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Merci, madame la présidente.
J'ai un peu de mal ce matin, car l'image bloque à mon écran. Vous m'en excuserez.
Je suis heureux que le comparaisse pour parler de la responsabilité ministérielle, car c'est ce dont il s'agit ici. Je ne me réjouis pas que le gouvernement ait choisi de ne pas tenir compte d'un ordre de la Chambre, mais cela nous donne l'occasion de discuter de la notion de responsabilité ministérielle avec le ministre. Je serai très heureux de le faire.
Je signale que, si nous avons convoqué des membres du personnel du ministère et du Bureau du Conseil privé, c'est que le les a pointés du doigt dans son témoignage en disant que le problème n'avait rien à voir avec lui et que nous devions nous adresser à ces gens-là. En fait, c'est le ministre qui a proposé à l'origine que nous discutions avec les membres du personnel qui, selon le point de vue qu'il défend maintenant, ne devraient pas être convoqués devant le Comité.
J'ai hâte de lui parler de la notion de responsabilité ministérielle pour savoir qui est responsable du fait que le et le n'ont pas pris les mesures nécessaires pour destituer un chef d'état-major de la défense lorsqu'une plainte fondée d'inconduite sexuelle a été déposée contre lui.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Mes propos rejoignent ceux de mes collègues conservateurs et néo-démocrates.
Je dois dire que je suis déçu. Je ne sais pas si je suis surpris ou non, mais je suis certainement déçu. C'est rare que nous nous plaignions de recevoir le ministre au Comité, et je ne m'en plains pas. Ce serait même intéressant qu'il soit là plus souvent, comme c'est le cas dans la plupart des comités.
Cependant, ce qui m'inquiète, c'est de voir qu'on ne respecte pas la volonté du Comité et qu'on écarte des témoins que l'on avait prévu d'entendre. Je me demande même si ce n'est pas une façon d'empêcher ces personnes de parler. Pourquoi ne voudrait-on pas laisser ces personnes parler? On me dit que ce ne sont pas elles qui prennent les décisions et que ce ne sont pas elles qui ont la responsabilité finale. Toutefois, elles savent quand même des choses, elles savent ce qui se passe et les décisions qui sont prises.
Dans la situation actuelle, où l'on voit que les actions du ministre ne sont pas celles qu'elles auraient dû être, il me semble qu'il serait pertinent d'avoir des commentaires et de l'information de la part du personnel.
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Madame la présidente, merci encore de me donner l'occasion de m'adresser une fois de plus au Comité.
Je suis accompagné de mon sous-ministre, du chef d'état-major de la défense par intérim et du juge-avocat général pour répondre aux questions.
Je tiens d'abord à apporter une précision, madame la présidente. Je comparais parce que, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons un profond respect pour les traditions du Parlement. L'une d'elles est le principe de la responsabilité ministérielle.
Le gouvernement croit que les ministres doivent rendre compte des décisions gouvernementales et des actes de leur personnel politique à la Chambre des communes. Nous avons collaboré avec les députés et nous avons rendu des comptes. C'est notre responsabilité, et nous l'avons assumée avec empressement.
Je comparais aujourd'hui parce que, en tant que membre du Cabinet, je parle au nom du gouvernement et de ceux qui y travaillent. Soyons clairs: les membres du personnel politique non élus doivent rendre des comptes aux membres du Cabinet, et le Cabinet doit rendre des comptes au Parlement.
Les conservateurs ont cru en ce principe fondamental il y a plus d'une décennie, lorsqu'ils étaient au pouvoir sous la direction du premier ministre Harper. C'est même un ministre conservateur des Affaires étrangères, John Baird, qui a expliqué au Comité pourquoi le gouvernement Harper refusait de laisser son personnel témoigner.
M. Baird a dit:
Si vous avez un problème avec mon personnel ou mon bureau, adressez-vous à moi. Vous ne pouvez pas traîner des gens devant ce comité pour les interroger de façon hostile et partisane — d'autant plus quand ces gens sont incapables de se défendre. Si vous avez un problème avec le gouvernement, notre système veut que vous vous adressiez aux ministres.
Les ministres sont responsables.
Ou peut-être l'opposition voudrait-elle entendre l'ancien premier ministre Harper lui-même:
Monsieur le Président, nos précédents et nos pratiques sont très clairs. Ce sont les ministres qui doivent rendre des comptes à la Chambre et aux comités, non leur personnel politique. Les membres du personnel politique doivent rendre des comptes aux ministres et aux députés pour lesquels ils travaillent.
Le premier ministre Harper et son gouvernement ont ordonné à leur personnel de s'abstenir de comparaître. Les ministres ont comparu à leur place. Malheureusement, les conservateurs d' — qui participe lui-même à cette étude, ne l'oublions pas — ont changé d'avis sur l'importance de ce principe fondamental de la responsabilité ministérielle. Ce qui était si important à leurs yeux lorsqu'ils étaient au pouvoir, ils l'ont jeté par-dessus bord maintenant qu'ils sont dans l'opposition. C'est regrettable et dangereux, car il faut que les Canadiens puissent être convaincus que les traditions mêmes de leur Parlement ne seront pas sacrifiées par simple opportunisme politique par ceux qui cherchent à obtenir le pouvoir.
Madame la présidente, l'argument présenté par MM. Baird et Harper était juste. C'était la bonne chose à faire à l'époque, et il en va de même maintenant.
Passons maintenant à la question très importante qui est à l'étude.
Commençons par énoncer ma position de la façon la plus claire possible. Je n'accepte aucune forme d'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes ni au ministère de la Défense nationale, quel que soit le grade ou le poste des personnes en cause. Je m'engage à faire en sorte que les victimes aient accès à une gamme de mesures de soutien et soient traitées avec équité et compassion. Je crois fermement à l'indépendance des enquêtes. Ce sont les principes qui me guident dans ce dossier depuis que je suis ministre de la Défense nationale.
Nous devons prendre soin de nos gens et leur offrir un milieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination. C'est inscrit dans notre politique de défense. C'est écrit dans ma lettre de mandat. C'est aussi conforme à mes convictions personnelles.
L'inconduite sexuelle est préjudiciable au plus haut point. Le gouvernement a travaillé fort pour donner suite au rapport de la juge à la retraite Deschamps. Nous avons mis en place des mesures axées sur la compréhension du problème, la prévention des préjudices, l'intervention en cas d'incidents et le soutien aux personnes touchées.
Nous avons créé le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle, qui est complètement indépendant de la chaîne de commandement militaire. Nous avons lancé une nouvelle formation obligatoire. Nous nous sommes associés à Statistique Canada pour mener des enquêtes afin de mieux saisir l'ampleur du problème. Nous avons examiné 179 dossiers anciens qui avaient été classés comme sans fondement. Nous avons créé de nouvelles équipes spécialisées dans la police militaire et au service des poursuites pour lutter contre l'inconduite sexuelle. Nous avons sollicité l'avis d'experts de l'extérieur et nous avons mis en œuvre de nouveaux programmes et de nouvelles politiques. L'an dernier, nous avons publié une stratégie visant à transformer la culture. Tout ce travail était essentiel et fondamental.
Il est clair que l'opération Honour, telle que nous la connaissons, a suivi son cours. Il est devenu évident qu'elle a ses limites. Il est extrêmement clair que nous avons encore beaucoup de travail à faire. Nous tirerons des enseignements des efforts qui ont été fructueux et de ceux qui ne l'ont pas été, et nous élaborerons un plan délibéré pour aller de l'avant.
Nous devons faire en sorte qu'il soit facile et commode pour quiconque, à quelque niveau que ce soit, de signaler un incident, et les mécanismes de signalement doivent inspirer confiance. C'est pourquoi nous élaborerons une structure de signalement indépendante pour examiner toutes les allégations. Comme le et moi-même l'avons dit, toutes les possibilités sont envisagées. Nous continuerons d'être guidés par l'équité et le respect de la primauté du droit. [Difficultés techniques] soient maintenus, car personne ne devrait avoir une influence indue sur une enquête. Cela compromet la capacité d'obtenir un résultat juste.
Madame la présidente, on ne peut pas le nier. L'inconduite sexuelle est un problème grave et systémique dans les Forces armées canadiennes. Nous devons prendre des mesures audacieuses pour instaurer une culture où jamais on ne minimise l'importance de l'inconduite sexuelle, ne ferme les yeux ou ne trouve des excuses. Pendant beaucoup trop longtemps, les membres des Forces armées canadiennes ont subi l'influence négative d'une culture qui est influencée par des conceptions dépassées du guerrier, une culture façonnée par l'hypermasculinité, une culture qui valorise l'affirmation de soi, l'agressivité et la compétitivité; une culture qui perpétue les rôles stéréotypés de genre et exclut ceux qui ne correspondent pas au modèle. Cet idéal imprègne les cultures militaires du monde entier. C'est évident dans ce qu'on raconte des bizutages et initiations, dans les incidents constants d'inconduite sexuelle. Ce n'était pas acceptable pas le passé, et ce ne l'est pas plus aujourd'hui.
Nous savons que nous devons changer notre culture afin de prévenir l'inconduite sexuelle. Notre valeur fondamentale qui prône le respect et la dignité pour tous doit régir tous les comportements et toutes les attitudes. Le changement ne se fera pas tout seul. Il faut adopter une approche tenace, méthodique et holistique. Tous les membres de l'organisation doivent s'y investir.
Ces deux derniers mois, les membres des Forces armées canadiennes et les civils de toute l'équipe de la Défense ont eu des discussions importantes sur les problèmes qui persistent dans nos organisations. Elles ont été motivées et éclairées par ceux qui ont fait part de leurs expériences, mais la responsabilité de s'attaquer à l'inconduite sexuelle ne repose pas sur les épaules des victimes. Elle repose sur nous tous.
Il revient aux dirigeants de toute l'équipe de la Défense d'établir une culture où chacun est traité avec dignité et respect. Il appartient aux commandants de protéger leur personnel contre les représailles. Il incombe à tous les membres de notre organisation d'intervenir quand ils sont témoins d'incidents et de se soutenir les uns les autres. Nous devons continuer à bâtir la confiance les uns envers les autres et envers nos organisations, une confiance qui doit être méritée et non tenue pour acquise.
C'en est assez de la politique. Nous devons nous concentrer sur les survivants et les victimes qui se manifestent. Nous devons maintenant agir et changer la culture des Forces armées canadiennes.
