Tous les produits de santé commercialisés présentent des risques associés à leur usage. Les médicaments sur ordonnance, les produits en vente libre, les produits biologiques, les vaccins et les produits de santé naturels présentent tous des risques. Certains de ces risques sont connus au moment de l'autorisation de mise en marché, mais nous savons également maintenant que des renseignements supplémentaires sur les risques ne deviennent connus qu'après que le produit soit utilisé de façon plus répandue. Partout dans le monde, les législateurs, dont Santé Canada, travaillent pour intégrer au système une meilleure capacité de réunir et d'utiliser cette information pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens et des Canadiennes. Il ne s'agit pas d'une défaillance du système, et ces problèmes ne sont pas uniques au Canada.
Comme pour les autres, la force de notre système de surveillance après la mise en marché est déterminée en grande partie par la capacité de déterminer rapidement les nouveaux risques et d'agir efficacement pour les atténuer. D'importantes améliorations ont été apportées dans ces deux domaines au cours des dernières années.
Le risque d'un médicament ne devrait pas être considéré isolément. Il est important de toujours considérer l'équilibre entre le risque éventuel et les avantages possibles. Ce principe s'applique à toute la gamme des produits de santé, des produits en vente libre aux médicaments sur ordonnance.
[Traduction]
Un autre concept important lorsqu'on analyse les réactions indésirables aux médicaments, c'est le fait qu'elles se produisent suite à une interaction entre un médicament, un patient et l'environnement, ce qui fait que les réactions indésirables aux médicaments ont des causes plus complexes que le médicament lui-même. Par exemple, un étude publiée dans JAMA en 2006 conclut que la surdose accidentelle ou mauvaise utilisation du médicament représente plus de la moitié des admissions à l'hôpital associées aux médicaments.
La plupart des réactions indésirables graves entraînant l'hospitalisation sont connues, bien décrites et associées à des médicaments qui sont sur le marché depuis de longues périodes, par exemple les anticoagulants, les antidouleur, l'insuline et les antibiotiques à base de pénicilline. Ces risques éventuels sont bien connus et pris en compte dans les décisions des praticiens lorsqu'ils prescrivent un médicament particulier. Selon l'étude susmentionnée, 16 des 18 médicaments causant le plus souvent des visites à l'urgence pour des réactions indésirables aux médicaments ont été en usage clinique depuis les 20 dernières années.
Mais la prescription appropriée nécessite également que le risque d'un médicament soit pondéré en regard de ses avantages, par exemple le nombre de vies sauvées ou le nombre d'années ajoutées à l'espérance de vie. Si un patient a un battement cardiaque irrégulier soutenu, sa probabilité d'un infarctus qui conduirait à la mort, à la paralysie ou à un autre résultat sérieux est de 3 p. 100 par année. Pour prévenir un infarctus, un puissant anticoagulant appelé Coumadin est utilisé et présente un risque connu de 1 p. 100 de saignement gastro-intestinal grave. Les risques de ce médicament sont réels et plusieurs hospitalisations associées à un saignement causé par le Coumadin sont documentées chaque année. Mais cela ne signifie pas que le risque est inacceptable, étant donné le nombre d'infarctus prévenus. Ainsi, une bonne décision au niveau de la population nécessite plus que la seule considération des risques du médicament isolément.
La pharmacovigilance et la pharmacoépidémiologie sont des disciplines qui évoluent rapidement. Les changements que Santé Canada propose au système de réglementation visent à amener le système de réglementation canadien dans le sens des meilleurs au monde. Comme les autres législateurs, nous ajoutons à la valeur offerte par les déclarations des réactions indésirables et nous travaillons en vue de la réception et de l'évaluation plus systématiques des études sur l'innocuité après la mise en marché et d'autres données.
Au cours de cette étude, des préoccupations ont été soulevées concernant la nécessité d'un examen indépendant après la mise en marché. Depuis son établissement en 2002, la Direction des produits de santé commercialisés de la Direction générale des produits de santé et des aliments coordonne la surveillance après la mise en marché et diffuse l'information sur l'innocuité des produits de santé. Les scientifiques de la DPSC offrent une évaluation scientifique indépendante distincte de celle des scientifiques qui autorisent la mise en marché des produits et la direction a un budget séparé de ceux des groupes de Santé Canada qui sont responsables des examens préalables à la mise en marché, tout en assurant une communication efficace dans tout le cycle de vie réglementaire du produit.
