LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des langues officielles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 1er avril 2003
¿ | 0910 |
Le président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)) |
M. John O'Neill (membre du Conseil d'administration de la Fondation des arts et du patrimoine de St. Albert et ancien sous-ministre à la culture et au multiculturalisme (Alberta), À titre individuel) |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
¿ | 0925 |
Le président |
M. Ernest Chauvet (président, Association canadienne-française de l'Alberta) |
Le président |
M. Ernest Chauvet |
¿ | 0930 |
¿ | 0935 |
Le président |
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne) |
¿ | 0940 |
M. John O'Neill |
¿ | 0945 |
Le président |
M. Ernest Chauvet |
¿ | 0950 |
Le président |
Le président |
Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.) |
Mme Yolande Thibeault |
M. Ernest Chauvet |
M. John O'Neill |
¿ | 0955 |
Mme Yolande Thibeault |
Mme Yolande Thibeault |
Le président |
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ) |
À | 1000 |
M. John O'Neill |
M. Benoît Sauvageau |
M. Ernest Chauvet |
M. Benoît Sauvageau |
M. Ernest Chauvet |
M. Benoît Sauvageau |
M. Ernest Chauvet |
À | 1005 |
Le président |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
M. John Williams |
Le président |
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.) |
M. John O'Neill |
M. Raymond Simard |
M. John O'Neill |
M. Raymond Simard |
Le président |
M. Raymond Simard |
M. John Williams |
M. Raymond Simard |
M. Ernest Chauvet |
À | 1010 |
M. Raymond Simard |
M. Ernest Chauvet |
M. Raymond Simard |
Le président |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
À | 1015 |
M. Ernest Chauvet |
M. John O'Neill |
M. Yvon Godin |
M. John O'Neill |
M. Yvon Godin |
Le président |
À | 1020 |
M. Ernest Chauvet |
M. John O'Neill |
Le président |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
M. John O'Neill |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
À | 1025 |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
M. John O'Neill |
Le président |
M. John Williams |
M. John O'Neill |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
M. John Williams |
À | 1030 |
M. John O'Neill |
M. John Williams |
M. John O'Neill |
Le président |
Mme Yolande Thibeault |
Le président |
M. Yvon Godin |
À | 1035 |
Le président |
M. John Williams |
M. John O'Neill |
M. John Williams |
À | 1040 |
Le président |
M. John O'Neill |
Le président |
M. Ernest Chauvet |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
À | 1045 |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. John Williams |
Le président |
M. John Williams |
Le président |
CANADA
Comité permanent des langues officielles |
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l |
|
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 1er avril 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0910)
[Français]
Le président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)): Bonjour, messieurs, mesdames. Bienvenue à cette réunion du Comité permanent des langues officielles. On me permettra de faire deux ou trois petites annonces de mise en situation pour les membres du comité, puis on passera à la présentation de nos témoins de ce matin.
Pour commencer, je vous ferai remarquer que demain, nous recevons comme témoin le président de Postes Canada, M. André Ouellet. Nous étions censés recevoir mardi prochain des gens du ministère de la Justice. Avec votre permission, j'aimerais reporter cette réunion à après Pâques pour que nous puissions avoir une réunion d'affaires, parce que nous avons plusieurs choses à régler. Je vais les mentionner rapidement.
Notre rapport sur l'immigration n'est pas terminé, mais nos recherchistes et notre greffier ont reçu les commentaires des gens, et nous aurons ça pour mardi prochain. Ce sera prêt bien avant, mais nous en parlerons mardi prochain. On travaille aussi à vous présenter une proposition de plan de travail sur la santé. C'est le renvoi qu'on a eu de la Chambre. Il y a aussi un avis de motion qui a été distribué aux membres du comité et qui pourrait faire l'objet d'une discussion mardi prochain, et selon ce que nous allons entendre ce matin, il y aura peut-être un autre rapport, assez court celui-là, sur la question des langues et du redécoupage des circonscriptions. Alors, nous aurons vraiment besoin d'une réunion de travail à huis clos pour adopter ou faire avancer ces rapports. Et le surlendemain, c'est-à-dire mercredi de la semaine prochaine, nous recevrons la présidente du Conseil du Trésor pour faire un tour d'horizon de toutes les questions qui sont d'actualité.
Je voudrais aussi mentionner deux résultats du travail du comité. Hier soir, en écoutant les nouvelles à CBC, j'ai été agréablement surpris de constater que parmi les conditions que le gouvernement avait imposées pour apporter une aide à la société Air Canada, la quatrième était le respect de la Loi sur les langues officielles. Je pense qu'on peut se féliciter, parce que c'est en insistant pendant près d'un an qu'on a réussi à en faire une des conditions que le gouvernement imposerait à Air Canada pour l'aider, le cas échéant.
La deuxième chose, et nous avons un document qui peut être distribué, est un rapport qui a été préparé par le Commissariat aux langues officielles et remis aux gens qui s'étaient plaints au sujet de la question du redécoupage de la circonscription d'Acadie--Bathurst, et qui donne raison aux plaignants. Vous vous souviendrez qu'on avait reçu ici, au comité, des représentants de la Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau Brunswick et un professeur de l'Université de Moncton pour parler de cette circonscription, et je suis fort aise que la commissaire leur donne raison.
Ce matin, nous recevons des représentants de l'Alberta, M. O'Neill et M. Chauvet. M. Chauvet représente l'Association canadienne-française de l'Alberta, et M. O'Neill est un citoyen de la circonscription de St. Albert.
Le sujet de la rencontre d'aujourd'hui est semblable à celui qu'on avait abordé lors de la comparution pour la circonscription d'Acadie--Bathurst. Sans plus tarder, je vais inviter M. O'Neill et M. Chauvet à nous faire leur présentation. À la suite de cela, nous allons, à tour de rôle, poser des questions jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de questions ou que le temps soit écoulé. Qui va commencer?
Monsieur O'Neill, la parole est à vous.
[Traduction]
M. John O'Neill (membre du Conseil d'administration de la Fondation des arts et du patrimoine de St. Albert et ancien sous-ministre à la culture et au multiculturalisme (Alberta), À titre individuel):
Mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs, j'aimerais tout d'abord vous lire une lettre rédigée par le maire de St. Albert sur la question à l'étude aujourd'hui:
... St. Albert, la cinquième ville en importance en Alberta. Elle confine à la limite nord-ouest d'Edmonton et compte parmi les 22 municipalités formant la région de la capitale de l'Alberta. Elle est la plus peuplée de la circonscription de St. Albert. |
St. Albert est la plus vieille ville non fortifiée de la province. Elle a été fondée par des missionnaires Oblats français en 1861 et constituée en tant que ville par le gouvernement territorial du Nord-Ouest à Regina peu avant que l'Alberta ne devienne une province. Mon propos n'est pas de vous raconter l'évolution de St. Albert depuis l'époque de la colonisation. Je souhaite simplement faire remarquer que nous sommes extrêmement fiers de notre patrimoine français et que nous sommes résolus à ce que les francophones d'ici, qui contribuent à la diversité de notre population actuelle, puissent s'épanouir et prospérer dans un environnement politique, social et culturel qui favorisera la concrétisation de leurs objectifs. En bref, nous estimons que la Commission de délimitation des circonscriptions électorales aurait dû penser à l'importance de préserver la communauté d'intérêts des francophones au moment de redessiner la circonscription de St. Albert. |
En page 1 du mémoire que la Ville de St. Albert a remis à la Commission de la délimitation des circonscriptions fédérales pour l'Alberta, le 10 octobre 2002 à l'Hôtel MacDonald d'Edmonton, le conseil municipal porte directement cette question à l'attention de la Commission. |
«... Il faut tenir compte du patrimoine de la région. La répartition géographique des communautés francophones forme un corridor distinct qui s'étend de St. Albert jusqu'au nord de la région. Leur présence historique a contribué au brassage d'idées et à notre qualité de vie. St. Albert travaille main dans la main avec ces communautés en vue de trouver des solutions mutuellement avantageuses...» |
Il s'agit notamment des localités de Morinville, Legal, Villeneuve, Rivière-Qui-Barre et Calihoo ainsi que du district agricole et résidentiel qui ceinture St. Albert. |
Pour préserver la communauté d'intérêts des francophones, il faudrait à mon avis redessiner les limites projetées de la circonscription d'Emonton-St. Albert. |
En conclusion, le découpage projeté des circonscriptions de la région de la capitale de l'Alberta n'est pas conforme aux dispositions énoncées par le Parlement à l'égard des communautés d'intérêts. La Commission de délimitation n'a pas bien posé la spécificité de la communauté francophone au sein de la circonscription. |
Je vous serais très reconnaissant de nous aider à rectifier la situation. |
Je vous prie d'agréer, monsieur, mes salutations distinguées. |
Richard H. M. Plain, maire. |
J'appuie pleinement le message du maire Plain, et j'aimerais maintenant y ajouter mes propres commentaires. Mon intervention ce matin vise à vous convaincre qu'il existe une importante communauté d'intérêts dans la circonscription fédérale actuelle de St. Albert. Par conséquent, les limites de cette circonscriptions ne devraient pas être modifiées si les parlementaires ont vraiment à coeur ce principe de la préservation des communautés d'intérêts.
Les riches cultures francophone et métisse de St. Albert et de la région qui se trouve au nord de cette circonscription ne devraient pas être affaiblies, il faudrait plutôt favoriser leur épanouissement. Je suis arrivé à St. Albert il y a 25 ans et j'ai découvert une ville fière de son histoire et de sa culture. Tout cela a commencé vers 1860 quand les Oblats et les Soeurs grises de Montréal se sont rendus dans la région et se sont intégrés à la communauté des colons métis.
¿ (0915)
Le chef de file de ce mouvement était un homme absolument remarquable de Saint-Sulpice au Québec, le père Albert Lacombe. Le père Lacombe et les Métis ont labouré la riche terre de leurs lopins le long de la rivière et y ont construit de solides maisons. À une époque, Saint-Albert était le centre agricole de l'Alberta.
D'autres missionnaires sont venus du Québec, ont amené avec eux des amis et des parents qui se sont établis à Saint-Albert et dans la région au nord de cette communauté. C'est ainsi que sont nées les villes de Morinville, Legal, Rivière Qui Barre, Villeneuve et j'en passe.
En 1861, les Soeurs de la Charité de Marguerite d'Youville, les Soeurs grises, sont venues de Montréal et ont fondé des écoles, des orphelinats et des hôpitaux là où on en avait besoin. Il y a un an, il y a eu une importante fête communautaire organisée par les résidents de la région pour remercier les Soeurs grises de leur présence dans la région et de leur service aux résidents du nord de l'Alberta, y compris les membres des Premières nations vivant dans les réserves.
