agents de probation, ça pose un problème quand une personne qui avait commencé un sursis a un bris, un arrêt de l'horloge, mais que, par contre, les autres sursis se poursuivent. Et lorsqu'on repart l'horloge, ça s'additionne. Pour certains sursitaires, le jeu d'un arrêt d'horloge par rapport aux autres sursis devient un élément qui complique le suivi lorsque vient le temps de déterminer à quel moment l'emprisonnement avec sursis va réellement se terminer.

    Le deuxième point est qu'il y a aussi des problèmes d'harmonisation. Il y a des personnes délinquantes qui commettent des délits dans différentes juridictions au Québec. À ce moment-là, il peut y avoir des juges dans différents endroits... Par exemple, quelqu'un peut avoir commis des délits à Montréal et dans la région de Saint-Hyacinthe, soit à deux endroits différents où il y a deux palais de justice différents et où les juges lui donneront des ordonnances avec sursis ayant des conditions différentes.

    L'harmonisation au niveau des conditions n'est pas toujours évidente. Par exemple, une condition d'encadrement pour une période à laquelle la personne devra être chez elle à certaines heures peut être donnée dans une juridiction, alors que dans une autre juridiction, les heures seront différentes et commenceront à une autre période. Donc, il y a parfois des problèmes entre la semaine et les fins de semaine quant aux conditions qui sont imposées aux personnes.

    Quant au contrôle des conditions, cela a déjà été abordé dans les journaux, mais il y a la question des téléphones cellulaires, par exemple. Lorsqu'on veut faire des vérifications téléphoniques, la technologie est peut-être en avance sur la loi ou encore sur la capacité d'application. Donc, l'utilisation de l'appareil cellulaire vient un peu fausser la possibilité de faire des vérifications par téléphone puisque les gens peuvent être à un endroit à l'extérieur de chez eux et donner l'impression qu'ils sont chez eux. C'est un élément qui peut être problématique et au sujet duquel certains juges ont déjà dit qu'en ce qui les concerne, ça ne peut pas être fait par téléphone cellulaire, qu'il faut vraiment qu'on puisse rejoindre la personne à un poste fixe, à la maison. Il y a parfois un certain flottement à ce niveau.

    Il y a également un problème par rapport aux gens ayant des sentences dans différentes juridictions; j'en ai parlé. C'est le cas, par exemple, pour le contrôle. Lorsqu'une personne est à Montréal pendant la semaine et qu'elle passe ses fins de semaine dans la région de Saint-Hyacinthe, pour des questions de travail ou d'organisation de sa vie, elle met en branle deux équipes qui, elles, vont essayer de contrôler son suivi afin de savoir si elle était vraiment à son domicile au cours de la nuit. Alors, l'équipe de Montréal fait une vérification et dit que pour elle, la personne n'est pas chez elle au cours de la fin de semaine. Et elle signale un manquement. Cependant, pour l'autre juridiction, la personne doit se trouver à Saint-Hyacinthe, et on notera qu'elle était vraiment présente à l'endroit prévu dans l'ordonnance. Donc, il y a parfois des contradictions de ce côté.

    Le principal élément problématique qu'on peut noter par rapport à la question du sursis, c'est quant la capacité du système à traiter les manquements. Du côté des agents de probation et des intervenants communautaires, ce que l'on peut noter, c'est qu'il y a effectivement une volonté de traiter le cas lorsqu'il y a un manquement, de s'en occuper, de veiller à ce que le contrevenant puisse être rencontré et qu'un feedback lui soit donné par rapport au manquement en question.

¹  +-(1545)  

    Par contre, le problème est parfois au niveau de la capacité de vraiment utiliser le manquement pour faire un travail éducatif ou rééducatif, conformément au mandat des agents de probation ou des intervenants communautaires. Il y a actuellement un problème majeur de ressources financières pour l'embauche d'un nombre suffisant d'agents de probation et d'intervenants communautaires qui seraient en mesure de faire ce travail. Le contrôle est fait par les gardiens, mais on ne va peut-être pas assez loin dans l'utilisation positive de la récupération pour l'intervention.

    Toujours par rapport à la question des manquements, il y a un problème d'harmonisation des pratiques entre le travail qui se fait par les intervenants dans le milieu et les procureurs de la Couronne. Certains procureurs de la Couronne dans certaines régions ou parfois même certains procureurs de la Couronne, sur une base individuelle, accordent plus ou moins d'importance à l'emprisonnement avec sursis, ce qui fait que leur façon de traiter l'emprisonnement avec sursis n'est pas évidente. C'est le cas, par exemple, lorsque des gens contactent les procureurs de la Couronne pour signaler qu'il y a un manquement à des conditions de demeurer à leur domicile le soir. Le manquement s'est fait de la façon suivante. Un gardien a communiqué avec le sursitaire chez lui, et ce dernier n'a pas répondu au téléphone. Normalement, un manquement est signalé à ce moment-là. Certains procureurs de la Couronne vont alors procéder et amener ce manquement devant le tribunal, mais d'autres vont dire que le fait que la personne n'ait pas répondu pas au téléphone ne signifie pas forcément qu'elle n'était pas chez elle. Alors, la question du fardeau de la preuve ne repose pas nécessairement toujours sur les épaules du contrevenant. Un certain flottement peut exister; cela dépend des régions et des procureurs.

    L'autre élément est que c'est une clientèle quand même un peu plus lourde que celle des gens qui obtiennent une probation. En ce qui concerne le Québec, comme je vous le disais, une partie de la clientèle qu'on retrouve en emprisonnement avec sursis était auparavant en milieu carcéral. Donc, ce sont des gens pour lesquels les manquements peuvent être potentiellement plus nombreux. Ce qu'on peut noter, c'est que dans l'ensemble, au Québec, la Couronne a de la difficulté à gérer le volume de manquements et donc de pouvoir traiter l'ensemble des manquements.

