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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 006 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 23 novembre 2020

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

[Français]

     Bonjour à tous.

[Traduction]

    Bienvenue à la sixième séance du Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 14 octobre 2020, le Comité se réunit aujourd'hui pour examiner les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur les opérations des Forces armées canadiennes.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons M. Christian Leuprecht, professeur au Collège militaire royal du Canada, ainsi que M. Conrad Sauvé, président et chef de la direction, et M. Jean-Philippe Tizi, chef des opérations canadiennes, tous deux de la Croix-Rouge canadienne.
    Nous avons aussi un témoin de Rome, en Italie. M. Amir Abdulla, directeur exécutif adjoint du Programme alimentaire mondial des Nations unies, sera avec nous pendant la première heure, si nous arrivons à régler les problèmes techniques. Il se joindra alors à nous.
    Nous allons d'abord entendre les déclarations liminaires. Monsieur Leuprecht, pourriez-vous commencer, s'il vous plaît?

[Français]

    Je vais intervenir en anglais, mais n'hésitez pas à poser vos questions dans n'importe laquelle des deux langues officielles.

[Traduction]

    Mon témoignage s'inspire d'un article que j'ai corédigé récemment avec Peter Kasurak et qui portait sur les opérations nationales des Forces armées canadiennes. Il a été publié par le Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale.
    La pandémie a de lourdes conséquences pour les Forces armées canadiennes, les FAC. Les FAC n'avaient pas seulement un plan, elles ont pu le mettre en place...

[Français]

    Madame la présidente, j'aimerais invoquer le Règlement.
    Il y a un problème concernant l'interprétation. On me dit que l'interprète ne peut pas faire son travail convenablement.
    Voulez-vous que je m'arrête quelques instants?

[Traduction]

    Oui, bien sûr.
    Je pense que nous allons commencer par les témoins de la Croix-Rouge, et revenir à vous ensuite, monsieur Leuprecht, lorsqu'ils auront terminé.
    Est-ce M. Sauvé ou M. Tizi qui présente la déclaration liminaire aujourd'hui?

[Français]

    Madame la présidente, je vais faire la présentation d'ouverture.
    Je vous remercie, car c'est un grand plaisir pour moi de m'adresser au Comité, ce matin. Je suis heureux de vous parler au nom des quelque 5 000 membres du personnel de la Croix-Rouge, dont 2 000 bénévoles qui participent sans relâche au soutien et aux interventions de la Croix-Rouge concernant la COVID-19, partout au pays.
    Le travail que nous avons accompli avec les gouvernements fédéral et provinciaux, ainsi qu'avec les communautés des Premières Nations, a été un moment de partenariat très important pour nous.

[Traduction]

    Je tiens à profiter de l'occasion pour saluer le travail incroyable des membres des Forces armées canadiennes avec qui nous avons eu le grand privilège de travailler à maintes reprises au cours de la dernière année, notamment pour rapatrier les voyageurs canadiens et pour augmenter la capacité de prestation des soins dans les centres d'hébergement de longue durée. Nous travaillons avec les Forces armées canadiennes depuis fort longtemps déjà.
(1115)

[Français]

    Pour bien situer l'intervention de la Croix-Rouge, j'aimerais vous donner un peu de contexte. Il y a deux aspects importants qui nous amènent à intervenir dans le cadre de la COVID-19. Tout d'abord, nous avons développé, grâce au soutien du gouvernement fédéral, une capacité à intervenir dans des enjeux de santé sur le plan international. La Croix-Rouge canadienne a 3 hôpitaux de campagne et 10 cliniques. Nous avons participé, au courant des 10 dernières années, à plus de 55 opérations internationales, incluant la gestion de centres de choléra et de centres d'Ebola. Cela constitue une partie importante de notre expertise, dont nous avons tiré profit dans ces opérations.
    Ainsi, d'une part, nous sommes intervenus à l'international, et nous avons une expertise en maladies infectieuses. D'autre part, au cours des dix dernières années, nous avons augmenté nos interventions, au Canada, en soutien aux municipalités et aux provinces. À plus grande échelle, nous sommes intervenus dans les situations d'urgence nationale, que ce soit les feux de forêt, les inondations, Fort McMurray, entre autres. Nous sommes présents partout au pays et nous sommes intervenus avec ces deux capacités.

[Traduction]

     Madame la présidente, j'en parle parce qu'il s'agit des compétences dont nous disposions, et j'ajouterais que la Croix-Rouge canadienne forme chaque année plus d'un million de Canadiens en premiers soins. Ce sont donc les compétences que nous étions en mesure de fournir.
    Très vite, l'Agence de la santé publique et le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement ont fait appel à nous pour leur prêter main-forte dans le rapatriement des Canadiens à la base militaire de Trenton. Les FAC jouaient un rôle très important. Nous avons travaillé de concert avec elles sur les bases pour fournir le soutien nécessaire. Nous avons aussi déployé une clinique de santé mobile à ce moment, et nous avons déployé du personnel pour aider le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement au Japon à s'occuper des Canadiens qui étaient hospitalisés dans ce pays et qui avaient besoin de soutien social.
    Dans les mois qui ont suivi, nous avons déployé toutes les ressources de la Croix-Rouge pour prêter main-forte ici, dans ce qui est la plus importante intervention nationale de notre histoire.
    Je vais vous en donner quelques points saillants et, naturellement, je pourrai vous en dire plus pendant la période des questions.
     Nous avons ensuite effectué le même travail qu'à la base de Trenton dans différents aéroports au pays, et nous sommes venus en aide à plus de 3 000 Canadiens qui étaient isolés, notamment dans cinq sites actifs.
    Nous avons mis en place un centre de soutien aux opérations virtuel pour les Premières Nations, grâce à l'aide du gouvernement fédéral, et avons aidé plus de 244 communautés autochtones en les conseillant sur les mesures d'urgence et de santé à mettre en place. Nous avons offert ces services en anglais, en français et dans cinq dialectes autochtones.
    À Toronto, nous avons livré plus de 40 000 paniers d'épicerie à des personnes âgées isolées.
    Un des éléments les plus importants, bien sûr, concernait la formation pour contrôler l'épidémie. Nous avons prêté main-forte au Québec dans plus de 157 établissements de soins de longue durée, en travaillant avec le gouvernement du Québec pour déployer des experts dans le contrôle des épidémies. Nous allons y revenir souvent, car c'était l'un des aspects les plus importants du travail à effectuer pour aider les établissements à stabiliser la situation.
    Nous avons également formé plus de 10 000 employés du gouvernement du Québec dans le contrôle des épidémies, et avons aidé et formé plus de 1 000 membres des FAC qui étaient déployés dans ces établissements.
    Par la suite, on nous a demandé de fournir une aide directe pour assurer la transition lors du retrait des militaires des centres de soins de longue durée au Québec, ce que nous avons fait. Nous avons recruté et formé plus de 1 000 personnes en six semaines et les avons déployées dans 51 centres. Nous avons réussi à maintenir la capacité dans ces centres, et nous sommes toujours présents dans 12 d'entre eux.
    Actuellement, nous sommes présents dans un centre en Ontario, dans cinq au Manitoba, de même qu'au Nunavut. Nous avons donc réussi à gérer la transition lors du retrait des militaires des centres tout en y maintenant la capacité.
    Au sujet des leçons apprises dans le cadre de cette opération, encore une fois, l'expertise que nous avons acquise sur la scène internationale — dans la gestion des centres de traitement du choléra et de l'Ebola — nous a été essentielle pour y arriver et pour comprendre comment procéder pour fournir une aide pratique et concrète dans des établissements en crise en y déployant nos experts dans le contrôle des épidémies et en travaillant de concert avec le personnel de ces établissements pour stabiliser la situation et prévenir la propagation à l'interne. Cela a été tout à fait essentiel dans nos activités.
    Le deuxième élément important a été la capacité de mobilisation de la Croix-Rouge, comme en témoigne le fait d'avoir réussi à recruter 1 000 personnes supplémentaires en six semaines. Je dois dire que si nous y sommes parvenus, c'est grâce aux nombreux Canadiens hautement compétents dans le domaine des ressources humaines et celui des services qui étaient temporairement sans emploi et disponibles. Nous avons réussi à les mobiliser.
    Toujours au sujet des leçons apprises, l'autre élément, c'est l'importance de la collaboration et de la communication de l'information en temps réel. Encore une fois, nous sommes reconnaissants aux militaires du soutien qu'ils nous ont apporté lorsque nous les avons remplacés dans les centres de soins de longue durée. Les profils déployés nous ont beaucoup aidés à la fois pour le recrutement et la formation.
    En terminant, madame la présidente, nous sommes [Difficultés techniques] capacité, et nous collaborons de nouveau avec l'Agence de la santé publique, la Sécurité publique et les provinces. Nous sommes toujours présents et nous accroissons notre effectif pour offrir le soutien nécessaire en ces temps difficiles. Nous gardons aussi un œil sur le printemps prochain pour nous assurer d'avoir la capacité requise pour intervenir dans d'autres situations, qu'il s'agisse de feux de forêt ou d'inondations. Je pense que nous avons été chanceux pendant toute cette période difficile de ne pas avoir eu à faire face, en plus, à une urgence au pays comme nous en avons connu dans le passé.
    Tout cela montre bien que nous avons besoin de renforcer notre capacité.
(1120)

[Français]

    Madame la présidente, cela conclut ma présentation.
    Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Sauvé.

[Traduction]