Une simple promenade dans St. Albert nous rappelle à pratiquement tous les instants nos racines francophones: une chapelle en rondins, la première église en Alberta; un établissement de soins prolongés fondé par les Soeurs grises, les élévateurs à grains qui viennent juste d'être remis en état, et le site proposé pour la création d'un centre d'interprétation métis.
La ville de Legal, qui se trouve au nord de St. Albert, est fière de compter la plus importante collection de peintures murales francophones historiques au Canada. Elles ont récemment été admirées par Son Excellence, l'honorable Adrienne Clarkson.
Permettez-moi de vous dire quelques mots du folklore de la région. Le père Lacombe a aidé les représentants du Canadien Pacifique Limitée dans leurs négociations pour obtenir la permission de faire traverser les territoires des Autochtones par la voie ferrée. Van Horne a pour cette raison nommé le père Lacombe président du CPR pour une journée. Le père Lacombe, pour ne pas être en reste, a nommé Van Horne prêtre pour une journée.
Le père Lacombe et ses amis ont construit le premier pont à l'ouest des Grands Lacs—un pont à péage, il fallait payer cinq sous pour traverser. Mais le passage était gratuit pour ceux qui avaient participé à sa construction ou pour ceux qui devaient le traverser pour se rendre à l'église.
J'ai récemment obtenu un document intitulé Le corridor historique francophone de l'Alberta. En traçant un corridor qui commence à St. Albert et se dirige vers le nord à Morinville, Legal, et plus loin, on décrit dans ce magazine une riche présence francophone et métisse dans une région agricole en plein essor. Tout au long de ce corridor on retrouve les descendants des premiers colons: les Morissette, les Péron, les Savoie, les Cunningham, les Cailloux, les Lemieux, les Chauvet, les Thibault, les Ménard et j'en passe. Ces familles, et les liens qu'elles ont les unes avec les autres, d'une communauté à l'autre, tissent des liens linguistiques et culturels riches tout le long de ce corridor francophone. C'est là notre force et notre fierté. C'est là une communauté d'intérêts.
Je fais partie du Comité culturel et touristique de St. Albert. Actuellement, nous développons et commercialisons le tourisme tout le long du corridor. Il s'agira d'une expérience éducative et historique, qui promet des retombées économiques pour la région.
La Faculté de Saint-Jean, le collège francophone au sein de l'Université de l'Alberta, a pour mission la préservation de la langue et la culture françaises, tout particulièrement en Alberta. Je suis membre du Conseil consultatif de la Faculté Saint-Jean, et je sais qu'on s'intéresse vivement au corridor historique francophone.
De plus, le conseil local des écoles publiques catholiques est chargé des écoles à Morinville et Legal. Toute la région est bien connue pour ses programmes d'immersion. Le conseil scolaire francophone régional est en pleine expansion. On construit actuellement une nouvelle école francophone à St Albert.
La ville de St Albert et les villes environnantes offrent aux citoyens une belle qualité de vie, attribuable dans une large mesure, à mon avis, à leur histoire. C'est pour cela, et en raison de nos perspectives économiques, que nombre de non-francophones sont venus s'établir ici au cours des 25 dernières années.
Ici, comme dans le reste du Canada, en raison de l'arrivée d'immigrants de tous les coins du monde, notre culture et notre langue françaises, tout comme notre culture et notre langue autochtones, sont remises en question, oubliées et même assimilées. Même lorsque le gouvernement se fait le champion du bilinguisme et du multiculturalisme, chaque communauté doit faire tout ce qu'elle peut pour protéger sa culture et sa langue.
¿ (0920)
Lors de la délimitation des circonscriptions électorales, les parlementaires, s'ils font vraiment ce à quoi ils se sont engagés, doivent tenir compte d'une «communauté d'intérêts». À mon avis, cela veut dire que les hommes, les femmes, les enfants et les familles qui ont en commun une histoire, une langue, une culture, des institutions et des organisations devraient demeurer unis.
La communauté qui existe dans les limites de la circonscription électorale actuelle de St. Albert est certainement une communauté d'intérêts. À mon avis, cette communauté d'intérêts pourra mieux s'épanouir si ses membres sont représentés par un seul député. Le corridor francophone, s'il était divisé de quelque façon que ce soit, serait affaibli. La communauté ne pourrait plus parler d'une seule voix claire à un député, et le Parlement ne pourrait plus entendre un seul député représentant la communauté francophone de la région.
Aligner St. Albert avec Edmonton, séparer St. Albert du reste du corridor francophone, c'est simplement balayer du revers de la main ce qui est peut-être la plus importante communauté d'intérêts du Canada. Je suis convaincu, cependant, que nos parlementaires éclairés protégeront les limites actuelles de la circonscription de St. Albert.
[Français]
C'est nécessaire et c'est bien smart.
Merci.
¿ (0925)
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur O'Neill.
M. O'Neill est un peu trop humble. Il est membre du conseil d'administration de la Fondation pour le patrimoine et les arts de St. Albert et ancien sous-ministre de la Culture et du Multiculturalisme pour l'Alberta.
Merci beaucoup, monsieur O'Neill.
[Français]
Nous allons maintenant demander à M. Chauvet, qui est président de l'ACFA, l'Association canadienne-française de l'Alberta, de nous adresser la parole.
Monsieur Chauvet, vous pouvez commencer.
M. Ernest Chauvet (président, Association canadienne-française de l'Alberta): Monsieur le président, chers membres du comité, ça me fait plaisir d'être ici. Je remercie M. Williams de son invitation. Au cours des cinq dernières années, j'ai pu travailler avec lui à de nombreuses reprises. J'ai cherché à le convaincre de faire partie du Parti libéral, mais je n'ai pas réussi jusqu'ici.
Le président: On y travaille!
M. Ernest Chauvet: Je dois admettre que je n'ai pas essayé de le convaincre de faire partie du Bloc québécois parce que le défi serait trop grand.
En premier lieu, j'aimerais me présenter et me situer. Je suis natif de Legal. Mon père est né à Legal. Je suis franco-albertain de plusieurs générations. J'ai été le président de la région de Centralta, qui englobe Legal, Morinville et St. Albert, durant de nombreuses années, et je suis présentement président de l'Association canadienne-française de l'Alberta.
Au départ, je veux tout simplement dire que je suis touché par la présentation de M. O'Neill de St. Albert, et je crois que lorsque j'aurai expliqué mon historique, vous allez savoir pourquoi. En tant que Franco-Albertain, mon père, qui a complété son B.A. et reçu son diplôme universitaire, a dû prendre ses cours de la 9e année à la 12e année par correspondance parce qu'il n'y avait pas d'école où l'enseignement en français était disponible. On sait tous comme c'est difficile. Moi, je n'aurais pas la discipline nécessaire pour faire quatre ans d'études par correspondance, de la 9e à la 12e année, pour compléter mon secondaire. Il faut le faire.
Plus tard, lorsque la question des écoles est venue sur le tapis, avec la mentalité qui existait en Alberta dans le temps, on considérait que le français empêchait l'apprentissage et que, pour être vraiment bien instruit, il fallait n'avoir qu'une langue. À ce moment-là, c'était l'anglais. Mon père, parce qu'il maîtrisait le français parlé et écrit et avait plus d'instruction que les gens autour de lui, a toujours défendu l'élément francophone tout en respectant l'élément anglophone. C'était vraiment un grand fédéraliste. Il avait un grand amour pour le pays. Il a toujours appuyé le français sans rabaisser l'anglais.
Ça a été une bataille difficile. Nous avons pu, comme communauté, nous séparer de la région plus grande de Sturgeon et former notre propre district de Legal, pour maintenir la langue et aussi la religion, qui était un sujet dans le temps. On parle de débat et de conviction. Alors, lorsque j'entends M. O'Neill parler ce matin, ça me touche.
Comme président de l'Association canadienne-française de l'Alberta, je me suis donné un dicton: que la francophonie soit appréciée par tous les Canadiens et Canadiennes.
Nous sommes un pays riche de deux cultures. Nous sommes le modèle mondial d'un endroit où deux cultures ont pu travailler ensemble pour faire du Canada le meilleur pays dans lequel vivre. Partout dans le monde, lorsque nous voyons deux cultures une à côté de l'autre, il y a de la chicane, de la guerre, de l'animosité. Peu importe nos chicanes historiques, au Canada, on a pu travailler ensemble comme deux peuples, comme deux cultures et devenir un modèle. Mon rêve serait que cette dualité culturelle et linguistique soit respectée partout au pays.
M. O'Neill a présenté un peu l'historique du district. Dans les quelques minutes que vous m'accordez, j'aimerais montrer que le partenariat qui a existé dans le corridor francophone de St. Albert, Morinville et Legal ne date pas d'aujourd'hui et que c'est en fonction de ça que ce comité s'est formé. Je vais présenter quelques points historiques, en faire le bilan et parler des partenariats qui ont existé, et à la fin, j'aimerais apporter quelques conclusions, dont vous avez sans doute déjà eu un aperçu lors de mon introduction.
M. O'Neill a parlé d'un corridor touristique francophone qui a été créé il y a à peu près cinq ans, lorsque j'étais président de la régionale. Cela a été fait là où on représente l'élément francophone, à St. Albert. St. Albert est la première ville agricole en Alberta qui a vraiment de l'envergure, et c'est le noyau de la francophonie.
¿ (0930)
Le premier pont bâti en Alberta fut construit à St. Albert--je ne veux pas répéter le discours de M. O'Neill--et on voit ici, au tout début, le message des maires de Legal, Morinville et St. Albert. On peut constater que ces trois villes ont travaillé ensemble pour mettre en évidence l'héritage francophone de ce coin de pays. On peut voir les musées et les peintures murales, ainsi que l'illustration des démarches qui ont été entreprises pour les réaliser.
Quelques-unes de nos murales illustrent les défis auxquels on a fait face en tant que francophones de l'Alberta. Certains d'entre vous ne savent peut-être pas que Legal est la capitale canadienne des peintures murales exécutées par des francophones. Il y a sur nos édifices environ 25 peintures murales, et nous en sommes fiers.
La murale de la station radiophonique CHFA, ouverte en 1949, illustre bien ce type de défi. Ainsi, à l'époque du débat suscité par cet événement à l'Assemblée législative de la province, on a rencontré un grand nombre d'obstacles seulement pour arriver à obtenir notre propre station radiophonique. Les temps ont changé, mais à ce moment-là, la création d'une radio francophone en Alberta équivalait pour eux à une tentative de prise de contrôle du pays par un gouvernement étranger.
