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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 012 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 6 février 2008

[Enregistrement électronique]

(1540)

[Traduction]

    Je souhaite la bienvenue aux députés. Comme il y a eu des votes après la période des questions, nous avons une dizaine de minutes de retard et certains députés ne sont pas encore arrivés, mais je crois qu'ils ne tarderont pas.
    Je rappelle à tout le monde que nous accueillons le ministre, le très honorable Chuck Strahl, qui nous parlera du projet de loi C-30. Il sera avec nous jusqu'à 16 h 30, mais ses collaborateurs resteront pendant toute la séance, jusqu'à 17 h 30. Les députés pourront poser des questions et obtenir des réponses.
    Nous allons suivre la marche habituelle, comme la dernière fois. Une fois terminée la déclaration liminaire du ministre, nous aurons un premier tour de questions, et chacun aura sept minutes. Aux tours suivants, ce sera cinq minutes. Comme la dernière fois, je ferai respecter les limites de façon assez stricte, de façon à avoir le plus grand nombre de tours possible.
    Là-dessus, au nom du comité, je vous souhaite la bienvenue, ministre Strahl. Vous avez une déclaration d'ouverture à faire?
     Mesdames et messieurs les membres du comité, c'est un plaisir d'être parmi vous pour vous parler d'un projet de loi auquel pensent depuis des dizaines d'années de nombreux Canadiens et surtout beaucoup de dirigeants des premières nations, c'est-à-dire le projet de loi C-30, Loi sur le Tribunal des revendications particulières.

[Français]

    Le projet de loi C-30, vous le savez tous, est la pierre angulaire de la mise en oeuvre du plan d'action global sur les revendications particulières annoncé l'été dernier par le premier ministre Harper et le chef national de l'Assemblée des Premières Nations, Phil Fontaine.

[Traduction]

    Les gouvernements qui se sont succédé à Ottawa depuis la naissance de notre pays ont conclu des traités avec les premières nations, mais il est arrivé que la Couronne ne respecte pas les obligations que lui imposaient ces traités et d'autres accords signés. Le projet de loi C-30 va nous aider à redresser ces torts en conciliant les intérêts des premières nations et ceux de tous les Canadiens.
    Les dirigeants des premières nations préconisent l'adoption d'une loi de ce genre depuis 60 ans. Et si la chose se réalise enfin aujourd'hui, c'est grâce à des partenaires engagés. Nous nous sommes mis à l'écoute et nous avons travaillé en étroite collaboration avec l'Assemblée des Premières nations pour répondre à cette demande. Comme l'a dit Phil Fontaine à propos du projet de loi C-30, c'est une sacrée bonne loi.
    Le projet de loi incarne l'esprit de collaboration véritable et productive que partagent le gouvernement du Canada et l'Assemblée des Premières nations. Nous montrons à tout le pays les avantages qu'il y a à travailler ensemble en vue d'un objectif commun, soit un processus de règlement des griefs historiques qui est novateur et tourné vers l'avenir.
    Avec la création d'un Tribunal des revendications particulières apte à rendre des décisions exécutoires, le gouvernement prouve sa volonté de régler ces revendications de longue date. Après seulement deux ans au pouvoir, le gouvernement a accompli de grands progrès vers le règlement de revendications territoriales dont bon nombre ont traîné sous les gouvernements précédents, parfois pendant des générations.
    En juillet dernier, le gouvernement et l'Assemblée des Premières nations ont mis sur pied un groupe de travail mixte qui réunit des représentants du Cabinet du premier ministre, du cabinet de l'ancien ministre Jim Prentice et de fonctionnaires du ministère, ainsi que des représentants du bureau du chef national et des chefs régionaux de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et de la Saskatchewan.
    Le groupe de travail a supervisé l'élaboration du texte de loi avec l'aide d'un groupe d'experts techniques de l'APN et du gouvernement fédéral, qui a étudié en détail les éléments du projet de loi.
    Il importe d'examiner quelques éléments clés de ce projet de loi historique. Je veux aussi expliquer comment nous avons pris en compte les recommandations et les critiques antérieures issues de différentes sources: le rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones intitulé Négociations ou affrontements: Le Canada a un choix à faire, le rapport produit en 1998 par le Groupe de travail mixte premières nations-Canada ainsi que les leçons retenues de la Loi sur le règlement des revendications particulières.
    Comme le premier ministre l'a dit le 12 juin 2007, les revendications d'une valeur de plus de 150 millions de dollars ne seront plus assujetties au processus de règlement des revendications particulières. La compétence du tribunal que propose de créer le projet de loi C-30 serait limitée aux revendications dont la valeur ne dépasserait pas les 150 millions de dollars, ce qui signifie que le tribunal ne pourrait accorder d'indemnisation supérieure à ce montant.
    Je tiens à préciser quelques points à ce sujet.
    Premièrement, une limite de compétence de 150 millions de dollars par revendication représente une augmentation considérable par rapport à la limite de 10 millions prévue par la Loi sur le règlement des revendications particulières, fortement critiquée par les premières nations.
    Deuxièmement, la vaste majorité des revendications particulières peuvent être résolues à l'intérieur de cette limite au moyen d'accords négociés ou par l'entremise du tribunal.
    Troisièmement, les revendications de valeur supérieure requièrent une plus grande latitude, qui ne peut être obtenue que par un mandat du Cabinet, délivré au cas par cas. En soustrayant les revendications de grande valeur à l'application de la politique sur les revendications particulières et au processus d'examen par le tribunal, nous faisons en sorte que l'allocation annuelle de 250 millions de dollars puisse servir à régler un plus grand nombre de revendications particulières.
(1545)

[Français]

    Enfin, dans l'accord politique que le chef national Phil Fontaine et moi-même avons signé il y a un peu plus de deux mois, le gouvernement fédéral s'est engagé à poursuivre l'étude de formules d'examen des revendications non couvertes par la politique sur les revendications particulières et le projet de loi.

[Traduction]

    En somme, le projet de loi et l'accord politique qui l'accompagne sont les fruits d'un travail de collaboration qui a exigé des compromis des deux côtés. Il peut être difficile de parvenir à un équilibre idéal, mais cette initiative est un bon exemple qui montre comment la collaboration peut donner des résultats justes et équitables pour tous. C'est pourquoi j'estime que nous devons faire avancer ce projet de loi rapidement, sans y apporter de modifications.
    Certains ont dit craindre que la somme de 250 millions de dollars par année ne suffise pas à payer à la fois les accords de règlement négociés et les indemnisations accordées par le tribunal. Comme je l'ai dit, étant donné que les revendications de grande valeur ne seront pas payées sur les fonds réservés et que le gouvernement conserve la possibilité de verser les fonds, avec intérêts, sur une période de cinq ans, je suis persuadé que les ressources affectées au règlement des revendications particulières seront suffisantes.
    Enfin, l'examen quinquennal de la loi permettra d'établir si les ressources financières prévues ont été suffisantes.
    J'aimerais maintenant prendre quelques minutes pour parler de l'inadmissibilité des revendications fondées sur des droits conférés par traité relativement à des activités susceptibles d'être exercées de façon continue et variable, notamment des droits de récolte, dont le tribunal pourrait être saisi. Je veux être bien clair: ces revendications ne peuvent pas faire l'objet de négociations dans le cadre de la politique sur les revendications particulières. Le fait que le projet de loi interdise la présentation de ces griefs en tant que revendications particulières ne limite pas l'application de la politique. Il s'agit plutôt d'une clarification nécessaire.
    La politique sur les revendications particulières doit permettre de résoudre les griefs historiques en réglant définitivement les dettes et les obligations dont on ne s'est pas acquitté. Le processus établi à cet égard ne convient tout simplement pas aux grandes questions posées par les droits permanents conférés par traité, qui sont indissociables de nos relations continues avec les premières nations. Si les députées le souhaitent, je me ferai un plaisir de parler d'autres initiatives que nous réalisons en Colombie-Britannique et ailleurs.
    Nous sommes bien conscients de l'importance de ces questions. C'est pourquoi l'accord politique comprend un engagement par lequel les parties acceptent d'établir ensemble une approche commune pour aborder les questions relatives aux traités qui ne sont pas réglées par le projet de loi ou la politique sur les revendications particulières. Cet engagement conjoint se traduira d'abord par une conférence nationale sur les traités, qui aura lieu en mars prochain.
    Le tribunal se penchera sur des revendications particulières touchant un large éventail de questions, dont les terres, mais il ne pourra accorder que des indemnités monétaires. Toutefois, les premières nations pourront choisir d'utiliser les sommes reçues pour acheter des terres de gré à gré. Comme le prévoit l'accord politique, les terres achetées avec les fonds reçus en indemnisation seront considérées en priorité aux fins d'ajout aux réserves.
    Au moment de la décision du tribunal, la première nation devra renoncer à son intérêt sur la terre visée par la revendication particulière. Cette disposition est nécessaire pour libérer les titres fonciers, du fait qu'une grande partie des terres visées par les revendications particulières appartiennent maintenant à des tiers. Je précise que cette façon de procéder est conforme à la démarche adoptée dans les accords négociés. Les gouvernements provinciaux et territoriaux ont aussi un rôle à jouer à cet égard. Ils participent à certaines négociations, et nous espérons qu'ils participeront davantage aux négociations sur le règlement des revendications particulières.

[Français]

    Notre gouvernement conservateur demeure convaincu que la négociation est la meilleure façon de résoudre ces revendications.

[Traduction]

    Le projet de loi C-30 ne liera pas les gouvernements provinciaux et territoriaux, à moins que l'un d'entre eux ne se soit ajouté au nombre des parties en cause et n'atteste par écrit qu'il a pris les mesures nécessaires pour être lié par la décision du tribunal.
    Bien que nous respections les compétences des provinces et des territoires, je suis conscient que les décisions du tribunal établissant que le Canada n'est pas le seul responsable des préjudices subis par la première nation requérante pourraient susciter des inquiétudes. Je tiens à préciser que, si la province ou le territoire n'a pas demandé à être partie en cause, le tribunal ne peut rendre de décision quant à sa responsabilité, auquel cas le tribunal ne statuera que sur la responsabilité du gouvernement fédéral. Toutefois, les premières nations pourront encore présenter leurs revendications aux provinces et aux territoires et, pour les régler, s'adresser aux tribunaux ou entreprendre un processus de négociation avec les parties concernées.
    Le projet de loi est conçu pour apporter plus de rigueur au processus de règlement des revendications particulières, ce qui aurait dû être fait depuis longtemps, vous en conviendrez. Au cours des audiences du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones tenues il y a un peu plus d'an, de nombreux témoins ont souligné la nécessité, pour le gouvernement fédéral, de fixer par une loi des échéanciers précis pour l'étude des revendications particulières. C'est ce que nous avons fait au moyen du projet de loi C-30.
    Nous avons aussi prévu des conséquences en cas de non-respect de ces échéanciers. Le projet de loi exige que le gouvernement fédéral étudie les revendications particulières dans un délai de trois ans. Il en sera de même pour les revendications en suspens, comme le prévoient les dispositions spéciales de transition. Pour que le gouvernement puisse respecter ces délais, toutes les demandes doivent satisfaire à une norme minimale raisonnable quant au type d'information à fournir et au mode de présentation de l'information.
    Si le gouvernement ne signifie pas à la première nation que sa demande a été acceptée ou rejetée aux fins de négociation dans le délai de trois ans, la revendication sera réputée avoir été rejetée et la première nation aura la possibilité de la présenter au tribunal. Les premières nations pourront aussi soumettre leur revendication au tribunal si les négociations n'ont pas abouti à un règlement après une période de trois ans, ou plus tôt si le Canada y consent.
    Il faut toutefois souligner que la première nation n'est pas obligée de soumettre sa revendication au tribunal après trois années de négociation. Les parties peuvent poursuivre les discussions. Toutefois, après qu'une revendication a été soumise au tribunal, une décision finale sera rendue, à moins que la revendication n'ait été retirée préalablement.
    Au sujet des préoccupations formulées par le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones et d'autres intervenants quant aux ressources consacrées au processus d'examen des revendications particulières et à l'élaboration des nouveaux principes directeurs, je voudrais rappeler que le gouvernement a abordé ces questions dans sa réponse au rapport sénatorial.
    
