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HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 mai 2000

• 0901

[Français]

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien. Au cours des trois premières heures de cette séance, de 9 heures à 12 heures, nous entendrons le témoignage du président et d'un vice-président de la Société Radio-Canada.

[Traduction]

Nous sommes aujourd'hui très heureux de...

M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président: Je vous donnerai la parole dans un petit instant.

[Français]

Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui le président et un des vice-présidents de la Société Radio-Canada.

[Traduction]

Monsieur Rabinovitch, vous constaterez, vu le nombre de personnes dans l'assistance, l'intérêt que portent les Canadiens et, bien sûr, les parlementaires, à tout ce qui touche Radio-Canada, qui est pour nous tous un symbole très chargé. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté de venir nous rencontrer avec un très court préavis.

Avant de commencer, M. Mills a demandé d'intervenir pour faire un rappel au Règlement. Monsieur Mills.

M. Dennis Mills: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais demander l'appui du comité pour que l'on déroge à l'exigence habituelle qu'il y ait un avis de motion. Le texte de la motion a été distribué dans les deux langues officielles. La motion traite de ce dont nous allons discuter ici aujourd'hui.

La première question importante à régler est celle de savoir s'il ne serait pas possible de lever l'exigence du dépôt d'un avis afin que la motion puisse être déposée. La motion que j'ai déposée a été appuyée par M. de Savoye, et je demande donc le consentement des membres du comité.

Le président: Premièrement, il n'est pas nécessaire que quelqu'un appuie la motion. Son simple dépôt suffit. Bien sûr, pour déroger à la règle, il nous faut avoir le consentement unanime du comité.

M. Mills désire présenter une motion. Il cherche à obtenir le consentement unanime du comité.

Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Cela ne me pose aucun problème de donner mon consentement, mais allons-nous discuter de la motion après l'exposé? Je pense qu'il serait préférable d'entendre d'abord ce qu'a à dire Radio-Canada.

Le président: Monsieur Mills.

M. Dennis Mills: Je me rangerai à la majorité en ce qui concerne le moment choisi pour discuter de la motion, mais je pense qu'il est important que M. Rabinovitch entende ce que les parlementaires ont à dire au sujet de cette question très importante. C'est là l'une des raisons pour lesquelles nous avions pensé qu'il serait peut-être bon que des députés fassent quelques courtes interventions, afin qu'il entende directement de notre bouche certaines de nos impressions et idées.

Je veux tout bien, mais je pense que, du point de vue tactique, il serait peut-être préférable que l'on traite ou que l'on discute de la motion. Peut-être que chacun de nous pourrait prendre deux ou trois minutes pour se prononcer sommairement sur la motion, après quoi nous pourrions entendre M. Rabinovitch pour reprendre alors un dialogue en bonne et due forme.

• 0905

Le président: Monsieur Mills, nous sommes dix ici. Si nous prenions chacun deux ou trois minutes, cela voudrait dire que la vraie réunion ne démarrerait que d'ici une demi-heure.

J'ignore comment veulent procéder les membres du comité, c'est-à-dire s'ils veulent entendre la motion maintenant ou alors reporter cela à plus tard. Ce sera aux membres du comité de décider. Si nous entendons tout de suite la motion, peut-être que seul un petit nombre de représentants des partis pourraient parler pour ou contre la motion, au lieu que chaque député prenne la parole. Pour être juste, nous sommes ici pour entendre M. Rabinovitch, et je pense que ce devrait être là le principal objet de cet exercice.

M. Dennis Mills: Monsieur le président, j'aimerais entendre ce que d'autres députés pensent de cela. L'important est que nous puissions déposer la motion et qu'elle puisse être lue en la présence du témoin afin de figurer au procès-verbal.

Le président: Très bien. Pourrait-on tous s'entendre sur ceci? Ai-je le contentement unanime des membres du comité pour que la motion soit déposée? Nous déciderons ensuite si nous voulons l'entendre tout de suite ou plus tard.

[Français]

Monsieur Bélanger, je vous donnerai la parole par la suite.

[Traduction]

Ai-je le consentement unanime des membres du comité? Si je ne l'ai pas, alors nous n'irons pas plus loin.

Des voix: D'accord.

Le président: Très bien. Déposez donc votre motion et lisez-la-nous et nous pourrons ensuite poursuivre.

M. Dennis Mills: Très bien. Merci, monsieur le président et chers collègues.

La motion dit ceci:

    Attendu que la Société Radio-Canada joue un rôle vital dans la communication télévisuelle au Canada;

    Attendu que la Société Radio-Canada assure une couverture télévisuelle régionale et locale partout au Canada et dans toutes les provinces et les territoires;

    Attendu que la Société Radio-Canada assure un lien direct à nos cultures diverses;

    Attendu que la Société Radio-Canada joue un rôle essentiel comme pépinière de l'industrie du cinéma et de la télévision et comme vitrine pour les jeunes journalistes, producteurs et artistes de toutes les régions du Canada;

    À ces causes, il est résolu que le comité s'oppose à ce que la Société Radio-Canada démantèle sa capacité télévisuelle régionale existante;

    Que le comité demande à la Société Radio-Canada d'augmenter et d'améliorer sa capacité de production télévisuelle régionale en anglais et en français;

    Que le comité demande au gouvernement fédéral d'assurer un financement suffisant et stable à la Société Radio-Canada de manière qu'elle puisse augmenter et améliorer sa capacité de production télévisuelle régionale;

    Que le comité entreprenne une étude urgente des questions liées à la distribution et à la transmission des signaux de télévision de la Société Radio-Canada.

[Français]

Le président: Monsieur Bélanger, vous voulez prendre la parole?

M. Mauril Bélanger: Monsieur le président, j'aimerais que les membres du comité puissent d'abord écouter la présentation des représentants de Radio-Canada et, comme nous le faisons d'habitude, les questionner, après quoi nous pourrons accepter ou rejeter la résolution de nos collègues. Je crois qu'en toute justice, il faudrait d'abord écouter ce qu'ils ont à dire et qu'ils écoutent à leur tour ce que nous avons à dire avant que nous passions à l'étude de la résolution de M. Mills.

Le président: Avant de céder la parole à M. de Savoye, je dois dire aux membres du comité que la séance devra être interrompue en raison de votes à la Chambre, ce qui fera en sorte que M. Rabinovitch disposera de moins de temps pour faire sa présentation. En toute courtoisie à son égard—après tout, il a accepté de venir comparaître devant nous malgré un préavis très court—, je souhaite qu'il puisse d'abord faire sa présentation et que nous étudiions par la suite la résolution qui a été déposée.

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le président, je suis d'accord sur votre raisonnement. Je suggérerais cependant que dès notre retour après le vote, nous nous penchions sur la résolution. Nous aurons ainsi permis à M. Rabinovitch de nous faire part de ses préoccupations et nous aurons été en mesure d'élaborer sur les nôtres. Je présume que nous serons prêts, après le vote, à disposer de la motion qu'a déposée M. Mills et que j'ai appuyée.

Le président: Il faut aussi tenir compte du fait qu'après avoir entendu la présentation de M. Rabinovitch, les membres du comité voudront sans doute lui poser des questions. Pourrions-nous laisser cette question en suspens et y revenir lorsqu'on saura mieux comment la séance se déroulera? Je comprends très bien les points de vue que vous avez exprimés.

[Traduction]

Allez-y, monsieur Rabinovitch.

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Nous aurons le vote à 10 h 30 et nous reviendrons ensuite pour reprendre la réunion du comité, n'est-ce pas?

Le président: Pourquoi ne pas tout simplement attendre de voir? Je ne sais pas combien de temps va prendre M. Rabinovitch. Il y a peut-être certains députés qui voudront d'abord l'interroger sur ce qu'il aura dit. Ne nous enfermons pas dans un emploi du temps rigide. J'ignore combien de temps prendra le vote. Nous avons jusqu'à midi pour M. Rabinovitch. Il est déjà 9 h 10, alors allons-y et nous verrons bien comment les choses se passeront.

Monsieur Rabinovitch.

• 0910

[Français]

M. Robert Rabinovitch (président-directeur général, Société Radio-Canada): Merci, monsieur le président et membres du comité.

[Traduction]

Nous sommes très heureux de l'occasion qui nous est ici donnée de discuter avec vous de ces questions. On en a beaucoup entendu parler dans la presse. Hier, cela faisait précisément six mois que j'étais en poste, et je suis en train d'apprendre la différence entre le secteur privé et le secteur public. C'est très différent.

[Français]

Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître. J'aimerais vous présenter le président de la télévision anglaise, Harold Redekopp.

[Traduction]

Nous sommes heureux de pouvoir profiter de ce processus de consultation pour prendre connaissance de vos préoccupations avant que le Conseil d'administration de Radio-Canada ne prenne une décision finale sur l'avenir de la Télévision anglaise.

[Français]

Nous sommes heureux de pouvoir profiter de ce processus de consultation et de prendre connaissance de vos préoccupations avant que le conseil d'administration de Radio-Canada ne prenne une décision finale sur l'avenir de la télévision anglaise.

[Traduction]

Radio-Canada, et dans ce cas précis la Télévision anglaise, est une institution canadienne à laquelle tous accordent une grande valeur, et elle occupe une place spéciale dans notre société. La nécessité d'un radiodiffuseur public typiquement canadien ne fera que s'accroître et le Canada en aura encore plus besoin dans l'avenir.

Avons de poursuivre, j'aimerais insister sur une de nos forces, à savoir la qualité et la loyauté de notre personnel. Sans cet engagement, nous ne serions que l'ombre de ce que nous présentons à l'antenne. En dépit des compressions et du manque de fonds, nos employés ont maintenu un niveau de professionnalisme et de qualité de travail incomparable.

Monsieur le président, nous sommes face à deux problèmes fondamentaux: une crise financière à court terme et une profonde crise d'identité à long terme.

Comme je vous l'ai expliqué en février, la Télévision anglaise traverse une grave crise financière. Vous avez devant vous une liasse, qui rafraîchira votre mémoire. Il s'agit là plus ou moins de la liasse dont nous avons déjà parlé et je n'entends pas en traiter de façon approfondie à moins que vous ayez des questions particulières à poser. Si ce document vous est fourni ici c'est principalement pour vous dire que rien n'a changé. Nous sommes en pleine crise financière.

En fait, si j'étais toujours dans le secteur privé et si je déposais le plan de Radio-Canada tel qu'il existe maintenant, avec ce que la Société est censée faire, mes banquiers me diraient que le plan comporte des failles structurales, et à moins de corriger ces problèmes structuraux, nous serions voués à la faillite.

Permettez que j'inscrive l'actuelle situation financière dans son contexte historique. Au cours des 16 dernières années, la Télévision anglaise a essayé de fournir le même niveau de service avec des budgets réduits. Je tiens à souligner qu'il s'agit d'une situation qui perdure depuis 16 ans déjà. Grâce à des solutions d'urgence, à des fonds ponctuels, à une exploitation plus intensive des créneaux publicitaires et grâce surtout au dévouement incroyable de ses employés, Radio-Canada a pu se maintenir dans l'état où elle est actuellement.

Or, malgré l'apport accru de la publicité et de nombreux licenciements, la Télévision anglaise n'arrive toujours pas à équilibrer son budget et à maintenir le niveau actuel de qualité dans sa programmation. Cela, monsieur le président, est notre problème à court terme.

À plus long terme, pour demeurer pertinente et pour continuer d'être regardée dans un univers multichaînes à prédominance américaine, la Télévision anglaise doit fournir une programmation canadienne distinctive et de qualité. Je veux que les Canadiens reconnaissent la Télévision anglaise tout de suite comme ils le font pour la Radio anglaise.

Avant que Harold vous décrive les plans établis par la direction, j'aimerais d'abord corriger certains des mythes ou des malentendus qui ont circulé ces dernières semaines.

Le président: Monsieur Rabinovitch, puis-je vous interrompre un petit instant?

Nous essayons d'installer des chaises afin que les personnes au fond de la salle n'aient pas à demeurer trop longtemps debout.

Merci. Excusez-moi.

• 0915

M. Robert Rabinovitch: J'aimerais donc corriger certains des mythes ou des malentendus qui circulent depuis quelques semaines.

Premièrement, tous les changements proposés ne visent que la Télévision anglaise.

[Français]

Nos services anglais de radio et nos services français de radio et de télévision ont respecté leurs engagements financiers et fournissent un service de radiodiffusion public de grande qualité. De fait, lors de leur réunion en mars, les membres du conseil d'administration ont réitéré leur engagement envers nos services radiophoniques en leur accordant une augmentation budgétaire de 10 millions de dollars qui devra être consacrée à la programmation. Je répète que nos services de radio ne sont pas visés par les discussions en cours, pas plus que ne l'est la télévision française.

[Traduction]

Nos services français de radio et de télévision et nos services anglais de radio ont respecté leurs engagements financiers et fournissent un service de radiodiffusion publique de grande qualité. En fait, à leur réunion de mars, les membres du Conseil d'administration ont réitéré leur engagement envers nos services radiophoniques en leur accordant une rallonge budgétaire de 10 millions de dollars, qui doit être consacrée à la programmation. Et je suis fier de dire—et bon nombre d'entre vous l'auront lu dans le journal ce matin—que l'amélioration de la qualité de la programmation radiophonique a commencé avec les émissions This Morning et Sunday Morning et le budget accru que nous avons pu consacrer à ces émissions.

Je le répète, nos services de radio ne sont pas visés par les discussions en cours, pas plus que la Télévision française.

Deuxièmement, bien des gens confondent les services locaux et régionaux et ont déclaré que Radio-Canada avait l'intention de se retirer des régions. Notre mandat, selon la Loi sur la radiodiffusion, est d'offrir un service national qui reflète la globalité canadienne et rend compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions. Nous continuerons de remplir ce mandat.

Toute suggestion selon laquelle Radio-Canada s'en irait des régions n'est qu'une information fallacieuse. Nous n'avons aucunement l'intention de quitter les régions. En fait, nos plans, comme vous l'expliqueront Harold et le vidéo que nous avons préparé, comprennent l'augmentation de notre présence journalistique dans un plus grand nombre de localités, la création d'un fonds de démarrage pour aider à la réalisation de nouvelles initiatives régionales et nous nous assurerons qu'il revienne au personnel régional de déterminer ce qui se passera chaque jour dans leur segment de l'émission de début de soirée. Personne au Canada ne perdra l'accès au signal de Radio-Canada.

Nous ferons de la Télévision anglaise ce que nous avons fait de la Radio anglaise dans les années 70, grâce à un plan complet et multidimensionnel. Ces propositions de repositionnement de la Télévision anglaise dans le nouveau paysage concurrentiel sont essentielles pour sa survie à long terme et pour toute action au-delà des défis financiers. Sans changement fondamental, nous sommes voués à sombrer dans l'oubli, malgré les efforts héroïques de notre personnel.

Enfin, à ceux qui ont suggéré que nous maintenions le statu quo, je tiens à préciser que cette option entraînerait autant de licenciements que le plan que nous présentons aujourd'hui, vu la crise financière que nous traversons. Or, ce plan nous permettra d'accomplir notre mandat, dans les limites de notre budget, et de faire véritablement oeuvre de radiodiffuseur public canadien en offrant une programmation distinctive et de qualité. Nous mériterons ainsi notre place dans le spectre et ferons ce que les Canadiens attendent de nous, soit offrir un service distinctif de qualité.

Je vais maintenant inviter Harold Redekopp à passer en revue pour vous les changements proposés. Sa présentation sera exhaustive et l'important à souligner ici est que la solution que nous proposons est une solution à long terme, une solution détaillée, une solution à laquelle on travaille depuis très longtemps.

Merci.

Le président: Monsieur Redekopp, vous avez la parole.

M. Harold Redekopp (vice-président, Télévision anglaise, Société Radio-Canada): Merci, monsieur le président.

Bonjour, mesdames et messieurs.

Les propos que je vais vous tenir ne sont pas contenus dans la pochette qui vous a été remise, mais je vais traiter de certains documents que celle-ci renferme.

On a beaucoup parlé de changements du côté de la Télévision anglaise, et vous en serez peut-être arrivés à la conclusion que ces changements ne visent que les émissions de début de soirée. Eh bien, comme vous aurez entendu le président le dire, les changements proposés sont beaucoup plus que cela, et j'aimerais prendre quelques instants pour vous parler du plan que nous proposons et de ce que nous essayons de réaliser. J'aimerais ensuite vous montrer un court vidéo, après quoi nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

• 0920

Nous avons entrepris une transformation en profondeur de la Télévision anglaise. Je dirais, comme l'a déjà fait le président, que ce plan est audacieux, d'envergure et complexe.

Il a débuté il y a 15 mois et il était axé sur deux objectifs. Le premier était de créer un service de télévision publique canadien qui augmenterait l'auditoire de la Télévision anglaise et la fidélité de cet auditoire, à la manière de la Radio anglaise de Radio-Canada. Le deuxième était d'asseoir la Télévision anglaise sur une solide base financière et, comme l'a dit le président, vous trouverez dans la pochette des renseignements au sujet de notre situation financière.

Il y a deux principales raisons qui militent en faveur d'une transformation. Premièrement, nous vivons une crise d'identité. Deuxièmement, nous vivons une crise financière, et j'aimerais vous parler de ces deux crises.

Je vais commencer par notre crise d'identité. Nous avions voulu créer ce que l'on a appelé une télévision publique canadienne. L'aspect canadien a pour la plupart été réalisé, et je dois dire que je n'y suis pour rien. Je travaillais à l'époque du côté de la radio. Mes prédécesseurs ont fait un travail parfaitement héroïque, canadianisant l'horaire des émissions télévisées pendant la période la plus difficile de notre histoire, de telle sorte qu'aujourd'hui le contenu canadien compte pour 80 p. 100 pour l'ensemble de la journée et 90 p. 100 pendant les heures de grande écoute. Pour vous donner un ordre de grandeur, sachez, par exemple, que l'Australian Broadcasting Corporation offre un contenu australien d'environ 40 p. 100 pendant ses plages de grande écoute. Nous sommes donc fiers de ce que nous avons réalisé.

D'autre part, nos émissions sont populaires. Neuf des dix séries d'émissions de divertissement canadiennes les plus populaires sont transmises par la Télévision anglaise de Radio-Canada. La Télévision anglaise compte pour plus de 40 p. 100 de l'auditoire total des émissions canadiennes. C'est une très belle réussite pour ce qui est du volet canadien.

Cependant, mesdames et messieurs, la crise d'identité est la suivante. Lorsqu'on interroge les Canadiens, on constate que nous ne sommes pas perçus comme étant suffisamment différents des autres télédiffuseurs. En fait, nous souffrons de ce que nous appelons une «image floue». Nous sommes perçus comme étant en partie un télédiffuseur commercial et en partie un télédiffuseur public. En fait, lorsque vous interrogez les Canadiens au sujet de la télévision publique, ils ne savent même pas très bien de quoi il s'agit. C'est donc tout un défi d'expliquer et de montrer de façon claire et convaincante ce qu'est la télévision publique et les raisons pour lesquelles elle mérite un appui public. Il n'est pas difficile de comprendre que si vous ne savez pas ce qu'est la télévision publique, il y a peu de chances que vous l'appuyiez.

La deuxième crise est notre crise financière, dont le président vous a déjà parlée. Permettez que j'en traite en des termes très simples. Ce que nous avons dans notre assiette dépasse largement nos possibilités financières. Je ne peux pas appuyer tous nos services régionaux. Je ne peux pas appuyer toutes nos émissions de réseau. Je ne dispose pas de suffisamment d'argent pour la réalisation d'émissions. J'ai trop d'infrastructure. J'ai trop de coûts fixes. Ces coûts fixes représentent 40 p. 100 de mon budget, alors lorsqu'il y a une réduction, je dois puiser dans les 60 p. 100 restants, correspondant à la programmation. À court terme, il me faut avoir un budget équilibré, mais à long terme, je souhaite libérer de l'argent de façon à pouvoir m'occuper de programmation, de financement de programmes et d'amélioration de la programmation.

