AANO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 31 mars 2008
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare ouverte cette 20e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. En tenant compte des points de vue de nos témoins, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-30, Loi constituant le Tribunal des revendications particulières et modifiant certaines lois en conséquence.
Je commence tout de suite parce que nous avons de nombreux témoins à entendre en très peu de temps. Je demanderais deux choses à mes collègues : tout d'abord, de respecter le temps qui leur est alloué durant la période de questions, et ensuite, de faire preuve d'indulgence car il se peut que nous terminions un peu après 17 h 30. Comme nous devons tous aller voter à 18 h 15, je ferai tout mon possible pour conclure avant 18 heures. Encore une fois, tout dépendra de la période de questions.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous nos témoins, ceux déjà à la table et ceux du deuxième groupe. Comme vous le savez sans doute, la série d'audiences tire à sa fin, et la séance d'aujourd'hui vise à permettre à tous ceux qui n'ont pas pu venir plus tôt de s'exprimer sur le projet de loi. C'est un peu comme une compagnie aérienne. On invite 150 personnes à venir prendre place à bord d'un avion de 130 sièges, en espérant qu'elles ne se présentent pas toutes. Ce qui s'est produit aujourd'hui, c'est que de nombreux témoins ont manifesté leur désir de comparaître devant le comité; c'est pourquoi nous sommes un peu plus occupés qu'à l'habitude. Par conséquent, je vous prierais d'être brefs dans vos déclarations. Nous avons tenu plusieurs séances et couvert bon nombre des éléments fondamentaux du projet de loi. Je vous demanderais donc d'en arriver rapidement au coeur du sujet afin qu'on ait plus de temps pour échanger entre nous. Cela permettra aux députés de poser des questions sur des sujets qui les intéressent particulièrement.
Pour la première table ronde, nous avons quatre groupes de témoins. De l'Assemblée des Premières nations, nous accueillons Shawn Atleo, chef régional, et Roger Jones, conseiller juridique. Ensuite, du Sommet des Premières nations, nous entendrons les grands chefs Edward John et Ken Malloway qui, je suppose, n'est pas encore arrivé car son siège est inoccupé. À titre personnel, il y a Tony Penikett. Merci d'être ici aujourd'hui. Enfin, nous avons les chefs Lawrence Paul et Noah Augustine, de l'Atlantic Policy Congress of First Nation Chiefs Secretariat.
Merci infiniment de votre présence. Je vous remercie à l'avance de vous en tenir au temps qui vous est imparti.
Nous allons maintenant céder la parole au représentant de l'Assemblée des Premières nations. Monsieur Atleo, si vous voulez bien commencer.
Merci, monsieur le président.
Merci au comité de nous avoir invités. Je suis ici depuis une semaine, et j'espère vraiment qu'il y aura une place pour moi ce soir dans l'avion pour retourner dans l'Ouest.
[Le témoin s'exprime dans sa langue autochtone.]
Ce ne sont que quelques mots dans ma langue pour reconnaître les territoires du peuple algonquin.
À titre de chef régional pour la Colombie-Britannique à l'Assemblée des Premières nations, je suis ici en ma qualité de coprésident du groupe de travail sur ce projet de loi. Moi et mon collègue, M. Bruce Carson, du Cabinet du premier ministre, en étions les deux responsables. J'ai été désigné par le chef national pour mener ce travail à bien et superviser le processus qui a précédé l'élaboration de cette mesure législative.
Je suis très heureux de dire que ce projet de loi représente, à mon avis, la meilleure mesure qu'on ait présentée jusqu'à maintenant pour parvenir à un consensus sur la forme que devrait prendre le Tribunal des revendications particulières, son mandat, ses activités et la façon de veiller à ce qu'il évolue convenablement.
Plutôt que de mettre en évidence les principaux éléments du projet de loi, j'aimerais aujourd'hui me concentrer sur le processus qui a servi à élaborer la mesure législative et l'accord politique.
Tout d'abord, je veux parler des travaux du groupe de travail. Cette initiative conjointe a commencé par l'établissement d'un mandat et d'un plan de travail. À la suite de l'annonce, nous avons été très heureux que le chef national se joigne au premier ministre et à l'ancien ministre dans ce domaine, M. Prentice, pour annoncer que les deux parties allaient travailler ensemble dans ce dossier.
Premièrement, on s'est mis d'accord pour s'appuyer sur certains documents fondamentaux dans l'élaboration du projet de loi. L'un d'eux était le rapport, et en fait, le projet de loi modèle, qu'avait rédigé le groupe de travail mixte qui, si je ne me trompe pas, avait été mis sur pied en 1997. À mesure que nous avancions, de nombreuses personnes au sein de nos communautés avaient l'impression que ce travail avait déjà été fait auparavant. À l'hiver 1997, on croyait qu'on déposerait un projet de loi en 1998. Il est donc important pour nous d'être au courant des développements qui nous ont menés jusqu'ici.
Parmi les autres documents clés, il y avait la Loi sur le règlement des revendications particulières qui, à ma connaissance, a fait l'objet de vos discussions, et évidemment, le rapport du comité sénatorial intitulé Négociations ou affrontements : le Canada a un choix à faire, présenté par le sénateur St. Germain en décembre 2006.
De toute évidence, comme on l'a déjà mentionné en comité, on travaillait sur ce dossier bien avant que la décision Calder ne soit rendue en 1973. Notre peuple y a mis beaucoup d'efforts au fil des ans.
De plus, les réformes, bien sûr, qui ont été énoncées dans La justice, enfin ont servi de modèle aux fonctionnaires fédéraux. Comme nous partions de quelque chose, nous avions compris, tout comme le chef national, que nous avions la possibilité de collaborer dans ce dossier. De là, nous avons rédigé une ébauche du projet de loi, puis travaillé conjointement à la peaufiner.
Il y avait plusieurs questions qui ne pouvaient être réglées au moyen du projet de loi ou qui ne s'inscrivaient pas dans le mandat fédéral énoncé dans La justice, enfin. Pour parvenir à un consensus sur ces questions, le chef national et le ministre Strahl ont conclu un accord politique complémentaire, qui engage l'Assemblée des Premières nations et le gouvernement du Canada à régler les questions en suspens.
La signature de cet accord par le chef national fut un moment très important puisque cela nous engageait à collaborer dans cette initiative concernant le projet de loi, malgré le fait que de nombreuses autres questions, sur lesquelles je reviendrai, ne pourraient être réglées.
La mesure législative et l'accord politique complémentaire sont reliés et reflètent l'entente des partis sur cette question importante. Il convient de noter que le groupe de travail mixte a tenu sa dernière réunion pas plus tard que vendredi dernier, ce qui a mis fin à ses travaux.
Le rôle d'un comité politique, c'est-à-dire le groupe de travail mixte, consistait à superviser les travaux d'une équipe législative et technique et d'autres équipes de travail. C'était essentiel pour parvenir à un consensus. Autrement dit, il ne fallait pas que le travail important des fonctionnaires et des professionnels soit déconnecté du processus politique. Par conséquent, en tant que membre du groupe de travail mixte, je tiens à préciser que j'approuve vraiment le processus avec lequel nous avons élaboré cette mesure législative et cet accord politique.
Avant de conclure ma présentation, je m'en voudrais de ne pas parler du processus qui a permis aux premières nations de participer aux travaux du groupe de travail mixte. À mon avis, ce qui compte réellement, ce sont les relations entre les premières nations et le gouvernement.
En mars 2005, les dirigeants des premières nations ont adopté un rapport intitulé Nos nations, nos gouvernements : Choisir notre propre voie. Ce rapport est le fruit du travail d'un comité que j'ai présidé. Il a été co-écrit par moi et David Nahwegahbow. Le rapport faisait suite aux discussions nationales sur l'autonomie gouvernementale des premières nations, la mise en oeuvre des traités et le règlement des revendications, tant particulières que générales. Ce document renferme beaucoup de renseignements et de bonnes idées. Deux principes très importants sont ressortis de ce rapport. Tout d'abord, les premières nations devraient pouvoir participer à l'élaboration des politiques et des lois qui les concernent et donner leur consentement à ce chapitre. Ensuite, il pourrait s'avérer nécessaire de créer certaines institutions, en l'occurrence le Tribunal des revendications particulières, dans le processus de réconciliation.
En mai 2005, suite à la publication de ce rapport, les premières nations et le gouvernement ont conclu un accord politique qui engage les parties à travailler ensemble et à s'entendre dans ce dossier, particulièrement sur les revendications particulières. L'Assemblée des Premières nations s'est inspirée de ce rapport et de l'accord politique pour élaborer le projet de loi, en collaboration avec le gouvernement, et c'est ce qui nous a permis d'accepter l'invitation du premier ministre et du ministre Prentice de prendre part à cette initiative.
Le processus du groupe de travail mixte destiné à faire collaborer des représentants de l'Assemblée des Premières nations et du gouvernement du Canada dans l'élaboration de lois et de politiques correspond exactement à ce qui est prévu dans l'accord politique sur la reconnaissance et la mise en oeuvre des gouvernements des premières nations, et doit être repris dans d'autres domaines politiques. Au moyen d'une résolution, les chefs de l'Assemblée des Premières nations ont reconfirmé, l'an dernier, notre mandat et notre appui à l'égard de ces travaux.
Autrement dit, sur le plan du processus, notre engagement conjoint dans l'élaboration des lois et des politiques a très bien fonctionné et marque une étape importante.
Par ailleurs, en ce qui concerne la réforme des revendications particulières, il y a encore quelques questions qui n'ont pas été réglées. Toutefois, le gouvernement fédéral s'est engagé à poursuivre les discussions afin de résoudre ces questions en suspens, qui sont toutes définies dans l'accord politique. Pourvu que le gouvernement respecte les engagements qu'il a pris dans ces deux documents — en particulier, ceux énoncés dans l'accord politique —, nous considérons que les travaux qui ont été menés dans le cadre de ce processus conjoint ouvrent la voie à une participation continue des premières nations dans des dossiers qui les touchent particulièrement.
Je tiens à dire que j'appuie fermement le projet de loi C-30 et l'accord politique. Comme je l'ai indiqué au début, à mon avis, tout est une question de relation entre les premières nations et le gouvernement, et je recommande fortement que le processus s'applique à d'autres travaux politiques et législatifs. Des initiatives telles que la conférence sur les traités à laquelle nous avons assisté récemment, à Saskatoon, doivent se poursuivre, et le plafond de 150 millions de dollars pour les revendications particulières devrait être revu.
En terminant, lors de la dernière réunion du groupe de travail mixte, qui s'est tenue vendredi dernier, j'ai senti une forte volonté politique de la part du gouvernement, et nous encourageons nos dirigeants respectifs, le chef national et le ministre, à aller de l'avant dans cet important dossier le plus rapidement possible. Il ne faudrait pas trop attendre pour conclure le processus; nous devons travailler ensemble et réduire les malentendus.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, monsieur le président.
[Le témoin s'exprime dans sa langue autochtone.]
J'ai voulu commencer, dans ma langue, en reconnaissant notre relation avec le peuple algonquin à qui appartiennent les terres ancestrales sur lesquelles nous sommes rassemblés aujourd'hui.
Merci de nous donner l'occasion de nous exprimer sur le projet de loi C-30. J'ai été élu membre de la direction du Sommet des Premières nations en Colombie-Britannique, dont le principal mandat est de régler la question territoriale dans le cadre de négociations.
J'aimerais aborder divers sujets : le processus dont mon collègue vient juste de parler, l'élaboration du projet de loi C-30; les normes en matière d'évaluation des relations entre les premières nations et l'État; et certaines des dispositions du projet de loi C-30; puis terminer en formulant quelques recommandations.
Il n'y a pas de doute qu'il est urgent de mettre en place un processus indépendant afin qu'on puisse régler les centaines de griefs présentés par les premières nations contre le gouvernement, communément appelés « revendications particulières ». En fait, bon nombre de ces revendications viennent de la Colombie-Britannique. Par exemple, il y a probablement au-dessus de 500 droits de passage qui visent les réserves autochtones, dont la valeur est estimée à 100 millions de dollars. Je ne suis pas certain que quelqu'un en ait déjà parlé.
Nous étions dans la salle de négociations avec les représentants de l'Assemblée des Premières nations et du gouvernement du Canada lorsqu'on a convenu d'aller de l'avant avec le projet de loi C-30. Selon nous, cela constituait un point tournant, et encore plus maintenant, étant donné où en est le projet de loi. Nous nous réjouissons de ces efforts et remercions l'Assemblée des Premières nations, de même que le groupe de travail mixte Canada-APN, pour leur collaboration dans l'élaboration du projet de loi C-30.
Les normes en matière de développement des relations entre les premières nations et l'État existent depuis toujours. Même l'attitude qu'adopte aujourd'hui le gouvernement à l'égard des intérêts des premières nations est truffée de politiques, de lois et de pratiques unilatérales, arbitraires et égoïstes dans le seul intérêt de l'État et du public.
La présentation qu'a faite le ministre Strahl devant le comité le 6 février était optimiste. Il a fait deux remarques concernant ce projet de loi. Il a indiqué que le projet de loi C-30 allait nous aider à redresser ces torts « en conciliant les intérêts des premières nations et ceux de tous les Canadiens ». Il a également parlé de la création du groupe de travail visant à superviser l'élaboration du projet de loi. Il a ajouté que cette collaboration donnerait des résultats justes et équitables pour tous.
Étant donné l'histoire des relations entre les premières nations de la Colombie-Britannique et le gouvernement dans les négociations et les litiges, on est beaucoup plus prudent dans l'évaluation. Si nous avons les avis juridiques et les arguments des avocats de la Couronne aux processus initiaux du tribunal, nous croyons que nous serons mieux placés pour évaluer les questions d'équité.
Dans toute l'histoire, il n'est jamais arrivé que le gouvernement fédéral appuie les premières nations ou intervienne en leur faveur dans les litiges impliquant des droits ancestraux et de propriété sur les terres, les territoires et les ressources, ou dans des conflits avec le gouvernement provincial et/ou des tierces parties. Et ce, malgré le fait qu'il a une obligation de fiduciaire envers les membres des premières nations.
En fait, lorsque nous avons examiné attentivement les arguments de la Couronne, nous avons pu relever une tendance dans son comportement : forcer les peuples autochtones à prouver qu'ils occupaient traditionnellement ces terres et nier leurs droits et titres ancestraux, même si l'article 35 de la Constitution du Canada reconnaît et affirme les droits ancestraux et issus de traités. Cette tendance doit être évaluée à la lumière des nouvelles normes dans les tribunaux et à l'échelle internationale.