Nous avions alors indiqué que nous évaluerions soigneusement les ressources à prévoir pour résoudre rapidement les revendications particulières, et que l'équité, l'inclusion et le dialogue étaient selon nous des principes importants dans la nouvelle démarche entreprise pour résoudre les revendications particulières. Nous avions ajouté que les nouvelles structures seraient accompagnées des ressources nécessaires.
     Nous avons certainement montré que le projet de loi C-30 a été élaboré en étroite collaboration avec les premières nations. Nous allons poursuivre les discussions sur bien d'autres questions, comme nous en avons convenu dans l'accord politique signé en novembre. Nous allons aussi nous assurer des ressources nécessaires pour garantir la réussite de ce nouveau processus de règlement des revendications territoriales particulières.
     En terminant, j'aimerais citer une observation du chef national mentionnée dans le rapport du comité sénatorial, Négociations ou confrontation: Le Canada a un choix à faire :
    
De nombreux Canadiens ont peur des revendications territoriales. Les gens craignent vraiment que si une revendication se règle, ils soient dépossédés de leurs terres et de leur propriété et privés de leurs droits. Pour les premières nations, il n'a jamais été question de priver qui que ce soit des droits dont nous devrions tous jouir.
    Monsieur le président, il est temps de faire preuve de la même courtoisie à l'égard des premières nations en corrigeant les torts du passé et en réglant ces griefs de longue date. J'invite tous les membres, peu importe le parti auquel ils appartiennent, à appuyer cette loi importante afin que nous puissions en arriver à un règlement définitif des revendications particulières, et ce, au bénéfice de tous les Canadiens.
    Merci.
(1550)
    Merci, monsieur le ministre.
    Avant de passer aux questions, auriez-vous l'obligeance de nous présenter vos collaborateurs qui vous accompagnent.
    Merci. J'aurais dû le faire.
    Sylvia Duquette et Robert Winogron sont mes deux collaborateurs. Ils ont participé aux négociations et ils pourront répondre à toutes les questions de nature technique. Je tiens à les remercier publiquement du travail qu'ils ont accompli, avec les autres négociateurs, pour parvenir à cet accord. La conclusion de l'accord témoigne de la qualité des efforts de tout ce groupe de travail.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    C'est Mme Neville qui posera les premières questions.
    Merci beaucoup. Merci, monsieur le ministre, d'être là. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Il s'agit d'une loi importante, et nous le reconnaissons.
    Avant de poser mes questions, je voudrais cependant revenir sur vos propos. J'ai remarqué que vous aviez souvent parlé de collaboration, et nous vous en félicitons. Nous espérons que, dans toute activité future avec les premières nations, les Métis, les Inuits et tout autre groupe, nous saurons aussi collaborer et consulter. Comme vous et moi le savons, c'est la seule façon de réussir dans des dossiers comme ceux-là. Je tenais donc à le souligner.
    J'ai quelques questions à poser, monsieur le ministre.
    Pourriez-vous en dire un peu plus sur les revendications particulières de plus de 150 millions de dollars? Vous savez que, pour un nombre important de revendications, on ne pourra pas recourir au tribunal. Il faut également régler ces revendications rapidement et équitablement. Selon vous, comment pourra-t-on les régler?
(1555)
    Merci. Je suis d'accord avec vous à propos de la collaboration. Chaque fois que des groupes, y compris des partis politiques, peuvent travailler ensemble, la collaboration vaut la peine et donne de bons résultats. J'espère que le projet de loi l'illustrera.
    Il est probable que deux des plus belles réussites de la législature auront été le règlement de l'affaire des pensionnats et le projet de loi proposé ici. Ce sont deux exemples éclatants des résultats de la collaboration. Je suis d'accord avec vous, c'est la meilleure formule, lorsqu'il est possible d'y recourir.
    Les grandes revendications dont le tribunal ne pourra pas se saisir sont celles de plus de 150 millions de dollars. Il y en aurait entre six et vingt, selon les divers interlocuteurs. Quoi qu'il en soit, dans le cas du tribunal, nous avons établi les paramètres de ce qui était visé. Pour les grandes revendications particulières, il faudra un mandat du Cabinet pour négocier au cas par cas.
    Dans les très grands dossiers, il faut généralement plus de souplesse et un mandat du Cabinet pour faire aboutir le règlement. Si on les faisait reposer sur le processus proposé ici, on risquerait de s'enliser et de ralentir tout le reste. Il y a en tout 800 revendications dont nous sommes saisis. La plupart sont visées ici et j'estime que, si nous englobions les revendications très importantes, nous risquerions d'engorger le système.
    Il faudrait donc un mandat du Cabinet. Ce mandat laisserait la latitude nécessaire aux négociateurs, au cas par cas, pour essayer de parvenir à un règlement encadré par le mandat.
    Croyez-vous que ces revendications, compte tenu de leur complexité, seront réglées d'une manière suffisamment rapide?
    Je l'espère, bien entendu. Je suis allé dans le nord de l'Alberta, où nous avons signé un accord de principe avec la nation de Bigstone. Le dossier a évolué de telle façon que la province a fini par participer à l'accord, qui traite des écoles, prévoit une certaine autonomie gouvernementale, porte sur des montants considérables et un vaste territoire. L'accord a fini par être très important, même s'il ne relève pas de la politique sur les revendications globales. Cela montre encore qu'il faut une certaine souplesse.
    Nous devrions pouvoir négocier deux choses, je dirais. Il faut prévoir négocier le plus rapidement possible, mais plus l'enjeu est important, plus il faut que, de part et d'autre, on fasse diligence. Les premières nations ont la même obligation. Bien sûr, elles veulent être prudentes. Comme un accord important est lourd de conséquences, il faut de la prudence, de leur point de vue, mais l'accord est également important pour le gouvernement du Canada. Il faut donc faire preuve de diligence raisonnable, et il n'est pas facile de fixer un calendrier aussi précis que ce que le projet de loi prévoit.
    Selon moi, l'impact global du tribunal sera d'ouvrir la voie au règlement rapide de beaucoup plus d'accords négociés, qu'ils soient importants ou plus modestes, parce qu'il suscite un climat dans lequel nous constatons que non seulement nous pouvons traiter ensemble, mais que nous pouvons aussi régler rapidement des revendications de longue date. Il y aura donc, je l'espère, un climat propice à des négociations plus rapides dans tous les cas, que l'enjeu soit très important ou plus réduit.
    Voici maintenant une question sur le tribunal. Un passage de l'accord politique sur lequel je voudrais plus de précisions dit :
Le chef national participera au processus de recommandation des membres du Tribunal tout en respectant la confidentialité de ce processus.
    Je voudrais des précisions, car cette disposition est bien différente de la formule qui a été proposée en 1998 et faisait dépendre l'admissibilité de la responsabilité conjointe de l'APN et du ministère.
    Pouvez-vous me dire comment vous en êtes arrivés à cette décision et pourquoi?
    Il est important de signaler que le tribunal sera composé de juges. Les choses se présentent différemment, puisqu'il s'agit de juges.
(1600)
    J'en suis consciente, mais je veux parler du processus de nomination.
    Oui, mais une fois que des juges interviennent — et la solution convenue a été de faire appel à des juges, et à des juges d'une grande expérience, je l'espère —, leur nomination relève du ministère de la Justice et du ministère des Affaires indiennes et du Nord. Nous tenons à avoir un mécanisme de consultation avec le chef national.
    Nous ne créons pas de nouvelles modalités de nomination des juges, à proprement parler. Nous disons que nous aurons une étroite collaboration avec le chef national, qui travaillera avec l'Assemblée des Premières nations à la formulation de recommandations. Comme les juges seront choisis parmi les juges existants, il n'est pas acceptable qu'un juge fasse partie du groupe de sélection. Autrement dit, des recommandations seront faites, avec la collaboration de l'Assemblée des Premières nations, par l'entremise du chef national, mais les personnes seront choisies parmi les juges existants, et, dans le processus de nomination, les juges relèvent du ministre de la Justice.
    Une précision. Dites-vous que le ministre de la Justice fera la nomination au lieu du ministre des Affaires indiennes? C'est ce qu'on entend faire?
    C'est juste. Les juges seront choisis parmi les juges qui siègent déjà, et c'est le ministre de la Justice qui les choisira.
    Merci.
    Monsieur Lemay.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre. J'apprécie beaucoup le travail qui a été fait. La création du Tribunal des revendications particulières est un travail important; un bon boulot a été fait.
    Monsieur le ministre, j'ai plusieurs questions qui sont, je l'avoue, assez pointues. Je ne mets pas en doute votre compétence, ce n'est absolument pas le cas. Cependant, ma première question est un peu plus générale. Les provinces, et bien évidemment le Québec, ont-elles été consultées avant le dépôt du projet de loi sur la création du Tribunal des revendications particulières?
    Je peux déjà demander à vos assistants de consulter l'article 15 du projet de loi, parce que j'aurai des questions là-dessus.

[Traduction]

    Je peux répondre. Les provinces ont été consultées sur la notion de revendication particulière, si on veut, mais elles n'ont pas participé à l'élaboration du projet de loi. Nous avons pris soin, dans la rédaction du projet de loi, d'éviter de leur imposer des obligations. Nous n'essayons pas non plus de forcer les provinces ou les territoires à participer contre leur gré. Nous n'essayons aucunement de nous immiscer dans leur champ de compétence.
    Par contre, les provinces peuvent participer, si elles le veulent, en manifestant leur intérêt par écrit.