Depuis sa création, la DPSC offre une évaluation indépendante et assure l'uniformité des normes sur l'innocuité, des méthodologies et des messages sur les risques; elle assure une utilisation des ressources distinctes par un personnel spécialisé affecté à la surveillance après la mise en marché afin d'optimiser les exigences opérationnelles et l'imputabilité; elle permet aux patients de prendre davantage la responsabilité de leurs décisions sur les produits de santé grâce à un meilleur accès à des messages fiables et crédibles sur les risques; et elle met davantage l'accent sur la surveillance, l'examen et la gestion des risques après la mise en marché.
Santé Canada a pris un engagement clair envers une surveillance indépendante après la mise en marché avec l'établissement de la Direction des produits de santé commercialisés. Nous avons publié récemment une stratégie quinquennale de surveillance après la mise en marché sur le site MedEffect Canada, de Santé Canada, et des copies vous seront remises aujourd'hui. Ce plan quinquennal indique comment Santé Canada continuera de faire évoluer les activités de surveillance après la mise en marché dans le sens des nouvelles sources de renseignements crédibles sur l'innocuité et des normes internationales.
La stratégie comprend plusieurs objectifs clés comme l'intégration des nouvelles sources d'information canadiennes et internationales, l'établissement de partenariats internationaux et nationaux pour faciliter le partage du travail et mettre en oeuvre un nouveau système de gestion de l'information moderne afin d'améliorer la détection et l'analyse des données sur les réactions indésirables, y compris l'intégration de l'information sur la déclaration des réactions indésirables tout au long du cycle de vie du produit.
Dans cette stratégie, un de nos objectifs est un recours accru à l'expertise externe pour compléter l'expertise scientifique et médicale du personnel de Santé Canada. Santé Canada a mis sur pied un Comité consultatif d'experts sur la vigilance des produits de santé qui offre des conseils sur les politiques et les programmes après la mise en marché associés à la vigilance visant les produits de santé. Le comité est composé d'un mélange d'expertise et d'expérience, avec des membres représentant les patients, les consommateurs, les secteurs de la santé et de l'industrie, les chercheurs et les universitaires.
Santé Canada réunit également ces comités consultatifs scientifiques d'experts externes pour contribuer à l'analyse des problèmes de sécurité après la mise en marché pour des produits ou des catégories de produits spécifiques. Ce processus a été appliqué récemment pour examiner les problèmes d'innocuité associés au produit Avandia. Nous voulons contribuer à l'expertise globale disponible au Canada et en bénéficier à l'avantage des Canadiens, et nous avons confiance que, ce faisant, la qualité des décisions que nous prenons sur les risques et les avantages des produits sera rehaussée.
Je mettrai maintenant en lumière les trois principes opérationnels fondamentaux qui guident notre travail.
Le premier est le principe de précaution. Ce principe fait partie de notre processus décisionnel et est enraciné dans le cadre de gestion intégrée des risques. Lorsque nous avons un signal de problème d'innocuité important, nous pouvons intervenir même en l'absence d'une preuve définitive. Il y a une série de mesures qui peuvent être prises, de la communication des risques à la suspension de l'autorisation de mise en marché. Le choix est déterminé par la gravité du risque, le potentiel de danger pour la population canadienne et la capacité éventuelle du système de soins de santé de gérer le risque s'il y a en même temps un potentiel de sauver des vies.
Le deuxième principe opérationnel est l'harmonisation avec les meilleurs pratiques internationales. Il y a une grande valeur à aligner nos terminologies, nos orientations et nos règlements. Cela facilite le partage d'information et du travail avec les autres législateurs. À l'appui de la surveillance après la mise en marché, Santé Canada a mis au point des protocoles d'entente sur le partage d'information avec de nombreux organismes de réglementation étrangers et est actif dans de nombreuses initiatives internationales, par exemple la Conférence internationale sur l'harmonisation, le Conseil des organisations internationales en science médicale, le Groupe de travail sur l'harmonisation mondiale des appareils médicaux et l'Organisation mondiale de la santé, entre autres.
Les problèmes d'innocuité survenant au Canada ne sont généralement pas différents de ceux des autres pays et, étant donnée la taille de la population canadienne, les nouveaux risques peuvent ne pas être identifiés au Canada en premier. Plusieurs signaux sont identifiés dans les études internationales, comme ce fut le cas pour les récentes mesures réglementaires concernant le Prexige, le Vioxx et d'autres médicaments. Nos solides relations de travail avec les autres législateurs permettent aux Canadiens de bénéficier du partage d'information et de l'intervention en temps opportun à l'échelle mondiale.
