ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de l'environnement et du développement durable
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 28 octobre 2004
¿ | 0900 |
Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)) |
Mme Karen Brown (sous-ministre adjointe, Service de la conservation de l'environnement, ministère de l' Environnement) |
Le président |
Mme Jennifer Moore (directrice générale, Direction générale de la coordination et des politiques relatives à l'eau, Service de la conservation de l'environnement, ministère de l' Environnement) |
¿ | 0905 |
¿ | 0910 |
¿ | 0915 |
Le président |
Mme Karen Brown |
M. William Crosbie (directeur général, Direction générale de l'Amérique du Nord, ministère des Affaires étrangères) |
Le président |
M. Peter Fawcett (directeur adjoint, Direction des relations avec les États-Unis, ministère des Affaires étrangères) |
Le président |
M. Jeff Watson (Essex, PCC) |
Le président |
M. Jeff Watson |
¿ | 0920 |
Mme Karen Brown |
M. Jeff Watson |
Mme Karen Brown |
¿ | 0925 |
M. William Crosbie |
M. Jeff Watson |
Mme Karen Brown |
M. Jeff Watson |
Mme Karen Brown |
M. Peter Fawcett |
M. Jeff Watson |
Mme Karen Brown |
M. Jeff Watson |
Le président |
¿ | 0930 |
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ) |
Mme Karen Brown |
M. Bernard Bigras |
Mme Karen Brown |
Mme Jennifer Moore |
Le président |
M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ) |
¿ | 0935 |
Mme Karen Brown |
Le président |
M. Peter Fawcett |
M. Christian Simard |
Mme Karen Brown |
¿ | 0940 |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.) |
Mme Karen Brown |
L'hon. Bryon Wilfert |
M. William Crosbie |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert |
Mme Karen Brown |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
¿ | 0945 |
M. Peter Fawcett |
M. Francis Scarpaleggia |
¿ | 0950 |
M. Peter Fawcett |
Le président |
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD) |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
¿ | 0955 |
M. Joe Comartin |
M. William Crosbie |
M. Joe Comartin |
M. William Crosbie |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
Le président |
M. Joe Comartin |
Le président |
M. Colin Carrie (Oshawa, PCC) |
À | 1000 |
Mme Karen Brown |
M. Colin Carrie |
Mme Karen Brown |
M. Colin Carrie |
Mme Karen Brown |
M. Colin Carrie |
Mme Karen Brown |
M. Colin Carrie |
Mme Karen Brown |
M. Colin Carrie |
Le président |
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.) |
À | 1005 |
Mme Karen Brown |
Le président |
M. Christian Simard |
À | 1010 |
Mme Karen Brown |
Le président |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
À | 1015 |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Peter Fawcett |
M. Joe Comartin |
M. Jeff Watson |
M. Peter Fawcett |
M. Jeff Watson |
M. Peter Fawcett |
M. Jeff Watson |
M. Peter Fawcett |
Le président |
À | 1020 |
M. Christian Simard |
M. Peter Fawcett |
Le président |
M. Colin Carrie |
M. Peter Fawcett |
M. Colin Carrie |
M. Peter Fawcett |
À | 1025 |
M. Colin Carrie |
Le président |
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD) |
M. William Crosbie |
M. Peter Fawcett |
M. Nathan Cullen |
Le président |
M. Jeff Watson |
À | 1030 |
M. Peter Fawcett |
M. Jeff Watson |
M. Peter Fawcett |
Le président |
M. Jeff Watson |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
M. Peter Fawcett |
M. William Crosbie |
M. Brian Jean |
Le président |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
À | 1035 |
M. William Crosbie |
Mme Yasmin Ratansi |
M. William Crosbie |
Mme Yasmin Ratansi |
Mme Karen Brown |
Le président |
M. Christian Simard |
Le président |
M. Jeff Watson |
Mme Karen Brown |
M. Jeff Watson |
Mme Karen Brown |
À | 1040 |
Le président |
M. Peter Fawcett |
Le président |
M. David McGuinty |
Mme Jennifer Moore |
Le président |
M. David McGuinty |
À | 1045 |
Mme Karen Brown |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert |
Mme Karen Brown |
L'hon. Bryon Wilfert |
Mme Karen Brown |
L'hon. Bryon Wilfert |
À | 1050 |
Le président |
M. Bernard Bigras |
M. Peter Fawcett |
M. Bernard Bigras |
M. Peter Fawcett |
À | 1055 |
Le président |
M. Tim Williams (attaché de recherche auprès du comité) |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'environnement et du développement durable |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 28 octobre 2004
[Enregistrement électronique]
¿ (0900)
[Traduction]
Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)): Bonjour à tous. Nous avons une journée d'automne magnifique à Ottawa et je crois que tout le monde s'apprête à passer une excellente journée.
Nous allons commencer par examiner une question qui inquiète beaucoup bon nombre d'entre nous, à savoir l'annexe de la Charte des Grands Lacs. Nous avons comme témoin ce matin Jennifer Moore, directrice générale, direction générale de la coordination et des politiques relatives à l'eau--bienvenue Jennifer--Karen Brown, sous-ministre adjointe, service de la conservation de l'environnement--bienvenue--et Bill Crosbie, directeur général, direction générale de l'Amérique du Nord, Affaires étrangères et Peter Fawcett. Bienvenue à tous.
J'aimerais également souhaiter la bienvenue à son excellence--je lui donne de l'excellence--M. Herb Gray. Je vous remercie d'être ici ce matin, monsieur Gray.
Nous avons le quorum et je vais donc donner immédiatement la parole à Karen.
Mme Karen Brown (sous-ministre adjointe, Service de la conservation de l'environnement, ministère de l' Environnement): Je vous remercie.
Bonjour à tous.
Si cela convient au comité, nous allons commencer par présenter le jeu de diapositives que nous vous avons remis et c'est Jennifer Moore qui va s'en charger. Après quoi, Bill Crosbie vous présentera quelques observations préliminaires et nous passerons ensuite aux questions des membres du comité.
Merci encore.
Le président: Très bien.
Madame Moore.
Mme Jennifer Moore (directrice générale, Direction générale de la coordination et des politiques relatives à l'eau, Service de la conservation de l'environnement, ministère de l' Environnement): Merci.
Le greffier a distribué un jeu de diapositives et nous aimerions prendre une dizaine de minutes pour vous présenter le contexte des Grands Lacs et ensuite, la perspective fédérale. Nous parlerons un peu de la Charte des Grands Lacs, de ses origines et des aspects sur lesquels nous travaillons pour vous donner une idée de la situation et des orientations futures.
Cette diapositive nous rappelle ce que représente le bassin des Grands Lacs. Dans ce contexte, c'est le bassin des Grands Lacs qui comprend les provinces de l'Ontario et du Québec et les huit États frontaliers américains. Cela veut dire le Minnesota, le Wisconsin, l'Illinois, l'Indiana, le Michigan, la Pennsylvanie, l'Ohio et l'État de New York. Voilà ce que recouvre le bassin des Grands Lacs.
La diapositive numéro quatre nous donne un aperçu des principaux instruments qui sont applicables au bassin des Grands Lacs. Sur le plan international, il y a le Traité des eaux limitrophes, qui a été signé par les deux pays en 1909. C'est un traité bilatéral qui lie le Canada et les États-Unis; il traite des obstructions ou des dérivations qui ont une incidence sur le niveau ou le débit naturels des eaux limitrophes et qui requièrent l'approbation de la Commission mixte internationale. Traité cadre, le Traité des eaux limitrophes de 1909 lie le Canada et les États-Unis.
Au Canada et dans les eaux canadiennes, le traité est mis en vigueur par la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales; c'est la loi fédérale qui a pour objectif de mettre en oeuvre le traité. Le Canada a utilisé cette loi pour interdire les transferts hors du bassin de la partie canadienne des eaux limitrophes, principalement celles du bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. Du côté des États-Unis, il y a la Water Resources Development Act. Ensuite, au niveau provincial, les principaux instruments sont en Ontario la Loi sur les ressources en eau, qui interdit les transferts d'eau hors du bassin et au Québec, la Loi visant la préservation des ressources en eau, qui interdit également les transferts d'eau hors de la province. Du côté des États-Unis, les huit États frontaliers ont adopté divers règlements qui aménagent le contrôle exercé sur les quantités d'eau utilisées.
Au niveau infranational, il y a la Charte des Grands Lacs. La charte elle-même a été adoptée en 1985, elle a été complétée par une annexe en 2001 et depuis quelques mois, il y a des consultations sur des ententes de mise en oeuvre de ces instruments. Vous verrez sur ce tableau que pour ce qui est des instruments les plus récents, il y en a un qui touche le Canada et qui n'est pas contraignant, c'est l'Entente sur les ressources durables en eau du bassin des Grands Lacs, qui est à l'étape de projet et qui fait l'objet de consultations. Du côté américain, il y a en plus de cet instrument un pacte. J'y reviendrai dans un instant.
Avec la diapositive numéro cinq, nous voulions vous donner une idée de la protection qu'assure actuellement le Canada pour ce qui est des transferts à l'extérieur du bassin. Comme je l'ai mentionné, il y a la loi fédérale et son règlement, à savoir la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales et son règlement d'application, qui interdisent les transferts massifs d'eaux limitrophes à l'extérieur du bassin. Cette interdiction vise le prélèvement d'eaux limitrophes et leur transfert hors de leur bassin hydrographique. Les violations de cette interdiction peuvent donner lieu à des condamnations. Au niveau national, nous avons travaillé avec les provinces qui mettent en oeuvre des lois, des politiques et des dispositions réglementaires provinciales qui interdisent les transferts à l'extérieur du bassin.
La diapositive numéro six présente le contexte de la Charte des Grands Lacs. Elle a été négociée par les membres du Conseil des gouverneurs des Grands Lacs--c'est-à-dire les huit États américains des Grands Lacs, le Québec et l'Ontario. Il y a ensuite la charte cadre, qui a été négociée en 1985, et un projet d'entente de mise en oeuvre, une annexe à la charte, qui a fait l'objet d'un accord en 2001. Les ententes détaillées de mise en oeuvre de la charte font à l'heure actuelle l'objet de consultations. Ce sont les documents qui ont été rendus publics en juillet 2004. Tous ces documents sont reliés entre eux; ils vont de la charte de 1985 qui énonce les principes généraux à des ententes qui prévoient des mesures de plus en plus précises.
¿ (0905)
La diapositive sept entre un peu plus dans les détails; elle décrit la Charte des Grands Lacs de 1985, un instrument non exécutoire, et les principes généraux qu'elle contient comme l'intégrité du bassin des Grands Lacs, la collaboration des gouvernements, la protection des ressources en eau des Grands Lacs, les avis préalables et les consultations auxquels donnent lieu les activités exercées et une série de programmes et de pratiques axées sur la collaboration.
La Charte des Grands Lacs de 1985 invitait également toutes les parties à négocier des mesures plus précises et une annexe a été publiée en 2001. Ces mesures détaillées sont décrites rapidement dans la diapositive neuf. L'annexe vient compléter la charte originale de 1985 et réaffirme l'engagement envers les cinq principes que je viens de vous mentionner. Elle invite les gouverneurs et les premiers ministres à élaborer un régime conjoint de gestion. Elle s'applique aux nouveaux prélèvements supplémentaires d'eau de surface et d'eau souterraine à l'intérieur du bassin des Grands Lacs ainsi qu'à la dérivation supplémentaire de ces eaux hors du bassin. Elle prévoit également que les instruments de mise en oeuvre qui seront éventuellement préparés devraient être exécutoires.
À l'époque, le gouvernement du Canada a exprimé certaines inquiétudes aux gouverneurs de la région des Grands Lacs, qui sont tous parties à l'annexe originale, et il a signalé qu'il était préoccupé par le laxisme de la norme contenue dans l'annexe 2001, par les risques de conflit avec le Traité des eaux limitrophes, par la compatibilité de ces documents avec l'Accord sur la qualité des eaux des Grands Lacs et il mentionnait également certaines préoccupations à l'égard du projet de rendre exécutoire les accords découlant de l'annexe 2001.
Depuis 2001, les négociateurs sont réunis, à savoir les huit États des Grands Lacs et les provinces de l'Ontario et du Québec, et ils poursuivent leurs travaux. En juillet de cette année, ils ont présenté un projet d'instruments de mise en oeuvre. Ces instruments sont décrits rapidement sur les diapositives neuf et suivantes.
Il y a deux instruments provisoires. Le premier est l'Entente sur les ressources durables en eau du bassin des Grands Lacs, qui n'est pas exécutoire, et qui doit être signée par les 10 parties. Ce sont les huit États des Grands Lacs, l'Ontario et le Québec. L'autre est le Pacte sur les ressources en eau du bassin des Grands Lacs, qui serait exécutoire en vertu du droit fédéral américain, et qui est donc relié à la Water Resources Development Act, et qui concerne les huit États américains des Grands Lacs.
Ces instruments créent ensemble un processus décisionnel applicable aux nouvelles dérivations et à l'augmentation de l'utilisation à des fins de consommation des eaux des Grands Lacs et ils établissent également des seuils d'intervention basés sur les volumes d'eau qu'impliquent les projets examinés.
La diapositive 10 présente l'Entente sur les ressources durables en eau du bassin des Grands Lacs, c'est une entente qui n'est pas exécutoire et qui doit être signée par les 10 parties. Elle établirait un organisme d'examen composé des gouverneurs et des premiers ministres de la région des Grands Lacs, dont les décisions ne seraient pas exécutoires, d'après les termes de l'accord. Cet organisme serait chargé d'examiner les projets ayant pour effet d'augmenter l'utilisation de l'eau à des fins de consommation et de la faire passer au-dessus des seuils d'examen. Cela vise, d'après nous, les projets qui concernent les eaux du bassin et celles qui se trouvent à l'extérieur du bassin. L'entente prévoit également que la gestion et la réglementation des provinces et des États individuels seraient maintenues pour les volumes inférieurs au seuil d'examen. L'idée est de s'en remettre aux lois et règlements provinciaux et étatiques pour contrôler les activités de gestion des ressources en eau, tant qu'elles demeurent inférieures à un certain niveau. Au-dessus d'un certain seuil, ces activités seraient examinées par l'organisme d'examen qui regroupe les 10 parties.