Le ministre Maynard, qui était de la région--on parle aujourd'hui du nord; à l'époque, cela englobait St. Albert--, avait dit à l'Assemblée législative de l'époque que partout dans l'Empire britannique, on voyait des pays qui avaient plus d'une langue officielle et qu'on ne devait pas chercher, en Alberta, à être plus anglais que les Britanniques eux-mêmes. En cela, il invitait les membres de l'assemblée législative à s'ouvrir à la dualité linguistique du pays. Cette histoire, qui est dépeinte sur nos murales, se rapporte à la nature de notre pays.
Une autre murale illustre la cause d'un M. Lavoie, un résidant de l'Ouest canadien. Pour participer à la Deuxième Guerre mondiale, ce dernier avait voulu s'inscrire en français, selon la loi du pays. Or, il n'y avait que des documents en anglais. Il a parcouru en vain la région qui est maintenant le corridor touristique pour trouver des formulaires en français. Quelques jours seulement avant qu'on l'arrête pour ne pas avoir rempli son questionnaire--on l'a retrouvé à Vimy--, on lui a imposé une amende de 7 500 $ parce qu'il ne s'était pas inscrit parce qu'il n'avait pas les formulaires en français. Cette cause s'est rendue jusqu'en Cour d'appel de l'Alberta, où M. Lavoie a enfin eu gain de cause. Cette cause a permis de faire avancer les choses en ce qui concerne la publication des documents fédéraux dans les deux langues officielles. On parle aussi beaucoup de la cause Bugnet ou Mahé, qui porte sur les droits des minorités du pays.
Dans ce corridor, on voit St. Albert, sa formation et son développement, ainsi que d'autres aspects de Morinville.
Il y a aussi les attraits touristiques de la région Centralta. Encore une fois, on peut voir que ces trois communautés travaillent ensemble pour conserver l'histoire francophone de leur région. On voit aussi que St. Albert, Morinville et Legal travaillent à la mise sur pied d'un autre élément touristique; il s'agit de day trips. Pour la première fois, dans une région telle que celle de St. Albert, Morinville et Legal, on fait ressortir de façon claire la présence francophone dans un contexte touristique. On peut voir cela dans ce document.
Cela dit, j'aimerais vous dire que ce partenariat lie très fortement les trois communautés depuis cinq ou six ans. Il faut beaucoup de temps pour développer des liens et créer des ouvertures à l'égard du bilinguisme et de l'histoire francophone. Durant trois ans, à chaque mois, j'ai rencontré les maires et représentants des municipalités pour bâtir cette relation et affirmer notre présence. Finalement, certains progrès ont été accomplis.
Or, maintenant, des changements sont apportés aux frontières électorales. Je trouve cela décevant. On reconnaît qu'il s'agit d'un processus; néanmoins, je suis ici pour faire valoir notre point de vue.
¿ (0935)
Des efforts ont été faits dans le passé, et je vous les ai expliqués.
Une autre chose intéressante est arrivée en Alberta. Après le succès qu'a connu le corridor touristique de Centralta, d'autres régions francophones de l'Alberta ont pu s'affirmer. Dernièrement, à cause de la visibilité de cette région, ils ont pu travailler ensemble. Même le maire d'Edmonton parle maintenant de développer un quartier francophone dans la ville d'Edmonton. Il y a eu beaucoup de progrès, mais on a besoin d'un noyau de force pour donner de l'influence aux communautés environnantes.
C'est avec conviction que je vous demande de réexaminer cette décision et de chercher à garder ces municipalités ensemble. L'enjeu est énorme.
Je vous remercie. Plusieurs seront d'accord avec moi pour dire qu'il y a des concentrations de francophones au pays et qu'il ne faut pas nous séparer pour que nous soyons moins forts. Au niveau provincial, on a fait face à ce défi jusqu'à récemment, alors que des francophones de Legal ont été envoyés dans le milieu anglophone au niveau de la santé. Nous avons fait des démarches auprès du ministre Mar et nous pouvons maintenant nous faire servir en français. C'est un défi constant.
Nous vous invitons, chers membres du comité, à chercher à garder ensemble les trois municipalités du corridor francophone dont il est question ici.
Le président: Merci, monsieur Chauvet. Vous comprenez que la décision ne revient pas à ce comité. Nous faisons de notre mieux pour nous assurer que tous les organismes gouvernementaux, incluant Élections Canada, respectent la Loi sur les langues officielles. C'est le mandat du comité et c'est la façon dont nous avons abordé la question d'Acadie--Bathurst. S'il y avait des recommandations ou des rapports, ce serait dans ce sens.
[Traduction]
Monsieur Williams, voulez-vous poser la première question, s'il vous plaît? Vous disposez de sept minutes.
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais d'abord vous remercier, au nom des résidents de la circonscription de St. Albert, d'avoir invité les témoins à venir ce matin. Cela démontre bien que le Parlement du Canada, même s'il se trouve à 1 500 milles de la circonscription de St. Albert, est en fait une institution locale qui a à coeur les intérêts des citoyens de St. Albert et, évidemment, des citoyens de toutes les régions du pays. Je tiens à vous remercier et vous féliciter d'avoir organisé cette réunion ce matin qui rapproche le Parlement du peuple.
J'aimerais également féliciter nos témoins d'être venus nous rencontrer ce matin pour nous expliquer la dualité et les racines francophones importantes de la circonscription de St. Albert. Je connais M. Chauvet et M. O'Neill depuis déjà plusieurs années.
J'aime beaucoup, lorsque je peux le faire, aller à Legal le dimanche matin car on organise un petit déjeuner au Club 60 Roses une fois par mois. J'y rencontre beaucoup de gens, de bons amis. Le dimanche matin dans la petite ville de Legal, la langue utilisée est le français. C'est bien agréable. Lorsque vous vous promenez dans les rues de Legal, en Alberta, vous entendrez plus de gens parler français qu'anglais. Je pense qu'il s'agit d'un aspect merveilleux de notre patrimoine.
Comme j'ai émigré au Canada, j'apprécie peut-être plus l'importance d'assurer la protection de ce patrimoine. Le patrimoine francophone de cette région, à mon avis, revêt une importance primordiale.
Lorsque j'ai déménagé dans la région d'Edmonton en 1970, je crois que St. Albert était une petite ville de quelque 3 000 ou 4 000 habitants. Lorsque j'ai déménagé à St. Albert en 1978, cette communauté comptait quelque 27 000 résidents. Aujourd'hui, la ville de St. Albert compte environ 56 000 habitants. Il s'agit d'une banlieue d'Edmonton qui est en pleine expansion. Évidemment, des gens de toutes origines et de toutes les régions du pays et du monde entier s'établissent à St. Albert, et cette communauté francophone historique représente une proportion toujours plus petite de la société.
Morinville et Legal ont des origines francophones très importantes. En fait, il y a quelques années, les affiches à la banque étaient en français. La Banque Royale du Canada était le nom de la banque. Ce n'était pas The Royal Bank of Canada; c'était l'équivalent français. Je pensais que c'était absolument merveilleux. Dans la ville de St. Albert, le musée s'appelle le Musée Héritage Museum, pour reconnaître que la culture francophone domine car les francophones sont le peuple fondateur dans cette région.
Comme M. O'Neill l'a signalé, St. Albert a été fondée le père Albert Lacombe en 1861. Je crois qu'aux alentours de 1865 St. Albert était la plus importante communauté entre Winnipeg et Vancouver dans les Prairies. Il s'agissait d'une communauté francophone, et la seule langue qu'on y parlait à l'époque était le français.
Un bon nombre des quelque 7 000 militaires de la base d'Edmonton vivent à Morinville et à Legal. Ils viennent de toutes les régions du pays, beaucoup d'ailleurs sont du Québec, et évidemment ils sont heureux de s'établir dans une communauté dont ils partagent la langue et la culture.
Je vis dans la grande métropole de Rivière Qui Barre. C'est une petite ville où on retrouve une trentaine de maisons. Je vis dans les banlieues qui se trouvent à trois milles de l'extérieur de la petite ville de Rivière Qui Barre. Comme son nom l'indique, il s'agit vraiment d'une communauté francophone. Mes amis dans cette région sont les descendants, les petits-enfants et les arrière-petits-enfants de ceux qui ont fondé cette communauté. Ils vivent dans les terres qui ont été colonisées autour des années 1880. Il s'agit d'une collectivité agricole et j'ai beaucoup apprécié connaître ces gens au cours des 15 ou 20 dernières années.
J'aimerais également signaler, monsieur le président, car je crois qu'il s'agit probablement d'une situation unique dans les Prairies, que nous avons un conseil scolaire catholique public, et non pas séparé, qui représente St. Albert, Morinville et Legal, le corridor francophone qui s'étend sur environ 25 milles du nord au sud, et qui se trouve au sein de la circonscription actuelle de St. Albert.
¿ (0940)
Si vous le permettez, monsieur le président, j'aimerais demander à nos deux témoins ce qu'il adviendra, d'après eux, de la culture francophone compte tenu de l'expansion fort rapide de St. Albert et également de Morinville et de Legal, qui sont deux banlieues de St. Albert en pleine expansion? La culture francophone sera-t-elle minée? Pensez-vous que les choses seront pires si l'on sépare St. Albert de Morinville et de Legal et la circonscription de Westlock—St. Paul, associant St. Albert à Edmonton pour créer la circonscription d'Edmonton—St. Albert? Est-ce que cela créerait plus de problèmes pour la communauté francophone qui cherche à préserver ses racines et à s'épanouir? Que pensez-vous de l'attitude du Parlement du Canada dont la responsabilité est de représenter les commettants et les communautés d'intérêts, comme vous l'avez déjà signalé? Est-ce que cela minera la capacité d'un député de représenter les communautés francophones si cette petite région est représentée par deux députés?
M. John O'Neill: J'imagine que vous connaissez mieux que moi les répercussions que ce changement aura sur notre communauté s'il se réalise.
Je ne peux pas m'empêcher de penser que, si l'on prend St. Albert et qu'on l'intègre à la ville d'Edmonton en la coupant de cette autre région, on va certainement freiner la croissance et les perspectives de croissance du corridor francophone. On va certainement l'entraver. J'imagine très bien qu'un député de St. Albert—Edmonton soit très préoccupé et distrait par ce qui se passe à Edmonton aux dépens de l'autre partie de la circonscription car mon expérience à St. Albert m'a appris qu'il y avait là deux caractères et deux identités bien distincts. On veut ajouter un groupe de personnes différentes et présentant des caractéristiques différentes de celles de la ville de St. Albert, donc on va faire disparaître une partie de la cohésion du groupe actuel.
L'avantage, comme je pense l'avoir dit dans mon exposé, c'est que les gens qui vivent actuellement dans le corridor francophone ont un interlocuteur auquel ils peuvent s'adresser en bloc pour défendre la question à l'ordre du jour. Or, ce qui va arriver à l'avenir, c'est qu'ils vont être divisés. Une partie de ce corridor va être intégrée à un autre secteur, va passer dans le domaine d'un autre député. Cela va changer beaucoup les choses, peut-être pas à court terme, mais certainement à long terme.