Ce sont donc notre crise d'identité et notre crise financière qui motivent notre transformation, et voici comment nous avons réagi. Ce que nous voulons faire c'est nous concentrer sur nos forces, sur ce que nous faisons bien, et y réinvestir de l'argent. Je dois dire que notre plan vise à nous asseoir d'abord dans le monde de la télévision conventionnelle. Le monde de la télévision conventionnelle va demeurer pendant quelque temps encore, et il nous faudra y être pertinents et concurrentiels pendant quelque temps. Nous voulons cependant également établir très tôt une présence efficace dans le domaine des nouveaux médias, et c'est également vers cela que tend notre plan: l'avenir.

Je vais donc vous parler de nos compétences ou de nos forces clés: les nouvelles, les actualités, la comédie, les émissions dramatiques et les sports—et lorsque je parle de sports, j'entends par là les sports amateurs, les Jeux olympiques et la Ligue nationale de hockey. Mais en plus de cela, j'aimerais vous parler de six secteurs dans lesquels nous voulons réinvestir, et c'est précisément ce que vise notre plan.

Nous allons commencer par notre première priorité, soit refléter de façon plus régulière et plus juste la globalité canadienne, rendant compte dans tout les pays de la diversité régionale, ce dans les nouvelles, les actualités, les émissions dramatiques, les arts, la comédie et les sports.

Permettez maintenant que je conteste cette idée que nous nous retirons des régions. Ce n'est pas le cas. Nous ne nous retirons pas des régions. À l'heure actuelle, la Télévision anglaise assure une présence dans 27 endroits différents du pays. Ce que nous aimerions faire, en fait, c'est augmenter cela. Ce plan nous permettra de nous établir dans au moins huit nouvelles localités, et nous aimerions, si les fonds à notre disposition nous le permettent, aller plus loin encore que cela.

• 0925

Le comité devrait savoir qu'il existe dans ce pays d'énormes trous noirs géographiques dans lesquels il n'y a aucun service et aucun espoir de service. Je suis originaire de Winnipeg et j'ai souvent fait en voiture le trajet Toronto-Winnipeg. Vous traversez un fuseau horaire, vous passez par Thunder Bay, vous traversez ensuite Dryden puis Kenora sur la frontière manitobaine, et il n'y a jamais de présence télévisuelle constante. Il s'agit d'une très vaste région. Les gens ne s'attendent pas à ce qu'il y ait un service, à moins que nous y fassions quelque chose. Il y aurait quelque chose s'il se déclenchait par exemple un énorme incendie; nous y enverrions évidemment une équipe. Mais il n'y a aucun reflet régulier de cette partie du pays.

L'on pourrait dire la même chose du sud de l'Alberta ou de l'intérieur de la Colombie-Britannique. En d'autres termes, nous avons dans ce pays d'énormes trous géographiques qui ne sont pas régulièrement reflétés, et il s'agit là d'une situation que nous aimerions redresser. Comme je l'ai déjà dit, nous voulons établir un minimum de huit nouveaux bureaux, comme nous les appelons, qui seraient des centres à partir desquels des journalistes pourraient rayonner et couvrir sujets et dossiers, pour participer de façon plus régulière au débat canadien.

Comme l'a dit le président de la Société, nous voulons également créer ce que nous avons appelé un fonds de démarrage pour aider à la réalisation de nouvelles initiatives. Permettez-moi de vous donner un exemple de ce que ce fonds pourrait faire. Je reviendrai sur cet exemple.

Nous avons financé un projet appelé Random Passage. Random Passage s'inspire d'un récit épique, un roman de Bernice Morgan, et l'histoire se déroule à Terre-Neuve. On y parle des premiers immigrants irlandais. La série sera vendue en coffret, et aura donc une durée de vie bien plus longue que sa diffusion à la télévision. La série sera vue au Québec, et sera diffusée par la Télévision anglaise. Il s'agit en fait d'une coproduction entre un producteur québécois et un producteur terre-neuvien. Il s'agit d'un récit de proportions épiques qui touchera le pays.

Soit dit en passant, l'idée est née d'une minuscule subvention du directeur régional de la télévision à Terre-Neuve. Il n'avait pas beaucoup d'argent, mais il avait trouvé l'idée formidable et c'est ainsi qu'il a consenti ce premier important investissement. Ce qui est envisagé ici c'est la création d'un fonds pour tous les bureaux régionaux; les choix seraient régionaux, mais ils devront s'inscrire dans les priorités du réseau.

J'aimerais traiter maintenant de cette idée que l'on est en train de créer un système ou un service centré sur Toronto. Regardez notre service. Prenez les émissions pour enfants: nous avons Theodore Tugboat et Street Cents, de la région de l'Atlantique. Prenez les émissions humoristiques: nous avons Made in Canada et This Hour Has 22 Minutes, de la région de l'Atlantique. Pour ce qui est de l'ouest du pays, on peut citer Da Vinci's Inquest, Nothing Too Good for a Cowboy et North of 60. Nous tenons à refléter les différentes régions d'un bout à l'autre du pays.

Enfin, en ce qui concerne cette idée d'un reflet plus régulier et plus juste de tout le pays, les équipes de nos principales émissions ne se déplacent plus. L'équipe de The National ne voyage plus. Elle le devrait, au moins quatre fois par an. L'équipe de Royal Canadian Air Farce devrait se déplacer un minimum de quatre fois l'an. L'équipe de The Nature of Things, qui fête cette année sa quarantième saison, devrait et aimerait se déplacer. Je n'ai pas d'argent. On ne parle pas ici de quitter les régions, de créer un système axé sur Toronto, mais plutôt de créer un système national qui reflétera de façon plus juste et plus régulière toutes les régions du pays.

Je vais maintenant passer à un deuxième volet dans lequel il faudrait réinvestir: celui des émissions pour les jeunes et pour les enfants. La programmation pour les enfants est la marque de tous les importants télédiffuseurs publics dans le monde. Les émissions pour enfants ne rapportent pas d'argent. Elles en perdent, parce que nous ne pouvons pas faire de publicité pendant ces plages d'écoute. Or, c'est un investissement dans l'avenir. C'est axé sur l'avenir.

Nous nous sommes déjà démarqués avec notre émission matinale, CBC Playground. Nous nous sommes associés à une organisation sans but lucratif dans ce pays appelée Get Set for Life, qui investit dans les cinq premières années très critiques de la vie d'un enfant. L'on nous voit promouvoir des valeurs éducatives, offrir un environnement d'apprentissage sain et promouvoir les compétences parentales, toutes choses qui font partie de notre mandat. Nous aimerions augmenter ce volet d'un tiers et le porter à 40 heures par semaine.

Un troisième volet dans lequel nous voulons réinvestir est ce que j'appelle le journalisme réfléchi. J'espère que les gens dans la salle ne vont pas voir là un oxymoron. Je vais vous donner des exemples de ce que j'entends par journalisme réfléchi.

Nous aimerions mettre davantage l'accent sur les documentaires. Le documentaire est une façon très simple de raconter une histoire. C'est simple à dire, mais c'est difficile à réaliser. C'est une forme d'émission extrêmement efficace et la Société Radio-Canada a toujours compté parmi les chefs de file en la matière et nous entendons maintenir notre position prééminente. Nous sommes d'ailleurs en train d'examiner la possibilité de produire une série documentaire régionale appelée The Canadian Experience.

• 0930

En ce qui concerne le journalisme d'enquête, la Télévision anglaise de Radio-Canada est aujourd'hui le seul joueur dans le pays. Je suis certain que vous êtes nombreux à avoir vu l'émission de The Fifth Estate portant sur Stephen Truscott. Non seulement elle s'est attirée un énorme auditoire, mais elle a eu une forte incidence.

Dans le domaine des affaires publiques, nous voulons créer de nouvelles émissions. Le dimanche matin surtout, nous aimerions proposer ce que nous avons appelé un «bloc sérieux», incluant une émission consacrée au discours politique, une émission sur la politique, une émission examinant la reddition de comptes dans les médias, non seulement du côté de la Société Radio-Canada mais également ailleurs, et une émission qui ferait un examen sérieux des questions d'ordre spirituel. Je dois dire qu'à Radio-Canada nous avons de la difficulté à traiter de questions de transcendance, mais nous allons faire un effort sérieux en ce sens.

Pour ce qui est du journal télévisé de 22 h, nous voulons y réinvestir. Nous voulons être plus contextuel, plus international et, surtout, plus original, ne nous limitant pas à faire un simple résumé des événements survenus dans la journée, mais ajoutant du nouveau contenu.

Sous toute cette rubrique de «journalisme réfléchi», nous voulons créer et produire davantage de «spéciaux», comme on les appelle, traitant des soins de santé, de la crise agricole ou autre.

Le quatrième volet dans lequel nous voulons investir est celui des arts. En septembre dernier, nous avons lancé ce qu'on a appelé CBC Thursday. Il s'agit d'une émission d'une heure sans publicité et qui traite de ce qu'il y a de mieux dans le monde des arts de la scène ici au Canada et partout dans le monde. Nous aimerions la saison prochaine porter la durée de cette émission à deux heures. Nous montrerions, par exemple, l'ouverture du Centre national des Arts, mais également la réouverture de Covent Garden.

J'aimerais m'arrêter ici un instant pour vous parler un petit peu de possibilités manquées. La veille du jour de l'An de cette année, la veille du nouveau millénaire, il y a eu à Toronto une très importante manifestation réunissant 15 vedettes d'opéra canadiennes, dont 10 dont je n'avais presque jamais entendu parler. Ce qui est épatant est qu'elles venaient de toutes les régions du pays, qu'elles étaient toutes jeunes et qu'elles avaient toutes monté des carrières à l'extérieur du pays. C'était une manifestation phénoménale. Nous aurions dû en faire une émission, et nous le savions, mais je ne disposais pas des ressources nécessaires. Le réseau radiophonique de CBC l'a donc diffusée et les seules autres personnes à l'avoir entendue étaient celles qui avaient le privilège d'être dans la salle. Or, c'était un spectacle d'envergure nationale qui aurait dû passer dans le cadre d'une émission CBC Thursday. Il faut trouver l'argent nécessaire pour faire ce genre de choses plus régulièrement. C'est là ce que nous devrions entreprendre en ce qui concerne les arts.

Un cinquième volet, qui découle en fait de ce dont je viens de vous parler à l'instant, est celui de ce que l'on appelle les «spéciaux à fort rayonnement». Si vous permettez, j'aimerais vous donner quelques exemples. L'événement d'envergure nationale réussi le plus récent a, je pense, été la couverture que nous avons faite de l'entrée dans le nouveau millénaire. C'était une émission de 26 heures qui nous a lié les uns aux autres ici au Canada et nous a liés avec le reste du monde. Quarante pour cent des Canadiens de langue anglaise ont, à un moment ou un autre, pendant ces 26 heures regardé l'émission sur leur poste.

En juillet dernier, la Télévision anglaise a été le télédiffuseur hôte à l'ouverture de Pier 21, qui célèbre les millions de Canadiens qui sont venus au Canada comme immigrants et les milliers qui sont partis du Quai 21 pour servir pendant la Deuxième Guerre mondiale. Nous étions là. Nous avons raconté l'histoire d'immigrants. Nous étions là et avons saisi cette occasion de partager un événement marquant avec le reste de la nation.

En juillet prochain, nous allons retourner à Halifax pour les grands voiliers.

Dans les semaines à venir, CBC va assurer la couverture en direct de la Tombe du soldat inconnu. Je pense que vous êtes nombreux dans la salle à savoir que la dépouille quittera la crête de Vimy pour le cénotaphe ici à Ottawa. Nous couvrirons tout cela en direct. Nous serons là en direct sur Newsworld le jeudi 25 mai et nous serons ici à Ottawa le dimanche 28 mai, lorsque la dépouille reposera en chapelle ardente et que le gouverneur général et le premier ministre rendront leurs derniers hommages au soldat inconnu. Nous serons ici sur le principal canal et sur Newsworld pour l'inhumation de la dépouille dans sa dernière demeure au Monument aux morts.

Voilà tous là des exemples de ce que l'on entend par événement de partage national. Leur couverture n'est pas bon marché, et il nous faut trouver les moyens financiers et autres d'en faire davantage. C'est là le premier genre de spécial à forte incidence dont nous aimerions multiplier le nombre. Ces émissions sont interactives et elles s'appuient sur des partenariats.

• 0935

Il y a un autre genre de spécial à forte incidence que nous voulons produire. Il s'agit des spéciaux en coffret. Les émissions proposées en coffret s'assurent ainsi une plus longue durée de vie.

Le meilleur exemple est l'émission sur l'histoire du Canada qui va être diffusée par les réseaux français et anglais le 22 octobre. Ce sera la première histoire exhaustive du Canada présentée à la télévision. L'émission est depuis le tout début destinée aux deux groupes linguistiques. Elle n'a pas été conçue pour les anglophones pour être traduite en français. Elle traitera des mêmes interprétations d'événements historiques et d'événements canadiens pour les deux auditoires. Elle aura bien sûr une vie bien plus longue que son temps de diffusion à la télévision. Il y aura du matériel didactique pour les écoles. Il y aura des livres ainsi qu'un site Web. Ce sera un legs pour le pays.

Je vous ai parlé brièvement de Random Passage. Je ne voudrais pas m'y attarder trop longtemps, mais Random Passage est un exemple littéraire d'un de ces projets de coffret. L'émission aura une vie au-delà de sa télédiffusion sous forme de vidéocassettes pouvant être utilisées plus tard.

Le dernier volet en matière de réinvestissement dont j'aimerais vous parler est axé sur l'avenir. C'est ce que j'appelle les «nouvelles voix». Lorsque je travaillais dans la radio, nous avons créé une zone de nouvelles voix qui a très bien réussi. En fait, elle a cette année remporté pour CBC Radio un prix Italia.

Ce que nous aimerions faire dans la télévision c'est créer ce que nous appelons une «zone d'innovation» pour les heures de grande écoute en fin de soirée et qui servirait de vitrine pour de nouveaux visages, de nouveaux talents, de nouveaux formats, de nouvelles idées, de nouveaux cinéastes, des émissions multiculturelles et interculturelles, les genres d'émissions qu'aucun autre télédiffuseur ne fera ni ne peut faire.

Cela m'amène à la façon dont nous devons procéder pour que ce plan fonctionne—comment faire pour réaliser cette transformation? La première chose à dire est que cela suppose des choix difficiles.

Il y a en vérité deux approches dont j'aimerais parler. La première est qu'il nous faut repérer ce qu'on appelle «les gros facteurs de coûts». Il nous faut trouver le moyen de convertir les coûts fixes en dollars pour la programmation, et cela se fera progressivement. Il nous faudra également nous intéresser aux émissions de l'heure du souper. Une idée que nous avons est la création d'une nouvelle émission nationale et régionale mixte à 18 h qui serait en direct, et en direct dans cinq fuseaux horaires. Il y aurait donc cinq éditions différentes. Chacune serait coanimée au niveau de la région. Il y aurait une programmation régionale, et le choix de reportages se ferait au niveau régional. L'on ferait également appel au système de bureaux élargi dont j'ai parlé plus tôt, ce qui nous permettrait de parler de l'actualité, de traiter de dossiers nationaux d'une façon novatrice et de laisser les régions se parler entre elles d'une façon qui n'a jusqu'ici pas été possible.

Je peux vous donner quelques exemples. Prenons, par exemple, l'élection partielle d'hier soir à St. John's-Ouest, à Terre-Neuve. La couverture de l'élection serait bien sûr incluse dans les cinq éditions; ce serait une nouvelle nationale. Mais l'édition de l'Atlantique lui ferait bien sûr une bien plus grande place.

Un autre exemple serait la neige et le temps froid qu'a récemment vécu le Manitoba: étant donné que toutes les cultures ont déjà été semées, c'est une nouvelle d'intérêt national, mais dans le fuseau horaire central, on lui ferait une plus grande place. Prenons encore la Loi 11, qui est en train d'être débattue en Alberta: ce serait bien sûr une nouvelle nationale, mais elle se verrait accorder une plus grande place dans la zone de l'heure normale des Rocheuses.

Cette émission nationale-régionale mixte serait une émission différente, assurerait un service différent et n'inclurait pas de contenu local.

La deuxième partie de notre approche en vue de nous distinguer et d'apporter valeur et soutien à la Télévision anglaise serait de réduire l'importance de la publicité. Permettez que je prenne quelques instants pour vous expliquer pourquoi.

À l'heure actuelle, 40 p. 100 de mon budget proviennent de recettes de la publicité, comparativement à 35 p. 100 il y a cinq ans. Ce n'est pas que l'on encaisse plus de recettes commerciales, c'est que mon budget total a changé, la composition a changé et la proportion des revenus commerciaux a augmenté. S'il nous faut continuer de tout faire aller, vous pouvez comprendre les pressions que je vis dans ma recherche des émissions susceptibles d'attirer le plus gros auditoire, par opposition aux émissions qui s'inscriraient dans la programmation d'un service public.

• 0940

C'est ainsi que les pressions en matière de recettes commerciales ont une forte incidence sur l'élaboration de la programmation, de telle sorte que la programmation qui en résulte ne sert pas toujours l'intérêt public.

Une deuxième raison de réduire l'importance de la publicité est l'encombrement que cela crée. À l'heure actuelle, pendant les plages de grande écoute, nous diffusons 12 minutes de publicité à l'heure, comme n'importe quel autre télédiffuseur. Il s'agit là du maximum autorisé par le CRTC. Ajoutez à cela deux minutes de matériel promotionnel pour faire la promotion de nos émissions, et cela vous donne un quart d'heure par heure de grande écoute, ce qui nous fait ressembler à CTV, CBS, City et tous les autres. Le téléspectateur qui se promène d'une chaîne à l'autre ne pourra pas nous distinguer des autres. Non seulement nous voulons nous distinguer des autres sur le plan contenu, nous voulons nous distinguer des autres sur le plan aspect. Comme le président l'a dit tout à l'heure, nous voulons donner à la télévision de CBC un nouveau visage qui est incontestablement canadien et public, tout comme c'est le cas de la radio de CBC, qui se détache très clairement des autres radios.

Pour récapituler, donc, la transformation de la Télévision anglaise exigera que nous offrions un service de télévision publique mieux défini; que nous révisions nos capacités en tant que fournisseur de contenu; que nous réinvestissions dans nos principales forces et dans les choses que nous faisons bien, et que nous nous positionnions bien en prévision du nouveau monde des médias et, enfin, que nous bâtissions appui et fidélité des téléspectateurs pour la Télévision anglaise de CBC.

Je vous remercie de m'avoir écouté. J'aimerais maintenant, si vous permettez, vous montrer un enregistrement vidéo qui vous expliquera de façon bien plus éloquente ce que nous aimerions réaliser. Il ne dure que sept minutes, mais nous le jouerons deux fois, comme vous en avez fait la demande, une fois en anglais et une fois en français. Merci.

[Présentation vidéo]

• 0955

Le président: Merci beaucoup, monsieur Rabinovitch et monsieur Redekopp. J'imagine que vous êtes maintenant prêts à répondre aux questions des membres du comité.

Monsieur Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

Permettez-moi de commencer par vous remercier d'être venus.

Ce que j'aimerais faire c'est ramener notre attention sur la raison pour laquelle nous sommes ici. Après vous avoir entendus tous les deux, je pense avoir reçu des messages contraires. La raison pour laquelle nous sommes ici est le message que nous recevons tous chez nous et dans les médias.

Radio-Canada est une vache sacrée dans ce pays. Lorsque j'ai lu dans les journaux et lorsque je vois à la télé que trois assemblées législatives provinciales ont adopté des résolutions parce qu'elles sont préoccupées par la perte de la radiodiffusion régionale, je me dis que c'est là le vrai message que les gens reçoivent.

Le message que vous m'avez transmis ce matin a été très différent, tout comme les messages que je reçois des électeurs dans ma circonscription. Je vais vous en lire un. D'ailleurs c'est un message que j'ai reçu il y a peu de temps d'un résident de ma circonscription. Voici ce qu'il dit:

    Salut, Inky.