Madame la présidente, merci de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous encore une fois.
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Merci, madame la présidente.
Merci d'être parmi nous, monsieur le ministre, et merci à tous les autres témoins également.
L'un des membres des forces a dit qu'il y a des allégations sérieuses et vérifiées à l'encontre d'un haut gradé, mais il ne convient pas de présumer des conclusions. Des enquêtes sont en cours, et ce sont elles qui permettront de voir quelles allégations sont confirmées.
Monsieur le ministre, je suis ravi que vous ayez passé la majeure partie de votre temps à parler des changements à apporter, et mes questions, après ce tour-ci, porteront entièrement sur cet aspect. Les centaines de personnes touchées, surtout des femmes, qui veulent être protégées, voudraient vraiment que les membres du Comité travaillent là-dessus. C'est le résultat le plus important auquel le Comité peut parvenir. C'est une responsabilité qui nous incombe à tous. Nous devons vraiment améliorer le système, et j'espère que nous en discuterons. Nous allons certainement poser beaucoup de questions à ce sujet. Nous devons aller de l'avant. Vous avez préconisé cette attitude, et nous sommes ravis que vous ayez parlé de la souplesse nécessaire pour aller de l'avant et apporter ces changements afin de protéger les hommes et les femmes des forces armées.
Je veux simplement m'assurer que, pour ce tour... Y a-t-il autre chose que vous vouliez dire au sujet des raisons qui vous poussent à comparaître aujourd'hui à la place de votre ancienne cheffe de cabinet, Zita Astravas?
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Madame la présidente, comme vous l'avez dit, il est important que les ministres interviennent à la place de leur personnel. Ils doivent rendre compte au Parlement de ce qui se passe dans leur ministère. C'est exactement ce que nous faisons.
Dans ce cas-ci, madame la présidente, toute l'équipe de la Défense et moi cherchons avant tout à comprendre la situation et à trouver les moyens d'apporter le changement de culture que tous les membres du Comité et nous souhaitons. J'attends avec impatience les recommandations du Comité et de tous les députés, parce qu'en fin de compte, c'est ce que... Lorsque nous avons formé le gouvernement, nous voulions créer un environnement accueillant pour tous les Canadiens, non seulement dans les Forces canadiennes, mais partout au Canada. C'est un objectif que nous avons pris très au sérieux.
Nous avons pris le rapport de Mme Deschamps très au sérieux avant même de former le gouvernement. Nous déployons beaucoup d'efforts pour apporter les changements voulus. Nous savons qu'il reste encore beaucoup de travail à faire, mais nous voulons continuer à l'accomplir. Plus important encore, nous devons pouvoir entendre le point de vue des experts. Nous devons entendre les survivants. Nous devons entendre les femmes des Forces armées canadiennes, qu'elles soient en service ou à la retraite. C'est ce qui nous permettra d'apporter ce changement de culture. Nous voulons agir le plus énergiquement possible, mais notre objectif ultime sera toujours la tolérance zéro.
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Si je comprends bien, quand cela fait votre affaire, vous laissez témoigner les fonctionnaires, et, quand cela ne fait pas votre affaire, vous ne les laissez pas témoigner.
Vous avez laissé entendre au Comité, le 12 mars dernier, que M. Walbourne n'avait pas fait son travail et qu'il aurait pu donner ses informations à d'autres personnes qu'à vous.
Pourtant, quand nous avons reçu M. Lick, l'ombudsman actuel — je ne me souviens pas si c'était à ce comité-ci ou au Comité permanent de la condition féminine —, il a dit que, s'il avait eu à agir, il aurait agi exactement de la même façon que M. Walbourne.
À votre avis, les deux ombudsmans, l'ancien et le nouveau, comprennent-ils mal la nature de leur travail, alors que vous, vous avez raison?
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Madame la présidente, je reviens sur la première affirmation du député. Non, mon personnel n'est jamais venu témoigner devant le Comité. J'ai toujours parlé au nom de mon ministère. Je suis accompagné du sous-ministre, du juge-avocat général, parfois du vice-chef d'état-major de la défense et, dans ce cas-ci, du chef d'état-major de la défense par intérim.
Pour répondre à l'autre question que le député a posée, je dirai qu'il est important, lorsque des allégations surgissent au sujet de quiconque, et a fortiori au sujet d'une personne nommée par le gouverneur en conseil, de suivre le processus approprié, sans ingérence politique, et d'assurer une indépendance absolue s'il y a lieu de lancer une enquête. C'est exactement ce qui s'est passé, et nous avons agi immédiatement, madame la présidente.
Le lendemain, le Bureau du Conseil privé a fait un suivi auprès de M. Walbourne. Je suis heureux de le répéter encore et encore. Il est tellement important que, chaque fois que nous recevons de l'information sur quelqu'un, quel que soit son grade ou son poste, nous prenions des mesures concrètes.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie le ministre de comparaître aujourd'hui pour parler de la responsabilité ministérielle. Cela touche au cœur du problème, soit le fait qu'on ne s'attaque pas à l'inconduite sexuelle dans les Forces canadiennes.
Lorsque l'opération Honour a été annoncée, en 2015, j'ai été parmi ceux qui ont félicité les militaires canadiens d'avoir pris acte du problème et d'avoir entrepris de le résoudre, mais ce que nous avons entendu à maintes reprises, c'est que l'opération Honour a en fait échoué. Au cours de cette étude, des témoins nous ont dit à plusieurs reprises que les membres des Forces armées canadiennes estimaient qu'il y avait deux normes différentes et que les hauts gradés des Forces armées canadiennes n'étaient pas tenus de respecter les mêmes normes que les simples soldats dans le cadre de l'opération Honour. C'est là le cœur du problème. Aucune des mesures prises ne peut avoir la moindre crédibilité, s'il s'agit de garantir aux femmes qu'elles peuvent servir dans les forces sur un pied d'égalité, si on ne fait rien pour réprimer les inconduites au plus haut niveau.
Monsieur le ministre, ma question est très directe. Le général Vance a été autorisé à rester chef d'état-major de la défense après que des allégations crédibles d'inconduite sexuelle eurent été soulevées contre lui. Qui est le ministre responsable du maintien du général à son poste de chef d'état-major de la défense dans ces circonstances?
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Madame la présidente, je le répète, chaque fois que des renseignements sont présentés, quel que soit le grade ou le poste... Dans ce cas-ci, il s'agissait de la nomination par le gouverneur en conseil de l'ancien chef d'état-major de la défense. Il fallait s'assurer que l'information présentée, que les allégations soient prises extrêmement au sérieux, et elles l'ont bel et bien été. Il est important d'appliquer à la lettre le processus prévu. Autrement, on risque de ne pas parvenir à une juste conclusion.
J'ai pris très au sérieux ma responsabilité envers les Forces canadiennes dès mon arrivée. L'accent que nous mettons sur nos effectifs, l'accent que le gouvernement met sur tous les types d'inconduite systémique, surtout l'inconduite sexuelle... nous avons pris des mesures.
Pour ce qui est de l'opération Honour, oui, elle a suivi son cours. Elle a commencé avant que nous ne formions le gouvernement. Nous essayons de voir ce qui a fonctionné, ce que nous devons conserver et ce que nous devons changer. Notre équipe a travaillé d'arrache-pied, même avant que les allégations concernant l'ancien chef d'état-major de la défense ne surgissent cette année. Nous voulions travailler à un changement de culture complet, ce dont nous discutions déjà. Nous avons tenu compte de toutes les formes d'inconduite. Nous avons mis sur pied un comité composé d'anciens membres actifs qui ont vécu diverses expériences, ce qui peut aller du racisme systémique jusqu'aux préjugés sexistes et à l'inconduite sexuelle, afin de pouvoir aller de l'avant.
Madame la présidente, l'une des choses que je préconiserai toujours auprès de tous les hauts dirigeants, c'est qu'il faut regarder vers l'avenir et créer un environnement inclusif. Non, ce ne sera pas facile, mais je peux vous assurer que personne ne va chômer. Tous les membres des forces armées, y compris le chef d'état-major de la défense par intérim et le sous-ministre, et vous tous continuerez de travailler pour apporter les changements nécessaires.
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Merci, madame la présidente.
Mes questions porteront sur les problèmes de harcèlement sexuel et d'agression sexuelle chez les militaires, mais je voudrais au préalable réagir à l'affirmation de quelqu'un qui a déjà pris la parole, affirmation selon laquelle le ministre aurait dû commander une enquête.
Il est important de se rappeler, et nous l'avons entendu à maintes reprises au Comité, que tout ce qu'un ministre peut faire, c'est s'en remettre aux autorités, qui peuvent alors entreprendre une enquête de façon à protéger la victime, à suivre la procédure établie et à respecter des normes de professionnalisme et d'impartialité. Évidemment, si le ministre ordonnait une enquête, ce serait de l'ingérence.
Je voulais poser des questions sur les traumatismes sexuels en milieu militaire. Je m'adresse d'abord à Mme Preston.
Madame Preston, à votre connaissance, quel soutien offre-t-on aux membres des Forces canadiennes qui ont subi un traumatisme sexuel?
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Merci beaucoup de la question.
Je vais en fait demander à Mme Preston de répondre à cette question, mais nous voulions nous assurer, dès le départ, que, quand quelqu'un se décide à parler... Imaginez ce que cette personne a vécu. Nous voulions nous assurer qu'elle aurait non seulement le soutien psychologique nécessaire, mais aussi de bons conseils sur la marche à suivre.
Par exemple, nous nous interrogeons en ce moment sur le moyen d'offrir à une personne victime d'une inconduite quelconque la possibilité d'obtenir le soutien, les conseils et les directives juridiques dont elle a besoin et le suivi nécessaire tout au long du processus.
Madame Preston, pourriez-vous apporter des précisions, s'il vous plaît?
Comme je l'ai dit tout à l'heure, les militaires peuvent bénéficier de diverses mesures de soutien en s'adressant aux services de santé ou au Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle. Ils peuvent également être aiguillés vers des spécialistes civils. Il existe également un programme de contributions dans le cadre duquel nous finançons neuf centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle, situés à proximité des bases partout au pays. Cela permet de demander de l'aide à l'extérieur de l'armée si on préfère parler à des fournisseurs de services non militaires.
