ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de l'environnement et du développement durable
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 9 décembre 2004
¿ | 0905 |
Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)) |
M. Gene Nyberg (directeur général et premier dirigeant par intérim, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie) |
¿ | 0910 |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.) |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ) |
Le président |
M. Bob Mills (Red Deer, PCC) |
Le président |
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD) |
Le président |
¿ | 0925 |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
M. Jean Bélanger (président, Groupe de travail de l'Écologisation de la fiscalité, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie) |
¿ | 0930 |
¿ | 0935 |
¿ | 0940 |
Le président |
M. Alex Wood (conseiller en politique, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie) |
Le président |
M. Lee Richardson (Calgary-Centre, PCC) |
Le président |
M. Bob Mills |
M. Jean Bélanger |
¿ | 0945 |
M. Bob Mills |
M. Jean Bélanger |
¿ | 0950 |
M. Bob Mills |
M. Jean Bélanger |
M. Bob Mills |
M. Gene Nyberg |
M. Alex Wood |
¿ | 0955 |
Le président |
M. Bernard Bigras |
À | 1000 |
M. Jean Bélanger |
M. Bernard Bigras |
M. Jean Bélanger |
Le président |
M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ) |
À | 1005 |
M. Jean Bélanger |
Le président |
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
M. Gene Nyberg |
M. Francis Scarpaleggia |
M. Gene Nyberg |
M. Francis Scarpaleggia |
À | 1010 |
M. Gene Nyberg |
Le président |
L'hon. Bryon Wilfert |
M. Gene Nyberg |
À | 1015 |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
M. Gene Nyberg |
Le président |
M. Nathan Cullen |
À | 1020 |
Le président |
M. Gene Nyberg |
M. Alex Wood |
À | 1025 |
M. Nathan Cullen |
M. Jean Bélanger |
M. Nathan Cullen |
À | 1030 |
Le président |
M. Gene Nyberg |
Le président |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
À | 1035 |
M. Gene Nyberg |
M. Brian Jean |
M. Gene Nyberg |
M. Jeff Watson (Essex, PCC) |
M. Jean Bélanger |
M. Jeff Watson |
M. Jean Bélanger |
Le président |
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.) |
À | 1040 |
Le président |
M. Gene Nyberg |
Le président |
M. David McGuinty |
Le président |
M. David McGuinty |
Le président |
M. Bernard Bigras |
M. Jean Bélanger |
À | 1045 |
M. Bernard Bigras |
Le président |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
M. Alex Wood |
Le président |
M. David McGuinty |
M. Gene Nyberg |
Le président |
À | 1050 |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
À | 1055 |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Bob Mills |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'environnement et du développement durable |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 9 décembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)): Bonjour, chers collègues, mesdames et messieurs.
Bonjour messieurs, et bienvenue au comité. Dès que John aura réussi à installer tout le monde, nous pourrons commencer.
Messieurs, conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous reprenons notre étude sur la réforme financière et l'environnement.
Nous accueillons aujourd'hui M. Gene Nyberg, directeur général et premier dirigeant par intérim de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie; M. Jean Bélanger, président du Groupe de travail de l'écologisation de la fiscalité, et M. Alex Wood, conseiller en politique auprès de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie. Je vous souhaite la bienvenue.
En guise de préambule, vous savez que la Chambre et ses comités sont actuellement à l'étape des propositions prébudgétaires. En tant que membres de ce comité, il est clair que nous sommes en faveur d'un budget vert, ou à tout le moins, d'un budget comportant des aspects plus écologiques, si vous voulez. Nous avons aussi l'intention de nous pencher sur la réforme financière ainsi que sur les aspects financiers du système environnemental et fiscal dans lequel nous évoluons; et nous examinerons également certaines répercussions des politiques fiscale et autres, dans le cadre de Kyoto.
Nous entendrons mardi des représentants du ministère des Finances, de même que la Commissaire à l'environnement. Ces rencontres sont organisées en vue de préparer nos discussions relatives au budget et à Kyoto. Durant la première semaine de février, nous recevrons aussi le ministre.
Donc, sur cette introduction et ce survol, nous sommes heureux de vous accueillir. Nous sommes toujours très réceptifs lorsqu'il s'agit d'entendre les opinions et les points de vue de personnes qui, dans le cadre d'une relation intergouvernementale, collaborent de près avec des ministères ou encore des organisations intergouvernementales ou non gouvernementales.
Monsieur Nyberg, je pense que c'est vous qui allez briser la glace et nous entendrons ensuite les autres témoins. Libre à vous de décider dans quel ordre vous entendez présenter vos déclarations.
M. Gene Nyberg (directeur général et premier dirigeant par intérim, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie): Merci beaucoup.
Monsieur le président. Bonjour à tous. C'est un grand plaisir d'être ici ce matin.
À la table ronde, nous nous trouvons aussi en mode prébudgétaire. Nous venons tout juste de mettre la dernière main aux recommandations que nous avons l'intention de présenter au ministre des Finances si possible d'ici les deux ou trois prochaines semaines au plus tard. Nous sommes un peu limités en ce qui concerne ce que nous pouvons dire à leur sujet, pour le moment, mais je peux certainement vous donner une idée de l'orientation que nous comptons prendre, ainsi que des arguments que nous ferons valoir à l'appui de ces recommandations. Peut-être même voudrez-vous nous rencontrer à nouveau plus tard, lorsque nous aurons achevé notre travail. Mais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'aimerais pour commencer vous décrire en quoi consiste la table ronde, juste au cas où vous ne nous connaîtriez pas si bien que cela.
Je devrais peut-être commencer par vous présenter mes collaborateurs. Jean Bélanger est le président de notre Groupe de travail de l'écologisation de la fiscalité. Il peut s'enorgueillir d'une très belle carrière, tant au sein de l'administration que de l'entreprise privée, aussi peut-on dire que la Table ronde a réellement bénéficié de son engagement dans ce domaine depuis de nombreuses années.
Alex Wood s'est joint à la table ronde il y a quelques années, et il possède lui aussi un bagage assez impressionnant sur le sujet. Il a travaillé aux États-Unis durant un bon bout de temps et c'est lui qui gère ce dossier pour nous, sur une base quotidienne.
Comme je l'ai dit, je voudrais seulement vous expliquer dans les grandes lignes en quoi consiste la table ronde nationale, parce que cela pourrait vous aider à mieux comprendre les aspects liés au contenu, puisqu'il en sera question aujourd'hui.
La table ronde a été créée en vertu d'une loi adoptée en 1994. La loi en question précise que notre tâche principale consiste à promouvoir les principes et la pratique du développement durable dans tous les secteurs et toutes les régions de la société canadienne. Évidemment, il s'agit d'un mandat très large, aussi nous avons décidé de le restreindre un peu, pour des motifs d'ordre pratique. Nous nous sommes dit que nous allions tenter de susciter une préoccupation plus équilibrée à l'égard de l'environnement et de l'économie dans la prise de décisions et l'élaboration de politiques. C'est donc une interprétation plus restreinte du mandat assez large qui est prévu dans la loi.
Le gouvernement fédéral compte bien entendu parmi notre public cible, il est donc très important que nous rencontrions les parlementaires, mais nous passons aussi pas mal de temps à donner des séances d'information aux ministres et aux hauts fonctionnaires. Mais, inévitablement, comme chacun sait, les considérations environnementales suscitent énormément d'intérêt à l'échelle provinciale étant donné que bon nombre de ces questions relèvent davantage de la compétence des provinces que du gouvernement fédéral. Alors nous entretenons aussi des relations avec les gouvernements provinciaux, au besoin, sur des sujets précis.
Notre organisme compte au maximum 25 membres. Ces personnes sont nommées par le gouverneur en conseil. De fait, elles sont nommées par le premier ministre. En réalité, le premier ministre est notre ministre responsable, et c'est par son entremise que nous présentons nos rapports au Parlement. Nos membres sont issus de tous les secteurs et de toutes les régions du pays, mais ils représentent surtout le monde des affaires, les groupes environnementaux, les syndicats, le milieu universitaire et les groupes d'action sociale. On peut donc dire qu'ils sont représentatifs d'une large couche de la société canadienne.
Nous avons continuellement au moins quatre programmes en cours. Nous disposons d'un budget assez limité: 5,2 millions $, comme vous avez pu le constater à la lecture de nos documents budgétaires. Nous avons donc quatre principaux programmes en cours en ce moment, sans négliger pour autant les démarches que nous avons entreprises dans la foulée des rapports et des recommandations présentés dans le passé. Par ailleurs, nous demeurons à l'affût de toutes nouvelles avenues susceptibles de nous intéresser. Aussi, nous participons activement à ce que nous appelons des travaux d'exploration ou d'établissement de la portée.
Nous mettons en place des groupes de travail chargés de surveiller la bonne marche de ces programmes. Ces groupes de travail sont formés de représentants des intervenants et aussi de spécialistes. Ils font leur travail, ils supervisent la recherche et l'analyse et ils voient aussi à la surveillance des consultations. Ce sont ces groupes de travail qui se rendent sur le terrain et qui organisent des ateliers de consultation à l'échelle nationale.
Finalement, ce processus repose sur plusieurs couches successives de consultations. C'est l'ensemble de nos membres qui déterminent le travail à effectuer et les orientations, et qui doivent ensuite approuver les recommandations. Mais il faut compter sur les groupes de travail formés d'intervenants de multiple provenance qui exercent aussi une surveillance sur les consultations d'envergure nationale, par conséquent, nous sommes très présents sur le terrain et nous entretenons des relations suivies avec les intervenants qui ont un intérêt dans les sujets qui nous occupent.
¿ (0910)
Nos travaux débouchent sur ce que nous appelons le rapport sur l'état du débat. Ce rapport est en quelque sorte notre signature; nous le produisons à la fin de chaque programme, et il porte bien son nom. Ce que nous voulons dire par là c'est que nous ne tentons pas de déterminer le plus petit dénominateur commun et ne voulons pas non plus à tout prix obtenir le consensus sur une question donnée. Nous tenons à connaître ce sur quoi les gens s'entendent, mais aussi quels sont les sujets de désaccord et quelle est l'origine ou quelles sont les raisons de ce désaccord. Comme vous serez à même de l'apprécier, aux fins de la politique gouvernementale, c'est très significatif. En réalité, c'est beaucoup plus important de savoir sur quel point les opinions divergent et pour quelles raisons, que de savoir sur quoi les gens s'entendent. Nous sommes persuadés que cet exercice constitue une très importante contribution au débat sur la politique gouvernementale.
En ce qui concerne l'écologisation de la fiscalité, la table ronde manifeste depuis longtemps son intérêt pour cette question—en fait, depuis les tout débuts. Et cela n'a rien de surprenant parce que nous considérons que c'est notre mandat de faire la promotion de politiques qui soutiennent le développement économique durable. Par définition, nous nous intéressons aux politiques économiques, et nous voulons nous assurer qu'elles s'harmonisent avec ce que nous nous efforçons de faire au chapitre des politiques environnementales. Ce qui nous amène directement à la vaste notion qui recoupe l'écologisation de la fiscalité, les instruments économiques ou peu importe le nom que vous voulez leur donner.
Cela signifie également que nous avons participé à des débats autour de la politique industrielle. Au début des années 1990, lorsque le pays s'est engagé dans une discussion sur la prospérité, sur l'initiative de la prospérité, nous étions déjà présents et nous nous efforcions de faire adopter dans les discussions toute cette notion comme quoi si l'on voulait être concurrentiel et obtenir de bons résultats sur le plan économique, il fallait investir dans l'environnement aussi.
En 1994, vous vous en rappelez peut-être—on y a fait allusion dans bien des documents—le Groupe de travail sur les instruments économiques et les mesures dissuasives à de saines pratiques environnementales a produit son rapport. Ce rapport a sonné pour nous l'heure de mettre sur pied ce que nous avions appelé à l'époque le comité permanent sur les instruments économiques de l'écologisation de la fiscalité. Ce comité a fait des petits, et ce que vous voyez aujourd'hui est le résultat de ces premières initiatives.
Fait intéressant à noter, du point de vue de notre organisation, ce point de départ a donné naissance à une foule d'autres activités qui se sont manifestées dans divers programmes et un éventail de recommandations, et à cet égard, nous trouvons que nous avons assez bien réussi. Par exemple, je pense que l'on peut affirmer que la table ronde a joué un rôle important pour que le traitement fiscal des dons de terres écosensibles soit modifié afin que l'on puisse vraiment faire don de ces terrains, et pour empêcher que les donateurs soient pénalisés financièrement. Plus récemment, dans notre rapport sur la viabilité écologique urbaine, c'est nous qui avions insisté sur les remboursements de TPS aux municipalités afin de leur permettre de réinvestir dans l'infrastructure environnementale et autres projets semblables. Nous avons joué un rôle prépondérant à cet égard. Par ailleurs, à l'époque où le premier ministre Martin était ministre des Finances, il nous avait demandé d'élaborer une stratégie en matière de redéveloppement des zones désaffectées. D'après ce que j'ai compris du ministre Godfrey et d'autres, il s'agit d'un document très important pour les personnes qui travaillent dans ce domaine qui les aide à comprendre comment procéder pour mieux développer ces zones, à la fois sur le plan environnemental et économique.