Le second volet des instruments de mise en oeuvre est le Pacte sur les ressources en eau du bassin des Grands Lacs. Ce pacte s'applique uniquement aux États américains des Grands Lacs. Il prévoit également la création d'un conseil d'examen. Le pacte américain reprend les seuils qui s'appliquent à l'entente plus large regroupant les 10 parties et il serait juridiquement exécutoire pour les parties américaines. Il contient certaines règles en matière de vote, comme l'indique le projet qui a été diffusé. Le projet parle des nouvelles dérivations. Il faudrait obtenir l'unanimité--tous les États des Grands Lacs devraient approuver ces nouvelles dérivations. Pour ce qui est des nouvelles utilisations pour la consommation, il faudrait que le projet soit approuvé par six États de la région des Grands Lacs.
¿ (0910)
Certaines parties du projet d'entente font l'objet de consultations. Là encore, en dessous d'un certain seuil, les régimes de réglementation et de gestion des États individuels continueraient de s'appliquer. Le projet de pacte, l'entente qui a été publiée, devra être approuvé par les assemblées législatives des États et par le Congrès américain.
Voilà donc un aperçu général des instruments de mise en oeuvre qui font l'objet de consultations depuis quelques mois.
La diapositive 12 vous montre les considérations qui modèlent la perspective fédérale. Le gouvernement fédéral fera des commentaires au Conseil des gouverneurs des Grands Lacs. Les commentaires sur les projets d'instruments s'inspireront des considérations suivantes : le souci de respecter l'interdiction qu'oppose le Canada aux transferts massifs d'eau limitrophe hors du bassin; le respect des obligations découlant du Traité sur les eaux limitrophes—aucun effet sur les niveaux et les débits; la prise en compte des besoins des écosystèmes—l'importance de protéger les écosystèmes dans les collectivités qui dépendent d'un approvisionnement en eau durable provenant du système hydrographique des Grands Lacs; l'élaboration de politiques fondées sur les connaissances scientifiques, basées sur des principes scientifiques objectifs et des données fiables, le principe de précaution, qui joue un rôle très important pour éviter les catastrophes, sans exiger que l'on tente d'apprécier les incertitudes scientifiques.
Voici donc les considérations qu'examine le gouvernement fédéral, en vue de formuler des observations destinées au conseil.
Enfin, pour ce qui est de la situation actuelle et des prochaines étapes, comme je l'ai mentionné, le gouvernement du Canada va communiquer ses observations aux gouverneurs au courant du mois de novembre. Nous avons également l'intention de transmettre nos observations au Québec, à l'Ontario et à nos homologues américains.
D'après ce que nous savons, les États et les provinces des Grands Lacs, autrement dit le groupe de travail du conseil, vont reprendre en 2005 les négociations sur les projets d'instruments de mise en oeuvre et ils seront amenés à les examiner à la lumière des commentaires émanant de la population qui auront été reçus au cours de la période de consultation qui vient de se terminer. Cette période a commencé au mois de juillet et s'est terminée à la mi-octobre. Nous prévoyons également que la version révisée de ces instruments devrait être prête dans le courant de l'année 2005.
Merci, monsieur le président.
¿ (0915)
Le président: Merci, madame Moore.
Je vous redonne la parole, Karen.
Mme Karen Brown: Merci.
Je vais demander à Bill Crosbie de présenter quelques observations liminaires.
M. William Crosbie (directeur général, Direction générale de l'Amérique du Nord, ministère des Affaires étrangères): Merci, Karen. Merci, monsieur le président.
Nous avons préparé un jeu de diapositives au sujet du Traité des eaux limitrophes. Pour gagner du temps, nous pouvons le remettre aux membres du comité.
J'aimerais souligner au comité, comme l'a fait le ministre Pettigrew à la Chambre des communes la semaine dernière, que, premièrement, les obligations qu'impose l'article 3 du traité aux États-Unis et au Canada ne sont pas modifiées par les projets d'ententes de mise en oeuvre de l'annexe de la Charte des Grands Lacs. Là encore, les engagements et les obligations auxquels nous avons déjà fait référence sont les suivants : aucune utilisation ou détournement des eaux limitrophes qui puisse toucher les niveaux ou les débits de l'autre côté.
Deuxièmement, les parties au Traité des eaux limitrophes, les deux gouvernements fédéraux, doivent veiller à ce que les ententes conclues par les États et les provinces puissent être mises en oeuvre dans le respect des obligations découlant du traité.
Troisièmement, comme le ministre Pettigrew l'a déclaré à la Chambre des communes la semaine dernière, nous sommes en train d'analyser les projets d'entente pour voir s'ils respectent le Traité des eaux limitrophes, tout cela en consultation avec les gouvernements des États-Unis, de l'Ontario et du Québec.
Du côté des États-Unis, le Congrès a chargé les États des Grands Lacs d'élaborer de nouvelles normes de gestion de l'eau dans le cadre de la U.S. Water Resources Development Act. Ces normes seront élaborées sous les auspices du Conseil des gouverneurs des Grands Lacs. Cela comprend l'Ontario et le Québec, en reconnaissance du rôle que ces provinces jouent dans la gestion de l'eau de ce bassin.
Comme cela est mentionné dans les diapositives, il y a deux ententes, un instrument international non exécutoire auquel sont parties l'Ontario et le Québec et une charte, qui lie les États américains, et qui devra être approuvée par tous les États de la région des Grands Lacs, tout comme les lois de mise en oeuvre, et ensuite, par le Congrès américain. Du côté des États-Unis, c'est un processus fort complexe.
Le gouvernement des États-Unis a récemment présenté des observations pour préciser certains éléments mais aucun aspect du pacte, lorsqu'il sera approuvé par le Congrès, n'est incompatible avec le droit fédéral américain et le droit international ou avec les obligations qu'impose à ce pays le Traité des eaux limitrophes. Certaines dispositions entreront en vigueur lorsque le document sera ratifié par tous les États, mais ces normes ne seront applicables qu'après l'achèvement du processus d'approbation, qui pourrait s'étendre sur une dizaine d'années.
Cela veut dire bien entendu que le gouvernement fédéral s'intéresse de près à cette question, qu'il élabore ses observations de façon très prudente et qu'il aimerait avoir les commentaires du comité.
Je devrais dire à mon sujet que je viens d'être nommé à ce poste il y a quelques semaines, et je vais donc demander à mon collègue Peter Fawcett, qui a lui-même participé très activement, avec nos collègues d'Environnement Canada, à une bonne partie des consultations avec les provinces, de bien vouloir m'épauler.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Crosbie.
Monsieur Fawcett, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Peter Fawcett (directeur adjoint, Direction des relations avec les États-Unis, ministère des Affaires étrangères): Pas pour le moment, monsieur le président.
Le président: Très bien. Et bien, s'il n'y a pas d'autres commentaires de votre côté, nous pouvons peut-être donner la parole aux membres du comité. Les membres du comité vont respecter l'ordre de parole sur lequel nous nous sommes entendus. Les Conservateurs vont commencer à poser des questions, ce sera ensuite au tour du Bloc, après cela aux Libéraux et ensuite au NPD; je donnerai ensuite la parole aux membres qui veulent intervenir dans l'ordre dans lequel ils se manifesteront.
Monsieur Watson.
M. Jeff Watson (Essex, PCC): Merci.
Pourriez-vous me dire combien de questions je puis poser maintenant?
Le président: Vous avez jusqu'à 10 minutes.
M. Jeff Watson: Très bien.
Tout d'abord, je tiens à remercier les témoins d'être venus devant le comité. Je l'apprécie beaucoup. Je sais que cela s'est décidé très rapidement et vous avez fait ce que vous pouviez pour nous présenter un exposé.
Il y a un certain nombre d'aspects qui me préoccupent et j'aimerais également aborder certains sujets. Le premier aspect qui me préoccupe est de savoir si l'eau va devenir une marchandise. Le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs a obtenu un avis juridique qui porte sur la possibilité d'établir une distinction entre les prélèvements à l'extérieur du bassin et ceux qui s'effectuent à l'intérieur du bassin. Autrement dit, selon cet avis, si l'eau était traitée comme une marchandise à l'intérieur du bassin, alors le droit fédéral et international exige qu'elle soit également traitée comme une marchandise à l'extérieur du bassin. La Commission mixte internationale a cependant une opinion contraire sur ce point.
J'aimerais donc savoir, face à des avis juridiques contradictoires, si, dans le cas où les gouverneurs accepteraient que l'eau soit traitée comme une marchandise dans ces ententes, l'eau ne devrait pas être traitée comme une marchandise aux termes de l'ALENA.
Je ne sais pas à qui adresser cette question. Peut-êre que quelqu'un pourrait essayer d'y répondre.
¿ (0920)
Mme Karen Brown: Je vais commencer. Je pense qu'il faut préciser que nous ne sommes pas des avocats, et que nous ne prétendons pas pouvoir vous fournir un avis juridique.
Le gouvernement du Canada a toujours estimé, dans ce domaine, que l'eau sous sa forme naturelle ne peut certainement pas être considérée comme une marchandise et l'eau sous sa forme naturelle est par conséquent protégée, si je peux m'exprimer ainsi, selon les règles de l'ALENA. C'est pourquoi les politiques du gouvernement du Canada sur les prélèvements massifs d'eau s'attachent principalement à préserver la santé des écosystèmes et que sa politique en matière de prélèvement vise essentiellement la préservation du bassin hydrographique.
Je ne suis pas en mesure de commenter des avis ou des opinions juridiques sur cette question venant de l'extérieur mais il est clair que tous les niveaux de gouvernement souhaitent que nous adoptions une approche cohérente à cette question; il faut préserver l'intégrité écologique des Grands Lacs et de leur bassin. Je tiens pour acquis que le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs étudie de très près cette question, comme le font bien entendu le Canada et les États-Unis.
M. Jeff Watson: Voilà donc la perspective du gouvernement fédéral. Mais j'aimerais aborder le point de vue américain pendant un instant. Je vais replacer tout ceci dans un contexte politique parce que je fais, bien sûr, de la politique. Mais le projet actuel... permettez-moi de réfléchir un moment.
Le Pacte sur les ressources en eau du bassin des Grands Lacs, d'après ce que je lis ici, est une entente qui exige l'unanimité entre les États américains et qui devra également être approuvée par le Congrès. Je vais replacer cela dans un contexte politique, si vous permettez, en tenant pour acquis que ce projet va aller de l'avant.
Vous le savez, à l'heure actuelle, le climat politique a beaucoup changé aux États-Unis. Il y a des lois contre nos porcs. Il y a des lois contre le bois d'oeuvre. Les frontières sont fermées à cause de l'EBS. En matière de sécurité, le Canada n'est pas toujours perçu comme un ami des États-Unis. Le climat politique chez notre voisin m'inquiète parce qu'il me semble qu'il serait très facile pour les États américains de s'entendre sur le prélèvement d'une ressource comme l'eau--ou de la transformer en marchandise si vous voulez--sans vraiment tenir compte des répercussions que cela pourrait avoir sur les Canadiens.
Je vais vous poser une question. Vous savez qu'il faut l'unanimité du côté américain. Supposons que ces États approuvent un prélèvement d'eau ou une dérivation massive à l'extérieur du bassin des Grands Lacs. Quel recours est-ce que le Canada pourrait exercer si nous n'étions pas d'accord avec cela? Je vais essayer de préciser un peu ma question. Par exemple, si Chicago... je ne devrais pas dire Chicago parce que cette ville est située à l'intérieur du bassin. Mais si une collectivité importante située à l'extérieur du bassin des Grands Lacs prélevait de l'eau pour sa consommation et la rejetait ensuite dans le bassin du fleuve Mississippi, qui est un bassin complètement différent, et que cela était approuvé à l'unanimité du côté des États-Unis, quels seraient nos recours dans un tel cas?
Mme Karen Brown: Tout d'abord, il me paraît bon de répéter que le Département d'État des États-Unis a remis des observations aux gouverneurs des Grands Lacs au sujet de ces ententes et qu'il a clairement indiqué qu'il souhaitait que ce pacte contienne une clause qui énonce très clairement que le Traité des eaux limitrophes--c'est-à-dire le traité entre le Canada et les États-Unis--doit l'emporter, malgré toutes les autres questions qui sont en train d'être examinées.
Sur ce point, je n'irais pas plus loin, parce que je ne sais pas vraiment quels sont les points de vue américains sur cette question mais nous sommes assez sûrs que le Département d'État des États-Unis a présenté cette demande très officiellement aux gouverneurs des Grands Lacs et qu'il a clairement indiqué qu'il s'engageait à respecter le Traité des eaux limitrophes, qui est en fait le traité qui régit tous les Grands Lacs.
C'est le Traité des eaux limitrophes qui joue le rôle de garde-fou; les deux niveaux de gouvernement se sont engagés à respecter ce traité et le Département d'État a clairement indiqué aux gouvenreurs qu'ils devaient également le respecter.
¿ (0925)
M. William Crosbie: J'ajouterais simplement que nous pouvons fournir au comité les observations du Département d'État des États-Unis qui, comme Karen l'a déjà dit, énoncent clairement qu'ils s'engagent à respecter le Traité des eaux limitrophes et...
M. Jeff Watson: À quel moment ces commentaires ont-ils été faits, si vous me permettez cette question, pour ce qui est de l'orientation adoptée par le Département d'État?
Mme Karen Brown: Très récemment. La semaine dernière?
M. Jeff Watson: Je suis peut-être un peu cynique par nature, mais ce n'est pas parce que le Département d'État a fait cette déclaration aujourd'hui qu'il ne changera jamais d'idée. Je crains beaucoup de nous retrouver avec une entente qui ne nous offre aucun recours. Je ne pense pas qu'il faille réclamer un droit de veto, mais si nous nous opposons à une dérivation approuvée par eux, que pourrons-nous faire?
Nous pensions aussi que la question du bois d'oeuvre et d'autres problèmes politiques auraient été réglés il y a longtemps.
J'aimerais approfondir un peu cet aspect, et même revenir sur la transformation de l'eau en marchandise. Le gouvernement fédéral affirme que ce n'est pas une marchandise. Si les États-Unis ne sont pas du même avis et qu'ils estiment que c'est une marchandise, je me demande ce que pourrait faire notre gouvernement fédéral si les États-Unis ne sont pas d'accord ou si nous nous opposons vraiment sur cette question. Que contient cette entente qui nous permette d'exercer une sorte de droit de veto ou un recours dans les cas où nous ne sommes pas du même avis que les États-Unis? Je crois que c'est cela que j'aimerais savoir.
Mme Karen Brown: Premièrement, nous ne sommes partie aux ententes qui sont en train d'être discutées en ce moment. Je crois que nous l'avons clairement précisé. Le gouvernement fédéral n'est pas partie à cette entente. Ce sont les provinces et les territoires, l'Ontario et le Québec, manifestement, ainsi que les États américains.