Nous songeons à améliorer des services, par exemple le programme de coordination des interventions et du soutien dont je vous ai déjà parlé, qui offre un soutien du début à la fin du parcours d'une victime. C'est un modèle centralisé, offert depuis Ottawa, mais nous enverrons du personnel par avion, pour offrir de l'accompagnement par exemple. Nous sommes en train d'élargir ce programme pour avoir des centres régionaux et offrir plus de soutien rapproché.
Nous réfléchissons à d'autres améliorations — par exemple, l'offre de conseils juridiques indépendants aux militaires, ainsi que des programmes de soutien par les pairs, en ligne et en personne.
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En fait, pour ceux et celles qui ont vécu une agression, qu'il s'agisse ou non de militaires, la décision de dénoncer est très difficile. On sait que, à l'extérieur de l'armée, dans le monde civil, seulement environ 5 % des agressions sexuelles sont signalées à la police.
Dans l'armée, les taux de signalement sont plus élevés. Cela va de 20 à 25 %. Je dois cependant préciser que 40 % de ces signalements sont faits par des tiers, ce qui dessaisit les victimes de leur pouvoir.
Les raisons de ne pas dénoncer un cas d'inconduite sont multiples. C'est une situation extrêmement embarrassante, très délicate et très personnelle. Les victimes commencent par se blâmer elles-mêmes avant même de songer à dénoncer. Ensuite, une fois cette difficulté surmontée, ce que vous dites est vrai. Il y a la crainte de ne pas être crues et la peur des représailles et des répercussions sur la carrière. Il y a toutes sortes de craintes, et pas seulement des représailles. Les représailles existent, c'est une réalité.
Il faut dire que le système n'inspire pas confiance — du fait même que les mécanismes ne sont pas rapides et que les militaires n'obtiennent pas l'information dont ils ont besoin pour bénéficier de ce système — et que les résultats de la procédure sont insatisfaisants, qu'il s'agisse du règlement obtenu ou du temps qu'il a fallu pour y arriver.
Les raisons pour lesquelles les victimes hésitent à signaler ce genre de situation sont multiples.
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Je remercie le député de sa question.
Il faut indiquer que le système de justice militaire joue un rôle important afin de traiter des questions d'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes. C'est un système qui agit en partenariat avec les autres systèmes qui sont mis en place dans les Forces armées canadiennes pour l'éducation et la prévention de l'inconduite sexuelle.
J'aimerais souligner que, lorsqu'il y a un incident d'inconduite sexuelle, la victime ou la survivante a le choix de le rapporter au système de police civile ou au système de police des Forces armées canadiennes, c'est-à-dire le Service national des enquêtes des Forces canadiennes.
Il est évident, comme le disait la Dre Preston, qu'il y a une série de défis et de blocages qui se présentent aux victimes et aux survivantes. Lorsqu'on ira de l'avant, il faudra s'assurer de les écouter et les soutenir davantage et de les respecter, afin qu'elles puissent regagner confiance non seulement dans le système de justice militaire, mais aussi dans le système criminel civil, ainsi que dans la chaîne de commandement.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci encore à tous les témoins d'être ici.
Nous avons entendu des témoignages très complets. Nous en sommes arrivés à certaines conclusions plus définitives qu'auparavant. L'une de ces conclusions est qu'il y a une responsabilité ministérielle. Le personnel politique exonéré n'a pas de comptes à rendre à la population canadienne, mais les ministres, eux, en ont.
Un très solide point de vue s'est par ailleurs révélé, appuyé par l'ancien chef de cabinet du premier ministre Harper, selon lequel il ne convient pas que des élus lancent une enquête ou y participent. À mon avis, il est très important que le Comité en prenne note.
Monsieur le ministre, je voulais profiter du fait que vous et l'équipe de la plus haute direction des Forces armées canadiennes soyez présents ici encore une fois pour vous demander de réexaminer la question du changement de culture. Vous avez dit dans votre exposé préliminaire, il y a plusieurs semaines, que « nous devons changer notre culture » et que « le temps de la patience est maintenant révolu ». Des témoins nous ont expliqué qu'il existe des paliers au sein des Forces canadiennes, que l'ouverture au changement pourrait être plus large parmi les militaires des rangs inférieurs et que la difficulté se trouve aux rangs supérieurs. Je cite un de nos témoins au sujet de la réticence des hauts gradés à changer.
Est-ce que vous et vos collègues pourriez dire au Comité comment précisément faire progresser de façon tangible une évolution systémique au sein des Forces canadiennes compte tenu de notre mandat? Sur quoi pourrions-nous nous concentrer en matière de culture? Il y a des aspects positifs à la culture, mais il y a aussi des aspects négatifs. Comment résoudre ce problème? Comment vraiment réaliser le changement que méritent les femmes et les hommes des Forces canadiennes, ainsi que les aspirants qui voudraient un jour servir dans l'armée?
Je vais vous laisser commencer, puis j'aurai des questions complémentaires à l'intention de votre équipe.
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Merci beaucoup de cette excellente question.
Nous nous intéressons à la question du changement de culture depuis un certain temps. Je l'ai dit publiquement. Il s'agit de veiller à protéger nos militaires de tous les rangs. Il s'agit de veiller à ce que nos recrues soient prises en charge tout au long du processus et à leur offrir un environnement inclusif de sorte que tous ceux et celles, quels qu'ils soient — sur les plans du genre, de l'orientation sexuelle, de la religion, de la couleur, etc. —, qui décident de s'enrôler dans les Forces armées canadiennes aient une chance juste et égale de réussir et que leurs compétences soient valorisées.
Évidemment qu'il y a de la résistance au changement, mais nous nous y attaquons vigoureusement. Nous devons également veiller à ce que ceux et celles qui ont été victimes d'agression dénoncent cette situation et reçoivent de l'aide. L'objectif est d'essayer de prévenir ce genre d'inconduite. Et cela se fera grâce à un changement de culture. Ces discussions ont cours depuis un certain temps. C'est l'objet du travail du groupe d'experts indépendant. Il y aura un changement de culture. Il faut d'abord que les hauts gradés participent pleinement à ce changement de culture, pour que les choses soient faites correctement au fil de la hiérarchie.
C'est à nous, au bout du compte, qu'incombe cette responsabilité.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Monsieur le ministre, à écouter les réponses que vous nous donnez depuis le début, j'ai presque l'impression que c'est vous qui êtes la victime dans cette situation, c'est-à-dire que vous êtes complètement impuissant et que vous avez tout fait correctement.
C'est un peu difficile à suivre, après avoir entendu les témoignages de l'ombudsman, M. Lick, de son prédécesseur, M. Walbourne, et du lieutenant-colonel Leblanc. Chaque fois qu'on leur a demandé si cela aurait constitué de l'ingérence que le ministre décide de dire qu'il y a un problème et de prendre les mesures nécessaires, ils ont tous répondu non.
J'essaie donc de comprendre pourquoi vous continuez de maintenir que, si vous aviez pris des mesures, cela aurait été de l'ingérence, alors que tous les experts crédibles en la matière disent que ce n'est pas le cas.
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Madame la présidente, je vais essayer d'être le plus clair possible.
La question est posée avec beaucoup de recul. Imaginez qu'on me communique des renseignements. Mon intention a été aussitôt de m'assurer de ne pas accueillir l'information confiée à l'ombudsman pour éviter de l'altérer. Et je dis bien immédiatement, car je sais, d'après ma propre expérience de détective, que, dans une enquête, il faut envisager la possibilité que l'affaire soit portée devant les tribunaux, et que la dernière chose à faire est d'intervenir.
En l'occurrence, j'ai pris l'affaire très au sérieux et je voulais m'assurer que l'information serait transmise au BCP, qui est responsable des nominations par le gouverneur en conseil, parce que c'est ce qu'il faut faire, pour que la décision soit prise et le suivi effectué indépendamment des élus, y compris moi-même. Ensuite, si les choses évoluaient autrement, d'autres décisions pourraient être prises. Il s'agissait de protéger l'intégrité de l'enquête, madame la présidente. Il n'y avait pas d'autre raison. Je ne peux pas dire les choses autrement. C'est le sérieux avec lequel j'ai traité ces affaires, compte tenu de mon expérience de détective.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Puisqu'il en a été question dans le témoignage d'aujourd'hui, monsieur le ministre, je tiens à vous remercier des services que vous avez rendus à ce pays dans l'armée et des nombreuses années pendant lesquelles vous avez servi honorablement. Merci.
En fait, j'aimerais adresser mes questions au général Eyre. Je vous souhaite la bienvenue, général, et je tiens à souligner que c'est la première fois que vous comparaissez devant le Comité à titre de chef d'état-major de la défense par intérim. Bienvenue parmi nous dans ce nouveau rôle.
J'aimerais revenir sur certaines des choses que vous avez dites lors de votre comparution devant le comité de la condition féminine le mois dernier. Vous avez fait une déclaration très importante au sujet de l'opération Honour.
On sait bien que, quand on essaie de trouver des solutions et des moyens de changer la culture institutionnelle, on peut faire des choses avec les meilleures intentions du monde et provoquer des répercussions inattendues. Je crois que vous avez parlé, à cet égard, de l'obligation de rendre compte. L'un des mots que vous avez employés... J'ai entendu des victimes dire que c'était quelque chose de tout à fait bienvenu.
Vous avez dit que l'opération Honour avait atteint son « point culminant ». Pourriez-vous expliquer ce que vous entendiez par là et nous parler des prochaines étapes? Que faire maintenant pour s'assurer de tirer les leçons de l'expérience, mais aussi pour s'assurer de ne pas répéter les erreurs commises par le passé?
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Merci de cette question. Il faudrait un certain temps pour décortiquer tout cela.
Je dois dire, tout d'abord, que nous n'avons pas toutes les réponses. En gardant cela à l'esprit, nous pourrons mieux élaborer nos mesures.
Le cadre que nous avons adopté est fondé sur l'écoute, l'apprentissage et l'action, c'est-à-dire écouter nos militaires des rangs inférieurs, écouter les victimes, écouter les experts externes, écouter les experts internes, écouter les universitaires et entendre ce qu'ils ont à dire sur ce qu'il faudrait faire. Nous devons apprendre. Nous devons prendre acte de tous les rapports qui ont été déposés. Nous devons prendre acte des résultats de l'opération Honour pour voir ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné.
