AANO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 15 novembre 2005
¹ | 1530 |
Le président (M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.)) |
Me Renée Dupuis (présidente, Commission des revendications des Indiens) |
¹ | 1535 |
Le président |
M. Jeremy Harrison (Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, PCC) |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
¹ | 1540 |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Le président |
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, PCC) |
Le président |
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ) |
¹ | 1545 |
Me Renée Dupuis |
M. Bernard Cleary |
Me Renée Dupuis |
¹ | 1550 |
Le président |
M. Bernard Cleary |
Le président |
Me Renée Dupuis |
M. Bernard Cleary |
Me Renée Dupuis |
M. Bernard Cleary |
Le président |
M. Roger Valley (Kenora, Lib.) |
Me Renée Dupuis |
¹ | 1555 |
M. Roger Valley |
Me Renée Dupuis |
M. Roger Valley |
Le président |
Mme Carol Skelton |
Me Renée Dupuis |
º | 1600 |
Mme Carol Skelton |
Me Renée Dupuis |
Mme Carol Skelton |
Me Renée Dupuis |
Mme Carol Skelton |
Le président |
M. Bernard Cleary |
Me Renée Dupuis |
M. Bernard Cleary |
º | 1605 |
Me Renée Dupuis |
M. Bernard Cleary |
Me Renée Dupuis |
Le président |
M. David Smith (Pontiac, Lib.) |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
º | 1610 |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
Me Renée Dupuis |
º | 1615 |
M. David Smith |
Le président |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Me Renée Dupuis |
M. Jeremy Harrison |
Le président |
M. David Smith |
º | 1620 |
Me Renée Dupuis |
M. David Smith |
Me Renée Dupuis |
º | 1625 |
Le président |
M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ) |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
º | 1630 |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
Le président |
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.) |
Me Renée Dupuis |
º | 1635 |
Mme Nancy Karetak-Lindell |
Le président |
L'hon. Sue Barnes (London-Ouest, Lib.) |
Me Renée Dupuis |
L'hon. Sue Barnes |
Me Renée Dupuis |
L'hon. Sue Barnes |
º | 1640 |
Me Renée Dupuis |
L'hon. Sue Barnes |
Le président |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
º | 1645 |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
M. Serge Ménard |
Me Renée Dupuis |
Le président |
L'hon. Sue Barnes |
Me Renée Dupuis |
º | 1650 |
L'hon. Sue Barnes |
Me Renée Dupuis |
Le président |
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC) |
º | 1655 |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
» | 1700 |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
Me Renée Dupuis |
M. Jim Prentice |
Me Renée Dupuis |
Le président |
L'hon. Sue Barnes |
Me Renée Dupuis |
L'hon. Sue Barnes |
Me Renée Dupuis |
» | 1705 |
L'hon. Sue Barnes |
Le président |
Me Renée Dupuis |
Le président |
CANADA
Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 15 novembre 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.)): Mesdames et messieurs, la séance est ouverte. Nous n'avons pas tout à fait le quorum pour voter, mais nous sommes certainement suffisamment nombreux pour entendre les témoins.
Notre témoin d'aujourd'hui a été ponctuelle et j'aimerais faire diligence. Nous accueillons Mme Renée Dupuis, présidente de la Commission des revendications des Indiens.
Sans plus de cérémonies, madame Dupuis, vous avez la parole, si vous désirez commencer par un exposé au comité.
Me Renée Dupuis (présidente, Commission des revendications des Indiens): Bonjour, monsieur le président.
[Français]
Bonjour à vous, membres du comité.
[Traduction]
Je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole ici aujourd'hui.
Je me limiterai à un bref exposé préliminaire et ensuite, je serai heureuse de répondre à vos questions.
Le processus de règlement des revendications au Canada a une longue histoire, façonnée par de nombreux événements. De même, les forces qui ont mené à la création de la Commission des revendications des Indiens sont fort anciennes. Faute de temps, je vais commencer en 1990.
Cette année-là, comme vous le savez, des troubles ont éclaté à Kanesatake-Oka, au Québec, au sujet d'une revendication territoriale. C'est à la suite de ces troubles que le gouvernement fédéral a annoncé son programme autochtone, s'engageant notamment à accélérer le règlement des revendications particulières.
[Français]
En 1991, la Commission sur les revendications particulières des Indiens, mieux connue sous le nom de Commission des revendications des Indiens, a été créée par décret à titre de commission d'enquête sous le régime de la Loi sur les enquêtes. En 1992, le gouvernement a procédé à la révision du mandat de la commission et a nommé plusieurs commissaires. La commission exerce ses activités dans le cadre de la politique du Canada sur les revendications particulières.
De 1991 à 2004, le premier ministre a été désigné ministre responsable de la commission aux fins de la Loi sur la gestion des finances publiques. En juillet 2004, cette responsabilité a été confiée au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.
À l'heure actuelle, la commission compte cinq commissaires, dont moi-même à titre de présidente. J'en profite pour souligner la présence de deux de nos commissaires, soit Alan Holman, de Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard,
[Traduction]
et la commissaire Sheila Purdy, d'Ottawa. La Commission bénéficie du soutien d'un personnel à la fois professionnel et dévoué.
Avant la création de la CRI, les premières nations ne pouvaient contester les décisions du gouvernement qu'en s'adressant aux tribunaux. La Commission offre aux premières nations qui souhaitent obtenir un examen indépendant des décisions gouvernementales une solution de rechange à la voie judiciaire.
Notre rôle est de répondre aux demandes qui nous sont présentées à la suite de la décision du ministre d'accepter ou de rejeter une revendication. Plus précisément, notre mandat comporte deux volets: en premier lieu, mener, à la demande de la première nation concernée, une enquête publique sur le bien-fondé de la décision du ministre dans l'un ou l'autre des cas suivants: si le ministre d'AINC a rejeté sa revendication ou si le ministre a accepté sa revendication, mais il existe un différend au sujet de la manière de fixer l'indemnisation; en second lieu, offrir, avec l'accord conjoint de la première nation et d'AINC et à n'importe quelle étape du processus de règlement, des services de médiation afin d'aider les parties à parvenir à une entente.
Permettez-moi de résumer rapidement les principes qui régissent nos activités courantes.
[Français]
L'indépendance et l'impartialité sont pour la commission, à titre d'instance quasi judiciaire, ce qui vient en tout premier lieu. Ces principes essentiels guident l'ensemble de notre processus d'enquête, en l'occurrence à partir du tout début de l'enquête et jusqu'au moment où nous formulons une recommandation quant à l'existence ou à l'absence d'une obligation non respectée du gouvernement du Canada à l'endroit d'une première nation.
Pour ce qui est des médiations, rien n'importe davantage que l'impartialité et l'indépendance lorsque nous nous efforçons de rapprocher les parties en vue d'arriver à une entente satisfaisante. Sans ces principes, nos tentatives de médiation seraient vaines.
[Traduction]
Le second principe est l'équité et la justice naturelle. Dans bien des cas, notre processus d'enquête offre aux parties une première occasion de se rencontrer. En effet, l'examen de la revendication effectué préalablement par le gouvernement ne porte que sur des documents. L'enquête est un processus quasi judiciaire dont l'équité exige d'accorder aux parties des délais appropriés pour présenter, à tour de rôle, leurs mémoires.
Notre processus est axé sur la communauté. Nous veillons à ce que les parties prennent part à la planification de l'enquête, après quoi le personnel se rend dans la communauté concernée pour expliquer le processus et interroger les aînés. Le comité chargé de l'enquête tient ensuite une audience dans la communauté. Par la suite, les conseillers juridiques des parties rédigent leurs mémoires en se basant sur les témoignages des aînés et la preuve documentaire, puis font valoir devant le comité leurs arguments oraux découlant de la preuve recueillie et des points de droit. Après les délibérations, le comité produit son rapport et formule sa recommandation.
¹ (1535)
[Français]
L'ouverture et la transparence constituent le troisième principe. Nous nous sommes engagés à faire en sorte que le fonctionnement de la commission soit ouvert et transparent. Outre nos rapports annuels, nous publions un rapport à la suite de chaque enquête et médiation. Nous sommes également habilités à publier un rapport sur toute question se rapportant aux revendications particulières.
Nous avons recours à divers moyens de communication, notamment notre site Web, nos bulletins, nos différents rapports et notre participation à des conférences. Peut-être plus que la plupart des organismes publics, nous visitons les communautés avec lesquelles nous sommes en relation afin de garantir que leur éloignement ne les empêche pas de se faire entendre.
[Traduction]
Le quatrième et dernier principe est l'importance de l'histoire orale. Nous recueillons méticuleusement l'histoire orale pertinente à l'enquête en nous rendant dans la communauté visée et en écoutant les témoignages des membres de la bande et, en particulier, des aînés.
Permettez-moi de vous dire que nous sommes très fiers de cette pratique à la CRI. La collecte et l'admission en preuve des témoignages oraux constitue une contribution unique de la CRI qui a été bénéfique tant aux premières nations qu'au public canadien en général. La Cour suprême du Canada a reconnu l'importance d'accorder aux témoignages oraux le même poids qu'à toute autre forme de preuve présentée à un tribunal.
Enfin, sur un plan plus philosophique, nous voyons notre rôle comme le rapprochement d'optiques différentes. La CRI joue un rôle unique en son genre au Canada du fait qu'elle travaille avec des parties qui font valoir des positions opposées dans les enquêtes et des points de vue divergents dans les médiations.