Les tribunaux ont établi plusieurs principes importants qui, selon nous, devraient être pris en considération. Premièrement, le gouvernement du Canada doit s'acquitter de son obligation et de son rôle de fiduciaire à l'égard des peuples autochtones. Deuxièmement, il s'est engagé à ne pas mener de négociations déloyales avec eux. Troisièmement, il est tenu de négocier de bonne foi. Quatrièmement, les tribunaux ont statué clairement qu'il avait l'obligation de consulter les groupes autochtones et d'obtenir leur consentement lorsqu'il s'agit d'élaborer des mesures législatives qui les concernent ou qui ont une incidence sur leurs droits.
Le 13 septembre dernier, les Nations Unies ont adopté la Déclaration sur les droits des peuples autochtones. L'article 43 prévoit que les droits reconnus dans cette déclaration constituent des « normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones du monde », et c'est là toute l'intention de la déclaration.
Je voulais aborder brièvement les paragraphes 6 et 8 du préambule de la déclaration, ainsi que les articles 27, 29, 30 et 40. Ceux-ci traitent de certaines de ces questions.
Le sixième paragraphe du préambule indique que l'assemblée générale est préoccupée par le fait que les peuples autochtones ont subi des injustices historiques à cause, entre autres, de la colonisation et de la dépossession de leurs terres, territoires et ressources.
L'article 40 se lit comme suit :
Les peuples autochtones ont le droit d'avoir accès à des procédures justes et équitables pour le règlement des conflits et des différends avec les États ou d'autres parties et à une décision rapide en la matière, ainsi qu'à des voies de recours efficaces pour toute violation de leurs droits individuels et collectifs.
L'article 38 :
Les États prennent, en consultation et en coopération avec les peuples autochtones, les mesures appropriées, y compris législatives, pour atteindre les buts de la présente déclaration.
L'un de ces buts est prévu à l'article 27 :
Les États mettront en place et appliqueront, en concertation avec les peuples autochtones concernés, un processus équitable, indépendant, impartial, ouvert et transparent prenant dûment en compte les lois, traditions, coutumes et régimes fonciers des peuples autochtones, afin de reconnaître les droits des peuples autochtones en ce qui concerne leurs terres, territoires et ressources, y compris ceux qu'ils possèdent, occupent ou utilisent traditionnellement, et de statuer sur ces droits. Les peuples autochtones auront le droit de participer à ce processus.
L'article 29 :
Les peuples autochtones ont droit à la réparation, par le biais, notamment de la restitution ou, lorsque cela n'est pas possible, d'une indemnisation juste, correcte et équitable pour les terres, territoires et ressources qu'ils possédaient traditionnellement ou occupaient ou utilisaient et qui ont été confisqués, pris, occupés, exploités ou dégradés sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
Et cette dernière phrase renferme la notion importante de « consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause » concernant l'utilisation ou la confiscation des terres ancestrales.
Le projet de loi C-30 et le processus conjoint qui a permis de l'élaborer permettront de répondre aux nouvelles normes internationales et à celles établies par les tribunaux.
A priori, je recommanderais — et je suis d'accord avec mon collègue, le chef régional Shawn Atleo — que ce processus soit considéré, à l'avenir, comme un mécanisme permanent visant à engager les peuples des premières nations dans l'élaboration des mesures législatives.
Le projet de loi C-30 marque une étape importante. On conférera au tribunal des pouvoirs lui permettant de régler des centaines de revendications particulières. Cependant, le projet de loi renferme des conditions et des limites à l'égard des décisions sur l'indemnité. Par exemple, le tribunal ne peut accorder qu'une indemnité pécuniaire et celle-ci ne peut être supérieure à 150 millions de dollars. De plus, Sa Majesté peut opter pour le paiement de l'indemnité en versements échelonnés. Il y a aussi des limites importantes concernant les principes d'indemnisation sur lesquels se fonde le tribunal pour déterminer le montant de l'indemnité. Est-ce que cela nous empêche d'appuyer le projet de loi? Non. Toutefois, s'il est adopté, on devra le revoir dans cinq ans pour déterminer la pertinence des normes qui y sont énoncées.
Nous sommes préoccupés par le plafond fixé à 150 millions de dollars. Il y a des communautés, par exemple la bande d'Okanagan, qui ne pourront voir leurs réclamations réglées. Nous vous recommanderions donc d'envisager un amendement visant à lever le plafond. Si cela s'avère impossible, à ce moment-là, le gouvernement devra s'engager fermement à régler ces revendications de façon juste et équitable.
Merci.
Merci beaucoup.
Merci d'avoir respecté le temps qui vous était alloué.
J'essaie d'aviser les témoins lorsqu'il leur reste une minute ou deux. Je vais tâcher de ne pas l'oublier.
Quand vous avez commencé, vous avez parlé dans votre langue autochtone, et j'ai cru vous entendre encourager les Canucks, mais je n'étais pas certain.
Oui, vous avez absolument raison, ils ont remporté le match d'hier soir, 6 à 2, alors nous les encourageons pour demain.
Merci, monsieur le président.
Je m'adresse à vous en tant que citoyen qui s'intéresse depuis longtemps aux questions relatives aux traités.
Je tiens à féliciter le gouvernement pour la volonté politique qu'il a démontrée dans la mise en oeuvre de cette initiative, soit le projet de loi C-30. J'aimerais également remercier les ministres Prentice et Strahl pour le projet d'élaboration mené conjointement avec l'Assemblée des premières nations.
Cependant, j'espère que le Parlement envisagera plus sérieusement la possibilité de mettre en place un processus conjoint de nomination et de créer des tribunaux entièrement indépendants pour régler les problèmes de mise en oeuvre concernant les traités en général, et non seulement les revendications particulières. Par exemple, au cours des 30 dernières années, le gouvernement du Canada a négocié, dans le nord du pays, des traités qui contribuaient énormément à l'édification du pays, mais malheureusement, chacun d'entre eux a entraîné des problèmes de mise en oeuvre. Même le sous-ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Michael Wernick, a reconnu que la mise en oeuvre demeurait un problème lorsqu'il a affirmé au Comité sénatorial permanent des affaires autochtones, le 12 février dernier : « De notre côté, il y a une limite à ce que nous pouvons accomplir sans la pleine participation de l'ensemble de nos collègues gouvernementaux ».
En 1999, Miguel Alfonso Martinez, rapporteur spécial des Nations Unies sur les traités, a mentionné que depuis l'époque coloniale, la plus grande déception du processus de conclusion des traités a été le manque de respect du gouvernement envers ce qui avait été convenu durant les négociations avec les premières nations. « Les États qui comptent une grande population d'Autochtones devraient désigner une autorité compétente qui se pencherait exclusivement sur les questions autochtones » — c'est ce qu'a dit Martinez lorsqu'il a proposé qu'autant d'Autochtones que de non-Autochtones siègent au tribunal indépendant d'arbitrage. Ce n'est pas nouveau. En 1704, dans l'affaire Mohegan Indians c. Connecticut, en appel devant le Privy Council from the American plantations, le procureur général de l'Angleterre a appuyé la création d'un tribunal permanent indépendant dont le rôle serait d'entendre des affaires impliquant des traités.
Comme la proclamation royale a été mise de côté pendant longtemps au pays et qu'elle a été ignorée pendant une centaine d'années en Colombie-Britannique, le principe a en quelque sorte été relégué aux oubliettes. Cependant, en 1975, la Nouvelle-Zélande a établi le Tribunal de Waitangi. Cela a permis aux Maoris de porter à l'attention du tribunal toute violation du traité commise par les autorités britanniques depuis sa signature, en 1840. Ce tribunal compte autant de Maoris que de non-Maoris et peut tenir des audiences bilingues.
Il faut se rappeler que les traités issus de ces discussions sont des engagements que prennent les deux parties. Au Canada, les décisions liées aux conflits entre les signataires des traités sont rendues par des tribunaux désignés par une seule des parties. Les parlementaires, surtout en 2008, auraient raison de mettre en doute l'impartialité de ce processus.
En tant que médiateur, je peux vous garantir que les médiateurs et les arbitres peuvent se révéler plus efficaces que n'importe quel haut tribunal structuré. Mais comme nous le savons tous, en raison des problèmes de mise en oeuvre au Nunavut, le ministère fédéral des Finances, par exemple, refuse de participer au processus d'arbitrage, et ce, même si c'est prévu dans un traité protégé par la Constitution. Par conséquent, dans ce cas, les arbitres peuvent être une option.
Par ailleurs, je dirais qu'il y a certainement suffisamment d'avocats au sein des premières nations au Canada pour occuper tous les sièges d'un organisme bipartite structuré comme un conseil des relations de travail, ou par exemple, un organisme tripartite comme la Commission des traités de la Colombie-Britannique. Il n'y a donc aucune raison qu'un processus de nomination conjoint Canada-premières nations, ou du moins, un processus de nomination conjoint, ne fonctionne pas. Oui, je reconnais que cela créerait un précédent, mais selon moi, en tant que personne qui s'intéresse depuis longtemps à ce dossier, ce ne serait pas un malheureux précédent.
Merci.
Merci beaucoup pour votre présentation et votre concision.
Maintenant, de l'Atlantic Policy Congress of First Nation Chiefs Secretariat, nous entendrons le chef Lawrence Paul... ou peu importe.
Merci de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Je suis Noah Augustine, chef de la première nation mi’kmaq de Metepenagiag, établie à Miramichi, au Nouveau-Brunswick. Je copréside également l'Atlantic Policy Congress of First Nation Chiefs Secretariat avec mon collègue ici, le chef Lawrence Paul. Nous allons partager notre temps, et je vais faire la première partie. Veuillez simplement m'en aviser si je dépasse le temps qui m'est alloué.
L'Atlantic Policy Congress of First Nation Chiefs Secretariat a été créé en 1992 et représente 37 communautés mi'kmaq, maliseet, innu et passamaquoddy dans les régions de l'Atlantique et du Québec. Son mandat est de mener des recherches, d'analyser et d'élaborer des solutions de rechange aux politiques fédérales qui touchent ses membres.
Pour ce qui est de notre position, nos chefs appuient, en général, le projet de loi C-30 dans sa forme actuelle. Comme vous le savez, très peu de progrès ont été réalisés jusqu'à présent dans le règlement des revendications particulières, et une réforme et des mesures s'imposent depuis longtemps.
Nous nous opposons principalement à la participation du gouvernement du Canada au processus de règlement des revendications puisque nous jugeons qu'il se trouve en situation de conflit d'intérêts. Le gouvernement détermine, à lui seul, la validité des revendications présentées contre lui. Nos chefs sont favorables à la création d'un tribunal juste et indépendant qui soit autorisé à réviser les décisions ministérielles et à prendre des décisions exécutoires, de façon opportune et rentable, concernant les revendications en suspens depuis longtemps.
Bien que le projet de loi C-30 présente de nombreux aspects positifs, nous estimons qu'il y a encore certaines questions à régler. Nous avons six préoccupations. Mon collègue et moi en aborderons trois chacun.
La première préoccupation concerne les engagements pris en vertu de l'accord politique conclu entre l'APN et le gouvernement du Canada. Nous croyons savoir que le projet de loi C-30 et l'accord politique vont de pair. Les questions qui dépassent la portée de la mesure législative seront couvertes par l'accord politique. Nous insistons sur le fait que les engagements contenus dans l'accord politique doivent être concrétisés comme il convient, par la mise en place d'un processus clair, réaliste, opportun et bien financé. Cela comprend toutes les questions définies dans l'accord politique, notamment un processus qui permet le règlement des revendications dont le montant dépasse 150 millions de dollars, la création d'un comité de supervision et une réforme conjointe de la politique fédérale d'ajouts aux réserves.
Nous sommes heureux d'apprendre que la définition de « revendications particulières » englobera également les revendications sur la création de réserves, comme l'a confirmé une lettre du ministre des Affaires indiennes adressée au chef régional de la Colombie-Britannique à l'APN le 26 novembre 2007.
La deuxième préoccupation concerne la nomination des juges du tribunal. L'article 6 du présent projet de loi prévoit que le tribunal soit composé de juges de juridiction supérieure sélectionnés à partir d'une liste du cabinet fédéral. À notre avis, il est crucial que le tribunal compte quelques membres d'origine autochtone afin de mieux refléter les systèmes juridiques traditionnels, les cultures, les langues et les connaissances générales et pratiques des questions auxquelles sont confrontées les premières nations. Cette exigence exclut donc la participation des juges issus des premières nations étant donné qu'il y en a très peu ou pas au Canada qui ont été nommés à une cour supérieure.
Le cabinet fédéral devrait pouvoir retenir des candidats des premières nations qui ont de l'expérience dans le domaine judiciaire — c'est-à-dire provincial — ou de l'arbitrage. Nous espérons que cette liste s'allongera, à l'avenir, pour inclure des juges de juridiction supérieure des premières nations. Toutefois, nous croyons savoir qu'il y en a très peu, s'il y en a, en ce moment au Canada.
À ce chapitre, nous nous réjouissons de voir que l'accord politique reflète un engagement du gouvernement selon lequel les premières nations pourrons, par l'intermédiaire de l'APN, prendre part au processus de sélection des membres du tribunal.
Troisièmement, nous sommes préoccupés par le plafond injuste imposé sur les indemnités pécuniaires que peut accorder le tribunal. Nous estimons que celui-ci devrait être relevé ou carrément éliminé. De nombreuses revendications pourraient être exclues du processus de règlement. Cela pourrait donner lieu à des procédures judiciaires longues et coûteuses. Même si la grande majorité des revendications sont inférieures au plafond, ce serait injuste et injustifié que certaines premières nations ne puissent bénéficier d'un processus rapide et indépendant en raison de la somme réclamée à titre de réparation.
Avant de céder la parole à mon collègue, le chef Paul, j’aimerais simplement ajouter qu’en tant que chef de Metepenagiag, j’ai également été négociateur en chef relativement à nos revendications territoriales, et récemment, nous avons fait d'une pierre deux coups. Nous avons cédé 160 acres de terre, mais en retour, on nous a donné la possibilité d’en acquérir 300.
Si nous pouvons accélérer le processus de règlement, j’aimerais insister auprès du comité sur les effets bénéfiques que cela pourrait avoir sur l’économie des communautés des premières nations. Au Nouveau-Brunswick, dans le cadre des négociations d’une entente relative à la taxe provinciale de vente en vertu de laquelle 95 p. 100 de l’argent perçu sur les territoires des premières nations revient à celles-ci — et c’est pourquoi la politique d’ajouts aux réserves est si importante —, l’accès à de nouvelles terres grâce à notre processus de règlement des revendications s’est avéré un outil économique crucial. J’aimerais simplement que le comité sache à quel point cela est important pour le développement économique des communautés des premières nations.
Merci.
Merci.
Chef Paul, votre collègue a débordé de quelques minutes, mais M. Penikett en a quelques-unes à vous donner. Vous disposez donc de cinq minutes.
D'accord, merci, monsieur le président.