Mais pour revenir à cette question--et Peter pourra en dire davantage--le Traité des eaux limitrophes est l'instrument qui nous permet de gérer cette ressource et nous utiliserions le Traité des eaux limitrophes. Le Canada et les États-Unis collaborent très étroitement dans ce domaine depuis l'entrée en vigueur de ce traité, notamment avec la CMI et les organismes et agences concernés.
Peter pourrait peut-être ajouter quelque chose.
M. Peter Fawcett: Merci.
Je pourrais peut-être revenir à la première question que vous avez posée au sujet des avis divergents, celui qu'a reçu le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs et celui de la CMI.
L'avis qu'a reçu le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs concernait le droit américain et l'avis--et franchement, c'est celui que nous approuvons--que la CMI a présenté est fondé sur le droit international. Pour en venir à la question de l'utilisation de l'eau à l'intérieur ou à l'extérieur du bassin, il est clair que les experts en droit international reconnaissent, comme nous l'avons fait en adoptant notre propre loi de mise en vigueur du traité intitulé la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, qu'il est possible de faire une distinction entre l'usage d'eau à l'intérieur du bassin et à l'extérieur du bassin.
Cela découle de l'existence du Traité des eaux limitrophes. Ce traité crée un régime international qui s'applique aux Grands Lacs; par conséquent, vous pouvez vous baser là-dessus. Je crois que la preuve ultime est notre propre loi, qui établit en fait une différence essentielle, puisqu'elle interdit de façon absolue les prélèvements massifs d'eau de notre côté.
L'avis qu'a reçu le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs porte donc sur le droit des États-Unis. Je ne suis pas un concessionnaliste, ni un expert dans ce domaine mais il me paraît clair que le Conseil essaie de rationaliser, si vous voulez bien, ces deux avis divergents.
Comme je l'ai dit, nous partageons tout à fait l'opinion exprimée par la CMI selon laquelle le droit international doit l'emporter, puisqu'il existe un régime international applicable aux Grands Lacs. Je pense également que les déclarations du gouvernement des États-Unis vont dans le même sens.
M. Jeff Watson: J'aurais deux très brèves questions, pour terminer. Il me reste une minute.
Tout d'abord, je regarde une citation du Conseil des gouverneurs des Grands Lacs, qui se trouve dans l'aperçu de l'annexe de la charte, la voici « Si l'eau est traitée comme une marchandise à l'intérieur du bassin, il est alors obligatoire selon le droit international et le droit fédéral de la traiter comme une marchandise à l'extérieur du bassin ». Vous dites que selon la CMI, c'est le droit international qui s'applique. Cet organisme estime que le droit international permet de faire cette distinction. Il y a donc désaccord sur ce point.
Je voudrais passer à une autre question. Je vais la poser maintenant : est-ce que la proposition américaine, telle qu'elle est formulée actuellement, constitue une violation du Traité des eaux limitrophes?
Mme Karen Brown: C'est un aspect que nous examinons en ce moment. Nous attendons toujours un avis juridique. Nous examinons très soigneusement les ententes, comme le ministre Pettigrew l'a déclaré en Chambre.
Il est évident que notre principale préoccupation est de veiller à ce que ces ententes soient compatibles avec le Traité des eaux limitrophes et en fait, il faut que les mesures de mise en oeuvre de ces ententes soient compatibles avec ce traité. Cet examen est donc en cours.
M. Jeff Watson: Très bien, je vous remercie beaucoup.
Le président: Merci.
Monsieur Bigras.
¿ (0930)
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.
Mon collègue a assez bien présenté la chose il y a quelques minutes. Ce qu'il a dit correspond aux inquiétudes de plusieurs environnementalistes. La crainte de certains est que cette entente ne sonne la fin d'un quasi-moratoire. Cela pourrait avoir pour conséquence une certaine déviation de plusieurs milliards de litres d'eau à la hauteur de Chicago vers le Mississippi. Je pense que vous devez être sensibles à cela. Certains estiment même--je pense au Conseil des Canadiens et au professeur Schindler, qui ont un avis juridique--qu'il y a un risque de perte de la souveraineté canadienne, en plus d'un risque de déviation importante des eaux.
Avez-vous un avis juridique? Est-ce que vos ministères ont obtenu l'assurance que cette souveraineté ne serait pas perdue? Qu'est-ce que vous avez fait? Avez-vous demandé des avis au ministère de la Justice? Quelles dispositions avez-vous prises pour éviter de perdre dans une certaine mesure la souveraineté canadienne?
[Traduction]
Mme Karen Brown: Merci.
Oui, nous consultons le ministère de la Justice. Nous avons demandé un avis juridique sur la compatibilité de ces ententes de mise en oeuvre avec le Traité des eaux limitrophes, avec la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, qui est la loi canadienne, et les avocats sont en train d'examiner cette question en ce moment.
Nous travaillons avec le ministère de la Justice et avec le service des avis juridiques des Affaires étrangères et ce sont là les questions dont ils sont saisis.
[Français]
M. Bernard Bigras: Monsieur le président, premièrement, serait-il possible que la sous-ministre dépose cet avis juridique lorsqu'elle l'aura obtenu? Ce serait souhaitable pour les membres du comité.
Deuxièmement, avez-vous évalué l'impact que pourrait avoir sur le Saint-Laurent une déviation qui entraînerait une baisse du niveau d'eau du bassin des Grands Lacs? Certains environnementalistes craignent qu'une telle déviation n'entraîne une baisse du niveau du bassin des Grands Lacs, et certaines hypothèses de travail laissent entendre qu'il y aurait une baisse de trois mètres du niveau du bassin des Grands Lacs.
[Traduction]
Mme Karen Brown: Pour ce qui est de la première question, nous serons heureux de vous fournir nos observations provisoires lorsque nous les aurons. Évidemment, nous travaillons beaucoup avec la justice et tout le personnel du programme. Nous voulons consulter l'Ontario et le Québec, ainsi que nos homologues américains, pour ce qui est de présenter des commentaires aux gouverneurs des Grands Lacs et nous aimerions aussi recevoir le rapport du comité pour veiller à ce qu'il en soit tenu compte dans nos décisions.
Au sujet de la seconde question, la Commission mixte internationale a effectivement commandé une étude sur ce sujet et je demanderais à Jennifer de vous fournir quelques détails là-dessus.
Mme Jennifer Moore: La Commission mixte internationale est en train d'étudier les niveaux et les débits, et le système du Saint-Laurent. Je crois que cette étude est menée en collaboration avec nos homologues américains et nos meilleurs experts y participent. Elle est en cours. Je ne peux pas vous dire exactement à quel moment elle sera achevée mais je transmettrai certainement cette information au comité.
Le président: Monsieur Simard.
[Français]
M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ): Il y a quelques années, j'ai participé à un comité consultatif de la Commission mixte internationale. Il s'agissait d'une demande qu'on avait faite à la Commission mixte internationale au sujet du contrôle des inondations ou des niveaux très élevés dans les Grands Lacs qu'on avait connus à la fin des années 1980. Il était donc nécessaire de mieux gérer l'eau des bassins. Il y avait des projets avec l'US Army Corps of Engineers. Je me souviens que dans le cadre de ces études, ne serait-ce qu'au chapitre des changements climatiques, il y avait des scénarios qui prévoyaient une baisse allant jusqu'à 30 p. 100 de l'eau qui se jetterait dans le Saint-Laurent en fin de bassin, et même des scénarios catastrophes qui parlaient d'une baisse de 50 p. 100 en 2025.
Premièrement, a-t-on un bilan des échanges actuels d'eau? On sait qu'il s'en fait. Il ne s'agit pas nécessairement d'une déviation de bassin, mais il se puise actuellement de l'eau dans les Grands Lacs. À quel niveau cette eau est-elle puisée? J'aimerais donc savoir d'où on part. Deuxièmement, j'aimerais savoir s'il existe des scénarios quant aux effets cumulatifs des prélèvements massifs possibles dans les Grands Lacs et des changements climatiques.
¿ (0935)
[Traduction]
Mme Karen Brown: Nous n'avons probablement pas tous les renseignements que vous demandez aujourd'hui, mais nous pouvons certainement vous les fournir. En outre, je pense que, lorsque la Commission mixte internationale comparaîtra devant vous--et je crois que ce sera le cas bientôt--elle pourra vous fournir la plupart de cette information. La CMI est chargée d'effectuer ces études et elle est en outre, comme Jennifer vient de le mentionner, en train de travailler sur la question des débits, qui est la question qui lui est confiée actuellement.
À moins que Peter ait quelque chose à ajouter, je pense que nous pourrons vous fournir des renseignements supplémentaires mais nous n'avons pas ces renseignements avec nous en ce moment.
Le président: Nous allons entendre des représentants de la CMI mardi prochain. Ils seront ici.
Désolé. Monsieur Fawcett.
M. Peter Fawcett: Merci, monsieur le président. C'est exactement ce que j'allais dire. C'est une des questions sur lesquelles ils vont témoigner.
En fait, la plus grande partie de ces renseignements provient en fait des rapports préparés par la CMI, notamment votre question au sujet des prélèvements actuels effectués sur les eaux des Grands Lacs. L'étude que nous avons mentionnée il y a un instant, l'étude des niveaux et des débits du lac Ontario et du système du Saint-Laurent, qui nous l'espérons sera terminée d'ici un an, nous fournira des renseignements supplémentaires.
Je pense que votre question touche un autre aspect important, à savoir la nécessité d'assurer une gestion plus large des eaux du bassin des Grands Lacs. Nous avons effectivement besoin d'avoir de meilleurs renseignements au sujet des utilisations actuelles, au sujet des effets cumulatifs de ces utilisations. Nous avons besoin d'information et d'études scientifiques pour pouvoir prendre ces décisions et il est nécessaire de mettre sur pied un meilleur régime de gestion de l'ensemble du bassin, comme le demande un certain nombre d'organisations internationales comme la CMI et la Commission des Grands Lacs.
[Français]
M. Christian Simard: Même si, dans une éventuelle entente entre les huit États, l'Ontario et le Québec, on s'engageait à respecter les traités et les lois, est-ce qu'une telle entente ne serait pas un peu comme le cheval de Troie, c'est-à-dire une première étape, pour les États américains, dans les pressions qu'ils exerceraient pour faire changer la loi fédérale américaine?
De notre côté, est-ce que l'Ontario, le Québec ou le fédéral aurait un angle d'attaque contre cette éventuelle chose? On pourrait s'engager à respecter le traité, mais par la suite, le membres du pacte pourraient s'organiser pour faire changer la loi fédérale, car il y aurait d'énormes pressions en ce sens. On sait qu'il y a plus de 40 millions de personnes--ce sont de vieux chiffres--autour du bassin des Grands Lacs, et 4 ou 5 millions de personnes le long du Saint-Laurent, qui est un peu le tuyau d'échappement au niveau environnemental. Au Québec, on subit l'ensemble des décisions prises par un bassin qui exerce d'énormes pressions, sans compter celles du Midwest américain.
Est-ce qu'il nous sera possible d'avoir une prise lors de la deuxième étape, celle où on voudra peut-être faire changer la loi américaine à la suite de pressions populaires extrêmement lourdes?
[Traduction]
Mme Karen Brown: Les questions que vous soulevez sont en fait celles qui ont été soumises au Conseil des gouverneurs des Grands Lacs. Il est vrai que la population du bassin des Grands Lacs est très importante et que la population qui vit dans cet écosystème est en pleine croissance, en particulier les collectivités situées à l'extérieur de ce que nous appelons traditionnellement le bassin et cette population représente une demande très importante.
Pour répondre brièvement à votre question je dirais tout d'abord que les ententes auxquelles vous avez fait référence, ainsi que les ententes auxquelles l'Ontario et le Québec sont parties sont en fait non exécutoires. Deuxièmement, malgré la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, la loi canadienne de mise en oeuvre, qui interdit en fait les prélèvements d'eau vers l'extérieur du bassin, l'emporterait encore. C'est le dilemme auquel nous faisons face : comment veiller à ce que le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs ne propose que des mesures qui soient conformes au traité. Je crois que le ministre Dion, lorsqu'il a répondu à une question en Chambre hier, a indiqué très clairement que nous n'avions aucune intention de modifier cette loi, ni le régime actuel. Nous nous sommes engagés très fermement à protéger ces deux choses.
¿ (0940)
Le président: Merci.
Je vais passer à l'autre côté de la table. M. Wilfert, et ensuite M. Scarpaleggia, pour dix minutes.
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, certains affirment que le Canada a joué un rôle très passif au cours de toutes ces discussions et qu'en fait, nous n'y avons guère participé. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
Mme Karen Brown: Le gouvernement du Canada n'est pas membre du Conseil des gouverneurs des Grands Lacs, comme les membres du comité le savent sans doute, et il ne siège donc pas à la table des négociations; il ne fait pas non plus partie des groupes de travail. Nous avons dû attendre que les ententes soient publiées en juillet dans le but de recueillir les commentaires du public pour pouvoir en prendre connaissance.
Nous faisons partie d'un processus auquel participent nos collègues fédéraux, mais également l'Ontario et le Québec. Nous espérons pouvoir transmettre nos commentaires au conseil à la fin du mois de novembre.
L'hon. Bryon Wilfert: Je pense, monsieur le président, que l'un des grands principes doit être que nous refusons à ce que l'on contourne le Traité des eaux limitrophes internationales, point final.
Certains s'inquiètent du fait que ce pacte pourrait en fait modifier les pouvoirs accordés par ce traité, et même en fait les pouvoirs de la CMI. Qu'en pensez-vous?
M. William Crosbie: Je pense aux commentaires qui ont été présentés par le Département d'État des États-Unis.
En particulier, le Département d'État a demandé que le pacte contienne la clause suivante :
Aucune disposition du présent pacte n'est incompatible avec les autres lois fédérales ou le droit international. En particulier, aucune disposition du présent pacte n'est incompatible avec le Traité de 1909 relatif aux eaux limitrophes et aux questions originant le long de la frontière entre le Canada et les États-Unis... Dans la mesure où une disposition de ces ententes serait incompatible avec le traité ou d'autres lois fédérales internationales, le traité ou la loi l'emporterait sur la disposition concernée. En outre, les conditions imposées dans ce document aux nouvelles utilisations à des fins de consommation, aux nouveaux prélèvements et dérivations, viendront s'ajouter à celles que contient le Traité. |
L'hon. Bryon Wilfert: Monsieur le président, étant donné que ces commentaires ont été présentés, vous l'avez dit, la semaine dernière...?