Comme je l'ai dit, l'une des principales raisons pour lesquelles je vis à St. Albert... Je suis un Montréalais d'origine. Je retourne régulièrement à Montréal, mais je suis heureux de revenir à St. Albert parce que j'y trouve une identité qui m'évoque beaucoup Montréal. Mais il y a aussi cette autre région, la région agricole, qui englobe Legal et toute cette zone, qui fait actuellement partie de la circonscription. D'une certaine façon, si les informations que je vais lire dans le journal à propos de notre nouvelle circonscription qui n'incorpore plus cela, j'aurai perdu quelque chose. J'aurai perdu une forme d'attachement à St. Albert.
Je constate aussi qu'il y a une sorte de renforcement dans le couloir, peut-être parce qu'on se rend compte qu'il est menacé ou parce que les rangs ont commencé à se resserrer avant même que le défi de ce changement proposé n'intervienne.
M. Chauvet a parlé des diverses activités en cours qui contribuent à unir ces trois régions. D'une manière ou d'une autre, tout cela va disparaître. Actuellement, je constate un renforcement et je ne voudrais surtout pas qu'on affaiblisse ce mouvement.
¿ (0945)
[Français]
Le président: Monsieur Chauvet.
M. Ernest Chauvet: Votre question a plusieurs dimensions, monsieur Williams.
Lorsqu'on regarde la croissance de la présence de la francophonie dans la région, on voit qu'il y a plusieurs facteurs, entre autres l'immigration, les politiques gouvernementales, les écoles, etc. Ce sont tous des facteurs qui y contribuent.
La réponse à cette question se trouve dans l'attitude des gens. Pour que la francophonie puisse s'épanouir, on doit créer un climat où la majorité anglophone puisse nous accueillir, nous voir comme une valeur ajoutée et voir les richesses que nous avons à offrir. De notre côté, nous devons être sensibles à cette approche. Par ailleurs, lorsque nous faisons des gains, comme nous venons d'en faire avec trois municipalités qui travaillent ensemble et qui nous reconnaissent--ce qui explique pourquoi je suis touché par le discours de M. O'Neill--et qu'ensuite le gouvernement fédéral défait ces partenariats qui ont été créés difficilement, parfois dans des situations hostiles où on a dû calmer les esprits, c'est décevant. On ne sait pas quoi dire. On a dépensé trop d'énergie pour qu'on nous divise sans réfléchir à l'aspect démographique de la situation.
Je ne sais que dire, sinon qu'on travaille très fort pour bâtir des partenariats et qu'on est très déçus lorsque le fédéral les défait. Je vous dirai franchement que certains membres de la communauté francophone m'ont demandé pourquoi j'allais au Parlement, alors que c'est un député de l'Alliance canadienne qui fait la proposition de nous garder dans cette circonscription.
¿ (0950)
Le président: Je vais vous interrompre. On essaie de ne pas faire de partisanerie ici et je vous ferai remarquer qu'on réussit passablement bien. Je ne veux pas qu'on brouille les cartes avec de la partisanerie.
M. Ernest Chauvet: D'accord.
Monsieur le président, ce n'est pas une question de partisanerie. Dans ce coin de pays, il y a eu différents partis au cours des années: la Parti libéral, le Parti progressiste-conservateur et l'Alliance canadienne. Je ne voulais pas faire ressortir ce point pour des raisons partisanes; j'étais motivé par notre conviction qu'il faut continuer à travailler ensemble. Mon intention n'était pas partisane. Je vous remercie.
Le président: Merci.
Madame Thibeault.
Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Merci, monsieur le président. Bonjour, messieurs.
Pour commencer, je veux remercier M. Williams qui vous a amenés ici ce matin. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne suis pas surprise, monsieur Williams, que vous ayez posé un tel geste.
Parlons de la délimitation de la circonscription. On sait qu'Élections Canada souhaitait que la population de chaque circonscription soit le plus près possible de ce qu'on appelle le quotient électoral. Pour l'Alberta, le quotient électoral est de 106 000, d'après mes recherches. Je vois que la population de St. Albert, en 1996, était de 105 000. Alors, quel est le problème? Pourquoi a-t-on décidé, à un moment donné, de changer tout cela, puisque vous êtes à l'intérieur du quotient, d'après moi? Est-ce pour équilibrer les circonscriptions environnantes, d'après vous?
M. Ernest Chauvet: Je ne peux pas vous répondre. Je dis simplement que nous voulons rester unis comme francophones. C'est tout ce que je veux.
Mme Yolande Thibeault: Si je mentionne cela, c'est que cela va évidemment affecter les limites de plusieurs circonscriptions avoisinantes. Vous travaillez peut-être avec ces gens-là pour défendre votre cause, comme cela a été fait au Nouveau-Brunswick, par exemple. Vous ne le faites pas. D'accord.
J'ai aussi été surprise de voir que 93 000 des 105 000 électeurs de la circonscription de St. Albert sont francophones. Excusez-moi, j'ai lu à l'envers. Alors, il y a 3 700 francophones. C'est quand même une très bonne proportion.
Vous parlez des commissions scolaires dans votre corridor. Combien d'écoles cela représente-t-il? Est-ce que ce sont des écoles publiques?
[Traduction]
M. John O'Neill: Assez curieusement, à St. Albert—et je crois que c'est un cas unique dans tout le Canada—les écoles catholiques sont considérées comme des écoles publiques parce que quand les conseils scolaires ont été mis sur pied à l'origine, les seules écoles publiques étaient des écoles canadiennes-françaises et les gens étaient catholiques. Les deux ne vont pas nécessairement ensemble, mais c'était le cas à l'époque. C'est pour cela que ce sont des écoles publiques. En fait, les écoles catholiques ont proposé au conseil scolaire protestant de devenir public en permettant aux écoles catholiques de demeurer distinctes. Mais pour une raison quelconque, ils n'ont pas accepté.
Vous vouliez savoir combien d'écoles il y a? M. Chauvet est mieux placé que moi pour vous répondre.
[Français]
M. Ernest Chauvet: Je m'excuse, mais je ne peux pas répondre ainsi à brûle pourpoint. Je sais qu'en ce qui concerne le système francophone qui, dans notre cas, est catholique et public, les villes de St. Albert, Morinville et Legal sont regroupées.
Pour ce qui est du nombre d'écoles séparées qui existent du côté protestant, je peux dire que Legal et Morinville font partie du système catholique de St. Albert, mais je ne peux pas vous dire combien d'écoles il y a. Je sais que c'est une zone qui comporte la plus haute concentration d'élèves en immersion en Alberta, ce qui reflète l'attitude de la population anglophone. Mais je n'ai pas les chiffres.
[Traduction]
M. John O'Neill: Je pense qu'il y a environ huit écoles catholiques dans ces régions, et cela inclut Legal et Morinville. On construit actuellement une école entièrement française. Il y avait au départ une plus petite bâtisse, mais on construit actuellement cette école. Je crois qu'il y en a une à Legal, entièrement française aussi, avec son conseil scolaire français. Pour ce qui est des écoles non catholiques à St. Albert, je ne connais pas bien les autres parties de cette région. Je pense qu'il y a peut-être cinq écoles non catholiques.
¿ (0955)
Mme Yolande Thibeault: C'est très intéressant.
[Français]
M. Ernest Chauvet: Il y a environ 1 500 élèves en immersion, si mes souvenirs sont exacts. Il y a deux écoles francophones: une à St. Albert et une autre à Legal.
Mme Yolande Thibeault: Merci beaucoup. Je vais laisser la parole à quelqu'un d'autre, mais je reviendrai si c'est possible.
Le président: Monsieur Sauvageau.
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Bienvenue, messieurs, et merci d'être là. Je vais joindre ma voix à celle de Mme Thibeault pour souligner l'initiative de mon collègue et ami de St. Albert, M. Williams, qui se préoccupe, comme certains l'ont fait dans d'autres régions, de la délimitation des circonscriptions électorales afin de tenir compte du fait français.
Merci, monsieur O'Neill, de m'avoir appris que le père Lacombe était originaire de Saint-Sulpice qui, en vertu de la nouvelle délimitation au Québec, fera partie de ma circonscription électorale, si je suis réélu, bien sûr; il ne faut pas être trop présomptueux. Il y a donc quelque chose qui nous unit davantage.
J'aimerais vous poser quelques questions. D'abord, j'aimerais savoir ce qui a été fait dans le but de faire respecter le corridor francophone et la circonscription électorale de St. Albert. Mme Thibeault a abordé ce sujet plus tôt, mais j'aimerais aller un peu plus dans les détails.
Lorsque la carte de votre circonscription a été présentée à votre communauté, est-ce que l'Association canadienne-française de l'Alberta a déposé un mémoire? Je sais que M. Arès de la FCFA vient de l'Alberta. Est-ce que vous avez déposé un mémoire avec la FCFA? Est-ce qu'Edmonton accueille bien l'inclusion de St. Albert? Je ne veux pas faire de partisanerie, mais je me demande si le fait que ce soit plus libéral aide quelqu'un, ou si le fait que ce soit plus allianciste aide quelqu'un d'autre. Existe-t-il un lien de cet ordre? Qu'est-ce qui a été fait avant qu'on en arrive à la réunion d'aujourd'hui? C'est ma première question.
Voici ma deuxième question. Monsieur O'Neill, vous avez dit que face à la menace d'une séparation, les résidants du corridor francophone s'étaient davantage unis pour démontrer leur solidarité. J'aimerais savoir comment, à d'autres égards, cette solidarité s'est manifestée. J'arrive de la circonscription de M. Simard, où se trouve une société de développement économique des francophones absolument dynamique. C'est un modèle à suivre. Est-ce qu'il y a des facteurs autres que touristiques qui unissent la communauté francophone de ce corridor et de quelle façon la francophonie s'y affiche-t-elle?
M. Williams nous parlait plus tôt de la signalisation routière et de la publicité. J'aimerais que vous nous parliez de cela. Il y a, en fait, deux volets à ma question. Qu'est-ce qui a été fait pour préserver cette circonscription électorale et qu'est-ce qui a été fait pour que des liens soient créés au sein de cette communauté du corridor francophone?
M. Ernest Chauvet: Je vais commencer par ajouter à ce que M. O'Neill a dit tout à l'heure. C'est un district à propos duquel il ne peut pas y avoir de partisanerie. On a eu des changements de parti au cours des années, que ce soit au fédéral ou au provincial. Je ne crois pas qu'il devrait y avoir un effort de ce côté-là. Je ne perçois pas les choses de cette façon. Pour moi, tout ce qui compte, c'est qu'on reste ensemble.