[Français]

    Je ne veux pas vous interrompre, monsieur le ministre, mais vous me permettrez de lire le paragraphe 1 de l'article 23 du projet de loi :
    23. (1) Le Tribunal n'a compétence à l'égard d'une province que si celle-ci est partie à la revendication particulière.
    Le Québec fait encore partie de la Confédération du Canada, et ce que je vais dire est valable aussi pour d'autres provinces. Supposons qu'une revendication territoriale touche une partie du Québec. Elle pourrait être présentée, par exemple, par des Algonquins au nord de Maniwaki. Je précise que ça pourrait se passer dans d'autres communautés.
    N'y aurait-il pas lieu d'indiquer ce qui suit dans le projet de loi que, lorsqu'une revendication particulière peut toucher une province, celle-ci soit immédiatement mise en cause, qu'on n'attende pas que le jugement soit rendu? Ça a un impact sur la province, la municipalité, la municipalité régionale de comté. Ce n'est pas dans le vide. Ça va bien dans le cas d'un territoire « isolé », mais quand on présente une revendication particulière de 100 millions de dollars qui touche un territoire enclavé dans une municipalité ou une province, je me pose la question suivante: n'y aurait-il pas lieu que celle-ci soit mise en cause immédiatement?
(1605)

[Traduction]

    Je demanderai peut-être à mes collaborateurs de donner aussi leur point de vue, mais une distinction s'impose: rien, dans le projet de loi, ne tend à obliger ni n'obligera les provinces à faire quoi que ce soit. Elles n'ont aucunement à participer, elles n'ont pas à faire partie de cette initiative, elles n'ont pas à admettre une responsabilité, ni quoi que ce soit d'autre. Elles échappent tout à fait à la portée du projet de loi.
    Une disposition prévoit que, si elles veulent participer à l'instance — et si elles veulent le faire pour leurs propres fins —, elles doivent se soumettre à un processus pour être partie à l'instance. Elles doivent signifier par écrit que telle est leur volonté et montrer comment elles ont pris des engagements, peut-être à leur assemblée législative, sur la façon donner suite à la décision.
    Une fois qu'elles ont signé, les provinces sont parties à la démarche, mais seulement si elles le veulent pour des fins qu'elles peuvent définir. Autrement, il s'agit strictement d'une obligation fédérale et d'une relation entre le gouvernement fédéral et les premières nations.
    La chose s'est produite à l'occasion, et l'un des députés ici présents a demandé si les gouvernements provinciaux prennent parfois part à ces négociations. Elles le font à leur gré. Elles sont déjà présentes aux négociations, et elles peuvent participer ou non. Elles sont toujours les bienvenues, mais il n'y a dans le projet de loi rien qui les oblige.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Sylvia voudrait peut-être intervenir.

[Français]

    J'aimerais souligner une chose. Vous avez parlé des Algonquins. Il ne s'agit pas de revendications globales, ce sont des revendications particulières. La seule chose que le tribunal peut faire en tout temps est de déterminer le montant d'argent dû. Il n'y aura donc aucune déclaration concernant, par exemple, la position des terres ou autre chose qui peut toucher la province.
    Je pourrais y revenir lors de la deuxième partie, mais rapidement, que se passait-il relativement aux revendications particulières avant la Confédération, donc avant 1867? Y avait-il un mécanisme de prévu? On sait qu'il y a des revendications à ce niveau.

[Traduction]

