Je représente en fait ici l'INSPA, l'Initiative nationale pour le soin des personnes âgées, dont je suis membre. Je suis psychologue, et je travaille dans le cadre d'un programme de soins aux personnes âgées à London, en Ontario, dans un des grands établissements canadiens offrant des lits d'accès prioritaire.
L'Initiative nationale pour le soin des personnes âgées est un réseau international de chercheurs, de praticiens, de personnes âgées, et d'étudiants qui se consacrent à l'amélioration des soins aux personnes âgées au Canada et à l'étranger. L'INSPA est financée grâce à une nouvelle subvention à l'initiative versée par les Réseaux des centres d'excellence.
Nos membres représentent des disciplines et des professions très diverses, notamment la gériatrie, les soins infirmiers, le travail social, la gérontologie, les sciences de la réadaptation, la sociologie, la psychologie, l'élaboration des politiques et le droit. Nous promouvons et facilitons la collaboration interdisciplinaire entre chercheurs et praticiens afin d'améliorer les soins offerts à la population vieillissante au Canada et ailleurs.
L'INSPA met avant tout l'accent sur le réseautage et le transfert de connaissances — autrement dit, son objectif est de mettre en pratique les résultats d'une recherche de qualité.
L'INSPA a trois buts généraux. Le premier est d'aider à réduire l'écart entre la recherche fondée sur l'expérience et la pratique elle-même. Le second est de donner une meilleure formation aux praticiens, d'améliorer les programmes d'enseignement des soins gériatriques, et d'attirer de nouveaux étudiants vers la spécialisation en soins aux personnes âgées. Son troisième but est d'apporter des modifications constructives à la politique relative aux soins aux adultes âgées
Maintenant que j'ai tracé les grandes lignes de l'organisme que je représente, je souhaiterais présenter quelques commentaires de l'INSPA au comité.
L'INSPA tient à féliciter Anciens combattants Canada pour l'attention que ce ministère apporte à l'étude des problèmes du vieillissement, comme en témoigne le travail représenté par le rapport du Conseil consultatif de gérontologie, Parole d'honneur, et l'examen des services de santé pour les Anciens Combattants. Soucieuse de promouvoir cet excellent travail, l'INSPA souhaiterait attirer l'attention du sur trois questions particulières.
Premièrement, nous notons que plusieurs des problèmes qui préoccupent l'INSPA, en particulier, la prestation de soins, le traitement de la démence à domicile, et les soins de fin de vie — ressortent clairement du travail effectué jusqu'à présent. L'INSPA a aussi fait de la lutte contre la violence à l'égard des aînés et de la santé mentale une des priorités des efforts destinés à améliorer le bien-être des adultes âgés.
Les soins de santé aux personnes âgées n'accordent pas une importance suffisante à la santé mentale. C'est pourquoi on a donné la priorité à celles-ci — l'établissement du cadre thématique de l'INSPA ainsi que dans la formation de la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées — une autre organisation dont je suis membre et au conseil d'administration de laquelle j'appartiens. — dans le but précis de promouvoir des améliorations dans cet aspect des soins aux adultes âgés.
La santé mentale est une composante critique de toute stratégie générale de promotion de la santé. Il est bien connu qu'une santé mentale déficiente a des répercussions sur la capacité d'accès aux bienfaits des interventions destinées à accroître, à maintenir ou à rétablir l'autonomie, à améliorer l'autonomie fonctionnelle et à promouvoir la qualité de vie, ainsi que sur la capacité d'assimilation et d'utilisation de ces bienfaits.
En règle générale, les programmes de soins à domicile sont mal conçus pour traiter les problèmes de santé mentale et les maladies mentales. Nous espérons qu'on accordera l'attention qui s'impose à la promotion de la santé mentale dans tout changement apporté au programme pour l'autonomie des anciens combattants qui résulterait des délibérations du comité.
Deuxièmement, nous applaudissons le comité pour l'intérêt qu'il attache à la prestation à un plus grand nombre de bénéficiaires des services offerts par le programme pour l'autonomie des anciens combattants. Nous reconnaissons nous aussi que les services dispensés devaient être fondés sur une évaluation des besoins. Nous notons que l'évolution des besoins au cours de la vie est un élément important à considérer. Pour que la prestation des services demeure appropriée et opportune, il est indispensable d'avoir un processus de surveillance efficace et convivial.
La participation d'adultes âgés à l'élaboration et à la mise en oeuvre du processus de surveillance sera, pensons-nous, indispensable à son succès. La surveillance de routine déclenchée par le passage du temps est importante, mais il est encore plus important de comprendre que l'état de santé des personnes âgées peut changer rapidement, en particulier celui des personnes dont l'autonomie est menacée. Les protocoles d'évaluation fondés sur les besoins qui sont élaborés devraient encourager en permanence l'auto-surveillance et la participation des usagers en cas de changement important. À notre avis, on devrait faire appel au savoir-faire dans le domaine du transfert de connaissances et du réseautage afin d'élaborer des approches d'avant-garde originales au partage des soins dans ce contexte.