Un autre secteur ayant eu réellement un lien avec les instruments économiques est celui de l'échange de droits d'émission. Au tout début, franchement, lorsque le gouvernement et le ministère des Finances en particulier étaient nerveux à l'idée d'aborder toute cette question de l'échange des droits d'émissions et que les gens ne voulaient surtout pas entendre parler de Kyoto ou de quoi que ce soit d'approchant, la table ronde s'est penchée sur cette question parce que nous trouvions qu'il était très important d'attirer l'attention sur ce domaine qui est un instrument politique très important. Nous avons organisé une consultation nationale qui a réuni des représentants en vue du monde des affaires, des environnementalistes, des universitaires et des représentants du gouvernement en vue de parler de diverses options relatives aux systèmes d'échange de droits d'émission et des diverses répercussions de ces approches. Après que nous ayons réussi, soyons sincères, le ministère des Finances a pris la relève, ce qui est fantastique. C'est exactement le genre d'intervention que la table ronde doit faire, à notre avis. Nous devons attirer l'attention sur des questions que personne d'autre n'est prêt à aborder, mais à partir d'un certain point, tout devient en quelque sorte opérationnalisé. Et c'est à partir de là que les ministères peuvent prendre le relais et poursuivre la démarche mieux que nous.
Mais aujourd'hui nous sommes venus vous dire, et quoi qu'on en pense, que la table ronde a l'intention de mettre fin à son propre programme d'écologisation de la fiscalité. La raison en est que cette composante fait désormais partie du mouvement général de chaque programme en cours. Chaque fois que nous allons nous pencher sur d'autres questions, l'écologisation de la fiscalité ou les instruments économiques en constitueront un volet important. Les choses se sont déjà développées dans ce sens, aussi nous avons pensé qu'il serait tout simplement logique de conclure notre phase actuelle de travail, donc notre déclaration d'aujourd'hui consistera à vous faire part de nos derniers efforts en ce sens.
¿ (0915)
Je vais conclure en vous disant que nous nous considérons vraiment comme des innovateurs à cet égard. Nous avons été très encouragés de constater qu'un certain nombre d'autres groupes reconnaissent maintenant qu'il faut examiner plus sérieusement les instruments économiques. Nous avons pris connaissance du rapport de l'OCDE qui mentionne que le Canada ne fait pas suffisamment d'efforts, par comparaison aux autres pays, à ce sujet. Le groupe sur la réglementation intelligente, avec lequel nous avons collaboré étroitement, a également déclaré que les instruments économiques et l'écologisation de la fiscalité devaient être envisagés avec plus de sérieux dans ce pays.
Nous sommes encouragés par ces témoignages, et nous constatons de réels progrès. Nous avons maintenant l'intention de vous entretenir plus particulièrement de l'étape que nous effectuons en ce moment et qui porte sur l'écologisation de la fiscalité et l'énergie. C'est une approche qui nous apparaissait importante. De toute évidence, le pays est déterminé à aller de l'avant concernant les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto. Aussi, nous avons pensé que nous pourrions apporter notre contribution en examinant l'écologisation de la fiscalité dans le domaine de l'énergie, et plus particulièrement dans trois secteurs: l'efficacité énergétique, les énergies renouvelables et l'hydrogène. Certaines des conclusions auxquelles nous sommes arrivés sont très significatives et je pense que nous serons capables d'apporter une contribution appréciable.
Je vais maintenant céder la parole à Jean Bélanger qui vous expliquera plus en détail qui nous sommes et les résultats que nous avons obtenus.
¿ (0920)
Le président: Merci, monsieur Nyberg.
Monsieur Bélanger.
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.): Monsieur le président, avant que nous n'allions plus loin, j'aimerais poser une question de procédure.
Le président: Allez-y.
L'hon. Bryon Wilfert: J'aimerais savoir pourquoi nous recevons ces documents à notre arrivée. À quel moment ces témoins ont-ils été invités? Pourquoi cette documentation nous parvient-elle seulement le jour de la réunion... ? C'est inexcusable, monsieur le président, pour les membres de ce comité de se présenter ici et de n'avoir pas reçu la documentation à l'avance afin de se préparer à entendre les témoins. Franchement, ça commence à bien faire.
Je suis peut-être le seul à déplorer cette situation, mais je dois vous dire, monsieur le président, que le greffier a tout intérêt à mieux faire son travail en ce qui concerne la réunion de la documentation. Si nous ne la recevons pas à l'avance, alors je suggère de ne pas entendre les témoins. Avec tout le respect que je dois aux témoins, en tant que parlementaire, je trouve la situation inacceptable. Il m'est difficile de mener efficacement une discussion avec des témoins lorsque je n'ai pas reçu la documentation à l'avance.
Le président: Monsieur Bigras, voulez-vous intervenir sur le même sujet?
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Je suis tout à fait en accord, monsieur le président, sur ce qu'a dit le secrétaire parlementaire. Il y a des retards importants dans la transmission des documents. Bien souvent, on reçoit les convocations très tard, parfois à 17 h 30. C'est totalement inacceptable, autant sur le plan de la documentation que sur le plan des convocations. Donc, pour être en mesure de bien questionner les témoins et de faire un travail constructif, je suis d'accord avec le secrétaire parlementaire qu'on devrait être plus rigoureux et que l'information devrait nous être transmise plus rapidement à l'avenir. J'espère que la nouvelle session sera plus constructive à cet égard.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Mills.
M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Je voudrais seulement ajouter que depuis bon nombre d'années, j'ai fait partie de trois comités différents et que les choses ne se sont jamais passées autrement dans les autres comités. C'est totalement inacceptable. Je suis d'accord à 100 p. 100 avec M. Wilfert. Pour faire du bon travail, nous devrions recevoir les documents quelques jours à l'avance, au moins pour laisser à notre personnel le temps de les examiner et de nous indiquer les points les plus importants. Mais je dois dire qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil, et que les choses se sont toujours passées ainsi depuis mon arrivée ici. C'est une frustration de longue date.
Le président: Merci, monsieur Mills.
Monsieur Cullen.
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD): Je suis nouveau ici, mais comme je suis issu du secteur privé, je peux vous dire que nous avions mis en place un système et que les documents nous parvenaient toujours avant toute réunion du conseil ou de quelque autre réunion du même genre.
Afin de ne pas perdre trop de temps ce matin, je me demande si nous ne pourrions pas confier ce problème au sous-comité pour qu'il voie s'il n'y aurait pas moyen de remédier à la situation et de faire bouger un peu les choses. Ainsi, nous pourrions nous concentrer sur l'écoute des témoins et essayer de comprendre leur déclaration du mieux que nous le pouvons
Le président: J'apprécie votre intervention, monsieur Cullen.
Monsieur Wilfert, la présidence sollicite votre indulgence, d'après mon expérience de ces questions, lorsqu'une objection est soulevée, on en prend bonne note et le comité y pourvoit en suivant le rythme de ses délibérations.
Puis-je suggérer, étant donné que les témoins sont devant nous, de ne pas briser le fil de leur pensée, et de les encourager à poursuivre leur déclaration? Lorsqu'ils auront terminé, nous pourrons aborder cette question, et en débattre en long et en large. J'ai moi aussi fait partie de bon nombre de comités, et j'ai toujours trouvé qu'il était plutôt... il n'est pas dans l'esprit et dans le rythme des débats d'interrompre les témoignages pour une question de procédure.
Pouvons-nous reporter la discussion à plus tard? Nous y reviendrons, monsieur Wilfert, et nous pourrons en débattre comme il vous plaira.
¿ (0925)
L'hon. Bryon Wilfert: Monsieur le président, j'accepte vos remarques, mais j'avoue que pendant tout le temps que j'ai passé à titre de secrétaire parlementaire aux finances, une telle situation ne s'est jamais présentée. Je dois aussi vous avertir que si la situation n'est pas corrigée, je vais m'objecter vigoureusement à ce que l'on entende tout témoin qui n'aurait pas fourni sa documentation à l'avance. C'est inacceptable.
Le président: Très bien. Merci beaucoup.
Monsieur Bélanger, vous avez la parole. Merci beaucoup.
[Français]
M. Jean Bélanger (président, Groupe de travail de l'Écologisation de la fiscalité, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie):
Merci, monsieur le président.
Je voudrais seulement mentionner le fait que nous sommes ici en réponse à une invitation qui nous a été faite mardi. Alors, il nous a été difficile d'obtenir la documentation requise plus tôt.
D'abord, je vais faire certains commentaires en français. Ensuite, je vais m'adresser à vous en anglais parce que la plupart des débats que nous avons eus se sont faits en anglais. En fait, il est souvent difficile de traduire des termes techniques. Cependant, je suis prêt à répondre à toutes vos questions.
M. Nyberg a déjà mentionné qu'il s'agit d'un programme qui a débuté vers l'an 2000. Nous sommes maintenant à la deuxième phase de ce projet. À mon avis, il serait bon de définir dès le début ce que nous entendons par l'écologisation de la réforme fiscale. Notre définition était: une stratégie qui permet de réorienter la fiscalité et les programmes de dépenses publiques d’un gouvernementpour instaurer une série d’incitatifs intégrés favorables à la transition vers le développement durable.
Lorsque nous avons commencé ces travaux, vers l'an 2000, c'était une variation de ce qui semblait se passer à ce moment-là. Nous avons invité des interlocuteurs européens et américains de différents partis à venir nous parler de ce sujet. À cette époque, ce qui semblait être en vogue était la réforme pure et simple des taxes. Nous étions donc attentifs à ce qui se passait dans ce domaine. Il y avait un accent sur la réforme des taxes, sur la hausse des taxes, mais nous croyions qu'il était beaucoup plus important d'examiner les autres items qui font partie d'un budget, tels que des incitatifs au niveau des dépenses ou des taxes, mais aussi des programmes, donc tout ce qui apparaît dans un budget. C'est donc la définition que nous nous sommes donnée à ce moment-là.
[Traduction]
Nous avons poursuivi et publié le premier rapport. Je constate que la plupart d'entre vous avez des exemplaires de ce rapport. Il s'agissait d'un processus d'apprentissage. Et vraiment, j'ai beaucoup appris au cours de l'exercice, et je pense que c'est dans cet esprit que nous devrions considérer ce premier rapport.
Esentiellement, nous nous sommes arrêtés à certaines leçons clés. Premièrement, il nous a semblé qu'il était approprié que l'écologisation de la fiscalité constitue un élément important de la mise en oeuvre du développement durable. Cet élément venait s'ajouter à l'ensemble.
La deuxième leçon que nous avons apprise est la plus difficile. J'avais travaillé pour l'industrie auparavant, et il m'avait semblé que bon nombre des sujets liés à l'environnement étaient toujours abordés dans le contexte de l'environnement, de la santé et de la sécurité de l'entreprise. Autrement dit, il revenait aux spécialistes techniques de s'occuper de ces questions. À l'époque, la plupart des problèmes étaient abordés sous l'angle du commandement et contrôle.
Lorsque nous avons décidé d'introduire des aspects financiers dans le décor, la difficulté venait de ce que l'on devait intégrer un certain nombre de disciplines qui, je dois le dire, ne l'avaient pas été souvent auparavant. Je veux parler des spécialistes techniques dans les entreprises, ceux qui dirigent les usines, et ainsi de suite, et ceux qui se situent davantage du côté des aspects économiques, de la fiscalité et ainsi de suite. Très souvent, nous avons constaté que même à l'intérieur des entreprises, ces gens ne se parlaient jamais.
Donc, le gouvernement n'était pas le seul à éprouver des difficultés à établir des liens entre les considérations ministérielles; l'industrie avait les mêmes. Évidemment, les environnementalistes voyaient les choses d'un autre oeil. Même dans les universités, on ne privilégiait pas beaucoup l'approche interdisciplinaire.
Quoi qu'il en soit, cette constatation fut l'une des plus importantes pour nous, c'est-à-dire qu'il fallait réunir des gens qui habituellement ne se parlaient pas. Il fallait donc du leadership, de l'ouverture, de nouveaux acteurs et un nouveau savoir. Nous devions harmoniser tout cela.
Par ailleurs, nous avons découvert que c'était très bien de parler des possibilités sur le plan de l'écologisation de la fiscalité, mais que ces possibilités devaient s'intégrer aux politiques. M. Nyberg vient tout juste de mentionner que c'est la dernière fois que nous effectuons une étude qui porte précisément sur l'écologisation de la fiscalité, parce que c'est un peu comme si c'était la queue qui commandait à la tête. Il faut désormais nous interroger sur la manière dont l'écologisation de la fiscalité s'insère dans la solution à un plus grand problème, qu'il s'agisse de la viabilité urbaine, ou d'un autre domaine des pêches, et ainsi de suite. En effet, il faut se demander comment ces éléments s'ajustent ensemble, et comment les postes budgétaires peuvent nous aider à atteindre nos objectifs de concert avec les aspects liés au commandement et contrôle, sur une base volontaire et d'autres éléments?
L'une des leçons que nous avons apprises est qu'il faut absolument s'appuyer sur des données solides pour y arriver, mais que ces données ne sont pas toujours disponibles. Nous avons trouvé que, pour bien des groupes, et en particulier si on veut envisager des initiatives à long terme, les choses se compliquent lorsque l'on tente seulement de se projeter trois ou quatre ans à l'avance. Lorsque nous parviendrons à l'étape suivante, et que nous nous efforcerons de faire des prévisions pour les 25 prochaines années, les choses deviendront encore plus nébuleuses. Donc, il nous faut des données solides afin de nous avancer sur des bases qui tiennent.