    Monsieur Leuprecht, pouvons-nous faire une autre tentative?
    D'accord, si cela convient à l'interprète.
    Elle est prête à essayer. Parlez lentement et clairement.
    Allez-y, monsieur.
    Dans le cadre de l'opération LENTUS, qui désigne les opérations nationales des Forces armées canadiennes, les FAC ont mis en œuvre l'opération Laser, soit leur réponse à la pandémie mondiale. On n'a pas beaucoup parlé ou pris conscience du point le plus important à cet égard. Le plus grand atout des forces armées dans toutes les opérations nationales auxquelles elles participent, c'est leur capacité opérationnelle, c'est-à-dire leur capacité de planification et d'exécution, en particulier pour ce qui est des chaînes d'approvisionnement; leurs officiers de la logistique qui savent où s'approvisionner et comment acheminer l'approvisionnement du point A au point B; et leur capacité de gérer le tout, au besoin, en autonomie, sans avoir à compter sur des partenaires ou du matériel provenant de l'extérieur.
     La plupart des autres ministères sont dotés uniquement d'une composante stratégique — les politiques — et tactique — la prestation des services. Ce qui rend les FAC uniques au Canada, c'est la vaste capacité opérationnelle de ses membres bien formés et expérimentés qui permet de lier les composantes stratégique et tactique et de fournir la capacité nécessaire pour passer à l'action en autonomie.
    Cette capacité exceptionnelle permet aux FAC de répondre à des besoins cruciaux, en appuyant l'Agence de la santé publique du Canada dans la gestion des stocks d'entrepôt pour confirmer la quantité d'articles d'équipement de protection personnelle disponibles, où ils se trouvent, et d'optimiser leur distribution par avion partout au pays afin de s'assurer que personne n'en manque, ou en allant prêter main-forte dans 54 centres de soins de longue durée.
    Toutefois, cette capacité comporte aussi un risque moral et elle vient avec un coût pour les FAC, leurs membres et les contribuables. Pour assurer le succès des missions nationales en répondant à diverses demandes urgentes, les FAC doivent s'assurer d'avoir un groupe de spécialistes et de généralistes instruits et bien formés toujours prêts à être déployés, de même que l'équipement nécessaire pour ce genre d'opérations. En ce qui concerne la pandémie, comme le réseau médical des FAC répond aux besoins de ses membres, elles ont dû réduire l'effectif dans leur réseau de la santé pour répondre à la demande de certaines provinces. Les FAC devraient-elles maintenant augmenter leur effectif médical? Sans ressources additionnelles, on s'expose à avoir à faire des compromis douloureux à l'interne.
    Au cours des 10 dernières années, le Canada est devenu plus dépendant des FAC pour répondre aux urgences de plus en plus nombreuses au pays. Le chef d'état-major de la défense a témoigné devant votre comité et mentionné que c'était quasiment devenu la routine maintenant. Il a dit: « Si je ne m'abuse, au cours des trois dernières années, nous avons procédé à des déploiements pour soutenir les provinces dans le cadre d'activités de lutte contre les feux de forêt et de gestion des inondations. Ces situations sont en train de devenir la routine, ce qui n'était pas le cas dans le passé. »
    Des observateurs proches de l'armée s'opposent à une augmentation des déploiements des FAC au pays. En décembre 2019, le commandant de l'Armée canadienne avait une mise en garde à faire à ce sujet, à savoir que si les déploiements deviennent plus importants et fréquents, c'est l'état de préparation de l'armée qui en souffrira. Les dirigeants des FAC souhaitaient que le rôle de combat des forces armées soit préservé. Depuis les années 1950, les FAC ont résisté farouchement à jouer d'autre rôle que celui de combat.
    Au fur et à mesure que les opérations nationales deviennent plus fréquentes, quels en sont les coûts et les avantages réels pour les CAF? Premièrement, j'aimerais souligner que d'assigner les opérations nationales uniquement aux membres de la réserve, par exemple, entraînerait une réaction très négative des réservistes qui ont toujours fait campagne pour être mobilisés au sein des unités de combat. L'opération Laser, la réponse des FAC à la pandémie, est venue accentuer la tendance des provinces et du gouvernement fédéral à dépendre des FAC. Cela s'est fait de manière très inégale. Plus de 1 700 soldats ont été déployés pendant plus de deux mois dans deux provinces, et 22 000 autres ont été mis en attente. Ces 1 700 soldats effectuaient des tâches non traditionnelles et non militaires, des tâches inhabituelles dans le cadre d'une opération LENTUS. Lors des feux de forêt ou des inondations, par exemple, les militaires exécutent des tâches dangereuses qui nécessitent de la logistique et du soutien technique. Or, dans ce cas, un régiment de reconnaissance blindé prenait soin de personnes âgées et s'occupait d'aide sociale.
    Ce ne sont pas des rôles traditionnels pour les militaires. Est-ce là ce que les militaires devraient faire? Les FAC devraient-elles servir de filet de sécurité aux provinces qui subissent un échec cuisant dans leur rôle? Ce déploiement est-il une politique judicieuse?
    Chaque membre des FAC déployé lors de l'opération LENTUS n'est pas disponible pour la mise sur pied de la force, la formation, le recrutement et le soutien aux opérations.
(1125)
     Les premiers rapports des FAC sur l'opération Laser montrent qu'il est absolument nécessaire de remédier aux faiblesses relativement simples de la gestion des soins qu'une meilleure inspection et des mesures correctives plus audacieuses de la part des provinces auraient pu éviter. En effet, le fait que de meilleurs systèmes aient été mis en place ailleurs explique pourquoi les FAC n'ont dû soutenir que 54 centres de soins de longue durée au lieu des 400 qui existent en Ontario et au Québec. Il y avait des milliers de bénévoles prêts à donner un coup de main, mais on a fait appel aux FAC.
    La Loi sur les mesures d'urgence établit la structure de gestion globale de l'intervention fédérale. Les provinces ont la responsabilité première, et tout soutien additionnel offert par le gouvernement fédéral doit être coordonné par le ministre de la Sécurité publique qui, en vertu de la loi, est chargé de la coordination du Plan fédéral d'intervention d'urgence. L'armée n'est censée être appelée que lorsque la demande dépasse la capacité des provinces. Pourtant, les provinces en sont venues à considérer les FAC comme leur premier recours, plutôt que leur dernier. Dans trois cas récents, les provinces ont rédigé et fait approuver des demandes d'assistance avant que leurs propres ressources ne soient épuisées. Terre-Neuve a entièrement démantelé son organisme responsable des mesures d'urgence, ce qui a encore accru sa dépendance vis-à-vis du gouvernement fédéral. Si les forces armées devaient être déployées à l'étranger en cas de crise, il se pourrait bien que ses ressources soient insuffisantes pour répondre à des opérations nationales. Nous avons même eu de la chance cette fois. Imaginez si les FAC avaient été appelées à intervenir dans des feux de forêt ou des inondations en marge de la pandémie, et la rapidité avec laquelle les ressources pourraient être débordées. Par conséquent, le simple fait que les FAC disposent de la capacité nécessaire n'en fait pas pour autant le meilleur fournisseur d'aide d'urgence. Une grande partie des besoins semble concerner des tâches générales pour lesquelles les forces armées sont une source très coûteuse. Trois conclusions s'imposent donc.
     Premièrement, la tendance des provinces à faire, et du gouvernement fédéral à approuver, des demandes d'assistance avant qu'elles aient épuisé leurs ressources est déconcertante. Il s'agit, en fin de compte, d'un problème politique, et non de politique.
    Deuxièmement, l'Aviation royale canadienne doit demeurer l'organisme vers qui on se tourne pour répondre aux besoins en ressources aériennes lors des opérations nationales. Le fait pour le gouvernement fédéral de disposer d'une flotte distincte d'avions en attente serait inefficace et coûteux. Qui gérerait une telle flotte? Seul Transports Canada dispose d'une flotte distincte d'aéronefs à voilure fixe et à voilure tournante. Les Chinook et les Griffon sont destinés à des tâches liées à l'opération LENTUS, mais ce n'est pas leur fonction première dans les FAC. Chaque force opérationnelle interarmées régionale dispose d'une unité d'intervention immédiate qui peut être déployée à grande échelle dans un délai de 24 à 48 heures. Aucune autre organisation dans le pays ne dispose de cette capacité.
    Troisièmement, le fait que les forces armées doivent jouer un rôle lors des grandes catastrophes, comme les inondations de la rivière Rouge en 1997 et la tempête de verglas en 1998, ne fait aucun doute.
    Les FAC sont une force d'intervention de dernier recours. Il n'est pas approprié de les utiliser pour remplacer la capacité et la main-d'œuvre civiles. Lorsqu'il s'agit d'un enjeu de sécurité, oui, on doit avoir recours aux FAC. Toutefois, ce sont les entrepreneurs civils ou la Croix-Rouge qui doivent répondre aux demandes de services. D'autres organismes disposent de tentes et de sacs de sable, et de la capacité voulue pour venir en aide aux centres de soins de longue durée.
     Les FAC ont une responsabilité bien définie dans les opérations nationales. Dans la vision « Protection, Sécurité, Engagement », l'assistance à la suite d'une catastrophe fait partie des huit missions principales des FAC. D'une part, les demandes d'assistance des FAC pour les opérations nationales ont de fortes chances de se poursuivre et d'augmenter. D'autre part, l'analyse soulève trois problèmes à traiter.
    Le premier est de savoir comment remédier au risque moral créé par le fait que le gouvernement fédéral soutient les provinces qui sous-investissent dans leurs capacités d'intervention d'urgence et qui se hâtent ensuite de demander son aide.
     Le deuxième problème est de remédier aux inégalités dans la mise en œuvre du Plan fédéral d'intervention d'urgence. Pour ce faire, il faut accroître l'effectif destiné aux interventions d'urgence, et en améliorer les compétences, dans les autres secteurs du gouvernement fédéral, un problème chronique.
     Le troisième problème est de savoir comment mobiliser la main-d'œuvre générale ou semi-spécialisée en cas d'urgence. Il existe quatre modèles que le Canada pourrait suivre.
     Le premier est de se doter d'un organisme civil de remplacement. Cependant, sans un travail régulier spécialisé pour occuper les périodes d'inactivité de son effectif, un organisme comme la Federal Emergency Management Agency aux États-Unis s'avère plutôt inefficace, imposant, bureaucratique, coûteux et peu agile.
(1130)
    Deuxièmement, le gouvernement fédéral pourrait mobiliser une main-d’œuvre bénévole et qualifiée, mais cette solution soulève une foule de questions juridiques.
    Troisièmement, en prévision d’une éventuelle rareté du soutien des Forces armées canadiennes aux opérations nationales en cas d’engagements de défense internationaux importants ou urgents, le gouvernement fédéral pourrait doter des petites organisations de services d’urgence semblables à celles que nous avons en Australie et en Allemagne d’une réelle capacité opérationnelle.
    Enfin, la meilleure option serait peut-être que le gouvernement fédéral redéfinisse ses priorités et élargisse légèrement et officiellement les Forces armées canadiennes pour appuyer leur rôle national et créer une capacité combinée d’environ 2 000 soldats réguliers et de réserve afin de favoriser l’amélioration des infrastructures dans les communautés éloignées des Premières Nations. Cette force combinée passerait la majeure partie de l’année à assurer la liaison, à planifier et à préparer le déploiement dans la communauté en été, qui pourrait être reporté ou reprogrammé si elle était appelée à intervenir, par exemple, en cas d’inondation, d’incendie, de pandémie ou autre.
    Les Forces armées canadiennes ont déjà assumé ce type de rôle national spécialisé dans les années 1920, 1930 et dans la période d’après-guerre. L’Aviation royale canadienne a été chargée de la cartographie du Canada. Au cours de ce processus, elle a mis des compétences et des avions à la disposition des pilotes de brousse. Ce n’est qu’à deux occasions depuis la Deuxième Guerre mondiale que l’Aviation royale canadienne a redéfini ses priorités pour les grands combats: la guerre de Corée et la guerre en Afghanistan. On peut ainsi inverser la logique qui veut que les opérations nationales perturbent les activités de planification normales des Forces armées canadiennes pour considérer que les tâches de combat réelles constituent un facteur de perturbation plausible, mais peu probable.
    Enfin, certaines personnes pensent que les Forces armées canadiennes ont besoin d’un nouveau service en plus des forces régulières et de réserve, d’un quasi troisième service. Cette option n’est pas recommandable, car elle soulèverait une myriade d’obstacles juridiques et institutionnels.
    Il y a deux choses à retenir. Primo, les Forces armées canadiennes doivent repenser leur position. Depuis des décennies, elles privilégient le combat expéditionnaire, mais elles devraient inverser la logique et donner la priorité aux opérations nationales. Cette démarche aurait également l’avantage de rendre les dépenses des Forces armées canadiennes plus acceptables pour les Canadiens.
    Secundo, les Forces armées canadiennes doivent se préparer à un avenir où la réussite des missions ne dépendra pas de l’aide des alliés. Les ressources alliées peuvent très bien être affectées à d’autres endroits ou à d’autres priorités, mais pour les opérations nationales en particulier, les alliés s’attendront à ce que les Forces armées canadiennes assument leurs propres responsabilités. Pour le Canada, la pandémie est donc une leçon d’autarcie militaire. Il s’avère que l’organisation a beaucoup à apprendre et à réapprendre.
(1135)
    Merci beaucoup, monsieur Leuprecht.
    Monsieur Abdulla, vous avez la parole.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, distingués invités, je suis ici aujourd’hui pour vous parler de l’expérience que le Programme alimentaire mondial a vécue cet été avec les Forces armées canadiennes dans le cadre de la réponse mondiale à la pandémie de COVID-19.
    Au Programme alimentaire mondial, nous sommes très reconnaissants au gouvernement canadien de l’intérêt qu’il porte à la manière dont nous travaillons pour répondre à la COVID-19 de diverses façons. En fait, notre directeur exécutif, David Beasley, s’est entretenu avec votre comité des affaires étrangères et du développement international jeudi dernier au sujet de notre travail humanitaire, donc ceux d’entre vous qui siègent au comité l’auront entendu.
    Pour ceux d’entre vous qui ne connaissent pas le Programme alimentaire mondial, nous sommes la plus grande organisation humanitaire internationale de lutte contre la faim dans le monde. Chaque jour, nous nourrissons environ 100 millions de personnes dans plus de 80 pays. Nous sommes également le chef de file des Nations unies pour la logistique et les télécommunications d’urgence.