    Mes collaborateurs ont hâte de répondre.
    Il y a des dispositions dans le projet de loi. Les paragraphes 14(2), 14(3) et 14(4) sont un peu verbeux, mais ils permettent au revendicateur de présenter une revendication fondée sur des faits survenus avant la Confédération.
    Merci.
    Madame Crowder.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, de comparaître pour parler de ce projet de loi important.
    J'ai trois questions que je vais poser d'emblée avant que vous ne répondiez.
    D'abord, quels types d'engagement et d'assurance y a-t-il comme quoi l'accord politique sera appliqué dans les meilleurs délais? Il est arrivé que d'autres accords politiques tombent à l'eau lorsqu'il y a eu un changement de gouvernement.
    La deuxième question est de l'ordre des principes et intéresse ceux d'entre nous qui, dans une vie antérieure, se sont occupés de médiation, de négociations, etc. Nombre d'entre nous ont travaillé dans un contexte où les négociations et la médiation se fondaient sur les intérêts des parties. Sur le plan des principes, veut-on évoluer vers une approche fondée davantage sur la collaboration plutôt que sur l'opposition des intérêts pour régler ces revendications? Même dans ce travail, il y a encore une opposition entre les intérêts.
    Ma troisième question découle des excellents travaux exécutés par le personnel parlementaire sur la transition. Les documents nous apprennent qu'il y a 612 revendications à l'étude et 138 à l'étape des négociations. Des témoins du ministère qui ont déjà comparu ont dit que l'arriéré était nettement plus considérable, puisque des revendications n'ont pas encore atteint ce stade de l'examen.
    Les services parlementaires de recherche disent que, lorsque nous considérons les revendications qui sont déjà dans le circuit, l'effet concret de l'article 42 est de remettre le compteur à zéro, aux termes de l'article 16, pour tous les revendicateurs qui ont des revendications actives, peu importe quand elles ont été présentées ou quand il a été décidé de négocier selon le système antérieur à celui du Tribunal des revendications particulières.
    En somme, remettre le compteur à zéro pour les revendications qui sont dans le système et ont pu l'être pendant un bon nombre d'années, une fois l'examen fait, semble désavantageux. Y a-t-il des ressources supplémentaires ou des mécanismes permettant d'éviter cet inconvénient pour ceux dont la revendication est dans le système depuis de nombreuses années?
    Merci.
(1610)
    Merci, ce sont autant de bonnes questions.
    Pour ce qui est de l'accord politique, l'Assemblée des Premières nations y a adhéré, et j'ai fini par l'approuver. Les négociations se sont déroulées lorsque Jim Prentice était ministre, mais j'ai signé, une fois terminée la tâche du groupe de travail.
    L'accord politique énonce les attentes de l'Assemblée des Premières nations et du chef national ainsi que les miennes pour ce qui est de la fréquence des réunions et l'engagement ministériel à donner suite aux décisions. Les négociations ont débuté lorsque Jim Prentice était ministre, mais j'ai facilement donné mon accord. J'espère qu'il rassure l'Assemblée des Premières nations parce qu'il se situe au niveau ministériel. Il ne s'agit pas seulement d'un service quelconque du ministère. Nous voulons nous assurer que le ministre tient lui-même à régler les problèmes qui gravitent autour des revendications.
    C'est un engagement politique, un accord politique. C'est pourquoi, il me semble, n'importe quel titulaire voudra le respecter. Le renier serait fort peu judicieux. On a suscité beaucoup de bonne volonté, et l'accord politique en témoigne. C'est donc un engagement politique et non une loi, mais c'est un document important qui intéresse les plus hautes instances des premières nations et du gouvernement du Canada.
    L'autre question porte sur l'orientation fondamentale: que peut-on faire pour éviter le caractère adversatif que la démarche suppose? Selon moi, il y aura trois choses. D'abord, nous engageons des ressources plus importantes. La commission actuelle, par exemple, se transformera pour jouer un rôle de médiation. Elle n'aura plus simplement à accepter les revendications au fur et à mesure et à les accumuler. Elle a fait du bon travail, mais son rôle va changer. Étant donné la présence du tribunal, elle va s'orienter vers un rôle de médiation. Ce rôle est important, et j'espère qu'elle pourra réunir les parties et faire avancer les dossiers avant qu'on n'en arrive à la confrontation.
    Dans l'ensemble, l'effet le plus important sera le tribunal lui-même, qui fixe des limites de temps, enfin. Les premières nations n'auront plus à reprendre des revendications dont elles ont hérité, ce qui est exaspérant. Quand les choses traînent pendant une génération, le climat finit par se gâter. Si on en arrive à un stade où il semble impossible de négocier ou si trois ans ont passé, l'affaire peut être renvoyée au tribunal, aux juges, à la discrétion de la première nation. Il n'y a plus de confrontation, car ce sont les juges qui rendent une décision.
    Le fait que le tribunal soit là et que les choses se fassent dissipera beaucoup de tension. Il n'y aura plus de lutte qui dureront toute une vie — c'est arrivé maintes fois par le passé —, et tous seront incités à travailler ensemble. Comme nous saurons tous que la limite est de trois ans, nous ne perdrons pas de temps. En soi, cela sera un important élément de médiation, de dynamisme dans tout le système.
    La dernière chose que j'ai notée ici, ce sont les revendications déjà engagées dans le système. Il faut des ressources plus abondantes, comme l'ont signalé le rapport du Sénat et le groupe de travail. Il en faut davantage pour éviter de simplement transférer l'arriéré d'un système à l'autre. Autrement, j'ignore comment nous pouvons nous y prendre. Vous avez parlé de la limite de trois ans. C'est à la discrétion des premières nations. Elles auront le choix. Elles pourront confier l'affaire au tribunal si elles estiment que cela a assez duré. Cela dépend d'elles; le gouvernement ne prendra pas cette initiative.
    Je crois que le ministre peut aussi accepter de recourir au tribunal plus tôt. Si les premières nations me disent que l'affaire a assez traîné et qu'elles veulent recourir au tribunal, le ministre peut accepter, même si les trois ans ne sont pas terminés.
(1615)
    Certaines des revendications qui sont dans le système depuis longtemps seraient des causes de choix à porter devant les tribunaux. Nous n'aurions pas à attendre trois ans pour le saisir d'une première revendication.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Bruinooge.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre Strahl, de comparaître aujourd'hui. Depuis qu'on vous a confié cet important portefeuille, vous avez vraiment pris au sérieux ce projet de loi et le travail nécessaire à son aboutissement.
    J'ai vu tous les efforts qui y ont été consacrés non seulement par vos collaborateurs et le ministère, mais aussi par l'APN. Il faut leur accorder beaucoup de crédit pour l'important travail qu'ils ont fait pour faciliter la rédaction du projet de loi. Voilà qui montre vraiment que, en démocratie, il arrive que les parties puissent se rejoindre et accomplir un excellent travail dans les domaines où elles peuvent s'entendre. Nous en avons ici un exemple éclatant.
    Vous avez vraiment pris une initiative dans ce dossier. Pourriez-vous expliquer brièvement comment vous pouvez y voir une réforme systémique vraiment très importante, d'autant plus que, depuis quelques années, le nombre de revendications en souffrance a singulièrement augmenté? Pourriez-vous expliquer comment vous avez fait de ce dossier une priorité et comment, selon vous, cette initiative permettra de réduire le nombre actuellement considérable des revendications en souffrance.
    Merci. Juste un mot à ce sujet. J'en ai assez parlé, mais il vaut toujours la peine de répéter que la collaboration est toujours l'idéal, mais peut-être encore plus du côté des premières nations où, très souvent, les intérêts sont très variés, certains remontant à l'époque de la Confédération et même plus loin.
    La formule proposée nous aidera à régler plus vite un plus grand nombre de revendications particulières. J'ai déjà dit que, d'après moi, elle suscitera une dynamique nouvelle. Il y aura une attitude nouvelle chez les négociateurs. Il y aura beaucoup moins de tension chez des gens qui, on peut le comprendre, disent que c'est trop long, qu'ils veulent obtenir une solution de leur vivant. La plupart d'entre eux l'obtiendront peut-être en l'espace de leur cycle électoral. Ils peuvent se dire: « J'ai lancé cette revendication territoriale et, avant que je me présente comme chef, elle est passé à l'étape suivante. » Ils peuvent constater des progrès. Il y aura un énorme changement: ils pourront montrer à leur peuple les progrès accomplis, et je serai fier d'avoir participé à cette amélioration.
    Il y a bien des choses que nous pouvons faire pour accélérer le règlement des revendications en général. Nous avons discuté de la possibilité de les regrouper, par exemple. Ainsi, en Colombie-Britannique, il peut y avoir des revendications portant sur des lieux de sépulture. Une grande partie des recherches à faire seront communes. Les cimetières sont isolés. Ils ont été laissés de côté. On s'inquiète des revendications particulières à cet égard. Mais, au lieu de dire: « Nous allons faire pour vous la recherche sur les sites de sépulture et, quand ce sera terminé, nous allons faire d'autres recherches », etc., il est beaucoup plus logique de dire qu'il y a 20 revendications particulières sur des sites de sépulture et qu'une grande partie des recherches est commune — par exemple, qu'est-ce qu'un lieu de sépulture, quelles en sont les limites, comment pouvons-nous le désigner? Nous pouvons faire beaucoup pour accélérer les choses. Il y aura toujours des revendications particulières, mais il est possible d'accélérer une grande partie des recherches. Il y a bien des éléments que nous pouvons regrouper. Vous imaginez que, lorsqu'il y a plus de 800 revendications, il y a bien des arguments répétitifs, bien des recherches répétitives. Nous pouvons accomplir du bon travail, en collaborant avec les premières nations, pour régler un plus grand nombre de revendications plus rapidement.
    Monsieur le ministre, il y a un autre élément dont on n'a peut-être pas discuté aussi souvent qu'on n'aurait dû le faire: dans le secteur des ressources, on attache un intérêt considérable à la certitude que cette initiative assurera, et non seulement pour le secteur des ressources, mais aussi pour les entreprises des premières nations. Comment croyez-vous qu'elle aidera les collectivités des premières nations et le secteur des ressources à renforcer les économies du Nord à court et à long termes?
(1620)
    Comme Mme Duquette l'a déjà dit, il importe de souligner que les revendications particulières ne portent pas sur le territoire à proprement parler. Il s'agit strictement d'indemnisation monétaire; le territoire n'est pas en cause. Il est possible qu'il finisse par l'être, si une première nation décide d'acheter des terrains et demande leur ajout à une réserve. C'est possible, mais cela doit se faire de gré à gré. En pareil cas, nous allons accélérer les choses et faire de l'ajout aux réserves une priorité. Pour reprendre l'exemple du cimetière, nous dirions qu'il ne faut pas chipoter: ils veulent qu'il fasse partie de la réserve? Alors ajoutons-le, et vite.
    Toutefois, il y a un élément propre aux revendications particulières, dont certaines peuvent être très importantes. On dit, une fois l'affaire soumise au tribunal: je veux une décision définitive. Cela fait partie de ce qu'on accepte: nous voulons une décision définitive. Les deux parties disent en somme: nous avons mené nos négociations, fait nos recherches, nous avons soumis l'affaire au tribunal, et nous voulons une décision définitive. Cette décision lie les parties, et nous passerons à autre chose.
    En ce sens, tout le monde est rassuré dans une certaine mesure. Le territoire n'est pas directement en cause, mais la question, la revendication particulière, est tranchée définitivement. Il me semble donc qu'il y a une certaine assurance qui arrive au bon moment pour quiconque a des intérêts. Même s'il s'agit d'un tiers qui observe la situation de l'extérieur, il peut se dire que le processus ne durera pas toute une vie, qu'il peut suivre l'évolution avec l'assurance que la question sera tranchée, et vite.
    C'est excellent pour les premières nations et pour tous les Canadiens. Voilà pourquoi je dis que tous ces droits sont conciliés. Il y a là une excellente occasion pour les premières nations qui veulent s'en prévaloir. Même si elles ne sont pas forcées de le faire. Elles peuvent avoir l'assurance, jusqu'à un certain point, que nous allons agir rapidement.
    Merci.
    Le premier tour est terminé. Nous entrons dans le tour-éclair.
    Cinq minutes à la vitesse de l'éclair, monsieur Russell.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur le ministre Strahl. Il est agréable de vous accueillir au comité.
    Voilà un exemple de collaboration de la part de votre gouvernement — et je souligne que c'est un exemple. J'ignore s'il y en a d'autres. Je dirai seulement que, si nous avions agi de la même façon pour l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, nous n'aurions pas eu un interminable débat sur cette mesure législative. Je vous invite à utiliser plus souvent cette approche de collaboration.
    Je n'ai qu'une question. Vous dites que le territoire n'est pas en cause. Mais, lorsqu'une première nation présente un grief quelconque, le territoire n'est-il pas l'une des questions litigieuses qui font partie de la revendication? N'est-ce pas l'une des questions les plus litigieuses en ce sens que, même si le projet de loi est adopté, il n'y aura ni extinction, ni abandon de quelque droit de la première nation à l'égard de quelque territoire que ce soit? On ne peut accorder des terres plus vastes ni établir une délimitation qui risque d'être contestée, ni parler d'atteinte aux intérêts à l'égard d'un terrain quelconque, mais vous pouvez seulement accorder une indemnisation.
    Cela sera-t-il une pierre d'achoppement, d'après vous? Essayons-nous d'échapper au problème simplement en augmentant le montant de l'indemnisation? Est-ce que c'est la justification de cette initiative?
    Le territoire n'est peut-être pas en cause, dans le sens où il ferait partie du litige, mais, aux termes du projet de loi, le tribunal ne peut accorder qu'une indemnisation monétaire. D'habitude, le gouvernement fédéral n'est pas propriétaire de terres, de toute façon. Normalement, les terres ne sont pas en cause. Chose certaine, le tribunal doit s'en tenir strictement aux indemnisations monétaires. La première nation peut acheter des terres avec cet argent, mais nous n'accordons pas de territoire. Cela ne fait pas partie du processus des revendications particulières.
    Certains des éléments que vous avez énumérés se rattachent le plus souvent aux accords sur les revendications globales ou encore aux droits constitutionnels ou issus de traités. Par exemple, si l'enjeu, ce sont les droits de récolte, les droits aux ressources, les droits à des terres plus vastes ou même des ajouts à des réserves, la démarche proposée ici ne s'applique pas. Par exemple, nous avons ajouté 159 000 acres à des réserves l'an dernier au Manitoba, et nous espérons en ajouter encore 150 000 cette année, et cela n'est pas visé par le projet de loi. Il s'agit d'une question de territoire, d'un ajout à une réserve, et le projet de loi ne porte pas là-dessus. Il ne vise pas à régler tous les problèmes à négocier, mais strictement les revendications particulières.
(1625)
    Non, j'essayais simplement de faire ressortir que le territoire est un enjeu litigieux...
    Bien sûr.
    ... une fois que la revendication a été confirmée.
    Quant au calendrier, je comprends que le processus prévoit six mois ou trois ans pour divers éléments. Pourquoi n'a-t-on pas décidé — en tout cas, je n'arrive pas à le lire ici — de fixer un délai au tribunal pour rendre sa décision, une fois qu'on en est à ce stade? Le projet de loi n'impose aucun délai au tribunal pour rendre sa décision, une fois qu'il a entendu toute la preuve et pris en considération toutes les positions.
    Non, mais le tribunal sera composé de juges. Ils veulent entendre toute la preuve. Il ne me semblerait pas acceptable de dire à un groupe de juges que nous allons les limiter à trois semaines. Chaque cause est très différente et fort complexe. Certaines peuvent être tranchées très rapidement, mais pour d'autres, il se peut que les juges veuillent prendre connaissance d'autres éléments de preuve, tellement la complexité est grande. Ils peuvent avoir besoin de plus de temps.
    De toute évidence, les juges prennent le temps nécessaire pour faire un bon travail, et je ne vais pas aller leur dire de se grouiller, parce que ce ne serait pas correct.
    Je comprends, mais il pourrait y avoir une certaine période.
    Les 250 millions de dollars, c'est de l'argent frais ajouté chaque année?
    Robert me disait à l'instant que des dispositions précisent qu'il faut agir rapidement, le plus rapidement possible, mais à la vérité, il faut que les choses se fassent correctement. Personne ne veut que le travail soit bâclé. Quand on soumet une affaire aux juges, on veut que les choses se fassent avec solennité. Ce sont de grands enjeux importants pour ceux qui ont attendu toute une vie qu'on règle un problème.
    Je suis d'accord.
    Les 250 millions de dollars, est-ce que c'est de l'argent frais?
    C'est un nouvel engagement de plus de 250 millions de dollars par année sur dix ans, et il est possible de revoir toute la question dans cinq ans. Mais cela n'englobe aucune des revendications particulières très importantes. Celles qui portent sur plus de 150 millions de dollars relèveront d'un autre mandat du Cabinet. Elles seront étudiées à part. Cet argent est mis de côté de façon que des ressources soient engagées. C'est l'une des choses qui ont manqué dans les tentatives précédentes.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Albrecht.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être parmi nous aujourd'hui.
    Le sujet intéresse certainement tous les Canadiens. Surtout dans ma circonscription, chaque fois que je parle de toutes ces revendications particulières en attente, mes électeurs n'en croient pas leurs oreilles.
    Je crois vous avoir entendu dire qu'il y avait 800 de ces revendications et même plus. Avez-vous une idée du temps qu'il faudra pour résorber un arriéré de cet ordre de grandeur? Est-ce qu'elles se sont accumulées rapidement depuis un ou deux ans ou l'accumulation s'est-elle faite à long terme?
    Avons-nous des données à ce sujet?
    On me dit qu'elles s'accumulent depuis 1993. La difficulté, c'est qu'il n'y a pas eu...
    En un sens, le gouvernement a été jusqu'ici juge et partie. Nous avons été responsables de toutes les étapes: acceptation de la revendication, rejet de la revendication, octroi d'une indemnisation ou non, etc. Le gouvernement avait tous les pouvoirs. Et le gouvernement dit maintenant que, au lieu de s'y prendre de cette manière... Cette méthode n'a pas été très fructueuse. On peut même dire que ce fut une catastrophe.
    En proposant ce processus, nous relâchons l'emprise, nous allons donner, engager un bon montant pour régler les revendications. C'est très rassurant pour les gens, qui disent qu'il n'est pas juste que le gouvernement décide de la validité de leur revendication, de leurs recherches, qu'il dise s'il va accepter ou non, combien il va payer, puisqu'il a toutes les cartes en main.
    Dans cette formule, il y a une certaine indépendance par rapport au gouvernement. Ce sont des juges qui se prononcent. Le système est bien différent, et je crois que c'est pour cela que l'APN a accepté.
    Il serait probablement juste d'extrapoler et de dire que, en l'absence d'un système comme celui que vous proposez, ce nombre de 800 augmenterait rapidement.
    Pour ce qui est de l'indemnisation monétaire, vous avez parlé de 250 millions de dollars par année. Si, dans une année donnée, on ne dépense que 50 millions pour régler des revendications, les 200 millions restants seraient-ils reportés à l'année suivante ou bien l'année suivante commence-t-elle avec l'affectation d'un nouveau montant?
(1630)
    D'après moi, l'argent ne devient pas périmé. C'est un engagement qui se prolonge. Le projet de loi ne donne pas de précisions. Le fonds de règlement est créé de façon à garantir que le travail se fasse, et d'autres ressources sont engagées à cette fin. Le projet de loi est muet, mais l'engagement a été pris. L'argent sera reporté sur les années suivantes.
    Donc, si l'argent n'est pas dépensé au cours d'une année donnée, il sera reporté à la suivante et 250 millions de dollars s'ajouteront? Est-ce clair? Non?
    Non. C'est une chose que nous sommes encore en train d'étudier. Nous n'avons pas la réponse aujourd'hui, mais un montant de 250 millions de dollars sera disponible chaque année. Le montant sera revu dans quelques années. Il y a aussi l'échelonnement des paiements, ce qui permet d'exercer un contrôle.
    Peut-être, en un sens plus pratique, parlons-nous de revendications importantes. Plus de 50 p. 100 des revendications sont probablement d'une valeur inférieure à 3 millions de dollars. Cela vous donne une idée du nombre de revendications qu'il sera possible de régler au moyen de ce montant.
    Je comprends d'après ce que vous dites, monsieur le ministre, que, puisque les versements seront échelonnés, avec intérêts, nous pourrons contrôler à quelle rapidité les fonds sont dépensés et qu'il y a là assez d'argent pour régler les revendications.
    Je le crois. Nous allons voir. C'est pourquoi nous prévoyons un réexamen dans cinq ans. Mais nous avons une grande latitude pour gérer la situation et veiller à utiliser tout l'argent disponible. S'il faut gérer la trésorerie pour y arriver, il y a des moyens de le faire.
    Merci. Je cède la parole à mon collègue pour une minute, s'il le veut.
    Je préférerais avoir cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Pourriez-vous nous donner une idée des réactions que vous avez eues, notamment du chef Fontaine et de l'APN, et peut-être aussi des délais d'adoption de cette loi, car vous estimez tous les deux qu'elle sera adoptée?
    Très rapidement, disons qu'il y a eu des discussions constantes pour élaborer le texte avec le groupe de travail, et beaucoup de points de vue ont été exprimés tout au long. Nous avons tenu une cérémonie, de l'autre côté de la rue, pour annoncer le projet de loi, lorsqu'il a été achevé. Le chef Fontaine y a participé, tout comme beaucoup d'aînés et de chefs qui ont participé à la démarche ou ont rêvé de ce jour-là. Il existe un important soutien. Il s'est exprimé à la réunion que l'Assemblée des Premières nations a tenue à Ottawa il y a peu. On y a adopté des motions d'appui. Je suis convaincu qu'ils comparaîtront comme témoins, mais j'ai l'impression que le projet de loi recueille de larges appuis.
    Merci, monsieur le ministre.
    Voilà qui met un terme au premier tour. M. Storseth, vous pourrez probablement intervenir au deuxième tour.
    Monsieur le ministre, il est 16 h 33, et vous aviez accepté de rester jusqu'à 16 h 30. La séance a débuté avec 10 minutes de retard. Je ne connais pas votre emploi du temps, et je ne sais si vous devez partir dès maintenant ou si pouvez rester encore quelques minutes.
    Je peux rester encore 10 ou 15 minutes, si vous le voulez.
    D'accord.
    Monsieur Lévesque, c'est à vous. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie de votre patience.
    J'aimerais parler de l'article 16. Si je le comprends bien, c'est encore au ministre qu'il appartient de décider si une revendication fera l'objet d'une négociation ou non. Il dispose de trois ans pour rendre sa décision. Si celle-ci est positive, il peut prendre trois années supplémentaires pour mener les négociations à bien.
    Comment a-t-on établi la grille déterminant les délais d'accès au tribunal? Ces délais prévus signifient-ils qu'un revendicateur dont la demande est jugée fondée ne pourra pas, ou risque de ne pas pouvoir, en l'absence du consentement du ministre, saisir le tribunal pendant six ans après le dépôt de sa revendication auprès du ministre? Croyez-vous que ces délais vont améliorer notablement le processus actuel?