Ayant achevé cette première étape qui consistait à examiner certains aspects et à en tirer des leçons--les contextes agricoles, les produits toxiques, le soufre dans le diésel, et éventuellement, le soufre dans le mazout--nous avons ensuite décidé de déterminer dans quels secteurs nous pourrions appliquer ces conclusions encore plus en profondeur, et comment nous pourrions poursuivre notre processus d'apprentissage.
¿ (0930)
C'est alors que nous avons décidé d'examiner les aspects liés à l'énergie et au changement climatique. Comment l'écologisation de la fiscalité et les instruments économiques pouvaient-ils être amenés à jouer un rôle plus efficace? De toute évidence, c'est un sujet extrêmement vaste. Nous avons réuni un certain nombre de personnes et avons fini par retenir trois domaines précis sur lesquels nous avons décidé de nous pencher, des domaines qui, nous l'espérions, nous montreraient la voie à suivre et comment l'élargir, et nous permettraient en outre de comprendre quelles étaient les synergies envisageables.
Nous avons commencé par regarder trois secteurs dans le contexte énergétique. Nous avons étudié l'efficacité énergétique, l'hydrogène--tout le monde parle de l'économie de l'hydrogène--ainsi que les nouvelles énergies renouvelables. Dans ces trois domaines nous avons mis sur pied trois groupes, des groupes d'établissement de la portée et des groupes de travail qui ont mis en commun leurs connaissances. Nous avons fait appel à la collaboration de trois établissements de recherche qui mettent au point des techniques de modélisation, chacun dans des aspects qui le concernent, et nous les avons poussés plus loin.
Nous avons étudié comment les politiques de nature fiscale pouvaient nous permettre de mieux nous attaquer au problème à long terme de la réduction des émissions de carbone. L'exercice a permis de mettre au jour un certain nombre de conclusions, mais pour le moment je dois demeurer dans les grandes lignes. Il nous reste à obtenir l'autorisation de publier lors de notre plénière qui aura lieu dans quelques jours. Aussi, pour le moment, je ne peux que vous donner un aperçu.
L'une de nos recommandations est qu'il ne fait aucun doute que les instruments économiques, ceux de nature fiscale, peuvent contribuer de façon significative à l'atteinte des objectifs en matière de réduction des émissions de carbone liées à l'énergie. Pas en eux-mêmes--autrement dit, ils ne sont pas les seuls instruments à utiliser--mais, si on les ajoute à l'ensemble, iils s'intègrent très bien et peuvent soutenir l'objectif.
Une deuxième recommandation fait valoir qu'il n'existe aucune contradiction inhérente entre promouvoir la réduction à long terme des émissions de carbone et poursuivre les autres objectifs de la société canadienne, c'est-à-dire la sécurité énergétique, les approvisionnements en ressources énergétiques, le développement économique, et ainsi de suite, du moment que l'on met en place une politique fiscale bien pensée qui travaille de concert avec les autres éléments. Cet effort ne peut être consenti de façon isolée. Par conséquent, l'une des leçons évidentes que l'on en a tirées est que les entités qui se préoccupent surtout des aspects financiers doivent être intégrées très étroitement avec celles qui se penchent sur les développements technologiques.
Une autre conclusion importante de notre démarche est que ceux qui font la promotion du développement des technologies énergétiques doivent se montrer prudents, parce que à long terme elles ne vont pas nécessairement donner les mêmes résultats que les politiques de réduction des émissions de carbone. Autrement dit, il faut se montrer prudents afin de ne pas considérer comme un fait accompli que l'amélioration des technologies énergétiques entraînera automatiquement une réduction des émissions de carbone. Nous en sommes arrivés à cette conclusion dans un certain nombre de nos travaux d'établissement de la portée.
Quatrièmement, il y a divers stades dans le développement des technologies. Lorsque l'on considère l'efficacité énergétique dans l'industrie--parce que nous nous sommes penchés uniquement sur l'industrie, et non sur les systèmes de chauffage domestiques, et ainsi de suite--donc, lorsque l'on examine ce qui se fait dans l'industrie, on peut considérer que ces développements sont des améliorations et des technologies à maturité.
Nous croyons qu'il faut se donner un centre d'intérêt. Si l'on envisage de faire appel à des instruments de nature fiscale, il faut mettre l'accent sur les instruments de traction par la demande qui facilitent et favorisent l'essor des technologies existantes. Quant aux nouvelles technologies énergétiques, comme celles qui sont représentées dans les études de cas sur les nouvelles énergies renouvelables, l'accent devrait être mis sur les instruments qui contribuent à combler l'écart des prix entre les technologies actuelles et les nouvelles.
¿ (0935)
Enfin, en ce qui concerne les technologies visant la réduction à long terme des émissions de carbone--dans ce cas-ci nous nous intéressons aux éléments qui sont associés à l'hydrogène--les résultats montrent que nous devrions nous concentrer surtout sur la promotion de la recherche et développement en vue de nous attaquer aux obstacles critiques, à la fois techniques et économiques. Donc, il est davantage question de l'aspect de la recherche et développement.
Nous avons également reconnu l'existence de certains problèmes. Ces problèmes sont associés au fait que ce marché de l'énergie fluctue de jour en jour. Par conséquent, la base en fonction de laquelle nous établissons nos prévisions et la modélisation économique est très affectée par le type d'assises retenues. Dans certains cas, les prévisions effectuées par divers groupes étaient inexactes pour ainsi dire dès le moment de leur publication. Nous ne voulons pas rejeter les torts sur qui que ce soit. Nous pensons seulement qu'il faut s'attendre à ce genre de difficultés lorsque l'on va de l'avant avec ces choses.
Une autre difficulté vient de l'absence d'un exercice de cartographie des énergies renouvelables. Il nous semble que c'est l'un des principaux obstacles. On a commencé dans une certaine mesure dans le domaine de l'énergie éolienne, et des initiatives commencent à porter fruit, mais pour ce qui est de cartographier le pays en vue de déterminer dans quelles régions les avantages vont s'accumuler, nous ne disposons pas pour le moment d'une cartographie à une échelle suffisante pour servir de base. Je pense que ce n'est pas un domaine facile, mais il n'y a pas de raison pour que les conditions environnementales et les aspects économiques s'affrontent; ils devraient fonctionner de concert. Cela signifie que nous devons réunir un éventail de disciplines qui, traditionnellement, n'ont jamais vraiment collaboré facilement ensemble, que ce soit au gouvernement ou dans l'industrie.
Merci beaucoup, monsieur le président.
¿ (0940)
Le président: Merci beaucoup, monsieur Bélanger.
Monsieur Wood, voulez-vous... ?
M. Alex Wood (conseiller en politique, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie): Je suis à votre disposition seulement pour répondre aux questions.
Le président: Bon, très bien. Merci beaucoup.
Alors, nous allons reprendre la parole, et le premier à poser ses questions est M. Richardson.
M. Lee Richardson (Calgary-Centre, PCC): Merci, monsieur le président.
Je voudrais d'abord vous remercier d'être venus témoigner, et je m'excuse pour le court préavis. Je pense qu'il est important que les membres du comité vous entendent. Je suis impressionné déjà par ce que je viens d'entendre.
Comme vous le savez, nous avons décidé de faire de la mise en oeuvre de Kyoto l'un de nos chevaux de bataille cette session. Je pense qu'il est très important que le comité entende votre déclaration, et en particulier en ce qui concerne l'écologisation de la fiscalité avant le début de cette étude. Je pense que cela fera partie intégrante de la nôtre, et aura une incidence sur le déroulement de la mise en oeuvre de Kyoto, au Canada.
Je réitère toutes nos excuses pour le court préavis qui vous a été donné. Je pense que vous êtes au courant que les travaux de ce comité sont très approfondis et très productifs--nos réunions n'ont rien à voir avec le neuf à cinq. Je vous suis reconnaissant d'avoir pris le temps de venir nous présenter votre déclaration ce matin.
Ceci dit, monsieur le président, j'aimerais que le critique dans le domaine de l'environnement pour le Parti conservateur, M. Mills, commence la période de questions.
Le président: Merci, monsieur Richardson.
Monsieur Mills.
M. Bob Mills: Merci beaucoup, messieurs, d'être venus témoigner.
J'ai de nombreuses questions à vous poser, et je pense que la meilleure façon de commencer est par ce que vous avez dit en dernier. Je veux parler de toute cette question des instruments de nature fiscale utilisés en vue d'élaborer une vision à long terme en ce qui concerne nos objectifs en matière de carburants de transition, et ainsi de suite.
Lors de multiples rencontres avec des intervenants dans le domaine des énergies de remplacement, dans des domaines d'avenir comme les piles à combustible, l'hydrogène, etc., l'une des questions qui a souvent fait surface est la suivante: où allons-nous trouver l'argent pour faire de la R-D? Comment réussir à attirer les investissements nécessaires pour nous rendre jusqu'à la commercialisation et pour voir venir à long terme si le gouvernement n'adopte pas cette vision?
Je me demande ce que vous pensez du rôle joué par ce gouvernement qui ne livre pas... La dernière chose que ces gens veulent c'est d'un autre programme où 50 % du financement sert à l'administration et l'autre 50 % est investi dans Dieu sait quoi, et pour lequel il n'y a aucun reddition de comptes. Comment entrevoyez-vous le rôle du gouvernement en ce qui concerne le financement de ces projets légitimes en matière de R-D auxquels on accorde tellement d'importance dans ce secteur? C'est ma première question.
M. Jean Bélanger: Monsieur le président, pour commencer, je trouve absolument essentiel d'envisager les choses à long terme. Nous pouvons y aller à vue de nez et dire qu'en ce moment on a besoin de financement en vue d'effectuer des recherches dans un éventail de technologies comme les énergies renouvelables et l'hydrogène, les piles à combustible, et le reste, mais je pense qu'il faut adopter une vision plus large de là où tout ça va nous mener.
C'est pourquoi nous mettons l'accent sur une période de 25 ans. À titre d'exemple, si on regarde toute l'économie de l'hydrogène, c'est excitant. Ce domaine présente un potentiel énorme pour le Canada, et un certain nombre d'entreprises sont promises à un bel avenir. Mais le succès n'est pas pour demain. Les résultats ne se feront pas sentir avant 2012. En fait, le groupe ayant réalisé l'étude de cas sur l'hydrogène signale que la commercialisation proprement dite ne se fera pas avant 2020. C'est à ce moment-là que les choses vont commencer à aboutir.
Il faut donc situer toutes ces technologies dans leur propre séquence temporelle--assurer la coordination. Ce que nous avons tenté de faire... Nous avons les études de cas. Ce sont des études individuelles. Notre rapport sur l'état du débat s'efforce de rattacher tous ces fils et de déterminer si toutes ces technologies s'insèrent dans une perspective plus large, une perspective qui consiste à admettre que certaines choses peuvent être réalisées dès maintenant, comme dans le domaine de l'efficacité énergétique. Et que d'autres peuvent être réalisées en plusieurs étapes, mais qu'il est possible d'aller de l'avant assez rapidement. Et il est aussi question des énergies renouvelables--l'énergie éolienne, notamment--et dans ce domaine, des projets ont déjà vu le jour. Par ailleurs, dans d'autres domaines, comme les centrales au fil de l'eau, et ainsi de suite, il faudra sans doute attendre plus longtemps, mais ils ont tous leur....
Nous sommes en faveur de l'adoption d'une vision à long terme et d'une harmonisation dans un cadre plus large, sans pour autant décider que tout est dit une bonne fois pour toutes. Il faut s'assurer de procéder à des examens réguliers, parce que des changements vont se produire, notamment dans la technologie.
¿ (0945)
M. Bob Mills: Le problème vient du fait que nous avons tellement mis l'accent sur Kyoto, sur les cibles, et sur les objectifs de 2008 et de 2012 que nous nous sommes placés dans un mode d'urgence. C'est peut-être aussi ce qui est arrivé à Tommy Banks lorsqu'il a déclaré que nous devrions doubler le prix de l'essence, de l'électricité, et ainsi de suite, et que c'est le seul moyen d'atteindre ces objectifs, et qu'il faut commencer dès maintenant.
Évidemment, c'est faux. Je suis d'accord à 100 p. 100 avec vous en ce qui concerne la vision à long terme, et je suis convaincu que la technologie nous permettra d'y arriver. Il s'agit seulement de la mettre au point dans le bon ordre, puis de l'évaluer et de la commercialiser. Mais pour cela, il va falloir fournir des mesures incitatives à la R-D.
Je trouve assez troublant que l'on ait déjà dépensé la somme de 3,7 milliards $, pour mettre en place un certain nombre de programmes dans le cadre desquels les gens remplacent leur chaudière et placent des aimants sur la porte du frigo, mais nous n'avons pas vraiment d'idée de ce que nous comptons faire à long terme. Qu'il s'agisse de l'énergie marémotrice ou peu importe, il existe tellement de possibilités.