    Il y a peut-être une harmonisation à faire entre prioriser certains types de manquements ou faire en sorte qu'il y ait des priorités accordées en termes du volume de manquements. Il serait peut-être possible de considérer qu'au deuxième ou au troisième manquement, on pourrait procéder devant la cour. L'attitude des Services correctionnels à l'heure actuelle, c'est d'indiquer à la Couronne tous les manquements, sans égard à la gravité comme telle des manquements. Ceci fait que la Couronne se trouve un peu noyée dans un ensemble de manquements, surtout dans un contexte où parfois, pour certains sursitaires, il y a beaucoup de conditions, et plus il y a de conditions d'imposées aux sursitaires, plus les risques de manquement sont importants.

    Alors, c'était les différents éléments d'information qu'on avait à vous présenter. Pour terminer, je veux juste vous dire que l'ASRSQ considère que l'emprisonnement avec sursis est une excellente mesure et qu'elle doit s'adresser à l'ensemble des contrevenants qui peuvent en bénéficier. On ne devrait pas faire de discrimination particulière à l'égard des gens qui pourraient convenir à ce type de mesure. C'est une mesure à maintenir. Il y a peut-être des efforts à faire pour harmoniser les pratiques, mais c'est surtout une question de manque de ressources financières et, donc, de postes d'agents d'intervention. La Couronne devra éventuellement faire un effort à ce niveau.

    Merci beaucoup de votre attention.

¹  +-(1550)  

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Monsieur Toews, vous avez sept minutes.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Merci.

    Vous avez certainement entendu dire, du moins, c'est ce que m'ont dit des policiers et des procureurs de la Couronne, qu'on a abandonné l'idée de faire appliquer les peines d'emprisonnement avec sursis en raison de la complexité des dispositions législatives et de l'impression selon laquelle les tribunaux ne les prennent pas au sérieux.

    Outre la question de l'application, je n'ai jamais pu comprendre—et peut-être pourrez-vous me l'expliquer—la différence, en pratique, entre l'emprisonnement avec sursis et la condamnation avec sursis. Il me semble que tout ce qu'on pouvait faire sous la rubrique de la condamnation avec sursis se fait maintenant aux termes des dispositions sur l'emprisonnement avec sursis.

    On invoque parfois l'idée fictive selon laquelle cette dernière peine en est une d'emprisonnement. Si je me souviens bien de l'époque où j'étais procureur de la Couronne, il était déjà possible d'imposer un couvre-feu quand il y avait eu condamnation avec sursis. Tout à coup, on prétend que c'est une forme de détention et que c'est différent de la condamnation avec sursis.

    Quelle est la différence en pratique et pourquoi ces deux systèmes ne pourraient-ils pas être fusionnés?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Lorsque la sentence suspendue, ou ce qu'on appelle souvent, au Québec, la mesure de probation a été introduite dans le Code criminel par le législateur, c'était une mesure axée beaucoup plus sur l'aide, le soutien apporté à la personne qu'on souhaitait aider. L'aspect encadrement n'était pas très présent. La personne avait des conditions à respecter, mais l'accent était mis davantage sur l'aide, le soutien dans la recherche d'un emploi ou les difficultés d'ordre familial. Il peut s'agir de diriger quelqu'un vers des ressources, comme un psychologue, pour l'aider à résoudre des problèmes personnels.

    Il y a une différence avec l'emprisonnement avec sursis. Je dirais que c'est le juge Lamer qui a finalement clarifié les choses avec un arrêt de la Cour suprême, en disant que c'est d'abord une mesure coercitive et qu'elle doit être vécue comme telle par la personne qui purge cette sentence. Cela fait qu'à ce moment-là, l'encadrement--je parle de l'expérience au Québec--est tel que la personne, au lieu d'être vue une fois par mois, comme ça pouvait être le cas en probation...

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: Ces deux mesures sont coercitives. Les condamnés sont tous assujettis à des conditions, que ce soit s'abstenir de boire de l'alcool, garder la paix ou bien se comporter. Ce sont toutes des mesures coercitives. Quel que soit le nom qu'on leur donne, pourquoi ces mesures coercitives ne pourraient-elles pas être imposées aux termes d'une condamnation avec sursis afin que tous sachent bien comment appliquer cette peine, que l'on parle de mesure de coercition ou de mesure de réhabilitation? En fait, avec les vieilles condamnations avec sursis, il y avait aussi des dispositions de coercition et des dispositions de réhabilitation. Il en va de même pour les peines d'emprisonnement avec sursis. Je ne vois tout simplement pas ce qui, en toute logique, a justifié la création de deux régimes distincts.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Je pense que le législateur voulait faire une distinction entre un type de clientèle pour lequel on souhaitait apporter davantage de soutien et avoir des gens... La majeure partie des gens qui devraient se retrouver en probation ne sont pas des criminels; ce sont des gens qui ont des problèmes d'adaptation sociale auxquels on a apporté un soutien.

¹  +-(1555)  

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: Un moment je vous prie.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Si vous voulez me laisser terminer, je dirai qu'alors que du côté de l'emprisonnement...

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: J'aimerais avoir une précision.

    Toutes ces personnes ont été reconnues coupables d'une infraction criminelle; ce sont donc tous des criminels. Que cela soit bien clair.

