AANO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 4 décembre 2007
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte. Bon après-midi à tous. Bienvenue à notre comité.
Le comité poursuit ses travaux aujourd'hui en conformité de l'ordre de renvoi du mardi 13 novembre 2007 portant sur le projet de loi C-21, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne. Nous accueillons trois fonctionnaires, MM. Jim Hendry, Martin Reiher et Charles Pryce, qui nous aideront au besoin.
Avant d'amorcer l'étude article par article proprement dite, je veux m'adresser brièvement aux membres du comité.
Comme vous le savez, je suis à la fois un nouveau venu au comité et un président de fraîche date. La semaine dernière, lorsque nous avons entendu le ministre ainsi que des témoins du Bureau du vérificateur général, j'ai été... Par exemple, j'ai accordé beaucoup de latitude aux témoins du Bureau du vérificateur général. Je n'ai pas surveillé rigoureusement leur temps de parole. Jeudi dernier, lorsque nous avons accueilli le ministre, j'ai averti les membres du comité avant de commencer que j'allais surveiller l'horloge de près. J'ai pensé que cela serait juste pour tout le monde. J'ai jugé bon de vous dire d'entrée de jeu de quelle manière j'entendais diriger la réunion. J'ai trouvé que les choses s'étaient bien passées.
Aujourd'hui, alors que nous abordons cet exercice, je veux dire la même chose. Nous allons discuter de divers amendements qui ont été présentés. Je ne prétends pas être au fait de tous les amendements qui seront soumis, mais j'ai vu plus tôt aujourd'hui une liste de certains projets d'amendement. Pour ce qui est de rendre une décision sur la recevabilité ou la non-recevabilité de ces amendements, je veux que vous sachiez que je ferai preuve de prudence. Autrement dit, il faudra me convaincre que l'amendement est recevable.
Je suis sûr qu'au cours de nos délibérations aujourd'hui, nous aurons plusieurs échanges à ce sujet.
Madame Crowder.
Je sais que les députés du comité ont reçu deux lettres de la Federation of Saskatchewan Indian Nations. Évidemment, le projet de loi C-21 ayant été présenté et renvoyé au comité, il n'a pas été possible de faire venir ces témoins. Par conséquent, je me demandais comment le comité allait répondre à la demande des porte-parole de cette organisation de venir le renseigner sur le projet de loi C-21. Si je ne m'abuse, les lettres en question étaient datées du 19 et du 20 novembre.
Au sujet de la façon dont le comité va procéder, comme vous le savez, nous allons débuter aujourd'hui l'étude article par article du projet de loi C-21. Si nous terminons aujourd'hui, nous devrons décider ce que nous allons faire jeudi. Si nous ne terminons pas aujourd'hui, nous allons poursuivre nos délibérations à la prochaine séance, soit jeudi. Mardi prochain, il est déjà prévu que la séance portera sur un autre sujet, et des témoins doivent comparaître. Par conséquent, si nous n'avons pas terminé l'étude article par article du projet de loi C-21 ce jeudi, je m'attends à ce que nous poursuivions nos délibérations le jeudi suivant.
Je n'ai pas l'intention d'interrompre ou de reporter l'étude article par article pour entendre d'autres témoins, si telle était votre question.
Je voulais surtout savoir quel processus que nous allons suivre. La présidence va-t-elle envoyer une lettre? Je suis simplement curieuse.
Nous avons eu cette conversation il y a deux ou trois séances. La greffière et moi-même avons rédigé à l'intention des divers groupes qui ont fait parvenir au comité une demande de comparution une lettre générique pour leur dire qu'au cours des prochaines semaines — essentiellement cette semaine et la semaine prochaine, qui seront suivies d'une pause de six semaines —, nous n'aurons pas le temps de les recevoir. Nous ajoutons, si je ne m'abuse, qu'au cours des prochains mois, nous allons revenir sur la question.
À mon avis, il faudra donc tenir une autre réunion du sous-comité. Je ne sais pas si cela sera nécessaire la semaine prochaine. Je penchais plutôt pour que cela se fasse à notre retour, la première semaine de janvier. À cette occasion, nous pourrions établir l'ordre de nos travaux pour les semaines à venir.
Madame Neville, avez-vous un commentaire?
J'ai simplement une question.
Vous avez parlé d'autres lettres, et je me demandais si l'une ou l'autre de ces lettres concernait le projet de loi dont nous sommes saisis.
Je ne vous suis pas. En réponse à la question de Mme Crowder au sujet des lettres de groupes demandant à comparaître devant le comité relativement au projet de loi C-21, vous avez dit avoir rédigé des lettres...
Il n'y a donc pas de lettres en réponse à ces demandes de comparution? Voilà ce que je veux savoir. Vous n'aviez pas l'air certain.
Au cours des deux ou trois derniers mois, nous avons reçu des lettres de différentes organisations, y compris celles-là. Nous avons rédigé ce que j'appellerais une réponse générique, du genre « Nous accusons réception de votre lettre et nous prenons bonne note de votre demande »...
Je suis désolé. La greffière me précise que la réponse a été envoyée en son nom, et non au nom de la présidence.
D'accord.
Nous n'allons donc pas les entendre. Vous avez dit que nous n'allions pas entendre d'autres groupes au sujet du projet de loi C-21.
Et les autres témoins que nous entendrons la semaine prochaine témoigneront sur un autre sujet que nous avons décidé d'inscrire à l'ordre du jour?
C'est juste.
Nous allons maintenant passer à l'étude article par article.
(Article 1)
Le président: Madame Crowder, voulez-vous prendre la parole à ce sujet?
Oui, je suis désolé. Il s'agit du premier amendement que vous proposé, l'amendement NDP-1, qui figure dans la trousse.
Je me demandais simplement si vous vouliez faire une brève déclaration sur les raisons qui vous ont amenée à le présenter.
Bien sûr. Merci, monsieur le président.
Comme vous l'avez signalé, il s'agit d'un amendement à l'article 1. À mon avis, l'information figurant dans la proposition d'amendement est assez claire, mais il y a un ou deux points, car les Six-Nations en particulier avaient...
Excusez-moi, sommes-nous censés avoir reçu un exemplaire de cette trousse?
Une voix: Elle a été envoyée à tous les bureaux ce matin.
Mme Tina Keeper: Je ne l'ai pas. Je suis désolée.
Tous les députés ont-ils la trousse relative au projet de loi C-21? Elle renferme les différents amendements que nous avons reçus et qui ont été classés, par notre personnel.
Madame Crowder, allez-y.
Cet amendement vise en partie à combler l'écart entre les nations qui jouissent présentement de l'autonomie gouvernementale et dont les entente pertinentes renferment un code des droits de la personne, et les autres. L'entente sur l'autonomie gouvernementale Nisga'a est un bon exemple car elle renferme un code des droits de la personne pour les premières nations.
Nous voulions englober les nations qui cheminent vers l'autonomie gouvernementale. L'idée première était de donner aux premières nations la possibilité de se doter de codes leur accordant le droit d'embaucher de préférence leurs propres citoyens, de dispenser des programmes et des services aux membres des premières nations vivant dans une réserve et de leur attribuer des terres sur une base préférentielle. Le but visé était de protéger les membres des premières nations vivant dans les réserves étant donné que certaines décisions auraient pu faire l'objet de contestations de la part de citoyens vivant hors réserve.
Ainsi, la première nation de Westbank n'a pas d' entente sur l'autonomie gouvernementale, mais l'entente qui la gouverne présentement renferme un code des droits de la personne. C'est un exemple d'une nation qui s'est dotée d'un tel code alors qu'elle n'est pas partie à une entente sur l'autonomie gouvernementale.
Merci, madame Crowder.
Je déclare l'amendement NDP-1 irrecevable.
Le projet de loi C-21 modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne en abrogeant l'article 67. Cette abrogation retire de la loi une exception qui soustrait la Loi sur les Indiens à son application.
Plutôt que d'abroger cet article, l'amendement propose de le remplacer par une nouveau cadre imposant plusieurs conditions et exemptions semblables à celles énoncées dans la Loi sur les Indiens.
Dans l'ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page 654, on peut lire: « Un amendement à un projet de loi renvoyé à un comité après la deuxième lecture est irrecevable s'il dépasse la portée ou le principe. »
De l'avis de la présidence, l'ajout de ce nouveau cadre est contraire au principe du projet de loi C-21 et est, par conséquent, irrecevable.
Vous pouvez en appeler de la décision de la présidence.
Cette question ne peut faire l'objet d'un débat. Les membres du comité ont deux choix. La présidence a déclaré irrecevable l'amendement NDP-1. Il est fait appel de cette décision. Le vote déterminera si la décision de la présidence recueille l'appui des membres du comité.
Si vous souhaitez appuyer la décision de la présidence, qui juge irrecevable la motion d'amendement, veuillez voter oui.
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Pouvons-nous avoir un vote par appel nominal, s'il vous plaît?
Comme ma décision a été renversée, nous allons conserver l'amendement.
Madame Crowder, je vous ai interrompue. Y a-t-il autre chose que vous vouliez dire?
J'ai une ou deux choses à dire. Premièrement, nous souhaitons bâtir une nouvelle relation entre le gouvernement et les premières nations. Deuxièmement, une récente décision d'un tribunal de la Colombie-Britannique concernant le peuple Chilcotin privilégie la réconciliation. Cette motion d'amendement se veut donc une tentative pour en arriver à une relation fondée sur la réconciliation. Cela implique la reconnaissance de la compétence des premières nations dans le domaine des droits de la personne, du droit de la famille, etc., comme l'a recommandé la Commission royale sur les peuples autochtones. Tout cela doit reposer sur l'assise qu'est la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Il s'agit donc d'une tentative pour amorcer le dialogue dans le contexte d'un nouveau rapport entre les premières nations et le gouvernement. Voilà l'intention qui sous-tend l'amendement proposé.
Merci, monsieur le président.
Mme Crowder a exprimé son opinion et évoqué la décision Chilcotin. Selon elle, les collectivités des premières nations devraient pouvoir choisir certains éléments énoncés dans l'amendement. C'est son opinion.
Nous allons amorcer la discussion sur ces arguments, mais la chose essentielle qu'il faut garder à l'esprit, c'est que tous ces amendements outrepassent carrément l'intention du projet de loi. En fait, ce projet d'amendement se trouve à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il y apporte une modification. Et cela dépasse de loin la portée de la mesure à l'étude.
Si la députée souhaite présenter un projet de loi d'initiative parlementaire visant à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne, la procédure parlementaire lui permet de le faire. Ce serait la bonne façon de procéder. Mais à mon avis, il est contraire à la procédure adoptée par la Chambre dans le passé de tenter de le faire au moyen de cette abrogation.
À mon avis, nous n'avons pas d'autre choix maintenant que d'entrer dans les détails puisque le comité a choisi de renverser la décision de la présidence. Résultat: nous devons débattre sur le fond cette motion d'amendement qui modifie substantiellement la demande d'abrogation dont le comité est saisi.