Le gouvernement n’offre aucune autre réparation que le versement d'une indemnité pécuniaire. Les communautés mik’kmaq, maliseet, innu et passamaqoddy entretiennent un lien très intime avec la terre de leurs ancêtres, sur les plans traditionnel, social, économique et culturel. C’est ce qui les définit en tant que peuples autochtones. Le projet de loi ne permet pas au tribunal d’accorder des terres à une première nation dans le cadre du processus d’indemnisation. Nous estimons que c’est essentiel, et nous sommes favorables à l’inclusion de solutions de rechange comme le prévoit l’accord politique. Les premières nations devraient avoir le choix de reprendre la terre qu’ils réclament ou d’en obtenir une nouvelle.
En ce qui concerne le tribunal, nous sommes préoccupés par le manque de précisions quant à sa définition dans le projet de loi. Même si on suppose que la plupart de ces détails seront fignolés au moyen d'un règlement, et nous reconnaissons que le tribunal doit jouir d’une certaine marge de manœuvre dans le règlement des dossiers, nous nous demandons si le projet de loi donne suffisamment de directives afin que le tribunal n’adopte pas la même attitude peu conciliante, que nous ne connaissons que trop bien.
À ce chapitre, les premières nations ont exprimé des préoccupations, par le passé, concernant les capacités de recherche inadéquates et le manque de financement pour participer au processus. Le gouvernement devrait au moins accorder un financement suffisant et indépendant pour soutenir les efforts de recherche et de négociation des premières nations et assumer les autres coûts connexes.
Ensuite, les provinces ne sont pas contraintes de participer au processus. Le tribunal devrait pouvoir les y obliger. Une province doit accepter de devenir partie au processus avant que cela relève de la compétence du tribunal.
Nous craignons qu’une première nation doive intenter des poursuites contre une province afin d’obtenir le règlement d’une revendication en suspens. Cela va à l’encontre de l’esprit du projet de loi, qui est de régler, dans les plus brefs délais, toutes les revendications particulières dont le montant est inférieur à 150 millions de dollars, et ce, de façon juste et indépendante. Le gouvernement du Canada doit trouver des moyens d’exiger la participation des provinces au tribunal, lorsque cela s’impose, comme solution de rechange aux tribunaux, dans le règlement de ces revendications en suspens depuis longtemps.
En terminant, comme je l’ai mentionné au début, en général, nous appuyons le projet de loi C-30 dans sa forme actuelle, à la condition que le gouvernement du Canada s’acquitte de tous ses engagements en vertu de l’accord politique.
Lorsque le ministre des Affaires indiennes a présenté ce projet de loi au comité, il a indiqué que cette mesure législative, de même que l’accord politique complémentaire, étaient le fruit d’une collaboration entre le gouvernement et l’Assemblée des Premières nations. Nous reconnaissons qu’un engagement politique visant à apporter des changements ne se traduit pas nécessairement par des changements réels. Toutefois, nous voulons obliger le ministre et le gouvernement à respecter leurs engagements, par nos efforts et notre soutien continu à l’Assemblée des Premières nations.
Nous tenons à remercier le comité de nous avoir donné l’occasion de nous exprimer sur le projet de loi C-30, et nous vous incitons fortement à vous pencher sur les questions que nous avons soulevées à ce chapitre.
Welálin. Merci.
Merci, monsieur.
Merci à tous les témoins.
Mesdames et messieurs les membres du comité, nous avons du temps pour un seul tour de sept minutes. Alors si vous voulez partager votre temps avec d'autres, gardez cela à l'esprit. Je vais vous avertir lorsque six minutes se seront écoulées. Je serai strict sur la durée des interventions aujourd'hui, et je demande votre collaboration.
Pour commencer, nous allons donner la parole à Mme Anita Neville, du Parti libéral.
Merci beaucoup, monsieur le président. J'espère pouvoir partager mon temps avec mon collègue qui se trouve à ma gauche.
Permettez-moi de vous remercier tous pour votre présence aujourd'hui et pour la substance et la qualité de vos exposés.
Vous avez tous relevé les divers enjeux que comporte ce projet de loi. Je comprends que tout le monde veule l'adoption du projet de loi. Pour notre part, nous comprenons l'importance d'aller de l'avant. Cela étant dit, vous avez parlé du plafond des indemnités, du tribunal, du rôle joué par le gouvernement provincial et de l'accord politique. Nous avons beaucoup entendu parler du plafond. J'aimerais entendre vos commentaires sur un certain nombre de choses, mais mon temps est limité. J'aimerais que vous nous parliez du plafond et que vous nous disiez si le processus utilisé — à savoir le recours au tribunal pour des règlements inférieurs à 150 millions de dollars — s'appliquerait ou pourrait s'appliquer à des règlements au-dessus de cette somme, en comprenant qu'ils seraient ensuite soumis au Cabinet.
Mon autre question est la suivante. Quelles sont vos attentes à long terme à l'égard de l'accord politique? Qu'en espérez-vous? Croyez-vous que les litiges en suspens que vous avez mentionnés seront réglés grâce à l'accord politique?
Chef John, vous pourriez commencer. Mon collègue me dit de choisir quelqu'un, et je vous regarde.
Merci.
Pour répondre à votre question sur le plafond, à savoir si le tribunal peut prendre une décision et soumettre ensuite le dossier au Cabinet, je n'y ai pas vraiment réfléchi. Je crois que c'est un scénario intéressant.
Dans l'état actuel des choses, nous savons tous que si vous demandez une indemnité de moins de 150 millions de dollars, vous avez accès au tribunal. Autrement, vous n'avez aucun accès. D'après ce que le ministre a dit, il y a entre 6 et 20 revendications qui dépassent les 150 millions de dollars. Celle de la bande d'Okanagan, dont j'ai parlé à la fin de mon exposé, est très importante. Nous avons aussi les revendications Douglas antérieures à la Confédération dans le territoire Sto:lo, à l'embouchure du fleuve Fraser. Ce sont des revendications très importantes. Que va-t-il leur arriver? Que va-t-il arriver si le gouvernement décide que ces revendications ne peuvent pas faire l'objet de négociations?
Ils avaient accepté que la revendication d'Okanagan fasse l'objet de négociations et ils ont ensuite quitté la table, laissant ainsi la communauté dans l'incertitude. Les tribunaux deviennent alors la seule option.
Ce que j'espère, c'est que l'accord politique devienne un document vivant durant les cinq premières années d'existence de ce tribunal. Il devra peut-être être revu et renégocié au terme de cette période de cinq ans, lorsque la loi aura été réexaminée également.
Si vous me le permettez, j'aimerais simplement faire un commentaire sur la politique générale. Un ancien sous-ministre des Affaires indiennes, à l'époque du gouvernement Mulroney, M. Harry Swain, avait dit que l'une des absurdités de la politique publique, c'est que nous limitons le coût des règlements par voie de mandats et de mesures législatives comme celles-ci, mais nous sommes prêts à engager des dépenses illimitées dans des négociations. Il me semble qu'à long terme, ce n'est pas une politique viable. Je suis d'accord avec M. Swain.
Monsieur le président, si vous me le permettez, très brièvement, j'aimerais faire un commentaire sur la question du long terme.
J'aimerais faire remarquer que cet effort a abouti après cinq ou six mois. Nous comprenons que les initiatives législatives prennent souvent plus de temps, habituellement aux alentours de 15 ou 18 mois. Il y a plus de 600 communautés des premières nations dans tout le Canada et, comme nous le savons tous, on tente de réformer ce dossier depuis la fin des années 60. Ce qui est important ici, c'est ce que j'ai dit au début, et cela nous ramène aux efforts à long terme et aux défis importants qu'un comité comme le vôtre doit relever pour trouver une façon de travailler ensemble afin de régler les questions qui ne l'ont pas encore été. Celle-ci en particulier est apparue clairement aux alentours de l'année de ma naissance. Nous pouvons faire beaucoup mieux, et c'est ce que nous disons ici.
Je suis ravi que vous ayez posé cette question. Il est essentiel que ce qui a été énoncé dans cet accord — à savoir qu'il faut un engagement actif, ferme, assuré et constructif — le soit sur une base permanente, régulière. Comme le grand chef John l'a dit, ce ne doit être que le commencement. Je suis d'accord avec lui.
Merci.
Je vous remercie de vos commentaires sur la relation que vous avez avec le gouvernement fédéral. Lorsque nous étions en mer, mon père disait « Sois toujours très prudent lorsque tu suis ce qui semble être une lumière brillante dans le brouillard; tu pourrais rencontrer une foule de problèmes. »
Je vous rappelle la déclaration sur les droits des peuples autochtones, qui a été rejetée; l'abrogation imposée de l'article 67; l'annulation de l'accord de Kelowna; peut-être les deux jours d'action nationale qui auront lieu dans trois ans; et nous avons maintenant la question des biens immobiliers matrimoniaux, qui est soumise à la Chambre sans qu'aucun processus n'ait été défini à l'égard de cette mesure législative particulière.
Notre comité peut modifier ce projet de loi. Si vous pouviez apporter un amendement, que serait-il?
[Français]
Je vais vous prendre au mot, monsieur Penikett. Votre proposition me cause un peu de difficulté. J'aimerais entendre M. Atleo à ce sujet tantôt.
Le grand chef Augustine et M. Paul ont dit la même chose. Honnêtement, il m'apparaît difficile de faire en sorte qu'il y ait un comité conjoint de nomination des juges. Ou ce sont des juges de la Cour supérieure dotés de tous les pouvoirs conférés aux juges de la Cour supérieure, tel que prévu dans la Loi sur les juges, ou on se retrouvera demain matin avec des membres du Barreau qui voudront participer à la nomination des juges, et avec des groupes de femmes qui voudront nommer des juges à la cour matrimoniale. C'est là que je vois un problème. Vous n'êtes pas les premiers à venir témoigner devant nous.
Monsieur Atleo, je voudrais connaître votre opinion là-dessus. J'ai bien lu le projet de loi C-30. En vertu de ce projet de loi, on passerait d'un processus de réconciliation à un léger processus contradictoire. En effet, quand on va devant la Cour supérieure, c'est qu'on est dans un processus contradictoire.
Je suis content de pouvoir entendre M. Atleo. Pourquoi avez-vous choisi de recommander aux premières nations de procéder en vertu d'un processus contradictoire devant des juges de la Cour supérieure? Et surtout, tous les peuples des premières nations sont-ils d'accord sur un processus qui exclut automatiquement les comités conjoints de nomination?
[Traduction]
Merci, monsieur Lemay.
Le chef régional Atleo m'a demandé de répondre à votre question, étant donné qu'elle est très technique.
Tout d'abord, le groupe de travail a discuté longuement du processus conjoint de nomination. Les membres du groupe de travail représentant l'Assemblée des Premières nations étaient en faveur de ce processus, parce que c'est une chose qui se reflétait dans les efforts du groupe de travail précédent et dans l'élaboration de la Loi sur le règlement des revendications particulières.
Il y a une distinction à faire lorsqu'on dit que les premières nations devraient jouer un rôle dans la nomination des juges et des arbitres parce que la jurisprudence qui découle des décisions rendues par la Cour suprême du Canada dit que pour parvenir à réconcilier la Couronne et les droits des peuples des premières nations, les perspectives, les lois et les traditions des premières nations doivent faire partie de la solution. Et qui d'autres que les peuples des premières nations sont mieux placés pour appliquer ce principe dans le règlement des litiges entre la Couronne et les peuples des premières nations? Alors il y a une distinction à faire quant aux autres groupes qui pourraient revendiquer le même pouvoir, celui de participer au processus conjoint de nomination.
L'autre question qui a été soulevée au cours de cet examen a trait au recours aux juges. Une chose que nous comprenons — et nous ne défendons pas la position du gouvernement ici, mais nous la comprenons très bien — c'est qu'il y a bien des années, le Tribunal canadien des droits de la personne avait ordonné à Ottawa de verser 5 milliards de dollars en arriérés au titre de l'équité salariale. Du coup, on a eu un frisson dans le dos et on s'est demandé si le gouvernement était prêt à accepter qu'un tribunal ait la compétence de régler des litiges qui pouvaient avoir des incidences financières importantes. Cinq milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent, et évidemment le gouvernement à l'époque — et probablement par la suite — n'était pas prêt à risquer de donner un chèque en blanc à un tribunal pour verser pareille indemnité monétaire. Nous croyons que c'est la raison pour laquelle on a fixé une limite aux indemnités pouvant être accordées par le tribunal.
Deuxièmement, ils ne font pas confiance à des membres d'un tribunal qui n'ont pas nécessairement la formation juridique pour régler ce type de litige, d'où la nécessité de nommer des membres de la magistrature à ces postes, qui agiraient sans doute de façon plus responsable.
[Français]
Ce qui se dit ici est très important et je veux ajouter quelque chose. À partir du moment où la Cour supérieure est impliquée — et j'y ai été pendant 30 ans —, un processus est mis en cause.
J'ai fait part d'un problème au ministre Nicholson quand il a comparu devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, auquel j'ai siégé lors de l'étude du projet de loi C-31 qui touche la nomination des juges. Actuellement, les juges de la Cour supérieure ne sont pas prêts à entendre des causes en vertu du projet de loi C-30. C'est là que les premières nations auront un rôle important à jouer. Si nous adoptons le projet de loi tel quel, les juges seront assurément des juges de la Cour supérieure qui sont déjà en place et qui ont une expérience de Blancs. C'est un débat que les premières nations devront tenir. C'est le choix qu'elles ont fait.
Quant aux 150 millions de dollars, je suis d'accord avec vous pour les retirer complètement. Les juges de la Cour supérieure sont habilités à rendre des jugements impliquant des sommes plus élevées que 150 millions de dollars.
[Traduction]
Merci, monsieur le président.
Merci à tous de comparaître devant le comité.
J'ai trois questions, et je vais les poser toutes les trois et vous laisser le reste du temps pour répondre. Je vais essayer de faire vite.
La première question porte sur le processus de nomination. J'aimerais revenir sur cette question, parce qu'il semble que l'accord politique précise que le chef participera à la recommandation des membres. On ne parle donc pas de nominations, mais de recommandations. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet. D'autres témoins ont proposé que des conseillers parmi les aînés puissent être mis à contribution, ce qui compenserait pour le manque d'expérience autochtone des juges. Je me demande si vous pouvez faire des commentaires à ce sujet.
Deuxièmement, dans les dispositions transitoires que l'on trouve aux articles 42 et 43, je crois comprendre que certaines revendications en cours traînent depuis très longtemps. J'ai pris une feuille, et certaines revendications remontent à 1991, 1998, 1987. Conformément à ces dispositions transitoires, si les gens choisissent volontairement de participer, le compteur sera-t-il remis à zéro lorsque la loi entrera en vigueur? J'aimerais entendre vos commentaires là-dessus. Il me semble que cette mesure désavantagerait grandement ceux qui ont présenté des revendications il y a des années. Il s'agit d'une question technique à laquelle Roger devra probablement répondre.
