HESA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la santé
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 9 mai 2018
[Énregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte. Je vous souhaite tous la bienvenue à la 105e réunion du Comité permanent de la santé. Nous poursuivons notre étude sur le don d'organes.
Avant de commencer, j'aimerais expliquer la situation concernant les deux réunions aujourd'hui, parce que je sais que tout le monde a été surpris. J'ai effectué des vérifications auprès de Joel, et il m'a dit avoir envoyé un courriel à tout le monde pour demander si les gens voulaient tenir une réunion lundi matin ou tenir une deuxième réunion mercredi après-midi. Quatre membres, j'imagine, ne pouvaient pas être là lundi, alors il a tout simplement prévu une deuxième réunion mercredi. C'est la raison pour laquelle nous avons deux réunions aujourd'hui.
Pour ce qui est de nos témoins, nous accueillons aujourd'hui le Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de la chirurgie de transplantation de l'Université de l'Alberta. Nous accueillons aussi la Dre Lori West, directrice, et David Hartell, directeur général, du Programme national de recherche en transplantation au Canada. Nous accueillons en outre Elizabeth Myles, directrice générale nationale, et Laurie Blackstock, une bénévole de la Division nationale de la Fondation canadienne du rein.
Je vous souhaite tous la bienvenue. Je vous remercie beaucoup d'avoir pris le temps de venir nous faire part de vos connaissances.
Nous allons commencer par des déclarations de 10 minutes de chacun et chacune d'entre vous en commençant par la Dre West.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir invitée aujourd'hui.
[Traduction]
Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité de prendre le temps de vous pencher sur les nombreux défis liés aux dons d'organes et à la transplantation au Canada.
Comme le Dr Kneteman, je fais partie d'équipes médicales. Je suis médecin en transplantation cardiaque pédiatrique et scientifique en immunologie des transplantations. Je peux donc vous faire bénéficier de cette expertise dans le cadre de notre conversation aujourd'hui.
Nous saluons vraiment vos efforts pour mener une étude sur ce que nous pouvons faire à l'échelle du pays, en tant que pays, pour les dizaines de milliers de Canadiens dont la vie peut être sauvée ou améliorée grâce à une greffe de cellules ou d'organes.
Nous vous remercions aussi d'avoir invité le Programme national de recherche en transplantation au Canada à participer à la discussion. Nous sommes conscients de l'importance de l'occasion que vous nous offrez de vous fournir de l'information sur notre programme et nos réussites tout en vous formulant des suggestions sur ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour accroître les dons, accroître l'accès aux transplantations et améliorer les résultats des greffes.
Je crois que nous tous ici aujourd'hui comprenons les avantages économiques liés à la transplantation et le fait que de telles interventions peuvent sauver des vies. Nous reconnaissons tous l'importance pour les Canadiens d'enregistrer leur intention de devenir un jour un donneur d'organes, si l'occasion se présente. La tragédie survenue le mois dernier à Humboldt en est assurément la preuve, car elle a inspiré plus de 100 000 Canadiens de partout au pays à s'inscrire en ligne pour devenir des donneurs d'organes.
Cependant, même s'il y a de plus en plus de Canadiens conscients de l'importance des dons d'organe, l'année dernière, au Canada, il y a eu moins de 800 donneurs décédés et seulement environ 500 donneurs vivants. Il y a officiellement 4 500 Canadiens sur des listes d'attente, et je pense qu'il est vraiment important de reconnaître — et ce n'est pas nécessairement quelque chose qui est reconnu de façon généralisée — que des milliers d'autres Canadiens pourraient être ajoutés à la liste d'attente. Les nombres de personnes sur les listes d'attente ne reflètent pas vraiment l'impact réel du problème. Ce n'est pas un domaine d'exception. Des dizaines de milliers de Canadiens pourraient bénéficier d'une transplantation s'ils pouvaient espérer trouver un donneur. Il y a tant de Canadiens qui ont besoin d'une transplantation qui ne se retrouvent jamais sur les listes d'attente. Selon moi, il ne faut pas oublier que c'est un problème beaucoup plus important que ne le laissent entendre ces chiffres à eux seuls.
Notre système n'est pas à la hauteur de son potentiel de transformer la vie de Canadiens, malgré les gains au cours des récentes années pour redonner aux patients souffrant de nombreux types de maladies chroniques, de tumeurs malignes et de défaillance d'organes une bonne santé. De plus, une fois qu'une personne reçoit une greffe, il faut optimiser les résultats à long terme de la transplantation afin qu'une retransplantation ne soit pas nécessaire, intervention qui, bien sûr, accentue les difficultés liées au fait de trouver suffisamment de donneurs d'organes, de façon à ce que la transplantation devienne vraiment un remède pour ces maladies.
Je crois qu'il est important de reconnaître que c'est un problème qui peut être résolu, et c'est ce que nous croyons. Le défi n'est pas impossible. Le Canada a les technologies, les gens, les ressources, les chercheurs et les biens nécessaires pour régler ce problème. Ce n'est pas le genre de problème dont on pourrait dire: « si seulement nous savions ceci » ou « nous ne savions pas cela ». C'est un problème que nous pouvons régler. Nous pouvons beaucoup apprendre d'endroits où il y a eu des réussites dans le monde entier, et je sais que nous le faisons, et je sais que tout cela fait partie de la discussion.
L'augmentation des dons et l'augmentation de l'accès à la transplantation exigent un solide partenariat national à de nombreux niveaux. Il faut commencer par compter sur des organismes provinciaux de don d'organes solides et bien financés comme vous l'ont dit lundi un certain nombre de représentants de différentes provinces. Il faut établir des liens clairs avec les organismes de bienfaisance dans le domaine de la santé et des groupes de patients. Il faut créer des partenariats créatifs avec les entreprises canadiennes de biotechnologie et l'industrie pharmaceutique en plus de compter sur un organisme national bien financé de politique et de coordination de la prestation des soins de santé par l'intermédiaire de la Société canadienne du sang, comme le soulignera le Dr Kneteman et comme en a parlé Isra Levy, lundi. Il est aussi essentiel de miser sur un réseau national de recherche solide et indépendant qui peut fournir les données probantes, évaluer les données et les stratégies, créer de nouvelles connaissances et faciliter des découvertes pouvant avoir une incidence rapide.
À cet égard, en 2013, le gouvernement canadien — par l'intermédiaire des Instituts de recherche en santé du Canada —, a financé le Programme national de recherche en transplantation au Canada, le PNRTC, dont les objectifs étaient de produire un cadre de recherche permettant de réunir les chercheurs dans les domaines du don et des transplantations à l'échelle du pays et à l'échelle de nombreuses disciplines qui composent ce paysage très complexe. Ce n'est que de cette façon que nous pouvons vraiment espérer de façon réaliste d'aller de l'avant.
Cette initiative était le fruit de solides partenariats entre plusieurs instituts des IRSC, y compris l'Institut des maladies infectieuses et immunitaires, la recherche sur le cancer, l'Institut de la nutrition, du métabolisme et du diabète et la recherche sur les sexes et la santé ainsi que de notre bureau de l'éthique et bon nombre de nos partenaires, dont vous entendrez parler ou que vous avez rencontrés, comme la Fondation canadienne du rein, la Fondation canadienne du foie, la Société canadienne du sang, les Fonds de recherche du Québec, Genome BC, Fibrose cystique Canada, Astellas Pharma et plusieurs autres.
Ce que nous avons maintenant créé au Canada, c'est une structure de recherche nationale unique au monde. Elle réunit des chercheurs en transplantation de moelle osseuse, des chercheurs en dons et des chercheurs en transplantation d'organes solides. Il n'y a en fait aucun autre programme du genre à l'échelle mondiale, et il fait vraiment l'envie de nos collaborateurs et partenaires à l'échelle internationale.
Je vais vous donner quelques exemples de nos principales réalisations au cours des cinq dernières années, parce que je pense qu'ils pourraient contribuer à éclairer certaines des idées et des propositions auxquelles vous réfléchissez dans le cadre de vos discussions au sein du Comité.
Le PNRTC a réuni des chercheurs de 31 établissements d'enseignement et universités du Canada autour d'un leadership central fourni par l'Université de l'Alberta et l'Université de Montréal. Nous avons réuni plus de 150 enquêteurs, plus de 200 stagiaires et plus de 200 collaborateurs qui s'intéressent uniquement à ces enjeux. Nous soutenons plus de 75 études nationales étroitement liées qui établissent un lien entre le don, la transplantation d'organes solides et la transplantation de moelle osseuse, ce qui permet — et c'est important — de réunir la science et la recherche cliniques et les économistes de la santé, les experts en droit de la santé, les chercheurs en éthique et les experts en politiques. Du côté des sciences pures, nous établissons des liens entre les domaines pertinents de la chimie et du génie. Du côté des sciences humaines, nous créons des liens avec des spécialistes des sciences sociales et des politiques et des experts de l'apprentissage machine et de l'intelligence artificielle. Tous ces intervenants ont un rôle important à jouer pour faire avancer ce genre de travail et avoir une incidence réelle sur ce que nous envisageons.
Nous avons aussi inclus des patients et des familles dans notre structure. Nous en avons fait des partenaires de recherche clés. Le fait d'intégrer le public dans le cadre de nos efforts de recherche garantit non seulement que nous tenons compte de leurs priorités, mais aussi que notre structure nous permet de rendre des comptes aux bailleurs de fonds de la recherche. Cela nous aide à évaluer les répercussions de notre travail et de proposer de nouveaux projets qui sont directement influencés par les priorités des patients.
Nous avons lancé et nous appuyons la plus importante étude clinique au monde sur les dons des personnes décédées avec nos organisations de don d'organes partenaires. L'étude est en cours et elle transforme la recherche au Canada et dans le monde entier en collaboration avec de nombreux partenaires internationaux importants.
Nous avons lancé des essais nationaux en utilisant de nouveaux... Vous avez peut-être entendu parler des « organes dans une boîte », des dispositifs de perfusion ex vivo. On y met des organes et, plutôt que de mettre les organes dans un sceau de glace et de les déplacer d'un endroit à l'autre, ces dispositifs les gardent vivants, et fonctionnels et en bien meilleur état pour la transplantation. Vu la géographie du Canada, ces dispositifs permettent de composer avec les distances et de faciliter le transport. Ce sont toutes des approches très créatives dont on a besoin pour avoir une réelle incidence dans ces dossiers.
Nous proposons aussi des stratégies internationales pour lutter contre le tourisme de transplantation et le trafic d'organes, et nous examinons des facteurs qui nuisent à l'accès à la transplantation et aux résultats connexes pour tous les groupes d'âge. Nous intégrons aussi dans notre travail des recherches axées sur le sexe et le genre et l'équité entre les divers groupes diversifiés.
Nous nous attaquons aux problèmes qui ont une incidence sur l'accès et les résultats dans les régions rurales, et éloignées du Canada et les collectivités autochtones ainsi qu'au sein des autres groupes vulnérables souvent négligés.
Après cinq ans, le PNRTC a montré le pouvoir d'une collaboration créative, et cette structure a été reprise par plusieurs nouveaux réseaux de recherche en santé au Canada, comme le réseau sur la résistance aux antimicrobiens et la maladie de Lyme et, ce qui est aussi important, dans le monde entier, par la British Transplantation Society, la Transplantation Society of Australia and New Zealand, l'organisation similaire en Allemagne et ainsi de suite, qui se demandent de quelle façon elles peuvent elles aussi créer des réseaux nationaux pouvant avoir ce genre d'incidence sur les résultats.
Les IRSC et leurs partenaires ont récemment fourni un soutien relativement à une prolongation de trois ans de notre infrastructure de base, mais le défi consiste à trouver un financement durable pour soutenir ces recherches importantes et assurer la croissance du réseau.
À cette fin, nous proposons des idées qui étaient impossibles il y a cinq ans. Nous proposons une vision plus large pour chaque don de transplantation, chaque occasion de don au Canada afin de ne pas en manquer et, essentiellement, d'éliminer les listes d'attente afin de faire de la transplantation un remède. C'est ce que nous appelons notre défi « Un transplant pour la vie », que vous trouverez dans le matériel que nous avons préparé.