Ensuite, nous devons agir. Ce faisant, nous devons recueillir toutes les suggestions, concilier les idées et les intégrer dans un plan délibéré, parce que le changement de culture ne se fait pas du jour au lendemain. Ce plan doit aussi comprendre certains objectifs à très court terme.
Concernant l'opération Honour et son « point culminant », cette expression militaire signifie précisément qu'une opération ne peut pas aller plus loin, qu'elle est à court de ressources, qu'elle est à bout de souffle. Il faut passer à autre chose. Il est très clair que l'opération Honour doit se transformer en un plan délibéré qui permettra de combler les lacunes circonscrites par notre personnel.
À l'avenir, nous devrons envisager le changement de culture du point de vue des victimes. Oui, on peut parler des progrès accomplis depuis 15 ou 20 ans, mais, pour une victime, cela n'a probablement pas d'importance. Je crois aussi très important de modifier notre cadre de référence.
Vous avez parlé de l'obligation de rendre compte. Je suis de plus en plus convaincu qu'il faut remplacer « obligation de rendre compte » par « obligation de réagir ». Nos militaires doivent en effet signaler les actes répréhensibles dont ils sont témoins, mais nous devons aussi donner des moyens aux victimes. Elles doivent avoir leur mot à dire dans le suivi de leur dossier. Je crois que la transition de l'obligation de rendre compte à l'obligation de réagir en sera un aspect important.
Les idées nous arrivent constamment. Il faut les concilier, mais nous sommes en bonne voie.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Avec le temps, on a appris que, lorsque l'ancien ombudsman, M. Walbourne, s'est adressé à vous, monsieur le ministre Sajjan, vous avez transféré l'information au Bureau du Conseil privé. Celui-ci a communiqué avec l'ombudsman, qui a refusé de lui transmettre de l'information parce que, dans la chaîne de commandement, le bureau de l'ombudsman ne relève pas du Bureau du Conseil privé, mais plutôt du ministre de la Défense nationale. Il ne peut donc pas transférer au Bureau du Conseil privé de l'information de nature confidentielle, par exemple. Or il n'y a pas eu d'enquête, finalement. On s'est donc retrouvé dans un cul-de-sac.
Trouvez-vous normal que, finalement, le cul-de-sac ait été votre bureau?
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C'est une très bonne question. Permettez-moi de préciser.
Si un citoyen lambda donnait de l'information, ce serait une autre histoire. Dans ce cas, on parle de l'ombudsman, dont les directives précisent à qui l'information peut être transmise, et le juge-avocat général peut en fait vous fournir ces renseignements à ce sujet, au grand prévôt, au juge-avocat général également, et cela peut aussi être transmis au Service national des enquêtes. Le juge-avocat général pourra apporter des précisions si quelque chose m'a échappé.
Dans ce cas-ci, comme il s'agit d'une nomination par le gouverneur en conseil, le traitement de l'information est extrêmement important. Je comprends ceux qui remettent en question ce que j'aurais dû faire, mais je vous le dis, je voulais m'assurer que l'information, quelle qu'elle soit, était traitée de façon indépendante, de sorte qu'au bout du compte, si jamais elle se retrouvait devant les tribunaux, il n'y a aucune raison pour laquelle une personne pourrait s'en tirer. Je voulais m'assurer que l'intégrité du processus soit protégée. En fait, j'ai été plus prudent que la moyenne en m'assurant de cela.
Si vous me le permettez, j'aimerais revenir sur un sujet dont je n'ai pas eu l'occasion de parler avec vous au cours de ma dernière série de questions, c'est-à-dire les différentes tailles d'équipement et de vêtements qui ne sont pas normalement en stock dans les bases.
Je sais, lieutenant-général, que vous avez parlé de cette question, mais nous avons été interrompus. J'aimerais revenir sur le fait que, dans bien des cas, du moins à l'heure actuelle, lorsque du matériel différent est nécessaire, le paiement est effectué à même un budget de base ou un budget local. Je vous prie de m'excuser — je ne connais pas toutes les structures, mais ce que je comprends, c'est que le paiement provient d'un budget de base.
Ce coût pose un défi pour l'intégration, parce qu'il faut prendre des décisions pour dépenser cet argent au niveau local, et c'est ce que j'ai entendu de la part des membres qui ont servi dans les Forces armées canadiennes.
Je vous demande donc si vous appuyez cette façon de procéder et quelles mesures vous prendriez pour vous assurer qu'elle ne constitue plus un obstacle. Autrement dit, y aurait-il un budget distinct pour s'assurer que cet équipement puisse être acheté sans nuire aux budgets de fonctionnement locaux de la base?
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Madame la présidente, lorsque je dis que toutes les options sont sur la table, nous ne devons rien laisser au hasard. Le premier aspect, qui est le plus troublant, c'est qu'un membre n'était pas sûr de pouvoir se manifester, à cause de la chaîne de commandement. Nous devons faire preuve d'indépendance et donner aux membres l'assurance de pouvoir se manifester. Nous devons nous pencher sur cet aspect au sein des Forces armées canadiennes, et nous devons aussi examiner un système externe. Ce problème systémique est beaucoup plus important que celui des Forces armées canadiennes. Il y a donc cet aspect à considérer. Comme le chef d'état-major de la Défense par intérim vient de le mentionner, nous envisageons actuellement un poste d'inspecteur général à cet égard, mais comment serait-il structuré?
Je ne veux pas faire une annonce pour le simple plaisir de dire que nous avons fait quelque chose. Je veux voir ce qui va réellement entraîner ce changement de culture. Par exemple, d'après ce que nous ont dit nos survivants et les membres qui ont servi dans les Forces armées canadiennes et qui servent actuellement, nous devons examiner où doit se produire le changement de culture, et c'est aux échelons inférieurs. Comment pouvons-nous nous assurer qu'aux plus bas échelons, nous choisissons les bons dirigeants? Devons-nous envisager — et je pose la question pour la forme — des entrevues tous azimuts? Nous devons examiner non seulement le rendement de la personne, mais aussi déterminer si elle exerce un ascendant et si elle est apte à commander. Nous devons nous demander de quel type de personne il s'agit et nous assurer que, lorsque quelqu'un doit prendre le commandement d'une unité ou commander un navire ou même un escadron, il doit obtenir ce commandement.
Des entrevues tous azimuts, des évaluations d'unité et, plus important encore, la formation qui s'impose, doivent être effectués de sorte qu'à partir du moment où quelqu'un se joint à l'équipe, peu importe ses opinions, on s'attend à ce que tout le monde sache clairement ce qui doit être fait. Plus important encore, si un problème survient, à qui peut-on s'adresser pour obtenir le bon soutien, mais aussi pour obtenir justice?
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Je vous remercie, madame la présidente.
Monsieur le ministre, vous nous avez beaucoup parlé de responsabilité ministérielle, aujourd'hui. C'est la raison que vous avez évoquée pour expliquer pourquoi votre personnel n'aurait pas le droit de témoigner devant ce comité. Pourtant, vous avez refusé toute responsabilité quant aux raisons pour lesquelles il n'y a pas eu d'enquête sur le général Vance et pour lesquelles il est resté en place pendant des années, malgré les allégations qui pesaient contre lui.
C'est sous votre gouvernement que l'opération Honneur a été un échec, on va se le dire. C'est aussi sous votre gouvernement que l'affaire entourant l'amiral McDonald a vu le jour, tout comme l'affaire entourant la personne responsable des ressources humaines au sein des Forces armées canadiennes.
Compte tenu de tous ces éléments qui s'accumulent, est-ce que vous pensez que cette responsabilité ministérielle, théoriquement, devrait s'appliquer à vous?
Acceptez-vous la responsabilité de toutes ces situations?
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Absolument, pour tout ce qui se passe au ministère, malgré les difficultés auxquelles nous avons fait face, je prends la responsabilité ministérielle très au sérieux. En ce qui concerne les défis que nous avons... L'opération Honour est devenue une affaire de nom et d'individu, mais ce dont nous avons besoin, c'est d'un effort d'équipe complet, et c'est exactement ce que nous faisons. Lorsque de telles situations se produisent, il ne s'agit pas de fuir les problèmes; il faut avancer et apporter les changements nécessaires, et c'est exactement ce que nous faisons.
Les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui en raison de la grande médiatisation des allégations... Nous savons que des gens souffrent, et nous nous sommes engagés dès le départ à créer un environnement inclusif. J'ai parlé à beaucoup d'entre vous, y compris au député, madame la présidente, et nous n'allons pas nous arrêter là.
Oui, je suis responsable de ce qui se passe, mais je vais m'assurer que nous maintenons ces progrès et que nous maintenons ce qui a fonctionné dans le cadre de l'opération Honour, mais je vais aussi voir comment nous pouvons accélérer le changement nécessaire. J'ai entendu de très bons exemples, et ce que nous devons maintenant faire, c'est déterminer exactement comment ces recommandations vont fonctionner et, plus important encore, comment nous allons pouvoir mesurer les résultats et ne pas simplement annoncer que le processus est terminé. Nous devons être en mesure d'être assez souples pour que tout ce que nous mettons en place puisse survivre à un gouvernement et à des ministres, de sorte que le changement ne puisse pas régresser et qu'il puisse toujours se poursuivre, parce que la société va évoluer et que les Forces armées canadiennes doivent continuer d'évoluer avec elle.
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Madame la présidente, nous voulons que toutes les personnes qui ont une plainte puissent se manifester afin que nous puissions prendre les mesures qui s'imposent et que, lorsque quelqu'un se manifeste, nous prenions immédiatement des mesures qui peuvent aboutir à un résultat équitable.
Dans ce cas-ci, malheureusement, l'intéressée n'a pas fourni l'information. Ce n'est pas à nous de juger pourquoi cela s'est produit ou non. Notre rôle est de mettre en place un processus approprié afin que, lorsqu'une personne désire loger une plainte, elle ait pleinement la possibilité de le faire.
Ce que nous voulons faire, pour que personne ne craigne des représailles, c'est donner aux gens les moyens de se manifester. S'ils le font, ils seront entendus, écoutés et soutenus et ils recevront les conseils appropriés sur la procédure à suivre. C'est exactement notre objectif.
À l'heure actuelle, même si nous avons des systèmes en place, nous savons qu'ils ne sont pas suffisants. Nous allons examiner la possibilité de regrouper un grand nombre de ces systèmes pour qu'il n'y ait qu'un seul endroit où appeler, peu importe la nature de l'inconduite.