Pour ce qui de l'approche du fédéral concernant Edmonton, M. O'Neill connaît mieux que moi la situation. Au point de vue municipal, je crois que les villes des régions environnantes qui veulent s'amalgamer verraient peut-être cela favorablement de leur côté, parce que ce serait une étape dans le processus visant à englober une ville environnante dans la grosse ville. C'est peut-être le cas. Ce n'est pas une question de partisanerie politique, mais cela pourrait faire partie de l'orientation de la ville, dont on a discuté au cours des dernières années.
Au point de vue de la francophonie, comme président de l'association, je n'ai pas voulu m'attarder à ces questions à moins d'être invité par les régions. Je ne défendrai pas une région au palier provincial à moins qu'on ne me le demande. Dans ce cas-ci, à la suite de l'invitation de M. Williams, j'ai vérifié et j'ai vu que c'était dans l'intérêt des maires des municipalités et de l'Association canadienne-française de la région. Je suis venu les défendre parce que c'est dans leur intérêt. Mais on ne s'attarde pas en premier lieu à cela. Ce n'est pas une chose à laquelle on s'attarde au plan provincial.
Mais tout dépend de la situation. Actuellement, le nouveau président de la région est très sensibilisé au point de vue politique. L'ancien président de la région ne l'était pas. Ce sont des facteurs naturels qui existent dans une association bénévole telle que la nôtre.
Donc, historiquement, on n'a pas présenté de mémoires et on ne s'est pas attardés sur la question à cause du processus et des personnes qui étaient en poste à l'époque.
Je pense que cela répond à votre importante question. Sur le plan provincial, on a participé à différentes table, surtout au point de vue de la santé, et cela nous a fait du tort.
À (1000)
[Traduction]
M. John O'Neill: À Edmonton, on serait sans doute très heureux de cette nouvelle formule parce qu'on voudrait inclure tout ce qui trouve dans un rayon de 100 milles des limites actuelles de la ville, un peu comme à Toronto. Je pense que Montréal a aussi une région métropolitaine.
Au sujet de la l'affichage, nous avons des affiches en français à St. Albert, de même que des plaques de rues en anglais, etc. Nous avons même des affiches en métis dans certaines des rues de St. Albert. Je ne devrais pas dire « nous avons même », puisque ce sont eux qui étaient là les premiers et qui ont mis des affiches en métis.
Comment travaillons-nous ensemble? Je sais que l'agent du développement économique à St. Albert travaille avec les agents du développement économique d'autres villes pour trouver des occasions de collaboration dans tous ces domaines.
Il est question à l'heure actuelle que les trois groupes se mettent ensemble pour construire un centre récréatif, si bien que nous aurons un véritable lieu de rassemblement communautaire. Nous espérons que ce projet va se concrétiser dans un avenir rapproché.
Voilà l'essentiel de mon rapport.
[Français]
M. Benoît Sauvageau: On a le profil linguistique de la circonscription dans un document qui a été déposé par le service de recherche parlementaire. Vous avez parlé d'un boom démographique dans la région de St. Albert. Si on maintenait le statu quo tel que vous le demandez, est-ce qu'on respecterait le coefficient électoral par comté? En d'autres termes, est-ce que votre proposition est acceptable dans les faits?
M. Ernest Chauvet: Si je comprends bien, vous parlez de l'élément francophone, du pourcentage de...
M. Benoît Sauvageau: Non. Je ne connais pas St. Albert, mais avec le boom démographique qu'il y a, si on maintient les limites actuelles de la circonscription de M. Williams, est-ce qu'on aura 148 000 électeurs? Si oui, cette proposition mourra de sa belle mort parce qu'on dépasse le nombre admis d'électeurs dans ce comté. Si on accepte le statu quo, est-ce qu'on respectera les conditions de délimitation des circonscriptions électorales?
M. Ernest Chauvet: Je pense que M. Williams serait mieux placé pour répondre à cette question. Pour ma part, je ne peux pas vous répondre.
M. Benoît Sauvageau: En ce qui a trait au délai, je crois que la Commission de délimitation des circonscriptions électorales peut accepter un délai supplémentaire ou une explication comme la vôtre. Cependant, même si nous voulons appuyer une proposition comme celle que vous faites pour répondre à la réalité du fait français en Alberta, dans ce corridor, il faut que cette proposition réponde aux critères d'admissibilité. Je pense qu'on se comprend bien à cet égard. Autrement dit, si le nombre d'électeurs admis est dépassé, même si nous voulons appuyer cette proposition en raison du fait français, nous nous trouvons automatiquement disqualifiés. C'est à cette question que j'aimerais que vous répondiez.
M. Ernest Chauvet: Je crois que le facteur le plus important est celui de la communauté de Legal. Il faut avoir 2 000 habitants. Quel est l'impact de cela sur l'ensemble? Je ne le sais pas. C'est dans la ville de St. Albert qu'il y aura l'impact le plus important. Mais pour nous, c'est la question des 2 000 habitants qui est importante. Nous devons nous assurer que ça soit ajouté au reste.
Je ne réponds pas complètement à votre question, mais je vous explique ce que signifient 2 000 habitants dans l'ensemble.
À (1005)
Le président: C'est votre dernière question, monsieur Sauvageau.
M. Benoît Sauvageau: Si j'ai bien compris, dans votre proposition, vous nous demandez d'appuyer le statu quo, c'est-à-dire le respect de la circonscription actuelle. Est-ce qu'on se comprend là-dessus? D'accord. On va ensuite vérifier si cela répond aux critères du nombre et ainsi de suite.
Le président: Avant de donner la parole à M. Simard,
[Traduction]
J'aimerais demander à M. Williams s'il ne pourrait pas aider un petit peu le comité. Pourriez-vous nous donner une idée approximative de Legal, de Morinville et de Rivière Qui Barre? Cela pourrait nous aider dans nos délibérations.
M. John Williams: La population de la ville de Legal est d'environ 1 200, celle de Morinville est d'environ 8 000 et celle de St. Albert est de 56 000 ou 58 000 à peu près. Morinville et Legal se trouvent dans le comté de Sturgeon, dont les limites sont décrites, si je ne m'abuse, dans le document qui a été présenté par la Bibliothèque du Parlement et ce comté est majoritairement francophone. Il comprend le petit hameau de Rivière Qui Barre, qui compte peut-être 100 ou 150 habitants; la ville de Villeneuve, qui compte peut-être 200 ou 300 habitants; et la région agricole, dont la population est principalement constituée des colons autochtones et de leurs familles. Le comté de Sturgeon aurait sans doute une population totale de quelque 15 000 habitants. Il y a donc 15 000 personnes dans le comté de Sturgeon et il y en a 8 000 ou 9 000 dans Legal, ce qui donne environ 25 000 personnes dans Sturgeon, Morinville et Legal—environ 25 000 personnes.
[Français]
Le président: Thank you very much.
Monsieur Simard.
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Merci, monsieur le président. Bonjour, messieurs.
J'aimerais surtout qu'on fasse une mise en situation. Avez-vous déjà demandé à la commission pourquoi elle avait fait cela, et lui avez-vous demandé s'il lui était possible de changer d'idée?
[Traduction]
M. John O'Neill: Tout ce que je peux vous dire en réponse, c'est que j'ai ici une lettre dans laquelle le maire fait état d'une rencontre qu'il a eue avec la Commission de délimitation des circonscriptions fédérales en octobre 2002, où il avait bien insisté sur l'importance de la communauté d'intérêts, et dit espérer une décision favorable de la commission.
Je voudrais revenir très brièvement à quelque chose qu'on a dit juste avant. Je suis peut-être un peu naïf, mais il me semble que la communauté d'intérêts, c'est beaucoup plus que les nombres. Si l'on décide de se débarrasser d'une communauté d'intérêts simplement à cause des nombres, surtout quand la marge n'est pas très grande, je crois que c'est une grave erreur. Excusez-moi pour ce commentaire.
[Français]
M. Raymond Simard: La rencontre avec le maire a eu lieu avant que les changements ne soient proposés, n'est-ce pas?
M. John O'Neill: Oui.
M. Raymond Simard: Avez-vous eu une rencontre après que les changements aient été proposés pour faire appel de la décision?
M. John O'Neill: Je crois que non. Monsieur Williams, le savez-vous?
[Traduction]
Le maire a-t-il rencontré...
Le président: Je m'occupe de lui, monsieur O'Neill.
[Français]
Monsieur Simard, voulez-vous répéter votre question?
M. Raymond Simard: En effet, c'est peut-être M. Williams qui peut y répondre. Je veux savoir si les gens de la communauté ou M. Williams sont intervenus auprès de la commission pour faire appel de la décision.
[Traduction]
M. John Williams: Oui, monsieur le président, je suis intervenu. J'ai présenté un exposé à l'audience publique du 10 octobre dernier, si je ne m'abuse, et j'ai expressément parlé du corridor francophone et de la communauté d'intérêts pour demander qu'on en tienne compte. Cette idée a été rejetée dans le rapport qui a été déposé par le Président à la Chambre des communes. J'ai donc sollicité l'appui de la communauté francophone pour poursuivre les démarches.
[Français]
M. Raymond Simard: Voici ma deuxième question.
Si je comprends bien les nouvelles frontières proposées, les villes de Morinville et de Legal seraient incorporées à la ville de St. Paul. Est-ce exact? Oui?
J'ai une nièce qui est avocate et qui travaille à St. Paul. Elle travaille beaucoup en français. Étant donné que St. Albert croît à un rythme assez incroyable et que les nouveaux habitants sont en majorité non francophones, avez-vous envisagé la possibilité d'être regroupés avec St. Paul?
M. Ernest Chauvet: J'y ai réfléchi avant même d'accepter la demande de M. Williams. Je connais assez bien la démographie et je me suis arrêté sur cette question.
Où est-ce que j'en suis? Pour que la francophonie soit appréciée par tous les Canadiens et, en Alberta, par tous les Albertains, il est parfois nécessaire de créer une influence sur les villes. St. Paul n'aura pas d'influence sur la ville d'Edmonton ou de St. Albert, car ces villes sont trop loin. Ce n'est pas parce qu'elles n'apprécient pas la communauté. Dans le cas de Legal, Morinville et St. Albert, il y a trois communautés qui se regroupent pour faire reconnaître leur identité. Cela a eu un impact sur la capitale et même sur l'Assemblée législative, selon ce que j'ai vu ces derniers temps.
Je me suis donc arrêté sur cette question, et c'est en fonction de cela que j'ai accepté la demande de M. Williams. C'est cela, la raison. C'est une approche de sensibilisation. Comment va-t-on s'y prendre? Je crois qu'on réussit mal à faire respecter la francophonie avec cette méthode-ci.