Nous croyons que le PNRTC peut aider à intégrer, réaliser et évaluer les stratégies et les idées dont le Comité discute, et nous sommes impatients de travailler avec vous.
Nous fournirions une expertise multidisciplinaire abondante et nous pouvons amener des partenaires pertinents à la table afin de continuer à travailler en collaboration avec vous sur ces enjeux. Nous savons que nous pourrions vous aider avec certains des exemples qui ont été proposés par Ronnie Gavsie, lundi, et qui vous seront proposés aujourd'hui, comme une campagne de sensibilisation du public, un travail en collaboration avec la SCS sur l'évaluation d'un programme national de vérification des décès et ainsi de suite.
En conclusion, je tiens à souligner l'importance de soutenir le projet de loi C-316. Il s'agit vraiment d'un bon exemple de la nature créative sur laquelle il faut s'appuyer et du fait qu'il ne faut pas laisser la composition de notre pays miner nos efforts. Nous pouvons tourner tout ça à notre avantage et vraiment utiliser ces genres de stratégies pour nous rendre là où nous voulons aller.
En conclusion, nous croyons qu'il s'agit d'une occasion parfaite d'aller de l'avant. Nous sommes très heureux que le Comité se penche sur ces enjeux et nous vous remercions à nouveau de nous avoir permis de témoigner aujourd'hui.
Merci beaucoup. Votre passion est évidente.
Nous allons maintenant passer au Dr Kneteman.
Vous avez 10 minutes.
J'aimerais vous remercier, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la santé, de me donner l'occasion de parler du rôle du gouvernement fédéral dans l'amélioration de l'accès aux dons d'organes.
Nous avons fait face à un certain nombre de défis pendant une bonne partie des 30 dernières années. Le taux de don d'organes au Canada restait inférieur à 15 par tranche de un million d'habitants. C'était moins de la moitié de ce que d'autres pays industrialisés du monde affichaient. De nombreuses activités, tant à l'échelon provincial qu'à l'échelon fédéral, ont été menées pour essayer de changer la donne, mais elles n'ont pas été très efficaces. C'est quelque chose que je sais très bien, parce que j'ai participé à bon nombre de ces activités.
L'une des tendances que j'ai constatées, c'est qu'il y a eu plusieurs rapports, le rapport Volpe, le rapport du SM et le rapport du plan d'action de l'Alberta. Cependant, à peu près aucun de ces rapports n'était assorti de financement ou ne prévoyait la structure organisationnelle nécessaire pour vraiment faire avancer le dossier. C'est donc avec plus d'enthousiasme que j'ai examiné la proposition de 2008 de créer un organisme au sein de la Société canadienne du sang qui assumerait ce rôle très important lié aux dons et à la transplantation d'organes et de tissus.
Je ne crois pas avoir à vous parler des défis liés au fait de travailler dans un domaine comme la santé dans le système fédéral canadien où, par l'intermédiaire de la Loi canadienne sur la santé, des fonds sont affectés aux 10 provinces et 3 territoires et où l'administration et la prestation des services relèvent de chaque province ou chaque territoire. Puisqu'il en est ainsi, nous nous retrouvons avec 10 organismes différents responsables des dons d'organes au pays. Un des défis liés à une telle situation, c'est qu'il faut composer avec un système disparate alors qu'on tente de faire ce travail important.
Toutefois, l'une des grandes réalisations de la dernière décennie a été les enquêtes menées dans des pays du monde entier qui s'étaient dotées de systèmes de dons très performants, y compris les États-Unis, l'Espagne et quelques autres pays grâce auxquels nous avons pu tirer certaines leçons très importantes relativement aux choses que ces systèmes très performants ont en commun.
J'en ai énuméré 10. Ces éléments commencent par un réseau pancanadien de coordonnateurs des donneurs et de médecins spécialisés en dons, des professionnels dévoués, qui acceptent de s'en charger dans le cadre de leur travail. De plus, cela inclut un examen des dossiers médicaux afin que ces professionnels puissent examiner chaque décès pour comprendre s'il y avait là une occasion ratée en matière de dons de façon à ne pas faire la même erreur la prochaine fois. De plus, ces pays créent des registres en ligne des personnes ayant l'intention de faire un don. À ce sujet, même s'il y a eu des percées en ce qui concerne l'autorisation légale d'aller de l'avant en s'appuyant sur ces registres, il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une stratégie à long terme qui n'est pas sans difficultés.
Le renvoi obligatoire aux organisations de dons d'organes prescrit dans la loi est un autre facteur important. Il faut aussi mettre en oeuvre tous les différents types de pratiques exemplaires, alors nous avons besoin d'une organisation pouvant aider à faire ce travail à l'échelle du pays. Tout ça doit être soutenu par de la formation professionnelle, puis, comme la Dre West l'a souligné, nous devons avoir la capacité de recueillir l'information pour voir comment on s'en sort dans ces domaines. Avons-nous du succès? Passons-nous à côté d'occasions? De quelle façon pouvons-nous modifier la donne afin de nous améliorer?
Pour appuyer tout cela, nous devons avoir la capacité d'effectuer les activités de transplantation en tant que telles. Bien sûr, il faut aussi du financement pour les organisations de dons d'organes. L'un des facteurs importants, dans tous ces pays qui ont eu du succès, c'est la présence d'une agence nationale de coordination.
Au cours de la dernière décennie, au Canada, de nombreuses stratégies ont été mises de l'avant pour essayer de résoudre ces problèmes. L'un des points essentiels consiste à comprendre que le don est une activité réalisée en grande partie dans les unités de soins intensifs et, parfois, les urgences, et il faut donc compter sur l'appui de médecins des soins intensifs. Ces médecins doivent participer très activement à la réalisation de ces activités.
Il faut aussi assurer la professionnalisation de nos services de dons, contrairement à ce qui se faisait il y a 25 ou même 20 ans, lorsque la plupart de ces activités étaient réalisées par des médecins qui, essentiellement, les faisaient dans leur temps libre, donnaient de leur temps, pour essayer d'aider. C'est un travail crucial pour lequel il faut des professionnels qui sont des experts dans le domaine et qui sont capables de fournir cet important service.
Nous avons besoin d'effectuer des recherches pour étayer notre politique et nos pratiques en matière de santé et élaborer des lignes directrices nationales sur les pratiques exemplaires relativement à chaque étape du processus de don.
Au cours de la dernière décennie, nous avons fait des progrès. Je pense que cela confirme la déclaration de la Dre West selon laquelle nous pouvons avoir une incidence dans le domaine. En fait, nous constatons déjà une certaine incidence. Au cours des 10 dernières années, on note une augmentation de 50 % des dons au pays. C'est très impressionnant, mais il reste du chemin à faire. Il faut encore augmenter ce taux de 50 % pour rattraper ce que nous pourrions appeler comme la norme de soins dans le domaine.
La diapositive suivante montre que les taux de dons varient beaucoup d'une province à l'autre, et même d'une année à l'autre. Si nous regardons cette diapositive, nous pouvons voir que l'Ontario a affiché une très importante augmentation au cours des 10 dernières années. Je crois que c'est parce que l'Ontario a affecté beaucoup de fonds et a créé une organisation très efficace dans le domaine. Malheureusement, ce n'est pas le cas dans toutes les provinces du pays, et nous avons donc affaire à un ensemble disparate de systèmes. De toute évidence, en tant que nation, nous avons une excellente occasion d'améliorer la situation dans ce domaine.
La diapositive suivante porte sur certains des facteurs qui contribuent à des taux élevés de donneurs. Il s'agit d'éléments cernés dans le cadre de notre évaluation de ce que font les autres pays autour du globe. On peut voir les mesures qui ont été mises en place et celles qui ne l'ont pas été à l'échelle du pays. Maintenant, après 10 ans, on aurait pu espérer voir sur cette diapositive une série de points verts, montrant que nous faisons toutes ces choses dont nous connaissons l'efficacité. Comme vous pouvez le voir, c'est loin d'être le cas. Par conséquent, si vous descendez vers le bas, vous verrez que le nombre de donneurs décédés varie beaucoup d'une province à l'autre — aussi peu que neuf et jusqu'à 21. Il y a encore beaucoup de variations, et c'est la raison pour laquelle nous voyons là une réelle possibilité d'amélioration à l'échelle du pays.
Je porte une attention particulière à trois de ces domaines: le rôle des médecins professionnels des dons, le fait de compter sur des systèmes qui prévoient en vertu de la loi l'obligation de signaler les donneurs potentiels et la mise en oeuvre de nouvelles idées comme le « don après la mort cardiaque » qui a été mis en place au cours de la dernière décennie.
Si nous regardons les deux barres du haut, on peut voir que deux provinces — la Colombie-Britannique et le Manitoba, qui affichent des points verts — ont mis en place ces processus. Je ne crois pas que ce soit une coïncidence que, si vous regardez la ligne du bas, le nombre de donneurs au cours de la période quinquennale a augmenté de 76 % en Colombie-Britannique et de 89 % au Manitoba. Malheureusement, ce ne sont pas toutes les provinces qui affichent le même rendement au cours des cinq dernières années, ce qui démontre une réelle possibilité d'amélioration.
Comme je l'ai mentionné, le don d'organes après la mort cardiaque est une forme de dons d'organes qui a été, en fait, la première façon dont on a procédé, avant l'élaboration de ce qu'on appelle les critères de mort cérébrale. C'est revenu comme une autre solution. Comme vous pouvez le voir, l'Ontario, encore une fois, a ouvert la voie avec l'élaboration très efficace d'un tel programme. Vous pouvez constater que le programme produit sept dons par tranche de un million d'habitants chaque année. La Colombie-Britannique n'est pas très loin. Bon nombre des autres provinces, y compris toutes les provinces des Prairies, ne font que commencer.
Cette diapositive montre peut-être mieux que toutes les autres les grandes variations à l'échelle du pays. En Ontario, comme je l'ai mentionné, on a investi beaucoup dans la mise en place de médecins qui se spécialisent dans les dons à l'échelle de la province. Comme vous pouvez le voir, il y a 66 médecins spécialisés dans les dons dans la province. C'est cinq par tranche de un million d'habitants. À l'opposé, je peux citer ma propre province, l'Alberta, qui en compte deux. Et il y a aussi la Saskatchewan, qui n'en compte aucun. Il y a d'énormes variations d'un bout à l'autre du pays, ce qui est très loin d'être optimal.
En résumé, nous pouvons voir que nous avons la capacité d'agir dans le domaine. Nous avons augmenté le nombre de donneurs de 50 ou 60 % au cours de la dernière décennie. Nous avons vu certains des principaux facteurs qui ont joué un rôle important dans cette augmentation. Nous sommes maintenant, au moins, parmi les 20 meilleurs pays au monde, mais nous pouvons faire beaucoup mieux. Il est évident que les programmes locaux, provinciaux et nationaux ont tous participé en partie à cette réussite. Plusieurs provinces qui ont investi et créé des systèmes et des organismes pour faire le travail — et qui le font très bien — affichent des améliorations très importantes quant à leur capacité d'offrir les soins. Il ne s'agit pas seulement de faire des dons, parce que, bien sûr, ce sont les dons qui permettent aux patients de notre province d'avoir des traitements vitaux, comme la greffe du foie ou du rein, et c'est vraiment ça, la composante essentielle de la formule qui permet à un chirurgien comme moi d'aider ces gens qui ont des besoins critiques.
Les progrès que nous constatons sont encourageants, mais il reste beaucoup de travail à faire au Canada pour nous rapprocher des meilleurs. Encore une fois, les provinces qui ont mis en oeuvre les caractéristiques de systèmes de dons très performants obtiennent les meilleurs résultats, ce qui prouve que nous pouvons faire mieux à l'échelle du pays.
À quel endroit un système national peut-il renforcer le rendement? Il est évident qu'il y a des domaines où toute la population de donneurs du Canada doit être de la partie pour régler le problème efficacement.
De plus, je crois que nous pouvons avoir un système national qui aide à soutenir la mise en oeuvre des stratégies qui ont fait leurs preuves pour favoriser les dons, mais un tel système national permettra de le faire à l'échelle des provinces, pas seulement dans certaines provinces. Nous devons être en mesure de créer une base de données nationales des activités et des résultats des dons et des transplantations de façon à pouvoir étayer la prise de décisions et les activités de recherche. Nous avons aussi besoin de stabilité et de financement à long terme d'un organisme national chargé de fournir un soutien et des directives en matière de don et de transplantation.