    Chaque jour, nous coordonnons le déplacement en moyenne de 5 600 camions, 50 navires océaniques, 92 avions et un réseau de 650 entrepôts et de six grands dépôts d’intervention humanitaire. Tous ces moyens servent à apporter de l’aide aux personnes vivant dans certaines des régions les plus inaccessibles du monde.
    Ce n’est possible que grâce à l’important soutien que nous recevons de la population et du gouvernement du Canada, entre autres. Votre partenariat et votre collaboration ont été d’une importance capitale pour le Programme alimentaire mondial, et maintenant plus que jamais auparavant, en raison de la pandémie de COVID-19. Non seulement le monde est confronté à une crise sanitaire sans précédent, mais nous sommes aussi potentiellement confrontés à une pandémie de famine imminente.
    Je sais que cela peut paraître choquant, mais si vous regardez les principaux chiffres, vous le comprendrez. Chaque nuit, 690 millions de personnes se couchent déjà le ventre vide. Elles souffrent en permanence de l’insécurité alimentaire. Quelque 135 millions de personnes supplémentaires se dirigent vers la famine. Ces personnes sont confrontées à une grave insécurité alimentaire, principalement en raison des conflits et des changements climatiques. Cependant, en raison des répercussions économiques de la COVID-19, 130 millions de personnes supplémentaires pourraient également être réduites à la famine. L’année 2021 reste un immense défi.
    La pandémie menace les progrès durement acquis en matière de développement et de consolidation de la paix au cours des décennies. Sans un soutien international immédiat et coordonné, nous assisterons à une augmentation des troubles civils, à une hausse des migrations et à une aggravation des conflits.
    Je suis vraiment ici pour rendre hommage au Canada et pour le remercier du leadership dont il a fait preuve en appelant à une réponse mondiale à la pandémie. Plus précisément, au début de cette année, le Programme alimentaire mondial a lancé une opération pour offrir des services communs et un soutien à la communauté humanitaire et sanitaire pour l’aider à répondre à la pandémie de COVID-19. Dans le cadre de cette opération, le Programme alimentaire mondial a assuré le transport, le stockage et l’expédition du fret des partenaires — principalement des fournitures médicales — destiné aux pays qui ont besoin d’urgence de matériel médical et d’autres fournitures pour lutter contre la pandémie.
    Nous avons soutenu 389 organisations avec plus de 1 400 vols de passagers, transportant plus de 25 000 passagers vers 68 destinations. Nous avons transporté 85 000 mètres cubes de fret vers 171 pays. Le Programme alimentaire mondial est fier de ce que nous avons réussi à accomplir en tant qu’épine dorsale de la logistique de l’intervention humanitaire mondiale.
    Il est évident que nous ne pourrions pas le faire seuls. Au moment où nous avons commencé tous ces efforts, nous ne disposions pas de suffisamment de moyens aériens pour répondre à la demande mondiale écrasante et croissante de transport de fret, et le secteur de l’aviation commerciale, comme nous le savons tous, avait du mal à y faire face.
(1140)
    Le Programme alimentaire mondial a donc dû trouver un autre moyen de soutenir ses partenaires au milieu de la pandémie. Il s'agissait principalement de l'utilisation des moyens militaires et de la protection civile dans les opérations humanitaires, qui est fondée sur le principe du dernier recours. Cela se produit lorsque trois conditions sont réunies: premièrement, un besoin particulier de capacités ou d'actifs ne peut être satisfait avec les actifs civils disponibles; deuxièmement, les actifs militaires et de protection civile étrangers aideraient à répondre à ce besoin et offriraient des avantages uniques en fait de capacités, de disponibilité et de rapidité; et, troisièmement, les actifs militaires et de protection civile étrangers compléteraient les capacités civiles au lieu de les remplacer.
    Une fois que ces moyens de dernier recours ont été cernés, les Nations unies ont envoyé une demande aux États membres pour que des moyens militaires et de défense civile soient utilisés pour cette opération.
    Je suis heureux de dire que le Canada a été parmi les États membres qui ont répondu à la demande, en offrant le soutien de l'Aviation royale canadienne. Un CC-177 Globemaster et un équipage de plus de 30 personnes ont été déployés au centre du Programme alimentaire mondial au Panama dans le cadre de ce que nous avons appelé l'opération Globe.
    Pendant deux semaines, l'équipe de l'Aviation royale canadienne a travaillé sans relâche aux côtés de l'équipe du Programme alimentaire mondial pour organiser une série de rotations afin de transporter du fret sanitaire du Panama vers le Guatemala, le Honduras, la Barbade, Trinité-et-Tobago et Saint-Vincent-et-les-Grenadines.
    Pendant ces deux semaines, nos équipes ont travaillé côte à côte et 24 heures sur 24, et ont surmonté des changements de dernière minute, ce qui a exigé une flexibilité et une coopération impressionnantes de la part de toutes les personnes concernées.
    Ce ne fut pas une mince affaire. C'était la première fois que de nombreux membres des deux équipes travaillaient à une telle opération. La courbe d'apprentissage a été raide, mais grâce au travail inlassable des personnes sur le terrain, on a jugé que l'opération a été un succès en montrant qu'une action en temps opportun permet d'éviter une escalade rapide des besoins et des conflits.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, distingués invités, alors que la dynamique du monde continue de changer, les catastrophes continuent de frapper et l'espace opérationnel est de plus en plus encombré. C'est dans ces espaces que la compréhension de l'autre est cruciale. C'est ce qui nous permet de coexister et de remplir les mandats qu'on attend de nous et, comme dans le cas de cette opération, même de coopérer et de travailler ensemble à un objectif commun.
    Au nom du Programme alimentaire mondial et de la communauté humanitaire internationale, merci à tous ceux qui ont facilité l'opération Globe, mais un merci particulier à l'équipe de l'Aviation royale canadienne qui s'est déployée au Panama et a travaillé si dur aux côtés de l'équipe du Programme alimentaire mondial. J'espère vraiment que cette expérience a amené les personnes concernées à mieux se comprendre les unes et les autres.
    À long terme, nous savons que les investissements dans la sécurité alimentaire et la résilience des communautés contribuent à des sociétés plus stables et plus prospères. Le Prix Nobel de la paix 2020 qui nous a récemment été décerné est une reconnaissance de ce lien important et crucial entre les conflits et la faim et du rôle essentiel que l'aide alimentaire peut jouer pour soutenir la première étape vers la paix et la stabilité. Il est maintenant temps pour nous tous de nous unir, de travailler ensemble et de soutenir les personnes les plus pauvres du monde, très souvent des femmes et des enfants, qui sont en première ligne.
    Je vous remercie et j'espère pouvoir répondre à toutes vos questions.
    Madame la présidente, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous parler aujourd'hui.
(1145)
    Merci beaucoup, monsieur Abdulla.
    Notre premier intervenant sera M. Dowdall.
    Bonjour, madame la présidente.
    Avant tout, je tiens à remercier nos témoins d'être présents aujourd'hui. J'ai beaucoup apprécié les commentaires de chacun d'entre eux. Mes premières questions s'adressent à M. Leuprecht.
    J'ai bien aimé votre exposé. Vous avez fait beaucoup de commentaires révélateurs qui m'ont donné matière à réflexion sur la façon de procéder.
    Nous avons appris que le Canada avait réduit ses engagements internationaux en raison de la pandémie de COVID, que ce soit pour des raisons de sécurité ou pour aider les centres de soins de longue durée. Nous avons également entendu parler de l'augmentation des exercices militaires en Russie et en Chine, alors que beaucoup de nos troupes sont bloquées ici ou dans leurs casernes.
    J'aimerais vous demander, monsieur Leuprecht, en quoi, selon vous, cette pandémie a-t-elle nui à l'état de préparation actuel du Canada en matière d'interventions internationales?
    Les 22 000 soldats qui étaient en attente pour soutenir l’opération Lentus, et plus particulièrement l’opération Laser, représentent environ un quart de l’ensemble de la force déployable, si l’on exclut les personnes en congé de maladie ou soumises à d’autres contraintes.
    Il s’agit d’un engagement très important en soi. C’est aussi en partie la raison pour laquelle les Forces armées canadiennes ont réduit certains de leurs engagements internationaux, précisément pour pouvoir disposer des membres et des moyens nécessaires si on leur demande de soutenir des opérations nationales.
    La question qui se pose maintenant est celle que j’ai essayé de soulever dans mon exposé concernant le compromis entre ces déploiements nationaux qui font en sorte que ces ressources ne soient pas disponibles, comme vous le soulignez, pour des opérations internationales, ou peut-être un scénario catastrophe dans lequel nous avons des opérations internationales cruciales et urgentes. Cette situation peut coïncider avec une forte demande pour des opérations nationales, ou avec des demandes multiples d’opérations nationales, comme une pandémie combinée à des inondations ou des incendies.
    Le fait que les Forces armées canadiennes aient dû essentiellement cannibaliser leurs propres services médicaux afin de répondre aux problèmes engendrés par la politique provinciale — ce que j’appellerais un échec provincial — soulève des questions très difficiles pour les Forces armées canadiennes, car cela signifie maintenant que les capacités... Si vous aviez dit à quelqu’un des Forces armées canadiennes il y a deux ans qu’il irait dans des centres de soins de longue durée, on vous aurait fait interner. La chose aurait été littéralement inconcevable, mais bien sûr, les Forces armées canadiennes doivent être là pour assurer le succès de la mission du gouvernement du Canada.
    Si vous disposez de ressources constantes, vous devez maintenant avoir des discussions très difficiles sur le type de capacités de soutien que les Forces armées canadiennes doivent déployer pour d’éventuelles opérations nationales. Dieu sait quels autres types d’échecs politiques des gouvernements provinciaux en matière d’infrastructures essentielles nous pourrions devoir affronter, par exemple. Ce sont donc des investissements que les Forces armées canadiennes ne peuvent pas faire dans des opérations internationales, ou dans la défense continentale, en fait.
(1150)
    Je suis tout à fait d’accord, il semble y avoir un manque de préparation aux situations d’urgence au niveau de la gestion, auquel il faut travailler à l’heure actuelle avec les provinces, les municipalités, les comtés, quels qu’ils soient.
    Ma prochaine question s’adresse à M. Sauvé de la Croix-Rouge. J’ai eu l’occasion de le voir en action. Nous avons connu un état d’urgence à l’époque où j’étais maire, et la Croix-Rouge a dû intervenir quand nous avons eu une tornade, je tiens donc à vous remercier pour votre service, et à vous dire combien vous êtes important pour les collectivités locales.
    Est-il temps pour nous de disposer d’un autre type de force de secours nationale permanente? La Croix-Rouge serait-elle en mesure d’assumer ce type de responsabilité?
    Dans le cadre de l’intervention dans les centres de soins de longue durée, avec des ressources appropriées, nous avons remplacé les opérations des Forces armées canadiennes. Au Canada, nous devons envisager une augmentation de nos capacités permanentes pour faire face à ces situations.
    Pour répondre à votre question, absolument, la Croix-Rouge peut jouer un rôle plus important. Nous avons accru cette capacité en raison des catastrophes naturelles auxquelles nous avons été confrontés; et maintenant, la pandémie a ajouté une autre dimension.
    Comme je l’ai dit dans mon introduction, nous sommes bien équipés, tant pour intervenir en cas de pandémie grâce à notre expérience internationale que pour intervenir en cas de crise nationale.
    Un aspect sur lequel nous devons miser est le succès que nous avons obtenu en remplaçant les Forces armées canadiennes dans les centres de soins de longue durée lorsqu’on nous a demandé de le faire, et en rehaussant les capacités, qui sont plutôt des capacités civiles.
    La réponse est donc oui, la Croix-Rouge peut jouer un rôle accru dans la préparation et les interventions.
    Nous savons que vous travaillez aux côtés du ministère de la Défense nationale. Pourriez-vous nous citer quelques éléments qui pourraient être améliorés dans ces circonstances?
    Je pense que nous avons eu une relation très forte avec le ministère de la Défense nationale au fil du temps, chaque fois qu’il survenait quelque chose de très important. Vraiment, l’essentiel est de voir où nous apportons des atouts et où c’est eux qui en apportent. Encore une fois, je pense qu’on a souligné que la capacité logistique de transport des forces armées est l’élément principal. Avec la planification, la logistique est une des choses les plus importantes.
    Ce que nous apportons, c’est la capacité de travailler dans un contexte civil. Bien sûr, nous travaillons avec des civils. Nous travaillons avec des bénévoles. Nous renforçons les capacités locales. Lorsque nous envisageons l’avenir de la préparation, nous savons, pour avoir été engagés à l’échelon municipal, que c’est à ce niveau que les capacités doivent d’abord se trouver, puis se développer. Les municipalités sont les premières à intervenir. Ensuite, lorsque les capacités sont dépassées, ce sont les autorités provinciales qui prennent le relais. Ensuite, nous devons travailler ensemble si la situation est plus importante. Nous devons faire preuve de souplesse dans tous les domaines.
    Profiter du meilleur des deux sur le plan des capacités — je pense que c’est ainsi que nous avons travaillé par le passé.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Monsieur Spengemann, la parole est à vous.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Sauvé, c'est un plaisir de vous revoir ce matin.
    Pouvez-vous nous parler davantage du lien entre la sécurité alimentaire et les crises humanitaires de façon plus large, et la sécurité globale ou régionale au Moyen-Orient ou en Afrique du Nord, par exemple?
    Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?
(1155)
    Quel est le lien entre la sécurité alimentaire et les crises humanitaires, et la sécurité globale ou régionale?
    En ce moment, on ne peut dissocier les enjeux climatiques des crises alimentaires et des conflits. Dans le contexte actuel, ils sont interreliés.
    Pour la Croix-Rouge, le Programme alimentaire mondial des Nations unies est crucial. Le renforcement de la capacité locale des organisations et de la Croix-Rouge sur le terrain et une meilleure réponse mondiale sont essentiels pour répondre à ces grands problèmes qui vont s'aggravant.
    Merci beaucoup, monsieur Sauvé.

