HESA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la santé
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 4 décembre 2013
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour mesdames et messieurs. Bienvenue à la séance du Comité de la santé. Il est 15 h 30, alors commençons.
Nous avons quatre témoins cet après-midi, dans la salle ou par vidéoconférence, alors commençons à les écouter. Si le comité veut bien, je propose que nous entendions d'abord les témoins qui nous viennent par vidéoconférence, puis ceux qui se trouvent ici dans la salle.
Tout d'abord, nous avons, de la Colombie-Britannique, Donald MacPherson de la Coalition canadienne des politiques sur les drogues. Allez-y, monsieur.
Je suis le directeur exécutif de la Coalition canadienne des politiques sur les drogues, basée à l'Université Simon Fraser à Vancouver.
Merci de m'avoir invité à vous parler aujourd'hui d'une question d'importance cruciale pour les Canadiens.
Notre organisme compte environ 70 organismes membres et 3 000 particuliers travaillant à améliorer la démarche du Canada en ce qui concerne la politique en matière d'usage des drogues et autres substances.
Il y a manifestement au Canada un problème au niveau de l'usage des médicaments d'ordonnance, de la dépendance aux opioïdes, des surdoses et d'autres problèmes connexes; nous sommes donc ravis que le comité étudiera sérieusement la question très bientôt. Le Canada est clairement en retard en ce qui concerne l'élaboration d'une stratégie nationale, ce que de nombreuses publications déclarent urgent. Au cours des prochaines semaines, la coalition présentera au comité un mémoire exhaustif sur la prévention des surdoses et la sensibilisation à celles-ci. Ce mémoire décrira comment les différents ordres de gouvernement et les collectivités au Canada pourront maximiser leurs efforts pour sauver des vies et prévenir les décès par surdose qui, la plupart du temps, auraient pu être évités.
Je ne m'attarderai pas sur les solutions qui font appel à des règlements pour le phénomène croissant de l'abus et de l'usage non médical des médicaments d'ordonnance. D'autres témoins en savent plus que nous à ce sujet. Je signalerai au comité, cependant, que les solutions faisant appel à des règlements ne constituent qu'une infime partie de la solution globale si une étude sérieuse doit être entreprise, ce que la situation actuelle justifie clairement, et que le comité devrait envisager d'élargir la portée de ses travaux et tenter de dégager les causes sous-jacentes de cet usage non médical croissant des opioïdes, ainsi que des mesures immédiates visant à faire en sorte que le nombre croissant de décès causés par des surdoses d'opioïdes soit éliminé.
En ce qui concerne l'utilisation des opioïdes d'ordonnance, comme l'a dit un chercheur aux États-Unis, le défi est de « trouver l'équilibre optimal entre le risque de surprescrire qui peut mener à la dépendance, à la surdose et au détournement, et le risque de sous-prescrire qui peut mener à un traitement insuffisant de la douleur. » Il poursuit en disant que, même aux États-Unis où les données sur le sujet sont bien meilleures, « Il existe peu de données pouvant guider la prise de décisions éclairées en vue de cet équilibre. » Nous savons tous que c'est là un problème complexe.
L'utilisation, la dépendance et les surdoses mortelles attribuables aux opioïdes existent depuis longtemps. Je suis un vétéran des activités menées dans le quartier centre-est de Vancouver pour réduire le nombre de décès attribuables aux opioïdes au cours des années 1990 et présentement. Des milliers de personnes ont perdu la vie au cours de cette période à Vancouver et en Colombie-Britannique, et de nombreuses autres ont subi de graves conséquences sur leur santé attribuables à l'utilisation d'opioïdes.
La réaction à la situation à Vancouver a été lente, inadéquate par rapport à l'ampleur des problèmes et, 20 ans après la première épidémie de surdoses mortelles d'opioïde en 1993, est loin d'être terminée. La complexité du problème et le partage des compétences font qu'il faudra beaucoup de temps encore avant qu'on arrive à une solution d'équilibre entre les contrôles réglementaires et l'accès aux médicaments pour ceux qui souffrent de douleurs intenses.
Notre exposé portera davantage sur ce qu'on peut faire dans l'intervalle pour éviter les surdoses mortelles d'opioïde alors qu'on s'efforce d'arriver à une approche multiniveaux et plurisectorielle visant à réduire les dommages que cause cette situation. Le document du CCLT, le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, S'abstenir de faire du mal: Répondre à la crise liée aux médicaments d'ordonnance au Canada, est un bon départ et présente une feuille de route pour le travail multisectoriel et intercompétence de haut niveau qui doit être accompli si l'on veut maîtriser ce phénomène.
Les interventions de prévention et d'urgence pour les surdoses d'opioïdes au niveau communautaire existent aujourd'hui et deviennent de plus en plus courantes, notamment aux États-Unis. Des changements de politique et des interventions concrètes qui peuvent être exécutés rapidement à tous les niveaux amélioreront la sécurité et éviteront les décès attribuables à l'utilisation d'opioïdes. J'insiste sur ceci de nouveau pour bien faire ressortir le fait qu'il faudra un certain temps avant qu'on ne découvre et mette en oeuvre des solutions réglementaires et des efforts accrus en amont. Dans l'intervalle, on peut faire beaucoup de choses pour minimiser les dommages.
Le défi que représente ce problème pour nous est exacerbé par un manque considérable de données au niveau national, ce qui est un problème que de nombreuses études ont soulevé, y compris le rapport du CCLT. En mai dernier, nous avons publié un rapport intitulé Se rendre au lendemain: Un rapport sur les politiques canadiennes sur les drogues. Un an de travail à la production de ce rapport a fait ressortir le fait que le Canada souffre d'un manque de données sur un certain nombre de problèmes se rapportant à cette question, ainsi qu'à d'autres enjeux liés à la politique en matière de drogues.
L'usage non médical des opioïdes d'ordonnance est maintenant au quatrième rang des formes de toxicomanie au Canada, et il y a lieu de croire que les opioïdes se placent en troisième position après l'alcool et le tabac comme cause de dommages.
Le Canada et les États-Unis devancent tous les autres pays pour ce qui est de la consommation d'opioïdes d'ordonnance. Cela a mené à une intensification du problème causé par l'utilisation d'opioïdes et les surdoses. Je tiens à préciser, cependant, qu'avant l'augmentation des quantités prescrites, les surdoses d'opioïdes étaient déjà un problème de proportion épidémique au début des années 1990 en Colombie-Britannique.
De fait, les surdoses de médicament proviennent de l'usage tant médical que non médical des médicaments d'ordonnance. Les surdoses associées précisément aux opioïdes d'ordonnance ont augmenté. Le 12 octobre 2012, la Interior Health Authority de la Colombie-Britannique a émis un avertissement à l'effet que le nombre de surdoses dans la région causées par l'usage d'opioïdes légalement prescrits autres que la méthadone était deux fois plus élevé que le taux provincial de la Colombie-Britannique. Ces surdoses étaient associées à l'usage des opioïdes d'ordonnance tels que prescrits, bien que la plupart de ces surdoses se produisaient chez des personnes à qui d'autres médicaments étaient également prescrits.
Aux États-Unis, des études longitudinales ont aussi signalé le risque élevé de surdose lorsque des opioïdes d'ordonnance sont pris avec des benzodiazépines et/ou de l'alcool.
Tout ceci révèle la nécessité d'élaborer deux politiques fédérales interreliées dans le but, un de fournir une direction en ce qui concerne les pratiques de prescription, et deux de créer une démarche de réduction des risques ou des méfaits en ce qui concerne les surdoses.
Sur le plan des pratiques de prescription, étant donné que le Canada a un des taux de prescription d'opioïdes les plus élevés au monde, il est important de reconnaître le rôle qu'ont les pratiques de prescription dans l'usage des opioïdes et des surdoses accidentelles au Canada, surtout au cours des 10 à 15 dernières années. Dans de nombreuses collectivités, les décès liés aux opioïdes semblent être concentrés dans les régions où des médecins prescrivent plus fréquemment des opioïdes.
Comme l'indique une récente stratégie sur les médicaments d'ordonnance publiée par le CCLT, il faut s'efforcer de conscientiser davantage les médecins sur les risques liés à l'utilisation des opioïdes.
Les médecins qui prescrivent des opioïdes doivent veiller à ce que les patients et leurs familles reçoivent de l'information à jour sur les effets potentiels de ces médicaments, y compris les risques de surdose et de dépendance. Les médecins devraient, de façon courante dans leur pratique, aider les patients à repérer les symptômes de surdose et à savoir comment y réagir.
Dans plusieurs des États américains, les commissions médicales ont recommandé que la naloxone soit prescrite conjointement aux opioïdes à quiconque présente un risque de surdose. Nous encourageons fortement les gouvernements provinciaux et les associations et collèges professionnels appropriés à envisager d'émettre des recommandations semblables aux médecins prescripteurs dans leurs régions.