[Traduction]

    Bien sûr, je crois qu'il y aura amélioration. Il y a trois ans pour chacune des étapes, ce qui donne aux premières nations le temps de préparer leur cause et de la présenter. Une fois qu'elle est acceptée, il y a un processus de trois ans pour parvenir à l'étape suivante. Il y a donc des repères dans le temps, et il est possible de progresser.
    Je réitère que nous espérons que la plupart des revendications se régleront quand même par la négociation. Nous espérons augmenter le nombre de revendications réglées et accélérer les négociations. Cela peut se faire en engageant des ressources, en regroupant les revendications communes, en faisant si possible des recherches communes et en collaborant avec les premières nations en vue de régler leurs revendications le plus vite possible. Il y a d'autres choses que nous pouvons faire pour accélérer le processus, mais si elles le préfèrent, elles peuvent recourir au tribunal.
    Il faut respecter une norme minimum. Il ne suffit pas d'écrire une lettre disant qu'on veut présenter une revendication. La demande doit s'accompagner d'un certain minimum d'information, et ce qui est nécessaire à une demande fructueuse a été élaboré avec le temps. Il faut connaître les faits historiques. Il faut avoir les résolutions du conseil de bande. Il faut réunir une foule de choses dans la documentation. Il nous incombe de veiller à ce que la demande, lorsqu'elle est présentée, soit la plus complète possible. Une fois qu'elle est présentée, on ne peut ajouter de l'information au fil du temps. Si cela se fait, c'est un autre processus qui démarre. Il faut donc que la demande soit la plus complète possible avant de la présenter. Nous voulons y veiller pour que, lorsqu'on commence à compter le temps, la demande soit solide et complète.
(1635)

[Français]

    Monsieur le ministre, les 853 revendications pendantes touchent-elles toutes le gouvernement fédéral?
    Ce projet de loi s'appliquera-t-il également à tous les organismes du gouvernement fédéral? Je pense entre autres à Pêches et Océans Canada, à VIA Rail, aux lignes de chemins de fer, aux ports de mer. Les organismes fédéraux pour lesquels il pourrait y avoir des revendications particulières sont-ils tous touchés par ce projet de loi?

[Traduction]

    D'abord, à propos des revendications au niveau fédéral, il y en a 800. Il ne sera pas fait droit à la totalité d'entre elles. Beaucoup, mais pas toutes, aboutiront à une indemnisation. Quelles soient soumises à un tribunal ou négociées, il arrive que nous établissions que certaines revendications ne sont pas justifiées. Cela fait partie du débat, de la négociation, parfois de la médiation. C'est le genre de décision que le tribunal prendra également.
    Qu'est-ce qui est visé? Toute revendication particulière qui correspond à la définition. Il y a certaines possibilités d'engagement et des définitions différentes. Il me semble que la portée du projet de loi est clairement énoncée.
    Bob ou Sylvia, quelque chose à ajouter?
    Il s'agit essentiellement d'éléments qui relèvent du ministre des Affaires indiennes car, bien sûr, ce sont des meures prises en vertu de la Loi sur les Indiens et de questions qui se rapportent à certains types de droits historiques issus de traités. La définition est très claire à ce sujet. Il n'est pas question de poisson.
    Merci.
    Monsieur Storseth.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Disons tout de suite que j'ai une ou deux questions à poser et que je partagerai mon temps de parole avec mon collègue, M. Warkentin.
    Monsieur le ministre, dans votre mandat, vous parlez sans cesse de développement économique et d'éducation pour les collectivités des premières nations. Comment le projet de loi aidera-t-il à servir certaines de ces priorités pour le gouvernement également?
    Trop souvent, nous sommes pris par le caractère immédiat de ce dont nous parlons. Pourriez-vous expliquer comment cette initiative s'intègre à votre conception de la réforme structurelle à l'intérieur du système? Qu'en pensez-vous?
    Grande question. Elle n'est certainement pas abordée dans son entier dans le projet de loi, qui porte expressément sur les revendications particulières.
    Il ne fait pas de doute que beaucoup de premières nations voient dans le règlement de leur revendication spécifique un moyen de résoudre leurs problèmes économiques ou de tirer parti des débouchés.
    Je me suis rendu dans le nord de la Saskatchewan, l'autre jour. Nous avons conclu un accord de 10 millions de dollars avec la première nation de Muskoday. Elle est enchantée des débouchés qui vont s'offrir à elle. C'est une première nation bien gérée, avec une bonne gouvernance et tout le reste. En plus de ce qu'elle fait déjà bien, elle a un montant de 10 millions de dollars pour envisager d'autres possibilités, comme l'achat de terres à ajouter à la réserve ou autre chose. C'est un bon coup de pouce pour le démarrage.
    Cela dépend de l'importance des revendications particulières. On a déjà dit que beaucoup sont très modestes. Ce n'est pas une panacée et je ne veux pas le faire croire. Il peut s'agir par exemple d'un coin de terrain qui a été enlevé pour une emprise routière. La première nation peut dire qu'elle n'a pas reçu d'indemnisation, et c'est une revendication légitime.
    Selon les circonstances, la première nation ne recevra peut-être qu'une ou deux centaines de milliers de dollars. Il ne faut pas prétendre que cela va changer la situation de cette nation du tout au tout. Par contre, comme un grief est réglé, il s'installe un climat différent. Et bien entendu, le moindre montant obtenu est presque toujours utile au développement économique. En ce sens, le règlement apportera une aide. Mais l'utilisation de l'argent est entièrement laissée à la discrétion de la première nation.
(1640)
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Vous avez dit que vous n'aviez pas la réponse, mais je suis sûr que votre ministère a une idée de l'ampleur des revendications foncières particulières. A-t-on une idée quelconque de l'ampleur approximative de ces 800 revendications?
    Il est important qu'il ne s'agisse pas de revendications foncières particulières. Malheureusement, les revendications sont généralement présentées ensemble. Il y a des revendications qui s'échelonnent sur toute la gamme, des petites aux grandes en passant par les moyennes. Il y en a quelques-unes, une poignée, dont la valeur est supérieure à 150 millions de dollars et donc, à ce dont le tribunal peut se saisir. Comme elles sont si importantes et d'habitude si complexes, il faudra un mandat du Cabinet pour les faire aboutir. Mais sur les 800, il peut tout y avoir, depuis presque rien, comme 10 000 $ pour des intérêts perdus ou la non-prestation d'un fonds quelconque, peut-être...
    Plus nous mettrons de temps à régler ces revendications, plus elles seront nombreuses, comme M. Albrecht l'a déjà signalé. Il y aura bientôt des revendications parce que nous avons mis trop de temps à régler les revendications. Autrement dit, les frais d'intérêt courent sur les frais d'intérêt. C'est pourquoi il est important d'adopter le projet de loi et de régler rapidement les revendications si nous voulons nous éviter d'autres problèmes parce que nous n'avons pas réglé assez rapidement. Quand on en arrive là, c'est un autre problème.
    Quel rôle les provinces joueront-elle dans les délibérations du tribunal?
    Aucun, à moins qu'elles ne le veuillent. Elles ne joueront aucun rôle dans le choix des juges ni dans celui de la composition du tribunal. Si elles décident qu'elles veulent... Il y a toujours des cas ou presque n'importe quelle province dira à l'occasion: j'ai également une obligation parce que, il y a 50 ou 100 ans, nous aurions dû attribuer cette terre, ou donner accès à cette ressource, par exemple. Elles souhaitent alors intervenir. Lorsqu'elles le voudront, nous serons heureux de les laisser participer. Il existe un processus qui leur permet de participer au processus du tribunal des revendications particulières. Elles doivent préciser par écrit qu'elles veulent le faire et montrer comment elles seront liées par la décision. De certains côtés, j'inciterais les provinces à y songer. Parfois, cela permettra de résoudre le grand problème tout d'un coup, après quoi nous pourrons tous passer à autre chose. Les premières nations, la province et le gouvernement fédéral peuvent tourner la page. J'invite les provinces à envisager cette possibilité parce que, au moins à l'occasion, c'est pour elles une bonne façon de régler un problème définitivement pour que nous puissions tous tourner la page.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Warkentin, vous interviendrez au prochain tour.
    Monsieur le ministre, merci de votre présence aujourd'hui et merci d'être resté quelques minutes de plus pour être là pendant une heure.
    Je vais lever la séance pendant une minute ou deux, pendant que le ministre nous quitte. Nous continuerons ensuite avec Mme Crowder et les fonctionnaires.