Quels sont les secteurs dans lesquels nous avons besoin de toute la population pour régler le problème? Il y en a plusieurs, et je parlerai dans un premier temps de la situation d'une personne qui reçoit une transfusion sanguine ou qui accouche. Lorsque nous sommes exposés aux antigènes, aux protéines d'une autre personne, notre système immunitaire réagit comme il se doit. Il crée des anticorps contre ces éléments, comme ce serait le cas si nous étions vaccinés ou si nous étions exposés à une infection. Le problème, c'est que cette réaction crée une situation où nous sommes effectivement immunisés contre une transplantation.
Il y a des gens au sein de notre population qui ont peut-être ce niveau d'anticorps contre 99 personnes sur 100 au sein de la population, ce qui fait en sorte qu'il est extrêmement difficile de trouver un type de HLA compatible pour eux. C'est seulement lorsque nous misons sur un groupe de millions de donneurs potentiels que nous pouvons surmonter ce problème.
Il y a aussi le Registre de donneurs vivants jumelés par échange de bénéficiaires. Disons qu'un époux veut donner un rein à son épouse, mais qu'il est du groupe sanguin A, et elle, du groupe B. Ce ne sera pas possible. Ça ne fonctionnera pas. Cependant, si nous pouvons trouver un autre couple dans la situation inverse, ils peuvent chacun échanger un rein, et ça peut fonctionner. Ces deux programmes qui existent depuis trois ou quatre ans ont permis la réalisation de 1 000 greffes de reins au Canada, des greffes qui n'auraient pas eu lieu autrement.
Il y a aussi d'autres domaines pour lesquels j'ai illustré de quelle façon nous pouvons soutenir une mise en oeuvre à l'échelle des provinces afin de créer une base de données nationale de façon à savoir ce que nous faisons. Malheureusement, si je veux réaliser des recherches actuellement sur la façon d'améliorer les transplantations, je dois me rendre aux États-Unis pour examiner de tels renseignements.
En conclusion, je pense qu'il est important de miser sur l'organisme qui a été mis en place et à qui on a donné ce travail... il y a une section responsable du don et de la transplantation d'organes au sein de la Société canadienne du sang, mais, malheureusement, elle a actuellement de la difficulté en raison d'un budget limité renouvelé tous les trois ans au terme d'un processus de demande. Je crois que nous avons besoin d'un genre de financement beaucoup plus solide et beaucoup plus stable pour ce type d'organisme national.
Merci beaucoup de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions.
D'accord. Merci beaucoup.
Je suis désolé d'avoir à vous interrompre, mais nous avons hâte de passer aux questions.
Nous nous tournons maintenant vers la Fondation canadienne du rein pour 10 minutes.
Elizabeth.
Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité. Au nom de la Fondation canadienne du rein, je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui, en compagnie de Mme Laurie Blackstock, dont un membre de la famille vit sous dialyse en raison d'une insuffisance rénale, et son époux et sa tante sont tous les deux des donneurs d'organes décédés. Je vais parler un peu pour commencer, puis elle vous parlera de son expérience.
J'aimerais d'abord vous remercier de votre invitation à témoigner aujourd'hui. Malgré les progrès réalisés au chapitre des greffes d'organes au cours des dernières années, le Canada manque encore considérablement d'organes pour répondre aux besoins des milliers de Canadiens qui attendent une greffe qui leur sauvera la vie. Il est urgent d'améliorer notre système de dons et de transplantation d'organes.
Environ 4 500 Canadiens attendent une greffe d'organes, et plus de 75 % des personnes sur la liste d'attente attendent un rein. Il y a beaucoup plus de personnes qui attendent une transplantation que ceux dont le nom figure sur la liste d'attente. Des 22 000 Canadiens qui ont une insuffisance rénale et qui ont besoin de dialyse pour continuer de vivre, environ seulement 16 % sont sur la liste d'attente pour une transplantation. L'accès à une transplantation est une question de vie ou de mort pour les personnes souffrant d'une insuffisance rénale.
L'autre traitement possible est la dialyse, une forme de thérapie de survie. La dialyse mine le temps, l'énergie et la qualité de vie des patients et peut même finir par entraîner leur mort. Le taux de survie quinquennal pour une personne sous dialyse est inférieur à 45 %, un diagnostic pire que de nombreux cancers. À l'opposé, le taux de survie quinquennal d'une personne ayant reçu une greffe d'un donneur décédé est de 82 %.
Gwen, une infirmière et une mère de deux enfants, décrit la dialyse comme de la survie plutôt que de la vie. Elle explique que sa néphropathie a miné sa vie, la privant de sa profession, de son énergie et de sa capacité de penser clairement au point où il ne lui restait qu'une vie « fatiguée, douloureuse, petite et isolée ». Après sa greffe du rein, elle a repris sa vie et elle vit maintenant une vie remplie de créativité, de rire et de travail ayant un sens.
En plus d'assurer la survie et la qualité de vie d'un patient, les greffes peuvent faire économiser beaucoup d'argent au système de soins de santé. Le coût total annuel de la dialyse varie de 56 000 $ à 107 000 $ par patient. Le coût d'une transplantation est d'environ 66 000 $ pour la première année, et environ 23 000 $ les années subséquentes. Par conséquent, le système de soins de santé peut sauver jusqu'à 84 000 $ par année par patient ayant subi une transplantation.
Malgré tous les avantages d'une greffe du rein par rapport à la dialyse, le nombre de personnes qui attendent une greffe de rein est à peu près le double du nombre de greffés du rein. En 2016, il y a eu 1 731 greffes de rein. Le délai d'attente moyen pour une telle greffe est de quatre ans, allant de 5,7 ans au Manitoba, à 3 ans en Nouvelle-Écosse. Chaque année, des patients attendant un rein figurant sur la liste d'attente meurent en attendant une greffe ou sont retirés de la liste d'attente parce qu'ils sont trop malades pour subir une greffe. C'est la réalité tragique pour des milliers de Canadiens qui souffrent d'une maladie du rein et pour leur famille.
La plus grande tragédie, c'est que bon nombre de ces décès pourraient être évités si on apportait des améliorations aux systèmes de dons et de transplantation à l'échelle du pays. Dans un environnement où les donneurs d'organes sont rares et la demande, élevée, les occasions manquées de dons sont une question de vie ou de mort. Seulement 2 % des décès à l'hôpital répondent aux critères pour le don d'organes, mais seulement une personne sur six devient un donneur décédé. Les organes de donneurs sont rares et précieux. Chaque donneur décédé donne quatre organes, en moyenne, de sorte que chaque donneur décédé qui passe entre les mailles du filet prive au moins quatre Canadiens d'une greffe qui pourrait leur sauver la vie. Des gens meurent inutilement en raison des défaillances du système de greffe d'organes.
Le gouvernement fédéral peu améliorer le système canadien de dons et de greffes d'organes et de tissus en mettant en oeuvre une stratégie nationale. Un cadre de surveillance est requis pour s'assurer que chaque donneur décédé potentiel est cerné et a la capacité de sauver des vies grâce au don d'organes de façon à ce que chaque personne qui attend une greffe ait un accès équitable à la transplantation d'organes partout au pays.
Cela inclut la mise en oeuvre et le contrôle de pratiques exemplaires, l'éducation publique et l'éducation des professionnels et l'élaboration et la coordination d'un système interprovincial avancé de partage d'organes.
Le gouvernement fédéral peut aussi améliorer le système et sauver des vies en faisant la promotion des dons vivants grâce à la sensibilisation du public et à la réduction des obstacles auxquels sont confrontés les donneurs et les receveurs. Cela inclut la mise en oeuvre de pratiques visant à réduire le temps qu'il faut pour qu'un donneur potentiel soit contrôlé et le soutien continu des programmes de donneurs vivants et de dons vivants, comme le Programme de dons croisés de reins.
Enfin, le gouvernement peut soutenir la recherche afin d'améliorer les résultats des greffes et la disponibilité des organes aux fins de transplantation au profit d'un plus grand nombre de personnes atteintes d'insuffisance rénale.
Merci.
Je suis ici pour vous aider à comprendre le côté humain du besoin d'un système national. Comme Elizabeth l'a mentionné, mon père vit sur dialyse et, l'année dernière, mon mari est devenu donneur d'organes décédé.
Pour aider à soutenir mon père, mon frère a dû quitter son emploi d'enseignant et revenir sur la ferme familiale pour être là pour lui. Il n'a pas le droit de vivre seul. Il doit se rendre à l'hôpital à environ 30 minutes de trajet en voiture, il passe quatre heures chaque fois, puis revient à la maison. Par conséquent, il n'a plus d'énergie. De façon générale, il regarde la télévision et lit des livres plutôt que d'être sur son tracteur et de tondre la pelouse.
L'histoire de mon mari est plus difficile à raconter. L'année dernière, je suis revenue d'un atelier de camping d'hiver et la maison était plongée dans l'obscurité. Je suis entrée et j'entendais des coups au deuxième étage. J'ai monté les escaliers et j'ai trouvé mon mari en convulsions ininterrompues, inconscient. Il a été amené d'urgence à l'hôpital local où il a subi une crise cardiaque et a aussi fait plusieurs crises. L'essentiel, c'est que les médecins l'ont ramené à la vie. Il était vivant. Les responsables l'ont transféré à l'hôpital d'Ottawa où il a été envoyé à l'USI pour être branché sur un système de maintien de la vie. S'il n'avait pas pu vivre assez longtemps pour se rendre à l'USI, il n'aurait pas pu être un donneur d'organes. Bien sûr, ce n'est pas le genre de choses auxquelles je pensais à ce moment-là, je voulais qu'il vive.
Après environ deux jours, il était clair que, même si les médecins et le personnel infirmier de l'USI avaient fait de leur mieux pour arrêter les crises, mon mari âgé de 57 ans qui semblait en bonne santé n'allait pas survivre. C'est à ce moment-là qu'on a commencé à me parler de don d'organes.
Le moment était bien choisi. Une personne m'a dit avoir vérifié le registre des donneurs. Elle savait que Stephen avait consenti au don d'organes et de tissus. À ce moment-là, étonnamment, la mère de Stephen et moi avons été un peu réconfortées par cette nouvelle. Nous savions que nous allions perdre Stephen. Même s'il survivait, il avait très peu de chances qu'il puisse fonctionner, alors cette occasion était un cadeau, et c'est immédiatement ainsi que nous l'avons ressenti. Cela nous a permis de nous accrocher à quelque chose.
Le médecin a expliqué qu'il y avait une coordonnatrice du Réseau Trillium pour le don de vie dans la salle d'à côté prête à nous parler si nous avions déjà pris notre décision ou si nous avions des questions. Le médecin a dit explicitement que la coordonnatrice et lui n'allaient jamais être dans la même pièce à cette étape-ci afin que nous ne nous sentions pas dépassées par le nombre d'intervenants ou pressées de prendre une décision positive au sujet du don. Pour moi, c'était important.
Le médecin est sorti, la mère de Stephen et moi avons parlé, puis la coordonnatrice du Réseau Trillium pour le don de vie est entrée à notre demande lorsque nous étions prêtes. Elle a expliqué que, si nous acceptions les souhaits de Stephen, on le maintiendrait en vie artificiellement pendant un jour de plus. Les responsables essaieraient de le débrancher le plus rapidement possible, mais il faudrait au moins une autre journée pour réunir l'équipe de transplantation et les receveurs potentiels pour commencer le jumelage.
À ce moment-là, sachant que mon père était en dialyse, je me suis demandé s'il pouvait recevoir l'un des reins de Stephen; ne serait-ce pas là un scénario digne d'un grand film? Mais la vie, ce n'est pas un film, et mon père n'était pas admissible pour une transplantation. Bien sûr, nous étions tout de même heureuses de savoir que, dans 24 heures, probablement plusieurs familles — un maximum de huit — allaient être terriblement joyeuses, tandis que nous continuions à vivre notre deuil. Même si nous étions désespérées par notre perte, nous ne voulions pas refuser à d'autres familles la possibilité de voir leur être cher sauvé et vivre une vie beaucoup plus en santé.
