SNUD Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 23 mai 2002
¸ | 1405 |
La présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)) |
¸ | 1410 |
M. Blair Buchholz (directeur des services à la jeunesse, Calder Centre) |
¸ | 1415 |
¸ | 1420 |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Bill Logue (directeur général, Larson House) |
¸ | 1425 |
La présidente |
M. Ernie How (coordonnateur, Services de toxicomanie - Malades externes) |
¸ | 1430 |
¸ | 1435 |
¸ | 1440 |
La présidente |
Mme Skelton |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
¸ | 1445 |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
Mme Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
M. Ernie How |
Mme Skelton |
M. Bill Logue |
¸ | 1450 |
Mme Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Skelton |
M. Ernie How |
Mme Skelton |
M. Bill Logue |
M. Blair Buchholz |
Mme Skelton |
M. Blair Buchholz |
Mme Skelton |
M. Ernie How |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
¸ | 1455 |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
M. Réal Ménard |
M. Bill Logue |
¹ | 1500 |
M. Réal Ménard |
M. Bill Logue |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Réal Ménard |
¹ | 1505 |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Ernie How |
M. Bill Logue |
La présidente |
¹ | 1510 |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
¹ | 1515 |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.) |
M. Bill Logue |
¹ | 1520 |
M. Dominic LeBlanc |
M. Bill Logue |
M. Dominic LeBlanc |
M. Bill Logue |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
¹ | 1525 |
La présidente |
Mme Carol Skelton |
M. Ernie How |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
¹ | 1530 |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Bill Logue |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
¹ | 1535 |
M. Ernie How |
Mme Carol Skelton |
M. Ernie How |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
M. Bill Logue |
Mme Carol Skelton |
¹ | 1540 |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Réal Ménard |
La présidente |
¹ | 1545 |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Ernie How |
¹ | 1550 |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
¹ | 1555 |
M. Blair Buchholz |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
º | 1600 |
M. Dominic LeBlanc |
La présidente |
M. Dominic LeBlanc |
La présidente |
M. Ernie How |
M. Dominic LeBlanc |
M. Ernie How |
M. Dominic LeBlanc |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
º | 1605 |
La présidente |
M. Bill Logue |
M. Dominic LeBlanc |
M. Bill Logue |
M. Dominic LeBlanc |
M. Bill Logue |
M. Dominic LeBlanc |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
º | 1610 |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Ernie How |
º | 1615 |
La présidente |
M. Bill Logue |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
º | 1620 |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
M. Ernie How |
º | 1625 |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Bill Logue |
La présidente |
M. Bill Logue |
º | 1630 |
La présidente |
M. Ernie How |
La présidente |
Mme Carol Skelton |
M. Ernie How |
Mme Carol Skelton |
M. Blair Buchholz |
Mme Carol Skelton |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
M. Blair Buchholz |
La présidente |
CANADA
Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments |
|
l |
|
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 23 mai 2002
[Enregistrement électronique]
¸ (1405)
[Traduction]
La présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Nous sommes les membres du Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments. Cet après-midi, nous sommes à Saskatoon pour parler de traitement pour toxicomanie.
Je vais vous mettre en contexte. Ce comité a été créé au mois de mai l'année dernière pour examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou médicaments. En avril dernier, à l'ordre de renvoi original s'est ajouté le projet de loi C-344, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, une loi relative à la consommation de marijuana.
Le comité a tenu des audiences dans diverses régions du pays et s'est penché sur la réduction des méfaits, le traitement, la prévention et l'application de la loi. Tous les membres du comité sont heureux d'être à Saskatoon aujourd'hui.
Des représentants de toutes les formations politiques font partie du comité, mais aujourd'hui, seuls trois sont présents. Je vais vous les présenter. Carol Skelton est députée de Saskatoon. Réal Ménard est député du Bloc québécois, de Montréal, et Dominic Leblanc est du Nouveau-Brunswick. Je suis Paddy Torsney, députée de Burlington, en Ontario.
Chantal Collin et Marilyn Pilon sont nos attachées de recherche, et Eugene est notre greffier suppléant pour cette semaine. Nous sommes heureux de l'avoir avec nous, d'autant plus qu'il est rompu aux affaires militaires.
Nos témoins d'aujourd'hui sont, du Calder Centre, Blair Buchholz, directeur des services à la jeunesse; le directeur de Larson House, Bill Logue; et des services externes de toxicomanie, le coordonnateur, Ernie How.
Messieurs, je propose que chacun de vous fasse une déclaration liminaire d'environ 10 minutes, histoire de nous mettre en contexte et de nous faire connaître vos desiderata. Puis, nous passerons aux questions des députés. Je vous ferai signe lorsque neuf minutes se seront écoulées, de sorte que vous puissiez passer à la conclusion, et par la suite, nous passerons à une récapitulation, ou vous pouvez me faire signe lorsque vous aurez presque terminé. Lorsque les 10 minutes seront écoulées, j'essaierai de vous accorder assez de temps pour terminer.
Blair, vous commencerez.
¸ (1410)
M. Blair Buchholz (directeur des services à la jeunesse, Calder Centre): Je suis ici pour vous entretenir des services que nous offrons au Calder Centre.
Le Calder Centre est un établissement de soins pour malades hospitalisés. Ses services sont destinés aux particuliers et aux familles touchés par les chimiodépendances. Nous faisons partie des services généraux de santé du district de Saskatoon. Nous faisons aussi partie des services de santé de la famille. Nous sommes une ressource provinciale. Nous assurons des services aux adultes, aux jeunes et aux familles de toute la province. Nos clients nous sont référés de partout en Saskatchewan.
L'année dernière, nous avons offert nos services à 355 adultes, 155 jeunes et 182 membres de leur famille.
La prestation de nos services repose sur le modèle des services de réadaptation saskatchewanais ainsi que sur les pratiques exemplaires du gouvernement fédéral. C'est ainsi que nous évaluons nos résultats.
Nos services sont de nature générale et ils sont axés sur le développement. Ils s'appuient sur un modèle de réadaptation lui-même fondé sur le modèle bicyclique, social et spirituel. Calder met en commun les ressources d'une équipe multidisciplinaire. Nos interventions sont caractérisées entre autres par leur approche personnalisée et orientées par la recherche d'une solution brève; elles comprennent des techniques d'entrevue motivationnelle, et un modèle de changement pluridisciplinaire qui permet l'apprentissage de l'autonomie fonctionnelle grâce à des techniques cognitives ou comportementales et la thérapie de la réalité.
Notre démarche est principalement axée sur un modèle transthéorique de changement et des techniques d'entrevue motivationnelle, mais différents intervenants aux formations tout aussi diverses font appel à différentes approches thérapeutiques.
Comme je l'ai déjà dit, notre équipe est multidisciplinaire. Nous avons des intervenants en toxicomanie, une infirmière, des ludothérapeutes, un conseiller familial et un conseiller spirituel. Une travailleuse sociale autochtone travaille aussi avec nous, ainsi qu'un psychologue clinicien, des aides en recherche et en qualité et un spécialiste en prévention primaire. Nous avons aussi une unité de service provinciale qui offre des services d'aiguillage partout en province, ainsi que certains traitements de groupe pour les toxicomanes de sorte que nous assurons une uniformité des services en Saskatchewan. Dans le cadre d'un autre projet, nous faisons appel à un travailleur social spécialisé en diagnostic mixte.
Du côté des contractactuels, nous avons recours à un médecin, un psychiatre, des aînés et des éducateurs en santé publique, ainsi que des nutritionnistes. Ils travaillent avec nous, mais sont engagés à contrat. Nous avons aussi de nombreux partenaires de service. Pour n'en nommer que quelques-uns, mentionnons les services médicaux et de santé mentale de SaskHealth, le ministère des Services sociaux, le ministère de l'Éducation, le Conseil tribal de Saskatoon, le PNLAADA et l'Université de la Saskatchewan.
Dans le cadre du programme destiné aux adultes, nous avons 32 lits réservés aux malades hospitalisés. Le programme de base dure quatre semaines; toutefois, nous pouvons l'adapter aux besoins de chacun. Il existe un programme de chimiodépendance pour les femmes et un programme distinct pour les hommes, tous deux fondés sur les particularités de chaque sexe. Enfin, nous avons ce que nous appelons le groupe de gens touchés par l'abus de substances psychoactives dans le cadre duquel nous offrons des services aux gens qui subissent des préjudices importants parce qu'un proche abuse de l'alcool ou d'autres drogues. Ce groupe participe aussi à nos services pour malades hospitalisés.
Nous avons un programme distinct pour les jeunes au Clader Centre. Nous disposons de 12 lits dans une aile distincte et nous offrons des programmes distincts dans la même institution adaptés aux jeunes de 12 à 18 ans. Ils se donnent aussi sur une période de quatre semaines; toutefois, encore une fois, nous sommes prêts à les adapter aux besoins individuels. Certains jeunes ne restent pas très longtemps, tandis que d'autres restent de 6 à 8 semaines, ce qui est le maximum. Généralement, les jeunes terminent le programme de quatre semaines.
Le programme destiné aux jeunes comprend des volets mixtes et séparés selon le sexe. Il y a aussi un programme scolaire qui fait partie d'un projet éducatif de Nutana. Essentiellement, nous assurons la gestion primaire des cas en fournissant une thérapie individuelle et de groupe. Nous offrons des services psycho-éducatifs, d'apprentissage de l'autonomie fonctionnelle et des programmes récréatifs. Le groupement et l'évaluation se font globalement. Les groupes sont établis selon les évaluations psychologiques, scolaires, médicales et psychiatriques.
Nous avons des programmes destinés aux familles fondés sur les besoins propres à chaque famille. Nos services peuvent varier de quelques heures à quelques jours, et dans des cas extrêmes, nous aurions notre groupe de personnes hospitalisées pour abus de substances. Nous tentons d'offrir des services distincts de ceux offerts dans la collectivité et axés sur les besoins de l'individu. Si la collectivité offre déjà des services de consultation familiale, nous tentons de travailler avec le responsable du dossier dans la collectivité ainsi que la famille pour nous assurer que leurs besoins sont satisfaits.
Nous avons aussi mis au point un programme spécial pour les Autochtones. Il est assez exhaustif. Nous ne sommes pas une organisation autochtone, mais nous avons beaucoup de clients autochtones au Centre Calder. Nous demandons régulièrement aux aînés de participer à nos activités, entre autres nos sueries, nos cercles de guérison, nos cérémonies du calumet, nos danses, nos pow-wows et nos ateliers d'artisanat. Notre travailleuse sociale autochtone travaille à temps complet et coordonne ces activités en plus d'être formée en médecine autochtone traditionnelle.
¸ (1415)
Nous essayons donc toujours de satisfaire les besoins culturels et spirituels de nos clients, peu importe d'où ils viennent. Nous avons un deuxième conseiller spirituel qui offre des services plus généraux au reste de la population.
Nos clients doivent volontairement s'inscrire à nos programmes et y participer activement, mais généralement, dans le cadre du programme pour les jeunes, nous constatons que les jeunes Autochtones et non-Autochtones interagissent beaucoup. Notre programme est un franc succès. Il existe très peu de tension raciale ou autre forme de tension semblable, et ce contexte interculturel semble plaire aux enfants qui apprécient le partage.
En plus de cela, nous avons aussi recours à la ludothérapie. Nous insistons beaucoup sur les activités de remplacement et la création de liens avec la collectivité.
C'était un résumé des services offerts par le Centre Calder. Je n'ai pas regardé ma montre, mais je crois que je suis bien près de mes 10 minutes.
¸ (1420)
La présidente: Souhaiteriez-vous que ce comité se penche plus particulièrement sur un de vos souhaits?
M. Blair Buchholz: De façon générale, j'espère qu'au cours de vos délibérations, vous vous attarderez longtemps aux services offerts partout au Canada. Il apparaît évident que ce problème frappe durement la société, et je songe plus particulièrement à la consommation de drogues injectables par les jeunes qui a atteint un point critique. Le manque de ressources est toujours central lorsque ces cas surviennent.
Les problèmes les plus importants semblent toucher la jeunesse puisque l'éventail des soins qui leur est offert ne semble pas être aussi complet que celui des adultes. Je pense plus précisément au sevrage et à la désintoxication auxquels aucun établissement ne se consacre là-bas.
À l'opposé, en ce qui a trait au traitement à plus long terme dont les programmes destinés aux Autochtones, les programmes durent effectivement plus longtemps, les ressources provinciales comprennent deux centres pour les jeunes Autochtones, mais ils ne se consacrent qu'aux problèmes de l'inhalation de solvants. Ils ne traitent pas les polytoxicomanes. Je crois que si vous faisiez une enquête auprès des intervenants en toxicomanie de la collectivité, ils vous diraient qu'il faudrait mettre au point des programmes destinés aux Autochtones pour ce groupe cible en particulier.
Aux deux extréminités du continuum de soins, il y a peu de clientèle et nous créons donc nos programmes pour cibler la majorité de la population et fournir les meilleurs services que nos ressources permettent.
La présidente: Je vous remercie beaucoup.
Monsieur Logue.
M. Bill Logue (directeur général, Larson House): Je vous remrecie beaucoup.
Je m'appelle William David Logue et j'ai le privilège d'être le directeur général de la Larson House ici à Saskatoon.
La Larson House est une organisation de bienfaisance à but non lucratif financée par le ministère provincial de la Santé par l'intermédiaire du Conseil de santé de Saskatoon. Nous sommes une unité de désintoxication, qui offre des services de stabilisation et de transition, notre principale fonction étant d'assurer une présence aux avant-postes de la guerre à la toxicomanie. Nous sommes généralement le premier contact de cette personne dont la vie dérape et qui perd toute emprise sur ce qui lui arrive.
Vous êtes sans doute du programme en 12 étapes dont la première est d'admettre qu'on est à la merci de l'alcool et des drogues et que notre vie devient impossible à gérer. Dans notre cas, la plupart des gens que nous rencontrons sont à la toute fin de ce processus: ils n'arrivent plus à gérer leur vie et sont envoyés à Larson House pour bien des raisons.
Larson House accepte les clients recommandés de n'importe quelle source. Nous prenons les clients recommandés qui nous viennent des gens de la rue, de la police, des médecins, de nos collègues ici, des clients que nous voyons en service externe, même des malades hospitalisés. Quiconque a besoin d'un environnement sécuritaire dans lequel il pourra se seuvrer de l'alcool ou des drogues peut venir à Larson House.
Lorsque ces clients nous sont envoyés, nous les admettons et nous nous assurons qu'ils sont vus par un personnel médical compétent qui se charge de superviser leur sevrage pour s'assurer qu'il se fasse de façon sécuritaire. Évidemment, si leur état est précaire et qu'ils ont des problèmes importants, nous les envoyons à l'hôpital où ils sont vus par des médecins qui stabilisent leur état avant de nous les renvoyer à Larson House pour poursuivre leur traitement.
À l'heure actuelle, Larson House dispose de 18 lits qui sont occupés à 102 ou 103 p. 100 tous les mois. L'année dernière, nous avons fonctionné à 106 p. 100 et fourni des services à environ 980 clients représentant 9 680 jours-hospitalisations.
Nous tournons à plein régime. Nous ne disposons que de neuf employés à temps complet et neuf à temps partiel pour le moment. Cela comprend un médecin. Toutefois, un deuxième médecin traitant rend visite au centre les lundis, mercredis et jeudis pour superviser les soins à donner aux clients.
Notre objectif primaire est de stabiliser l'individu dans son contexte social de désintoxication non médicale, de l'aider à se sevrer de sa dépendance, quelle qu'elle soit—qu'il soit question d'une dépendance à l'héroïne, à la cocaïne, à l'alcool, peu importe. Notre objectif est de les stabiliser du point de vue physique et psychologique pour qu'ils reprennent leur esprit et puissent prendre des décisions quant à leur vie et à leur avenir.
Lorsque nous accueillons ces individus, notre première tâche est de stabiliser leur état. Nous tentons de leur démontrer que la dépendance est une maladie et nous leur offrons des renseignements sur les groupes d'entraide comme Alcooliques Anonymes et Narcotiques Anonymes de sorte qu'ils comprennent qu'une aide leur est offerte et qu'ils pourront continuer de recevoir cette aide à l'extérieur de notre cadre.
À ce stade, toujours en conformité du modèle saskatchewanais de la réadaptation, nous remettons leurs dossiers aux responsables cliniques de leur cas. Nous cherchons à les inscrire au service de soins aux toxicomanes pour qu'ils puissent être évalués et que l'on détermine si une hospitalisation ou des soins prolongés en service externe sont souhaitables pour la thérapie de prévention des rechutes, ou encore si des évaluations subséquentes faites par les services externes déterminent qu'une hospitalisation au Centre Calder est préférable.
Cela étant dit, la Larson House transfère parfois ses clients à d'autres unités de la Saskatchewan. Les centres de Hopeview, Indian Head, et Slim Thorpe peuvent aussi faire le même genre de recommandation et assurer le même genre de service que nous.
En résumé, c'est l'essentiel de nos activités. Ce que vous devez comprendre, c'est qu'à titre d'unité de désintoxication, nous sommes dans les tranchées. Nous sommes le point de départ.
On m'a demandé ce que je voudrais que l'on change, quels étaient mes desiderata. À Saskatoon, nous tentons désespérément de mettre sur pied une unité de désintoxication brève qui se rattacherait à Larson House. Des négociations sont en cours à cet effet. Plutôt que d'incarcérer les toxicomanes appréhendés par la police, ceux-ci seraient envoyés au centre de désintoxication brève où ils seraient traités par des professionnels dont l'objectif principal serait de stabiliser leur état pendant les 24 premières heures et de les familiariser avec les services de désintoxication pour qu'ils comprennent bien qu'une aide leur est offerte. Une fois leur état stabilisé, ils pourront décider de partir ou de s'inscrire au programme de désintoxication officiel plutôt que de simplement quitter leur cellule au lendemain de leur détention. Cela leur donnerait un peu d'espoir et peut-être une idée de ce qu'ils peuvent changer tout en étant traités humainement plutôt que d'être seulement incarcérés. C'est ce que nous souhaitons.