[Traduction]

    Monsieur Abdulla, c’est un plaisir de vous avoir avec nous. Merci beaucoup pour votre service, et félicitations à l’équipe du Programme alimentaire mondial d’avoir reçu le Prix Nobel de la Paix 2020.
    Nous avons eu l’occasion de féliciter David Beasley la semaine dernière. Je tiens simplement à vous réitérer mes félicitations.
    Monsieur Abdulla, vous avez été vice-président du Groupe des Nations Unies sur le développement durable. Vous avez accordé une attention particulière aux objectifs de développement durable pour 2030.
    Vous pouvez examiner des cas comme ceux du Yémen, de la Syrie, de la Libye, de l’Afghanistan et de l’Irak, des cas dans lesquels les Nations unies et, à certains égards, le Canada ont participé activement à des initiatives politiques et de consolidation de la paix. Ensuite, vous ajoutez à cela la COVID-19. Vous avez parlé du lien entre le conflit et la faim, exacerbé par la COVID-19. Pourriez-vous prendre un peu de temps juste pour préciser quels sont ces vecteurs et comment nous pourrions les surmonter?
    Merci beaucoup pour vos aimables paroles à propos de ce prix, que nous considérons également comme une forte reconnaissance du multilatéralisme. Nous voyons non seulement à quel point le multilatéralisme importe au Programme alimentaire mondial, mais aussi comment les interventions multilatérales peuvent réellement contribuer à améliorer la situation.
    En ce qui concerne votre question précise, j’estime qu’elle comporte deux parties.
    Tout d’abord, le lien entre le conflit et la faim est bien reconnu dans la Résolution 2417 du Conseil de sécurité des Nations unies, dans laquelle ils sont inextricablement liés. Dans des pays comme ceux que vous venez de mentionner, nous voyons ce lien se manifester tous les jours.
    Que ce soit la faim qui provoque un conflit ou le conflit qui provoque la faim, c’est un cercle vicieux. Si on y ajoute le climat, on se retrouve avec le climat comme moteur du conflit et comme moteur de la faim. Ce cycle se produit.
    Lorsque vous ajoutez le troisième C, la COVID, alors vous avez la COVID en période de conflit et de changements climatiques. Ce cercle et ce cycle deviennent alors si vicieux qu’on essaie simplement d’obtenir.... Ce qu’il faut donc faire, c’est créer des cycles vertueux pour, en quelque sorte, ramener les choses dans l’autre sens.
    Dans un sens, ces cycles vertueux se produisent également par le truchement d’une série de C. Ils se produisent grâce à la collaboration — nous travaillons tous ensemble — et à la coordination, de sorte que la collaboration se fait au mieux de manière à éviter les chevauchements et à réduire les écarts. Pour une organisation financée par des contributions volontaires, le troisième C, qui est celui des contributions, finit par devenir important. Sans contributions financières, nous ne pouvons pas maintenir ce cycle.
    Je pense que les objectifs de développement durable au programme pour 2030 et les objectifs de développement durable pour la COVID ont mis en évidence à quel point les choses sont interdépendantes. Vous pouvez commencer par un, la pauvreté; deux, la faim; trois, la santé; quatre, l’éducation; cinq, le sexe — qui est une question cruciale; six, l’eau, et continuer jusqu’à 17, en passant par 16 en cas de conflit, et ils sont interconnectés. La COVID a mis ces éléments en exergue. Si nous n’en réglons pas un, nous ne les réglerons pas tous.
    Durant la minute qu'il me reste, j'aimerais parler de la fourniture de biens et de services essentiels par des éléments non étatiques dans des États fragiles. Certains de ces éléments se radicalisent, alors que d'autres politisent ces fonctions... Après tout, vous témoignez devant le Comité de la défense. Du point de vue de la sécurité, avez-vous des inquiétudes quant à l'exacerbation des conflits dans ces endroits très précis, où des éléments indésirables finissent par fournir des services de nutrition ou de santé parce que les États en déroute n'en ont essentiellement pas la capacité?
    Je pense que vous avez mis le doigt sur ce qui constitue une menace ou une faiblesse fondamentale. En effet, des acteurs malveillants s'infiltrent dans certaines régions des États en déroute pour combler les lacunes. Il s'agit de lacunes visées par des organisations comme le Programme alimentaire mondial, en collaboration avec des donateurs très neutres comme le Canada — et j'ajouterai que cela arrive même lorsque les conditions sont appropriées... Quoi qu'il en soit, il semblerait que la pression exercée sur les ressources nationales... Je dirais que la quantité d'équipement ou le nombre de soldats ou de membres du personnel susceptibles d'être déployés pour une opération telle que l'opération Globe sont tout de même minimes, mais les retombées concrètes sont très importantes.
    Les gens voient des résultats tangibles. Ils n'ont pas besoin de se joindre à ces éléments malveillants. Ils obtiendront de l'aide auprès de gens qui ont de bonnes intentions.
(1200)
    Merci beaucoup, monsieur. C'est très utile.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Je veux remercier les témoins qui ont fait une allocution. Elles étaient toutes aussi intéressantes les unes que les autres.
    Ma première question s'adresse à M. Leuprecht.
    J'ai lu avec attention votre article intitulé « Defining a role for the Canadian Armed Forces and humanitarian assistance and disaster relief », paru dans le Hill Times du 3 août dernier — je l'ai ici. Dans cet article, vous dites qu'il y a un problème à ce que le gouvernement fédéral doive porter assistance aux provinces, dont les systèmes de santé sont sous-financés.
    J'aimerais vous entendre au sujet de la responsabilité du fédéral dans ce sous-financement. La part du financement de l'État fédéral du système de santé est de plus en plus petite. Les répercussions de ce sous-financement se font particulièrement sentir en temps de pandémie. En plus d'éponger les coûts liés à l'inflation dans le domaine de la santé, les provinces doivent compenser le sous-financement fédéral.
    Au début de la loi, les transferts en santé du gouvernement fédéral étaient de 50 %, mais ils sont maintenant de 22 %. J'aimerais vous entendre là-dessus.

[Traduction]

    En raison de la manière dont le système est conçu, je vais répondre en anglais. On m'a demandé de m'en tenir à une seule langue, alors je vous prie de m'excuser. J'aurai pu répondre en français si le système avait été différent.
    Je crois qu'au printemps, vous avez entendu le premier ministre du Québec demander aux Forces armées canadiennes de rester dans les établissements de soins de longue durée jusqu'en septembre. C'est grâce à la Croix-Rouge, qui a fourni une capacité de remplacement, que les Forces armées canadiennes ont pu aller d'un établissement à l'autre et faire passer l'état d'alerte du rouge au vert.
    À mon avis, cette collaboration avec la Croix-Rouge a montré que le premier ministre provincial s'attendait à des choses qu'il ne convenait peut-être pas de demander aux ressources militaires fédérales. L'idée d'élargir le rôle de l'armée m'inquiète également sur le plan des relations entre les civils et les militaires.
    Le gouvernement fédéral doit s'employer beaucoup plus activement à travailler avec les provinces au chapitre de la prévention et à faire en sorte que les transferts fédéraux ne soient pas nécessairement liés à des dépenses précises. Je pense que la pandémie, les inondations et les feux de forêt nous ont exposés à une lacune importante en ce qui concerne des investissements coordonnés dans les infrastructures essentielles. Selon moi, la crise des soins de longue durée a révélé que nous devons peut-être aussi changer notre conception des infrastructures essentielles. Lorsqu'un premier ministre provincial fait appel à l'armée, tout ce qui a échoué s'inscrit effectivement dans le cadre des infrastructures essentielles.
    Je pense que nous devons dissocier ces deux débats. La péréquation fiscale est un problème politique que les provinces et le gouvernement fédéral doivent régler. Ensuite, il y a un problème d'ordre opérationnel lié à l'intervention tactique et opérationnelle immédiate, puisque ce déploiement précis résulte d'un manque de coordination efficace entre les gouvernements fédéral et provinciaux en vue d'une planification stratégique à moyen terme.

[Français]

     Je veux être clair, et vous me corrigerez si je me trompe, monsieur Leuprecht. Le premier ministre du Canada a mis des militaires en attente pour aider les provinces.
    Ai-je raison de conclure que c'est le gouvernement fédéral qui a offert l'aide des militaires en premier, même s'il n'avait pas les CHSLD en tête?
(1205)

[Traduction]

     L'armée fera tout ce que lui demandera le pouvoir politique. La question est de savoir ce que le gouvernement fédéral peut faire pour éviter que les provinces imposent, par inadvertance, des fardeaux au gouvernement fédéral ou des exigences opérationnelles à l'armée, lorsque ces questions sont mieux gérées à l'échelle provinciale, moyennant une prospective stratégique et une planification à moyen terme.
    Je crois qu'il y a lieu de mieux coordonner les efforts du gouvernement fédéral et des provinces au chapitre de cette planification à moyen terme pour prévoir ces difficultés et les éviter dans le cadre des infrastructures essentielles des soins de longue durée, mais le gouvernement fédéral lui-même doit en faire plus en matière de mesures d'urgence, par exemple, pour ce qui est d'assurer la capacité logistique au sein des ministères.
    Il y a beaucoup de leçons à tirer de cette expérience, mais je ne pense pas qu'il soit bien sage de lier les transferts fiscaux en matière de santé aux défaillances opérationnelles et tactiques immédiates qui surviennent sur le terrain, puisque la gestion et la vérification des établissements de soins de longue durée constituent une fonction qui relève des provinces. Il ne s'agit pas d'établir combien d'argent les gouvernements fédéral et provinciaux jugent approprié pour les transferts et, bien sûr, dans quelles conditions, c'est-à-dire la question de savoir si les transferts sont inconditionnels ou conditionnels.

[Français]

    Logiquement, il ne devrait pas y avoir de conditions, puisque la santé est un champ de compétence provinciale. Si le gouvernement fédéral n'apporte pas sa juste part au financement de la santé, on se retrouve dans une situation comme celle que nous vivons aujourd'hui.
    Plusieurs disent que le Québec était mal pris. Il avait épuisé toutes ses ressources, quand il a demandé l'aide des Forces armées canadiennes.
    N'est-ce pas votre avis aussi?

[Traduction]