À (1010)
M. Raymond Simard: Normalement ou souvent, les villes ont des choses en commun. Par exemple, est-ce que St. Paul a des choses en commun avec Morinville, Legal et St. Albert, ou si ces villes sont plus éloignées et plus indépendantes?
M. Ernest Chauvet: Elles sont plus indépendantes. On a des choses en commun. On a des racines communes. On a eu des échanges de familles au cours des années. Les gens de la communauté francophone d'Alberta, surtout ceux qui sont natifs de la province, se connaissent bien. C'est une question d'impact, monsieur Simard.
J'ai enseigné et j'ai été directeur d'école à Plamondon, qui fait partie du nouveau district. Je suis allé à l'école à St. Paul durant quatre ans. Je suis bien sensible à la question et j'ai réfléchi avant de faire cette présentation aujourd'hui.
M. Raymond Simard: Tout dernièrement, nous avons eu un exemple concret de l'importance que les communautés d'intérêts soient représentées par un parlementaire. Je représente Saint-Boniface depuis 10 mois, mais je suis natif de Ste. Anne, qui est dans la circonscription de Provencher. C'est une circonscription où les minorités n'ont jamais pu avoir 50 p. 100 des voix. C'était frustrant pour les gens de notre communauté parce que leurs votes ne comptaient jamais. Par contre, on avait quand même beaucoup d'influence en tant que communauté minoritaire.
On a vu la semaine dernière le représentant de cette circonscription voter contre son parti en faveur d'une motion qui favorisera peut-être les francophones. C'est un exemple concret de l'importance de la personne qui vous représente.
J'apprécie beaucoup votre position et je pense qu'un peu comme dans Provencher, vous avez de l'influence avec M. Williams. Évidemment, il respecte la communauté francophone, et c'est très important.
Merci d'être ici.
Le président: Merci, monsieur Simard.
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.
Ça me fait plaisir de vous voir aujourd'hui aux Comité des langues officielles et de voir que vous avez accepté de venir nous rencontrer.
Sachez que je viens d'une communauté francophone du Canada. Le gouvernement fédéral vient de publier le plan Dion et dit qu'il va dépenser 750 ou 850 millions de dollars pour donner aux minorités la possibilité de se faire représenter. Les mots me manquent, mais je comprends totalement la situation de votre région.
Monsieur Chauvet, pendant que faisiez votre présentation, j'ai vu que vous preniez les choses à coeur, et je peux le comprendre. Pour ma part, je viens de la région de la Péninsule acadienne et je représente les Acadiens. Ce qui se passe chez vous se passe aussi chez nous.
Si vous ne l'avez pas déjà fait, je vous recommande de faire une plainte à la commissaire aux langues officielles. J'ai ici le rapport de la commissaire aux langues officielles sur la circonscription d'Acadie--Bathurst, que je vais vous donner. Elle y dit que notre plainte est fondée et que la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales a une responsabilité en vertu de la partie VII et de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles et doit prendre en considération la communauté d'intérêts.
Comme vous l'avez dit dans vos commentaires, les gens d'une communauté mettent parfois un certain temps à s'adapter. Je peux dire que chez nous, les francophones de la Péninsule acadienne et les gens de Bathurst ont appris à travailler ensemble. Maintenant qu'ils ont appris à travailler ensemble, on les dérange et on veut les séparer. Je trouve que c'est horrible, inacceptable et monstrueux, et je pèse mes mots.
Pour moi, c'est une nouvelle déportation des Acadiens. On veut déporter les Acadiens d'une manière légale. Comme chez vous, les francophones ont appris à travailler avec les anglophones, et les deux communautés sont capables de travailler ensemble à des dossiers pour se faire reconnaître davantage. On veut les diviser en utilisant des chiffres plutôt que des considérations humaines. On se base sur des nombres qui ne représentent pas ce que les gens ressentent.
Quand les gens voudront se mettre ensemble pour aller voir leur député fédéral, ils devront rencontrent deux députés. Ils seront peut-être pris avec des députés de différents partis qui ne s'entendent même pas. Comment pourra-t-on travailler à des dossiers quand il y a toutes sortes de considérations politiques? Je trouve que c'est monstrueux et inacceptable pour les régions francophones. Je pèse beaucoup mes mots et je n'ai pas honte de les dire en tant que représentant d'une région francophone.
Vous m'avez entendu m'exprimer clairement, et j'aimerais savoir si vous voyez les choses de la même manière que moi.
Merci.
À (1015)
M. Ernest Chauvet: J'aimerais vous faire remarquer que le nouveau président régional est un gars de La Broquerie, dans la région de Saint-Boniface. Le connaissant, je m'attends à ce qu'il fasse la démarche et qu'il la fasse au provincial aussi. C'est important pour la communauté.
Je reçois aussi demain les champions ministériels des langues officielles à Legal. Je les reçois demain chez moi. Je suis sûr que je vais avoir la chance de faire part de notre situation à ces gens.
Merci pour votre intervention. Vous vous êtes fait brasser en Acadie. Vous avez eu votre part.
[Traduction]
M. John O'Neill: Eh bien, monsieur, j'aurais aimé avoir pu m'exprimer avec autant de clarté et de fermeté que vous l'avez fait sur cette question.
M. Yvon Godin: J'aimerais vous poser une question directe. Vous travaillez dans la communauté, vous travaillez pour le patrimoine, et vous savez que, parce que vous travaillez dans la communauté, vous devez vous démener pour essayer d'obtenir des programmes du gouvernement fédéral. Ma question est simple : ne vaut-il pas mieux travailler avec un député qu'avec deux députés, où il y aurait danger que...? Il y aurait effectivement un danger. Nous vivons en régime démocratique; nous devons en accepter les conséquences, et je crois en la démocratie, mais si vous vous trouvez à avoir deux députés qui ne sont pas du même parti dans notre régime démocratique canadien, il sera plus difficile de faire avancer vos projets, de les faire avaliser par le ministre et approuver par le gouvernement.
M. John O'Neill: Je suis en effet convaincu de cela.
M. Yvon Godin: Merci.
[Français]
Le président: Merci. Permettez-moi de poser quelques questions.
Premièrement, j'aimerais expliquer ce que sont les champions, que M. Chauvet vient de mentionner, aux gens qui nous écoutent ou qui ne sont pas au courant. Le gouvernement du Canada a institué dans chaque ministère et agence un poste de champion des langues officielles. Ce champion est une personne à un niveau assez élevé; c'est habituellement un sous-ministre adjoint. Cette personne a la responsabilité de voir à l'application de la Loi sur les langues officielles. Depuis deux ans, je crois, ces gens ont l'habitude de se réunir deux fois par année dans des régions du pays. Si j'ai bien compris, c'est ce groupe de gens qui va se rencontrer à Legal. Ce serait une belle occasion de faire valoir à ces gens la situation dont nous discutons ce matin, monsieur Chauvet.
Je voudrais maintenant explorer un peu avec vous, monsieur Chauvet and Mr. O'Neill, cette notion du corridor francophone de St. Albert, Morinville et Legal, auquel on a fait allusion à plusieurs reprises.
Si j'ai bien compris, il y a un conseil scolaire qui regroupe ces trois communautés. Est-ce que ce conseil scolaire regroupe également d'autres communautés?
À (1020)
M. Ernest Chauvet: Pour ce qui est du côté francophone, c'est le même conseil scolaire. Du côté public, il y a le Greater St. Albert Catholic Schools.
[Traduction]
M. John O'Neill: Oui.
[Français]
Le président: Donc, il y a déjà une cohésion au niveau du conseil scolaire.
M. Ernest Chauvet: Oui.
Le président: J'aimerais savoir si j'ai bien compris.
[Traduction]
Je ne sais pas trop si c'était dans le témoignage de M. Williams ou dans celui de M. O'Neill qu'il était question d'un centre culturel communautaire qui a déjà été construit ou qui serait construit pour servir ce corridor. Quelqu'un peut-il nous en dire un peu plus à ce sujet?
M. John O'Neill: C'est un projet qui a été lancé il y a déjà un certain temps. Il s'agit d'un centre récréatif très coûteux qui compterait des terrains de soccer, peut-être une patinoire intérieure, et bien d'autres installations sportives et récréatives.
La collectivité de St. Albert est d'avis qu'elle ne peut pas construire le centre toute seule. Les autres collectivités des alentours, comme Rivière Qui Barre, dont il n'est pas fait mention très souvent, et les réserves indiennes aimeraient également que le projet se concrétise. Certaines parties travaillent déjà ensemble afin d'essayer de réunir les fonds nécessaires pour aménager un centre récréatif. En fait, d'après les indications, le centre serait construit à l'extérieur du territoire de St. Albert, dans les limites du comté voisin, qui fait partie du corridor francophone. La collaboration existe déjà, et je ne crois pas que le centre pourra être construit par une entité sans la participation des autres partenaires.
[Français]
M. Ernest Chauvet: Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais ajouter qu'au cours des dernières années, les quatre municipalités, qui incluent la municipalité de Sturgeon, s'étaient mises d'accord pour annoncer la région dans les deux langues. Cela avait donné le nom Les Plaines Manawan /Manawan Plains. Je dois admettre avec un peu de regret qu'après la dernière élection municipale, cette idée avait un peu reculé avec le changement à la mairie de la ville de St. Albert. Cependant, il y a parfois un recul, mais ce n'est pas fini. Quand il y a un recul, si on lâche, c'est fini. Ce n'est pas ce qu'on a appris de nos frères acadiens. On ne lâche pas quand il y a un recul. Mais au point de vue municipal, un partenariat s'est développé au cours des dernières années.
Le président: Merci.
J'ai une autre question au sujet de ce corridor. Depuis un certain temps, au niveau canadien, on fait des efforts pour créer des corridors touristiques anglophones au Québec et francophones à l'extérieur du Québec. Ce que vous mentionnez est-il lié à cette notion de grands corridors touristiques, monsieur Chauvet? C'est en fonction de la population francophone dans ce coin-là, n'est-ce pas?
M. Ernest Chauvet: Oui, et il y a là du timing. On a développé un couloir touristique francophone parallèlement à ce qui s'est fait dans la région de Saint-Boniface. En Alberta, on a un couloir plus grand, qui s'étend de St. Paul à Bonnyville, Plamondon et d'autres villes.
Le président: J'ai eu l'occasion de participer, à un moment donné, au festival francophone d'Alberta. Malheureusement, cette année-là, il avait fait tellement froid que c'en était décourageant. Mais si je comprends bien, il a lieu chaque été, et souvent dans cette région. Est-ce que j'ai raison de penser cela?
M. Ernest Chauvet: Oui. Au cours des quatre dernières années, il y en a eu deux: une fois à St. Albert et l'autre fois à Morinville-Legal.