Nous espérons que ce projet de désintoxication brève s'accompagne d'un centre de transition de 12 à 14 lits à l'étage supérieur. Ce serait un centre de longue durée pour nos clients qui pourraient y rester trois, six ou neuf mois, le temps de faire leur transition à la vie normale, de récupérer, de travailler ou de faire ce qu'ils ont à faire. Ils auraient un environnement sécuritaire, stable, exempt d'alcool et de drogues où vivre et construire des fondations durables qui les mèneront au rétablissement et à la stabilité.
C'est l'essentiel de ce que j'avais à partager avec vous aujourd'hui. Si vous avez des questions...
¸ (1425)
La présidente: Merci.
Monsieur How.
M. Ernie How (coordonnateur, Services de toxicomanie - Malades externes): Merci.
Au nom du personnel du district de santé de Battlefords, je vous remercie de nous permettre de faire cet exposé.
Ce dont je vais vous parler n'est que le reflet de ce que nous voyons tous les jours. Nous ne prétendons pas appuyer nos observations sur des recherches. C'est ce que nous voyons tous les jours.
Dans le document que je vous ai distribué, il y a d'abord un aperçu général. Les Services de santé mentale du district de santé de Battlefords sont l'organisation qui supervise la prestation des services de toxicomanie. C'est un des derniers endroits où les services en santé mentale sont encore chargés des services de toxicomanie. Nous partageons les mêmes locaux, notre gestion est commune et nos services d'accueil le sont aussi. Les deux services font partie de l'hôpital Union de Battleford. Le tout fonctionne très bien. Nous sommes des partenaires efficaces, mais nous devons tout de même améliorer notre situation.
Une partie des services de toxicomanie de Battlefords sont offerts au Centre de réadaptation de Hopeview. C'est un établissement mixte de neuf lits disposant d'un programme échelonné sur 90 jours. C'est le seul programme de 90 jours de toute la province, à l'exception du programme d'extension des services de l'Armée du Salut ici à Saskatoon. Il s'appuie sur un modèle en 12 étapes axé sur l'apprentissage de l'autonomie fonctionnelle. Les bénéficiaires sont généralement des polytoxicomanes parfois atteints d'un trouble mental concomitant. Nos bénéficiaires ont généralement terminé un ou deux programmes plus courts, ce qui confère parfois à Hopeview un statut de dernier recours.
Nous coopérons avec les services de santé mentale pour satisfaire les besoins de nos bénéficiaires. Nous avons un conseiller à temps complet et cinq employés de soutien. Du personnel est présent 24 heures sur 24. À l'heure actuelle, on tente d'ajouter une composante de désintoxication en société à notre programme. C'est pour assurer un éventail de services complets. Si nous devons aiguiller quelqu'un vers l'établissement de Bill, nous voulons éviter qu'il y ait rupture dans la séquence des services. C'est pour répondre en partie à ce problème.
Le programme est axé sur l'intégration de routines quotidiennes. En bref, nos bénéficiaires sont responsables de la cuisine, du nettoyage et de l'entretien des lieux. Ils apprennent ainsi à fonctionner de façon autonome.
Les services externes pour lesquels je travaille sont dotés de cinq conseillers et d'un employé de soutien. Nous sommes ouverts cinq jours par semaine, de 8 heures à 17 heures. Nous somme situés dans le Centre de santé mentale de Battlefords, mais notre entrée est distincte. C'est très important pour notre clientèle qui craint l'opprobre de la société et ne souhaite pas être associée aux gens atteints de troubles mentaux. Nous accueillons environ 600 clients par année. Les cas urgents en dehors des heures normales de travail sont traités par l'urgence de l'hôpital et le personnel de l'aide psychiatrique qui travaille la nuit. Les toxicomanes sont gardés là la nuit jusqu'à ce que nous puissions les recevoir le matin, ou si l'hôpital juge qu'ils peuvent rentrer chez eux, une recommandation sera faite pour que nous les voyions le lendemain.
Nous offrons aussi un programme de conduite prudente. Ce programme est destiné aux gens qui ont été arrêtés pour conduite avec facultés affaiblies ou d'autres raisons médicales. Nous recevons environ 120 clients par année dans le cadre de ce programme. Il comprend aussi un volet de sensibilisation de la population à la conduite prudente.
Le programme réservé aux adultes est suivi par 300 clients par année, pour tous les types de dépendance. Il comprend des services d'évaluation et de recommandation. Nous avons des programmes de réadaptation continus de jour. Nous offrons aussi des services aux particuliers, aux familles et aux installations correctionnelles de Battlefords. Un de ces programmes est communautaire et un autre est offert dans un environnement contrôlé. Il existe aussi un programme personnel et un programme collectif au collège régional. Ce programme est destiné aux toxicomanes qui souhaitent terminer leur 12e année de formation générale. Ces clients sont très à risque et nous les recevons une fois leur état stable. La rétroaction que nous recevons à ce sujet est très positive. La sensibilisation dans la collectivité et la prévention sont les éléments clés de cette initiative.
Je voudrais parler de la nature de notre clientèle. Elle se compose à 40 p. 100 de non-Autochtones et à 60 p. 100 d'Autochtones ou de descendants autochtones. Dix pour cent consomment des drogues injectables, 56 p. 100 abusent d'alcool et 36 p. 100 d'alcool et de drogues.
Nous offrons des services de thérapie pour le jeu pathologique à notre unité de services externes, et 50 personnes par année s'en prévalent. Nous assurons l'évaluation, les recommandations et le traitement. Cinquante pour cent de nos clients ont un trouble mental concomitant. C'est une prévalence plus élevée que celle enregistrée dans tout autre service de la province. Nous croyons que cela s'explique par notre partenariat étroit avec les services en santé mentale et les recommandations croisées. Nous offrons des services de prévention et de sensibilisation du grand public. Ces services sont offerts dans quatre districts de santé.
Dans le cadre de notre programme de services à la jeunesse, nous offrons des volets individuels et collectifs. Nous voyons environ 160 clients par année. Nous assurons l'évaluation, les recommandations et le traitement pour les clients âgés de 18 ans et moins. Nous constatons que la gamme des drogues employées est très vaste, qu'elles soient médicales ou non. Ce que les travailleurs des services à la jeunesse nous signalent souvent, c'est que les enfants ont souvent des problèmes relationnels et familiaux, et que le coeur du problème se trouve là, pas dans les jeunes eux-mêmes. Souvent, ces travailleurs passent beaucoup de temps à aider les jeunes à venir à bout de ces problèmes, ce qui les aide par la suite à résoudre leurs problèmes d'abus de substances psychoactives. Nous offrons nos services à la fois dans les établissements de garde en milieu fermé et en milieu ouvert. Nous disposons de bureaux dans les deux écoles secondaires. Battlefords n'a que deux écoles secondaires, et nous avons des clients dans ces écoles.
¸ (1430)
En matière de sensibilisation à la prévention au sein de la collectivité, je dirais que 80 p. 100 de notre clientèle nous est envoyée par les services juridiques et que 63 p. 100 des filles nous sont aussi envoyées par les services juridiques. Quatre-vingt-huit pour cent des jeunes disent consommer de l'alcool et des drogues, et comparativement à 36 p. 100 pour notre clientèle adulte, l'on constate une augmentation importante de la consommation de drogues chez les jeunes. Seulement 10 p. 100 des jeunes disent ne consommer que de l'alcool.
Notre expérience nous a permis de déterminer que le profil de notre clientèle change considérablement. Dans le passé, nous traitions principalement des alcooliques; à l'heure actuelle, notre clientèle abuse de substances diverses et est parfois atteinte d'un trouble mental concomitant.
La formation et les ressources nécessaires pour faire face à cette nouvelle réalité sont inadéquates, et bon nombre de nos modèles de traitement qui servaient dans le passé ne répondent pas bien aux besoins de notre nouvelle clientèle. Par exemple, l'exigence de l'abstinence totale de médicaments psychotropes n'est pas cohérente puisque certains de nos clients sont atteints de troubles mentaux et doivent prendre des médicaments de ce type.
Les services de santé mentale et de toxicomanie ne nous permettent pas de traiter tous les clients puisque certains ne répondent pas aux critères d'admission de l'un ou l'autre de ces services. Bien que nous fassions des progrès, il faut consacrer davantage de ressources à ce problème.
Nous n'avons pas suffisamment de connaissances sur les effets des drogues modernes sur la santé mentale et physique des toxicomanes, qu'il s'agisse de l'ecstasy, du speed ou des autres drogues que nous appelons modernes.
En ce qui a trait aux effets de la marijuana sur notre clientèle—et ces effets peuvent aussi être dévastateurs—, le problème est ce clivage entre la norme et la recherche. Y a-t-il un lien entre la dépression et la consommation de marijuana? Certaines recherches tendent à démontrer que oui. L'on pose souvent la question à nos clients. La marijuana cause-t-elle des troubles de santé mentale ou est-elle un facteur contributif de leur déclenchement? Encore une fois, les troubles mentaux concomitants doivent faire l'objet de plus de recherches.
Le manque de motivation, le syndrome amotivationnel, est particulièrement fréquent. Les recherches sur l'usage médical de la marijuana tendent à normaliser son usage sans se soucier des effets néfastes sous-jacents. On fait la promotion des avantages de cette consommation sans se pencher sur ses effets secondaires.
Nos intervenants auprès des jeunes identifient le nombre de fois où le jeune se prête à des activités à risque très élevé comme la préparation d'une mixture de cachets dérobés de la pharmacie familiale et écrasés pour être reniflés ou injectés, sans savoir quels sont les effets potentiels de sa consommation. Personnellement, je tente toujours de savoir si le jeune renifle des solvants ou en abuse. C'est très difficile d'obtenir des réponses à ces questions. Un sentiment de honte est toujours rattaché à leur consommation. Les renifleurs sont au bas de la hiérarchie dont le sommet est occupé par les consommateurs d'héroïne et d'opiacés.
Nos bases de données provinciales ne renferment que des renseignements sur l'année en cours, alors beaucoup d'informations manquent. Les dommages sont similaires à ceux du syndrome d'alcoolisation foetale et des effets de l'alcool sur le foetus. Nous constatons que la détérioration de nos clients adultes qui reniflent des poudres narcotiques sur une période de cinq à six ans est inouïe.
Les jeunes reniflent souvent pendant deux à trois ans, souvent entre les âges de 8 à 12 ans. Puis, ils sont en âge de recourir au crime ou d'avoir un emploi à temps partiel et arrêtent de renifler pour passer à d'autres drogues diverses. C'est une situation tout à fait inacceptable.
Puisque les renifleurs sont perçus comme la queue du peloton, nous devons prendre bien soin de ne pas les oublier. Dans le contexte de l'usage non médical de drogues, du financement est toujours disponible pour les programmes d'échange de seringues et de méthadone. C'est très facile d'occulter ce groupe qui est pourtant très important. Lorsque je travaillais dans des établissements correctionnels, j'en discutais avec des détenus et plus de 50 p. 100 d'entre eux m'ont dit qu'ils ont reniflé lorsqu'ils étaient jeunes, avant de passer à autre chose.
Un autre problème qui survient dans nos interactions avec les hôpitaux et les services en santé mentale, c'est le manque de connaissances sur les dépendances du personnel médical. Inversement, les travailleurs en toxicomanie ne comprennent pas toujours bien la perspective des professionnels de la santé.
Un exemple de fragmentation de services et de chevauchement malgré le peu de ressources serait le programme Kids First. Il a été lancé à North Alfred il y a un an. Depuis sa mise en oeuvre, nous n'avons eu que des chinoiseries administratives. Si elles avaient eu les mêmes ressources, il y a déjà un an que d'autres organisations auraient envoyé leurs travailleurs dans les rues pour accomplir de véritables progrès.
¸ (1435)
Le programme Kids First est une bonne initiative. Je le cite comme exemple de chevauchement où l'on a créé un autre palier bureaucratique.
En raison des délais, il est difficile d'offrir des services immédiats aux toxicomanes. Souvent, lorsqu'on leur demande ce qu'on pourrait faire pour leur être utile, de façon à ce qu'ils se présentent plus tôt, ils répondent qu'ils souhaitent pouvoir compter sur quelqu'un pour les aider lorsqu'ils le demandent. Je suis sûr que Bill confirmera ce fait. Souvent, avant que nous réussissions à trouver des lits et les ressources voulues pour répondre à leurs besoins, il s'est écoulé trop de temps et les toxicomanes ont recommencé à se droguer. Il faut mettre sur pied un processus qui leur permette d'obtenir un service sur-le-champ, dès qu'ils se présentent.
Voilà les questions que nous avons soulevées. Merci.
¸ (1440)
La présidente: Merci. Cela nous laisse assez de temps pour les questions.
Madame Skelton.
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Merci beaucoup de votre présence cet après-midi.
Le porte-parole principal de notre parti, Randy White, n'a pas pu se joindre à nous aujourd'hui parce que sa mère est très malade. J'ai l'honneur de siéger au comité.
Même si cela n'est pas vraiment dans ma circonscription, Bill, lui, s'y trouve. Je comprends le problème. J'étais présente lors de l'inauguration de Calder House. Je comprends.
J'aimerais poser une question fondamentale. En fait, on part du principe qu'il incombe aux ministères de la Santé provinciaux et territoriaux de s'occuper des services à l'intention des toxicomanes. Quel devrait être, d'après vous, le rôle du gouvernement fédéral à cet égard?
M. Bill Logue: Le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle actif, à mon avis, en établissant des normes nationales en matière de soins, surtout en ce qui a trait aux dépendances. J'aimerais également que le gouvernement fédéral joue un rôle de chef de file en déterminant l'orientation des soins que nous devrions offrir.
À l'heure actuelle, le principe de la réduction des méfaits soulève toutes sortes de questions. Ce principe présente certains avantages très nets. Il comporte aussi toutefois certains inconvénients. Il faudrait mettre sur pied un processus en vertu duquel des professionnels chevronnés discutent en vue d'élaborer une stratégie viable, afin de donner à toutes les provinces du pays des directives en vue de résoudre le problème.
Nous avons douze ou neuf provinces, j'oublie le nombre exact. Chacune fait cavalier seul. Le problème, c'est que l'on ne peut pas obtenir le même genre de traitement au Québec qu'en Colombie-Britannique, ou vice versa. Il faudrait normaliser tout cela d'un bout à l'autre du pays.
Quant au principe de la «réciprocité» relativement aux dépenses liées à la toxicomanie, cela existe en Saskatchewan, en Alberta et au Manitoba. Ce n'est pas une politique à l'échelle nationale. Il existe des limites provinciales qui imposent des directives quant au traitement des dépendances dans notre pays. Ce n'est pas normal. Toute personne venant de n'importe quelle région du pays devrait obtenir le même traitement, où qu'elle se trouve. Nous devrions établir des critères quant à ce que nous jugeons acceptable dans notre pays, et non l'inverse. Nous devrions tous être au même diapason.
Il nous faut un organisme national qui contribue à établir les règles d'engagement, ou quel que soit le nom qu'on leur donne, de façon à ce que nous soyons tous au diapason. Ces règles s'appliqueront aux services de désintoxication, de soins ambulatoires et de soins en milieu hospitalier. Les besoins en matière de désintoxication des adolescents seront les mêmes dans tout le pays et dans toutes les provinces. Il en ira de même des besoins en désintoxication pour les adultes. Nous fonctionnerons tous dans le cadre des mêmes règles en vue d'atteindre les mêmes objectifs. C'est dans ces conditions que, à l'échelle nationale, nous commencerons à vraiment construire quelque chose et à améliorer la situation. Nous ne devrions pas offrir un programme solide de lutte contre la toxicomanie en Alberta, par exemple, pour la seule raison que cette province est un peu plus riche que certaines autres.
Tous les Canadiens devraient avoir droit au même niveau et à la même qualité de traitement des toxicomanies, quel que soit leur lieu de résidence. C'est extrêmement important à mon sens.
La présidente: L'un des autres témoins souhaite-t-il répondre?
M. Ernie How: À mon avis, c'est dans le secteur de la recherche que le gouvernement fédéral devrait intervenir, et pas seulement de la recherche sur le genre de drogues que consomment les toxicomanes, mais également sur les pratiques exemplaires. Vous comprenez ce que je veux dire.
La présidente: Blair.
¸ (1445)
M. Blair Buchholz: J'ai eu l'honneur d'aller assister à Ottawa à l'atelier sur les pratiques exemplaires visant les adolescents et l'abus d'alcool ou d'autres drogues, et cela a été une expérience vraiment utile à mes yeux. Il faut entreprendre plus d'initiatives dans ce domaine pour soutenir le reste du pays relativement à ce que vient de dire Ernie, c'est-à-dire la recherche et la concertation entre les groupes.
Il n'existe pas véritablement d'organismes responsables des pratiques, comme l'a dit Bill. Il n'existe dans le pays aucune véritable norme dans ce domaine.
Ce qui me paraît le plus troublant, parfois, c'est de travailler avec des gens d'origine autochtone, et les problèmes de compétence relatifs à la prestation des divers services; c'est sans doute pour moi le problème le plus crucial pour ce qui est des services offerts dans les provinces.
Je le répète, il existe sans doute quatre programmes de traitement à l'intention des adultes des Premières nations dans la province—je ne suis pas certain du chiffre exact, mais il y en a quelques-uns—et aucun programme pour les adolescents. Parfois, les services offerts varient énormément selon que les jeunes sont des Indiens inscrits ou non. Il y a un grand nombre d'adolescents qui ont déménagé en milieu urbain et qui ne vivent plus dans les réserves, et ils n'ont donc pas droit aux mêmes avantages ou bien ils n'ont pas les liens voulus avec la direction des services médicaux ni la possibilité d'avoir accès aux services de façon opportune. Ils passent d'une certaine façon entre les mailles du filet.