    Je voudrais simplement savoir pourquoi toutes ces conditions ne pourraient pas être réunies au sein d'un seul système. Je ne veux pas entrer dans des considérations philosophiques, je m'intéresse aux problèmes pratiques. Quelles sont les objections pratiques à l'intégration de toutes ces conditions en un seul régime?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Votre interprétation de la notion de criminel est différente de la nôtre. Vous mettez dans le même sac toutes les personnes qui ont commis des actes criminels. Nous, quand on parle de personnes délinquantes ou criminalisées, on fait une distinction entre une personne qui a commis un acte délinquant et une personne qui a un mode de vie délinquant, une pensée délinquante, une façon d'être qui est délinquante. Il y a des gens qui commettent des erreurs de parcours dans leur vie, mais cela ne fait pas nécessairement d'eux des gens qui ont un mode de vie délinquant. Il y a une différence entre quelqu'un qui commet un délit une fois dans sa vie et quelqu'un qui commet un ensemble d'actes délinquants, où l'on sent que la délinquance est vraiment au coeur de sa vie à l'extérieur.

    Alors, la différence que l'on fait, c'est que dans les deux cas, au niveau de la probation et de l'emprisonnement avec sursis, ce sont des mesures qui se déroulent en milieu ouvert. L'optique de distinguer la probation de l'emprisonnement avec sursis, c'est que dans un cas, on veut mettre davantage l'accent sur le soutien à la personne, où il y a certains éléments d'encadrement, mais qui ne sont pas traités de façon très forte par les procureurs de la Couronne, entre autres, et par la cour. Ça, c'est au niveau de la probation.

    Quelques cas vont être référés en cour et certaines mesures vont être prises. Généralement, au Québec, ce sont de petites amendes pour signaler à une personne qu'elle ne s'est pas présentée à son agent depuis quelques mois. Par contre, du côté de l'emprisonnement avec sursis, la personne se trouve dans un contexte où il y a du contrôle...

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: Je vous interromps, parce qu'il me reste peu de temps.

    Vous avez dit que les condamnations avec sursis sont considérées avec beaucoup de sérieux par la Couronne, mais vous venez de passer beaucoup de temps à nous dire que la Couronne ne traite pas les peines d'emprisonnement avec sursis de la même façon. Certains procureurs sont plus sévères que d'autres. J'essaie simplement de cerner la distinction. Qu'il s'agisse d'une condamnation avec sursis ou d'un emprisonnement avec sursis, pourquoi ne pas adapter la peine aux circonstances dans le cadre d'un seul et même régime afin d'éviter toute cette confusion? C'est ça qui nuit aux peines d'emprisonnement avec sursis et c'est ça qui a nui au régime des condamnations avec sursis. On ne les applique pas.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Par rapport à la situation au Québec, il n'y a pas de confusion. Je ne sais pas quelle est la situation dans les autres provinces, mais entre les deux mesures, le départage de la clientèle semble de plus en plus clair pour les procureurs de la Couronne et aussi pour les tribunaux. La probation est une mesure d'aide. L'emprisonnement avec sursis, qui se déroule aussi en milieu ouvert, est une mesure d'aide, mais où il y a un aspect beaucoup plus coercitif.

    En probation, il n'y a pas de conditions où on impose aux gens d'être chez eux le soir, avec des vérifications téléphoniques et des visites sur place pour s'assurer que la personne est bien là. La personne en probation a beaucoup plus de latitude parce que cela s'adresse à une clientèle moins problématique. L'emprisonnement avec sursis s'adresse à une clientèle plus problématique qui nécessite davantage de contrôle et généralement beaucoup plus d'aide.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci.

[Français]

    Monsieur Marceau, vous avez sept minutes.

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président.

    D'abord merci, monsieur Beaudoin et monsieur Bérard, d'être venus. Vous avez fait une présentation fort intéressante et fort éloquente. J'ai certaines questions qui sont plutôt d'ordre pratique. Vous dites, monsieur Beaudoin, que vous avez 64 cas à votre association. Combien d'employés avez-vous pour superviser les 64 cas?

+-

    M. Donald Beaudoin: Il y a deux employés qui se partagent le case load.

+-

    M. Richard Marceau: Deux employés pour 64 cas?

º  +-(1600)  

+-

    M. François Bérard: Oui, à temps plein.

+-

    M. Richard Marceau: Vous dites dans votre conclusion, monsieur Bérard, je crois, que les peines avec sursis sont une excellente mesure, selon vous, mais en même temps, vous dites qu'il n'y a pas assez de ressources financières et humaines pour faire le contrôle de cela.

    Comment peut-on affirmer qu'une mesure est excellente et qu'elle fonctionne bien si on n'est pas sûr que les conditions ont été respectées?

+-

    M. François Bérard: De quelles conditions voulez-vous parler?

+-

    M. Richard Marceau: Je parle des conditions lorsqu'il y a une peine avec sursis. Vous avez dit qu'à chaque fois qu'il y a une peine avec sursis, il y a toujours des conditions qui sont appliquées dont, entre autres, le couvre-feu.

    Je vais poser ma question d'une autre façon. Est-ce que vous avez des chiffres sur le nombre de personnes au Québec qui ont été condamnées avec sursis et qui sont en bris de conditions, soit qu'elles ne respectent pas les conditions, dont le couvre-feu et autres, soit qu'elles ont commis une nouvelle infraction pendant qu'elles étaient sous peine avec sursis?

+-

    M. François Bérard: Actuellement, je n'ai pas ces informations. Nous, on ne travaille pas au ministère de la Sécurité publique; on travaille dans des organismes communautaires. Donc, on n'a pas un portrait d'ensemble du nombre de bris.

+-

    M. Richard Marceau: Mais d'après votre expérience personnelle... Depuis le début, vous n'êtes pas la première personne à nous dire que ça va bien--je suis un amateur qui parle à des professionnels--, mais en même temps, on nous dit qu'on n'a pas de chiffres. Les seuls chiffres qui nous ont été fournis concernaient le Manitoba, si ma mémoire me sert correctement. D'après ces chiffres, dans 37 p. 100 des cas, il y avait bris de conditions ou encore de nouvelles offenses. Je n'appelle pas cela un excellent résultat. Alors, comme vous dites que ça marche, vous devez avoir une idée approximative des chiffres, des statistiques.