    J'aimerais par votre intermédiaire exprimer mon dégoût face au plan de CBC de démanteler son service de journal télévisé de 18 h. Comme vous le savez, CBC Winnipeg est le seul service de télédiffusion qui offre une quelconque couverture de l'actualité en dehors du périmètre de Winnipeg. Ce dont nous n'avons absolument pas besoin c'est d'un autre journal télévisé de Toronto avec des petits bouts en provenance des régions ajoutés de-ci de-là.

Voilà le vrai message qu'on m'envoie.

Comme je l'ai dit et comme vous l'avez vous-même dit, CBC ne pas être tout pour tout le monde. Nous comprenons cela. Nous comprenons que c'est vous l'expert quant à la gestion de la boîte. Mais je pense que dans ce cas-ci, l'on parle d'un radiodiffuseur public et que c'est l'affaire du pays. Comme vous l'avez expliqué ce matin, ce n'est pas la même chose que gérer une boîte privée.

Par conséquent, si le message que vous nous avez transmis ce matin est le vrai, allez-vous faire en sorte que les gens adoptent ce message?

Le président: Monsieur Rabinovitch.

• 1000

M. Robert Rabinovitch: Merci, monsieur Mark.

Je pense qu'il nous faut situer un peu cela dans son contexte. Nous avons, comme cela aurait été le cas de tout organisme, commencé par faire de la recherche et par examiner les différentes possibilités pour redresser notre situation financière ainsi que les problèmes d'identité, et ce il y a quelque temps déjà et bien avant mon arrivée. Nous avons déposé des idées auprès du Conseil d'administration le 26 avril 2000. Nous avions déjà sur une certaine période de temps sensibilisé le conseil à la crise financière à laquelle nous nous trouvions confrontés.

En ce qui concerne le Conseil d'administration, celui-ci n'a pas commencé à expliquer au public la totalité de ce qui était prévu. En effet, ma comparution ici marque notre première présentation à un auditoire non fermé et, en fait, au grand public.

Malheureusement, à Radio-Canada, comme dans beaucoup d'endroits, on vit dans une maison de verre. Les gens ont choisi de parler à l'extérieur des parties qu'ils n'aimaient pas. Voilà qui explique les fuites concernant les coupures et les coupures potentielles. Voilà qui explique le message transmis au sujet d'une émission donnée qui ne réussit pas très bien et qui ne s'inscrit pas forcément dans ce que devrait faire un télédiffuseur public. Mais le message quant aux changements que nous souhaitons apporter et quant au pourquoi de ces changements commence, lui, tout juste à sortir. C'est ce que vous voyez aujourd'hui dans ce vidéo et dans notre présentation. Ce que nous tentons de faire c'est apporter un changement fondamental du côté de la télévision publique anglaise à cause de notre ferme conviction que cela est nécessaire et de notre ferme conviction que sans cela nous ne survivrons pas.

Le président: Monsieur Mark, vous pouvez poser une courte question.

M. Inky Mark: J'ai une question au sujet du bien-fondé de toutes ces coupures. Ce que le public a entendu est que 50 p. 100 de l'effectif vont recevoir un avis de congédiement. J'aimerais savoir si vous avez fait des recherches sur l'incidence que cela aura, non seulement à court terme mais également à long terme, et non seulement dans les économies locales mais également sur la scène nationale. Feriez-vous la même chose si vous oeuvriez dans le secteur privé? Élimineriez-vous la moitié de vos employés qualifiés? Ce qu'il y a de particulier chez Radio-Canada et chez les employés qui s'y développent est qu'ils ont également une forte incidence sur notre industrie cinématographique. J'aimerais donc savoir quelles analyses des répercussions vous avez effectuées avant de coucher ce plan sur papier.

M. Robert Rabinovitch: Nous avons fait des analyses et avons examiné des façons de limiter les compressions d'effectifs qu'il nous faudra vivre. Comme vous le savez, il nous a fallu congédier 150 personnes à Toronto en février. Il s'agit donc là, malheureusement, d'un exercice continu. Ce n'est pas parce que nous aimons faire des mises à pied; c'est parce que nous sommes dans une camisole de force financière. Et si nous faisons ces choses, c'est que notre objectif premier est d'assurer une programmation de qualité.

Nous sommes très préoccupés par la perte de personnes de qualité. Nous sommes très préoccupés par le vieillissement de notre organisation et par le recrutement de jeunes gens, car c'est là notre avenir. Mais nous vivons également une réalité. J'ai accepté mon poste sachant qu'il allait me falloir faire des choix difficiles pour survivre. C'est là, malheureusement, ce que nous avons dû faire. Malheureusement, le dégraissage, le changement et la restructuration sont le mode de vie des années 90 et, maintenant, de l'an 2000, dans toutes les sociétés.

Heureusement que nous restructurons notre effectif à une époque où l'industrie est en croissance, où il y aura bien plus de possibilités pour les personnes désireuses de rester dans l'industrie avec les nouvelles licences qui vont être accordées. Il s'agit donc, à notre avis, d'une médaille qui a son revers. Il y aura plus de concurrence et plus de changements dans notre structure, mais, en même temps, il en résultera davantage de possibilités pour les personnes désireuses de rester dans l'industrie.

Je suppose qu'en bout de ligne, ce qu'il nous faut faire, c'est mettre autant que possible l'accent sur la programmation. Partout où nous pouvons économiser des ressources en vue des les consacrer à la programmation, c'est cela qu'il nous faut faire. Il nous faut fonctionner de façon aussi efficiente que si nous étions une société privée.

Le président: Nous vous reviendrons.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Bonjour, monsieur Rabinovitch et monsieur Redekopp.

C'est un message bien emballé que vous nous livrez ici ce matin. C'est enthousiasmant; on regarde ça et on se dit que c'est extraordinaire. Tout le monde a compris ce qui était bien emballé, mais j'aimerais jeter un coup d'oeil sur les petits caractères.

• 1005

Tout votre raisonnement est basé sur une réaffectation des ressources financières, et vous nous dites ce que vous allez réaliser avec cette réaffectation. De fait, ce que j'ai senti, c'est un virage où le visage régional va faire davantage de place au visage national. C'est une décision politique et c'est bien votre droit.

Mais je me demande ce qui sera sacrifié. Si on réaffecte des ressources, c'est qu'on les prend à gauche et qu'on les met à droite. Qui va-t-on déshabiller? Il y aura des pertes d'emplois, comme vous l'avez dit, et d'aucuns présument qu'elles seront importantes. Qu'est-ce que ces pertes d'emploi vont affecter exactement? Est-ce qu'elles vont affecter les régions? J'ai compris qu'on diffuserait un bulletin à l'heure du souper où toutes les régions se parleraient, ce qui veut dire qu'aucune région ne se parlera à elle-même pendant très longtemps.

On parle aussi de productions. On fera peut-être fabriquer ces productions à l'extérieur et on utilisera peut-être ce qu'on appelle la transculturalité; c'est-à-dire qu'on va utiliser des budgets du réseau français pour coproduire ou faire coproduire des productions avec le réseau anglais.

Je me souviens d'un certain M. Manera qui avait démissionné parce qu'il estimait être incapable de s'acquitter de son mandat en raison du budget insuffisant qu'on lui avait accordé. Ses successeurs, et vous en êtes un, nous ont dit qu'il y avait de la lumière au bout du tunnel. Mais, lorsque vous êtes arrivé, la lumière n'était pas aussi évidente que cela. Je crains que celui ou celle qui vous succédera ne se retrouve devant ce comité dans deux, trois, quatre ou cinq ans—cela dépendra de votre longévité et de votre patience—pour nous tenir un discours à peu près semblable au vôtre avec de nouvelles prévisions.

Monsieur Rabinovitch, il y a un phénomène qui s'appelle l'inflation, qui s'élève à 2 p. 100 par année et auquel vous n'échapperez pas. Et je n'ai pas parlé des augmentations salariales qu'on souhaite évidemment à tous nos bons employés de CBC et de la Société Radio-Canada. Vous dites vous-même que si vous étiez une entreprise privée et que vous alliez voir votre banquier, il vous dirait que vous allez vers la faillite. Dites-moi la vérité, monsieur Rabinovitch. Avez-vous besoin d'argent de la part du gouvernement?

Des voix: Ah, ah!

M. Robert Rabinovitch: Oui.

M. Pierre de Savoye: Merci, monsieur le président.

M. Robert Rabinovitch: Je dois cependant souligner qu'il nous appartient, comme gestionnaires, de gérer cette organisation dans les limites de l'enveloppe budgétaire existante. Nous devons essayer de trouver les sommes nécessaires dans l'enveloppe budgétaire de notre organisation. Je travaille de concert avec notre groupe de travail de réingénierie afin de trouver des moyens de gérer nos actifs de manière plus efficace afin que nous puissions identifier de nouvelles sommes d'argent qui nous permettront de gérer l'organisation dans un environnement où les coûts croissent sans cesse.

Vous avez mentionné l'inflation. Il faut également tenir compte des salaires et des ententes que nous avons signées avec les syndicats, lesquelles prévoient des hausses encore plus importantes que celles qu'a acceptées le Conseil du Trésor. Il nous appartient d'essayer de composer avec les actifs dont nous disposons, de gérer la société et de trouver, si cela est possible, les sommes nécessaires dans la boîte. Si on fait notre travail et qu'on veut réussir à offrir le service public qu'on a élaboré et qu'on vous a présenté aujourd'hui, cela va coûter de l'argent, beaucoup d'argent. Le gouvernement et le public devront prendre une décision à ce chapitre. Nous devons pour l'instant gérer l'organisation dans les limites de l'enveloppe budgétaire qu'on nous a accordée.

M. Pierre de Savoye: Monsieur Rabinovitch, si vous mettiez en oeuvre la proposition que vous nous avez présentée, le reflet d'une région pour elle-même ne serait-il pas diminué? Vous ne pouvez pas à la fois faire des mises à pied et maintenir la même quantité de productions régionales qu'auparavant, à moins que les ressources ne soient déjà bien mal utilisées. Vous nous avez dit que votre personnel était extrêmement dévoué et compétent. Je présume donc qu'il fait déjà tout ce qui est possible. Donc, moins de personnel veut dire moins de productions régionales.

• 1010

M. Robert Rabinovitch: Non, pas du tout. Au contraire, on dit vouloir changer la méthode de production et en particulier un programme, un programme qui n'est pas nécessairement adapté au secteur public. C'est un programme qui nous coûte beaucoup d'argent, et on pourra épargner de l'argent avec la réaffectation.

Nous avons notre budget de base. Il faut contrôler notre déficit, mais nous pouvons augmenter le nombre de personnes présentes dans les régions. Ces personnes seront là pour faire des rapports sur ces régions. Donc, la programmation ne diminue pas dans les régions. Par ailleurs, il y a une sorte de programme qui va disparaître.

M. Pierre de Savoye: Lequel?

M. Robert Rabinovitch: Il s'agit des nouvelles locales, ce que l'on appelle en anglais les supper hours.

M. Pierre de Savoye: Monsieur Rabinovitch...

Le président: Je vais revenir à vous.

[Traduction]

Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Merci, monsieur le président.

Messieurs Rabinovitch et Redekopp, merci d'être venus.

J'aimerais commencer par reprendre ce qui a été dit dans le vidéo, soit que CBC est un élément indispensable de la vie canadienne. C'est cela qu'est pour moi CBC, et c'est également le cas d'un très grand nombre d'électeurs dans ma circonscription. Comme Albert Schultz l'a si éloquemment dit, CBC raconte notre histoire et reflète nos vies. Mais raconter des histoires et refléter nos vies, cela veut dire différentes choses dans différentes régions.

Vous avez aujourd'hui commencé en disant que vous viviez deux crises: une crise d'identité et une crise financière. M. Redekopp dit que vous avez une nouvelle vision fondamentale. Pardonnez-moi d'être quelque peu sceptique quant à cette nouvelle vision. Oui, vous vous êtes attaqué à la crise d'identité, absolument, et c'est une vision merveilleuse. Mais pour ce qui est de la crise financière ou de l'insécurité financière, en quoi s'agit-il ici d'une nouvelle vision fondamentale? N'est-ce pas une simple répétition des réductions dans la programmation locale que l'on a déjà vues? Je me souviens que j'étais en école de droit à Windsor lorsque la programmation a été coupée là-bas. Ce devait être, à l'époque déjà, la solution.

Une autre chose qui me préoccupe est que vous avez maintes fois parlé de camisole de force financière, de seuil de rentabilité. Vous dites qu'à long terme il vous faut dégager davantage d'argent. Ce que l'on voit ici n'est que la pointe de l'iceberg. Si l'on commence à couper ici, que coupera-t-on encore?

Votre vision est merveilleuse. C'est un merveilleux mandat à vendre aux Canadiens, et il nous reflétera. Mais les gens craignent que si l'on commence à couper ces bulletins régionaux, ce ne sera que le début, et qu'ils continueront de s'effriter.

Où est le plan vous permettant d'obtenir tout l'argent qu'il vous faut pour réaliser toutes ces merveilleuses choses? Vous avez parlé de huit nouveaux bureaux et de ce fonds de démarrage. Vous dites ne pas avoir l'argent nécessaire pour vous déplacer. D'où va donc provenir cet argent? En même temps, vous parlez de réduire la publicité. D'où va provenir l'argent?

Je suis inquiète. Je suis très inquiète. J'aimerais que vous ayez l'argent. J'aimerais que vous puissiez finir votre mandat. Comment allez-vous régler le problème d'insécurité financière que vous vivez? Nous n'avons pas entendu d'explication sur la façon dont ce plan va être réalisé.

J'ai encore une autre question. Monsieur Rabinovitch, vous ai-je bien entendu dire que le rôle du télédiffuseur public n'est pas de faire les bulletins de nouvelles locaux?

M. Robert Rabinovitch: Permettez que je commence par répondre à votre dernière question. J'ai déjà déclaré publiquement qu'il nous faut avoir le courage, vu nos ressources limitées, de nous demander s'il n'y a pas certains secteurs dans lesquels le service est assuré de façon compétente par le secteur privé. Il nous faudra peut-être nous retirer de ces secteurs, car nous ne pouvons pas être tout pour tout le monde.

Ce que je dis et ce que j'ai voulu dire dans le contexte de ce programme que nous mettons de l'avant est qu'en ce qui concerne les journaux télévisés de 18 h, «dans l'ensemble», et dans presque toutes les régions du pays, le secteur privé a relevé le défi et assure la couverture et ce de façon très compétente.

Cela nous donne, pour en revenir à votre première question, la souplesse nécessaire pour réorganiser la société de façon à libérer les ressources nécessaires pour réaliser le programme que nous avons déposé et que vous avez vu. Je peux vous assurer que le programme tel que déposé, avec les changements que nous comptons apporter, est financièrement prudent et réalisable. Je ne peux pas vous assurer qu'à long terme nous n'aurons pas besoin de plus d'argent. Au contraire, si nous voulons maintenir et augmenter la présence du radiodiffuseur public, avec les menaces et les défis qu'amène la mondialisation, il nous faudra enrichir la radiodiffusion publique. Il n'en demeure pas moins que le programme tel qu'il vous a été présenté, avec les changements que nous souhaitons apporter, est financièrement responsable.

• 1015

Mme Sarmite Bulte: Mais, encore une fois, en quoi est-il différent de ce qui a été fait par le passé, lorsque CBC a fait des coupures?

M. Robert Rabinovitch: Eh bien, premièrement, je n'étais pas là.

Mme Sarmite Bulte: Je le sais.

M. Robert Rabinovitch: Je ne peux donc pas me prononcer là-dessus. Mais l'on peut dire que l'on a enduré chez CBC, sur une période de 16 ans, des coupures presque chaque année, sinon en dollars, alors autrement, mais concrètement. Il est très difficile d'essayer de continuer d'être tout pour tout le monde.

La différence—et peut-être que ce n'est pas très gentil à dire—est que cette fois-ci nous coupons un membre. Nous ne laissons pas le mal s'étendre à la société tout entière. La solution de rechange au statu quo—et permettez que je sois très clair—est d'étaler la douleur, mais il y aura toujours les mêmes pertes d'emploi, car nous ne pouvons pas faire ce que nous devons faire, et la programmation prévue aujourd'hui ne pourra pas être livrée en l'an 2000-2001—en d'autres termes, à l'intérieur du cycle actuel—sans pertes d'emplois importantes. C'est ce que je dis depuis que je suis arrivé en poste et qu'on m'a montré les chiffres. C'est une impossibilité.

Ce que nous espérons faire ici c'est accuser les pertes d'emploi et effectuer la restructuration d'une façon qui oriente la société vers l'avenir au lieu de la faire se retourner sur le passé.

Le président: Merci.

C'est M. Shepherd qui est le suivant sur la liste, mais, si j'ai bien compris, monsieur Wilfert, vous devez partir et allez voir si vous ne pourriez pas prendre sa place.

Très bien. Merci, monsieur Shepherd.

Monsieur Wilfert.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.

Nous avons beaucoup parlé aujourd'hui de vision et de ressources. Une partie importante du débat s'est déroulée dans les coulisses. D'après ce que j'ai compris, vous avez eu quelques sept plans différents au cours des 18 derniers mois. Nous en avons entendu des bribes. Vous avez aujourd'hui tenté de corriger certains éléments. Une partie de la responsabilité a bien sûr dû être assumée par vous, car ce débat aurait dû venir plus vite, ce qui aurait évité aux parlementaires, au public et aux médias d'en arriver à certaines conclusions.

Vous parlez de la crise d'identité. Vous présentez un tableau très intéressant qui, on en conviendra je pense tous, s'annonce très enthousiasmant. Mais il y a, encore une fois, la question des ressources, la question de disposer des dollars nécessaires pour faire le travail. En règle générale, vous avez une vision et vous dites: «Voici ce que cela va coûter. Voici quelles sont les options si nous voulons aller de l'avant avec le modèle A, le modèle B ou le modèle C». J'ignore quels étaient vos six autres plans. J'ignore s'il y a quelqu'un qui est au courant, mis à part les membres du Conseil d'administration. J'aimerais en tout cas pour ma part savoir quelles étaient ces autres options.

J'aimerais savoir quels sont les montants minimaux requis. Bien sûr, vous êtes moins dépendants de... Les coûts fixes comptent pour 40 p. 100, ce qui a une incidence sur la programmation, mais vous allez malgré tout, idéalement, réduire la publicité. Vous parlez toujours de plus de 670 congédiements. Et, en bout de ligne, je constate dans le feuillet de renseignements que vous faites des comparaisons... Je ne comprends pas pourquoi vous voudriez comparer CBC à BBC. Peut-être que vous pourriez comparer CBC à l'Australian Broadcasting Corporation, vu l'étendue du territoire des deux pays et les similitudes côté population. Vous soulignez que le radiodiffuseur australien se voit accorder 7,5 milliards de dollars pour une population qui est trois ou quatre fois celle du Canada.

Monsieur le président, j'aimerais vraiment savoir pourquoi, au lieu de saigner la société, vous ne mettez pas ceci sur la table: «Voici les options que nous voyons si vous voulez ce genre de CBC, si c'est ce que veulent les Canadiens»? Et d'après le sondage de Polaris en 1999... Mais vous n'avez présenté qu'une seule option, et une option qui, très franchement, paraît bien, mais, encore une fois, je ne voudrais pas que vous reveniez nous voir d'ici un, deux ou cinq ans pour nous dire: «Eh bien, nous pensions pouvoir réaliser ceci, mais cela n'a pas abouti, alors il nous faut X dollars».

Je me rends compte que le jour de votre arrivée en poste, monsieur Rabinovitch, jour où vous êtes venu nous voir ici, vous ne vouliez pas nous demander davantage d'argent. Mais, d'un autre côté, si vous voulez vraiment guider CBC vers le XXIe siècle, qu'on mette sur la table les faits en ce qui concerne vos besoins, pour qu'on puisse revenir sur les autres questions, comme par exemple la programmation régionale, etc. J'aimerais donc savoir quelles sont les options au lieu qu'on nous dise tout simplement: «Eh bien, voici la situation. C'est à prendre ou à laisser».