Si les provinces et le gouvernement fédéral réussissaient à s'entendre et à déterminer qui va vraiment être responsable... Je sais que cela se fait, mais parfois on a tendance à l'oublier, et je pense qu'il y a un groupe de personnes qui ne reçoivent pas les services dont elles ont besoin à cause de ce chevauchement de compétences.
La présidente: Madame Skelton.
Mme Carol Skelton: En vous écoutant, j'ai remarqué que quelqu'un a parlé des centres Slim Thorpe et Calder. Combien de centres avons-nous en Saskatchewan?
M. Bill Logue: Vous parlez de centres de traitement en établissement?
Mme Carol Skelton: Pouvez-vous citer les différents centres et nous dire combien il y en a à chaque niveau, combien de centres de désintoxication?
M. Bill Logue: Pour la désintoxication, il y a Larson House; il y a Angus Campbell à Moose Jaw; quant au centre Slim Thorpe, il abrite le service de quatre lits...
Mme Carol Skelton: Combien de lits y a-t-il dans chaque centre?
M. Bill Logue: Combien de lits dans chaque centre?
Mme Carol Skelton: Combien de lits avons-nous pour la désintoxication?
M. Bill Logue: Ce sont des chiffres approximatifs. Je sais qu'il y en a quatre au centre Slim Thorpe, 18 à Larson House, 20 à Angus Campbell, sauf erreur, et 24 à Regina. Il y a également le service de deux lits à Kipling, et peut-être aussi un nouveau service de deux lits à Battleford.
M. Blair Buchholz: Il n'est pas en activité.
M. Bill Logue: Il n'est pas encore en activité.
M. Blair Buchholz: Il y a également les installations MACSI dans la province...
M. Bill Logue: Ah oui, c'est vrai.
M. Blair Buchholz: ... et le CCA, de Regina, qui offre également des services.
Pour ce qui est du traitement des adultes, je crois que le centre Slim Thorpe offre également un certain nombre de lits. Il y a Pine Lodge, qui est un programme à l'intention des adultes et aussi le centre Calder.
Je ne sais pas exactement le nombre de lits dont disposent les organismes des Premières nations. C'est le gouvernement provincial qui possède cette information.
Mme Carol Skelton: Et il y a 12 lits à l'intention des adolescents pour toute la province de la Saskatchewan?
M. Blair Buchholz: Oui. Les divers centres de désintoxication accueillent les jeunes de moins de 18 ans, et certains de moins de 16 ans--cela arrive à l'occasion--mais ce n'est pas l'endroit idéal. Ces enfants sont très vulnérables et l'organisation de ces centres laisse à désirer.
Pour les jeunes de 16 et plus, le Centre Angus Campbell de Moose Jaw les accueille par petits groupes, mais il est vraiment difficile pour un adolescent qui souhaite se stabiliser de faire une cure de désintoxication ou d'avoir un accès immédiat au service. Nous recevons des enfants qui ont des problèmes de désintoxication, mais nous sommes un programme de traitement et nous ne pouvons pas répondre à la demande de ceux qui se présentent à nos portes.
Mme Carol Skelton: Monsieur How, je crois savoir que vous utilisez l'établissement de santé mentale de Battleford, les locaux de l'ancien hôpital.
M. Ernie How: Nous sommes situés au Centre de santé mentale à court terme. C'est à l'hôpital Union.
Mme Carol Skelton: Ah bon, à l'hôpital Union.
M. Ernie How: Oui.
Mme Carol Skelton: Vous utilisez donc les lits ou l'espace supplémentaires qui se trouvaient à l'hôpital Union.
M. Ernie How: Oui.
Mme Carol Skelton: Avec la diminution des districts de santé et autres, cela va-t-il poser un autre problème en Saskatchewan, étant donné la redistribution des ressources entre les districts de santé? Cela va-t-il vous mettre des bâtons dans les roues? Je sais que lorsque les districts de santé sont passés de la SADAC...
M. Bill Logue: Pour Larson House, cela n'aura aucune conséquence, car depuis notre création, nous fonctionnons comme un service provincial.
¸ (1450)
Mme Carol Skelton: Très bien. Cela ne va donc pas poser de problème. Le niveau et la qualité des traitements resteront identiques dans toute la province, n'et-ce pas?
M. Bill Logue: Oui. Nous avons toujours eu pour mandat de desservir la région de Saskatoon, et le reste de la province selon les disponibilités.
Mme Carol Skelton: Cela ne va toutefois pas vous poser de problème.
M. Ernie How: Nous ne prévoyons pas des changements radicaux dans note mode de prestation des services.
Mme Carol Skelton: En fait, il existe une assez bonne uniformité dans l'ensemble de la province pour ce qui est des programmes de traitement. Vos normes sont les mêmes dans tous les centres et vous travaillez en collaboration. C'est bien cela?
M. Bill Logue: Je sais que tous les centres de désintoxication appliqueront leurs propres politiques et procédures. Je veux dire que nous continuerons de fonctionner plus ou moins de la même façon...
Mme Carol Skelton: Mais vos normes seront identiques dans toute la province.
M. Bill Logue: Pour l'essentiel, oui.
M. Blair Buchholz: À un moment donné, et ensuite, après le démantèlement, les responsables adoptent des politiques différentes dans les diverses régions. Toutefois, relever les défis des services de rétablissement modèle de la Saskatchewan est une chose qui est assez largement acceptée dans toute la province, je pense. Les gens essaient de respecter ces 12 principes cliniques de façon générale.
Mme Carol Skelton: Si le gouvernement fédéral établit des normes, comme l'a dit Bill, il y a les mêmes normes qui sont en vigueur dans toute la province. Si nous disions que l'ensemble du Canada doit offrir les mêmes services, la Saskatchewan pourrait dire: C'est déjà le cas chez nous. Ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a pas de différence entre les districts de santé.
M. Blair Buchholz: On peut trouver une approche différente dans les divers districts de santé--il faut espérer que l'écart sera minime--mais ces centres fonctionnent de façon autonome dans les divers districts de santé. Il n'existe pas d'organisme central qui régit tout cela ou fixe les normes. Il s'agit plutôt d'une entente conclue entre les professionnels de la lutte contre la toxicomanie. Nous avons essayé de préserver l'entité provinciale, le groupe de travail provincial. À l'heure actuelle, l'organisme central se réunit au Park Town. Il y a un regroupement des conseillers provinciaux en toxicomanie qui participent à une conférence, de sorte qu'il existe un ensemble de structures informel auquel les gens s'efforcent de se plier.
Mme Carol Skelton: La présidente a signalé ce matin que l'Ontario exige que toutes les régions offrent un programme d'échange de seringues.
La présidente: C'est le mode de prestation qui diffère.
Mme Carol Skelton: Y a-t-il un programme d'échange de seringues à North Battleford.
M. Ernie How: Non, il n'y en a pas, mais on est en train d'en créer un. Si tout se passe bien, le programme sera en place d'ici la fin de l'année.
M. Bill Logue: Je pourrais peut-être intervenir.
À une époque, la SADAC avait un mandat provincial. À la suite de la délégation de pouvoirs de la commission, nous avons perdu l'avantage de l'organisme central. À une époque en Saskatchewan, lorsqu'un nouveau programme était mis sur pied—disons le programme de traitement à la méthadone—il devait être approuvé et mis sur pied par la SADAC et les règles concernant l'admissibilité et les services offerts étaient établies comme normes provinciales.
Or, depuis que la commission ne chapeaute plus tous les programmes, les divers districts de santé offrent leurs propres services, s'ils décident de le faire. C'est ce qui cause une certaine confusion et c'est ce qui nous a posé divers problèmes, car en vertu des nouveaux programmes, tout le monde fait plus ou moins cavalier seul. Nous avons perdu cette cohérence au niveau provincial.
Si l'on considère la façon dont nous fonctionnons en général, comme les anciens centres tels que Ryerson House, Calder Centre, North Battleford, qui ont été mis sur pied... En effet, nous essayons de nous conformer aux règles qui ont été établies, mais bon nombre de nouveaux programmes et toutes sortes d'initiatives ont été mis sur pied et tous les districts de santé font ce que bon leur semble. C'est ce qui cause une certaine confusion dans ce domaine, et il serait beaucoup plus simple qu'il existe à nouveau un organisme central qui établisse la norme provinciale.
La présidente: Merci, madame Skelton.
Monsieur Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Madame la présidente,
[Traduction]
Je vais parler en français.
[Français]
Je veux revenir sur le rôle du gouvernement fédéral et je veux m'assurer que je comprends bien votre idéal. En ce moment, toute la question des traitements est assurée par les provinces, et on n'a pas accès à la même panoplie de traitements assurables d'une province à l'autre. Évidemment, je comprends que la question des ressources se pose ici. Ne serait-ce pas beaucoup plus simple si le gouvernement fédéral restaurait les paiements de transfert aux provinces pour s'assurer qu'on soit en mesure de faire face à la demande dans le secteur qui vous préoccupe, soit celui de la rémission et de la désintoxication?
Il me semble que s'il y avait une norme nationale... D'abord, la façon dont on voit les traitements est liée à un certain nombre de valeurs. Il y a des gens qui croient à l'abstinence et d'autres qui croient au modèle en 12 étapes. Il y a des gens qui ne croient pas du tout au traitement à la méthadone. On a vu qu'une diversité de points de vue existait. On a visité sept ou huit villes jusqu'à maintenant. La réalité de Halifax nous apparaît sensiblement différente de celle d'Hochelaga--Maisonneuve, que je représente, ou de celle de Saskatoon. N'y aurait-il pas, dans l'idée de vouloir en faire quelque chose de centralisé, une espèce de piège idéologique? Ne serait-ce pas au niveau des ressources que le gouvernement fédéral devrait intervenir?
Ce sont mes premières questions. Après avoir traité de celles-ci, je voudrais qu'on ait un échange sur les traitements que vous offrez.
¸ (1455)
[Traduction]
La présidente: Monsieur Buchholz.
M. Blair Buchholz: Personnellement, je suis d'accord avec vous. Je suis d'avis que si le gouvernement fédéral rétablit les paiements de transfert et laisse aux provinces ou aux régions le soin de déterminer ce qui convient... Il se pose toutes sortes de problèmes différents dans le Nord, dans l'Est et dans l'Ouest. Je crois que cela devrait se faire.
En revanche, je suis convaincu qu'il faut que les paiements de transfert s'accompagnent d'une reddition de comptes pour s'assurer que les services fondamentaux sont bien offerts et que les transferts servent bien aux fins auxquelles ils sont destinés. S'ils visent précisément les services de désintoxication, c'est à cela que les fonds devraient servir. Je ne sais pas quels critères vous imposez à l'égard des paiements de transfert, mais je crois que le gouvernement de la Saskatchewan devrait déterminer ce qui est dans l'intérêt supérieur des gens.
Dans le même ordre d'idées, j'en reviens à la question des champs de compétence. Pour les Premières nations, je ne connais pas toutes ces questions à fond, mais je crois qu'il existe des fonds distincts pour les personnes en cause. Je suis d'accord avec vous pour ce qui est des paiements de transfert.
Vous vouliez obtenir plus de détails au sujet des programmes que nous offrons. Est-ce cela la dernière partie de votre question?
M. Réal Ménard: Non. Je ne sais pas si votre collègue souhaite ajouter quelque chose.
[Français]
Je vais vous poser une question très précise. Pour ce qui est du financement, vous avez répondu à ma question.
J'essaie de comprendre une chose depuis ce matin. On semble nous dire qu'à Saskatoon, la principale ville de la Saskatchewan, qui est une petite province du Canada sur le plan de la population... Comparons ce qui se passe présentement à ce qui se passait il y a 10 ans. Je ne sais pas si vous exerciez votre profession il y a 10 ans. Êtes-vous en mesure de nous donner des facteurs explicatifs qui feraient qu'il y aurait présentement, en l'an 2002, plus de personnes à Saskatoon qui s'injectent de la drogue?
Je vais vous donner une explication. Lorsqu'un professeur d'une université de Terre-Neuve, la Memorial University of Newfoundland, a rencontré les membres du comité, il a dit qu'il y avait souvent un lien entre la non-disponibilité d'équipements récréo-sportifs dans une communauté et l'usage des drogues. Pensez-vous que ce modèle pourrait s'appliquer ici? Au niveau de la municipalité, y a-t-il des équipements sportifs, des arénas, des jeux pour le basket-ball qui sont accessibles? À votre avis, quel est le facteur explicatif? Comment la situation que vous vivez présentement est-elle différente de celle que vous connaissiez il y a 10 ans, par exemple?
[Traduction]
M. Bill Logue: Je peux peut-être répondre à votre question.
Je gère un centre de désintoxication depuis 14 ans et supposons que nous parlons de normes nationales. Dans mon cas et en ce qui concerne la désintoxication, mes problèmes sont très différents de ceux de ces personnes, car lorsque les gens sont malades, ils sont malades, un point c'est tout, monsieur. Ils subissent les conséquences physiques et psychologiques de l'abus d'alcool et de drogues, et il faut les stabiliser avant qu'on puisse prendre d'autres mesures à leur égard. Il faut redonner à ces personnes un minimum de santé pour leur permettre de fonctionner.
Il y a 14 ans, je m'occupais principalement d'alcooliques et de personnes qui fumaient de la marijuana à l'occasion. Nous avions de temps à autre affaire à un consommateur de Talwin et de Ritalin. Lorsque nous étions confrontés à l'occasion à un véritable morphinomane ou héroïnomane de Vancouver, en tant que travailleurs des services de toxicomanie, nous nous réunissions tous pour jeter un coup d'oeil sur cette personne—et je ne plaisante pas, car c'était vraiment un événement—et nous disions: «Dis donc, regarde un peu. De véritables marques d'aiguille». Nous étions tous sidérés.
C'était le problème d'une grande ville comme Vancouver. Nous étions un peu en région éloignée. Il y a 14 ans, Saskatoon était une petite ville de province mais aujourd'hui, nous sommes confrontés à des problèmes de grande ville et constatons une aggravation des cas de toxicomanie en Saskatchewan. C'est un problème qui semble empirer continuellement.
Voilà ce qui s'est passé en Saskatchewan. Pour quelle raison? Je ne sais pas si les gens ont plus d'argent qu'avant ou si les enfants n'ont pas les ressources voulues pour jouer au hockey et mener ce genre d'activités. J'accueille un grand nombre de jeunes gens de 17 à 19 ans qui n'ont aucun but dans la vie, qui sont désoeuvrés. Ils ne peuvent pas trouver d'emploi. Ils ne peuvent pas être admis dans les forces armées. Que leur reste-t-il? Par ennui purement et simplement, ils se tournent vers d'autres activités. Comme vous le dites, nous devons peut-être faire davantage pour offrir aux jeunes de notre pays des solutions de rechange viables, plutôt que l'alcool ou la drogue.
¹ (1500)
[Français]
M. Réal Ménard: Par exemple, à Halifax, on doit composer avec la présence d'un port et ce que cela implique comme réalité. Je sais que la Saskatchewan est d'abord et avant tout une province de Prairies et que ce n'est donc pas la réalité portuaire qui la caractérise d'abord. Avez-vous l'impression que le crime organisé réussit à s'implanter plus facilement en Saskatchewan qu'il y a 10 ans, ou est-ce plutôt que vous êtes tout simplement dans l'axe de Vancouver? C'est peut-être une hypothèse plausible, Vancouver étant une plaque tournante du crime organisé. Les endroits où on produit le plus de marijuana au Canada sont Vancouver et Montréal, à cause de la présence d'un port. Est-ce que vous êtes tenté, à partir de l'information dont vous disposez, de relier la situation actuelle à l'établissement des Hells Angels ou d'autres groupes parmi les 35 bandes de motards criminalisés qui existent au Canada?
[Traduction]
M. Bill Logue: Nous constatons également une augmentation du problème dans les rues à Saskatoon. Nous savons que le crime organisé a pris de l'ampleur et qu'il y a plus de gens qu'avant qui ont recours à des moyens illégaux pour trouver l'argent nécessaire pour acheter des drogues.
À Saskatoon, là où se trouve Larson House, nous savons continuellement été aux prises avec le problème de la prostitution. Nous savons que c'est le principal instrument auquel ont recours les trafiquants de drogues à la petite semaine. Si je veux trouver de l'argent, s'il me faut obtenir 8 000 $ ou 9 000 $ pour m'acheter une livre d'héroïne, deux moyens rapides s'offrent à moi: prendre un pistolet et voler une banque, mais c'est dangereux, ou mettre la main sur deux ou trois filles, les droguer et les faire travailler sur le trottoir pour mon compte. C'est un moyen vraiment rapide d'obtenir l'argent nécessaire, et c'est ce qui se passe.
[Français]
M. Réal Ménard: Est-ce que j'ai encore un peu de temps, madame la présidente?
La présidente: Il faut laisser les témoins répondre.
M. Réal Ménard: D'accord. Parfait.
[Traduction]
M. Ernie How: Je reviendrai sur la question du manque de ressources.
Dans le secteur que nous desservons, il y a 70 000 personnes et cela prend deux heures et demie pour le traverser. Nous sommes vraiment éparpillés. Nous avons souvent des problèmes à Saskatoon, avec certains traitements qui y sont mis sur pied. Le gouvernement s'attend à ce que nous déplacions simplement nos services, mais cela ne convient pas à nos petites localités.
L'absence d'activités pour les enfants et les gens d'une localité de 500 ou 600 habitants pose un véritable problème.
S'agissant du crime organisé, il n'y en a pas beaucoup dans les petites localités, mais nous constatons que les trafiquants se rendent à Saskatoon ou Edmonton et ramènent la drogue de ces villes-là. Nous n'avons pas de prostitution organisée, comme il y en a à Saskatoon ou dans certains autres grands centres.
Ces personnes consomment un véritable cocktail de produits chimiques car tout dépend de ce que chacun aura pu se procurer une semaine donnée. Voilà les problèmes auxquels nous sommes confrontés.
[Français]
La présidente: Une petite question.