Le président: Oui.
L'hon. Bryon Wilfert: Je présume que nous ne connaissons pas encore la réaction des États-Unis.
Mme Karen Brown: Pas à ma connaissance. Non.
L'hon. Bryon Wilfert: Le Département d'État américain a fait connaître sa position très clairement. Vous avez indiqué que, lorsque le processus sera achevé, nous ferons connaître la nôtre tout aussi clairement. Nous voulons savoir si nous allons indiquer clairement notre position, à la fois au gouvernement de l'Ontario et du Québec et bien sûr aux gouverneurs, et qu'une fois cela fait nous nous y tiendrons.
Nous craignons que l'on apporte certains changements qui obligeraient les gouvernements de l'Ontario et du Québec à adopter des dispositions législatives qui auraient pour effet de modifier les normes, et d'autoriser certaines formes de prélèvement d'eau, ce qui n'est pas dans l'intérêt national du Canada. Évidemment, je ne saurais trop insister sur le fait que l'intérêt national du Canada doit l'emporter, quelle que puisse être l'opinion des autres à ce sujet.
Je pense que dans nos consultations et dans nos discussions avec les autres parties, nous ne voulons pas aller très loin sans avoir clairement fait connaître notre position, parce que comme vous le mentionnez, ces discussions vont se poursuivre l'année prochaine et sans doute déboucher sur l'adoption d'une loi d'ici la fin de l'année prochaine.
Je tiens à souligner encore une fois, monsieur le président, comme le ministre l'a déclaré hier que notre position sur les prélèvements d'eau est très claire, point final : nous ne voulons pas que l'on introduise des changements qui pourraient être interprétés de différentes façons, nous voulons éviter les problèmes juridiques. Le droit américain est très complexe. Je comprends les répercussions possibles mais je tiens à préciser clairement que notre gouvernement doit être très ferme à ce sujet, en particulier avec nos homologues provinciaux.
Le président: Merci.
Monsieur Fawcett, je pense que le comité aimerait également avoir la référence que vous avez citée il y a quelques minutes. Nous aimerions que vous en remettiez des copies au comité.
Monsieur Scarpaleggia.
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je pense que la population canadienne est très troublée par cette question. C'est une question très complexe, cela est sûr, et chaque fois que nous pensons que nous la comprenons--et excusez l'analogie--cela nous échappe comme de l'eau. Nous avons dit l'année dernière aux Canadiens que l'adoption de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales avait réglé la question; c'est notre position. Et nous voici peu de temps après, en train de parler d'un accord complexe entre les États et les provinces, avec le gouvernement fédéral qui surveille la chose mais qui n'y participe pas vraiment. C'est pourquoi j'estime que ces préoccupations sont en partie justifiées .
Mais ma question porte sur la question des mesures et de la mise en oeuvre des documents. Il y a ce mythe qui veut que la science soit objective et permette d'atteindre la vérité et que tous les scientifiques de valeur peuvent s'entendre sur ce qu'est un fait et la vérité, mais je crois savoir que les niveaux d'eau des Grands Lacs sont en fait influencés par des facteurs naturels. On m'a dit, et je ne sais pas si c'est exact, que la faiblesse des niveaux actuels de l'écosystème est probablement due à des facteurs naturels.
Si j'ai bien compris, je pense que, selon l'entente sur l'annexe, l'eau qui est prélevée dans ce bassin doit y être reversée par les États. Que se passe-t-il en cas de désaccord sur de tels prélèvements? Supposons que des scientifiques américains, des scientifiques canadiens, des scientifiques provinciaux et des scientifiques fédéraux se mettent à se disputer et disons que le problème s'aggrave, et que l'on craigne du côté du gouvernement fédéral que cette entente ne soit pas respectée et qu'il faille faire quelque chose. Expliquez-moi ce qui se passerait, étape par étape. Comment le gouvernement fédéral s'y prendrait-il pour faire respecter sa conception de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales dans une situation aussi confuse? Quelles seraient les étapes à franchir? Que ferait le gouvernement fédéral? S'il disait à l'Ontario et au Québec qu'il ne pense pas que ces provinces en respectent l'esprit; qu'il n'est pas satisfait de la situation; qu'il n'est pas d'accord avec les scientifiques américains...que se passerait-il?
¿ (0945)
M. Peter Fawcett: J'aimerais commencer par réagir de façon informelle à ce que vous avez dit en premier. Nous sommes également un peu frustrés de voir ce projet parce qu'il manque de précision et qu'il n'est pas basé sur des données scientifiques sûres, comme vous l'avez mentionné. Vous avez tout à fait raison, c'est un des principes fondamentaux que nous allons inclure dans nos commentaires destinés au conseil, à savoir qu'il faut que les décisions soient fondées sur des données scientifiques.
D'après ce que m'ont dit l'Ontario et le Québec, une des raisons qui explique que la formulation de ces documents est aussi vague est qu'il était urgent de les publier, compte tenu de l'étape à laquelle étaient rendues les négociations à l'époque. Le mandat était de négocier cette entente dans un délai de trois ans. Les négociateurs avaient dépassé le délai et la population voulait, bien évidemment, savoir ce qui se passait. Nous sommes donc en face d'un projet qui n'est en fait pas achevé. La formulation doit être resserrée. Le texte qui nous a été transmis se prête à toutes sortes d'interprétations. Je suis donc tout comme vous inquiet de ce manque de précision.
Maintenant, pour en arriver à votre question proprement dite, si nous ne sommes pas satisfaits de la façon dont les choses se déroulent, et en tenant pour acquis que le Québec et l'Ontario ne sont pas satisfaits non plus, que nous pensons que cela va donner un résultat inacceptable et influencer ou toucher les obligations des États-Unis aux termes du traité, alors nous procéderions à des consultations avec le gouvernement américain. Si ces consultations ne débouchaient pas sur un résultat acceptable, alors nous soumettrions probablement la question à la Commission mixte internationale pour obtenir un avis indépendant fondé sur des données scientifiques.
Je pense que c'est ce que nous ferions. La CMI communiquerait alors un avis indépendant et nous essaierions de résoudre la question de cette façon.
Là encore, je ne peux pas vraiment faire de commentaires au sujet du processus visé par cette entente parce que, comme cela a été mentionné plus tôt, c'est une entente qui concerne les États et les provinces.
M. Francis Scarpaleggia: À titre de question de suivi, je vais vous poser la question suivante qui m'intéresse vraiment. Que se passerait-il si la CMI n'arrivait pas à se prononcer faute de majorité, et si la province de Québec et la province de l'Ontario n'étaient pas d'accord avec le gouvernement fédéral sur cette question?
Dans vos commentaires, vous avez tenu pour acquis que les provinces avaient les mêmes préoccupations que le gouvernement fédéral. Que se passerait-il si les préoccupations ne coïncidaient pas et si la CMI n'était pas en mesure de rendre une décision? Que se passerait-il ensuite? Quelle serait la prochaine étape? Comment régler ce différend? Quel serait le mécanisme à utiliser pour résoudre ce différend? Comme je vous l'ai dit, je suis vraiment intéressé à savoir ce qui se passerait.
¿ (0950)
M. Peter Fawcett: Je devrais souligner le fait que le gouvernement fédéral est partie au Traité des eaux limitrophes, de sorte qu'en fin de compte, c'est nous qui sommes responsables. Mais nous avons toujours collaboré très étroitement avec l'Ontario et le Québec au cours de ce processus, et nous espérons que ce dialogue et cette collaboration étroite avec les provinces se poursuivront.
Le président: Monsieur Scarpaleggia, je dois vous interrompre et donner la parole à M. Comartin.
Je vous rappelle que M. Gray est ici, que nous allons entendre la CMI et que vous pouvez approfondir cette question avec elle.
Monsieur Comartin.
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président.
Permettez-moi de commencer par faire une déclaration, à savoir que, malgré tout ce qui s'est dit au cours de la dernière législature au sujet de la loi en vue de renforcer l'interdiction des prélèvements et des exportations d'eau en vrac, la réalité est que le ministre a néanmoins le pouvoir d'accorder des permis aux termes de cette loi. Il ne s'agit donc pas d'une interdiction absolue.
Je comprends toutefois les commentaires de M. Wilfert au sujet de la position que le gouvernement semble adopter, selon laquelle ce pouvoir discrétionnaire ne sera pas exercé. Je voudrais rester sur ce sujet.
Je ne sais pas très bien, monsieur Fawcett et monsieur Crosbie, auquel de vous deux je devrais adresser cette question mais à quel moment avons-nous appris que les gouverneurs des Grands Lacs envisageaient d'élaborer une deuxième entente qui prendrait la forme d'un pacte? Quand est-ce que le gouvernement fédéral, le nôtre ou celui des États-Unis, a-t-il appris la chose? Est-ce que cela s'est fait au mois de juillet ou avant?
M. Peter Fawcett: Je vais essayer de répondre à vos deux questions, parce que...
M. Joe Comartin: La première n'était pas une question, monsieur Fawcett, c'était une affirmation. Je n'ai pas besoin d'une réponse sur ce point. J'aimerais que l'on réponde à la deuxième question, à savoir à quel moment avons-nous appris cela?
M. Peter Fawcett: Oui. Lorsque le Congrès a délégué aux États des Grands Lacs ses pouvoirs aux termes de la Water Resources Development Act, il était prévu à l'époque que les huit États des Grands Lacs présenteraient au Congrès un projet sous la forme d'un pacte. Voilà comment... Si j'ai bien compris, selon le droit américain, les États peuvent conclure une entente exécutoire. Celle-ci est ensuite transmise au Congrès. Je pense donc que, lorsque la question a été déléguée aux États des Grands Lacs, je crois que c'était en 1999 ou en 2000, il était clair à ce moment-là que le pacte qui en ressortirait serait soumis à l'approbation du Congrès.
M. Joe Comartin: Était-il clair à l'époque que le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs serait constitué pour prendre des décisions sur la question des prélèvements d'eau? Ou est-ce que cela n'est apparu que plus récemment?
M. Peter Fawcett: Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre correctement à cette question. Ce sujet a été délégué au Conseil des gouverneurs des Grands Lacs, qui comprend l'Ontario et le Québec, et qui est chargé de mettre sur pied un régime de gestion des eaux. C'était la mission que le Congrès lui avait confiée. Je pense que l'on peut en déduire qu'on s'attendait à ce que des décisions soient prises au sujet de la gestion de l'eau au sein de ce groupe.
M. Joe Comartin: Mais on aurait pu choisir la Commission mixte internationale et la charger de prendre ces décisions ou de présenter des recommandations; en effet, cet organisme existait déjà et cette responsabilité lui avait déjà été confiée. Il n'était pas nécessaire de choisir un organisme composé de gouverneurs d'État.
M. Peter Fawcett: Je pense que le pacte doit être conclu par les huit États des Grands Lacs. Mais je vais peut-être vous répondre d'une autre façon.
Il est nécessaire, comme je l'ai dit plus tôt, d'assurer la gestion de l'eau dans le bassin des Grands Lacs. La gestion de l'eau relève des États et des provinces. Ce sont eux qui accordent les permis, recueillent des données et s'occupent de ces choses. Nous ne nous mêlons pas de la gestion de l'eau. C'est une question de gestion d'une ressource qui relève des provinces et des États.
Je dois toutefois mentionner qu'il existe du côté américain des mesures très diverses qui visent à assurer la gestion de l'eau. L'idée était de se donner des normes communes plutôt qu'avoir des mécanismes différents dans chaque État, de façon à disposer de données comparables et à mieux savoir ce qui se passe dans le bassin. C'était l'intention, je crois, à l'origine de la décision d'élaborer ces normes de gestion de l'eau.
¿ (0955)
M. Joe Comartin: Cela me pose le même problème que me posait l'accord quand je l'ai vu pour la première fois au mois d'août. C'est peut-être que je réagis un peu trop en avocat mais il me paraît inévitable qu'il y ait un conflit entre ce conseil et la CMI. Cela me semble tellement évident, en particulier lorsqu'on examine les détails et que l'on voit combien les normes prévues par le pacte et l'entente sont laxistes. Je ne crois pas que quelqu'un qui a une formation juridique--et là encore, c'est peut-être ce qu'il faut posséder--pourrait penser qu'un tel conflit n'est pas inévitable.
La CMI a ses propres normes, qui, de toute évidence, sont beaucoup plus strictes. La CMI a pour l'essentiel imposé un moratoire pour les nouvelles dérivations, en attendant d'obtenir de meilleures données scientifiques. Par contre, il y a une norme très peu stricte...vous savez, la dernière question que vous avez posée.
Il y a toutes sortes de dispositions dans ces documents qui font que le conseil n'examinera même pas les dérivations. Il est possible de prélever des quantités d'eau massives sans qu'il soit procédé à aucun examen, en particulier lorsqu'il s'agit de consommation. C'est pourquoi je ne comprends pas très bien comment nous en sommes arrivés à cette situation.
Je dois vous dire que j'ai posé cette question aux gens du MRN lorsqu'ils se trouvaient à Windsor et que je n'ai pas obtenu de réponse satisfaisante. Il est certain que quelqu'un a dû se rendre compte de ce qui allait se passer.
M. William Crosbie: La compatibilité des instruments est une question qui relève des deux gouvernements fédéraux. Je pense que les commentaires présentés par le Département d'État américain visent à réaffirmer la suprématie des obligations découlant du Traité des eaux limitrophes.
M. Joe Comartin: Monsieur Crosbie, cela ne répond pas à ma question. S'ils se contentent de cette déclaration et qu'ils continuent dans cette direction, comment cela réglera-t-il le conflit qui va inévitablement opposer la CMI et le conseil?
M. William Crosbie: Je n'irais pas jusqu'à dire que ce conflit est inévitable. Nos commentaires visent notamment à aider les parties à trouver une façon de permettre à tous les intervenants concernés d'exercer leurs rôles et leurs responsabilités. Comme Peter l'a déjà dit, ce sont les États et les provinces qui sont responsables de la gestion de l'eau. Avec ces ententes, ces gouvernements essaient d'améliorer la façon dont ils exercent leurs responsabilités et ce, de façon coordonnée. En tant que gouvernement fédéral, travaillant de concert avec le gouvernement fédéral des États-Unis, nous voulons simplement veiller à ce que ce genre de collaboration soit conforme à nos obligations internationales.