Une semaine après avoir décidé que je serais une défenseure et une éducatrice, j'ai reçu la meilleure carte de remerciements de l'histoire. Elle provenait d'un jeune homme qui avait reçu une double greffe pulmonaire et qui respire maintenant grâce aux poumons de mon mari. Il a dit avoir eu la possibilité de passer Noël chez lui avec sa famille pour la première fois en trois ans. Il acquiert des compétences qu'il n'aurait jamais pu acquérir autrement, après de nombreuses années de plus à l'hôpital. Ce qui m'a touché le plus, c'est qu'il a dit qu'il pense à la famille du donneur chaque fois qu'il respire. La dernière phrase disait que le mot « reconnaissant » n'arrivait même pas à commencer à décrire comment il se sentait. Il nous a remerciées, ajoutant que nous lui avions sauvé la vie.
Je suis ici pour souligner que le don d'organes et de tissus n'aide pas seulement les receveurs et leur famille. Il ne s'agit pas seulement de réduire le coût énorme des traitements rénaux à long terme. Il peut aussi s'agir d'un cadeau incroyable pour les familles endeuillées comme la mienne, car lorsque la possibilité de don est présentée avec douceur et de façon éthique, au bon moment, lorsqu'il y a peu ou pas d'espoir de survie d'un être cher, c'est un cadeau. Le fait de savoir que la vie de cinq personnes a probablement changée pour le mieux de façon spectaculaire grâce aux poumons, aux reins et aux cornées de Stephen ne change en rien son décès ni l'intensité de notre deuil, mais cela nous donne tout de même des moments de soulagement.
Stephen vit dans ces cinq personnes.
Merci beaucoup de nous avoir raconté votre histoire. Il n'y a pas d'autre façon pour nous d'apprécier, d'entendre ou de comprendre tout ça si ce n'était de vous l'entendre dire. C'est toute une histoire. Cela signifie beaucoup.
Nous allons passer à une série de questions de sept minutes en commençant par M. Oliver.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, Laurie, de nous avoir présenté votre témoignage et votre histoire très personnelle, de la façon dont tout ça a touché votre vie et celle des personnes qui vous entourent. Je remarque que vous avez été très occupée avec la Société canadienne du cancer, le mouvement Gift of 8 et différentes campagnes. Vous avez été une véritable championne de ces différentes causes, alors je vous remercie de tout ce que vous avez fait. C'est vraiment formidable de rencontrer une Canadienne comme vous.
Premièrement, il faut élaborer et mettre en oeuvre une campagne multimédia nationale soutenue pour promouvoir les dons.
Deuxièmement, il faut accroître les possibilités pour les donneurs de s'identifier comme tels. À l'échelon fédéral, nous avons entendu dire qu'il serait possible d'utiliser les formulaires d'impôt. En plus de ServiceOntario, nous pourrions miser sur Service Canada et divers intervenants du genre.
Troisièmement, il faut promouvoir un meilleur partage interprovincial d'organes, particulièrement pour les personnes faisant face à des circonstances plus difficiles et particulières.
La quatrième recommandation découle de ce que j'ai entendu aujourd'hui tout autant de ce que j'ai entendu dans le passé. On dirait que nous avons un organisme national de coordination, mais qu'il pourrait être plus solide. Il devrait cerner les pratiques exemplaires et peut-être même des stratégies de mise en oeuvre. Je suis étonné, pour être honnête avec vous, des écarts à l'échelle du Canada, d'une province à l'autre. J'en comprends qu'un leadership provincial est essentiel. Lorsque je regarde les différences entre l'Ontario et la Nouvelle-Écosse, d'un côté, et l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et Terre-Neuve-et-Labrador, de l'autre, les différences sont énormes. C'est là où les pratiques exemplaires et les stratégies pourraient jouer un rôle, c'est sûr. Il faut aussi créer une base de données nationale pour la recherche, base de données qui, j'imagine, pourrait relever d'un organisme national de coordination.
La dernière recommandation — et, Laurie, vous avez encore frappé en plein dans le mille — est liée à ce que nous a dit le témoin du Réseau Trillium pour le don de vie durant la dernière réunion. J'ai déjà dirigé un hôpital, et je sais que, il y a tout juste deux ou trois ans, vers 2013-2014, le modèle du don de vie a changé. Ce n'est plus à un médecin ni à un membre du personnel infirmier de l'USI ou de l'urgence de parler à la famille. Ces intervenants n'ont pas la formation voulue pour parler du don d'organes. Leur compétence tient aux stratégies permettant de sauver des vies, alors passer d'un à l'autre est quasiment impossible.
Il y a maintenant une exigence en Ontario selon laquelle il faut déclarer certains décès cérébraux au Réseau Trillium pour le don de vie et communiquer l'information en question. Le Réseau Trillium pour le don de vie s'occupe ensuite de la conversation, et, si c'est acceptable aux yeux de la famille, des équipes de récupération d'organes sur le terrain viennent et travaillent en collaboration avec la famille de façon à pouvoir extraire les tissus donnés.
Quand je regarde les chiffres de l'Ontario, je constate que tout ça a donné un véritable coup de pouce au travail: cette approche vraiment proactive du Réseau Trillium pour le don de vie fonctionne. Je veux vraiment insister sur le besoin de soutenir les hôpitaux, dans les urgences et les USI grâce à des équivalents provinciaux du Réseau Trillium partout au Canada et sur le besoin de compter sur des équipes sur le terrain prêtes à se rendre dans les hôpitaux pour aider les fournisseurs de soins locaux.
C'est ce qui figure sur ma liste.
Y a-t-il quelque chose d'autre que vous voulez y ajouter, pour ce qui est des recommandations à formuler?
Je pense qu'il faut insister sur l'importance d'un cadre national de recherche permanent qui sera le moteur de certaines recommandations. Je crois que vous avez raison de dire qu'il ne faut pas seulement avoir une base de données nationale qui peut être hébergée ou créée par la SCS, ce qui peut être très utile... Les nombreux niveaux de recherche multidisciplinaire pouvant avoir une incidence sur tous ces aspects sont, à mon avis, vraiment cruciaux.
Pouvez-vous être plus précis? Dans quels domaines, selon vous, faut-il réaliser des recherches à l'échelon national?
Il faut prendre le cadre qui est déjà bien établi et qui a été un succès et le financer de façon durable...
La façon la plus logique de le faire, c'est de continuer à travailler par l'entremise des IRSC, parce que c'est cette méthode qui a permis d'en arriver là où nous en sommes. Cette structure ne fait pas partie de la SCS, mais les responsables travaillent en très étroite collaboration et en partenariat avec la SCS, et tout ça fonctionne très bien. Je crois que le fait d'assurer la pérennité de ce genre de recherches est tout à fait logique, et on peut le faire. C'est là où le Canada est déjà un chef de file.
J'aimerais dire deux choses. Premièrement, comme je l'ai souligné, il y a l'obligation de signaler les donneurs potentiels. C'est quelque chose qui fonctionne très bien en Ontario. Les choses dont nous avons parlé qui sont si importantes — et vous les avez soulignées — ne sont pas réalisées à l'échelle du pays. Deuxièmement, le fait que des professionnels des dons participent aux discussions et aux questionnements est aussi crucial. Le défi, bien sûr, c'est qu'aucune organisation provinciale, peu importe ses bonnes intentions ou peu importe si elle est bien financée, ne pourra diriger ces travaux à l'échelle de toutes les autres provinces, et il faut donc une organisation nationale quelconque habilitée à le faire, qui doit le faire et qui a le financement nécessaire pour y arriver.
Pour ce qui est de la base de données nationale, le registre canadien des transplantations de la SCS est déjà en place. Le système informatique existe. Le défi, c'est d'y intégrer l'information. Au Canada, depuis toujours, la déclaration, la transplantation et les dons se font de façon volontaire, et, pour cette raison, il y a plein de défauts, et ce n'est pas fiable. Il faut aller au-delà de tout ça et réfléchir à la façon dont on peut financer l'activité consistant à obtenir l'information et à l'intégrer dans la base de données afin que les professionnels, les chercheurs dont Laurie a parlé, aient quelque chose avec quoi travailler.
Je crois que ces deux éléments, comme point de départ, seraient très importants et pourraient avoir un réel impact.
C'est difficile de faire le lien entre tout ce qui concerne la collecte de données de recherche de haut niveau et ce qui se passe vraiment à l'urgence à 3 heures du matin lorsque quelqu'un se présente avec un traumatisme crânien et qu'il faut avoir cette conversation dans un tel contexte. C'est la composante sur le terrain, et il y a aussi toute la question des registres généraux.
C'est sûr. Je ne crois pas qu'il revient à un groupe comme le nôtre d'essayer de s'intéresser à ce niveau et de déterminer exactement quelle mesure il faut prendre au quotidien, mais le fait d'avoir en place un système permettant de faire ces choses est, selon moi, le facteur crucial.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier à nouveau le Comité d'avoir accepté de réaliser l'étude, aujourd'hui.
Je tiens aussi à remercier nos témoins qui sont là aujourd'hui, qui ont présenté des déclarations et qui viennent de si loin, tout particulièrement la Dre Lori West, qui a mentionné dans sa déclaration le projet de loi C-316: s'il est adopté, il permettra aux Canadiens d'indiquer leur désir d'être des donneurs d'organes dans le cadre de leur déclaration de revenus annuelle.
Je tiens aussi à remercier Laurie Blackstock, de son histoire, de son bénévolat et de son travail de défense des droits. Je remercie aussi votre époux d'avoir fait un merveilleux don de vie.
M. Oliver a fait du très bon travail en résumant ce qu'on a entendu au cours des deux ou trois derniers jours relativement à ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour aider à soutenir le système de dons d'organes et de tissus, ici, au Canada. Les commentaires supplémentaires que vous avez formulés aujourd'hui sont aussi très utiles.
J'ai quelques questions précises et rapides à poser.
L'une est destinée à Dre Lori West. Ma question concerne votre exposé et le document que vous avez fourni. Premièrement, je vous remercie aussi de l'excellent travail de recherche que vous faites. Vous avez mentionné ici avoir un solide bilan de réussite, et c'est vrai. Il y a une chose précise que j'ai remarquée, ici, c'est que vous avez mis au jour les défis juridiques, sociaux, institutionnels et professionnels qui sont associés au fait que la famille a un droit de veto quant à l'intention antérieurement enregistrée de faire un don. J'aimerais que vous nous en disiez plus à ce sujet. Y a-t-il beaucoup de situations où des familles vont à l'encontre des volontés d'un donneur potentiel?
Je pense que tout le monde est conscient de la complexité de la situation. Il y a beaucoup de facteurs, des grands et des petits, qui contribuent aux problèmes que nous continuons d'avoir en ce qui a trait aux dons d'organes. C'est un exemple de quelque chose à quoi nous avons réfléchi au départ, une situation dont on nous avait dit qu'elle ne constituerait pas un obstacle important pour accroître le nombre de dons et qui, en fait, s'est révélé un facteur très important. Ce sont des situations qui se présentent souvent, très fréquemment.
Il s'agit de travaux réalisés grâce à des efforts multiples sous la direction de Tim Caulfield, à l'Université de l'Alberta. Malgré le fait que, en examinant le paysage légal dans chaque province du pays quant à l'exigence d'obtenir la permission liée à ce qui peut bien se produire lorsqu'une personne s'inscrit pour être donneur d'organes... malgré le fait que l'inscription à un registre de donneur d'organes est un événement juridique, la famille d'une personne peut faire fi de ses désirs. Cette même famille ne pourrait pas empêcher le défunt de donner toute sa fortune à un chat, mais elle peut facilement refuser le don d'organe d'une personne qui a dit légalement vouloir le faire.
En fait, c'est beaucoup plus important et courant qu'on ne le croyait avant. Encore une fois, c'est un facteur parmi de nombreux autres. Cependant, ce sont des problèmes que nous pouvons possiblement régler en examinant chacun des obstacles aux dons.
Docteure West, ne peut-on pas faire abstraction des souhaits de la famille, dans ce cas-là? Si la personne a signé un document exécutoire en droit disant: « je veux donner mes organes à mon décès », pourquoi la famille peut-elle l'emporter? Les médecins ou le gouvernement ne peuvent-ils pas tout simplement dire: « désolé, mais c'est ce que nous allons faire ».