Je crois que vous avez mentionné que certaines de ces technologies--je pense que c'est votre troisième point--ne tiennent pas compte de la consommation de carbone. J'ai fait pas mal de recherche sur l'énergie éolienne durant l'été et j'ai visité des parcs d'éoliennes, au Danemark notamment, ainsi que des installations de recherche, et j'ai trouvé tout cela très intéressant. La première question à se poser est la suivante: « Quelle quantité d'énergie utilise-t-on pour fabriquer une éolienne? » Les opposants nous disent: « Vous ne pourrez jamais récupérer l'énergie qui a été nécessaire pour fabriquer l'acier des pièces ». La réponse est la suivante--et c'est la même partout sur la planète--il suffit de récupérer l'énergie produite durant six mois pour compenser pour l'énergie dépensée pour la fabrication. Je pense que cela doit être vrai, parce que je l'ai entendu tellement souvent. Je pense que c'est à cela que vous voulez en venir. Ai-je raison?
M. Jean Bélanger: Lorsque l'on décide d'adopter une vision à long terme, il est important aussi d'examiner le cycle de vie, c'est-à-dire le cheminement nécessaire pour arriver au but. À titre d'exemple, dans le domaine de l'efficacité énergétique, il est possible d'améliorer l'efficacité du point de vue de l'énergie, mais en contrepartie, on peut aboutir à une technologie qui émet encore plus de carbone. C'est une possibilité à envisager.
Nous préconisons de ne pas s'en tenir à un seul aspect, et au contraire de s'assurer qu'en utilisant cette énergie plus efficiente on n'oublie pas les étapes ayant été nécessaires pour y arriver. Dans certains domaines, comme l'énergie éolienne, les turbines, ce que vous avez entendu est probablement vrai. Tout ce que nous essayons de faire, c'est de souligner à quel point il est important d'envisager le cycle de vie dans sa totalité.
¿ (0950)
M. Bob Mills: Dois-je lire entre les lignes et appliquer ce que vous dites à l'éthanol? La production de l'éthanol peut parfois coûter plus cher en énergie que ce que l'on peut en retirer. Est-ce un bon exemple de ce que vous avancez?
M. Jean Bélanger: Il nous manque des études précises sur les cycles de vie dans des situations données. Dans les grandes lignes, je suis d'accord avec vous. Si vous voulez parler de la biomasse résiduelle, c'est quelque chose d'entièrement différent que de cultiver du blé ou quoi que ce soit d'autre en vue de le transformer en éthanol. Les circonstances sont différentes. Je le répète, c'est ce que nous entendons par cycle de vie.
M. Bob Mills: En ce qui concerne le différend entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial au chapitre des compétences--et même des administrations municipales, comme dans le domaine des déchets et autres aspects similaires--que pensez-vous de l'idée que le gouvernement fédéral devienne en quelque sorte le carrefour d'échange des données sur les technologies?
Prenons par exemple les déchets. Si on s'adresse au gouvernement fédéral, on se fait répondre que ce n'est pas de compétence fédérale. Si on s'adresse au gouvernement provincial, on nous dit que c'est de la compétence municipale, et non provinciale. Et si on s'adresse à la municipalité, elle répond qu'elle n'a pas d'argent et qu'elle est incapable de faire de la recherche et développement, et qu'elle ne peut que continuer à faire ce qu'elle faisait déjà.
Il me semble que la réponse est que le gouvernement fédéral devrait être le carrefour d'échange pour la plupart de ces nouvelles technologies et aussi pour la plupart de ces nouvelles mesures incitatives, et que les administrations provinciales et municipales pourraient se référer à ce centre de documentation, si vous voulez, et partir de là. Pourquoi devrait-on s'attendre à ce que chaque province, chaque municipalité se mette à réinventer la roue, pour ainsi dire?
Ai-je raison de penser ainsi? Qu'en pensez-vous?
M. Gene Nyberg: Vous soulevez un point essentiel. Nous ne l'avons pas abordé directement, mais je dirais que la table ronde serait favorable à la mise en place d'une meilleure fonction de coordination et que cette coordination pourrait se faire à l'échelle fédérale, et qu'il faudrait mettre en place davantage de coopération fédérale-provinciale et municipale. Mais en bout de ligne, ce sont les paliers de gouvernement inférieurs qui sont responsables de bon nombre de ces programmes, aussi ils devraient conserver beaucoup de pouvoir discrétionnaire et de décision. Nous ne voudrions pas voir cette capacité se perdre ou se compliquer.
J'aimerais revenir à votre point précédent et y ajouter quelque chose--et je sais que Alex aussi veut faire un commentaire. Une chose nous a vraiment frappés au sujet des travaux que nous venons d'achever--et cela pourra vous sembler contre-intuitif, mais c'est pourtant vraiment surprenant--c'est l'idée que l'on ne peut résoudre l'équation de la réduction de la consommation énergétique par la décarbonisation. Le rapport n'est pas automatique.
Cela peut vous sembler aller de soi, mais c'est une conclusion très sérieuse. Et cette conclusion est qu'en tant que pays, il faut établir nos priorités. Si notre priorité est la décarbonisation, cela risque de nous entraîner sur des voies très différentes sur le plan énergétique, sur le plan technologique et aussi, à notre avis, sur le plan de la politique financière. C'est toute la question. Les raisons qui nous poussent à mettre au point ces outils et ces politiques, que ce soit sur le plan financier ou autre, doivent être précisées davantage que cela n'a été fait jusqu'ici.
Je sais que Alex veut ajouter quelque chose.
M. Alex Wood: Oui, en effet, monsieur Mills, j'aimerais ajouter deux choses à ce que Jean et Gene ont déjà déclaré.
Je pense que la question de la R-D a préoccupé beaucoup de monde, de toute évidence. Quel devrait être le rôle du gouvernement dans la promotion de la R-D et dans la promotion de la commercialisation des technologies?
Beaucoup en sont venus à la conclusion que le régime actuel qui vise la R-D, et essentiellement le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, est l'un des meilleurs du genre par comparaison avec nos concurrents au sein de l'OCDE.
Le problème, comme vous venez d'y faire allusion, consiste à se demander ce qui va se passer plus tard, si on suit la chaîne de valeur. Quel peut être le rôle du gouvernement lorsque vient le moment de faire passer la recherche en laboratoire à l'étape de la commercialisation? Cette question nous interpelle et nous incite à nous demander quel pourrait être le rôle du gouvernement dans ce domaine. Le gouvernement, comme on peut s'y attendre, est assez allergique à l'idée d'être celui qui devra décider laquelle de ces technologies devrait bénéficier de ressources publiques. Maintenant, de toute évidence, à certains égards, c'est pourtant ce que nous faisons, mais cela n'empêche pas le gouvernement d'avoir à répondre à certaines questions assez cruciales.
L'une des choses qui nous a semblé digne d'intérêt, pour répondre en partie à cette question, est l'ensemble du climat d'investissement qui existe dans le secteur privé en vue de faciliter les choses. Nous tentons de déterminer comment on pourrait, à l'intérieur du système fiscal, de la politique financière, diriger les ressources beaucoup plus importantes du secteur privé vers ce genre de question, plutôt que d'avoir recours exclusivement aux ressources publiques. Voilà un exemple qui illustre clairement comment une utilisation créative de la politique financière pourrait l'amener à jouer un rôle plus important que celui qu'elle joue actuellement. En dirigeant des investissements en provenance du secteur privé vers certaines de ces questions on pourrait canaliser beaucoup plus de ressources qu'on ne le fait déjà.
J'aimerais ajouter aussi concernant votre question sur le rôle du gouvernement fédéral en tant que carrefour d'échange de données, que c'est une question très intéressante concernant les énergies renouvelables, par exemple. C'est dans ce domaine que l'on rencontre les interactions les plus directes entre les champs de compétences concurrents des provinces et du gouvernement fédéral--en fait, elles ne sont pas concurrentes, étant donné que la production d'énergie relève des provinces. Mais l'une des choses dont nous avons l'intention de discuter, et l'une des conclusions auxquelles nous sommes arrivés, est qu'il existe des arguments très solides en faveur de la reconnaissance que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle normatif--essentiellement, il devrait établir les normes--concernant une définition nationale de l'énergie verte, par exemple.
Si les provinces ont l'intention d'adopter des stratégies en faveur de l'énergie verte et si elles souhaitent développer des marchés, par exemple, en vue d'échanger des étiquettes vertes ou des certificats d'énergie renouvelable entre elles, il faudra établir une norme nationale concernant ce genre de choses. C'est à mon avis le rôle qui convient au gouvernement fédéral, dans ce domaine.
¿ (0955)
Le président: Merci, monsieur Wood.
Merci de vos questions, monsieur Mills.
La présidence vous a laissé une certitude latitude; je n'ai pas voulu vous interrompre pendant cette partie de la discussion.
Mais nous avons épuisé la période de temps allouée sur ce sujet. Je vous reviendrai plus tard, Jean.
Monsieur Bigras, vous êtes le suivant.
[Français]
M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président.
Je me croirais un peu sur un nuage, ce matin. J'ai lu vos recommandations. D'abord, je pense que c'est un rapport qui a été produit avec beaucoup de rigueur. On y présente un cocktail de mesures, mais il me semble que vous passez complètement à côté du sujet. C'est mon impression. Je me trompe toujours.
J'espère que dans les recommandations que vous allez faire au gouvernement dans deux semaines, vous suivrez une direction qui relèvera, entre autres... Je pense au rapport de l'OCDE. Je pense aussi au rapport de la commissaire à l'environnement et au développement durable, qui fait un constat. Il me semble qu'il faut au moins, avant d'arriver avec des mesures qui sont bien correctes, faire un constat. À mon avis, il y a un échec de la politique fiscale au Canada. On ne tend pas, actuellement, vers une politique fiscale environnementale.
Je pense que vous devriez lire le rapport de la commissaire à l'environnement. On y indique clairement que depuis plus d'une dizaine d'années, aucune évaluation stratégique environnementale n'a été appliquée par le gouvernement. Quand on a un gouvernement qui décide de subventionner des entreprises dans le secteur de la fabrication automobile, comme Ford, mais qui, en même temps, ne leur impose pas des règles et des normes rigoureuses en matière de fabrication des véhicules du même type que celles qui sont imposées en Californie, et qui continue à mettre en place une loi comme la C-48, qui vient donner des incitatifs fiscaux aux compagnies pétrolières alors que les incitatifs donnés à l'industrie de l'environnement et des énergies renouvelables sont moindres, je pense que vous devez d'abord faire un certain constat et, et à partir de ce constat, faire des recommandations. Ce matin, je ne sens pas ce message. J'espère que dans deux semaines, vous indiquerez au gouvernement que la situation actuelle est totalement inacceptable et qu'elle ne tend pas vers une politique fiscale environnementale.
Croyez-vous que l'on devrait mettre en oeuvre des moyens, des outils et peut-être une obligation réglementaire pour faire en sorte que l'évaluation environnementale stratégique soit appliquée au Canada? La base, c'est le ministère des Finances. Or, le ministère des Finances n'a pas été le ministère le plus transparent au cours des dernières années, autant à l'endroit de la commissaire à l'environnement et au développent durable qu'à l'endroit des parlementaires. Donc, est-ce que vous avez l'intention de demander au ministère des Finances d'ouvrir ses livres et de nous dire vraiment comment il a l'intention d'appliquer une politique fiscale qui va tendre vers l'écologisation, qui va tendre vers une politique fiscale environnementale?
À (1000)
M. Jean Bélanger: Il n'y a pas de doute que lorsqu'on a commencé ce projet, on devait essayer de faire des petits pas avant d'aller trop loin dans l'histoire. En fait, l'écologisation n'était pas vraiment reconnue. On accepte parfaitement ce fait.
Nous avons eu certaines réunions avec les fonctionnaires du ministère des Finances. Ils sont intéressés au projet que nous avons. Quant au constat, notre projet était très spécifique. Il s'agissait d'essayer de voir de quelle façon on pouvait appliquer une telle démarche, plutôt que de faire un constat général. Je ne dis pas qu'un tel projet ne devrait pas être fait, mais dans notre optique, ce qu'on voulait essayer de faire était de l'appliquer directement.
Vous avez parlé du rapport de l'OCDE. Nous y souscrivons définitivement. Nous ajoutons qu'il faut aller d'autant plus loin que les autres pays font la même partie.
M. Bernard Bigras: Est-il possible que les recommandations que ferez au gouvernement dans deux semaines soient transmises en même temps au Comité permanent de l'environnement et du développement durable afin de contribuer à nos travaux futurs?
M. Jean Bélanger: Normalement, nos documents sont publics. Alors, oui, définitivement.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Bigras.
Monsieur Simard.
[Français]
M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ): Je vais poursuivre dans le même sens que mon collègue. L'éco-taxation ou l'ecologisation de la fiscalité n'a pas une consonance qui se prête tellement bien au marketing. Il faut trouver autre chose. On appelle cela des incitatifs fiscaux ou des « désincitatifs ». C'est un terme moins français, mais on pourrait utiliser l'expression « fiscalité verte » ou « fiscalité à des fins environnementales ». Il me semble que ce concept n'est pas si récent.
J'ai beaucoup travaillé en environnement. J'ai été directeur général de l'Union québécoise pour la conservation de la nature. Je participais aux travaux de la table ronde du Québec, dont j'étais membre. Monsieur Bélanger, je pense que nous nous sommes rencontrés dans des comités de finances sur l'ALENA, où l'on devait jurer de ne jamais distribuer de documents.