M. Joe Comartin: Monsieur Crosbie, je serais d'accord avec vous si nous parlions uniquement des eaux qui demeurent à l'intérieur du bassin. Dès que vous donnez à ce conseil le pouvoir de prendre des décisions--et je ne pense pas qu'ils reculeront sur ce point--autorisant le détournement d'eau vers l'extérieur du bassin, cela veut dire qu'il y aura inévitablement un conflit avec la CMI.
Je tiens à être très clair : je reconnais que les États et les provinces doivent effectivement améliorer leur gestion; cela ne me cause aucun problème. Je vis constamment avec cette eau polluée, alors je suis au courant et je suis tout à fait conscient de la nécessité de cette chose. Ce n'est pas ce qui fait problème. Ce qui m'inquiète, c'est la possibilité que l'on dévie l'eau à l'extérieur du bassin et je me demande pourquoi ce conseil aurait le pouvoir de le faire. Je ne comprends vraiment pas pourquoi on lui a donné ce pouvoir.
M. Peter Fawcett: Permettez-moi de faire un commentaire sur ce dernier aspect. Je dirais que non seulement les obligations découlant du Traité des eaux limitrophes ne sont pas modifiées par le projet d'entente de mise en oeuvre mais que les obligations des États-Unis et les nôtres qui découlent de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs demeurent inchangées.
Le président: Monsieur Comartin, une minute.
M. Joe Comartin: Monsieur Fawcett, cela ne réglera pas le problème.
Merci, monsieur le président.
Le président: Nous allons peut-être revenir de ce côté de la table et donner la parole à M. Carrie.
M. Colin Carrie (Oshawa, PCC): Tout d'abord, j'aimerais dire que je suis très content de vous voir ici.
J'aime la façon dont se déroule la période de questions. Ce qui m'inquiète, c'est que je suis d'accord avec le NPD et avec le Bloc. Je me demande bien, monsieur le président, si vous n'avez pas ajouté quelque chose à cette eau.
Je viens de la circonscription d'Oshawa, qui se trouve dans les Grands Lacs, et je constate que tous les aspects de notre collectivité--les aspects sociaux, économiques, les loisirs--sont reliés à l'eau. Je vois l'eau comme une source de vie. Quand j'étais jeune, je pensais que nous en aurions indéfiniment. Je constate aujourd'hui, avec les défis que pose la croissance démographique, que nos nappes phréatiques ont beaucoup baissé. C'est un aspect que les élus devront régler au cours des 20 ou 30 prochaines années, en améliorant la gestion de cette ressource. Si nous ne...
Pour faire un rappel historique, vous avez peut-être entendu parler de la mer d'Aral en Russie, dont on a prélevé des quantités d'eau considérables. En 20 ou 30 ans, ils ont transformé une région dynamique où vivaient des milliers de personnes en un désert ou presque. C'est un des grands problèmes auquel nous allons devoir faire face au cours des années qui viennent. Il me paraît que nous devons commencer à examiner toutes ces choses et à agir au cours des années qui viennent.
La question que j'aimerais vous poser, c'est peut-être une question difficile, est que j'aimerais savoir pourquoi nous nous attaquons en ce moment à ce problème? Il me semble que nous avions une entente que nous trouvions assez satisfaisante. D'où viennent les pressions qui s'exercent pour modifier la situation, pour renégocier différents aspects? Est-ce que ce sont les gouvernements, fédéraux ou provinciaux, ou plutôt les grandes sociétés qui veulent utiliser de l'eau? Pourquoi faut-il agir maintenant? Pourquoi entamer des négociations?
À (1000)
Mme Karen Brown: Je crois que cela découle, à l'origine, du fait que le Congrès américain a délégué aux États la responsabilité de mettre sur pied un régime de gestion aux termes de la Water Resources Development Act. Comme je pense que Peter et d'autres l'ont mentionné il y a un instant, il était nécessaire d'harmoniser les normes et d'en arriver à une sorte d'accord, étant donné que ces États se partagent, bien évidemment, des quantités d'eau considérables. Il s'agit donc d'une évolution assez récente.
Je ne peux pas vous dire, et je ne pense pas que quelqu'un le puisse, pourquoi le Congrès américain a décidé d'agir comme il l'a fait, pour ce qui est de la façon dont ce projet de loi est structuré et de la demande qui a été faite aux différents États concernés. Je considère que le fait que l'Ontario et le Québec aient décidé de se joindre à ce dialogue est un élément positif. Ces provinces souhaitent s'assurer que la norme qui sera élaborée leur sera acceptable. Elles ont pour objectif, et d'ailleurs elles l'ont dit clairement, de veiller à ce que cette norme soit la plus exigeante possible de façon à ce qu'elle protège leurs intérêts dans les Grands Lacs et dans le fleuve Saint-Laurent.
Sur ce point, je crois qu'il est impossible de savoir pourquoi les États-Unis ont choisi cette voie, mais nous nous sommes clairement engagés, avec les provinces, à veiller à ce que ces documents soient compatibles et à préserver des normes strictes pour les Grands Lacs.
M. Colin Carrie: Très bien.
Ma question suivante comporte également un aspect historique. Je vis près des Grands Lacs, et je sais que le niveau du lac Huron a sensiblement baissé au cours des 20 dernières années. Est-ce que nous recherchons les raisons de cette situation? Qu'est-ce qui s'est produit et quel effet cela a-t-il eu jusqu'ici?
Mme Karen Brown: Là encore, cela fait partie de l'étude en cours actuellement qui porte sur les niveaux et les débits des Grands Lacs, étude qu'effectue la CMI. Il se fait beaucoup de choses pour essayer de comprendre l'équilibre des flux entre les Grands Lacs. C'est donc un sujet qui est à l'étude en ce moment.
M. Colin Carrie: Savons-nous quels sont les lacs dont le niveau baisse? Est-ce que tous les niveaux baissent en même temps? Est-ce qu'il y en a qui s'élève ou...?
Mme Karen Brown: Je ne connais pas tous ces détails. Là encore, je pense que la CMI pourrait répondre à cette question la semaine prochaine.
M. Colin Carrie: Très bien.
Est-ce que nous travaillons avec d'autres organismes pour prendre des mesures agressives en matière de conservation pendant que se déroule ce processus?
Mme Karen Brown: Oui, nous le faisons. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos homologues par l'intermédiaire du Conseil canadien des ministres de l'environnement. Nous étudions actuellement des programmes très larges qui traitent de certains aspects de la conservation. Parallèlement, pour ce qui est des Grands Lacs, nous avons depuis quelques années un plan d'action pour les Grands Lacs et l'équivalent pour le fleuve Saint-Laurent, qui traite des questions de responsabilité conjointe, comme la qualité et la quantité de l'eau ainsi que la conservation.
M. Colin Carrie: Et pour les choses comme les barrages? Est-ce que nous travaillons avec l'industrie ou avec des organismes sur les projets hydroélectriques ou les choses de ce genre?
Mme Karen Brown: Oui. Dans la mesure où l'on présente de nouveaux projets, le gouvernement fédéral travaille toujours de façon très étroite avec les promoteurs et avec d'autres organismes pour effectuer l'évaluation environnementale lorsque le projet comporte un aspect qui relève d'une responsabilité fédérale.
M. Colin Carrie: Merci.
Le président: M. McGuinty et ensuite M. Simard.
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci d'être venus ce matin. Je voulais commencer par vous dire que je suis heureux de constater que vous êtes tous très pris par cette question et que nous avons entendu des commentaires très intéressants présentés par mon collègue M. Wilfert.
Je veux examiner cette question du point de vue d'un avocat. J'ai lu les ententes deux fois et je vais vous poser quelques questions qui découlent des réactions que j'ai eues à la première et à la seconde lectures de ces documents, questions que vous pourrez, je l'espère, transmettre à d'autres organismes qui examinent ces aspects--peut-être à la justice.
Premièrement, le pacte et l'entente reconnaissent dans leurs préambules qu'aucune disposition de ces accords ne peut l'emporter sur le Traité des eaux limitrophes de 1909 ou aller à l'encontre de ses dispositions--et effectivement, je crois que ces ententes vont jusqu'à dire qu'elles doivent respecter à peu près tous les traités internationaux susceptibles de s'appliquer dans ce domaine. C'est un préambule et je ne sais pas si ce préambule lie le pacte et l'entente. Ce qui m'amène à vous poser une question, à laquelle j'aimerais avoir une réponse, si vous demandez un avis juridique. Peut-on dire que le pacte et l'entente essaient en réalité de soustraire certaines activités aux dispositions du Traité des eaux limitrophes de 1909, par exemple? Voilà donc une question que je voulais vous poser.
La deuxième chose qui m'a frappé était les dispositions supplémentaires de l'article 10, dans le pacte, qui traite des effets cumulatifs. Je ne sais pas où en est la science des effets cumulatifs, en particulier pour les grandes étendues d'eau douce. Je dirais que cette science n'est peut-être pas très avancée si l'on pense aux effets cumulatifs terrestres. Cette science n'est guère avancée, d'après moi. J'aimerais vous poser une question ou obtenir une réponse. Qu'est-ce que cela veut dire? Ils ont défini cela en termes très larges et imprécis; ce n'est pas un domaine facile, cela est certain, mais j'aimerais avoir quelques précisions sur ce que cela veut dire. Ils vont effectuer « une évaluation périodique des effets cumulatifs des prélèvements, dérivations et utilisations à des fins de consommation... tous les cinq ans ou chaque fois que... les pertes [en eau du bassin]...atteindront 50 000 000 gallons par jour », et cela continue. C'est l'article 10 du pacte.
L'autre chose qui m'a frappé se trouvait dans le chapitre 7 de l'entente, intitulé « Dispositions finales », les articles 701, 702 et 703, par exemple. On y réaffirme très clairement les pouvoirs et les responsabilités constitutionnelles du gouvernement fédéral du Canada et de celui des États-Unis. Là encore, j'essaie de comparer cela à certains commentaires qu'ont fait mes collègues selon lesquels nous avons des avis juridiques qui disent que cela constitue une perte de souveraineté. Je n'ai pas constaté cela. J'ai fait des recherches à ce sujet et même fait des efforts désespérés.
La dernière question que j'aimerais vous soumettre porte sur la façon dont ces documents s'intègrent à la nouvelle approche qu'a adoptée l'Ontario en matière d'établissement du prix de l'eau? L'Ontario examine à l'heure actuelle, par exemple, les coûts des prélèvements et d'attribution de permis dans le cas de l'eau embouteillée et cette province est en train d'adopter de nouvelles mesures qui vont montrer, je crois, très rapidement à l'Ontario qu'il ne dispose pas des données hydrogéologiques dont il aurait besoin pour faire de bons choix et prendre des décisions efficaces.
Voici les questions que je voulais vous poser.
À (1005)
Mme Karen Brown: Merci. Nous transmettrons ces questions au ministère de la Justice.
Pour ce qui est des effets cumulatifs, permettez-moi de vous dire que nous sommes certainement tout à fait favorables à tout ce qui pourrait améliorer les informations scientifiques concernant les effets cumulatifs. C'est un domaine particulièrement difficile, en particulier lorsqu'on examine à la fois la question de la qualité de l'eau et celle des quantités. Le bassin des Grands Lacs est soumis à un stress découlant de l'arrivée d'espèces étrangères qui viennent s'ajouter à toute une série de produits chimiques toxiques. Il s'agit donc là d'une étude très importante que nous souhaitons encourager en poursuivant notre collaboration avec les deux côtés de la frontière.
Nous transmettrons ces questions.
Le président: Très bien.
Monsieur Simard.
[Français]
M. Christian Simard: C'est une question très complexe. J'ai l'impression, et je me demande si mon impression est juste, que tout tourne autour des normes qui sont dans l'entente et autour de l'unanimité ou de l'absence d'unanimité au Conseil des gouverneurs. Selon certaines interprétations, les gouverneurs des Grands Lacs ont un avis juridique qui dit qu'il est impossible de distinguer les transferts à l'intérieur du bassin des transferts à l'extérieur du bassin, parce que l'eau est commercialisée. C'est une façon de contourner le préambule ou l'élément qui dit qu'on doit respecter tous les traités.
Donc, il y a cette fuite possible et cette impossibilité de distinguer entre l'intérieur et l'extérieur du bassin. À partir du moment où l'eau des Grands Lacs est mise dans une bouteille, on ne peut pas savoir où elle va, où elle est commercialisée. Est-ce qu'il serait possible, même advenant une opposition forte de l'Ontario et du Québec aux dispositions, que la seule entente entre les huit États américains autour des Grands Lacs suffise à faire en sorte qu'on applique unilatéralement ces normes floues et cette déviation, qui ne porte pas ce nom mais qui est bien réelle, des eaux des Grands Lacs, qui pourrait se faire un peu en cachette?
À (1010)
[Traduction]
Mme Karen Brown: C'est une question complexe et tout n'est pas très clair. Comme nous l'avons déclaré plus tôt, une des raisons qui expliquent que le texte de ces ententes ait été publié rapidement est qu'il s'agit de documents très complexes et qu'on voulait obtenir les commentaires de la population et des opinions sur les normes proposées. Il est évident que nous devrons examiner la façon dont tous ces documents peuvent s'harmoniser, et cela fait partie du défi auquel doit faire face le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs, tout comme le Canada et les États-Unis.
Je crois que l'on peut dire que le Québec et l'Ontario ont également clairement indiqué qu'ils étaient tout à fait contre l'interdiction des transferts à l'extérieur du bassin. Je pense donc que nous sommes tous du même avis sur ce point. Le défi, comme je l'ai mentionné plus tôt, est de travailler à partir de cette entente pour élaborer des normes qui soient à la fois compatibles et exigeantes de façon à pouvoir répondre aux besoins canadiens comme aux besoins des États-Unis et ensuite, d'utiliser ce processus de consultation et de participation de public pour obtenir d'autres commentaires et d'introduire une certaine uniformité grâce à ce document.
Il est très difficile de répondre à des questions hypothétiques parce qu'il ne s'agit là en fait que de versions provisoires. Nous nous attendons à ce que ces documents évoluent, je peux vous le dire, à la suite de toutes ces consultations. Ce travail va débuter, ou du moins les commentaires de la population seront examinés, au cours des mois de novembre et décembre. Nous pensons que la deuxième version de ces documents sera très différente.
Le président: Chers collègues, je vais donner la parole aux personnes qui me font signe, de sorte qu'il n'y aura pas d'ordre particulier.