+-

    M. François Bérard: Pour ce qui est des personnes que l'on supervise dans les case loads, par exemple à la Maison St-Laurent, on a aussi 64 cas. À peu près 10 p. 100 des clients ont des bris de conditions. Le nombre de récidives est très faible actuellement, mais je n'ai pas l'information pour l'ensemble du système au Québec, ce que le ministère de la Sécurité publique du Québec a comme information. Mais si on parle de notre expérience, le niveau est très faible et le type de clientèle qu'on nous réfère est généralement une clientèle relativement difficile.

+-

    M. Richard Marceau: Vous avez mentionné, entre autres dans vos conclusions, qu'il ne devrait y avoir aucune discrimination de faite en vertu du type d'infraction commise. Vous n'êtes pas sans savoir que cela va contre une position unanime adoptée par les provinces l'an passé, alors que tous les ministres de la Justice ont spécifiquement parlé d'une présomption selon laquelle les condamnations avec sursis ne sont pas appropriées pour les infractions graves et avec violence, comme celles qui causent la mort et celles dont des enfants sont les victimes.

    Alors, vous dites que les provinces ont tort de vouloir faire une distinction entre les crimes violents et les crimes non violents.

+-

    M. François Bérard: Oui, tout à fait.

    La position des provinces ou la position du gouvernement fédéral, qui fait une distinction entre les crimes violents et les crimes non violents, est, pour nous, une position politique. Alors, quand on regarde des situations—et ce n'est pas juste par rapport à l'emprisonnement avec sursis—quand on regarde au niveau de l'intervention clinique auprès de gens, souvent les personnes qui ont commis des délits avec violence, malgré toutes les apparences, sont des personnes avec lesquelles il est le plus facile de faire une intervention afin de les faire changer de comportement.

    Je vous donne un exemple. Dans le cas des fraudeurs, d'un point de vue extérieur, si les délits sont non violents, peu importe la fraude, ce n'est pas important. D'un point de vue clinique, d'un point de vue de l'intervention pour amener des changements chez les personnes, c'est la clientèle la plus difficile. Si on compare avec une personne qui a commis un meurtre, l'acte comme tel est un acte odieux qui ne doit pas être commis. C'est pour cette raison que des sentences aussi lourdes sont imposées. La clientèle de personnes ayant commis des meurtres dans le milieu familial ou dans le voisinage—je ne parle pas des tueurs à gages—constitue généralement, dans les deux tiers des cas, une clientèle plus facile à faire avancer et pour laquelle les taux de récidive sont les plus faibles.

    Encore une fois, je ne parle pas des tueurs à gages, mais au-delà des apparences, la question de la violence et de la non-violence est un faux débat. Dans la loi actuelle, lorsqu'on parle, par exemple, de la libération conditionnelle, du processus expéditif, il y a des gens qui ont été arrêtés pour des délits reliés au trafic de stupéfiants. Il y a des gens qui ont commis des délits mineurs qui sont sortis rapidement, mais parmi eux, il y a de gros bonnets. Mais sous l'angle de la violence et de la non-violence, on adopte parfois des attitudes ou on prend des orientations qui font qu'on n'aide pas au niveau de l'intervention. On se fait des illusions, tant au niveau politique provincial que fédéral, et il faut que ça change. C'est le point de vue qu'on veut partager à propos de cette situation. Arrêtez de vous en faire accroire là-dessus.

º  +-(1605)  

+-

    M. Richard Marceau: Est-ce qu'il me reste du temps?

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Vous aurez de nouveau la chance d'intervenir, j'en suis certain.

    Monsieur Lee, vous avez la parole.

+-

    M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Merci de votre témoignage.

    Quand je pense à l'emprisonnement avec sursis, deux choses me frappent. La première, c'est l'effet dissuasif ou l'effet de sanction sociétale, et la seconde, c'est la question de la sécurité publique.

    Quand on examine le système correctionnel, on n'a pas à aller bien loin pour trouver des lacunes. C'est attribuable à la nature même de ce régime: des délinquants s'enfuient pendant qu'ils sont en semi-liberté, d'autres doivent partager leur cellule avec d'autres, il y a des problèmes de santé, des problèmes alimentaires et toutes sortes d'autres formes de dysfonctions humaines et administratives. Mais si on s'en tient à l'emprisonnement avec sursis et à la sécurité publique, avez-vous constaté que l'emprisonnement avec sursis comportait des risques pour la sécurité du public? L'emprisonnement avec sursis constitue-t-il une menace pour la sécurité publique? D'après votre expérience personnelle, la loi crée-t-elle ou suscite-t-elle un milieu propice à l'apparition de problèmes de sécurité publique qui devraient nous inquiéter comme législateurs?

[Français]

+-

    M. Donald Beaudoin: Dans les faits, lorsqu'on a connu des situations plus à risque où un individu se désorganisait de façon plus importante, il a été possible d'agir très rapidement, soit, comme je vous le disais, en obtenant un mandat d'arrestation émis par le substitut du procureur ou en expliquant bien la situation aux policiers qui, eux, pouvaient agir en vertu d'un article du Code criminel et intercepter la personne. Dans les faits, c'est arrivé comme ça.

