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Je vous souhaite la bienvenue à cette 131
e réunion du Comité permanent de la santé. Les délibérations publiques d'aujourd'hui dureront jusqu'à 17 h 10 environ, puis nous passerons à huis clos pour discuter un peu des affaires du Comité.
Je veux tout d'abord remercier nos témoins d'avoir accepté de venir nous prêter main-forte avec cette nouvelle étude.
Du ministère de la Santé, nous accueillons Abby Hoffman, sous-ministre adjointe, que nous avons déjà reçue plusieurs fois auparavant.
Du ministère des Femmes et de l’Égalité des genres, nous entendrons Lisa Smylie, qui est directrice de la recherche et de l'évaluation à l'Unité des résultats et livraison.
Du ministère Services aux Autochtones Canada, nous accueillons Valerie Gideon, qui n'en est pas à sa première fois ici non plus. Merci beaucoup. Mme Gideon est sous-ministre adjointe principale à la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits. Il y a aussi le Dr Tom Wong, toujours de ce ministère, qui est directeur exécutif et médecin en chef de la Santé publique.
Il va y avoir deux déclarations liminaires, soit une par Mme Hoffman et une autre par Mme Gideon.
Madame Hoffman, si vous le voulez bien, nous allons amorcer la séance avec la vôtre. Vous avez 10 minutes.
Bonjour. Merci de me donner l'occasion de vous parler de cette importante question.
Je tiens d'abord à souligner que nous nous réunissons aujourd'hui sur des terres traditionnelles non cédées de la Nation algonquine.
Comme tout le monde, les récits au sujet des femmes autochtones qui ont été forcées de se faire stériliser m’ont grandement préoccupée. Il est inacceptable qu’une telle chose ait pu arriver à n'importe quelle femme dans le système de santé canadien, et ce, quel que soit l’endroit. La stérilisation forcée ou contrainte est une violation grave des droits de la personne et de l'éthique médicale. C’est une forme de violence fondée sur le sexe, et la preuve de besoin plus général d'éliminer le racisme et les pratiques discriminatoires qui pourraient exister dans le système de santé.
Malheureusement, il existe au Canada une histoire documentée de stérilisation obligatoire liée à un mouvement eugénique plus vaste qui remonte aux années 1900. L’institutionnalisation, la réglementation du mariage et la stérilisation étaient des mécanismes de contrôle sociaux qui avaient été mis en place dans certaines régions du Canada. Bien que ces pratiques aient été codifiées dans les lois de certaines provinces, nous savons que la stérilisation sans consentement approprié a aussi été pratiquée ailleurs au pays. Les victimes étaient des femmes avec une déficience intellectuelle, des femmes marginalisées et des femmes autochtones. Plusieurs universitaires de renom, dont Karen Stote et Erika Dyck, ont abondamment documenté ces pratiques.
De récents reportages sur les femmes autochtones qui ont subi des stérilisations forcées laissent entendre que ces injustices pourraient avoir eu lieu bien après l'abrogation des lois autorisant ces stérilisations. Mis à part les travaux de la sénatrice Boyer et de la Dre Judith Bartlett, à Saskatoon, l’étendue du phénomène n'a pas été documentée de manière exhaustive.
Il incombe à tous les acteurs du système de santé de veiller à ce que les patients aient accès à des services de santé exempts de préjugés et d’ostracisme. Le gouvernement du Canada prend cette obligation au sérieux. Nous sommes conscients que les femmes autochtones ainsi que d'autres femmes vulnérables touchées par la pauvreté, les problèmes de santé mentale et la toxicomanie font aussi face à des problèmes de préjugés et de sécurité dans le système de santé.
Par exemple, en 2016, après une étude qui a duré six ans, le Women's College Hospital a publié le rapport A Thousand Voices for Women's Health — ou, un millier de voix pour la santé des femmes —, qui documente comment les femmes de diverses communautés ont le sentiment d'être traitées et les attentes de ces femmes à l’égard des services, services qu’elles souhaitaient voir adaptés aux identités individuelles, aux cultures et aux situations sociales des personnes. De façon générale, ces femmes étaient d'avis que la prestation des services devrait se faire dans le respect de ces différences et sans jugement.
Comme vous le savez, au Canada, aucun ordre de gouvernement n’a la compétence exclusive en santé. Il s'agit d'un système complexe de compétences partagées où le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces et des territoires doivent chacun assumer d’importantes responsabilités. Pour sa part, le gouvernement fédéral est tenu d’assurer la santé et la sécurité des Canadiens, de contribuer financièrement au système de santé canadien au moyen du Transfert canadien en matière de santé et de fixer des normes nationales sur les soins, ce qu’il fait par l’intermédiaire de la Loi canadienne sur la santé. Les gouvernements des provinces et des territoires sont quant à eux responsables au premier chef de la gestion quotidienne, de l'organisation et de la prestation des services de santé, et chacune de ces administrations a pour cela créé son propre système en fonction de principes communs.
Dans le cadre de leurs responsabilités visant à administrer et assurer la prestation des services de santé, les provinces et les territoires ont élaboré au moyen de lois leurs propres cadres pour assurer la surveillance des professionnels du milieu par des organismes d'autoréglementation. Ces organismes sont chargés d'examiner les plaintes déposées contre les professionnels de la santé qui relèvent d’eux, de répondre à ces plaintes et de prendre des mesures disciplinaires lorsqu’elles s’avèrent fondées.
Les provinces et les territoires ont également le pouvoir de réglementer les affaires liées au consentement des patients à l’égard des traitements médicaux. Le concept de consentement éclairé a évolué avec le temps. C’est une question complexe. Autrefois, les processus de prises de décisions au sujet des traitements relevaient presque exclusivement des fournisseurs de soins, mais ils ont changé au fil du temps pour faire une plus grande place à l’opinion des patients.
Pour qu'il y ait un consentement éclairé, il faut assurer que le patient a les renseignements et la capacité nécessaires pour prendre une décision lucide quant au traitement que lui conseillent ses praticiens de la santé. Le consentement éclairé signifie que le patient a reçu des renseignements sur la nature, les avantages escomptés, les risques et les effets secondaires du traitement, sur les solutions de rechange et sur les conséquences probables d'un refus de suivre le traitement. Or, pour que le consentement soit valide, le patient doit avoir la capacité de porter un jugement éclairé et de donner ce consentement de façon volontaire.
Des études portant sur les femmes qui donnent leur consentement pour les interventions gynécologiques montrent que les patientes affirment souvent se sentir obligées de signer un formulaire de consentement malgré leur choix ferme de ne pas procéder à l'intervention. Dans une étude par Hall, Prochazka et Fink publiée dans le Journal de l'Association médicale canadienne, en 2012, il est indiqué que 30 % des femmes qui ont accepté l'opération ont déclaré qu'elles ne pensaient pas avoir le choix de signer le formulaire de consentement, et que 88 % des femmes croyaient que le formulaire n’était en fait qu’une formalité administrative. On peut donc supposer qu’il existe d'importantes lacunes dans la façon dont les praticiens parlent à leurs patientes de cette question de consentement. On peut aussi présumer que la façon d’obtenir le consentement et le moment choisi pour le demander sont importants.