Le dernier principe opérationnel qui guide notre travail est la responsabilité partagée. Santé Canada est seulement un intervenant dans un système de soins de santé canadien intégré, complexe et interdépendant. Les scientifiques de la Direction travaillent avec diverses organisations, par exemple l'Inforoute de Santé Canada et d'autres, pour mobiliser les avantages du système de santé canadien concernant l'accès utile aux futurs dossiers de santé électroniques comme source d'information sur les réactions indésirables et d'autres renseignements, par exemple.
Comme vous le savez, au Canada, les soins de santé relèvent de la compétence des provinces et des territoires. Les choix thérapeutiques sont pris chaque jour par les professionnels de la santé et les consommateurs canadiens. Santé Canada ne réglemente pas la pratique de la médecine, mais s'efforce d'offrir une information opportune sur le risque associé aux produits commercialisés afin de faciliter les meilleurs choix thérapeutiques et de réglementer l'industrie qui est responsable de la vente de produits sûrs et efficaces et d'informer les intéressés concernant les produits qu'elle vend.
En incarnant ces principes opérationnels dans notre travail, notre objectif est toujours de mieux répondre aux problèmes d'innocuité qui se présentent et de nous acquitter de notre mandat fondamental qui est de protéger la santé et la sécurité des Canadiennes et des Canadiens.
Je remercie le comité du travail qu'il accomplit pour nous appuyer à cet égard. Il nous fera plaisir d'offrir des explications et des réponses aux questions du comité, et nous attendons avec impatience les recommandations du comité.
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Je voudrais remercier le Comité permanent de la santé de m'avoir invité à parler de la surveillance post-commercialisation dans le secteur pharmaceutique.
Je suis le directeur du Programme de médicaments de l'Ontario au ministère de la Santé et des Soins de longue durée et j'aide à gérer le Programme d'assurance-médicaments de l'Ontario, un programme de remboursement des médicaments qui s'adresse principalement aux aînés, aux assistés sociaux et aux personnes qui dépensent beaucoup pour leurs médicaments par rapport à leur revenu.
Je suis également le coprésident du groupe de travail sur l'innocuité et l'efficacité des médicaments dans le monde réel de la Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques. Le mandat de ce groupe de travail de la SNPP consistait en partie à examiner la possibilité de renforcer la surveillance post-commercialisation au Canada et les études qui sont faites dans divers secteurs de la recherche pour voir s'il est possible de coordonner ce travail et d'améliorer la collaboration dans l'ensemble du pays.
Nous attendons toujours des instructions des ministres au sujet du travail à accomplir dans le cadre de la Stratégie. Par conséquent, mes propos d'aujourd'hui se situeront surtout dans le contexte d'un régime d'assurance-médicaments provincial.
Tel qu'indiqué dans le mandat de l'étude du comité sur la surveillance post-commercialisation des produits pharmaceutiques, il y a un certain nombre de questions clés qui sont très importantes en ce qui concerne le remboursement des médicaments dans le cadre d'un régime provincial. Il s'agit notamment de la surveillance de l'utilisation des médicaments, de la sécurité des consommateurs, de l'accès à l'information pour le public et de la déclaration des réactions indésirables.
Les produits sont inscrits dans le formulaire du régime d'assurance-médicaments de l'Ontario sur les recommandations du Comité consultatif canadien d'expertise sur les médicaments dans le cadre du Programme commun d'évaluation des médicaments ainsi que du Comité consultatif d'experts de l'Ontario chargé d'évaluer les médicaments. Les décisions définitives sont prises par le directeur exécutif du Programme de médicaments de l'Ontario.
Une des principales questions que nos experts cliniques soulèvent au cours de l'évaluation d'un médicament est la façon dont le produit sera utilisé dans le monde réel plutôt que dans les études publiées sur lesquelles leurs recommandations s'appuient souvent. Les études sur les médicaments sont faites dans des milieux contrôlés et de nombreuses restrictions s'appliquent, notamment en ce qui concerne le moment et la façon dont le produit est administré, les patients qui peuvent participer aux essais cliniques et les limites quant aux autres médicaments que le patient peut recevoir pendant le traitement.
Cet environnement limite la capacité de nos experts de faire des recommandations au sujet des applications thérapeutiques d'un nouveau médicament ou d'une nouvelle indication. Il y a très peu d'études qui font des essais cliniques comparatifs avec d'autres médicaments si bien que nous ne comprenons pas clairement l'efficacité et la sécurité globales d'un produit par rapport aux autres médicaments qui peuvent être utilisés pour traiter des conditions similaires.