    Je peux dire aussi qu'en rapport aux délits ou à la nature des délits, nous avons vu au cours des trois dernières années que pour environ 1,5 p. 100 du case load, la nature du délit du contrevenant était en lien avec les agressions sexuelles. Dans tous les cas d'agresseurs sexuels qu'on a vus assujettis à une ordonnance de sursis, les accusations étaient pour incitation à des contacts sexuels. Nous n'avons vu aucun cas où c'était une récidive; c'était toujours un premier délit de nature sexuelle. C'était toujours aussi dans un contexte familial. Les victimes étaient les enfants de l'agresseur ou les enfants de la conjointe de l'agresseur.

    À ce moment-là, on peut dire que le délinquant a investi la victime. C'est un contexte de passage à l'acte où on ne peut pas parler de pédophilie primaire à connotation perverse, où il y a un degré d'imprévisibilité important. Le contexte délictuel était important. Tous ces clients étaient aussi assujettis à l'article 161 de la loi, qui leur interdit d'être en contact avec des mineurs ou de se retrouver dans des lieux où il est possible qu'il y ait des enfants.

    Il est évident que l'encadrement de ces personnes est plus soutenu. Il y a davantage de vérifications téléphoniques et de vérifications au domicile de l'individu qui sont faites. Ce sont des gens qui sont assignés à résidence pour de longues périodes. Dans tous les cas, il s'agissait de sentences de deux ans moins un jour. Sur notre case load, on n'a pas vu de délinquants sexuels qui avaient des sentences de 12 mois ou de 18 mois avec sursis. Dans tous les cas, ils avaient une sentence de 729 jours.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Avant de poser ma deuxième question, vous dites que c'est dans le domaine des infractions sexuelles ou de la pédophilie que l'emprisonnement avec sursis présente le plus de risques. C'est à cet égard que le risque pour la sécurité publique est le plus élevé, n'est-ce pas?

º  +-(1610)  

[Français]

+-

    M. Donald Beaudoin: Non. Comme on avait posé plus tôt une question sur la nature des délits, entre autres, je voulais nuancer cela et dire que le pourcentage n'était pas de 10 ou 12 p. 100 des case loads.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Vous avez donc répondu à une autre question.

[Français]

+-

    M. François Bérard: C'est cela.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Bon, c'est une réponse de plus pour celui qui avait posé la question.

    Maintenant, que répondez-vous à ma question?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Vous demandiez s'il y avait plus de risques. La réponse est non. Bien sûr, on travaille dans un contexte où la clientèle présente toujours un risque de récidive, mais globalement, la sécurité du public n'est pas moins bien assurée depuis qu'il y a l'emprisonnement avec sursis. Les moyens qui ont été mis en place au Québec par les intervenants, de façon générale, font en sorte que le niveau d'encadrement est bon. Depuis que cette mesure existe, la sécurité du public n'est pas compromise plus qu'avant. Dans la mesure où on ajoutera des ressources, on aura sans doute de meilleures performances et on augmentera la sécurité du public. C'est là qu'est le principal problème à l'heure actuelle.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Vous dites que si vous aviez davantage de ressources, vous obtiendriez de meilleurs résultats—autrement dit, un meilleur résultat en matière de sécurité publique.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Oui.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Vous affirmez néanmoins n'avoir aucune préoccupation relativement à la sécurité publique. Si l'emprisonnement avec sursis ne vous inquiète pas du point de vue de la sécurité publique, pourquoi dites-vous que le risque serait moindre si vous aviez davantage de ressources financières?

[Français]

+-

    M. François Bérard: À ce moment-là, on pourrait non seulement mettre l'accent strictement sur le contrôle des possibilités de récidive, mais aussi travailler davantage à la prévention des récidives à moyen et à long terme. On peut encadrer les choses de telle manière que la sécurité du public, toutes choses étant par ailleurs égales, n'est pas moins compromise qu'auparavant; elle est peut-être même mieux assurée. Si on veut aller beaucoup plus loin, il faudra avoir davantage de personnes pour faire ces interventions.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci, monsieur Lee.

    Monsieur Toews, à vous la parole.

+-

    M. Vic Toews: J'aimerais revenir à la question de la condamnation avec sursis ou des ordonnances de probation, car ce n'est toujours pas parfaitement clair dans mon esprit.

    Les ordonnances de probation ont toujours entraîné une surveillance moins stricte, mais il y a toujours eu des différences entre les diverses ordonnances de probation. Il y a toujours eu un continuum qui, selon vous, est complété par les peines d'emprisonnement avec sursis. Pourtant, les procureurs de la Couronne et vous-même, au sein de votre bureau, vous n'appliquez pas nécessairement les mêmes conditions. Encore une fois, il y a un continuum, certains détenus étant surveillés plus étroitement que d'autres.

    À mon avis, il y a un chevauchement entre le continuum de l'emprisonnement avec sursis et celui de la condamnation avec sursis, de sorte que la peine avec sursis où la surveillance est la plus intensive équivaut à une forme légère de l'emprisonnement avec sursis. Est-ce un bon résumé de la situation?

[Français]

+-

    M. François Bérard: En fait, dans l'intervention en milieu ouvert, la sentence suspendue ou la probation comme telle est la mesure la plus légère au niveau de l'encadrement, alors que l'emprisonnement avec sursis est la mesure qui comporte le plus de contraintes, d'encadrement, de contrôle. Comme dans l'exemple que je vous donnais tout à l'heure, dans un cas, on a des contacts avec le délinquant une fois par mois, et dans l'autre, une fois toutes les deux semaines, voire une fois par semaine.

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: Bon, s'il y a une raison...

    Je ne veux pas revenir sur la philosophie de la chose, parce que vous ne serez peut-être pas d'accord avec moi et vice versa à ce sujet, mais je vois plutôt cela sous l'angle systémique.