À mon avis, l'interprétation des droits des collectivités des premières nations et des pouvoirs y afférents qui est proposée à la Commission canadienne des droits de la personne par le biais de cet amendement va dans la mauvaise direction.
Je vous renvoie au témoignage antérieur d'un certain nombre de personnes qui ont affirmé que...
Une voix: Pouvez-vous les nommer?
M. Rod Bruinooge: Avec plaisir.
M. Larry Chartrand, en particulier, un professeur autochtone qui jouit d'un grand respect dans ma ville d'origine — ce qui ne veut pas nécessairement dire que je manque d'objectivité — a fourni un témoignage très crédible sur les dispositions interprétatives proposées par un certain nombre de groupes, dont l'Assemblée des Premières nations.
Selon lui, intégrer dans un texte de loi une interprétation des droits devant relever du régime de cette loi restreindrait les droits des collectivités des premières nations elles-mêmes. En formulant une disposition interprétative, nous risquons d'empêcher la Commission canadienne des droits de la personne d'assurer un juste équilibre entre les droits collectifs et les droits individuels qui devront être pris en compte dans la foulée de cette abrogation.
En insérant dans le texte de la mesure ces amendements spécifiques, nous lions les mains de la Commission canadienne des droits de la personne. Nous limitons sa capacité de dégager ce juste équilibre. Elle devra s'en tenir uniquement à ce texte. La Commission a toujours été en mesure d'apporter sa propre interprétation, et il va de soi qu'elle devra continuer de pouvoir le faire lorsqu'elle rendra des décisions dans de futures causes impliquant des réserves des premières nations, où certains estiment que leurs droits fondamentaux sont lésés.
Lorsque la période de transition aura pris fin, et que des plaintes relatives aux droits de la personne seront déposées auprès de la commission, celle-ci n'aura pas d'autre choix que de respecter la Constitution du Canada et, bien entendu, l'article 35. Mais si nous formulons des suggestions d'interprétation dans un texte spécifique, elle devra obligatoirement s'y plier, ce qui, selon moi, limitera beaucoup sa marge de manoeuvre.
À mon avis, cela laisse croire, malheureusement, que nous sommes des experts en matière d'interprétation de ces droits. L'expert en ce domaine, c'est plutôt la Commission canadienne des droits de la personne qui, selon moi, a fait de l'excellent travail depuis 30 ans pour assurer un équilibre entre les droits de tous les Canadiens, les droits de la majorité par rapport ceux de la minorité.
Toutes les personnes présentes dans la salle conviendront que la Commission canadienne des droits de la personne a fait un travail admirable. Malheureusement, l'amendement de Mme Crowder entravera sa capacité d'interpréter les dispositions qui lui seront soumises pour qu'elle rende des leurs décisions une fois la période de transition terminée.
Je vais probablement m'en tenir là. J'aimerais aborder chaque point individuellement, mais je veux aussi laisser à d'autres, collègues comme adversaires, la possibilité de s'exprimer.
Merci, monsieur le président.
Ce qui est intéressant à propos de cette question de droit, c'est que dans un rapport spécial consacré à l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission des droits de la personne fait des recommandations quant au contenu possible d'une disposition interprétative. C'est ainsi que, contrairement à ce que préconise le secrétaire parlementaire, selon lequel on devrait laisser à la Commission canadienne des droits de la personne le soin de se pencher sur une disposition interprétative, la commission elle-même demande cela.
Je vais citer un passage du rapport, tiré de la rubrique « Éléments clés d'une disposition interprétative »:
Le comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne a formulé des recommandations quant au contenu possible d'une disposition interprétative. Selon lui, une telle disposition doit:
faire en sorte qu'on tiendra compte des besoins et des aspirations des communautés autochtones dans l'interprétation des droits et des motifs de défense prévus par la loi;
assurer un équilibre adéquat entre les droits individuels et les intérêts des communautés autochtones;
aider à l'interprétation des moyens de défense actuels prévus par la loi; elle ne doit pas constituer un nouveau motif de justification qui saperait la réalisation de l'égalité; et
éviter de servir à justifier la discrimination fondée sur le sexe ou d'être utilisée pour perpétuer des inégalités historiques créées par la Loi sur les Indiens.
La Commission est généralement d'avis qu'il s'agit là de principes directeurs judicieux pour l'interprétation de la LCDP en contexte autochtone.
Et en note en bas de page, il est précisé:
Il convient de noter que ni la commission ni le tribunal n'ont la compétence ou l'expertise pour interpréter les articles 25 et 35.
La Commission canadienne des droits de la personne elle-même a affirmé qu'il était nécessaire que la loi renferme une disposition interprétative. Parmi les nombreux témoins qui ont comparu devant le comité, un grand nombre a insisté sur l'importance d'avoir une disposition interprétative dans la mesure.
Lorsque des gens de tous les horizons — des experts juridiques à certains commissaires, en passant par les auteurs du rapport de la Commission canadienne des droits de la personne elle-même —, expriment une même opinion, je ne vois pas comment on pourrait en faire fi au moment de rédiger une mesure qui sera présentée à la Chambre.
Pour répondre à Mme Crowder, en ce qui a trait à ses déclarations concernant les propres recommandations de la Commission canadienne des droits de la personne au comité et aux multiples autres tentatives pour abroger l'article 67, il n'est proposé nulle part dans ces recommandations d'accorder aux gouvernements ou aux collectivités des premières nations le droit de dispenser, exclusivement ou sur une base préférentielle, des programmes ou des services à ses citoyens. On ne préconise nulle part que les gouvernements des premières nations accordent la préférence à leurs citoyens pour ce qui est de la formation et de l'embauche d'employés ou d'entrepreneurs.
S'agissant de l'attribution de terres, de ressources ou d'autres avantages économiques, cet aspect est passé sous silence dans les recommandations. À mon avis, c'est précisément le genre de choses qui, malheureusement, favorisera le statu quo. À l'heure actuelle, le statu quo permet d'attribuer des terres, des maisons et des emplois à certaines personnes, dans certaines communautés, qui jouissent d'un accès spécifique dont d'autres sont privés.
C'est précisément la raison d'être de la Commission canadienne des droits de la personne que d'offrir aux groupes minoritaires l'égalité et les mêmes avantages auxquels ont accès tous les autres citoyens des collectivités canadiennes.
C'est du texte fondamental dont je parle. Et cela ne faisait pas partie de la recommandation que vous avez lue et de celles dont j'ai pris connaissance. En incluant cela dans le projet de loi, nous favoriserions le maintien du statu quo. Ce serait comme si l'abrogation n'avait jamais eu lieu.
Je ne vois vraiment pas comment on peut présenter ces amendements et s'attendre à quelque changement que ce soit une fois la période de transition en cours. Si vous allez dans le sens de ces recommandations, si vous adoptez cet amendement, aussi bien limiter la période de transition à une seule journée car cela ne changera absolument rien.
Les commentaires du député me laisse perplexe. Il semble avoir une idée bien précise de la façon dont la mise en oeuvre du projet de loi C-21 se déroulera et des avantages qui, selon lui, en découleront pour les premières nations. Il a commencé son intervention en évoquant l'amendement. Selon lui, de par leur nature même, ces éléments de l'amendement sont au coeur du problème qu'il veut régler grâce au projet de loi C-21, si j'ai bien compris.
Il me semble évident que le député ne respecte pas la relation de nation à nation qui accompagne le droit inhérent à l'autodétermination. Il s'agit d'une relation de nation à nation incarnée dans un traité. Une chose est sûre. L'article 35 de notre Constitution stipule:
(1) Les droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés.
(2) Dans la présente loi, « peuples autochtones du Canada » s'entend notamment des Indiens, des Inuits et des Métis du Canada.
(3) Il est entendu que sont compris parmi les droits issus de traités, dont il est fait mention au paragraphe (1), les droits existants issus d'accords sur des revendications territoriales ou ceux susceptibles d'être ainsi acquis.
(4) Indépendamment de toute autre disposition de la présente loi, les droits — ancestraux ou issus de traités — visés au paragraphe (1) sont garantis également aux personnes des deux sexes.
Je mentionne cela car le cadre juridique et constitutionnel évoqué est très dérangeant, très troublant, en ce sens qu'il ne semble pas faire partie de la réflexion sur l'orientation que le député veut donner au projet de loi C-21. Je sais pertinemment qu'en tant que pays, en tant que nation, le Canada ne voudrait certainement pas que d'autres se mettent à édicter nos lois. C'est ce qui est au coeur de la discussion.
La députée qui a proposé l'amendement a dit clairement être motivée par la volonté de faire en sorte que la réconciliation préside aux rapports entre le Canada et les premières nations. Il semble qu'il soit très difficile pour nous de rompre avec le passé dans ce processus et d'essayer de se mettre à l'écoute des premières nations.
Certes, vous avez mentionné l'avis d'un éminent professeur, mais pourquoi n'écoutons-nous pas les gens dont les conditions de vie sont touchées par cette disposition? À maintes reprises, nous avons entendu des porte-parole de l'Assemblée des Premières nations, de l'Association des femmes autochtones du Canada et de l'Association du Barreau canadien au sujet des conséquences possibles et de l'importance d'agir dans les limites de ce cadre juridique et constitutionnel.
Je trouve cela très troublant.
Je veux poser une question aux fonctionnaires de Justice Canada et faire quelques observations qui font suite à l'intervention de Tina. Je veux être sûre d'avoir bien compris, que des dispositions analogues à celles-ci existent déjà dans d'autres accords de revendications territoriales qui ont été signés.
Je ne suis pas sûr que les accords de revendications territoriales qui ont été signés jusqu'à maintenant renferment leurs propres codes de droits de la personne. Ils créent assurément...
Je n'ai pas demandé ce qu'il en était pour les codes de droits de la personne, désolée.
Prenons l'exemple de l'Accord de revendications territoriales du Nunavut. À ma connaissance, il ouvre la porte à un programme d'action positive. Même nous ne sommes pas régis par une entente d'autonomie gouvernementale, notre accord de revendications territoriales nous donne le droit d'accorder la préférence aux Inuits. Je suppose qu'on pourrait parler en l'occurrence d'action positive, en ce sens que les bénéficiaires peuvent offrir sur une base préférentielle des programmes et des services en matière de formation et d'embauche d'employés et d'entrepreneurs. Même chose pour la distribution de terres et de ressources se trouvant sur des terres appartenant aux Inuits. Le cas échéant, ceux-ci auraient certains droits à des redevances.
De telles dispositions n'existent-elles pas déjà dans certains accords de revendications territoriales qui ont été signés?
Le secrétaire parlementaire a dit s'inquiéter de la possibilité que cela ait pour effet de modifier la loi. En fait, sous sa forme actuelle, la Loi canadienne sur les droits de la personne confère certains pouvoirs de ce genre. Par conséquent, il pourrait être possible de prendre un certain nombre de mesures allant en ce sens sans qu'il soit nécessaire de les préciser et, également, de permettre aux premières nations — et j'apporterai à cet égard un autre argument — d'élaborer de tels programmes.