    Comme vous le savez, il y a, sauf erreur, 33 transferts, dont la plupart sont inconditionnels, les autres étant conditionnels. Un transfert inconditionnel signifie que c'est la province qui décide comment elle va dépenser ces fonds. À preuve, les Forces armées canadiennes ont été appelées à intervenir dans les établissements de soins de longue durée de deux provinces, mais pas dans ceux des huit autres provinces ni des trois territoires; nous pouvons donc constater que différentes provinces ont pris différentes décisions en ce qui concerne non seulement l'attribution des fonds mis à leur disposition, mais aussi la gestion et la vérification, par exemple, des soins de longue durée.
    Nous pouvons examiner les laboratoires d'expérimentation pour savoir ce qui a bien fonctionné dans certaines provinces et ce qui aurait pu être amélioré dans d'autres provinces. Alors, unissons nos efforts et assurons-nous de comprendre ce qui a échoué sur le plan tactique et opérationnel, au lieu d'essayer de transformer cela en un débat sur la question de savoir combien de fonds supplémentaires le gouvernement fédéral pourrait ou non devoir transférer. Au bout du compte, la façon de dépenser les transferts inconditionnels est un choix qui appartient aux provinces.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Garrison.
    Je voudrais remercier tous nos invités de leurs précieux témoignages devant le Comité aujourd'hui. À l'instar de mes collègues, je tiens à remercier les gens du Programme alimentaire mondial de tout le travail qu'ils ont accompli dans le monde entier et à les féliciter d'avoir reçu le prix Nobel de la paix.
    Les témoignages que nous avons entendus ce matin révèlent clairement un lien entre la faim, les conflits, la crise climatique et la COVID. C'est pourquoi ces observations sont très utiles.
    Ma première question s'adresse à M. Abdulla. Vous avez parlé du troisième C du cycle vertueux de l'intervention, à savoir les contributions, par opposition à l'autre cycle. Je ne vous demande pas de parler des contributions d'un pays en particulier à ce stade-ci, mais y a-t-il eu un appel spécial de fonds et, le cas échéant, quelle a été la réaction générale à cet égard?
    Au début de la réponse mondiale à la pandémie de COVID — et j'utilise, encore une fois, le modèle du cycle vertueux des C —, il y a eu beaucoup de coordination avec le BCAH, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, qui a travaillé en étroite collaboration avec l'OMS. C'est ainsi qu'est né le Plan de réponse humanitaire global, assorti d'un appel correspondant. Bien franchement, les donateurs du monde entier ont fait preuve d'une grande générosité.
    Dans le cas du Programme alimentaire mondial, l'appel comportait deux volets. D'une part, il fallait des services communs et un soutien logistique au nom du système, comme la contribution du Canada, c'est-à-dire non seulement une aide financière, mais aussi un appui non financier de l'Aviation royale canadienne. D'autre part, l'appel concernait l'intensification de la crise alimentaire. Au moment où la COVID battait son plein, nous avions déjà des besoins assez considérables. Pour les pays les plus touchés, nous avons estimé qu'il fallait près de 5 milliards de dollars américains jusqu'au premier trimestre de l'année prochaine, parce que c'est le genre de planification à long terme qui s'impose pour assurer l'approvisionnement alimentaire. La réponse à cet appel a été phénoménale, car nous avons pu recueillir plus de 50 ou 60 % des fonds. Je dois souligner qu'une bonne partie de ces 5 milliards de dollars ne visait pas les besoins supplémentaires. En fait, une grande partie de cet argent a servi à répondre aux besoins du Soudan du Sud, du Yémen et d'autres pays de ce genre.
    Il y aura toujours des lacunes, mais au sein du Programme alimentaire mondial, nous reconnaissons que les donateurs se montrent très généreux au chapitre du financement de la lutte contre les crises alimentaires et la sécurité alimentaire. Ils en sont conscients. C'est très visible, et les contributions sont imminentes. Nous en sommes fort reconnaissants. On nous demande souvent quel est le véritable visage de la faim. C'est celui d'une femme affamée qui se prive de tout pour pouvoir nourrir son enfant affamé. Voilà ce que nous voyons constamment. À notre sens, c'est la raison pour laquelle nous devons plaider pour cette cause comme nous le faisons.
    Nous espérons que le cycle vertueux nous permettra réellement de réduire de plus en plus les besoins. Un des aspects les plus frustrants, c'est lorsqu'on doit sauver les mêmes vies encore et encore. Malheureusement, les conflits et les changements climatiques entrent en ligne de compte. Enfin, nous espérons que la COVID disparaîtra, mais si nous ne nous attaquons pas à ces deux C, c'est-à-dire aux conflits et aux changements climatiques, et si nous nous débarrassons du troisième C...
    À ce sujet, il faut dire que nous considérons certainement le Canada comme le quatrième C du cycle vertueux.
(1210)
    Merci beaucoup de cette généreuse observation.
    Aurez-vous besoin de ressources supplémentaires en matière de coordination et de logistique? Je pense que le monde entier s'apprête à vivre trois ou quatre mois très sombres avant que la distribution des vaccins ne puisse commencer. Y a-t-il d'autres choses que vous demanderiez à des organisations comme les Forces armées canadiennes pour appuyer la logistique et la coordination?
    Selon nous, il se peut que la deuxième ou, à certains endroits, la troisième vague commence à frapper avant l'arrivée des vaccins. Nous n'avons donc pas exclu la probabilité ou l'éventualité d'une nouvelle demande de ressources en matière de défense militaire et civile.
    Pour l'instant, aucune demande n'a été formulée, mais l'équipe qui en serait chargée se penche là-dessus. D'ailleurs, on a récemment tenu une réunion pour examiner la question. Il n'y a pas de demande immédiate, mais à l'heure actuelle, nous ne pouvons pas écarter cette possibilité. Il faudra probablement attendre le premier trimestre de l'année prochaine avant que le vaccin soit mis en circulation. Chose certaine, de nombreuses capacités logistiques seront consacrées à l'acheminement des vaccins, ce qui sera d'une importance cruciale, mais encore faut-il que tout le reste continue de fonctionner.
    Monsieur Benzen, la parole est à vous.
(1215)
     Merci, madame la présidente, et merci à tous les témoins.
    Monsieur Leuprecht, vous avez dit beaucoup de choses très intéressantes dans votre déclaration préliminaire, et j'aimerais revenir sur certaines d'entre elles. De toute évidence, compte tenu de la pandémie et de tous nos autres engagements militaires à l'étranger, comme la lutte contre les feux de forêt et tout le reste, l'Armée canadienne est très sollicitée. Pourtant, il semble que nous n'ayons pas suffisamment de ressources. Vous avez expliqué brièvement que le gouvernement devait augmenter ses dépenses en matière de défense de sorte qu'elles représentent 2 % de son budget, plutôt que 1,3 %.
    Pouvez-vous nous en parler un peu?
    Permettez-moi de vous fournir quelques données sur les récentes opérations.
    De 2010 à 2020, il y a eu 31 opérations nationales, y compris des activités d'aide dans le cadre de 23 opérations. Le nombre et le type de soldats affectés à 29 d'entre elles, ainsi que la durée de 23 d'entre elles, permettent de dégager les tendances suivantes. La fréquence de ces opérations est en hausse, mais la majorité d'entre elles étaient d'envergure relativement modeste: elles ont exigé moins de 100 militaires canadiens, et 16 des 23 opérations pour lesquelles nous disposons des renseignements étaient de durée relativement courte, c'est-à-dire de moins d'une quinzaine de jours. Bien que l'ampleur des opérations ait augmenté récemment, après les années 2000, les inondations ont nécessité l'intervention d'environ 2 500 membres des Forces armées canadiennes, alors que les inondations de la rivière Rouge en 1997 avaient nécessité l'intervention de 8 000 militaires, et la tempête de verglas de 1998 dans l'est du Canada avait exigé 12 000 militaires.
    Le point crucial, c'est le transport aérien, comme nos collègues l'ont évidemment déjà signalé. L'évacuation des habitants d'une localité et le transport aérien de fournitures et d'effectifs sont des fonctions très demandées. Il y a aussi une certaine demande pour des spécialistes, comme des ingénieurs, et une forte demande pour la main-d'œuvre en général. Aussi perturbatrices que soient ces activités, dans l'ensemble, ce sont des opérations qui devraient figurer parmi les capacités des Forces armées canadiennes.
    Comme le chef d'état-major de la défense l'a souligné dans ses observations devant le Comité, les Forces armées canadiennes intègrent désormais ces capacités dans leurs cycles opérationnels d'entraînement et d'intervention en cas d'incident. L'effet perturbateur tient à l'ampleur des opérations et à la nature non conventionnelle des exigences, par exemple, pour les inondations et les feux de forêt, qui font maintenant partie des opérations des Forces armées canadiennes. Toutefois, comme je l'ai signalé, les Forces armées canadiennes n'avaient pas prévu une opération de lutte contre la pandémie de l'ampleur de celle qu'on lui a demandé de mener. L'armée a prouvé qu'elle pouvait accomplir cette tâche, mais elle a aussi montré que, devant la demande constante de ressources, il y a des compromis très difficiles à faire.
    Comme nos collègues l'ont fait remarquer, nous vivons dans un environnement international de sécurité qui nécessitera probablement plus de capacités et de besoins, simplement sur le plan opérationnel. Nous vivons dans un environnement où nos alliés et notre principal allié stratégique, les États-Unis, demandent aux autres alliés de faire plus en matière de défense, et nous devons composer avec une exigence accrue en matière d'opérations nationales.
    Autrefois, les gens disaient toujours que le Canada s'en tirait à bon compte. Pour ma part, je soutiens que le Canada est un allié profitable. Il n'a dépensé que le nécessaire pour la défense. Le problème, c'est que le montant qui était qualifié de strict nécessaire dans le passé ne l'est tout simplement plus maintenant, compte tenu des exigences et des défis auxquels nous faisons face aujourd'hui sur le plan des déploiements à l'échelle nationale, continentale et internationale en matière de paix, de stabilité et de sécurité, ainsi que sur le plan de nos engagements à titre d'alliés.
    Cela signifie manifestement que nous devrions doubler nos dépenses et passer de 20 à 40 milliards de dollars.
    Je tiens à préciser que ce dont le Canada a besoin, ce n'est pas nécessairement d'une plus grosse armée; les gens ont souvent tendance à croire que nous devons faire plus de recrutement. Nous avons déjà des problèmes à ce chapitre. Ce qu'il nous faut, c'est une meilleure armée, c'est-à-dire une armée mieux organisée avec le bon matériel, la bonne formation et les bonnes personnes. Cela a toujours été la force des Forces armées canadiennes.
    En fin de compte, ce qu'il nous faut, ce sont des gens exceptionnels avec des attirails exceptionnels et fiables, et cette capacité que nous avons de faire les choses par nous-mêmes. En fait, c'est ce qui est en jeu ici si nous continuons à miner notre capacité à donner à l'organisation ce dont elle a besoin pour lui permettre de se déployer et d'être l'organisation sur laquelle nous pouvons compter, peu importe ce que l'État attend d'elle. Compte tenu du présent rythme opérationnel, je crains que le degré d’engagement actuel ne soit pas suffisant pour maintenir cela.
(1220)
    Merci.
    Allez-y, monsieur Robillard.

[Français]

     Ma question s'adresse à la Croix-Rouge.
    Dans l'hypothèse d'une augmentation des éclosions dans les établissements de soins de longue durée, est-il possible de voir les Forces armées canadiennes retourner dans ces établissements pour aider la Croix-Rouge?
    Votre question concerne-t-elle les Forces canadiennes ou la Croix-Rouge? Me demandez-vous si nous serons débordés par la situation actuelle?
    Oui.
    Cela dépend à quel endroit. D'abord, plusieurs choses ont été faites au Québec. Je voudrais souligner la très grande collaboration avec le ministère de la Santé et des Services du Québec et les CIUSSS.
    Au Québec, nous avons déployé des effectifs pour remplacer les militaires dans les établissements de soins de longue durée, mais nous avons aussi contribué à former plus de 7 000 employés du ministère de la Santé et des Services sociaux. Ce ministère a donc augmenté sa capacité à intervenir dans les CHSLD.
    Nous avons les effectifs nécessaires pour soutenir le gouvernement du Québec dans le contexte actuel. Nous avons gardé 500 employés disponibles. À ce stade-ci, je ne peux pas prévoir l'avenir, mais je peux dire que notre capacité est assez bonne. Nous sommes en discussion avec d'autres provinces pour augmenter la capacité et offrir le même genre d'aide.
    Merci.
    Avec l'opération Globe, le Canada a répondu à une demande d'aide de l'ONU pour le transport de nourriture et d'équipement médical en relation avec le Programme alimentaire mondial et l'Organisation mondiale de la santé.
    Que pensez-vous de l'aide apportée par le Canada pendant la pandémie?
    Merci beaucoup.

[Traduction]

     Je pense que pour l’Opération GLOBE, cette contribution particulière est arrivée à un moment très névralgique où nous avions du matériel sanitaire, principalement de l’Organisation mondiale de la Santé — mais aussi de l’Organisation panaméricaine de la santé, l’OPS —, que nous avions beaucoup de mal à déplacer. Sans les ressources de l’Aviation royale canadienne, ce matériel sanitaire aurait probablement été retardé d’au moins deux ou trois semaines, voire d'un mois. À ce stade de la crise, ce retard de trois semaines à un mois aurait entraîné d'importantes pertes de vie. Il ne fait donc aucun doute que cette contribution aura permis de sauver des vies.
    Dans le cadre de ses efforts en matière de sécurité alimentaire, le Canada a également été un fervent partisan du Programme alimentaire mondial. Les contributions du Canada ont été très axées sur nos programmes de repas scolaires, qui ont une incidence importante sur le plan nutritionnel, mais aussi sur l’éducation des filles.
    J’ai souvent dit à ceux qui soutiennent ces programmes que leur contribution agit sur la nutrition, l’éducation et l’égalité des sexes. Avec une seule contribution, vous donnez aux filles les moyens de devenir des femmes autonomes qui, elles-mêmes, auront de meilleures familles, des familles plus productives. Elles seront mieux nourries et mieux éduquées.
    Je pense que ce type de programmes est une pierre angulaire de la contribution du Canada, et même s'ils ne s'inscrivent pas nécessairement dans le cadre de la pandémie, ils contribuent assurément à faire en sorte que les personnes qui étaient dans des régions touchées par la COVID soient plus résistantes face à la crise à venir.
    Je pense que, dans l’ensemble, nous apprécions beaucoup la contribution du Canada. Nous croyons également que c'est une contribution de qualité. Il ne s’agit pas seulement de la taille de la contribution, mais aussi de sa qualité, et le Canada a toujours été un donateur de grande qualité.
    Merci.
(1225)

[Français]