    J'ai travaillé dans l'administration de ce genre de choses sous l'angle gouvernemental, et j'aimerais savoir s'il y aurait quelque chose qui s'opposerait à ce qu'on intègre les deux. D'un côté, il y aurait le côté plus bénin, les peines conditionnelles ou avec sursis, et de l'autre la surveillance plus lourde, le tout faisant partie d'un seul système intégré assorti de conditions différentes s'appliquant à chaque catégorie selon le genre de délinquant.

    Moi, je regarde cela sous l'angle systémique. Admettons que vous ayez tout l'argent nécessaire dans le monde que vous souhaitez. L'intégration des deux systèmes poserait-elle problème? C'est cela que j'essaie de comprendre.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Je dirais que oui, il y a un problème à intégrer les deux systèmes. J'imagine que vous proposeriez que les gens soient davantage dans un contexte d'emprisonnement avec sursis, mais peut-être avec des modalités d'encadrement plus légères. L'emprisonnement avec sursis part de l'idée que la personne devrait normalement être incarcérée, mais qu'elle est à l'externe.

º  +-(1615)  

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: En fait, non. Mais disons plutôt...

[Français]

+-

    M. François Bérard: La probation, elle, part de l'idée qu'on peut adopter une approche communautaire avec la personne plutôt que d'envisager au départ une mesure d'incarcération.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci, monsieur Toews.

    Monsieur Grose.

+-

    M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Vous dites que le taux de manquement est de 10 p. 100. Cela me pose un petit problème, alors creusons un peu plus loin et voyons ce qu'est un manquement.

    Imaginons un type condamné avec sursis à six mois mais avec un couvre-feu à 22 heures. Pendant les deux premiers mois, vous n'avez constaté aucun manquement de sa part, mais un soir, vous faites une vérification à 22 heures et il n'est pas là. Il revient chez lui à 23 heures. Considérez-vous cela comme un manquement et ordonneriez-vous qu'il soit mis en prison? Ou alors utiliseriez-vous votre propre jugement?

[Français]

+-

    M. François Bérard: La directive qui a été donnée par les Services correctionnels du Québec, autant à leurs propres agents qu'aux organismes communautaires, est que lorsqu'il y a un tel manquement, il doit être signalé à la Couronne. C'est un choix qui a été fait au Québec et qui peut se comprendre. Actuellement, l'orientation n'est pas d'utiliser le pouvoir discrétionnaire pour gérer nous-mêmes un premier manquement et pour dire qu'éventuellement, s'il y en a un deuxième ou un troisième, nous allons émettre un avis de manquement. Donc, dès qu'il y a un manquement, nous le signalons à la Couronne, ce qui est une des raisons pour lesquelles la Couronne est embourbée dans une série de manquements.

+-

    M. Donald Beaudoin: Je voudrais ajouter que lorsqu'il y a un manquement, on produit un document dans lequel on explique la raison du manquement. Par exemple, l'individu est arrivé à 23 heures, on lui a parlé et il a expliqué que telle ou telle chose était arrivée. On écrit cela dans un document qui sera acheminé à la Couronne. Ce n'est pas parce qu'il y a eu un manquement qu'il va y avoir réincarcération. Le procureur décide si la situation doit être présentée au juge. À ce moment-là, on convoque le client, et il y a réincarcération ou non, compte tenu de l'événement.

[Traduction]

+-

    M. Ivan Grose: La Couronne a donc le pouvoir discrétionnaire. Parfait, j'ai ma réponse.

[Français]

+-

    M. Donald Beaudoin: Oui, actuellement.

[Traduction]

+-

    M. Ivan Grose: Vous n'arrêtez pas de parler de réincarcération. J'imagine que ces gens-là n'ont pas été incarcérés du tout. S'ils ont été condamnés avec sursis, ils n'ont pas été en prison. En cas de manquement, en théorie, ils iraient en prison. Peut-être pas, pas nécessairement. Peut-être leur peine pourrait être prolongée. Serait-ce possible en cas de manquement?

[Français]

+-

    M. Donald Beaudoin: Non, il n'est pas possible de prolonger la sentence. Dès qu'il y a manquement et que le juge ordonne la réincarcération, l'individu doit purger le reste de la sentence de sursis.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci, monsieur Grose.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Le juge ne peut pas prolonger la période de sursis, mais il peut agir quant aux conditions de la sentence. Il peut réincarcérer la personne ou resserrer les conditions de sa sentence. Par exemple, au lieu de devoir rentrer à 19 heures, la personne devra rentrer à 17 heures. Effectivement, il y a une certaine latitude au niveau des juges.

+-

    M. Richard Marceau: Messieurs, vous avez affirmé à quelques reprises qu'il y avait un problème de ressources financières et donc de ressources humaines au Québec, parce que c'est évidemment la société que vous connaissez. Si vous deveniez ministre demain matin et que vous pouviez avoir tout l'argent que vous voulez, combien d'argent et de personnel supplémentaires demanderiez-vous, simplement pour le Québec?

+-

    M. François Bérard: En matière d'emprisonnement avec sursis ou en général?

+-

    M. Richard Marceau: En matière d'emprisonnement avec sursis. Disons que vous n'avez pas gagné à la 6/49.

+-

    M. François Bérard: Pour l'emprisonnement avec sursis, il nous faudrait probablement une centaine d'agents de probation de plus ou une centaine d'intervenants communautaires de plus. Tout cela s'inscrit dans un contexte où les Services correctionnels du Québec ont actuellement un déficit de 30 à 35 millions de dollars, ne serait-ce que pour appliquer leur propre loi, leur nouvelle loi.

+-

    M. Richard Marceau: Un déficit de 30 à 35 millions de dollars?

+-

    M. François Bérard: Je parle d'un déficit global. Pour le sursis, il faudrait l'équivalent de 4 ou 5 millions de dollars supplémentaires pour être en mesure d'embaucher une centaine d'agents de probation ou d'intervenants communautaires de plus.