Tout ce que je vois, c'est qu'on entamera des études pour les trois ou quatre prochaines générations. J'ai l'impression que nous aurons le temps de crouler sous les conséquences de l'effet de serre avant que ces études ne soient finalisées. Cette échéance me semble lointaine et parfois mal ciblée. Je connais les limites d'une table ronde, pour avoir participé à plusieurs. Il s'agit d'un large compromis d'intérêts où la faute est toujours au secteur voisin.
Récemment, j'ai assisté à une séance du Comité permanent des finances. Les représentants de l'industrie de la distribution des automobiles affirmaient qu'il ne fallait pas taxer les grosses cylindrées, que c'était contre-productif, que cela allait empêcher l'industrie d'améliorer sa technologie et qu'au bout du compte, cela allait nuire à l'environnement. Chaque secteur affirmait qu'il serait touché par cela.
Par contre, à un moment donné, on doit tenir compte de l'urgence de la situation et des problématiques. On a augmenté de 20 p. 100 la production de gaz à effet de serre alors qu'on devait et qu'on doit toujours la diminuer. C'est une responsabilité planétaire.
Je n'ai pas entendu les membres de la table ronde s'interroger sur la fiscalité des pétrolières lorsque le projet de loi C-48 a été adopté. Ce dernier faisait diminuer la fiscalité de 28 à 21 p. 100. L'analyse des lois fiscales actuelles et les correctifs vaudraient un million d'études sur un éventuel programme de subvention des moteurs diesels. C'est assez traditionnel. Au bout du compte, ce sont parfois des programmes de subvention que vous proposez, alors que le fait d'apporter des correctifs à la fiscalité actuelle constituerait un très beau plan. Or, compte tenu de sa structure, une table ronde comme la vôtre peut-elle y parvenir? Je l'ignore.
Je trouve votre proposition un peu décevante. J'aimerais que vous répondiez à ces commentaires un peu tristes mais réalistes.
À (1005)
M. Jean Bélanger: En termes génériques, comme je l'ai déjà mentionné à M. Bigras, il me semble qu'une des choses importantes dans tout cela consiste à établir un échéancier au-delà de 2012. Soumis à un tel échéancier, on est contraint de tenter de fournir des réponses qui iront peut-être à l'encontre des avantages qui surgiraient si l'on donnait la chance à différents groupes et technologies de se développer de façon coordonnée et ordonnée.
De notre côté, je ne dis pas que cela ne saurait être fait. Nous sommes un groupe qui effectue des études, mais à long terme. Nous intervenons derrière le va-et-vient des activités inhérentes à un projet de loi. Notre processus exige une interrogation de la part de toutes les parties impliquées dans le dossier, ce qui prend plus de temps. Il faudrait donc envisager quelque chose de semblable.
Il est très difficile pour nous de parler d'un certain projet de loi et d'arriver à respecter notre processus normal. Nous constatons qu'un travail pourrait être effectué à long terme, mais il s'agirait définitivement d'un travail colossal. Nous sommes toujours confrontés au problème du financement de ces projets, sans mentionner qu'il faut souvent développer l'information nécessaire, puisqu'elle n'existe pas.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Simard.
Je vais maintenant m'adresser à l'autre côté, façon de parler.
Monsieur Scarpaleggia, et ensuite M. Wilfert.
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.): Merci, monsieur le président.
Ma question porte sur les cartes d'abonnement d'autobus donnant droit à des déductions d'impôt. Avez-vous une opinion sur la question? Il semble que le gouvernement du Québec se penche actuellement sur la question. Est-ce que cela aurait pour effet d'augmenter l'effectif des utilisateurs des systèmes de transport public? J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Est-ce quelque chose que vous aimeriez proposer au gouvernement fédéral?
M. Gene Nyberg: Oui, en effet. Il est bien connu que nous sommes en faveur de cette mesure depuis de nombreuses années. Mais nous n'avons pas l'intention de reprendre ce cheval de bataille encore cette année. Cette proposition a suscité l'appui quasi unanime de tous nos membres, mais lorsque nous l'avons présentée aux fonctionnaires du ministère des Finances, ils ne s'y sont pas opposés; mais ils ont fait valoir qu'étant donné le coût par tonne de la réduction de gaz à effet de serre, cette mesure ne se rentabilise pas, par comparaison avec d'autres qui pourraient être adoptées. C'est un argument intéressant. Nous ne sommes pas en mesure de créer nos propres modèles qui nous permettraient éventuellement de contester les conclusions auxquelles ils en sont arrivés au Ministère, mais c'est ce que l'on nous a répondu. Comme je l'ai mentionné, nous avons fait des démarches en vue de faire adopter cette mesure, mais si les fonctionnaires nous affirment qu'elle n'est pas aussi efficiente que d'autres, c'est difficile pour nous de dire le contraire.
M. Francis Scarpaleggia: Le ministère des Finances a toujours le dernier mot en ce qui concerne les coûts-avantages; chaque mesure de nature fiscale doit produire un bénéfice net en fonction de certains critères.
M. Gene Nyberg: Oui. Si je peux me permettre une critique à cet égard, c'est que nous souhaiterions qu'ils fassent preuve d'un peu plus de transparence avec nous en nous communiquant leurs analyses. Ainsi, nous pourrions nous-mêmes les utiliser et instaurer des échanges plus continus sur ces questions, plutôt que de nous contenter de leur présenter des propositions, et de les voir refusées, mais sans en connaître les raisons, par exemple. Nous pourrions faire un meilleur travail si nous avions une rétroaction concrète.
M. Francis Scarpaleggia: Vous aimeriez prendre connaissance des arguments du Ministère dans tous leurs détails et les examiner de près.
Ce qui m'amène à une question connexe. Il existe un comité de coordination appelé le Comité de coordination de l'environnement et du développement durable. Il est formé de sous-ministres. Est-ce que vous suivez les travaux de ce comité du mieux que vous le pouvez? Évidemment, leurs réunions se déroulent au sein de la fonction publique. Pensez-vous que ce comité fait un bon travail de sensibilisation de tous les ministères, y compris, sans aucun doute, le ministère des Finances, concernant la nécessité d'intégrer des mesures à l'échelle gouvernementale visant à promouvoir le développement durable?
À (1010)
M. Gene Nyberg: Notre interprétation est que les choses ne fonctionnent pas aussi bien qu'elles le devraient. À la table ronde, par exemple, nous ne tenons pas de réunions régulièrement avec ce groupe et pourtant, nous pensons que nous devrions le faire. Une partie du problème tient au fait que l'on nous considère comme étant à l'extérieur du système, donc c'est un peu compliqué, nous avons un pied dehors et l'autre dedans.
Ceci dit, je pense qu'ils ne se rendent pas service en se privant de faire appel à nous pour réfléchir à certaines questions. J'ai l'impression, franchement, que bon nombre des sous-ministres qui participent à ces réunions les considèrent comme un à-côté par rapport aux choses vraiment importantes qu'ils ont à faire. Cela ne relève pas de l'administration centrale. Il y a bien des années, la table ronde avait organisé ce que nous avions appelé un forum ou un dialogue des décideurs sur le développement durable. Nous avions à cette occasion réuni tous les sous-ministres du gouvernement fédéral avec des chefs d'entreprise et d'autres intervenants afin de discuter de la manière dont le gouvernement fédéral devrait procéder pour élaborer une stratégie de développement durable. Les ministères sont censés le faire, mais il n'y a pas de stratégie globale sur le développement durable à l'échelle du gouvernement fédéral.
Ce fut très révélateur. Le greffier du Conseil privé avait déclaré lors de cette réunion que la description de travail des sous-ministres ne disait nulle part qu'ils seraient évalués en fonction des résultats qu'ils auraient obtenus concernant les objectifs de développement durable. Donc, oui, c'est pris au sérieux, mais certainement pas autant que ce devrait l'être.
J'ai remarqué, même dans la réponse du ministère des Finances au rapport de Johanne Gélinas--ce fut très révélateur, et cela nous a perturbés--que l'environnement est considéré comme une question de politique sociale. C'est une erreur; et c'est de là que vient tout le problème. Nous avons toujours soutenu que l'environnement est au coeur du fonctionnement et du bien-être de l'économie.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons été encouragés d'entendre récemment le ministre Dion définir une problématique qui affirmait qu'en effet, l'environnement est au coeur de l'économie. Si nous ne faisons pas correctement les choses, nous riquons de nous tirer dans le pied, économiquement parlant. Il y a d'énormes possibilités, et il faut en tirer parti.
Franchement, le gouvernement lui-même n'est pas encore mobilisé pour agir à cet égard. Je sais que le Ministre essaie de le faire à sa manière. Il y a un comité du cabinet, je pense qu'on l'appelle le comité de l'environnement et de l'économie durable, sous la présidence du ministre Emerson. C'est un développement prometteur. Il s'agit, d'après ce que j'en sais, d'un comité ad hoc, aussi on va voir comment les choses évoluent et comment on se débrouille pour gérer les dossiers, mais tous les ministères importants qui ont des responsabilités sur le plan de l'environnement et de l'économie, y compris la Santé, par l'entremise des aspects sociaux, sont mis à contribution.
Donc, des tentatives sont faites en vue de mettre en place des structures visant à surmonter certains de ces problèmes.
Le président: Merci.
Pour poursuivre avec le temps qui reste, je cède la parole à M. Wilfert.
L'hon. Bryon Wilfert: Merci, monsieur le président.
Premièrement, je vais revenir sur votre dernière remarque. Oui, effectivement, le ministre a parlé de l'environnement et de la compétitivité dans la même phrase, et il est clair que nous avons besoin d'un changement culturel et institutionnel qui n'a pas eu sa place ici depuis longtemps. Vous nous avez indiqué dans vos derniers commentaires que nous ne sommes pas mobilisés pour le faire.
Avez-vous des suggestions à faire à présent concernant les moyens de nous mobiliser pour agir, étant donné la structure traditionnelle dans laquelle nous évoluons? J'ai passé moi-même deux ans au ministère des Finances, et je dois dire que je suis modérément optimiste concernant l'idée que le ministre des Finances comprend bien la situation et la nécessité d'utiliser certains instruments économiques pour faire progresser notre programme concernant l'environnement.
J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet, et ensuite j'ai l'intention de revenir sur un commentaire que vous a fait Francis concernant les abonnements d'autobus.
M. Gene Nyberg: La situation est très difficile. Selon nous, les ministres et les hauts fonctionnaires sont bien disposés, mais la réalité est que chaque ministère, comme vous l'avez dit, est organisé en silo, et que chaque ministère a ses propres parties intéressées. À l'Environnement, on considère que le Ministère sert les intérêts environnementaux et pas les autres, et à l'Industrie, qu'il soutient l'industrie, aux Ressources naturelles, on considère qu'il apporte son soutien au secteur primaire. Tant et aussi longtemps que la structure demeure celle-ci, il est clair que les ministères vont entrer en compétition les uns avec les autres, et c'est le modèle avec lequel nous avons toujours travaillé.
On a pensé que les ministères devraient avoir un but additionnel, et qu'il devrait y avoir une sorte de marché des idées stratégiques. Mais lorsque l'on regarde le développement durable, si on veut prendre les choses au sérieux, il est clair qu'il faut plus d'intégration. Si on regarde les choses en face, la plus grande réforme devrait probablement avoir lieu au Bureau du Conseil privé. Ce Bureau n'a pas joué le rôle de coordination et d'exécution auquel on aurait pu s'attendre, et le seul moyen d'y arriver est de mettre en oeuvre à l'échelle du système une directive globale cohérente découlant de la politique. Quelqu'un doit s'assurer que tout le monde respecte ces priorités et ces directives, quelles qu'elles soient.
À (1015)
L'hon. Bryon Wilfert: Le ministre de l'Environnement a, certainement au sein du cabinet en tout cas, opéré une petite révolution. Le fait par exemple qu'il ait accepté de participer à l'élaboration d'un dossier de présentation avec Industrie Canada; qu'il se soit fait des alliés au sein du cabinet et, de toute évidence, au sein de la bureaucratie, afin que l'environnement passe de la fin du processus à son début, et que l'on adopte d'entrée de jeu une vision environnementale--autrement, on a tendance à considérer l'environnement comme une sorte d'ajout à la toute fin qui apporte vraiement peu de chose à la discussion--est la chose qui, plus que n'importe quoi d'autre jusqu'à maintenant, a eu le plus d'impact sur ses collègues du cabinet. Je pense aussi qu'au sein de la bureaucratie on assiste à une collaboration entre les sous-ministres comme on n'en a jamais vue auparavant.
Le ministère des Finances, même s'il affirme constamment ne pas utiliser le système fiscal pour favoriser un intérêt plutôt qu'un autre, a eu clairement tendance à le faire.
On a fait allusion au projet de loi C-48. C'est moi qui étais le secrétaire parlementaire chargé de la mise en oeuvre du projet de loi C-48. Il visait le secteur des ressources pétrolières, gazières et minières au Canada et les questions de compétitivité économique à l'échelle du monde entier. Je n'essaierai pas de trouver des excuses au fait que cette loi visait surtout à égaliser les chances. Mais ceci dit, nous pouvons également nous servir de ces instruments dans le domaine de la technologie verte, ce qui n'a pas été fait. Il faut examiner de très près la question des mesures incitatives.