Troisièmement, nous sommes partisans de l'utilisation de toute une gamme de formules de garde en établissement pour les personnes âgées, et nous convenons que l'on devrait faire des efforts pour encourager les adultes âgés à conserver leur autonomie le plus longtemps possible, et pour leur permettre de le faire.
Nous notons cependant qu'il est risqué de considérer les foyers de soins de longue durée comme des résidences de dernier ressort. Cela risque en effet d'aggraver l'opprobre qui s'attache déjà à la formule des soins en établissement. Pour bien des raisons, un nombre élevé d'anciens combattants et d'autres adultes âgés ont besoin de soins complets en établissement pour pouvoir survivre. On a dit qu'une société peut se juger à la manière dont elle prend soin de ses membres les plus vulnérables.
Les communications et la publicité concernant les changements au système actuel ne devraient pas donner l'impression que ces anciens combattants et leurs familles qui n'ont pas besoin d'être placés dans des établissements de soins de longue durée, ont mieux réussi que ceux qui en ont besoin. Nous notons également qu'il faudra s'assurer que l'accent que l'on met désormais sur la promotion de la santé et sur la prestation de services novateurs est aussi apprécié pour les résidents des installations à long terme que pour les personnes qui demeurent dans leurs propres collectivités.
Je vous remercie de m'avoir permis de présenter ces vues au comité.
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Deux choses me viennent à l'esprit en réponse à votre question. La première est que le placement en établissement est souvent rendu nécessaire par toute une combinaison de facteurs, dont beaucoup dépendent du dispensateur de soins. Donc, si un dispensateur de soins qui s'occupe d'une personne atteinte de démence progressive fait une chute et se retrouve à l'hôpital, il y a de plus fortes chances que l'ancien combattant souffrant de démence devra être placé dans un foyer de soins à long terme puisqu'il n'y a plus personne pour s'occuper de lui.
Il y a donc deux problèmes: l'évolution de la maladie et la stabilité des facteurs de protection. Dans l'évolution de la démence, certaines choses peuvent se produire qui font qu'il devient de plus en plus difficile de s'occuper d'une personne à domicile, que la situation soit stable ou non, c'est-à-dire lorsque certains de ce qu'on appelle les symptômes d'ordre psychologique et comportemental commencent à être plus marqués, ce qui se produit lorsque la démence s'aggrave. Il s'agit de l'errance, de l'agression, des comportements inappropriés et des hallucinations — le genre de comportements et de symptômes qui peuvent devenir bien plus difficiles à gérer dans un foyer et dans un environnement communautaire. Donc, lorsque la maladie progresse et que ces symptômes se manifestent de plus en plus fréquemment, il peut devenir nécessaire de recourir au placement en établissement, même si la famille ou le conjoint n'a pas changé.
En revanche, la maladie peut parfois demeurer assez stable mais si le dispositif de prestation de soins change, le placement en établissement devient soudain et nécessaire.
Je reviens à votre question précédente au sujet des recherches qui ont été effectuées. Je ne pense pas qu'on se soit beaucoup attardé à déterminer s'il y avait une incidence plus élevée de démence chez les anciens combattants que dans les autres populations. Bien sûr, de nombreuses recherches ont été faites, en particulier aux États-Unis. Elles portaient sur les anciens combattants qui s'en sont fort bien sortis lorsqu'ils étaient d'âge moyen — ils travaillaient, ils avaient fait une bonne carrière et avaient pris une retraite précoce — et tout d'un coup, ils avaient été frappés de démence. La démence, avec ce qu'elle implique de perte de capacité d'adaptation, de raisonnement et de fonctionnement, combinée aux pertes cognitives accompagnant le vieillissement, peut provoquer une situation assez explosive qu'il devient fort difficile de contrôler. Vous pouvez donc avoir affaire à une situation dans laquelle les tensions normales dues au vieillissement se trouvent exacerbées.
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Bonjour, madame Gibson. Je vous remercie d'être venue. Votre présentation était fort intéressante.
Si j'ai bien compris, vous êtes favorable aux soins à domicile. Vous avez dit qu'il était important pour les gens âgés de demeurer le plus longtemps possible dans la communauté ou à domicile. Avons-nous les personnes qualifiées pour les aider, celles qu'on appelle les aidants naturels?