En adoptant une démarche de réduction des risques de surdose d'opioïde, il est important de reconnaître que la relation entre l'usage des opioïdes et les surdoses n'est pas nécessairement une simple relation de cause à effet. De nombreuses personnes prennent des opioïdes sans en ressentir des effets nocifs. L'usage en soi ne mène pas à la dépendance ou à la surdose.
Il est crucial de savoir clairement ce qui augmente le risque de surdose. Les patients présentent un risque de surdose particulièrement élevé dans les circonstances suivantes: s'ils prennent des opioïdes en même temps que de l'alcool ou d'autres drogues; s'ils sont à l'étape d'initiation ou de sevrage d'une thérapie aux opioïdes; s'ils sont à la fin d'une période d'usage ou de non-usage, comme lors d'une incarcération; s'il leur est difficile d'accéder à des soins primaires; ou encore, si un médicament d'ordonnance est retiré de la liste ou devient soudainement non disponible et ils sont forcés par les circonstances à trouver d'autres produits pour soulager leur douleur.
Ces risques s'appliquent à l'usage tant médical que non médical des opioïdes. Les surdoses sont aussi plus courantes chez les sans-abri, en raison des problèmes de santé et de l'accès limité aux soins de santé qui peuvent découler de l'absence de logement stable et sûr.
Quand le nombre de surdoses augmente, souvent la première réaction est de tenter de contrôler et de limiter l'approvisionnement. En général, ces stratégies font appel à des programmes de surveillance des ordonnances, des campagnes de reprise des médicaments et à la limitation des doses d'opioïdes prescrites, mais aucune de ces mesures ne s'est révélée efficace dans la réduction des surdoses mortelles accidentelles.
Il n'est pas exclu que la limitation de l'approvisionnement des opioïdes d'ordonnance puisse être un élément important d'une stratégie de prévention, mais il est tout aussi important de veiller à ce que les stratégies visant à maîtriser les effets nocifs de l'usage des opioïdes ne mènent pas au diagnostic erroné d'une maladie ou à l'ignorance des causes physiques de la douleur.
De plus, les stratégies visant à régler le problème de surdose omettent quelquefois de reconnaître la différence entre les sexes qui caractérise les événements de surdose. Bien que les surdoses puissent être plus fréquentes chez les hommes, les décès attribuables à une surdose d'opioïdes d'ordonnance chez les femmes ont augmenté au cours des dernières années à un taux plus élevé que chez les hommes en raison, entre autres, de l'augmentation de la prescription de médicaments contre la douleur aux femmes, souvent en même temps que des médicaments comme les benzodiazépines.
En limitant l'approvisionnement, on se trouve à transposer le problème à un marché clandestin. Pour réagir aux problèmes de l'usage non médical des opioïdes d'ordonnance, sept provinces ont retiré l'OxyContin des formulaires pharmaceutiques provinciaux en 2012. Ces changements visaient à endiguer l'usage généralisé de ces médicaments en en limitant l'approvisionnement; cependant, comme cela est mentionné dans les rapports de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, si l'usage d'un médicament est contrôlé par la réduction de l'approvisionnement, les fournisseurs et utilisateurs peuvent passer à un autre médicament présentant un effet psychoactif analogue, mais plus puissant et plus pur.
Les produits « oxy » ayant été retirés de nombreux formulaires pharmaceutiques au niveau provincial et fédéral, certaines personnes sont passées à des médicaments d'ordonnance tout aussi puissants ou recherchent d'autres succédanés illicites. Les données et preuves empiriques laissent entendre que l'usage non médical des opioïdes d'ordonnance est devenu plus fréquent que celui de l'héroïne. Avec le retrait récent d'OxyContin de nombreux formulaires pharmaceutiques provinciaux et du régime fédéral des médicaments, des succédanés illicites comme l'héroïne et les analogues du fentanyl pourraient refaire surface en tant que remplacements disponibles et peu coûteux de l'OxyContin.
On a un exemple de cette transposition en Colombie-Britannique. En 2013, l'agent provincial des services de santé de la Colombie-Britannique a émis un avertissement après que le bureau des coroners de la Colombie-Britannique ait observé que 23 décès avaient été liés au fentanyl.
Excusez-moi, monsieur MacPherson. Nous dépassons un peu le temps ici et je me demandais si vous approchiez de la conclusion de votre exposé. Combien de temps vous faut-il encore?
En ce qui concerne la transposition, aux États-Unis, une étude récente fondée sur les données combinées de l'enquête nationale sur la consommation de drogues et la santé de 2002, 2004, 2008 et 2010 a révélé que 77 % des personnes signalant un usage non médical des analgésiques d'ordonnance et de l'héroïne au cours de l'année précédente avaient commencé par faire un usage non médical des analgésiques avant de passer à l'héroïne. Bien que le retrait d'un médicament ne puisse pas être la cause de tous les passages de l'usage non médical d'un analgésique à la consommation d'héroïne, ce pourrait être un facteur important.
Je terminerai en précisant que nous présenterons un mémoire complet au cours des prochains mois. Ce mémoire est en cours de traduction présentement.
Nous croyons qu'il s'agit d'une stratégie exhaustive concernant les surdoses d'opioïdes tant illicites que d'ordonnance. Les deux constituent des facteurs d'un problème de santé publique auquel nous sommes confrontés et les gens vont et viennent entre ces deux marchés, avec des surdoses mortelles accidentelles quand ils tentent de prendre leur médicament suivant les indications prescrites.
Nous recommandons que le gouvernement fédéral adopte une démarche généralisée de prévention des surdoses et d'intervention d'urgence qui comprenne six éléments clés.
Le premier serait de rendre la naloxone plus aisément accessible et moins coûteuse en l'incluant dans les régimes de médicaments provinciaux et en en permettant la vente libre.
Le deuxième serait d'élargir la portée des programmes de formation communautaires et institutionnels sur la façon de prévenir, de reconnaître et de traiter les surdoses. Je viens tout juste moi-même de suivre un de ces programmes à la conférence des Canadian Students for Sensible Drug Policy. Cela dure environ une heure.
Le troisième serait d'intensifier les programmes de formation sur les surdoses à l'intention des intervenants de première ligne.
Le quatrième serait de réduire les obstacles aux appels au service 911 en cas de surdose d'une drogue de sorte que les gens ne craignent pas que la police arrive et les arrête pour d'autres contraventions en matière de drogue à l'occasion d'une surdose. La police de Vancouver a pour politique courante de ne pas réagir aux appels concernant une surdose à moins que ceux-ci ne soient faits par des ambulanciers. Cette façon de faire pourrait être adoptée par d'autres services.
Le cinquième serait de mettre en oeuvre des lignes directrices appropriées pour la prescription d'opioïdes qui ne limitent pas l'accès aux médicaments analgésiques requis ni ne donnent lieu à encore plus de discrimination à l'endroit des personnes qui utilisent des drogues.
Le sixième serait d'augmenter la collecte, l'analyse et la diffusion, en temps opportun, des données sur les occurrences de surdose.
Cette dernière recommandation est probablement une des plus importantes, car, d'après ce que j'ai lu, il est crucial que le contrôle et la collecte des données au Canada s'améliorent considérablement afin que nous puissions arriver à de saines décisions en matière de politique fondées sur des preuves solides.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur MacPherson.
Nous entendrons maintenant, du Centre de toxicomanie et de santé mentale, Dr Selby et Mme Sproule.
Allez-y, pour un maximum de 10 minutes si vous voulez bien.
Merci. Je suis Peter Selby et, à ma gauche, c'est Mme Sproule. Je suis le responsable du programme de traitement de la toxicomanie au CAMH.
Comme vous le savez peut-être, le CAMH, affilié à l'Université de Toronto, est le plus grand centre de recherche et de traitement en matière de toxicomanie et de santé mentale au Canada. Nous avons environ 600 lits à l'hôpital, dont 48 réservés aux patients présentant des troubles de toxicomanie. Nous avons un programme important de traitement de la dépendance aux opioïdes. Nous avons un programme spécial de traitement des personnes qui souffrent à la fois de douleur et de dépendance, que leur douleur et leur dépendance soient le résultat d'un usage récréatif ou de l'usage de médicaments d'ordonnance. Nous avons aussi un programme visant particulièrement les accidentés du travail.
Nous représentons cette perspective du côté traitement. Nous avons aussi un important programme de recherche, de même qu'un important programme d'éducation. Nous sommes en Ontario les fournisseurs de la formation complète à l'intention des médecins prescripteurs et autres praticiens de la santé dans le domaine de l'usage approprié des opioïdes, tant pour le traitement de la dépendance que celui de la douleur.
Ceci étant dit, et collaborant avec le CCLT pour le rapport sur la surdose d'opioïdes d'ordonnance ainsi que sur la prescription des opioïdes et l'usage récréatif des médicaments d'ordonnance, j'aimerais dire trois choses. Ce sont les trois façons dont nous pourrions envisager la situation.