+-

    M. Richard Marceau: Vous parliez de votre case load. Vous êtes deux employés pour 64 cas. Est-ce que cela vous semble suffisant?

º  +-(1620)  

+-

    M. François Bérard: Non. Il serait peut-être nécessaire d'avoir une meilleure modulation en fonction des problématiques présentées par chacun des clients. Actuellement, au Québec, on a une charge de travail légèrement supérieure ou, dans certains cas, largement supérieure à ce qu'elle devrait normalement être, étant donné tout ce qu'il faut faire en termes d'encadrement. Quand on a 64 cas, cela correspond à un niveau d'encadrement minimal. Les gens consacrent en général beaucoup plus de leur temps personnel en dehors de la charge.

+-

    M. Richard Marceau: D'accord. Idéalement, combien de personnes devrait-il y avoir?

+-

    M. François Bérard: Je dirais qu'il faudrait trois personnes par charge.

    M. Richard Marceau: Trois personnes pour 64 cas?

    M. François Bérard: Oui.

    M. Richard Marceau: Merci.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Monsieur Macklin.

+-

    M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): L'une de vos difficultés, comme vous le mentionniez dans votre exposé, concerne le problème du calcul de la peine lorsque les conditions viennent à changer. Il est certain que c'est là simplement une question d'administration. Pensez-vous que la loi telle qu'elle est actuellement rédigée est mal structurée et que cette lacune est à la base du problème en question?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Non. Je pense que c'est plutôt un problème de superposition des décisions qui sont prises par les juges. Il n'est pas toujours facile de mettre bout à bout l'ensemble des mesures judiciaires qui sont prononcées. Ce n'est pas nécessairement dans la loi elle-même qu'il y a cette problématique.

[Traduction]

+-

    M. Paul Harold Macklin: Voulez-vous dire par là que nous devrions apporter des amendements pour aider les juges à faire leurs calculs?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Ce ne serait peut-être pas une mauvaise idée que quelque chose soit fait pour faciliter leur travail afin de leur permettre d'harmoniser les sentences, et pour faire en sorte qu'il leur soit beaucoup plus facile de savoir combien de temps de sa sentence de sursis une personne doit encore purger.

[Traduction]

+-

    M. Paul Harold Macklin: Vous qui êtes expert en la matière, qu'est-ce que vous préconiseriez?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Il y aurait peut-être lieu d'indiquer aux juges qu'ils doivent essayer d'harmoniser leurs sentences. Plutôt que d'imposer des sentences parallèles, ils pourraient essayer de faire quelque chose de beaucoup plus global, d'avoir une perception plus globale.

[Traduction]

+-

    M. Paul Harold Macklin: Comment faire en sorte que le premier juge aligne la peine qu'il prononce sur celle d'un second juge, alors qu'il ignore encore que celui-ci va entrer dans le tableau?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Le deuxième ou le troisième juge aura probablement plus de facilité à harmoniser les choses que le premier.

[Traduction]

+-

    M. Paul Harold Macklin: C'est exact.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Pour le premier juge, ou même le deuxième s'il y en a un troisième dans le portrait, c'est beaucoup plus difficile.

[Traduction]

+-

    M. Paul Harold Macklin: Mais vous n'avez rien de concret à préconiser pour faciliter les choses?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Non.

[Traduction]

+-

    M. Paul Harold Macklin: Je vous remercie.

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews: Étant donné que l'aspect dissuasion et l'aspect dénonciation sont deux volets du Code criminel qui interviennent au niveau de la détermination de la peine, y aurait-il pour vous des crimes qui devraient être exclus du régime du sursis de peine?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Aucun.

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: Je ne pense pas avoir d'autres questions pour ces témoins-ci, monsieur le président.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Aucun ne devrait être exclu pour la raison suivante: c'est qu'il appartient à la cour, et c'est une question de principe, de prendre les mesures les plus appropriées à chaque situation. Donc, a priori, on ne doit exclure aucune possibilité. C'est respecter ce qu'on appelle le principe de l'individualisation de la peine, et il faut inclure la question du sursis dans cette démarche.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Monsieur Grose.

+-

    M. Ivan Grose: Avez-vous comparé ce qu'il en coûtait d'incarcérer quelqu'un qui a été condamné à ce qu'il en coûte de condamner avec sursis? Qu'en coûte-t-il de mettre quelqu'un en prison par opposition à une peine avec sursis?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Je n'ai pas de chiffres précis, mais en ce qui concerne les détenus provinciaux, au Québec, le coût de l'incarcération est actuellement de 37 000 $ à 40 000 $ par détenu. Dans le cas de la probation, on parle d'un coût de 1 800 $ à 2 000 $ par probationnaire. L'emprisonnement avec sursis nécessite probablement un financement deux fois plus élevé. On parle donc probablement d'environ 4 000 $ par sursitaire.

º  +-(1625)  

[Traduction]

+-

    M. Ivan Grose: Il semblerait donc que, dans la mesure où le sursis est beaucoup plus rentable et coûte beaucoup moins, il faudrait que l'on vous donne tout le personnel de supervision dont vous avez besoin. Cela me semblerait logique.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Oui, tout à fait.

[Traduction]

+-

    M. Ivan Grose: Je vous remercie.

[Français]

+-

    M. François Bérard: Malheureusement, on n'est pas toujours dans un monde aussi logique que celui-là. Il y a d'autres considérations qui doivent être prises en compte.

[Traduction]

+-

    M. Ivan Grose: Je sais, merci.

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Je n'ai pas saisi la réponse. Précisez-moi donc ce que vous avez dit, le coût d'emprisonnement serait selon vous de 37 à 40 000 $ par détenu, mais je n'ai pas compris si vous aviez parlé de 2 000 $ ou de 4 000 $ pour...