Dans toutes les provinces du pays, il y a une distinction à faire entre la situation juridique et l'aspect lié à la prestation des soins de santé. Dans chaque province, la façon dont les systèmes sont établis exige qu'on demande et obtienne la permission. Il y a vraiment un fossé, ici, et on pourrait vraiment travailler là-dessus afin de rationaliser tout ça à l'échelle du pays et surmonter...
Par exemple, durant cette conversation, plutôt que de dire: « nous demandons votre consentement », nous pourrions plutôt dire « votre être cher » — comme nous l'avons entendu ici — « a indiqué que c'était important pour lui et il a pris le temps de l'affirmer. Nous sommes ici pour l'aider à ce que cela se produise ».
Merci.
J'ai un bref commentaire sur la retransplantation. J'ai un bon ami qui a subi une double greffe pulmonaire. Cela fait presque 10 ans maintenant. J'espère qu'il lui en reste encore 10, mais ce n'est pas très courant. Est-ce vrai que la transplantation d'organes a une durée de vie? Quelles recherches faites-vous pour améliorer la longévité des organes transplantés?
La longévité et les résultats en matière de transplantation varient beaucoup selon l'organe transplanté, et c'est une équation très complexe. Les poumons sont probablement les greffes les plus difficiles.
Il y a de plus en plus de personnes dont les organes transplantés font défaut pour des raisons que nous comprenons peu. Nous comprenons de plus en plus de choses chaque année en raison des recherches réalisées pour bien comprendre cette situation. Tout ça a une incidence sur la façon dont nous composons avec ces problèmes complexes et essayons de diminuer le besoin de retransplantation, ce qui, bien sûr, aura une incidence sur les listes d'attente.
Merci.
Rapidement, parce que mon temps est limité, docteur Kneteman, j'ai une question à vous poser.
Je ne peux pas donner du sang actuellement parce que je suis récemment allé en Afrique. Je ne peux pas donner de sang pendant un an. Ma fille a eu la malaria, alors elle ne pourra plus jamais donner de sang. Il y a beaucoup d'autres situations où des Canadiens ne peuvent pas donner du sang en raison d'un événement ou d'un mode de vie. Qu'arriverait-il maintenant si j'ai par malheur un accident? Ma famille, bien sûr, permettra le don d'organes. Qu'arrivera-t-il?
Il y a une différence importante entre un don de sang et un don d'organe. La grosse différence, c'est que dans le cas d'un don d'organes, on est très loin d'avoir l'offre nécessaire pour répondre à la demande, tandis que, dans le cas du sang, nous sommes beaucoup plus près d'être capables de répondre aux besoins. Vous avez certainement déjà entendu parler des pénuries de sang, et ce sont des événements importants, mais ces pénuries sont habituellement intermittentes et temporaires et limitées à un seul endroit.
Nous avons fait beaucoup de chemin au cours de la dernière décennie pour comprendre l'importance des risques associés aux diverses infections possibles qu'une personne peut avoir. Même dans le cas d'un toxicomane qui consomme des drogues par intraveineuse et qui a peut-être l'hépatite C, nous savons maintenant quel est le risque pour le receveur. L'équipe médicale a la capacité de prendre une décision et de formuler une recommandation à cette personne. La personne, bien sûr, prendra la décision définitive, mais nous savons que, dans une telle situation, par exemple, nous pouvons transplanter un tel patient et le traiter grâce à des médicaments contre l'hépatite C très efficaces par la suite.
Dans bon nombre de ces situations, nous avons accès à de bien meilleurs renseignements au sujet des risques courus, alors votre famille se verrait présenter la situation, tout comme le bénéficiaire potentiel, et une décision pourrait être prise à partir de là.
Je vois. Parfait. Je dois faire très vite.
D'après la carte indiquant la présence de médecins spécialisés en don d'organes au Canada, on dirait bien que l'Alberta ne fait pas du très bon travail actuellement. Je veux vous poser des questions au sujet des hôpitaux en Alberta. Y a-t-il, en Alberta, des hôpitaux qui sont prêts à composer avec toutes les situations où l'on a l'occasion de prélever un organe sur une personne, ou laisse-t-on filer de telles bonnes occasions?
Selon moi, si on regarde cette diapositive ainsi que l'autre diapositive qui présente les taux de don, vous constaterez que l'Alberta a beaucoup de retard par rapport à l'Ontario. Il n'y a aucune raison qu'il en soit ainsi. Cependant, l'une des différences — en fait il y en a plusieurs —, c'est le fait que, essentiellement, il y a seulement deux médecins spécialisés dans les dons dans la province dans une situation où nous comprenons très bien qu'il en faut beaucoup plus.
Le projet de loi qui a été présenté et qui porte sur la création d'un organisme en Alberta commence, essentiellement, à faire avancer les choses, mais on n'est vraiment pas allé assez loin dans bien des domaines pour essayer de répondre à des questions comme celles que vous venez de poser.
Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
Docteur Kneteman et docteure West, je crois comprendre que les règlements actuels concernant les critères d'exclusion pour les personnes ne pouvant pas être des donneurs d'organes comprennent les hommes qui ont eu des rapports sexuels avec des hommes au cours des cinq années précédentes. Quelle preuve scientifique, s'il y en a, donne à penser que les hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes ne devraient pas pouvoir devenir des donneurs d'organes ou de tissus, et croyez-vous que ce critère d'exclusion devrait être modifié?
Je crois que c'est une discussion importante, et je crois aussi qu'il est important de comprendre ce que ces critères signifient vraiment. Essentiellement, les critères sont liés à des choses qui augmentent les risques. Ces critères n'interdisent pas nécessairement un don. Il y a là une différence importante. Comme l'a dit M. Webber, ces renseignements indiqueront que la personne se trouve dans une situation que nous reconnaissons comme présentant un risque plus élevé, et, comme je l'ai dit, il pourrait s'agir de choses aussi graves que la consommation de drogues injectables.
Nous avons tout de même la possibilité d'intervenir — et nous pouvons le faire de façon très efficace — pour réaliser ce qu'on appelle des tests d'acide nucléique. Ces tests peuvent nous dire, en fait — en quelques jours — si quelqu'un a été exposé à l'hépatite C, au VIH ou à différents agents du genre. Les médecins responsables des dons et ceux responsables de la transplantation peuvent discuter de cette information avec le receveur potentiel, qui, essentiellement, peut décider d'aller de l'avant.
C'est seulement, par exemple, si on a dépisté chez quelqu'un une séropositivité que, dans la vaste majorité des centres, on refusera d'aller de l'avant.
Ce n'est pas une interdiction absolue. C'est essentiellement le reflet d'un risque accru qu'il faut comprendre, et nous devons expliquer tout ça au receveur potentiel, parce que ce dernier doit, bien sûr, pouvoir donner un consentement éclairé pour aller de l'avant avec la transplantation.
J'aimerais ajouter quelque chose. Je me souviens de ces discussions lorsque le projet de loi a été adopté. N'oubliez pas que, lorsque je parle aux parents d'un enfant qui a besoin d'une transplantation cardiaque, il y a un risque de mort de 100 %. Il y a un risque total que les parents perdent leur enfant sans transplantation. Vraiment, comme le Dr Kneteman l'a dit, au bout du compte, il s'agit de soupeser les risques, et il ne peut pas y avoir d'absolu. Tout est relatif.
Je veux simplement apporter une précision, parce que nous avons obtenu une information des analystes et de la Bibliothèque du Parlement. Je vais vous la lire:
Outre les critères généraux d’exclusion des donneurs d’organes et de tissus prévus au Règlement sur la sécurité des cellules, tissus et organes humains destinés à la transplantation, l’annexe E de la norme générale traite plus en détail de la catégorie de personnes à risque d’infection par le VIH et d’hépatite virale, en y ajoutant les hommes qui ont eu des relations homosexuelles au cours des cinq années précédentes... En conséquence, le Règlement exclut ces hommes des donneurs potentiels d’organes et de tissus.
J'essaie simplement de clarifier les choses. Cette information donne à penser qu'il y a une exclusion. Vous êtes en train de dire au Comité qu'ils ne sont pas exclus, mais qu'il y a plutôt un pouvoir discrétionnaire. Je veux tout simplement m'assurer que c'est bien clair.
C'est lequel? Sont-ils exclus ou un don peut-il tout de même se produire à la discrétion du médecin?
D'après mon expérience pratique, ce genre de chose peut se faire et se produit si, bien sûr, on informe le receveur potentiel des risques accrus.
Nous avons fait des recherches et publié des lignes directrices au cours des deux ou trois dernières années indiquant explicitement que c'est quelque chose qu'on peut faire et que nous voulons nous assurer de tenir compte de ces donneurs.
Merci.
Je veux maintenant parler de financement.
Docteure West, d'après ce que j'ai compris, ce n'est pas parfait, mais je crois savoir qu'il y a du financement fourni pour réaliser des recherches par l'intermédiaire des instituts...
... les Instituts de recherche en santé du Canada — 14 millions en tout —, mais qu'il y a une certaine incertitude relativement à ce financement. Il y a 3 millions de dollars qui ont été attribués pour les trois prochaines années, mais je crois savoir que le financement fédéral associé à ces recherches n'est pas certain.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et nous préciser quels sont vos besoins?
Oui. Les IRSC et les partenaires que j'ai nommés ont fourni, par l'intermédiaire d'un mécanisme relevant des IRSC, un montant initial de 14 millions de dollars pour un programme quinquennal. Nous arrivons à la fin de la période. Ce financement, qui a permis de générer près de 40 millions de dollars grâce à des partenariats créatifs, arrive à sa fin. C'est ce financement qui nous a aidés à réussir.
Il n'y avait pas de mécanisme de renouvellement automatique dans le cadre du programme. Cependant, vu la réussite du programme et les nombreux résultats positifs, les responsables ont prévu, pour une période de trois ans, un soutien financier durable limité pour le maintien de l'infrastructure du cadre de recherche du PNRTC. On parle seulement de 3 millions de dollars au cours des trois prochaines années.
À moins d'avoir un nouveau mécanisme de soutien pour ce genre de cadre de recherche, alors nous n'aurons plus de financement à l'avenir pour poursuivre nos travaux.
D'accord.
J'aimerais avoir rapidement votre opinion sur le consentement présumé. Durant la dernière réunion, nous avons entendu certains témoins nous parler de l'opportunité d'adopter une forme quelconque de modèles de « consentement présumé ».
Rapidement, c'est une question que je pose à chacun d'entre vous, êtes-vous favorable à l'adoption du consentement présumé? Est-ce un système que nous devrions envisager?
Le consentement présumé est en vigueur et a peut-être été très efficace dans un certain nombre de pays, surtout en Europe. Bon nombre de ces pays ont des histoires faisant en sorte que leur passé est un peu différent du nôtre. En Amérique du Nord, on a un système juridique qui est beaucoup plus fondé sur les droits individuels, et cela a été un élément important de l'effort visant à maintenir la discussion avec chaque personne. Et là, je ne dis pas que les choses doivent rester ainsi, mais je pense que c'est ainsi que nous en sommes arrivés à la situation actuelle.
En réalité, en ce qui me concerne, si la majeure partie de notre population est favorable à une telle idée, je serais, essentiellement, tout à fait heureux qu'on aille de l'avant en ce sens.
Évidemment, il est possible d'aliéner ou de mettre en colère des gens de l'autre côté et c'est donc en partie ce qui nous préoccupe si jamais on veut aller dans cette direction. Il pourrait en fait y avoir des gens qui, parce qu'ils se sentent pressés...
... en raison du consentement présumé... Il pourrait y avoir une réaction brutale. C'est la raison, selon moi, pour laquelle il n'y a pas eu beaucoup d'enthousiasme à l'idée d'aller de l'avant avec une telle chose. Cependant, en réalité, les résultats des sondages révèlent que, au fil des ans, les résultats sont de mieux en mieux en ce qui a trait au consentement présumé, et je crois qu'il y a maintenant plus de 50 % des Canadiens qui y sont favorables.