Tout d'abord, il faut qu'il y ait sur le marché les produits appropriés permettant de gérer la douleur avec le moins de risque possible. Il faut aussi qu'il y ait un meilleur usage des produits qui présentent le moindre risque sur le marché pour la gestion de la douleur ainsi qu'un usage approprié des médicaments servant au traitement de la dépendance.
En deuxième lieu, il faut veiller à ce que les fabricants aient un programme de surveillance pour que, lorsqu'ils mettent un produit sur le marché, ces produits soient surveillés, et ce, afin de faire en sorte qu'ils suivent le principe de précaution et qu'aucun préjudice ne soit causé à la société, préjudice alors assumé par la société et non par le fabricant. On peut faire certaines choses pour veiller à ce que nous disposions de ce niveau de sécurité quand un produit est mis sur le marché et pour préciser ce que le promoteur de ce produit doit faire.
En troisième lieu, il y a les pratiques de prescription dont nous avons entendu parler un peu. Les pratiques de formation et de réglementation doivent aller de pair avec ces pratiques, afin de permettre ou d'interdire aux prescripteurs d'utiliser les opioïdes pour le traitement de la douleur ainsi que pour le traitement de la dépendance. Dans le cadre des pratiques, il faut s'assurer de disposer de moyens de gestion de la douleur exhaustifs et fondés sur des données probantes. Par absence de moyens de gestion de la douleur, nous ne parlons pas des médicaments. Il nous faut absolument disposer des autres services complémentaires dont les Canadiens ont besoin pour gérer leur douleur et réintégrer la population active.
Nous devons veiller à ce qu'il n'y ait aucune distinction géographique dans l'accès à ces services. Autrement dit, que les personnes qui se trouvent dans les régions isolées n'aient pas à recourir aux pilules et autres choses du genre pour gérer leur douleur, mais qu'elles puissent disposer de services comme la physiothérapie et une gestion appropriée de la douleur qui leur permettent d'être fonctionnelles à nouveau sans avoir à recourir à des analgésiques, ou si des analgésiques sont utilisés, qu'ils le soient avec parcimonie.
Enfin, j'aimerais dire que nous devons mettre en place des politiques qui définissent clairement certains des aspects réglementaires qui se rapportent à l'établissement des formulaires pharmaceutiques et aux médicaments qui existent, qui encouragent l'utilisation des formes d'opioïdes les plus bénéfiques mais les moins nocives pour la gestion de la douleur. De plus, une fois ces réformes instaurées, il faudra avoir aussi mis sur pied des outils de traitement appropriés à l'intention des personnes souffrant de dépendance. Ainsi, on disposera d'un personnel suffisant pour le traitement des dépendances afin d'atténuer certains des effets.
Quant aux politiques, plusieurs d'entre elles ont été mentionnées, comme, par exemple, l'inclusion de la naloxone soit dans le médicament lui-même, soit sa disponibilité gratuite aux pharmacies pour les patients qui présentent un risque élevé.
Je passe maintenant la parole à ma collègue, Mme Sproule, pour ce qui est du rôle que les programmes de surveillance peuvent avoir dans la pratique.
Je m'appelle Beth Sproule, et je suis une clinicienne à la Faculté de pharmacie du CTSM, ainsi qu'auprès de l'Université de Toronto.
J'aimerais donner suite aux observations, surtout en ce qui concerne les recommandations en matière de contrôle et de surveillance, en reprenant et en appuyant les recommandations mises de l'avant dans le document du CCLT, S'abstenir de faire du mal.
Comme l'a dit M. MacPherson, et je tiens à le répéter, à l'heure actuelle, le Canada ne dispose pas d'un service de surveillance complet qui permette de déterminer l'étendue du problème, les nombres et les répercussions. Nous avons quelques miettes d'information provenant de diverses sources et de diverses régions du pays, mais nous n'avons pas une vue d'ensemble systématique et ne disposons certainement pas des mécanismes de surveillance courante qu'ont les États-Unis, par exemple.
Je considère cela plutôt important, tant pour savoir où nous en sommes que pour toutes les interventions que nous tentons de mettre en oeuvre. Nous devons être en mesure de surveiller les répercussions, et le seul moyen de le faire est de savoir où nous en sommes aujourd'hui, puis d'examiner les changements.
Une fois de plus, comme cela a déjà été mentionné, nous voulons prévenir les problèmes découlant de l'abus des médicaments d'ordonnance, mais nous voulons aussi que les médicaments demeurent disponibles pour leur usage thérapeutique. Toute intervention pourrait avoir des répercussions d'un côté ou de l'autre, et nous avons besoin d'un système de surveillance pour suivre cela de sorte que les interventions adoptées diminuent effectivement les dommages, mais ne diminuent pas la disponibilité ni les avantages des médicaments eux-mêmes.
Les programmes de surveillance des ordonnances, qui ont déjà été mentionnés, constituent un des moyens de surveillance clés. Ils sont considérés assez importants. Je crois qu'au Canada nous avons quelques bons programmes dans diverses provinces. Il nous faut nous rassembler pour examiner les meilleures pratiques, déterminer quelles caractéristiques de ces programmes sont les plus efficaces et juger de leur efficacité dans la surveillance.
Ces programmes servent aussi d'intervention. En identifiant les patients ou les prescripteurs, les programmes de surveillance des ordonnances ont un double rôle, celui de surveillance, et aussi celui de prévention par intervention.
Avec ce que nous savons, je crois que certains documents concernant les meilleures pratiques existent, mais il y a aussi un énorme effort de recherche qu'il va falloir accomplir pour évaluer ces meilleures pratiques et, une fois de plus, évaluer leurs répercussions.
C'étaient là les principaux points que je voulais soulever.
Merci.
Très bien.
Nous entendrons maintenant nos témoins dans la salle. Nous avons deux autres groupes à écouter, puis nous passerons aux questions.
Nous commencerons par la Coalition on Prescription Drug Misuse.
Monsieur Harris ou Dre Ulan, allez-y pendant 10 minutes, je vous prie.
Merci, monsieur le président et les membres du comité d'avoir invité la Coalition on Prescription Drug Misuse à témoigner aujourd'hui et à faire partie de cette importante étude parlementaire.
Je m'appelle Collin Harris. Je suis un détective de la police de Calgary travaillant à l'unité antidrogue, et je suis l'expert en la matière pour les dossiers concernant les affaires de drogue qui passent par le service de police de Calgary.
Je m'appelle Susan Ulan. Je suis médecin de famille de formation et je travaille au College of Physicians and Surgeons of Alberta. Nous sommes l'organisme qui régit la pratique de la médecine en Alberta. Dans le cadre de mon portefeuille, je travaille avec des cabinets de médecins prescripteurs et je suis la coprésidente de la Coalition on Prescription Drug Misuse.
Nous sommes ravis d'être ici aujourd'hui.
Merci.
J'aimerais commencer en vous contant l'histoire de Jodie Bruketa.
Jodie Bruketa était une Calgarienne de 28 ans récemment diplômée de l'université qui travaillait à établir sa carrière en communication et vivait seule à Calgary. Jodie a commencé à avoir des maux de tête par suite d'un accident de véhicule et, en conséquence, elle a reçu une ordonnance de Percocet en avril 2003. À l'automne, sa consommation de Percocet avait augmenté. En janvier 2004, Jodie est décédée d'une surdose de Percocet et d'un sédatif. C'est son frère qui l'a trouvée dans sa cuisine. Au moment de sa mort, elle était en train de préparer une soupe.
J'aurais aimé pouvoir vous dire que la mort de Jodie est une chose peu commune, mais elle ne l'est pas. L'histoire de Jodie est bien trop courante. Voilà pourquoi notre présence aujourd'hui est importante.
La Coalition on Prescription Drug Misuse, ou comme nous nous qualifions, la CoOPDM, a été constituée en mai 2008 avec l'objectif de s'attaquer au problème du mauvais usage des médicaments d'ordonnance en Alberta. Ce sont ses participants qui confèrent à notre organisme son caractère unique.
La CoOPDM se compose d'organismes et de particuliers qui se sont réunis de façon volontaire et dans un esprit de collaboration autour d'une vision commune pour s'attaquer au problème du mauvais usage des médicaments d'ordonnance en Alberta, et le réduire. Nous avons des pharmaciens, des fournisseurs de traitement, des policiers, des médecins et des représentants du gouvernement, c'est-à-dire bon nombre des groupes d'intervenants qui voient de près les conséquences du mauvais usage des médicaments d'ordonnance.
Depuis 2008, nous nous attaquons activement ensemble à la question du mauvais usage des médicaments d'ordonnance. Nous avons entrepris un certain nombre d'études et d'initiatives de consultation pour mieux comprendre l'étendue et la complexité du problème en Alberta. Nous avons commencé par commander une étude visant à examiner l'étendue du problème en 2008. Comme nous l'avons entendu ici aujourd'hui, la quantité des données et des renseignements dont on dispose pour travailler est très limitée.