La troisième question a trait à la médiation. Lorsque le ministre a comparu devant le comité, il a parlé d'un nouveau rôle de médiation pour la CRI. Toutefois, on ne sait trop si les divers gouvernements feront plus confiance à ce processus de médiation qu'au mécanisme actuel.
Je vais vous laisser la parole.
Tout d'abord, en ce qui a trait au processus de médiation, il reste évidemment à définir ce à quoi ressemblera une nouvelle commission des revendications des Indiens, puisque celle qui existe actuellement terminera son mandat à la fin de l'année.
L'autre aspect important, et ceci a trait en partie à ce qu'a dit M. Lemay, c'est que les parties doivent travailler ensemble pour mettre au point les règles de procédure du tribunal. Elles doivent faire en sorte que la procédure soit moins axée sur la contradiction et qu'il y ait un service de gestion des instances. C'est là où une nouvelle commission des revendications des Indiens pourrait être mise à contribution, en permettant aux parties d'essayer de régler leurs différends avant même qu'une détermination soit faite par le tribunal. En signant l'accord politique, les parties s'engagent à travailler ensemble à l'élaboration des règles de procédure du tribunal, de manière à rendre la procédure plus amicale et moins axée sur la contradiction.
Pour ce qui est du compteur, on a discuté du nombre de revendications qui traînent depuis longtemps. Apparemment, certaines ont été entendues par la Commission des revendications des Indiens, et des rapports sont attendus. Ce serait injuste de ramener tout le monde à la case de départ, où il faudrait attendre en file pour accéder au tribunal. On comprend que l'accord politique doit tenir compte du traitement précédent de certaines revendications. Des rapports ont pu être produits, et d'autres pourraient être attendus. Il faut trouver une façon de faciliter l'accès au tribunal pour les parties qui attendent déjà depuis longtemps. Il faudrait un système de priorités pour établir l'ordre des instances devant le tribunal.
Je crois que le chef régional Atleo veut faire un commentaire.
Je vous remercie de soulever la question des aînés. On pourrait dire que nos aînés représentent notre autorité, notre autorité morale. Cet effort, malgré ses imperfections, puisque ce sont, après tout, des gens qui y ont participé, laisse croire à la possibilité — et c'est pourquoi je parle sans cesse de ces relations et pourquoi la participation des aînés serait essentielle — de combler davantage le fossé de l'incompréhension, qui a fait en sorte que des affaires comme celles-ci perdurent depuis trop longtemps. C'est pourquoi il faut faire un effort, lorsque la génération actuelle est prête à passer à l'action et propose de trouver la meilleure façon possible de régler des problèmes de longue date, que personne d'entre nous ici n'a créés. Il faut reconnaître cela.
C'est pourquoi je répète sans cesse que, nonobstant les commentaires importants que vous avez faits, monsieur Lemay, au sujet des problèmes que nous voyons dans le fonctionnement de certains mécanismes, c'est justement ce que nous devons nous efforcer de régler. Cette mesure ne fait que montrer qu'il est possible de le faire.
Plus précisément, il faut reconnaître que les aînés portent la connaissance des traités historiques, qu'ils nous informent, nous instruisent et nous guident et qu'il est essentiel pour notre peuple, je crois, qu'ils aient un rôle à jouer.
Merci.
J'ai certaines choses à ajouter au sujet du processus de nomination. J'espère que le tribunal ne deviendra pas une mini-cour supérieure. Le processus ne devrait pas être aussi contradictoire que... Il a une option; il y a un processus. Je crois que la Couronne et les premières nations doivent s'assurer que le processus est juste et que les questions sont traitées de façon équitable.
L'article 12 du projet de loi prévoit l'établissement de « règles de procédure pour régir ses activités ». La recommandation qui se trouvait à la fin de mon exposé, à laquelle je ne suis malheureusement pas arrivé durant mes remarques préliminaires mais que j'aimerais présenter, est que les groupes revendicateurs des premières nations devraient participer à l'établissement des règles de pratiques et de procédures du tribunal. Je crois que c'est là où les conseillers que vous recommandez ou proposez seraient extrêmement utiles.
M. Lemay a parlé de procédure tout à fait contradictoire. C'est en partie pourquoi j'ai fait référence à la déclaration sur les droits des peuples autochtones, en particulier à l'article 27, qui prévoit la mise en place d'un « processus équitable, indépendant, impartial, ouvert et transparent prenant dûment en compte les lois, traditions, coutumes et régimes fonciers des peuples autochtones ».
Je m'attends à ce que les pratiques et les procédures du tribunal intègrent cela et que le tribunal réfléchisse à la manière d'intégrer ces notions dans ses pratiques, dans les procédures qu'il établit.
Merci.
Très brièvement, monsieur le président, je dirais que le grand avantage qu'offrent les outils de médiation, qui ne sont pas largement utilisés dans le processus de traité ou les négociations entre les Autochtones et le gouvernement, c'est que vous pouvez concevoir vous-même certains éléments du processus, si bien que les avantages dont les chefs ont parlé ici peuvent être intégrés.
Un des problèmes que posent les chapitres sur la résolution des conflits que l'on trouve dans la plupart des traités négociés au cours des 30 dernières années, c'est que ces mécanismes ne fonctionnent pas, et je dirais que c'est parce que les processus de résolution des conflits n'ont pas été mis à l'essai durant les négociations. C'est un problème.
Par bonheur, le processus de la Commission des traités de la Colombie-Britannique implique deux représentants du gouvernement, deux représentants des premières nations et un président, issu de l'une ou l'autre des parties. La commission est censée se dissoudre lorsqu'elle aura terminé les négociations en Colombie-Britannique. Ce sera peut-être dans 100 ans — on ne le sait pas — mais d'ici là, elle est assez bien conçue. Si le Parlement et les autres, les trois parties, voulaient lui confier un rôle d'arbitrage dans la mise en oeuvre des traités à cet endroit, je ne crois pas que vous auriez nécessairement besoin de juges.
Je dirais toutefois ceci à M. Lemay: il est vrai, évidemment, qu'elle ne jouit pas d'une indépendance judiciaire maintenant, et c'est là l'avantage qu'offre le système judiciaire.
Merci, monsieur le président. Je vais peut-être partager mon temps avec M. Albrecht.
J'aimerais remercier tous les témoins aujourd'hui pour leurs propos fort intéressants. Nous avons entendu d'excellents témoins tout au long de notre étude, et j'aimerais vous féliciter tous aujourd'hui.
La semaine dernière a été palpitante pour le gouvernement. Je pense à l'accord politique que nous avons signé avec l'APN, et une partie de cet accord a en fait été mise en oeuvre lors de la conférence qui a eu lieu la semaine dernière à Saskatoon. C'était là l'une des promesses faites dans l'accord, qui a été accomplie la semaine dernière. J'ai participé à cette conférence, qui nous a donné une excellente occasion d'entendre les suggestions et les préoccupations d'un bon nombre de chefs signataires de traités partout au pays.
La première question que j'aimerais poser, toutefois, a trait à l'inexactitude qui se retrouve peut-être dans le compte rendu par suite de ce qu'ont dit certains de mes collègues d'en face. On a laissé entendre qu'un plafond est en quelque sorte une mauvaise chose. Ce que je dis depuis le début, c'est qu'en fixant une limite de 150 millions de dollars, on permet non seulement au tribunal de se concentrer sur la multitude de revendications de valeur moindre qui existent, mais aussi au gouvernement fédéral de centrer son attention sur les revendications de très grande envergure. Non seulement cela. Si on éliminait le plafond, on pourrait craindre que les grandes revendications grugent les 250 millions de dollars attribués au tribunal, et aucune des revendications de moindre valeur ne serait réglée et nous nous retrouverions dans la même situation que maintenant, avec près de 1 000 revendications à régler.
Monsieur Atleo, seriez-vous d'accord pour dire que cette logique est valable, pourvu évidemment qu'il y ait une volonté politique de régler les revendications de plus grande envergure?
Merci.
Je crois que mon collègue Roger a parlé de notre rôle au sein du groupe de travail conjoint. Le gouvernement en est arrivé au mandat et, sous la direction du chef national, nous avons accepté de nous engager en comprenant que la limite faisait partie du mandat du gouvernement, que nous allions travailler sur un projet de loi qui viserait les premières nations dont les revendications se trouvent en deçà de la limite et que c'était d'autant plus important d'en arriver à un accord politique.
Autrement dit, nous parlons d'un arriéré important, ce que nous comprenons tous, je crois, et ce que les Canadiens doivent comprendre, un arriéré de près de 1 000 revendications à régler partout au pays.
Il ne faut pas seulement s'occuper de l'arriéré. Il faut aussi prendre soin de ne pas oublier personne. C'est pourquoi il importe d'entendre les communautés qui veulent soulever des questions, qui veulent aborder la question de la limite. Bien que, à titre de coprésident du groupe de travail, je sois satisfait du résultat de nos travaux et, comme je l'ai déjà dit, je les appuie, il est d'autant plus important qu'un comité comme le vôtre travaille ensemble pour régler ce qui, selon moi, est la plus grande injustice sociale que nous avons dans notre pays.
Ceci nous sert de tremplin. Il faut s'engager dans l'accord politique à faire en sorte de ne pas oublier ceux dont les revendications sont supérieures à la limite. Nous devons nous y engager. J'ai dit tout à l'heure que j'avais l'impression qu'il y avait une forte volonté politique. J'espère que nos dirigeants respectifs formeront le groupe de travail nécessaire et qu'ils veilleront à ce que personne ne soit mis de côté.
J'espère avoir répondu à votre question.
Je vous remercie, monsieur Atleo.
Croyez-vous que la collaboration que vous avez reçue de la part de notre gouvernement a été adéquate?
Je crois que c'était, à de nombreux égards, sans précédent. On est en train de poser un nouveau jalon. Nous avons beaucoup appris. Je serais ravi que nous ayons des conversations qui nous apprendraient comment améliorer nos efforts. Je l'ai dit tout à l'heure: en l'espace de cinq ou de six mois, nous avons fait avec plus de 600 communautés... Pour nous, en Colombie-Britannique, par exemple, le projet de loi a été rendu public et a été déposé le jour même où les chefs de la province se réunissaient. Vous comprendrez donc qu'on a eu très peu de temps.
Je crois qu'à l'avenir, nous devons élaborer une définition commune de ce qu'est un engagement total et constructif. Si nous avons des résultats ici, alors nous devrons prendre appui sur eux. Par exemple, les premières nations et le gouvernement pourraient avoir des notions différentes de ce qu'est une consultation. Ce serait inutile de créer un environnement dans lequel les opinions diffèrent sur le sens de ce mot. Par ailleurs, les premières nations seront nombreuses à dire que nous travaillons sur ce dossier depuis des décennies et qu'il est absolument essentiel de s'occuper de l'arriéré.
Encore une fois, j'espère avoir répondu à votre question. Je le répète, ce processus devra être amélioré, renforcé et dépassé.
Vous êtes d'accord pour dire que vous avez amorcé un processus constructif avec le gouvernement.
Ce n'est pas tout. Après avoir consulté l'APN pour concevoir cette mesure législative historique, nous avons conclu l'accord politique, qui a déjà donné des résultats avec la conférence sur les traités, comme je l'ai dit tout à l'heure. De plus, nous précisons dans l'accord politique que la nomination des juges sera faite en consultation avec le chef national.
Monsieur Atleo, croyez-vous que cette approche fonctionnera pour votre organisation?
Cela nous ramène aux interventions précédentes. Concernant le processus de nomination, les responsabilités du ministre, l'incapacité d'une autorité ministérielle fédérale dans ces domaines et le mandat proposé par le gouvernement ont été présentés très clairement au groupe de travail conjoint.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, je dirais que c'est le meilleur consensus auquel on puisse arriver, en ce sens que le chef national a son mot à dire et d'autres concepts entrent en jeu, comme la participation des aînés. Cela résulte de la nécessité pour nous d'être des partenaires à part entière.
Nous devons continuer à définir nos relations dans ce contexte, à la lumière des titres de propriété existants et des droits conférés par traités que nous avons dans ce pays. Comme d'autres l'ont proposé, nous pourrions appliquer ces concepts à d'autres initiatives et améliorer nos relations en nous inspirant de cet exercice d'engagement constructif et de collaboration.
Merci beaucoup, monsieur Atleo et monsieur Bruinooge.
Voilà qui complète nos discussions avec le premier groupe de témoins.
Avant de suspendre nos travaux pour une minute afin de permettre le changement de témoins, j'aimerais remercier les témoins de leur présence. Je ne pourrai pas vous remercier personnellement parce que je dois voir à ce que nos travaux reprennent dans quelques minutes, mais je vous remercie infiniment.
Je vais suspendre la réunion pour deux minutes pour permettre aux nouveaux témoins de prendre place.
Si mes collègues et les témoins veulent bien prendre place, j'aimerais poursuivre avec le deuxième groupe. J'apprécie le fait que nous essayons de faire les choses très rapidement aujourd'hui.
J'aimerais que le comité poursuive l'étude du projet de loi C-30 avec le prochain groupe. Je sais que nos audiences sont télévisées. Je ne sais jamais quelle mise en contexte je dois présenter aux gens qui nous regardent. Il y a sûrement autre chose à la télévision cet après-midi.
Nous recevons quatre autres délégations cet après-midi. Nous avons avec nous le chef Wilton Littlechild et le chef Charles Weaselhead, de l'Assemblée des Premières nations de l'Alberta. Deuxièmement, nous accueillons Rick Simon, chef régional de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador. La troisième délégation est composée du grand chef Norman Young, du chef Harry St. Denis, et de Peter Di Gangi, représentants du Secrétariat de la nation algonquine. Les derniers témoins, mais non les moindres, sont le grand chef Morris Swan Shannacappo et Carl Braun, de la Southern Chiefs Organization, du Manitoba.
Je crois que plusieurs d'entre vous étaient ici lorsque nous avons commencé, il y a une heure. Je vais demander à chaque délégation de présenter un exposé de 10 minutes ou moins. Je vais essayer de vous faire signe lorsqu'il restera deux minutes. Si je ne le fais pas, je vous avertirai de vive voix lorsqu'il restera une minute, mais je vais vous interrompre au bout de dix minutes. Nous poursuivrons ensuite avec les questions.
J'aimerais commencer avec M. Wilton Littlechild, chef régional de l'Alberta de l'Assemblée des Premières nations.
Merci beaucoup, monsieur le président, de m'avoir invité à comparaître devant vous dans le cadre de l'étude du projet de loi C-30. C'est un honneur pour moi d'avoir la chance de participer à vos travaux et de faire de brefs commentaires à titre de membre du groupe de travail conjoint.