Nous devons approfondir l'indépendance dont vous avez tous parlé, pour bien faire les choses. Nous voulons nous assurer, pour ce qui est de l'indépendance, que les gens ont l'assurance que s'ils portent plainte, des mesures seront prises. Dans ce cas-ci, madame la présidente, nous avons pris des mesures. Évidemment, nous aurions aimé que le résultat soit différent, mais dans ce cas-ci, nous devons protéger le processus, parce qu'en fin de compte si, d'une manière ou d'une autre, nous perturbons par inadvertance le processus indépendant, nous compromettrons un résultat juste dans notre société.
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Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Dans le temps qu'il me reste, j'aimerais vous ramener encore une fois en arrière.
Vous avez beaucoup parlé des options possibles pour l'avenir. En plus d'examiner les plaintes dont nous sommes saisis, le défi fondamental de notre comité est vraiment d'orienter les Forces canadiennes dans une direction différente.
Il y a quelques minutes, vous avez eu un échange avec mon collègue, M. Robillard.
Quel serait l'élément que vous voudriez changer plus rapidement, peut-être même avant d'autres priorités dans la même veine, pour vraiment amorcer un changement de culture avec profondeur et direction?
Y a-t-il une priorité que vous demanderiez au Comité d'examiner plus à fond, peut-être, afin qu'il formule des recommandations?
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En fait, il s'agit plutôt de voir pourquoi les personnes qui ont des allégations à formuler ne se sentent pas à l'aise de le faire. Nous devons nous assurer de leur donner confiance, de sorte que c'est la première chose que nous devons faire, et cela comme il faut. Quels systèmes pouvons-nous avoir pour que les personnes qui désirent loger une plainte puissent le faire sans représailles? Nous y travaillons et nous aimerions entendre vos recommandations.
L'autre aspect qui est tout aussi important et qui concerne la prévention à long terme est un changement de culture. Comment créer un environnement inclusif? Cela pourrait être en ayant un environnement exempt de harcèlement où un processus indépendant permettra de donner aux gens l'assurance que, s'ils ont une plainte, ils seront entendus et que des mesures pourront être prises.
En fin de compte, ce que j'aimerais voir ressortir de tout cela, madame la présidente, c'est que lorsqu'une personne signe sur la ligne pointillée pour se donner entièrement — vous l'avez fait, les membres du Comité l'ont fait et je l'ai fait, en disant littéralement que j'étais prêt à risquer ma vie — elle puisse obtenir tout ce dont elle a besoin pour avoir un environnement inclusif afin de pouvoir ajouter de la valeur aux Forces armées canadiennes.
Les militaires qui sont parties... et ce sont ces départs qui sont le résultat le plus inquiétant de tout cela. Notre organisation a perdu du terrain. J'ai vu l'impact des femmes dans les armes de combat. J'ai eu des conversations avec de nombreux militaires qui m'ont demandé ce que je pensais des femmes au combat. Je leur réponds: désolé, mais nous avons déjà eu cette conversation il y a longtemps. Prenez l'Afghanistan.
La dernière récipiendaire du prix du capitaine Nichola Goddard... J'ai servi avec elle en 2006. Liz faisait partie de la section dans laquelle j'ai servi. Combien de fois ai-je été témoin de sa bravoure qui a littéralement sauvé nos vies? Quand vous voyez cela, et que vous regardez... Nous parlons de masculinité toxique, mais ce ne sont pas vos muscles qui vous mènent là, c'est la grandeur de votre cœur. Êtes-vous prêt à risquer votre vie? C'est donc ce que tout le monde a fait.
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Bonjour et bienvenue à tous.
[Traduction]
Pour ceux qui viennent de se joindre à nous pour la deuxième moitié de la séance d'aujourd'hui, je déclare la séance ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le mardi 9 février, le vendredi 12 mars et le lundi 22 mars, le Comité reprend son étude des mesures à considérer face aux problèmes d'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes, y compris les allégations à l'endroit de l'ancien chef d'état-major de la Défense Jonathan Vance.
Aujourd'hui, par vidéoconférence, nous entendrons, à titre personnel, M. Michael Wernick, ancien greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet. Nous accueillons également M. Gregory Lick, ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes.
Vous aurez jusqu'à six minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Je crois comprendre que M. Lick fait une déclaration préliminaire, mais pas M. Wernick. Nous pouvons poursuivre maintenant.
Monsieur Lick, je vous invite à prendre la parole et à faire votre déclaration préliminaire. Merci.
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Bonjour, madame la présidente.
Ceci est mon premier témoignage devant le Comité au sujet de l'inconduite sexuelle dans les forces armées, et il suit mon témoignage du 25 mars qui portait sur le statut des femmes. Je suis accompagné de Robyn Hynes, directrice générale des Opérations au Bureau de l'ombudsman..
En tant qu'ombudsman, j'ai notamment pour rôle de prendre le pouls de la communauté et d'agir comme médiateur, enquêteur et rapporteur pour les questions qui touchent le MDN et les FAC, et ce, en toute neutralité et objectivité. Dans le respect de ce rôle, je ferai l'observation que nous surveillons la façon dont la question de l'inconduite sexuelle dans les forces armées est traitée dans les médias et devant les comités, avec le constat qu'il y a une plus grande préoccupation envers la posture politique et institutionnelle qu'envers la résolution du problème. Pourtant, le problème continue de se manifester dans la vraie vie des survivantes, survivants et témoins qui passent entre les mailles du filet d'un système défaillant, et qui n'osent parler par crainte de possibles représailles ou répercussions fatales pour leur carrière.
Jusqu'à maintenant, cet enjeu s'accompagne d'informations contradictoires, voire erronées. Les témoignages ont changé au sujet des personnes qui étaient au courant, du moment où elles ont été mises au courant, des personnes qui avaient le pouvoir d'agir, de ce qui aurait dû être fait et des personnes devant être tenues responsables. Je dis assez. Assez de l'autoprotection et de l'évitement. Assez du traînage de pieds politique. Il est temps de mettre nos énergies collectives sur le changement de la culture et l'établissement de processus qui seront réellement au service des personnes qui sont victimes d'inconduite de nature sexuelle ou de tout autre type d'abus de pouvoir au sein du système militaire.
J'ai énoncé plus tôt le rôle de mon bureau, mais laissez-moi le préciser davantage. L'ombudsman ne peut se pencher sur aucune allégation de nature criminelle ou pouvant constituer une infraction au Code de discipline militaire. Si, au cours du traitement d'un dossier, des indications d'actes criminels font surface, nous transférons, avec le consentement du commettant, l'affaire au Grand Prévôt — et non au BCP, au JAG ou à quelque autre instance, comme cela a été suggéré dans des témoignages précédents.
L'ombudsman rend des comptes directement au ministre de la Défense nationale. De façon générale, ce qui est attendu de nous est que nous avisions la personne à qui nous rendons des comptes lorsqu'il y a des problèmes dans l'organisation de cette même personne. Dans le cas qui a été porté à l'attention du , il n'y a pas eu d'enquête, car la personne qui a porté plainte n'y a pas consenti. Le Bureau de l'ombudsman ne mène pas d'enquête sans le consentement explicite du plaignant.
J'ai entendu de diverses sources qu'il y a des discussions en cours dans les Forces armées canadiennes et le ministère au sujet d'une reconfiguration des systèmes de traitement qui abordent cet enjeu. Je ne participe pas à ces discussions, et je ne peux pas y participer. Il y aurait un conflit d'intérêt si je contribuais à la conception de processus que je serais plus tard appelé à examiner. J'applaudis tout effort pour résoudre cet enjeu, particulièrement les efforts pour relever le défi énorme qu'est le changement de culture. Le changement de culture doit comprendre des garanties comme quoi les dénonciations d'inconduite ou d'abus de pouvoir à caractère sexuel, raciste, discriminatoire, etc., n'entraîneront pas de représailles ou de répercussions sur la carrière pour les personnes qui osent parler.
Attention cependant: la refonte des processus internes des Forces armées et du ministère de la Défense ne sera pas suffisante. Il doit y avoir une entité en dehors de la chaîne de commandement et du ministère, responsable de surveiller les mécanismes de redressement des FAC et du MDN. Cette organisation ne peut relever d'une autorité ayant un intérêt direct dans l'issue de toute affaire individuelle ou systémique.
J'ai précisé ce que mon bureau ne peut pas faire. Laissez-moi vous expliquer ce qu'il continuera à faire.
Nous écoutons nos commettants et on leur donne de l'information pertinente dans leurs cas. Lorsque cela est approprié, nous les orientons vers les services de soutien et mécanismes de redressement existants. Notre but est d'aider les commettants à se débrouiller dans un système complexe afin qu'ils puissent obtenir de l'aide et trouver le meilleur recours selon les circonstances.
Nous jouons un rôle de facilitateur ou de médiateur lorsqu'il y a rupture des communications dans un processus déjà en cours. Lorsqu'un commettant croit avoir été traité injustement dans un processus, nous pouvons examiner les étapes du processus pour nous assurer qu'il y a eu un traitement équitable et faire des recommandations au décideur pour revoir sa décision. Mon bureau peut intervenir dans des circonstances urgentes, lorsque l'accès à un mécanisme de recours existant causerait des difficultés indues au commettant ou nuirait à ses intérêts.
En plus d'offrir une assistance générale, d'agir comme médiateurs et d'examiner les processus, nous avons aussi le pouvoir d'enquêter sur des problèmes de nature systémique. Nos enquêtes sont fondées sur la collecte de données probantes et donnent lieu à des recommandations visant à améliorer le bien-être de la communauté militaire.
Au cours des dernières années, des mécanismes internes ont été établis au ministère et dans la chaîne de commandement qui ont dédoublé les fonctions remplies par le Bureau de l'ombudsman. Comme notre mandat nous oblige à orienter les commettants vers les mécanismes existants, cela a eu pour effet de graduellement remplacer des fonctions indépendantes par des fonctions internes. Malgré tout le mérite qu'ont ces initiatives, elles ne sont pas indépendantes.