Nous avons mené une série de groupes de discussion dans les réserves des Premières Nations, dans les quartiers de centre-ville abritant une population à risque élevé et auprès de groupes de professionnels clés comme des médecins, des pharmaciens, des policiers et des fournisseurs de traitement. Nous avons tenu un symposium des chefs de file professionnels, gouvernementaux et communautaires pour commencer à encourager l'engagement de certains des plus hauts dirigeants de notre province à l'égard de la question.
Nous avons entrepris un certain nombre de projets de recherche pour mieux comprendre comment améliorer la collecte des données sur le mauvais usage des médicaments d'ordonnance, ce qui nous aiderait à mieux comprendre le problème et à déterminer ce dont on a besoin pour s'attaquer de façon plus approfondie au problème au niveau provincial et national.
Nous avons collaboré activement avec le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies dans l'élaboration de la stratégie S'abstenir de faire du mal. De fait, Dre Susan Ulan, qui est la coprésidente du CoOPDM, était également coprésidente du Conseil consultatif national sur l'abus de médicaments d'ordonnance, l'auteur du rapport.
À l'heure actuelle, nous collaborons étroitement aussi avec le médecin hygiéniste en chef de l'Alberta pour déterminer comment faire en sorte que cet enjeu reçoive une attention prioritaire dans le programme de santé publique de notre province.
J'aimerais maintenant passer la parole à ma collègue, Dre Susan Ulan.
Qu'est-ce que notre participation au CoOPDM ces cinq dernières années nous a appris? Nous avons appris que le mauvais usage des médicaments d'ordonnance se répercute sur tout le monde, toutes les collectivités, toutes les catégories démographiques. Il ne se limite pas aux populations marginalisées. Jodie Bruketa aurait pu être la fille de n'importe qui ici et c'est donc une question sur laquelle il faut se pencher dans les meilleurs délais. Le problème a des répercussions sur notre santé publique, notre sécurité et nos systèmes de soins de santé.
C'est un problème très compliqué, comme l'ont mentionné les autres témoins. Il s'agit ici de médicaments qui ont des fins thérapeutiques, et donc, nous avons besoin d'y avoir accès à des fins légitimes. La résolution de ce problème ne fait pas appel à une solution simple, unilatérale. Le cas échéant, il aurait été réglé depuis très longtemps. Il est beaucoup plus compliqué que cela.
On a tendance à se concentrer sur les opioïdes, mais en réalité il y a de nombreux médicaments qui présentent un potentiel d'abus. Nous devons tenir compte des opioïdes, des sédatifs et des tranquillisants, ainsi que des stimulants. De fait, le Canada compte parmi les plus grands consommateurs de Ritalin par habitant; ainsi donc, en ne se concentrant que sur les opioïdes, on ne voit pas les autres problèmes.
Retirer l'accès à un médicament ne réglera pas le problème, car, comme nous l'avons vu en Alberta, les collectivités ou les patients individuels se tournent vers d'autres médicaments ou d'autres substances illicites. La consommation d'alcool devient plus courante, et cela a en soi des conséquences non voulues. Tout effort que nous entreprenons doit être bien pondéré et généralisé. Pour améliorer les choses, nous devons envisager une stratégie très globale.
Comme cela a déjà été mentionné, le document du CCLT S'abstenir de faire du mal a effectivement présenté une démarche globale. Il décrit cinq volets de mise en oeuvre portant sur la formation, la prévention, la surveillance et le traitement, de même que de questions d'application de la loi. En réalité, pour être efficace, il faut traiter tous ces éléments ensemble, et non pas n'en choisir que quelques-uns; c'est la seule façon dont nous pourrons améliorer les choses compte tenu des répercussions et de la complexité des questions.
Un autre point que nous avons appris concerne les données. Il est crucial que nous procédions à la collecte de données et obtenions des données de plusieurs sources. Comme l'a mentionné Mme Sproule, nous pourrons ainsi quantifier le problème et examiner les possibilités d'intervention. Cela nous permettra aussi de mettre au point un système de surveillance de sorte que nous puissions repérer les nouveaux problèmes plutôt qu'attendre de les voir dans les médias, et déterminer comment repérer les choses d'une façon beaucoup plus proactive.
Nous devons avoir un meilleur accès aux traitements, comme le traitement de la douleur chronique, de la dépendance et des problèmes de santé mentale car, comme l'a indiqué Dr Selby, au fur et à mesure que les habitudes de prescription évoluent, il y a davantage de patients présentant des problèmes légitimes et, quelquefois, des problèmes qu'ils ont créés eux-mêmes et qu'il faut traiter. Si nous n'avons pas accès aux traitements, nous transférons des situations de soins de santé au système d'application de la loi, et donc, l'accès aux traitements est une composante cruciale de la solution.
Nous ne pouvons régler tout ceci sans le leadership du gouvernement. Je ne saurais trop insister sur ce point. Pour que les organismes changent, il doit y avoir un leadership tant au niveau provincial que territorial, mais, en fait, ce leadership doit commencer au niveau fédéral. C'est ainsi que nous pouvons inciter, encourager et obliger les organismes à apporter des changements d'importance. La collaboration est aussi un élément important — très important —, mais la collaboration doit aussi s'accompagner de leadership.
En conclusion, la Coalition on Prescription Drug Misuse a accompli beaucoup au cours des cinq dernières années. Nous sommes un organisme bénévole avec un financement limité et une influence limitée, et nous sommes arrivés au niveau du médecin hygiéniste en chef de l'Alberta. La question est maintenant visible pour lui, et nous travaillons avec lui pour examiner les possibilités de structure de gouvernance en Alberta. Je recommanderais que cela soit adopté dans tout le pays.
Nous sommes, et avons été, un partenaire très actif pour la stratégie S'abstenir de faire du mal que nous appuyons fortement. Cette stratégie est très complète. Nous avons un plan. Nous avons la participation de toutes les bonnes personnes, toutes les bonnes organisations. Nous commençons à mettre en oeuvre les divers volets et nous avons besoin d'un appui et d'un certain financement. Nous vous demandons d'envisager cet aspect dans vos recommandations.
Ce comité a une excellente occasion d'accomplir quelque chose de bien et de présenter certaines recommandations significatives qui pourraient réduire les risques de façon radicale, de sorte que les familles comme les Bruketa et les personnes comme Ada — qui parlera elle-même de son expérience — n'auront pas à souffrir du mauvais usage de médicaments.
Je vous remercie de votre temps et de votre intérêt.
Merci beaucoup.
Notre dernier témoin cet après-midi est Mme Giudice-Tompson du Advocates for the Reform of Prescription Opioids.
Allez-y, pendant 10 minutes.
Je remercie le président et les membres du comité de l'occasion de vous présenter mon témoignage.
Je m'appelle Ada Giudice-Tompson. Je suis vice-présidente de Advocates for the Reform of Prescription Opioids, et membre du Conseil consultatif national sur l'abus de médicaments d'ordonnance du CCLT, qui est l'auteur de la stratégie canadienne S'abstenir de faire du mal.
Cependant, je suis aussi ici en tant que la mère d'un merveilleux jeune homme, mon fils Michael, qui est décédé en 2004 après avoir pris des opioïdes prescrits par son médecin. Je porte ici tant l'habit du défenseur que celui d'une personne qui a vécu la douleur personnelle de voir quelqu'un mourir des effets des opioïdes d'ordonnance, des drogues qui sont trop souvent considérées comme étant « sûres si elles sont prises selon l'ordonnance », mais qui, à mon avis, son loin de l'être.
En effet, si j'avais eu des renseignements précis sur Percocet, je ne serais pas allée chercher la première ordonnance de mon fils et je ne serais pas ici aujourd'hui. Mon fils Michael est mort deux ans après cette ordonnance initiale.
Tout comme de nombreux autres Canadiens, je ne savais pas du tout que les médicaments légalement prescrits, ceux prescrits par un médecin, dispensés par un pharmacien et approuvés par Santé Canada sont aussi dangereux que des drogues illicites comme la cocaïne, l'héroïne ou la métamphétamine en cristaux. De fait, je crois qu'ils sont encore plus dangereux car, quand un médicament a reçu l'aval de Santé Canada, les Canadiens partent du principe que le médicament est sûr, au moins s'il est pris conformément à l'ordonnance. Mon histoire pourrait être celle de n'importe qui; des milliers de Canadiens ont reçu des ordonnances les menant à la dépendance ou à la mort par surdose.
L'étendue et le risque actuels associés à la prescription de médicaments opioïdes sont considérablement sous-estimés. L'organisme Centers for Disease Control and Prevention, le CDC, a déclaré que l'épidémie des dépendances et des décès par surdose a augmenté en parallèle avec la prescription des opioïdes. Le CDC a reconnu l'existence d'une épidémie, la pire dans l'histoire des États-Unis. Et pourtant, le Canada et les États-Unis continuent d'être les plus gros consommateurs d'opioïdes par habitant dans le monde, et la consommation canadienne a augmenté plus rapidement que celle des États-Unis.