Toutes les administrations sont tenues de s'assurer que la prestation des services de santé se fait sans discrimination, peu importe l'endroit où ils sont prodigués ou la personne qui les prodigue. Le gouvernement fédéral peut jouer et joue un important rôle de catalyseur pour l’amélioration du système de santé et il appuie la collaboration de nombreux acteurs et intervenants relativement à certains problèmes névralgiques.
Dans une minute, ma collègue de Services aux Autochtones Canada vous entretiendra sur différents aspects de cette question, mais je voudrais d’abord vous dire un mot sur les plans particuliers que nous proposons pour améliorer la sécurité sur le plan culturel.
Cette démarche est conforme à l'engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de faire avancer la réconciliation avec les Autochtones et de mettre en oeuvre les appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation. Notamment, elle donne suite aux appels à l'action nos 23 et 24, qui demandent à tous les ordres de gouvernement d'appuyer la formation sur la compétence culturelle pour les professionnels de la santé et les appels lancés aux écoles de médecine et de soins infirmiers pour qu’elles exigent que tous les étudiants reçoivent « une formation axée sur les compétences pour ce qui est de l’aptitude interculturelle, du règlement de différends, des droits de la personne et de la lutte contre le racisme ».
Le 11 décembre 2018, la et l'ancienne ont écrit aux ministres provinciaux et territoriaux et aux organismes de santé pour demander leur collaboration et leur participation à un groupe de travail fédéral-provincial-territorial. Santé Canada assumera un rôle de direction et collaborera avec les provinces, les territoires et les organismes de santé afin de prendre des mesures qui, nous l'espérons, conduiront à un changement de culture important dans le système de santé canadien. Nommément, ce changement devrait se traduire par un déplacement vers un système apte à soutenir le déploiement des efforts visant à empêcher les pratiques racistes et discriminatoires et à augmenter l'accès à des services de santé sécuritaire du point de vue culturel pour les Autochtones.
En mars, Santé Canada réunira des partenaires provinciaux et territoriaux afin de discuter de vecteurs de collaboration possibles relativement aux mesures susceptibles d’améliorer la sécurité culturelle dans le système de soins de santé. Le groupe collaborera étroitement avec des partenaires autochtones, des femmes et des organisations de professionnels de la santé. Nous nous attendons à ce que le groupe de travail fédéral-provincial-territorial tire parti du bon travail déjà en cours dans l'ensemble du pays, et qu'il détermine les possibilités d'actions dans des domaines comme la sensibilisation et la formation.
Par exemple, en Colombie-Britannique — l’une des administrations les plus avancées du pays à ce chapitre —, une formation approfondie sur la sécurité culturelle a déjà été donnée aux fournisseurs, aux administrateurs et aux décideurs de toute la province. Les autorités de la santé, les institutions, les fournisseurs, etc. dans d'autres parties du pays ont également des initiatives en cours à ce sujet.
Nous allons collaborer à l’échelle nationale et régionale avec les partenaires autochtones et les gouvernements ainsi qu’avec des collèges professionnels et des organismes de santé. Heureusement, il y aura des possibilités d'apprendre de l'expérience des groupes qui défendent l'objectif de la non-discrimination depuis un certain temps, comme c’est le cas, par exemple, de la Régie de la santé des Premières Nations, en Colombie-Britannique, qui vise à « ancrer » les concepts de sécurité et d'humilité culturelles dans la prestation des services de soins de santé.
Nous savons que l’amélioration des résultats en matière de santé, la bonification de l'accès à des services et des programmes de santé appropriés au niveau culturel et la prise en compte des déterminants sociaux de la santé sont de grandes priorités pour les leaders et les communautés autochtones dans l'ensemble du pays.
Je crois que le travail que nous entreprenons permettra d’améliorer la sécurité culturelle et la qualité des services dans le système de santé, et qu’il contribuera à la réconciliation.
Je vous remercie de m’avoir donné la chance de vous présenter ces quelques observations. Après l’exposé de ma collègue, je serai ravie de répondre à vos questions. Merci.
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Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à m'exprimer devant le Comité sur la question cruciale de la stérilisation forcée ou contrainte.
J'aimerais aussi amorcer mon intervention en soulignant que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
[Français]
Nous sommes ici aujourd’hui parce que nous sommes tous troublés par les rapports faisant état de la stérilisation forcée et contrainte des femmes autochtones au Canada. Je veux rendre hommage à ces femmes et je tiens à souligner leur courage. Je parle non seulement en tant que femme d’une Première Nation, membre de la nation micmaque de Gesgapegiag, au Québec, et mère de deux jeunes filles autochtones, mais aussi à titre de personne qui a consacré toute sa carrière à défendre la santé des Autochtones, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de la fonction publique.
[Traduction]
La stérilisation forcée ou contrainte constitue une grave violation des droits de la personne et de l'éthique médicale. Tous les Canadiens ont la responsabilité de veiller à ce que ces pratiques ne se reproduisent plus jamais. Comme le soulignait ma collègue, Abby Hoffman, la stérilisation forcée ou contrainte est une forme de violence fondée sur le sexe et elle est la preuve du besoin plus général d'éliminer le racisme et les pratiques discriminatoires. Un tel acte, parmi d'autres, nous incite à prendre des mesures visant à assurer la sécurité culturelle et l'humilité dans les systèmes de santé, à améliorer le consentement éclairé et adapté sur le plan culturel, et à éliminer les obstacles auxquels se heurtent les femmes autochtones lorsqu'elles accèdent aux services de santé au Canada. Lutter contre le racisme présent dans les systèmes de soins de santé est une question de réconciliation, comme l'a dit la Commission de vérité et de réconciliation.
En plus des progrès soulignés par ma collègue en ce qui a trait à l'accroissement de la sécurité et de l'humilité culturelles dans les systèmes de santé, j'aimerais souligner les travaux entrepris par Services aux Autochtones Canada sur le sujet et, en raison du temps limité, je vais me limiter aux mesures les plus récentes.
Au début de décembre 2018, nous avons tenu une téléconférence avec des partenaires autochtones et des organisations nationales du secteur de la santé afin de discuter des façons de faire progresser la collaboration et de déterminer les mesures qui garantiront un consentement préalable, libre et éclairé, et des services adaptés à la culture et sécuritaires pour les femmes autochtones partout au Canada.