Le paragraphe 16(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne se lit comme suit:
Ne constitue pas un acte discriminatoire le fait d’adopter ou de mettre en oeuvre des programmes, des plans ou des arrangements spéciaux destinés à supprimer, diminuer ou prévenir les désavantages que subit ou peut vraisemblablement subir un groupe d’individus pour des motifs fondés,
— et cela inclut la race —
directement ou indirectement, sur un motif de distinction illicite en améliorant leurs chances d’emploi ou d’avancement ou en leur facilitant l’accès à des biens, à des services, à des installations ou à des moyens d’hébergement.
Ainsi, à bien des égards, il n'est pas nécessaire de remanier la loi de fond en comble pour accomplir certains des objectifs visés par la motion.
Votre deuxième point faisait spécifiquement référence aux Inuits. La motion concerne les premières nations. Cela est compréhensible, étant donné que l'objet du texte modificatif est de supprimer une disposition particulière visant la Loi sur les Indiens. Mais à l'avenir, dans un esprit de réconciliation, la Loi canadienne sur les droits de la personne s'appliquerait à tous les groupes autochtones de la catégorie 24 de l'article 91, et cela engloberait les Inuits. Le fait d'en limiter l'application aux premières nations risque fortement de susciter un sentiment d'inégalité chez les groupes autochtones qui sont laissés de côté.
Cet argument s'applique non seulement à cette motion en particulier, mais sans doute aussi à la plupart des motions. Il semble aller de soi de focaliser sur les premières nations, étant donné qu'elles sont assujetties à la Loi sur les Indiens, alors que d'autres nations, comme Mme Crowder l'a mentionné, sont régies par des traités. Il y a aussi les Inuits, qui sont gouvernés par des accords de revendications territoriales et par d'autres instances gouvernementales.
En conséquence, le fait que l'on mentionne précisément les gouvernements des premières nations pourrait déboucher sur une contestation en vertu de la Charte.
Je sais ce que fait la mesure. Ce qui me trouble, ce sont les commentaires de M. Bruinooge, qui n'adhère pas à ces dispositions. C'est ce que je comprends. Je sais que nous appliquons déjà des programmes d'action positive dans différentes régions du pays. Ce qui me perturbe au plus haut point, c'est qu'il anticipe déjà certains résultats dans la foulée de l'abrogation de cette disposition, comme Mme Keeper le faisait remarquer.
Entendre de tels propos me dérange beaucoup car je ne sais pas ce qui arrivera aux programmes existants. Au bout du compte, des peuples différents vivront des situations très différentes, selon qu'ils auront ou non réussi à signer des accords de revendications territoriales. C'est ce qui se passera si, selon son idée préconçue, ce sont précisément là les initiatives qui disparaîtront avec l'adoption de cette mesure législative.
Merci, monsieur le président.
En réponse aux commentaires de Mme Karetak-Lindell et de Mme Keeper, l'amendement stipule qu'un gouvernement des premières nations « a le droit » et ensuite, on dresse la liste de ce qu'il peut faire. S'il était question de l'article 16, qui a déjà été cité par M. Hendry, cela serait une autre histoire. Si l'on ouvrait la porte à un processus autorisant l'attribution de terres à un certain groupe de la communauté pour de bonnes raisons, peut-être des raisons familiales, ce serait le genre de situations sur lesquelles la Commission canadienne des droits de la personne pourrait se prononcer.
Cependant, ce n'est pas de cette façon que j'interprète la motion. Pour moi, on autorise ainsi la prestation de tous ces services en fonction de décisions du gouvernement des premières nations. Je pense que si l'on allait plus loin, si l'on préconisait que la Commission canadienne des droits de la personne puisse proposer des mesures analogues, comme le fait l'article 16, ce qui a déjà été suggéré, ce serait une autre histoire.
Voilà pourquoi j'en reviens à mon argument de tout à l'heure: il ne faut pas que la Commission canadienne des droits de la personne ait les mains liées par un article comme celui-là. J'estime qu'au sein des collectivités des premières nations, certaines minorités se trouvent lésées à bien des égards. Voilà pourquoi nous tentons d'abroger l'article 67. Voilà pourquoi nous avons déployé tous ces efforts jusqu'ici, pourquoi nous discutons de ce point en particulier.
Et vous avez raison, c'est mon avis, mon opinion. Bien sûr, je ne prétends pas que mon opinion soit sans réplique, mais tout le monde doit avoir une opinion sur ces questions, et c'est la mienne. Selon moi, il n'y a absolument rien de répréhensible dans mes convictions. Et c'est la raison pour laquelle je continue de les défendre avec autant de ferveur.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Dans l'espoir que mon honorable collègue sera en mesure de clarifier la position de son parti, je vais céder la parole à Mme Neville pour l'instant.
J'ai d'autres questions, monsieur Storseth. Je suis désolée de vous décevoir.
Je veux faire suite à l'intervention de M. Hendry, et après, je ferai un commentaire.
Vous avez dit qu'il n'était pas nécessaire de remanier la loi de fond en comble pour régler ces questions. J'aimerais que vous nous donniez de plus amples explications à ce sujet. Je voudrais aussi que vous étoffiez vos commentaires au sujet des premières nations, des Inuits, et autres. Êtes-vous d'avis que ces amendements devraient englober tous ces autres groupes?
J'ai besoin de plus amples informations de votre part.
Il faut comprendre que la Loi sur les droits de la personne vise surtout le domaine de l'emploi. En ce qui a trait au premier point, l'article 16 confère un certain pouvoir à un employeur ou à un fournisseur de services.
La plupart des plaintes portent sur l'emploi ou la prestation de services. À propos de l'article 16, la commission a élaboré une politique générale que l'on peut consulter sur son site Web. Elle porte sur ce qu'on appelle les « programmes spéciaux ». Il existe aussi une politique d'emploi préférentiel pour les Autochtones. Il y est question d'exigences raisonnables et d'autres aspects. La politique applicable dans le seul domaine de l'emploi compte cinq pages.
En un sens, la commission a fourni des lignes directrices sur la façon d'élaborer de tels programmes. On suppose qu'en temps voulu, elle pourrait élaborer une autre politique, qui porterait sur les services, particulièrement dans un contexte autochtone. Elle s'y emploie.
Elle a aussi le pouvoir de formuler des lignes directrices. Il s'agit d'un pouvoir quasi législatif qui l'autorise à énoncer son interprétation des dispositions de la loi qu'elle-même et le tribunal doivent appliquer. Elle est habilitée à prodiguer des conseils aux employeurs et aux fournisseurs de services en ce qui concerne l'élaboration de programmes, de politiques, de pratiques d'emploi conformes à la loi.
Pour ce qui est du deuxième point, comme je l'ai dit, la Loi canadienne sur les droits de la personne s'appliquerait aux groupes autochtones de la catégorie 24 de l'article 91. Comme il est principalement question des premières nations dans l'amendement, je vous signale que dans la disposition de la Charte portant sur l'égalité, on se préoccupe de l'exclusion de certains groupes. Dans la mesure où certains groupes autochtones auxquels la Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique ne seraient pas couverts par cette disposition en particulier, il se peut fort bien que cette exclusion donne lieu à une contestation en vertu de la Charte.
Mais je ne suis pas certaine que vous ayez répondu à ma question. Êtes-vous en train de dire que d'autres groupes devraient être inclus dans chacun des amendements que nous présentons en vue d'éviter une contestation en vertu de la Charte?
C'est effectivement ce qui découle de mon propos. Je ne peux guère vous en dire plus, mais je pense que vous avez compris l'argument.
D'accord.
Si je peux me permettre une observation, monsieur le président, je pense que nous faisons face à ce problème parce que...
Permettez-moi de revenir en arrière. Je ne pense pas que quiconque autour de la table s'oppose à l'abrogation de l'article 67. Ni mon parti ni moi-même n'y sommes opposés. Je ne pense pas qu'il y ait quiconque ici qui soit contre cette initiative, et nous l'avons affirmé à maintes et maintes reprises. La question est de savoir comment s'y prendre.
Ce que j'entends maintenant réaffirme l'importance d'une disposition interprétative, l'importance de répondre à la vingtaine de groupes qui sont venus témoigner devant le comité et l'importance, également, de mener de plus amples consultations.
Ce que je trouve regrettable, c'est que nous ayons manqué le bateau lorsque la Chambre a prorogé ses travaux. Lorsque j'ai rencontré pour la première fois le nouveau ministre, immédiatement à notre retour, et qu'il m'a annoncé qu'il allait représenter l'ancien projet de loi C-44, il ne m'a pas dit à ce moment-là que la mesure n'avait pas changé d'un iota. J'espérais que le comité serait plus ouvert et sensible aux divers témoignages que nous avons entendus.
Après avoir écouté M. Hendry, je suis encore plus convaincue de la nécessité de répondre aux inquiétudes, aux craintes des collectivités, qui sont peut-être attribuables à un manque de confiance — je ne suis pas certaine dans quelle mesure cela entre aussi en jeu — et de la nécessité d'intégrer le plus de détails possible dans le libellé du projet de loi.
Je vais terminer là-dessus.
Merci, madame Neville.
J'ai sur ma liste Mme Keeper, M. Storseth, M. Warkentin et M. Albrecht.
Madame Keeper.
J'ai moi aussi une question à poser aux représentants du ministère de la Justice.
Je voudrais revenir sur ce que je disais à propos de l'article 35 et du cadre juridique et constitutionnel. Dans ses décisions, la Cour suprême a recommandé de mener des consultations auprès des premières nations. Avant d'adopter une mesure législative qui aura un impact sur les conditions de vie des premières nations, il devrait y avoir au préalable des négociations de bonne foi au sujet de l'élaboration de la mesure en question.
L'amendement présenté a fait ressortir à quel point le député conservateur est loin d'adhérer sur le fond à cette proposition qui est tirée d'une entente sur l'autonomie gouvernementale des premières nations. Pour combler ce gouffre, il faut instaurer un processus qui nous permette de négocier et de progresser dans un esprit de conciliation.
Peut-être pourrions-nous discuter de la façon dont ce processus pourrait s'inscrire dans ce cadre?
Si nous formulons ce genre de mesure en l'absence d'un tel processus de consultation, respecte-t-on le cadre juridique et constitutionnel? Respecte-t-on les recommandations énoncées par la Cour suprême dans ses décisions en ce qui concerne la marche à suivre à adopter?
D'accord. Je vais trouver la phrase spécifique.
Cela ne prendra qu'un instant, monsieur le président.
Dans l'affaire Badger, la cour a déclaré que l'honneur de la Couronne est toujours en jeu lorsqu'elle transige avec les peuples autochtones et qu'il faut toujours présumer que cette dernière entend respecter ses promesses. Les traités ayant une incidence sur les droits ancestraux et issus de traités doivent être interprétés de manière à préserver l'intégrité de la Couronne. Aucune apparence de « manoeuvres malhonnêtes » ne doit être tolérée. Dans l'interprétation d'un traité ou d'un document, toute ambiguïté ou expression douteuse dans le libellé doit profiter aux Indiens. Toute l'imitation ayant pour effet de restreindre les droits qu'ont les Indiens en vertu des traités doit être interprétée de façon restrictive et il appartient à la Couronne de prouver...