M. Robert Rabinovitch: J'aimerais faire quelques commentaires, si vous le voulez bien.

• 1020

Je suppose qu'il me faut dire mon mea culpa du fait qu'il y ait eu des fuites partielles au sujet du plan. La prochaine fois, j'ignorerai l'avis du Conseil d'administration et je publierai le plan. La réalité est que j'essayais de jouer selon les règles, et moi je les comprenais et je pensais qu'il en était de même des autres. Les règles étaient que l'on fait sont travail en tant que groupe de gestion, l'on apporte ses idées, aussi dures soient-elles, aussi difficiles soient-elles, et l'on prend ses décisions, en conseil, sur cette base, au lieu de s'appuyer sur de fausses impressions et des demi-vérités sur le retrait de certaines localités et d'autres choses du genre. Là-dessus, je me suis trompé. Bien franchement, je referai la même chose, car je respecte le conseil d'administration. Je pense que le conseil doit avoir le temps et la possibilité d'examiner différents plans.

En ce qui concerne les coupures d'emplois, et je sais que cela sera maintes et maintes fois mentionné, ce que vous avez, je pense, c'est un exemple d'un bout de papier sur l'une des possibilités les plus extrêmes qui ont été présentées au Conseil d'administration. Le conseil est toujours saisi des possibilités les plus extrêmes et de ce qui serait nécessaire pour nous remettre dans les limites du budget telles que celui-ci a été déterminé.

Je ne peux pas vous garantir que nous ne reviendrons pas ici dans deux à cinq ans. Ce marché est l'un des plus dramatiques et des plus dynamiques dans le monde à l'heure actuelle. Il est extrêmement stimulant d'oeuvrer dans le domaine de la télédiffusion. La situation change d'un jour à l'autre. Peu importe qu'il y ait ou non de nouveaux entrants qui proposent différentes façons d'assurer la programmation; la seule chose dont vous pouvez être sûr c'est que la situation ne sera pas la même le lendemain.

Tout est possible, étant donné notre dépendance à l'égard de la publicité, quel que soit le plan qui sera mis de l'avant. Nous n'avons pas vécu un ralentissement majeur, une récession majeure, ce que moi j'ai vécu dans le secteur de la radiodiffusion, pour tout d'un coup voir ces recettes de publicité s'écrouler et changer du tout au tout. Nous n'avons pas vécu une situation dans laquelle les annonceurs ont décidé de faire de la publicité au moyen d'autres tribunes.

Je peux vous assurer d'une chose, et c'est que je ne sais pas si je vais revenir d'ici deux à cinq ans pour vous dire que les choses n'ont pas abouti ou que nous n'avons pas l'argent nécessaire. Ce que je peux vous assurer, et c'est tout ce que je peux faire à l'heure actuelle dans les limites du budget qu'on nous a donné, dans les limites de notre structure, c'est qu'avec ce nouveau programme dynamique—et c'est vous qui en parlez ainsi—nous pourrons réussir si nous apportons les changements nécessaires. Nous pouvons aujourd'hui joindre les deux bouts. Nous pensons pouvoir y parvenir pour les deux ou trois prochaines années. Nous sommes à l'aise avec la structure en place. Nous avons une approche. Nous avons le financement, avec ces rajustements qui rendront cela possible.

Le président: Madame McDonough.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais moi aussi souhaiter la bienvenue à nos invités ici ce matin et leur dire combien cette discussion est pour moi importante.

J'aimerais commencer par souligner l'importance critique de la programmation régionale et locale dans le contexte du mandat de CBC et m'associer à la notion de Northrop Frye selon laquelle la culture est régionale.

Voilà pourquoi j'ai été complètement atterrée par votre logique quant à la décision de porter un coup mortel au journal télévisé de 18 h, étant donné surtout les cotes d'écoute. Si vous prenez la cote d'écoute de l'émission locale de 18 heures à l'Île-du-Prince-Édouard ou à Terre-Neuve, elle dépasse, et de loin, la cote enregistrée par le dernier épisode de MASH. Je ne pense pas que vous puissiez avoir un plus fort vote de confiance que celui qui vous est donné là par les cotes d'écoute pour le journal télévisé de 18 h.

Je vous ai écouté parler de votre reconnaissance de l'importance de la programmation régionale et de la programmation locale. Je vous ai entendu exprimer votre reconnaissance de la loyauté du personnel et de la loyauté de l'auditoire pendant cette période de compressions extrêmement difficile. Puis je vous regarde livrer des propositions qui vous font faire des pieds de nez à la loyauté de l'auditoire, surtout dans les provinces de l'Atlantique, mais également dans des localités comme Windsor et Winnipeg. Vous avez de très solides auditoires. Quant à la question de remercier le personnel de sa loyauté, après 3 000 coupures, en proposer encore 674 dans un secteur aussi critique que la programmation locale et régionale est une chose qu'il m'est très difficile de comprendre.

• 1025

Je songe à certaines de vos innovations audacieuses et votre vision en ce qui concerne certains changements radicaux est tout à fait la bienvenue. Cela me paraît excitant. J'aimerais également soulever une question. Si vous y croyez, et je pense que c'est le cas—je pense que vous voyez toute l'excitation qu'il y a derrière—pourquoi n'y investissez-vous pas? Ne le faites pas aux dépens de quelque chose d'aussi important que la programmation locale et régionale, qui a été si bien récompensée par la loyauté de vos auditoires.

Je suis bien évidemment une fière Canadienne de la région de l'Atlantique. Au cours des quatre derniers jours, je me suis rendue dans trois des capitales des provinces Maritimes où sont produits des journaux télévisés de 18 heures—St. John's, Charlottetown et Halifax. Je pense que vous devez des explications à ceux et celles qui croient fermement en la télédiffusion publique, qui croient en l'importance régionale et locale, mais qui ne comprennent tout simplement pas pourquoi vous sacrifieriez cela, qui est au coeur même de l'édification d'une nation.

Partager une nation, c'est très bien. L'idée de partager certains des grands spectacles, des grandes histoires, c'est très bien. Assurément, édifier un pays, c'est raconter l'histoire des gens, ce qui se passe dans leur localité, ce qui a une incidence sur leur région. Et tout particulièrement aujourd'hui, lorsqu'un si grand nombre de décisions ont une incidence sur la vie des gens dans les plus petites localités, dans les régions les moins peuplées et les moins prospères, le télédiffuseur public a une responsabilité toute spéciale. Quantité de répercussions sur la vie des gens sont en train de porter atteinte à leur sentiment d'appartenance à une nation, à leur idée de qui nous sommes et de comment nous nous insérons dans l'ensemble, à leur appartenance à la famille canadienne.

Je vous invite donc à réagir à ce qui est véritablement un plaidoyer désespéré. Ce ne sont pas seulement les députés de ces régions qui sont désespérés à l'idée que vous sacrifieriez la réussite de ces journaux télévisés de 18 h et de ses autres émissions régionales. C'est également le cas des législateurs, des gens dans la rue. C'est tout le monde qui demande: «Qu'arrive-t-il à la Société Radio-Canada, qui est censée nous inclure dans la notion de famille canadienne?»

M. Robert Rabinovitch: C'est difficile. Je ne conteste rien dans tout ce que vous avez dit.

Je suis allé à Terre-Neuve et j'ai été époustouflé par l'appui pour l'émission. Je me rends encore une fois la semaine prochaine dans l'est du pays, et je sais ce que vous me dites.

Je pense, sauf tout le respect que je vous dois, que vous êtes en train de mélanger deux idées, et quelques autres concepts. Vous mélangez deux idées, notamment le régional et le journal télévisé local de 18 h. Le journal télévisé de 18 h ne fonctionne que dans quelques localités seulement. C'est une source de gêne dans la mesure où ce journal ne fonctionne pas dans la plupart des endroits et il nous faut l'examiner dans son entier pour voir ce qui peut être fait.

La réalité est que là où je suis placé il me faut prendre des décisions et faire des choix douloureux dans ce que je recommande au Conseil d'administration. Il nous faut avancer et poser des questions à l'occasion et faire des choses dont nous ne sommes pas très fiers ni très heureux. Si vous permettez que je m'exprime ainsi, et vous ne serez peut-être pas de mon avis, ce sont ces genres de choix qu'il nous faut faire, étant donné la situation budgétaire à l'intérieur de laquelle nous devons fonctionner.

C'est un choix entre Street Cents et This Hour Has 22 Minutes et des émissions de ce genre qui sortent de régions que nous voulons protéger, développer et améliorer. C'est le choix d'avoir davantage de représentation régionale dans la programmation, par opposition à un genre particulier appelé «journal de 18 h». Voilà, en gros, le dilemme. Notre situation financière est telle que nous ne pouvons pas faire les deux choses.

Nous avons pris une décision. D'autres prendraient peut-être une décision différente; le Conseil d'administration de la Société Radio-Canada a pris une décision différente. Mais ne nous leurrons pas: en bout de ligne, il nous faire quelque chose sans quoi nous continuerons tout simplement de couper partout et de déraper vers un trou noir, et il n'y aura alors plus de CBC.

Le président: Madame McDonough, deux votes ont été prévus. Pour être juste envers les autres, je pense qu'il nous faudra revenir plus tard à vous.

Monsieur Muise.

• 1030

M. Mark Muise: Merci, monsieur le président, et merci à nos invités.

Monsieur Rabinovitch, vu l'heure, je ne vais pas répéter toutes les choses importantes qui ont déjà été dites ici aujourd'hui au sujet des raisons pour lesquelles nous devrions conserver nos journaux télévisés de 18 heures et tout particulièrement des émissions comme First Edition et Compas et Heure and Nom.

En tant que membre du comité et en tant que fier Néo-Écossais, je tiens à me faire l'écho de tout ce qui a été dit ici aujourd'hui. J'aimerais également vous saisir de l'importance de rapporter ce message au Conseil d'administration, car vous dites le respecter. Or, monsieur, le conseil doit vous respecter vous et respecter ce que disent les Canadiens. Vous n'avez pas devant vous de simples parlementaires siégeant à un comité permanent de la Chambre des communes: nous parlons ici au nom de Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

Monsieur Rabinovitch, je vous demande, je vous exhorte de rapporter ce message au Conseil d'administration en mettant toute la flamme que nous autres y mettons ici aujourd'hui.

Vous avez dit sans ambages plus tôt que vous êtes mécontent des conditions d'octroi de licences imposées par le CRTC. Je me demande si en menaçant de supprimer les journaux télévisés locaux de 18 h vous n'essayez pas tout simplement de soulever un tollé dans le seul but d'obtenir davantage d'argent.

M. Robert Rabinovitch: Dommage que je ne sois pas aussi doué que cela.

M. Mark Muise: Peut-être que vous l'êtes.

M. Robert Rabinovitch: Permettez-moi de réagir à certains points que vous avez soulevés.

Je pense qu'un débat au sujet de la télédiffusion publique est critique. Et, bien franchement, l'une des meilleures choses qui soient ressorties du contre-temps de janvier avec le CRTC a été l'enclenchement d'un tel débat dans ce pays. Je crois dans le processus politique: si le public réagit et demande au gouvernement d'investir plus d'argent dans le radiodiffuseur public, nous aurons réussi et nous aurons un système de télédiffusion publique plus sain et plus fort.

Je ne nie donc pas le débat. En fait, j'en retire énormément de plaisir et je pense que c'est ce qui doit se passer. Je pense que les coupures qui se font, comme je l'ai dit, depuis 16 ans, ont été très destructrices et que si ce n'était la qualité des gens que nous avons, qui sont restés et qui ont travaillé, qui ont fait des choses qu'on n'aurait jamais pu imaginer, nous serions bien plus mal pris aujourd'hui.

Je devrais m'arrêter là, mais je n'ai pas encore appris à me taire, alors je vais dire ceci. Nous allons définitivement transmettre le message au Conseil d'administration. Je pense d'ailleurs qu'il est absolument critique que nous le lui transmettions. Mais il me faudra, monsieur, transmettre plusieurs messages au conseil. Il me faudra lui dire toute l'inquiétude que vous et nous avons tous en ce qui concerne les émissions de 18 h. Il me faudra leur dire que nous nous trouvons dans une situation financière telle qu'il nous faut couper, et beaucoup. Il me faudra leur dire qu'exception faite d'un ou deux endroits, lorsque vous regardez la cote d'écoute du journal de 18 heures, nous avons une part de 2 p. 100 à Edmonton, avec un auditoire de 10 000 personnes, et une part de 3 p. 100 à Saskatoon.

Nous pouvons les uns les autres citer des chiffres. Sur les 14 émissions, il y en a trois ou quatre qui réussissent très bien, j'en conviens, et cela sera rapporté au Conseil d'administration. Mais il faut lui rapporter toute l'histoire, et c'est ce qui a été fait jusqu'ici.

M. Mark Muise: Ne détruisez pas les bonnes émissions.

M. Robert Rabinovitch: Oui, je comprends.

Le président: J'aimerais dire aux membres du comité que je pense que nous avons un petit problème avec les questions et le temps prévu, car la liste est encore longue, bien sûr, et il y a deux votes qui s'en viennent. Il y aura une première sonnerie de 30 minutes, qui devrait commencer à retentir incessamment, et nous aurons donc 30 minutes pour nous rendre à la Chambre. Dès que nous aurons terminé ce vote, il y aura une autre sonnerie de 30 minutes, ce qui veut dire que si les députés veulent revenir ici, il leur faudra presque tout de suite retourner à la Chambre des communes. Il nous faut donc, en gros, boucler notre travail dans les 25 prochaines minutes si nous voulons pouvoir revenir et nous occuper de la motion de M. Mills. Voilà quelle est la triste situation. Nous pourrions peut-être donc nous limiter à de courtes questions afin que chacun ait l'occasion d'intervenir.

La liste d'intervenants est longue. J'ai M. Limoges, M. Easter, Mme Carroll, M. Shepherd et M. Bélanger. Si vous pouviez être brefs, cela nous permettrait de faire un maximum avant la sonnerie de 30 minutes.

Monsieur Limoges.

• 1035

M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vais aller droit au but. Je pense que vous connaissez les chiffres. Les statistiques du BBM montrent que la suppression du journal télévisé local à Windsor supprimera l'émission la plus populaire offerte par CBC à Windsor.

Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de répéter ce qui a déjà été dit. Même si vous ne travailliez pas pour CBC il y a dix ans, je suis certain que vous avez entendu parler d'une marche menée par le maire d'alors, John Milson, et qui avait réuni plus de 10 000 personnes. J'y ai participé il y a dix ans, lorsque j'étais membre du conseil municipal. Cela montre que le journal télévisé local de CBC est extrêmement important pour les gens de Windsor. Les 350 000 habitants de Windsor et du comté d'Essex sont bien franchement sur les lignes de front. Nous sommes une tête de plage dans la lutte du canadianisme contre les gros chars américains qui nous entourent. Et nous sommes différents de beaucoup d'endroits au Canada. Peut-être qu'il existe certaines ressemblances avec d'autres régions du pays sur les extrémités, mais même les localités de la côte Est et de la côte Ouest sont entourées par beaucoup plus d'eau. Nous, nous sommes entourés par un énorme marché qui n'est pas canadien, et c'est une situation toute différente.

Je comprends également, d'après ce que vous avez dit, que nous pouvons commencer à pleurer la perte du journal télévisé local si vous faites ce que vous avez prévu. Mais je comprends également que vous allez perdre environ 120 millions de dollars de revenus de publicité si vous n'offrez plus de programmation locale. Si j'ai bien compris les décisions antérieures du CRTC, vous devrez vous limiter à chercher à vendre des publicités nationales et régionales seulement, et non plus locales, si vous choisissez de ne plus offrir d'émissions locales. J'imagine que c'est également la raison pour laquelle vous dites que vous allez redéfinir ou réduire l'importance de la publicité.

J'adore ce que vous dites vouloir offrir sur le plan redéfinition de CBC. Tout cela est formidable. Mais pourquoi le faire aux dépens, en tout cas à Windsor, de votre émission la plus populaire? À Windsor, nous avons plus besoin que nulle part ailleurs du journal télévisé local pour nous aider à maintenir notre identité canadienne.

M. Robert Rabinovitch: Tout ce que je peux vous dire c'est que je vous entends. Nous soumettrons cela au Conseil d'administration. Notre préoccupation et notre problème demeurent les mêmes. Nous sommes dans une camisole de force financière. Si ce n'est pas le journal télévisé local et si nous décidons, en tant que conseil, de conserver le journal télévisé local, alors il nous faudra couper autre chose. Nous couperons autre chose qui a un caractère canadien distinctif. Nous couperons de la programmation que nous voulons mettre sur les ondes parce qu'elle aide à définir CBC en tant qu'instrument proprement unique, et nous poursuivrons alors notre dérapage vers nulle part.

Je n'essaie pas d'aligner le débat sur la question des bons contre les méchants. J'essaie d'expliquer que si vous avez un budget limité, un budget ciblé, il vous faut—et, je m'excuse, mais je viens du secteur privé—il vous faut couper le tissu en fonction des vêtements à façonner. Et il y a certaines choses que nous ne pouvons tout simplement pas faire.

M. Rick Limoges: Êtes-vous en train de dire que si vous aviez plus d'argent, il n'en serait pas question? Soyons clairs.

M. Robert Rabinovitch: Non. Si nous avions plus d'argent, je discuterais de la question avec le Conseil d'administration et nous examinerions la meilleure façon d'utiliser cet argent, étant donné la programmation que nous voulons mettre sur les ondes et la direction dans laquelle nous voulons engager CBC. Nous ne...

M. Rick Limoges: Vous donnez plus d'argent ne rétablirait pas la programmation locale. J'aimerais que vous soyez clair là-dessus.

M. Robert Rabinovitch: Nous donner plus d'argent résulterait en une discussion avec le Conseil d'administration, et cela pourrait ou ne pourrait pas rétablir la programmation locale.

Le président: On vient de me faire savoir que même s'il y aura une sonnerie de 30 minutes, ce sera un maximum de 30 minutes. Le vote débutera dès qu'il y aura suffisamment de personnes à la Chambre. On nous demande donc de nous y rendre le plus tôt possible. Poursuivons donc avec les questions, de telle sorte que lorsque la sonnerie retentira, nous ne prendrons que quelques minutes pour nous rendre à la Chambre.

Je suis vraiment très déçu pour M. Shepherd. Il a cédé son tour et il est maintenant très mal pris. Si cela vous convient, je vais donc commencer par lui. Très bien.

• 1040

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Rabinovitch, lorsque vous êtes venu nous voir en février, vous avez déclaré que vous ne reviendriez pas à moins de pouvoir nous présenter un plan financier et que vous ne nous demanderiez pas d'argent à moins d'avoir en place un plan financier. Ce que vous nous avez donné aujourd'hui, il me semble, ne constitue pas un plan financier. J'ai l'impression qu'il y a beaucoup de bonnes intentions et beaucoup d'insinuations.

Je suppose que ce dont il est question c'est d'un genre de redistribution des ressources au sein de la société. Il est question en partie de réduire l'hémorragie et en partie de financer certaines de vos nouvelles émissions.

Lorsque vous étiez ici en février, un autre point que vous avez soulevé était la disposition des immobilisations. Vous êtes plusieurs fois revenu sur ces 40 p. 100 de coûts fixes. Ce qui m'a toujours ennuyé avec cette logique est que l'on prenait des biens immobiliers et qu'on les jetait dans un pot qui était en définitive une passoire. Vos observations me ramènent à cela et me font vous imaginer revenir nous voir dans deux ou trois ans pour nous dire: «Écoutez, tout cet argent est parti. Qu'allons-nous faire maintenant?»