Malgré tous nos efforts, les différences d'optiques continueront, pendant un certain temps, de marquer le processus de règlement des revendications particulières au Canada. Ce concept de rapprochement demeurera crucial si nous voulons réaliser des progrès collectifs dans le domaine des revendications particulières.
En conclusion, nous sommes d'avis que la CRI a largement fait ses preuves depuis 1991. Pourtant, il est clair également que des défis de taille subsistent. Nous ne ménageons aucun effort pour faire en sorte que le processus que nous appliquons bénéficie de la confiance de toutes les parties.
[Français]
Je répondrai à vos questions avec plaisir. Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Dupuis.
Monsieur Harrison.
M. Jeremy Harrison (Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, PCC): Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier notre témoin de sa présence ici aujourd'hui.
J'aimerais avoir une idée du nombre de cas dont s'occupe la CRI. Combien de cas sont présentés devant la Commission chaque année?
Me Renée Dupuis: À l'heure actuelle, nous avons un total de 64 dossiers, à savoir 40 enquêtes et 24 médiations.
M. Jeremy Harrison: Historiquement, depuis 1991, combien de cas ont été réglés par la CRI par année?
Me Renée Dupuis: De 1991 à 2005, nous avons présenté 55 rapports d'enquête et 11 rapports de médiation.
M. Jeremy Harrison: Comment le gouvernement a-t-il réagi à ces rapports? Je crois comprendre que le gouvernement n'est pas tenu d'accepter les recommandations présentées dans ces rapports. Dans la plupart des cas, est-ce que le gouvernement a accepté toutes les recommandations, la plupart d'entre elles, certaines d'entre elles...?
Me Renée Dupuis: J'ai les chiffres les plus récents pour vous. Sur les 65 rapports d'enquête, nous avons formulé une recommandation de ne pas négocier la revendication dans sept cas. Dans les cas où nous avons recommandé la négociation de la revendication, la recommandation a été acceptée par le ministre dans 34 cas et rejetée dans 18 autres cas. Si vous ajoutez à cela, les six revendications et rapports qui n'ont pas encore reçu de réponse de la part du gouvernement, vous arrivez au total de 65.
¹ (1540)
M. Jeremy Harrison: Combien de temps faut-il, approximativement, pour traiter un cas, entre le moment où la demande parvient à la CRI et le moment où une recommandation est formulée? Combien de temps faut-il en moyenne?
Me Renée Dupuis: Je peux vous dire que le délai le plus court a été de deux ans et que le délai le plus long, de cinq ans. Certains de ces cas sont très complexes, faisant intervenir de nombreuses premières nations, et certains sont moins complexes ou compliqués. Ce que nous avons vu jusqu'à présent, c'est que selon la complexité de ces revendications, il est parfois plus facile d'en arriver à un rapport final à court terme.
M. Jeremy Harrison: Une question qui m'intéresse, c'est le fait que le dernier Parlement a étudié le projet de loi C-6, qui aurait créé un régime différent pour les revendications particulières. Je crois comprendre que le gouvernement a décidé que le projet de loi C-6 ne deviendrait pas une loi. Ce projet de loi été adopté au cours du dernier Parlement, mais il ne recevra pas la sanction royale. Le secrétaire parlementaire pourra me corriger, mais c'est ce que l'on m'a indiqué.
Au cours du processus d'étude du projet de loi C-6 par le Parlement, y a-t-il eu moins d'importance accordée à la CRI? Je suppose que je me demande si la CRI s'est vue accorder moins de ressources au cours des dernières années.
Me Renée Dupuis: Pour répondre à la question du membre du comité, au cours des six derniers exercices financiers, y compris l'exercice actuel, nous avons doublé notre charge de travail. Nous sommes passés de 38 dossiers, à savoir 25 enquêtes et 13 médiations en 2000-2001, à 64 enquêtes et médiations, et parce que nous avions doublé notre charge de travail, nous avons demandé des ressources additionnelles que l'on nous a accordées.
M. Jeremy Harrison: Y a-t-il des postes de commissaire vacants à l'heure actuelle?
Me Renée Dupuis: Deux postes de commissaire sont actuellement vacants.
M. Jeremy Harrison: Sur combien, au total?
Me Renée Dupuis: Sur un total de sept.
Nous avons à l'heure actuelle cinq commissaires — en fait, cinq commissaires à temps partiel, y compris moi-même en tant que présidente à temps partiel de la Commission.
M. Jeremy Harrison: Très bien, et évidemment, mon collègue, M. Prentice, a été commissaire de la CRI. Depuis combien de temps ces deux postes sont-ils vacants?
Me Renée Dupuis: Un poste s'est libéré à la suite de la démission de l'ancien président de la Commission, c'était en juin 2003. L'autre est devenu vacant au mois d'août de la même année, en 2003.
M. Jeremy Harrison: Alors, ces postes sont vacants depuis plus de deux ans maintenant. Le fait que deux postes de commissaire sur sept ne sont pas comblés nous amène probablement à penser que c'est peut-être une raison qui explique pourquoi les choses n'avancent pas plus rapidement. Je sais que vous n'êtes pas en position de demander pourquoi le gouvernement n'a pas comblé ces postes, mais je pense que c'est probablement une question qui vient à l'esprit de beaucoup de gens.
Je n'ai pas vraiment d'autres questions, monsieur le président, pour ce tour. Je laisse la parole à quelqu'un d'autre.
Le président: Il reste du temps, si Mme Skelton désire l'utiliser. Il ne fait aucun doute qu'il y aura un autre tour.
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, PCC): Je suis désolée; je suis arrivée quelques minutes en retard et je veux juste examiner les notes d'information. Merci.
Le président: Très bien.
Alors, monsieur Cleary, s'il vous plaît.
[Français]
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ): Bonjour, madame Dupuis. J'ai eu l'occasion de vous rencontrer à plusieurs reprises. C'est toujours pour moi un grand plaisir de vous retrouver.
Comme vous le savez sans doute, j'ai travaillé au dossier relatif à un conseil tribal lorsque la commission en était à ses débuts. Il s'agissait alors du Conseil Attikamek-Montagnais. À l'époque, on avait fortement insisté pour que la commission soit totalement indépendante du gouvernement. Il va sans dire que comme tout le monde, je me suis aperçu que ça n'avait pas été le cas. En outre, j'ai constaté que la commission royale avait elle aussi souhaité cette indépendance. Je sais que dans le cadre de pratiquement tous ses rapports, votre commission fait une demande au gouvernement dans ce sens.
À cet égard, j'aimerais savoir pourquoi, à votre avis, le gouvernement n'adhère pas à cette notion d'indépendance. Je voudrais savoir également pourquoi vous défendez cette notion dans le cadre de presque tous vos rapports et, enfin, pourquoi vous obtenez une réponse négative.
¹ (1545)
Me Renée Dupuis: Pour ce qui est de l'indépendance de la commission, j'aimerais faire un bref retour en arrière. En 1991, le gouvernement a décidé de créer une commission d'enquête. En principe, quand il crée une commission d'enquête, le gouvernement établit un mécanisme temporaire. Or, notre commission fonctionne depuis 14 ans comme une solution temporaire.
Je suis arrivée à la commission en 2001 à titre de commissaire et en suis devenue la présidente en 2003. Au cours des années 1990, en l'occurrence dès la création de la commission, nous avons, dans le cadre de plusieurs de nos rapports annuels, attiré l'attention du gouvernement sur la nécessité de créer un organisme permanent et indépendant qui examinerait toutes les revendications particulières. Faire des recommandations au gouvernement fait en effet partie de notre mandat. La commission n'a jamais cessé d'affirmer qu'un organe indépendant et permanent devrait être créé.
Cela dit, je suis en mesure d'affirmer qu'en vertu de son statut de commission d'enquête fédérale créée par décret, la commission a pu maintenir jusqu'ici un mode de fonctionnement indépendant. Nous avons su assurer aux parties qui comparaissent, autant les premières nations que le gouvernement canadien, que nous sommes en mesure de mener les enquêtes et les médiations sans subir de pression ou d'interférence.
Vous m'avez ensuite demandé pourquoi, à mon avis, le gouvernement n'adhérait pas à cette notion d'indépendance. Or, je ne suis pas nécessairement la personne la mieux désignée pour répondre à cette question. Je pense que les représentants du gouvernement sont mieux placés que moi pour le faire.
M. Bernard Cleary: Puisque la commission réitère continuellement sa demande, j'en déduis que cette indépendance aurait des avantages certains. En quoi consisteraient ces avantages? Les directives que vous donnent les gouvernements limitent-elles votre rôle? Qu'est-ce que cette indépendance changerait pour vous?
Me Renée Dupuis: En fait, même si la commission d'enquête fonctionne en vertu d'un décret du gouvernement et sous l'autorité de la Loi sur les enquêtes, sa position est analogue à celle de certains tribunaux qui ont une juridiction et qui doivent composer avec le fait d'entretenir des relations avec le gouvernement. Certains tribunaux administratifs spécialisés sont dans une situation similaire à la nôtre. Le fait qu'ils font partie du portefeuille d'un ministère précis ne les empêche pas — et c'est à notre avis notre cas également — de réaliser leur mandat de façon totalement indépendante à l'égard du gouvernement.
Pour notre part, nous devons, dans le cadre de nos enquêtes, entendre le point de vue des premières nations de même que la position du Canada. De plus, nous devons nous assurer d'être neutres et impartiaux, autant dans notre façon de recevoir ce qui nous est présenté que dans celle de faire nos recommandations.
¹ (1550)
[Traduction]
Le président: Vous avez environ 30 secondes, monsieur Cleary.