(1645)
    Nous sommes de retour. Nous allons poursuivre le deuxième tour. Il reste deux interventions. Mme Crowder est la prochaine, et nous allons poursuivre jusqu'à la demie.
    Madame Crowder, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais en savoir un peu plus sur les revendications déjà présentes dans le système. Ce n'est pas encore clair. Selon moi, l'effet concret de l'article 42 est que, aux fins de l'article 16, le compteur est remis à zéro pour tous ceux qui ont des revendications actives, peu importe quand elles ont été soumises. Le point me semble important, car certaines sont dans le système depuis une vingtaine d'années. Je sais que le processus ne s'applique que depuis 1993, mais certaines revendications traînent depuis longtemps.
    Les modalités de transition pour les revendications existantes ne me semblent pas encore claires. Question connexe: je ne suis toujours pas convaincue qu'une dynamique nouvelle, différente permettra d'accélérer le règlement. J'ai besoin de plus d'information sur ce qui, au juste, accélérera le processus, en dehors du regroupement des revendications et des recherches communes, car je ne pense pas que, en soi, ces deux éléments accéléreront le processus.
    Pourriez-vous répondre à ces deux questions?
    Oui. Le gros de l'arriéré, tout ensemble, peut comprendre un maximum de 500 revendications, seulement dans la phase initiale, comme vous l'avez dit. Pour ce qui est de remettre le compteur à zéro, vous avez tout à fait raison. Il faut ensuite compter trois ans. La période s'allonge. Les revendications sont là depuis un certain temps, et il faut ajouter encore trois ans.
    Auront-elles la priorité sur les nouvelles revendications soumises?
    Il y a un processus spécial qui permet de... Les demandeurs voudront revoir leurs revendications également. Ils ne perdront pas de temps en le faisant, et nous faciliterons les choses, car lorsqu'une revendication est en attente depuis longtemps, elle n'est pas nécessairement prête pour l'évaluation. La première nation doit alors avoir l'occasion de mettre la revendication à jour, de la mettre en règle.
    Une chose que je dirais, à propos de l'accélération du règlement, c'est que, même si vous avez raison de dire que le compteur s'enclenche lorsque la loi... En ce moment, si les modifications n'étaient pas apportées, on prévoit qu'il faudrait bien plus que trois ans. Toutes les premières nations qui ont des revendications qui font partie de l'arriéré à la phase de l'évaluation auront une réponse dans les trois ans. C'est un élément très important du processus, mais il nous faut au moins ces trois années pour répondre à cette pléthore de revendications accumulées.
(1650)
    Aurez-vous les ressources nécessaires? C'est l'autre question. Il n'est pas certain qu'on ait confiance d'avoir des ressources suffisantes pour étudier ces plus de 500 revendications déjà présentes dans le système.
    Deuxièmement, est-ce qu'une partie de ces 250 millions de dollars servira au dispositif administratif?
    Non. Il faut dissocier les deux choses. Comme le ministre l'a dit tout à l'heure, il y aura des ressources supplémentaires, car nous tenons absolument à résorber l'arriéré dans les trois ans. Nous avons maintenant un cadre imposé par voie législative, et il nous faut réagir.
    Les 250 millions de dollars n'ont rien à voir avec les ressources du gouvernement. Ils serviront exclusivement à indemniser les premières nations dont les revendications sont reconnues.
    Donc, rien pour les fins administratives.
    Non. C'est tout à fait à part, et les ressources seront là pour suivre le processus, de façon que nous puissions respecter les délais.
    Avez-vous analysé au ministère les ressources qui seront nécessaires pour honorer vos engagements en trois ans? Mettons qu'une partie importante de ces 500 ou 600 revendications est engagée dans le système. De quelles ressources le ministère aura-t-il besoin pour honorer votre engagement dans ce cadre de trois ans?
    Bien sûr, nous étudions tout cela, ainsi que les gains d'efficacité. Nous avons cerné tous ces gains pour pouvoir aller de l'avant.
    Cette information est-elle à la disposition du comité?
    À proprement parler, nous n'avons pas de rapport à déposer. Nous pouvons essayer de vous communiquer des renseignements. Pour l'essentiel, nous savons quelles ressources il faudra affecter et nous avons confiance. L'engagement a été pris et les ressources seront là pour que nous puissions agir.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Bruinooge.
    Merci, monsieur le président. Peut-être aurons-nous seulement quelques questions sur certaines des procédures des juges.
    Voici une de mes questions. A-t-on fixé des paramètres aux juges à propos du calendrier? Pourront-ils suivre un processus pour s'assurer de respecter les délais? Je songe à d'autres scénarios. C'est un peu à côté, mais nous avons au Manitoba un processus public en matière d'assurance. Il y a des limites à ce qu'on peut obtenir pour une entorse au cou ou une fracture de la jambe, ce qui clarifie vraiment le processus. Les délais sont établis, tout comme les montants. C'est très efficace. C'est une entité qui sert la province assez bien.
    Je fais la comparaison avec ce processus pour demander quels types de repères seraient employés pour respecter la chronologie dont vous avez parlé. Par exemple, si un juge estime qu'une revendication justifie une indemnisation de 250 millions de dollars, j'imagine que les autres revendications, cette année-là, ne pourront se régler. Pour moi, donc, les 250 millions de dollars, c'est le montant à répartir sur un certain nombre de revendications.
    Pour conclure ma question, y a-t-il un processus initial que les juges emploieront pour répartir ces 250 millions de dollars?
    Revenons un peu en arrière. Une chose importante ici, c'est que la majorité de tout l'arriéré de 800 revendications se réglera par la négociation, comme le ministre l'a dit. Le tribunal sera saisi de la minorité des causes sur lesquelles les parties ne se sont pas entendues. Il y a obligation législative de recourir au tribunal lorsque le gouvernement a refusé de négocier ou que les négociations se sont interrompues. La grande majorité de ces revendications ne seront jamais portées devant les tribunaux.
    Quant à la minorité des revendications soumises au tribunal, le ministre a dit que ce sont des juges qui les entendraient. Ils seront maîtres de l'instance. Comme il est dit dans le projet de loi, le tribunal est invité, entre autres choses, à tenir compte de l'élément temps dans l'étude d'une revendication. Cela dit, il faut faire preuve de diligence. Ils feront leurs propres règles et il leur est demandé, lorsqu'ils les feront, d'agir de telle manière que la revendication puisse être étudiée rapidement.
(1655)
    Le projet de loi jouit d'un soutien considérable des deux partis. Je crois qu'il sera adopté rapidement, peut-être même en six à huit semaines. Une fois franchies les étapes du Sénat et de la sanction royale, ce qui ne devrait pas tarder non plus... On pourrait peut-être y arriver au début de mai. C'est peut-être optimiste, car mon expérience de l'étude des projets de loi dans ce comité-ci n'a pas été très bonne. J'espère néanmoins que, étant donné le sujet, tout ira mieux et que le comité fera diligence.
    Mettons que la sanction royale soit donnée à la mi-mai. Quand, selon vous, le tribunal pourrait-il se mettre à l'oeuvre?
    Il doit être prêt à se mettre à l'oeuvre 120 jours plus tard, lorsque le projet de loi entre en vigueur. L'entrée en vigueur est automatique. Ici, je me tournerai vers mon collègue du ministère de la Justice, mais, aux termes de la Loi d'interprétation, nous pouvons commencer, même avant l'entrée en vigueur, à faire les préparatifs administratifs pour que le tribunal soit prêt quatre mois plus tard.
    Il y a donc la sanction royale, puis, 120 jours après, l'entrée en vigueur. Entre les deux, nous prévoyons nous préparer pour que, dès le premier jour, le tribunal puisse se mettre à l'oeuvre.
    Merci.
    Madame Keeper, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous de rester ici pour poursuivre l'échange.
    Je voudrais revenir aux articles 22 et 23, à propos des provinces. Le ministre a dit qu'elles n'étaient pas tenues de reconnaître leur responsabilité. Si elles veulent être partie à l'instance, elles peuvent en informer le tribunal par écrit. Je ne saisis pas très bien la relation entre la Couronne et les premières nations dans ce processus, puisque le ministre a dit que c'était la seule façon, pour les provinces, de participer.
    Est-ce exact? C'est seulement si la province décide de participer?
    Oui. Il s'agit bien sûr d'un tribunal fédéral. La plupart des dossiers abordés comprendront une responsabilité fédérale très importante, voire exclusive. Cela ne veut pas dire que les provinces n'ont pas également certaines responsabilités à l'égard de certaines revendications.
    C'est juste. L'article 22 dispose que, lorsque le tribunal doit rendre une décision qui « peut avoir des répercussions importantes sur les intérêts d’une province, d’une première nation ou d'une personne », il en avise les intéressés. Dans ce cas, où en est rendu le processus?
    L'article 23 confère au tribunal la compétence nécessaire pour accorder la qualité de partie à une province. Cela est prévu au paragraphe 23(2), lorsque le gouvernement fédéral allègue que des pertes sont imputables à une province. Le gouvernement fédéral fait face à une revendication d'une première nation et estime que la province est en partie responsable; c'est sa position, et il invite la province à reconnaître la compétence du tribunal et à participer à l'examen de la revendication.
(1700)
    N'y a-t-il que la Couronne, que le gouvernement fédéral qui ait la capacité de faire ce type d'allégation? La première nation peut-elle faire la même chose? Cela ferait-il partie de la revendication, de sorte que le tribunal rende ensuite la décision?
    C'est exact. La première nation peut alléguer qu'une province est responsable. Cela ne se produit pas. D'habitude, c'est le gouvernement fédéral qui fait une allégation à l'encontre d'une province, mais c'est possible. Puis, c'est la province qui décide si, oui ou non, elle reconnaît la compétence du tribunal.
    C'est donc au tribunal d'agir?
    Oui, le tribunal accorde la qualité de partie.
    D'accord. J'aurais une question à poser. Vous avez dit que la grande majorité des revendications seraient réglées par la négociation et que celles qui ne peuvent l'être seront soumises au tribunal. Bien des premières nations ont des revendications de nature territoriale et ne sont pas intéressées par un règlement monétaire seulement. Quel mécanisme le gouvernement entend-il proposer pour les revendications territoriales?
    Excellente question.
    D'habitude, si c'est une revendication territoriale, il faut que la province participe, et elle le fait dans le cadre de négociations. Du point de vue du gouvernement fédéral, cependant, même à la table des négociations, l'apport au titre de sa responsabilité est habituellement monétaire, et ce sera la même chose au tribunal. Comme la vaste majorité des revendications sont négociées, nous souhaitons la participation des provinces autant que possible et nous les invitons à la table des négociations de toutes les revendications particulières lorsqu'elles peuvent aider ou sont peut-être partiellement responsables, quand des questions territoriales sont en cause.
    Y a-t-il un type particulier de relation dans ce processus de négociation? Est-ce un processus trilatéral, bilatéral ou un double processus bilatéral? Qui décide, la première nation et la Couronne?
    Le meilleur exemple est celui des droits fonciers issus de traités. Parfois, on doit des terres aux termes de traités historiques, mais elles n'ont pas été accordées ou n'ont pas été accordées en quantité suffisante. Nous avons avec la plupart des provinces un accord qui donne le mandat nécessaire pour aller de l'avant. Nous avons des tables tripartites réunissant une première nation, une province — mettons la Saskatchewan — et le gouvernement fédéral. La province travaille avec nous pour que les éléments territorial et monétaire puissent être abordés en même temps.
    C'est très constructif, et cela continuera.
    Merci.
    Monsieur Warkentin.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup d'être restés et de participer à nos délibérations cet après-midi.
    Pourrions-nous discuter brièvement de l'établissement de la validité des revendications? Comment s'y prend-on? Quel est le processus prévu dans le projet de loi? Comment les différentes parties établissent-elles le bien-fondé d'une revendication?
    Allez-y. C'est le tribunal.
    S'agit-il de savoir comment le tribunal va se prononcer sur la validité ou comment le ministre décide de négocier ou non?
    Probablement d'abord le tribunal.
    L'article 26 du projet de loi dit de façon très générale que le tribunal mène ses délibérations comme il le juge bon. Puis, le paragraphe 26(2) porte sur les facteurs à prendre en considération, comme la rapidité du règlement. Les membres du tribunal, qui sont des juges de la Cour supérieure, établiront leurs propres règles et mèneront les délibérations comme ils le jugeront bon. S'il s'agit du modèle judiciaire classique, ils entendront des témoins, examineront des documents et parviendront à une décision sur l'obligation qui peut exister ou non.
    Combien de temps faudrait-il pour établir la validité, d'habitude? Je présume que cela dépend des circonstances. Cela fait-il partie des trois ans à partir du moment... ou est-ce que cela s'ajoute?
    Les audiences durent d'habitude beaucoup moins longtemps. La revendication moyenne devrait demander selon nous un maximum de trois semaines; parfois seulement deux. Ce sont des audiences; la preuve est présentée, et les juges se prononcent.
    La période de trois ans concerne l'évaluation du ministre en vue de la négociation — le choix du Canada de négocier la revendication — et une autre période de trois ans est prévue pour la négociation. La négociation peut se prolonger, mais il y a cette période de trois ans, après quoi, s'il n'y a pas de règlement, la première nation peut dire que ça suffit, qu'elle veut s'adresser au tribunal pour obtenir une décision.
(1705)
    Pour ce qui est de la validité, si une revendication est jugée sans fondement, est-ce une décision exécutoire? Peut-on par la suite faire jouer d'autres mécanismes?
    Allez-y, vous compléterez... C'est une décision finale du tribunal.
    La décision est finale et les intimés sont libérés de toute obligation. Si des terres sont en cause, l'intérêt à leur égard est libéré. La décision est finale, sous réserve seulement d'une révision judiciaire, processus par lequel la compétence du tribunal est remise en cause; pour le reste, la décision est finale.
    Les revendications particulières prennent bien des formes différentes, et je voudrais revenir brièvement sur l'expropriation de terres, surtout pour les couloirs de transport, notamment ferroviaire. Je crois savoir que des revendications spécifiques portent sur la question ferroviaire, que les emprises soient utilisées ou qu'elles aient été abandonnées et n'aient pas été rendues à la collectivité autochtone. Dans ce genre de situation, où un tiers, le CN ou le CP peut être partie, je me demande comment les choses se déroulent. Comment les tiers participent-ils au processus qui permet d'établir les dommages ou l'obligation de restitution?
    Ils ne participent pas. Seul le tribunal évalue la responsabilité des intimés. Les tiers ne participent pas à ce processus. Si une tierce partie est en cause, le tribunal considère les faits et établit, dans l'ensemble des faits, la responsabilité du gouvernement fédéral, d'un autre intimé ou de provinces. Il accorde une indemnisation aux dépens de l'intimité, dans la proportion de la responsabilité de celui-ci.
    Je comprends que nous entrons dans les hypothèses et que ce n'est peut-être pas prudent. Comment se déroulerait, selon vous, l'étude d'un différend au sujet d'un chemin de fer toujours utilisé, pour peu que ce genre de problème puisse faire l'objet d'une revendication spécifique?
    Il y a ici plusieurs questions. Il s'agit d'une interprétation. L'article 14 explique avec force détails les motifs qui justifient la présentation d'une revendication. Si, dans une affaire donnée, les faits correspondent à l'un de ces motifs, le revendicateur peut présenter une revendication, d'abord au ministre puis, après trois ans, au tribunal. Nous pouvons nous interroger sur différents scénarios, et il n'est peut-être pas bon d'essayer de deviner comment les choses se dérouleraient, mais les motifs sont clairement énoncés dans cet article.
    Merci.
    Monsieur Lemay.