[Français]

+-

    M. François Bérard: On parle de 2 000 $ pour la personne qui est dans un contexte de probation. Votre collègue parlait de sentences suspendues. L'encadrement étant plus substantiel dans le cas de l'emprisonnement avec sursis, le coût est environ deux fois plus élevé. Nous ne travaillons pas au ministère, mais l'ordre de grandeur devrait être à peu près celui-là.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci.

    Monsieur Marceau.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Non, ça va. Merci.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Monsieur Lee.

+-

    M. Derek Lee: Je vous remercie.

    Je voudrais vous demander si votre expérience en la matière vous porterait à ajouter quelque chose.

    On entend parfois dire que les juges, lorsqu'ils prononcent une peine, auraient tendance à accorder le sursis plutôt que la probation ou l'absolution conditionnelle, et que la supervision des détenus en sursis coûte plus cher et est plus rigoureuse que les autres options. Je vous demande si vous avez vous-même pu remarquer, de la part des tribunaux, une tendance à recourir inutilement au sursis. En d'autres termes, les tribunaux élargissent-ils inutilement le champ de la supervision alors qu'ils pourraient choisir une option moins complexe?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Quand on regarde les statistiques qui sont actuellement disponibles du côté des Services correctionnels du Québec, on constate que la mesure de probation est demeurée très populaire chez les juges au Québec. L'emprisonnement avec sursis est probablement ordonné dans le cas des gens qui auraient obtenu auparavant une probation, mais qui auraient nécessité un encadrement plus substantiel que celui qui était offert auparavant.

    Donc, oui, il y a eu un déplacement d'un certain nombres de personnes, qui sont maintenant en emprisonnement avec sursis, mais pour lesquelles l'encadrement de la probation n'était pas suffisant. Mais on a pu aussi constater que certaines personnes que l'on suit, qui sont maintenant en emprisonnement avec survis, auraient été incarcérées il y a quelques années. Donc, au Québec, l'emprisonnement avec sursis a contribué à faire sortir du milieu carcéral des gens présentant un niveau de risque pouvant être géré dans la communauté.

    Cela fait partie des problématiques qu'on voit en criminologie. Est-ce qu'on va surpénaliser des gens qui sont en probation en les envoyant maintenant en emprisonnement avec sursis? Le travail sur le terrain nous démontre que ce phénomène n'existe pas vraiment. Il y a toujours un risque, mais au Québec, il n'y a pas eu ce phénomène-là, parce que les gens qu'on a transférés méritaient quelque chose de plus encadrant ou étaient surpénalisés en prison. Donc, on a pénalisé ces derniers de façon plus judicieuse en les envoyant en emprisonnement avec sursis.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Mettons les choses au clair. Si un condamné qui tombe sous le coup d'une ordonnance de probation viole les conditions de celle-ci, le Code criminel exige bien qu'il soit accusé et inculpé, n'est-ce pas?

[Français]

+-

    M. François Bérard: …[Note de la rédaction: inaudible]…

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Par contre, s'il y a manquement de la part de quelqu'un qui a été condamné avec sursis, il existe une procédure plus simple pour remettre la main dessus, c'est l'expression que j'utiliserais faute d'en avoir une meilleure.

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Comment cela se traduit-il?

+-

    M. Derek Lee: Peut-être «remettre la main dessus» n'est pas la meilleure expression, et cela ne se traduit peut-être pas facilement.

    Quoi qu'il en soit, la réponse est plus directe et peut-être plus simple aussi, et elle n'exige pas de dénonciation en vertu du Code criminel. Est-ce que je me trompe en faisant cette différence?

º  -(1630)  

[Français]

+-

    M. François Bérard: Vous parlez de situations où il y a un bris de conditions?

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Je parle ici d'une violation de condition, dans le premier cas lorsqu'il s'agit d'une ordonnance de probation et dans le second cas pour un sursis. Si vous avez à réagir à un manquement, l'un des deux est-il plus compliqué que l'autre s'il y a violation d'une ordonnance de probation?

[Français]

+-

    M. François Bérard: Selon l'expérience terrain des intervenants au niveau de la probation, il n'est pas plus compliqué de faire une dénonciation lorsqu'il y a un manquement. Malheureusement, cependant, depuis que la probation existe dans le Code criminel, la Couronne n'a pas nécessairement toujours attaché beaucoup d'importance à la mesure probatoire. Donc, beaucoup d'agents de probation ont eu tendance à ne dénoncer que les situations les plus graves en termes de manquement. Ce n'est pas plus compliqué, parce que dans les deux cas, l'endroit où on doit envoyer le manquement est à la Couronne. Cependant, on constate que dans le cas des emprisonnements avec sursis, la pression sociale fait en sorte que la Couronne attache davantage d'importance à cette mesure, parce qu'elle sait que cela s'adresse à une clientèle qui est en soi plus lourde que celle qui est en probation.

    Donc, je dirais que le processus lui-même n'est pas plus compliqué au départ, mais qu'il y a un traitement plus sérieux de la part de la Couronne lorsqu'on parle d'emprisonnement avec sursis.

[Traduction]

+-

    M. Derek Lee: Je vous remercie.

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci, monsieur Lee.

    Je ne vois personne d'autre qui veuille intervenir à part M. Maloney qui arrive à point nommé.

+-

    M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): J'attendrai une autre fois pour poser ma question, monsieur le président.

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    Le vice-président (M. John McKay): Je voudrais remercier nos témoins au nom du comité. Nous vous remercions de nous avoir fait part de vos observations. J'espère que cela aura pu être utile à notre étude.

    La séance est levée.