De plus, cela ne nous dit pas comment le produit sera utilisé dans le monde réel. Par exemple, y a-t-il des risques plus élevés associés aux produits chez certains groupes de patients, ou le produit est-il plus efficace pour certaines personnes? Est-il préférable d'essayer d'abord d'autres médicaments avant de passer à des produits pour lesquels on a moins de preuves concrètes de leurs effets cliniques?
Pour certains des nouveaux produits qui arrivent sur le marché, la preuve d'efficacité peut reposer sur des marqueurs de substitution. Ces marqueurs sont souvent utilisés comme prédicteurs. On peut supposer qu'un changement dans un marqueur indique un effet ou un résultat clinique. C'est particulièrement problématique parce que souvent, nous n'avons pas de données probantes pour montrer le lien direct entre le marqueur de substitution et le résultat présumé.
Si l'on compte davantage sur ce genre de renseignements pour donner accès à des nouveaux médicaments et pour soutenir le processus d'homologation, l'évaluation post-commercialisation va devenir de plus en plus importante. De plus, il sera nécessaire de faire des études à long terme pour valider les effets cliniques.
Une fois qu'un produit est mis en marché, les fabricants semblent hésiter à réaliser ce genre d'études. Pour cette raison, nous nous retrouvons souvent dans la situation où les conseillers experts n'ont pas les renseignements voulus pour recommander l'inscription d'un médicament au formulaire et les fabricants ne sont pas incités à faire des études à long terme pour valider les conclusions initiales une fois que le médicament a été approuvé.
Il est essentiel que les organismes fédéraux et provinciaux puissent bénéficier des données recueillies pour soutenir la recherche post-commercialisation. Même si nos rôles sont différents, il y a souvent des similitudes dans le genre de données qui sont nécessaires pour évaluer les médicaments après leur mise en marché. Il faut inciter les fabricants à continuer à travailler dans ce domaine, car ce sont des renseignements essentiels qui seront utilisés par tous les secteurs.
Il y a de nombreux exemples de thérapies médicamenteuses qui ont eu des effets négatifs inattendus après leur mise en marché. Certains de ces effets peuvent résulter de la prise du médicament pendant une période prolongée bien au-delà de la durée typique des essais cliniques. De plus, ce genre de renseignements aidera à valider certains des effets cliniques qui peuvent avoir été supposés pendant le processus d'évaluation des nouveaux médicaments et leur inscription dans les formulaires des provinces.
La collecte et l'analyse des données est souvent faite individuellement dans différents centres de recherche du pays et les résultats de ce travail ne sont pas toujours largement communiqués. À l'heure actuelle, aucun organisme n'a pour mandat de recueillir et d'analyser ces données. Il y a peut-être aussi un manque de personnel formé dans ce domaine.
Le financement pour soutenir les programmes de recherche et les liens entre ces programmes peuvent aider à réduire ou à éliminer le dédoublement de la recherche. Cela peut également contribuer à enrichir les données recueillies en incluant un plus grand nombre de participants dans les études. Cela pourrait être considéré comme une première étape pour financer un centre plus important qui permettra peut-être que les fonctions soutenant ces programmes et les liens avec les autres organismes nationaux qui participent à l'évaluation des médicaments, au financement et à la surveillance soient établis avec le moins de chevauchement possible. À l'heure actuelle, certains intervenants examinent ces possibilités pour voir comment il serait possible d'établir ces réseaux au Canada.
Il est également important pour nous de bien comprendre quels sont les renseignements à recueillir. Les données d'observation sont importantes pour comprendre comment les produits sont utilisés en général et peuvent mettre en lumière certains risques ou problèmes. Néanmoins, elles ne sont peut-être pas suffisamment précises pour que nous sachions quel est l'impact réel du médicament et cela peut susciter la confusion sur le marché.
L'établissement de registres complexes pour recueillir des données peut fournir les renseignements détaillés requis pour faire une évaluation approfondie d'un médicament après sa commercialisation, mais cela aura des répercussions importantes sur les ressources requises pour recueillir ces renseignements.
L'autre facteur important est la rapidité de l'information. Il ne sert pas à grand-chose de recueillir ces renseignements si les résultats ne sont pas diffusés rapidement pour permettre de réévaluer, au besoin, les décisions antérieures concernant le remboursement d'un médicament.
Pour conclure, au fur et à mesure que ce travail progressera, il sera important d'examiner ses répercussions sur tous les intervenants, y compris les patients, les professionnels de la santé, les fabricants, les chercheurs, les gouvernements, etc. Il faut assurer un juste équilibre afin que les données soient recueillies avec rapidité et précision, mais sans surcharger le secteur des soins de santé.