M. Réal Ménard: On sait que les gens qui consomment de la drogue ont toutes sortes de motivations personnelles et que ce n'est pas simple de ramener cela à un modèle unique. Si, comme législateurs, on retirait du Code criminel l'interdiction relative aux drogues et qu'on faisait de cette question quelque chose de moins interdit, avez-vous le sentiment que ça changerait un peu le profil des consommateurs, ou si, au contraire, ça ne changerait rien? La détresse des gens a-t-elle quelque chose à voir avec le régime juridique? Est-ce que, dans votre communauté, vous faites des liens entre le profil des consommateurs et le régime juridique qui est en cours?
¹ (1505)
[Traduction]
M. Blair Buchholz: Je vais essayer de répondre à cette question. Je vais prendre un peu de recul, car je n'ai pas parlé de ce qui a changé par rapport à il y a une dizaine d'années. Lorsque je travaillais au service de traitement des adolescents il y a 10 ans, notre client type était un jeune de race blanche de la classe moyenne ou haute. Il y avait très peu d'adolescents des Premières nations qui participaient au traitement. La tendance s'est complètement inversée. À l'heure actuelle, 65 % de nos patients sont des membres des Premières nations qui viennent de couches sociales nettement inférieures.
Ce qui explique un tel changement de situation à Saskatoon, c'est l'évolution du tableau démographique. Il y a eu une urbanisation et les jeunes se sont précipités en grand nombre vers la ville. Je conviens avec Bill que l'un des problèmes auxquels nous sommes confrontés est celui de la manipulation des trafiquants de drogues et d'autres prédateurs qui exercent des pressions sur les adolescents vulnérables pour les faire participer à des activités d'exploitation sexuelle et de prostitution, quel que soit le nom qu'on veuille lui donner.
Cette urbanisation s'est accompagnée d'importants problèmes de changement de culture—bien des gens viennent de petites villes ou de réserves—et aussi de pauvreté. Les personnes déplacées sont confrontées à toutes sortes de problèmes. Il y a bien des gens à Saskatoon aujourd'hui qui n'étaient pas dans cette situation il y a 10 ans. Nous sommes arrivés à un tournant où le système des soins de santé, le système judiciaire, les services sociaux et tous les intervenants essaient de s'adapter et de répondre aux besoins d'un groupe très difficile de personnes qui ont opté pour la vie en ville.
Je ne sais pas si cela répond à votre question au sujet de la disponibilité de produits chimiques. La plupart des personnes qui ont une dépendance et s'injectent des drogues sont des gens qui vont toujours se livrer à un abus de substances quelconques. En d'autres termes, ils ont un problème multiple. Ce n'est pas une chose plutôt qu'une autre, mais c'est une foule de problèmes auxquels ils sont confrontés jour après jour. La consommation de substances leur apporte un soulagement, en faisant disparaître leurs symptômes, ce qui leur rend la vie plus douce. Comme vous le dites, il y a divers programmes sportifs qui existent mais bon nombre d'entre eux ne sont pas pleinement utilisés.
Nous avons des problèmes relatifs aux normes et aux valeurs familiales, pour savoir ce qui est acceptable pour les enfants. Il y a un grand nombre d'enfants qui se promènent librement dans la rue. La question est complexe. Il y a des problèmes d'ordre économique, familial, des problèmes de déplacement, de marginalisation. La situation a beaucoup changé par rapport à il y a 15 ans.
La présidente: Merci.
Monsieur Logue ou monsieur How.
M. Ernie How: Je ne crois pas que le fait de modifier les critères d'interdiction va faire disparaître le problème, bien au contraire. Un toxicomane sera toujours toxicomane. Pour une raison ou une autre, c'est son destin. Le fait de supprimer l'interdiction va-t-il faire de ce problème une norme plus acceptable? Y aura-t-il un plus grand nombre de personnes qui se contentent d'essayer? Un facteur de dissuasion prévu dans la loi réussit à dissuader les jeunes, car bon nombre d'entre eux ont l'avenir devant eux et ils ne veulent pas partir du mauvais pied. Ils sont très conscients de leur comportement.
M. Bill Logue: Sur ce point, j'ai une opinion plus ferme. Je souhaite que l'on rende nos lois plus sévères. Je souhaite que certaines personnes—pas le pauvre petit toxicomane qui achète un huitième au coin de la rue ou le pauvre bougre qui est complètement accro à la morphine et qui essaie de s'enfoncer une aiguille dans le bras... Je ne veux pas que ce type-là fasse 10 ou 15 ans de tôle. Je veux qu'il trouve de l'aide. Je veux essayer de lui redonner une vie normale.
Certes, il serait souhaitable que le gouvernement fédéral alloue plus de fonds et de ressources aux forces de l'ordre pour leur permettre de poursuivre activement les principaux fournisseurs et ceux qui importent de grandes quantités de drogues dans notre pays. J'aimerais que ces gens-là se voient imposer une sanction assez forte qu'ils y réfléchiront à deux fois avant de se livrer à ce genre de choses. Je pense à une peine d'emprisonnement à perpétuité, car ces gens-là détruisent des vies humaines. Ils détruisent nos jeunes. Ils mettent le vers dans le fruit de notre société. Si l'on fait un survol historique, on constate que la plupart des grands pays ne sont pas tombés à cause d'une invasion de l'extérieur mais bien à cause d'une désintégration morale venue de l'intérieur.
Je pense que c'est vraiment là qu'est le problème. Si nous voulons que le Canada existe toujours dans 50, 75 ou 200 ans, il va vraiment falloir nous attaquer à ce problème, au lieu de fermer les yeux et de jouer à l'autruche en espérant que le problème disparaîtra de lui-même. Nous devons adopter une position active et nous attaquer au problème ainsi qu'à ses responsables. C'est mon avis. Je ne saurais l'exprimer avec plus de véhémence.
La présidente: Merci beaucoup.
Merci, monsieur Ménard.
J'aimerais poursuivre un peu sur ce point, monsieur Logue. Au Canada atlantique, on nous a dit que la drogue de choix n'était pas l'héroïne mais le Dilaudid, qui est un médicament prescrit. On nous a aussi beaucoup parlé du Ritalin et du Talwin. Ce sont des médicaments prescrits à des fins médicales qui se retrouvent sur le marché noir.
Au Canada atlantique, on nous a dit qu'on hésitait à réprimer l'utilisation illégale de ces médicaments prescrits parce que cela risquerait d'ouvrir un marché de l'héroïne. Si les gens éprouvent le besoin pour une raison quelconque de se droguer ou de modifier leur état, ils vont se replier sur tout ce qu'ils pourront trouver. En l'occurrence, ce n'est pas à un trafiquant d'héroïne ou à un gang de motards que s'attaque la répression, c'est à un médecin.
Disons donc qu'il y a un médecin douteux qui distribue ces médicaments. Le problème, évidemment, c'est que les gens qui ont vraiment besoin de ces drogues ne réussissent pas toujours à se les procurer et que cela pose toutes sortes de problèmes.
¹ (1510)
M. Bill Logue: Oui, mais à mon avis c'est tout simplement une excuse. Si je suis médecin, et que quelqu'un doit prendre du Dilaudid, je vais lui prescrire ce médicament et je n'aurai aucune hésitation à le faire. Le problème, c'est que quelquefois des membres de la famille vont voler l'ordonnance. Il y a toutes sortes de façons de revendre ces médicaments dans la rue, et vous ne réussirez certainement pas à empêcher cette situation.
Mais il est clair que si quelqu'un prend l'ordonnance de quelqu'un d'autre et la revend, il enfreint manifestement la loi. Et si un médecin prescrit des quantités massives de Dilaudid ou de morphine, il faudrait qu'il y ait un système pour contrôler ces actes.
Ce n'est pas parce qu'on va mettre en place un système beaucoup plus rigoureux pour les médicaments prescrits que les Hell's Angels vont voir grimper leur marché de la morphine. De toute façon, ils vendent déjà toute la morphine qu'ils peuvent à tous les gens possibles.
La présidente: Oui, mais il y a des gens qui travaillent dans la rue auprès de ces drogués qui nous ont dit qu'à leur avis un contrôle plus rigoureux du marché des médicaments prescrits entraînerait une hausse de la demande. Il y aura toujours quelqu'un pour répondre à cette demande. Quel que soit le prix, ou quelle que soit la peine de prison encourue, il y aura quelqu'un qui sera prêt à répondre à cette demande parce que l'occasion sera là. De toute façon, les gens s'imaginent toujours qu'ils ne vont pas se faire prendre, et si ce trafic leur rapporte assez d'argent, ils sont même quelquefois prêts à en assumer les conséquences s'ils se font prendre.
M. Bill Logue: Peut-être, mais je crois quand même que si l'on met en place des éléments de dissuasion, on va bloquer ce trafic. Lever les bras au ciel et adopter une attitude de laisser-faire en disant que, si c'est un médicament prescrit, il n'y a pas de problème, ce n'est certainement pas une bonne chose pour la société.
La présidente: Je ne prône absolument pas le laisser-faire. En fait, la vérificatrice générale a établi qu'au niveau fédéral nous consacrons 95 p. 100 de notre argent à réduire l'offre et 5 p. 100 seulement à réduire la demande—une demande insatiable. Mais si nous ne réduisons jamais cette demande, nous n'aboutirons jamais à rien en interdisant ou en réduisant l'offre. Il y aura toujours quelqu'un, quel que soit le prix, il y aura toujours une nouvelle substance que les gens voleront ou essaieront de se procurer par n'importe quel moyen.
Les gens nous disent donc qu'il ne faut pas trop se préoccuper de l'autre aspect, qu'il faut se concentrer sur des stratégies énergiques de réduction de la demande. Or, ces stratégies relèvent principalement des provinces actuellement, pour des raisons constitutionnelles, puisque ce sont les provinces qui administrent la santé et l'éducation, qui constituent les deux véhicules essentiels pour réduire la demande.
M. Bill Logue: D'accord, mais regardez les modèles que les Européens ont adoptés, au Danemark et en Hollande. Ils ont assoupli leur contrôle de l'offre de drogues et de stupéfiants, mais regardez ce qui s'est passé là-bas depuis vingt ans.
La présidente: Quoi?
M. Bill Logue: Ils ont un problème épouvantable. La consommation de drogues a pratiquement triplé dans ces pays, et maintenant ils sont en train de revenir à une attitude plus dure.
La présidente: La plupart ont encore assoupli l'accès aux drogues. Vous pourriez peut-être me citer l'étude à laquelle vous vous référez.
Enfin, vous avez dit que vous souhaitiez avoir des normes nationales, mais j'ai trouvé intéressant de vous entendre parler d'un type bien précis de désintoxication que vous alliez mettre sur pied parce qu'il était adapté à votre quartier et à la zone dans laquelle vous travaillez.
¹ (1515)
M. Bill Logue: C'est un modèle adapté à n'importe quel quartier où il y a un service de police qui ramasse les alcooliques et les drogués pour les enfermer dans une cellule de dégrisement
La présidente: Vous êtes le premier à parler de ce genre de programme novateur, et c'est donc peut-être une innovation qu'il faudrait reprendre ailleurs. Certains disent que la souplesse d'action locale permet la mise en place de solutions plus créatrices.
M. Bill Logue: Je ne voulais pas dire qu'il faudrait imposer des contrôles nationaux rigoureux à tous les petits villages pour leur dicter exactement la marche à suivre face à ce problème. Je voulais simplement dire qu'il y aurait une formule nationale de contrôle: dans ce domaine, il faudrait qu'il y ait un centre de désintoxication qui offrirait ce type de service au client. L'administration de ce service pourrait être adaptée aux besoins de chaque collectivité particulière, mais il y aurait une politique nationale en vertu de laquelle les villes d'une certaine taille seraient tenues d'avoir un centre de désintoxication ou ce genre de formule de soutien.
Pour ce qui est de la prestation du service elle-même, je n'ai peut-être pas été assez clair, mais je n'ai absolument pas voulu dire que le gouvernement fédéral devrait énoncer ces règles de façon absolument immuable, je voulais simplement dire que ces services devraient être disponibles à l'échelle nationale.
La présidente: Très bien.
Monsieur LeBlanc.
M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Merci, madame la présidente.
Merci à tous pour vos exposés et vos réponses aux questions de mes collègues.
M. Ménard a posé la question que j'allais poser à propos de la décriminalisation de la marijuana. Il m'a coupé l'herbe sous le pied, c'est l'avantage d'être dans l'opposition.
Bill, vous avez répondu en parlant d'une démarche beaucoup plus agressive et de sanctions beaucoup plus lourdes pour les gros trafiquants et les réseaux du crime organisé, mais je ne suis pas sûr que vous ayez répondu à la question de la décriminalisation de la simple possession. Vous avez dit qu'à votre avis il ne faudrait pas enfermer le drogué qui se fait prendre en possession de marijuana et qui risquerait de faire dix ans de prison. Je crois que tout le monde est assez d'accord là-dessus.
Pensez-vous que la décriminalisation puisse se justifier? Il ne s'agit pas de légaliser la marijuana, mais simplement de faire en sorte que la personne qui se retrouve chez vous n'ait pas un casier judiciaire simplement parce qu'elle a été prise en possession de marijuana. J'aimerais bien avoir votre opinion sur ce point précis.
Pour ce qui est des autres membres du groupe de témoins qui ont une expérience des programmes de traitement—et je n'étais pas avec mes collègues qui sont allés à Toronto voir comment fonctionnait un tribunal consacré aux drogues, comme il y en a déjà dans d'autres provinces—pensez-vous qu'un traitement obligatoire ou coercitif se justifie? Je crois que c'est Ernie qui a dit que certains de ses clients lui avaient été renvoyés en vertu d'une ordonnance judiciaire. D'après votre expérience du traitement, est-ce que cela sert à quelque chose qu'un juge envoie un drogué en prison à cause d'une activité criminelle quelconque? Ou y a-t-il plutôt une utilité quelconque à imposer un traitement de trois mois ou un traitement plus long à ce drogué?
Je crois que c'est Bill qui a dit que la première des douze étapes consistait à reconnaître qu'on avait besoin d'aide, et peut-être n'est-il pas aussi facile de l'accepter quand c'est le juge qui le dit que quand on fait cette démarche soi-même. Comment le traitement coercitif s'inscrit-il dans le cadre de la démarche judiciaire? Je vous pose donc deux questions ici.
M. Bill Logue: Pour répondre à la question sur la simple possession de marijuana, à mon avis la marijuana est une drogue d'introduction. Pratiquement tous les héroïnomanes que j'ai rencontrés avaient commencé par la marijuana. Je crois que la marijuana est une drogue extrêmement dangereuse, mais je ne souhaite pas que la simple possession entraîne une peine de prison de 10 ans. Certainement pas.
Je crois qu'il faudrait qu'on mette un dispositif permettant de rendre les gens responsables de leurs actes. La marijuana est une substance illégale au Canada. Elle a entraîné toutes sortes d'habitudes. Pourquoi aurions-nous peur d'appliquer la loi?
Si je bois trois verres et que je prends le volant, allez-vous me condamner pour conduite avec facultés affaiblies? Bien sûr, parce que c'est la loi. J'estime donc que, tant que la marijuana sera illégale au Canada, tout individu pris en possession de marijuana devrait être tenu de payer une amende. Peu importe que cela soit symbolique ou non, il ne faut pas laisser passer ces infractions. C'est une substance illégale, on ne peut pas dire que c'est normal d'en avoir.
Si l'on veut décriminaliser la possession, qu'on légalise la marijuana. Qu'on dise aux gens: Vous pouvez aller dans votre cour... On peut très bien faire du vin ou de la bière dans son sous-sol. Si c'est ce que veut le gouvernement fédéral, qu'il le dise, parfait.
¹ (1520)
M. Dominic LeBlanc: Oui, mais faites attention, Bill. Tout d'abord, je ne suis pas sûr que c'est ce que souhaite le gouvernement fédéral.
On peut très bien avoir une substance illicite sans que la possession de cette substance soit une infraction criminelle. Vous pouvez très bien avoir une bouteille de bière ouverte sur la banquette arrière de votre automobile et devoir payer une contravention sans avoir nécessairement un casier judiciaire. C'est une simple infraction administrative.
Je crois que vous avez raison quand vous parlez de légaliser et dire que la possession n'est pas une infraction. Personnellement, je ne crois pas que cela serait très utile. Mais certains soutiennent—et personnellement je n'ai pas encore d'opinion arrêtée sur la question—qu'il faudrait décriminaliser. En fait, dans ma province, le Nouveau-Brunswick, si vous vous faites prendre lorsque vous chassez l'orignal illégalement, la sanction ou le châtiment est beaucoup plus sévère que si vous vous faites prendre avec de la marijuana. Mais vous allez avoir un casier judiciaire si vous avez de la marijuana, mais pas si vous branconnez l'orignal au Nouveau-Brunswick.
D'après vous, il faudrait continuer à dire que c'est une substance illicite mais sans imposer de sanctions pénales—vous avez parlé d'une sanction symbolique, d'une amende? Est-ce que cela aura autant d'effet, à votre avis, qu'un casier judiciaire?
M. Bill Logue: Très franchement, je ne me suis jamais vraiment posé la question. Je crois que la marijuana est une substance dangereuse. Je sais que si un enfant traînait dans la rue avec de la marijuana et proposait à vos propres enfants de faire l'expérience d'un petit joint, je serais furieux car cela devrait être interdit.
M. Dominic LeBlanc: Que pensez-vous du traitement obligatoire?
M. Bill Logue: Je n'y crois pas. Si quelqu'un n'est pas décidé à changer, vous allez certainement le faire entrer dans un centre de traitement, et il ne jouera pas le jeu. Ces gens-là ne sont pas obligés d'accepter n'importe quoi. J'ai connu bien des cas de personnes qui suivaient un traitement parce qu'elles étaient en probation ou pour une raison quelconque et qui respectaient effectivement les apparences, mais si ces gens-là n'avaient nullement l'intention au fond d'eux-mêmes de changer, cela ne servait strictement à rien. Je ne connais pas un seul conseiller au monde qui soit capable d'obliger quelqu'un à faire quelque chose qu'il n'a pas envie de faire ou qu'il n'est pas motivé à faire.