M. Comartin et ensuite M. Watson.
M. Joe Comartin: M. Crosbie ou M. Fawcett, je crois savoir que le procureur général du Michigan a déposé une lettre dans laquelle il s'oppose au détournement d'eau--je ne connais pas très bien les détails, parce que je n'ai pas vu la lettre. Je me demandais si vous pouviez nous dire, grâce à vos contacts aux États-Unis, si d'autres États ont manifesté, d'une façon ou d'une autre, une certaine insatisfaction avec les ententes, que ce soit au niveau des gouverneurs ou à un autre niveau.
M. Peter Fawcett: Comme vous le savez, nous avons cinq consulats dans la région des Grands Lacs. Ces consulats nous fournissent des rapports au sujet des consultations publiques qu'ont entamées les États et le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs.
Vous avez tout à fait raison, le procureur général du Michigan s'est vivement opposé aux dérivations d'eau. Le Michigan s'y oppose particulièrement vivement parce que l'État est entièrement situé dans le bassin des Grands Lacs. Nous connaissons donc leur position, mais nous n'avons pas enregistré beaucoup de réaction des autres États. Ils sont sans doute en train de terminer leurs consultations et je crois savoir, étant donné que le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs reprend ses séances vers la mi-novembre, qu'ils feront rapport à ce moment sur les consultations et sur les commentaires qu'ils ont obtenus. Il y a un comité consultatif qui examinera également le résultat de ces consultations, de sorte que nous serons peut-être en mesure d'avoir à ce moment d'autres réactions du côté des États-Unis.
M. Joe Comartin: Avez-vous une copie de la lettre du procureur général du Michigan?
M. Peter Fawcett: Je pense que nous en avons une, oui.
M. Joe Comartin: Pourriez-vous en remettre une copie au comité?
M. Peter Fawcett: Je serais heureux de le faire.
M. Joe Comartin: Cette question s'adresse à vous deux. Les deux ministres ont indiqué que les gouverneurs et les provinces étaient disposés à ne pas demander que le gouvernement fédéral respecte la date limite du 18 octobre. Avons-nous quelque chose de solide à ce sujet. Il semble que vous n'allez pas leur transmettre notre réponse avant la fin du mois de novembre. Vont-ils attendre jusque-là? Avons-nous une confirmation à ce sujet?
À (1015)
M. Peter Fawcett: Nous avons indiqué au Conseil des gouverneurs des Grands Lacs à Chicago que nous attendions des commentaires du côté canadien et que nous avions l'intention de présenter des commentaires. Ils ont réagi comme ils l'ont déjà fait plusieurs fois : ils vont examiner nos commentaires; cela les intéresse beaucoup.
Je devrais également dire à l'intention des membres du comité que j'ai présenté un exposé, en fait à deux reprises, au conseil au sujet de notre loi de mise en oeuvre—les modifications que nous avons apportées à la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales—de sorte qu'ils sont très au courant de ce que fait le gouvernement fédéral et qu'ils attendent une réponse de notre part.
M. Joe Comartin: Ont-ils mentionné qu'ils allaient prolonger la période de consultation pour d'autres groupes, notamment les écologistes?
M. Peter Fawcett: Pas à ma connaissance.
M. Joe Comartin: Merci.
Monsieur Watson.
M. Jeff Watson: J'aimerais revenir sur certains aspects qu'ont abordés mes distingués collègues du comité qui sont vraiment partis dans la bonne direction.
La position de repli est toujours celle que nous offre la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, qui, en vertu de l'article 3, fait de la CMI l'arbitre ultime. J'aimerais savoir comment vous comprenez le rôle de la CMI. Je crois qu'à cause de l'article 3 ma question serait la suivante : la CMI va-t-elle avoir son mot à dire sur l'approbation des dérivations d'eau aux termes des accords de mise en oeuvre de l'annexe 2001?
M. Peter Fawcett: La CMI a pour rôle d'approuver tous les projets qui ont un effet sur le débit des eaux. Je dirais, pour répondre brièvement à votre question, que, si un projet a un effet sur les niveaux et les débits, il doit être approuvé par la CMI.
Je dirais également que la CMI nous a fourni des conseils assez complets dans son rapport de 2000 intitulé La protection des eaux des Grands Lacs et dans l'examen triennal qu'elle a effectué en août 2004. En particulier, il est important de tenir compte de la recommandation numéro un qui porte sur cette question. Voici ce que dit cette recommandation :
les gouvernements fédéraux..., les gouvernements des États des Grands Lacs ainsi que l'Ontario et le Québec ne doivent autoriser un projet de prélèvement d'eau du bassin des Grands Lacs que si le promoteur est en mesure de démontrer que ce prélèvement ne compromettra pas l'intégrité de l'écosystème du bassin des Grands Lacs... |
Vous pouvez donc constater, en vous fondant sur cette recommandation, que la CMI joue un rôle très important dans le processus d'approbation et d'examen.
M. Jeff Watson: Pour mieux comprendre la portée de ce pacte, je voudrais poursuivre sur le sujet qu'a abordé M. Comartin dans sa question concernant le fait que le gouvernement du Michigan est opposé à toute nouvelle dérivation massive, et je voudrais savoir si cela veut dire qu'il n'y aura aucune dérivation d'eau de grande ampleur—dans le cas où ce pacte serait adopté, devrais-je dire, parce qu'il n'a pas encore été adopté n'est-ce pas? S'il était en vigueur, cela voudrait dire qu'il n'y aurait aucun nouveau projet de dérivation massive d'eau, est-ce bien exact?
M. Peter Fawcett: Comme nous l'avons mentionné tout à l'heure, le pacte américain doit être approuvé par les huit États des Grands Lacs qui doivent adopter à cette fin des lois de mise en oeuvre, et il doit ensuite être approuvé par le Congrès américain. Cela va prendre beaucoup de temps. Pour répondre à votre question, étant donné qu'elle s'applique à ces accords de mise en oeuvre, je dirais qu'il faudrait que tous les États approuvent un tel projet.
M. Jeff Watson: Est-ce que les niveaux d'eau des Grands Lacs sont en train de baisser, d'après ce que vous savez?
M. Peter Fawcett: Comme je l'ai mentionné plus tôt, il serait préférable de poser cette question à la CMI. Pour en revenir à la question qu'a posée tout à l'heure votre collègue au sujet de la baie Georgienne en particulier, nous nous inquiétons beaucoup de la baisse de niveau dans la baie Georgienne. La CMI va s'efforcer de déterminer les causes de ce phénomène. C'est un système de lacs global. Ils sont interreliés et cela est très complexe. Il y a des causes naturelles qui font varier les niveaux constamment. Il y a ensuite l'effet du changement climatique, qui, d'après les experts, aura un effet sur les niveaux des lacs. C'est donc un aspect qui nous préoccupe beaucoup.
Le président: M. Simard et ensuite M. Carrie.
À (1020)
[Français]
M. Christian Simard: Dans les notes d'information de la Bibliothèque du Parlement, on parle de la position de Great Lakes United. Great Lakes United est une organisation parapluie regroupant énormément d'ONG de la région des Grands Lacs. J'aimerais savoir s'il s'agit de la position du groupe tout entier ou d'une partie de Great Lakes United, qui semble dire qu'un accord imparfait vaut mieux que la situation anarchique actuelle.
J'aimerais avoir vos commentaires sur cet aspect. Si un groupe aussi important d'ONG appuie le principe de l'accord, même s'il fait la promotion d'une augmentation des normes, cela ne servira pas nécessairement les intérêts du Québec et de l'Ontario et ne favorisera pas la préservation des eaux des Grands Lacs.
[Traduction]
M. Peter Fawcett: Je vais essayer de répondre brièvement à votre question.
Great Lakes United est en fait un regroupement binational d'ONG des deux côtés de la frontière. Cet organisme a été membre du conseil consultatif et suit le processus de très près.
Nous sommes tous d'accord, comme je l'ai dit plus tôt, pour dire que ce projet n'est pas parfait. Nous ne sommes pas satisfaits de sa formulation, nous ne sommes pas satisfaits d'un certain nombre d'éléments de ce projet, et c'est pourquoi le gouvernement canadien va présenter son point de vue au conseil.
Le président: Monsieur Carrie.
M. Colin Carrie: Je sais que les projets de détournement soulèvent des préoccupations réelles et légitimes mais il y a aussi quelque chose qui ressemble à une peur, à de la paranoïa. Il ne faudrait pas trop grossir les choses.
Mais pour en revenir à la question de mon collègue au sujet des projets de détournement d'eau, savez-vous s'il y a certains États américains qui ont planifié ou proposé des projets de détournement à l'heure actuelle?
M. Peter Fawcett: Pas vraiment. Je suis désolé, je ne peux pas répondre à votre question...ou peut-être sur un plan plus général, si cela peut être utile.
À la différence du Canada, les États-Unis ont déjà mis en oeuvre de nombreux projets de dérivations, et il y a toujours des projets et des propositions à l'étude. Nous ne sommes pas au courant d'un projet spécifique qui aurait une influence sur les niveaux et les débits des Grands Lacs. Mais cela touche peut-être une remarque que nous avons faite il y a un moment au sujet de la nécessité d'améliorer l'information et la coordination entre les États, l'Ontario et le Québec, et de renforcer la transparence de tous ces aspects, pour que ce genre de projets soient officiellement présentés et fassent l'objet d'un examen.
M. Colin Carrie: Je m'intéresse plutôt à d'autres genres de projets. J'en ai entendu parler d'un il y a quelques années qui visait à détourner le lac Supérieur vers le Mississippi. Je ne sais pas si cela était sérieux mais je pense que cela inquiéterait beaucoup les Canadiens. Et avec le libellé actuel de l'entente—vous avez déclaré qu'il faut l'approbation des États des Grands Lacs—que se passerait-il si un tel projet était présenté et que le Canada s'y opposait? Je me demande simplement si nous pourrions vraiment nous y opposer.
M. Peter Fawcett: Permettez-moi de vous donner un exemple très précis. Lorsque la société NOVA a été autorisée en 1998, par le biais d'un permis, à prélever de l'eau du lac Supérieur—c'est l'Ontario qui l'y a autorisé, malheureusement—cette décision a eu des répercussions très intéressantes puisqu'elle a attiré l'attention des Canadiens et des Américains sur la nécessité de mieux protéger les eaux des Grands Lacs.
L'Ontario a modifié sa législation, nous avons modifié la nôtre, de façon à interdire les prélèvements massifs d'eau. Nous avons donc au Canada un régime très complet qui interdit ce genre de chose.
Permettez-moi de faire une petite remarque à ce sujet, parce que cela ne ressort pas clairement de la lecture des ententes. L'article 200 de l'entente énonce que les membres individuels peuvent prendre des mesures plus restrictives, de sorte que l'Ontario et le Québec sont autorisés par l'entente à conserver leur interdiction des prélèvements d'eau et c'est un aspect très important. Ils ont déclaré publiquement qu'ils avaient l'intention de préserver cette interdiction, comme c'est le cas au Canada.
Pour en revenir à NOVA, voilà quelle a été la réaction au Canada. Aux États-Unis, les protestations les plus vives sont venues des huit États des Grands Lacs. Si l'on se place dans un contexte plus large, on constate que les huit États des Grands Lacs ont les mêmes intérêts que l'Ontario, le Québec et le Canada et qu'ils souhaitent également préserver l'intégrité des Grands Lacs. C'est également la raison pour laquelle le Congrès américain a délégué à ces États certains pouvoirs attribués par la WRDA; ils ont constaté que les gouvernements qui gèrent les eaux de ce bassin jouent un rôle essentiel dans la préservation de son intégrité et dans le niveau de protection que nous souhaitons avoir.
À (1025)
M. Colin Carrie: Je crois qu'il est importnat de noter cela. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est important de préserver notre droit de nous opposer à certaines choses. C'est en effet une région qui joue un rôle central pour notre pays.
Je vous remercie.
Le président: M. Cullen et ensuite M. Watson.
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD): Deux questions. Premièrement, certaines provinces, en particulier l'Ontario, estiment que le gouvernement fédéral ne s'est pas impliqué suffisamment directement dans ces discussions et qu'il a plutôt adopté un statut d'observateur. D'après ce que vous savez, en particulier au ministère des Affaires étrangères, pensez-vous que nous nous sommes impliqués suffisamment dans le processus qui va déboucher sur toutes ces décisions?
Deuxièmement, vous avez parlé d'interdiction, et vous semblez dire que les provinces ont une sorte de droit de veto dans le cas où les États des Grands Lacs proposeraient des exportations d'eau massives. J'aimerais comprendre cela clairement. Y a-t-il une clause très explicite de l'entente qui dit que, dans le cas où, pour une raison où une autre, tous les États souhaitent...? Il est évident que les besoins en eau vont augmenter au cours des années qui viennent. Je ne m'inquiète pas nécessairement de ce qui va se passer en septembre mais dans 15 ou 25 ans, les États vont commencer à manquer d'eau. Je n'aimerais pas en arriver à une situation où les États commencent à se mettre d'accord et à dire que l'exportation de cette eau ne serait pas une mauvaise chose, quelle qu'en soit la raison. J'aimerais être tout à fait sûr que nous conserverons ce droit de veto.
Je viens de la Colombie-Britannique et nous avons connu une société américaine qui a essayé d'exporter de l'eau en vrac; la province l'a empêchée de le faire, mais cette société a poursuivi la province en invoquant l'ALENA--et je crois qu'elle a gagné, vous me corrigerez si je me trompe. Je me demande ce que vous pensez d'un cas de ce genre, où une société aurait l'approbation d'un État ou du Congrès, alors que son projet serait refusé par l'Ontario et le Québec et qui entamerait alors des poursuites.
M. William Crosbie: Bien sûr, la question du refus relève du Traité des eaux limitrophes. Le Traité des eaux limitrophes s'applique à toute modification du débit ou du niveau de l'eau. Il faut qu'un tel changement soit approuvé par la CMI. De sorte que ces ententes ne peuvent modifier cette obligation. Ce n'est pas aux provinces de le faire; cela relève du Traité des eaux limitrophes et de la CMI.
Peter, vouliez-vous intervenir sur ces questions?
M. Peter Fawcett: Nous avons consulté l'Ontario et le Québec dans l'élaboration de nos commentaires. Avant votre arrivée, je crois avoir mentionné que nous avions présenté des exposés sur la législation fédérale, et le conseil est très intéressé de savoir comment nous avons décidé de mettre en oeuvre les obligations qui découlent du Traité des eaux limitrophes, à savoir les modifications à la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales. Nous avons adopté la position la plus restrictive en mettant en place une interdiction absolue.