     Monsieur Brunelle-Duceppe, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais m'adresser à M. Sauvé ou à M. Tizi.
    Vous me direz lequel des deux est le mieux placé pour me répondre.
    Je voudrais comprendre la mécanique ou, du moins, certains détails au sujet de l'intervention de la Croix-Rouge dans une situation comme celle-ci, qui nous a tous touchés. Vous avez d'ailleurs été touché vous aussi, vous en avez payé les frais et vous avez très bien fait cela.
    Est-ce que ce sont les Forces armées canadiennes qui vous donnaient les ressources financières pour payer les volontaires de la Croix-Rouge qui allaient prendre le relais des militaires?
    Non, les fonds proviennent en fait de différents endroits. Nous avons déjà des ententes avec les provinces. Par exemple, dans certains cas, le gouvernement du Québec nous a embauchés pour faire des activités. En ce qui concerne le cas précis du relais des militaires par la Croix-Rouge, il s'agit de fonds qui proviennent du gouvernement fédéral.
    D'accord.
    Je sais qu'au début, le salaire de 26 $ l'heure a été discuté. Finalement, combien la Croix-Rouge a-t-elle rémunéré ses volontaires?
    Est-ce que vous le savez?
    Oui.
    En fait, il y a une différence. Ici, nous avons déployé des employés, et pas nécessairement des bénévoles. Je pourrais vous donner le montant final.
    Notre objectif n'était pas de recruter des gens pour rester de façon permanente dans le réseau de la santé. Il y avait donc une différence entre notre objectif et celui du gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec a fait une campagne de recrutement pour aller chercher 10 000 travailleurs de plus dans ce secteur. Nous, nous avons fait une campagne de recrutement pour aller chercher des gens qui voulaient intervenir temporairement...
    De façon temporaire.
    ... dans la phase d'urgence. Cela n'avait donc rien à voir avec tout le système permanent du réseau de la santé.
    Tout à fait. Je comprends très bien la démarche.
    Est-ce que ces personnes effectuaient les mêmes tâches que les employés déjà sur place?
    L'objectif visait deux choses. Nous avions deux types d'équipes. L'une était spécialisée en prévention des infections, pour accompagner l'établissement et l'aider à resserrer ses contrôles; c'était un volet très pratique. L'autre, qui n'était pas spécialisée, était là pour aider à tout ce qui pouvait être administratif et soutien. Il ne s'agissait pas de remplacer le secteur spécialisé ni les gens formés à cet égard, mais plutôt d'apporter une aide générale, que ce soit dans la gestion de la réception ou toutes sortes d'autres tâches très générales.
    Dans votre allocution, je crois que vous avez parlé d'une formation de six semaines.
    Est-ce exact?
    Non. J'ai dit que cela a pris six semaines pour recruter et former 1 000 personnes.
    D'accord, c'était pour recruter et former les gens.
    En quoi la formation consistait-elle exactement?
    Il s'agissait d'un encadrement général pour montrer comment aider dans une situation. Autrement dit, la formation portait sur le travail général et toutes les consignes en ce qui a trait à la protection, au port de l'équipement de protection individuelle, et tout le reste.
    Vous avez travaillé avec beaucoup de diligence. Je vous en félicite.
    Merci.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Garrison.
    Merci, madame la présidente.
    J’ai d'autres questions pour la Croix-Rouge, mais je tiens avant tout à la remercier pour l’énorme aide qu’elle a apportée, et ce, malgré un préavis très court. Pouvez-vous nous parler un peu de la façon dont les choses se sont déroulé lors du départ des Forces canadiennes et l'arrivée de la Croix-Rouge? Selon vous, dans quelle mesure cette transition a-t-elle fonctionné?
    Je pense que ça s’est très bien passé. Tout d’abord, je tiens à remercier les Forces armées canadiennes. Elles ont vraiment collaboré au transfert de l'information dans son entier. Ce qui a été essentiel aussi — et je pense que c'est ce qui mérite le plus d'être souligné —, c’est que nous avons travaillé très étroitement avec le ministère de la Santé et des Services sociaux du gouvernement du Québec, parce qu’après tout, c'est lui qui travaille avec ces établissements et qui savait le mieux où notre aide était requise. C’était un travail de coordination quotidien. La transition s’est bien déroulée. Nous sommes toujours présents, je pense, dans 11 établissements de soins de longue durée. Nous continuons à y soutenir le gouvernement du Québec, et nous avons gardé 1 500 personnes sur le terrain. Ce ne sont pas des bénévoles. Comme je le disais tout à l’heure, nous avons fait appel à du personnel rémunéré, puisqu'il s'agit d'un engagement de plusieurs mois.
    Existe-t-il un plan pour supprimer progressivement l’aide que la Croix-Rouge continue à prodiguer dans ces 11 établissements? Combien de temps pensez-vous rester dans ces établissements?
    Encore une fois, il s’agit de prêter main-forte au gouvernement du Québec. Je pense que nous avons prolongé notre présence jusqu’en mars dans ces établissements ou dans d’autres, nommément partout où il peut y avoir un chevauchement ou des problèmes. Comme je l’ai dit, nous augmentons notre soutien en Ontario et au Manitoba. Au Manitoba, nous sommes dans cinq établissements de soins de longue durée. Toujours selon le même modèle, nous sommes là essentiellement pour aider à contrôler l'épidémie et à faire face à la recrudescence de cas dans les établissements qui pourraient être débordés.
(1230)
    Merci.
    Je sais que mon temps est très restreint. Je voudrais revenir à M. Abdulla, du Programme alimentaire mondial, et parler des zones, des régions ou des pays qui, selon lui, seront les plus menacés au cours des prochains mois en raison de la convergence appréhendée des pénuries alimentaires et de la crise de la COVID.
    Le pays le plus préoccupant en ce moment est probablement le Yémen, où nous avons de sérieux problèmes d’accès. En fait, nous avons eu de bonnes nouvelles ces dernières semaines, puisqu'il y a eu des progrès à cet égard. À Sanaa, les autorités de fait nous permettent désormais de mieux cibler l’enregistrement, dont l’enregistrement biométrique, ce qui signifie que nous savons un peu mieux dans quelle mesure l’aide arrive aux personnes qui en ont le plus besoin.
    Dans ces endroits difficiles d'accès et ces pays en conflit où la surveillance n’est pas toujours particulièrement facile, il vous faut absolument un système d’enregistrement très robuste. C'est ce qui s'est amélioré ces dernières semaines. Nous avions jusque-là dû faire face à de graves difficultés à ce chapitre.
    Il y a le Yémen, où nous avons vu, potentiellement, des poches de famine. Juste après le Yémen, il y a le Soudan du Sud, certaines parties du nord-est du Nigéria, puis des régions du Sahel, dont le Mali, le Niger et peut-être le Burkina Faso. Ce sont des endroits où, encore une fois, les conflits et les affres du climat frappent très fort. C'est assurément le cas du Soudan du Sud.
    Ce sont les pays les plus préoccupants.
    Merci beaucoup. C’est très apprécié.

[Français]