Ce que j'aimerais donc savoir c'est où se trouve le plan financier. Comptez-vous présenter aux députés et donc au pays un plan financier précis détaillant les ressources qui vont être coupées, et je veux parler ici non seulement des pertes d'emplois mais également de certaines des immobilisations? Je sais que vous avez parlé de louer certains de ces biens immobiliers. Vous avez parlé de la possibilité de changer une partie de la culture de CBC de façon à ne plus être qu'un radiodiffuseur, mais bien un locateur également.

J'aimerais que vous répondiez à certaines de ces questions, mais ce qui m'intéresse surtout c'est de savoir où est le plan.

M. Robert Rabinovitch: Le plan, monsieur, est le suivant: le programme que nous avons déposé est un programme équilibré dont nous avons assuré le conseil d'être en mesure d'exécuter financièrement. C'est le conseil qui doit décider de l'accepter ou de le rejeter, et le conseil comprend nos contraintes financières. Ce que nous avons déposé et ce que vous avez vu est un plan équilibré que nous pensons financièrement prudent et faisable.

Quant à la question de la liquidation d'immobilisations et de biens immobiliers, permettez-moi d'être très clair. Nous sommes en train d'examiner la façon dont nous gérons nos biens, dont nous en avons beaucoup un peu partout au pays, et la façon dont nous gérons la transmission et la distribution. Notre groupe de travail sur la restructuration est en train d'examiner la façon dont la Société Radio-Canada gère ses établissements et tous leurs aspects.

Nous n'avons aucune intention de vendre quoi que ce soit comme solution à court terme. Tout l'argent que nous recevons... Ce que nous souhaitons faire c'est gérer ces avoirs avec prudence de façon à assurer des revenus à la société. En d'autres termes, nous n'allons pas mettre des immeubles en vente à moins de ne plus pouvoir nous en servir, auquel cas nous en retirerons l'argent et mettrons cet argent en banque pour vivre des intérêts et utiliser ces fonds selon nos besoins à des fins de programmation et de développement. Mais il ne s'agit pas là d'une solution à court terme, et c'est pourquoi nous acceptons pour l'heure de souffrir.

Nous n'avons pas la moindre idée, monsieur, de ce que nous pourrions retirer de ces biens immobiliers. Nous examinons sérieusement la situation; nous l'examinons professionnellement. Nous faisons appel à des professionnels pour nous aider avec la gestion de nos immobilisations. Mon travail dans le secteur privé m'a au moins appris que l'on ne peut pas faire de l'argent avec des immobilisations avant d'en y avoir investi. Il nous faudra faire des améliorations locatives et d'autres choses du genre si nous voulons pouvoir retirer des revenus de ces biens. Nous gérerons cela de façon à pouvoir, nous l'espérons, en retirer davantage d'argent à l'avenir.

Mais du point de vue planification—et j'ai déjà dit ceci explicitement à la direction—nous ne pouvons pas dépenser de l'argent que nous n'avons pas encore et que nous n'avons pas produit, parce que cet argent ne sera peut-être pas là. Il se pourrait fort bien qu'en bout de ligne nous ne puissions pas produire les fonds souhaités. J'y crois, mais je pense qu'il faudra attendre deux ou trois ans avant de pouvoir inscrire des revenus à la rubrique recettes de gestion de biens immobiliers ou recettes d'installations de transmission.

J'ai des raisons d'être confiant étant donné les expressions d'intérêt qui sont venues du secteur privé et des mécanismes et des moyens de gestion de biens et d'installations de transmission que j'ai vus, mais ce ne sont là que des raisons d'être confiant; ce ne sont pas des faits. Ce ne sera pas un fait et je ne dépenserai pas d'argent et nous ne dépenserons pas d'argent tant que nous ne verrons pas quelque chose de concret. Nous ne dépenserons l'argent que si nous voyons une source de revenus qui servira la société à long terme.

Le président: Monsieur Easter.

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais savoir, de façon générale, comment vous avez déterminé ce que le public veut selon vous. Vous avez esquissé plusieurs choses, parlé d'un certain nombre d'émissions, etc. En ce qui concerne les émissions de 18 h, qu'est-ce qui est plus distinctement canadien que ce que font les Canadiens jour après jour? Regardez les cotes. Alexa et les autres ont mentionné les cotes enregistrées à Charlottetown et à Saint John.

• 1045

S'agissant de vos nouvelles émissions mixtes nationales-régionales, si l'illustration de ces dernières est ce que vous diffusez dans l'Île-du-Prince-Édouard les fins de semaine, l'émission The Maritimes Tonight, en ce qui me concerne, je ne la regarderai pas, pas plus que la plupart des autres Prince- Édouardiens, car ce n'est pas... Nous regarderons The National. Nous aimons The National. Ce journal nous donne le contexte canadien. Et pour ce qui est de The Maritimes Tonight les fins de semaine, allez donc faire quelques sondages et vous constaterez qu'au lieu d'avoir un taux d'écoute de 68 p. 100 à 76 p. 100 à Charlottetown pour le journal de 18 h en semaine, en fin de semaine vous n'avez plus guère que 20 p. 100. Je ne connais pas les chiffres, mais c'est une émission que nous ne regardons pas car nous ne nous identifions pas avec elle.

À Charlottetown, nous n'avons pas d'autre choix que CBC. Le journal fait partie de la ville. Il montre tout, depuis les campagnes pour le Timbre de Pâques jusqu'aux téléthons.

Ma dernière remarque est pour dire de ne pas vous priver d'une ressource financière dont vous jouissez actuellement. Curieusement, beaucoup des critiques que j'entends viennent du secteur privé. Les entreprises font de la publicité sur CBC dans l'Île-du-Prince-Édouard, et ne voient pas actuellement de problème. Avec ces cotes d'écoute, elles veulent la possibilité de passer des annonces locales et se demandent où elles vont le faire dorénavant. Elles ne vont certainement pas acheter des publicités sur Maritimes Tonight, car ce n'est pas le genre d'émission qu'elles veulent.

Ça marche bien. Pourquoi ne pas construire sur cette base, au lieu de tout détruire?

M. Harold Redekopp: Je pourrais peut-être commencer.

Tout d'abord, il faut savoir que le paysage est multiforme. Croyez-moi, je ne connais que trop bien l'historique des journaux de 18 h. Au cours des dix dernières années, nous les avons transformés au moins quatre fois, à cause des contraintes financières. Nous avons dû effectuer des choix difficiles et, chaque fois, nous avons choisi de favoriser The National—c'est-à-dire le journal pancanadien—plutôt que le journal local.

Nous sommes donc aujourd'hui dans une situation où, il est exclu que nos journalistes puissent percer puisque tout va contre eux. Ils réussissent bien dans certaines localités des Maritimes, mais je peux vous dire que cela ne marche pas du tout ailleurs.

Nous devons donc nous recentrer sur notre mandat, qui exige que nous offrions un service national. Nous sommes tenus de fournir un service équivalent dans tout le pays. J'ai déjà parlé des trous noirs. Si nous rétablissions les journaux de 18 h, nous devrions les rétablir dans des villes comme Saskatoon, qui ont dû y renoncer, et nous avons dû en payer le prix. Calgary n'a jamais disposé de moyens adéquats. Nous avons d'énormes, d'énormes problèmes.

Ayant suivi tout cela pendant dix ans, je dois dire qu'il est décourageant de voir des gens talentueux, brillants, qui pourraient rencontrer un succès énorme, mais dont le budget s'évanouit—ils n'ont pas de budget de développement, ils n'ont pas de budget de déplacement. Il n'est pas étonnant que leur part d'audience s'effondre.

Donc, sauf votre respect, monsieur, nous sommes acculés à concentrer notre effort. Comment pouvons-nous servir au mieux l'ensemble du public canadien? Comment revenir à l'essentiel de notre mandat, soit refléter toutes les parties du pays à l'ensemble et à chacun de nous? Comment faire cela avec nos contraintes budgétaires au cours des cinq prochaines années? Voilà ce que le président et moi-même ne cessons de dire.

Forcément, il y aura quelques perdants, et ceux qui veulent les nouvelles locales ne seront pas satisfaits d'un programme pancanadien. Mais j'estime qu'il y a tout autant de téléspectateurs intéressés à un journal pancanadien qui regarderont cette émission. Il faudra quelques années pour la construire, mais nous pensons être capables de construire un nouvel auditoire pour ce genre de programmation.

Pour ceux qui tiennent absolument aux nouvelles locales, c'est regrettable, mais il nous sera impossible dans ce scénario d'offrir des journaux locaux.

Le président: Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vais essayer de poser des questions précises. Je vais les poser dans l'ordre et j'apprécierais que vous y répondiez succinctement.

• 1050

À la question de savoir si la SRC va réduire les annonces publicitaires, je crois que Mme Bulte l'a déjà posée, mais je n'ai pas entendu la réponse. J'aimerais donc connaître la réponse.

Pour ce qui est du Conseil d'administration, vous avez expliqué que des éléments de votre plan ont été révélés au public et que cela vous a posé un dilemme. Est-ce que le Conseil d'administration, dans son ensemble, souscrit à la vision que vous avez esquissée ici, ce matin?

Lorsqu'il est question de gros sous, j'écoute très attentivement, car on dit parfois dans les journaux, monsieur Rabinovitch, que le problème n'est pas réellement une question d'argent. Or, ce matin, le message est que vous avez besoin d'argent. Ai-je bien saisi, est-il exact que vous parlez de deux ensembles de fonds, ceux dont vous avez besoin pour concrétiser la vision que vous avez esquissée, qui englobe la programmation régionale? Vous dites donc que vous n'avez pas besoin de fonds supplémentaires pour cela, mais que si vous deviez conserver les journaux locaux, vous auriez besoin d'argent. Pourriez-vous m'aider à y voir clair dans ces deux caisses différentes?

Ma dernière question concerne votre définition de la région. Il me semble que le mandat que vous impose le CRTC, un organe indépendant, est très clair: vous devez offrir des émissions aux régions. Mais il s'agit peut-être là d'un concept de région différent. Est-ce que par région vous entendez les neuf régions—désolée, ce n'est peut-être pas le bon chiffre—que distingue le CRTC, ou bien avez-vous redéfini les régions en fonction des fuseaux horaires, c'est-à-dire que l'on parle là de deux notions de régions différentes?

J'aimerais vos réponses à ces questions. Merci.

M. Robert Rabinovitch: Je serai bref également. Comme nous l'avons indiqué dans le vidéo, nous souhaitons réduire les annonces publicitaires graduellement. Mais nous pensons, vu nos contraintes financières, qu'il sera très difficile de les réduire de beaucoup pendant les premières années de ce programme. Plus tard, peut-être pourrons-nous les diminuer davantage. Il y aura toujours des annonces publicitaires à la SRC. C'est une affirmation catégorique, mais je n'hésite pas.

Nous pensons que le premier secteur où nous devrions réduire les annonces, voire les éliminer complètement, sont les journaux télévisés. Cela ne fait que deux ou trois ans que nous en diffusons pendant les journaux, et je ne peux pas dire que le public les ai accueillies à bras ouverts. D'ailleurs, lorsque nous avons commencé, nous avons enregistré des baisses sensibles des cotes d'écoute. Je pense également qu'elles modifient fondamentalement l'image d'un radiodiffuseur public.

Deuxièmement, pour ce qui est de la vision, je ne puis m'exprimer au nom du conseil. Nous en avons discuté au conseil. La réunion a été longue. Je pense que le conseil est préoccupé par certains aspects particuliers des coupures, tout en reconnaissant qu'il faudra bien en effectuer et se faire une raison—il faudra se faire une raison. L'impression générale que j'ai retirée—et ce n'est qu'une impression... Je ne veux pas faire dire au conseil ce qu'il n'a pas dit. Mon sentiment est que le conseil considère, tout compte fait, que le plan présenté par la direction—et le conseil nous l'a demandé il y a 15 ou 18 mois—est solide et place la SRC sur la carte de la télévision anglaise de la manière qu'il souhaitait.

Mme Aileen Carroll: Cela signifie-t-il qu'il est d'accord avec le plan ou non?

Le président: Madame Carroll, laissez donc M. Rabinovitch finir de répondre, à tout le moins.

M. Robert Rabinovitch: En ce qui concerne les fonds, tout le monde aimerait en avoir davantage. L'argent évite beaucoup de problèmes, mais la réalité, encore une fois... Vous vouliez savoir s'il y a deux caisses distinctes. Il s'agit plutôt de deux problèmes différents qui se sont rejoints. Un problème est le recentrage à long terme de la SRC et son visage future, et l'autre problème sont les contraintes financières qui s'imposent à nous cette année.

Le gouvernement, le Conseil du Trésor, ne nous a pas soulagés de ces contraintes financières. Nous devons respecter notre budget. Ce n'est pas comme si—pour reprendre l'analogie que j'ai employée la dernière fois—je pouvais aller à la banque et demander un prêt pour faire la soudure en attendant que nous construisions la société. Ce n'est pas une possibilité pour nous.

• 1055

On nous a dit de nous débrouiller avec les crédits que nous avons. Nous avons expliqué quelles seraient les conséquences—qu'il y aurait des modifications radicales—et on nous a dit de faire ce qu'il fallait pour repositionner la SRC. Il est plus important de repositionner la SRC et de regagner la faveur du public et on nous donne l'argent pour cela, mais malheureusement on ne nous a pas offert de boucher les trous dans notre budget d'aujourd'hui.

En ce qui concerne les régions, la définition que nous employons est conforme à celle du CRTC. Nous pensons que l'ensemble du programme que nous présentons est très conforme à ce que nous demande le CRTC, et nous avons défini les régions en gros sur la base des fuseaux horaires.

Mme Aileen Carroll: Des fuseaux horaires...?

M. Robert Rabinovitch: Oui, pas une base provinciale. Le programme que nous présentons est structuré sur une base régionale, pas provinciale.

[Français]

Le président: Monsieur Bélanger.

[Traduction]

M. Mauril Bélanger: Je suis heureux que nous ayons cette discussion, car il y a un peu de confusion quant au sens d'un journal local et d'une région, car si vous avez le fuseau horaire comme région, beaucoup de gens pensent être une région et mériter un journal local. C'est en partie là la cause du problème, à mon avis, monsieur.

Monsieur le président, j'avais plusieurs questions, mais nous allons manquer de temps et je me limiterai à une seule. En ce qui concerne l'infrastructure, dont vous dites qu'elle accapare 40 p. 100 de votre budget, prévoyez-vous la vente de l'infrastructure régionale que vous n'utiliserez plus, de façon à louer vos locaux plutôt que d'en être propriétaire?

M. Robert Rabinovitch: Il est trop tôt pour vous donner une réponse précise, monsieur Bélanger. Nous avons l'intention d'utiliser notre infrastructure de la manière la plus efficiente possible. Il est tout à fait concevable que dans certains endroits il soit plus logique pour nous de louer, de nous défaire de certains bâtiments. Dans d'autres cas, la logique pourra dicter que nous conservions un immeuble et louions l'espace excédentaire—mais nous avons beaucoup de bâtiments dans beaucoup d'endroits dont nous n'occupons pas tout l'espace.

M. Mauril Bélanger: J'espère que vous réfléchirez aux répercussions de la vente de ces immeubles sur la capacité d'une région ou localité à faire plus que rassembler l'information, car j'imagine qu'à l'heure actuelle certains de ces locaux ne servent pas seulement à réaliser le journal télévisé de 18 h.

M. Robert Rabinovitch: Rarement, monsieur.

M. Mauril Bélanger: Oui, mais comment comptez-vous que la région puisse jouer un rôle dans votre plan, qui prévoit la production de toutes sortes d'émissions différentes, si elle ne possède pas de locaux dans lesquels travailler?

M. Robert Rabinovitch: Pourriez-vous m'aider, Harold?

La plus grande partie du travail de production que nous faisons actuellement, hormis les journaux télévisés—et je demanderais à M. Redekopp de vous donner des précisions—est en collaboration avec le secteur privé. Dans la plupart des cas, les sous-traitants n'utilisent pas les locaux de la SRC, et la vente d'un bâtiment donné n'aura pas de conséquences à ce niveau. Comme je l'ai dit, rien n'est encore décidé, mais si nous choisissons de céder un local donné, cela ne change en rien la possibilité de travailler avec des producteurs locaux indépendants. Voilà la réalité.

M. Mauril Bélanger: Bien. Je vais aborder un autre sujet. On vous a attribué le propos, à tort ou à raison—et vous rectifierez si c'est erroné—que même si vous aviez plus de moyens, vous opteriez quand même pour le plan que vous proposez. Est-ce exact?

M. Robert Rabinovitch: J'ai dit qu'il est plus important pour moi de repositionner CBC et de résoudre le problème d'identité et d'image du service en langue anglaise, et si nous avions davantage de fonds—un très grand «si»—je soumettrais au conseil des idées et propositions en ce sens. Mais j'ai dit sans détour que mon premier objectif est d'améliorer la qualité de la programmation nationale et, en particulier, la qualité de notre présence dans les régions, de façon à donner aux régions une plus grande représentation dans nos émissions nationales. Ce n'est pas nécessairement de posséder davantage d'équipements.

M. Mauril Bélanger: Monsieur Redekopp, pouvez-vous me dire combien de minutes du journal de 18 h sont produites maintenant dans le réseau de Télévision anglaise?

M. Harold Redekopp: Excusez-moi, pourriez-vous répéter la question?

M. Mauril Bélanger: Vous avez l'Île-du-Prince-Édouard qui a un journal...

M. Harold Redekopp: Nous en avons 14.

M. Mauril Bélanger: Combien de minutes sur cette heure du journal sont diffusées simultanément à travers le pays?

M. Harold Redekopp: Dans les journaux actuels, voulez-vous dire?

M. Mauril Bélanger: Oui.

• 1100

M. Harold Redekopp: Sur les 14, je crois que neuf ou dix produisent 60 minutes et 30 minutes. Donc, ces régions produisent 90 minutes par jour, cinq jours par semaine, et les trois restantes produisent 60 minutes seulement pendant cinq jours. Vous pouvez donc faire le calcul.

M. Mauril Bélanger: C'est donc 500 ou 600 minutes, en gros?

M. Harold Redekopp: Oui.

M. Mauril Bélanger: Combien de minutes y aurait-il dans cette proposition que vous présentez au conseil?

M. Harold Redekopp: Il y en aura forcément moins. Nous parlons ici d'un CBC réduit. Il y aura moins d'heures de production, c'est certain. La lourdeur de nos coûts est due en partie à nos unités de production multiples. Nous allons donc certainement produire en tout moins de minutes, moins d'heures. C'est ce que prévoit le plan, et personne n'a cherché à le cacher. Nous disons que nous allons travailler très fort pour avoir davantage de contenu régional dans les émissions qui seront diffusées à l'échelle nationale.

Mettons les choses ainsi. Nous avons, en quelque sorte, deux catégories d'activités. En fait, nous en avons plus, mais résumons-les à deux. L'une est l'activité locale et l'autre est l'activité nationale. D'une certaine façon, si cette proposition est acceptée, nous allons abandonner l'activité locale et nous concentrer sur l'activité nationale. À l'intérieur de celle-ci, nous allons accroître le contenu régional. Voilà l'essence de la proposition que nous formulons. Il y aura beaucoup moins de programmation locale.

M. Mauril Bélanger: Pourtant, à Ottawa, par exemple, vous avez une part de 10 p. 100 d'un marché de 750 000 téléspectateurs, ce qui fait donc 75 000. Est-ce cela que vous dites? Vous allez laisser tomber ce public. C'est contraire à votre mandat, qui est d'être le reflet des régions, pour elles-mêmes et entre elles.

M. Harold Redekopp: Tout d'abord, la part de 10 p. 100 équivaut à 39 000 téléspectateurs, car il faut bien voir ce qu'est une part. Une part, c'est la part des téléspectateurs qui regardent la télévision à 18 h. Ce n'est pas la population totale. Et c'est ce que l'on appelle une cote. Voici donc la part, et elle représente 39 000 personnes. Vu les coupures budgétaires subies par cette station, je trouve que c'est un chiffre très honorable.