Pour commencer, je tiens à remercier le chef national Fontaine de m'avoir accordé sa confiance en me permettant de travailler à cette importante mesure législative aux côtés du chef régional Atleo et du chef régional Joseph. Bien que tous les membres et le personnel du groupe de travail méritent des éloges, j'aimerais, pour le compte rendu, souligner l'excellent travail de nos coprésidents, M. Bruce Carson et le chef Atleo. Après 60 ans d'efforts déployés par une foule de personnes, nous avons maintenant devant nous le projet de loi C-30. Je crois que nous le devons à l'efficacité de leur présidence.
Au cours de vos réunions, d'excellents témoins vous ont fait part de leurs opinions sur la meilleure façon d'avancer et la prochaine étape à franchir pour que justice soit enfin faite, comme nous le souhaitons tous. Permettez-moi d'ajouter ma voix aux appels lancés pour la mise en place d'un système amélioré de règlement des revendications. J'ai aussi eu l'honneur de faire partie d'un comité précédent à titre de député de la 34e législature, pendant cinq ans. Je ferai mes commentaires à la lumière de cette expérience également.
Je ferai d'abord une remarque personnelle sur le processus parlementaire. Lorsque j'ai fait partie de divers comités, j'ai toujours cru que les affaires autochtones et les questions touchant directement les premières nations devaient et pouvaient être traitées d'une manière non partisane. Compte tenu des procédures traditionnelles que l'on trouve dans les deux Chambres, ce n'est probablement qu'un rêve. Néanmoins, la mise sur pied d'un groupe de travail conjoint composé de représentants du Bureau du premier ministre, du ministère des Affaires indiennes, du ministère de la Justice et de l'Assemblée des Premières nations pour la rédaction d'un projet de loi constitue un nouveau modèle pour l'avenir.
Ce partenariat avec des représentants de la Couronne m'a redonné à croire, à cause de la collaboration fructueuse des membres, que ce modèle mérite d'être considéré pour de futures initiatives législatives. Avec d'autres modèles de travail créatifs, comme la présence de membres d'office au sein de votre comité, cette façon de faire augmente considérablement les chances que les premières nations acceptent l'adoption des mesures législatives proposées.
Deuxièmement, en ce qui a trait à la méthode de travail, bien que ces modèles puissent être améliorés à la lumière de notre expérience récente, permettez-moi de recommander d'autres améliorations possibles. On pourrait commencer le processus de rédaction législative plus tôt, en considérant les principes ou même en confiant aux communautés locales la rédaction des textes législatifs qui serviraient de base aux discussions. Une participation directe et signifiante des représentants des premières nations dès le début pourrait être avantageuse pour tous.
Bien que je respecte ceux qui n'adhèrent pas à cette méthode de travail, elle vaudrait la peine d'être considérée. Certains pourraient soutenir que les règles de procédure parlementaires et de rédaction législative ne permettaient pas cela. Je leur répondrai que le temps est peut-être venu de changer ces règles. Certains ont critiqué le manque de consultation, et je dirai que cela est attribuable en partie aux délais serrés et au caractère confidentiel que l'on doit assurer au processus de rédaction législative.
Troisièmement, je crois encore fermement que la déclaration des Nations Unies est un cadre de partenariat qui constitue une solution. C'est une déclaration de bonne volonté qui nous sert de tremplin pour établir de meilleures relations. En effet, la mise en oeuvre du projet de loi C-30 devrait être guidée par les paramètres de la déclaration des Nations Unies, par exemple les articles 19, 28 et 32.
Pour ne pas prendre trop de temps, je vais citer seulement l'article 19 :
Les États se concertent et coopèrent de bonne foi avec les peuples autochtones intéressés — par l'intermédiaire de leurs propres institutions représentatives — avant d'adopter et d'appliquer des mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner les peuples autochtones, afin d'obtenir leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
Comme vous le savez, le 7 mars, le comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale a demandé aux États-Unis d'appliquer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Voici en substance ce qu'on trouve dans son rapport :
le comité recommande enfin que la déclaration soit utilisée pour interpréter les obligations de l'État partie, aux termes de la Convention, envers les peuples autochtones.
Comme un témoin précédent, le chef Ed John, l'a mentionné en faisant référence à d'autres articles, ce rapport souligne la valeur de la déclaration des Nations Unies pour l'avenir.
Quatrièmement, la méthode de travail qui a permis de rédiger le projet de loi C-30 est un premier pas très important dans le cheminement que nous amorçons sous le deuxième thème décennal international des Nations Unies, « partenariats pour l'action et la dignité ». La méthode de travail, à mon avis, donne tout son sens à ce thème.
Il y a des années, nos aînés ont dit... [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
Si quelqu'un entend faire une loi qui touchera directement votre vie, il vaut mieux que vous soyez là pour défendre vos intérêts. Dans ce sens, j'ai été très honoré de faire partie du groupe de travail conjoint et de voir les mots de nos dirigeants être mis à exécution.
Monsieur le président, nous ne devons pas avoir peur du succès — comme la récente conférence sur les traités tenue à Saskatoon, dont M. Bruinooge a parlé. C'était une première mise en oeuvre de l'accord politique signé par le ministre Strahl et le chef national Fontaine. Pour toutes les bonnes raisons invoquées par les témoins précédents, je crois que le travail fait par le groupe de travail conjoint constitue notre meilleur effort, compte tenu que nous avions le mandat de rédiger conjointement le projet de loi C-30. Nous pouvons nous appuyer sur ces forces pour avancer.
Pour terminer, je me joins à ceux qui ont demandé l'adoption du projet de loi pour établir un tribunal indépendant qui assurera l'impartialité et l'équité, une plus grande transparence et un règlement plus rapide des revendications, de sorte à rétablir la confiance et à créer de meilleures relations entre nos peuples. Nous pouvons avancer ensemble dans un esprit de partenariat et joindre nos énergies pour construire un meilleur avenir.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, chef Littlechild.
Nous avons utilisé environ huit minutes.
Le chef Weaselhead voulait aussi faire un commentaire.
Je tiens à remercier le comité permanent de m'avoir invité à comparaître devant lui au nom des Autochtones de l'Alberta et, plus précisément, de la tribu des Blood, ou Kainai.
Je m'appelle Charles Weaselhead. Je suis le chef de la tribu des Blood. Je suis également le grand chef responsable du traité no 7, qui couvre la partie Sud de l'Alberta.
Le mémoire sur le projet de loi C-30 que la tribu des Blood, ou Kainai, a préparé à l'intention du comité permanent des affaires autochtones a été envoyé à Bonnie Charron le 7 mars 2008. Nous avons décidé, en raison des contraintes de temps, de ne pas passer en revue le document, mais de présenter, plutôt, un résumé des points saillants de notre mémoire. Nous allons parler brièvement du contexte historique et culturel dans lequel a évolué la tribu des Blood, de la tribu des Blood de nos jours, de sa relation avec le Canada et des préoccupations que soulève le projet de loi C-30. Nous allons aussi formuler sept recommandations au comité.
Les principes tribaux qui régissent les actions de la tribu des Blood sont énoncés dans la déclaration de nos aînés, que nous appelons Kainayssini. Cette déclaration verbalise l'interprétation qu'ont fait nos aînés du but de notre existence en tant que Kainai. Kainayssini établit le système tribal et énonce les principes directeurs permettant de protéger et de préserver ce système. Elle constitue un guide pratique précisant les mesures qui doivent être prises dans l'immédiat et dans l'avenir pour assurer notre survie. Nous devons veiller à protéger les fondements de notre existence, notamment nos terres, notre langue, notre culture de même que nos droits politiques, économiques et sociaux.
La tribu des Blood, ou Kainai, est située dans le Sud de l'Alberta, dans la réserve des Gens-du-Sang, la plus vaste au Canada. Elle s'étend sur une superficie légèrement inférieure à 520 milles carrés et compte plus de 10 000 membres.
Historiquement, la relation de la tribu des Blood avec le Canada puise ses racines dans le traité no 7 qui a été signé de nation à nation le 22 septembre 1877. Ce traité constitue un accord solennel et exécutoire valide à perpétuité. Dans ce traité, nous avons convenu de partager nos terres avec la Couronne britannique, sauf pour ce qui est des régions réservées expressément à notre usage exclusif. Par conséquent, nous conservons le même statut politique et juridique que nous avions lors de la signature du traité no 7, y compris le droit à l'autonomie gouvernementale. Ce sont nos dirigeants qui continuent de diriger le peuple Blood.
Du devoir d'honneur découle le devoir de consultation quand un texte législatif risque de toucher à nos droits ancestraux ou issus de traités : ces droits sont en effet protégés par le paragraphe 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982. Le devoir de consulter peut en retour exiger des accommodements de la part du Canada de même que notre consentement. Le traité no 7 a imposé certaines obligations au Canada. Plus particulièrement, le Canada était tenu d'agir honorablement dans toutes ses transactions avec la tribu des Blood.
Passons maintenant au projet de loi C-30, qui a pour objet de constituer le tribunal des revendications particulières chargé de statuer sur le bien-fondé des revendications particulières des premières nations et sur les indemnités afférentes. La tribu des Blood éprouve certaines inquiétudes au sujet de cette mesure. Soulignons que notre mémoire ne constitue pas une consultation mais bien un exposé des préoccupations qui découlent de ce projet de loi.
Premièrement, concernant les droits issus de traités et le devoir de consultation, la tribu des Blood, un des principaux intervenants, n'a pas pris part aux discussions qui ont mené au dépôt du projet de loi. Or, le devoir de consultation implique que soient consultés les titulaires des droits ancestraux — c'est-à-dire les gouvernements des premières nations qui représentent leurs membres et leurs collectivités, non pas les organisations nationales ou régionales. Plus spécifiquement, la tribu des Blood se représente elle-même. Elle ne compte pas d'organisme porte-parole et s'attend à être consultée par le Canada.
Deuxièmement, la non-dérogation. Le projet de loi C-30 ne renferme...
Excusez-moi, mais cela fait un peu plus de 14 minutes que vous parlez. Tous les membres du comité ont une copie de votre mémoire. Je vous demanderais de conclure rapidement.
En ce qui a trait à la non-dérogation, aux membres du tribunal et aux nominations, puisque l'accord politique entre le ministre et le chef national de l'Assemblée des Premières nations concernant la réforme des revendications particulières stipule que le chef national de l'APN participera au processus de recommandation des membres du tribunal, pourquoi n'est ce pas précisé dans le projet de loi?
Je vais laisser de côté la question des attributions du tribunal.
Concernant les revendications particulières, le projet de loi ne règle pas les problèmes inhérents au régime actuel de règlement des revendications.
Passons maintenant au point 7, que nous jugeons très important. Il porte sur la limite de la valeur des revendications et de régime applicable aux revendications de grande valeur. Le tribunal ne peut accorder d'indemnités totales supérieures à 150 millions de dollars. Ce plafond ne tient pas compte des revendications particulières qui valent plus de 150 millions de dollars. De plus, le projet de loi ne mentionne aucune mesure visant le règlement de ces revendications. Il est tout simplement inacceptable pour le Canada d'affirmer qu'il n'est pas nécessaire que ces revendications, en raison de leur petit nombre, fassent l'objet d'un processus législatif. Un mécanisme de règlement sera supposément établi au moyen de l'accord politique intervenu entre le ministre et le chef national. Les accords politiques ne sont pas exécutoires. Cette situation pose de sérieux problèmes à la tribu des Blood, en raison surtout de sa propre revendication de grande valeur, qui est supérieure au plafond fixé par le législateur.
Quel régime sera élaboré pour régler cette revendication et les autres demandes qui dépassent le plafond légal? Qui en fixera les modalités? Comme il s'agit de la revendication des Blood et non pas de l'APN, il est impératif que ce soit la tribu des Blood qui participe aux discussions visant à établir ce régime. D'après nos informations, le gouvernement fédéral va affecter en tout 250 millions de dollars par année au versement des sommes accordées par le tribunal ou négociées par les parties. Ce sera insuffisant s'il y a plusieurs grandes revendications, même inférieures à la limite des 150 millions de dollars.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, monsieur le président. C'est un honneur pour moi de comparaître devant le comité permanent et d'entendre les témoignages sur le projet de loi C-30.
Le processus conjoint qui a mené au dépôt du projet de loi C-30 et à l'accord politique, comme l'ont mentionné de nombreuses autres personnes avant moi, s'est avéré une expérience fort positive en ce sens qu'elle nous a permis de collaborer avec le gouvernement du Canada. Je suis persuadé que les rapports entre l'ancien ministre Jim Prentice et le chef national Phil Fontaine, qui ont tous deux piloté le dossier de la commission des revendications, y ont été pour beaucoup. Je tiens à le souligner, et à saluer aussi le travail de ma collègue Shawn Atleo et de M. Bruce Carson, du Cabinet du premier ministre. Il est clair qu'il a fallu l'intervention de personnes très haut placées pour arriver là où nous en sommes aujourd'hui, c'est-à-dire au projet de loi présentement à l'étude. Il s'agit, selon moi, et de l'avis de nombreuses autres personnes, d'un fait sans précédent qu'il faut reconnaître.
Nous appuyons le projet de loi et l'accord politique dans sa forme actuelle. Ils constituent une nette amélioration par rapport au statu quo et aux démarches entreprises dans le passé pour régler le problème. J'occupe le poste de chef régional depuis 1994. J'ai eu l'occasion de travailler pendant un certain temps avec les chefs de l'Atlantique, qui ont témoigné plus tôt. J'ai fait partie du groupe de travail mixte qui a été mentionné. J'ai participé à bon nombre des réunions qu'il a tenues un peu partout au Canada. J'essayais à l'époque de faire le même travail dont il est ici question aujourd'hui.
Il est fort intéressant de voir, de mettre en place un projet de loi qui a pour objet de répondre à nos préoccupations, comme le fait que le gouvernement agit en qualité de juge et partie.
Le projet de loi C-30 ne vise pas à corriger toutes les faiblesses de la politique des revendications particulières et du mécanisme de règlement. Il est vrai qu'ils en contiennent. L'accord politique complémentaire s'attaque aux questions connexes qui touchent la politique et le mécanisme.
Mes collègues, le chef Noah Augustine et le chef Lawrence Paul, du Atlantic Policy Congress, ont parlé plus tôt de la façon dont nous entendons maintenir la pression sur le gouvernement pour qu'il respecte cet accord politique.
Comme vous, monsieur Bruinooge, j'ai assisté à la conférence sur les traités qui a eu lieu la semaine dernière. La tenue de conférences est l'un des premiers points abordés dans l'accord politique. C'est une bonne chose qu'elle ait eu lieu. J'étais vraiment content d'y participer. J'y ai présenté un exposé sur certains des problèmes que soulève la question des traités dans la région de l'Atlantique.