Je tiens à remercier, encore une fois, le comité permanent de m'avoir invité à discuter de cette importante question.
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Bonjour, madame la présidente et membres du comité. Je vous remercie, encore une fois, de m'avoir invité à prendre la parole devant vous.
Je voudrais répéter brièvement certaines choses que j'ai dites la dernière fois, mais je ne vais pas m'y attarder. J'espère que vous lirez plutôt la transcription de mes observations.
Pour commencer, les réactions indésirables constituent un grave problème de santé publique, mais notre système de réglementation empêche la plupart des médicaments dangereux d'être commercialisés. La difficulté réside dans les réactions hétérogènes aux médicaments, les différences dans la variabilité des réactions que nous avons tous. Je crois que, la dernière fois, j'ai donné l'exemple d'une réaction cutanée causée par l'ibuprofen, c'est-à-dire le Motrin ou l'Advil, qui a entraîné la desquamation de la peau chez un jeune enfant. C'est un produit que les gens utilisent régulièrement sans difficulté particulière — je m'en sers moi-même sans problème — mais qui cause une réaction très importante chez certaines personnes. Ces effets ne sont pas toujours prévisibles et ils ne sont pas très fréquents, ce qui complique les choses. Il s'agit de trouver des solutions à ces problèmes et de permettre que ces médicaments continuent d'être utilisés lorsqu'ils sont efficaces et ne présentent pas de danger. Pour résoudre ce problème de santé publique, il faut comprendre l'hétérogénéité des réactions et le fait que tout le monde ne réagit pas de la même façon.
Un article publié dans le Journal of the American Medical Association, en 1998, laisse entendre que les réactions négatives aux médicaments qui ne sont pas dues à des erreurs ou des abus constituent la cinquième cause de décès aux États-Unis. C'est un problème très important et nous devons trouver des moyens d'y remédier.
Comment résoudre un problème qui survient chez certains patients, mais pas chez tous? Chaque médicament est différent. Certaines personnes ont des réactions à un médicament, mais pas à un autre. Je crois essentiel de bien comprendre le rôle que joue la génétique dans les différences au niveau des réactions et c'est le contexte dans lequel je vous parle aujourd'hui.
Mes travaux et ceux du Dr Michael Hayden, le généticien avec qui je travaille, cherchent à comprendre la réaction aux médicaments et à relier la pharmacologie clinique et la génétique humaine. Lorsque les médicaments entrent dans l'organisme, ils franchissent quatre étapes fondamentales: ils sont absorbés, ils sont distribués, ils sont métabolisés en composantes actives ou inactives et ils sont excrétés. Ces quatre étapes sont contrôlées par les gènes. Si nous comprenons quelle est l'étape de la biotransformation qui engendre un problème de toxicité, un effet néfaste, nous pouvons aussi comprendre quels sont les gènes qui le permettent. En fait, comme je l'ai dit la dernière fois, le Dr Hayden et moi-même avons découvert les gènes de trois réactions graves et fatales.
Nous croyons que ces travaux ont énormément de valeur à l'échelle mondiale. Ce sont des médicaments qui sont utilisés depuis de nombreuses années, comme l'ont déclaré mes collègues de Santé Canada. Les médicaments qui sont actuellement sur le marché posent également des problèmes. Ce ne sont pas seulement les nouveaux médicaments, mais ceux que nous utilisons parfois depuis une cinquantaine d'années. Nous voulons utiliser la nouvelle science de la pharmacogénomique, qui combine la pharmacologie clinique et la génétique humaine, pour comprendre la réaction aux médicaments et ensuite s'en servir pour établir des tests prédictifs permettant d'éviter des réactions indésirables chez les personnes qui y sont le plus exposées. Il faudrait au moins que nous sachions, avant de commencer une thérapie, chez qui les réactions les plus graves risquent de se produire. Si nous procédons comme il faut, nous le saurons pour chaque médicament et pour chaque patient.
Le coût de la technologie diminue rapidement. Les recherches réalisées jusqu'ici montrent la valeur de cette science. La Food and Drug Administration, aux États-Unis, recommande déjà des tests génétiques pour au moins trois médicaments et trois réactions particulières, dont l'une est notre découverte, dans le cadre du réseau qui a été financé avec de l'argent de Génome Canada. C'est avec beaucoup d'enthousiasme que nous nous dirigeons dans cette voie.