En outre--et ce n'est pas un aspect dont parle beaucoup la législation--nous avons également un régime de permis pour l'utilisation de l'eau à l'intérieur du bassin. Le ministre des Affaires étrangères attribue des permis aux projets qui ont un effet sur les niveaux et les débits à l'intérieur du bassin. De sorte que nous exerçons un contrôle étroit, d'après moi, au niveau de l'interdiction et de l'attribution de permis sur l'utilisation des eaux à l'intérieur du bassin au Canada. Je pense que nous avons consulté l'Ontario lorsque nous avons élaboré cette réglementation. Nos règlements sont très semblables à ceux de l'Ontario, et nous voulons bien sûr conserver un contrôle très strict sur ces aspects.
Je voudrais dire quelques mots de l'affaire Sun Belt, celle à laquelle vous avez, je pense, fait référence en Colombie-Britannique. Il y a eu le dépôt d'un document aux termes du chapitre 11 de l'ALENA. En quatre ans, cette affaire n'a pas progressé du tout. D'après ce que je sais, elle est demeurée en l'état.
M. Nathan Cullen: Merci.
Le président: M. Watson et ensuite M. Jean.
M. Jeff Watson: Monsieur Fawcett, en fait, vos commentaires soulèvent une autre question, d'après moi. Je vais revenir à mes observations antérieures.
Vous avez parlé des dispositions strictes que nous avions adoptées, et affirmé que les parties individuelles--et là je pense que vous parlez de l'Ontario et du Québec--peuvent préserver leur interdiction contre tout prélèvement d'eau en vrac. Il me semble que cela soulève une contradiction, du moins apparemment, et vous pourrez peut-être me dire si elle est réelle ou non.
Les provinces sont tenues d'apporter des changements réglementaires ou législatifs, ou d'autres changements encore, pour mettre en oeuvre cette entente. Cette entente prévoit également les prélèvements vers l'extérieur du bassin. Est-il vraiment possible de préserver l'interdiction des prélèvements d'eau en vrac et de mettre en oeuvre une entente qui autorise ce genre de transfert? Vous pourriez peut-être me dire a) s'il y a là une contradiction et b) quels sont les types de changements, s'il n'y a pas de contradiction, auxquels il faudrait procéder pour mettre en vigueur cette entente?
À (1030)
M. Peter Fawcett: Et bien, nous examinons cela de près. Comme je l'ai mentionné plus tôt, l'article 200 autorise l'Ontario et le Québec à préserver les interdictions qui sont en vigueur à l'heure actuelle. Ces deux provinces ont publiquement déclaré qu'elles conserveraient ces interdictions.
M. Jeff Watson: Vous affirmez donc qu'il n'y a pas de contradiction.
M. Peter Fawcett: Et bien, nous allons examiner tout cela de très près pour veiller à ce qu'il n'y ait pas de contradiction.
Le président: Pouvons-nous réfléchir un moment à cela?
M. Jeff Watson: Oui, permettez-moi d'y penser pendant un instant.
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Monsieur le président, ma question traite en fait des aspects à long terme de la gestion de l'eau, en général, au Canada et de nos rapports avec notre voisin du sud. Je crois savoir qu'à l'heure actuelle, aux termes de l'ALENA, l'eau n'est pas considérée comme une marchandise et ma question concerne l'avenir de nos rapports et la nécessité pour les États du midwest américain d'avoir accès à davantage d'eau à cause de la sécheresse, etc.
Est-ce que l'ALENA et la qualification actuelle de l'eau posent des dangers à long terme? Je crois savoir que ce n'est pas une marchandise, ou que l'eau ne sera pas vendue comme une marchandise, mais elle est en fait vendue à l'heure actuelle lorsqu'elle est mise en bouteille, etc. N'y a-t-il pas une sorte de danger à long terme pour ce qui est des eaux du Canada, et pas seulement celles des Grands Lacs?
M. Peter Fawcett: Il est difficile de répondre à une question qui porte sur les effets à long terme, mais permettez-moi de mentionner quelques éléments.
Tout d'abord, la question de la transformation de l'eau en marchandise est très controversée et je pense que les meilleurs avis juridiques que nous avons obtenus ont été incorporés dans nos modifications à la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales de façon à traiter l'eau comme une ressource. Tant que vous gérez l'eau comme une ressource, ce n'est pas une marchandise. Par contre, lorsqu'on commence à la mettre en bouteille, elle devient une marchandise et elle est assujettie à nos obligations commerciales internationales. C'est pourquoi je pense que nous avons choisi la bonne méthode en décidant de gérer l'eau dans son bassin, de la gérer comme une ressource.
Il y a déjà eu un certain nombre de projets, qui nous inquiètent toujours, quand ils font surface, qui envisagent des déviations d'eau sur de longues distances. Si les sources d'eau se raréfient, ces idées reviendront. J'ai examiné des décisions récentes qui concernent un certain nombre de projets. Le transport d'eau sur de longues distances coûte très cher. Un mètre cube d'eau pèse une tonne, il faut donc soit un projet comportant une infrastructure très importante, soit disposer d'un moyen de transport très bon marché pour être en mesure de déplacer un tel volume d'eau. Mais qui sait? Les aspects économiques peuvent évoluer, et il faut toujours demeurer vigilant pour protéger et conserver nos ressources en eau.
M. William Crosbie: Permettez-moi de préciser une chose. Nous ne pensons pas que l'ALENA risque de nous empêcher de réglementer l'eau au Canada sous sa forme naturelle, l'eau en vrac. Nous ne pensons pas que cet accord impose des obligations au Canada, que ce soit maintenant ou plus tard, et qu'il susciterait un conflit entre notre utilisation de cette eau et la réglementation des ressources en eau.
M. Brian Jean: Merci.
Le président: Merci, monsieur Jean.
Madame Ratansi.
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Merci d'être venus.
Je sais que toutes ces discussions qui tournent en rond m'ont fait tourner la tête et bien sûr, maintenant que j'ai vu le film H2O, ma tête tourne encore plus. Cela soulève des préoccupations et même des craintes de savoir ce qui pourrait arriver. L'eau est un bien tellement important. Nous l'avons depuis si longtemps.
Cette entente soulève des questions complexes. Y a-t-il des spécialistes qui pensent que ce pacte vise à contourner le Traité des eaux limitrophes? Si c'est le cas, que pouvons-nous faire? Quelles sont les dispositions de l'entente qui obligeront toutes les parties à respecter le traité? Quelles mesures pourrons-nous prendre pour le faire respecter? Peut-être que vous n'avez pas les réponses; peut-être qu'il faudrait les poser au ministère de la Justice, et peut-être à la CMI, mais donnez-moi une brève idée de ce que vous pensez à ce sujet et nous pourrons ensuite demander à la CMI ce qu'il faut faire.
À (1035)
M. William Crosbie: Et bien, nous avons abordé cette question un peu plus tôt et mentionné que le gouvernement des États-Unis avait présenté des commentaires et des modifications grâce auxquelles le pacte ne pourrait pas empiéter sur les dispositions du Traité des eaux limitrophes ni aller à l'encontre de ses dispositions.
À l'heure actuelle, le gouvernement du Canada prépare des commentaires, et il est évident qu'un de nos objectifs est de veiller à ce qu'aucune de ces ententes ne puisse porter atteinte au Traité des eaux limitrophes, ni aux obligations qui incombent aux deux gouvernements.
Mme Yasmin Ratansi: Il va donc falloir attendre ces réponses.
M. William Crosbie: Nous avons demandé des avis juridiques. Des avocats du ministère de la Justice et du ministère des Affaires étrangères sont en train de préparer ces avis juridiques.
Mme Yasmin Ratansi: C'est donc une question de confiance et de la confiance que nous plaçons dans les mécanismes d'exécution de cette entente.
Mme Karen Brown: Il me semble important de mentionner que le pacte est un projet qui a été publié en vue de faciliter la consultation de la population. Les gouverneurs des Grands Lacs reçoivent de nombreux commentaires, comme vous pouvez vous en douter, en plus de ceux que leur a envoyés le Département d'État des États-Unis. Nous sommes convaincus que ces ententes seront modifiées, de sorte que nous ne savons pas très bien quel sera le texte des versions révisées, comment ces questions seront réglées--il est évident qu'ils doivent tenir compte de l'opinion du Département d'État--et comment ils règleront les autres difficultés qui ont été soulevées.
Nous n'allons certainement pas faire de commentaires au sujet du pacte américain mais nous allons certainement en faire au sujet de l'entente relative aux ressources en eau.
Le président: Merci.
Monsieur Simard.
[Français]
M. Christian Simard: À mon avis, il ne faut pas examiner cela d'un point de vue juridique. Ma compréhension du problème est qu'il y a une demande extrême pour le transfert d'eau des Grands Lacs vers l'extérieur du bassin des Grands Lacs, que cette demande est tellement forte qu'il va falloir y trouver une solution et qu'il nous sera très difficile de poursuivre qui que ce soit sur le plan juridique. Il sera extrêmement difficile de savoir comment appliquer les normes et comment faire un suivi dans une multitude d'entreprises privées. En français, il y a une expression qui dit: « Le diable se cache dans les détails ». Dans ce cas-là, s'il y a normes et qu'il y a détournement, il sera à peu près impossible de prouver qu'il y aura eu violation d'accord étant donné qu'il sera impossible de retracer l'eau sortant des Grands Lacs, de savoir où elle se retrouve exactement. Cela ressemble au problème de traçabilité qu'on constate dans d'autres domaines. On n'a absolument pas de gestion intégrée ou de compréhension intégrée de cela.
Je me demandais tout à l'heure si le statu quo ne serait pas meilleur qu'un accord comme celui-là, qui va nécessairement conduire à des déviations possiblement importantes de l'eau des Grands Lacs qu'on ne pourra pas prouver ou dont on ne pourra pas se rendre compte avant qu'il ne soit trop tard.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Simard.
Monsieur Watson.
M. Jeff Watson: Merci.
Il me semble évident--du moins d'après les témoignages que nous avons entendus aujourd'hui--que le gouvernement fédéral entretient certaines réserves au sujet de l'entente telle qu'elle est écrite. Ma première question est la suivante, est-ce que ces ententes, telles qu'elles sont écrites, risquent de restreindre le moindrement les pouvoirs qu'attribue le Traité des eaux limitrophes en matière de protection des Grands Lacs?
Mme Karen Brown: C'est ce que nous étudions. Comme le ministre Pettigrew et je pense le ministre Dion l'ont déclaré publiquement, il est évident que notre intention est de veiller à formuler des commentaires qui vont assurer la compatibilité de ces documents. Nous voulons bien sûr défendre, tout comme le gouvernement des États-Unis, le Traité des eaux limitrophes et les obligations qui en découlent pour nous, ainsi que la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales.
M. Jeff Watson: Ma dernière question que je vous adresse est donc la suivante : Que peut faire le gouvernement fédéral pour obtenir les changements qu'il souhaite? Je parle ici des mesures que vous allez prendre et non pas des changements que vous recherchez. Que va faire le gouvernement fédéral pour introduire des changements? Quels sont les mécanismes dont il dispose pour obtenir que l'on procède à certains changements?
Mme Karen Brown: Et bien, nous allons présenter nos commentaires aux gouverneurs des Grands Lacs. Nous allons travailler très étroitement avec le Québec et l'Ontario ainsi qu'avec le gouvernement des États-Unis. C'est la prochaine étape, lorsque nous aurons préparé des commentaires qui nous satisfont et que nous y aurons intégré les avis du ministère de la Justice.
À (1040)
Le président: Monsieur Fawcett.
M. Peter Fawcett: Monsieur le président, permettez-moi d'ajouter quelques précisions. En février 2001, le gouvernement fédéral a présenté des commentaires très complets au sujet d'une proposition très libérale qui avait été faite à l'époque. On parlait en fait de près de 5 millions de gallons par jour, comme seuil d'examen des déviations d'eau à l'extérieur du bassin. Je suis heureux de pouvoir vous dire que nous avons transmis nos commentaires à un certain nombre d'États--pas seulement au Michigan mais à plusieurs autres et que l'État de New York en particulier s'est déclaré très préoccupé de l'ampleur de ces dérivations. L'annexe qui a découlé de ce processus contenait des principes qui se rapprochaient davantage de ce que nous souhaitions obtenir.
Je pense que le conseil sera heureux d'examiner les commentaires du gouvernement du Canada et qu'il réfléchira ensuite à tous les commentaires qu'il aura reçus au cours de ces consultations.
Le président: Merci.
Monsieur McGuinty.
M. David McGuinty: Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir sur quelques commentaires plus généraux au sujet de l'eau et profiter de votre présence ici ce matin. Bien sûr, je n'ai pas de chiffres récents. Si vous avez des idées là-dessus, je serais très heureux de les entendre. Je crois savoir que de 84 à 88 p. 100 de toute l'eau douce qui est utilisée aux États-Unis et au Canada sert à l'irrigation. Je ne sais pas si cette tendance est en hausse ou en baisse, avec l'amélioration de la technologie de l'irrigation, et à mesure que nous trouvons, par exemple, de nouvelles sources souterraines et des façons plus efficaces d'irriguer des cultures sur une grande échelle, en particulier dans le midwest américain.
Je ne sais pas si la tendance qu'ont les États du nord-est américain à se vider parce qu'on construit de plus en plus de villes dans le désert du sud-ouest se poursuit ou si en fait, les besoins d'eau douce vont augmenter dans un bon nombre de ces régions. J'entends dire cela souvent mais je n'ai pas vu de données confirmant que c'est bien dans cette direction qu'évoluent les choses.
L'eau va probablement devenir un problème mondial. Il est assez probable que dans la plupart des pays en développement, c'est le problème mondial du jour--par opposition à, par exemple, le changement climatique--pour la plupart des gens qui vivent dans les villes et les pays en développement.
Est-ce qu'il y a du nouveau au sujet des petites usines nucléaires de dessalement, sur le plan de la rentabilité? Je pense, madame Brown, que vous avez parlé du fait que les aspects économiques de l'eau sont en train d'évoluer ou non sur le plan du coût, ou c'était peut-être M. Crosbie. Je sais que l'industrie nucléaire française a examiné les possibilités qu'offre le marché du dessalement de l'eau de mer, une tendance qu'il serait très difficile de contrer lorsque l'on voit la pénurie d'eau qui frappe les endroits les plus secs de la planète. Pouvez-vous réagir à tout cela?