Voici ma question: si ce sont là les jugements qui ont été rendus par la Cour suprême du Canada... ses recommandations. Les décisions de la Cour suprême du Canada dans les affaires Sparrow, Delgamuukw et autres confirment l'obligation de la Couronne de consulter... et requièrent un changement fondamental dans la façon dont la Couronne a traditionnellement transigé avec les peuples autochtones. Dans la foulée de l'affaire Delgamuukw et d'autres décisions juridiques, certains gouvernements ont tenté d'améliorer leurs politiques et mécanismes de consultation. Toutefois, les régimes de consultation entre la Couronne et les peuples autochtones n'ont pas encore engendré la stabilité nécessaire en ce qui concerne le processus décisionnel du gouvernement et sa prévisibilité.
Voilà ce que je veux savoir: si c'est ce que recommande la Cour suprême du Canada, y a-t-il une possibilité que l'on doive établir un processus, ou que le gouvernement soit tenu d'instaurer un processus avant de se lancer dans une mesure comme celle-là?
Pour ce qui est de savoir quel genre de politiques le gouvernement choisit en matière de consultation, si j'ai bien compris la question porte sur... l'obligation de consulter au sujet de l'élaboration d'une mesure législative. Si je ne m'abuse, au cours de la session précédente, la question de savoir s'il existe une obligation de consulter préalablement à l'élaboration d'une mesure législative a fait l'objet d'intenses discussions.
Je pense qu'il y a eu... Je ne parlerais pas d'un consensus, mais j'ai entendu des avocats qui ont témoigné devant le comité dire que la Cour suprême n'avait pas tranché cette question, et qu'il est fort probable, question de gestion du risque, que la consultation soit appropriée. Mais la cour n'a pas dit clairement que la consultation est un prérequis à l'élaboration et à l'adoption d'une mesure législative.
J'ai une autre question.
D'après vous, la Cour suprême, dans ses recommandations, n'a pas affirmé l'obligation de consulter, que tout cela est... Autrement dit, même ce concept est négociable.
Je n'ai pas dit cela. Dans le contexte de l'adoption d'une mesure législative, à la question de savoir s'il existe une obligation de consulter, la cour a affirmé clairement qu'il existe une obligation de consulter, et d'autres ont dit la même chose.
Lorsqu'une action de la Couronne concerne des décisions touchant les terres, les ressources et le développement économique, il se peut fort bien qu'il y ait une obligation de consulter. Quant à savoir s'il s'ensuit une obligation de consulter dans le contexte de l'adoption d'une mesure législative — quelle qu'elle soit, mais une mesure de cette nature — cela n'a pas été déterminé par la Cour suprême.
Je pose la question parce que je ne suis pas avocate et que je n'ai pas de connaissances en droit. Supposons que l'on fasse valoir qu'il est possible que l'on porte atteinte à un droit issu de traités en faisant cela — supposons que c'est l'argument —, à ce moment-là, le contre-argument serait de répondre non, ce n'est pas le cas. Cela remet tout en question, n'est-ce pas?
Oui, mais à ce moment-là, il faudrait que la question soit résolue. Si les consultations sont insuffisantes, et que la mesure législative proposée est adoptée, elle peut subséquemment faire l'objet d'une contestation au motif qu'il y a eu violation d'un droit ancestral ou issu de traités. Si le droit ancestral issu de traités est établi, si la violation est établie, à ce moment-là, il appartient au gouvernement de justifier toute atteinte, et il peut ne pas être capable de le faire. L'une des raisons pour lesquelles il pourrait échouer est l'absence de consultations. Cela est déterminé après l'adoption de la mesure.
Si j'ai bien compris, ces décisions de la Cour suprême préconisent aussi un changement dans la façon dont le gouvernement transige avec les premières nations, pour éviter que l'on doive se retrouver devant les tribunaux par la suite, n'est-ce pas?
Certainement. On y préconise constamment de privilégier la négociation par opposition au litige, la réconciliation, etc. Ce sont des signaux clairs.
Mme Crowder a mentionné Roger William. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une décision de la Cour suprême du Canada, cette cause aussi privilégie la réconciliation et la négociation par opposition au litige. On y explique que le droit n'est qu'un aspect du contexte plus vaste dans lequel les Canadiens autochtones et non autochtones doivent vivre ensemble.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Tout d'abord, je voudrais préciser une chose aux fins du compte rendu. Contrairement à ce qu'a dit Mme Neville, chaque parti a eu la possibilité de s'exprimer sur le sujet à la Chambre des communes. La décision de renvoyer la mesure au comité a été votée à l'unanimité. Il ne faudrait pas l'oublier.
Deuxièmement, monsieur le président, c'est essentiellement faire preuve d'arrogance que d'ignorer les règles et les précédents du Parlement. Il est très clair qu'en l'occurrence, on vise à modifier une loi existante. Cela n'a aucun rapport avec la teneur du projet de loi C-21. Dans Marleau-Montpetit, on peut lire ce qui suit sous Pertinence:
Tout amendement à un projet de loi doit nécessairement être pertinent, c'est-à-dire toujours avoir rapport à l'objet du projet de loi ou de l'article à l'étude. En ce qui concerne un projet de loi renvoyé à un comité après la deuxième lecture, un amendement est irrecevable s'il vise à modifier un texte législatif dont le comité n'est pas saisi ou s'il vise à modifier un article de la loi existante qui n'est pas précisément visé par un article du projet de loi.
Manifestement, selon mon opinion, selon l'opinion de la présidence et, je crois, selon l'opinion de n'importe quel avocat, l'amendement dépasse la portée de la mesure.
Monsieur Reiher, je crois comprendre que vous représentez Justice Canada dans ce dossier. À votre avis, cet amendement dépasse-t-il la portée du projet de loi C-21?
Certains paragraphes de l'amendement proposé outrepassent clairement la portée de la Loi canadienne sur les droits de la personne; je peux l'affirmer.
Par exemple, le nouvel alinéa 67(1)e) réfère à « toute question les concernant ou ayant trait en priorité à leur communauté ». Comme M. Hendry l'a mentionné tout à l'heure, la Loi canadienne sur les droits de la personne traite essentiellement de l'emploi et de la prestation de services. Il semblerait bien que cette disposition soit d'une portée plus large.
Je ne prétend pas être un expert de la procédure. Par conséquent, je m'abstiendrai de tout commentaire ayant trait à la procédure parlementaire, mais pour ce qui est de la portée de la Loi canadienne sur les droits de la personne, je peux affirmer catégoriquement qu'à notre avis, l'amendement outrepasse son champ d'application.
Monsieur Hendry ou monsieur Pryce, voulez-vous réagir à ces propos également, si vous voyez les choses autrement?
J'ajouterais un autre point concernant le paragraphe f) de la motion. Je le répète, la Loi canadienne sur les droits de la personne traite de choses assez simples: l'emploi et les services. Même si les audiences peuvent s'éterniser, comme c'est habituellement le cas lorsque des questions juridiques sont en cause, la loi interdit la discrimination. En outre, elle offre aux employeurs et aux fournisseurs de services des moyens de défense qui ouvrent la porte à une perspective plus large, une perspective communautaire, ou tout simplement à la perspective de l'employeur.
En l'occurrence, l'un des sujets de préoccupation concerne le paragraphe f), qui demande à un tribunal
de recourir aux traditions juridiques et aux lois coutumières autochtones, et de les appliquer conformément aux principes d'égalité et de justice.
Dans la mesure où ces questions font intervenir l'une des défenses figurant présentement dans la loi, cela est réglé dans la loi actuelle. Il y a sans doute lieu de se demander si l'intégration dans la loi des traditions juridiques et des lois coutumières autochtones aurait pour effet d'élargir ou même de diminuer la portée de la mesure. Nous ne le savons pas vraiment.
Le professeur John Borrows a écrit un livre brillant sur le droit autochtone et son application. Il a élaboré une théorie très intéressante au sujet de sa portée dans le contexte du système de common law. En même temps, si cette disposition devient partie intégrante de la loi, un tribunal pourrait être appelé à appliquer l'un des nombreux ensembles de lois coutumières et traditions juridiques différentes. Au bout du compte, cela pourrait avoir pour effet d'élargir ou de contracter certaines parties de la loi. D'une certaine façon, cela pourrait compromettre l'universalité des principes de non-discrimination qui figurent déjà dans la loi sous sa forme actuelle.
Merci beaucoup, monsieur Hendry. Je ne peux qu'être d'accord. Il est absolument irresponsable de la part des 12 personnes qui sont ici présentes d'avoir l'arrogance de tenter de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne au cours d'une séance de deux heures. C'est la raison fondamentale pour laquelle on retrouve une cohérence dans la procédure parlementaire, cohérence dont l'opposition a ouvertement fait fi en présentant cette motion. Franchement, il faut que les députés de l'opposition votent contre cette motion.
Mme Crowder connaît très bien les questions autochtones. Pour être franc, monsieur le président, c'est un autre exemple où la queue commande à la tête simplement parce qu'on a fait davantage d'efforts à ce bout-là.
J'invite donc le comité à faire preuve d'intelligence et de jugement et à voter contre cette motion le moment venu.
Merci.
Merci, monsieur le président.
Comme je suis un nouveau venu au comité, je m'excuse si je pose des questions que l'on a déjà abordées au cours des audiences des mois précédents sur le sujet. Toutefois, l'une des raisons pour lesquelles j'ai demandé à siéger au comité, à m'y joindre, c'est tout simplement le volume considérable d'appels que j'ai reçus à mon bureau en ce qui concerne précisément le sort des minorités dans les collectivités autochtones.
Je représente une région dotée d'une nombreuse population autochtone. Un nombre substantiel de collectivités autochtones sont disséminées dans ma circonscription. Ce qui m'inquiète énormément, surtout lorsqu'il est question d'une disposition interprétative, c'est le sort des minorités au sein des premières nations... car il existe aussi des minorités dans les communautés des premières nations.
Si l'un ou l'autre d'entre vous souhaite rencontrer certaines personnes de minorités vivant dans des communautés des premières nations, je vous invite volontiers à m'accompagner dans ma circonscription. Je vous exposerai certains cas horribles où des personnes ont été expulsées de leur maison parce qu'elles n'appartenaient pas à la bonne famille ou qu'elles n'avaient pas appuyé le bon candidat aux élections. Les histoires d'horreur sont multiples. Des mères et des enfants ont été jetés à la rue parce qu'ils avaient agi d'une certaine façon ou dénoncé une situation quelconque.