J'ai pris part à de nombreuses conférences sur les traités dans le passé. J'espère que, contrairement à ce qui a été décidé la semaine dernière, cet accord ne sera pas relégué aux oubliettes. Nous espérons qu'il aboutira à des résultats concrets. Nous devons démontrer que nous sommes capables d'agir dans ce domaine.
Le processus qui a mené à l'élaboration du projet de loi et de l'accord politique représente un point tournant; il doit servir de modèle à d'autres secteurs stratégiques. Nous avons ici l'occasion de réaliser des progrès dans plusieurs autres domaines d'activité, d'amener le gouvernement et l'Assemblée des Premières nations à engager des discussions au plus haut niveau. Cette occasion, nous nous devons de la saisir.
En plus de participer aux travaux d'élaboration avec le gouvernement du Canada, l'Assemblée des Premières nations a organisé des séances d'information et de discussion avec les premières nations dans les régions. Nous nous sommes efforcés de participer à cet effort du mieux que nous le pouvions.
En Nouvelle-Écosse, nous avons sollicité la participation de deux conseils tribaux, soit la Union of Nova Scotia Indians et la Confederacy of Mainland Mi'kmaq. Avant que l'assemblée ne leur donne un aperçu du contenu du projet de loi, les deux associations ont posé des conditions : elles nous ont demandé de signer des documents affirmant que cette démarche ne constituait pas une consultation. Nous l'avons fait. Nous leur avons dit que la consultation était la responsabilité du gouvernement du Canada, pas la nôtre. Nous avons, par notre présence, cherché à appuyer cet effort. Toutefois, si d'autres consultations s'imposent, ce sera au gouvernement de s'en occuper.
Cela dit, nous pouvons tirer de cette expérience de nombreuses leçons positives. Mentionnons, entre autres, la nécessité d'engager les premières nations directement, et dans un délai raisonnable. Comme vous le savez, le projet de loi a été déposé, si je ne m'abuse, le 27 novembre. Le temps de l'analyser, d'organiser des rencontres dans les régions, de discuter entre nous en tant que chefs du Canada, et nous étions déjà au 11 décembre. Le délai était très serré, le défi, énorme.
Nous appuyons le projet de loi dans sa forme actuelle, sans amendement. Toutefois, cela n'empêche pas les autres groupes d'en proposer. Il s'agit là d'un droit démocratique fondamental qui s'applique à tous, y compris les premières nations. Nous ne disons pas que tout est parfait, loin de là. Toutefois, nous sommes satisfaits du travail qui a été accompli jusqu'à maintenant.
L'objectif prioritaire de la mise en oeuvre du projet de loi et de l'accord politique est d'assurer le respect des engagements qu'ils englobent. Il est essentiel que les engagements et les travaux conjoints définis dans l'accord politique soient exécutés rapidement. Il est vrai que la création d'un tribunal juste et indépendant qui peut prendre des décisions exécutoires dépasse de loin ce qui a été fait jusqu'ici. Or, ce qu'il faut maintenant se demander, c'est si le projet de loi va être mis en oeuvre.
Nous savons que le Parlement a un rôle à jouer. Au bout du compte, en tant que premières nations, la question de savoir quel gouvernement va se charger de la mise en application du projet de loi nous importe peu. L'essentiel, c'est qu'il le soit, en raison de tout le travail qui a été mené et parce qu'il va beaucoup plus loin que toute autre démarche entreprise dans le passé.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur Simon.
Nous allons maintenant céder la parole au représentant du Secrétariat de la nation algonquine. Allons-nous entendre un ou deux témoins?
[Français]
Bonjour, membres du comité. Nous sommes heureux d'être parmi vous pour parler du projet de loi C-30. Puisque le temps presse, nous déposerons notre document complet et présenterons un résumé.
Le Secrétariat de la nation algonquine (SNA) est un conseil tribal qui représente trois premières nations algonquines dont les territoires se situent dans le nord-ouest du Québec et le nord-est de l'Ontario. Je parle des premières nations du Lac Barrière, de Timiskaming et de Wolf Lake. Chacun de nos membres vit des situations factuelles différentes et a une variété de réclamations potentielles selon la politique des revendications particulières. Aucun de nos membres n'a signé de traité de cession territoriale, ce qui signifie que nous possédons toujours le titre autochtone de notre territoire traditionnel. C'est donc le fondement d'une réclamation globale.
Le comité veut savoir si le projet de loi abordera effectivement le présent conflit d'intérêts qui existe dans la politique actuelle, et s'il est préférable au statu quo. Le comité veut aussi savoir si les propositions du gouvernement fédéral répondront adéquatement aux arrérages de plus de 800 réclamations.
De façon générale, si le projet de loi est adopté, il représentera une amélioration; mais il y a quand même un bon nombre d'enjeux fondamentaux qui laissent des doutes et des soucis tenaces. Nous voulons donner au comité des exemples de faits vécus depuis la mise sur pied du plan La justice, enfin qui montrent qu'il faut apporter des modifications. Nous appuyons fortement les amendements au projet de loi C-30 que l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador avait recommandés à votre comité le 10 mars dernier. Nos membres sont directement touchés par la définition proposée de ce qui est ou non une réclamation admissible, et nous voulons insister sur l'importance de ces amendements proposés. Notre document complet donne les détails.
L'un des objectifs de la réforme sur les revendications particulières était d'éliminer les conflits d'intérêts fédéraux. Malgré sa culpabilité, le fédéral contrôle la politique, le processus et le financement. Le projet de loi C-30 touche en partie ce sujet par la création d'un tribunal pour entendre certains genres de réclamations.
Cependant, les réclamations demeureront sujettes à des conflits d'intérêts fédéraux avant même la réception de la soumission des revendications par le gouvernement fédéral, et ce, au cours des six prochaines années. Les plus importantes réclamations seront sujettes à des conflits d'intérêts tout au long du processus.
Comme nous l'avons expliqué dans notre document, ces conflits d'intérêts sont réels et ont des répercussions directes sur la gestion de nos réclamations. Indépendamment des bienfaits du tribunal, nous demeurons très préoccupés par la possibilité d'abus et le manque de responsabilités dès le processus de réclamations. Nous nous basons sur la manière dont les réclamations des premières nations Wolf Lake et Timiskaming ont été traitées depuis l'annonce de l'initiative La justice, enfin.
[Traduction]
Dans le cas des deux premières nations, en juin 2007, le gouvernement fédéral a agi de manière unilatérale et arbitraire quand il a modifié, sans consultation ni consentement, la formule adoptée d'un commun accord pour régler les revendications de nos membres.
Pour la première nation de Wolf Lake, cela a entraîné le retrait de ses revendications du processus d'examen de la commission et l'arrêt de ses travaux. Résultat: nous n'aurons accès à aucune tribune si le projet de loi C-30 n'est pas adopté. Pour la première nation Timiskaming, cela a provoqué la rupture apparente d'une entente qui avait fait l'objet d'une résolution du conseil de bande. Dans les deux cas, les actions du gouvernement fédéral ont eu pour effet de miner les efforts déployés par nos membres pour régler leurs revendications, et d'ébranler notre confiance dans le processus.
Cette façon de faire témoigne d'un manque de responsabilité et de transparence. Nous ne pouvons obtenir de réponses ou de justifications pour les actions de la DGRP, la Direction générale des revendications particulières. En l'absence de réponses satisfaisantes, nous jugeons que la direction agit de mauvaise foi. Ce genre de comportement nous préoccupe. Nous nous demandons si le comité peut nous aider à cet égard, soit en demandant des explications, soit en mentionnant ces cas dans son rapport.
Cette expérience n'a rien à voir avec celle que nous avons vécue dans le cas du projet de loi C-6, auquel nous nous sommes opposés. À l'époque, les responsables fédéraux avaient consulté nos membres et affirmé que le revendicateur autochtone pouvait se prévaloir des dispositions de la nouvelle loi ou s'en tenir au processus actuel. Cette fois-ci, aucune consultation constructive n'a eu lieu.
Le ministère des Affaires indiennes aurait pu, dès juin 2007, profiter de ses rencontres avec les revendicateurs des premières nations pour promouvoir sa nouvelle approche en nous expliquant comment nos membres allaient bénéficier des changements apportés. Nous aurions accepté volontiers de collaborer avec la DGRP. Malheureusement, cela ne s'est pas produit. Par ses actions, la DGRP a fait l'inverse.
Nous sommes d'accord pour dire qu'il faut améliorer de toute urgence la politique et le mécanisme actuels. Le projet de loi C-30 constitue une amélioration par rapport au projet de loi C-6. Toutefois, bon nombre des questions clés non résolues ont été transposées dans l'accord politique. Les engagements que prévoit cet accord sont aussi vagues aujourd'hui qu'ils l'étaient au moment où ils ont été annoncés, en novembre 2007. Le gouvernement fédéral nous dit de lui faire confiance, mais c'est difficile, en raison de ce que nous avons vécu récemment.
Le projet de loi, une fois adopté, va devenir loi, sauf qu'il n'y a rien dans celui-ci qui oblige la mise en oeuvre de l'accord politique. Bien que nous ne soyons pas contre la réforme des revendications particulières, nous avons des inquiétudes légitimes qui restent sans réponse satisfaisante. Le Parlement ou le comité pourrait peut-être, si le projet de loi va de l'avant, surveiller la façon dont le gouvernement fédéral gère la transition en accordant une attention spéciale aux étapes initiales du processus, où le risque de conflit d'intérêt fédéral demeure bien réel.
Autre point important: que le projet de loi C-30 devienne loi ou non, le problème du manque de ressources financières au sein du gouvernement fédéral et des premières nations doit être solutionné. À l'heure actuelle, il n'y a pas suffisamment de ressources pour éliminer l'arriéré et appuyer les efforts de négociation accrus. Parallèlement, les nombreux objectifs fixés par le gouvernement fédéral relativement au projet de loi C-30 ne peuvent être atteints sans l'octroi de ressources additionnelles importantes et du côté du gouvernement fédéral et du côté des premières nations.
J'aimerais faire quelques brefs commentaires au sujet d'un article précis du projet de loi qui vise directement la première nation de Wolf Lake. L'article 14 du projet de loi définit ce qu'est une revendication particulière. L'alinéa 14(1)c) dispose qu'une première nation peut saisir le tribunal d'une revendication qui résulte de
la violation d'une obligation légale de Sa Majesté découlant de la fourniture — notamment un engagement unilatéral donnant lieu à une obligation fiduciaire légale — ou de l'administration par Sa Majesté de terres d'une réserve...
La première nation de Wolf Lake est l'une des cinq premières nations du Québec qui ne possèdent pas de terres de réserve mises de côté, en vertu de la Loi sur les Indiens, pour leur usage et bénéfice. Donc, dans notre cas, aucune terre de réserve n'a été mise de côté. Le libellé de cette disposition ne tient pas compte de notre situation. Il faudrait y apporter un amendement, comme celui qu'a proposé l'APNQL dans son mémoire, qui pourrait se lire comme suit: « découlant de l'attribution ou de l'omission d'attribution des terres de réserve », au lieu de « découlant de la fourniture de terres d'une réserve ».
J'ai terminé.
Merci beaucoup.
Notre dernier témoin représente la Manitoba's Southern Chiefs' Organization. Nous allons d'abord entendre le grand chef Shannacappo.
Merci. Je veux vous offrir du tabac, en guise de cadeau, pour avoir accepté d'entendre notre témoignage.
[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
Mesdames et messieurs, bonjour. Je tiens à vous remercier du temps que vous nous accordez. Je m'appelle Morris Swan Shannacappo, qui veut dire Good Sounding One. Je vais donc essayer de faire en sorte que mes propos, cet après-midi, soient des plus agréables.
Je tiens à vous remercier d'avoir accepté de nous rencontrer, d'entendre le point de vue de notre peuple. Il a été question d'un ancien projet de loi, le C-6, auquel nous sommes également opposés. Aujourd'hui, je vous ai, dans le cadre d'une brève cérémonie, offert du tabac pour avoir accepté de nous rencontrer. Notre comportement est dicté par nos traditions et nos coutumes, tout comme le sont les lois du Canada.
Je tiens d'abord à préciser que je représente 36 premières nations du Manitoba. Elles sont visées par les traités nos1 à 5. Je ne prétends pas, ici, défendre leur position vis-à-vis de ces traités. Ensuite, j'agis également comme porte-parole pour les premières nations qui sont visées par le traité no 4. Il y en a sept au Manitoba, et 34 en Saskatchewan.
En 1880, Alexander Morris, à l'époque lieutenant-gouverneur de la province du Manitoba, a rédigé un ouvrage intitulé The Treaties of Canada with the Indians of Manitoba and the North-West Territories. Bien connu de tous les étudiants d'histoire, cet ouvrage contient des exemplaires des traités conclus entre 1850, en Ontario, et 1877, en Alberta, des observations de première main des commissaires des traités, et des rapports sur les traités présentés au gouvernement.
Le lieutenant-gouverneur Morris défendait passionnément l'importance des traités et l'obligation de les respecter. Il a dit en guise de conclusion, et je cite, parce que cela mérite d'être répété :
... qu'un gouvernement averti et paternel applique fidèlement les clauses de nos traités et fasse de son mieux pour aider et relever la population indienne confiée à nos soins, et nous verrons la paix, le progrès et la concorde régner chez elle dans le Nord-Ouest; et au lieu de voir les Indiens disparaître « comme la neige fond au soleil », selon l'expression forte de l'un deux qui vivait dans le vieux Canada, ils deviendront de loyaux sujets de la Couronne, heureux, prospères et indépendants. De son côté, le Canada pourra se rendre le témoignage que, dans un esprit vraiment patriotique, notre pays a fait son devoir envers la race rouge dans le Nord-Ouest et, du même coup, envers lui-même.
Quelque 127 ans plus tard, le 12 septembre 2007, l'honorable Jim Prentice, dans un communiqué intitulé « Revendications particulières : La justice, enfin », expliquait que, de manière générale, les revendications particulières des premières nations découlent du non-respect, par le gouvernement fédéral, des obligations juridiques définies dans les traités historiques, la Loi sur les Indiens ou les autres accords officiels conclus entre les premières nations et la Couronne — le lieutenant-gouverneur Morris avait eu raison de dire ce qu'il a dit en 1880. L'objectif de ces traités est de faire en sorte que les Canadiens d'origine autochtone et membres des premières nations sont heureux, prospères, indépendants.
La réconciliation réclamée par les tribunaux et de nombreuses personnes éclairées de notre société passe par le respect de tous les engagements pris en vertu des traités, et pas seulement une partie de ceux-ci, comme le prétend l'actuel gouvernement du Canada. La triste réalité, c'est que les parlementaires font délibérément preuve de naïveté s'ils pensent que le fait de ne pas respecter en totalité et de manière honorable chaque volet des traités va aboutir à la réconciliation qu'ils recherchent, réconciliation que nous, en tant que premières nations et Canadiens, méritons.