Tout Canadien exposé aux opioïdes, avec ou sans ordonnance, s'expose à un risque. De plus, on nous présente chaque année de plus en plus de preuves de problèmes de sécurité et du mauvais usage des opioïdes de plus en plus courant chez les patients qui souffrent de douleur chronique. Cela n'est pas surprenant, compte tenu du manque d'essais cliniques effectués portant sur l'usage à long terme des opioïdes.
Advocates for the Reform of Prescription Opioids est un organisme binational canadien et américain composé de personnes dont la vie a été détruite par la prescription excessive d'opioïdes. ARPO représente ce qui se passe dans le monde réel, et nous avons pour mission de veiller à ce que la réglementation, la mise en marché, la prescription et l'utilisation d'opioïdes soient fondées sur des preuves.
ARPO a étudié ce problème de concert avec l'organisme Physicians for Responsible Opioid Prescribing, PROP. Nous estimons que la prévention de la mauvaise utilisation des médicaments d'ordonnance ne peut être examinée à l'écart des systèmes qui sanctionnent les médicaments dont on abuse. De plus, nos connaissances doivent provenir de la science et non de mauvais renseignements. En examinant tant le procédé que le contenu, nous pourrons être en mesure de déceler les écarts de l'approbation réglementaire des médicaments quant aux habitudes de prescription et à l'utilisation par les patients de médicaments sanctionnés légalement qui agissent sur le corps de la même façon que le fait l'héroïne.
L'histoire révèle la vérité. On peut commencer à voir une image plus précise en regardant les poursuites en justice intentées avec succès contre les pharmaceutiques, le marketing trompeur des comprimés à libération lente de morphine, d'héroïne et d'oxycodone, les formulations dissuasives de l'abus et l'examen continu par le comité sénatorial des finances des États-Unis du lien financier qui existe entre les pharmaceutiques et les groupes préconisant un usage plus généralisé des opioïdes. On peut alors constater la fausse représentation de la sécurité et de l'efficacité des médicaments, ainsi que le conflit d'intérêts et l'influence exercée.
Le message encourageant un usage plus généralisé des opioïdes n'était pas fondé sur des données scientifiques, mais plutôt sur une intention de maximiser les ventes. De nombreux médecins bien intentionnés ont encouragé l'usage plus généralisé des opioïdes, car ils souhaitaient soulager la douleur; pourtant, malheureusement, ces médicaments ne fonctionnent pas aussi bien que cela a été dit aux médecins. En fait, à long terme, la sensibilité à la douleur est souvent augmentée pour les patients qui consomment des opioïdes.
L'information erronée a servi à l'établissement de nos lois, de nos règlements, de nos politiques et des pratiques de médecine. Les pharmaceutiques, les fournisseurs de soins de santé et d'autres personnes nous ont conté de nombreux mythes au sujet des opioïdes, mais, malheureusement, notre principal organisme de réglementation, Santé Canada, accepte comme parole d'évangile l'information sur les essais cliniques fournie par les pharmaceutiques, sans plus de vérification.
Ceci a des répercussions sur le marketing, les monographies, l'étiquetage, la prescription et, en bout de ligne, les patients et leur famille. Santé Canada doit reconnaître que le rôle de réglementation a une incidence sur les pratiques cliniques, et il devrait être sommé de réexaminer la façon dont il est arrivé à approuver les médicaments opioïdes ou, franchement, tout autre médicament au Canada qui a un potentiel élevé d'abus et/ou peut mener à un abus, à un mauvais usage ou à la dépendance.
De nombreux Canadiens disent que nous avons une épidémie d'abus de médicaments d'ordonnance. Cette façon de décrire le problème n'est pas tout à fait la bonne. Certes, l'abus fait partie du problème, mais en général, ce comportement n'est pas la façon dont une personne s'engage sur cette voie.
L'accent est toujours mis sur l'abus, car c'est à l'avantage de plusieurs personnes si nous catégorisons les gens en soit des patients légitimes, soit des toxicomanes. C'est une fausse dichotomie. Cela perpétue aussi le stigmate apposé aux personnes qui développent une dépendance. De fait, la monographie de l'oxycodone indique que, généralement, l'abus du médicament « n'est pas un problème chez les patients ayant de la douleur pour qui l'oxycodone est une indication appropriée ». Cette allégation continue de renforcer la notion erronée voulant que la dépendance soit rare chez les patients qui ont de la douleur, et indique l'étendue de la propagande et de l'influence de l'industrie.
À l'heure actuelle, la Loi sur les aliments et drogues ne permet pas la non-approbation d'un médicament pour cause de mauvais usage. Ceci est extrêmement inquiétant, compte tenu de l'absence de transparence dans le processus d'approbation des médicaments et du fait que l'usage peut mener au mauvais usage. Ceci est tellement important que je le répète. De nombreuses personnes commencent à utiliser les opioïdes d'ordonnance de la façon dont ils leur sont prescrits, puis, par la suite, commencent à mal les utiliser ou à en abuser. Après tout, ce n'est pas surprenant; les opioïdes sont des narcotiques fortement toxicomanogènes. Le ministre de la Santé devrait avoir le pouvoir de rejeter l'approbation d'un nouveau médicament si celui-ci présente un potentiel élevé de mauvais usages ou d'abus.
De plus, en septembre 2013, la FDA exigeait que les fabricants d'opioïdes mettent à jour le texte de leurs monographies, l'étiquetage et l'information destinée aux patients en améliorant les avertissements et les mesures de précaution. La FDA a proposé un exemple: « Même si vous prenez votre dose correctement, telle que prescrite, vous courez un risque de dépendance, d'abus et de mauvais usage des opioïdes qui pourrait mener au décès. » Santé Canada devrait exiger le même genre de mise en garde.
Les prescripteurs doivent disposer de renseignements exacts sur lesquels fonder leurs décisions thérapeutiques. L'accent sur la prévention devrait être mis avant l'approbation des médicaments, et non pas après que des patients aient subi le préjudice de leur usage. Il y aurait lieu d'établir un comité d'experts sur les médicaments et la sécurité des patients au niveau fédéral, n'ayant aucun lien avec l'industrie, qui aiderait Santé Canada dans l'approbation ou le retrait de médicaments. La prévention doit commencer au niveau de l'organisme de réglementation, et celui-ci doit avoir le pouvoir de reconnaître pleinement son mandat en matière de sécurité des patients.
Les organismes de réglementation doivent cesser d'écouter les gens qui ont un intérêt dans la vente des opioïdes et commencer à écouter les patients, les familles, les fournisseurs de soins de santé et les Canadiens de l'ensemble du pays qui réclament un changement radical dans la façon dont les médicaments sont mis sur le marché. En tant que législateurs, vous pouvez faire bien plus qu'atténuer les dommages. Vous pouvez les prévenir entièrement.
Les formulaires pharmaceutiques aux niveaux fédéral et provincial devraient inclure les médicaments non opioïdes et les autres formes de thérapie servant à gérer la douleur.
Je précise: je ne dis pas que les opioïdes ne devraient jamais être utilisés. Indéniablement, ils sont appropriés dans certaines situations cliniques. Quand nous disposerons de tous les renseignements, nous pourrons mieux déterminer les situations dans lesquelles nous sommes disposés à exposer des patients au risque des opioïdes.
Cette épidémie a causé d'innombrables décès et la destruction de patients, de familles et de collectivités. Le statu quo ne peut être maintenu. Ceux qui ont l'obligation morale, légale et réglementaire doivent assumer leurs responsabilités et apporter des changements.
Merci.
Je vous remercie de votre très sincère exposé. Au fait, pour les autres députés, est-ce bien Giudice-Tompson?
Je l'ai mal prononcé trois fois; j'espère alors que d'autres membres le prononceront correctement une ou deux fois.
Nous commençons notre tour de sept minutes avec Mme Davies.
Merci beaucoup.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui, surtout vous madame Giudice-Tompson qui nous a rappelé à quel point il s'agit d'un enjeu personnel. Vous avez parlé de votre fils, et je suis sûre que ce n'est pas chose facile à faire devant un comité parlementaire formel et, donc, je vous remercie de nous avoir conté votre histoire.
J'aimerais aborder une ou deux choses ici. Il est de plus en plus clair, à mes yeux du moins, que la démarcation entre légal et illicite est très floue. Il est évident que nous parlons de substances qui présentent un risque de dépendance. Plusieurs d'entre vous ont mentionné les opioïdes, que ceux-ci aient été obtenus par des moyens légaux ou des moyens illicites.
Je trouve ironique que lorsqu'une substance est jugée illégale, la réaction courante a été de dire que nous devrions simplement la bannir; pourtant, l'usage thérapeutique est là. Nous pouvons comprendre que, même si un médicament particulier, comme OxyContin ou quelque chose d'autre du genre présente un grand risque, il peut avoir un usage thérapeutique légitime. Il nous faut donc trouver une solution bien pensée et complète et non pas simplement l'interdire et penser que nous avons réglé ainsi le problème.