Pour moi, c'est vraiment abominable. Par conséquent, lorsque l'on discute d'une disposition interprétative, je crains fort que les minorités individuelles... permettez-moi de mettre des visages pour éclairer la situation. Ces gens sont des vieillards, des mères, des enfants, des personnes qui se sont élevées contre ce qu'ils considèrent un système corrompu, contre la corruption, et qui sont tout simplement expulsées de la communauté.
Très concrètement, une disposition interprétative permettra à mon avis aux dirigeants de cette communauté de dire: « Nous nous fichons des droits que vous croyez avoir; nous allons simplement interpréter cette disposition comme si elle nous conférait un droit absolu. »
Voilà ce qui m'inquiète. Si quelqu'un ici peut me dire qu'il y a moyen de faire en sorte que cela ne se produise pas...
Je sais qu'il y a ici des gens qui doutent que ces situations se produisent réellement.
Madame Keeper, je serais très heureux si vous veniez dans ma circonscription...
Dans mon optique — et cela a même été dit au cours de la séance —, la Loi canadienne sur les droits de la personne concerne l'emploi et la prestation de services. Je ne pense pas que quiconque ici s'opposerait à ce que l'on s'assure qu'il n'y ait aucune discrimination dans les réserves ou dans les communautés autochtones dans le domaine de l'emploi. Je ne pense pas qu'aucun de nous appuierait une interprétation qui ouvrirait la porte à la discrimination en matière d'emploi. De même, je ne pense pas que cela serait accepté en ce qui concerne la prestation de services.
Je sais qu'il y a des problèmes liés aux coutumes et aux pratiques autochtones, mais je ne pense pas que la Loi sur les droits de la personne traite spécifiquement de ces questions. Son champ d'application est l'emploi.
On nous a parlé de l'emploi et de la prestation de services. Je me demandais si notre avocat-conseil pourrait évoquer la possibilité qu'advenant l'adoption d'une disposition interprétative, certaines de mes préoccupations ne s'avéreraient pas... que nous ne pourrions pas garantir la non-discrimination à l'endroit des Autochtones dans le domaine de l'emploi et des services.
Je ne suis pas trop sûr de vous suivre. Laissez-vous entendre que l'on pourrait se servir de la disposition interprétative pour créer de la discrimination?
Je songe précisément au cas d'une communauté autochtone qui, en prenant une décision fondée sur un certain nombre de critères, se trouverait à en donner une interprétation qui ouvrirait la porte à une certaine discrimination.
Premièrement, tout dépend de la nature de la disposition interprétative. Si l'on songe à l'adoption d'autres lois ou d'autres règles émanant d'autres sources, il est possible qu'on se retrouve avec des décisions rétrogrades par rapport à la protection assurée par la Loi sur les droits de la personne.
Il est possible qu'une coutume, une tradition, une loi oubliée de longue date, etc. ait pour effet de ressusciter certains des problèmes ayant causé traditionnellement des difficultés au sein d'un groupe, si elle entrait en vigueur. Par conséquent, je suppose qu'on espère que la Loi sur les droits de la personne fera en sorte que l'attribution des emplois et des services soit exempte de toute discrimination.
Quant à savoir si une disposition interprétative pourrait ouvrir la porte à une situation rétrograde, comme je l'ai dit, c'est une possibilité.
Maintenant que nous avons établi cela solidement, d'après vous, y a-t-il dans la Loi sur les droits de la personne une disposition discriminatoire à l'endroit des Autochtones? Si l'on accorde aux gens un traitement égalitaire en termes d'emploi et de prestation de services, y a-t-il dans les traditions autochtones, à votre connaissance, un aspect qui irait à l'encontre de l'égalité dans ces domaines?
Je n'ai qu'une connaissance générale des traditions autochtones. Je connais beaucoup mieux la Loi canadienne sur les droits de la personne. Sous sa forme actuelle, sa raison d'être est d'assurer une égalité fondamentale aux citoyens selon 11 critères, dont la race et l'origine nationale ou ethnique.
Très bien. Compte tenu de vos connaissances, vous ne voyez rien dans la culture ou la tradition autochtones qui aille à l'encontre de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Merci, monsieur Warkentin.
Avant de passer à M. Albrecht, j'ai Mme Crowder, Mme Keeper et ensuite, M. Russell. Vous êtes tous des parlementaires expérimentés. Vous savez que nous allons examiner toutes ces dispositions jusqu'à épuisement verbal ou physique des troupes. À ce moment-là, nous passerons au deuxième projet d'amendement de notre longue liste.
Monsieur Albrecht.
Merci, monsieur le président.
L'idée d'une disposition interprétative a certes été évoquée à maintes reprises lors des séances antérieures du comité. L'un des principaux arguments qui militent contre une disposition interprétative, c'est qu'en la rédigeant, on risque d'oublier un élément clé.
Dans son amendement, Mme Crowder a inclus, à l'alinéa 67(1)a) les programmes et les services, à l'alinéa b) la formation et l'embauche, à l'alinéa c) les terres et les ressources, à l'alinéa d) les pratiques à caractère culturel ou spirituel, ou les pratiques traditionnelles, à l'alinéa e) toute question ayant trait à la communauté, et, enfin, à l'alinéa f) les traditions juridiques.
La question que je me pose est la suivante: sommes-nous certains que cette liste de suggestions de Mme Crowder couvre toutes les éventualités? La réponse est clairement non. Nous ne pouvons pas être sûrs d'avoir envisagé toutes les scénarios possibles.
À mon avis, il est impossible de couvrir, dans une disposition, ou même dans un document de cinq pages, toutes les situations qui peuvent survenir au sein d'un groupe spécifique des premières nations.
Tout à l'heure, quelqu'un a mentionné que nous avons entendu une vingtaine de groupes qui ont présenté des exposés au sujet de l'abrogation de l'article 67. Mais nous savons, monsieur le président, qu'il existe au bas mot 600 groupes des premières nations au Canada.
Laisser entendre que la commission ou le tribunal pourrait acquérir une expertise dans toutes ces traditions et ces lois coutumières pour tous les différents groupes disséminés un peu partout au Canada est parfaitement irréaliste.
Cela ne veut pas dire que les intérêts, les traditions et les coutumes des peuples des premières nations ne seraient pas pertinents lors de l'instruction d'une plainte; ils seront pris en compte de façon spécifique dans ce contexte. Mais pour ce qui est des cas particuliers que cette disposition interprétative tente d'anticiper — ce qui est clair —, nous essayons de prévoir l'avenir et le genre de problèmes qui pourrait survenir. Finalement, tout cela n'est que pure conjecture. En réalité, ces questions peuvent uniquement être tranchées par la commission et le tribunal dans le contexte général d'une plainte qui les amènera à prendre en compte les traditions, les coutumes et les lois des premières nations.
Monsieur le président, je trouve très malheureux que le comité ait décidé de renverser votre décision de tout à l'heure, qui était très sage. Il ne faut absolument pas appuyer cet amendement. J'y suis fortement opposé.
Merci, monsieur le président.
Je dois dire que j'apprécie le ton généralement respectueux du débat d'aujourd'hui qui porte, à mon avis, sur une question très importante. Il n'y a eu qu'une seule observation au sujet du respect. Selon M. Storseth, le comité n'était pas suffisamment respectueux.
Si l'on veut vraiment parler de respect pour le processus, le comité a adopté antérieurement deux motions demandant la tenue de consultations, ce que le gouvernement a choisi d'ignorer. Par conséquent, pour ce qui est du respect du processus, lorsqu'une majorité de députés d'un comité proposent un cadre de consultation mûrement réfléchi, je pense qu'il est important d'en prendre note.
Pour revenir à la disposition interprétative, le grand défi qui est le nôtre, c'est qu'à maintes occasions, la Commission des droits de la personne, que ce soit par l'entremise des commissaires, individuellement, ou dans un de ses rapports, a souligné l'importance d'une disposition interprétative.
Lorsque la commissaire en chef de la Commission canadienne des droits de la personne, Mme Jennifer Lynch, a comparu devant le comité, elle a expliqué dans son exposé du 19 avril 2007 la nécessité d'adopter une disposition d'interprétation:
La nécessité d'adopter une disposition d'interprétation relève d'un domaine important où des divergences de point de vue ont été exprimées. Or, le projet de loi C-44 — maintenant le projet de loi C-21 — passe cela sous silence. Nous soumettons respectueusement que ce ne devrait pas être le cas. Les membres des premières nations et leurs communautés ont une histoire unique et un statut particulier dans le système constitutionnel et juridique du Canada. Leurs droits ancestraux et issus de traités sont affirmés dans la Constitution. De plus, ils ont été confirmés progressivement par les tribunaux et sont reconnus par les gouvernements de tous ordres.
À notre avis, il est impératif d'adopter une disposition d'interprétation pour que s'applique le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. De même, c'est un élément fondamental pour mettre sur pied un système approprié de recours en cas de violation des droits de la personne chez les premières nations. Une disposition d'interprétation permettrait de s'assurer que les demandes individuelles sont étudiées à la lumière de droits et d'intérêts collectifs légitimes.
De nombreux observateurs s'entendent sur la nécessité d'adopter une disposition d'interprétation, mais la façon d'y arriver fait l'objet de divergences.
C'est en ces termes que la commissaire en chef de la Commission canadienne des droits de la personne réclame une disposition d'interprétation. Ce sont les personnes mêmes qui seront chargées d'entendre les plaintes qui disent avoir besoin de cet élément en particulier.
Je suppose que ma question s'adresse aux représentants du ministère. Je me suis sentie vraiment mal à l'aise face à certains commentaires exprimés tout à l'heure. C'est presque comme si l'on présumait implicitement qu'il est impossible que les premières nations aient des droits humains égalitaires. Ces préoccupations concernent toutes sortes de décisions prises par les premières nations, qui sont potentiellement discriminatoires. Il existe une présomption intrinsèque selon laquelle les premières nations, d'une façon ou d'une autre, n'accordent pas la même validité aux droits de la personne dans leur propre milieu.
Je vais formuler mes propos sous forme de question. En matière de droits, la Commission canadienne des droits de la personne, comme je l'ai dit tout à l'heure, a soulevé la question de l'adoption d'une disposition d'interprétation, mais elle a aussi signalé qu'il existe des cas où une exigence professionnelle justifiée, un motif justifiable — vous, les avocats, savez très bien tout cela — justifie que l'on traite une personne d'une façon qui, autrement, aurait été contraire aux droits de la personne.
Dans ces documents, la commission cite certains cas où intervient ce motif justifiable. Dans la note en bas de page 28, elle cite la Commission des droits de l'homme de l'Ontario, mais j'estime que c'est un commentaire légitime. Elle précise, par exemple, qu'en vertu du paragraphe 24(1) du Code des droits de la personne de l'Ontario, ne constitue pas une atteinte au droit, reconnu à l'article 5, à un traitement égal en matière d'emploi le fait
qu'un organisme ou un groupement religieux, philanthropique, éducatif, de secours mutuel ou social dont le principal objectif est de servir les intérêts de personnes identifiées par la race, l'ascendance, le lieu d'origine, la couleur, l'origine ethnique, la croyance, le sexe, l'âge, l'état matrimonial, le statut de partenaire de même sexe ou un handicap n'emploie que des personnes ainsi identifiées ou leur accorde la préférence si cette qualité requise est exigée de façon raisonnable et de bonne foi compte tenu de la nature de l'emploi.