     Madame Gallant, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Leuprecht, nous savons que la Russie a utilisé la pandémie pour tester l’état de préparation des forces de l’OTAN à de nombreuses occasions et pour démontrer de nouvelles capacités conventionnelles et hybrides.
    Avez-vous connaissance de cas où la Russie a mis notre défense nationale à l'épreuve ou a fait la démonstration de nouvelles capacités hybrides et conventionnelles spécifiquement contre le Canada?
    Eh bien, il est certain que la Russie poursuit ses intrusions dans les zones d’identification de la défense aérienne de NORAD et que leur nombre n'a pas diminué. Dans certains cas, cette activité s'est accrue, surtout dans le domaine aérien.
    Le déploiement des Forces armées canadiennes en Lettonie est la cible constante et quotidienne d'attaques de la part de la Russie. Je pense que ce que nous pouvons apprendre du déploiement en Lettonie, c’est ce que tous les pays occidentaux devront apprendre sur ce que nos alliés en Lettonie connaissent depuis des années, à savoir que la Russie y est présente de façon soutenue et asymétrique, tant dans les domaines conventionnels de l’espace — terrestre, aérien, maritime, aérospatial et cybernétique — pour saper nos troupes et nos opérations, que dans nos sociétés et nos institutions. Nous n’aurons guère d’autre choix que d'améliorer notre résilience d'une part et, d'autre part, de tracer des lignes rouges claires.
    Cela met en relief le défi qui a déjà été soulevé plus tôt, à savoir que les Forces armées canadiennes font aujourd’hui une foule de choses qu’elles ne faisaient pas au lendemain de la guerre froide, alors qu'elles ont beaucoup moins de ressources qu'elles en avaient. Les opérations d'information dans le domaine de la cybernétique sont un exemple de cet état de fait. Il semble que les Canadiens et les politiciens sont toujours heureux de demander aux Forces armées canadiennes d'en faire plus, mais sans jamais augmenter leurs ressources, voire en les diminuant. En ce qui concerne les équipements, nous pourrions dire que nous n'en faisons pas assez pour rester au niveau où nous sommes.
    Je pense que nous sous-estimons la détermination de nos adversaires et les menaces que les activités hostiles à l'endroit du Canada font planer sur nos intérêts, nos valeurs, nos alliés et nos partenaires. Comme nos collègues viennent de le dire, ces activités existent aussi dans d’autres parties du monde qui sont en crise et où nous savons que nos adversaires versent activement de l’huile sur le feu. Le but de nos adversaires est d'allumer des conflagrations et de provoquer une migration vers l’Europe et d’autres endroits afin de déstabiliser les régions, les alliés et les partenaires.
(1235)
    Puis, la pandémie au Canada nous a rendus plus dépendants... et a fait peser un nouveau fardeau sur la technologie dans notre vie quotidienne.
    Dans notre environnement actuel, à quels types de cyberattaques de nations comme la Russie, la Chine communiste ou l’Iran sommes-nous désormais plus vulnérables?
    Je vous renvoie à l’excellent document que le Centre de la sécurité des télécommunications, ou le CST, a publié la semaine dernière intitulé Évaluation des cybermenaces nationales 2020. Or, cette évaluation du CST est différente des précédentes puisqu'elle est la première à ma connaissance à faire état de façon explicite de la Chine et des activités chinoises. Il est de plus en plus important de prendre conscience de cette dynamique si nous voulons dénoncer les intervenants qui tentent délibérément de nous nuire et de nuire à nos institutions.
    Il est certain qu’en devenant de plus en plus connectés en raison de la pandémie, nous avons également créé une série de nouvelles vulnérabilités, que ce soit dans la sphère politique, au sein de l'État, dans le secteur privé ou dans nos sociétés civiles. Cela se traduit par l'émergence de maillons faibles que nos adversaires exploitent activement. Nous savons, par exemple, que les universités et les instituts de recherche ont été des cibles de choix, et nous le savons grâce aux déclarations que le CST a publiées antérieurement en coopération avec des pays partenaires.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Bagnell.
    Merci à tous les témoins de leur très intéressante contribution, et félicitation à M. Abdulla pour son prix Nobel de la paix.
    Monsieur Abdulla, vous avez fait allusion à quelques reprises aux changements climatiques, ce qui était très intéressant.
    J’aimerais que vous nous expliquiez l'effet que les changements climatiques ont eu sur les personnes qui ont besoin de la nourriture que vous livrez et sur leur capacité à produire de la nourriture. De même, quelle incidence les changements climatiques ont-ils sur ceux qui fournissent la nourriture et qui sont vraisemblablement dans une autre zone climatique?
    Merci beaucoup.
    Je pense que les effets des changements climatiques dans de nombreux pays auxquels nous apportons notre aide peuvent être constatés sur plusieurs fronts. Sur le front de la sécurité alimentaire, il y a des sécheresses graves et elles sont de plus en plus nombreuses. Les gens ont commencé à déplacer les cultures qui ne sont plus aussi résistantes à la sécheresse qu’elles ont pu l'être. Je pense qu’il y a certaines techniques agricoles que l’on cherche à améliorer.
    Il y a autant de régions où il y a des sécheresses que de régions où il y a des inondations répétées. Nous constatons également des problèmes de dégradation des terres. Les gens doivent utiliser des techniques agricoles qui ne sont peut-être pas les meilleures pour les sols parce qu’il y a parfois trop d’eau ou pas assez d’eau. Nous devons améliorer les capacités qu'ont les gens de recueillir et de stocker l’eau.
    Un autre effet que nous constatons sur la sécurité alimentaire, c'est qu’à mesure que les pâturages reculent — c'est-à-dire ces terres où les gens, surtout les éleveurs et les nomades du Sahel, peuvent mettre leurs animaux en pacage —, les gens sont forcés d'aller vers le sud. Or, cela commence à avoir une incidence sur les terres traditionnellement réservées aux agriculteurs, les terres agricoles. Les éleveurs se heurtent donc aux agriculteurs, ce qui cause des tensions que ne manquent pas d'exploiter des groupes comme Daech et Al-Qaïda ou Boko Haram, en Afrique de l’Ouest. Ils exploitent les tensions et les conflits qui sont apparus entre les gens qui cherchent à se nourrir par différents moyens.
    Du côté de l’offre, je pense qu’une chose que nous constatons, c'est que les problèmes liés au climat font en sorte que certains pays sont moins généreux qu'auparavant. Un autre aspect que je voulais aborder est celui de la migration. Nous avons vu des gens se déplacer de certaines régions d’Afrique vers le nord du Sahel, puis franchir la Méditerranée, mais nous avons aussi vu le même phénomène en Amérique centrale, dans ce que l’on appelle le « corridor de la sécheresse ». Dans de nombreux pays d’Amérique centrale, les populations se déplacent vers le nord et cette tendance est en grande partie due à l’incapacité qu'elles ont de se donner autre chose que des moyens de subsistance de base. Même l’agriculture de subsistance de base sur certaines de ces terres marginalisées est de plus en plus difficile.
    Ce ne sont là que quelques-uns des principaux domaines.
(1240)
    Merci.
     Il ne me reste qu’une trentaine de secondes et j’ai une question pour la Croix-Rouge.
     J'aimerais connaître le pourcentage de vos travailleurs au Canada qui sont rémunérés et le pourcentage de ceux qui sont bénévoles. Pourriez-vous nous donner un chiffre approximatif, car il ne nous reste qu’une vingtaine de secondes.
    De façon approximative, je dirais qu'environ 20 % de notre personnel est rémunéré et que les 80 % qui restent sont des bénévoles. C’est dans ces eaux-là.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Bezan.
    Merci, madame la présidente.
    Je sais que notre temps est restreint, alors j'en viens tout de suite à mes questions. Elles s’adresseront toutes à M. Leuprecht.
    Professeur, comme nous l’avons entendu en comité la semaine dernière, les Forces armées canadiennes vont jouer un rôle dans la distribution des vaccins contre la COVID à l'échelle du pays. À votre avis, les Forces canadiennes ont-elles la capacité logistique nécessaire pour s'acquitter de cette tâche? Anticipez-vous quelque problème à cet égard?
    Je suis persuadé, vu l'aide que les Forces armées canadiennes ont été en mesure de fournir à l'Agence de la santé publique du Canada avec la logistique entourant l'équipement de protection individuelle ou EPI de même qu'avec la chaîne d'approvisionnement et le transport aérien, qu'elles ont amplement la capacité de fournir tout le soutien nécessaire au déploiement de tout plan stratégique de distribution des vaccins établi par le gouvernement.
    Évidemment, au bout du compte, c'est une situation gagnant-perdant puisque tant et aussi longtemps que nous dépendrons des Forces armées canadiennes pour fournir cette capacité et ce soutien logistiques, cette capacité ne pourra pas être utilisée dans d'autres types d'opérations ou de soutien.
(1245)
    Oui, je comprends. Merci, monsieur Leuprecht.
    Tant dans vos écrits, cet été, que devant ce comité aujourd'hui, vous avez parlé du « risque moral » que nous courons parce que les gouvernements provinciaux ont sous-investi dans l'intervention en cas d'urgence. Croyez-vous qu'ils ont renoncé à leurs responsabilités? Devraient-ils être pénalisés en conséquence?
    Les gouvernements provinciaux tirent très peu de bénéfice politique des investissements stratégiques dans les infrastructures essentielles, mais il semble que, quand le gouvernement fédéral intervient en leur offrant de la collaboration et du financement, ils ont un incitatif pour agir. J'estime qu'il s'agit d'une responsabilité conjointe qu'ils doivent assumer.
    Je crains que, dans la foulée de la pandémie, compte tenu de la diminution de leurs ressources, les politiciens et gouvernements provinciaux tentent de mettre l'accent sur les aspects les plus payants sur le plan électoral plutôt que sur ceux qui vont assurer la viabilité à moyen terme. Même si le gouvernement fédéral peut facturer chaque recours aux Forces armées canadiennes, cette politique présente de grandes difficultés, évidemment, surtout quand ce sont des gouvernements provinciaux à la situation financière déjà précaire qui reçoivent ces factures, d'où le dilemme du gouvernement fédéral.
    Nous savons que, au titre de la Loi sur la défense nationale, la partie VI de la Loi si je ne m'abuse, il y a des pouvoirs relatifs à l'aide au pouvoir civil. Faut-il modifier des éléments de cette loi pour tenir compte de la réalité actuelle et de l'abus des gouvernements provinciaux qui demandent l'intervention des forces armées chaque fois qu'ils semblent éprouver des difficultés?
    La Loi a été changée après qu'on ait fait appel aux Forces armées canadiennes pour déblayer la neige à Toronto.
    Il y a des bizarreries dans la Loi qui datent de la Confédération et que nous commençons seulement aujourd'hui à régler et à aligner à la réalité du XXIe siècle. Au titre de la Loi, c'est le ministre qui est ultimement responsable de la décision, en collaboration avec le chef de l'état-major de la défense, qui décide de quelle façon cette décision sera opérationnalisée, donc les Forces armées canadiennes ont aussi un pouvoir discrétionnaire considérable quant à la façon exacte dont on appliquera cette décision.
    Je crois que, quand nous avons des problèmes… Par exemple, s'il y a des problèmes récurrents sur le plan des infrastructures essentielles et que le gouvernement fédéral donne l'occasion aux provinces d'y remédier, mais qu'elles ne s'en prévalent pas ou, comme on l'a vu à des endroits comme Fort McMurray, il y a d'importants retards dans la construction d'infrastructures essentielles qui auraient pu contrer une partie du désastre survenu il y a seulement quelques mois, ce pourrait être une occasion de revoir les choses.
    Selon moi, des pénalités seraient probablement moins efficaces que l'établissement des incitatifs fédéraux adéquats et de la bonne capacité de planification stratégique connexe. J'estime également que les Forces armées canadiennes doivent, afin de ne pas toujours cannibaliser notre propre organisation, créer leur propre unité d'intervention nationale comme…
    Parlons de cette unité d'intervention nationale, tiens. Faites-vous référence à quelque chose de semblable à l'Équipe d'interventions en cas de catastrophe que nous dépêchons à l'étranger pour offrir du secours? Ou pensez-vous plutôt à quelque chose qui ressemblerait à l'Army Corps of Engineers américain, qui pourrait fournir ces investissements à long terme dans les infrastructures, surtout, comme vous l'avez mentionné, dans les régions nordiques et arctiques du pays, mais qui serait là aussi pour fournir de l'aide humanitaire en cas de désastre?
    Je crois qu'une unité spécialisée dans les opérations nationales composée d'environ 2 000 réservistes et membres de la Force régulière qui ont une capacité immédiate d'intervention en première ligne pour des types d'interventions plus ciblées et d'opérations plus circonscrites... Mais c'est aussi l'occasion de discuter avec les provinces de la nécessité d'avoir des organismes provinciaux de services d'urgence beaucoup plus solides. Actuellement, nous avons la capacité tactique d'organiser les mesures d'urgence, mais pas la capacité de déploiement.
    L'une des choses que nous avons apprises de la Croix-Rouge, c'est que notre capacité d'appoint assurée par des bénévoles doit être beaucoup plus systématique. Par exemple, en Allemagne et en Australie, cette capacité est coordonnée par l'intermédiaire des services d'urgence nationaux, comme le Bundesanstalt Technisches Hilfswerk.
    Actuellement, la Croix-Rouge doit essentiellement assumer cette tâche. Je crois que le gouvernement peut faire davantage pour veiller à ce que les bons bénévoles et les bonnes capacités soient disponibles au bon moment, après quoi les Forces armées canadiennes peuvent aider à canaliser cette expertise là où elle est nécessaire.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Baker, je vous en prie.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Mes questions s'adressent à M. Sauvé, de la Croix-Rouge.
    D'abord, je tiens à vous remercier ainsi que la Croix-Rouge pour votre travail dans nos centres de soins de longue durée.
    Dans ma circonscription, Etobicoke-Centre, nous avons perdu 42 aînés au Eatonville Care Centre. C'est l'un des cinq centres où les Forces canadiennes ont apporté leur aide et qui était mentionné dans leur rapport à propos des conditions épouvantables dans les centres de soins de longue durée en Ontario.
    Vous avez dit que la Croix-Rouge a participé à la formation des Forces canadiennes. Vous avez aussi pris la responsabilité du travail fait avant cela par les Forces.
    Selon votre point de vue, quel a été l'impact du travail des Forces armées canadiennes dans nos centres de soins de longue durée?
(1250)
    Au moment où c'est arrivé, c'était nécessaire. Dans les discussions des deux dernières années, on a déterminé que les Forces armées canadiennes, qui sont formées pour autre chose, doivent être le dernier recours.
    La Croix-Rouge a démontré qu'on peut développer une capacité civile pouvant intervenir dans des situations qui requièrent surtout une opération civile. Il a été absolument nécessaire d'augmenter cette capacité pour faire face aux problèmes qui survenaient. On a démontré qu'on pouvait remplacer l'armée. C'est ce qui est arrivé dans les centres de soins de longue durée, où on a mis en place une capacité civile.
    Qu'il s'agisse d'événements climatiques ou d'une pandémie... Il faut dire que la pandémie est une situation exceptionnelle. Il faut prendre le temps de bien analyser les répercussions et voir comment on peut améliorer la situation en mettant des systèmes en place.
    Nous travaillons depuis des années avec les provinces pour améliorer la réponse de la Croix-Rouge aux situations d'urgence. Il faut faire un pas de plus dans cette direction en ayant une plus grande capacité sur une base plus permanente, afin de pouvoir jouer un rôle dans ces situations et, peut-être, éviter d'avoir à faire appel à l'armée.
    Je suis d'accord avec vous. La Croix-Rouge a démontré ses capacités dans plusieurs domaines.
     Il serait intéressant, pour mes concitoyens qui sont en train d'écouter cette discussion, de connaître votre point de vue. Vous savez beaucoup plus ce qui se passe dans ces centres de soins de longue durée que la plupart des gens.
    Pouvez-vous nous dire quel a été l'impact de l'aide des Forces armées canadiennes sur nos aînés? Je vous pose cette question pour que mes concitoyens comprennent l'impact que vous avez eu. Dans la dernière minute qu'il me reste, j'aimerais savoir quel l'impact a eu la Croix-Rouge en prenant soin de nos aînés.
    Je ne peux pas parler au nom des Forces canadiennes, mais je peux affirmer que l'impact du travail de la Croix-Rouge dans ces établissements a été énorme.
    Des aînés de ces établissements et plusieurs employés qui y travaillaient avaient contracté le virus. C'était un cercle vicieux. On perdait des employés et on était moins en mesure d'offrir des services. Il y avait des lacunes importantes dans toute la chaîne de service.
    La Croix-Rouge apporte de l'aide aux organisations pour rétablir la confiance et mieux contrôler les systèmes. Nous avons aussi fourni du personnel additionnel durant cette période. D'un autre côté, on perdait des employés et une peur s'installait dans ces établissements. On manquait d'employés pour fournir les services essentiels. On a pu stabiliser la situation. La peur dans les centres de soins de longue durée a été très importante.
    À l'avenir, il faudra bâtir et disposer d'une capacité d'intervention rapide pour intervenir dans toutes sortes de situations d'urgence.
    Il ne faut pas oublier que les provinces ont pris le relais, certainement au Québec, en recrutant davantage de personnel pour répondre aux besoins.
(1255)
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    C'est mon dernier tour de parole et j'en profite pour remercier tous les témoins de leur participation et de leurs réponses au Comité aujourd'hui. Franchement, c'était très intéressant.
    Ma dernière question s'adresse à M. Abdulla.
    Plusieurs personnes disent que c'est au Yémen qu'il y a la pire crise alimentaire sur la planète. En septembre dernier, le Canada a été publiquement désigné par des enquêteurs de l'ONU comme l'un des pays qui contribuent à alimenter la guerre au Yémen. On sait que la famine découle de la guerre.
    Pouvez-vous nous dire de quelle façon la vente d'armes du Canada à l'Arabie saoudite empire la crise alimentaire au Yémen?

[Traduction]