Dans le comté de mon ami Gérard Asselin, par exemple, il y a un dossier problématique. Un certain M. Anthonin Lévesque, ancien combattant âgé, a de sérieux problèmes. Son épouse, qui a à peu près son âge, n'est plus capable, physiquement, de prendre soin de son mari, à tel point qu'on a été obligé de le placer quelques semaines dans un centre quelconque, avant de le rapatrier chez lui. Comment faire pour résoudre une telle situation?
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C'est exactement pour cette raison que nous devons veiller à envisager un continuum de soins offrant des options multiples et nous assurer que nous prenons la décision qui permet d'offrir les soins appropriés en fonction de la situation du sujet. Si cette personne a le genre de besoins qui peuvent être aisément satisfaits par les services disponibles, il lui sera possible de rester chez elle plus longtemps. Mais lorsqu'on s'aventure dans le domaine des soins de santé mentale et des problèmes de démence, etc., les services de soins à domicile existants ne peuvent pas nécessairement offrir l'aide professionnelle requise.
Chez les professionnels des soins de santé, la question des ressources humaines pose un gros problème lorsqu'il s'agit de fournir des services à domicile acceptables. C'est la raison pour laquelle, dans votre processus d'évaluation, vous devez vous assurer que vous jaugez le besoin dans une perspective très générale. Ce n'est pas simplement une question de fonction — ce que vous pouvez faire dans des circonstances idéales — c'est la question de savoir ce dont vous disposez vraiment et le genre de soutien dont vous aurez besoin.
Il s'agit aussi de reconnaître que l'entrée dans un établissement de soins à long terme, n'est pas nécessairement définitive. Les soins à long terme sont bien souvent une plaque tournante. Une personne peut avoir besoin d'occuper un lit de soins à long terme pendant un certain temps et peut ensuite réintégrer la collectivité, à quelque stade de sa vie qu'elle se trouve, selon les ressources dont elle peut se prévaloir.
Je crois qu'il est indispensable de faire preuve de beaucoup plus de souplesse dans la manière dont nous considérons les différentes options qui s'offrent dans le continuum des soins et dans la manière dont ces options peuvent se recouper et coexister pour répondre à des besoins différents dans le temps.
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Merci, monsieur le président.
Maggie — si vous me permettez de vous appeler Maggie — je vous remercie vivement d'être venue aujourd'hui.
Selon d'autres témoignages, il n'y a tout simplement pas assez de personnes comme vous. Il est bien évident, si nous avons tous ces beaux plans, même si le gouvernement et l'opposition acceptent que x dollars soient consacrés à leur financement, et même si nous donnons suite à toutes les recommandations que nous avons entendues, sans les ressources humaines physiques requises pour passer à l'action, ce pourrait être peine perdue.
Quelle recommandation pouvez-vous faire aux gouvernements fédéral ou provinciaux afin qu'ils encouragent les gens à faire carrière dans ce secteur, à y voir une occasion d'apporter une aide, de gagner correctement leur vie, comme c'est manifestement votre cas, et à les convaincre qu'il s'agit 'une carrière valable et passionnante? Année après année, nous semblons avoir les mêmes difficultés à amener le gens à choisir une profession dans ce secteur. Quelles recommandations voudriez-vous que nous transmettions?
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Je veux parler du secteur de la psychologie. Si vous consultez le site de l'American Psychological Association aux États-Unis, vous verrez que celle-ci offre une foule de documents d'information et de promotion destinés à encourager les gens, en particulier les étudiants qui s'intéressent au domaine de la santé mentale, à faire une carrière dans le secteur des soins aux personnes âgées ou dans celui de la géronto-psychologie.
La Société canadienne de psychologie fait maintenant plus d'efforts dans ce sens, efforts auxquels je participe moi-même. Je suis convaincue qu'il faut mettre l'accent sur le système éducatif et qu'il est indispensable de mieux sensibiliser les gens à l'intérêt, au potentiel et à la valeur des carrières dans le domaine des soins aux adultes âgés, et je considère qu'il faut le faire plutôt avant qu'ils aient choisi une autre spécialité, avant qu'ils aient entrepris des études de deuxième et troisième cycles, qu'ils aient déjà décidé de ce qu'ils allaient faire et se soient engagés sur une voie dont il est difficile de s'écarter.
Il n'y a pas que les professions de la santé mentale qui connaissent des difficultés. Le secteur de la gériatrie a aussi du mal à recruter suffisamment de personnes désireuses de se spécialiser dans ce domaine.
Les gens se spécialisent en cours d'études; il conviendrait donc de travailler avec les collèges et les universités afin de susciter plus d'intérêt et de créer plus d'options qui orienteraient les étudiants dans ces directions.