Je suis tout à fait d'accord avec ce que le Dr Kneteman a dit. Je crois que c'est un des éléments d'un casse-tête complexe, mais il faut tenir compte de chaque élément.
Certaines des choses dont il a parlé comme les spécialistes des dons, même dans les pays qui ont adopté le consentement présumé — l'Espagne est le pays affichant les meilleurs résultats à l'échelle internationale —, on vous dira que le consentement présumé n'a été qu'un aspect de la solution. C'est quelque chose qui a été bien prouvé. Le fait de mettre en place certaines structures comme les vérifications nationales des décès, l'obligation de signaler les donneurs potentiels et les spécialistes des dons sont les choses qui ont vraiment rendu la transformation possible dans ces pays.
Bien sûr, au Canada, c'est une administration différente, mais il faut s'adapter si on veut réussir dans notre propre pays.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être là.
Il y a quelques semaines, j'ai rencontré Mme Blackstock. M. Webber et moi avons coanimé une réception sur le don d'organes et de tissus organisée par la Société canadienne du sang.
Merci de nous avoir raconté votre histoire.
Merci, monsieur Webber, de cette séance.
Ma question vous est destinée, docteure West. Quelles sont les conditions dans lesquelles une personne qui peut se qualifier comme donneur, comme une mort cardiaque? Dans quelle situation un patient peut-il donner ses organes?
Quelles sont les conditions dans lesquelles une personne décédée peut être considérée comme un donneur décédé?
Nous devons prendre conscience du fait que les donneurs décédés sont incroyablement rares. Chaque année, au Canada, 1 % seulement des décès se produisent dans des conditions permettant le don d’organes. Environ 270 000 Canadiens meurent chaque année, et, pour devenir un donneur décédé potentiel, il faut décéder à l’unité des soins intensifs d'un hôpital, sous respirateur, et il ne doit y avoir aucune complication chronique qui empêcherait le don d'organes. Il s’agit donc de circonstances extrêmement rares, et c’est pourquoi toute perte de donneur potentiel constitue pour nous un problème de santé publique, et elle ne devrait jamais se produire en milieu hospitalier; nous savons que ça se produit constamment. Comme l’a déjà mentionné Lori, il y a eu un peu moins de 800 donneurs décédés au Canada, l’an dernier, et nous croyons que nous perdons peut-être des milliers de donneurs chaque année, donneurs qui ne sont pas identifiés comme tels.
Le problème repose notamment sur le fait qu'il n'y a aucune conséquence pour l’hôpital qui a manqué un donneur. Aucune conséquence n’est prévue pour les unités qui n’ont pas su identifier un donneur. En collaboration avec la Société canadienne du sang, nous avons examiné les mécanismes que nous pourrions mettre en place en tentant de comprendre les changements systémiques qui nous aideraient à mieux identifier ces donneurs. Si nous pouvions passer de 800 à 2 000 donneurs par année, nous renforcerions grandement notre capacité de greffe d’organes.
Nos travaux avec la Société canadienne du sang nous permettent de comprendre sous divers angles les principaux éléments qui nous empêchent d’identifier les donneurs et nous font manquer des occasions. Commençons par utiliser tous les organes à notre disposition. La Dre West a parlé de ces dispositifs qui nous permettent de conserver un organe qui aurait normalement été jeté aux ordures et de le réparer, d’y effectuer des interventions chirurgicales et de le manipuler afin qu’il puisse sauver une vie. Nous envisageons toutes les possibilités qui permettraient d’accroître les dons et nous voulons cerner les problèmes du système afin de les régler et de trouver davantage de donneurs.
Merci.
Docteur Kneteman, pouvez-vous nous en dire davantage sur le concept de signalement obligatoire des donneurs potentiels?
Certaines provinces canadiennes ont maintenant un système de signalement obligatoire des donneurs potentiels. Que ce soit une personne ayant subi un traumatisme grave au cerveau ou un AVC ou une personne qui, pour diverses raisons, est à l'article de la mort ou est déjà décédée, la loi oblige les médecins en soins intensifs ou les urgentologues qui en sont responsables à signaler ce donneur potentiel à l'organisme de dons d'organes — Trillium, en Ontario, ou BC Transplant, en Colombie-Britannique — afin que ses organes puissent servir. Si toutes les conditions sont réunies, les médecins auront une discussion avec la famille. Malheureusement, de telles mesures ne sont pas prises dans toutes les provinces canadiennes.
Merci.
Vous avez également parlé de partenariats patients, familles et chercheurs. Comment pouvons-nous établir de tels partenariats?
Je fais allusion aux partenariats patients, familles et chercheurs dans les régions rurales et éloignées. Comment pouvons-nous établir ces partenariats de recherche dans un plus grand nombre de provinces? En Saskatchewan et au Manitoba, les chiffres sont très faibles.
Je ne veux pas pointer du doigt des provinces en particulier, mais il faut reconnaître que le niveau d’engagement, de financement et d’élaboration des mécanismes qui s’avèrent efficaces varie énormément. Encore une fois, il faut une approche pancanadienne — une approche fédérale ou nationale — qui nous permettrait de savoir qui traîne de l'arrière et qui peut nous aider, de manière à fournir aux provinces l’aide dont elles ont besoin pour surmonter les obstacles qui les empêchent de mettre en œuvre ces mécanismes. Soyons réalistes; personne n’a le mandat d’examiner la situation à l’échelle du pays, de cerner les lacunes des provinces et de proposer des solutions. Nous devons affecter quelqu’un à cette tâche et lui fournir les fonds nécessaires pour qu’elle puisse l’accomplir.
Pour ce qui est des partenariats patients-chercheurs, une des choses que notre réseau a réussi à faire, c'est de trouver des façons de faire participer activement les patients et les familles à nos études — pas en tant que sujets d’étude, mais en tant que coéquipiers qui contribuent à la conception et à l’évaluation de nos études et à l’établissement des priorités de recherche. Ils participent aux examens par les pairs.
Pour nous, les patients et les familles ont une expérience inestimable. Lori nous a parlé de son expérience du processus de don d'organes. Nous comptons un certain nombre de familles de donneurs décédés qui éclairent nos recherches et nous aident à poser les bonnes questions, à mobiliser les familles de la bonne façon et à concevoir la recherche d'une façon qu'elle ait une incidence positive sur les patients et les familles et qu'elle intègre leurs préoccupations.
Merci.
J'ai une autre question qui s'adresse à tous.
Les membres des équipes médicales chargées des donneurs doivent-ils suivre une formation particulière?
Il faut posséder de nombreuses compétences essentielles, et je crois que cette formation est en cours d'élaboration au pays. Les mécanismes de formation sont loin d'être parfaits, mais nous sommes sur la bonne voie.
Certains médecins qui interviennent auprès des donneurs se sont rendus dans d'autres pays pour voir comment leurs systèmes fonctionnent. Ils choisissent habituellement un pays dont le système est très efficace, notamment l'Espagne et les États-Unis, et s'intéressent particulièrement aux organismes d'obtention d'organes américains, qui obtiennent de très bons résultats et qui méritent notre attention.
C'est un domaine dans lequel il est important de fournir un soutien aux personnes qui s'y intéressent. Nous avons encore bien des croûtes à manger avant d'atteindre la perfection à cet égard, également.
Le temps est écoulé. Merci beaucoup.
Passons maintenant à la période de questions. Chacun dispose de cinq minutes, et nous commençons par M. Aboultaif.
Merci beaucoup.
Et merci à vous, monsieur le président. C'est bon de voir autant de visages familiers.
Docteur Kneteman, permettez-moi d'abord de vous remercier personnellement, vous et votre équipe médicale, de tout ce que vous avez fait pour ma famille. Pour ceux qui ne le savent pas, mon fils Tyler a eu trois greffes du foie. Je lui ai fait don d'une partie du mien, et le reste provient de donneurs décédés. Le Dr Kneteman a dirigé l'équipe chirurgicale qui s'est occupée de mon fils, et je leur serai éternellement reconnaissant. Merci.
Comme vous le savez probablement déjà, j'ai présenté en 2016 le projet de loi C-223, qui visait à créer un registre national des donneurs d'organes. Malheureusement, il a été rejeté en deuxième lecture à la Chambre des Communes, par le parti au pouvoir, en raison d'une partisanerie bien inutile. Je tiens à mentionner que le président avait appuyé mon projet de loi contre la volonté du gouvernement. Je vous en remercie.
Je suis ravi que le Comité décide enfin d'examiner cet important sujet qui me tient à coeur et auquel je pense souvent, vu mon expérience personnelle, car le don d'organes a permis à ma famille et à moi-même de mettre un terme à la douleur dans laquelle nous avons vécu pendant près de 20 ans. Nous remercions du fond du coeur les équipes médicales et les familles des donneurs. Nous ne savons toujours pas qui ils sont. Ils avaient pris une décision et nous ont fourni deux possibilités de greffe, en plus de celle que nous avions créée nous-mêmes.
Nous savons qu'environ 260 Canadiens sont décédés en 2016 faute d'organes. Nous savons également qu'environ 4 492 Canadiens sont sur la liste d'attente, et que l'attente peut durer jusqu'à quatre ans. J'ai entendu les histoires des attentes pour un rein qui se sont prolongées pendant huit ans, voire même dix ans, soit dix ans sans aucune qualité de vie. Nous savons à quel point cela est improductif pour le patient, sa famille et la société en général.
Il va sans dire que nous devons adopter une approche mieux coordonnée entre les provinces et lancer une campagne de financement nationale et un programme connexe, qui prendrait la forme d'un registre.
J'aimerais d'abord poser ma question au Dr Kneteman, et vous pourrez tous ajouter un commentaire par la suite.
Premièrement, savez-vous combien d'organes de donneurs décédés nous n'avons pas la possibilité d'utiliser? Selon cette réponse, croyez-vous qu'il faudrait un registre national des donneurs d'organes qui lierait toutes les provinces et qui, sans dire « obligerait », inciterait tous les intervenants à agir et à travailler ensemble de façon responsable?
Docteur Kneteman, j'apprécierais que vous répondiez en premier à mes questions. Merci.
Je dirais que dans la situation actuelle, lorsque la famille accepte le don, le système de don et de transplantation fera tout en son pouvoir pour utiliser tous les organes viables. Dans de nombreux cas, l’organe peut être endommagé, soit prématurément par la maladie, soit à cause d'un événement qui s’est produit peu de temps avant le décès; dans ce cas, il n’est plus viable. Par conséquent, il est impossible de récupérer tous les organes de tous les donneurs, mais nous faisons notre possible. Si un organe ne trouve pas preneur dans la province de l’Alberta, par exemple pour défaut de compatibilité HLA, nous allons tenter de trouver un receveur compatible en Colombie-Britannique ou dans une autre province. Nous faisons des efforts, et si nous ne trouvons pas de receveurs compatibles au Canada, nous communiquons avec les États-Unis pour voir s’il y a compatibilité. Nous faisons tout en notre pouvoir pour réduire au minimum les pertes.
Mais le plus gros problème se situe en amont... En fait, il arrive trop souvent que le donneur potentiel n'est pas reconnu ou que, s'il est reconnu, son cas n'est pas transmis à l'organisme d'obtention d'organes en vue d'une discussion avec la famille. Je crois que c'est à cette étape que nous perdons de nombreuses occasions de transplantation.
J'abonde dans le même sens.
D'après le rapport rédigé en 2014, un candidat sur six devient donneur. Il y a évidemment un écart à combler, et diverses raisons expliquent cet écart.
Comme nous l'avons déjà mentionné, un refus de la famille peut bloquer le processus, et la situation varie d'une province à l'autre. Cela s'élève à près de 50 % dans la province du Manitoba.
Quant à ce que nous pouvons faire à l'échelle nationale, vu les compétences provinciales et fédérales, je crois que nous disposons déjà des bons éléments. Je crois que ces ressources ont simplement besoin d'être soutenues davantage et améliorées. La Société canadienne du sang pourrait élaborer la politique nationale et se charger de la coordination entre les divers organismes provinciaux afin que tout un chacun dispose du soutien dont il a besoin et que nous puissions renforcer la capacité d'affectation et de partage entre les provinces. L'organisme dispose déjà des ressources et des programmes. Nous devons simplement nous assurer que ceux-ci sont viables et bien soutenus et qu'une organisation de recherche nationale et indépendante soit mise sur pied pour que nous puissions bénéficier d'outils novateurs et de nouvelles technologies qui renforceront notre système de dons d'organes et amélioreront les résultats à long terme pour les receveurs.