Enfin, je voudrais dire que tous les Canadiens, toutes les parties prenantes, tant l'industrie pharmaceutique que le gouvernement, les patients, les cliniciens et les chercheurs universitaires, veulent des médicaments plus sûrs. C'est ce que tout le monde désire. Nous avons la possibilité de poursuivre un objectif commun et nous avons un système national de soins de santé pour soutenir cette recherche. Je ne saurais trop insister sur le travail que je fais au niveau international avec différents groupes qui se disent incapables de faire ce que nous faisons ici dans leur pays. Nous avons créé des possibilités. Nous avons intégré notre travail dans le système de santé du Canada. Nous nous sommes servis des cliniciens pour découvrir quelles sont les réactions. D'ici la fin de cette année, nous aurons plus de 10 000 déclarations de réactions indésirables et des contrôles qui sont essentiels pour comprendre les différences entre les personnes qui ont des réactions négatives aux médicaments et celles qui n'en ont pas. Ce travail nous permettra d'avancer sur bien d'autres plans et de commencer à élaborer des diagnostics prédictifs pour aider les cliniciens à mieux choisir des médicaments plus sûrs pour les Canadiens.
Merci beaucoup.
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Je travaille à l'Agence de la santé publique du Canada et nous nous occupons de la surveillance post-commercialisation des vaccins utilisés chez l'être humain pour prévenir les maladies.
Pour ce qui est des décès en question, je pense que l'EMEA a publié un communiqué, le 24 janvier 2008, au sujet de deux ou trois décès. Nous l'avons contactée le lendemain, le 25 janvier, pour lui demander quelles étaient ses inquiétudes au sujet de ces décès. Les agents de l'EMEA nous ont assurés qu'à leur avis ces décès n'étaient pas liés au Gardasil.
Également, dans le cadre d'un protocole d'entente entre Santé Canada et notre agence ainsi qu'entre Santé Canada et l'Agence européenne des médicaments, nous avons pu demander ces rapports, que nous avons obtenus le 28 janvier et distribués à nos homologues de la Direction des thérapies biologiques et génétiques ainsi qu'à nous-mêmes, pour nous assurer qu'il n'y avait là rien de préoccupant.
Chaque décès est préoccupant, mais des mesures sont prises. Nous avons estimé que toutes les mesures voulues avaient été prises. Nous avons communiqué par les voies régulières avec les personnes qui étaient au courant de ces décès et on nous a assurés qu'il n'y avait pas de problème. La même chose s'est produite aux États-Unis où il y a eu neuf décès.
Je crois important de mentionner que si vous examinez les essais cliniques avant l'homologation qui portaient sur 10 000 femmes, pas seulement des fillettes âgées de 9 à 12 ans — et j'y viendrai dans un instant — parmi les 10 000 femmes en question, un groupe a reçu le vaccin et un autre un placebo, mais personne ne savait qui avait reçu le vaccin. Le nombre de décès a été le même dans les deux groupes et aucun de ces décès n'a été attribué au vaccin ou au placebo.
Le problème que posent tous les produits comme celui-ci, qui sont utilisés dans des programmes de grande envergure, est que des décès surviennent spontanément pour d'autres raisons. Au moins, si un décès survient pendant un essai clinique, vous avez la possibilité de démontrer qu'il n'y a pas de différence entre le groupe qui a été vacciné et le groupe qui a reçu le placebo sans l'ingrédient actif.
Pour la surveillance post-commercialisation, vous n'avez pas cet autre groupe. Vous savez seulement qu'il y a eu un décès et vous devez essayer d'établir s'il est dû au vaccin ou à une autre cause. Nous avons donc estimé, en collaboration avec nos collègues, tant à Santé Canada qu'au niveau international, que ces décès n'étaient pas attribuables au vaccin.
Je ne sais pas si vous voulez que je parle aussi de la question des enfants, des fillettes. Au cours des essais cliniques qui ont été réalisés pour le vaccin… Je pense qu'on a déjà fait valoir que tout produit qui est mis sur le marché a fait l'objet d'essais cliniques et, dans le cas de Gardasil, ces essais ont porté sur plus de 10 000 personnes. C'est beaucoup, mais ce n'est pas suffisant pour déceler des effets rares et c'est pourquoi il faut une surveillance post-commercialisation. Les cas rares tels que les cas de décès doivent être examinés individuellement.