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Malheureusement, je ne vais pas pouvoir vous donner de réponse satisfaisante, parce que je travaille en fait au service de gériatrie, le service de soins à long terme de cet hôpital, dans le cadre du programme de soins aux anciens combattants. Je ne travaille pas dans le programme sur les traumatismes liés au stress professionnel. Mais il y a certainement des personnes tout à fait qualifiées pour vous décrire ce programme en détail. Ma spécialité est la gériatrie.
Mais pour revenir à votre question au sujet de ce qui rend différents les anciens combattants, il y a un des aspects des soins à long terme qui me paraît particulièrement important, c'est le fait que les anciens combattants qui bénéficient de ces soins sont en majorité des hommes alors que dans la population générale, il s'agit surtout de femmes.
Cela va changer pour plusieurs raisons, notamment parce que la démographie des taux de mortalité change — les hommes vivent plus longtemps — et notamment aussi parce que les structures familiales sont en train de changer. Le scénario habituel dans lequel l'épouse plus jeune s'occupe d'un conjoint plus âgé qui pourra ainsi vivre toute sa vie chez lui, est aussi en train de changer à cause de l'évolution de la structure familiale.
L'étude de la population des anciens combattants qui bénéficient de soins offre une excellente occasion de comprendre les besoins des hommes vieillissants et de les extrapoler pour déterminer ce que seront les besoins des hommes vieillissants de la population générale au cours des prochaines décennies lorsqu'un équilibre commencera à s'établir entre le nombre d'hommes et de femmes qui vivent jusqu'à un âge avancé.
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Oui, je crois que la plupart d'entre nous le savent.
Je voudrais reprendre un point que mon collègue Peter a déjà soulevé. Pourriez-vous nous en dire plus sur les soins professionnels?
Un des soucis constants est de savoir où obtenir ces soins professionnels. C'était une des questions qui a été posée.
Dans chaque ville de l'Ontario — et c'est probablement à peu près la même chose dans tout le pays — lorsque nous cherchons un médecin, ou un spécialiste quelconque, mais il s'agit toujours de médecins, chaque ville a des difficultés à répondre aux besoins médicaux de la collectivité. Lorsque les mêmes problèmes se posent dans nos établissements de soins à long terme, comment peut-on leur donner les moyens de répondre à nos besoins de services professionnels?
Auriez-vous des recommandations à faire sur la manière de partager, de collaborer avec les collectivités, de travailler avec le grand public, ou simplement d'obtenir les soins requis?
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, madame Gibson. Nous sommes heureux de votre présence et nous apprécions ce que vous avez dit au sujet du problème de la santé mentale et de son importance pour cette étude.
J'ai une petite question à vous poser. J'ai été frappé par les statistiques présentées par les représentants de Santé Canada lorsqu'ils ont comparu devant nous. Je ne sais pas exactement d'où qu'elles venaient — je n'ai pas le document devant moi — mais selon les témoins, la vaste majorité des personnes âgées appartenant à une certaine catégorie ont déclaré qu'elles étaient en bonne santé lorsqu'on les a interrogées. Pourtant, selon une autre statistique, le même groupe comportait un pourcentage élevé de personnes souffrant d'au moins quatre maladies chroniques et un pourcentage encore plus élevé de personnes atteintes d'au moins une maladie chronique. Or, lorsqu'on leur a demandé ce qu'elles pensaient de leur santé générale, elles ont répondu qu'elles se portaient très bien.
Je leur ai donc posé la question, et on m'a répondu qu'il s'agissait d'un simple état d'esprit. Je continue à trouver intéressant que l'on puisse dire « Je suis en bonne condition, même si j'ai quatre maladies chroniques ». Pourriez-vous faire un commentaire à ce sujet?
Ma seconde question serait la suivante. Comme nous parlons des anciens combattants et des programmes axés sur ceux-ci, nous savons qu'il doit y avoir certaines similarités entre les personnes âgées, les aînés et le sous-groupe des anciens combattants. Mais si nous nous en tenons à ces derniers et si nous parlons uniquement de programmes axés sur les anciens combattants, nous savons que certains de ces programmes sont similaires à ceux qui sont conçus pour des populations de même type. Devrions-nous nous concentrer sur quelque chose de spécifique dans le cas des anciens combattants âgés, qui sont la grande majorité, afin d'optimiser nos ressources, le temps dont nous disposons et nos efforts?
Voilà mes deux questions.