M. Scarpaleggia a mentionné les abonnements d'autobus. J'ai probablement accumulé plus d'expérience sur la question des abonnements pour le transport en commun que quiconque depuis mon passage à titre de président de la FCM. Et de fait, j'ai eu à essuyer les tirs à titre de secrétaire parlementaire lorsque ce projet est mort au feuilleton. Le ministère des Finances a toujours fait valoir l'argument comme quoi cette mesure ne produisait pas les résultats escomptés. Mais si on regarde ce qui se passe aux États-Unis et dans les administrations européennes où elle est appliquée... si vous pouviez dire aux politiciens municipaux qu'ils verront les effectifs des utilisateurs du transport en commun grimper de 2 p. 100, ils seraient aux anges. Et cependant, les chiffres fournis par ces administrations parlent plutôt d'une augmentation de la fréquentation qui oscille entre 20 % et 25 %.
À mon avis, il n'existe pas d'argument valable contre cette mesure. Nous assistons tout simplement à une résistance institutionnelle. Vous avez déclaré que vous n'étiez pas sûr de vouloir recommander cette mesure cette fois encore. Y a-t-il une raison pour laquelle vous voudriez faire marche arrière, alors qu'il y a aussi un projet de loi d'initiative privée devant la Chambre sur cette question...
Le président: Monsieur Wilfert, le témoin va devoir vous donner une courte réponse, parce que d'autres personnes veulent aussi poser des questions.
M. Gene Nyberg: La seule raison pour laquelle nous ne voudrons probablement pas recommander cette mesure encore une fois cette année est que nous avons adopté une approche entièrement différente cette fois à l'égard du ministère des Finances. Nous avons examiné les priorités du gouvernement telles qu'il les a exprimées, par exemple, dans le discours du Trône, et nous essayons d'orienter nos efforts dans le sens qui, selon nous, ferait avancer directement les initiatives du gouvernement. C'est pourquoi nous nous concentrons sur l'énergie cette année, ainsi que sur la viabilité urbaine--ce genre de choses. Alors nous allons probablement éviter cette question.
Le président: Monsieur Cullen, vos questions, s'il-vous-plaît.
M. Nathan Cullen: Merci, monsieur le président.
Merci messieurs de vous être joints à nous, et surtout avec un si court préavis.
J'avoue que j'essaie d'évaluer si c'est seulement de la mauvaise humeur après deux ou trois sessions de cinq semaines ou si c'est seulement à cause des déclarations que j'entends. En toute sincérité, je suis extraordinairement frustré d'entendre vos témoignages. Je suis totalement honnête avec vous.
Je ne remets pas en cause l'intégrité des témoins ou des membres de cette organisation, que je surveille du coin de l'oeil depuis quelques années, mais j'éprouve beaucoup de difficulté à concilier ce que j'entends de la part des groupes environnementaux, des gens qui se penchent sur ces questions, qu'il s'agisse de la pollution ou de la nécessité pour le gouvernement de se doter de véritables buts et mesures incitatives, et la désinvolture avec laquelle on s'exprime aujourd'hui.
J'ai trouvé ce rapport et vos remarques, à l'exception de ce que vous avez dit en dernier sur le Conseil privé, extraordinairement insipides. Je pense que ce rapport intitulé « les premiers pas » date de 2002. Nous sommes en 2004, à l'aube de 2005, et nous abordons toutes ces questions comme si nous avions 25 ans devant nous pour le faire, comme si nous devions faire preuve de considération.
Nous avons déjà examiné la question. Beaucoup de groupes se penchent sur la question depuis nombre d'années. Nous savons qu'il y a des cas très précis, et nous entendons les témoignages sur les études de cas et les exemples à l'échelle internationale de ce qui se fait sur le plan de la réforme de la fiscalité. Jetons simplement un coup d'oeil sur les initiatives qui donnent des résultats, sur celles du Ministère, sur celles que les autres ministères ont abordées. J'ai vraiment beaucoup de mal à justifier le rapport qui existe entre votre groupe et le premier ministre et avec un parti en particulier et le gouvernement, avec l'indépendance nécessaire pour pouvoir faire des critiques.
J'attendais ce moment avec impatience, et j'espérais vous entendre dire à quel point il était déplorable de constater la lenteur avec laquelle les choses s'étaient passées avec le ministère des Finances, et tout ce discours sirupeux en février, et comme il faudrait en finir une bonne fois pour toutes avec ces histoires. C'est le type de doléances que nous entendons de la part du vérificateur. Mais je sais que vous n'êtes pas des vérificateurs. Vous faites partie de ceux qui élaborent les politiques et qui tentent de présenter des recommandations. Mais le fait est que votre rapport date de pratiquement trois ans, et que vous vous adressez encore au ministère des Finances comme si vous proposiez des mesures potentiellement révolutionnaires, avec lesquelles il faut se montrer extrêmement prudent, et vous faites valoir qu'il faut envisager les choses à long terme, je trouve tout cela extrêmement frustrant.
En ce qui concerne les subventions perverses dans le secteur énergétique, pour commencer, M. Wilfert a parlé d'égaliser les chances. Si seulement nous pouvions faire de même dans le domaine des mesures financières de nature fiscale.
Je ne veux pas reporter les torts sur qui que ce soit--c'est un commentaire de M. Bélanger. Quant à moi, je tiens à ce que l'on blâme quelqu'un. Je veux que vous blâmiez quelqu'un. Je veux que vous commenciez à pointer du doigt les responsables de cet immobilisme.
Qu'est-ce que vous attendez? Nous avons fait des pieds et des mains pour pouvoir entendre quelqu'un dans les hautes sphères du ministère des Finances. Que faudra-t-il faire pour mettre fin à cette inertie et pour abolir ce cloisonnement entre les ministères? J'ai un discours révolutionnaire au sein de ce gouvernement. Nous avons un gouvernement minoritaire. Nous sommes montés à l'assaut du Conseil privé et avons déjà remporté quelques minces victoires. Mais j'y vois un symbole, et j'ai bien l'intention de m'en servir. Que faudra-t-il faire pour que ce gouvernement comprenne que le moment est venu d'ajuster le tir, et particulièrement au ministère des Finances, à Ressources naturelles Canada et au ministère de l'Industrie, donc pour qu'il se mette bien dans la tête que le temps des études est révolu et que nous croulons sous leur poids, comme l'a suggéré un autre membre? Que faudra-t-il que nous fassions pour qu'il comprenne?
Quel rôle entendez-vous jouer pour exercer des pressions sur le gouvernement? Vous êtes censés jouer le rôle d'un catalyseur. C'est votre mandat. C'est votre seule raison d'être. Et pourtant, vous nous présentez un rapport vieux de trois ans, et je n'ai entendu parler d'aucune réforme significative au sein du ministère des Finances.
À (1020)
Le président: Monsieur Nyberg, ou quiconque veut répondre à cette question.
M. Gene Nyberg: Pour répondre à votre premier point au sujet de l'institution, c'est de bonne guerre, je suppose, et je vous comprends. Mais je dois dire qu'à mon point de vue, nous ne sommes pas une organisation d'attaque. Nous ne sommes pas un groupe de revendication. Nous ne sommes pas, par exemple, comme l'étaient le conseil économique ou le conseil des sciences, qui faisaient des sorties dans les médias et attaquaient le gouvernement lorsqu'il ne bougeait pas sur certaines questions. Nous nous situons plutôt dans le domaine des solutions. C'est ce que nous essayons de faire. Nous voulons faire en sorte que les choses marchent.
Pour ce qui est de l'approche que nous avons adoptée au sujet de l'énergie et du changement climatique, à titre d'exemple, nous savons que le processus ayant été suivi récemment avec les tables de concertation et toutes les autres discussions qui ont suivi s'est révélé une véritable fondrière et a été très éprouvant pour quiconque y a participé. Nous avons donc tenté d'éviter cet écueil en nous efforçant d'aller au-delà de la période de conformité au protocole de Kyoto et de nous poser la question suivante: que faut-il faire pour passer à des approches et à des solutions à plus long terme? Nous essayons de franchir l'impasse. C'est ça que nous essayons de faire.
Et franchement, ce n'est pas une mince affaire que d'arriver à réunir les intervenants de l'industrie et des ONG et des provinces pour discuter de ces choses. Chacun a sa propre vision bien ancrée. Nous essayons de collaborer avec tous et chacun afin d'en arriver à des solutions et de trouver des moyens de faire des progrès. Ces progrès devront, j'en ai bien peur, se faire par étapes. Cela ne fait aucun doute. Dans notre sphère d'activité, les progrès seront marginaux, et très graduels. Nous n'envisageons pas de faire des percées révolutionnaires. Je ne pense pas que ce soit dans la nature de notre organisation de le faire non plus. C'est notre rôle. Il y a sûrement d'autres groupes mieux placés que nous pour faire des revendications, et c'est très bien. C'est pourquoi je vous dis que nous nous efforçons plutôt de briser les barrières.
Aimeriez-vous ajouter quelque chose, Alex et Jean?
M. Alex Wood: Je tiens à faire quelques précisions sur le contexte dans lequel les politiques sont élaborées dans ce domaine. Nous avons répondu à la question de M. Mills et aux remarques de M. Bélanger au sujet de la question de l'énergie, en rapport notamment avec l'aspect fiscal, qui s'avère souvent une approche fort instructive dans maints domaines—force est de constater qu'il y a des lacunes réelles en matière d'information et de capacités, qui nous empêchent vraiment de trouver des solutions définitives aux problèmes.
M. Bélanger a évoqué la question d'une base d'information utilisée par le gouvernement fédéral pour établir des prévisions concernant la demande d'énergie, l'approvisionnement énergétique, la montée incessante des prix. Le gouvernement a trop peu investi dans la collecte de données. On nous annonce la publication imminente d'une mise à jour de ces données, mais la gestation dure depuis cinq ans déjà.
Il est certain que nous pouvons faire mieux. Dans les recommandations que nous nous apprêtons à soumettre, nous insisterons sur le fait que cette collecte d'information est un enjeu clé. Quand le débat s'ouvrira sur les mesures fiscales, on se demandera tout d'abord si on dispose des chiffres nécessaires pour évaluer les répercussions des mesures. Pour l'instant, nous n'avons pas ces chiffres. Si nous voulons nous doter de mécanismes fiscaux, disposerons-nous des données essentielles à leur conception et à leur mise en oeuvre? La réponse est non, dans la plupart des cas.
Je vous donne un exemple. Au Royaume-Uni, il existe une mesure d'amortissement fiscal bonifié. La déductibilité est de 100 p. 100 pour une flotte de véhicules, c'est-à-dire que véhicule peut être entièrement amorti dès la première année, selon les données recueillies par le gouvernement—en fait, pour toute l'Europe—sur les émissions de carbone de tous les véhicules en circulation.
Nous ne disposons pas de telles données ici. Transports Canada et RNCan commencent à peine à les recueillir. Pour instaurer des mesures fiscales axées sur la réduction des émissions de carbone, nous avons besoin de cette base d'information.
À (1025)
M. Nathan Cullen: Bref, nous élaborons des politiques sans pouvoir mesurer les conséquences. Mme Gélinas nous a dit à peu près la même chose.
Ces recommandations auront bientôt trois ans. Pouvez-vous nommer les trois principaux domaines de progrès? Si j'ai bien compris, vous refusez de prendre quelque engagement que ce soit à court terme. Ce n'est pas votre rôle dans cette affaire. Vous avez formulé des recommandations. Vous avez reçu un budget minime mais non négligeable pour faire avancer le dossier. Vous fonctionnez de façon indépendante ou en lien étroit avec le premier ministre, je ne sais trop, mais un groupe d'influence pourrait très bien faire des pressions pour que quelque chose se passe.
Vous avez déposé vos recommandations il y a trois ans. Donnez-moi les trois résultats majeurs. Citez-moi trois réalisations qui vous permettent de dire que vous avez fait quelque chose de concret, de démontrer votre efficacité et de justifier votre existence. Parlez-moi de ce qui vous procure un sentiment de satisfaction, le sentiment du travail accompli.
M. Jean Bélanger: Monsieur le président, je dois souligner que ce document, publié voilà quelques années déjà, était un document d'apprentissage. L'objectif était de comprendre la réforme fiscale, de quoi il en retournait au juste, ce qui se passait dans d'autres pays. Le but n'était pas de formuler de grandes recommandations. Nous voulions a priori comprendre le système.
Depuis, nous avons entamé la deuxième phase. Malheureusement, nous attendons actuellement que le rapport reçoive l'adhésion générale, mais comme ce n'est pas encore fait, nous ne pouvons pas devancer le groupe. Le rapport contient des recommandations précises sur les mesures à prendre. Nous espérons que les recommandations liées aux mesures fiscales et à d'autres domaines seront adoptées dans le mois qui vient.
Je voudrais donner suite maintenant à certains propos de M. Wilfert. S'il y a une leçon à tirer de ce processus, c'est bien que les aspects fiscaux ne peuvent être mis en cause une fois l'examen terminé. Il faut tenir compte de l'aspect fiscal dès le début. Quand on se penche sur un domaine stratégique qui, traditionnellement, a été modelé par une approche d'injonction et de contrôle, on se demande forcément si d'autres avenues sont possibles. Et on se tourne vers l'aspect fiscal.