M. Ernie How: J'aimerais intervenir ici.
À propos de cette notion de «drogue d'introduction», je parlais l'autre jour à un étudiant qui me disait que l'alcool, les cigarettes et la marijuana étaient considérés comme des drogues d'introduction. Ils n'ont pas de problème à consommer une drogue d'introduction à condition de ne pas aller plus loin. C'était un sens complètement différent.
Ceci me ramène à ce que je disais tout à l'heure, à savoir que les recherches actuelles, surtout sur la marijuana, ne sont pas à jour et ne tiennent pas compte de l'évolution de la situation.
Cinquante pour cent de nos clients viennent des services juridiques. Or, depuis cinq ou six ans, je ne me souviens pas d'une seule personne qui ait été sous le coup pour possession. Je me demande donc si même cela a encore une pertinence quelconque de nos jours. On n'impose plus ces condamnations.
Nous réussissons dans une certaine mesure avec ces clients tenus de suivre un programme. Quelquefois, c'est frustrant, mais il y a aussi des réussites. En parlant de programmes obligatoires, le programme SGI ou le programme de conduite prudente sont des programmes imposés. Si vous perdez votre permis de conduire, vous êtes obligés de suivre ce programme, et dans certains cas nous avons pu constater des résultats vraiment impressionnants. Nous avons vu des alcooliques à l'hôpital, parfois convaincus qu'ils allaient mourir, suivre ensuite ce programme pour pouvoir retrouver leur permis de conduire et changer radicalement de vie. C'est phénoménal.
Par conséquent, je suis très satisfait des traitements obligatoires qui atteignent bien leurs objectifs au niveau provincial. Et en tant que conseiller dans un secteur de service, j'ai trouvé ce programme très enrichissant.
La présidente: Que signifie SGI?
M. Ernie How: Saskatchewan government insurance.
La présidente: Monsieur Buchholtz, vous voulez faire un commentaire?
M. Blair Buchholz: Certainement.
Je reprendrai simplement ce que disait Ernie. Je ne crois pas que la légalisation de la simple possession ou la décriminalisation change grand-chose car d'après ce que je peux constater, il est plutôt rare qu'on condamne des personnes pour simple possession.
Je me trompe peut-être. Cela arrive peut-être beaucoup plus dans d'autres régions. Mais j'étais récemment à Vancouver et j'ai constaté que la police pouvait, par exemple, découvrir une plantation et aller arracher tous les plants sans même porter d'accusation contre qui que ce soit. J'imagine qu'il y a diverses formules possibles. Si on a quelque chose, qu'on s'en serve; sinon, supprimons-le. Voilà ce que je dirais, quoique je n'approuve pas la consommation de cannabis.
Pour ce qui est de la coercition, je m'occupe surtout des jeunes actuellement et ils ont presque tous une motivation externe, qu'elle vienne des tribunaux ou de la famille ou d'ailleurs. Il est rare que des jeunes nous disent: «J'ai absolument besoin de cela, je suis arrivé au fond». Je crois que chez les jeunes cela arrive, il y a des jeunes qui se rendent compte qu'ils ont un problème, mais la plupart d'entre eux s'interrogent et ne sont pas vraiment conscients de l'ampleur de leur problème. Souvent, c'est l'ordonnance de probation ou la pression juridique qui les poussent.
Nous avons beaucoup de succès avec les personnes qui sont tenues de suivre un programme. Ces personnes prennent un peu de recul, réfléchissent, changent un peu leur attitude. Cela ne veut pas dire que les jeunes vont nécessairement s'abstenir, mais ils vont essayer d'améliorer leur vie avec un plan ou des stratégies différents. Je crois que c'est utile.
J'ai aussi vu le revers de la médaille avec la surutilisation du système juridique. En Saskatchewan, nous avons le taux d'incarcération de jeunes délinquants le plus élevé de toute l'Amérique du Nord, et cela ne nous a pas servi à grand-chose. Je pense donc qu'il faut trouver un équilibre entre les formules d'intervention qui permettent d'aider ces personnes et la simple incarcération. Si l'on n'a pas de programmes pour aider les individus à se réadapter, on jette de l'argent par les fenêtres. On va avoir plus d'installations pour les jeunes contrevenants. Avec la nouvelle loi sur les jeunes contrevenants, il va y avoir des changements positifs, mais encore une fois tout est une question de financement.
Prenons un exemple concret: En Saskatchewan, on va passer d'un modèle d'incarcération à un modèle de thérapie communautaire où les jeunes participeront à des activités qui contribueront à leur traitement, en tant que patients internes ou externes. Mais il n'y a pas d'argent pour ces programmes. En gros, on compte sur les services médicaux, qui sont déjà surchargés et qui ont des listes d'attente, pour accomplir ces objectifs de la nouvelle loi, mais il n'y a pas d'argent. Il y a eu des fonds de transition, mais il n'y a pas d'argent pour la programmation, et les gens qui gèrent les établissements pour jeunes contrevenants ne vont pas fermer de lits parce que les données démographiques montrent bien qu'ils vont en avoir besoin.
Encore une fois, il faut voir l'ensemble du système pour savoir à quoi l'argent va être affecté, que ce soit à l'incarcération ou à un modèle plus thérapeutique.
Je n'ai peut-être pas répondu à votre question, mais...
¹ (1525)
La présidente: Merci.
Madame Skelton.
Mme Carol Skelton: Pourrions-nous avoir les chiffres du programme SGI. Vous les avez, ou vous pourriez nous les transmettre?
M. Ernie How: Vous voulez parler des résulats du programme, du nombre de personnes?
Mme Carol Skelton: Oui. L'aperçu d'ensemble du programme.
Bill, vous avez parlé d'un matelas de désintoxication? C'est bien le nom, c'est ce que vous envisagiez à Saskatoon?
M. Bill Logue: Oui, il s'agit d'une désintoxication brève, et on parle quelquefois de matelas de désintoxication.
La présidente: Donc ces gens-là ont le choix d'aller en prison ou de venir chez vous?
M. Bill Logue: En gros, oui.
La présidente: C'est donc comme un programme obligatoire? C'est celui-là que vous n'appuyiez pas avant? Ce n'est pas que j'ai l'impression d'une incohérence ici, monsieur Logue, mais vous vouliez peut-être parler du traitement.
Mme Carol Skelton: J'aimerais revenir à la question de la criminalité, des gangs, etc.
Nous parlions ce matin des grandes villes. Nous avons le même genre de problème dans nos villes que dans ces grandes villes, non? C'est bien exact?
M. Bill Logue: C'est exact.
Mme Carol Skelton: Qu'en dites-vous, Blair?
M. Blair Buchholz: Je suis d'accord.
Mme Carol Skelton: On a donc toutes les formes de consommation de drogues à Saskatoon et à Regina?
M. Bill Logue: Oui.
Mme Carol Skelton: Est-ce que ce sont les Hells Angels qui apportent ces drogues? Ce sont ces gangs? D'où vient la drogue, de la côte? Vous en avez une idée?
¹ (1530)
M. Bill Logue: Elles viennent probablement de toutes les provenances possibles. Il y a de la drogue qui vient de la côte, probablement surtout de la côte Ouest. Il y en a aussi qui arrive des États-Unis. Les gens qui veulent gagner de l'argent illégalement se livrent à ce trafic. Que ce soient les Hells Angels ou quelqu'un qui fait cela à son compte, il y aura toujours des gens qui le feront. Je crois que Saskatoon est aussi vulnérable que n'importe quelle grande ville.
Mme Carol Skelton: Vous alliez dire quelque chose, Blair?
M. Blair Buchholz: Non. Il y a juste une chose que je voudrais mentionner quand M. LeBlanc reviendra. Je n'ai pas répondu à sa question. Il y avait autre chose que je voulais dire.
Mme Carol Skelton: À votre avis, qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire de plus important pour vous aider? Quelle serait la chose la plus importante?
M. Ernie How: J'aimerais revenir à la recherche. Il faudrait faire des recherches sur les effets des drogues sur les individus et leurs retombées sur nos collectivités. Qu'on fasse des recherches pour avoir une idée de ce qui se passe à Saskatoon, à Winnipeg ou à North Battleford. Qu'on ait un débat national cohérent et durable. À ce moment-là, on pourra préciser les tendances. Les informations existent peut-être, mais elles sont très fragmentées et difficiles à obtenir. Pour moi, ce serait cela le plus important: faire des recherches normalisées et cohérentes sur les drogues que nos jeunes consomment et non pas de la marijuana cultivée en serre qui n'a rien à voir avec ce qu'on trouve dans la rue.
La présidente: Monsieur Logue.
M. Bill Logue: Le plus important, ce serait de donner des ressources importantes aux provinces en veillant à ce que l'argent serve à poursuivre la mise au point de programmes et à administrer ces programmes honnêtement auprès des personnes qui en ont le plus besoin.
M. Blair Buchholz: Ce qui serait important, ce serait d'avoir une vision d'ensemble des montants disponibles et de voir s'il faut réaffecter certains crédits plutôt dans le domaine de la prévention et des activités thérapeutiques.
Vous connaissez certainement les coûts sociaux et financiers de la toxicomanie. C'est une maladie curable et je crois que nous pouvons faire beaucoup de choses en ce sens. On peut progresser en travaillant très fort et en travaillant mieux, mais je crois que si on investit dans ce domaine, on fera des économies à long terme au niveau de la justice, de la santé, etc.
Ce que je vous encourage à faire, c'est réfléchir aux retombées de ce problème sur notre pays et à essayer de déterminer le montant de ressources appropriées pour aider les gens.
Mme Carol Skelton: Je vous pose une question à chacun parce que vous venez tous d'horizons différents. Quel est le délai d'admission des patients à un programme de désintoxication pour chacun d'entre vous? Est-ce que vous refusez souvent des gens?
J'ai été frappée ce matin d'entendre dire qu'il n'y avait que 12 lits pour des jeunes en Saskatchewan. Je crois que c'est un problème pour notre province. Vous refusez des gens souvent?
M. Bill Logue: Tous les jours. Comme je vous l'ai dit, nous tournons en permanence à 100 p. 100. Il arrive souvent que nous refusions 25 à 26 demandes de désintoxication en une seule journée. Dès qu'un client termine son programme, il y en a d'autres qui font la queue. Nous avons un taux d'occupation de plus de 100 p. 100 parce que nous avons un système de transmission de lits chauds. Disons, par exemple, que nous avons six clients qui doivent partir le matin: On leur donne leur bon de sortie. Le personnel change les draps et fait le ménage dans la chambre. Nous parlons de transmission de lits chauds parce que le matelas est encore chaud au moment où le client suivant vient s'y installer. Donc, dans la comptabilité, nous avons une double occupation du lit jusqu'à minuit. C'est ce que nous appelons le système du lit encore chaud.
Mme Carol Skelton C'est comme cela que vous avez un taux d'occupation de 150 p. 100.
M. Bill Logue: Oui, cela arrive tous les jours.
¹ (1535)
M. Ernie How: Dans notre cas, quelqu'un téléphone pour demander un rendez-vous avec un conseiller. Dans le meilleur des cas, l'attente est de trois ou quatre semaines.
Dans le cas des gens qui sont en crise, nous essayons de les accueillir dans la journée ou au maximum dans les 24 heures. Nous les accueillons en dehors des heures de consultation, même si cela veut dire que quelqu'un continue à travailler pendant son heure de repas.
Mme Carol Skelton: Vous avez souvent des gens en crise? Vous en avez tous les jours?
M. Ernie How: Je vous dirais qu'à tous les jours, il y a quelqu'un qui a un besoin urgent. Parfois, il suffit d'une intervention au téléphone. Dans certains cas, il faut rencontrer la personne.
Mme Carol Skelton: Blair?
M. Blair Buchholz: Nous avons une liste d'attente, mais cela varie avec les saisons. En règle générale, la demande est moins grande l'été, mais à la rentrée scolaire, dès octobre et jusqu'en mai ou juin, nous avons une liste d'attente. Cela représente une attente de deux à quatre semaines, de sept à dix clients. C'est un centre de traitement et il y a une liste d'attente, certainement. Nous ne refusons personne, mais avec les jeunes, il y a toujours une période opportune pour intervenir.
Mme Carol Skelton: Vous parlez de la situation chez les jeunes?
M. Blair Buchholz: C'est exact.
Pour les adultes, en règle générale, il n'y a pas souvent de listes d'attente, mais cette année, nous avons vu une augmentation de la drogue chez les adultes aussi, ce qui a occasionné une période d'attente d'une, de deux, voire de trois semaines.
Avec les jeunes, c'est problématique parce qu'il y a une fenêtre d'intervention. Si le service n'est pas disponible pendant cette période, les jeunes changent d'idée assez rapidement. D'aucuns croient que les listes d'attente constituent un problème, mais s'il faut attendre de deux à quatre semaines pour un traitement, beaucoup considèrent que cela ne représente pas un problème grave.
Mme Carol Skelton: Est-ce que vous trouvez que 12 lits consacrés aux jeunes, dans une province comme la Saskatchewan, c'est suffisant?
M. Blair Buchholz: Il y a différents points de vue sur la situation. Il y a beaucoup de bon travail qui s'effectue dans la communauté. Quel est le bon service au bon moment? Globalement, je l'admets, nos ressources sont insuffisantes, et j'ai déjà parlé du domaine de la désintoxication. Parallèlement, des clients nous sont souvent référés dans des cas où le traitement n'est pas vraiment adapté. Beaucoup de choses peuvent être faites dans la communauté, et l'évaluation est la clé.
Il y a beaucoup de programmes communautaires efficaces et novateurs. Il faut examiner toutes les solutions possibles plutôt que de répéter le refrain: des lits, des lits, des lits. Il faut consacrer beaucoup de temps à la recherche pour déterminer quels types de lits sont nécessaires et dans quel contexte.
Mme Carol Skelton: Cette question renvoie à mes racines rurales en Saskatchewan. Constatez-vous une forte augmentation du nombre de clients provenant des milieux ruraux, c'est-à-dire des fermiers?
M. Bill Logue: Oui, nous avons beaucoup plus de clients qu'avant qui nous arrivent de la ferme pour un traitement de désintoxication.
D'abord, il faut bien faire la différence entre les types de lits—par exemple, les lits pour les soins en clinique. Les lits pour traitement de désintoxication sont très différents parce qu'il s'agit toujours de personnes en situation de crise. Ceux qui viennent subir un traitement de désintoxication arrivent toujours en situation de crise. Ils sont malades. Ils ne sont plus capables de gérer leur vie et ils ont peur. Ils ont besoin d'aide immédiatement.
Notre dynamique est légèrement différente de celle des lits pour soins en clinique, d'une part, et des lits pour soins en consultation externe, d'autre part. Si quelqu'un se présente dans une clinique à consultation externe en état de crise, manifestement, on essaie de le faire entrer dans un centre de désintoxication parce que c'est là que le traitement doit commencer.
Lorsque nous refusons des patients, nous les avisons de rappeler régulièrement. Nous admettons et congédions des patients 24 heures sur 24, et nous espérons pouvoir libérer une place dans les 24 heures environ, aux termes d'un séjour de trois ou quatre jours. Avec un peu de chance, nous arrivons à libérer une place encore plus rapidement. Nous essayons d'admettre les patients le plus vite possible, dès qu'un lit se libère.
Mme Carol Skelton: Merci beaucoup.
Je reviens à la question concernant le milieu rural. En raison des problèmes agricoles que nous avons connus en Saskatchewan au cours des deux ou trois dernières années, j'ai remarqué que ces régions se dépeuplent. Est-ce que vous constatez que ces...
M. Bill Logue: Oui. Beaucoup de fermiers viennent nous voir pour obtenir un traitement de désintoxication. Les spécialistes de la toxicomanie en milieu rural sont appelés à faire beaucoup d'interventions auprès de familles d'agriculteurs qui sont aux prises avec énormément de problèmes de dépression et de sentiment de vulnérabilité. Nous recevons beaucoup d'agriculteurs d'âge moyen—dont les revenus étaient autrefois plus élevés—, gravement déprimés et suicidaires. Leurs nombres ont augmenté. Nous n'avons pas tenu de statistiques comme telles, mais en effet, il y en a beaucoup plus qu'avant.
Mme Carol Skelton: Vous n'avez pas de statistiques là-dessus?
¹ (1540)
M. Bill Logue: Non, nous n'avons jamais tenu de telles statistiques.
La présidente: M. How.
M. Ernie How: L'autre chose que l'on constate par rapport à la désintoxication dans les petites collectivités rurales, c'est qu'il y a de tels traitements en cours dans les hôpitaux régionaux, mais ces traitements ne sont pas désignés comme tels. Je sais qu'à North Battleford il y a toujours deux ou trois clients en traitement de désintoxication, bien qu'on ne relève jamais ces chiffres.
Mme Carol Skelton: C'est une réalité qui a toujours été acceptée, en quelque sorte.
M. Ernie How: Oui.
La présidente: Pouvez-vous répondre à la question qui a été posée sur le milieu rural?
M. Ernie How: Dans notre service, je ne peux dire que nous ayons constaté de nouvelles tendances.
La présidente: M. Buchholz.
M. Blair Buchholz: Si je me fie à nos sources de référence d'un bout à l'autre de la province, je dirais que la représentation est assez homogène. La population y est représentée de façon assez égale. Ce qui signifie que les patients nous arrivent d'un peu partout.
La présidente: M. Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard: Merci.
Je trouvais moi aussi que 12 lits pour les jeunes, ce n'était pas beaucoup, mais je pensais qu'ici, dans la province, vous aviez un gouvernement bolchevique qui avait des préoccupations de nature très sociale, madame la présidente. N'y a-t-il pas ici, en Saskatchewan, un gouvernement de coalition avec les néo-démocrates? Est-ce que je me trompe?
La présidente: [Note de la rédaction: Inaudible] ...est deux fois plus grand qu'en Colombie-Britannique.