[Français]
La Commission interaméricaine des droits de l'homme a recommandé au Canada de publier une brochure d'information à l'intention des fournisseurs de soins de santé et des patients sur le consentement préalable, libre et éclairé dans le contexte des services de santé pour les femmes autochtones. Pour concrétiser cette idée, nous avons discuté avec des organisations nationales de femmes autochtones sur la façon de procéder.
Nous nous employons également à mettre sur pied un nouveau comité consultatif sur le bien-être des femmes autochtones, composé de représentants des organisations autochtones nationales, des organisations de femmes autochtones, du Conseil national autochtone des sages-femmes, du Cercle national autochtone contre la violence familiale et de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada. Ce comité vise à informer le ministère sur les enjeux actuels et émergents, notamment la santé sexuelle et génésique. La réunion inaugurale aura d'ailleurs lieu le 14 février 2019.
En outre, nous organiserons au printemps un forum national visant à mobiliser les organisations autochtones et professionnelles en vue de prendre des mesures de collaboration portant sur la santé génésique des femmes autochtones et d'élaborer des lignes directrices pour garantir un consentement préalable, libre et éclairé quant aux procédures de stérilisation.
[Traduction]
En plus de répondre aux recommandations formulées par la Commission interaméricaine des droits de l'homme, Services aux Autochtones Canada s'efforce de soutenir la santé génésique des femmes autochtones de façon plus générale grâce à ses programmes et politiques. Par exemple, le Programme de soins de santé maternelle et infantile de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits propose des services communautaires de visites à domicile effectuées par des infirmières et des visiteurs familiaux auprès de plus de 8 100 femmes enceintes et familles ayant de jeunes enfants dans 309 communautés des Premières Nations. Dans le cadre du programme, les femmes enceintes se voient proposer des services de gestion de cas, de dépistage, d'évaluation et d'aiguillage, ainsi que des stratégies de promotion de la santé pour cerner les risques et améliorer la santé maternelle et infantile. Le budget de 2017 a bonifié le financement annuel actuel du programme — qui est de 25 millions de dollars — en prévoyant l'ajout de 21,1 millions de dollars sur cinq ans.
Le budget de 2017 a aussi prévu un investissement de 6 millions de dollars sur cinq ans pour les sages-femmes autochtones. Il s'agit du tout premier investissement fédéral dans ce domaine. On considère que les soins prodigués par des sages-femmes dans les communautés autochtones sont un moyen d'aider à améliorer la santé et le bien-être des femmes, de leurs enfants et de toute la communauté. Les sages-femmes autochtones constituent un moyen de favoriser le retour des naissances dans les communautés, une pratique traditionnelle de longue date qui intégrait des cérémonies et des pratiques médicales traditionnelles. De plus, le choix éclairé est reconnu comme étant un principe central des soins prodigués par les sages-femmes au Canada, et il pourrait contribuer à faire en sorte que les femmes autochtones jouent un rôle central dans leurs propres soins de santé et dans leur expérience d'accouchement.
[Français]
La sénatrice Yvonne Boyer et la Dre Judith Bartlett, qui ont effectué une vérification externe de rapports sur la stérilisation forcée et contrainte à Saskatoon, ont conclu que la perte de garde précédente ou la menace de perte de garde avaient joué un rôle dans la stérilisation contrainte et forcée des femmes autochtones en Saskatchewan.
Certaines données probantes indiquent qu'en plus de soutenir les femmes dans la planification de leur santé génésique, ce qui peut prévenir d'autres cas de stérilisation forcée ou contrainte, les sages-femmes aident les femmes à ne pas perdre la garde de leurs enfants. D'autres travaux sont nécessaires dans ce domaine et nous nous tournons vers le leadership des sages-femmes autochtones pour avoir une meilleure compréhension. Pour ce faire, nous sommes heureux que le Conseil national autochtone des sages-femmes ait accepté de devenir membre du comité consultatif sur le bien-être des femmes autochtones.
[Traduction]
Le budget de 2017 prévoyait également de nouveaux investissements visant à renforcer le soutien aux mères en veillant à ce que toutes les femmes inuites et des Premières Nations aient droit à un accompagnement lorsqu'elles doivent quitter leur communauté pour accoucher. Nous savons que la présence d'une personne de soutien lors des accouchements offre de nombreux avantages à la femme qui accouche, notamment en l'aidant à prendre des décisions et à défendre ses choix. Le Programme des services de santé non assurés de Services aux Autochtones Canada offre maintenant une couverture financière pour une personne accompagnant les futures mères, quel que soit leur âge ou leur état de santé, reconnaissant ainsi qu'aucune femme ne devrait avoir à accoucher seule.
[Français]
Le gouvernement du Canada s'est engagé à mettre en oeuvre les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation, notamment les appels 22, 23 et 24, qui ont été mentionnés par ma collègue. Ces appels portent sur l'utilisation et la reconnaissance de la valeur des pratiques de guérison des Autochtones, sur le maintien et l'augmentation du nombre de professionnels autochtones dans le secteur de la santé autochtone et sur la prestation d'une formation sur la lutte contre le racisme et sur les compétences culturelles pour tous les étudiants en médecine et en sciences infirmières.
[Traduction]
Notre ministère explore, avec le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada et des organisations autochtones, des idées de projet pour permettre un « pôle de connaissances » en ligne d'outils d'apprentissage des compétences culturelles. L'an passé, le Collège royal des médecins et chirurgiens a entrepris de faire de la santé et de la sécurité culturelle des Autochtones une composante obligatoire de l'éducation médicale supérieure et de la certification.
Comme le disait aussi Abby, l'organisme responsable de la santé des Premières Nations en Colombie-Britannique, la First Nations Health Authority, a aussi fait un travail remarquable avec la province et avec ses régies régionales de la santé en mettant la touche finale à une Déclaration sur la sécurité en santé culturelle ainsi qu'en donnant des renseignements relatifs à la formation sur la sécurité et l'humilité culturelles dans l'ensemble du système de santé provincial. Elle est en train de développer la toute première norme de sécurité et d'humilité culturelles en partenariat avec l'organisme des services de santé Health Standards Organization, qui est lui-même affilié à Agrément Canada. Nous avons bon espoir que d'autres provinces et territoires se pencheront sur ces travaux et les reconnaîtront en tant que pratique prometteuse.
[Français]
Nous ne pouvons entreprendre ce travail unilatéralement. L'Association des femmes autochtones du Canada et Pauktuutit, l'association des femmes inuites du Canada, font preuve de leadership en matière de santé des femmes autochtones. À mesure que notre relation avec ces organisations de femmes se développe et s'élargit pour inclure aussi les femmes mitchifs, c'est-à-dire les femmes de la nation métisse, nous sommes encouragés par leur bon travail et leurs conseils. Leur collaboration est essentielle pour bien faire les choses.