Les traités comprennent des promesses liées aux terres, lesquelles englobent de nombreuses revendications foncières non réglées, ainsi que d'autres promesses importantes et tangibles qui portent, par exemple, sur l'éducation, la santé, la protection de la culture. Celles-ci doivent toutes être honorées si nous voulons atteindre la vision de M. Morris, soit celle d'un peuple qui est heureux, prospère, indépendant.
Aujourd'hui, les Autochtones exercent un contrôle sur 0,04 p. 100 des terres au Canada, ce qui représente moins d'un demi pour cent de la superficie. Au Manitoba, nous contrôlons 0,04 p. 100 des terres.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'engagements financiers très importants dans les traités historiques, comme vous les appelez. Pour nous, ce sont des traités, point à la ligne. Toutefois, ces engagements doivent être revus. Ils ont peut-être été faits dans un contexte historique, mais ils sont toujours d'actualité.
Il est clair pour les membres des premières nations, et ce devrait être la même chose pour vous, que les éléments les plus importants des traités sont les promesses relatives aux terres, à la préservation de notre mode de vie, au droit d'exploiter les richesses de ces terres pour maintenir, soutenir, nourrir notre peuple et nos institutions politiques, nos langues et notre culture.
Au Manitoba, il y a littéralement des dizaines de milliers d'acres de terres qui nous reviennent en vertu des traités 1 à 5 et de l'accord de 1997 sur les droits fonciers issus de traités, accord auquel le Canada est partie. De vastes superficies ont été délimitées par les premières nations visées par l'accord, sauf que celles-ci n'ont pas été converties en terres de réserve pour diverses raisons que nous jugeons non fondées. Nous devrions pouvoir nous prévaloir du processus de règlement des revendications particulières pour obtenir des mesures de redressement déclaratoire ou injonctive qui obligeraient le Canada à faire ce qu'il est tenu de faire en vertu des traités et de l'accord de 1997 sur les droits fonciers issus de traités.
En vertu du projet de loi actuel, même si nous arrivions à faire entendre notre revendication, tout ce que nous pourrions obtenir, c'est un jugement d'exécution de paiement en échange duquel nos droits à l'égard des terres en question seraient éteints par voie législative, comme le précise le paragraphe 21(1). Pire encore, l'extinction de ces droits se ferait sans que nous puissions avoir recours aux protections habituelles que prévoit la Loi sur les Indiens, qui exige la tenue d'un référendum avant que tout intérêt foncier ne soit cédé.
Le projet de loi a été élaboré en tenant compte uniquement du point de vue du colonisateur. Il s'agit là d'un autre exemple de la façon dont le colonisateur nous invite à poursuivre notre colonisation. Quand vous vous tirez sciemment une balle dans le pied, est-ce que cela fait moins mal? Votre pied n'est-il pas déchiqueté?
Limiter le processus de revendications particulières aux indemnités pécuniaires, comme le fait l'alinéa 20(1)a), alors qu'un si grand nombre de revendications issues de traités impliquent des terres et des ressources, est injuste. Limiter les indemnités pécuniaires aux seuls dommages pécuniaires, comme le fait le sous-alinéa 20(1)d)(ii), et exclure les dommages subis sur les plans de l'éducation, de la culture ou de la langue, les choses même que les traités étaient censés protéger, est injuste. Plafonner les indemnités à 150 millions de dollars, comme le fait l'alinéa 20(1)b), est injuste. Réduire la valeur de ces indemnités en obligeant les premières nations qui ont des revendications similaires de partager ses ressources limitées, comme le fait le paragraphe 20(5), est injuste. Toute condition imposée par voie législative qui limite ce à quoi le revendicateur a droit en vertu des traités va à l'encontre du principe de l'honneur de la Couronne.
Notre peuple est pauvre. Il manque de travail, d'éducation, et son état de santé laisse à désirer. On nous doit beaucoup, mais nous n'avons pas le droit de profiter des ressources de ce pays, comme le prévoyait à l'origine les traités. Nous avons accepté de partager ces ressources, pas de nous appauvrir.
En termes simples, nous avons faim. Nous avons faim de justice. Nous manquons d'options. Nos enfants se suicident ou participent à des activités qui ne sont pas conformes à notre culture et nos coutumes.
Ce que je crains, en tant que dirigeant, c'est que nous acceptions de céder notre droit à une juste part des ressources qui sont les nôtres en échange d'un peu de nourriture pour limiter la famine — n'importe quelle nourriture, en fait.
Le droit de pouvoir, un jour, manger comme un roi dans le meilleur des restaurants ne veut rien dire quand on a faim. Il ne faut pas beaucoup d'imagination pour comprendre ce qu'une personne affamée doit faire, littéralement, pour survivre. Elle va vendre ses droits pour une bouchée de pain et pour un peu d'eau. Est-ce cela, la justice? Est-ce cela qu'on entend par s'acquitter pleinement d'une obligation? Personne ici n'oserait dire oui.
Pourquoi, alors, y a-t-il un si grand nombre de personnes qui appuient le projet de loi constituant le tribunal des revendications particulières? Je ne peux songer qu'à mes frères qui souscrivent à cette initiative, qui ont tellement faim qu'ils sont prêts à accepter une bouchée de pain, n'importe quoi, et avec le sourire.
Je me présente devant vous aujourd'hui avec conviction et détermination. Je suis un Anishinabe et je sais qui je suis, je sais ce que je veux. Sachez qu'il n'y aura pas de véritable réconciliation tant que les traités n'auront pas été honorés dans leur totalité, tant que nous n'aurons pas appris à transiger d'égal à égal.
Il n'y aura pas de paix, de solution à ce que l'on appelle le problème autochtone. Le fait est qu'il n'y a jamais eu de problème autochtone. Il y a par contre un problème canadien, un problème que le Canada doit corriger et régler.
Le projet de loi offre, à cet égard, de faux espoirs : il n'est qu'une occasion déguisée de nous coloniser. Les opprimés sont invités à jouer le rôle des oppresseurs.
Certains témoins ont dit craindre que le tribunal ne soit pas suffisamment indépendant, de sorte que justice ne sera pas rendue. Il n'y aura qu'un semblant de justice. Par exemple, dans le cas des nominations, en vertu du projet de loi, seul le cabinet fédéral aura le pouvoir de nommer les membres du tribunal. Je tiens à vous rappeler que nous avons conclu un traité avec la Couronne, de nation à nation. Les représentants de la Couronne continuent de perpétuer le mythe selon lequel ils sont les seuls à pouvoir administrer nos terres traditionnelles et nos ressources naturelles.
D'accord.
Je ne cherche pas, par mes propos, à mettre en doute l'honnêteté et l'intégrité des juges. Toutefois, il ne faut pas oublier que les juges au Canada sont un produit de ce même système juridique qui a opprimé mon peuple pendant des centaines d'années.
Je n'ai pas peur de voir d'éminents juristes étrangers — il y en a beaucoup dans les bureaux des Nations-Unies — statuer sur mes droits et les droits du Canada. Sur ce point, je trouve inquiétant que le Canada ait voté contre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qu'il ait refusé de la mettre en oeuvre. Cette déclaration a été qualifiée d'acceptable et appropriée par la grande majorité des pays.
Seuls quatre pays ont voté contre la déclaration. Le Canada fait partie du groupe. J'en conclus que le Canada, en tant que nation, n'a pas été capable d'accepter une mesure que le reste du monde a jugé raisonnable.
Ce que nous réclamons, essentiellement, c'est l'intervention, ou la participation, de la communauté internationale lorsque nous nous trouvons dans une impasse et qu'aucun progrès n'est possible. Les Maoris ont réussi, au sein de leur propre pays, à faire en sorte que les traités conclus soient honorés et que les ressources de la terre soient partagées.
Voilà certaines des questions que nous voulions aborder avec vous.
Merci.
Merci beaucoup.
Encore une fois, je tiens à présenter mes excuses aux témoins. J'ai dû vous pousser, un peu, car nous devons participer à un vote. Habituellement, la réunion prend fin à 17 h 30. Certains de mes collègues ont dû quitter parce qu'ils ont d'autres engagements. Les autres sont tout à fait disposés à rester. Nous allons avoir un tour de table de six minutes. Nous devrions avoir terminé vers 18 heures.
Nous allons commencer par le Parti libéral. Madame Keeper, nous vous écoutons.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous les témoins pour leurs exposés.
Il est évident que l'on ne s'entend pas sur ce qu'il convient de faire avec ce projet de loi sur les revendications particulières.
Je vais partager mon temps de parole avec le député du Nunavut.
On a parlé du manque de consultation. M. Simon a dit que cette obligation relève du gouvernement fédéral. On a parlé de l'arriéré, de la loi sur l'extinction des droits. En fait, d'après un des documents fournis par l'APN, le projet de loi montre clairement que, dans le cas des terres, le gouvernement fédéral se décharge de son obligation d'agir comme un fiduciaire prudent en imposant l'extinction.
Quelle est la solution? Comment pouvons-nous concilier la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones avec un projet de loi qui propose l'extinction des droits? Nous avons entendu de nombreux témoins. Certains sont contre; certains estiment que nous devrions proposer des amendements; d'autres jugent que nous devrions nous assurer que le projet de loi franchisse rapidement toutes les étapes du processus législatif.
Compte tenu de ces points de vue divergents, que pensez-vous de toute la question de l'extinction des droits?
Il reste environ trois minutes et demie. Si vous êtes plusieurs à vouloir répondre, je vais vous demander d'être brefs.
On soulève plusieurs questions, monsieur le président. Je vais essayer de répondre à certaines d'entre elles et ensuite céder la parole à mon collègue, le chef Simon.
Concernant la consultation, je pense qu'il est essentiel de revenir à la suggestion du témoin précédent, à savoir que l'on définisse soigneusement ce que l'on entend par « consultation ». À mon avis, par exemple, si vous le juxtaposez à la Déclaration des Nations Unies — à l'article 19 —, vous aurez une idée de ce que ce terme peut vouloir dire.
Prenons, par exemple, les 60 dernières années. Pouvons-nous dire qu'au cours de cette période, il y a eu beaucoup de consultations? Les projets de loi présentés dans le passé ne prévoyaient-ils pas la tenue de consultations exhaustives, mais en proposant une formule différente, comme je l'ai mentionné? La consultation, à mon avis, peut prendre diverses formes, allant d'un simple échange de correspondance, des appels téléphoniques, des discussions privées, à quelque chose de plus formel, qui reposerait sur le principe du consentement préalable et informé.
Il existe, à l'intérieur de cette gamme de choix, plusieurs lignes directrices sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour décider que nous avons tenu suffisamment de consultations et que nous pouvons aller de l'avant avec un projet de loi comme celui-ci.
Concernant l'extinction des droits — et je m'excuse si je m'appuie sur des renvois internationaux, mais c'est mon domaine de spécialisation depuis 30 ans —, il y a quelques jugements rendus par des organismes internationaux qui demandent au Canada de ne plus appliquer la politique d'extinction, ou encore de ne le faire, bien entendu, « que s'il y a consentement » de la première nation ou de la nation autochtone qui participe au processus de négociation. Ils acceptent, dans certains cas, le principe de l'extinction des droits, si cela se fait dans le cadre de négociations justes et indépendantes. C'est une autre façon de voir les choses.
Bref, il y toute une série de facteurs à prendre en considération. Comme vous le savez, quand un comité comme le vôtre encourage ce genre de dialogue public, il finit par se retrouver avec divers points de vue. Nous devons arriver à les concilier si nous voulons être en mesure d'aller de l'avant.
J'aborderai la question de la consultation du point de vue de la région que je représente, la Nouvelle-Écosse.
Comme vous le savez, nous avons entamé la négociation de traités et de titres ancestraux par l'entremise du processus néo-écossais. Celui-ci prévoit ce que nous appelons un accord-cadre. À de nombreuses reprises par le passé, des documents ont été utilisés en cour par le ministère des Pêches et des Océans ou le ministère des Affaires indiennes, qui revenaient sur toute cette notion de consultations et de discussions avec nous. En vertu de cet accord-cadre, les gouvernements fédéral et provincial se sont engagés politiquement à ce qu'aucune des discussions ne soit utilisée en cour, si le processus néo-écossais échouait et si nous nous retrouvions à nouveau devant les tribunaux.
Nous tenons absolument à ce qu'on identifie clairement les consultations comme telles. Ce n'est pas à l'Assemblée des Premières nations de le faire, mais plutôt au gouvernement du Canada, puisque c'est son projet de loi. Si le gouvernement veut engager des consultations, il doit suivre les processus applicables dans notre région et auxquels il a accepté de se conformer.
Certains croient que nous devrions faire adopter rapidement ce projet de loi, mais personnellement, je ne pense pas que ce soit prudent. Je considère qu'il importe davantage de faire un bon travail que de faire accepter cette mesure législative à toute vapeur par le Parlement.
Si le projet de loi reçoit l'appui de tous les partis, ce qui semble être le cas, il devrait survivre à une élection. Donc, il vaut mieux s'appliquer que procéder trop rapidement.
[Français]
Je saisis au bond la balle du chef St. Denis. Je lui dirai que, s'il y avait des élections demain matin, conformément au Règlement de la Chambre, ce projet de loi mourrait au Feuilleton s'il n'était pas adopté. On parle d'urgence, mais il n'y a pas nécessairement urgence. Je le dis sans vouloir faire de politique ici. Il n'y aura peut-être pas d'élections demain matin, mais ce que nous voulons surtout, c'est connaître l'opinion des peuples des premières nations.
J'ai bien compris le chef Littlechild. Je ne sais pas si c'est perçu par les grands chefs qui sont ici aujourd'hui, mais ce projet de loi, s'il est adopté, constituera le tribunal des revendications particulières, qui n'est pas un processus obligatoire. Si ce projet de loi était adopté demain matin, vous, les chefs, ne seriez pas obligés de vous en servir pour vos revendications particulières. Vous pourriez continuer à utiliser l'ancien processus. Mais vous comprendrez que cela pourrait être plus long.
J'ai une seule question à vous poser, et je vous la pose parce que vous êtes de toutes les provinces. Comment allons-nous faire? Que nous recommandez-vous quant aux provinces? Certains d'entres vous veulent des terres qui sont en territoire provincial. Que doit-on faire si les provinces ne font pas partie de l'action que vous allez entreprendre ou que vous pourriez entreprendre en matière de revendications particulières? Y a-t-il une solution? Devrait-on amender le projet de loi pour obliger les provinces à être partie prenante dès l'instant où une action est entreprise? Quelle est la solution? En avez-vous une à nous proposer? Je ne vous ai pas entendus en parler aujourd'hui. Peut-être ai-je mal entendu, mais il me semble que je n'ai rien entendu à ce sujet, ni en anglais ni en français.