M. Réal Ménard: Je vais continuer plus sérieusement et aborder deux questions. D'abord, vous savez qu'un comité du Sénat, sous la direction de Pierre Claude Nolin, a élaboré un document de consultation dans lequel on soutient que la marijuana n'est pas une drogue qui entraîne une escalade de la consommation. Deux études scientifiques citées dans ce document révèlent que la marijuana est peut-être une porte d'entrée sur la drogue, mais qu'aucune théorie scientifique ne prouve qu'il s'agit d'une drogue entraînant une escalade de la consommation. Ce n'est pas parce que vous prenez de la marijuana que vous allez par la suite prendre de l'héroïne ou d'autres types de drogue. En tant qu'intervenants dans ce milieu, vous recevrez peut-être ce document.
En 1998, le Parlement canadien a voté la loi qui a mené à la création des Instituts canadiens de recherche en santé. Une quinzaine d'instituts ont été créés; l'un d'entre eux, situé à Montréal, aborde spécifiquement la question des toxicomanies. Je pense que ça ne serait pas une mauvaise idée de se procurer de l'information à ce sujet. Les Instituts canadiens de recherche en santé, comme Mme la présidente s'en souvient certainement, ne sont pas des édifices physiques; ce sont des chercheurs qui forment un réseau à travers le Canada. Beaucoup de recherche est faite sur les types de dépendances et sur la façon dont se créent les différents modèles de dépendance. Il y a sept ou huit spécialistes, à travers le Canada, qui travaillent à ces questions.
Chose intéressante, le budget de ces instituts va en augmentant. L'an prochain, le budget devrait atteindre 500 millions de dollars. Selon les chercheurs, qui veulent toujours plus d'argent, ce n'est peut-être pas suffisant, mais la situation est quand même plus intéressante qu'il y a cinq ans. Je ne suis pas là pour défendre ou faire la promotion du gouvernement; vous savez, madame la présidente, qu'il faut garder un rôle critique de ce côté-ci de la table, et on va continuer à le faire. Je voulais simplement vous transmettre cette information.
Donc, il existe vraiment un institut qui se spécialise dans les questions de toxicomanie. En fait, il s'agit de toxicomanie et de santé mentale. Pour ma part, je connais mieux les chercheurs de Toronto et de Montréal, mais je ne serais pas étonné d'apprendre qu'il y a des chercheurs de la côte ouest, de la Saskatchewan, du Manitoba et de la Colombie-Britannique qui y travaillent.
Voilà les deux commentaires que je voulais faire, et je veux également vous poser deux questions. En tant que comité, une des questions importantes qu'on aura, à mon avis, à considérer est celle de la décriminalisation et des traitements qui devront être mis à la disposition des différentes communautés. Évidemment, on sait que les traitements ne pourront pas être fournis par le gouvernement fédéral. J'aimerais, pour m'assurer que je le comprends bien, clarifier un point: vous dites que depuis 10 ans, le profil des consommateurs a changé. Parmi les explications que vous avancez, vous mentionnez un facteur d'urbanisation; les gens quittent les campagnes pour venir dans les grandes villes comme Saskatoon. Vous dites également, et c'est sur ce sujet que je veux plus de détails, avoir l'impression que le lien avec le crime organisé n'est pas significatif. Vous n'avez pas l'impression que le crime organisé est plus présent ici qu'il ne l'était il y a 10 ans. Est-ce que j'ai bien compris?
La présidente: Tout le groupe peut répondre, mais il est possible que ce soit plutôt une question pour le panel sur l'enforcement.
¹ (1545)
M. Réal Ménard: Il faut que vous soyez un peu multidisciplinaire, madame la présidente. Il ne faut pas mettre les gens dans des catégories. Plus flexible que Mme la présidente, on finit au Cirque du Soleil.
[Traduction]
La présidente: Pour votre gouverne, permettez-moi d'ajouter qu'en Alberta, on pensait que c'était plutôt la bande de motards des Outlaws, et non les Hells Angels. Je ne sais pas quelles sont les couleurs locales, cela pourrait être semblable.
Quelqu'un voudrait-il répondre?
M. Blair Buchholz: Plusieurs questions ont été posées, alors je vais commencer au début.
La présidente: Bien sûr.
M. Blair Buchholz: En ce qui concerne la marijuana et les drogues d'introduction, je crois que cela dépend davantage de la disponibilité des drogues et des normes de comportement qui prévalent dans le milieu où les gens se tiennent en groupe. Ce que les autres consomment constitue le bassin de drogues disponibles.
Je ne connais pas l'état de la recherche comme tel. Par ailleurs, je crois que différentes personnes sont en quête de sensations euphoriques différentes. Beaucoup de gens ne s'intéressent pas à la marijuana. Ils préfèrent le speed, la ritaline et ce type de stimulation, plutôt que la marijuana, les opiacés, les dépresseurs et toute cette gamme de sensations.
Je suis d'accord avec vous. Bien que les gens utilisent la marijuana pour ensuite rechercher une sensation plus forte, je ne crois pas qu'il y ait nécessairement un lien, d'après mes lectures, et que cela constitue une drogue d'introduction.
J'aimerais aborder l'étude MAST. Cette étude a été effectuée aux États-Unis, mais il est très important de comprendre pourquoi cette étude s'est avérée si pertinente.
Vous parlez des chercheurs et du fait de consacrer beaucoup de temps et de recherche aux modalités cliniques. Or, l'étude MAST, réalisée aux États-Unis, s'est penchée sur les programmes des 12 étapes cognitives et comportementales. Elle s'est penchée sur les différentes modalités de traitement et l'efficacité de chacune. En dernière analyse, on a conclu que, en gros, les méthodes étaient toutes également efficaces.
Ce qui compte, c'est d'identifier l'état des changements, l'aptitude à participer, et le traitement sélectionné pour le patient. C'était le facteur clé. Grâce au programme des 12 étapes, l'état des patients s'est amélioré sur le plan du comportement cognitif, peu importe le type de thérapie employé. Je crois que quatre ou cinq modalités de traitement ont été étudiées.
Ce qui s'est avéré important renvoie à ce que vous disiez à propos de la coercition. Dans quelle mesure le patient est-il prêt? Serait-il mieux servi en consultation externe ou devrait-il être traité en clinique? Quelle est la méthode la plus adaptée?
Je crois qu'il est merveilleux que l'on investisse dans la recherche. Beaucoup de percées ont été réalisées dans le domaine de la neuropsychologie et de la toxicomanie, et beaucoup de méthodes d'intervention et de traitement mises au point. De nouveaux médicaments sont mis au point pour aider à contrôler les symptômes du sevrage et à réduire l'état de besoin.
Je crois qu'il faut poursuivre ce travail. La technologie dans le progrès de la médecine est un domaine sur lequel il faut nous pencher afin de favoriser une approche multidisciplinaire dans le traitement.
Ici, à Regina, les bandes de motards sont les Apollos et les Rebels. Je crois qu'ils sont associés aux Hells Angels, qui sont maintenant officiellement implantés ici. Je crois qu'il y a assurément un lien. La bande des Indian Posse, ainsi que les Warriors sont deux factions ou groupes que nous voyons au sein du groupe des Premières nations, surtout chez les jeunes. Il y a des bandes plus petites, comme la West Side gang et d'autres.
Les bandes de motards et autres organisations criminelles jouent certainement un rôle dans le flux de drogues qui alimentent la toxicomanie et encouragent le crime contre les biens, la prostitution et les infractions plus graves encore dans le but de garder tout le monde accroché. Je crois qu'il y a assurément un lien.
La présidente: Merci.
Monsieur How.
M. Ernie How: J'ai une remarque à propos des drogues d'introduction et de la marijuana. Qu'il s'agisse de marijuana, de cocaïne, peu importe la substance que l'on consomme au départ, l'activité a pour effet de rendre normale l'utilisation d'une substance psychotrope pour se sentir mieux. Plutôt que de faire face à ses problèmes, la personne, jeune ou moins jeune, à chaque fois qu'elle consomme, apprend à ne pas faire face à la vie d'une façon positive et à se tourner vers la marijuana, le speed, peu importe. La marijuana est tout aussi en cause que les autres substances et est devenue socialement acceptable.
Sur la question du crime organisé, je dirais qu'à North Battleford, bien qu'il s'agisse d'un territoire appartenant aux Hells Angels, nous ne voyons pas souvent ce groupe. Mais nos revendeurs principaux sont en place depuis un certain temps. Le plus important revendeur en ville exerce son commerce depuis que j'ai l'âge de 18 ans, et il vend toujours et entretient des prostituées. Lorsque l'on parle à sa clientèle ou à ses associés, on apprend qu'ils se rendent à Edmonton ou à Saskatoon pour acheter des Hells Angels, et parfois des bandes asiatiques. Ainsi, bien que notre collectivité ne soit pas directement affectée, elle est touchée par les Hells Angels et le crime organisé.
Dans les petites collectivités autochtones, ce sont les bandes de motards criminalisées qui règnent, comme le Indian Posse et le Manitoba Warriors. Les Warriors sont très bien organisés dans les collectivités où ils sont actifs.
¹ (1550)
La présidente: Merci.
Monsieur Logue.
M. Bill Logue: Si je me fie à mon expérience par rapport à la marijuana, je vous dirai qu'à tous les jours, je vois entrer à Larson House des personnes qui ont consommé de la marijuana et qui continuent à en consommer. À maintes reprises, elles m'ont affirmé que c'est une des substances qu'elles ont utilisée en premier. Après l'avoir consommée, elles souhaitaient progresser et consommer une autre drogue et se livrer à des expériences.
Je ne suis pas en mesure de déposer un rapport de recherche de 3 millions de dollars affirmant que ceci prouve cela, mais ce que je sais, c'est qu'un grand nombre de mes clients ont connu beaucoup de problèmes dans leur vie à cause de la marijuana, et parce qu'ils ont progressé vers d'autres substances. Je considère que cela demeure une drogue très dangereuse, et plus elle est accessible, plus nous aurons de difficultés.
La présidente: En corrolaire, je vous précise qu'ils parlent de la marijuana et non de l'alcool.
M. Bill Logue: De nos jours, la plupart des clients qui nous arrivent pour se faire soigner consomment et de l'alcool et de la marijuna. C'est la norme.
La présidente: Monsieur Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard: Merci. Je trouve qu'on fait tous les deux une bonne équipe, madame la présidente, comme quoi on gagne à se fréquenter.
Quel est le taux de succès des différents modèles de traitement que vous nous avez présentés plus tôt? Si une personne se présente chez vous, par exemple, qu'elle démontre sa volonté de s'en sortir, si vous me permettez l'expression, qu'elle franchit les différentes étapes que vous avez mentionnées et que la bonne volonté est là, pourrait-on dire que cette formule est gagnante dans huit cas sur dix, sept cas sur dix ou six cas sur dix? Quel genre de statistiques avez-vous là-dessus?
[Traduction]
La présidente: Monsieur Logue.
M. Bill Logue: Dans le domaine de la désintoxication, si le patient sort du centre en vie après sept jours, c'est essentiellement un succès, croyez-le ou non. J'ai eu un client qui s'est présenté 63 fois, et la 64e fois, il a réussi. Quand vous dirigez un centre de traitement, ce qui compte, ce n'est pas le nombre de fois qu'une personne vient subir une désintoxication; ce qui compte, c'est d'être présent lorsqu'ils ont besoin de vous et de leur communiquer une estime de soi et un respect de soi, ainsi que le soutien dont ils ont besoin.
Il peut arriver qu'un client vienne nous voir pour la première fois, qu'il apprenne les notions de base en une journée et qu'il n'y ait plus jamais de problème. Voilà un succès. Il peut arriver qu'une personne revienne huit fois et finisse par décrocher. Cela peut prendre neuf fois. Mais nous ne comptons pas le nombre de fois que les clients se présentent, et ne notons pas le fait qu'il est sobre ou non. Nous n'avons aucun dossier de ce genre, selon lequel seules les notes parfaites contribuent à notre taux de succès. Je ne crois pas que cela soit vraiment possible dans le le traitement des toxicomanies. Il y a une chose que je dis au personnel travaillant dans la désintoxication, si le client quitte le centre en vie, nous avons remporté une victoire.
La présidente: Combien de personnes n'en ressortent pas vivantes?
M. Bill Logue: À ce jour, personne n'est encore mort dans le centre.
La présidente: D'accord, je posais la question tout simplement.
M. Ernie How: Dans notre service, nous examinons cette question. Nous n'avons pas encore dressé le bilan des résultats, parce que la question demeure: qu'est-ce qui constitue un succès? Si quelqu'un ressort du traitement et ne boit pas, est-ce un succès? Si quelqu'un termine le traitement et boit cinq bières par jour au lieu de dix, est-ce un succès? Nous ne le savons pas.
Nous avons donc adopté un indicateur de rendement. À chaque fois qu'un client passe par notre service, il remplit un petit questionnaire. On lui pose des questions sur sa vie sociale et ses relations personnelles. Nous mesurons ces éléments pour essayer de déterminer à quel moment nous avons la plus grande incidence sur la vie du client. Puis, nous essayons d'adapter nos services en conséquence. C'est quelque chose de mesurable et de réalisable, tandis qu'il est très difficile de contrôler des résultats.
La présidente: Monsieur Buchholz.
¹ (1555)
M. Blair Buchholz: Je crois que l'ancien critère était l'abstinence. Ainsi, si les clients s'abstenaient d'ingérer toute drogue, dans ce cas... Autrefois, on essayait de mesurer les taux de succès des différents programmes en se fondant sur l'abstinence, mais je ne crois pas que cette méthode soit aujourd'hui communément acceptée. Cela se fonde davantage sur une évaluation globale de l'autonomie ou d'indicateurs de la qualité de vie. Manifestement, la consommation réduite et l'abstinence doivent être vues comme des indicateurs positifs, mais si une personne a réduit son activité criminelle, son comportement antisocial, sa consommation, si elle a amélioré ses relations familiales et personnelles et sa capacité d'évoluer en société, tous ces éléments constituent de bons indicateurs.
Au sein de notre programme, nous menons actuellement un projet de recherche qui mesure la consommation également, parce qu'il est important de savoir si nous aidons à réduire la consommation, bien sûr, mais nous examinons aussi les indicateurs de qualité de vie pour voir si les clients se sentent plus sains, s'ils ressentent un mieux-être et s'ils vont bien. Nous avons également des taux d'achèvement de programme, qui ne font essentiellement que nous indiquer que la personne a été là pour une période de temps donnée et a complété le programme. Mais ces données sont également importantes parce qu'elles nous aident à déceler les tendances dans les besoins du client et notre capacité d'y répondre.
[Français]
M. Réal Ménard: Me reste-t-il encore un peu de temps?
La présidente: Oui.
M. Réal Ménard: Que vous êtes attachante, madame la présidente. Vous êtes tellement généreuse. Si seulement vous pouviez présider d'autres comités que celui-ci.
Vous avez probablement entendu parler des trois phases de la Stratégie nationale sur le sida qui ont eu lieu de 1989 à 1993, de 1993 à 1997 et de 1997 à ce jour. Cette stratégie, qui a été mise sur pied par les conservateurs, a été renouvelée à raison de 49 millions de dollars par tranche de quatre ans. Avez-vous des liens avec les différents acteurs fédéraux qui sont responsables de la mise en oeuvre de la Stratégie nationale sur le sida? Cette stratégie nationale a cinq volets: un volet sur la recherche; un volet sur la documentation; un volet sur le traitement; un volet sur les autochtones; et un volet sur des liens entre les collectivités. Compte tenu qu'il y a souvent des liens assez ténus entre l'utilisation de drogues injectables et le sida, est-ce que la Stratégie nationale sur le sida du gouvernement fédéral vous dit quelque chose?
[Traduction]
La présidente: Monsieur Logue.
M. Bill Logue: Je n'ai aucune information là-dessus.
La présidente: Monsieur How.
M. Ernie How: Il y avait une stratégie en place dans notre collectivité. Il y a quelques travailleurs qui se spécialisent dans la prévention du sida et dans la sensibilisation. Dans la région de Battleford, nous en sommes aux premières étapes d'un programme d'échange de seringues. Le programme de maintien à la méthadone est actuellement en discussion. Ainsi, nous commençons tout juste à nous attaquer à ce problème.
Le conseil tribal de Battleford, qui a son siège dans la région, compte un travailleur qui fait beaucoup de prévention et de sensibilisation dans le cadre du programme de lutte contre le sida. Mais je ne saurais vous parler précisément du programme fédéral, non.
La présidente: Monsieur Buchholz.
M. Blair Buchholz: Je ne saurais vous renseigner officiellement sur le programme fédéral. J'ai siégé au sein d'un comité représentant toutes les régions de la province et qui s'est penché sur les pathogènes transmissibles par le sang, le VIH. Nous avons présenté un rapport au médecin en chef de la Saskatchewan, je suis donc au courant de certains programmes en cours dans les Premières nations et certains programmes locaux, des traitements d'entretien à la méthadone. Je sais seulement que c'est un grave problème. L'un des problèmes que nous avons constatés est l'hépatite C. Le sida en est assurément un, mais l'hépatite C est également très répandue dans la région.
La présidente: Merci, monsieur Ménard.
En ce qui concerne vos soins en clinique, spécialement les programmes communautaires pour les jeunes, est-ce que vous enseignez aux gens de se protéger contre l'hépatite C et le sida?
M. Blair Buchholz: Oui, nous invitons des agents de santé publique à venir faire des exposés aux jeunes. Ainsi, on peut dire que nous essayons de sensibiliser les jeunes. Nous ne leur enseignons pas comment utiliser les seringues de façon sûre, par exemple. Nous n'allons pas jusque-là, mais nous...
La présidente: Les condoms.
M. Blair Buchholz: Oui, ils reçoivent toute cette information. Nous fournissons ces renseignements également.
Nous offrons également des traitements à la méthadone, voilà assurément quelque chose. Il y a des traitements d'entretien à la méthadone ici même, à Saskatoon. Nous ne maintenons pas un stock de méthadone sur les lieux. Il faut aller s'en procurer à la pharmacie, mais si les clients sont stabilisés à la méthadone, nous leur fournirons également le service.