[Traduction]
Il faudra les efforts de plusieurs intervenants pour s'assurer que le racisme structurel et les effets de la colonisation ne nuisent pas à la santé des femmes autochtones. Je veux vous assurer que nous prenons cette question très au sérieux, et que nous continuerons de travailler dans un esprit de collaboration et de partenariat pour offrir aux femmes autochtones du Canada des services de santé sécuritaires et adaptés à leur culture.
Je répondrai avec plaisir à vos questions.
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Je dirais que dans pratiquement toute formation médicale, il y a des modules obligatoires qui portent sur le consentement éclairé. On y traite des aspects éthiques, juridiques et cliniques d'un consentement éclairé et valable.
Outre la formation officielle, il existe aussi des organisations comme l'Association canadienne de protection médicale, qui est naturellement l'assureur responsabilité, si on veut, des professionnels de la santé au Canada. Elle s'efforce de s'assurer que les fournisseurs comprennent parfaitement bien leurs responsabilités à l'égard du consentement éclairé, tant du point de vue juridique, éthique que clinique. Le corps médical a beaucoup de ressources à sa disposition.
Dans les hôpitaux et les autres établissements, soit hors du cadre des études universitaires ou supérieures, la question du consentement se corse, car il y a chaque jour des centaines de situations où le fournisseur de soins doit obtenir le consentement éclairé du patient. Il y a donc des gens dans les hôpitaux qui sont chargés d'établir le dialogue avec les fournisseurs de soins lorsqu'ils prennent des décisions et informent les patients des traitements possibles pour s'assurer qu'ils ont bel et bien obtenu un consentement approprié de leur part.
Je mentionne cela simplement, mais je ne suis pas une experte des aspects juridiques du consentement éclairé. Je ne le suis pas et ne prétends pas l'être et je ne veux pas qu'on pense que je le suis. Je veux simplement souligner que les étudiants en médecine reçoivent une formation officielle et qu'il y a ensuite un dialogue permanent sur les enjeux liés au consentement tout au long de leur carrière.
Dans une discipline particulière — et je tiens à répéter encore une fois que je ne suis pas une experte —, dans la mesure où un spécialiste est autorisé à effectuer une intervention médicale, ou à la proposer et à y procéder dans son domaine de spécialisation, il faut penser à la façon dont le consentement s'appliquerait dans ce cas. En obstétrique et en gynécologie, en raison de la nature des interventions qu'il est autorisé à faire, le spécialiste doit discuter de l'intervention et de ce qu'il serait approprié de faire avec sa patiente et donc savoir si elle est d'accord avec l'intervention.
Il y a un aspect du consentement éclairé lié au spécialiste. On présume alors que le processus fonctionne bien. On présume que le fournisseur de soins tient compte des circonstances particulières du patient lorsqu'il discute du traitement. C'est ici que les enjeux entourant la sécurité culturelle et la réceptivité et la sensibilisation aux différences culturelles et la situation du patient entrent en ligne de compte. Ce qui peut être une conversation tout à fait adéquate avec un patient dans un cas peut ne pas l'être avec un autre. On peut penser qu'il y a eu consentement éclairé, mais que ce ne soit pas le cas en raison de la situation particulière d'un patient.
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Je veux simplement situer le tout en contexte, selon ce que je comprends.
En 2015, des femmes en Saskatchewan ont déclaré avoir subi une ligature des trompes contre leur gré, sous la pression de professionnels de la santé et de travailleurs sociaux. Souvent, pendant que ces femmes étaient en train d'accoucher, et parfois pendant qu'on leur administrait la péridurale, soit pendant qu'elle était sous anesthésie, le médecin amenait l'idée d'une possible ligature des trompes et les pressait de décider et de la subir à ce moment.
En 2017, un examen indépendant de l'administation régionale de la santé de Saskatoon a attiré l'attention sur le fait que des femmes autochtones étaient forcées de subir une ligature des trompes. Je crois savoir que l'administration a maintenant reconnu que c'était le cas. C'est un fait avéré, alors il n'y a pas de doute. Il y a bel et bien eu des stérilisations forcées.
En 2017, quelque 60 femmes, à ce moment, ont intenté un recours collectif contre le gouvernement de la Saskatchewan, les administrations régionales de la santé, les médecins, et le gouvernement fédéral au sujet de la stérilisation forcée. Nous savons également que le Canada étant signataire de la Convention des Nations unies contre la torture, le Comité contre la torture des Nations unies a examiné notre bilan en matière de prévention et d'élimination de la torture et d'autres formes de mauvais traitements. Le dernier examen a eu lieu en novembre à Genève. Dans son rapport final, le Comité a officiellement reconnu que la stérilisation forcée et répandue des femmes autochtones au Canada est une forme de torture. Il a en outre soumis au Canada une liste de recommandations, et fait rare, il lui a demandé de fournir de l'information sur leur mise en oeuvre dans un délai d'un an, contrairement au délai habituel de cinq ou six ans.
Cela étant dit, j'ai quelques questions.
Premièrement, le gouvernement fédéral a-t-il, à votre connaissance, mandaté des procureurs fédéraux pour enquêter afin de savoir si des accusations criminelles devraient être portées? Avez-vous de l'information à ce sujet?
Le fait de demander une étude plus précise et de disposer de faits permettant de déterminer l'ampleur de la situation va nous permettre de tabler sur quelque chose de réel. En ce moment, on peut fabuler. Effectivement, le principe lui-même est absolument indéfendable, mais ce qui me trouble, c'est qu'on se retrouve de nouveau dans un enchevêtrement de responsabilités à se demander ce qu'on va faire, qui va en prendre la responsabilité, comment le plan d'action va être mis en œuvre et comment les fonds vont être dépensés. En effet, il faut des fonds pour mettre en œuvre un plan d'action et des solutions.
En attendant, si la situation est réelle et qu'elle perdure, d'autres femmes vont subir ce que j'appelle, pour ma part, des mutilations. Les enjeux sont nombreux. Il y a le côté légal, il y a la notion de consentement ainsi que d'autres questions. Je ne le dis pas pour vous blâmer, mais vous ne disposez pas de l'information. Selon moi, vous n'êtes pas en mesure de nous rassurer en nous disant qu'il y a un plan et que l'ensemble des provinces, des cliniques et des médecins s'en vont dans la même direction. Malheureusement, il y a du flou.
Est-ce que cela concerne seulement la Saskatchewan? Le reste du Canada est-il touché, lui aussi? La question vous a déjà été posée, mais vous n'avez pas vraiment de réponse.
Par ailleurs, on défend beaucoup le corps de la femme dans le cas présent, mais je me demande si des hommes ont également été soumis à cette pratique dans des communautés particulières. Y a-t-il eu de la stérilisation, forcée ou non, chez les hommes?
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins.