[Français]
M. Bernard Cleary: Voici ma dernière question. L'ensemble des revendications particulières devrait être traité à l'extérieur du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Celui-ci est à la fois juge et partie au ministère de la Justice.
Pensez-vous que la commission pourrait disposer d'un mandat global dans le cas des revendications particulières?
[Traduction]
Le président: Une réponse très brève, madame Dupuis, si vous désirez répondre.
[Français]
Me Renée Dupuis: Oui.
M. Bernard Cleary: À quoi s'applique votre « oui »?
Me Renée Dupuis: Je réponds oui à votre question.
M. Bernard Cleary: D'accord.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Valley.
M. Roger Valley (Kenora, Lib.): Merci, madame Dupuis, d'être venue aujourd'hui pour partager certaines de vos réflexions.
Je suis intrigué par certaines déclarations que vous avez faites dans votre exposé préliminaire et par certains aspects concernant la façon dont vous recueillez votre information. C'est la question que j'aimerais explorer avec vous.
Vous avez beaucoup parlé, en fait — il en est fait mention à plusieurs reprises — de l'information que vous obtenez des aînés et des témoignages et de la preuve documentaire. À la page 3, vous signalez que les témoignages oraux ont le même poids que les autres formes de preuve.
J'ai passé beaucoup de temps moi-même sur cette question et une des raisons pour lesquelles je suis ici, c'est le succès que j'ai eu à traiter avec les aînés des communautés des premières nations. Ma circonscription compte 38 réserves. Je suis très actif auprès de ces collectivités. Je connais les défis et il faut une capacité spéciale pour avoir le temps et les discussions permettant d'obtenir l'information des aînés.
Vraiment, c'est un partage. Ce n'est pas aussi simple que de poser directement des questions et de les laisser répondre. S'ils sont à l'aise avec vous et s'ils ont confiance qu'ils seront traités avec respect, les anciens vont partager avec vous. C'est un processus assez spécial et j'ai toujours trouvé qu'il était extrêmement gratifiant d'avoir le temps de m'assurer que ce genre de conversation ait lieu.
Vous avez parlé du témoignage des aînés et de la preuve documentaire et du fait que les deux avaient le même poids, mais qu'arrive-t-il lorsqu'il y a des conflits? J'imagine que cela arrive un certain nombre de fois, parce que les aînés dans les collectivités peuvent avoir des opinions différentes. Il peut y avoir des communautés différentes qui interviennent dans les revendications. D'après votre expérience, j'aimerais savoir ce qui arrive lorsque ces problèmes surviennent et qu'il y a des preuves ou des témoignages différents qui sont fournis.
Une autre chose que j'aimerais savoir, c'est comment intervient la formation, pour avoir des gens qui sont préparés et qui ont le temps et qui connaissent la meilleure façon de discuter avec les aînés? Je me demande comment vous faites cela, d'après votre expérience.
Me Renée Dupuis: Je dirais certainement que c'est un défi. Nous avons incorporé, dans notre processus d'enquête, des moyens de nous assurer que nous sachions à l'avance à quelle communauté nous avions affaire. Lorsque j'ai dit que le personnel se rend sur place, cela signifiait que nous avons un de nos avocats, que nous appelons des personnes de liaison, qui se rend dans la communauté, qui rencontre les gens, qui rencontre les témoins et qui recueille ce que nous appelons un « témoignage anticipé ». Il discute du problème, de ce que nous voulons entendre de la part des membres ou des anciens de la bande au cours des audiences et du genre de preuve que le comité cherche à obtenir.
Étant donné que le processus de première instance avec AINC est un processus qui ne porte que sur les documents, nous nous trouvons dans une position... Il y a des lacunes dans les documents. Il s'agit de revendications anciennes, comme un traité signé en 1899 dans le nord de la Saskatchewan, et il n'y a pas nécessairement beaucoup de preuves de ce qui a été dit au moment de sa signature, alors nous devons compléter ce qu'il y a dans les documents et essayer de combler les lacunes. C'est une des raisons pour lesquelles nous devons nous rendre dans la collectivité et entendre ce que les gens ont à dire.
Mais nous voulons également qu'ils nous parlent, parce que nous voulons savoir quel est leur point de vue sur ce qui est arrivé, leur version de l'histoire, et c'est pourquoi nous insistons pour que cela soit un élément central de notre processus d'enquête. Cela prend du temps, mais nous pensons que cela en vaut la peine dans le sens que, souvent, nous nous retrouvons dans des audiences et que c'est la première fois que les membres de la bande, les membres de la communauté et les anciens entendent les positions des uns et des autres. Nous allons écouter ce que les anciens ont à dire et, parfois, cela entraîne une réévaluation de la revendication et, en plus, il y a le fait que nous trouvons qu'il est extrêmement important de recueillir cette preuve.
La raison pour laquelle nous avons fait allusion à la décision de la Cour suprême du Canada, c'est que depuis que cette dernière a affirmé en 1997 qu'il s'agit d'un élément de preuve très important et qu'il devrait avoir le même poids que toute autre forme de preuve, nous pensons que c'est une partie très importante de notre processus.
C'est difficile, mais vous savez, pour avoir présidé certaines de ces enquêtes, mon expérience a été que nous voyons souvent des gens venir nous voir très ouvertement parce que c'est la première fois qu'ils ont l'occasion de raconter leur histoire, de raconter leur version de ce qui est arrivé.
Ensuite, comment évaluez-vous la crédibilité de ce témoin? Ce n'est pas différent de ce que doit faire n'importe qui qui se trouve dans une situation semblable, disons dans un tribunal, mais c'est difficile. C'est certainement difficile.
¹ (1555)
M. Roger Valley: Comme je l'ai dit, une des beautés de la tradition orale, c'est qu'il faut quelqu'un pour l'entendre. Trop souvent, cela ne se fait pas et c'est pourquoi j'étais intrigué de savoir, en fait, combien de temps il faut pour le faire. Nous savons que beaucoup de ces processus demandent beaucoup de temps, mais je suis heureux d'entendre que nous avons le temps d'écouter, parce que c'est important.
Je suis simplement curieux au sujet d'une question que j'ai posée — ou que je voulais poser et que je ne l'ai pas fait. Comment se fait la formation? Vous avez parlé d'une personne de liaison. Est-ce que cette personne vient de la région, de la collectivité ou de votre bureau? C'est parce que la valeur de toute l'information que nous obtenons est fonction de la personne que nous envoyons sur place pour poser les questions et participer avec la communauté, alors je pense que c'est important. J'aimerais personnellement savoir comment vous dénichez cette personne, parce que si vous preniez dix personnes au hasard sur la rue, vous auriez du mal à en trouver une qui a la capacité d'écouter et de vraiment interagir avec la collectivité pour obtenir de l'information de qualité.
Me Renée Dupuis: Je suis heureuse de pouvoir vous dire que nous avons la chance de compter sur des personnes très consciencieuses au sein de notre personnel, des gens qui possèdent une vaste expérience et qui sont eux-mêmes Autochtones. Ainsi, notre directrice de la liaison est une Autochtone et je dirais même que tous nos employés affectés aux activités de liaison sont des Autochtones. Comme vous pouvez vous l'imaginer, nous comptons beaucoup sur leur connaissance des collectivités autochtones pour guider notre approche de ces communautés et obtenir de l'information.
Si je dis que ce n'est pas facile, c'est parce que les gens des Premières nations sont de plus en plus réticents à communiquer des renseignements sur leur population et leurs conditions de vie. Je dois toutefois préciser que nous parvenons à obtenir ces renseignements grâce à la compétence des gens qui travaillent pour nous.
M. Roger Valley: Merci.
Le président: Madame Skelton.
Mme Carol Skelton: Madame Dupuis, je vous prie de m'excuser; j'ai raté le début de votre exposé.
Dans votre conclusion, vous avez indiqué très clairement qu'il y avait encore d'importantes difficultés à aplanir. Pourriez-vous m'indiquer les trois principales difficultés auxquelles vous êtes confrontée quotidiennement dans votre travail? Est-ce possible?
Me Renée Dupuis: Je vais vous en indiquer trois par ordre de priorité. Je vais d'abord poursuivre dans le sens de ce que je viens de dire.
Les témoignages relatant l'histoire orale sont essentiels si on veut trouver l'information manquante aux fins de ces revendications, de ces enquêtes. Nous intervenons à la fin du processus. Nous devons entendre la version des Anciens. Il nous faut préserver ces éléments de preuve, ne pas les perdre. Alors, le temps est certes un élément qui peut jouer contre nous.
Un autre des enjeux importants consiste certainement à s'assurer que les gens avec lesquels nous traitons, qu'il s'agisse de représentants du Canada ou des Premières nations, demeurent persuadés que nous sommes neutres et impartiaux dans ce processus. C'est certes une difficulté.
À plus long terme, je vous parlerais également de la contribution que nous devons apporter dans ce dossier très délicat et difficile du point de vue des droits de la personne et des droits en général. On considère souvent que nous nous intéressons aux obligations morales, alors que nous traitons plutôt des droits, des obligations légales. Est-ce qu'un droit a été violé? A-t-on respecté ou non un traité? Nous nous intéressons donc aux questions de droit. Il est toujours difficile de faire comprendre cela aux gens. C'est pour cette raison que nous contribuons aux efforts visant à sensibiliser la population canadienne à cette réalité bien concrète. Nous traitons des droits, et non des obligations morales.
º (1600)
Mme Carol Skelton: Si je me fie à la façon dont vous en parlez, cela me semble particulièrement difficile. Est-ce que c'est toujours aussi compliqué?