Et ainsi de suite.
Conséquemment, dans le contexte de certains codes des droits de la personne, on reconnaît qu'il peut exister une exigence professionnelle justifiée. On peut faire valoir que pour les premières nations, une exigence professionnelle justifiée pourrait être la maîtrise de la langue et une certaine connaissance de la culture et de la tradition autochtones. Dans ce contexte, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas envisager une disposition d'interprétation qui tiendrait compte de certaines restrictions légitimes, notamment dans le domaine de l'emploi.
J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.
Je crois avoir mentionné que le paragraphe 16(1) permet l'application de programmes spéciaux pour faire droit aux préoccupations de ceux qui ont généralement été désavantagés dans le passé — dans le cas qui nous occupe peut-être à cause de leur race —, et facilite certains avantages économiques.
J'ai mentionné également la politique relative à l'embauche préférentielle des Autochtones qui tente de favoriser cela. En fait, c'est la deuxième mouture que fait la commission de sa politique d'embauche préférentielle. La première avait été approuvée en 1990 ,et celle-ci, 13 ans plus tard. Elle ne ménage pas ses efforts pour actualiser ses documents.
Il est possible de mettre en oeuvre des politiques et des programmes de ce genre en vertu de la loi sous sa forme actuelle, ou, en tout cas, un grand nombre d'entre eux, ceux auxquels nous avons fait référence. Conséquemment, on peut faire valoir qu'il n'est pas nécessaire de doter la commission de nombreux outils additionnels. Elle applique déjà une politique spécifique à l'égard de l'emploi des Autochtones.
Elle peut faire beaucoup par elle-même. Comme je l'ai dit, elle a le pouvoir d'énoncer des lignes directrices qui sont exécutoires pour elle-même et pour le tribunal; en vertu de l'article 29, elle est habilitée à interpréter la loi. Avec les outils dont elle dispose déjà, elle peut faire beaucoup pour adapter, comprendre et appliquer les règles à des situations particulières.
Quant aux dispositions d'interprétation particulières auxquelles vous avez fait référence, celles qui portent sur les organismes philanthropiques, éducatifs, de secours mutuel, etc., elles figurent dans les lois provinciales. Elles sont absentes de la loi fédérale, la raison principale étant qu'il s'agit d'une question de propriété et de droit civil. En effet, les provinces ont compétence en ce qui concerne les droits civils ou humains des groupes religieux, des groupes d'origine ethnique nationale, d'associations de cette nature. À la différence, au niveau fédéral, la compétence des principaux organes s'applique aux grandes organisations: chemins de fer, gouvernement, compagnies aériennes, transport interprovincial et international, navigation, et diverses autres domaines relevant du pouvoir fédéral.
La composition des populations et des groupes démographiques relevant de la législation provinciale des droits de la personne est différente de celle des organismes relevant de la loi fédérale, qui constituent un groupe plus clairsemé mais tout de même assez populeux. C'est un groupe d'un type différent, et il n'existe pas de disposition analogue à celle-là à son égard. Je concède que c'est assez courant au niveau provincial. En effet, les provinces se préoccupent de la légion, du club ukrainien, de diverses églises, etc. et veulent pouvoir embaucher des employés affiliés à ces groupes et offrir des services à leur clientèle. Mais en règle générale, ces groupes ne relèvent pas de la compétence du gouvernement fédéral.
Une partie de vos propos met en relief le problème qui est le nôtre. Vous avez fait état d'une différence entre la loi fédérale et les lois provinciales en matière de droits de la personne. Encore une fois, je réitère que c'est la commission elle-même qui a préconisé l'adoption d'une disposition interprétative. Ce n'est pas quelque chose que nous avons rêvé; c'est un voeu qu'elle a clairement exprimé dans l'un de ses autres rapports également, dont je n'ai pas encore cité d'extraits.
Nous sommes aux prises avec tout un problème lorsque l'organisme même qui devra entendre les plaintes affirme qu'il a besoin d'une disposition d'interprétation et que nous ignorons complètement sa requête. C'est la commission qui devra rendre des décisions dans ces causes.
Lorsque les experts dans ce domaine particulier, ceux qui jugent du bien-fondé des plaintes depuis je ne sais combien d'années maintenant, demandent qu'une telle disposition soit incluse dans la loi, je ne comprends pas pourquoi nous faisons fi de leur opinion. À mon avis, c'est tout à fait insensé.
Je ne peux guère vous en dire plus.
Cependant, je peux mentionner le cas de Peter et Trudy Jacobs, qui a été soumis au Tribunal canadien des droits de la personne. Peter a été adopté par la bande Mohawk. Il a tissé des liens très étroits avec le peuple Mohawk. Il a appris la langue, les traditions de la longue maison, etc. Il a épousé une femme de sang pur Mohawk, et le couple vivait dans la réserve. Mais en vertu du code en cours d'élaboration à l'époque, on l'a privé de son appartenance, tout comme sa femme.
Le couple a déposé une plainte parce qu'il ne recevait pas certains services prévus dans la Loi canadienne sur les droits de la personne. Le tribunal a examiné la preuve, les traditions, enfin tous les éléments sur lesquels porte notre réflexion. Au bout du compte, le tribunal a déclaré qu'en vertu de la preuve présentée par des experts des traditions, rien ne justifiait qu'une personne adoptée soit exclue. Cela montre que dans le cadre de la loi actuelle, de la structure actuelle, il y a place pour des considérations de ce genre.
À la suite de cette décision, la disposition spécifique qui faisait problème a été modifiée afin de permettre des accommodements. À cette époque, on était tout de même sensible aux préoccupations et aux traditions des peuples autochtones. Je peux vous le dire, la question des accommodements, qui est un concept important des droits de la personne, n'a pas été perçue par les tribunaux de la même façon depuis. Il s'agit là d'une affaire qui remonte à un certain temps, mais néanmoins, elle montre que le système actuel est sensible aux préoccupations exprimées ici.
L'affaire Jacobs est intéressante, en ce sens qu'elle soulève la question plus vaste de savoir qui détermine l'appartenance à la bande et le statut d'Indien. C'est là un débat beaucoup plus large qui dépasse certainement la portée de notre discussion d'aujourd'hui.
Je sais qu'en règle générale, le Tribunal des droits de la personne a interprété de façon très étroite l'article 67. Selon une notion qui a circulé, l'abrogation de l'article 67 aura pour effet de faire bénéficier les premières nations des droits de la personne, ce qui est tout simplement faux. L'abrogation aura pour effet de leur accorder la possibilité de loger des plaintes ayant trait aux droits de la personne à l'égard de la Loi sur les Indiens. Les premières nations jouissent déjà des droits de la personne hors du cadre de la Loi sur les Indiens. Par conséquent, on a travesti le message dans ce dossier.
Mon dernier commentaire porte sur le rapport de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale pour la période de février-mars 2007. Je pense que c'est l'un des autres problèmes auxquels nous sommes confrontés. Voici la recommandation du rapport:
Tout en saluant la récente décision de l'État-partie d'abroger l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) qui avait concrètement pour effet de soustraire les dispositions de la Loi sur les Indiens et les décisions y afférentes de la protection assurée par la loi, le comité note qu'en soi, l'abrogation ne garantit pas aux Autochtones vivant sur les réserves le droit d'avoir accès à des mécanismes de recours efficaces (article 6).
Le comité invite instamment l'État-partie à engager des consultations sérieuses avec les communautés autochtones en vue d'instaurer des mécanismes assurant l'application adéquate de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) eu égard aux plaintes logées en vertu de la Loi sur les Indiens dans la foulée de l'abrogation.
Alors qu'on se demande si lamesure devrait ou non inclure une disposition interprétative, la simple abrogation de l'article 67 ne fournira pas aux communautés les ressources nécessaires pour offrir des recours. Je ne sais pas si vous avez eu l'expérience d'autres plaintes liées aux droits de la personne dans des domaines où des mécanismes de recours existent. Le logement et l'emploi me viennent à l'esprit. Interjeter appel d'une décision rendue par une bande au sujet de l'allocation de ressources limitées signifie simplement que quelqu'un d'autre sera exclu de la liste. C'est ce que cela signifie.
Je ne sais pas si vous avez des commentaires à ce sujet.
Il s'agit sans contredit d'une question plus vaste, mais des plaintes ont déjà été logées en matière d'emploi, et ces mécanismes de recours sont disponibles. Dans certaines causes qui ont été instruites — l'affaire Jacobs et d'autres —, les plaignants ont obtenu réparation.
Cependant, dans d'autres cas, l'article 67 a fait obstacle à toute réparation. Je peux vous citer en exemple l'affaire du conseil Gordon qui portait sur l'attribution de logements. La Cour d'appel fédérale a affirmé que l'article 67 était une entrave à la réparation que le plaignant aurait autrement obtenue du tribunal qui avait instruit l'affaire.
La loi prévoit un ensemble de mécanismes d'enquête, de médiation, de consultation et, finalement, de renvoi des cas qui le justifient à un tribunal. Le plaignant peut obtenir une ordonnance d'un tribunal et la faire appliquer en tant qu'ordonnance de la Cour fédérale.
C'est donc un système qui a du mordant, mais il arrive dans certains cas...
Monsieur le président, cette discussion dépasse même la portée de l'amendement de Mme Crowder. Je voudrais savoir si elle présente un sous-amendement à son amendement. Sinon, peut-être pourrait-elle simplement proposer sa motion pour que nous puissions passer au vote à ce sujet.
Je regrette, monsieur le président, mais je pense que cette discussion a un lien direct avec ma motion. Nous parlons de l'application de l'article 67. Nous nous demandons si elle aura vraiment pour effet d'améliorer sensiblement les conditions de vie des gens.
Je vais laisser M. Hendry continuer, mais si je ne m'abuse, madame Crowder, vous avez mentionné il y a de cela plusieurs minutes que vous en étiez à votre dernier point. Je vous demanderais donc de tenir parole.
Je vais simplement terminer en disant que dans l'affaire Gordon, l'obstacle n'était pas l'impossibilité d'avoir recours au tribunal. C'était l'article 67, étant donné qu'un conseil de bande a le pouvoir d'attribuer les biens immobiliers dans sa réserve.
Voici vraiment mon dernier commentaire.
Il n'y a pas de réponse à cela car le problème ne relève pas de votre compétence. La réalité est la suivante: il se peut fort bien qu'une bande soit réputée ne pas avoir fourni un logement à quelqu'un, mais je sais que dans presque toutes les collectivités autochtones, la liste d'attente pour un logement est très longue. Dans sa décision, le tribunal peut bien affirmer que le plaignant a été victime de discrimination, mais concrètement, si on lui accorde un logement, c'est simplement qu'on aura retiré quelqu'un d'autre de la liste.