Je suppose que je veux examiner la situation du point de vue médical pour tenter de comprendre le processus de consentement. Le modèle de la profession médicale stipule qu'il ne faut causer aucun tort. Je trouve les médecins extrêmement prudents, car ils craignent de commettre une erreur. Si vous avez déjà subi une opération, vous connaissez toutes les étapes qu'il faut suivre avant de procéder à l'intervention. Les médecins ne veulent pas risquer de perdre leur permis de pratique; il y a des assurances, des poursuites et toutes sortes de facteurs qui entrent en jeu. Ils tiennent absolument à agir dans les règles de l'art. Le consentement est donc extrêmement important.
Nous voici devant le cas d'une femme enceinte de neuf mois. Normalement, il s'est établi une relation entre la future mère et le médecin de famille ou un médecin quelconque. Des sonagrammes et des tests sont effectués pendant les neuf mois de grossesse. Un éventail de démarches doivent être entreprises. Habituellement, c'est une période au cours de laquelle une relation s'établit et on discute du déroulement de la grossesse, des précautions à prendre et de l'alimentation. La future mère et le médecin parlent de la manière dont la grossesse se déroule et de la période qui suivra l'accouchement. Il y a donc beaucoup de communication.
Je me demande ce qu'il se passe dans ce processus, puisqu'un grand nombre de femmes prennent une décision qu'elles ont l'impression d'être obligées de prendre ou qu'elles ne veulent pas prendre, alors qu'elles ont eu une longue période pour discuter de la question, établir une relation de confiance avec leur médecin, accorder leur consentement éclairé et en parler avec d'autres membres de la famille. Que se passe-t-il? Pourquoi le consentement pose-t-il problème? Il semble pourtant y avoir suffisamment de temps. Ce n'est pas une décision prise à la hâte. Ce n'est pas comme si ces femmes avaient été victimes d'un accident de la route et amenées d'urgence à l'hôpital, où le médecin doit procéder à une intervention au sujet de laquelle elles disposent de 10 secondes pour prendre une décision parce que c'est une question de vie ou de mort. C'est un long processus.
Pouvez-vous nous expliquer ce qu'il en est? Pourquoi les décisions se prennent-elles ainsi alors qu'on dispose de tout ce temps et de tout cet encadrement? La situation ne se confine pas à un seul médecin; le problème semble répandu et se pose dans de nombreuses villes. C'est un problème national. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les choses ne se déroulent pas comme nous penserions normalement qu'elles se passent, avec une décision éclairée à la clé?
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Bien sûr. Je peux commencer à répondre.
Sachez tout d'abord que je pense que nous parlons, dans une certaine mesure, d'hypothèses. Je doute toutefois que ce soit dans le genre de situation que vous évoquez — c'est-à-dire celle de femmes qui ont eu une interaction suivie avec un ou plusieurs fournisseurs au cours de leur grossesse et qui ont une date d'accouchement prévue ou au moins une idée approximative du moment auquel elles doivent accoucher — que des femmes ont été contraintes à se soumettre à une procédure de stérilisation qu'ultérieurement, elles nient avoir acceptée ou dont elles disent ne pas avoir eu l'impression que c'était la bonne décision.
Je pense que nous discutons plus probablement de personnes pour ainsi dire sans abri qui ont peut-être eu une interaction avec un professionnel des soins de santé alors qu'elles vivent jour et nuit dans l'indigence. Il est plus probable qu'il s'agisse du genre de personne qui n'a pas établi de relation avec le système de soins de santé et qui n'est certainement pas sur un pied d'égalité avec le fournisseur. Lorsqu'il est question de consentement, je pense qu'un certain degré de connaissance ou de sensibilisation culturelles quant au fait qu'une personne a des moyens économiques très modestes ou est presque à la rue change tout. Ces situations peuvent se comprendre.
Il faut aussi comprendre que le déséquilibre de pouvoir entre un professionnel des soins de santé et une personne se trouvant en pareille situation est tel qu'on ne peut prendre absolument au pied de la lettre les échanges qui ont lieu entre ces deux personnes, comme on le ferait normalement.
Ici encore, il faut faire preuve d'imagination, mais on peut voir comment une situation peut mener au genre de cas que je décris. Le problème est aggravé par les troubles de santé mentale ou de dépendance. Je veux qu'il soit clair que je ne porte pas d'accusation contre les fournisseurs de soins de santé, mais il n'y aurait rien d'étonnant à imaginer que des fournisseurs sans formation adéquate rencontrant une personne aux prises avec un éventail de problèmes sociaux, économiques et psychosociaux puissent être enclins à lui demander, au moment de l'accouchement, si elle voudrait éviter pareille situation dans l'avenir. Ils auraient ainsi une conversation où ils ne tiendraient pas bien compte de la situation réelle de cette personne et, par conséquent, de ce que signifie cet échange entre patiente et fournisseur, puisqu'ils ne connaîtraient pas la manière adéquate de gérer la situation.
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Je peux répondre en ce qui concerne les personnes autochtones.
De nombreux hôpitaux du pays disposent d'interprètes ou d'intervenants autochtones, particulièrement dans les régions où les patients autochtones sont nombreux. Il y a aussi des travailleurs communautaires agissant à titre de représentants de la santé qui peuvent contribuer à aider les femmes et à en interpréter les propos.
Si les femmes doivent quitter leurs communautés et parcourir de longues distances pour accéder aux services hospitaliers, et si elles se heurtent à des différences linguistiques et culturelles importantes qui les empêchent de comprendre l'information, elles recevront du soutien. On assurera non seulement leur propre transport, mais aussi celui de leur accompagnateur. C'est ce dont nous voulons parler quand nous parlons d'accompagnateur.
L'accompagnateur peut également offrir des services d'interprétation au besoin.
Je ne pense pas que le processus soit encore parfait. Les intervenants des systèmes provinciaux et territoriaux sont maintenant bien plus sensibilisés au problème, et les services se sont grandement améliorés depuis 10 ans, mais je pense que cette question fera partie des points que le groupe examinera.
Existe-t-il encore des régions où les femmes autochtones ont accès à des procédures de stérilisation ou à d'autres interventions spécialisées qui s'accompagnent de risques, particulièrement au chapitre du consentement éclairé, et où nous devons investir dans de meilleurs services d'interprétation?
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Je dois dire que ce que j'entends me préoccupe grandement. Je pense que les témoins sont bien intentionnés, mais ils nous décrivent et nous demandent d'imaginer une sans-abri pauvre et sans relation établie avec un professionnel des soins de santé, une femme vulnérable qui arrive à l'hôpital au moment de sa vie auquel elle est la plus vulnérable: sur le point d'accoucher. On lui pose une question extrêmement profonde alors que le travail est sur le point de commencer ou est en cours: on lui demande si elle consent ou non à être stérilisée. D'après ce que j'entends, il y aurait peut-être un problème de communication.
Cette situation ne devrait jamais survenir. J'affirme que s'il s'agissait d'une femme blanche de la classe moyenne, jamais un médecin ne lui poserait de telle question pour la première fois alors qu'elle s'apprête à accoucher. On est manifestement en présence de stéréotypes, de racisme.