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Pour répondre à votre seconde question, il s'agit plutôt d'établir, pour les populations d'anciens combattants, des programmes qui sont... C'est une population bien circonscrite; vous pouvez donc concevoir pour elle des programmes idéaux, des programmes modèles axés sur différents problèmes. Nous ne le savons pas parce qu'en général, nous n'avons pas de programmes idéaux, de programmes modèles visant les personnes âgées qui ont besoin d'aide, mais nous pouvons au moins envisager de créer des programmes idéalement adaptés aux besoins des anciens combattants qui constituent un groupe bien défini, et lorsque nous verrons que ces programmes fonctionnent, que nous comprendrons ce qui les fait fonctionner, les raisons pour lesquelles ils sont utiles et ce qui fait qu'ils le sont, que ce soit parce qu'ils sont axés sur les hommes ou sur des relations de longue durée entre conjoints, ou encore sur l'esprit de camaraderie qui unit les anciens combattants, alors seulement serons-nous en mesure de tirer des leçons de ces programmes et de déterminer comment leur application pourrait être étendue à l'ensemble de la population.
Les études internationales portant sur les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale semblent montrer que l'esprit de camaraderie a beaucoup contribué à protéger les anciens combattants de nombreux pays. Cela tient au fait que leurs services ont été reconnus et continuent à l'être et qu'ils sont salués dans le cadre de diverses manifestation telles que les cérémonies du souvenir. Le sentiment, chez eux, qu'on les apprécie et qu'on tient à leur prodiguer des soins est en fait lié à la bonne santé mentale de ceux qui sont confrontés aux nombreux effets du vieillissement.
Cela vaut vraiment la peine de consulter les études faites sur les populations d'anciens combattants en Finlande, en Russie, en Grande-Bretagne et en Amérique, car ces études font ressortir un certain nombre de points communs. L'un d'entre eux semble être que si vous avez vécu un événement vraiment traumatique tel qu'une guerre, le fait qu'on se souvienne de ce que vous avez fait et qu'on vous en est reconnaissant sont deux facteurs qui constituent une certaine forme de protection pendant toute votre vie. Cela diffère de la situation du membre ordinaire de la collectivité qui a peut-être subi de nombreux traumatismes sans pour cela que son expérience ait été systématique, organisée et reconnue.
Voilà donc quelques-uns des avantages du groupe des anciens combattants que nous pourrions à mon avis exploiter pour élaborer des programmes modèles de soins de santé à l'intention d'une population vieillissante. Je crois que c'est ce qu'Anciens Combattants Canada a essayé de faire à de nombreux égards.
Excusez-moi; j'ai complètement oublié votre première question. Quelle était votre question?
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Bonjour, madame Gibson. J'ai beaucoup aimé votre présentation, malgré le peu de temps qui vous était alloué, et je tiens à vous en féliciter. On aurait peut-être pu vous donner quelques minutes de plus, compte tenu de l'intérêt qu'a suscité votre présentation chez les membres du comité.
On sait aujourd'hui qu'une fille ou un garçon qui décide de joindre les forces armées est sous la responsabilité du ministère de la Défense nationale. Lorsqu'il quitte la Défense nationale, cette responsabilité est transférée au ministère des Anciens combattants.
Comme le disait M. Perron tout à l'heure, il y a peu de formation et d'information sur les conséquences et les problèmes de santé mentale qui peuvent survenir.
Par exemple, dans un article, on apprenait qu'aux États-Unis, au moins 6 256 personnes ayant servi dans l'armée ont mis fin à leurs jours en 2005, soit une moyenne de 17 personnes par jour. La moyenne au sein de la population est de 8,9 pour 100 000 personnes, et la moyenne pour les anciens combattants aux États-Unis est de 18,7 à 20,8, c'est-à-dire le double.
Dans mon comté, les anciens combattants manquent d'information. Ils ont d'abord fait un séjour au sein des Forces canadiennes. Ils sont allés au combat. Ils ont un numéro de dossier à titre d'anciens combattants, mais aujourd'hui ces personnes sont âgées, souvent handicapées et connaissent une perte de qualité de vie. Elles sont donc laissées à elles-mêmes parce qu'elles ne savent pas qu'un programme de soins de santé existe pour les anciens combattants. Elles ne savent pas qu'elles pourraient recevoir une espèce de compensation financière ou que différents programmes existent. Malheureusement, les anciens combattants sont laissés à eux-mêmes dès qu'ils quittent la Défense nationale.
Ils le font au détriment de leur santé et de leur famille. Plusieurs d'entre eux se découragent et mettent fin à leur vie. Je pense que les anciens combattants devraient être à tout le moins informés de l'aide financière provenant du gouvernement fédéral, et ce, dès qu'ils joignent les forces armées. Également, il faudrait qu'il y ait un suivi constant auprès des anciens combattants pour éliminer les problèmes de santé ou, du moins, leur fournir les services auxquels ils ont droit en tant qu'anciens combattants.
Si un ancien combattant de mon comté venait me voir à mon bureau et me demandait si je peux lui dire où se trouve au Québec un endroit où on peut obtenir tous les renseignements pertinents pour les anciens combattants, je serais un peu démuni et je devrais me tourner vers M. Perron — un peu comme je l'ai fait ce matin — pour pouvoir communiquer avec le ministère des Anciens combattants.
