:
Honorables députés du Parlement canadien, je suis le lieutenant-colonel Matthias Reibold. Je suis l'attaché de défense de la République fédérale d'Allemagne au Canada.
C'est pour moi un grand honneur et un plaisir de prendre la parole devant vous au sujet des affaires des anciens combattants en Allemagne.
[Français]
Bonjour messieurs, dames, honorables membres du Parlement canadien.
Je suis le lieutenant-colonel Matthias Reibold et j'occupe le poste d'attaché de défense de l'Allemagne. C'est un grand honneur pour moi d'être parmi vous aujourd'hui. Je sais que vous êtes bilingues, mais mon français est très pauvre. C'est la raison pour laquelle je vais m'adresser à vous uniquement en anglais.
[Traduction]
Permettez-moi de commencer par les conscrits. En Allemagne, un conscrit gagne 7,50 € par jour, soit l'équivalent de 12 $ canadiens. Il est logé et nourri et son équipement lui est fourni. Il peut aussi bénéficier gratuitement du transport public entre son lieu de résidence et sa caserne. S'il est marié, il gagne davantage. Son appartement est payé par les forces armées et il a accès au service des soins de santé militaires gratuitement. Advenant qu'il subisse une blessure pendant sa période de service, il aura droit à des soins médicaux gratuits fournis par l'armée jusqu'à concurrence de trois mois après la fin de ses neuf mois de service. S'il devient handicapé, il recevra une pension de base modulée selon la gravité de son handicap. Dans certains cas, il pourra recevoir une indemnité unique — par exemple, s'il s'adonne à une activité dangereuse, comme le parachutisme. S'il meurt dans un accident, sa femme touchera une pension de veuve et ses enfants, une pension d'orphelin. En outre, ses parents pourraient aussi recevoir une pension, si c'était lui qui s'en occupait. De plus, son emploi est protégé. Autrement dit, il ne perd pas son emploi pendant qu'il est affecté au service militaire. Toutes les autres cotisations qui courent pendant cette période, comme l'assurance-santé, le régime de pension et l'assurance-emploi, sont payées par le gouvernement.
Je précise que ces conscrits ne participeront jamais à une mission à l'étranger, comme en Afghanistan ou au Kosovo.
Je passe au second groupe. Les conscrits qui veulent servir sur une base volontaire entre 11 et 23 mois bénéficient des mêmes avantages que tous les autres conscrits. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi il est difficile de trouver un terme adéquat qui définit ces conscrits. Je les appellerai des volontaires temporaires. Ces soldats reçoivent la même rémunération que les soldats réguliers, selon leur rang. Ils sont affectés à des missions à l'étranger. S'ils subissent une blessure au cours de leur période de service, ils ont droit à des soins médicaux gratuits fournis par l'armée pendant au moins trois ans après l'expiration de leur service.
Pendant leur mission à l'étranger, trois choses peuvent arriver à un soldat faisant partie de ce groupe. Premièrement, il pourrait être kidnappé ou gardé en captivité. Si cela se produit, il continuera de recevoir son salaire aussi longtemps que durera cette situation et, par la suite, il touchera une indemnité supplémentaire à titre de compensation pour ses souffrances. Ceux qui ont subi des blessures graves à la suite d'incidents survenus pendant leur mission à l'étranger touchent une indemnité pouvant aller jusqu'à 80 000 €. Si l'assurance personnelle, médicale ou l'assurance-vie du soldat refuse de l'indemniser en raison d'une clause sur les risques liés à la guerre, les forces allemandes lui offriront une couverture jusqu'à concurrence de 250 000 €.
Le troisième groupe englobe les conscrits qui servent pendant de longues périodes, soit de deux ans à 20 ans. Je les appellerai les soldats réguliers ou non professionnels. Ils bénéficient des mêmes prestations que les conscrits susmentionnés. En outre, ils reçoivent un plein salaire et leur équipement est gratuit. Ils ont également accès à des services médicaux gratuits fournis par des médecins militaires. D'ailleurs, le coût des soins de santé de leur famille est payé jusqu'à concurrence de 80 p. 100 par les forces armées. S'ils doivent déménager, leur déménagement est payé. On leur remet aussi une carte qui leur permet de voyager à moitié prix. S'ils sont loin de leur famille, les coûts liés à leur retour à la maison toutes les deux semaines, en automobile ou en avion, sont aussi couverts.