Je ne pense pas qu'il y ait de problème culturel ici, pas du côté de la femme. Je détecte là une approche systémique raciste, postcoloniale, paternaliste et sexiste classique dans le système de soins de santé du Canada, un pays pourtant membre du G7.
Je vais aussi vous dire que j'observe une réaction bien faible et bien tiède de la part du gouvernement fédéral, alors qu'il est au fait de la situation depuis maintenant quatre ans. Nous ignorons l'ampleur du problème. Nous ne savons pas dans quelles provinces cette pratique perdure ou qui est vraiment touché par le problème. Personne n'a tenté de communiquer avec ces femmes. C'est ce que je constate.
Je ne blâme pas les fonctionnaires qui témoignent aujourd'hui, soit dit en passant. Je sais que vous êtes ici pour fournir des réponses. Je dois toutefois vous dire que je suis extrêmement préoccupé par ce que j'entends. Le gouvernement réagit très timidement à ce qui a été qualifié de torture à l'échelle internationale. Je ne puis imaginer pire violation des droits de la personne que le fait de priver une femme du choix de procréer et d'avoir ou non un enfant alors qu'elle est en travail.
Sachez en passant que cette décision ne devrait jamais être prise à ce moment-là; jamais. La question ne devrait jamais être posée. Le problème n'est pas de savoir si le consentement est éclairé ou non. Je veux connaître le professionnel des soins de santé qui a l'outrecuidance de poser cette question à une femme en se fondant sur des présomptions stéréotypées, alors qu'il n'existe entre eux aucune relation établie. Voilà où le bât blesse. Ce n'est pas un problème de culture, de langue ou de capacité de comprendre.
Je vais maintenant proposer une motion:
Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité invite des représentants de Maurice Law Barristers and Solicitors, du Réseau d’action des femmes handicapées Canada, de l’Association des femmes autochtones du Canada, d’Amnistie internationale, de la Régie de la santé des Premières Nations de la Colombie-Britannique, et le ministre de la Justice, à comparaître devant le Comité le plus tôt possible pour lui communiquer des éléments probants au sujet de la stérilisation forcée de femmes au Canada.
Chers collègues, je pense que nous sommes tous sur la même longueur d'onde à ce sujet et que nous sommes tous horrifiés par ce que nous avons entendu. Je remercie mes collègues d'avoir appuyé la motion que j'ai présentée afin de vous faire comparaître, mais je pense que nous pouvons tous comprendre que les personnes qui témoignent aujourd'hui ne sont pas en mesure de nous fournir les renseignements dont nous avons besoin. Je demanderais donc à tous mes collègues d'appuyer ma motion pour que nous puissions aller au fond des choses.
J'ajouterais qu'à l'échelle internationale, nous avons l'obligation de faire enquête et de mettre fin à cette pratique. Nous avons entendu des témoignages très honnêtes, mais nous ne savons même pas si le problème perdure aujourd'hui; c'est peut-être bien le cas. En qualité de parlementaires, nous avons appris que des agressions qui constituent de la torture ont été commises à l'endroit des Canadiennes les plus vulnérables, des personnes que nous avons le devoir impératif de protéger. Il est de notre devoir de faire enquête, de prévenir cela, de veiller à offrir réparation et soutien, et de tenir les gens responsables de leurs actes. Constatant que les témoins ici présents ne peuvent nous fournir l'information nécessaire, je demande à mes collègues d'appuyer ma motion.
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Il y a quelques problèmes. L'un est lié au ministère de la Justice. S'il y a une poursuite, des représentants du ministère seraient-ils autorisés à venir témoigner? Je ne suis pas certain qu'ils puissent répondre aux questions. Cela ne signifie pas que vous ne posez pas les questions, mais je pense qu'il serait plus approprié de convoquer d'autres ministères, car nous parlons d'une enquête. Dans ce cas-ci, ce serait probablement la GRC, car elle serait vraisemblablement chargée de mener cette enquête.
Je ne suis pas certain, mais je suis également d'accord que nous devons prendre notre temps. Il est bien que nous en discutions maintenant. Je pense que tout le monde convient que nous voulons aller de l'avant — personne n'a dit le contraire —, mais que nous devons prendre notre temps pour nous assurer de le faire d'une manière appropriée afin de réussir au final. Nous discutons pour veiller à ce que justice soit rendue aux femmes et à ce que nous respections les conventions et la séparation des pouvoirs entre la magistrature et nous. Nous avons des pouvoirs considérables si nous souhaitons obliger les gens à témoigner, mais nous devons faire très attention. Je pense que nous devons prendre un peu plus notre temps.
Je ne sais pas trop si nous avons besoin de préciser tous les témoins. Je ne suis pas certain, car il y a, si je ne m'abuse, le sous-comité qui gère les affaires de ce comité qui pourrait dresser la liste des témoins à partir des suggestions de tout le monde. Je ne pense pas que les suggestions de témoins seront rejetées.
De plus, je pense que ce pourrait être à un niveau beaucoup plus élevé. Je sais que quelques sous-ministres adjoints très compétents sont venus témoigner devant le Comité, mais il serait peut-être préférable de convoquer un sous-ministre, quelqu'un de plus haut placé, pour répondre aux questions. Le fait de ne pas trop politiser l'enjeu est un autre problème. Cela nous ramène aux droits fondamentaux de la personne.
J'ai une dernière chose à dire. Je sais que nous voulons passer au prochain intervenant, mais les témoins sont ici. Je ne sais pas si nous allons revenir aux témoignages. Je sais qu'une autre série de questions est prévue. Devraient-ils rester ici pour les 35 prochaines minutes à nous écouter? Allons-nous revenir à la période des questions, ou est-elle terminée? Je crois que de nombreuses personnes souhaitent intervenir et débattre de cette question pour trouver la meilleure marche à suivre.
Je me demande seulement s'il y a des questions additionnelles que les gens ont pour les témoins. Je sais que les analystes ont préparé un certain nombre de questions, qui pourront faire la lumière également sur cet enjeu. Si elles ne sont pas consignées au compte rendu... Je sais que c'était la dernière série de questions.
Il y a de nombreuses questions.
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Comme je l’ai mentionné un peu plus tôt, je pense que nous sommes tous très inquiets et que nous voulons des réponses, mais nous voulons nous assurer de bien faire les choses.
J’ai beaucoup de respect pour mon collègue M. Davies, mais parfois certaines motions semblent être déposées rapidement en réaction à des témoignages, comme c'est le cas aujourd’hui.
Jusqu'à maintenant, le Comité permanent de la santé a toujours été très collégial. Il a toujours mené ses travaux dans l'intérêt supérieur de la population canadienne, et ce, de façon non partisane.