Je pense qu'il y a un manque considérable d'information sur la santé, les suivis, les programmes et l'aide financière auxquels les personnes ont droit. Souvent, des gens sont incapables de tenir le coup et décident de mettre fin à leur vie. Il y a des cas de suicide, mais il y a également des cas de meurtre.
J'aimerais que vous me disiez comment le gouvernement pourrait améliorer le système fédéral afin d'aider nos anciens combattants et de les rassurer sur le plan des programmes de santé.
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Je peux m'appuyer sur une certaine expérience dans ce domaine.
Je ne crois pas être en mesure de dire ce que le gouvernement devrait faire, mais un des phénomènes particulièrement frappants chez les jeunes, c'est leur dépendance à l'égard d'Internet. Les personnes âgées sont moins dépendantes, mais les jeunes consultent Internet lorsqu'ils ont besoin d'information. Et à mon avis, c'est une bonne chose que le public soit bien informé. Une des meilleures choses que nous puissions faire c'est de mettre l'information sur des sites conviviaux de manière à ce que tous ceux qui le souhaitent puissent y avoir accès. Après tout, ni vous ni moi, ni personne d'autre n'est capable de retenir toute l'information existante sur tous les services, programmes et différentes questions, et les soins des vétérans n'est qu'une des questions auxquelles vous devez faire face.
Je ne peux pas vous parler d'une clinique avec laquelle je n'ai aucun lien, mais il serait assez facile d'obtenir l'information nécessaire. Je suis d'accord avec vous, il est bon d'avoir plus d'information; l'accès à Internet est la voie de l'avenir, et la solution est d'avoir des sites de qualité facilement accessibles pour tous. S'il y a des informations auxquelles le public devrait avoir accès et vers lesquelles vous devriez pouvoir les aiguiller, il faut pouvoir trouver un moyen de les mettre sur le Web.
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Oui. La solitude est un énorme problème pour les adultes âgés, et ce problème n'est pas facile à résoudre, car il est en partie le résultat des circonstances.
Prenez les statistiques: 2 000 anciens combattants meurent chaque mois — je crois que c'était la statistique présentée dans le rapport du Conseil consultatif de gérontologie. Beaucoup d'anciens combattants âgés se retrouvent seuls à la suite du décès de leur partenaire. Un des avantages de la vie communautaire pour les personnes âgées est que si l'environnement est conçu et programmé de manière appropriée, il leur est possible de combattre la solitude. Donc, le problème du maintien de ces personnes dans la communauté peut être dû à un changement de la situation familiale ou de celle de leurs amis, si bien que, sans que ce soit de leur faute, elles se retrouvent socialement isolées et seules. Les formules de vie communautaire, qu'il s'agisse de résidence-services, de soins à long terme ou d'autres choses, qui offrent des programmes de qualité, peuvent leur redonner goût à la vie et leur offrir une nouvelle possibilité de participer, de s'impliquer et de jouir vraiment de leurs dernières années, alors que cela aurait été impossible pour ces personnes âgées, si elles vivaient encore de manière autonome au sein de la collectivité.
Il faut donc se montrer prudent lorsque l'on veut promouvoir l'autonomie et la vie communautaire et s'assurer que les gens ne survivent pas au réseau de soutien dont ils disposent. Ils en arrivent au point où, sans que ce soit de leur faute, ils ont besoin d'une aide pour se créer un autre réseau de soutien pour continuer à avoir des contacts sociaux, des amis et tout le reste, au soir de leur vie. La solitude est un énorme problème.
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Oui, quelques minutes de plus.
J'ai une mère de 94 ans qui vit dans un de ces établissements. Je vais lui rendre visite le plus souvent possible mais, malheureusement, elle se trouve à huit heures de route de l'endroit où je réside; mes visites ne sont donc pas très fréquentes. Mais je vais la voir et j'observe ce qui se passe.
Je note qu'un des plus gros problèmes psychologiques qui se posent pour elle et ses amis est, je crois, le passage de la situation où on est utile aux autres et où on est capable de les aider, à la situation inverse où l'on a besoins d'aide au lieu de pouvoir en offrir. En général, lorsque je parle aux résidents de cet établissement, en particulier les hommes âgés, ils me disent qu'ils se sentent totalement inutiles. Ils aimeraient pouvoir réparer quelque chose; ils aimeraient fabriquer ou construire quelque chose, ils aimeraient tout simplement pouvoir faire quelque chose. Ce sont des personnes actives pour qui il est devenu tout d'un coup impossible de faire quoi que ce soit.