J'aimerais parler de la notion voulant que, d'une façon quelconque, l'interdiction complète fonctionnera. Je me demande quelle démarche nous devons adopter. Dans le cas des médicaments, nous avions ce que nous appelions la démarche à quatre piliers pour les problèmes de dépendance. C'était la prévention, le traitement, l'application — l'application était un élément — et la réduction des méfaits. Ces piliers ont été ramenés à trois par l'exclusion de la réduction des méfaits. Il me semble que ce genre de démarche fondée sur une compréhension de ce à quoi nous sommes confrontés en matière de santé publique est exactement ce qu'il nous faut.
Je me demande, monsieur MacPherson et docteur Selby, si vous pouviez répondre à cela. Quand notre comité examine la façon dont le gouvernement devrait aborder cela, devons-nous adopter une démarche fondée sur la santé publique, à savoir réduire les risques et réduire les méfaits, plutôt que déclarer qu'une interdiction complète de la substance fonctionnera? D'après ce que j'ai entendu, si nous adoptons ce point de vue, quelque chose d'autre viendra remplacer cette substance. C'est à se demander quelle démarche fonctionnera et quelle démarche ne fonctionnera pas. Pouvez-vous répondre à cela?
Monsieur MacPherson, j'aimerais aussi vous demander de nous parler un peu plus de la façon dont la naloxone pourrait être rendue disponible. Vous dites qu'il y a certains obstacles ou certaines difficultés. C'est une substance qui évitera les surdoses, et donc, je ne comprends pas pourquoi l'obtention de la naloxone est problématique. Pouvez-vous expliquer cela?
J'aimerais éclaircir un point pour nos invités, et cela ne réduira pas votre temps, madame Davies; c'était environ trois minutes, trente secondes. Ce tour est un tour de sept minutes; donc, si vous pouvez chacun restreindre vos réponses à une minute ou une minute et demie, cela nous permettra de respecter la limite de sept minutes.
Pour votre première question, madame Davies, c'est justement pour cela que nous avons commencé par dire au début de notre exposé que le sujet est incroyablement complexe. Le témoin a parlé des grandes pharmaceutiques. Je pense que c'est important. Il suffit de voir à la télévision américaine les annonces promotionnelles des produits pharmaceutiques. Nous n'avons pas ce degré de publicité au Canada, et je pense que c'est une bonne chose.
Je ne crois pas que, de nos jours, interdire une substance réglerait le problème. Cela ouvre le marché pour d'autres types de substances, dont certaines sont encore plus dommageables, comme nous le constatons avec le fentanyl à divers endroits de l'Amérique du Nord; c'est une substance beaucoup plus puissante que les autres opioïdes d'ordonnance.
Interdire un médicament ne fonctionne pas. Cela crée un marché pour d'autres substances. C'est pour cela qu'il faut mettre sur pied une démarche généralisée. Voilà pourquoi nous vous encourageons à poursuivre cette discussion au sujet de la complexité des enjeux, mais dans l'intervalle, procédons tout de suite à la réduction des risques ou la réduction des méfaits et augmentons la disponibilité de la naloxone. Dans de nombreux États des États-Unis, la naloxone est prescrite en même temps aux personnes qui présentent un risque élevé de surdose d'opioïde. La naloxone devrait se trouver dans les formulaires pharmaceutiques provinciaux. Ce n'est pas une substance complexe. À ma connaissance, même la mauvaise utilisation de la naloxone n'est pas nocive. Par contre, elle permet d'éviter les décès par surdose et sert à traiter les surdoses lorsque celles-ci se produisent.
Notre groupe de travail national qui compte plus de 25 organismes représentant dans la plupart des cas des intervenants de première ligne et certains universitaires collaborant avec nous dans la rédaction des mémoires demandant l'élargissement de l'accès à la naloxone qui seront présentés au comité. Ce faisant, on informe le public au sujet des surdoses, des risques de surdose, du risque que représente la prise simultanée de plusieurs médicaments, de l'importance de l'accessibilité à une substance comme la naloxone et de l'importance d'apprendre aux gens comment intervenir en cas de surdose. Cela représenterait un élément important de l'éducation de la base.
Je crois que voir une démarcation entre le traitement et la réduction des méfaits est une notion un peu étrange. En tant que médecin, je peux vous dire que la médecine occidentale est entièrement fondée sur la réduction des méfaits. Nous ne guérissons pas l'hypertension, nous ne guérissons pas le diabète. Nous ne guérissons pas la dépression et nous ne guérissons pas l'insuffisance cardiaque. Nous traitons simplement ces états et réduisons les méfaits qu'ils peuvent causer au patient.
Cela remonte à Saint-Thomas More, en quelque sorte le père de la médecine moderne. C'est ce que nous faisons. Nous ne guérissons pas. Nous réduisons les méfaits. Il existe des traitements efficaces entérinés par l'Organisation mondiale de la santé pour les dépendances. Nous avons des lignes directrices qui n'ont rien à voir avec la fabrication des médicaments.
L'utilisation de médicaments efficaces, génériques et à coûts modiques qui pourraient sauver des milliers de vies dans le cadre d'un programme de traitement que même les médecins de famille pourraient prescrire après très peu de formation ne se déroule pas comme elle le devrait dans ce pays. Plus de restrictions sont imposées aux médecins dans la prescription de ces médicaments que dans la prescription des analgésiques.
Je crois que nous pouvons faire beaucoup plus, même dans le cadre de travail existant. Pourquoi cette fausse dichotomie quand on parle de réduction des méfaits? Nous réduisons les méfaits quand on porte des jambières et des casques en jouant au hockey. Nous réduisons les méfaits quand nous utilisons de l'essence sans plomb. Nous faisons cela parce que nous croyons que certaines choses doivent être faites dans la société. Nous voulons les avantages des médicaments, mais nous en réduisons les méfaits. C'est là que se situe l'innovation.
Merci beaucoup.
Je commencerai, si vous me le permettez, par une remarque peut-être évidente. Je suis sûre que bon nombre d'entre nous ressentent la même chose. Je suis profondément attristée par votre perte, Ada. Je ne peux imaginer la terrible douleur que ce serait de perdre son fils. Je vous remercie d'être venue ici aujourd'hui partager avec nous votre expérience et militer en son nom.
J'aimerais me tourner vers certains des experts que nous avons entendus ici. Nous avons d'une part ce problème récurrent et, d'autre part, il est intéressant de noter que le CAMH, un policier individuel ou les médecins de famille disent tous la même chose, c'est-à-dire que nous manquons vraiment de données concrètes sur l'étendue de ce problème.
Ada, vous avez aussi mentionné la même chose, soit que nous ne disposons pas d'un système de surveillance adéquat nous permettant de comprendre et déterminer véritablement l'étendue de ce problème. Vous êtes en plein dans le mille quand vous dites que nous sous-estimons l'étendue de la question. Voilà pourquoi notre gouvernement s'est engagé, dans le discours du Trône, à inclure dans la politique nationale antidrogue l'abus des médicaments d'ordonnance, ce qui vous amène tous ici aujourd'hui.
Les représentants du CAMH mentionnent qu'aux États-Unis, il y a un système de surveillance qui permet un contrôle actif. Pouvez-vous nous décrire ce système?
[Note de la rédaction: Inaudible]... des enquêtes annuelles nationales auprès des ménages qui portent spécifiquement sur cette question, visant l'usage et l'abus des médicaments d'ordonnance, tant exclusivement que dans le cadre d'enquêtes plus générales.
Les États-Unis ont un système complet, appelé RADARS, un système créé spécifiquement pour la surveillance des méfaits causés par les médicaments d'ordonnance. Initialement, il a été créé par l'intermédiaire de Purdue, de fait par la pharmaceutique qui produisait OxyContin, puis il a été étendu à d'autres pharmaceutiques quand il a été assumé par le Rocky Mountain Poison and Drug Center.
Ce système analyse un certain nombre de données de diverses sources par le truchement des sondages et des données des coroners, et des admissions aux centres de traitement des dépendances. Il est, essentiellement, financé par des contributions de diverses entreprises pharmaceutiques. Celles-ci n'interviennent pas dans le processus et cet organisme indépendant recueille les renseignements et les distribue.
C'est un modèle. Un autre, par exemple, porte sur la collecte systématique des données aux salles d'urgence.
Les États-Unis ont un certain nombre de systèmes qui, pris ensemble, peuvent produire des données très complètes de façon régulière.
Vous voulez ajouter quelque chose?
Oui.
J'aimerais ajouter que nos systèmes de collecte de données pourraient bénéficier de l'application de certains autres progrès technologiques. La collecte de données a été accélérée par le biais de l'informatique dans les nuages, pour les personnes qui viennent se faire traiter. Par exemple, lorsque cette technologie a été appliquée en Californie, on a constaté qu'on peut accéder très rapidement aux données.
Il est aussi possible d'observer les tendances et, ce qui est encore plus important, l'outil de collecte des données est aussi un outil de traitement qui aide les praticiens dans la planification du traitement.