    Évidemment, il est très difficile de répondre à cette question.
    Chose importante à noter ici: les armes en soi ne sont pas la cause de la crise alimentaire. C'est quand on utilise ces armes d'une manière qui, je vous dirais, n'est pas convenable, qu'elle se produit, et cette mise en garde s'applique de part et d'autre.
    Les Saoudiens sont armés. Ils affirment défendre leurs intérêts nationaux et leur territoire, et qu'ils sont attaqués sur leur territoire. Cela se produit avec des armes qui sont fournies à l'adversaire. Le problème ici, c'est qu'on espère une situation où fournir des armes n'est pas nécessaire, mais établir une corrélation directe avec la présence de beaucoup d'armes dans cette région est probablement un lien de cause à effet trop fort, bien que cela exacerbe assurément la situation.
    Le Canada joue aussi son rôle en veillant à ce que la population qui est le plus dans le besoin ait accès à des bons alimentaires et au comptant afin d'endiguer la crise alimentaire, et vous êtes un de nos donateurs en matière de sécurité alimentaire. Je dirais que vous devez également souligner ce point. Il est à espérer que le conflit se termine et qu'il ne sera plus nécessaire pour qui que ce soit de fournir des armes à un côté comme à l'autre.
    Merci pour cette réponse.
    Allez-y, monsieur Garrison, je vous en prie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Comme c'est notre dernière série de questions, j'aimerais m'adresser à M. Leuprecht.
    Très souvent, au Canada, on a l'impression que les pays mentionnés par M. Abdulla, soit le Yémen et ceux de la bande qui va du Soudan du Sud jusqu'au Nord-Est du Nigeria, n'ont pas grand-chose à voir avec le Canada, et nous avons donc tendance à dire, ce qui est assurément le cas au sein de la population, que ces choses sont certes malheureuses, mais qu'elles ne nous concernent pas vraiment.
    Pouvez-vous nous parler de l'une de ces menaces à la sécurité découlant de la détérioration de la situation dans le Sahel en Afrique de l'Ouest?
    Comme vous le savez, j'ai écrit sur le Sahara-Sahel.
    Nous ne devons jamais oublier que l'Europe est notre deuxième partenaire stratégique en importance après les États-Unis. Nous avons vu les conséquences de la migration de masse et ses répercussions sur la sphère politique européenne, répercussions avec lesquelles nous vivons encore. Nous avons, pas seulement du point de vue des valeurs canadiennes, mais aussi des intérêts canadiens, un grand intérêt dans la région, en partie parce que nous sommes l'un des très rares alliés qui peuvent aussi user d'une capacité francophone, et ce sont des pays où il y a déjà des opérations des Forces armées canadiennes. Je vous souligne tout particulièrement la mission militaire au Niger, mais aussi le soutien, par exemple, que le Canada apporte à tous les pays entourant la Syrie, à l'exception de la Syrie elle-même, pour assurer la stabilité de la région. Donc, oui, nos intérêts sont manifestement en jeu.
    Selon vous, qu'est-ce que le Canada pourrait faire de plus en ce moment sur le plan diplomatique pour remédier à ces menaces dans le Sahel?
    Nous pourrions probablement faire davantage sur le plan de la coordination.
    En diplomatie, la difficulté est toujours notre capacité très limitée sur place par rapport à l'ampleur du travail à abattre. Cela est en partie dû à la façon dont nous finançons non seulement les Forces armées canadiennes, mais aussi, globalement, nos corps d'affaires étrangères, de développement international et de commerce international, de sorte à mieux affirmer nos intérêts. Puisque les ressources sont limitées, il y a probablement des possibilités considérables de synergies, tant avec d'autres alliés et pays partenaires qu'avec des organisations membres, afin d'acquérir la capacité nécessaire à l'établissement d'une voie d'avenir durable pour une région qui nous tourmentera pendant encore des décennies.
(1300)
    Madame la présidente, là-dessus, j'en profite pour conclure.
    Merci beaucoup aux témoins.
     Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    Je souhaite souligner que, au début de cette réunion, il y a encore eu des problèmes techniques. Nous avons commencé un quart d'heure en retard. J'ai demandé à ce que l'on veille à l'avenir à aviser tous les témoins qu'ils doivent avoir un micro qui fonctionne adéquatement et qu'ils doivent être en ligne assez tôt avant l'heure prévue de la réunion pour remédier à tous ces problèmes.
    L'avis de cette réunion a été transmis au cours de la fin de semaine. Nous l'avons reçu samedi. Les notes d'information nous ont été transmises vendredi soir, je crois. Les mots de passe et ce genre de choses n'ont été transmis qu'hier soir, ce qui ne nous laisse pas assez de temps, à nous les membres, pour nous préparer, surtout pendant la fin de semaine, quand notre personnel n'est pas là, et pour rassembler nos documents de recherche et veiller à ce que nous posions les meilleures questions possible dans le cadre de cette étude importante.
    Je vous prie donc, madame la présidente, de veiller à ce qu'un avis adéquat soit donné bien à l'avance afin de que nous puissions avoir du personnel à notre disposition pour nous aider à préparer ces réunions, le lundi matin en particulier, mais cette pratique devrait s'appliquer en tout temps.
    Merci, monsieur Bezan.
    Monsieur Bagnell, allez-y.
    Justement, je me demande s'il est possible pour la Bibliothèque du Parlement, quand il s'agit de notes d'information pour ce type de réunions, de nous fournir un document où ce qui est nouveau est indiqué, soit grâce à l'italique, à une couleur différente ou à un autre moyen. Puisque les réunions portent essentiellement toutes sur le même sujet et que la majeure partie de la note d'information est toujours la même, cela nous éviterait d'avoir à tout lire pour voir s'il y a du neuf par rapport à notre première note d'information.
    Bon. Merci beaucoup pour ces interventions, messieurs Bezan et Bagnell.
    Monsieur Bezan, ce sont vos cinq dernières minutes. Si vous souhaitez les partager avec l'un de vos collègues, n'hésitez pas à le faire. Merci.
    Madame la présidente, je ne pensais pas que nous allions prolonger la réunion, donc je serais on ne peut plus heureux de poser quelques questions supplémentaires.
    Ma question s'adresse à la Croix-Rouge. Quand les Forces armées canadiennes ont été déployées dans les établissements de soins de longue durée en Ontario et au Québec, elles ont publié un rapport sur ce qu'elles y ont vu. Est-ce que la Croix-Rouge publiera un rapport semblable sur les soins qu'elles prodiguent actuellement dans d'autres provinces?
    Nous soumettons un rapport sur tout incident dont nous sommes témoins directement aux autorités de la santé et des services sociaux de la province, en temps réel. Je crois qu'il y aura un rapport plus général sur nos conclusions, l'aide d'appoint et les leçons tirées de cette expérience.
    Est-ce que ce rapport sera rendu public?
    Oui, notre rapport à cet effet sera rendu public, tout à fait.
    Merci beaucoup.
    Vous avez déjà parlé de la transition et nous savons que vous avez déjà travaillé très étroitement avec les Forces armées canadiennes. À votre connaissance, la Croix-Rouge jouera-t-elle un rôle dans la distribution des vaccins au pays?
    Bien sûr, nous fournissons actuellement une grande aide d'appoint, et nous sommes présents aux séances de planification avec l'Agence de la santé publique du Canada pour établir quelle sera notre contribution. À ce stade, rien n'est encore établi, mais nous serons bien évidemment disponibles pour apporter toute l'aide possible.
    Monsieur Leuprecht, vous avez parlé de créer une nouvelle organisation et de veiller à ce qu'elle soit adéquatement financée, sans nuire à la formation et aux opérations préparatoires actuelles des Forces armées canadiennes. Dans la dernière série de questions, nous avons parlé de la possibilité de créer une unité semblable à l'Army Corps of Engineers américain…
    Pouvez-vous fournir plus de détails sur l'allure que devrait prendre ce type d'organisation selon vous? S'agirait-il de l'armée? Vous dites que c'est une combinaison de réservistes et de membres de la Force régulière.
    Aussi, vous avez parlé de toute la question des coûts par rapport aux compromis qui doivent être faits au sein des Forces armées canadiennes. D'où viennent ces coûts et quels sont les compromis faits par d'autres services des forces armées?
(1305)
    Vu toutes les données que je fournis dans mon mémoire ainsi que dans mon article, j'estime qu'essayer de faire fonctionner les opérations nationales en plus de toutes les autres demandes qui lui sont faites rend actuellement ce rôle difficile à assumer pour l'organisation. Donc, il serait utile d'avoir une équipe spécialisée.
    Si aucun argent frais n'est consacré à cette équipe, il y aura par conséquent un prix à payer ailleurs, mais on peut aussi en tirer profit et utiliser cette capacité pour d'autres types d'opérations de nature nationale, par exemple pour améliorer les conditions des Premières Nations, ce que je suggère. Je crois que ce pourrait être avantageux pour toutes les parties concernées.
    Le gouvernement fédéral doit améliorer sa propre capacité de planification et de déploiement des mesures d'urgence sur le plan civil. Mais, ici, la façon dont le plan fédéral d'intervention en cas d'urgence a été déployé ne l'a pas permis. Il doit améliorer sa coordination, être en mesure de veiller à ce que des entités comme l'Agence de la santé publique du Canada aient de meilleures capacités logistiques et veiller à ce que les provinces puissent fournir elles-mêmes le type de capacité d'appoint que le gouvernement fédéral a, au bout du compte, été appelé à fournir, tant grâce aux militaires qu'à la Croix-Rouge.
    Donc, professeur, suggérez-vous que l'équipe d'intervention rapide en cas de catastrophe dont nous disposons par l'intermédiaire de l'EICC relève également de ce nouveau groupe et qu'en conséquence, cette nouvelle organisation soit constituée d'un volet national et d'un volet international?
    Si je ne m'abuse, l'EICC est essentiellement une équipe composée d'environ trois personnes qui travaillent à temps plein et qui ont la capacité de mobiliser environ 200 membres de l'organisation dans des délais très courts.
    Ce que je propose, c'est la création d'une entité spécialisée au sein des Forces armées canadiennes, une entité composée d'environ 2 000 personnes qui s'occupent précisément de ces enjeux. Je pense que les demandes sont maintenant si régulières et si nombreuses que nous devons renforcer cette capacité à l'interne, afin de mieux anticiper les demandes qui pourraient survenir.
    Je crois que personne n'avait vraiment prévu que les Forces armées canadiennes seraient forcées d'aller travailler dans des établissements de soins de longue durée. Ils étaient, bien sûr, prêts à accomplir ce travail, parce qu'ils ont été instruits et formés à cet effet. Toutefois, il y a de meilleures façons de planifier ce travail et, si cette unité est en mesure de le planifier, elle pourra signaler au gouvernement fédéral les problèmes potentiels. Le gouvernement fédéral pourra alors assurer une coordination avec les provinces afin d'essayer d'éviter à l'avenir que ces problèmes n'en arrivent au point où nous devons déployer la capacité de pointe des Forces armées canadiennes et de travailler avec la Croix-Rouge de manière plus préventive dès le début, plutôt que de devoir attendre pendant quelques mois que la Croix-Rouge puisse remplacer efficacement les Forces armées canadiennes à l'aide des capacités requises.
    Sans le renfort de la Croix-Rouge canadienne en juin, les Forces armées canadiennes auraient peut-être même été forcées de rester beaucoup plus longtemps. C'est grâce à la Croix-Rouge que cette opération est redevenue civile.
    Je suis également reconnaissant à la Croix-Rouge de tout le travail qu'elle a réalisé pour soutenir les Forces armées canadiennes.
    Merci.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    En fait, j'avais la main levée lorsque M. Bezan a parlé de son rappel au Règlement. Je demande que, dès que l'on sait qu'un témoin ne pourra pas assister à la séance, tous les membres du Comité soient informés du changement et du nom de la personne qui pourrait remplacer le témoin qui n'est pas libre.
    Merci.
    Très bien, merci beaucoup. Nous allons prendre cela en note.
    Madame Vandenbeld, la parole est à vous.
    Je tiens à vous remercier, madame la présidente, d'avoir fait en sorte que nous terminions cette série de questions, mais je sais que nous sommes à court de temps, alors je ne vais poser qu'une brève question. Je tiens également à remercier tous les témoins de leurs observations très instructives.
    Je pense que vous avez couvert presque tous les sujets, mais il y a une question que nous n'avons pas abordée aujourd'hui. Il s'agit de la Croix-Rouge.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la collaboration entre la Croix-Rouge et les Forces armées canadiennes dans le cadre de l'opération GLOBE, qui est liée au travail de rapatriement et aux efforts déployés à Trenton lorsque nous avons ramené tant de Canadiens chez eux au début de la pandémie?
(1310)
     Ce n'est pas la première fois que nous réalisons un travail semblable. Je pense qu'il faut replacer cette opération dans son contexte.
    Je suis au service de la Croix-Rouge depuis quelque temps déjà. Vous devez vous souvenir qu'il y a un certain temps, nous avons amené au Canada 5 000 réfugiés kosovars. Ils étaient hébergés sur une base militaire, et nous gérions les services et les soins offerts là-bas. Nous avons également travaillé avec les Forces armées canadiennes lorsque de nombreuses personnes ont traversé la frontière du Québec et que le camp a été mis en place. L'armée a installé les éléments logistiques du camp pendant que nous gérions les services sur le terrain. C'est le genre de structure complémentaire...
    La même chose s'est passée dans ce cas-ci. Nous avons dépêché des gens et pris soin des personnes qui étaient logées sur la base. Nous leur avons fourni tout ce dont elles avaient besoin — la nourriture, etc. —, et nous avons élargi cette opération afin d'héberger toute personne arrivant à un aéroport qui ne disposait pas de lieux de quarantaine. Nous avions accès à une structure qui nous permettait de mettre cela en place.
    En général, la conversation que nous avons en ce moment porte sur le fait que nous avons commencé à examiner les capacités qui étaient propres aux militaires, les services qui pouvaient être assurés par les capacités civiles, et les domaines dans lesquels nos capacités étaient complémentaires.
    Si je peux me permettre d'ajouter quelque chose, une question a aussi été posée au sujet des services mobiles. Je dois rappeler aux députés, car nous avons mentionné l'EICC, que la Croix-Rouge dispose également de trois hôpitaux de campagne et de dix cliniques mobiles. Je le répète, du côté civil, nous possédons une capacité logistique et opérationnelle qui peut être mise à profit.
    Fort bien, merci.
    Nous arrivons à la fin de la séance. Je tiens à remercier tous nos témoins et les membres de notre comité. Compte tenu des témoins et des questions posées par l'équipe, cette séance a été extraordinaire.
    Je tiens à vous remercier d'avoir passé du temps avec nous aujourd'hui.
    Sur ce, la séance est levée.
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