Je pense souvent que certains de ces établissements pour personnes âgées devraient avoir une activité utile pour la collectivité, peut-être avoir un atelier dans lequel elles pourraient fabriquer des lampadaires qu'on installerait ensuite dans toute la ville. Ces gent-là pourraient alors dire « Regardez, c'est nous qui les avons fabriqués. » Cela leur donnerait quelque chose à faire. Existe-t-il quelque chose de ce genre? Encore une fois, je me contenterai d'une réponse générale.
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Les grands établissements de soins pour personnes âgées de notre pays, tels que Parkwood — il y en a 12 à 14 — sont extrêmement bien équipés. Ils proposent toutes sortes d'activités. Parkwood, par exemple, a un atelier de travail du bois, un atelier de modelage, un atelier d'art textile, une piste de quilles, une taverne et un vert pour golfeurs. Une foule d'activités récréatives et de loisirs est offerte. La devise de l'établissement est en quelque sorte « C'est votre vie. Vous êtes ici chez vous. »
Votre qualité de vie est importante. Vous avez besoin d'activités récréatives attrayantes pour vous, ce qui signifie qu'il faut pouvoir offrir une large gamme d'activités; vous devez aussi pouvoir participer, si vous le voulez, à des activités plus proche d'un travail normal, par exemple fabriquer ou construire quelque chose, intervenir dans la programmation intergénérationnelle, etc.
La notion selon laquelle les centres de soins en établissement doivent offrir toute une gamme d'activités aux résidents pour que ceux-ci y trouvent du plaisir et un sens à la fin de leur vie, est bien acceptée dans les études en gérontologie et fait l'objet de nombreuses études sur l'importance de ces activités pour le bien-être et la santé. Met-on toujours cela en pratique? Pas toujours. Pas partout.
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Cela m'étonnerait fort que je prenne cinq minutes.
Je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir comparu aujourd'hui, madame Gibson.
Je m'excuse humblement de mon arrivée tardive. Je prends très, très au sérieux, les questions intéressant les anciens combattants.
J'ai été retardée parce que j'ai eu le plaisir de rencontrer M. Guy Gruwez, un visiteur Belge et son épouse. M. Gruwez vient de Ypres, en Belgique. Il est président honoraire de la Last Post Association de ce pays, présidence qu'il occupe depuis 40 ans. Il a pu rencontrer le premier ministre, et j'ai eu l'honneur de l'accompagner.
Je vous prie donc d'excuser mon retard. Je vous donne ma parole que je lirai votre témoignage de la première à la dernière page. Je sais de toute façon que j'ai des collègues compétents qui m'ont remplacé.
Je suis revenu juste à temps pour entendre une remarque de M. Asselin, qui rend lui aussi visite à notre comité aujourd'hui. Il a parlé avec beaucoup d'émotion des anciens combattants, et je lui en sais gré.
Il y a une chose qui m'inquiète. Vous avez dit que 70 anciens combattants se suicident chaque jour. J'ai demandé au greffier d'où venait cette information; apparemment, elle figure dans un journal. Je voudrais que vous déposiez ce document. Ce chiffre me paraît absolument obscène, et je tiens absolument à ce que l'on tire cela au clair.
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Merci, monsieur le président.
Nous avions parlé plus tôt de la façon de trouver les futurs psychologues qui aideraient nos aînés et nos anciens combattants. Vous avez brièvement parlé des douloureuses expériences de la guerre et de l'aura qui les entoure, du fait que l'on marque le souvenir de ces expériences en organisant des manifestations telles que la Semaine des anciens combattants; vous avez aussi parlé de la fierté qu'inspirent aux anciens combattants leurs médailles et les remerciements de la population.
Ce qu'il y a de louable au Canada, depuis un certain nombre d'années, c'est que l'on prend de plus en plus conscience de l'importance de nos anciens combattants. C'est probablement parce que d'anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée vieillissent et que, chaque jour, nous en perdons un nombre considérable, à cause de leur âge ou de la maladie.
En ce qui concerne les personnes qui suivent une formation en psychologie, en particulier lorsqu'il s'agit d'aider des anciens combattants et leurs familles, recommanderiez-vous que ces étudiants aient, sinon une expérience de la vie militaire, du moins la possibilité d'être intégrés aux forces militaires lorsque celles-ci sont déployées, que ce soit en Afghanistan, à Haïti, en Bosnie, ou ailleurs, de manière à ce qu'ils puissent vivre, très jeunes, certaines des difficultés auxquelles ces hommes et femmes seront aux prises 20 ou 40 ans plus tard.
La raison pour laquelle je dis cela c'est que l'étude sur le SSPT nous a montré que ce symptôme peut vous affecter immédiatement ou se manifester bien des années plus tard. Nous nous sommes rendu compte que lorsque ces psychologues vont parler aux personnes qui se trouvent dans des centres de traitement des traumatismes, il serait bon que ceux qui répondent aient une idée de la situation qu'ils avaient eux-mêmes connue.