[Français]

    Merci. Je vais essayer d'être concis.
    Madame Duquette, vous avez dit plus tôt quelque chose qui m'a chicoté et qui m'est resté à l'esprit. Cela dit, je prends du bon côté ce que Me Winogron a mentionné. L'alinéa 14(1) d) dit :
    
14. (1)d) la location ou la disposition, sans droit, par Sa Majesté, de terres d’une réserve;
     Imaginons qu'on soit au bord de la mer et qu'il y ait une revendication territoriale sur toute la côte parce qu'on a procédé à une expropriation et qu'on a enlevé le bord de mer à une réserve pour le céder au ministère des Pêches et des Océans afin qu'il y fasse un port de mer. Le ministère des Pêches et des Océans ne devrait-il pas être appelé à être partie au litige? D'autres entités gouvernementales — j'ai parlé plus tôt des chemins de fer — pourraient-elles être appelées à être partie au litige?
(1710)

[Traduction]

    Je vais demander au conseiller juridique de compléter la réponse.
    Le gouvernement fédéral a des obligations de fiduciaire. Si le gouvernement fédéral — et plus spécialement le ministère des Affaires indiennes — est en cause, c'est parce que les terres ont été prises en vertu de la Loi sur les Indiens, et c'est le ministre et le ministère des Affaires indiennes qui doivent accepter ou refuser et s'occuper des restitutions et de tout le reste. D'habitude, les revendications portent sur des obligations de fiduciaire qui n'ont pas été remplies au moment de consentir à ce que les terres soient prises. C'est là qu'intervient la responsabilité fédérale. Cette responsabilité est souvent liée à la Loi sur les Indiens et aux devoirs qui y sont prévus.
    J'ignore si cela vous éclaire.

[Français]

    Oui, cela m'aide. Donc, on restreint le débat aux terres de réserve en vertu de la Loi sur les Indiens. Pour les Indiens hors réserve qui occuperaient, par exemple, un territoire depuis 50 ans mais qui ne seraient pas constitués en réserve, cela ne s'appliquerait pas?
    Non.
    J'ai bien compris lorsque j'affirme cela? Donc, cela ne s'appliquerait pas à eux. C'est cela?

[Traduction]

    Si j'ai bien compris votre question, je vais répondre que, comme je l'ai déjà dit, les motifs sont énoncés à l'article 14. Ces motifs ne sont pas limités aux terres des réserves, bien entendu. Il peut y avoir des revendications fondées sur d'autres motifs.

[Français]

    Attendez, il y a un point important. Je veux comprendre. Nous avons des Autochtones qui vivent hors réserve, qui sont sur des territoires non constitués en réserve, et ils sont là depuis des décennies. On parle de 15 à 20 ans. Ce Tribunal des revendications particulières pourrait-il s'appliquer à eux? Peuvent-ils faire une demande en vertu de ce tribunal?

[Traduction]

    Il ne s'agit pas de l'endroit où les personnes habitent. Vous pouvez voir dans la loi que les « revendicateurs » sont définis comme les bandes aux sens de la Loi sur les Indiens. Les revendications sont présentées par les bandes, non par des particuliers. Donc, peu importe où la personne habite. Ce sont les premières nations qui présentent les revendications. Elles sont les seules qui soient habilitées à le faire.

[Français]

    Si une bande est constituée, c'est plus large que des Autochtones en réserve, ça peut aller plus loin?