Cet outil répond aux besoins de surveillance. Il répond aux besoins du particulier, car il lui donne une évaluation. C'est vraiment une utilisation des techniques modernes pour la collecte et l'analyse de données massives qui pourrait aider à produire en temps réel des données sur ce qui arrive plutôt qu'on ait à attendre un outil de collecte des données qui indique 10 ans plus tard quels étaient les tendances.
C'est un accès en temps réel, et nous essayons d'appliquer la même chose au Canada, si possible, mais là encore, comme vous pouvez le deviner, cela prend de l'argent, du temps et des efforts, ainsi que de la persuasion pour faire savoir que nous pouvons effectivement disposer d'un tel outil ici. Ce sont des instruments qui ont été validés.
L'utilisation de cet outil coûte 6,20 $ pour chaque évaluation. C'est tout: 6,20 $. Il pourrait être installé dans un poste de police. Il pourrait être installé dans le cabinet d'un médecin de famille. Il pourrait être installé n'importe où, mais nous n'avons pas encore rendu opérationnels certains des gros investissements technologiques qui ont été faits au Canada. Des choses comme Internet haute vitesse dans le Nord, par exemple, pourraient être mises en oeuvre au Canada.
Je pourrais peut-être glisser une petite question à la Dre Ulan avant que mon temps ne s'écoule.
Vous avez soulevé un point très important au sujet de l'abus des médicaments d'ordonnance et du fait que celui-ci ne se rapporte pas seulement aux opioïdes, mais aux autres drogues comme le Ritalin. Pouvez-vous nous en dire davantage là-dessus?
C'est difficile, car nous ne disposons pas d'un grand nombre de bonnes données et donc, nous en ignorons la pleine portée. D'après les données de l'Organe international de contrôle des stupéfiants, le Canada figure parmi les pays qui prescrivent le plus — et je crois qu'il était en tête de file en 2011 — de Ritalin par habitant.
Cela s'explique mal. Ce pourrait être qu'au Canada, on diagnostique les troubles déficitaires de l'attention plus fréquemment. Nous savons que les étudiants de collège et d'université qui souhaitent améliorer leur rendement académique en font un usage récréatif. Nous savons aussi qu'il est couramment mal utilisé avec d'autres médicaments dont on peut abuser. Il peut être reniflé et produit un effet semblable à celui de la cocaïne. Il peut aussi être utilisé pour contrecarrer les effets secondaires d'autres médicaments ou d'autres drogues illicites.
En réalité, on ne lui a pas accordé beaucoup d'attention. Nous ne disposons vraiment pas de bonnes données qui nous permettent de savoir à quel point son usage est un problème au Canada. Une fois de plus, cela révèle à quel point il est important de disposer d'un système de surveillance de sorte que, quand on commence à observer une hausse de l'usage au Canada, on puisse adopter des mesures d'évaluation proactive et élaborer des stratégies visant à améliorer la situation et à réduire les méfaits.
Cela dépend de la province. De nombreuses provinces ont effectivement des programmes de surveillance des ordonnances. En Alberta, nous avons le programme d'ordonnances en triple copie. À mon avis, à plusieurs niveaux, nous avons un très bon programme, car nous avons un dossier de santé provincial auquel tous les médecins ont la possibilité d'accéder. La majorité des médecins y ont accès.
Tout praticien qui participe directement au soin d'un patient peut ouvrir une session et examiner les données sur les ordonnances du patient. Il peut voir ce qui a été prescrit et dispensé au patient, par quels médecins et quelles pharmacies. Le médecin peut alors prendre des décisions éclairées. À mon avis c'est très important.
Dans le cas des provinces qui ont un programme de surveillance des ordonnances, nous réunissons les renseignements sur les stimulants ou les opioïdes et nous pouvons ainsi identifier les médecins et les patients à risque élevé, et voir comment ils interagissent avec leurs médecins. C'est très important. C'est l'autre élément de la surveillance, ce à quoi Beth faisait allusion, je crois. À mon avis, c'est crucial.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Nous avons le même système en Colombie-Britannique, et il constitue un outil très important de surveillance des patients ainsi que des habitudes de prescription des médecins.
J'aimerais remercier tout le monde.
Madame Giudice-Tompson, je tiens à vous présenter mes sincères condoléances pour votre fils. À mon avis, votre témoignage constitue un exemple très important de la façon dont ceci peut arriver à n'importe qui, quand un médicament est donné à une personne et que celle-ci décède d'une surdose ou décède par suite d'un mauvais usage du médicament. Ce genre de situation ne se limite pas, comme vous dites, à ceux que nous considérons être des rejets de la société, les personnes qui sont marginalisées, celles dont personne ne semble se préoccuper. Il est crucial que les gens comprennent comment les médicaments agissent sur le cerveau humain et dans le corps humain, et à quel point, ils ne respectent personne. C'est une chose importante que nous devons garder à l'esprit si nous allons examiner la question. J'aimerais vous remercier de nous l'avoir signalé.
J'aimerais remercier la Dre Ulan d'avoir mentionné les médicaments autres que les opiacés et les opioïdes qui sont prescrits. Je vous remercie d'avoir mentionné les benzodiazépines. Je sais que Don MacPherson les a mentionnés aussi. Nous devons inclure toute la gamme des médicaments, Ritalin, tranquillisants, sédatifs et narcotiques de toutes sortes.
Nous ignorons tant de choses, car nous n'avons pas de base de données. Il est clair, d'après ce que j'ai entendu de tout le monde aujourd'hui, que nous avons besoin d'une base de données. Je sais que les provinces ont des bases de données et, certaines provinces ont de bonnes bases et effectuent un certain pistage. Comme l'a dit le Dr Selby, il est très important que nous ayons un rôle de chef de file fédéral et que le gouvernement fédéral réunisse tous ces renseignements en un endroit. C'est un rôle fédéral, la constitution d'un centre de renseignements, la collecte des renseignements, la production de statistiques nationales, de statistiques pancanadiennes qui nous aideront à comprendre la nature du problème et ses variations dans chaque région, et à découvrir ce que les autres régions font qui pourrait être utile.
J'aimerais poser une question. Ce n'est pas une question particulièrement scientifique — ou au fait, elle l'est. Don MacPherson a parlé de l'usage récréatif et de l'usage thérapeutique. Il est évident que nous avons, d'une part, des personnes qui prennent un médicament qui leur est prescrit parce qu'elle en ont besoin pour leur santé et, d'autre part, certaines personnes qui n'ont pas besoin d'un médicament pour régler un problème de santé physique ou mentale, mais qui ont besoin de ce médicament à cause d'un problème de dépendance; elles ont donc vraiment besoin de ce médicament.
Quelle est d'après vous, si on met de côté l'élément criminel, la différence entre les personnes qui font un usage récréatif des médicaments et celles qui en font un usage thérapeutique et qui pourraient développer une dépendance? Comment d'après vous le gouvernement fédéral ou les gouvernements en général devraient-ils traiter différemment ces situations?
C'est une question très difficile, et je n'emploierai pas le terme « récréatif ». L'utilisation des opioïdes non conforme à la posologie recommandée sur l'étiquette pourrait être en grande partie une automédication. Il pourrait y avoir un grand nombre de raisons qui poussent une personne à entrer dans le marché non officiel des opioïdes.
Si l'on regarde le Canada d'ouest en est, et j'ai passé un certain temps à l'Île-du-Prince-Édouard, la presque totalité de l'usage des opioïdes d'ordonnance se fait dans l'est, et il y a encore une immense quantité d'héroïne utilisée à Vancouver. Comme l'indiquent les données américaines, les gens passent d'un côté à l'autre, selon les circonstances. Les marchés de l'usage illicite des médicaments d'ordonnance et des drogues illicites sont très actifs, et le passage de l'un à l'autre est très fluide.
Je suppose que l'expression « usage récréatif » me dérange. Même dans l'exemple du Ritalin, il y a un usage. Les étudiants l'utilisent pour aiguiser leur concentration sur les examens, et ainsi de suite. C'est un élément de la complexité de ce que nous examinons. Il est difficile d'arriver à une seule solution. La solution doit être globale. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce que le Dr Selby a dit au sujet de la réduction des méfaits. La plupart des programmes de réduction des méfaits portent sur des personnes qui ne suivent pas un traitement. La politique adoptée par la police de Vancouver de ne pas réagir couramment aux cas de surdose vise à amener les personnes qui consomment des drogues à... C'est ce genre de choses.
Très peu de personnes participent effectivement à un traitement quelconque des dépendances. La plupart des personnes qui ont des problèmes de dépendance ne suivent pas un traitement. Il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire pour aider ces personnes ainsi que celles qui tentent de gérer leur douleur et qui développent une dépendance.
Je suis sûr que cela n'a pas répondu à votre question, mais le sujet est très complexe.
Merci.
Non, Don, je suis d'accord avec vous. J'ai employé la formule « usage récréatif » simplement parce qu'on l'a entendu employer plus tôt dans le cadre d'un exposé.