Me Renée Dupuis: Je suis persuadée que cela demeure difficile, même dans une situation idéale. Même si tout allait aussi bien qu'on peut l'imaginer, cela resterait ardu.
Mme Carol Skelton: Lorsque vous parlez de l'importance du facteur temps, je comprends que les aînés ne rajeunissent pas, que nous risquons de les voir partir en emportant avec eux l'histoire orale. Est-ce bien de cela dont il est question?
Me Renée Dupuis: Tout à fait.
Mme Carol Skelton: Merci.
Monsieur le président, je n'ai plus de question.
Le président: Merci, madame Skelton.
Monsieur Cleary.
[Français]
M. Bernard Cleary: En novembre 2003, le Parlement a voté une loi concernant les règlements relatifs aux revendications particulières. Or, le gouvernement n'a jamais appliqué cette loi. Vous avez certainement dû vous informer des raisons de cet état de chose. Quelles sont-elles, selon vous?
Me Renée Dupuis: On nous a informés que la loi n'allait pas être mise en vigueur pour l'instant. Nous devons donc continuer à mener des enquêtes et à essayer de fournir des services de médiation. Nous nous en tenons à notre mandat. Nous n'avons pas d'explication particulière à recevoir du gouvernement. Quoi qu'il en soit, on nous a informés de cette décision.
M. Bernard Cleary: Que disait cette loi, exactement?
º (1605)
Me Renée Dupuis: Le gouvernement avait décidé de déposer un projet de loi visant à créer un centre destiné à traiter toutes les revendications particulières. Ce centre serait une organisation parapluie et serait composé d'une commission de médiation, d'une part, et d'un tribunal, d'autre part.
D'après ce que nous avons compris, l'idée générale serait de tenter de régler les plaintes ou les revendications par le biais de la médiation. Dans les cas où la médiation ne donnerait lieu à aucun règlement, la commission aurait le pouvoir de renvoyer ces dossiers au tribunal. Ce dernier, qui serait spécialisé, rendrait une décision quant à la validité de la revendication.
M. Bernard Cleary: La commission était-elle favorable à cette loi?
Me Renée Dupuis: Nous avons soumis à ce comité de la Chambre des communes et à celui du Sénat quelques sujets de réflexion. Nous avons abordé de nouveau ces questions dans notre Rapport annuel 2002-2003. Globalement, nous avons suggéré aux membres des comités d'examiner le projet de loi en fonction de huit principes de droit administratif. En définitive, nous avons toujours recommandé au gouvernement de créer un organe permanent et indépendant. En vertu du projet de loi, un organe est créé. Cependant, quelques éléments du projet de loi nous semblaient causer problème. Nous avons voulu attirer l'attention des membres des deux comités parlementaires sur certains d'entre eux.
Nous avons énoncé le principe selon lequel un tel projet de loi devrait consacrer l'accès à la justice. Nous avons dit, entre autres, qu'une première nation devrait bénéficier d'un accès raisonnable à la justice et que dans cette perspective, imposer une limite de 10 millions de dollars en vertu du projet de loi pouvait constituer un problème. Ici, on peut donner comme exemple le fait qu'une première nation n'a pas accès à toutes les ressources de financement afin de faire valoir sa revendication.
[Traduction]
Le président: Je ne sais pas si c'est Mme Barnes ou Mme Karetak-Lindell qui veut...
Oh, c'est M. Smith.
[Français]
M. David Smith (Pontiac, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, madame Dupuis, d'être parmi nous cet après-midi.
Mon collègue d'en face vous a demandé plus tôt combien de commissaires étaient en fonction présentement à la commission. Vous avez précisé qu'il y en avait cinq sur un total de sept postes. Vous avez mentionné que les deux postes étaient vacants depuis 2003. J'imagine que ces postes sont comblés par le ministre. Est-ce exact?
Me Renée Dupuis: Les personnes qui occupent ces postes sont nommées par le biais d'un décret du gouvernement.
M. David Smith: Il s'agit ici d'une commission autochtone. Or, j'aimerais savoir combien de commissaires sont autochtones.
Me Renée Dupuis: La représentation des Autochtones et des non-Autochtones a varié au fil des ans. Les deux postes vacants étaient, jusqu'en 2003, comblés par des Autochtones. À l'heure actuelle, un des commissaires est autochtone et les quatre autres, dont moi-même, sont non autochtones.
M. David Smith: Selon votre présentation, vous prévoyez en 2005 et 2006 vous consacrer à 64 dossiers, dont 40 enquêtes et 24 médiations. Ai-je bien compris?
Me Renée Dupuis: Oui.
M. David Smith: Pour ce qui est des chiffres pour l'année 2004-2005, ils sont pratiquement les mêmes, soit 43 et 21. Vous avez indiqué plus tôt qu'il fallait en moyenne entre deux et cinq ans pour terminer un dossier. Nous avons ici des données qui couvrent cinq ans, soit de 2000 à 2005.
Combien de dossiers par année, en moyenne, réussissez-vous à traiter ou à terminer? Combien y a-t-il de dossiers complétés, entièrement réglés? Je parle de dossiers dont le contenu est conforme à vos observations et à votre position, et qui ont été remis au ministre.
º (1610)
Me Renée Dupuis: Le nombre a varié au fil des ans. Cependant, au cours des dernières années, c'était en général trois ou quatre rapports d'enquête, et autant en médiation.
M. David Smith: Si je comprends bien, annuellement, de six à huit dossiers terminés étaient prêts à recevoir une décision. C'est le gouvernement ou le ministre en place qui rend ces décisions. Est-ce exact?
Me Renée Dupuis: C'est exact dans le cas des enquêtes. Par contre, lorsqu'une médiation est terminée, cela signifie généralement qu'il y a eu entente entre le gouvernement et la première nation. Le dossier est alors clos au gouvernement aussi. Dans les cas d'enquêtes, nous émettons notre recommandation, et le dossier suit ensuite son cours au gouvernement.
M. David Smith: Si je me fie à vos chiffres, une moyenne de 10 à 12 p. 100 des dossiers sont réglés, ou attendent que le ministre décide si l'enquête est justifiée et s'il est d'accord.
Je suis ici pour les peuples autochtones. Les personnes âgées sont notre mémoire, et elles nous quitteront malheureusement. Si nous réglons 10 ou 12 p. 100 de 64 dossiers, cela ne donne que 6 ou 8 dossiers.
Le processus est-il trop lourd? Manque-t-il d'effectifs? Je suis convaincu que l'ensemble des gens présents sont dévoués à la cause et qu'ils veulent tous régler le plus de dossiers possible, mais cela prend des ressources.
Pourquoi seulement 10 ou 12 p. 100 des dossiers sont-ils complétés? Je ne vous fais pas de reproches, mais n'y aurait-il pas moyen d'augmenter ce nombre à 25, 30 ou 40 p. 100? Il y a lieu de se questionner parce que les gens nous disent que les règlements demandent beaucoup de temps. Étant de l'extérieur, il m'est facile de constater la situation. Le pourcentage de résolution de dossiers est faible, mais je peux au moins comprendre que le processus est lourd.
Selon vous, y aurait-il moyen d'alléger ce processus, afin de l'accélérer et de résoudre plus rapidement certains dossiers?
Me Renée Dupuis: En effet, je crois qu'il existe des moyens d'accélérer les choses, Mais votre question porte-t-elle sur le processus de la commission ou sur le processus qui le précède? Les dossiers parviennent à la commission au terme d'un long processus.
M. David Smith: Avant que son dossier ne vous parvienne, une première nation aura tenté d'autres recours sans arriver à une entente. Si je comprends bien, la commission est une entité indépendante où un conseil de bande dépose une requête après avoir déjà essayé de s'entendre avec le ministère.
Me Renée Dupuis: En effet, nous recevons, par exemple, la demande d'enquête d'une première nation dont la revendication a été rejetée. Ou alors, sa revendication a été acceptée, mais il y a un désaccord entre le ministère et elle quant à la base sur laquelle devrait se faire la négociation.
Par conséquent, les dossiers qui nous parviennent sont généralement les dossiers les plus difficiles et les plus complexes. Par exemple, il reste des dissensions après qu'une étude ait été instaurée, qu'une recherche ait été élaborée par une première nation et qu'une recherche ait été effectuée par le Canada. Finalement, la plainte est rejetée et le dossier nous arrive après un long processus.
La commission est un mécanisme de révision. Nous reprenons donc le processus du début: nous étudions tout le dossier à nouveau, nous ajoutons la collecte d'informations et nous entendons des témoignages. Si tout cela était fait en première instance, les délais seraient déjà réduits. Par exemple, si la recherche était effectuée conjointement au départ, si on recueillait la preuve des Anciens au départ, cela nous éviterait de refaire une partie de la recherche. C'est un élément qui pourrait accélérer ou alléger le processus.
º (1615)
M. David Smith: Quand vous dites « au départ », cela implique-t-il le ministère et vous?
[Traduction]
Le président: Vous aurez l'occasion d'y revenir, monsieur Smith. Vous avez déjà dépassé le temps qui vous est alloué.
Monsieur Harrison.
M. Jeremy Harrison: Merci, monsieur le président.
Ma question n'est pas très longue. Je vais vous lire une citation tirée du rapport annuel de la CRI. On y parle d'un « ... nombre anormalement élevé de retards dans le suivi des recommandations de la Commission et son refus de financer des recherches qui appuieraient les revendications des Premières nations... » et on fait référence — et cela concerne le gouvernement — « au fait que le gouvernement avait pris beaucoup trop de temps pour passer en revue un certain nombre de revendications qui ont ensuite été acceptées aux fins d'enquête par la CRI à cause du délai encouru, qui équivalait à leurs yeux à un rejet... ».