L'avantage principal dont bénéficient ces soldats réguliers tient à ce qu'ils reçoivent une fois qu'ils ont quitté l'armée. À la fin de leur service, ils obtiennent un montant d'argent supplémentaire, une formation plus poussée et des études payées. Selon la durée de leur service, ce régime s'applique de sept mois à cinq ans après l'échéance de leur période de service. Ils peuvent donc étudier à l'université ou suivre une formation d'apprenti. Ils reçoivent 75 p. 100 de leur salaire au moment de leur départ et la totalité des frais de scolarité sont couverts. Un soldat qui a servi plus de 12 ans peut aussi poser sa candidature pour un emploi dans les services gouvernementaux. Cela aussi est réglementé par la loi.
Lorsque ces soldats quittent les forces armées, les coûts liés à l'assurance-retraite, à l'assurance-santé, à l'assurance-emploi et à l'assurance-soins infirmiers sont payés rétroactivement, de sorte que le soldat, homme ou femme, n'est pas désavantagé par rapport aux fonctionnaires. En cas de décès, les personnes à charge survivantes reçoivent tout l'argent qu'il aurait reçu s'il avait terminé son contrat.
J'avoue qu'il est très difficile de traduire les synonymes allemands ou la terminologie propres à notre bureaucratie. Au besoin, j'utiliserai des expressions qui décrivent les faits et qui faciliteront la compréhension de tous.
Les forces armées allemandes ont subi une transformation que j'estime réussie. Vouées à la défense du pays au cours de la guerre froide, elles participent maintenant à des missions sur la scène internationale dans le contexte des Nations Unies, des nations européennes et de l'OTAN. Au cours de cette transformation, il a aussi été nécessaire d'adapter notre législation concernant la couverture sociale et le régime de soins de santé de l'ensemble de nos soldats.
Tous les soldats allemands, hommes et femmes, font partie intégrante de notre système politique. En vertu de ce principe, il est normal qu'à l'instar de tous les autres citoyens allemands, ils bénéficient des avantages sociaux communs de notre système. Mais à la différence d'autres catégories ou groupes professionnels, les militaires effectuent un travail qui comporte des tensions et des risques additionnels. Voilà pourquoi il est important qu'ils aient accès à des prestations spéciales offertes par le gouvernement. Encore là, cela correspond à l'idée que nous nous faisons de notre société. Voilà pourquoi les législateurs allemands accordent une importance particulière à la situation spéciale de nos soldats. Par conséquent, nous avons modulé ou actualisé plusieurs lois, notamment la loi sur les militaires et la loi sur les avantages sociaux des militaires. De plus, une loi relativement récente vise à aider les soldats blessés, à la suite d'un accident ou autrement, ou décédés en cours de mission.
Permettez-moi de vous fournir un survol plus détaillé de notre système. Premièrement, je voudrais signaler que nous n'employons pas l'expression « anciens combattants » en Allemagne en raison de notre système de conscription. Présentement, tous les citoyens allemands de 18 ans et plus doivent servir dans les forces allemandes pendant neuf mois. Les jeunes gens qui sont objecteurs de conscience peuvent remplacer le service militaire par un autre type de service. À l'heure actuelle, les forces allemandes comptent 240 000 soldats.
Nos conscrits sont répartis en cinq groupes. Le premier groupe, les conscrits, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, doivent servir pendant neuf mois. Ce service est réservé aux hommes. Plus tard, ces conscrits — et c'est le second groupe — peuvent servir entre 11 et 23 mois additionnels, sur une base volontaire. Le troisième groupe se compose de conscrits qui peuvent servir entre deux ans et 20 ans. Ce groupe est ouvert aux hommes et aux femmes. Le quatrième groupe se compose de conscrits qui servent de réservistes et le cinquième groupe, auquel j'appartiens, réunit des conscrits qui ont décidé de devenir soldats professionnels. Les soldats de chacun des groupes ont accès à des prestations différentes, pendant leur service ou après.