Pour les essais qui ont eu lieu avant l'homologation, il n'a pas été possible de faire participer un grand nombre de fillettes plus jeunes, à cause de certains tests qui ont été jugés inappropriés pour des fillettes prépubertaires. Par conséquent, ces tests ont été faits uniquement sur les jeunes filles âgées de 13 ans et plus. Néanmoins, on a ensuite essayé d'établir si la réaction immunitaire des fillettes plus jeunes aurait été équivalente et il n'est pas nécessaire, pour cela, que le nombre de participants soit aussi important.
Par conséquent, pour ce qui est de l'efficacité du médicament, il est clair qu'elle a été étudiée. Pour ce qui est de son innocuité même un chiffre de 10 000 participants ne suffit pas. Par conséquent, quelques centaines de fillettes âgées de 9 à 12 ans ne constituaient certainement pas un nombre suffisant, mais ces essais sont suivis d'une surveillance post-commercialisation.
Je voudrais parler surtout de la Stratégie nationale relative aux produits pharmaceutiques et du fait que toutes ces questions sont, de toute évidence, de nature à la fois fédérale et provinciale. Je voudrais donc savoir comment la stratégie fonctionne en ce qui concerne les réunions des coprésidents, les groupes de travail et tout le reste.
Je crois que vous êtes le coprésident du groupe de travail sur l'innocuité dans le monde réel. Bien entendu, il y a eu une conférence en septembre 2005. Il y a eu l'atelier sur les projets de recherche. Il y a eu le rapport du consultant en 2007. Communiquez-vous dans les deux sens avec le gouvernement fédéral pour répondre à ce genre de choses? Quelles recommandations votre groupe de travail a-t-il fait sur cette question? Avez-vous parlé de l'homologation progressive? Avez-vous discuté de la façon dont se ferait le rappel d'un médicament?
Certaines personnes en ont déjà entendu parler, mais j'ai fait beaucoup d'obstétrique et parfois, après avoir fait un accouchement pendant la nuit, je recevais une lettre de Santé Canada trois jours plus tard m'informant qu'un médicament avait été rappelé. Le lendemain matin, il fallait que je calme les inquiétudes de mes patientes. Il semble que nous ayons une façon très désuète de communiquer avec les médecins au sujet des risques.
D'autre part, je voudrais savoir si votre groupe de travail s'intéresse aux médicaments contrefaits. S'il y a eu une réaction indésirable à un médicament, comment savez-vous qu'il s'agissait du véritable médicament et non pas d'une contrefaçon si nous prenons ce qui s'est passé dans le cas de l'héparine et des véritables problèmes qui se posent actuellement aux États-Unis?
Donc, tout d'abord, où en est la stratégie? Je crois qu'un coprésident fédéral n'a même pas encore été nommé.
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Par le passé, Santé Canada s'occupait à la fois des médicaments et des vaccins lorsque l'Agence se trouvait encore au sein de Santé Canada en tant que Laboratoire de contrôle des maladies. Il y a eu ensuite une séparation et le Laboratoire de contrôle des maladies a conservé la responsabilité des vaccins. C'est seulement un petit historique.
Nous sommes chargés de la surveillance post-commercialisation pour les vaccins préventifs destinés à l'être humain. La Direction des produits biologiques et des thérapies génétiques, qui fait partie de Santé Canada, est chargée de la réglementation avant la mise en marché, mais elle a aussi des responsabilités après la commercialisation. Une des différences entre les médicaments et les vaccins et certains produits biologiques est qu'il faut étudier et autoriser la mise en marché de chaque nouveau lot de vaccins et c'est ce que fait la DPBTG.
Nous siégeons avec la DPBTG à un certain nombre de comités. Elle a un comité de la gestion des risques et lorsqu'un problème surgit à l'égard d'un vaccin, nous travaillons avec la Direction au sein de ce comité. Nous avons notre Comité consultatif national sur l'immunisation où la Direction siège également. Le comité émet des recommandations à l'égard des vaccins et des mises à jour concernant l'innocuité des vaccins dans le cadre du guide d'immunisation. Divers documents techniques sont produits lorsqu'un nouveau vaccin est mis en marché.
Nous avons un groupe de travail sur la vaccinovigilance. C'est un comité fédéral-provincial-territorial qui compte des membres de l'ensemble des provinces et des territoires et qui a un coprésident des provinces et un coprésident de l'Agence. Il s'occupe de la vaccinovigilance, établit le formulaire que nous utilisons pour les déclarations et élabore des définitions et des normes de procédure nationales pour la déclaration des réactions indésirables. Nous travaillons en collaboration avec les provinces et territoires et la DPBTG siège également à ce comité.