Mme Jennifer Moore: Nous ne sommes pas des experts techniques. Vous avez parlé de défis mondiaux et il est certain qu'il s'agit bien là d'un grand défi mondial. Il y a des objectifs de développement pour le millénaire qui consistent à améliorer l'accès à la fois à l'eau potable et à l'eau pour les appareils sanitaires. Les façons d'y parvenir suscitent beaucoup de discussions.
Je dirais qu'au-delà du dessalement, il y a toutes sortes d'autres technologies. Elles ont commencé à évoluer, à passer des systèmes aux ménages et il y a pas mal de travail qui se fait dans ces domaines. La technologie va certainement influencer de nombreux aspects, notamment elle va nous permettre d'essayer de modifier la demande d'eau et sa conservation. Si vous voulez davantage de détails, nous pourrions certainement vous en fournir mais je dirais d'une façon générale qu'il se fait beaucoup de choses dans ce domaine.
Pour ce qui est des tendances, je dirais que nous suivons cela de près. Il y a les usages agricoles et les usages municipaux. Sur le plan résidentiel, les Canadiens viennent dans le monde au deuxième rang pour ce qui est de l'utilisation de l'eau, tout juste derrière les États-Unis. C'est quelque chose qui nous rappelle que nous avons beaucoup à faire du côté de la demande, de la gestion et de la conservation. Nous examinons un certain nombre de stratégies dans ce domaine, en collaboration avec le Conseil canadien des ministres de l'environnement. Il se fait déjà des choses en matière de conservation et c'est un aspect sur lequel nous allons continuer à travailler.
Le président: Merci.
Monsieur McGuinty.
M. David McGuinty: Monsieur le président, j'aimerais que les témoins de ce matin nous indiquent où nous en sommes, sur le plan national, dans le domaine des connaissances hydrogéologiques. Quelle est l'étendue de nos connaissances? Quels sont les fonds qui seront attribués sur une base permanente pour nous permettre de savoir quelle est notre situation exacte sur le plan de l'hydrogéologie? Pour les débits, les quantités d'eau, quel est le montant des investissements que nous faisons dans ces domaines? Je pense au financement de recherches pour obtenir ce genre d'analyses et de connaissances de façon à mieux connaître ce qu'il en est de la question de l'eau au Canada.
À (1045)
Mme Karen Brown: Nous serions très heureux de vous fournir davantage de détails sur ces sujets. D'une façon générale, lorsque vous parlez de la situation hydrogéologique, vous parlez d'un grand nombre de choses, des précipitations, de l'enneigement, de la fonte des neiges--le cycle hydrogéologique dans son sens large--des eaux souterraines, et le reste. C'est un système assez complexe, comme vous pouvez le comprendre. Toutes sortes de spécialistes s'en occupent, depuis les météorologues jusqu'aux hydrogéologues et aux spécialistes des eaux souterraines. Nos connaissances varient selon la région concernée. Nous comprenons assez bien la région des montagnes Rocheuses et les débits vers les Prairies. Il s'est fait un bon nombre d'études à ce sujet ainsi que sur certains des effets qui se font ressentir plus au nord.
Nos collègues de la Geological Survey ont effectué une étude très systématique des réservoirs d'eau souterrains. Nous comprenons mieux ici les réservoirs de pétrole et de gaz que les réservoirs d'eau souterrains, comme vous le savez tous. Nous avons commencé à procéder de façon très systématique et essayons d'utiliser nos fonds de la façon la plus efficace possible pour essayer de comprendre ces phénomènes, en travaillant très étroitement avec nos collègues provinciaux ainsi qu'avec d'autres experts, scientifiques et universités.
La situation est loin d'être parfaite mais nous sommes en mesure de vous fournir de l'information.
Le président: Je pense que nous sommes arrivés à la fin des questions. Si vous me permettez de faire quelques commentaires...
Excusez-moi, monsieur Wilfert, vous êtes le dernier. Je ferai ensuite les derniers commentaires.
Monsieur Wilfert.
L'hon. Bryon Wilfert: J'apprécie la générosité du président.
Il y a une question de structure. Nous avons la justice, l'environnement et les affaires étrangères. Je sais comment les choses fonctionnent ici et j'aimerais savoir exactement qui est le ministère responsable, pour ce qui est de coordonner tous ces efforts.
Mme Karen Brown: Je pense que l'on peut dire que le ministère responsable est celui des Affaires étrangères pour ce qui est des obligations découlant de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales. Nous apportons bien sûr l'expertise scientifique et travaillons en étroite collaboration avec eux. M. Pettigrew est en fait le ministre responsable.
L'hon. Bryon Wilfert: J'ai parfois remarqué qu'il y a eu des discussions pendant la période des questions pour savoir si ce serait le ministre des Affaires étrangères qui répondrait à une question ou si ce serait plutôt celui de l'environnement. Je voulais simplement être sûr que les trois ministères travaillent de concert.
Vous avez mentionné que vos commentaires seraient transmis au Conseil des gouverneurs des Grands Lacs. Nous avons une date butoir à respecter à ce sujet qui est le 26 novembre. Ces commentaires pourront-ils être communiqués au comité avant le 26 novembre.
Mme Karen Brown: Nous pouvons certainement en parler aux ministres et leur demander de le faire. De la même façon, nous pensons que les ministres voudront connaître le point de vue du comité avant de mettre la dernière main à leurs commentaires. Nous devrions essayer de coordonner nos travaux.
L'hon. Bryon Wilfert: Je pense, monsieur le président, qu'il serait utile de savoir quelle est la teneur des commentaires qui seront présentés. Si nous devons formuler des recommandations, il serait mieux de ne pas le faire dans le vide. Il serait utile de communiquer ce message.
Je sais que la façon dont cette question seraréglée aujourd'hui aura des répercussions importantes pour demain et pour l'avenir, qu'il s'agisse des Grands Lacs, des questions qui touchent l'Ouest du Canada, des rapports entre le Montana et l'Alberta ou le Dakota du Nord et le Manitoba. Bien sûr, il faut regarder au-delà des élections américaines. Beaucoup de choses ont été dites. Mais il me paraît essentiel d'être très clair, parce que l'eau sera le pétrole du XXIe siècle, et nous ne sommes pas aussi riche que certains le pensent.
L'autre danger qui nous guette pourrait venir de l'ALENA. On répète que cela n'est pas couvert par l'ALENA. Et bien, je voudrais que cela soit absolument certain. Je ne voudrais pas que nous nous retrouvions dans une situation où quelqu'un invoquerait l'article 11 et où nous nous apercevrions que ce n'était pas ce que nous voulions. Nous faisons une distinction entre les exportations d'eau en vrac et la question de l'eau embouteillée et cela me préoccupe et m'inquiète un peu.
J'espère donc que nous le ferons une autre fois mais ma principale préoccupation à l'heure actuelle est de bien comprendre les commentaires qui seront présentés et de pouvoir consulter des fonctionnaires au cas où nous aurions besoin de renseignements supplémentaires sur les commentaires.
Merci.
À (1050)
Le président: Je suis sûr qu'ils en tiendront compte.
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président.
Au mois de février 2001, devant le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs, le gouvernement canadien a émis des réserves, entre autres concernant les normes qui étaient établies dans cet accord. Il a indiqué que ces normes pourraient permettre des prélèvements d'eau dans le bassin des Grands Lacs ou dans d'autres régions.
Monsieur Fawcett, je voudrais savoir si, depuis le 8 février 2001, vous avez eu des discussions avec vos homologues provinciaux, entre autres du Québec et de l'Ontario, qui vous permettent de remettre en question ces inquiétudes. Avez-vous eu des relations avec les fonctionnaires du gouvernement du Québec? Est-ce que les discussions que vous avez eues dans les derniers mois ou les dernières années vous ont rassuré quant aux inquiétudes que vous aviez exprimées, le 8 février 2001, devant le Conseil des gouverneurs?
[Traduction]
M. Peter Fawcett: Je vous remercie de cette question.
Oui, nous avons eu des consultations avec des fonctionnaires du Québec, avec des fonctionnaires de l'Ontario qui font partie du groupe de travail sur l'eau mis sur pied par le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs.
Comme je l'ai dit plus tôt, le projet a été présenté au conseil en l'an 2000--et nos commentaires en février 2001--c'était un projet très laxiste qui autorisait le prélèvement de cinq millions de gallons par jour. Nous étions très inquiets de voir un projet qui pouvait entraîner une dérivation à long terme vers l'extérieur du bassin d'une eau qui n'y serait pas retournée.
La meilleure façon d'éviter les déviations d'eau vers l'extérieur du bassin est d'avoir une entente qui réunit les parties chargées de gérer l'eau du bassin de façon à élaborer une norme conjointe qui permette d'examiner les projets, d'obtenir de meilleurs renseignements pour prendre de meilleures décisions, et d'améliorer nos connaissances scientifiques pour obtenir des données fiables. La gestion du bassin passe nécessairement par un renforcement de la coopération entre tous les gouvernements concernés. Comme nous l'avons dit à plusieurs reprises, il y a le garde-fou que constitue le Traité des eaux limitrophes, parce que ce traité a pour effet de bloquer les projets qui influenceraient les niveaux et les débits de l'autre côté de la frontière. Les obligations découlant du traité ne sont pas modifiées.
Une dernière remarque,--quelqu'un a fait un commentaire au sujet de l'application de la loi--il est absolument essentiel de prévoir un mécanisme d'application de la loi, parce qu'il faut beaucoup de temps pour obtenir l'approbation des divers États, pour faire adopter les lois qu'il faut, et il y a beaucoup d'éléments à mettre en place. À l'heure actuelle, il y a des États qui n'ont pas adopté de dispositions en matière d'autorisation de permis. D'autres disposent d'excellents renseignements et de données semblables aux nôtres. Il est donc vraiment nécessaire de coordonner la mise en oeuvre de tout ceci, et de poursuivre notre collaboration avec nos collègues de l'Ontario et du Québec.
[Français]
M. Bernard Bigras: Dans vos discussions avec les provinces, entre autres avec le Québec, avez-vous senti qu'il y avait une certaine forme de délinquance de la part de ces gens? Est-ce que vous le sentez? Est-ce que les relations avec les provinces vont bien? Est-ce que vous sentez que l'esprit est respecté? Est-ce que la collaboration est bonne? Est-ce que vous avez des discussions? Vous ne m'avez pas dit si vous aviez eu des discussions avec le Québec. Ensuite, quel est l'état de vos discussions?
[Traduction]
M. Peter Fawcett: Nous avons rencontré des représentants de l'Ontario et du Québec au mois de septembre. Nous avons eu une excellente discussion, je pense, au sujet de ces propositions. Avant cela, nous avions parlé du concept et de ce qui était envisagé, mais ce n'est que lorsque la proposition a été publiée le 19 juillet que nous avons obtenu des données précises dont nous pouvions discuter.
Notre partenaire dans ce dossier, Environnement Canada, avait d'excellentes questions à poser à nos collègues au sujet des répercussions de tout cela. Ces provinces sont des parties dans cette proposition. Elles ont participé à un bon nombre de discussions et elles ont eu des entretiens détaillés avec le Conseil des gouverneurs des Grands Lacs.
C'est donc une question très technique. Il y a certainement beaucoup de choses à améliorer et je pense que l'Ontario et le Québec reconnaissent qu'il faudra préciser un certain nombre de choses avant de pouvoir mettre en oeuvre ce projet.
À (1055)
Le président: Merci.
Chers collègues, les membres d'un autre comité sont en train d'arriver. Si vous lem permettez, je vais conclure et remercier nos témoins.
J'aimerais mentionner que si l'on se fie à notre bible en matière de compétence, nous constatons qu'Environnement Canada relève directement de notre comité. Lorsqu'on examine le partage des responsabilités, les deux qui ressortent sont celles qui consistent à « conserver et protéger les ressources du Canada en eau » et à « appliquer les règles adoptées par la Commission mixte internationale Canada-États-Unis ». Ce sont des mandats qui touchent nos débats, si vous voulez.
M. Herb Gray était ici aujourd'hui. Il sera encore là demain, au moment où nous poursuivrons l'étude de ces questions.
J'aimerais remercier les témoins et aussi souhaiter la bienvenue à M. Charles Caccia. Charles a présidé le comité pendant onze ans, c'est un ancien ministre de l'Environnement, et il va continuer d'assister à nos séances. Charles, je crois que vous pouvez vous réjouir de constater que le flambeau a été passé à quelqu'un d'autre et vous voyez, avec les questions que posent les membres du comité, que l'environnement est toujours entre de bonnes mains grâce aux débats et aux compétences des membres du comité. Nous sommes heureux que vous soyez ici aujourd'hui.
Merci et merci aux témoins.
Avant d'ajourner, j'aimerais mentionner certaines choses aux membres du comité.
Premièrement, le comité de direction s'est réuni. Nous allons vous recommander--mais il y aura un autre rapport--d'utiliser le cadre de l'accord de Kyoto pour regrouper certaines questions qui ont été soulevées par le commissaire de l'environnement et répondre à certaines préoccupations qui ont été exprimées au cours d'une autre séance, en particulier sur la question des finances. Tim est en train d'élaborer un ordre du jour qui vous sera soumis.
Deuxièmement, nous avons deux projets de loi--les parcs et les oiseaux--et ces deux projets de loi seront présentés au comité probablement la semaine suivante. M. Wilfert, nous espérons que le ministre pourra présenter ces deux projets pour que le comité puisse regrouper ces discussions. M. Wilfert, je vous invite à suivre cette question avec le ministre.
Enfin, pour ce qui est des témoins à convoquer pour discuter de cette question, je propose de nous accorder encore quelques jours pour le faire. Des membres du comité ont transmis au président des noms de témoins, et Tim va nous préparer un document d'information sur ces témoins. Avez-vous terminé ces documents, Tim?
M. Tim Williams (attaché de recherche auprès du comité): Uniquement pour vous.
Le président: Oh je vois. Je pense qu'on pourrait les distribuer. En fait, ils devraient être communiqués aux autres membres du comité.
Je vous invite à présenter d'autres noms de témoins, et ensuite le comité de direction examinera les questions qui ont été soulevées et essaiera de formuler une recommandation d'ici mardi prochain au sujet des témoins qu'il serait bon d'entendre.
Monsieur Bigras, nous essaierons de terminer cela mardi prochain avant notre séance ordinaire.
L'hon. Bryon Wilfert: Monsieur le président, pour ce qui est des projets de loi, oui, je crois que cela ira.
Pour la liste des témoins, j'ai fourni, en anglais et en français, des noms de témoins et j'espère que cela sera utile au comité.
Le président: Merci.
La séance est levée.