[Traduction]

    Je ne suis pas sûre. Nous ne comprenons probablement pas votre question complètement.
    Je voudrais tirer quelque chose parfaitement au clair. Je crains...
    M. Mark Lemay: Faites donc cela.
    Mme Sylvia Duquette: Oui. Je crains que les députés ne pensent que ce tribunal ou ce processus porte sur des revendications relatives aux droits et titres autochtones et à l'occupation des territoires par des groupes autochtones, dont des bandes. Il ne s'agit pas de cela. Ces questions relèvent du processus des revendications globales et du processus des traités de la Colombie-Britannique.
    Les questions foncières abordées ici concernent la saisie injustifiée de terres des réserves aux termes de la Loi sur les Indiens. Elles concernent le fait de ne pas avoir fourni, de n'avoir pas respecté l'obligation de fournir des terres pour les réserves et ce qui a pu se passer dans le cadre d'un traité. Le résultat final, c'est que toutes les parties intéressées sont présentes aux négociations. La question se règle là et aboutit à un accord. Au tribunal, ce sont les juges qui disent s'il y a eu faute, et l'indemnisation est strictement monétaire.
(1715)
    Merci. Je n'ai pas donné l'avertissement une minute avant la fin. J'avais 40 secondes de retard. J'ai donc donné à Mme Duquette un peu plus de temps.
    Monsieur Bruinooge.
    Monsieur le président, souvenez-vous de ce temps supplémentaire. Ajoutez-le à mon prochain tour, peut-être.
    Mes questions se rattacheront peut-être à des questions antérieures et plus expressément à des revendications particulières qui ont été réglées ces dernières années, même jusqu'aux annonces que le gouvernement a faites récemment. Croyez-vous que les montants des règlements — pour certaines revendications dans certaines régions — et les niveaux prévus dans les critères utilisés vont influencer les juges, dans les repères et les niveaux qu'ils vont établir?
    Les juges feront un travail de juge, c'est-à-dire établir s'il y a une obligation juridique. Ils ne comparent pas les revendications entre elles. La revendication de la première nation est présentée, les juges se prononcent sur l'obligation juridique, qui est ensuite quantifiée. Ce sont les dommages, si on veut. Ces autres questions ne sont pas pertinentes. Ce qui a été réglé par le passé au cours de négociations, nous le réglons et les parties s'entendent. Au tribunal, le juge rend une décision en s'appuyant sur le droit.
    Très bien. Je me dis seulement que les juges doivent se guider d'après certains repères. Ils doivent faire un certain raisonnement. J'imagine qu'ils doivent au moins se reporter à des montants accordés par le passé pour former leur propre opinion. Cela est sans doute évident dans la réponse. Je n'ai donc pas besoin de réponse.
    Peut-être quelques questions au sujet du projet de loi C-6 que le gouvernement précédent a fait adopter. Pourriez-vous signaler quelques améliorations que le projet de loi C-30 apporte par rapport à cet autre projet antérieur?
    Il y a quelques différences clés entre les deux. Nous avons déjà parlé du recours à des juges. La limite est passée de 10 à 150 millions de dollars. Le texte législatif fixe des délais à l'évaluation des revendications et à la réponse aux premières nations, qui ont aussi un recours lorsque les négociations ne permettent pas de régler la revendication. C'est donc fort différent.
    Un autre élément central est que, lorsque le tribunal doit prendre une décision, il se prononce sur toute la revendication. Autrement dit, il se prononce à la fois sur l'obligation juridique et sur le montant à verser. Lorsque les parties repartent, la revendication est réglée une fois pour toutes. Il n'y a pas d'autre étape, où il faudrait reprendre les négociations, une fois reconnu le bien-fondé de la revendication. Tout se règle du même coup, ce qui accélère beaucoup le processus.
    Je vais revenir sur la question de M. Warkentin et le caractère définitif de la décision.
    Lorsque le tribunal rend une décision finale, je me dis, de mon point de vue de profane, que d'autres juges des tribunaux classiques hésiteraient à revoir le jugement de l'un de leurs collègues, un collègue qui, à temps plein, étudie ces revendications. Il me semble très peu probable que, après un jugement final de ce tribunal, d'autres tribunaux revoient l'une de ces causes.
(1720)
    Il n'y a aucune disposition d'appel. Le fonds de la cause ne peut donc être revu. La cause ne peut être revue du point de vue du droit ni de son interprétation par le juge. La seule possibilité est la révision judiciaire, qui est un recours administratif dont on peut se prévaloir lorsqu'un juge outrepasse sa compétence. D'abord, il s'agit des juges de la cour supérieure, et je ne veux pas m'avancer sur les chances de succès d'une révision judiciaire. Ce sont les seuls motifs permettant de revenir sur une décision.
    Madame Crowder.
    Je suis désolée si je reviens sans cesse aux revendications qui sont déjà dans le système, mais il y en a tant qui représentent des enjeux importants. Je suis allée sur le site de la Direction générale des revendications particulières et j'ai consulté son Rapport d'étape d'information au public, qui fait 276 pages. En toute justice, je dirai que certaines revendications sont closes ou réglées, mais j'en ai regardé quelques-unes. Par exemple, il y en a une qui a été présentée en 1998 et qui se trouve toujours au ministère de la Justice, dans l'attente d'un avis juridique préliminaire.
    Je me demande donc quelle sera la relation avec le ministère de la Justice, lorsque les nouvelles dispositions s'appliqueront, et comment le processus s'en trouvera accéléré.
    Nous travaillons avec une section des services juridiques spéciaux au ministère de la Justice.
    Nous avons parlé des ressources, tout à l'heure. Il n'y a pas que l'efficacité et les ressources. Nous travaillons aussi en partenariat. Il y aura aussi des ressources pour le ministère de la Justice, qui participe beaucoup au processus. Si nous voulons que le travail se fasse efficacement, avec des ressources suffisantes, il faut que le ministère de la Justice et AINC aient tous les deux assez de ressources. Ils les auront.
    Puis-je présumer que des lignes directrices sur la rapidité du service permettront au ministère de la Justice de répondre en moins de dix ans...
    Eh bien...
    Vous n'avez pas à commenter. J'ai une deuxième question à vous poser. Je remarque dans la liste un nombre important de dossiers en attente d'une opinion juridique préliminaire au ministère de la Justice. Certains semblent très anciens. Il y a certainement de nombreux facteurs qui entrent en ligne de compte, mais il me semble que le ministère de la Justice, pardonnez-moi, constitue parfois un obstacle.
    J'aurais une question à poser sur la médiation. Sauf erreur, le ministre a dit qu'une partie du rôle de la Commission des revendications particulières des Indiens était la médiation. Dois-je comprendre qu'elle a jusqu'au 31 décembre 2008 pour conclure des dossiers qui sont très avancés? Le projet de loi C-30, ne mentionne pas, autant que je sache, cette commission ni un processus de règlement des différends. Pourriez-vous me dire ce qu'il adviendra de la commission après le 31 décembre et quelles sont les dispositions qui seront mises en place pour assurer la médiation?
    La commission a deux fonctions. D'abord, elle reçoit les demandes de renseignements et fait des recommandations non exécutoires. Deuxièmement, elle assure la médiation à la demande des parties. Comme on l'a annoncé il y a huit mois, la commission terminera les dossiers suffisamment avancés pour pouvoir être achevés d'ici décembre prochain. Entre-temps, elle continuera d'offrir des services de médiation aux tables de négociation.
    Après le 31 décembre 2008?
    La commission sera là jusqu'en décembre. Après, les services de médiation relèveront d'une autre entité. Il faut qu'il s'agisse d'un autre organisme, puisque, à proprement parler, la Commission des revendications particulières des Indiens est une commission d'enquête. Après cette date, des services de médiation seront offerts aux tables de négociation. Ils seront maintenus.
    Cet engagement sera en place, et les services de médiation offerts après le 31 décembre seront du même niveau que ceux assurés par la commission?
    Conformément à « La justice, enfin », cela fait partie d'une proposition globale. L'idée consiste à assurer un meilleur accès à la médiation, dont la valeur est reconnue. L'idée, c'est aussi de négocier le plus grand nombre de revendications possible. C'est une proposition centrale du gouvernement et un pilier du plan « La justice, enfin ».
(1725)
    Nous en sommes à la fin du troisième tour.
    M. Albrecht posera les dernières questions. Nous pourrons terminer d'ici 17 h 30.
    Merci, monsieur le président.
    Le ministre, les fonctionnaires du ministère et des collègues ont souligné plus d'une fois aujourd'hui la grande collaboration qui a abouti au processus proposé ici, et nous nous réjouissons tous de cette approche.
    Je m'interroge sur les relations avec les premières nations au niveau régional. Nous savons qu'il y a eu collaboration entre l'APN et le gouvernement. Y a-t-il également eu collaboration au niveau régional avec les premières nations? Comment ont-elles réagi à l'élaboration du projet de loi?
    Le gouvernement a consulté l'Assemblée des Premières nations et a collaboré avec elle à titre d'organisation nationale représentant toutes les premières nations du Canada. Le projet de loi est de portée nationale.
    Au sein du groupe de travail, le Canada a désigné quatre personnes, et l'APN en a désigné quatre qui étaient représentatifs: Roger Augustine, chef du personnel de l'APN, Lawrence Joseph, chef régional de l'APN et chef de la Federation of Saskatchewan Indian Nations, Wilton Littlechild, chef régional de l'APN en Alberta, et Shawn Atleo, coprésident, qui est chef régional de l'APN pour la Colombie-Britannique.
    C'est probablement une question — celle des diverses premières nations, en dehors du groupe des consultations — sur laquelle l'APN pourrait donner des détails, si vous l'invitez au comité.
    Il vaut aussi la peine de signaler que les consultations sur l'idée d'une entité indépendante ont commencé il y a des années. La plupart des préoccupations devaient alors être connues.
    Vous êtes plutôt confiant et croyez que les groupes régionaux des premières nations ont été correctement représentés au cours des consultations, depuis l'Assemblée des Premières nations jusqu'à la base, si nous pouvons nous exprimer en ces termes?
    Ce n'est probablement pas à moi de le dire. L'Assemblée des Premières nations pourrait élaborer. Je peux dire que la démarche a duré pendant tellement d'années que les préoccupations et les problèmes sont très bien connus, et que nous avons travaillé en étroite collaboration avec l'organisation nationale qui, je crois bien, représente les premières nations de tout le Canada.
    Il me semble important que tous les Canadiens aient l'assurance qu'il ne s'agit pas d'une approche unilatérale dont le mandat a été donné par le gouvernement. Nous avons vu l'APN, et je suis rassuré d'entendre que d'autres groupes au niveau régional ont également participé aux consultations.
    Merci.
    C'est tout?
    Merci, monsieur Albrecht.
    Nous terminons à temps.
    Je conclus en remerciant les témoins d'être restés après le départ du ministre.
    La séance est levée, et nous reprendrons lundi.