Nous savons bien évidemment, monsieur le président, que l'un des principes de la justice fondamentale est le droit à un procès dans un délai raisonnable. On parle ici de justice pénale, mais c'est un principe tout aussi important pour n'importe quel tribunal.
Je me demandais, madame Dupuis, si vous pouviez nous en dire davantage au sujet des raisons pour lesquelles ces commentaires ont été inclus dans le rapport annuel de la CRI.
Me Renée Dupuis: Pourriez-vous me dire dans quel rapport...? Savez-vous d'où provient cette citation?
M. Jeremy Harrison: Je crois que c'est dans le rapport annuel de la CRI. Je ne sais pas trop si c'est celui de cette année ou celui de l'an dernier.
Me Renée Dupuis: À différentes reprises, nous avons formulé des recommandations en vue d'améliorer le système en place. Il nous est ainsi arrivé de soutenir qu'il fallait accorder davantage de ressources au ministère de la Justice et au ministère des Affaires indiennes afin d'accélérer le processus lorsque nous sommes en attente de la révision d'un avis légal. Je pense que d'autres témoins vous ont dit qu'il y a des problèmes de délai au ministère de la Justice. Nous avons aussi fait valoir que nous recommandions l'établissement d'une liste de toutes les revendications en attente dans le système de manière à ce que nous puissions analyser les principes les plus importants en cause à la lumière de notre expérience de 20, 25 et maintenant 30 ans d'application de cette politique. Nous croyons toujours qu'il vaudrait la peine d'essayer de nous montrer plus systématiques dans la manière dont nous traitons ces revendications globales.
Nous avons également suggéré au gouvernement d'investir davantage de ressources dans le processus et d'essayer d'établir, si je puis dire, une jurisprudence administrative regroupant les décisions que nous avons rendues précédemment dans de tels dossiers. Ce sont des recommandations de ce genre que nous avons formulées pour contribuer à la réflexion du gouvernement quant aux améliorations pouvant être apportées au système.
M. Jeremy Harrison: Merci.
Le président: Monsieur Smith, je vous ai interrompu tout à l'heure, alors...
[Français]
M. David Smith: Madame Dupuis, je ne suis pas une personne de loi, je ne suis pas avocat. Plusieurs de mes collègues autour de la table sont avocats. Je suis un administrateur et je m'intéresse donc aux chiffres. J'en reviens aux 10 ou 12 p. 100. Si on faisait un exercice de chiffres et qu'on décidait qu'il faut régler 50 cas par année, on arriverait à la conclusion qu'il vous faudrait 250 personnes pour y parvenir, puisque vous avez 51 employés en ce moment. Cela n'a aucun sens et ne satisferait pas le côté logique du cerveau. Cependant, on doit bien pouvoir changer quelque chose à ce processus. Vous êtes là depuis 2001. D'après vous, sans affecter la qualité de l'exercice, que peut-on modifier pour alléger le processus et en arriver à déposer des propositions au gouvernement ou au ministre en place, afin qu'ils prennent une décision?
º (1620)
Me Renée Dupuis: Un élément m'apparaît extrêmement important pour améliorer le système dans son cadre actuel, et c'est de faire se dégager les précédents, les éléments et les principes qui ont été appliqués depuis 30 ans, et qui ont mené à la résolution d'un certain nombre de plaintes. N'oublions pas qu'il s'agit au départ d'une politique qui vise à régler des revendications particulières. Il faut réexaminer chacune de ces plaintes ou revendications à la lumière de ces principes.
Il ne s'agit pas de ne pas accorder de procès équitable aux deux parties. Mais on peut très bien essayer d'établir des principes comme le fait la jurisprudence. Prenons l'exemple des revendications relatives aux droits fonciers issus des traités. Une première nation peut avoir signé un traité en 1899 en Saskatchewan. À l'époque, elle avait droit à un certain nombre de milles par famille, mais un certain nombre de principes ont été développés depuis 30 ans en Saskatchewan. Il y a même eu une entente tripartite entre la Saskatchewan, le Canada et un groupe de 27 premières nations.
Il y a des choses à retenir de ces expériences. Des principes peuvent se dégager de cela. On peut réviser, à la lumière de ces principes, toutes les plaintes et les revendications qui sont présentement dans le système. C'est une solution. De plus, à l'époque, on a choisi de procéder par la négociation. Dans le cadre de la politique actuelle, et depuis l'arrêté Calder en 1973, on nous a mentionné qu'il y a des droit autochtones au Canada. Le gouvernement a choisi de régler les revendications par la négociation plutôt que d'en débattre devant les tribunaux.
Au tout début du processus, par le biais de la médiation et de la facilitation, on pourrait préciser conjointement de quoi il est question dans cette négociation, au lieu de se rendre compte à la toute fin que tel ou tel élément était contesté. En d'autres mots, on pourrait établir par la médiation les vrais enjeux de la revendication venant d'un groupe de Saskatchewan, d'Alberta ou du Québec.
Les ministères concernés ont besoin de plus de ressources. Il faut accorder plus de ressources, maintenant que nous savons que notre société n'a pas respecté certaines de ses obligations et qu'il faudra, tôt au tard, corriger ou compenser cette situation.
M. David Smith: Vous avez parlé des autres ministères. Une dame du ministère de la Justice nous a expliqué pourquoi il fallait plus de ressources. Je reviens à mes 64 dossiers, et je trouve fort intéressant ce que vous dites de la mémoire corporative: utiliser le passé afin d'essayer de résoudre certains dossiers présents et futurs. Quelque chose vous empêche-t-il d'emprunter cette voie?
Me Renée Dupuis: À l'heure actuelle, rien ne nous permet de refuser la demande d'une première nation dont la revendication a été rejetée par le ministre. Nous avons pour mandat d'enquêter si elle exige une enquête complète sur son dossier. Nous ne pourrions pas, par exemple, répondre que cela nous apparaît entièrement réglé, puisque cela a été résolu par des ententes en Saskatchewan. Nous faisons des recommandations au gouvernement. Nous sommes tenus d'agir dans le contexte actuel, qui est très précis. Dans l'hypothèse où le Canada et une première nation nous feraient une demande de médiation pour faciliter leurs discussions, nous n'aurions pas non plus l'autorité nécessaire pour leur dire sur quelle base ou à partir de quel règlement ils doivent négocier. Nous sommes là pour faciliter un règlement entre deux parties qui définissent elles-mêmes leurs enjeux.
º (1625)
[Traduction]
Le président: Monsieur Ménard.
[Français]
M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): Madame Dupuis, avant que nous ne commencions la réunion, vous m'avez dit que je comprendrais tout des revendications particulières à la suite de votre présentation. J'avoue avoir encore de la difficulté à vous situer dans le processus que l'on nous a expliqué au cours des autres séances. J'arrive de l'extérieur, et ce genre de problème ne m'est pas familier. Évidemment, je siège avec des gens qui semblent le vivre depuis des années.
Étant donné ce qu'on nous a dit lors des séances antérieures, je comprends ce que sont les revendications particulières par rapport aux revendications générales. Mme Bartolini nous a expliqué qu'au début, lorsqu'un groupe indien voulait faire une réclamation, on passait un certain temps avec ses représentants pour bien l'établir. On devait d'abord demander une opinion juridique, et c'est à ce moment que les délais étaient plus longs. Il fallait pour cela prévoir environ cinq ans. Le premier processus pouvait durer jusqu'à deux ans, mais en général, il durait cinq ou six mois. L'étape de l'opinion juridique pouvait durer jusqu'à cinq ans. D'ailleurs, il fallait parfois jusqu'à deux ans simplement pour trouver un avocat à qui confier le dossier.
Ensuite, si la revendication était acceptée, on passait à la médiation ou à une forme de recherche de conciliation pour établir la réparation au tort que soulevait le groupe indien qui avait fait la réclamation.
Où vous situez-vous dans ce processus? Qu'est-ce que j'ai mal compris de ce processus?
Me Renée Dupuis: Monsieur le président, je voudrais préciser ma pensée et je vais essayer de le faire le plus clairement possible. Je voulais faire en sorte que les membres du comité comprennent non pas les revendications particulières, mais le fonctionnement de la commission. Je ne voudrais pas avoir pour mission de vous faire comprendre complètement les revendications particulières.
Pour ce qui est de la commission, je vais revenir sur ce que j'ai dit. La commission est une commission d'enquête qui a comme mandat de revoir les décisions d'un ministre. Il s'agit d'une espèce de mécanisme de révision constitué en commission d'enquête qui, après avoir procédé à une enquête publique sur une demande qui lui est adressée, intervient en révision d'une décision du ministre à la demande d'une première nation, lorsque sa revendication a été rejetée par le ministre ou, quand elle a été acceptée, lorsqu'elle n'est pas d'accord sur la base de règlement ou sur le principe de compensation proposé par le ministre pour régler sa revendication.
Nous sommes donc une structure de commission d'enquête qui intervient en révision d'une décision et qui, ultimement, produit un rapport et une recommandation au ministre, et indique si, selon son jugement, elle estime qu'une obligation légale du Canada à l'égard d'une première nation n'a pas été respectée. Voilà pour la partie des enquêtes.
M. Serge Ménard: Vous arrivez donc très longtemps après que la revendication ait été faite, soit à la fin d'un processus déjà très long.
Me Renée Dupuis: C'est pour cela que je dis que nous arrivons au bout d'un processus.