Le problème — et je crois que le Dr Kneteman et la Dre West l'ont mentionné eux aussi —, c'est que les systèmes actuels ne sont pas viables et qu'ils ne sont pas assortis d'une stratégie à long terme. Je crois que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle à cet égard, et c'est un leadership qu'il doit exercer pour permettre à la structure nationale de recherche que nous avons créée de perdurer et à la Société canadienne du sang de continuer d'être un chef de file et de rassembler les provinces.
Merci beaucoup.
Je m'excuse à l'avance si certaines de mes questions semblent simplistes ou naïves. Je suis un remplaçant et je n'ai pas participé à la première partie de l'examen. J'aurais bien aimé y être, car c'est un sujet absolument fascinant.
J'aimerais obtenir quelques précisions sur certains thèmes afin de mieux comprendre. Par exemple, quel est le rôle du médecin spécialisé en dons, exactement? S'agit-il du chirurgien qui effectue la greffe ou du spécialiste qui détermine si l'organe est sain et peut être utilisé ou qui examine les critères de compatibilité? Que fait le médecin spécialisé en dons exactement?
Nous sommes deux à pouvoir répondre à votre question, mais un médecin spécialisé en dons... Souvent, si un patient de l'unité des soins intensifs peut devenir donneur d'organes, il peut y avoir un conflit, car le médecin des soins intensifs — qui tente de sauver la vie de ce patient — ne peut pas, d'un point de vue éthique, se charger des questions relatives à la gestion de ce patient en tant que donneur d'organes. Il y a ici une ligne à ne pas franchir.
Le spécialiste des soins intensifs qui s’occupe de ce patient doit se retirer et laisser la place à quelqu’un d’autre, c'est-à-dire au spécialiste des dons, qui étudie le dossier et sait quel soutien médical fournir à une personne qui est maintenant décédée au sens de la loi — c'est-à-dire que les critères de la mort cérébrale sont respectés — et qui doit aussi prendre les décisions cliniques qui s’imposent pour préserver les organes destinés à la transplantation. C’est un spécialiste différent.
Peut-être que Norman veut commenter également, mais c'est ce que l’on entend par spécialiste des dons. C'est une distinction très importante à faire dans le cas du cadre du processus durant lequel un patient devient un donneur décédé.
Un spécialiste du don d'organes peut être un membre du personnel infirmier ou un médecin. Nous parlons précisément ici des médecins spécialisés en dons, et, comme la Dre West l'a mentionné, ceux-ci voient une partie de leur salaire —c'est-à-dire une partie de leur financement —affectée à cette responsabilité distincte. La majorité de ces médecins sont des spécialistes en soins intensifs, qui, peut-être un jour par semaine, deviennent des spécialistes du don d'organes.
Lorsqu'ils ne sont pas occupés par les dons, ils peuvent mener des activités de sensibilisation auprès d'autres médecins de l'hôpital. Ils peuvent également participer à l'examen des dossiers médicaux afin d'y repérer des occasions de dons manquées. Ils s'adonnent à ces tâches essentielles au système de dons d'organes, et, si un donneur potentiel est signalé, ce sont eux, comme la Dre West l'a mentionné, qui prendront le relais une fois que le prélèvement d'organes est autorisé. Encore une fois, la personne qui s'est occupée du patient de son vivant est pour ainsi dire en conflit pour ce qui est du don d'organes.
D'après vous, quel serait environ le pourcentage d'hôpitaux canadiens qui comptent un tel spécialiste des dons? Je suppose que cela pourrait être un grand obstacle, car il faut qu'un tel spécialiste soit présent pour que le don d'organes puisse se réaliser, je suppose.
Je crois que tous les hôpitaux du pays ont un tel spécialiste. La question est de savoir si ce spécialiste est financé pour assumer ce rôle dans chaque hôpital.
Ce que l'on recommande, c'est que chaque hôpital ayant une unité de soins intensifs compte un tel spécialiste. C'est le cas en Espagne, qui compte beaucoup plus de spécialistes du don d'organes. Ainsi, lorsqu'un donneur potentiel est signalé, il y a toujours une personne compétente et à l'aise avec le concept qui dirigera le processus.
Il en a été question il n'y a pas très longtemps. Disons qu'un hôpital dispose d'un tel spécialiste; comment les choses se déroulent-elles en temps réel? Si un patient décède et que certains organes pourraient être utilisés, comment communique-t-on avec les receveurs potentiels? J'ai de la difficulté à m'imaginer le processus dans son ensemble.
C'est un processus complexe, et bien des choses se passent en même temps. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons besoin de spécialistes dans ce domaine, et les coordonnateurs des dons d'organes, qui nous aident avec bon nombre de ces aspects, nous appuient.
En fait, le signalement à l'organisme d'obtention d'organes est habituellement reçu par un coordonnateur des dons d'organes, qui communique avec les divers intervenants du système. Il faut d'abord savoir si le donneur potentiel est sur le point d'être déclaré mort ou s'il s'agit d'un don potentiel après mort cardiaque. Ce sont deux situations différentes.
Il peut ensuite communiquer avec les équipes de transplantation du receveur potentiel, les médecins et les chirurgiens, qui détermineront si l'organe convient à la greffe. Si c'est le cas, il faut ensuite chercher dans la liste d'attente du système la personne la plus compatible ou celle qui se trouve en tête de liste.
Ensuite, il faut organiser le prélèvement des organes du donneur et le transport de ces organes à destination des centres où les greffes auront lieu, centres qui peuvent être éparpillés un peu partout au pays.
Il y a énormément de choses à coordonner. Par contre, tous ces éléments sont extrêmement importants, et c'est pourquoi le système doit être très efficace.
Je suis désolé, mais votre temps est écoulé. Vos questions et les réponses étaient excellentes, mais vous n'avez plus de temps.
Nous devons maintenant passer à M. Lobb.
Merci beaucoup.
J'ai peut-être manqué cette information, mais combien y a-t-il de dons d'organes par année au Canada?
Combien y a-t-il de dons au total en une année? L'année dernière, il y a eu environ 800 donneurs décédés et un peu plus de 500 donneurs vivants.
En effet.
Alors j'ai une autre question. J'aimerais connaître votre point de vue éthique. Est-il éthique ou non d'accorder un crédit d'impôt ou de verser un montant aux personnes qui feront don de leurs organes après leur décès ou qui l'autorisent sur leur... Est-ce que c'est éthique? Je ne le sais pas.
Cela fait l'objet de grands débats dans le milieu des greffes à l'échelle mondiale. À quoi servent les mesures incitatives? Sont-elles vraiment contraires à l'éthique? Peut-on les voir d'une autre façon? Peut-on envisager des mesures dissuasives au lieu de mesures incitatives? C'est très compliqué. C'est extrêmement compliqué, et c'est pourquoi il est impossible de fournir une réponse simple à votre question sur le caractère éthique de la chose.
Par contre, nous pouvons faire beaucoup de choses pour éliminer les obstacles à la transplantation. Est-il éthique de demander à un donneur vivant de payer sa propre intervention chirurgicale, dans le cadre de ce système, de façon que le système n'ait pas à payer les milliers de dollars? Il y a de nombreux éléments qui entrent en ligne de compte, tout au long du processus qui exige une greffe sur un receveur.
Voulez-vous ajouter quelque chose?
Rémunérer une personne qui accepte de donner un rein est, à mon sens, étant donné notre système, non éthique et non fondé, et je crois qu'aucun programme de transplantation au Canada agirait de la sorte.
Cependant, comme la Dre West l’a mentionné, il y a des zones grises dans de nombreuses autres situations. Qu’arrive-t-il si le donneur potentiel, qui serait par exemple un membre de la famille, demeure aux États-Unis et doit traverser la frontière, prendre congé de son travail, engager des frais et louer un appartement dans la région d’Edmonton pendant le processus de dons d’organes? Il y a beaucoup d’éléments dissuasifs s’il faut payer de sa poche. Dans de telles circonstances, je crois que l’on essaie de plus en plus de trouver des solutions, et chaque province utilise différents mécanismes pour indemniser le donneur potentiel de ce type de frais.
Je n'ai jamais eu à faire un tel choix, et j'espère que je n'aurai jamais à le faire, mais je m'imagine quelqu'un dire: « Le pauvre Jimmy a eu un accident de voiture, et nous devons prendre une décision. Si l'on nous offre 10 000 $ pour payer ses frais funéraires, eh bien allons-y. » Peut-être qu'ils n'y avaient pas pensé auparavant. Je ne sais pas. Je suis convaincu que certaines personnes auront le souffle coupé par cette idée.
À certains endroits, certainement aux États-Unis, un tel montant est versé pour couvrir les frais funéraires, mais encore là, c'est une question de perspective. À la base, le fait de payer un organe en argent comptant est contraire à l'éthique.
Oui, et j'estime que votre exemple de don de rein illustrait parfaitement une situation non éthique.
Il y a aussi des questions non financières, comme le rang sur la liste d'attente. En Israël, si vous faites don d'un organe, le membre de votre famille sur la liste d'attente gagne quelques rangs, et cela ouvre encore une autre perspective.
Vous avez parlé de la recherche, et cela est aussi indispensable. En 2015, quelques collègues et moi-même avons travaillé avec SLA Canada et la ministre de l'époque; l'organisme avait droit à un financement pluriannuel pour construire quelque chose. Je crois qu'il a eu pendant sept ans un financement continu qui lui a permis de construire quelque chose de concret.
Je crois qu'un tel financement serait approprié en ce moment. Je ne veux pas avancer de chiffres, mais le Fonds canadien de recherche sur le cerveau bénéficie d'un financement de contrepartie, et il semble que le gouvernement du Canada pourrait de la même façon travailler avec divers organismes afin de rassembler les fonds et de se donner des objectifs communs. Cela pourrait être le résultat à atteindre.
Cela contribuerait énormément à la cause. Comme la Dre West et moi-même l’avons déjà mentionné, nous avons beaucoup de mécanismes en place pour bien faire notre travail, mais, actuellement, au sein de la Société canadienne du sang, par exemple, le service qui en est responsable doit présenter une demande écrite à la conférence des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux, tous les trois ans, pour obtenir du financement. Le montant de ce financement et le moment où il sera éventuellement versé sont toujours incertains, et cela complique beaucoup les activités pour un organisme national ayant une responsabilité aussi importante. On dirait que l’on est toujours les derniers à recevoir du financement, durant l'année, on cherche des façons d’obtenir encore du financement au lieu de se concentrer sur le travail à faire.
Je suis convaincu que SLA Canada serait ravi de vous faire part de sa propre expérience, mais mon temps est écoulé.
La stratégie énoncée dans vos documents propose exactement ces mesures. Votre soutien nous serait grandement utile.
Oui, ce sera en français.
Merci.
[Français]
D'abord, je vous remercie beaucoup d'être ici. C'est extrêmement intéressant.
Madame Blackstock, votre témoignage est plus qu'intéressant et plus que bienvenu. J'ai été très touché par votre témoignage.
Nous avons commencé à examiner la question du don et de la transplantation d'organes. Je ne veux pas être négatif, mais j'ai une remarque à faire.
J'aimerais savoir ce qui vous tient éveillés la nuit. Vous êtes des professionnels et vous travaillez dans votre domaine depuis longtemps. Je remarque que le fait de travailler en vase clos est un problème. Les provinces et les organismes travaillent chacun de leur coté. D'après les présentations, il y a une multitudes d'organismes. Or je constate de l'inefficacité dans les résultats.
Moi, je me fonde sur les résultats. Si un gestionnaire regardait ces résultats sur une longue période, il se demanderait si on a fait des avancées importantes. Les pourcentages sont importants parce qu'il n'y a pas beaucoup de donneurs. Au Québec, on parle de 173 donneurs. Un, c'est toujours mieux zéro, mais s'il s'en ajoute quelques-uns, le pourcentage augmentera énormément.