C'est la réalité. Je ne pense pas qu'il y ait, dans les circonscriptions des députés, des communautés autochtones où il n'y a pas une liste d'attente pour les logements. Cela n'existe tout simplement pas.
Voilà, c'était mon argument. En l'absence de ressources additionnelles, ce qui, encore une fois, dépasse la portée de ce que vous pouvez faire — à moins que vous puissiez, d'un coup de baguette magique, injecter des ressources additionnelles dans le domaine du logement — à elle seule, l'abrogation n'améliorera pas les conditions qui ont engendré la plainte pour cause de discrimination.
C'était mon dernier commentaire.
Merci, madame Crowder.
Je sais maintenant ce que nous allons faire jeudi après-midi, ainsi que jeudi en huit. Tous ceux qui ont réservé des vols tôt jeudi prochain voudront peut-être y repenser.
J'ai Mme Keeper, M. Russell, M. Albrecht et M. Warkentin.
Madame Keeper.
J'aimerais revenir sur le commentaire de M. Hendry au sujet de l'amendement. Je paraphrase, mais vous avez parlé de ses répercussions. Selon vous, cet amendement pourrait avoir pour effet d'élargir ou de contracter le champ d'application de la loi. L'adoption d'un amendement de ce genre pourrait avoir pareilles conséquences.
Si je ne me trompe pas, mon observation portait spécifiquement sur la référence aux traditions juridiques et aux lois coutumières autochtones, que nous ne connaissons pas très bien. Cette référence pourrait avoir pour effet de modifier concrètement certaines des protections qu'offre présentement la loi.
Formidable.
Dans ce cas, j'aimerais poser une question aux représentants de la Justice. Je représente une circonscription très vaste qui compte 33 premières nations. Une organisation politique représente les premières nations du nord du Manitoba. Des 33 qui sont implantées dans ma circonscription, 27 sont représentées par la Manitoba Keewatinowi Ininew Okimakanak.
Dans leur témoignage devant le comité, leurs porte-parole ont affirmé qu'à leurs yeux, ce projet de loi constitue une atteinte à leurs droits. Selon eux, la Constitution du Canada, l'article 35, et leur traité, leur confèrent le droit de formuler des codes à l'égard de leurs collectivités, d'élaborer des lois avec le Canada, au cours de ce processus. Nous avons également entendu des représentants de l'Association du Barreau canadien. Et à propos de l'incidence de l'abrogation de l'article 67 sur d'autres mesures, il est possible qu'à la suite de ce changement, la Loi sur les Indiens elle-même puisse être soumise à la Commission canadienne des droits de la personne, en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Pourrions-nous parler de cette conséquence? Nous nous bornons à échanger sur ce que les premières nations disent à cette table, sur ce que dit le gouvernement fédéral ou sur ce que disent les conservateurs. J'aimerais que les représentants de Justice Canada nous communiquent leur perspective. Croient-ils possible qu'on se serve de la Loi canadienne sur les droits de la personne de cette façon?
Si je ne m'abuse, même le juge Muldoon a déclaré que si ce n'était de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, le Tribunal canadien des droits de la personne serait obligé de déchirer la Loi sur les Indiens pour respecter l'aspect égalitaire des droits de la personne au Canada.
Mon argument...
Oh, c'est donc votre argument, c'est ce que vous voulez faire?
Vous voulez déchirer... C'est donc cela que vous avez en tête. Mais ce que l'on dit ici, c'est que la Loi sur les Indiens est la seule loi...
... qui protège les terres indiennes. En fait, au moment de l'adoption de la Loi canadienne sur les droits de la personne, le gouvernement avait déclaré à l'époque — et c'était entendu —, qu'il allait remanier la Loi sur les Indiens afin de la moderniser. Cela ne s'est pas fait.
Je veux savoir si vous croyez... l'Association du Barreau canadien qui nous a dit que d'autres mesures législatives risquaient d' être touchées de la même manière.
Voulez-vous dire que quelqu'un pourrait loger une plainte au sujet de la Loi sur les Indiens proprement dite en invoquant le critère de la race?
Premièrement, le système des plaintes ne fonctionne pas tout à fait de cette façon. La Charte est un instrument de nature constitutionnelle qui permet de contester des dispositions spécifiques d'une loi du Parlement. En vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, vous pouvez contester une décision d'emploi discriminatoire ou vous plaindre de discrimination parce qu'on ne vous a pas fourni de services à cause de votre race.
À propos de cet argument, la Cour suprême a rendu une décision, en toute déférence pour le juge Muldoon, dans l'affaire Gosselin c. Québec en 2005, comportant la référence universelle CSC 15. Il s'agissait d'une contestation de la Charte de la langue française fondée essentiellement sur la mise en oeuvre législative de l'article 23 de la Charte, au sujet des droits linguistiques de la minorité.
Ce qui est pertinent, en l'occurrence, c'est que les juges n'ont pas admis la capacité de contester cette loi qui utilisait effectivement la Charte.
Au paragraphe 14, ils ont déclaré ce qui suit:
Ce lien est fondamental pour bien saisir la question constitutionnelle. Autrement, toute loi adoptée en vertu du par. 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 (« Les Indiens et les terres réservées pour les Indiens »), par exemple, pourrait être contestée parce qu'elle établit une distinction fondée sur la race, et les lois sur les écoles confessionnelles pourraient être détachées de leur assise constitutionnelle et contestées parce qu'elles font une distinction fondée sur la religion. Une telle interprétation aurait concrètement pour effet de neutraliser l'exercice du pouvoir reconnu par la Constitution.
Par conséquent, ce qu'on laisse entendre ici, ce que dit la cour, c'est que ces lois sont fondamentalement arrimées à leur assise constitutionnelle.
Très bien. Vous parlez donc spécifiquement de l'emploi et de la prestation de services.
Je veux poser une autre question.
Lorsque vous avez cité l'autre cas, celui auquel vous avez fait référence... Je crois que cela concernait les Six-Nations ou Akwesasne.
Oui. Au sujet de cette affaire, pour avancer...
Présentement, comme Mme Carter l'a dit, on travestit le message pour faire croire aux gens que les peuples des premières nations n'ont pas la possibilité de déposer des plaintes dans le domaine des droits de la personne. Or, ils le font présentement en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
L'Assemblée des Premières nations, de concert avec la Société des services à l'enfance et à la famille des premières nations, a déposé une plainte contre le gouvernement fédéral dans un dossier ayant trait à la protection de l'enfance. Un dossier du même ordre a aussi cours dans ma circonscription. On met en cause les services de santé offerts aux enfants vivant dans les réserves. Ces derniers n'ont pas accès à des services de santé s'ils sont atteints d'un handicap ou s'ils ont des besoins médicaux complexes.
Des questions de cette nature peuvent maintenant être soumises à la Commission canadienne des droits de la personne.
Oui.
Par conséquent, je voudrais vous demander ceci. Lorsqu'on entend le message selon lequel nous voulons accorder des droits de la personne aux premières nations et lorsqu'on entend M. Warkentin relater dans son intervention ce qui se passe... Évidemment, les premières nations ont du mal à fournir des services puisqu'elles sont chroniquement sous-financées, ce qui est le fondement de cette plainte concernant la protection de l'enfance...
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Quel rapport cela a-t-il avec l'amendement? Il faut rester dans le sujet.
Aujourd'hui, je laisse beaucoup de marge de manoeuvre aux députés dans leurs interventions. La seule chose qui m'encourage, si je peux me permettre cette observation, c'est qu'il semble se dessiner... Je ne veux pas appeler cela des « lignes de bataille », mais aux yeux de n'importe quel observateur dans la salle, il semble qu'il y ait deux opinions différentes sur cette question. Je ne suis pas certain qu'un camp puisse persuader l'autre.
J'invite les députés à présenter plus rapidement leurs arguments et à poser leurs questions. Ensuite, nous passerons au vote sur cet amendement, soit le premier des quatorze que nous devons étudier.
Merci, monsieur le président.
Je voudrais savoir dans quelle mesure les premières nations ont présentement accès à des recours en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Les Indiens des premières nations peuvent loger une plainte pour des motifs de discrimination dans le domaine de l'emploi et des services, comme tous les autres citoyens, sous réserve de l'article 67, présentement en vigueur. C'est l'objet de notre débat.
Avec votre permission, l'abrogation de l'article 67 permettra de contester des décisions rendues en vertu de la Loi sur les Indiens, ce qui n'est pas possible maintenant.
Vous avez évoqué tout à l'heure la possibilité que cette abrogation soit lourde de conséquences en ce qui a trait à la Loi sur les Indiens. C'est également ce qu'ont présumé d'autres témoins. Certes, certaines dispositions de la Loi sur les Indiens seront sans doute touchées, mais la Loi sur les Indiens est assujettie à la Charte depuis 25 ans, et elle est toujours intacte.
C'est en partie pour cette raison qu'il n'y a pas grand risque, à notre avis, que la Loi sur les Indiens soit démantelée.
Le risque n'est peut-être pas élevé, mais c'est une possibilité. D'autres députés ont évoqué le sort des minorités au sein des premières nations, et je ne sais pas trop ce que cela signifie.
Prenons l'exemple hypothétique d'une personne n'appartenant pas aux premières nations qui réside dans une réserve des premières nations. Est-ce là une situation qui pourrait poser un risque?
À l'heure actuelle, les décisions rendues en vertu de la Loi sur les Indiens ne peuvent être contestées devant la commission en raison de l'article 67. Elles pourraient l'être si l'article 67 était abrogé, et cela vaudrait autant pour les membres que pour les non-membres des premières nations.
Avant de donner la parole à M. Russell, je vous rappelle que nous devons nous présenter à la Chambre pour voter. Je crois savoir que la sonnerie retentira à 17 h 30 et que les votes débuteront à 17 h 45. Je veux simplement vous aviser que je mettrai alors fin à la séance. Le député qui aura la parole à ce moment-là pourra poursuivre son intervention à la prochaine séance.
Monsieur le président, pourrais-je présenter une motion pour que la séance soit prolongée en soirée, après les votes?
J'invoque le Règlement. Le député est habilité à présenter une motion s'il le veut. Je ne pense pas qu'il soit tenu de demander à la présidence la permission de présenter une motion.
Par conséquent, s'il a une motion à présenter, ne discutons pas à savoir s'il peut ou non en présenter une. À mon avis, il le peut.
On m'informe qu'étant donné que nous discutons déjà d'un amendement, nous ne pouvons accepter cette motion.
Merci, monsieur le président.
Bon après-midi. Je m'excuse de mon retard, mais lorsqu'une bordée de neige tombe, je peux vous dire que les raquettes et les pelles sont les plus belles inventions du monde. Je suis heureux d'être de retour.
Je veux exprimer mon avis au sujet de cet amendement en particulier, mais tout d'abord, je tiens à dire que j'ai été très déçu... et mon collègue voudra peut-être préciser sa pensée devant le comité. Je parle de M. Warkentin. Tout à l'heure, dans son intervention, il a fait référence à la corruption, allant presque jusqu'à qualifier les premières nations de foyers de corruption.