M. Mauril Bélanger: Je sais cela et l'on en a beaucoup parlé, mais vous avez peut-être là un groupe de téléspectateurs qui seraient intéressés à faire en sorte que les crédits allant à la SRC soient augmentés. Or, nous entendons des positions contradictoires de la part de la SRC. J'entends plein de déclarations contradictoires.

M. Robert Rabinovitch: Sauf votre respect, monsieur, il n'y a pas de contradiction dans nos propos. Nous avons dit explicitement que l'objectif premier est de repositionner la SRC et tout crédit qui pourrait nous être accordé sera envisagé dans ce contexte, sous réserve de l'avis de notre Conseil d'administration.

M. Mauril Bélanger: Améliorer The National est une priorité...?

M. Robert Rabinovitch: Je vous dis quelle est ma priorité. La priorité de mon conseil sera peut-être différente, mais il est faux de dire que nous envoyons des signaux contradictoires.

[Français]

Le président: Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Plus tôt, monsieur Rabinovitch, vous avez bien précisé qu'il n'y aurait pas de coupures au réseau français de télévision parce que c'est déjà fait. Cela s'est fait sans qu'il y ait un débat comme celui qu'on a aujourd'hui. Je dois dire que les régions en ont souffert et qu'elles en souffrent encore. Je dois signaler, entre autres choses, que la télédiffusion des matchs des Expos n'existe plus. J'espère que vous ne nous annoncez pas dans votre projet que celle des Blue Jays va aussi disparaître.

Vous êtes vous-même un Anglo-Montréalais. Il me semble que le bulletin de nouvelles locales, à tout le moins le bulletin québécois, présente un certain intérêt pour les Anglo-Québécois.

En fait, un bulletin de nouvelles locales, c'est important, surtout de la part de Radio-Canada, parce que ça établit un niveau de qualité et aussi parce que ça assure une diversité des sources d'information. La disparition du bulletin local pose deux problèmes: d'abord, Radio-Canada n'établira plus le niveau de qualité sur le marché local et, deuxièmement, ce sera une source d'information de moins pour le consommateur, qui y a pourtant droit.

Vous avez déclaré ceci quand vous êtes venu nous voir le 17 février:

    Dès le départ, je tiens à préciser une chose. Il ne s'agit pas pour le moment de solliciter des fonds additionnels [...]. Je suis fermement convaincu que la première mesure à prendre consiste à tout mettre en oeuvre pour que Radio-Canada devienne un radiodiffuseur public aussi efficient que possible.

Monsieur Rabinovitch, l'efficience ne consiste pas à se couper un membre pour consommer moins d'énergie. L'efficience consiste à utiliser les ressources que l'on a pour mieux faire la même chose, ou encore à prendre moins de ressources pour faire au moins la même chose aussi bien. Or, ce n'est pas ce que vous nous annoncez aujourd'hui. Vous l'avez dit plus tôt: on s'ampute; on se coupe un membre. C'est inadmissible.

• 1105

Ce que je comprends et qui m'apparaît relativement tragique, c'est que le soutien de la Société Radio-Canada à l'édification d'une identité nationale se fait au détriment du sentiment d'appartenance régionale de chaque Canadien et Canadienne et de chaque Québécois et Québécoise. Est-ce que j'ai raison, monsieur Rabinovitch?

M. Robert Rabinovitch: Je ne suis pas certain d'avoir bien compris la fin de votre question, mais je vais essayer d'y répondre. Si ça ne vous plaît pas, peut-être pourrez-vous me l'expliquer de nouveau.

Je suis absolument d'accord avec vous pour dire qu'une des raisons d'être du service public, c'est de définir et d'essayer de créer un niveau de qualité. C'est aussi une source d'information importante. C'est justement pour cela que l'on veut augmenter le nombre de personnes sur le terrain, même à Québec, dans tous les secteurs, pour essayer d'augmenter la qualité de l'information sur les ondes. Un programme local ayant un taux de participation de 5 p. 100 pour un auditoire de 25 000 personnes et qui occupe la troisième place—parce qu'il y a un nouveau système de Global dans le même marché—n'est pas absolument nécessaire pour établir les principes que vous avez mentionnés et expliqués.

Au sujet des Expos, je dois dire qu'on a essayé plusieurs fois de diffuser leurs matchs. Comme vous le savez, je travaille avec cette compagnie, mais les prix étaient épouvantables.

M. Pierre de Savoye: Monsieur Rabinovitch, je vous interromps très brièvement. Vous dites que l'auditoire est petit et qu'il y a de la concurrence. Depuis quand une compagnie du secteur du privé se retire-t-elle du marché parce qu'un concurrent est en train d'en prendre une part? À ce compte-là, McDonald's arrêterait de vendre ses hamburgers. Vous, vous vous retirez. Pourquoi ne bonifiez-vous pas votre produit? Il me semble que c'est là votre mission: la qualité et la bonification.

M. Robert Rabinovitch: C'est exactement le contraire, monsieur. Assez souvent, une compagnie doit faire une analyse du marché afin de savoir où elle peut faire de l'argent et où elle ne peut pas survivre. Il arrive tous les jours que des compagnies décident que la concurrence est trop forte et qu'elles doivent quitter leur marché.

M. Pierre de Savoye: Vous n'êtes plus de taille, quoi.

M. Robert Rabinovitch: Pardon?

M. Pierre de Savoye: Vous n'êtes plus de taille.

[Traduction]

Vous n'êtes plus de taille.

[Français]

M. Robert Rabinovitch: La concurrence?

M. Pierre de Savoye: Oui. Vous n'êtes plus de taille à concurrencer.

M. Robert Rabinovitch: Au contraire. Je ne vais pas concurrencer dans certains secteurs. Je n'ai pas assez d'argent pour concurrencer le secteur privé dans le domaine des nouvelles locales. J'ai de l'argent, la position et la qualité du personnel requis pour le secteur local, mais pour continuer d'offrir notre service dans les autres secteurs professionnels...

M. Pierre de Savoye: C'est donc une question d'argent. Vous n'avez pas l'argent nécessaire.

M. Robert Rabinovitch: Ce n'est pas seulement une question d'argent. C'est une question d'un gros montant d'argent. N'oubliez pas qu'on fait des coupures dans le secteur des nouvelles locales depuis 10 ans. Comme M. Redekopp l'a expliqué plus tôt, il s'agit d'une série de coupures. Nous ne sommes même pas dans le marché avec eux. Nous ne pouvons pas...

[Traduction]

C'est une prophétie qui se réalise inéluctablement.

[Français]

Quand on coupe encore et encore, le résultat est évident: on va perdre la concurrence.

[Traduction]

Le président: Monsieur Scott.

L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Comme Mme McDonough, je trouve très attrayants vos projets à l'échelle nationale, mais en tant que Néo-Brunswickois, je suis indigné par les moyens que vous employez pour y parvenir.

Je serais curieux de savoir si vous considérez comme nouvelles locales ce qui se passe à l'assemblée législative du Québec ou de l'Ontario. S'il n'y a plus de SRC à Fredericton, il n'y aura plus de nouvelles sur l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick. Sont-ce là des nouvelles locales? Méritent-elles l'attention nationale? Il n'y a pas de chaîne privée couvrant notre assemblée législative. Avant que vous me lanciez nos taux d'écoute à la figure, sachez que ce journal n'existe que depuis cinq ans. Je me souviens lorsque le studio a été ouvert à Fredericton. J'étais député alors. Cela ne fait pas si longtemps.

• 1110

Le fait est que les nouvelles de notre partie du pays ne seront plus diffusées. Elles ne seront plus diffusées car il n'existera plus la capacité de le faire dans notre partie du pays, dans ma province, et en particulier celle de Wayne. Le secteur privé ne pourra pas faire le même usage de ces studios que celui qui avait été annoncé quand on l'a inauguré. On commence seulement à posséder la capacité de l'utiliser. Cela ne se fera plus.

Par conséquent... Vous avez mentionné maintes fois vos antécédents dans le secteur privé, et je vous en félicite, mais la SRC n'est pas le secteur privé. C'est une institution publique à laquelle les Canadiens d'une côte à l'autre s'identifient et il est insultant que nous soyons le membre que vous allez couper dans l'intérêt de la SRC nationale.

Je suis partisan de la SRC nationale. J'ai appuyé la SRC nationale pendant toute ma vie, mais pas aux dépens de la couverture locale des événements locaux qui comptent pour les gens du Nouveau-Brunswick et qui ne seront plus couverts. J'exhorte donc le Conseil d'administration à résister, à écouter ce que nous disons aujourd'hui et, si tout cela est une question d'argent, faisons l'effort d'en trouver davantage. Tout le monde ici le dit.

Le président: Y a-t-il une question, monsieur Scott, ou faites-vous un commentaire? Quelle est la question? Est-ce combien d'argent il faudrait?

M. Andy Scott: Voici la question: Comment défendez-vous le fait que, lorsque cela prendra effet, il n'y aura plus de couverture immédiate de ce qui se passe dans une assemblée législative de ce pays? Comment défendez-vous cela?

M. Harold Redekopp: Eh bien, je peux peut-être commencer.

Tout d'abord, il est inexact de dire qu'il n'y aura plus de couverture. Y aura-t-il moins de couverture? Probablement. Mais nous sommes absolument résolus à continuer de couvrir les assemblées législatives de tout le pays, y compris celle du Nouveau-Brunswick. Nous avons également la capacité de couvrir les élections et nous maintiendrons le temps d'antenne politique gratuit.

Mais oui, absolument, quelque chose sera perdu. C'est regrettable, et nous devons évidemment trouver un équilibre. Mais pour mettre les choses au clair, il y aura une couverture provinciale et une couverture des assemblées provinciales—pas autant que par le passé, mais il y en aura, absolument.

M. Andy Scott: Bon. En tout cas, ce qui se passera avec le journal régional, c'est qu'il couvrira quatre assemblées législatives. Aujourd'hui, il n'en couvre qu'une seule. Voilà la différence.

Le président: Monsieur Mills.

J'essaie de me montrer aussi équitable que possible envers tous les membres, car j'ai une longue liste de noms, longue comme le bras. Je veux simplement donner une possibilité à ceux qui n'ont pas encore eu la parole.

M. Dennis Mills: Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Rabinovitch, vous n'avez cessé de faire état dans votre exposé de votre expérience du secteur privé. Franchement, lorsque je suis arrivé dans cette ville il y a 20 ans et ai travaillé dans l'édifice Langevin, vous étiez un fonctionnaire que j'admirais à l'époque et considérais comme l'une des réelles vedettes de la construction de ce pays. Lorsque votre nom a été évoqué pour diriger la SRC, j'ai applaudi, non à cause de votre expérience du secteur privé, mais parce que je me souviens de vous comme d'un visionnaire, de quelqu'un qui voulait poursuivre la construction et la reconstruction de la nation.

Lorsque je songe à la SRC, ou lorsque je ressens de la peine pour la SRC, ce n'est pas en tant qu'entreprise. J'y vois un instrument qui est responsable devant le Parlement et dont le rôle est de nous aider tous à construire la nation, particulièrement dans les régions isolées. La SRC est un instrument qui fait que les régions éloignées ont la possibilité d'être les égales de ma ville, sur le plan de la participation sur la scène nationale.

J'ai beau essayer, je ne parviens pas à comprendre pourquoi vous ne parlez pas aux parlementaires de la contribution que la SRC a apportée ces dix dernières années à l'industrie cinématographique, qui est maintenant une industrie de près de trois milliards de dollars dans notre pays, et dont la majorité des participants, qui fabriquent les films, sont passés par la SRC à un moment ou à un autre. La SRC ne reçoit absolument aucun crédit pour ce secteur en expansion de notre économie. Et c'est là un facteur économique, monsieur Rabinovitch. Si vous gériez une entreprise et que vous alliez voir votre banquier, vous mettriez ce facteur en avant pour demander qu'il soit ajouté à votre crédit.

• 1115

Je crois aussi, monsieur Rabinovitch, que tous ces studios et cette présence du gouvernement national, par l'intermédiaire de la SRC, dans les régions, pourraient servir à éduquer ou former davantage de nos jeunes dans ce domaine en expansion des communications et de la technologie de l'information. Je pense que chaque bâtiment de la SRC, au lieu d'être loué ou désaffecté, devrait être affilié à une université locale.

Je me demande donc si vous ne pourriez pas nous revenir—et je reprends là le plan de M. Shepherd—pour présenter à ce comité toutes les possibilités d'amélioration, chiffrées, afin que nous débattions entre nous pour voir si nous ne pourrions nous entendre afin de non seulement rétablir, mais encore améliorer, vos moyens.

Vous avez dit à plusieurs reprises aujourd'hui que vous êtes dans une camisole de force financière. Vous avez dit à plusieurs reprises que vous êtes dans une situation impossible. Nous sommes là pour vous servir. Nous sommes là pour édifier un pays, pour vous aider à construire un pays. Mais tant que vous ne mettez pas des chiffres à côté du rêve que nous avons, il est très difficile pour nous d'aller exercer des pressions sur les destinataires de notre rapport.

Le président: Monsieur Rabinovitch, autrement dit, il vous demande de combien d'argent vous avez besoin?

M. Dennis Mills: Et vous savez quoi, monsieur Rabinovitch, nous ne parlons pas ici de demi-mesure.

M. Robert Rabinovitch: Premièrement, si vous le permettez, je tiens à vous remercier de vos compliments sur ma période dans la fonction publique, que j'ai immensément appréciée. Mais je dois vous dire aussi que j'ai appris quelque chose dans le secteur privé, notamment l'impératif de l'efficience et la poursuite d'objectifs. Je suis revenu à cause de mon amour du service public et de ma croyance fondamentale dans la radiodiffusion publique. C'est une vie très différente et que je trouve extrêmement stimulante. Mais ma motivation ultime était ma forte croyance en la SRC et en la radiodiffusion publique.

Je vais vous parler franchement et vous dire que l'on ne m'a jamais promis d'argent lorsque j'ai accepté cette fonction. Je l'ai fait en connaissance de cause, et je l'ai dit à mon arrivée en février—en sachant qu'il y avait des contraintes financières. J'ai accepté ce travail sachant que nous devrions fondamentalement recentrer la télévision de langue anglaise. Et je pense avoir dit en février—et je l'ai dit ailleurs aussi—qu'il nous faudra faire à peu près la même chose, à long terme, avec le service en langue française. Mais là, nous avons plus de temps. Nous avons un excellent service. Mais tout le domaine subit une mutation.

Il est impossible de vous donner un prix pour ce que j'aimerais avoir. C'est l'une des raisons, d'ailleurs, pour lesquelles j'ai fait la comparaison avec la BBC: que vous sachiez ce qui peut être fait et quelles sommes peuvent être demandées par un radiodiffuseur public. La BBC offre un service excellent et jouit, de plus, d'une trésorerie garantie, si bien qu'elle peut dresser des budgets à long terme, mettre en chantier des émissions qui ne seront diffusées que plusieurs années après.

Autrement dit, elle peut gérer comme une entreprise privée. Elle connaît son budget, elle connaît ses flux de trésorerie et sait ce qu'elle doit faire pour créer le genre d'émissions qu'elle veut diffuser. Mais je ne demande pas 7,5 milliards de dollars, car je sais que c'est impossible.

On m'a fait savoir clairement qu'il n'y aura pas de nouveaux crédits tant que nous n'aurons pas fait le ménage dans la maison, et faire le ménage signifie plusieurs choses. Il faut, avant tout, avoir une vision à long terme. Que cherche-t-on à faire? Pourquoi existe-t-on? Pourquoi est-on un service public? Et c'est la réponse que j'espère avoir donné aujourd'hui avec le vidéo et l'exposé de Harold. Pour moi, tout part de là. Au moins, nous savons où nous allons.

Soyons parfaitement clairs. Même si j'avais le feu vert aujourd'hui et tout l'argent du monde, il nous faudrait quand même du temps pour faire ce que nous voulons. Ce que vous voyez aujourd'hui est un plan sur deux ou trois ans vers notre objectif particulier.

• 1120

Le pire pour la SRC sont des crédits ponctuels, car cela ne fait que retarder la restructuration qu'il faudra bien effectuer en fin de compte. C'est une victoire à la Pyrrhus. Elle conduit à la crise dans laquelle nous sommes aujourd'hui. La SRC est une organisation qui était extrêmement réticente à couper les services, extrêmement réticente à abandonner ce qu'elle aurait dû laisser tomber.

Peut-être tout ce débat aurait-il dû intervenir il y a trois ou quatre ans, lorsque le gouvernement a amputé notre budget de 400 millions de dollars. Peut-être la SRC aurait-elle dû dire: «Voici la réponse à ce que vous venez de faire. Très bien, c'est votre décision, et nous respectons votre décision. Voici le résultat de ce que vous avez fait».

M. Manera a essayé de faire cela. Il a essayé de le faire avec fermeté, avec la plus grande fermeté possible, en mettant son poste dans la balance. À cause d'un espoir et du désir de continuer à servir le public à tous les égards, la SRC n'a pas réduit les services, mais le résultat a été de les diluer. Et on les a dilués et dilués encore, jusqu'au stade où le service devient hautement contestable.

C'est pourquoi nous avons essayé de revenir à l'essentiel. Et si le fondement devient bon, je suis sûr qu'avec ce genre de débat et de discussion... Comme je l'ai déjà dit, ce débat et cette discussion sont opportuns. Ils sont essentiels pour la radiodiffusion de service public. Mais il nous incombe aussi de faire marcher les choses avec les moyens que nous avons.

M. Dennis Mills: Eh bien, monsieur Rabinovitch, je vais céder la place à d'autres, mais je tiens à vous faire savoir que «couper un membre»—et ce sont là vos paroles—est une mesure plutôt radicale. Je m'y opposerai de tout mon être, car c'est contraire à la construction d'une nation.

Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Mark.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président. Je n'ai qu'une courte question.

Je suis heureux que vous invitiez à un débat public sur ce sujet. Lorsque vous avez comparu la première fois devant le comité, je vous avais lancé un défi: que vous et les membres de votre conseil fassiez une tournée du pays pour vous faire une réelle idée de ce que souhaite le public. Vous disposez du meilleur instrument pour un débat public, et je vous lance donc le même défi. Allez-vous ouvrir un débat public sur les ondes de la SRC, concernant le rôle que la Société joue dans ce pays?

M. Robert Rabinovitch: Je pense que nous sommes en plein milieu du débat en ce moment, monsieur.

Des voix: Bravo.

M. Inky Mark: Je parlais d'une réunion publique télévisée.

M. Dennis Mills: En utilisant certaines de ces nouvelles techniques interactives.

M. Robert Rabinovitch: J'ai également dit à l'époque qu'il était temps d'agir.

M. Inky Mark: D'accord.

M. Robert Rabinovitch: La raison en est que je ne veux pas participer à la dégringolade de CBC dans l'échelle de la sottise. Or, c'est ce qui va arriver si nous ne procédons pas à une opération chirurgicale majeure. Je n'ai pas honte de l'expression «couper un membre», car couper un membre peut sauver un corps. Ce que j'essaie de faire, c'est sauver le corps.

Nous essayons d'améliorer la qualité du service de CBC. Il nous faudra peut-être une opération chirurgicale radicale pour y arriver. Tout le monde veut le changement, jusqu'à ce qu'il soit là. Nous devons opérer des changements majeurs si nous voulons survivre en tant que société.

M. Inky Mark: Aurons-nous donc ce débat avant ou après que vous apportiez des changements?

M. Dennis Mills: Avant.

M. Robert Rabinovitch: Je pense que nous avons le débat en ce moment. En fin de compte, l'important c'est que nous ayons cette discussion, et nous en avons eues plusieurs avec d'autres groupes, et nous transmettrons les avis à notre Conseil. C'est à lui qu'il incombe de prendre la décision finale.

Le président: Madame McDonough, brièvement.

Mme Alexa McDonough: Merci, monsieur le président.

On a beaucoup cité vos propos, monsieur Rabinovitch. Je vais citer directement vos paroles pour ne pas commettre d'erreur d'interprétation. Vous avez dit: «Je n'avais pas de promesse, ni ai-je demandé une promesse, du gouvernement qu'il me donnerait davantage de crédits».