Le président: . D'accord. Si j'ai bien compris les témoignages qu'on a entendus ce matin, le cachet francophone de ce corridor a une influence sur l'immersion, parce qu'il y a là le plus haut taux d'immersion per capita en Alberta.
À (1025)
M. Ernest Chauvet: Oui.
Le président:
Dans le rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales de l'Alberta, qui a été déposé à la Chambre il y a quelques jours, il y a un passage qui est assez flagrant et que je cite. C'est au sujet d'Edmonton et c'est dans la partie III.
La commission rejette l'utilisation étroite de l'identité ethnique pour délimiter les circonscriptions pour deux raisons: |
La commission s'oppose par principe à l'idée de fixer les limites en fonction des ethnies ou des classes. Les élus doivent plutôt représenter et desservir tous les Canadiens vivant dans leur circonscription. |
Je me rends compte que je cite ce commentaire hors contexte, mais il me semble aller catégoriquement à l'encontre de la notion de communauté d'intérêts. C'est pour cela que le comité a accepté d'emblée la demande du député Williams de vous recevoir ce matin pour étudier un peu cette question. On parle ici de deux circonscriptions, mais il y en a peut-être d'autres au pays où, de toute évidence, les commissions ne tiennent pas compte de cet aspect de la communauté d'intérêts.
Pour ma part, je suis convaincu que la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales de l'Alberta devrait refaire ses devoirs en fonction des consignes qui lui avaient été données par le directeur général des élections et par la commissaire aux langues officielles.
Je vous remercie de votre présentation de ce matin. Il y a d'autres collègues qui veulent vous poser des questions, mais je pense que votre message est très clair et très bien compris.
[Traduction]
Je n'ai plus de questions pour vous, monsieur O'Neill, mais je tiens à vous remercier sincèrement de votre participation à notre réunion de ce matin—en mon nom, en tout cas.
Je ne peux pas parler au nom des autres tant que nous n'aurons pas eu l'occasion d'analyser les témoignages et d'en faire la synthèse en vue peut-être de présenter un rapport, mais pour ma part, je suis persuadé que les membres de la commission en Alberta ont négligé de tenir compte de la communauté d'intérêts dans le cas qui nous occupe.
Merci.
M. John O'Neill: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, monsieur le président, je tiens à préciser que le député qui représente la ville de St. Albert à l'Assemblée législative de l'Alberta est très favorable au corridor, il est en tout cas très favorable à ce qui se passe ici aujourd'hui et à l'exposé que j'ai présenté.
Le président: Merci, monsieur.
Nous allons maintenant avoir un deuxième tour. Monsieur Williams.
M. John Williams: Merci beaucoup.
En vertu de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles, le gouvernement fédéral s'engage :
à favoriser l'épanouissement des minorités francophone et anglophone du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. |
D'après vous, la Commission de délimitation des circonscriptions électorales s'acquitte-t-elle de ce mandat énoncé dans la Loi sur les langues officielles en mettant St. Albert dans une circonscription et Morinville-Legal dans une autre?
M. John O'Neill: Je ne crois pas qu'elle réponde à cet objectif et, si elle y répondait, je ne serais pas là aujourd'hui. C'est parce que je suis d'avis qu'elle a négligé de réaliser cet objectif que je suis venu témoigner ici aujourd'hui.
[Français]
M. Ernest Chauvet: Je ne crois pas que les gens aient agi par malice. Je crois tout simplement que dans ce cas, ils manquaient d'information. Le fait d'accepter la demande de M. Williams est un signe de bonne volonté. On s'engage parfois dans une voie en manquant d'information. Donc, on présente de l'information. Ma réponse est que cela ne respecte pas certaines dispositions de la Loi sur les langues officielles. Je ne crois pas que cela ait été intentionnel et je crois que le gouvernement peut rectifier la situation.
Le président: Merci.
Monsieur Williams.
[Traduction]
M. John Williams: Le sous-alinéa 15(1)b)(i) de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales—et c'est en vertu de cette loi que la Commission des circonscriptions électorales a fait son travail—précise que la commission doit tenir compte des éléments suivants: «la communauté d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription électorale... ou son évolution historique».
Permettez-moi de répéter, elle doit tenir compte de «la communauté d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription électorale... ou son évolution historique». Le sous-alinéa 15(1)b)(i) ajoute le critère de la superficie des circonscriptions qui ne doit pas être trop vaste dans les régions peu peuplées, mais il ne s'agit pas ici de régions peu peuplées.
D'après vous, la Commission de délimitation des circonscriptions électorales a-t-elle suivi la directive qu'elle se donne elle-même dans la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales ou pensez-vous qu'elle a fait fi de cette loi quand elle a divisé St. Albert et Morinville-Légal en deux sans tenir compte de la communauté d'intérêts?
À (1030)
M. John O'Neill: Elle n'en a peut-être pas fait fi, mais je suis certainement d'avis qu'elle a oublié ce principe. C'est pour cette raison que j'ai présenté mon témoignage—il m'a semblé qu'elle s'était intéressée davantage aux nombres qu'à ce principe. Je ne pense que les nombres doivent l'emporter sur le préjudice causé par cette proposition. À mon avis, le nombre n'est tout simplement pas aussi important que la communauté d'intérêts.
M. John Williams: Très bien.
C'est là un point intéressant, monsieur le président. S'agissant des limites des circonscriptions électorales, l'Alberta est une des provinces canadiennes où la superficie des circonscriptions est la plus importante—je crois qu'elle est de 254 000 milles carrées. Calgary est à 180 milles d'Edmonton, et son évolution n'a pas été la même que celle d'Edmonton. Calgary n'a vraiment pas de banlieue, alors qu'Edmonton compte 22 localités régionales : St. Albert, Morinville, Legal, Stony Plains, Spruce Grove, etc.
Je me reporte ici au rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales pour l'Alberta. Dans ce rapport, la commission précise que Calgary a connu une croissance rapide à l'intérieur des limites de la municipalité. Elle recommande qu'un des nouveaux sièges en Alberta soit accordé à Calgary, de façon à ce que cette ville compte dorénavant huit sièges. La population d'Edmonton a aussi augmenté, mais la population de la région urbaine avoisinante a augmenté beaucoup plus, en raison justement de la croissance démographique des localités que j'ai énumérées.
La commission a proposé un nouveau découpage électoral qui tiendrait compte de la croissance de la population urbaine d'Edmonton et de ses environs qui porterait à huit le nombre de circonscriptions électorales. Elle était d'avis que ce remaniement non seulement répondrait aux besoins de représentation de Calgary et de la région d'Edmonton, mais rétablirait également—et c'est cela qui fait problème—l'égalité historique de la représentation des deux villes. Calgary aurait droit à huit sièges et Edmonton aussi.
Voici la question à laquelle je voudrais que les témoins répondent : à votre avis, est-il plus important d'assurer cette égalité historique entre Calgary et Edmonton ou de tenir compte de la communauté d'intérêts comme l'exige la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales?
M. John O'Neill: Je ne comprends pas pourquoi la commission insiste sur l'importance d'assurer l'égalité entre ces deux villes. Elles sont à 200 milles l'une de l'autre. Elles ont chacune leur personnalité et leurs caractéristiques démographiques. Il me semble qu'on se mêle un peu de faire de la politique en voulant assurer l'égalité en tous points entre les deux. En tout cas, l'argument n'est pas assez important pour justifier qu'on ne tienne pas compte de la communauté d'intérêts.
[Français]
Le président: Thank you, Mr. Williams.
Madame Thibault.
Mme Yolande Thibeault: Merci, monsieur le président.
Je voudrais simplement faire un commentaire. Je veux vous souhaiter bonne chance. Monsieur Chauvet, comme vous l'avez dit plus tôt, il ne faut pas lâcher. Même s'il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire ici, au comité, comme notre président vous l'a dit, nous pouvons certainement vous assurer de notre appui moral au moins. Je sais qu'au Nouveau-Brunswick, M. Godin a fait des représentations. Il a gagné jusqu'à un certain point, même s'il ne sourit pas trop.
Dans ma propre circonscription, au Québec, il y a une petite municipalité d'à peu près 16 000 habitants qu'on voulait diviser en deux. C'est une communauté qui est en grande partie anglophone. Les gens du milieu ont fait des représentations et ils ont gagné.
Vous avez une bonne cause. Continuez.
Le président: Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Merci.
Je m'entends toujours bien avec ma collège Mme Thibeault. Nous ne sommes pas seulement un comité de moralité; je m'attends à ce qu'on fasse des recommandations à la commission. Je pense qu'il est important qu'on soit capables de recommander à la commission de suivre la Loi sur les langues officielles du Canada, ainsi que l'esprit de la loi et de la Charte canadienne. C'est notre responsabilité comme comité, et je veux vous assurer que de mon côté, je vous appuierai. Je pense que le comité va faire une recommandation. On n'a pas fait venir des gens de l'Alberta simplement pour les entendre et leur dire qu'on les appuie, mais bien pour travailler avec eux et les comprendre.
Je suis très déçu, monsieur le président, du rapport sur l'Alberta. Lorsque les commissaires disent, dans le rapport, que la commission s'oppose par principe à l'idée de fixer les limites en fonction des ethnies ou des classes, ils vont à l'encontre d'Élections Canada. Une commission ne peut pas décider des nouvelles lois au Canada et dire que c'est bien dommage pour les Canadiens et les Canadiennes. La loi est claire. Elle dit qu'il y a une marge de 25 p. 100. Ce n'est pas à eux de dire que la marge doit maintenant être de 5 ou de 2 p. 100. Il faut qu'ils respectent l'esprit de la loi. Comme vous le disiez si bien, monsieur O'Neill, on a affaire à des humains et non à des chiffres.
Sur ce, j'aimerais vous remercier. Je peux vous assurer que le rapport sur l'Alberta est semblable aux autres rapports qu'on voit partout au pays. C'est pour cela que j'ai toujours refusé qu'Élections Canada donne un mandat aux commissions. On veut que ça soit près de zéro ou de 5 p. 100. Eh bien, non. Ils livrent la marchandise, mais ça va à l'encontre de la loi, où il avait été établi qu'il y aurait une marge pour les communautés d'intérêts. Si on n'est pas prêt à prendre en considération les communautés d'intérêts, cela va à l'encontre de la loi.
À (1035)
Le président: Merci, monsieur Godin.
[Traduction]
Monsieur Williams, dernière intervention.