[Traduction]
Nous vous recommandons évidemment d'essayer d'améliorer le processus et d'aller de l'avant. Quant à ce que j'ai dit plus tôt, je n'ai pas signé de traité avec le Manitoba, ni même avec le Canada. J'en ai conclu un avec Sa Majesté du chef du Canada. J'aimerais donc que le signataire du traité, qui a permis au Canada de rapatrier sa Constitution, participe également aux discussions.
En ce qui concerne la province, il y a encore beaucoup à faire au sujet des traités dans le domaine des droits sur les ressources et les minéraux. Il faudra aborder la question, parce que nous n'avons pas donné ces droits à qui que ce soit et selon nous, rien de tout cela ne revient à la province. Pour nous, la province n'est qu'une autre entreprise; c'est notre point de vue, ce que nos anciens nous ont appris, ce que nos conseillers juridiques nous ont dit, et c'est également la perception sur la scène internationale.
Merci.
Je ne crois pas qu'on rédigera jamais une mesure législative parfaite. Je ne peux rien vous recommander quant aux prochaines étapes à suivre.
Je crois que la tribu des Blood et deux autres nations ont accepté ce qu'on appelle la LGPGFPN, la Loi sur la gestion du pétrole et du gaz et des fonds des premières nations. Il s'agit d'une loi facultative, à laquelle peuvent adhérer la plupart des premières nations si elles le désirent.
Nous avons une idée bien définie de ce qu'est la consultation. C'est le même problème avec l'Alberta. Je reviens aux commentaires du chef Littlechild. Peut-être faudrait-il s'entendre sur la définition de consultation, puis faire tout notre possible pour rédiger une loi-cadre, qui ne plaira peut-être pas à tous, mais dont les bases pourront au moins répondre à nos besoins.
Je suis également d'accord avec le chef Shannacappo. Comme nous représentons nos communautés, nos anciens et notre Créateur, nous maintenons fermement nos positions au sujet de nos droits inhérents et de nos droits conférés par traité.
Merci.
Oui. Quant à savoir si la province devrait être obligée de rendre les terres, dans un cas comme celui du village de Wolf Lake, étant donné qu'il s'agit d'une revendication concernant les terres de réserve, le gouvernement fédéral devrait en effet forcer les provinces à restituer les terres qui ont fait l'objet de négociations avec la Couronne.
Merci, monsieur le président.
Je voudrais remercier tous les témoins d'avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd'hui.
Ma question s'adresse au chef St. Denis, au chef Norman Young et au chef Swan Shannacappo.
Je tiens à remercier le chef Littlechild et le grand chef Ed John d'avoir mentionné la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, parce qu'il importe de se souvenir du contexte. Même si le Canada n'a pas signé cette déclaration, son libellé est important puisqu'il y est question d'équité, de justice, de prise de décisions rapide, ce genre de choses. Quelques-uns des points que vous avez soulevés s'y rapportent. Je crois que vous avez vu juste lorsque vous avez parlé des ressources dont disposeront les premières nations à la table de négociation, que ce soit au sujet des revendications particulières ou des traités.
J'avais demandé plus de renseignements sur les ressources nécessaires pour traiter l'arriéré des revendications particulières; malheureusement, la lettre du ministre en réponse à mes questions restait plutôt vague. On m'assurait que des ressources seraient prévues — au ministère de la Justice —, mais on ne mentionnait aucune mesure concrète pour les mettre à la disposition des premières nations, ni pour combler le retard.
Justement, j'ai parlé de cet arriéré à de nombreuses reprises et je crois qu'il est important d'obtenir l'avis des gens. La disposition transitoire prévue à l'article 42 de la mesure législative fait en sorte que les premières nations qui décident d'entamer le processus de revendications particulières remettent le compteur à zéro. Cela signifie que celles qui avaient entamé le processus il y a déjà quelques années et qui sont admissibles se retrouvent au point de départ, malgré tout le travail qu'elles ont accompli. Le processus actuel deviendra caduc le 31 décembre 2008. Si je comprends bien, les premières nations auront deux choix: entamer des poursuites ou recommencer à zéro dans le cadre du nouveau processus.
J'aimerais savoir quels sont, selon vous, les autres éléments dont il faudrait tenir compte au cours de la période transitoire pour ceux qui sont admissibles au processus de revendications particulières. Je sais que cela ne répond pas à toutes vos préoccupations concernant les revendications territoriales et la non-admissibilité.
Je me suis penché sur la question pour essayer de déterminer ce que la mesure législative prévoyait pour les gens qui ont présenté des revendications, peu importe où. Je ne peux malheureusement vous parler que de la situation des communautés pour lesquelles je travaille.
Dans le cas du village de Wolf Lake — vous trouverez de plus amples détails dans le mémoire —, la bande a soumis une revendication en 1996. Aux environs de 2000, elle a fait appel devant la Commission des revendications des Indiens. On a entamé une enquête, puis on est passé à la médiation. Ensuite, à l'automne 2006, l'enquête devait reprendre. La bande allait être entendue cette année, mais le gouvernement a décidé que le dossier n'était pas suffisamment avancé.
Il faudra probablement un an pour que le projet de loi soit adopté, puis la bande devra attendre une autre année, puisqu'on prévoit deux périodes de six mois. Elle ne sera donc pas entendue par le tribunal avant environ deux ans, alors qu'elle a entamé le processus en 1996. En outre, il est fort probable que de nombreux dossiers soient en attente d'une audience. Donc, dans le cas du village de Wolf Lake, on perd deux ans. Le processus d'enquête pourrait aller bon train au moment où je vous parle, mais on a empêché la bande de continuer. On ne lui a pas vraiment expliqué pourquoi, et on ne lui a jamais demandé son avis. On lui a seulement dit qu'elle était exclue. Donc voilà la situation à Wolf Lake.
Quant à Timiskaming, nous nous heurtons entre autres au problème des lignes directrices en matière de présentation de revendications, prévues à l'article 16 de la loi, si je ne m'abuse. Le ministre a le pouvoir discrétionnaire d'établir des normes minimales dans ce domaine. Nous nous sommes rendu compte que depuis l'annonce de La justice, enfin, la Direction générale des revendications particulières essaie d'imposer unilatéralement de nouvelles lignes directrices, sans discussion, qui contreviennent à l'entente qu'elle a conclue avec notre conseil tribal.
Pour ce qui est de cette communauté, on a perdu l'équivalent de cinq ans de recherche et de développement sur les revendications. Et nous n'avons pu obtenir de garantie au sujet de l'évolution de ces revendications.
D'un côté, je peux être précis, mais de l'autre, il y a de nombreux points vagues qui n'ont pas encore été élucidés et qui nous aideraient à y voir un peu plus clair.
Merci.
Il reste environ 20 secondes. Quelqu'un a-t-il un commentaire rapide à faire?
Allez-y, monsieur Braun.
Merci, monsieur le président.
En tant que directeur du comité des droits fonciers issus des traités, je m'occupe directement de la mise en oeuvre des revendications réglées. J'utilise le mot « réglé » de façon très générale. Pour les premières nations, ce mot s'applique aux terres qui ont été restituées, et ce, seulement une fois que toutes les obligations ont été remplies.
L'entente-cadre du Manitoba a été signée en 1997. Actuellement, 469 parcelles de terre ont été sélectionnées pour le transfert de 1,1 million d'acres aux premières nations. De ces parcelles, 54 ont été converties. Sachez qu'après environ 11 ans d'efforts, nous avons accompli 11 p. 100 du travail, le tout au nom des 15 premières nations signataires des traités.
Nous avons beaucoup de pain sur la planche. Lorsqu'on parle de revendications, dans mon esprit, il s'agit de la phase 1, celle de la validation des revendications. Mais il reste beaucoup à faire dans la phase 2 et, ultérieurement, sur le plan du développement et de la gestion des terres, entre autres.
Je voulais simplement porter ces chiffres à votre attention.
Merci.
Je vous remercie. Ces chiffres nous seront très utiles.
Le dernier intervenant est M. Storseth, du Parti conservateur. Je vous accorde six minutes, monsieur.
Merci beaucoup, mesdames et messieurs.
Comme toujours, je suis heureux de vous revoir après notre congé de deux semaines. Certaines choses ne changent jamais.
Tout d'abord, je tiens à remercier les membres du comité, qui ont livré de très intéressants témoignages aujourd'hui et ont lancé d'excellentes idées. Il importe toutefois de remettre les pendules à l'heure à certains égards.
Il ne s'agit pas de tout reprendre à zéro. D'après ce que je comprends du projet de loi, on cherche plutôt à offrir aux communautés des premières nations la possibilité d'adopter un système différent et d'en abandonner un qui, il faut en convenir, doit être réformé. Cette mesure permettra d'accélérer le processus. Dans ce dossier, nous nous efforçons constamment de défaire des mythes que l'on cherche à perpétuer d'un côté comme de l'autre.
Je tiens à saluer un autre Albertain, le chef Littlechild, ancien député. C'est une bonne chose que nous profitions de vos connaissances en la matière, pas seulement en tant qu'ancien député et chef albertain, mais également comme membre du groupe de travail mixte.
Monsieur Littlechild, nous avons entendu de nombreux témoignages, notamment celui du chef Lawrence Joseph, de la Saskatchewan, qui, je crois, représente environ 75 premières nations et plus de 122 000 Indiens reconnus. Je citerai quelques passages de son témoignage:
Le gouvernement du Canada fait certaines choses que nous estimons assez urgentes. Je suis ravi de vous annoncer que les chefs des premières nations de la Saskatchewan soutiennent fermement cette initiative. Nous vous avons fourni une résolution datée de la mi-février qui appuie pleinement les travaux du groupe de travail mixte.
Il poursuit en disant:
J'ai travaillé au gouvernement pendant 30 ans et j'ai été chef pendant 10 ans. Au cours de cette période, je n'ai jamais vu autant d'engagements de la part d'un gouvernement qui tentait de faire un travail stratégique et structuré conjointement avec les premières nations.
Le vice-chef, M. Glen Pratt, a continué en disant:
C'est un important pas en avant qui permet aux premières nations d'être à la table des négociations et de recommander de manière conjointe des lois. Cela nous permet dans une certaine mesure de façonner le projet de loi plutôt que de réagir à un projet de loi tout fait.
Je crois que ces points sont très importants. M. Simon en a d'ailleurs déjà évoqué quelques-uns. Tous ces gens se sont montrés favorables à l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle.
Certains aspects de l'entente politique qui doivent être mis en oeuvre échappent au cadre de ce projet de loi, mais vous conviendrez que cette mesure législative doit aller de l'avant dans sa forme actuelle. Elle marque un tournant et est très importante pour les premières nations ainsi que pour le gouvernement du Canada.
Eh bien, c'était toute une tirade. Je vous laisse quelques secondes pour y réfléchir.
Merci beaucoup.
Je commencerai par préciser que contrairement à ce qui se fait en Saskatchewan, la fédération a, en Alberta, les traités 6, 7 et 8. Ces derniers prévoient un protocole de respect qui autorise des chefs comme M. Weaselhead à donner leur opinion personnelle sur de telles questions. Par conséquent, lors de l'assemblée nationale, vous avez constaté que les chefs de l'Alberta s'étaient abstenus de voter. Et lors de mon intervention d'aujourd'hui, je me suis adressé à vous en tant que membre du groupe de travail mixte. En cette qualité, j'appuie évidemment les travaux du groupe de travail et la proposition qui nous intéresse aujourd'hui. Je pourrais difficilement commencer à critiquer les travaux qui ont demandé tant d'efforts. Alors oui, j'appuie la proposition.
Ceci dit, si votre comité trouvez quelque chose pouvant améliorer le projet de loi pour les premières nations, je ne vous dirai pas de renoncer, parce que c'est bien sûr votre prérogative.
Je considère tout ceci comme un ensemble. La partie à laquelle j'ai participé pourrait être améliorée aux premières étapes. Maintenant, la balle est dans votre camp et c'est à vous de jouer. Comme je l'ai déjà dit, si les témoignages vous permettent de renforcer les aspects qui concernent les premières nations, je ne peux pas vous dire de ne pas le faire. Je suis également confronté à un dilemme, mais je vous appuie en tant que membre du groupe mixte.
Merci beaucoup.
Chef Weaselhead, j'aimerais vous donner l'occasion de formuler un commentaire également. Je vous poserai une ou deux questions précises en enfilade. Je vous demanderai d'y répondre brièvement pour que nous puissions en discuter par la suite.
Nous convenons tous que le processus et le système doivent évoluer. Je sais que dans votre mémoire, vous avez mis en lumière certains points que vous aimeriez voir changer, tout en admettant que le processus permettrait d'accélérer le traitement de 80 p. 100 des revendications et que les plus importantes continueraient dans le même système. Croyez-vous que les 150 millions de dollars serviront au moins à cela?
Pensez-vous qu'en rendant ce processus indépendant, nous faisons un pas dans la bonne direction?
Enfin, croyez-vous que le processus sera accéléré pour ces revendications et que l'obligation de procéder à un examen quinquennal est également importante?
Je sais que vous avez déjà émis certaines critiques, mais j'aimerais que vous répondiez à ces questions.
Je vous remercie beaucoup.
Selon moi, le processus sera accéléré pour la majorité des revendications, particulièrement les petites.
Je suis aussi d'accord avec le chef Littlechild. De façon générale, je suis également en faveur de l'adoption du projet de loi, mais nous avons ici l'occasion de continuer les discussions au sujet de changements précis qui pourraient être apportés. Dans mon esprit... je parle en mon nom lorsqu'il s'agit d'une revendication importante. Par exemple, à quelques reprises, l'ancien ministre des Affaires indiennes, Jim Prentice, m'a dit que les revendications importantes seront traitées en vertu d'un mandat spécial du cabinet; mais nous ne voyons aucune mesure exécutoire à cet effet dans le projet de loi.
Après avoir observé la situation et parlé de la question avec d'autres nations, je crois que le processus aidera la majorité des premières nations. Certaines d'entre elles auront peut-être d'autres points plus précis à régler, comme l'ont indiqué les deux groupes de discussion. Il est donc possible d'apporter des changements et de modifier le processus en fonction de certaines questions et préoccupations exprimées devant le comité. Je crois qu'il importe également de faire écho à ces préoccupations.
Merci.
Je vous remercie beaucoup.
Au nom de tous mes collègues du comité, j'aimerais remercier les témoins des premier et deuxième groupes. Nous avons eu une excellente discussion aujourd'hui. Comme je l'ai dit, je vous remercie d'avoir fait de brèves interventions pour nous aider à respecter l'horaire. Merci beaucoup.
La séance est levée.