Vous avez répété cela aujourd'hui, mais pourtant vous n'avez cessé d'employer des termes comme «difficultés financières extrêmes», «camisole de force financière», et «si nous étions dans le secteur privé, nous déclarerions faillite». Cela m'amène à ma question, et je vais vous la poser très simplement.

C'est peut-être vrai que vous n'aviez pas de promesse, ni n'avez demandé de promesse d'une rallonge financière du gouvernement, et ma question est toute simple: avez-vous promis vous-même de ne pas demander plus d'argent?

• 1125

J'entends dire un peu partout dans le pays que pour exécuter votre mandat vous avez besoin de plus de moyens. Nous avons connu des coupures sauvages, des coupures à courte vue. Nous avons subi des coupures qui nous font nous sentir étrangers à nous-mêmes. Souvent, lorsque nous écoutons les nouvelles du pays, ce qui se passe dans beaucoup de régions est contraire à notre coutume canadienne, et c'est souvent dans les trous noirs de ce pays, où la SRC est absente.

Je vous demande donc carrément si vous avez promis de ne pas demander plus d'argent? Et si ce n'est pas le cas, donnerez-vous l'assurance aujourd'hui aux Canadiens, et aux députés qui les représentent autour de cette table, que vous irez voir votre conseil et l'exhorterez à demander au premier ministre et au gouvernement fédéral les fonds qui vous sont nécessaires pour exécuter le mandat de la SRC?

M. Robert Rabinovitch: Je ne dirais pas que mon entretien avec le premier ministre était confidentiel. Mais je lui ai parlé à 3 h du matin et je n'ai pas idée de ce que j'ai dit. J'étais à Hawaii à l'époque.

Mme Alexa McDonough: Vous a-t-il demandé de promettre de ne pas demander plus d'argent?

M. Robert Rabinovitch: On m'a expliqué très clairement à plusieurs reprises que la SRC n'est pas une priorité financière de ce gouvernement. Si un autre gouvernement veut changer cela, nous serons évidemment prêts à accepter et à collaborer avec ce gouvernement.

On nous a clairement dit que nous sommes censés vivre dans les limites de notre budget. Il est très clair également—et je l'ai fait savoir au gouvernement—que le mandat tel qu'il est... pas tellement défini dans la Loi sur la radiodiffusion, car très franchement le programme que nous avons esquissé est tout à fait conforme à la Loi sur la radiodiffusion et nos conseillers juridiques le confirment. Le mandat élargi, mettons, englobant des journaux télévisés locaux, ne peut être rempli dans les limites du budget existant.

J'ai dit cela aux syndicats et à qui veut l'entendre. Je pourrais bien vous dire que tout ira à merveille. La réalité est que ce n'est pas vrai. Lorsque nous signons un accord avec un syndicat au-dessus d'un certain chiffre, nous savons qu'il y aura des coupures, car le gouvernement nous a dit qu'il n'allait pas combler la différence. Nous l'avons expliqué très clairement aux différents groupes.

Je dois m'accommoder de la réalité politique et financière. J'ai parlé à mon Conseil d'administration. Celui-ci, à son tour, a pris divers contacts. Ce sont des gens qui ont pas mal de relations. Je crois que le gouvernement comprend parfaitement bien ce qui se passe. Nous l'avons expliqué simplement, sans nous embarrasser de précautions. Nous avons indiqué clairement les conséquences de la réduction continue, en valeur réelle, de notre budget. Voici la conséquence. Ce que je refuse de faire, sinon j'aurais refusé ce poste, c'est de présider au déclin continu de la Société.

M. Dennis Mills: Rappel au règlement, monsieur le président.

Aux dernières nouvelles, tous les membres de ce côté-ci sont des députés ministériels—et Aileen aussi, bien entendu. Et je sais que la plupart d'entre nous réfutons ce que M. Rabinovitch vient de dire, à savoir que le gouvernement a pour position que la SRC n'est pas une priorité économique. Je tiens à préciser pour le procès-verbal que je ne connais aucun député du côté gouvernemental épousant ce point de vue.

Mme Aileen Carroll: Rappel au règlement, monsieur le président. Cela n'est pas exact.

Le président: Excusez-moi, mais je ne vais pas accepter de rappel au règlement à ce stade. M. Rabinovitch est ici pour dire la façon dont il voit les choses, et ce sera ensuite à nous de décider comment nous les voyons nous-mêmes. Si nous commençons avec des rappels au règlement, nous n'en sortirons jamais.

Désolé, madame Carroll, nous allons continuer.

Mme Aileen Carroll: Non, non, monsieur le président. Je suis sur la liste, monsieur le président, et je ne me plains pas.

Le président: Oui, vous êtes sur la liste.

Mme Aileen Carroll: D'accord.

Le président: Monsieur Easter, puis madame Bulte.

M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.

Je reviens encore une fois à ma question initiale: comment avez-vous déterminé ce que sont les priorités canadiennes, à votre avis, du point de vue de ce programme que vous esquissez? Vous avez parlé ici d'élaguer, de réduire les annonces publicitaires, ce que personne dans ma région ne souhaite. Vous avez parlé de faire de nouvelles choses. Je demande réellement si c'est bien ce que les Canadiens souhaitent, car les gens chez moi me disent qu'ils veulent des journaux télévisés locaux en début de soirée. C'est ce qu'ils disent.

J'aimerais donc savoir comment vous avez choisi ces orientations. Sauf votre respect, monsieur Rabinovitch, j'espère que cette citation est exacte—peut-être Maclean's s'est-il trompé—mais vous auriez dit à ce magazine que vous et votre fils trouvez très mauvais les bulletins de nouvelles de 18 h. Vrai ou faux, je ne sais pas—c'est à vous de me le dire. Mais la suppression de ces journaux de début de soirée répond-elle à votre désir personnel ou bien avez-vous des indications que les Canadiens n'en veulent pas? J'aimerais savoir comment vous avez arrêté cette liste de priorités.

• 1130

Vous pouvez constater que nous-mêmes tenons au maintien de ces émissions. Si vous ne pouvez pas les maintenir avec votre budget actuel, dites-nous combien il vous faudrait pour les préserver.

M. Robert Rabinovitch: Pour préciser les choses, monsieur, j'ai dit dans Maclean's que mon fils, qui est âgé de 22 ans et prépare une maîtrise à la London School of Economics, et qui est un jeune pas mal éveillé, est représentatif de l'auditoire type que nous devrions viser. Même nous ne pouvons obtenir sa faveur, car le journal CITY Pulse est excellent et nos stations ont subi des coupures budgétaires tellement sauvages qu'elles ne peuvent plus assurer la qualité promise. Si nous ne parvenons pas à capter une personne de cette intelligence, nous avons un problème, car c'est là notre auditoire naturel. Voilà ce que j'ai dit.

M. Wayne Easter: Bien, c'est bon à savoir.

M. Robert Rabinovitch: Je veux apporter une autre clarification. Une organisation à laquelle le gouvernement verse 760 millions de dollars, plus 130 millions de dollars pour les immobilisations—près de 900 millions de dollars en tout—est forcément une priorité. Et c'est le montant que l'on nous donne. La question est de savoir si nous sommes prioritaires pour un financement accru, comparé à d'autres besoins dans le domaine culturel? Et la réponse jusqu'à présent est non. Il faut bien le dire.

Je ne tiens pas à supprimer les journaux de 18 h. Je sais que nous avons des téléspectateurs qui y tiennent. Moi-même je ne le regarde pas, mais peu importe. Mais ces journaux sont un très gros facteur de coût dans notre système, et excepté pour une ou deux villes—la vôtre en est une—c'est un facteur de coût qui ne rapporte pas d'auditoire, parce qu'ils n'offrent rien qui soit propre à un radiodiffuseur public. Ce n'est pas un service public... Ce n'est pas pour critiquer ces émissions, mais ces journaux sont d'un type que le secteur privé fait extrêmement bien et dans lequel il a investi.

Maclean's publie aujourd'hui une lettre qui critique mes propos mais renforce mon argumentation dans le même souffle. Elle demande comment nous pourrions avec deux camions concurrencer quelqu'un qui en aligne vingt.

Le fait est que préserver des journaux de 18 h de bonne qualité, à titre de priorité, est une entreprise très coûteuse, car il y en a 14 à réaliser, et nous ne pourrions pas expliquer que nous ne les offrions pas partout dans le pays. Si ces journaux étaient une priorité, alors il faudrait les financer correctement, consacrer tout l'argent voulu, et les offrir partout dans le pays. Eh bien, cela ferait un nombre énorme. Et nous ne commencerions même pas à rénover et améliorer les programmes que nous voulons diffuser sur le réseau national.

Cela peut être une priorité si quelqu'un y tient, mais c'est une priorité extrêmement coûteuse qui dominerait et nous empêcherait pratiquement de faire tout le reste.

M. Wayne Easter: Mais vous ne pensez pas que votre mandat vous impose d'offrir ce service dans les régions où il n'y pas d'alternative privée? J'en connais plusieurs comme cela.

M. Robert Rabinovitch: Il n'y a qu'une seule région actuellement desservie par le journal télévisé de 18 h de CBC qui ne possède pas d'alternative privée, et c'est la vôtre. Partout ailleurs, il y a des journaux concurrents. Il faut voir le système de radiodiffusion comme un tout. Il est composé, en gros, de radiodiffuseurs publics et privés, et il y a une limite à ce que nous pouvons faire, avec les moyens dont nous disposons et que nous prévoyons d'avoir.

Le président: Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte: Merci, monsieur le président.

J'aimerais parler des économies réalisées par la suppression des journaux locaux de 18 h. L'une des raisons de cette suppression donnée dans l'article de Maclean's est qu'il vous faut éponger un déficit d'une quarantaine de millions de dollars. Selon d'autres données, compte tenu des recettes publicitaires, vous perdez environ 45 millions de dollars sur ces émissions. J'aimerais en savoir un peu plus.

Qu'allez-vous faire du montant que vous allez économiser? Je croyais que vous alliez vous en servir pour mettre en oeuvre cette vision que vous avez esquissée ici, mais vous avez dit aussi que ce plan ne serait mis en oeuvre que dans deux ou trois ans. J'ai peut-être mal saisi. Pourriez-vous nous expliquer cela?

• 1135

M. Harold Redekopp: Si je puis répondre, nous avons tout d'abord un déficit structurel, et tout montant que nous économisons ou dégageons va évidemment servir à résoudre notre problème budgétaire. Le reliquat, qui sera affecté à ce plan, servira à apporter les améliorations dont nous parlons. Mais toute restructuration comme celle que nous prévoyons exigera du temps. Il faut du temps pour créer ces nouvelles émissions. Nous allons devoir déchaîner nos forces créatrices.

D'abord, il nous faudra obtenir le feu vert de notre Conseil. Une fois que nous l'aurons, nous commencerons à déchaîner les forces créatrices—les producteurs, metteurs en scène, chercheurs, etc. pour mettre en chantier ces programmes. Donc, la réalisation prendra quelques années. Selon la rapidité de la décision, nous espérons opérer le lancement d'ici la fin de l'exercice en cours. Mais cela dépendra du moment où nous aurons le feu vert.

Pour résumer, le premier usage de tout argent nouveau sera pour résoudre notre problème structurel—nous accumulons un déficit en ce moment même—et le reliquat servira directement aux améliorations dont nous avons parlé aujourd'hui.

Mme Sarmite Bulte: Quelle proportion ira au déficit et quelle proportion à la mise en oeuvre de cette vision que vous décrivez, cette merveilleuse vision?

M. Harold Redekopp: Voici notre plan, tel que nous l'avons communiqué au Conseil. Nous disons que pour tout faire—n'oubliez pas que ce projet est d'une seule pièce—il faudra entre 80 millions et 120 millions de dollars. Cela dépendra de la mesure dans laquelle nous réduirons notre stock de locaux commerciaux. Voilà donc la fourchette, entre 80 millions et 120 millions de dollars, mais il faudra au minimum 80 millions pour résoudre le problème et réaliser certaines des améliorations dont nous parlons. Et comme le président l'a dit, c'est une dépense continue, pas une injection de fonds ponctuelle, sous peine de mettre en danger nos programmes.

Mme Sarmite Bulte: Je cherche toujours le chiffre du déficit de cette année.

M. Harold Redekopp: Au lieu de vous donner... Si je suis réticent à vous donner des chiffres, c'est parce qu'on va s'en saisir pour dire: «Ah! ah!, le problème est résolu cette année».

Nous avons pris un horizon de trois ans et dit que pour équilibrer les comptes et résoudre tous nos problèmes—nous avons un problème structurel à régler—nous pourrons le faire en puisant dans ces 80 millions de dollars. Je ne sais pas s'il serait très utile que je vous donne un chiffre précis de crainte—et j'ai déjà vécu cela—qu'on l'utilise pour fins de comparaison et dire qu'il n'y a pas d'amélioration. Très franchement, cela fait trop longtemps que je suis là pour croire que nous pouvons résoudre notre problème immédiat sans résoudre le problème à long terme.

Le problème fondamental de la télévision de langue anglaise est que le service n'attire pas un auditoire et une loyauté suffisants. Nous devons les construire et nous ne pourrons pas le faire sans ressources. Donc, sauf votre respect... Désolé, ma voix monte simplement parce que je suis tellement convaincu de ce que je dis.

Mme Sarmite Bulte: Nous aussi. Et nous voulons vous aider à construire cette vision. C'est pourquoi, lorsque nous regardons avec réalisme ces chiffres... Est-il exact, monsieur Rabinovitch, que vous affichez actuellement un déficit de plus de 40 millions de dollars, comme on le lit dans Maclean's?

M. Dennis Mills: C'est 120 millions de dollar par an sur cinq ans.

M. Robert Rabinovitch: Les fonds dont nous avons besoin pour mettre en oeuvre ce programme, y compris la réduction du déficit, se situent entre 80 millions et 120 millions de dollars.

M. Dennis Mills: Chaque année.

M. Robert Rabinovitch: Chaque année, en continu. Et je dois ajouter—désolé—que cela ne règle pas le problème des journaux de 18 h.

Le président: Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger: J'aimerais revenir très rapidement sur un élément que vous avez mentionné, à savoir tous les efforts que CBC/Radio-Canada déploie en ce moment pour les nouveaux médias. Et vu que CBC/Radio-Canada a développé, à toutes fins pratiques, la radio dans ce pays dans les années 20 et 30, puis la télévision, j'espère que la SRC prendra sur elle de faire la même chose pour les nouveaux médias. Dans ce cas particulier, je considère qu'il serait irresponsable de ne pas demander des fonds nouveaux, au lieu de les puiser dans le budget existant.

Je vous encourage, en dépit des engagements que vous avez pris envers vous-mêmes ou quiconque de ne pas demander d'argent—si vous n'en avez pas pris, très bien—de le faire, car il importe de développer ces nouveaux médias et d'assurer qu'ils aient un contenu canadien, que vous pouvez fournir. Voilà pour le premier point.

• 1140

Deuxièmement, on parle de télévision publique par opposition à la télévision privée. Je pense que nous avons absolument besoin d'une télévision publique dans notre pays, car elle apporte une diversité d'opinion qui est en train de se perdre. C'est un aspect sur lequel le comité ne s'est pas encore penché. Le gouvernement envisage de se pencher sur ce problème, celui de la concentration des médias. Prenez Ottawa. Nous avons trois quotidiens, dont deux appartiennent au même homme.

Je pense pouvoir dire qu'il y a un virage net à droite dans ce pays, certainement dans la presse écrite, mais les chaînes de télévision privées appartiennent souvent aux mêmes sociétés. Je trouve extrêmement important qu'il existe une voix publique qui ne subit pas la dictature de la publicité télévisée. J'ai donc été un peu surpris lorsque vous avez dit qu'il y aura toujours des annonces publicitaires sur CBC. Pour ma part, je serais en faveur de fonds publics pour supprimer les annonces publicitaires sur CBC et Radio-Canada.

J'espère que la déclaration catégorique que vous avez faite tout à l'heure en disant que vous serez prêt à revoir cela à l'avenir est vrai, car la meilleure façon de distinguer CBC/Radio-Canada des autres pourrait être ne de pas diffuser d'annonces publicitaires. Cela semble avoir marché pour la radio.

Merci.

M. Robert Rabinovitch: Monsieur Bélanger, je serais le plus heureux des hommes si j'avais les fonds pour renoncer totalement aux annonces publicitaires, c'est-à-dire environ 400 millions de dollars, plus l'argent pour réaliser les émissions.

Je pense que la structure de certains genres d'émissions, comme les sports, les sports professionnels—et nous devons retransmettre et retransmettons le sport professionnel—est conçue de manière à ce que les annonces publicitaires s'intègrent normalement à ce produit. Je pense qu'il y aura des annonces publicitaires, car je ne vois pas venir un chèque de 400 millions de dollars, en sus de tout le reste. Croyez-moi, je ne tiens pas à passer des annonces publicitaires pour le simple plaisir.

Comme Harold l'a dit dans son exposé, ce qui importe, c'est ce qui nous distingue des autres, lorsque le téléspectateur arrive sur notre chaîne. Nous l'avons fait à la radio, de manière fabuleuse. Et les arguments sur la suppression des annonces publicitaires étaient les mêmes.

Deuxièmement, en ce qui concerne la télévision publique ou privée, la diversité des voix, je trouve que vous avez tout à fait raison. Nous sommes le plus grand rassembleur de nouvelles du pays. Nous sommes les seuls à investir dans l'information outre-mer. Nous avons renforcé nos émissions de radio et notre capacité d'information à la radio, et nous continuerons de le faire selon nos moyens. C'est un aspect extrêmement important de notre mission consistant à expliquer une région à une autre région, à permettre aux régions de se renseigner les unes sur les autres. Cela est incontestable et c'était l'un des points focaux de notre présentation.

Je suis pleinement d'accord avec vous sur la nécessité d'avoir et la diversité et une structure de rassemblement et de diffusion de l'information en provenance de tous les coins du pays.

Pour ce qui est des nouveaux médias, ils occupent une place cruciale dans l'avenir de tout radiodiffuseur public. Nous ne pouvons prédire aujourd'hui où et comment les programmes seront acheminés à l'avenir. Nous savons qu'il y aura des changements. Il est tout à fait concevable que vous accédiez à vos émissions de la SRC par des moyens multiples, sur la télévision conventionnelle mais peut-être aussi sur l'Internet.

Je ne suis pas censé faire état de mon expérience du secteur privé, mais certaines sociétés mettent déjà à l'essai—c'est déjà au-delà du stade expérimental, cela existe déjà ici dans cette ville—de très grandes largeurs de fréquence, offrant une importante capacité de livraison à domicile. Cela va radicalement transformer la façon dont les émissions sont présentées. Cela renforcera l'impératif d'une SRC de qualité, d'une fenêtre canadienne distinctive produisant des émissions sur les situations canadiennes. Nous sommes donc absolument résolus à être présents dans ces nouveaux médias et à les employer. La différence, peut-être, par rapport au passé—l'un des changements que j'ai apportés—est que les nouveaux médias vont être intégrés dans le système de radio et de télévision existants.

• 1145

J'attends de nos producteurs télévisuels, lorsqu'ils réalisent une émission pour la télévision conventionnelle, qu'ils intègrent déjà dans la conception les nouveaux médias. Une émission telle que Drop the Beat—je ne me souviens jamais du nom—conçue pour un auditoire spécifique, se distingue aussi par la façon dont elle fusionne plusieurs éléments des médias. C'est la voie de l'avenir. Nous regarderons la télévision de manière différente, nous accéderons aux programmes de manière différente.

La SRC est une machine à réaliser des programmes. C'est une des raisons pour lesquelles je veux me débarrasser du boulet que représente tout ce capital fixe, en faire une source de rapport financier, car actuellement il est un frein à notre capacité de production plutôt qu'un outil.