Dans ma première remarque, je disais que nous allions pouvoir étudier et améliorer cette motion ultérieurement. Il ne faut pas prendre de décisions sous le coup de l'impulsion. Nous ne pouvons pas affirmer vouloir étudier cette question et obtenir de l'information immédiatement sans même avoir un plan de match.
Nous pourrions aller dans toutes les directions pour tenter d'obtenir toutes sortes d'informations. Il faut éviter, au bout du compte, que les analystes se basent sur quelque chose d'improvisé pour faire leur rapport. C’est cela que je remets en question. Je ne suis pas contre la motion. Nous allons peut-être reprendre exactement la même motion ultérieurement, mais lorsque nous aurons établi un cadre.
Ce que je souhaite, c'est que le Comité fasse une étude en bonne et due forme du dossier. Cette étude serait beaucoup plus poussée que si nous nous limitions à entendre les témoignages de certaines personnes, qu’ils soient valables ou non.
De plus, je trouve que nous perdons du temps. Il y a devant nous quatre témoins qui ont probablement des réponses. Que ces réponses soient intéressantes ou pas, là n'est pas la question. Ils pourraient nous donner un aperçu de la situation actuelle et nous dire où en est le ministère de la Santé dans ce dossier.
Nous pouvons continuer à débattre de la motion ou encore déposer un amendement favorable. Finalement, je trouve que nous n’avons pas de plan. Notre comité réagit sous l’impulsion du moment alors que la situation est très sérieuse. Ce ne sont pas trois témoins de plus qui vont changer la recommandation actuelle du Comité. Notre comité est beaucoup plus sérieux que cela.
Je souhaite que nous établissions un plan et que nous l'approuvions, comme nous l'avons fait pour nos autres études bien documentées. Nous devons avoir une liste de témoins provenant de partout au pays, puisque toutes les régions seront touchées. Nos analystes doivent nous proposer un plan de match, ce qui nous permettra, le cas échéant, de soumettre un rapport à la .
Si c’est le souhait de mon collègue, nous pouvons toujours écouter deux ou trois témoins supplémentaires, mais je souhaiterais faire plus que cela.
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Avons-nous des copies de la motion pour que je puisse la lire? Je ne suis pas une personne très auditive: je lis beaucoup. J'aimerais obtenir une copie de la motion pour pouvoir savoir sur quoi nous nous prononçons, pour être honnête, car c'est très important pour moi. Cela m'intéresse beaucoup. Je ne me rappelle pas tous les témoins qui allaient potentiellement être convoqués. J'aimerais m'assurer que nous entendrons les témoignages des représentants des autorités provinciales concernées de Saskatoon et de la Saskatchewan qui ont peut-être des renseignements à nous fournir. J'aimerais également entendre les témoignages des représentants du Collège de médecine.
Nous devons débattre également de l'ampleur de l'étude. Elle pourrait durer très longtemps et se pencher sur un grand nombre de questions. Je pense que nous avons besoin d'un peu plus de temps pour débattre de la question. Nous pouvons en débattre publiquement et décider du nombre de jours que nous voulons y consacrer, que ce soit deux, trois, quatre ou huit séances. Il y a beaucoup de données manquantes et de choses que nous ne savons pas, ce qui est plutôt malheureux. Il y a des insinuations dans les médias. J'aimerais savoir si une enquête est en cours et ce que l'on examine potentiellement dans cette enquête. Je ne sais pas trop les renseignements que la GRC ou le ministère de la Justice pourraient communiquer, et je ne suis pas certain comment ces données sont liées à l'affaire civile.
Il y a de nombreuses questions, et si j'avais quelques jours de plus ou une semaine... Je ne pense pas que cela changera le cours de l'histoire si nous attendons une semaine de plus seulement pour établir un plan de travail. Nous pourrions discuter avec les gens qui dirigent le Comité — Mme McLeod, M. Casey et M. Davies — pour établir un plan de travail pour nous. De toute évidence, il faut déterminer quand l'étude prendra fin et les travaux que nous pouvons mener efficacement pour rendre justice aux femmes.
Je suppose que personne ne fera plus de stérilisation de la sorte au Canada. Je suis certain qu'il y a probablement des gens qui sont très nerveux dans le système de soins de santé et qui s'inquiètent à propos des poursuites. Néanmoins, il y a des témoins que nous pourrions convoquer.
Je crains que si nous dressons la liste maintenant... Je sais qu'il y avait un amendement et que nous pourrions ajouter des témoins additionnels. Combien de personnes figurent sur la liste jusqu'à présent?
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Je vais lire la motion une autre fois. Je donne le bénéfice du doute à mes collègues, car il se peut que ce soit attribuable au fait que je n'ai pas distribué la motion, que j'ai, soit dit en passant, par écrit. Il aurait mieux valu sans doute que je la distribue. Écoutez bien, elle se lit comme suit:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité invite des représentants de Maurice Law Barristers and Solicitors, du Réseau d'action des femmes handicapées Canada, de l'Association des femmes autochtones du Canada, d'Amnistie internationale, de la Régie de la santé des Premières Nations de la Colombie-Britannique, et le ministre de la Justice à comparaître devant le Comité le plus tôt possible pour lui communiquer des éléments probants au sujet de la stérilisation forcée de femmes au Canada.
Ma motion ne vise pas la tenue d'une étude ni la production d'un rapport. Il s'agit du même type de motion qui a été présentée pour faire comparaître les témoins qui sont ici aujourd'hui. La motion vise simplement à demander la tenue d'une autre réunion afin de pouvoir entendre d'autres témoins qui pourraient nous donner de l'information sur le sujet.
Ce qui s'est passé, c'est que les membres ont commencé à expliquer toutes les difficultés liées à la production éventuelle d'un rapport, à l'audition d'autres témoins, etc., alors la discussion a bifurqué. J'essayais de faire preuve de collégialité envers Mme McLeod, en acceptant qu'on ajoute d'autres témoins à ceux que je propose. La motion ne nous oblige pas à faire cela immédiatement ni à produire un rapport. Il n'est pas question non plus d'entreprendre une étude, mais simplement d'entendre d'autres témoins.
Pendant que j'ai la parole, j'aimerais dire que je fais preuve d'indulgence envers les membres du Comité, car je tiens à souligner aux fins du compte rendu que je suis un peu offusqué par les commentaires de M. Ayoub, qui prétend que je ne fais pas preuve de collégialité, que ma motion est partisane et qu'elle est présentée sur un coup de tête. J'avais rédigé ma motion avant la réunion, alors je ne la présente pas sur un coup de tête.