M. John Williams: Merci beaucoup.
Je cite encore une fois le rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales pour l'Alberta. La commission y fait remarquer que, même si l'on reconnaît de plus en plus que la région d'Edmonton englobe plusieurs collectivités distinctes dont chacune a connu une évolution historique bien à elle, on constate l'existence d'une bonne part d'intérêts communs et de collaboration entre ces collectivités pour la coordination aux chapitres de l'infrastructure, des transports, des soins de santé et des services. Témoin l'existence des organismes suivants : Capital Region Wastewater Commission; Alberta Capital Region Alliance, qui s'intéresse surtout au transport; Edmonton Regional Airport Authority; et Capital Health Authority.
La commission dit également que, sur le plan de la géographie et de la communauté d'intérêts, les populations de la région métropolitaine d'Edmonton ont davantage en commun avec la population d'Edmonton qu'avec celle des collectivités rurales situées au-delà des limites de leurs territoires.
Même si nous avons en commun des régies communautaires qui s'occupent des aqueducs et de l'évacuation des eaux usées, pensez-vous que la communauté d'intérêts des gens eux-mêmes est plus importante quand il s'agit de la compétence fédérale que de s'en tenir aux lignes de démarcation de la régie de gestion des aqueducs, qui sont davantage fonction du sens d'écoulement des eaux que de quoi que ce soit d'autre?
M. John O'Neill: La terre appartient à la population; je ne sais pas vraiment ce que ça veut dire. Évidemment, nous partageons la terre, mais les cultures ne sont pas les mêmes. Différentes cultures peuvent partager des voies d'eau, des routes, avoir ce genre de choses en commun.
M. John Williams: Monsieur le président, pour citer encore une fois le rapport, il est à noter que sur le plan philosophique, la commission rejette l'idée d'établir les limites en fonction de l'ethnicité ou de la classe; elle préconise plutôt que les élus représentent et tiennent compte de tous les Canadiens qui vivent à l'intérieur d'une circonscription électorale.
Il est également à noter que la loi même de la commission, la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, ordonne directement à la commission de reconnaître la dualité culturelle et le développement historique du pays, ce que la commission a rejeté.
Il s'agit d'une commission dont les membres sont nommés, monsieur le président. Je rejette catégoriquement l'hypothèse et l'attitude des membres qui considèrent avoir le dernier mot sur la façon dont tous les Canadiens sont représentés. Nous sommes peut-être une société multiculturelle, mais nous avons aussi une histoire.
J'ai quelques derniers points, monsieur le président. Encore une fois, en ce qui concerne le rapport de la commission, au sujet des liens des localités avoisinantes avec l'Alberta rurale, la commission prétend que bien qu'on ne conteste pas les liens structurels, économiques, culturels et récréatifs avec Edmonton et les municipalités avoisinantes, les liens traditionnels de commerce et de culture de St. Albert et de Leduc sont avec les régions rurales avoisinantes. C'était un point que j'avais fait valoir.
Aux audiences toutefois, les membres de la commission ont affirmé qu'ils avaient entendu des opinions qui les avaient convaincus dans leur idée que les communautés de banlieue sont plus étroitement liées à la région métropolitaine qu'aux régions agricoles un peu plus éloignées.
Encore une fois, je demande à nos témoins, acceptez-vous l'affirmation de la commission que Edmonton—ce groupe amorphe d'habitants—n'est qu'un groupe de personnes ou est-ce que vous croyez que ces personnes font en fait partie de communautés à l'intérieur de la région métropolitaine d'Edmonton?
Je veux que ce soit consigné au procès-verbal, monsieur le président, il le faut.
À (1040)
Le président: Tout à fait.
Monsieur O'Neill.
M. John O'Neill: J'avais quelque chose en tête, mais je l'ai oublié. Je suis épuisé vers 10 heures le matin.
Je dirais que plusieurs habitants de St. Albert vont travailler à Edmonton. Je peux vous le confirmer. Je l'ai fait pendant 25 ans et je peux vous dire que je suis très heureux de revenir à St. Albert à cause de la qualité de vie qu'on y trouve. Je pense que c'est une localité qui repose essentiellement sur son histoire et que ses habitants sont les descendants des premiers colons. On n'arriverait pas à les retrouver s'ils étaient éparpillés dans la ville d'Edmonton.
C'est un point que je tenais à faire valoir.
[Français]
Le président: Thank you.
Monsieur Chauvet.
M. Ernest Chauvet: Je suis d'accord. Les gens de St. Albert ne s'associent pas à ceux de la ville d'Edmonton. Ils se considèrent comme une communauté. Ils sont beaucoup plus près des communautés environnantes de Morinville et de Legal que de celle d'Edmonton. Les partenariats se sont davantage développés entre St. Albert, Morinville, Legal et Sturgeon qu'entre St. Albert et Edmonton.
C'est sûr que la proximité d'Edmonton les oblige à dialoguer jusqu'à un certain point avec la ville, mais ils n'ont pas d'affinité avec la ville; ils ont plutôt une affinité avec la partie rurale.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Chauvet.
[Traduction]
Merci beaucoup, monsieur O'Neill.
De nombreux remerciements ont été adressés au président de ce comité pour avoir organisé cette réunion. Je pense qu'on fait erreur. Il faut d'abord remercier M. Williams d'avoir attiré notre attention sur cette question et ensuite les membres du comité pour avoir rapidement accepté de l'examiner.
Je pense que nous avons autour de cette table plusieurs parlementaires qui ont à coeur le mandat que leur a confié la Chambre des communes et qui interviennent rapidement.
Ce qui m'amène à parler de la suggestion de M. Godin, à savoir qu'il faudrait songer à préparer un rapport. J'aimerais voir si nous en sommes convenus. Je pense qu'il y a consensus autour de la table. Nous allons commencer à préparer un rapport.
[Français]
Je vais demander à notre recherchiste de prendre note de ce qui a été dit ce matin, et aux membres du comité de communiquer avec notre recherchiste cette semaine pour qu'on puisse avoir un rapport assez rapidement.
J'aimerais également mentionner à notre recherchiste que la dernière fois que nous avions parlé de cette question, dans le cas de la circonscription d'Acadie--Bathurst, j'avais cité un passage assez important du rapport de la Commission Lortie, qui s'était penchée entre autres sur toute cette notion de communautés d'intérêts. J'aimerais qu'on reprenne cela également.
Voilà qui termine notre réunion d'aujourd'hui. Je demanderais aux membres du comité de faire des suggestions de recommandations à notre recherchiste d'ici jeudi, afin qu'on puisse étudier ce rapport mardi prochain.
Mardi prochain, nous aurons une réunion à huis clos où nous étudierons plusieurs rapports afin de les déposer à la Chambre avant Pâques.
Demain, nous recevrons le président de Postes Canada, l'honorable André Ouellet.
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Merci, monsieur le président.
J'aimerais faire une autre suggestion. Je pense qu'il faut faire un rapport le plus tôt possible parce que le temps passe. On vit avec le temps et on n'a jamais pu arrêter l'horloge.
Le président: Est-ce que mardi prochain vous conviendrait?
M. Yvon Godin: J'aimerais aussi qu'on envoie ce rapport non seulement aux commissions qui sont impliquées dans la chose, mais également au sous-comité du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Il est important que le sous-comité du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre entende la voix et les recommandations du Comité des langues officielles, parce que c'est encore un autre aspect du processus.
Le président: Monsieur Godin, cela ne pose aucune difficulté. Dès que le rapport sera déposé à la Chambre, parce que c'est là qu'il faut le déposer en premier lieu, nous pourrons certainement nous assurer qu'il soit envoyé au comité en question, à toutes les commissions de délimitation des circonscriptions électorales et, naturellement, à Élections Canada. Pour cela, il n'y a pas de difficulté, mais il faut passer premièrement par la Chambre, comme vous le savez.
À (1045)
M. Yvon Godin: Et au sous-comité du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.
Le président: Ça va. Monsieur Williams.
[Traduction]
M. John Williams: Merci, monsieur le président.
Puisque nous parlons de communautés d'intérêts, je souhaite dire officiellement que la circonscription actuelle de St. Albert compte essentiellement deux parties. La moitié nord est caractérisée par un petit cordon de collines appelé Glory Hills qui s'étend d'est en ouest et divise la circonscription en deux. C'est dans cette moitié que se trouve la communauté francophone dont nous parlons aujourd'hui. La moitié sud se compose principalement de gens d'origine autrichienne et germanique et elle constitue une communauté d'intérêts dans le comté de Parkland, la ville de Spruce Grove et la municipalité de Stony Plain.
Ces municipalités ont négocié des accords tripartites en vertu desquels elles se sont constituées en entité trimunicipale. Ensemble, elles ont été les hôtes des Jeux d'été de l'Alberta. Elles ont créé un centre récréatif trimunicipal dont M. O'Neill et M. Chauvet vous ont parlé. La moitié nord de la circonscription envisage la même chose pour les municipalités de Sturgeon, St. Albert, Morinville et Legal. Si votre comité prépare un rapport, je lui demanderais... eh bien, je voudrais dire officiellement qu'il existe deux communautés d'intérêts qui devraient être préservées dans la circonscription.
Mme Thibeault a souligné que la population de la circonscription en question répond aux exigences démographiques et j'exhorte le comité à dire qu'il ne faut pas modifier la circonscription de St. Albert.
Merci.
Le président: Monsieur Williams, nous accueillons vos remarques avec plaisir et vous recevrez un exemplaire de l'ébauche du rapport avant qu'il ne soit approuvé.
Peut-être pourriez-vous inviter certains membres du comité à visiter votre superbe circonscription.
M. John Williams: Avec plaisir, monsieur le président.
Le président : Quand?
M. John Williams : Très bientôt. Je crois que nous avons invité tous les membres du comité, du moins ceux qui pourront venir, à St. Albert, Morinville et Legal. J'espère que cela se fera le 24 avril, sinon le 25. J'ai parlé au maire de St. Albert et il se réjouit à l'idée de vous accueillir. Un petit déjeuner sera organisé pour le comité, ou plutôt les membres qui pourront se déplacer, le matin du 24. Nous discutons avec le conseil scolaire afin qu'il organise un événement culturel pour le comité.
Nous aimerions que vous visitiez la chapelle sur la colline. Cette chapelle est le plus vieux bâtiment de la province de l'Alberta. C'est une superbe construction édifiée par le père Albert Lacombe vers 1863 et elle est l'âme de la ville de St. Albert. Nous aimerions vous faire visiter Morinville et Legal afin que des membres de notre communauté qui n'ont pas eu l'occasion de venir ici puissent vous présenter leurs points de vue, monsieur le président.
Quoi qu'il en soit, je peux vous garantir un accueil chaleureux...
Le président: Je suis l'un de ceux qui acceptera votre invitation avec enthousiasme.
Monsieur O'Neill et monsieur Chauvet, je vous souhaite un bon voyage de retour. Je vous remercie beaucoup de nous avoir accordé du temps ce matin.
[Français]
À demain.
La séance est levée.