Le président: Je rappelle aux membres que M. Rabinovitch s'est mis à notre disposition depuis 9 h. Il doit partir à midi, et je suis sûr qu'il en sera soulagé.

Des voix: Oh, oh!

Le président: J'ai une longue liste de membres voulant poser des questions, mais nous ne pouvons continuer éternellement. Nous recevons d'autres témoins à midi, et je suis sûr que vous voudrez faire une petite pause.

Nous avons M. Muise, Mme Carroll, M. Limoges, M. Shepherd et Mme Lill. Si vous voulez bien collaborer entre vous, chacun aura peut-être son tour.

Monsieur Muise.

M. Mark Muise: Merci, monsieur le président.

J'ai deux questions, et elles seront brèves. Premièrement, monsieur Rabinovitch—et veuillez atteindre que je pose la deuxième avant de répondre à la première—votre plan ne porte que sur le réseau anglais, vu les contraintes budgétaires. Je ne comprends pas pourquoi vous ne vous attaquez pas à l'ensemble. J'aimerais des explications car je ne comprends pas.

L'autre élément que j'aimerais évoquer est la déclaration faite l'an dernier par la présidente de la SRC Guylaine Saucier, avant les audiences du CRTC l'an dernier:

    Comme vous le savez, nos plans comportent l'engagement formel de renforcer notre présence régionale dans tout le Canada et, à la télévision anglaise, de réduire les retransmissions de sport professionnel. Nous sommes sensibles aux remarques faites et, dans les deux cas, nous renforcerons nos engagements.

Nous savons également que le comité d'examen du mandat présidé par Pierre Juneau demandait à la SRC de préserver sa programmation locale et régionale et vous venez d'entendre ce que Mme Saucier venait d'affirmer. Nous savons que le CRTC a donné son aval à cet engagement, et l'a même inscrit au cahier des charges de la SRC. Peut-on conclure que vous avez décidé d'annuler cette promesse faite aux Canadiens?

M. Robert Rabinovitch: Non, monsieur.

Revenons à la première question, puisque vous m'avez demandé de répondre d'abord à la première.

Nous nous concentrons actuellement sur la télévision de langue anglaise, car c'est là que se situe le problème immédiat, la camisole de force financière. La télévision et la radio de langue française ont opéré d'importants changements ces dernières années, tout comme la télévision anglaise, mais ne connaissent pas de crise immédiate. Malheureusement, c'est l'un des problèmes lorsque l'on n'est en fonction que depuis six mois. Je réagis aux crises.

Deuxièmement, et c'est une note plus positive, sous la direction de M. Redekopp et à la demande du Conseil, nous avons investi beaucoup de temps et d'énergie dans le recentrage de la télévision anglaise et le moment pour cela était propice. Il était logique de s'attaquer aux deux problèmes en même temps et d'agir sans tarder. En tant que nouveau président, j'aurais aimé avoir plus de temps, mais il était logique d'agir sans tarder et le plan d'ensemble est cohérent.

En ce qui concerne les engagements donnés au CRTC, nous allons les honorer. Nous allons accroître notre présence régionale. Elle revêtira une forme différente, mais nous aurons davantage de noyaux régionaux et d'organes de collecte. Nous aurons davantage de nouvelles régionales. Nous allons restructurer le journal de 22 h, mettant à profit Newsworld. Nous continuerons à respecter nos obligations régionales.

Je me hâte d'ajouter que nous distinguons, tout comme la loi—la loi n'emploie jamais le mot «local»—j'établis une grande distinction entre le mot «régional» et le mot «local». Elle est peut-être artificielle, mais le fait est que le marché des nouvelles locales est différent, exige une approche différente dans laquelle le secteur privé excelle. D'une certaine façon, cela nous donne la flexibilité de faire différemment notre travail régional.

• 1150

Le président: Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll: Merci, monsieur le président.

Je ne sais pas si c'est parce que je siège du côté de l'opposition, mais je me sens une grande liberté...

Une voix: Les écailles vous sont tombées des yeux.

Des voix: Oh, oh!

Mme Aileen Carroll: ... de me ranger du côté de M. Rabinovitch, lorsqu'il dit que les priorités gouvernementales se reflètent dans les coupures imposées à la SRC. Certes, monsieur le président, je conviens avec M. Mills que M. Rabinovitch devrait réaliser qu'il y a dans cette salle un groupe très actif et dévoué de simples députés qui sont très préoccupés—nous avons passé la matinée à exprimer ces inquiétudes—et fervents partisans de la SRC.

Vous m'avez enlevé les mots de la bouche, monsieur Rabinovitch, en disant que vous ne vouliez pas infantiliser les programmes. Nous non plus. Un très grand nombre de députés partagent notre point de vue mais n'ont pu obtenir une place à cette table.

Toutefois, je conclus en rappelant l'adage qui veut que nos choix financiers reflètent nos valeurs. C'est tout aussi vrai au sein de la SRC qu'au sein du gouvernement, dont je fais partie. Le message que nous sommes nombreux à vous transmettre aujourd'hui est que nous tenons très fort à la programmation régionale. Je vous regarde danser—et je trouve que c'est une danse—entre la définition de «local», et celle de «régional», la définition de «régional» qu'épouse le CRTC et la définition de «régional» axée sur les cinq ou six fuseaux horaires de notre beau pays.

Mais je vous demande, lorsque vous repartirez d'ici, de ne pas perdre de vue nos préoccupations et vous remercie de l'occasion de vous les exprimer.

Le président: Très bien dit, comme une nouvelle Conservatrice.

Des voix: Oh, oh!

Mme Aileen Carroll: Joe, je suis là!

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Limoges.

M. Rick Limoges: Merci, monsieur le président.

J'aimerais revenir un instant sur les nouveaux revenus qui seront nécessaires. Je crois savoir, et j'en ai déjà parlé, que vous allez perdre environ 120 millions de dollars de recettes publicitaires au niveau local. Je crois également que les recettes publicitaires totales de la CRC dépassent légèrement le demi-milliard de dollars.

Est-ce exact, ou bien suis-je à côté de la plaque? Est-il dont exact que vous allez perdre environ 120 millions de dollars en recettes publicitaires locales lorsque vous supprimerez les journaux locaux, et vous devrez donc compenser ce manque à gagner, en sus des économies prévues, pour disposer des 80 millions à 120 millions de dollars que requiert votre nouvelle vision. Autrement dit, essayez-vous de dégager plus de 200 millions de dollars en supprimant les journaux locaux et réaliser votre vision pour l'avenir?

M. Robert Rabinovitch: Je ne peux pas vous donner de réponse précise, mais je peux vous dire que les recettes publicitaires totales de la télévision de langue anglaise sont de 200 millions de dollars, pour toutes les sources. Le chiffre des recettes locales est considérablement inférieur à ce que vous dites.

Selon l'agencement des émissions et l'orchestration de tout cela, je ne sais pas quelle part de ces recettes publicitaires nous perdrons automatiquement. Nous en perdrons sûrement une partie. Mais nous ferons aussi des économies au niveau de la vente. Mais disons que les recettes publicitaires sont très nettement inférieures au chiffre que vous avez cité, monsieur.

M. Rick Limoges: D'accord. Je vous remercie.

En ce qui concerne les journaux, tout le monde ici admettra que les journaux locaux de CBC ont été saignés à blanc et que la qualité en a souffert. La moitié de ces journaux locaux sont composés de séquences du National etc.

Mais très franchement, lorsqu'un chien se fait écraser à Toronto, cela ne nous intéresse pas beaucoup. Cela peut intéresser Toronto, mais pas Windsor et d'autres localités. Si c'est cela votre idée de nouvelles régionales, cela ne va pas du tout séduire le public.

La difficulté que nous avons—et je suis fervent partisan de...

Le président: Monsieur Limoges, vous n'avez que quelques minutes.

M. Rick Limoges: D'accord.

• 1155

Je suis fervent partisan des radiodiffuseurs privés. Ils font un excellent travail. Mais nous avons le problème, particulièrement dans la presse écrite, d'un parti pris politique dont nous espérons que la SRC pourra nous sauver. En ce qui concerne la programmation, que faudrait-il pour garder sur les ondes ce journal local?

M. Harold Redekopp: De l'argent. Mais lorsqu'il est question d'argent, il vaut probablement mieux que le président en traite.

Des voix: Oh, oh!

Une voix: Il vient du secteur privé.

M. Harold Redekopp: Permettez-moi de dire pour commencer que beaucoup d'idées fausses circulent autour de cela, notamment que tout ce nouveau journal sera déterminé par ce qui se passe dans les rues de Toronto. Ce n'est pas du tout là le but.

En fait, et pour démentir ces notions une fois pour toutes, nous envisageons—je souligne «envisageons»—si nous en avons les moyens, car cela coûte toujours plus cher, de réaliser cette émission de 18 h en dehors de Toronto. Cela coûte plus cher et il nous faudra trouver l'argent pour cela. Mais nous n'avons pas l'intention de filtrer toutes les nouvelles au travers du crible de Toronto. Voilà ce que je voulais bien préciser d'emblée. Je ne sais pas trop quoi dire d'autre.

M. Robert Rabinovitch: Nous avons également dit clairement que la composition de ces émissions sera déterminée au niveau régional, et pas à partir d'un lieu central, où qu'il se trouve.

M. Rick Limoges: Le niveau régional, c'est le fuseau horaire. Est-ce exact?

M. Robert Rabinovitch: C'est exact.

Le président: Monsieur Rabinovitch, auriez-vous la bonté de répondre encore à deux brèves questions, de M. Shepherd et de Mme Lill?

M. Robert Rabinovitch: Certainement.

Le président: Après tout ce que vous avez déjà subi, je suis sûr que deux de plus ne feront guère de différence.

M. Robert Rabinovitch: J'attends toujours le vote, monsieur le président. Il devait me donner le temps de souffler.

Des voix: Oh, oh!

M. Dennis Mills: Le vote a été annulé.

Le président: Monsieur Shepherd, rapidement.

M. Alex Shepherd: En ce qui concerne le plan financier, qui a été évoqué plusieurs fois, vous avez pas mal éludé nos questions. Y a-t-il un plan financier? Si oui, pouvez-vous nous le communiquer, à nous les parlementaires?

Deuxièmement, toujours au sujet du plan financier, vous dites avoir un déficit structurel à éponger. Vous nous avez parlé de votre vision de l'avenir. J'aimerais savoir quelle est votre priorité dans l'exécution de ce plan. La première priorité du plan est-elle d'éliminer le déficit structurel, si bien que la vision dont vous parlez devra attendre encore deux ou trois ans? Est-ce que les changements structurels que vous annoncez aujourd'hui visent simplement à éliminer le déficit structurel et non pas, en fait, à mettre en oeuvre votre nouvelle vision?

M. Robert Rabinovitch: Ce que nous présentons aujourd'hui, et avons soumis à notre conseil, est un plan global de transformation de CBC, visant à absorber le déficit structurel et à avancer d'une manière financièrement prudente et sûre.

Si ce plan est adopté, et adopté dans sa totalité, nous sommes assurés de régler le problème structurel et de surmonter notre déficit. Le plan dégage les fonds pour cela. Nous n'allons pas revenir demain demander une rallonge de fonds. Nous avons dans ce plan l'argent voulu non seulement pour entamer la réalisation mais réaliser complètement ce que vous avez vu aujourd'hui, dans l'exposé et dans le vidéo.

Évidemment, plus nous aurons de fonds à l'avenir et plus nous pourrons enrichir la programmation. L'un des stades les plus importants de la réalisation d'émissions est ce que l'on appelle le développement. Une émission peut exiger une ou deux années de travail avant d'être diffusée sur les ondes. Cela coûte cher. Nos budgets de développement d'émissions ont dû être amputés de tous côtés. Nous avons effectué des coupures partout, à tel point que cela se voit sur les ondes, en dépit des prouesses de notre personnel—sans lui, ce serait bien pire.

Mais je peux vous garantir, monsieur, qu'il y a un plan financier. Nous l'avons présenté à notre conseil. Une fois que tout sera finalisé, nous pourrons le communiquer, mais tant que les décisions finales n'auront pas été prises, des incertitudes planent. Le plan est cohérent, global, et fondé sur la probité financière et la mise en oeuvre de cette restructuration de la télévision de langue anglaise.

Le président: Madame Lill, vous avez été très patiente.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci beaucoup.

Je ne suis pas portée à parler de ce genre de choses car je m'intéresse plutôt au contenu des émissions, mais j'aimerais parler de la transmission des signaux.

Personne n'a encore parlé des installations physiques ici. Nous n'avons pas parlé de la manière dont vous allez transmettre ces nouvelles émissions. J'aimerais savoir comment tout cela va fonctionner sur le plan technique. Que va-t-il advenir de la répartition des canaux? Est-ce que vos décisions de programmation seront déterminées par des considérations de transmission par satellite?

• 1200

J'aimerais savoir si le maintien de journaux locaux dans la région Atlantique ou des villes comme Winnipeg est compatible avec la vente des systèmes de transmission et de distribution? Si vous vendez tous les réseaux de distribution locaux, pourriez-vous continuer à avoir des émissions locales comme celles dont nous parlons avec tant de passion autour de cette table? La grande décision que vous prenez est-elle en fait de nature technologique? Vos décisions de programmation seront-elles déterminées par les contraintes des systèmes d'acheminement?

M. Robert Rabinovitch: La réponse est non. La technologie suivra la décision, et non pas l'inverse. Nous ne faisons rien sur le plan de la transmission qui va nous lier les mains plus tard. Néanmoins, certains modèles nous donnent davantage de souplesse que d'autres.

Même si nous ne faisions rien, si nous conservions le système existant, il faudrait se demander s'il est bien rationnel pour la SRC d'être propriétaire de ces tours de transmission ou s'il n'existe pas une meilleure façon de faire les choses?

C'est une tendance qui se manifeste partout dans le monde. La BBC a vendu toutes ses tours de transmission. Il n'est pas nécessaire de posséder la tour pour acheminer le signal.

Étant donné l'implantation de nos tours et leur utilité dans le nouveau monde du sans fil, il peut y avoir d'autres façons de a) bénéficier de ces tours que nous avons mises en place au fil des ans et b) continuer à acheminer tous les services. Les deux sont totalement distincts. L'amalgame entre les deux que font certains trahit un manque de compréhension de...

Mme Wendy Lill: Expliquez-nous. Je suis curieuse...

M. Robert Rabinovitch: ... car nous sommes d'abord et avant tout une entreprise de programmation.

Mme Wendy Lill: ... quel est le marché pour les transmetteurs hertziens. Je ne sais pas. Qui voudrait les acheter? Vous pouvez me le dire.

Je sais que cela se fait. Je sais que la BBC a vendu tous ses transmetteurs et... Est-ce que la privatisation de nos systèmes de transmission ne...? Voulons-nous que notre radiodiffuseur public soit totalement à la merci d'un système de transmission privé? N'y voyez-vous pas un problème?

Vous parlez de votre capital fixe. Il se compose de locaux et d'équipement, et vous prenez une décision plutôt radicale aujourd'hui, en mai 2000, qui pourra limiter pour l'éternité nos possibilités. J'irai jusqu'à dire que vous éliminez toute possibilité de changements futurs que nous pourrions souhaiter, par le choix de votre système de transmission aujourd'hui.

M. Robert Rabinovitch: J'adorerais avoir une longue discussion avec vous et nos techniciens à ce sujet, mais, très franchement, je ne partage pas votre avis.

Nous avons au moins six acheteurs intéressés. Aux États-Unis, une société possède maintenant 17 tours. Ces dernières sont des instruments précieux dans le monde d'aujourd'hui car on peut y accrocher toutes sortes de matériel de transmission. Elles ne sont pas utiles seulement pour la télévision.

À l'heure actuelle, nous avons un groupe commercial qui vend les droits d'utilisation de nos tours et rapporte quelques millions de dollars par an. Nous pensons pouvoir obtenir un bien meilleur rendement. Ce que nous ne ferons pas—et je m'y engage—c'est nuire à notre faculté d'utiliser ces tours pour la transmission de nos signaux. Nous aurons toujours notre place garantie sur ces tours.

Nous avons un autre problème dont personne n'a parlé, à savoir le passage à la télévision numérique. La FCC a décrété que tous les États-Unis devraient être numérisés d'ici 2007. Eh bien, qui va me faire un chèque de 800 millions de dollars pour convertir nos installations de transmission au numérique? Quelques entreprises privées sont prêtes à conclure des partenariats avec nous et à payer le coût de la numérisation.

J'aimerais beaucoup m'étendre sur ce sujet avec vous.

Le président: D'accord.

M. Robert Rabinovitch: Vous avez appuyé sur mon démarreur.

Le président: Monsieur Rabinovitch, je dois dire, après vous avoir écouté ce matin, que beaucoup de membres doivent se demander pourquoi vous avez répondu oui au premier ministre. Il fallait beaucoup de courage.

Vous avez été extrêmement franc et ouvert avec nous, vous comme M. Redekopp, et au moins nous connaissons beaucoup mieux la situation qu'auparavant. Nous réalisons les défis auxquels vous êtes confrontés et ce que nous avons à faire. Vous avez entendu très clairement la position des membres et le très profond intérêt qu'ils portent à la télévision régionale, tel qu'ils la voient. Ainsi, chacun sait à quoi s'en tenir.

• 1205

Nous apprécions réellement que vous ayez pris trois heures sur votre temps pour venir nous rencontrer aujourd'hui. Merci infiniment, monsieur Rabinovitch et monsieur Redekopp. Cela a été très utile pour nous tous. Merci.

M. Robert Rabinovitch: Si je puis, monsieur le président, j'aimerais dire combien j'ai apprécié votre invitation. Je crois réellement que l'avenir de la radiodiffusion publique sera déterminé par les députés dans cette salle et ce que les Canadiens leur diront. Un débat sur la radiodiffusion publique est indispensable et n'a que trop tardé et si nous y avons contribué le moindrement, cette matinée aura valu la peine.

Je peux également assurer aux membres que nous transmettrons leurs préoccupations au conseil. Celui-ci est confronté, tout comme nous, à des décisions que nous préférerions ne pas devoir prendre, mais nous ne pouvons continuer à faire l'autruche et—je répète l'expression—assister à l'infantilisation du réseau que nous chérissons et, finalement, continuer à abuser de notre personnel. Celui-ci a traversé une période terrible au cours des 10 ou 15 dernières années et nous leur devons de leur dire quel futur les attend et essayer d'améliorer ce futur, car nous sommes tous de fervents partisans de la radiodiffusion publique.

Je vous remercie donc de votre invitation.

Le président: Merci beaucoup.

Des voix: Bravo, bravo!

Le président: Nous avons une autre séance sur le projet de loi C-27. Les témoins attendent déjà. Nous devrions faire une pause auparavant, mais M. Mills a sa motion.

À l'ordre.

M. Dennis Mills: Après toute cette discussion, je pense que nous pouvons procéder rapidement au vote sur cette motion.

Le président: Excusez-moi. Silence, je vous prie.

Que souhaitent les membres? Monsieur Scott.

M. Andy Scott: Monsieur le président, je vous demande instamment de mettre aux voix la motion déposée par M. Mills ce matin.

Le président: Voulez-vous que je procède au vote tout de suite?

M. Andy Scott: Oui.

Le président: Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger: J'aimerais supprimer au moins le dernier paragraphe.

Le président: Proposez-vous un amendement, monsieur Bélanger?

M. Mauril Bélanger: Oui, étant donné la discussion que nous avons eue et aussi le fait que le comité n'a ni le temps ni les ressources d'entreprendre ce travail. J'espère...

M. Dennis Mills: Monsieur le président, je n'y suis pas opposé.

M. Mauril Bélanger: C'est un amendement amical.

Le président: M. Bélanger propose de supprimer la dernière phrase. Si vous êtes d'accord, nous allons mettre aux voix la motion modifiée, c'est-à-dire sans le dernier paragraphe.

Des voix: D'accord.

Le président: Très bien. Je mets aux voix la motion modifiée.

(La motion est adoptée—Voir Procès-verbaux)

Le président: La séance est levée.