Un organisme externe avec le pouvoir de garantir l'équité, la confidentialité et la protection contre les représailles est nécessaire. S'il y a une réelle volonté politique de créer une entité en dehors de la chaîne de commandement et du ministère, alors ne cherchez pas plus loin. Il faudrait relativement peu d'intervention pour que mon bureau étende ses services de soutien à la communauté de la Défense pour fournir des services de conseil, fournir des rapports statistiques supplémentaires sur les problèmes soulevés sans obligation de rapporter des cas individuels et renforcer notre capacité actuelle de garantir que tous les plaignants sont traités équitablement et que nos recommandations sont mises en œuvre en faisant rapport au Parlement sans filtre politique.
Les Forces canadiennes ne ressemblent à aucun ministère ou agence fédéral. Les questions touchant les forces armées ont une incidence sur la sécurité nationale et touchent tous les députés, circonscriptions et citoyens de ce pays. Il est essentiel que le Parlement reçoive les informations nécessaires pour que le Cabinet prenne les mesures appropriées pour traiter des questions qui pourraient jeter le discrédit sur l'institution militaire et même affecter le recrutement et le maintien du personnel.
Le Bureau de l'ombudsman a été créé, il y a plus de 23 ans, pour enquêter de façon indépendante et neutre sur des enjeux soulevés par les membres de la communauté militaire, lorsque toutes les avenues de redressement possibles du système ont été épuisées. Le Bureau agit comme un filet de sécurité lorsque le système interne défaille. Nous faisons partie de la solution, mais pas de toute la solution. Ce dont le Bureau de l'ombudsman a besoin pour continuer de faire partie de la solution est un mandat défini en loi et une existence permanente. Pour le moment, l'existence du Bureau est seulement inscrite dans une directive ministérielle et une DOAD signées par le CEMD et le SM. Notre existence pourrait cesser avec le retrait ou la modification d'un de ces instruments.
D'autres pays, comme le Royaume-Uni, l'Australie et l'Allemagne ont établi des organismes de surveillance de l'armée pleinement indépendants, ayant un mandat légal, et pouvant se rapporter au Parlement. Le Canada pourrait faire de même s'il y avait une volonté politique. Cela n'a pas été le cas jusqu'à maintenant.
Nous sommes à la croisée des chemins, et je crois que l'avenir commence par un changement de culture comprenant de solides mécanismes de redressement à l'intérieur du MDN et des FAC, avec une entité externe pleinement indépendante qui s'assure que les victimes de tout type d'inconduite ou d'injustice ne passent pas entre les mailles du filet.
Merci, madame la présidente.
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Je ne sais pas de quel témoignage vous parlez, monsieur Bezan. Je vais faire de mon mieux pour reconstituer la chronologie. Mes assistants de recherche sont Google et Wikipedia, alors j'ai fait de mon mieux pour reconstruire les événements d'il y a trois ans.
Si je me souviens bien de la séquence des événements, le vendredi 2 mars, Elder Marques est venu du deuxième étage, a demandé à me voir et a soulevé la question pour la première fois. C'est la première fois que j'en ai entendu parler. C'était le vendredi 2 mars.
Je crois comprendre, d'après les articles publiés dans les médias, que M. Walbourne est allé voir le ministre . Le ministre Sajjan en a parlé à Mme Astravas, sa chef de cabinet. Mme Astravas a contacté Elder Marques, au CPM, à un moment donné entre le 1er mars et le 2 mars.
Elder Marques est venu me voir dans la matinée du 2 mars. Il m'a dit que le s'inquiétait au sujet d'un problème concernant le chef d'état-major et qu'il voulait que nous l'examinions. J'ai dit, d'accord, vous devriez aller voir Janine Sherman, qui était, à l'époque, ma collaboratrice chargée des questions touchant le personnel supérieur, et c'est ce qui s'est passé l'après-midi.
Je peux clarifier un des articles des médias sur le courriel envoyé vers 14 heures. Son texte était: « Vous êtes difficile à trouver. Pouvons-nous nous rencontrer? Nous allons devoir mettre les choses par écrit. » C'était un courriel de Elder Marques à Janine Sherman.
Puis, il y a eu des conversations dans l'après-midi du vendredi entre Elder, Zita et Janine. Je n'ai pas participé à ces conversations. Je ne suis pas certain de pouvoir les classer dans le bon ordre, mais elles portaient effectivement sur la meilleure façon de répondre à M. Walbourne.
À la fin de la journée de vendredi... Là encore, je me fonde sur un article. Le a répondu à M. Walbourne en fin de soirée, le vendredi, en lui disant d'aller parler au BCP. Puis, le lundi matin, après la fin de semaine, Zita Astravas lui a envoyé un courriel très semblable, qui est rapporté dans l'un des articles des médias, disant qu'il devrait aller en parler au BCP.
Entre la matinée et la soirée du 2 mars, le dossier s'est effectivement retrouvé entre les mains du Bureau du Conseil privé.
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Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je crois que le principe primordial, c'est qu'il revient à la plaignante de décider si une enquête doit être menée dans cette affaire. À mon avis, la question fondamentale, surtout pour le Comité, c'est que nous devons bâtir un système qui donnera confiance à ceux qui voudront loger une plainte.
En l'espèce, si nous examinons, en rétrospective, tous les témoignages et tous les commentaires dans les médias, autant que nous le sachions, il est très probable que, lors de la conversation que mon prédécesseur a eue avec elle, la plaignante n'avait aucune confiance que quoi que ce soit serait fait. Je pense que c'est fondamentalement le problème qui se pose pour le Comité.
Essentiellement, la plaignante n'était pas convaincue que quelque chose serait fait et qu'elle serait protégée contre les représailles. Quant à savoir si le BCP est le bon organisme d'enquête dans ce cas particulier, je ne pense pas que ce soit fondamentalement la question qui se pose. Le BCP aurait pu s'en charger s'ils avaient eu l'information, comme M. Wernick l'a dit — peut-être. Mais je dirais qu'il est un peu plus complexe d'enquêter sur l'inconduite sexuelle d'un militaire que, disons, au sein d'une organisation civile. Je crois qu'il faut avoir une certaine connaissance de l'armée pour bien faire enquête. Cela pourrait peut-être être confié à un enquêteur de l'extérieur, mais fondamentalement, je pense que dans ce cas-ci, c'était le manque de confiance à l'égard de ce qui serait fait.
C'est pourquoi cette enquête particulière n'a pas été menée.
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Il vaudrait probablement mieux poser ces questions à Janine, en ce qui concerne les vérifications qui sont faites. Nous aurions des renseignements sur chacune des personnes nommées par décret en raison de leur nomination, de leur sélection et de leur processus de nomination. Nous ne tenons pas de dossier sur tous leurs faits et gestes. Cela dépend de l'endroit où elles ont travaillé et de l'organisation qu'elles ont dirigée. Lorsque nous recueillons des faits au sujet d'une allégation, nous cherchons évidemment tous les renseignements pertinents, y compris le genre de choses dont vous avez parlé.
Si vous me permettez de poursuivre dans la même veine que M. Lick, je pense qu'il s'agit d'une situation vraiment unique, parce que vous parlez de la personne à la tête même de l'organisation. Je ne préconiserais jamais que le BCP intervienne dans les affaires internes des forces armées. Ce n'est pas souhaitable, mais comme il s'agissait d'une personne nommée par décret, c'est-à-dire la personne nommée par le pouvoir exécutif à la tête de l'organisation, nous avions, dans une certaine mesure, la responsabilité d'examiner la plainte.
Une analogie peut être faite avec les allégations d'inconduite contre la commissaire à l'intégrité, Mme Ouimet, en 2010, les allégations d'inconduite contre la présidente de la Commission canadienne des droits de la personne, Mme Chotalia, en 2013, et même, dans une certaine mesure, les allégations contre la gouverneure générale en tant que chef d'État. Lorsque c'est la personne au sommet de l'organisation, à quelle autre instance s'adresser?
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C'est une excellente question, et si vous me le permettez, je pense qu'il y a plusieurs éléments de réponse.
Il s'agit en partie de reconnaître que c'est un gros problème et un défi qui va au-delà d'une seule personne. Il aurait peut-être été nécessaire d'arracher les pissenlits et de changer le leadership au sommet, mais cela n'aurait pas suffi à placer les Forces canadiennes là où nous voulons qu'elles soient.
Si vous regardez le rapport Wigston, au Royaume-Uni — que je recommande au Comité et à tous ceux qui nous regardent —, il s'agit d'un rapport exhaustif sur le même problème qui se pose dans l'armée du Royaume-Uni. Il s'agit d'un plan très complet pour aller de l'avant avec 36 recommandations, et le gouvernement Johnson s'est engagé à y donner suite et a déposé chaque année des rapports de suivi sur les progrès réalisés à cet égard. Je pense qu'un mécanisme semblable serait nécessaire.
Je suis tout à fait d'accord avec M. Lick pour dire que, quel que soit l'organisme que les parlementaires décident de créer, il devrait faire l'objet d'une loi et être permanent. Je pense qu'une des façons d'avancer serait, qu'au lieu d'attendre que le gouvernement dépose un projet de loi, le Comité et le comité de la condition féminine conseillent le gouvernement sur ce que devraient être les caractéristiques de ce projet de loi. Je suis tout à fait disposé à en parler davantage.
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Je pense que M. Lick a soulevé une question très importante. Allez-vous enchâsser l'obligation d'obtenir le consentement d'un plaignant pour donner suite à sa plainte, ou donneriez-vous à l'organisme d'enquête un certain pouvoir discrétionnaire pour agir sans ce consentement? C'est un énorme problème, et je n'ai pas d'opinion à ce sujet, mais vous feriez mieux d'y aller prudemment.
Il faut envisager toutes sortes de scénarios, y compris celui où la personne au sommet de la chaîne de commandement fait l'objet de la plainte, et ce que vous feriez dans ce cas, par exemple. C'est analogue, je crois, à ce qui se passe à la GRC, qui est aux prises avec les mêmes problèmes. Comme nous l'avons appris à Rideau Hall et ailleurs, il ne suffit pas d'avoir un processus en place. Je suis tout à fait d'accord avec M. Lick pour dire que si vous n'avez pas confiance dans le processus et que les gens n'ont pas l'impression qu'ils peuvent se manifester, vous pouvez avoir toutes les formalités, tous les pouvoirs et tous les organismes d'enquête que vous voulez.