La présidente: Je vous remercie, monsieur LeBlanc.
Vous ne vouliez pas faire cette enquête pour M. How, n'est-ce pas?
º (1600)
M. Dominic LeBlanc: Non, je laisse ce soin à vous-même et à Réal; il semble exister une bonne camaraderie entre vous.
La présidente: C'est une enquête sur les relations qui rend tous les députés nerveux.
M. Dominic LeBlanc: C'est exact. Je trouve inadmissible que l'on doive remplir un formulaire quelconque à propos de ses relations personnelles pour évaluer l'intégration d'une personne à la société. C'est très inquiétant.
Comme Réal, je tiens aussi à vous féliciter à propos de l'excellent travail que vous faites. Chaque fois, Réal commence par vous complimenter.
J'ai une question. L'une de nos collègues qui représente le quartier est du centre-ville de Vancouver et qui a voyagé avec notre comité pour participer à un grand nombre de nos audiences préconise... Je ne veux pas parler en son nom. À certaines reprises, elle a indiqué que les solutions que recherche sa collectivité au problème d'utilisation de drogue par injection comprennent les piqueries contrôlées et les programmes d'entretien à l'héroïne.
Chacun d'entre vous participe à divers stades du traitement de l'accoutumance. Certains témoins qui ont comparu ce matin estimaient que certaines de ces stratégies de réduction des méfaits risquent en réalité d'aller à l'encontre du but recherché.
Je comprends que chaque collectivité a des besoins différents. Dans les régions rurales du Nouveau-Brunswick, une piquerie contrôlée n'est peut-être pas une solution aussi appropriée que pour le quartier est du centre-ville de Vancouver ou d'autres grands centres urbains. À votre avis, quel message le gouvernement fédéral se trouverait-il à transmettre s'il participait à un projet de recherche prévoyant de piqueries contrôlées et des programmes d'entretien à l'héroïne.
La présidente: Monsieur How.
M. Ernie How: Je crois que cela revient une fois de plus à en normaliser l'utilisation, à indiquer que c'est acceptable. C'est comme dire que ce genre de comportement est acceptable. Je crois que c'est le message que reçoit la population générale, surtout les jeunes et les gens qui sont prédisposés à ce genre de chose.
Quant à ce qui doit être fait à Vancouver, la situation est tout à fait différente de celle qui existe ici. J'ai lu certaines études et de la documentation sur ce sujet, et les opinions sont partagées. Personnellement, je ne suis pas sûr de la position que j'adopterais. Je sais que dans la ville de North Battleford, non ce ne serait pas possible.
M. Dominic LeBlanc: Ce ne serait pas possible pour quelle raison, à cause de l'opinion publique ou parce que cela n'aurait aucune valeur sur le plan de la recherche ou ne serait pas nécessaire?
M. Ernie How: Oui, c'est surtout probablement parce que ce n'est pas nécessaire, mais aussi quel type de recherche ou de décision motiverait ce genre d'initiative? Et l'opinion publique y serait extrêmement défavorable.
M. Dominic LeBlanc: Comment votre collectivité réagirait-elle si la population de Vancouver indiquait qu'elle a besoin d'une piquerie contrôlée et d'un programme d'entretien à l'héroïne?
M. Ernie How: On ne peut s'y opposer. Nous parlons de gens qui ont une prédisposition à emprunter cette voie, nous ne parlons pas de la population générale. La population générale se demanderait pourquoi nous agissons ainsi, pourquoi nous leur donnons plus de drogues, pourquoi nous leur facilitons la situation? On se trouve à transmettre un message négatif aux personnes qui sont prédisposées à agir ainsi.
La présidente: Monsieur Buchholz.
M. Blair Buchholz: Cette perspective m'effraie un peu, mais la réalité est très différente au centre-ville de Saskatoon, comparativement à ce qui se passe à Vancouver et ailleurs. Donc, je crois qu'il faut séparer le traitement des accoutumances ou le traitement de la chimiodépendance de certains éléments de la réduction des méfaits à l'autre extrême. C'est là où un grand nombre de problèmes interviennent au niveau du territoire, des idées que se font les gens et de leurs problèmes.
Personnellement, si la recherche est bien faite et indique que cela réduit la maladie et sauve des vies... Je sais qu'il existe d'autres endroits, en Grande-Bretagne et dans certains pays d'Europe, où on a adopté des mesures de ce genre. Je ne suis pas sûr de leurs résultats. Je ne suis pas sûr si ce sont des mesures utiles ou qui sont utilisées. Personnellement, si cela se fait dans le cadre de la santé publique ou dans d'autres secteurs comme dans le cadre du travail social, c'est très bien, mais lorsque vous associez cela au traitement de la toxicomanie, cela devient autre chose. Le traitement des toxicomanies vise à aider les gens à réduire leur consommation plutôt qu'à maintenir un niveau d'utilisation qui soit sûr.
Il y a bel et bien un débat sur la réduction des méfaits en Saskatchewan. Je ne veux pas dire qu'elle n'a pas de raison d'être; je ne suis simplement pas sûr du contexte dans lequel elle doit s'inscrire et dans le cadre de quel service. Il ne fait aucun doute qu'il y a beaucoup de gens qui sont en train de propager des maladies et de mourir, et il faut aussi que l'on s'occupe de ce genre de problèmes.
º (1605)
La présidente: Merci.
Monsieur Logue.
M. Bill Logue: Avant de pouvoir commenter à ce sujet, il faudrait que je sache quels sont les critères prévus pour les piqueries contrôlées. Cela signifie-t-il que quiconque veut s'injecter de la morphine peut simplement s'en faire administrer ou s'agit-il de morphinomanes chroniques qui ont de longs antécédents, qui sont des personnes à risque, ou qui sont peut-être séropositives ou atteintes du sida, et qui peuvent venir obtenir leur dose de morphine et on se débarrasse des seringues de la façon appropriée? Quels seraient les critères d'un tel programme?
Je serais contre tout programme qui permettrait à un jeune de 18 ans qui veut essayer la morphine de se présenter en demandant qu'on lui en injecte une dose pour qu'il voit l'effet que cela fait. J'aurais de vives objections à un tel programme.
Je suppose que s'il s'agissait d'un programme qui s'adressait à des toxicomanes endurcis—des personnes qui ont essayé absolument tout autre recours pour contrôler leur vie et n'ont plus aucune autre option—et que c'est le dernier recours pour tâcher de contrôler une maladie contagieuse, et qu'ils satisfont à des critères précis, très sévères et très contrôlés pour obtenir un tel service, je suppose que dans ce genre de situation je pourrais peut-être appuyer ce programme. Mais si ce programme permettait simplement à une personne qui se présente pour aucune raison valable, pour se faire injecter, pour qu'une infirmière lui montre comment utiliser une seringue, j'aurais beaucoup de difficulté à l'accepter. Cela dépendrait des conditions du programme.
M. Dominic LeBlanc: Je comprends bien ce que vous dites. Je ne parlais pas d'un buffet où toute une foule de drogues sont offertes et où vous pouvez vous présenter et essayer différentes drogues. Si je comprends bien les tenants d'un tel programme, ils considèrent qu'il est destiné aux toxicomanes purs et durs qui consomment depuis de nombreuses années. Ce n'est pas vraiment clair. Bien que certains semblent indiquer qu'une piquerie contrôlée ne comprendrait pas le maintien à l'héroïne et que ces personnes devraient apporter leur propre drogue à ce site, d'autres vont plus loin et disent qu'un programme d'entretien à l'héroïne, par exemple, permettrait à ces personnes d'aller à une telle piquerie pour se faire administrer des drogues—qui seraient prescrites, je suppose.
M. Bill Logue: Comme je l'ai déjà dit, j'aimerais prendre connaissance des critères établis pour un tel programme. Si ce programme faisait l'objet d'un contrôle rigoureux et, je le répète, s'il était destiné à améliorer la qualité de vie d'une personne, en fonction des critères, ce serait quelque chose que je devrais...
M. Dominic LeBlanc: D'après votre expérience, vous ne seriez pas opposé en principe à ce que l'on procède à des expériences selon certaines de ces conditions?
M. Bill Logue: Selon certaines conditions, tant que ce programme n'est pas accessible à n'importe qui, et n'offre pas la possibilité à quelqu'un d'expérimenter, je pourrais envisager la chose.
M. Dominic LeBlanc: Je vous remercie.
La présidente: Merci.
J'ai quelques questions à vous poser. Auparavant toutefois, est-ce que vous vouliez répondre à une autre question?
M. Blair Buchholz: Je voulais répondre à M. LeBlanc. Vous étiez sorti de la pièce et...
La présidente: L'usage consacré ici est de ne pas mentionner les absences des membres.
M. Blair Buchholz: D'accord, mais vous aviez mentionné une question. Si vous me permettez de répondre, après que vous êtes sorti, quelque chose m'est venu à l'esprit. Vous avez parlé des tribunaux réservés aux affaires de drogues et de cette initiative, et je tenais simplement à attirer votre attention sur certaines choses qui ont été mises en oeuvre dans la municipalité à cet égard. J'aimerais d'abord mentionner les cercles de justice et les nouvelles initiatives qui s'y rapportent. On fait maintenant appel à des professionnels de services thérapeutiques, comme des spécialistes de la santé mentale, de la toxicomanie, ou à des travailleurs sociaux. Leur présence crée un cercle-tribunal, où un jeune est accueilli par des aînés et des gens choisis pour l'aider, professionnels et autres. On le soutient au moyen d'un programme thérapeutique plutôt qu'une peine d'emprisonnement. Cette nouvelle façon de faire donne d'assez bons résultats.
Il y a aussi ce qu'on appelle l'Opération secours, qui s'adresse aux jeunes en fin d'adolescence ou au début de la vingtaine, et qui s'adonnent à la prostitution. Ceux qui animent cette initiative collaborent avec l'escouade des moeurs des services policiers, les services de soutien, les travailleurs sociaux et les aînés. Lorsque des jeunes sont appréhendés par l'escouade des moeurs, plutôt que d'être écroués, ils ont le choix de se rendre à un cercle de justice, où ils peuvent recevoir l'aide des représentants des services thérapeutiques ou de leurs aînés. Ils le font volontairement, et s'ils déclinent cette offre, ils seront assujettis à l'application régulière de la loi. C'est donc une solution de rechange.
Je précise aussi qu'au sein des tribunaux spécialisés en matière de drogue, il y en a qui adoptent aussi la démarche d'une participation volontaire à un programme thérapeutique.
º (1610)
La présidente: Je vous remercie. Cela correspond assez bien à ce que j'allais effectivement vous demander.
Dans certaines régions de notre pays, nous avons certainement entendu parler de la détresse de ceux et celles qui suivent des traitements. Une fois qu'ils ont terminé leur thérapie, ils retournent à la même vie qu'auparavant. Ils quittent les services de désintoxication, sans s'inscrire dans d'autres programmes de traitement.
Il est pénible de voir comment on laisse tomber ceux et celles qui ont encore besoin d'aide et de suivi. Est-ce que la Saskatchewan fait mieux, avez-vous fait mieux dans les petites agglomérations, peut-être? Est-ce qu'on coordonne les services de santé et les services sociaux afin de soutenir les gens pour qu'ils puissent changer de vie? Existe-t-il des programmes de ce genre? Tout en reconnaissant le rôle que pourraient jouer les cercles de justice ou l'Opération secours en matière de coordination des services, est-ce qu'il faudrait aussi en faire davantage? Devrions-nous faire d'une telle fonction un modèle à suivre?
M. Blair Buchholz: Je crois qu'il faut en faire davantage. Il y a certainement beaucoup d'initiatives en cours, mais aussi beaucoup de morcellement des services, surtout de ceux qui visent les jeunes. Je pourrais sans doute évoquer certains projets novateurs, de très bons exemples de partenariats. On peut donc parler de certains succès, mais il nous reste encore beaucoup de choses à faire pour que les prestataires de services se concertent et assurent le suivi des soins après la fin d'un programme thérapeutique en établissement.
Dans les services de lutte contre la toxicomanie, nous savons que la guérison a lieu dans la société, et que les traitements en établissement ne représentent qu'un court moment dans la vie d'une personne. Le modèle de soins s'articule donc autour du renvoi à un service communautaire et des services d'un conseiller en toxicomanie, lequel coordonne le suivi thérapeutique.
Ici, j'aimerais dire quelques mots au sujet des jeunes. Ceux que nous voyons souffrent de problèmes multiples. Bon nombre d'entre eux sont victimes du syndrome d'alcoolisation foetale ou des effets de l'alcoolisation foetale. Ils souffrent de problèmes de comportement, et certains d'entre eux, de troubles mentaux. Je le répète, ils souffrent de problèmes multiples. Nous nous occupons d'eux, mais nous n'offrons pas de services suffisamment planifiés et coordonnés, ni n'avons assez de ressources pour venir en aide comme nous le voudrions à ceux et celles qui ont les problèmes les plus aigus. Tous nos services sont sollicités au maximum. Nous connaissons donc passablement de difficultés.
Il est parfois assez pénible de fournir des services en établissement, de formuler des recommandations et les voir rester sans effet. Nous pouvons recevoir des documents sur un jeune puis l'évaluer sur le plan psychologique, ce qui donne une assez bonne idée de ses besoins dans son milieu. Cependant, nous n'avons aucun moyen d'assurer un suivi ou d'obtenir des services, car nous ne faisons pas partie des services thérapeutiques communautaires. Nous travaillons en étroite collaboration avec eux, mais la province est grande, et il s'y passe toutes sortes de choses.
Les gens vous diront qu'ils sont soumis à des demandes considérables ou à beaucoup de stress, du fait qu'ils n'ont pas assez de ressources pour offrir des thérapies à long terme dans les cas de traumatismes sexuels ou d'autres problèmes de ce genre. Il n'y a tout simplement pas assez de ce genre de services dans les régions rurales de la Saskatchewan, compte tenu des besoins.
La présidente: Monsieur How.
M. Ernie How: Dans notre collectivité, nous avons réussi à établir des liens avec les services psychologiques et psychiatriques. Ces dernières années, nous avons conçu un système nous donnant accès aux dossiers de santé mentale des jeunes, nous les avons reçus, et cela a été un très net progrès.
Nous avons d'excellents rapports de travail avec le conseil de tribu, et cela est fort utile lorsqu'il s'agit d'assurer la continuité des soins de quelqu'un traité par nous ou qui sort d'un établissement. La collectivité et les services professionnels doivent tendre la main et élaborer les réseaux dont ces gens ont besoin. Toutefois, oui, cela devrait faire partie des pratiques exemplaires; nous avons déjà fait des progrès, mais il nous en reste encore beaucoup à accomplir.
º (1615)
La présidente: Bien, je vous remercie.
Monsieur Logue.
M. Bill Logue: Il nous en reste encore énormément à faire. Il n'est pas rare que lorsque je donne son congé à quelqu'un à la fin de sa cure de désintoxication, pour alcoolisme par exemple, cette personne n'a aucune adresse fixe. Ce jeune n'a nulle part où aller. Quand il arrive à la maison Larson, j'essaie de joindre les services sociaux; ils vont fixer un rendez-vous pour deux semaines plus tard, mais en attendant, la personne concernée n'a nulle part où aller. On nous a retiré les services pour hommes de l'Armée du Salut, qui étaient un soutien principal ici en ville. Je pouvais au moins obtenir que ces jeunes y vivent, et maintenant tout cela a disparu. Cela signifie donc que souvent, lorsqu'on donne son congé à quelqu'un, on le renvoie à la rue.
La présidente: Où est passée l'Armée du Salut?
M. Bill Logue: Le programme a été supprimé.
La présidente: Est-ce parce que les besoins avaient diminué ou parce qu'on manquait de ressources?
M. Bill Logue: Je n'en suis pas sûr. On ne nous l'a jamais dit. Je suis sûr qu'il y avait encore des besoins. J'ignore si les raisons qui ont mené à la fermeture de l'Armée du Salut ont été de nature financière ou autre.
M. Blair Buchholz: Je pense que le bâtiment où étaient situés les services avait besoin de rénovations très importantes pour qu'on se conforme au code de prévention des incendies.
M. Bill Logue: Je n'en sais rien. Ils ont dépensé deux millions et demi de dollars sur cet immeuble il y a quelques années.
La présidente: Donc, monsieur Logue, les gens, dont certains sont en crise, viennent chez vous, s'inscrivent à vos programmes et vous vous occupez d'eux.
M. Bill Logue: Nous leur offrons un lit.
La présidente: Vous leur offrez un lit et ils se purgent de toutes les drogues accumulées. Combien de temps sont-ils là?
M. Bill Logue: Le séjour régulier dure de trois à sept jours.
La présidente: Par conséquent, après sept jours...?
M. Bill Logue: Cela dépend de la condition physique dans laquelle ils se trouvent. Supposons que la personne en question utilisait des stupéfiants, et que les effets de la désintoxication n'ont commencé que cinq jours après la dernière dose, ce qui n'est pas rare. En ce cas, je vais la garder plus longtemps.
La présidente: Vous pouvez donc garder les gens jusqu'à...
M. Bill Logue: Oui. Je vais garder certaines personnes plus longtemps que le séjour réglementaire, pour être sûr que leur condition physique est stable. Toutefois, règle générale, le séjour dure de trois à sept jours. Après cela, je vais essayer de recommander les personnes chez nous à un autre service.
Si le malade nous vient du district de santé de Saskatoon, je vais faire en sorte qu'il ou elle soit envoyé au service ADS, Alcohol and Drug Services, situé dans une solide maison de pierre afin qu'il ou elle puisse bénéficier des services d'un gestionnaire de soins. Ce dernier va effectuer une évaluation de santé afin d'établir si la personne qui lui a été envoyée devrait être en établissement ou en clinique externe.