Si le gouvernement décidait de financer ce type d'activité, afin d'aider ceux qui se préparent à devenir des psychologues auprès des militaires, des anciens combattants et de leurs familles, seriez-vous prêt à recommander qu'ils vivent une expérience d'intégration?
Bien. À moins que d'autres membres du comité ne veuillent ajouter quelque chose, je crois que nous avons fait le tour de la question.
Avant de nous quitter, nous devons aborder certains points concernant notre prochain voyage. Des dossiers vous seront distribués et notre agent de la logistique pourra répondre à toutes vos questions.
Bien, je remercie donc notre témoin pour son allocution et pour avoir répondu à nos questions. Je sais que M. Epp, en particulier, vous est reconnaissant d'avoir pris le temps de répondre à ses questions. Vous vous êtes montrée très conciliante. Merci beaucoup.
Si cela ne vous ennuie pas, je suis certain que des membres du comité aimeraient vous remercier personnellement. Nous avons beaucoup apprécié votre présence.
Avant de partir, j'aimerais discuter de certains détails de notre prochain voyage ainsi que de notre itinéraire.
À l’intention de M. Stoffer et de ceux qui ignorent comment cela fonctionne, je précise que Kate, qui se trouve actuellement au fond de la salle et qui nous a apporté les dossiers tout à l'heure, ne peut pas témoigner. Alors si vous avez des questions, la procédure officielle consiste à les adresser au président.
Je vous demande à tous d’ouvrir le dossier et de prendre l’itinéraire. Comme vous le voyez, le dossier contient aussi un chèque couvrant les indemnités quotidiennes, etc. Je le survole rapidement. Il y a le calcul des indemnités quotidiennes en anglais et en français, le nom des personnes qui vont nous accompagner. Il y a même le nom complet de Kate: Kate Bourke. L'itinéraire s'y trouve aussi. J’examine rapidement le contenu du dossier, je suppose que vous en faites autant. Il y a des cartes.
Patientez une petite seconde, monsieur Epp, je veux simplement me familiariser avec les documents avant que nous commencions à en discuter.
Bien, alors tel que convenu, nous entendrons d'abord M. St. Denis, puis M. Epp.
Monsieur St. Denis.
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Désolé de vous interrompre, mais nous devons parler logistique.
Si j'ai bien compris, nous voulions rester sur la base de Comox même, mais son commandant n’était pas très chaud à cette idée. D'après ce que j'ai compris, la base accueille rarement une telle délégation et l’on craint que les chambres ne soient pas à la hauteur.
Est-ce que la question du logement a été réglée?
D'accord, nous avons réservé au Crown Isle. Le comité doit se prononcer sur la question. Les chambres sont réservées.
Je ne doute pas, monsieur, qu'en insistant un peu auprès de vos collègues, vous réussissiez à les gagner à votre cause.
Y a-t-il d'autres questions, des commentaires, des réflexions?
Bien, écoutons donc madame Hinton.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai parlé tout à l'heure de Guy Gruwez. Le comité compte de nouveaux membres et quelques remplaçants alors, si vous le permettez, je prendrai une minute pour brosser un portrait de ce monsieur.
M. Gruwez est le président d’honneur de l'association belge Last Post et il occupe ce poste depuis 40 ans.
Cela fera bientôt 80 ans que les membres de cette association organisent une cérémonie que je qualifierai de remarquable, en l'honneur des Canadiens qui ont combattu et qui ont trouvé la mort en Belgique pendant la Première Guerre mondiale. Chaque soir sans exception, des membres de l'association jouent le Last Post devant des centaines de citoyens et de touristes réunis au monument commémoratif de la Porte de Menin.
Sur le monument figurent les noms de 7 000 Canadiens qui ont perdu la vie au cours de la Première Guerre et qui n’ont pas de sépulture connue. Voilà de quoi je voulais vous parler.
Si vous ne connaissez pas la porte de Menin et n'avez jamais eu l'occasion de la visiter à titre personnel ou en tant que membre du comité, je vous recommande vivement de le faire. Quand j'y suis allée... Le monument est coiffé d'un immense dôme ouvert d'où tombaient doucement des milliers de coquelicots pendant qu'on entendait le Last Post. Le seul fait d'en parler me donne la chair de poule.
Alors si vous en avez l'occasion et que vous souhaitez mesurer la gratitude des pays étrangers à l'égard des Canadiens et des Canadiennes qui ont bravement combattu, c'est une expérience inoubliable.
Merci de m'avoir permis d'ouvrir cette parenthèse.