M. Serge Ménard: Vous semblez hésiter à utiliser le mot « révision ». Je vous comprends, car vous êtes avocate. Au fond, par rapport au processus de révision, même en droit administratif, votre pouvoir n'est pas décisionnel. Il ne s'agit que d'un pouvoir de recommandation. Le ministre peut accepter vos recommandations, tout comme il peut ne pas les accepter.
º (1630)
Me Renée Dupuis: C'est exact.
M. Serge Ménard: D'accord, je comprends.
Maintenant, vous tenez au mot « indépendant ». Ordinairement, on dit que les juges sont indépendants parce qu'ils sont nommés à vie ou durant bonne conduite et que, par conséquent, ils n'ont pas à craindre le non-renouvellement de leur mandat si leurs décisions ne plaisent pas au gouvernement.
Qu'est-ce qui assure votre indépendance?
Me Renée Dupuis: Nous sommes comme tous les mécanismes administratifs de révision dont le mandat, d'une certaine manière, ne leur garantit pas les mêmes critères d'indépendance que la magistrature, dans le contexte judiciaire. Je pense qu'il s'agit d'un contexte de droit administratif connu, qui fait reposer sur les épaules de ceux qui exercent ce pouvoir une pression plus grande de maintenir l'indépendance de leurs travaux et, dans notre cas, l'impartialité de nos travaux.
M. Serge Ménard: Si je comprends bien, votre organisme est distinct du gouvernement. Vous ne faites pas partie du gouvernement. Vous n'êtes pas dans la fonction publique.
Me Renée Dupuis: Non, nous ne sommes pas dans la fonction publique. Les commissaires et les employés ne font pas partie de la fonction publique.
M. Serge Ménard: Vous êtes nommés pour un mandat fixe.
Me Renée Dupuis: Nous sommes nommés pour un mandat indéterminé.
M. Serge Ménard: Indéterminé, dites-vous?
Me Renée Dupuis: Oui.
Le président: Merci, monsieur Ménard.
[Traduction]
Madame Karetak-Lindell.
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci, monsieur le président.
À la suite d'autres exposés qui nous ont été présentés, je pense que quelques-unes des questions posées par des représentants conservateurs ont laissé entendre que le processus de la Commission des revendications des Indiens ne constituait pas une alternative valable, que cela équivalait à un recours aux tribunaux. J'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet.
En outre, quelques-uns des témoins que nous avons entendus ont beaucoup parlé du rôle des provinces et de la difficulté à régler quelques-unes des revendications en raison du trop grand nombre de parties en cause, surtout lorsque les deux ordres de gouvernement sont concernés. Je me demandais si cela avait une grande influence dans le règlement des dossiers qui vous sont soumis.
Enfin, je m'intéresse beaucoup aux causes qui remontent à la période précédant la Confédération et aux différences entre ces cas et les dossiers plus récents ainsi qu'à la façon dont vous les traitez. Certains témoins nous ont notamment fait valoir qu'ils préféreraient que ces dossiers d'avant la Confédération relèvent entièrement du gouvernement fédéral, de telle sorte que celui-ci s'entende par la suite avec le gouvernement provincial pour en arriver à un règlement distinct.
Je me demande ce que vous en pensez.
Me Renée Dupuis: Je vais commencer par votre dernière question en essayant peut-être de faire le lien avec la deuxième, parce qu'elles sont interconnectées.
La participation provinciale au règlement des revendications particulières pose un problème. À notre point de vue, cela complique certes les choses et pas uniquement pour les revendications remontant à l'époque précédant la Confédération alors que les provinces n'existaient pas. Je ne veux pas me lancer dans une discussion hautement juridique concernant les obligations fiduciaires, mais comme les membres du comité le savent bien, il y a au moins un tribunal qui a statué qu'il existait une obligation fiduciaire fédérale ainsi qu'une possibilité d'obligation fiduciaire provinciale. Il s'agit donc d'un aspect à considérer.
Il y a aussi la question des dossiers datant d'avant la Confédération. Qui doit faire les frais d'événements qui se sont produits avant même la création du système fédéral, et qui devra rendre des comptes à l'égard des avantages tirés par l'Ontario ou le Québec, par exemple, au titre de territoires qu'ils se seraient appropriés avant la Confédération? J'ai fait référence à l'entente tripartite en vertu de laquelle la province de la Saskatchewan a accepté d'octroyer des terres et des sommes d'argent suivant une formule de partage de coûts avec le gouvernement fédéral. Il y a donc certainement des principes juridiques qui viennent compliquer les causes qui nous sont soumises.
La situation peut être d'autant plus complexe que les provinces n'ont pas nécessairement acquis l'expertise suffisante, ni notamment établi des liens assez étroits avec les peuples autochtones, ce que le gouvernement fédéral a pu faire dans le contexte des responsabilités qu'il assume depuis 1867 au titre des affaires indiennes. En fait, certaines provinces se demandent même si elles devraient avoir un rôle à jouer dans le règlement des revendications. Ainsi, la participation des provinces ajoute à la difficulté et à la complexité du processus ainsi qu'au temps nécessaire pour régler ces revendications.
À ce titre, nous avons indiqué dans notre rapport annuel concernant le projet de loi C-6 que nous jugions que toute instance créée pour traiter les revendications particulières devrait veiller à assurer la primauté de la relation fiduciaire entre les Premières nations et la Couronne fédérale. Nous avons fait part à l'époque de notre préoccupation quant à la mise en péril de ce principe constitutionnel en raison du transfert aux provinces de la responsabilité à l'égard de certains aspects des revendications. Selon nous, cela risquait de miner le rôle joué par le gouvernement fédéral.
Pour ce qui est de votre première question, à savoir si nous constituions une solution de rechange valable aux tribunaux, je peux vous dire que les parties en cause, les Premières nations qui ont comparu devant nous, nous ont indiqué que le processus, bien qu'il exigeait beaucoup de temps et arrivait à la fin d'une très longue démarche, était à leurs yeux un mécanisme valable, qui leur donnait accès à une audience équitable et leur offrait la possibilité de rencontrer en personne les représentants du Canada, de faire valoir leur cause et de se faire connaître en même temps que leur version des faits.
º (1635)
Mme Nancy Karetak-Lindell: Merci.
Le président: Merci, madame Karetak-Lindell.
Il n'y a personne du Parti conservateur. Quelqu'un d'autre veut intervenir du côté du gouvernement?
Madame Barnes.
L'hon. Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): J'ai une brève question.
J'ai lu votre rapport — et je veux également vous remercier pour votre exposé d'aujourd'hui; nous serons certes toujours heureux de vous accueillir ici — et je voulais vous demander s'il est arrivé au cours des cinq ou six dernières années que la CRI dépense tous les fonds qui lui étaient alloués.
Me Renée Dupuis: Ce fut presque le cas l'an dernier, mais pas tout à fait. Je pense donc qu'il y a eu des fonds non utilisés pour toutes les années d'existence de notre Commission sauf peut-être... Il faudrait que je vérifie. Je pense que nous avons déjà accusé un léger déficit, mais cette année-là mise à part, depuis les débuts de la Commission il y a toujours eu des fonds non utilisés dans le budget.
L'hon. Sue Barnes: Vous n'avez jamais dépensé toutes les ressources qui vous étaient allouées jusqu'à maintenant?
Me Renée Dupuis: Il faudrait peut-être que je vérifie. Si vous me le permettez, monsieur le président, je préférerais faire cette vérification. Je crois me souvenir d'un léger déficit pour une année.
L'hon. Sue Barnes: Oui, peut-être pourriez-vous fournir ces renseignements à notre greffier dans les prochains jours.
º (1640)
Me Renée Dupuis: Nous allons voir à vous fournir cette information cette semaine.
L'hon. Sue Barnes: D'accord, merci beaucoup. Je crois que c'est tout ce que je voulais préciser pour le moment.
Le président: Monsieur Ménard.
[Français]
M. Serge Ménard: J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous recevez les témoignages d'Anciens. Sont-ils assermentés? Sont-ils interrogés? Y a-t-il des représentants du gouvernement et de la bande? J'ai l'impression que ce n'est pas toujours... Je vous laisse faire les distinctions qui s'imposent.
Me Renée Dupuis: J'ai parlé de la visite faite par le personnel de la commission, qui est une visite préparatoire à l'audition publique dans la communauté. Des membres du personnel de la commission rencontrent les représentants de la communauté et ceux que la communauté a désignés comme étant ses témoins. Lors de cette première rencontre, notre avocat discute avec ces témoins. Il s'agit en quelque sorte d'un interrogatoire préalable des témoins afin que l'on puisse dresser un procès-verbal de cette rencontre et des sujets que doivent couvrir ces témoins, et ce procès-verbal est fourni au gouvernement du Canada. Ce sont notre avocat et les membres de notre personnel qui rencontrent les témoins dans la communauté. Une fois le procès-verbal dressé, on l'envoie au gouvernement du Canada, qui est en mesure de voir les éléments sur lesquels porteront les témoignages.
En général, c'est un comité d'enquête de trois personnes qui va faire l'audition dans la communauté. À cette étape, les témoins de la communauté sont interrogés par l'avocat de la commission en présence de l'avocat du Canada et d'un représentant du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. En somme, c'est une audition publique dans la communauté. Fréquemment, l'audition se passe dans une école et on invite les étudiants à y assister parce qu'ils font des travaux sur l'histoire de leur communauté. On s'assure qu'ils sont présents.