À mon avis, si on veut que les instruments fiscaux soient efficaces, il faut les intégrer dès le début du processus. Le ministère des Finances doit donc entrer en scène dès la phase initiale, au cours de laquelle on recense tous les instruments pouvant être offerts.
M. Nathan Cullen: Merci.
Je suis bien conscient que ce n'est pas un document de recommandation. Toutefois, si j'en juge par ma lecture, vous sembliez convaincus à l'époque qu'il était important, très important.
Je reprends ma question. Depuis que vous avez réalisé l'importance absolue d'en tenir compte partout, dans tout ce que nous faisons, qu'avez-vous fait de signifiant pour convaincre le gouvernement d'agir sur une question d'aussi grande importance?
J'ai bien entendu ce que vous venez de dire. Vous avez tenu des propos similaires au début de votre exposé sur l'importance de cette question. J'ai pris connaissance de votre document, et de celui de Mme Gélinas, et notamment de son rapport sur le ministère des Finances, où elle se plaint que les fonctionnaires ne veulent même pas prendre acte des recommandations. Personnellement, moi qui vient du secteur privé, je n'ai jamais entendu parler d'un vérificateur qui voit son rapport refusé et rejeté par le groupe qui fait l'objet de la vérification. C'est insensé.
Alors, depuis le temps—près de trois ans, je ne connais pas la date exacte, mais nous arrivons bientôt à 2005—de la publication du rapport et de votre constatation de l'importance des enjeux... Le ministère des Finances vient tout juste de balayer du revers de la main tous les éléments cruciaux soulignés par son propre vérificateur. Qu'avez-vous réussi à faire pendant cette période pour convaincre les fonctionnaires de ce que vous êtes vous-mêmes convaincus, c'est-à-dire l'importance capitale de l'EF?
À (1030)
Le président: Pouvez-vous être aussi succinct que possible?
M. Gene Nyberg: Bien sûr.
Comme je l'ai déjà dit, nous soumettons des propositions au ministère des Finances chaque année en prévision du prochain budget. Une fois que nous avons fait cet exercice, nous nous fondons sur certaines découvertes réalisées au cours du processus pour formuler des recommandations.
Nous avons obtenu ce que je qualifierais de petites victoires, mais des victoires quand même. Par exemple, nous avons vendu l'idée au gouvernement fédéral d'acheter certains volumes d'électricité produite à même des sources renouvelables. Nous avons recommandé que ce volume soit de 10 ou 20 p. 100, peu importe, et qu'il augmente de façon progressive. C'est l'une de nos réalisations.
Nous avons aussi été parmi les ardents défenseurs d'une mesure de remboursement de la TPS sur les investissements dans les infrastructures municipales. Nous avons également soumis des recommandations sur le traitement initial des investissements commerciaux dans le domaine de l'énergie éolienne, pour faciliter son émergence.
Nous faisons de telles propositions progressives chaque année, en nous fondant sur nos réalisations précédentes.
Le président: Merci beaucoup.
Messieurs et mesdames les membres du Comité, il est actuellement 10 h 30. Nous ferons des allers-retours entre M. Jean, M. McGuinty, M. Simard, M. Bigras et Mme Ratansi, mais j'aimerais que nous finissions à 10 h 50, ce qui nous laissera le temps d'aborder deux sujets. Le premier est le rapport qui nous revient par l'entremise du greffier concernant la procédure d'examen des nominations aux organismes spéciaux.
J'aimerais par ailleurs donner une réponse au Comité concernant certains points soulevés par M. Wilfert.
Nous allons donc poursuivre jusqu'à 10 h 50, pour céder notre place à un autre comité.
Monsieur Jean, puis monsieur McGuinty.
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Merci, monsieur le président.
J'utiliserai une bonne partie de la période qui m'est allouée pour formuler des commentaires, si vous me le permettez. Je n'ai pas l'intention de vous resservir ce qui a déjà été dit par les autres membres de ce côté-ci.
J'ai aussi lu l'étude que vous avez présentée il y a deux ans, presque trois. Dans les politiques d'avenir, si j'en juge par ce que j'ai vu dans les recommandations, et comme l'ont si bien dit M. Simard et M. Bigras, M. Cullen aussi, il ressort très nettement que notre société n'en a que pour les études, les études, les études. C'est plutôt décourageant.
Vous faites référence dans le rapport lui-même à une étude s'étendant sur trois à cinq ans. M. Bélanger a parlé de 25 ans. Pourquoi pas 100 ans?
Je n'ai pas l'impression que les retombées néfastes du secteur de l'énergie sur l'environnement vont disparaître. C'est un phénomène continu, et les améliorations doivent être constantes.
Je préconise la prolongation des études parce que trois ou cinq années ne suffiront pas pour mener ce travail à terme. Nous en sommes déjà à la fin de cette étude et je ne sais pas ce qui se passera après. C'est la question que je vous pose d'ailleurs.
Il me semble que le gouvernement—je ne jette de pierres à personne—n'est pas prêt à mettre en oeuvre sa propre stratégie de conservation de l'environnement. Il s'en remet aux traités internationaux pour ce faire, parce qu'il a trop peur, ou je ne sais pourquoi, de confronter les groupes de pression, d'aller de l'avant, de foncer.
Je dois vous faire une remarque, en sachant fort bien qu'il est parfois risqué de prendre des engagements de peur d'y laisser sa peau. Mais j'y vais. Parfois, surtout dans la position singulière de ceux qui doivent faire état de constatations ayant un fort impact, il vaut mieux foncer et dire ce qu'il en est, de façon ferme et forte... Il faut parfois être brave quand l'environnement est en jeu, recommander s'il le faut la carotte ou le bâton. Il faut prendre le taureau par les cornes et faire ce qu'il y a à faire plutôt que de tourner autour du pot, d'aligner les études les unes après les autres pour finalement n'arriver à rien. Voilà très franchement comment je vois les choses.
Les études, bien évidemment, gaspillent beaucoup d'arbres. Je crois que nous avons fait suffisamment d'études et dévasté suffisamment de forêts. C'est la première fois que je constate qu'un rapport de votre groupe a été imprimé sur du papier recyclé, du moins 20 p. 100 du rapport, et je vous en félicite.
Je vous en prie, foncez tête baissée. N'ayez pas peur de vous mouiller et de faire des recommandations au gouvernement qui marqueraient enfin un pas dans la bonne direction.
Selon moi, l'industrie est prête à faire le virage vert, mais elle veut le faire dans un cadre équitable, auquel M. Nyberg a fait allusion déjà. Que s'est-il passé depuis 2002? Qu'est-il advenu de ce rapport? Je sais que M. Cullen vous a posé la même question, mais je n'ai pas encore entendu de réponse claire. Que s'est-il passé depuis que cette étude a été publiée?
À (1035)
M. Gene Nyberg: Je cède ma place à Jean Bélanger. Mais, je le répète, ce document n'est pas représentatif des autres rapports que nous publions. Celui-là est en fait une synthèse de nos apprentissages, si je peux m'exprimer ainsi.
Tous nos autres rapports importants, ceux que j'appelle les « rapports sur l'état du débat », intègrent des recommandations très judicieuses et très puissantes. Nous avons frappé quelques bons coups ces dernières années, notamment le programme portant sur les milieux urbains et celui sur les zones désaffectées. Nous avons été des précurseurs dans le domaine des indicateurs environnementaux et du développement durable, une entreprise qui a été extrêmement difficile. Le gouvernement nous a commandé ce travail et nous avons réussi à forger de très bons indicateurs ciblés, qui nous aident à mieux comprendre l'effet de nos activités économiques sur notre capital naturel. Nous avons besoin de ces données pour étoffer notre réflexion sur la meilleure approche dans ces différents secteurs.
Nous avons formulé des recommandations très musclées, c'est certain. Si vous souhaitez que nous revenions pour vous en expliquer quelques-unes, nous en serons ravis. Je le répète, ce document ne représente pas du tout ce que nous faisons la plupart du temps, ce qui ne veut pas dire qu'il ne possède pas sa valeur intrinsèque.
Jean, avez-vous quelque chose à ajouter au sujet de nos réalisations des deux ou trois dernières années?
M. Brian Jean: Je vous suggère, puisque chaque minute est précieuse et que M. Watson souhaite poser une question brève, de nous soumettre un bref compte rendu de ces recommandations? Je sais que vous avez déposé un rapport sur les zones désaffectées, mais je préférerais cette forme pour me donner le temps de lire et de faire mes propres recherches.
M. Gene Nyberg: D'accord.
M. Jeff Watson (Essex, PCC): Je vais m'efforcer d'être bref.
Certaines conséquences sur les fermes et la conservation, de même que le concept de crédit de taxe municipale, ont particulièrement retenu mon attention, même s'il semble admis que ce ne sera pas suffisant. Existe-t-il un meilleur programme, moins lourd pour la tenue des registres municipaux? Il n'y a pas d'argent pour financer ce type de programme. Avez-vous une autre solution, ou allez-vous envisager une autre avenue qui favoriserait la conservation des terres marginales à des fins environnementales?
Je ne sais pas si ma question est assez précise. J'essaie de rester bref, pour que vous ayez plus de temps de parole que moi.
M. Jean Bélanger: En gros, les résultats de ces études de cas ont été remis au ministère de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire et au ministère de l'Environnement. Selon ce que j'en sais, des mesures de suivi sont actuellement intégrées au programme général des paysages agricoles.
M. Jeff Watson: Avez-vous l'intention d'étudier un autre modèle que celui du crédit de taxe municipale? J'aimerais mieux comprendre ce que vous faites au juste.
M. Jean Bélanger: Non, pas à cette étape-ci.
Le président: Merci, monsieur Watson.
Monsieur McGuinty.
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Il est toujours agréable de revoir d'anciens collègues. Merci de votre visite.
J'ai tout d'abord quelques commentaires à livrer, parce que j'ai l'impression que certains membres du Comité nous ont entraîné sur un chemin glissant. Je suis d'avis que cette digression trahit leur apparente incompréhension du chemin parcouru par ce groupe depuis près d'une décennie.
Il me semble entrevoir quelques méprises relativement à ce qu'est cette organisation et ce qu'elle n'est pas. Comme j'en ai été président pendant neuf années environ, je me sens habilité à remettre les pendules à l'heure.
Ma première remarque portera sur une affirmation de M. Simard. Il ne s'agit pas d'un ONG environnemental financé par le gouvernement. Malgré les tentatives de l'opposition pour la faire passer pour un ONG environnemental financé à même les poches des contribuables, ce n'est pas le cas. Cette organisation, pour ce que j'en comprends, n'est ni un pis-aller pour le gouvernement, ni un garde-fou, malgré ce qu'en diront certains membres, je le répète. Ce n'est pas le rôle qui lui a été confié. Son rôle est de tenter de réconcilier des intérêts divergents au sein de la société canadienne.
Par conséquent, il faut savoir que les recommandations soumises par ce type d'organisation diffèrent complètement de celles formulées, par exemple, par l'UQCN au Québec, le porte-voix d'un groupe restreint et très spécialisé de citoyens activistes et préoccupés par la question environnementale dans la province du Québec, et uniquement dans cette province.
La Table ronde nationale assume une responsabilité beaucoup plus lourde, qui consiste à départager les points de vue des représentants de l'industrie, du milieu universitaire, des milieux environnementalistes, et de proposer des recommandations éclairées en vue d'un changement. Il me simple tout à fait inopportun, voire déloyal, que des membres fassent des commentaires sur l'organisation sans tenir compte des conséquences de leurs paroles.
Qu'il s'agisse de la stratégie nationale sur les zones désaffectées, du pacte avec les villes, ou encore des travaux sur les indicateurs nationaux, de la réforme de la réglementation en matière d'eau et d'eaux usées, des recommandations de mesures musclées intégrées à six des huit derniers budgets, l'organisation a énormément contribué à faire bouger le pays dans une nouvelle direction, qui est loin d'être la plus aisée.
J'aimerais maintenant adresser une question aux témoins, qui fait suite à celle que j'ai posée à la commissaire la semaine dernière. En 1993, le gouvernement s'est bel et bien engagé, un engagement qu'il semble avoir réitéré, à faire un examen en profondeur du régime fiscal qui régit les activités commerciales. Je ne parle pas ici d'une taxe environnementale, à l'instar de M. Simard. Ma question est beaucoup plus large que la taxe environnementale, qui semble perçue comme un spectre effrayant dans la population canadienne.
Pouvez-vous nous dire si c'est quelque chose de possible? L'a-t-on déjà fait ailleurs? Selon vos découvertes et vos travaux, comment réagissez-vous à l'idée qu'une telle analyse pourrait être faite?
À (1040)
Le président: Monsieur Nyberg.
M. Gene Nyberg: Alex pourra me corriger, mais je ne crois pas que ce travail a été fait, selon ce que j'en sais. Il est vrai que ce serait une opération de grande envergure.
Il ne faut pas perdre de vue non plus que toute la notion d'écologisation de la fiscalité n'est pas bien comprise en général. Dans son essence la plus pure, l'écologisation consiste à donner aux politiques une orientation commune axée sur le mieux-être de l'environnement et de l'économie. Cela signifie qu'il faut revoir tous les mécanismes de subvention, les dépenses fiscales, bref, l'ensemble du système, afin de nous assurer que toutes nos entreprises convergent dans une direction commune. C'est très difficile, même dans des circonstances optimales. C'est ce que nous souhaitons tous mais, très honnêtement, je suis loin d'être certain que ce sera facile.