Nous avons aussi un comité consultatif sur l'évaluation de la causalité. Il se penche sur les événements indésirables graves dont certains ont été mentionnés. Il s'agit notamment des décès, des hospitalisations, de tout ce qui prolonge l'hospitalisation, de tout ce qui menace la vie et de tout ce qui cause des lésions résiduelles ou des malformations congénitales potentielles. Nous prélevons ces déclarations et nous les examinons dans la mesure du possible. Nous ne pouvons pas toujours obtenir les renseignements dont un comité a besoin pour les étudier. La DPBTG siège également à ce comité.
Ce sont donc des interactions officielles. Il y a également un certain nombre d'interactions informelles, ponctuelles, lorsqu'un problème surgit, comme les décès reliés au Gardasil. Ces décès n'ont pas été causés par le Gardasil mais ils ont suivi sa prise. Il s'agissait d'associations temporelles qui ont été déclarées à l'EMEA. Quand nous avons obtenu ce renseignement, nous avons rencontré nos collègues de la DPBTG. Nous travaillons donc régulièrement avec eux, pas tous les jours, mais plusieurs fois par semaine.
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Merci pour votre question.
L'utilisation non indiquée d'un produit thérapeutique est une utilisation autre que celles qui sont indiquées sur l'étiquette du produit. Il peut s'agir d'un dosage différent ou d'une voie d'administration différente ou encore d'une indication autre que celle pour laquelle le médicament a été approuvé au départ.
L'utilisation non indiquée dépend en partie du médecin. La médecine utilise parfois des médicaments autrement que pour les indications recommandées. La supervision de ces utilisations non indiquées est principalement exercée par les collèges des pharmaciens ou des médecins qui réglementent les activités de leurs membres.
Bien entendu, il y a parfois au Canada des utilisations non indiquées en pédiatrie. C'est souvent pour répondre à un besoin thérapeutique. D'autre part, on ne dispose pas toujours de connaissances approfondies qui ont été dirigées vers les organismes de réglementation et approuvées pour autoriser une indication. Il y a aussi des indications non indiquées pour certaines sous-populations telles que les patients atteints du cancer ou du sida. Comme je l'ai dit, c'est une réalité dans l'exercice de la médecine.
En tant qu'organisme de réglementation, nous prenons des mesures lorsque nous apprenons qu'une utilisation non indiquée présente des risques, mais nous ne pouvons pas réglementer ces utilisations. C'est en dehors de notre mandat. Comme je l'ai dit, cela relève des différentes associations professionnelles du Canada.
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Tout d'abord, il y a peut-être plusieurs malentendus au sujet de l'expression « homologation progressive » qui, selon nous, ne voulait pas dire que les médicaments se retrouveraient sur le marché plus rapidement.
Cela signifie que nous voulons être certains de tirer parti au maximum des connaissances que nous accumulons, avec le temps, au sujet d'un médicament. C'est la façon traditionnelle de faire des études avant la mise en marché et nous n'avons pas voulu changer cela. Néanmoins, aux États-Unis, il y a des mécanismes qui permettent de commercialiser les médicaments plus rapidement, c'est-à-dire plus tôt au cours de l'étude préalable à la commercialisation. Au Canada, cela visait 32 médicaments sur les 9 000 qui sont commercialisés normalement et ces médicaments s'adressaient à une très petite population, à des gens pour qui cela répondait à un besoin médical. C'est donc très limité.
Aux États-Unis, on a veillé à assurer un suivi. Nous avons essayé d'explorer ce concept de façon très raisonnable, car les gens qui sont dans cette situation et qui prennent ces médicaments doivent savoir dans quel contexte ils se trouvent et il faut que l'étude puisse être complétée. L'Europe travaille également sur cette question.
Par conséquent, cela dépend de la façon dont vous assumez vos responsabilités à l'égard de ces quelques médicaments — et il ne s'agit pas des autorisations générales dont la plupart des médicaments feront l'objet au cours de leur cycle de vie. En fait, pour la majorité des médicaments, il n'y a pas de changement dans les données requises avant la mise en marché. C'est seulement pour ce très petit nombre de médicaments.
Ensuite, il s'agit de vraiment s'assurer que ces engagements sont tenus. Nous avons réfléchi à la question et nous en avons discuté avec un grand nombre de groupes et on insiste beaucoup sur… Par exemple, les provinces nous ont dit qu'elles voulaient que la plupart des problèmes soient résolus et que nous devons régler cette question de façon raisonnable. Nous veillons à ce que ces engagements soient tenus et c'est là une politique sur laquelle nous nous sommes penchés très sérieusement.