Notre avocat pose les questions aux témoins de la communauté, de la première nation. Les membres du comité d'enquête peuvent aussi poser directement leurs questions aux témoins. Par la suite, il y a un conciliabule ou une discussion entre les avocats de la première nation, ceux du Canada et notre avocat, afin de voir si ceux-ci ont des questions à poser ou des éléments d'information à exposer aux témoins. C'est notre avocat qui posera toutes les questions aux témoins. Il posera d'abord ses propres questions et ensuite celles qui auront été posées par le Canada ou par la première nation. Nous ne permettons pas le contre-interrogatoire des témoins lors de l'audition publique. Par ailleurs, si, pour une raison ou pour une autre, une des deux parties veut déposer des témoignages d'experts ou faire entendre des experts, nous permettons le contre-interrogatoire.
M. Serge Ménard: Il doit sûrement arriver que certains de ces Anciens meurent entre le moment où ils sont interrogés par un avocat de la commission et le moment où siège la commission. Dans un cas semblable, le procès-verbal qui a été dressé constitue-t-il une preuve?
Me Renée Dupuis: Il arrive que la première nation dépose en preuve devant la commission des affidavits qui ont été reçus d'un témoin, d'un aîné de la communauté qui est décédé et qui aurait été normalement entendu par notre commission. Il peut aussi s'agir d'affidavits qui ont été déposés lors d'autres procédures de la première nation sur des éléments similaires.
M. Serge Ménard: Oui, mais vous avez dit qu'à la première étape, l'avocat de la commission se rend rencontrer les témoins potentiels et dresse un procès-verbal de cet interrogatoire, qu'il envoie ensuite au ministère. J'imagine qu'il le fait pour que le ministère se prépare à l'audience publique de la commission.
º (1645)
Me Renée Dupuis: Oui.
M. Serge Ménard: Cela prend sûrement un certain temps. Comme vous avez affaire à des Anciens, j'imagine que la nature fait que, de temps à autre, un de ces Anciens ne puisse pas se présenter devant la commission plus tard. Ce procès-verbal sera-t-il versé au dossier pour faire preuve de son contenu?
Me Renée Dupuis: De toute façon, le procès-verbal sera déposé, mais je ne me souviens pas d'une situation exactement comme celle que vous décrivez, dans le sens où il y aurait déjà eu un procès-verbal constitué et où la personne serait décédée.
Il est arrivé que la santé déclinante de ces personnes fasse qu'elles ne puissent plus se déplacer. À ce moment-là, le comité s'est déplacé avec l'avocat du Canada et l'avocat des parties pour entendre la personne là où elle se trouvait.
M. Serge Ménard: J'en déduis qu'il ne doit pas s'écouler un long délai après le moment où l'avocat doit questionner les témoins et les audiences de la commission. C'est simplement une rencontre exploratoire avant l'audience de la commission.
Me Renée Dupuis: Oui. Comme vous le dites, nous essayons de faire en sorte que le délai soit très court entre cette visite exploratoire et notre audition.
M. Serge Ménard: J'ai une dernière question à poser. Ai-je suffisamment de temps? C'est quand même essentiel.
Ce qui nous frappe le plus, c'est la longueur des délais. Avez-vous une opinion sur la façon dont on pourrait raccourcir les délais avant que votre commission ne soit saisie d'une revendication?
Me Renée Dupuis: Au risque de me répéter, je dirai qu'un certain nombre de mesures pourraient être mises en place. Comme nous l'avons dit, il pourrait y avoir plus de médiation dès le départ ou plus de ressources dans le système actuel. Ensuite, nous pourrions essayer d'apprendre les principes qu'on a développés et les appliquer systématiquement. Cela couvre trois secteurs où, à notre avis, il y aurait certainement moyen d'améliorer le système.
M. Serge Ménard: Qu'est-ce qui empêche que cela se fasse? Il paraît que cela fait un bout de temps qu'on pense à cela, du moins d'après ce qu'on nous a dit.
Me Renée Dupuis: Monsieur le président, je ne voudrais pas être irrespectueuse envers le comité, mais je ne suis pas certaine qu'il m'appartienne de répondre à ce moment-ci à cette question.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Dupuis.
Madame Barnes.
L'hon. Sue Barnes: Merci beaucoup.
J'aimerais demander à notre témoin comment le CRI établit l'ordre de priorité de ses enquêtes. De toute évidence, vous avez un certain nombre d'enquêtes en attente. Effectuez-vous un tri à cet égard, ou y allez-vous par ordre d'arrivée? Comment choisissez-vous?
Me Renée Dupuis: Règle générale, nous traitons les demandes au fur et à mesure qu'elles nous sont soumises, mais nous établissons des priorités en cours de traitement. Les retards ne dépendent pas entièrement de nous. Si une élection a lieu dans une communauté où une visite de notre personnel est prévue, il est bien évident que la Première nation va nous demander de reporter cette visite, ce qui fait que tout le processus est retardé.
Si les parties acceptent de discuter des questions en cause... Au départ, nous examinons les questions à régler. Nous demandons aux représentants des Premières nations sur quelles questions ils souhaitent voir porter l'enquête. S'ils se rendent compte, à la lumière de cette discussion, qu'une analyse ou une recherche plus approfondie s'impose, nous pouvons alors convenir de procéder à une recherche conjointe, c'est ce que nous préconisons, et nous devons alors mettre la revendication de côté en attente des résultats de cette recherche.
Nous essayons de trouver un juste équilibre quant aux aspects du processus que nous pouvons accélérer. Au départ, nous entrons en interaction avec les parties en cause: visites de notre personnel, détermination des questions à régler, présentation des arguments. Par la suite, il y a les délibérations des groupes d'experts et la rédaction du rapport. Nous essayons d'en arriver à un équilibre, en fonction des enquêtes qui se déroulent le plus rapidement, partiellement — et je ne dis pas totalement — en raison des choses qui peuvent se produire dans le cours de l'enquête.
Je veux dire par là que les retards ne sont pas uniquement attribuables au fait que nous prenons trop de temps. Nous devons tenir compte du fait que nous agissons à la demande d'une Première nation. Si on nous demande de mettre une revendication en attente, nous ne pouvons pas vraiment dire non à une telle requête.
º (1650)
L'hon. Sue Barnes: Pourriez-vous nous donner plus de détails? Il est bien évidemment plutôt rare qu'un tribunal fasse des visites dans une communauté. Le faites-vous très souvent? À quelle fréquence y a-t-il de telles visites dans le cadre de ces revendications?
Dans une situation normale, quelle serait la fréquence et la durée de vos visites dans une collectivité pour amasser des éléments de preuve? À votre avis, dans quelle mesure cela est-il utile au processus?
Me Renée Dupuis: Tout dépend du nombre de témoins. Dans certains cas, nous devons rencontrer cinq Anciens; dans d'autres, il y en a une vingtaine. Ainsi, une visite du personnel peut exiger une ou deux journées d'entrevue avec des aînés.
Lors des audiences... Par exemple, dans l'affaire la plus récente que j'ai prise en charge, il y avait quatre enquêtes parallèles touchant deux Premières nations en concurrence. Deux audiences ont été tenues dans les communautés visées; deux jours dans l'une d'elles et trois jours dans l'autre. Nous avons ensuite reçu une demande d'intervention provenant de sept autres Premières nations, et nous avons dû tenir une audience pour étudier cette demande. Dans cette affaire, il a donc fallu cinq jours d'audience dans les collectivités, en plus des audiences visant à débattre des arguments juridiques.
Dans d'autres cas — et je pense à l'un d'eux en particulier — il y aura une seule Première nation en cause, une première série d'audiences ou de séances de travail dans la communauté, pendant trois jours, puis une seconde série de cinq journées. La durée peut donc varier en fonction de la complexité des questions à régler, mais c'est une étape que nous jugeons habituellement très utile pour bien des raisons.
Je pense pouvoir affirmer, et je suis heureuse de pouvoir le dire, que nous avons la chance de compter sur des commissaires très consciencieux. Les gens s'attendent à voir des fonctionnaires d'Ottawa. Ils ont plutôt droit à des commissaires travaillant à temps partiel; des Canadiens pouvant provenir de l'Île-du-Prince-Édouard aussi bien que de la Saskatchewan, de Québec ou d'Ottawa, qui procèdent à l'audition de leur cause. Les gens sont heureux d'avoir l'occasion de faire connaître leur situation, de faire valoir leur version des faits.
Les gens apprécient la démarche, mais estiment parfois très difficile de se retrouver dans une salle où l'avocat du Canada soutient qu'ils n'ont absolument aucun droit. Mais c'est leur première occasion de rencontrer personnellement les représentants du Canada, de constater qu'il y a effectivement des gens qui travaillent pour le Canada et de pouvoir faire leurs déclarations devant nous.
Nous estimons qu'il s'agit d'un mécanisme très utile; j'ai d'ailleurs établi une liste de tous les membres de votre comité avec les enquêtes actuellement en cours dans vos circonscriptions respectives. Cela nous permet de mieux comprendre de quoi il en retourne lorsque nous avons une revendication dans le nord de la Saskatchewan ou le sud de l'Alberta, mais aussi lorsqu'il nous faut passer quelques jours à Lethbridge ou à Prince Albert de manière à mieux saisir toute l'ampleur de ces questions complexes.
Le président: Merci, madame Barnes.
Monsieur Prentice.
[Français]
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC): Madame Dupuis, je suis ravi de faire votre connaissance. Je vais exprimer mes idées et poser mes questions en anglais.
[Traduction]
D'abord, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de votre excellent travail au sein de la commission depuis que vous en êtes devenue la présidente.