La Société canadienne du sang est responsable d'assurer un leadership au Canada. J'ai déjà rencontré des gens de cet organisme et j'ai hâte de les rencontrer à nouveau. Ce leadership est-il exercé relativement à la sensibilisation du public? La Société canadienne du sang n'a pas fait de sensibilisation auprès du public depuis longtemps. Pourtant, cela fait partie de ses responsabilités.
Comment voyez-vous cela? Quel est le déclencheur?
J'ai déjà pris deux minutes pour vous poser cette question très large, mais je ne dispose que de cinq minutes. N'importe quel témoin peut répondre.
[Traduction]
J'aimerais avant tout m'excuser. Il m'a fallu quelques minutes avant d'obtenir la traduction en anglais, donc malheureusement, j'ai manqué la question.
[Français]
Je peux répondre.
Le fait de voir tous les organismes qui sont ici travailler ensemble me donne de l'espoir. C'est récent. Quand le Programme national de recherche en transplantation du Canada a été créé, c'était la première fois qu'on réunissait les chercheurs en don d'organes et ceux qui travaillaient en transplantation. D'habitude, ce sont deux domaines distincts, mais nous avons réalisé que c'est en travaillant ensemble que nous pouvions réaliser des avancées.
Le document que nous vous avons transmis énumère tous les partenaires que nous mettons ensemble, parce que la transplantation touche beaucoup de domaines. Elle touche la Fondation canadienne du rein et la Fondation canadienne du foie. Vraiment. ce n'est qu'en travaillant ensemble que nous pourrons améliorer la situation. La Société canadienne du sang est un de nos plus importants partenaires. C'est en travaillant ensemble que nous pourrons leur donner...
C'est reconnu qu'on va plus loin en travaillant ensemble.
Vous êtes là, on est ensemble et on se parle. Par contre, où sont le leadership et les résultats qui en découlent, outre le fait de se réunir et de faire des rapports? Selon la présentation de M. Kneteman, plusieurs rapports ont été produits au cours des années. À part faire ces rapports, quelles mesures a-t-on prises?
Vous dites que vous avez besoin de fonds de façon continuelle, mais comment peut-on arriver à 200, à 800 ou à 1 000 dons d'organes? Comment peut-on augmenter la courbe de croissance des dons d'organes et de vies sauvées? Comment peut-on diminuer la liste d'attente et le nombre des personnes qui meurent chaque année en attendant un don d'organe? Où sont ces résultats?
Nous serions heureux de vous parler de nos résultats et de toutes les avancées que nous avons faites au cours des cinq dernières années. Il y a aussi les nouvelles technologies qui, présentement et non dans l'avenir, changent la façon dont on pratique la transplantation au Canada.
Notre objectif est d'éliminer, d'ici 10 ans, le temps d'attente pour une nouvelle greffe. C'est vraiment transformé.
[Traduction]
J'ai en effet présenté des diapositives qui illustrent le fait que, au cours de la dernière décennie, nous sommes passés d'un taux statique très décevant de 15 donneurs par million d'habitants à une augmentation au Canada de 50 %. Je pense que nous reconnaissons aussi que, même s'il s'agit d'une réalisation très importante, il y a encore beaucoup à faire.
Ce travail a été réalisé aux échelons fédéral et provincial de même que par tous les différents organismes qui ont joué un rôle. En fait, il s'agit d'une collaboration et d'un travail continus. Par exemple, Ronnie Gavsie, qui est la directrice du Réseau Trillium pour le don de vie en Ontario, siège à notre comité consultatif d'experts sur le don et la greffe d'organes pour la Société canadienne du sang et met à profit son expertise dans sa province pour dire ce qui fonctionne, ce qui est efficace et ce que nous devrions faire.
Les différents systèmes bénéficient d’un appui constant, et nous voudrions que ce soutien soit renforcé et qu’il se poursuive essentiellement, car l’interaction à l’échelle nationale est essentielle. Compte tenu du système de soins de santé et du gouvernement que nous avons au Canada, ce ne sera pas seulement un système national qui gérera le tout. Essentiellement, il s’agit d’une responsabilité provinciale, mais de nombreuses tâches ne pourront simplement pas être effectuées par un organisme provincial, parce qu’elles supposent le partage d’organes à l’échelle du pays, ce qui se produit fréquemment, de même que la mise en place de ce genre de stratégies dans toutes les provinces, plutôt que dans certaines seulement.
[Français]
[Traduction]
Merci.
Docteure West, durant votre déclaration liminaire, vous avez fait allusion à la question du trafic d'organes et du tourisme de transplantation des organes. De façon générale, pouvez-vous nous donner une idée de l'ampleur de la situation.
La portée du trafic d’organes a diminué dernièrement, ce qui, je crois, est un aspect positif. Mais cela demeure un problème. Le trafic d’organes illégal sévit dans plusieurs pays. Cela reste un problème que nous devons régler, mais à tout le moins, il y a une diminution. Cela s'explique en partie parce que nous voyons des progrès à l’égard de nos propres programmes de donneurs décédés et de donneurs vivants. Le programme de dons croisés de rein au Canada a une très grande incidence à cet égard.
Quant à ce que nous devons faire, je suis ravi de partager la question avec le Comité. Nous avons commandé une étude auprès de chercheurs, d’experts juridiques et d’experts en transplantation internationaux afin que ces derniers examinent ce que nous pourrions faire pour combattre le problème de trafic d’organes et de tourisme médical au Canada. L’une des principales recommandations issues de l’étude visait à obliger les médecins à produire des rapports sur leurs patients qui ont subi une transplantation dans un autre pays.
Puis-je vous interrompre un instant? J'essaie de mieux comprendre l'ampleur de la situation au Canada. Avez-vous une idée du nombre de Canadiens qui sont touchés par cette situation?
C'est là le problème. En mettant en oeuvre la production de rapports, nous pourrions avoir une bonne idée de l'ampleur du problème. À l'heure actuelle, il est difficile de savoir combien de patients sortent du pays. En raison du secret professionnel qui lie le médecin et le patient, nous ne pouvons pas obtenir cette information.
Oui. On estime qu'il y en a moins de façon générale. Je ne veux pas diminuer le problème, mais je crois que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard. Je suis heureux de faire part des recommandations au Comité.
Docteure West, j'aimerais avoir une recommandation très claire de votre part. Combien d'argent le gouvernement fédéral doit-il injecter pour maintenir ce programme de recherche?
Pour le moment, la structure du programme est d'environ 40 millions de dollars. Nous avons mis en place une structure qui permettra maintenant de faire descendre les coûts à environ 3 millions de dollars. Pour assurer le maintien du programme, nous devons réellement résumer ce que nous avions lorsque nous l'avons créé, car nous avons maintenant une vision beaucoup plus audacieuse afin de réellement résoudre ces problèmes.
Pour donner un chiffre, je présume qu'il faudrait 60 millions de dollars sur cinq ans pour permettre au programme de durer encore cinq ans.
Docteur Kneteman, vous avez parlé de créer une base de données nationale. Si vous pouviez la créer, à quoi ressemblerait-elle?
Nous avons un certain nombre d'éléments. Le Registre canadien de transplantation est déjà en place, et il s'agit d'un système qui regroupe l'information à cet égard. Tous les différents organismes responsables d'organes — les spécialistes des reins, les spécialistes du foie, entre autres — se sont déjà réunis et ont déterminé quels éléments devraient former les ensembles de données de base pour que l'on puisse suivre la situation de manière efficace. Notre problème, c'est que nous devons financer l'activité — les gens — essentiellement pour obtenir cette information de tous les centres de transplantation et de dons au pays et l'intégrer dans la base de données. À l'heure actuelle, il n'existe pas de financement pour cela. Nous devons aussi rendre cette pratique obligatoire, car autrement, nous ne verrons pas ces données.
Maintenant, cela termine notre série de questions officielle, mais je ne peux m'empêcher de penser que M. Eyolfson doit avoir une question. Si c'est le cas, je demande le consentement unanime pour le laisser poser une question.
Avez-vous une question à poser? Y a-t-il quelque chose d'urgent?
Monsieur le président, j'ajouterais simplement que je sais qu'il est un marathonien. Je veux être le premier à mettre la main sur ses poumons.
J’ai seulement un commentaire à formuler. Je me réjouis que nous ayons maintenant un médecin distinct pour le faire. Je suis urgentologue de formation. J’ai exercé ce métier pendant 20 ans. Il y a un certain nombre d’années, nous avons dû avoir cette conversation, et nous — qui fournissions des soins — étions les seuls à avoir cette conversation avec des familles. C’était une tâche très difficile à assumer. Imaginez que vous êtes en présence d’un jeune âgé de 22 ans qui a été gravement blessé par balle à la tête. Les membres de la famille sont en état de choc. Vous leur annoncez le pire, puis vous dites: « Soit dit en passant, pourrions-nous prélever ses organes? » C’est une situation très inconfortable. Un changement à cet égard est bien accueilli. Par le passé, il est aussi arrivé que nous perdions des donneurs d’organes, car il y avait simplement un manque de coordination selon le moment où ils sont venus durant la nuit et la personne qui était disponible à ce moment-là. Le temps passe et vous vous rendez compte que ce ne sera pas possible. C'était une tragédie chaque fois. J'aimerais donc tous vous remercier de...
Oui, docteure West?
Il ne faut pas non plus oublier que le territoire de notre pays est vaste et que nous ne pouvons pas seulement nous concentrer sur les villes et les régions urbaines où il y a des décès. Les accidents de la route mortels dans les régions éloignées nécessitent une approche particulière. Il faut tenir compte de ces... l'Alberta est un bon exemple. Il ne peut s'agir uniquement d'Edmonton et de Calgary. Nous devons nous pencher sur Red Deer et Lloydminster. Je crois que ce sont des endroits où la pensée créative peut contribuer à la façon d'aborder la question.
Absolument. J'ai travaillé dans une ambulance aérienne pendant 13 ans. C'était dans le cadre d'un programme d'aéronefs à voilure fixe, et nous procédions à des évacuations médicales dont le vol à l'endroit où il fallait deux heures pour s'y rendre en avion. Nous parlons de régions très éloignées. Vous avez raison. Dans certains de ces cas, il s'agissait de donneurs d'organes potentiels, et je pense que nous devons nous assurer que ce n'est pas... Comme je dis, il ne doit pas y avoir de donneurs d'organes uniquement dans les grandes villes, car ils sont déjà suffisamment rares; nous ne voulons pas perdre de donneurs potentiels.
Je vous remercie tous de votre contribution à cet égard.
Merci beaucoup. Je dis souvent que nous avons les meilleurs témoins et les meilleurs experts de tous les comités au Parlement. Vous renforcez assurément ces propos aujourd'hui. Vous nous avez donné beaucoup de matière avec laquelle travailler et à laquelle réfléchir.
Je veux remercier M. Aboultaif de nous avoir raconté l'histoire de sa famille, car il y a 338 députés au Parlement, et nous ne sommes que des humains. Nous vivons la même chose que tout le monde. Les gens ont tendance à l'oublier parfois, mais nous sommes humains, et c'était utile d'entendre cela.
Je vous remercie infiniment. Nous allons beaucoup réfléchir à cela. Nous allons donner les instructions relatives à la rédaction, mais je pense que nous devrions tous réfléchir à cela et en parler à l'occasion d'une autre séance et tenter de changer les choses, si nous le pouvons, dans notre rapport.
Merci à vous tous de vos commentaires.
J'ai déjà dit que je serais ravie qu'on me consulte de nouveau, si cela est utile au Comité. Nous savons que ces questions sont délicates et complexes.
Vous avez dit plus tôt — et je l'ai écrit — que c'est un paysage complexe. Mais il s'agit d'une des questions les plus simples lorsque vient le temps de trouver une solution. Vous savez, nous parlons de toutes sortes de choses dans ce comité — la crise des opioïdes, le stress post-traumatique— et nous ne savons réellement pas quoi faire. Toutefois, si nous pouvons accroître la sensibilisation du public et des professionnels et obtenir un peu de financement, cela sauvera des vies. Il s'agit donc de la situation la plus simple, je crois.
Quoi qu'il en soit, merci beaucoup.
Nous allons maintenant prendre une courte pause avant de reprendre avec la prochaine séance. Nous allons prendre une pause de 15 minutes.
La séance est levée.
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