Le gouvernement allemand a créé de nouvelles structures il y a quelques années. L'an dernier, la France a mené une enquête sur les agressions sexuelles dans ses académies militaires. Le président Biden a parlé de harcèlement sexuel et d'inconduite dans l'armée américaine, il y a à peine un mois, à l'occasion de la Journée internationale des femmes. Il est clair que nous avons un problème profondément enraciné à surmonter pour changer la culture militaire et bâtir le genre de culture militaire que nous voulons au XXIe siècle, ainsi que des systèmes de recours appropriés.
Mon conseil au gouvernement — même si ce n'est plus mon rôle d'en donner —, c'est qu'il pourrait déposer un avant-projet de loi sous forme de livre blanc afin d'en faire un exercice moins partisan pour l'élaboration du projet de loi, ou il pourrait invoquer l'article 73 du Règlement et renvoyer le projet de loi au Comité avant la deuxième lecture et vous donner beaucoup de latitude pour le modifier. Je suis d'accord avec ce que M. Lick a dit au sujet de la nécessité de faire preuve de moins de partisanerie et de moins ressasser le passé. Je crois important d'établir ce qui s'est passé, mais je pense que les cinq partis d'un gouvernement minoritaire devraient pouvoir travailler ensemble et élaborer un nouveau projet de loi.
Une mesure législative serait nécessaire, mais insuffisante. Il faut un programme beaucoup plus vaste que cela.
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On dirait que c'est le nouveau mot de 2021. Mes excuses.
Je peux me tromper, mais je crois comprendre comme vous que la nomination faite par le gouvernement Harper en 2015 était ouverte. Autrement dit, il n'a jamais été question de le prolonger. Il allait rester en poste jusqu'à ce que quelqu'un s'avise de dire: « Ça y est, nous allons avoir une passation de commandement », faire une rétro-ingénierie à partir de cette date et lancer un processus de succession. En 2018, à l'époque dont nous parlons, le général était là depuis trois ans. La convention prévoyait quatre ou cinq ans.
Si vous vérifiez, vous verrez que certains ont fait quatre ans et d'autres cinq. Faites le calcul, et vous verrez que son mandat expirerait après quatre ou cinq ans en 2019 ou 2020. Avec des élections à date fixe et le blocage des nominations importantes à l'automne 2019, il fallait décider s'il allait être en poste quatre ans ou cinq ans. La passation de commandement allait-elle précéder ou suivre les élections? C'était essentiellement... Il n'y a jamais eu de prolongation, et sa promotion de DM 2 à DM 3 remontait à 2017, après deux années en fonction.
La question était de savoir si le gouvernement devait choisir une date pour la passation de commandement et amorcer un processus de recherche pour la succession. Tel était l'essentiel des conseils et du contenu de la note que j'ai adressée— que le Bureau du Conseil privé a adressée — au au sujet du général Vance au début de juillet 2018. Cette note comporte deux choses. La première était la cote recommandée pour 2017-2018, dont je suis heureux de parler. Puis, elle soulevait la question de la durée du mandat et présentait un choix au : voulez-vous régler cela en 2019 ou en 2020?
À ce moment-là, l'intérêt du général pour le poste à l'OTAN était un facteur, tout comme ce qui était en train de devenir un roulement très rapide chez les hauts gradés de l'armée, et je suis heureux d'en parler également.
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Je vous remercie. C'est tout un compliment puisque, depuis que j'ai pris ma retraite, j'utilise rarement la langue de Molière.
Je n'ai pas de recommandation précise à faire. Si vous le voulez, je peux aborder de nouveau la question et vous donner mes conseils lorsque le gouvernement aura déposé un projet de loi. Le rapport Wigston est peut-être un modèle à suivre pour le Parlement et le gouvernement.
Mon interprétation de ce qui s'est passé, c'est qu'on a créé un cercle vicieux. Ce sera à vous, au moment de rédiger de votre rapport, de décider si vous êtes d'accord ou non avec moi. Le ministre Sajjan avait d'autres options, M. Walbourne avait d'autres options et j'avais aussi d'autres options, mais ce qui s'est passé s'est passé. Sur le fond, le fait que la source était anonyme et que la personne qui a déposé la plainte ne nous a pas donné la permission de procéder a créé une impasse.
Selon moi, c'est vraiment le système dans son ensemble qui a créé la situation.
[Traduction]
Je pense que le avait le choix de faire les choses autrement. Je pense que M. Walbourne pouvait faire les choses autrement, et je peux voir que le Bureau du Conseil privé pouvait aussi faire les choses autement, ce qui aurait changé les délais.
La somme de ce qui s'est passé a créé une impasse, et nous n'avons pas pu aller de l'avant. Je le regrette.
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Oui. Je ne voulais pas improviser mes recommandations sur la cote de rendement ou sur la durée du mandat et sur le moment où il aurait fallu procéder à la passation de commandement sans y avoir réfléchi, mais je me suis adressé au et à la sous-ministre de la Défense nationale , mes principales sources d'information à ce sujet.
Il y avait d'autres problèmes touchant la cote de rendement, si vous me permettez de les énumérer rapidement. C'était pour le cycle de rendement de 2017-2018, de sorte que les choses qui étaient dans notre ligne de visée étaient que nous en étions à la première année de la mise en œuvre de la nouvelle politique de défense, annoncée en juin 2017, et qu'il y avait des investissements à faire. Et le processus d'acquisition des avions de chasse a été relancé, après une longue interruption. Il y a eu le déploiement au Mali. Et le fait que le Canada avait accepté d'assumer le leadership de la mission d'entraînement de l'OTAN en Irak. Il s'est fait de l'excellent travail pour refermer l'écart avec le ministère des Anciens Combattants; pour la première fois depuis de nombreuses années, les Forces armées canadiennes et le ministère des Anciens Combattants travaillaient très bien ensemble. Le dossier des excuses aux militaires LGBTQ a été réglé, tout comme celui des 100 millions de dollars. Franchement, nous lui reconnaissions le mérite de l'opération Honour et du travail accompli sur les questions de santé mentale et de milieu de travail. Il y a eu beaucoup de points positifs cette année-là.
J'ai fait part au de certaines préoccupations au sujet du roulement des cadres supérieurs, parce que, à ce moment-là, le 2 mars, il y avait eu un important remaniement du groupe d'officiers supérieurs. Par coïncidence, le vendredi 2 mars était la date de l'annonce des promotions et des départs à la retraite. Tout un chambardement. Je crois qu'il y a eu un reportage de la CBC à ce sujet.
Et le 9 mars, la Gendarmerie royale du Canada a porté des accusations criminelles contre l'amiral Norman, ce qui a entraîné un autre remaniement. Puis il y a eu encore un autre au printemps, ce qui m'a amené à demander au ce qui pouvait bien se passer. C'était un facteur.
L'ambition du général Vance, qui convoitait le poste à l'OTAN, était pertinente. Je voulais savoir si le pensait que c'était réaliste ou non. Le général était-il un candidat sérieux, ou son ambition était-elle illusoire? Si je me rappelle bien, le ministre a dit que oui, sa candidature serait prise au sérieux.
Et ensuite, il y a eu le problème du maintien de bonnes relations avec l'armée américaine en 2018, avec un commandant en chef erratique à la Maison-Blanche. Le général Vance avait d'excellentes relations avec l'armée américaine. Tout cela faisait partie d'un tourbillon de problèmes, et je reconnais que nous avons perdu de vue les problèmes d'inconduite. Je ne me rappelle pas que nous nous en soyons parlé.
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Je ne suis pas le mieux placé pour donner les détails, mais vous pourriez sans doute les obtenir de Mme Sherman ou du Conseil du Trésor. Il y a un processus très formel et structuré pour les questions de harcèlement, de discrimination et d'inconduite. Les organisations ont des obligations très claires, et il y a des mécanismes de recours. Cela se rattache également à la négociation collective et au droit d'utiliser les griefs et les syndicats pour se faire représenter dans ces dossiers, et ainsi de suite.
Nous avons aussi utilisé des sondages annuels approfondis de la fonction publique et une foule de questions sur le harcèlement et la discrimination pour essayer de cerner les points chauds et de cibler avec précision les gestionnaires qui pourraient poser problème et ainsi de suite. Certes, je ne pense pas que c'était parfait ou que nous avons fait tout ce que nous aurions pu faire, mais nous avons fait des progrès.
#MoiAussi est arrivé à l'hiver 2017, et nous avons fait un examen sérieux de ce qui se passait dans la fonction publique civile. Il y avait des équipes de travail. De fait, Mme Sherman en a piloté une, sous ma direction. Mme Thomas a joué un rôle très actif en tant que sous-ministre principale, et ainsi de suite. Donc, nous nous en sommes occupés.
Cela me donne l'occasion de dire officiellement que l'une des choses que nous avons faites à la suite de #MoiAussi et de ce processus d'examen a été de modifier le processus de rémunération au rendement des personnes nommées par le gouverneur en conseil. Vous verrez sur le site Web que la dernière mise à jour de la politique date d'avril 2018. De fait, c'est le principal changement que nous avons fait: la rémunération au rendement est désormais révocable et récupérable dans les cas graves de gabegie et d'inconduite. Ce n'était pas le cas auparavant, et les coupables pouvaient s'en tirer en prenant leur retraite ou en quittant. Ce qu'ils ne peuvent plus faire.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Monsieur Wernick, j'ai trouvé tout votre témoignage très intéressant. Vous avez dit que la plaignante ne faisait pas confiance au processus et que, puisque l'ombudsman ne voulait pas transmettre plus de détails au Bureau du Conseil privé, on s'est retrouvé bloqué. Je comprends cette perspective et cette histoire.
Toutefois, d'un autre côté, en 2015, il y a eu une enquête sur des allégations du même type visant le même général. Ne vous est-il pas venu à l'idée, à cette époque, de rouvrir ces dossiers pour voir s'il n'y avait pas quelque chose qui clochait, en voyant que cela persistait dans le temps? C'est comme un boulet ou un bruit ambiant qui persiste.
Il me semble que c'est un indice assez parlant.
J'aimerais d'abord corriger certains points que certains membres du Comité ont soulevés au cours de la séance.
En premier lieu, pour ce qui est des officières générales, en 2015, il y en avait 6 à ce niveau ou plus haut, et il y en a aujourd'hui 15. Cela devrait répondre à la question sur la promotion des femmes.