Je remarque que vous êtes accompagnée de deux éminents collègues. Je leur souhaite la bienvenue aussi. Je constate qu'Anne Chalmers est également ici aujourd'hui, elle fait partie de la commission depuis le tout début.
J'entrerai directement dans le vif du sujet, le comité se penche sur toute la question des revendications particulières parce que nous voyons que le projet de loi C-6 a, à toutes fins pratiques, été déchiré par le gouvernement et que le gouvernement a garanti, à l'APN à tout le moins, qu'il n'adopterait pas le projet de loi C-6 dans sa forme actuelle.
Le projet de loi C-6 est l'aboutissement de beaucoup d'années de travail. Laissons de côté un instant la question de savoir s'il est parfait ou non, mais comme nous devons maintenant aller de l'avant sur de nouvelles bases, j'aimerais que vous commentiez le cadre législatif sur lequel se fonde la commission et ce qui doit être fait pour que le processus de revendications particulières fonctionne.
Je vois deux alternatives. La première serait que quelqu'un insuffle vie à votre commission et la fasse passer à l'étape suivante, qui serait d'en faire une commission complètement indépendante, investie de pouvoirs d'arbitrage complets, indépendants du ministère. Si cela ne fonctionne pas, l'alternative serait qu'une entité, peut-être la Cour fédérale, assume une quelconque responsabilité judiciaire de juger de ce revendications, parce qu'il est une véritable honte nationale que le Canada soit à la fois juge et partie dans ce processus; franchement, cela nous porte à nous questionner sur notre engagement envers la justice et les droits de la personne.
Quelle serait la solution à vos yeux?
º (1655)
Me Renée Dupuis: Évidemment, nous militons pour la création d'un organisme permanent indépendant et nous voyons cette commission comme le fondement potentiel de cet organisme indépendant. Je pense qu'un tel processus est nécessaire. Nous l'avons déjà dit et nous le croyons toujours. Pour le reste, je crois que ce n'est pas à moi de dire s'il serait convenable ou non que ce pouvoir soit délégué à la Cour fédérale. Ceci dit, nous estimons toujours avoir besoin d'un processus complètement indépendant et permanent pour régler ces revendications.
M. Jim Prentice: La commission fonctionne toujours selon le mandat qui lui a été donné à titre de Commission sur les revendications particulières des Indiens du Canada en 1991, si je me rappelle bien, mandat qui a été légèrement modifié. Quels sont les changements nécessaires aujourd'hui pour rendre la commission complètement indépendante du gouvernement du Canada et l'habiliter à prendre des décisions exécutoires? Corrigez-moi si je me trompe, mais à l'heure actuelle, vous ne pouvez que donner vos recommandations au gouvernement du moment.
Me Renée Dupuis: Effectivement, mais je pense qu'il y a tout un éventail d'options pour modifier le décret actuel, et nous pourrions à partir de là en arriver à un cadre législatif complet. La commission a la responsabilité de s'occuper des revendications, mais il y a des options qui s'offrent.
M. Jim Prentice: Supposons que nous voulions procéder raisonnablement vite pour améliorer la situation actuelle, où il manque un cadre législatif complet. Nous dites-vous que nous pourrions simplement modifier le mandat de la commission par décret afin de placer la commission en position de prendre des décisions judiciaires?
Me Renée Dupuis: Ce n'est pas à nous de déterminer comment nous pouvons passer de notre statut actuel à un statut meilleur ou différent. Ce n'est certainement pas à nous de le dire. Je vous dis toutefois qu'i y a des options que le gouvernement pourrait envisager pour ce faire.
M. Jim Prentice: D'accord, j'accepte que c'est à nous et non pas à vous d'examiner la question. Mais avant que nous ne l'examinions, nous avons besoin des conseils des plus brillants esprits de notre pays, et vous en faites partie, vous ainsi que vos collègues de la commission. La commission a-t-elle déjà présenté des options au gouvernement et dans l'affirmative, pouvez-vous nous les présenter?
» (1700)
Me Renée Dupuis: Je crains que la commission ne se soit pas penchée sur la question plus en détail que ce qu'elle a déjà présenté à votre comité au sujet de nos points de vue sur le projet de loi C-6. À part cela, nous n'avons pas fait d'étude approfondie sur les options.
M. Jim Prentice: La commission a-t-elle participé à des rencontres sur les options avec l'APN en particulier? Avez-vous fait des recommandations à l'APN?
Me Renée Dupuis: Comme nous avons le mandat d'essayer d'offrir des services de médiation aux premières nations du Canada, nous avons rencontré les représentants de l'APN, leur avons fait parvenir une invitation et leur avons offert nos services de médiation dans toutes leurs discussions sur le sujet.
M. Jim Prentice: Vous parlez de médiation entre l'APN et le gouvernement...
Me Renée Dupuis: Exactement.
M. Jim Prentice: ... pour en arriver à une solution au sujet du projet de loi C-6.
Me Renée Dupuis: Le décret est clair sur cette partie de notre mandat, qui dicte que nous devons offrir aux premières nations du Canada des services de médiation sur les questions relatives aux revendications particulières.
M. Jim Prentice: Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois comprendre qu'il y a quelques années, peut-être même l'an dernier, la structure de la commission a changé. À une certaine époque, la commission relevait du Cabinet du premier ministre, si je me souviens bien, et faisait directement rapport au CPM, donc d'une certaine façon, il ne faisait pas rapport au ministère. Je suppose que cette structure a changé pour que la commission fasse rapport au ministère et non plus au Cabinet du premier ministre. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi et nous dire à quand remonte ce changement?
Me Renée Dupuis: Comme je l'ai déjà dit cet après-midi, de 1991 à l'été 2004, le premier ministre était le ministre désigné en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques. En juillet 2004, le gouvernement a décidé de désigner le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien ministre responsable aux termes de cette loi. À des fins administratives, le ministre des Affaires indiennes est dorénavant le ministre responsable devant la Chambre de la CRI, ce qui ne diminue pas notre indépendance à notre avis, et nous l'avons dit clairement au ministre. Nous fonctionnons toujours et nous avons besoin de fonctionner de façon indépendante du gouvernement. C'est ce que nous faisons depuis juillet 2004.
Le président: Merci, monsieur Prentice.
C'est maintenant le tour des députés du gouvernement de poser des questions s'ils en ont d'autres.
Madame Barnes.
L'hon. Sue Barnes: Merci.
Vous avez parlé de votre rôle de facilitation. Je comprends que vous parlez du rôle de facilitation sur les revendications particulières de chacun. Ai-je raison? Ce n'était pas de la facilitation sur le nouveau projet de loi?
Me Renée Dupuis: Nous avons le mandat d'offrir des services de médiation aux premières nations et au Canada lorsqu'ils participent à l'étude d'une revendication acceptée. S'ils doivent négocier, qu'ils sont dans une impasse et qu'ils ont besoin d'aide, nous pouvons leur offrir des services de médiation.
L'hon. Sue Barnes: D'accord. Il s'agit en fait de services de médiation, mais quel type d'aide offrez-vous exactement, juste pour nous donner une idée?
Me Renée Dupuis: Tout dépend. Nous intervenons dans diverses circonstances. Le cas le plus classique est celui d'une revendication acceptée pour laquelle les deux parties consentent à se tourner vers la CRI pour obtenir des services de médiation. Il arrive aussi que les parties demandent à la CRI de superviser des études conjointes et la concrétisation de projets; c'est davantage un rôle de facilitation dans des études ou des analyses conjointes. De plus, si pendant une enquête, il semble y avoir place à la négociation, nous inviterons les gens à profiter de notre processus de médiation. Nous pouvons donc offrir un service de médiation à n'importe quelle étape de l'enquête.
Cela prend diverses formes: la supervision de tout le processus de négociation à partir du moment où la revendication est acceptée jusqu'à son règlement; de l'aide aux parties dans l'établissement du mandat des consultants qui seront embauchés pour mener des études sur la perte de jouissance, par exemple; la coordination d'études conjointes, de la recherche et de l'analyse et j'en passe. Nos services englobent aussi la supervision de toutes les activités entreprises par les parties pendant le processus.
Je pense que vous avez entendu d'autres témoins mentionner que la CRI était bonne pour éviter aux parties de dérailler et pour les aider à avancer dans le processus. Je crois qu'on peut facilement comprendre que lorsqu'une revendication touche douze enjeux et circonstances différents, il peut être très compliqué de garder les parties concentrées sur le sujet et de les aider à avancer.
En gros, c'est le type de services de médiation et de facilitation que nous offrons. C'est tout l'éventail des méthodes de résolution des conflits, ce n'est donc pas strictement de la médiation dans tous les cas. Parfois, il s'agit plutôt de facilitation.
» (1705)
L'hon. Sue Barnes: Très bien.
Merci.
Le président: Merci, madame Barnes.
Madame Dupuis, cela vient clore nos multiples rondes de questions pour vous. Je tiens à vous remercier, au nom de tous les membres du comité, d'être venue aujourd'hui, de nous avoir présenté votre exposé et de nous avoir fait part de vos réponses très réfléchies à une multitude, voire à un barrage de questions. Merci d'être venue aujourd'hui. Comme M. Prentice et d'autres l'ont dit, merci infiniment de tout le bon travail que vous faites.
[Français]
Me Renée Dupuis: Je vous remercie, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Il y a un vote qui nous oblige à être à la Chambre des communes dans 15 à 20 minutes environ. À moins que quelqu'un ne veuille aborder un autre sujet très brièvement, je vais déclarer la séance levée.