Nous en avons parlé à la Table ronde, et nous rêvons tous d'augmenter notre capacité d'examen, mais nous n'avons pas ces pouvoirs pour l'instant.
Le président: Monsieur McGuinty.
M. David McGuinty: Est-ce que j'ai dépassé mon temps?
Le président: Non, vous êtes juste dans les temps.
M. David McGuinty: Parfait. Merci, monsieur.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président. Je serai bref.
Il y a une recommandation que M. Bélanger a effleurée et qui, je l'espère, se retrouvera dans le rapport que vous déposerez dans quelques semaines. C'est toute la question de la technologie.
Vous avez dit, monsieur Bélanger, à peu près ce qui suit: la technologie n'est pas nécessairement une garantie de réduction à long terme des émissions de gaz à effet de serre. Je trouve que c'est un énoncé fort important. En effet, selon le discours du gouvernement actuel que j'ai entendu jusqu'ici, la technologie constitue le fondement même de la politique et de la stratégie de réduction de gaz à effet de serre.
Encore hier, à la Chambre des communes, en réponse à une question posée par M. Layton, M. Martin a insisté beaucoup sur les questions technologiques, comme si la technologie était à la base de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
J'aimerais que vous élaboriez dans cette direction-là. Si le gouvernement décide de mettre tous ses oeufs dans le même panier, non pas en élaborant une stratégie de réduction à la source des émissions de gaz à effet de serre dans un horizon plus rapproché, mais en misant strictement sur la technologie qui, elle, ne va rapporter des fruits qu'à long terme, cela risque, à mon avis, de reporter le problème et de nous éloigner des échéances de Kyoto.
J'aimerais vous entendre à ce sujet. Est-ce que cela fera partie d'une recommandation au gouvernement dans quelques semaines? J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur ce sujet.
M. Jean Bélanger: Comme vous le savez, je peux seulement répondre partiellement à votre question parce que le rapport n'est pas approuvé par le conseil. Néanmoins, il n'y a pas de doute que l'un des critères qui sera au centre de toute la discussion sera la définition à donner au carbone qui est émis sur le cycle de vie. C'est un critère que nous allons définitivement recommander.
Donc, s'il y a des programmes de technologies qui doivent recevoir un appui d'une façon ou d'une autre, nous croyons qu'il faudrait tenir compte de ce critère, entre autres. Nous voulons que ce critère soit reconnu. C'est assez important.
À (1045)
M. Bernard Bigras: Je n'ai plus de questions.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Bigras.
Et la question finale appartient à Mme Ratansi.
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Merci, monsieur le président. Je cède trois minutes de mon temps à M. McGuinty.
Votre mandat consistait en une analyse FFPM—forces, faiblesses, possibilités et menaces—, suivie d'un examen de l'environnement international. Sur la scène internationale, vous avez examiné la situation en Europe, qui est apparue beaucoup plus en avance que quiconque.
Donc, quand l'Europe procède à l'EF, dans quelle mesure réussit-elle à uniformiser les interventions? L'uniformisation est essentielle, il faut adopter une approche globale pour y arriver. Avez-vous trouvé quelques exemples pratiques qui pourraient être adaptés ici, un budget vert par exemple?
Ma deuxième question porte sur le triangle dans lequel vous vous insérez, dont le secteur bénévole représente un élément critique. Quelle est la situation en Europe à cet égard? J'apprécierais une réponse rapide, pour qu'il reste du temps à M. McGuinty.
M. Alex Wood: Comme vous l'avez souligné, nous avons fait beaucoup de recherche documentaire pour savoir ce que d'autres gouvernements faisaient dans le domaine, tant dans le domaine général de l'EF que sur la question plus précise de l'énergie.
L'énergie, dans le contexte européen, a été au coeur des activités de réforme fiscale, de redéploiement fiscal, des politiques fiscales en général. L'Europe a surtout adopté des taxes sur l'énergie et même sur l'essence. Nous avons constaté, ce qui corrobore les conclusions auxquelles sont parvenus d'autres groupes, que le modèle européen—qui se conjugue encore à l'échelle nationale, en grande partie—est truffé d'exemptions et de trous sur le plan de l'application des mesures fiscales. Ce n'est donc pas le meilleur exemple qui soit.
La seule exception est sans doute la « taxe-climat » instaurée au Royaume-Uni, de même que les conventions d'accompagnement sur les changements climatiques. Cet outil d'intervention sera sans doute étendu, une fois encore, à la grandeur de l'Europe. C'est un système qui respecte en grande partie la théorie sur le modus operandi de ces interventions. C'est essentiellement une taxe sur les hydrocarbures que le gouvernement impose en fonction de la capacité d'amélioration et des progrès réels par rapport aux accords sur la réduction des hydrocarbures que les industries ou les divers secteurs ont conclu avec le gouvernement. La taxe est en fait réinjectée dans les industries et les secteurs; c'est donc une approche du bâton et de la carotte, un modèle qui s'est avéré relativement efficace jusqu'à maintenant.
Nous avons reçu une délégation du Royaume-Uni il y a quelques mois, et ces gens nous ont affirmé que le secteur privé avait très bien accueilli ces mesures. Dans la plupart des cas, et notamment au Royaume-Uni, ces taxes sont accompagnées d'une réduction d'un autre type de taxe. Au Royaume-Uni, où les cotisations sociales ont été diminuées, on en arrive à un résultat neutre pour le gouvernement et le secteur privé lui-même.
Le président: J'attends de voir si M. McGuinty va enfin mettre le pied dans l'étrier.
M. David McGuinty: Merci, monsieur le président.
J'aimerais entendre les réponses des témoins sur deux points précis, qui concernent plus particulièrement les remarques de M. Nyberg sur le problème systémique général que représente le BCP. Quelle est la réaction des témoins concernant la création d'un poste de sous-secrétaire occupé par un membre du Cabinet au sein du BCP, chargé expressément du développement durable au sein du gouvernement fédéral?
Et que pensez-vous de la constitution d'un groupe de travail sur l'EF, auquel on attribuerait dix ETP, par exemple, selon un mécanisme interministériel—il regrouperait des représentants des Finances, de l'Industrie, de RNCan, de l'Environnement et d'autres ministères. Ces gens pourraient travailler ensemble, faire front commun pour trouver des solutions viables à soumettre à l'examen du gouvernement. Qu'en pensez-vous?
M. Gene Nyberg: Pour répondre à la première question, elle va tout à fait dans le sens de mes propos concernant le rehaussement des responsabilités générales du Bureau du Conseil privé, pour favoriser une réflexion si cruciale sur ces thèmes. C'est une approche très valable parmi d'autres.
Je continue de penser, par ailleurs, que la réponse définitive doit venir de ce niveau, sur délégation du greffier. Elle doit venir des niveaux les plus élevés et donc, par définition, du premier ministre également.
Pour ce qui est de la capacité, je suis tout à fait d'accord. Pendant les années où nous nous sommes penchés sur l'écologisation de la fiscalité, notre principale difficulté était de trouver des spécialistes canadiens capables de nous aider. Cette rareté a été l'une des principales embûches pour l'avancement de nos travaux. Il y a çà et là quelques bulles d'activité, mais il faut un bon coup de pouce pour progresser. Si cette amélioration est possible, nous donnerons volontiers notre soutien.
Le président: Merci, monsieur McGuinty.
Je remercie tous les témoins. Je sais que vous avez été convoqués à court préavis, et nous en apprécions d'autant plus vos lumières. L'exposé que je m'apprête à faire vous permettra sans doute de mieux comprendre les antécédents du Comité et le rôle que vous devrez jouer à partir de là.
Chers collègues du Comité, la question soulevée par M. Wilfert...
Monsieur Wilfert, je vais vous expliquer le pourquoi d'un préavis si court. J'apprécie par ailleurs le commentaire de M. Richardson, qui a souligné que c'est à la demande de la présidence, par l'entremise du comité directeur, que les témoins ont comparu aujourd'hui. Si vous restez, je crois que vous serez intéressés et que l'information vous sera pertinente. Je l'espère.
Nous savons que notre ordre du jour comporte tant de plages à combler. Il y a eu deux projets de loi, de même qu'un rapport crucial sur l'Annexe 2001. En parallèle, nous nous sommes efforcés de rester concentrés sur les aspects financiers du développement durable et sur le rapport de la commissaire à l'environnement. Nous l'avons reçue à deux reprises. Elle reviendra mardi prochain, accompagnée de représentants du ministère des Finances.
Il nous restait une fenêtre très étroite, après en avoir fini avec les textes législatifs et le rapport clé, pour recevoir des témoins-experts à même de nous parler des mesures d'encouragement efficaces dans le régime fiscal des finances, de celles qui sont moins efficaces, des subventions pernicieuses, bref, de toutes ces questions soulevées aujourd'hui par les membres du Comité.
C'est le comité directeur qui a décidé de préparer le terrain pour le Comité et de lui faire entendre des témoins qui pourraient lui donner un prélude en vue de la séance de mardi prochain, qui sera axée sur les questions financières. À titre de président, si vous me le permettez, je souligne que la Table ronde pourrait grandement nous aider en se penchant sur l'absence de mesures concrètes à l'appui du programme de développement durable, sur la question générale des taxes sur les énergies renouvelables et non renouvelables et, enfin, sur la question des subventions pernicieuses. Ces questions composeront le menu de nos débats, et je crois que le Comité bénéficierait grandement de vos lumières et de toute référence supplémentaire à cet égard.
Voilà pour l'explication. De toute évidence, il incombe à la présidence d'obtenir l'information à l'avance, les documents pertinents, etc. C'est évident. Cependant, dans ce cas précis, la décision a été rapide. J'ai pris la décision d'inviter la Table ronde, et j'apprécie hautement que vous ayez donné suite à l'invitation.
J'espère que cette explication vous permet de mieux comprendre à quel point nous devons nous montrer souples devant les orientations du Comité et faire office de facilitateur pour y donner suite. C'est ce qui explique la situation.
Monsieur Wilfert.
À (1050)
L'hon. Bryon Wilfert: Monsieur le président, merci de ces commentaires. Cependant, ce n'est pas la première fois que cette situation se produit. Le comité directeur s'est réuni à 8 h 30 mardi, ce qui laissait amplement de temps au greffier pour réunir le matériel.
Peu importe que l'on soit dans l'opposition ou au pouvoir, il n'est pas question de nous retrouver dans une situation où les membres du Comité ne reçoivent ont à temps l'information dont ils ont besoin pour faire le travail pour lequel ils sont mandatés.
Je comprends, monsieur le président, que les documents doivent être déposés. Nous en avons parlé. Mais c'était à 8 h 30 mardi matin. Nous sommes jeudi et la réunion a commencé à 9 h. Si un délai de 48 heures ne suffit pas pour réunir l'information, sauf le respect que je vous dois, il devient même inimaginable d'inviter des témoins. Ce n'est pas leur rendre justice. Je n'en veux pas à mes interlocuteurs d'aujourd'hui. J'en ai contre le fait que même l'avis a été envoyé tard la veille de la réunion. Il faut revoir nos pratiques, dès maintenant, pour qu'à l'avenir...
Je sais que le président fait de son mieux. Ce n'est pas contre lui que j'en ai. Mais je sais aussi qu'il lui appartient de saisir qui de droit des préoccupations de tous les membres afin que la situation ne se reproduise pas.
Merci.
Le président: Très bien. Je suggère de nous en arrêter là. Je crois que nous avons fait le tour de la question. Merci de l'avoir soulevée, monsieur Wilfert. Nous allons tenter de faire mieux la prochaine fois.
Monsieur Jean.
À (1055)
M. Brian Jean: Nous pourrions transmettre une lettre ou un avis quelconque...
Le président: Oui. Pour clore le sujet, monsieur Jean, vous pourriez transmettre une lettre ou un document d'appui quelconque à cet effet. Ce serait fort utile. Merci beaucoup.
Messieurs et mesdames les membres du Comité, il me reste un dernier point. Lors de notre dernière réunion, on a demandé des précisions sur certains aspects du processus de renvoi au Comité des nominations à des organismes spéciaux tels que la Table ronde et la Société immobilière du Canada. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire que je lise la réponse. Nous en avons des exemplaires dans les deux langues.
J'attends votre avis à cet égard. Encore une fois, on m'a avisé de l'urgence entourant la nomination à la Société immobilière. De fait, si nous n'entendons pas le renvoi afin de rendre une décision, le poste ne sera pas pourvu.
Quelqu'un est-il intéressé à cette audience? Le Comité pourrait entendre M. Rochon, le candidat à une reconduction de mandat, mardi prochain.
Monsieur Mills.
M. Bob Mills: Je ne crois pas que c'est vraiment nécessaire. Je suis plus intéressé par la nomination à la présidence de la Table ronde. C'est l'organisme sur lequel nous avons le plus travaillé et qui nous intéresse le plus.
Le président: Très bien.
Nous allons donc inscrire la Table ronde à l'ordre du jour et nous aviserons le ministre de notre décision à l'égard de la Société immobilière du Canada.
Merci beaucoup, mesdames et messieurs les membres du Comité.
La séance est levée.