Deuxièmement, ma motion n'est pas du tout partisane. Elle est liée aux témoignages. Lorsque le sujet a été présenté, nous avons tenu une discussion et nous avons présenté des motions visant à inviter le ministre à comparaître. Les libéraux ont refusé qu'on l'invite. Nous avons parlé de tenir une réunion avec d'autres comités, parce que le sujet concerne la condition féminine, les relations avec les Autochtones et la santé, comme nous l'avons affirmé. Les libéraux ont refusé; ils ne voulaient pas cela. Nous avons proposé qu'un sous-comité du Comité permanent de la santé se penche sur le sujet. Cette proposition a également été refusée. En fin de compte, nous avons eu une séance d'information avec des représentants des ministères qui ont été soigneusement choisis par les libéraux. Ce sont les gens qui sont ici. Ce n'est pas une décision qui a été prise par le Comité, mais plutôt par les libéraux. Ce sont eux qui ont choisi ces personnes.
Nous savons maintenant, étant donné les témoignages que nous avons entendus aujourd'hui — et je le répète, j'ai énormément de respect pour toutes ces personnes; je ne les vise pas — que ces témoins ne peuvent pas nous fournir l'information dont nous avons besoin. Nous voulons obtenir de l'information, et jusqu'à maintenant, j'ai entendu Mme Hoffman affirmer qu'on peut seulement « imaginer » ce qui se passe.
Soit dit en passant, j'ai reçu un message pendant que nous parlions. L'avocate du cabinet Maurice Law Barristers & Solicitors a répondu qu'elle aimerait ne pas venir témoigner, mais qu'elle connaît des dizaines de femmes qui ont affirmé qu'elles seraient ravies de venir témoigner si c'est la seule façon de donner une voix aux victimes. J'aimerais entendre des personnes qui peuvent nous dire ce qui s'est passé. Je ne veux pas avoir à imaginer une itinérante qui n'a pas... Non, je veux entendre parler de ce qui s'est produit.
Je crois que c'est un peu malhonnête. J'entends tout le monde dire qu'on souhaite aller au fond des choses, mais les libéraux invoquent toujours une raison pour nous empêcher d'entendre les personnes qui sont véritablement au courant de la situation. Si les membres libéraux du Comité croient réellement qu'il s'agit d'une situation grave, et qu'il faudrait aller au fond des choses, alors qu'ils nous permettent de tenir une autre réunion, ou deux autres, pour entendre d'autres témoins qui seraient en mesure de nous donner davantage d'information. C'est là l'objet de ma motion.
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J'aimerais faire quelques commentaires, monsieur le président.
Je veux faire attention aux mots que je dis et je vais les prononcer en français, même si la motion n'est qu'en anglais.
J'ai mentionné mon appui dès le départ, à condition que le débat soit ordonné et sensé et que le Comité aille au-delà du simple choix de deux ou trois témoins. Plus encore, je n'ai jamais dit que cette étude exigeait un rapport présentement. Je suis très conscient du fait que cette étude n'exige pas de rapport. Ce que j'ai dit, toutefois, c'est que la motion nous a été présentée rapidement. Tant mieux si vous dites que vous avez préparé cette motion et que vous ne l'avez pas présentée de façon impulsive. Cela dit, je vous fais un premier commentaire: si la motion avait été préparée, elle aurait pu être traduite en français.
Je passe à mon deuxième commentaire: si la motion avait été préparée et que nous avions été en mesure d'en discuter, j'aurais pu me préparer à vous soumettre des suggestions de témoins supplémentaires. Là, nous sommes pris, si je puis dire, à nous prononcer sur une motion bien intentionnée mais précipitée.
J'ai toujours bien travaillé avec vous, monsieur Davies. Je ne vois pas pourquoi nous en sommes là aujourd'hui. Nous sommes en train de dire la même chose, nous avons des intentions passablement identiques, mais nous proposons, en fin de compte, des moyens différents pour arriver au même résultat.
Parfois, on veut aller plus vite, mais on va moins vite en allant trop vite. En essayant de faire avancer les choses, on prête des intentions à des collègues qui n'ont absolument aucun désir de vous mettre des bâtons dans les roues. Je suis aussi horrifié que vous d'avoir entendu ce qui s'est dit et de ne pas avoir eu les réponses que j'aurais aimé entendre. Par conséquent, ne me prêtez pas d'intentions, ne me mettez pas de mots dans la bouche. Je sais très bien ce que j'ai dit; nous pouvons consulter les comptes rendus préliminaires.
Je ne veux pas me chicaner avec vous, car nous nous entendons bien. Je veux que nous trouvions ensemble un moyen de faire mieux, car nous pouvons faire beaucoup mieux. L'important, ce n'est pas nous, ici autour de la table, mais bien les femmes qui sont en train d'attendre, de se faire mutiler ou torturer, comme vous le disiez.
Malheureusement, nous n'avons que des réponses partielles. J'aimerais entendre les bons témoins. Il y en a plus que trois. Je peux vous garantir que nous allons avoir besoin de plus que trois ou quatre témoins supplémentaires pour vraiment accomplir un travail qui soit tout à l'honneur de l'actuel Comité permanent de la santé.
Je vais m'arrêter ici.
Monsieur Davies, pourquoi ne pas effectuer en fait une étude et appeler cela une étude, qui sera suivie d'un rapport et de recommandations? Si nous tenons des séances d'information et que nous prévoyons diffuser aussi de l'information, je ne comprends pas pourquoi nous ne formulerions pas également des recommandations. Faisons donc quelque chose qui pourrait faire bouger un peu les choses à propos de cette situation.
Je souhaite la tenue d'une étude, car, en ce qui concerne la Commission de vérité et de réconciliation, nous remarquons qu'elle n'a pas mené à beaucoup d'accusations. Il y a eu des milliers d'heures de témoignages de la part de milliers de témoins, dont la plupart étaient publics. Pourtant, très peu d'accusations ont été portées. C'est triste de constater que le système de justice a permis qu'on balaie tout cela sous le tapis. Cela me rappelle quelque chose. Des personnes sont en situation de pouvoir, comme on l'a entendu dire durant les témoignages, et en anthropologie, on a étudié les relations des gens et on sait qui détient le pouvoir — le certificat, le diplôme — et à quel moment les gens sont vulnérables, comme vous l'avez mentionné, monsieur Davies.
Je suis préoccupé. Je veux vraiment faire les choses correctement. Pour être honnête, je ne suis pas certain... Nous avons aujourd'hui une séance d'information, et l'ordre du jour se lit comme suit: « Conformément à l'article 108(2) du Règlement, séance d'information sur la séance d'information sur la stérilisation forcée de femmes au Canada ». Il s'agit donc d'une séance d'information sur une séance d'information. Cela ne m'intéresse pas.
Je souhaite qu'on formule des recommandations concrètes, après avoir entendu des témoins, à l'intention de l'organe exécutif du gouvernement, qu'il s'agisse de la GRC ou du ministère de la Justice, visant à faire en sorte qu'il tienne responsables des personnes pour les graves violations des droits de la personne qui ont eu lieu au Canada. Je ne suis pas certain qu'une séance d'information sur une séance d'information nous permettra de formuler des recommandations.
Peut-être que le président peut m'éclairer.