L'autre chose qui me préoccupe beaucoup est que, selon ce que nous apprennent de nombreux membres du Comité, il y avait des allégations très bien connues contre le général Vance. Je pense que nous devrions revenir au témoignage selon lequel en 2018, comme l'ont dit tous les témoins, on n'était pas au courant d'autres allégations. Les seules personnes qui étaient au courant dès 2015 étaient et son chef de cabinet. Il faut prendre garde, parce que si les députés de l'opposition sont au courant de multiples allégations... On sait qu'il y a une enquête en cours, et j'espère beaucoup que quiconque est au courant d'autres allégations les soumettra aux autorités compétentes pour examen dans le cadre de l'enquête en cours.
Cela dit, j'aimerais demander quelques précisions, encore une fois, à M. Wernick.
Monsieur Wernick, des membres du Comité nous ont appris certaines choses au cours de cette séance et des séances précédentes. Nous les avons entendus expliquer qu'il y a eu des allégations fondées d'inconduite sexuelle en 2018 et que le gouvernement, le et le BCP n'ont rien fait, les ont traitées comme un problème épineux, ou ont fermé les yeux. Dans certains cas, il y a eu des insinuations, qui ont été délibérément écartées. Diriez-vous, monsieur Wernick, que c'est un portrait exact de ce qui s'est passé en 2018?
Comme M. Lick l'a dit — et je conviens que nous devrions nous attaquer aux principaux problèmes structurels —, l'indépendance et le changement de culture sont probablement les deux plus importants, comme l'ont aussi mentionné d'autres témoins. Je suis ravi que M. Lick soit dans cet état d'esprit et qu'il occupe le poste qu'il occupe, car il sera en mesure de nous aider et de nous encourager à apporter ces changements.
Monsieur Wernick, vous avez mentionné la possibilité d'apporter ces changements au moyen d'un projet de loi, tout en précisant qu'un projet de loi ne suffirait pas. Pourriez-vous nous rappeler ce que contiendrait un projet de loi sur l'indépendance et le changement de culture, et quels autres éléments pourraient en faire partie? Ce sont les deux principaux problèmes dont nous ont fait part les victimes et les experts qui s'en sont occupés.
Qu'y aurait-il dans un projet de loi pour changer ces deux éléments principaux — changement de culture et indépendance — et que pourrait-on faire en marge du projet de loi, surtout à votre connaissance, parce que vous avez peut-être entendu d'autres pays parler de ces changements importants qui profiteraient grandement à de nombreuses femmes dans l'armée?
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Vous me prenez un peu au dépourvu, mais je pense que l'essentiel serait de remettre à zéro le cadre législatif, et il faudrait un projet de loi pour le faire. Il y serait question de toute une série de pratiques administratives au sein du ministère de la Défense nationale et de l'armée canadienne.
Il y a un lien que je ferais ressortir, et c'est qu'il n'est pas sans rapport avec le système de justice militaire, parce qu'à un moment donné, c'est le droit militaire qui est enfreint. Il y a un débat à tenir sur la question de savoir si ces questions de conduite devraient être traitées par le droit militaire ou le droit civil. Chaque pays a trouvé ses propres réponses à la question.
D'après ce que j'ai trouvé dans mes recherches sur Google, un examen du système de justice militaire est en cours, dirigé par le juge Fish, un juge à la retraite, qui donnera au gouvernement des conseils à ce sujet. Je pense qu'il serait vraiment important d'examiner la ligne de démarcation et les bornes entre le système de justice militaire et le système de recours que vous voulez créer, et qui serait axé sur les questions de conduite non criminelle. Ce serait vraiment important.
D'après les autres questions qui ont été soulevées, il y a des éléments sur lesquels vous devrez vous prononcer à titre de législateurs. Voulez-vous maintenir cette garantie de confidentialité? Comment pouvez-vous l'assurer? Quel pouvoir discrétionnaire voulez-vous accorder aux gens? Direz-vous « doit » mener ou « peut » mener une enquête, car ces mots sont importants, et qui prend la décision en fin de compte? Il y a des principes conceptuels ici.
Ce que j'ai constaté — et je le dis sans ironie —, c'est que nous avons quelque 14 mandataires du Parlement, et qu'il y a des problèmes de limites et de bornes, de couloirs de nage, si vous voulez, où l'on semble parfois empiéter sur le couloir de l'autre, entre une plainte relative aux droits de la personne, une plainte de la Commission de la fonction publique, une plainte concernant un dénonciateur ou une plainte concernant l'intégrité. L'essentiel serait probablement de bien délimiter les bornes pour que les gens puissent se manifester et obtenir des résultats palpables. C'est une question de conception de l'appareil gouvernemental. Je sais que cela peut sembler terriblement bureaucratique, mais vous n'avez probablement qu'une seule chance de bien faire les choses.
Il y a d'autres rapports sur lesquels on peut s'appuyer. Vous pouvez remonter jusqu'à celui sur la Somalie. J'ai lu qu'il recommandait la création d'un poste d'inspecteur général indépendant, alors où cela s'insère-t-il dans tout cela?
Ce n'est pas évident. Je ne vais pas vous dire exactement comment procéder. Ce serait peut-être une bonne idée que ce comité et le comité de la condition féminine se réunissent et travaillent ensemble sur le problème.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Monsieur Wernick, tout à l'heure, je vous ai demandé si vous étiez au courant des allégations visant M. Vance lors de sa nomination initiale, en 2015. Vous m'avez dit que vous n'étiez pas vraiment au courant. Cela m'amène à me questionner un peu.
Si je ne me trompe pas, au départ, M. Vance a été nommé par le Bureau du Conseil privé. À ma connaissance, la première enquête, qui a eu lieu en 2015 et qui concernait des rumeurs de relation inappropriée, entre autres, a été menée dans le contexte de sa nomination. C'était donc une vérification préalable à la nomination.
D'ordinaire, quand on nomme quelqu'un à un poste quelconque, on vérifie son dossier et d'autres documents, et si on trouve des traces douteuses, on s'assure que cela ne pose aucun problème.
Est-ce que le Bureau du Conseil privé avait perdu ces documents ou ces archives, ou est-ce que je comprends mal comment cela fonctionne?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je veux simplement répondre à un commentaire du secrétaire parlementaire sur la question de savoir si l'inconduite sexuelle du général Vance était amplement connue et d'où ça vient.
Je me reporte encore une fois à une entrevue que Mercedes Stephenson, de Global News, a effectuée avec la majore Brennan le 21 février 2021. Dans cette entrevue, elle lui a demandé si les hauts dirigeants militaires étaient au courant de la relation inappropriée que le général Vance avait eue avec elle alors qu'elle était une subalterne. La majore Kellie Brennan a répondu, et je cite: « Je le sais parce que je le leur ai dit. »
Il est manifeste que beaucoup de gens croyaient que les allégations d'inconduite sexuelle étaient amplement connues.
Comme nous manquons de temps aujourd'hui, j'aimerais revenir à ce que j'estime être un témoignage très important, celui de M. Wernick, qui a parlé d'autres mesures que l'on aurait pu prendre. Il a dit que le aurait pu prendre l'enveloppe et la transmettre au Bureau du Conseil privé. Il a parlé de la possibilité pour l'ombudsman de caviarder davantage d'information avant de transmettre la note.
Il a peut-être été interrompu avant de pouvoir poursuivre. Y a-t-il d'autres choses que le Bureau du Conseil privé aurait pu faire à ce moment-là?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Wernick, je voulais revenir rapidement sur le changement de culture. Il en a été amplement question dans votre témoignage et dans celui de M. Lick aujourd'hui, ainsi que lors de réunions précédentes.
J'ai déjà été consultant au Boston Consulting Group. Si on avait fait appel à nos services pour produire un changement de culture — et j'ai travaillé à pas mal de projets de la sorte au fil des ans —, nous nous serions interrogés sur le cadre de travail, les diverses catégories de choses qui devaient avoir lieu et l'échéancier correspondant. Je simplifie à l'excès, mais c'est en synthèse ce à quoi cela ressemblerait et ce que nous viserions.
Si vous produisiez cela pour nous — et je sais bien qu'il ne peut s'agir que d'une estimation approximative —, quelles sont certaines des principales catégories ou mesures qui doivent être prises, à votre avis, pour changer la culture? Vous avez parlé de législation, mais ce ne sont pas tous les changements qui passent par le législateur.
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Oui, la question est de taille. Je ne pense pas pouvoir lui rendre entièrement justice.
Permettez-moi d'intervenir en réponse à l'échange avec M. Lick. De toute évidence, il faut procéder dans l'ordre. L'enquête à Rideau Hall a eu lieu en 2020, et elle n'était pas connue ou n'aurait pas pu être connue ou même imaginée en 2018, lorsque nous avons examiné... mais elle parle pour la capacité du Bureau du Conseil privé de se renseigner sur les faits. Les enquêtes ne sont pas comparables, comme je l'ai dit, parce que dans l'affaire à Rideau Hall, il y avait plusieurs plaignants et de nombreux témoins à interroger, ce qui n'était pas le cas pour le général Vance.
Je vais revenir à votre question. J'ai passé trois ans à essayer de changer la culture de la fonction publique civile, avec des résultats mitigés. Vous nous avez rappelé qu'au cours du mois de mai 2018, mon ami Michael Ferguson, le vérificateur général, a déposé un rapport sur le système de paie, qui était très cinglant au sujet de la fonction publique et qui parlait d'une culture d'obéissance envers les ministres. J'ai comparu devant le comité des comptes publics et j'ai discuté de la question avec lui.
Je suis parfaitement conscient que changer la culture d'une grande organisation composée de dizaines de milliers d'êtres humains n'est pas chose facile et peut prendre du temps. Je pense que les fondements législatifs sont importants pour ce qui est des mesures incitatives et dissuasives, des conséquences et de la transparence. Il faut faire beaucoup de recherches et d'essais sur le milieu de travail, au moyen de sondages et d'autres mécanismes, pour déterminer où se trouvent les problèmes. Il faut nommer les bonnes personnes aux bons postes et prêcher par l'exemple. C'est un programme aussi vaste que complet, car il y va de formation, dans les écoles, au Collège militaire royal, etc. Je vous renvoie une fois de plus au rapport Wigston, car il tente d'établir une architecture à ces fins, et je pense que vous en auriez besoin.
Dans le cas qui nous occupe, et sachant ce que nous savons, que le rapport Deschamps était insuffisant, que l'opération Honour était insuffisante elle aussi et que le système semble avoir laissé tomber la plaignante et ce dossier, nous devons nous attaquer aux principes mêmes de la loi.