Je reçois beaucoup de gens qui sont dans un état de détresse très aiguë, des gens qui ont tout perdu, car n'oublions pas que je fais affaire avec les plus malades des malades. Cela signifie que lorsqu'ils m'arrivent, le soutien de leur famille leur a probablement déjà été retiré, et il ne leur reste plus nulle part où aller, donc la situation est passablement difficile. Nous ne disposons que de très peu de ressources pour trouver un endroit à ces gens, mais nous faisons de notre mieux.
On ne peut plus tout simplement aller voir un travailleur chargé des services d'urgence. Il faut prendre rendez-vous, et cela veut dire attendre peut-être deux ou trois semaines. En conséquence, certaines de ces personnes sont laissées à elles-mêmes après qu'elles soient passées par chez nous.
La présidente: En été, ce n'est peut-être pas tellement problématique pour un jeune de 20 ans de se retrouver seul.
M. Bill Logue: Bien, mais lorsqu'il fait jusqu'à moins quarante dehors à Larson House, oui, il faut alors que nous fassions tout en notre pouvoir pour trouver un lieu sûr et bien chauffé qui accueillera celui ou celle qui doit nous quitter.
Beaucoup de gens ne le savent peut-être pas, mais lorsque c'est complet chez nous, c'est-à-dire lorsqu'il y a 18 personnes dans la pièce, quelqu'un peut bien arriver à trois heures du matin et être en état d'ébriété. Il fait moins quarante dehors, et celui ou celle qui vient de frapper a peur et a froid et n'a nulle part où aller. Nous allons donc trouver un endroit où l'étendre à terre dans le hall d'entrée. On ne se trouve donc pas à les admettre en bonne et due forme, mais au moins à les accueillir dans un lieu bien chauffé et sûr, pour éviter les graves problèmes que peut causer le froid. Le matin, nous pouvons laisser partir la personne.
La présidente: Est-ce que vous participez à certaines des initiatives destinées aux sans-abri? Ainsi, par exemple, dans ma région, les gens qui...
M. Bill Logue: Nous travaillons en étroite collaboration avec les gens qui administrent les programmes d'intervention en situation de crise, surtout ceux qui s'occupent des femmes sans abri. Ces services vont essayer de trouver des lieux sûrs pour les femmes sans abri. Cependant, non, il n'y a pas de collaboration officielle avec les gens qui administrent les programmes destinés aux sans-abri. Non seulement nous n'avons pas travaillé avec eux, mais ces derniers ne nous ont jamais approchés.
La présidente: Et est-ce que dans vos services on essaie de faire participer les services juridiques, de manière à ce qu'ils réunissent les gens ou les services? Ainsi, par exemple, si vous saviez que le seul choix qui s'offre à quelqu'un, c'est d'aller travailler dans un hôtel de passe, si c'est le seul endroit où il ou elle peut trouver de la chaleur, existe-t-il un mécanisme auquel on pourrait recourir pour faire inculper cette personne ou pour la faire passer devant un cercle de justice? Est-ce que vous devez parfois travailler avec les services juridiques afin de vous assurer que les gens reçoivent des services?
M. Blair Buchholz: Nous collaborons avec le ministère des Services sociaux. Ce dernier a d'ailleurs droit à trois de nos lits que nous gardons pour les jeunes sans abri qui s'administrent des drogues injectables; ils ont donc plus aisément accès à des services. Ce ministère est assez compétent lorsqu'il s'agit de trouver des ressources. Parfois, nous aimerions que les services offerts soient encore meilleurs. Cela dit, je pense que personne à avoir séjourné chez nous ne nous a quittés en pensant qu'on ne répondrait pas à ses besoins ou bien qu'il ou elle se retrouverait forcément dans la rue. Jusqu'à maintenant, le ministère des Services sociaux a été assez efficace lorsqu'il s'est agi de trouver des endroits acceptables, tout au moins pour les jeunes.
Dans le cas des adultes, il reste toujours des situations où les gens ne sont pas à l'aise si tout ce qui leur est offert, c'est d'aller au YM-YWCA, et qu'ils n'ont pas beaucoup d'argent et n'en auront pas avant quelque temps. Évidemment, devant une telle situation, ce genre de protégé va invariablement choisir de retourner à ce qu'il ou elle connaît le mieux.
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La présidente: Et parfois, il ou elle n'a même plus ce choix parce que franchement, la famille, les amis, les proches en ont assez...
M. Bill Buchholz: Oui.
M. Blair Buchholz: On exerce beaucoup de pression sur les gestionnaires de cas communautaires et sur les agents. Par conséquent, je ne pense pas qu'on soit arrivé au moment où il faudrait faire intervenir l'administration officielle.
Nous avons constaté que le ministère—au moins dans le cas de notre organisme—a très bien pu s'occuper des besoins de chaque personne. Mais là, il s'agit d'un mécanisme de traitement structuré qui fait en sorte que les conditions de vie des personnes sont, en général, plus stables que pour les personnes auxquelles Bill a affaire.
M. Bill Logue: Pour ces gens dont je m'occupe qui reçoivent leurs prestations sociales au début du mois, beaucoup d'entre eux ne mettent que deux jours pour dépenser cet argent. Ces personnes se livrent à des saouleries et par la suite, elles atterrissent chez moi. Moi je peux les garder pendant sept jours. À la fin de cette période, ces personnes doivent être envoyées aux services sociaux, mais elles ont déjà dépensé leurs prestations sociales qui auraient dû leur durer tout un mois. À ce moment-là, elles n'ont pas d'argent. Il est très difficile pour nous d'insérer ces personnes dans un milieu sûr et durable.
La présidente: Serait-il possible pour le ministère des Services sociaux d'émettre quatre chèques pendant le mois plutôt qu'un?
M. Bill Logue: Sauf erreur, il existe un programme, selon lequel les prestataires peuvent recevoir seulement 50 p. 100 de leurs prestations sociales à la fois.
La présidente: À Vancouver, on nous a dit que, en fait, certains confisquaient les chèques de prestations sociales aux gens tout de suite au début du mois. Certains fournissaient même des stupéfiants pendant cette période, ce qui multipliait les problèmes. Est-ce un problème que vous rencontrez chez-vous? À Vancouver, il s'agissait essentiellement de locateurs puants.
Non, pas tellement. Ce serait le cas si vous vous occupiez de gens qui ont un sérieux problème de consommation de drogues par injection et qui souffrent de toutes sortes de problèmes sociaux.
Vous nous avez dit que vous traitez des gens qui consomment de la méthadone.
M. Blair Buchholz: Oui, si ces gens ont été stabilisés. Au début de ce genre de traitement, les gens peuvent devenir désorientés. Donc, dans ces cas-là, notre programme de traitement ne serait pas très efficace. Normalement, les gens qui ont été stabilisés en utilisant la méthadone peuvent s'intégrer dans notre programme de traitement.
La présidente: Vous arrive-t-il de devoir faire subir une cure de désintoxication à quelqu'un qui prend aussi de la méthadone?
M. Bill Logue: Nous négocions actuellement avec notre bailleur de fonds quant à la possibilité d'élaborer un programme selon lequel nous accepterions quelqu'un qui consomme déjà de la méthadone et d'autres stupéfiants. Nous les mettrions dans un programme de désintoxication pour qu'ils arrêtent de consommer les stupéfiants, sauf la méthadone. Actuellement, nous avons pu calculer les effectifs et les ressources supplémentaires qu'il nous faudrait pour pouvoir assumer cette charge additionnelle. Néanmoins, nous sommes prêts à intégrer dans notre programme quelqu'un qui consomme déjà de la méthadone, si cette personne ne prend que 30 milligrammes par jour. Dans ce cas-là, nous sommes prêts à tenter de les sevrer des autres stupéfiants qu'ils consomment.
La présidente: Monsieur How, une personne déjà inscrite à un programme de traitement à la méthadone qui décide de rentrer chez elle, à North Battleford, par exemple, peut-elle continuer à se faire soigner?
M. Ernie How: Nous avons un pharmacien qui peut en fournir. Nous n'avons pas de médecin, à North Battleford, qui est prêt à émettre une ordonnance pour la méthadone. Donc, un médecin dans une autre ville doit le faire. Nous nous heurtons à des grandes difficultés, parce que des fois des centres de désintoxication vont essayer de réintégrer quelqu'un sous traitement par méthadone dans la communauté sans que cette personne dispose des ordonnances appropriées. Nous avons aussi vu des personnes qui sont arrivées chez nous et qui étaient sous traitement de méthadone dans d'autres collectivités. Elles sont venues chez nous sans les ordonnances requises. Il nous faut un médecin chez nous, car ces gens se retrouvent dans une situation vraiment pénible.
La présidente: Nous avons vu ailleurs, surtout à Toronto et au tribunal des stupéfiants, que certains toxicomanes—votre clientèle donc—ont beaucoup de problèmes. Des fois ces gens souffrent de problèmes d'ordre physique—c'est-à-dire qu'ils souffrent de douleurs—et c'est même peut-être pourquoi ils ont commencé à consommer des stupéfiants. Il faut des moyens très novateurs pour pallier et traiter leurs douleurs, sans qu'ils continuent de consommer des stupéfiants à outrance.
Y a-t-il suffisamment de médecins dans votre province, avec lesquels vous pouvez travailler et qui sont en mesure de cerner les médicaments les plus efficaces pour permettre aux gens de mettre fin à leur consommation de stupéfiants? Je sais qu'il n'y en a pas assez dans ma province natale, et on nous a parlé de médecins qui étaient censés savoir qu'une certaine personne était toxicomane mais qui continuaient à émettre des ordonnances pour des médicaments comme le Percocet et le Dilaudid. On aurait pensé quand même, que ces médecins auraient constaté que telle ou telle personne était en fait un toxicomane et que le médecin saurait quel médicament prescrire ou quel genre de traitement il faudrait pour pallier telle ou telle douleur. Êtes-vous en avance à cet égard en Saskatchewan?
M. Ernie How: Non, je ne pense pas, et c'est un véritable problème qu'il faudrait résoudre. Les toxicomanes se plaignent souvent de se faire administrer par leur médecin des substances qu'ils ne devraient pas prendre. C'est sans doute à cause d'un manque de sensibilisation des médecins et des infirmières quant aux conséquences des médicaments pour les toxicomanes.
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M. Blair Buchholz: À Calder, nous avons un groupe consultatif provincial qui a notamment défini des protocoles provinciaux concernant la gestion du sevrage, la méthadone et les sujets du même ordre.
Je sais que la question se pose, et nous nous y intéressons. Nous avons reçu de la formation en soins complémentaires et à Calder, nous offrons différents services de formation. Mais nous avons aussi traité des personnes qui présentent de graves problèmes de gestion de la douleur et qui ont d'autres problèmes de dépendance lorsqu'on leur donne certains médicaments.
Il y a quelque temps, nous avions parmi nos patients une jeune fille dont les doigts se nécrosaient à cause des injections intraveineuses, et elle souffrait énormément. Il a fallu lui administrer un narcotique, car elle risquait de perdre ses doigts, mais elle était prête à subir un traitement. Il y a donc des choix à faire.
Nous sommes tout à fait prêts à prendre les décisions de ce genre avec le médecin qui travaille avec nous. C'est un domaine qui suscite beaucoup d'intérêt, mais je suis d'accord avec les autres pour dire qu'il reste encore bien des progrès à faire.
Nous faisons un effort d'éducation auprès d'un médecin qui a tendance à trop prescrire de narcotiques; il va passer un certain temps avec nous au centre Calder, pour apprendre pendant quelques semaines.
La présidente: Vous allez donc le sensibiliser à...
M. Blair Buchholz: Il va venir passer quelques semaines ou un mois pour s'informer sur la toxicomanie. On peut souhaiter qu'il va ainsi maîtriser sa tendance à la surprescription. Nous allons voir.
La présidente: Est-ce une procédure informelle ou est-ce que ce médecin a fait l'objet d'accusations?
M. Blair Buchholz: Oui. Je ne sais même pas si je peux en parler. Nous sommes en relation avec le Collège des médecins et chirurgiens, et nous sommes associés à plusieurs médecins.
La présidente: C'est très bien.
À vous, monsieur Logue.
M. Bill Logue: Il faut dire, à la décharge des médecins, que bien des gens passent par les centres de traitement pour toxicomanes, et lorsqu'ils consultent leur médecin, celui-ci leur prescrit un médicament pour les remettre d'aplomb, mais ils ne lui disent pas qu'ils ont une dépendance et qu'ils viennent de subir un traitement. C'est un grave problème. Je le dis pour rendre justice aux médecins, parce qu'il y en a beaucoup d'excellents.
Il y a en ville certains médecins qui sont tout à fait prêts à travailler avec les toxicomanes ou avec des personnes présentant une dépendance et qui souffrent de douleur chronique. Les médecins sont prêts à leur prescrire des traitements de remplacement, mais ce ne sont pas les plus nombreux et leur charge de travail est telle qu'il n'est pas facile de les consulter.
Nous disons toujours à nos patients de parler en toute franchise à leur médecin et de leur faire part de leur problème de toxicomanie.
Quand ils sont informés du problème, la plupart des médecins feront tout en leur pouvoir pour éviter de prescrire un produit susceptible d'engendrer une dépendance, ou pour chercher un produit de remplacement. La plupart des médecins auxquels nous faisons affaire se montrent très coopératifs.
Si l'on pouvait créer une clinique spécialisée pour régler ces questions, on parviendrait certainement à aider bien du monde.
La présidente: À Toronto, nous avons été marqués par les problèmes différents que ces personnes pouvaient avoir. Une personne a eu un accident de voiture en allant à son traitement, a souffert de multiples fractures de la jambe, et cela a causé tant de problèmes et tant de questions de famille—un seul de ces problèmes aurait suffi pour nous désarçonner complètement. Mais cette personne a dû composer avec tout cela, et en plus avec la toxicomanie. C'est étonnant qu'elle pouvait se lever le matin et faire ce qu'elle avait à faire.
M. Bill Logue: Cela est assez commun. Une personne a été blessée dans un accident de travail il y a un an et demi, et est venue chez nous avec une dépendance chronique à la codéine pour demander de l'aide avec la désintoxication. Cette personne reçoit encore des indemnités pour accident du travail. C'est une situation difficile.
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La présidente: Il y a un travail de sensibilisation à faire.
Monsieur How, vous dites que vous êtes chargé de la coordination avec les services de santé mentale, et que vos services sont utiles.
M. Ernie How: Oui, beaucoup de clients ont bénéficié de nos services. Un bon nombre de clients qui sont aiguillés vers nous, viennent du pavillon psychiatrique. On fait ce qu'on peut pour eux et on leur offre les meilleurs services possible à ce moment-là.
Ceci nécessite beaucoup de souplesse et de la formation et des ateliers en coopération avec les autres services. On s'arrange—soit les services de santé mentale travaillent avec nous, soit nous travaillons avec eux.
L'admission centrale est avantageuse. Quand quelqu'un téléphone, on évalue déjà vers quel service il ou elle doit être aiguillé. Et comme tout est centralisé, on n'a pas besoin d'échanger de l'information entre les différents services. Le système fonctionne très bien, et semble être très bien accepté par les clients.
La présidente: D'accord. Est-ce qu'il y a d'autres questions?
Mme Carol Skelton: Je n'ai qu'une question. Avez-vous accès au CIPC?
M. Ernie How: Non. Cela dépend du budget.
Mme Carol Skelton: Mais vous n'avez pas accès au système—ne dites pas non trop rapidement—en Saskatchewan.
Est-ce que le CIPC contient des données sur la consommation de drogues, ou est-ce que c'est vous qui avez ces données?
M. Blair Buchholz: Si la personne signe une autorisation de façon volontaire, nous pouvons obtenir de l'information sur son historique de consommation de drogue, non du CIPC mais par le biais du système de santé. Nous pouvons donc voir quels médicaments de prescription ils prennent, et quels tendances ou problèmes sont associés à ces médicaments. Pour ce qui est de l'aspect criminel, nous sommes autorisés à consulter le rapport prédécisionnel des délinquants juvéniles et d'autres informations aussi, mais nous n'avons pas accès au CIPC avec nos ordinateurs.
Mme Carol Skelton: D'accord. Je voulais simplement savoir.
La présidente: Vous avez donc une banque de données centralisée pour toutes les prescriptions émises en Saskatchewan.
M. Blair Buchholz: Il y a un triple contrôle pour les narcotiques.
La présidente: Mais c'est uniquement pour ces substances.
M. Blair Buchholz: C'est ça. Mais si je ne m'abuse, le ministère de la Santé peut retrouver la documentation sur les médicaments que les gens ont pris. Ils retrouvent ces informations en utilisant leur numéro d'hospitalisation.
La présidente: Avez-vous un programme de médicaments gratuits?
M. Blair Buchholz: Excusez-moi, je n'ai pas bien compris.
La présidente: Est-ce que tout le monde reçoit des médicaments de prescription gratuitement...?
M. Blair Buchholz: Non, pas gratuitement.
La présidente: Bon. Vous avez donc un programme de triple contrôle. Certaines provinces ne font pas cela, si bien que les narcotiques et leur prescription constituent un grave problème pour elle.
Avec l'autorisation du patient, vous pouvez donc obtenir certaines données.
M. Blair Buchholz: C'est exact.
La présidente: Très bien.
Le comité va continuer son travail, et nous sommes supposés faire rapport en novembre 2002. Chantal et Marilyn s'angoissent beaucoup quand je mentionne cette date, mais c'est notre date limite, en principe. Alors, si vous estimez que nous devrions nous pencher sur d'autres études, idées ou programmes, vous pouvez communiquer avec Carol Chafe, qui est notre greffière régulière. Carol va s'assurer de distribuer votre communication à tous les membres du comité dans les deux langues officielles.
Nous avons beaucoup aimé les excellents exposés d'aujourd'hui et nous vous remercions du temps que vous avez passé avec nous. Je sais que vous avez beaucoup de choses importantes à faire. Nous vous sommes reconnaissants aussi pour votre travail au sein des collectivités, et l'aide que vous apportez à vos clients. Votre travail fait une différence énorme. Nous sommes très impressionnés par ce que vous faites, et nous vous souhaitons beaucoup de succès à l'avenir.
La séance est levée.