Pour ce qui est des réservistes, tous ceux qui ont servi dans ces catégories obtiennent le statut de réservistes après coup. Tout dépend du rang ou du statut acquis avant le départ des forces armées. Un réserviste peut être appelé à servir plusieurs semaines par année ou s'engager sur une base volontaire pour des missions à l'étranger, par exemple. Ce faisant, il a les mêmes droits que je viens de mentionner, ainsi que les mêmes devoirs que n'importe quel autre conscrit. Son emploi est aussi protégé pendant sa période de service, pendant la durée de ses fonctions de réserviste, et il touche la différence entre 7,50 € par jour et le salaire qu'il reçoit normalement, mais uniquement jusqu'à un certain plafond. Vous pouvez vous imaginer les salaires des cadres; nous ne payons pas pour ces écarts importants.
En ce qui concerne les conscrits qui sont des soldats professionnels, la plupart de ceux qui ont opté pour cette voie doivent servir jusqu'à l'âge de 61 ans. Certains d'entre eux ont le droit de prendre leur retraite à 56 ans. Une fois à la retraite, ils reçoivent une pension équivalant à 72 p. 100 de leur dernier salaire. Si un soldat professionnel n'est plus en mesure de s'acquitter de ses fonctions et qu'il est obligé de prendre sa retraite, sa pension s'établira entre 66 p. 100 et 72 p. 100 de son salaire, selon ses années de service. Une pension de veuve s'élève à 60 p. 100 du salaire mensuel et une pension d'orphelin, à 30 p. 100. Par exemple, en tant que lieutenant-colonel, je dois travailler pendant 42 ans étant donné que l'âge de la retraite est maintenant 61 ans.
Compte tenu des dangers des missions, l'Allemagne a adopté en 2007 une nouvelle loi précisant le traitement qui doit être réservé aux soldats, laux fonctionnaires, aux juges et aux employés civils de nos forces ayant subi une blessure grave. Par là, on entend une blessure qui engendre un handicap évalué à plus de 50 p. 100. Cette loi définit plusieurs mesures. La première vise l'acquisition de compétences additionnelles pour permettre aux personnes handicapées de livrer concurrence aux personnes non handicapées sur le marché de l'emploi. En outre, tous les conscrits que j'ai mentionnés précédemment dans différentes troupes ont le droit de devenir des professionnels après avoir subi de graves blessures en cours de service. Ils seront employés par les forces armées.
En Allemagne, nous avons un secrétaire d'État ou un sous-ministre responsable des anciens combattants, des réservistes ou des conscrits. Le Parlement confie aussi à l'ombudsman le mandat de veiller à ce que toutes les questions juridiques soient surveillées et contrôlées. De plus, un général est chargé de ces affaires au sein de l'appareil militaire.
En résumé, après notre première mission à l'étranger au Kosovo, en 1999, nous nous sommes rendus compte qu'il fallait changer bien des choses. Notre bureaucratie était trop compliquée, trop lourde, et nous étions soumis aux pressions de l'opinion publique. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, ces mesures, particulièrement la dernière, assurent à nos soldats et à nos employés civils la couverture dont ils ont besoin pendant les années où ils servent leur pays.
Voilà qui met fin à mon bref exposé. Je répondrai maintenant volontiers à vos questions.
:
J'ai deux petites questions.
Lieutenant-colonel, je pense qu'à l'occasion de notre prochaine visite, nous devrions nous rencontrer au café Heldelberg à Heldelberg, en Allemagne. C'est un très bel endroit. Vous pourriez toujours fournir la bière la prochaine fois, pour que nous pussions prendre un pot après la séance.
D'accord. J'ai deux questions.
Au Canada, s'il y a une chose dont nous pouvons tous être très fiers, c'est l'instauration de ce que nous appelons les centres de ressources pour les familles des militaires, qui sont au nombre de 34 au pays. Généralement, ces centres sont rattachés à des bases et à des organisations militaires. Lorsque nos soldats partent à l'étranger, leurs familles ont un endroit où elles peuvent nouer des liens, travailler ensemble et partager leurs expériences.
Ma première question est la suivante: existe-t-il des établissements de ce genre en Allemagne? Dans l'affirmative, le gouvernement contribue-t-il à leur financement d'une façon ou d'une autre?
Ma deuxième question porte sur votre pension. Au Canada, si la femme d'un militaire meurt avant qu'il ait 60 ans et qu'il se remarie, qu'il vit pendant encore 20 ans et qu'il meurt par la suite, sa seconde femme pourrait toucher sa pension. Mais s'il se remarie après l'âge de 60 ans et qu'il meurt par la suite, sa seconde femme n'a droit à aucune pension. Ce problème se pose-t-il dans votre pays également?