À un moment donné, il voudra peut-être clarifier ses propos. Nous n'étudions pas une mesure anti-corruption, mais l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
J'apporterai une précision très simple.
J'ajouterai une nuance: corruption présumée. Cela dit, il y a bel et bien eu des cas de corruption dans certaines des réserves de ma circonscription.
Je rappelle seulement que nous n'étudions pas une mesure anti-corruption, mais l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. C'est simplement ce que je voulais dire.
En outre, monsieur le président, le comité a été saisi de la mesure et nous avons entendu de nombreux témoins. Il est décevant que le gouvernement ait raté une belle occasion de soumettre au comité certains changements par rapport au projet de loi précédent, des changements qui auraient pu refléter les témoignages présentés par les dirigeants autochtones, par des citoyens autochtones et non autochtones, par des experts juristes et par des représentants la Commission des droits de la personne.
Cela dit, je voudrais poser aux témoins une ou deux questions. Je souhaite simplement obtenir une précision car cet amendement semble découler du fait qu'il n'existe pas de disposition interprétative.
Je me permets d'intervenir car je sais que vous êtes arrivé quelques minutes en retard aujourd'hui. Je voudrais vous expliquer comment il se fait que nous en sommes là.
Au début de la séance, j'avais déclaré cet amendement irrecevable pour des motifs ayant trait non pas à son mérite, mais à la procédure législative. L'amendement en question outrepasse la portée du projet de loi.
Comme ma décision a été contestée et renversée par une majorité des membres du comité, nous discutons donc de NDP-1, l'amendement dont nous sommes saisis. Voilà où nous en sommes.
À mon avis, la discussion a été quelque peu échevelée cet après-midi, certains ayant abordé le bien-fondé de divers concepts et notions, et d'autres, la recevabilité de la motion au plan technique. Comme vous le savez, si l'amendement est jugé irrecevable, cet argument a préséance. C'est uniquement s'il est jugé recevable qu'on discute par la suite de ses mérites.
Voilà qui vous donne une idée de la discussion que nous avons eue aujourd'hui.
Je vous remercie de cette précision. Je savais que le comité avait renversé cette décision de la Présidence.
Je veux simplement poser la question suivante: La Commission canadienne des droits de la personne est-elle liée à une disposition interprétative en vertu de sa loi habilitante en ce qui concerne les droits autochtones, les droits communautaires, les intérêts autochtones, ou à une disposition d'ordre général dont elle fait l'interprétation?
Il existe un certain nombre d'interdictions concernant la discrimination en matière d'emploi, de services, de logement, etc. C'est ce qu'elle applique.
Vous avez dit que la commission peut faire preuve d'une certaine souplesse, qu'elle dispose d'une certaine marge de manoeuvre lorsqu'elle rend une décision ou un jugement.
La commission se borne à décider ce qu'elle fera d'une plainte; c'est le tribunal qui rend la décision. Il s'agit de deux organisations distinctes. La commission dispose d'une certaine marge de manoeuvre dans l'élaboration des politiques et elle peut formuler des lignes directrices quasi-législatives pour faciliter l'interprétation de la loi, sans pour autant poser des interprétations générales. Elle dira: « C'est ce que nous pensons que cela signifie, mais voilà ce qu'il vous faut. »
Ce que je veux faire ressortir, c'est que le tribunal fonctionne déjà en vertu d'un certain principe — la souplesse, la capacité de prendre en compte diverses coutumes et lois, voire de pouvoir assurer l'équilibre entre les droits individuels et communautaires. Pourquoi cette façon de faire ne pourrait-elle pas être reproduite en parallèle dans le contexte de cette loi en particulier? Y a-t-il quoi que ce soit qui nous interdit d'insérer une disposition interprétative dans cette loi?
Le Tribunal des droits de la personne applique simplement la loi. En se fondant sur la preuve, il détermine s'il y a eu discrimination et, ensuite, il prend en compte les moyens de défense soumis par, disons, une compagnie maritime ou un conseil de bande. Par conséquent, la preuve dépendra du genre de cause.
Pour ajouter à cela, vous dites qu'à l'heure actuelle, lorsque le tribunal rend une décision, il est habilité à prendre en considération les traditions des premières nations dans son interprétation des dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne. D'ailleurs, je pense que c'est une chose que M. Hendry avait mentionnée. La différence, advenant l'adoption d'une disposition interprétative, c'est qu'elle aura l'obligation de prendre en compte l'intérêt collectif. La crainte qui a été exprimée aujourd'hui, c'est qu'en faisant cela, nous prenons un risque. Ce n'est pas automatique.
Nous ne présumons pas que de mauvaises décisions seront rendues. Nous signalons simplement qu'on court le risque qu'en prenant en compte les intérêts collectifs, ces derniers aient préséance sur les droits individuels. L'intérêt individuel risque de ne pas gagner la partie. Il se peut qu'il y ait une érosion de la protection des droits individuels. C'est ce qui arrivera nécessairement si l'on accorde préséance aux droits collectifs. C'est ce à quoi nous avons fait allusion.
Par conséquent, le tribunal peut faire cela maintenant, mais c'est subjectif. Il peut choisir de prendre en compte ou non ces facteurs. Si nous intégrons cette disposition dans le projet de loi, il sera tenu de peser tous ces facteurs particuliers. Voilà la différence.
Non. À mon avis, chaque défense possède une structure au sein de laquelle chaque élément est étayé par la preuve. Nous essayons de faire comprendre que dans un cas mettant en cause les mesures prises par un conseil de bande, par exemple, la preuve fera sans doute état des objectifs collectifs que ce conseil de bande souhaitait atteindre par son action.
Sur le fond, rien n'empêche le gouvernement de rédiger le projet de loi en y insérant une disposition interprétative, n'est-ce pas?
Le ministère de la Justice a-t-il participé à la rédaction du projet de loi? A-t-il fourni des conseils au gouvernement en ce qui concerne cette mesure en particulier?
La réponse est oui. Il va de soi que le ministère de la Justice a participé à la rédaction de ce projet de loi. Quant à savoir s'il faut y insérer une disposition interprétative, cette décision n'appartient pas au ministère de la Justice. C'est au Parlement de décider, évidemment, et il n'y a pas...
La réponse est oui; techniquement oui.
Dans vos travaux d'ébauche du projet de loi, avez-vous discuté sérieusement, entre fonctionnaires, de l'opportunité d'inclure une disposition interprétative? Le ministère s'est-il prononcé dans un sens ou dans l'autre? Pouvez-vous partager cette opinion avec le comité?
Je pense que nous ne sommes pas autorisés à communiquer l'avis qu'a donné à ce sujet le ministère de la Justice. L'avis en question est protégé par le secret professionnel qui lie un avocat à son client. Mais comme M. Reiher l'a dit, nous pouvons confirmer que le ministère de la Justice a participé à l'élaboration du projet de loi.
À ce moment-là, y a-t-il eu une discussion à savoir si des consultations suffisantes avaient eu lieu?
La question des consultations a été évoquée au cours des discussions qui ont eu lieu, mais je ne pense pas pouvoir vous en dire plus.
Pouvez-vous nous renseigner davantage sur les principes directeurs en matière de consultations? Le ministère de la Justice est-il arrivé à la conclusion qu'il n'a pas l'obligation de consulter les peuples autochtones en prévision de la rédaction d'une mesure législative? Est-ce là l'opinion du ministère? Est-ce là l'avis que vous avez donné à votre client?
Comme nous l'avons déjà dit, l'avis que nous fournissons au gouvernement est protégé par le secret professionnel. Mais cet avis s'inspire des directives de la Cour suprême du Canada.
Par conséquent, lorsque le gouvernement choisit de consulter... Je suppose que lorsque vous dites que l'avis s'inspire des directives de la Cour suprême du Canada ou des décisions d'autres instances...
En réponse à Mme Keeper, j'ai expliqué que la loi est claire au sujet des consultations concernant des décisions ayant trait à la gestion des ressources; par contre, il n'y a pas de directive claire au sujet de l'obligation de consulter en ce qui concerne l'adoption d'une mesure législative.
Mais il y a certainement un principe directeur qui vous guide en matière de consultations. Vous ne vous bornez pas à dire que vous n'avez pas de position claire à ce sujet.
D'après mon expérience, Justice Canada adopte des positions claires dans ses dossiers et il se fonde sur des arguments de fond pour défendre ses positions. Habituellement, vous en arrivez collectivement à une décision concernant des enjeux comme les consultations et, ensuite, vous les défendez avec conviction. C'est la raison pour laquelle le ministère emploie 900 avocats, pour faire précisément ce genre de chose...
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. La question de la consultation ne fait pas partie de l'amendement à l'étude. Nous avons eu des délibérations qui ont duré de nombreux mois au sujet des consultations. En ce moment, M. Russell ne discute pas du bien-fondé de l'amendement.
J'ai fait preuve d'une grande latitude aujourd'hui, monsieur Russell, à bien des égards. M. Bruinooge a raison. Avez-vous des questions précises, qui auraient ne serait-ce qu'un rapport quelconque avec les dispositions qui font vraiment l'objet de...
Je ne suis pas d'accord avec la présidence. Chaque question que j'ai posée avait un rapport quelconque avec l'amendement à l'étude.
Je ne peux parler pour Mme Crowder, mais il ne fait aucun doute que l'amendement proprement dit a été généré par les problèmes entourant les consultations, par le fait qu'il n'y a pas de disposition interprétative dans le projet de loi, etc. Mais que l'on en parle ou non spécifiquement dans chaque paragraphe ou alinéa, il n'en reste pas moins que cela a un rapport direct avec l'amendement.
Comme c'est le temps de l'année où l'on fait des souhaits, vous pourriez peut-être présenter une demande en ce sens au père Noël.
Je veux simplement continuer. Y a-t-il un principe directeur en ce qui concerne la rédaction des lois au niveau fédéral et les consultations avec les peuples autochtones? Pouvez-vous simplement me dire s'il y a une ligne directrice à cet égard.
Il n'existe pas de ligne directrice particulière. Récemment, le ministre des Affaires indiennes, si je ne m'abuse, a annoncé les premiers pas vers une politique de consultation des peuples autochtones; il existe un plan d'action pour y arriver.
En ce qui concerne les consultations relatives à l'élaboration de mesures législatives, le principe fondamental, qu'il s'agisse d'un enjeu politique ou juridique, est qu'il est toujours bon de consulter si l'on veut rédiger de bonnes lois.
Chers collègues, la sonnerie retentit.
J'ai sur ma liste pour jeudi, une fois que M. Russell aura terminé, M. Albrecht et M. Warkentin.
J'espère qu'au cours des prochaines 48 heures, les membres du comité jugeront bon de clore la discussion et de passer au vote. Je n'allais pas interrompre un député, surtout à sa première question.
Je vous reverrai tous jeudi après-midi à 15 h 30.
La séance est levée.