Si je vous comprends bien, il n'y a aucune différence à faire. Ce serait plutôt une sorte de continuum dans l'usage, sans frontière bien tranchée, et quoi que nous fassions pour atténuer le problème, il nous faut admettre que les consommateurs ne peuvent pas être rangés dans l'une ou l'autre catégorie. C'est ce que je voulais vous entendre dire et c'est effectivement ce que vous avez dit. Je vous en remercie.
Le Dr Selby nous a parlé de réduction des méfaits. Je suis heureuse que vous ayez vous aussi évoqué la question. J'étais un peu surprise que, comme le disait Donald MacPherson, vous liez réduction des méfaits et traitement, mais je voudrais d'abord parler de la réduction des méfaits. J'ai remarqué que dans le document S'abstenir de faire du mal, où l'on trouve le mot « méfaits », le traitement est un des modules, mais il n'y a pas de volet réduction des méfaits. On ne parle que de traitement et on fait l'impasse sur la réduction des méfaits. Or, comment espérer ne pas faire de mal si l'on ne s'attache pas à réduire les méfaits? D'après moi, la réduction des méfaits est un élément essentiel de toute approche. Chacun cherche en employant ce terme à se faire du capital politique, mais c'est, d'après moi, quelque chose d'essentiel.
J'aimerais savoir ce que vous pensez du fait que ce terme ne figure pas dans le document S'abstenir de faire du mal. Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet de la réduction des méfaits?
On peut employer le terme que l'on veut, mais, en définitive, nous sommes là pour faire en sorte que les Canadiens soient en bonne santé, et pour réduire les méfaits même si l'on n'emploie pas cette expression. Il nous faut nous demander si ce terme divise plus qu'il ne rapproche. S'il a tendance à diviser, son emploi fera plus de mal que de bien.
D'après moi, il nous faut privilégier ce dont l'individu a besoin à un moment donné. Qu'il s'agisse de surdose de naloxone ou d'une trousse, ou de programme d'échange d'aiguilles, d'un produit qui permet effectivement de réduire les méfaits, ou d'un meilleur accès aux traitements, ou les deux, c'est, exactement comme vous le disiez, Mme Fry, un continuum, et la dichotomie que nous avons établie risque, sans qu'on le veuille, de faire du tort à la société tout entière.
Si nous voulons améliorer la santé de la population, au lieu de nous enliser dans un débat sur la question de savoir s'il s'agit ou non de réduction des méfaits, essayons d'employer les termes à bon escient. Nous savons que ces divers types d'états, y compris les dépendances, sont définis en fonction de certains critères.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier nos témoins.
Madame Sproule, ma première question s'adresse à vous.
J'ai appris quelque chose l'autre jour, alors que je m'entretenais de la production de médicaments dont on ne puisse pas faire un usage détourné. Il s'agit de l'OxyNEO. Il semble que ce médicament soit tellement dur, qu'on ne puisse pas le pulvériser pour le renifler. Il n'est pas soluble, non plus, et on ne peut donc pas le faire fondre, l'aspirer dans une seringue et l'injecter. On affirme que cela entraînerait une baisse sensible des quantités de drogues employées abusivement, qu'elles soient obtenues de manière licite, qu'elles aient été volées ou qu'elles aient été, pour une raison ou pour une autre, perdues ou égarées.
Devrions-nous nous intéresser à cela? S'agit-il, selon vous, de quelque chose que l'industrie pharmaceutique devrait envisager et qu'il conviendrait de promouvoir?
Tout à fait. Ce serait effectivement quelque chose à envisager. Encore une fois, et comme nous l'avons dit plus tôt, il faut aborder le problème sous divers angles. Cela ne résout bien sûr pas le problème, car, comme nous l'avons dit également, à partir du moment où tel ou tel produit n'est plus disponible, ou qu'il perd de son attrait, les gens passeront à autre chose. Mais une telle mesure irait dans le bon sens.
Il semble que les États-Unis aient obtenu de bons résultats. L'OxyNEO est offert aux États-Unis depuis maintenant plusieurs années. Il continue à être vendu sous le nom d'OxyContin. Les divers systèmes de contrôle en place là-bas semblent montrer que le changement de formulation a entraîné une baisse générale de l'attrait que présentait ce médicament, et une baisse aussi du taux d'abus. Les résultats semblent confirmer que c'est effectivement le cas.
Certains ont été néanmoins surpris du fait que cela n'avait pas permis de supprimer tout abus de ce produit. Encore une fois, si cela permet de réduire une forme d'abus, en l'occurrence celle qui consiste à pulvériser les cachets et à les injecter en solution afin d'accroître la sensation, il ne faut pas perdre de vue qu'un nombre appréciable de ceux qui s'adonnent aux médicaments opiacés prescrits par ordonnance, les prennent par voie orale. Ils avalent le cachet et éprouvent néanmoins une sensation.
D'après moi, ces formulations conçues de manière à prévenir les emplois détournés, ou les formulations qui empêchent la pratique dangereuse qui consiste à écraser les comprimés et à pouvoir, en une fois, ingérer une forte dose, ce qui augmente les risques de surdose, vont dans le bon sens, mais ne résoudront pas une fois pour toutes le problème.
Je comprends bien, et ce n'est pas ce que j'entendais. Il est clair qu'il n'existe aucune mesure qui à elle seule va résoudre le problème. Il faut approcher cette situation sous de multiples angles. J'invoquais simplement l'exemple de quelque chose qui mérite d'être étudié, mais que nous n'avons pas encore au Canada.
Je vous remercie.
Monsieur le détective Harris, vous parliez tout à l'heure des outils de surveillance. Quels sont, sur ce plan, les moyens actuellement employés par la police de Calgary?
En ce qui concerne les enquêtes sur l'abus de médicaments prescrits par ordonnance, le programme d'ordonnances en triple exemplaire devrait nous permettre de repérer les abus qui nous sont signalés par l'Ordre des médecins et chirurgiens.
Tout va dépendre du type d'infraction. Parfois il s'agit de l'obtention d'ordonnances multiples, la personne s'adressant à plusieurs médecins, par exemple, ou d'ordonnances volées à un médecin prescripteur, ou de vols commis chez les particuliers par des personnes à la recherche de drogues. Tout va dépendre du type d'enquête que nous menons.
Sur le plan de l'action policière, nous envisageons de créer de nouvelles bases de données afin de pouvoir échanger des renseignements et coordonner notre action avec l'ordre des médecins et des chirurgiens, et les pharmaciens. À l'heure actuelle, chacun tient ses propres dossiers et il est regrettable qu'en raison des lois sur la protection de la vie privée, nous ne puissions pas échanger ces renseignements. Sans cela, nous pourrions repérer plus tôt les individus en cause, intervenir sans tarder et ne pas avoir à attendre que les drogues fassent leur apparition sur le marché clandestin. Il est actuellement fréquent que, le temps qu'on intervienne, les drogues sont déjà entrées dans les circuits de distribution.
Je vous remercie de votre réponse. Je suis heureux de constater que, comme la Colombie-Britannique, l'Alberta a depuis longtemps mis en place ce genre de programmes.
Docteur Selby, vous nous avez parlé tout à l'heure de l'opérationnalisation des systèmes de surveillance. Ce serait, selon vous, à la fois simple et économiquement rationnel. Je ne sais pas si je vous ai bien compris, mais que faudrait-il pour opérationnaliser de tels systèmes?
Non, vous m'avez bien compris. Nous disposons de modèles, des sortes de prototypes, qui nous permettraient de mettre le programme en oeuvre très rapidement. Il nous faudrait pour cela nous procurer le programme des États-Unis et l'installer sur un serveur canadien. Pourraient ainsi y avoir accès les cabinets médicaux et à chaque fois que quelqu'un demande une ordonnance pour un médicament antidouleur, le risque d'abus ou de mauvais usage serait évalué au moyen de ce modèle. Les mésusages seraient repérés et cela permettrait au praticien et au patient de décider, ensemble, du traitement à suivre.
J'ajoute que ces données, si elles sont recueillies auprès d'un nombre suffisant de cliniques, comme cela a été le cas aux États-Unis — je précise que c'est le modèle qui a permis de déceler les changements intervenus dans la consommation d'OxyContin — permettent très rapidement de se faire une idée de la situation. Si ce système était adopté par les cliniques canadiennes, vous auriez vite une bonne idée des problèmes qui se posent et de l'évolution de la situation. Cela vous permettrait d'intégrer mesures de traitement, recueil des données et analyses. Ce serait dans l'intérêt à la fois de la médecine, du patient, des administrateurs et des bailleurs de fonds.
C'est une nouvelle manière d'envisager la prestation des soins de santé. Il est, au Canada, difficile d'effectuer de telles percées, mais je pense que nous y parviendrons si nous pouvons obtenir les appuis nécessaires.
Cela va un peu à l'encontre de ce qui se fait actuellement dans 13 paliers gouvernementaux, ou disons 14, si l'on compte le fédéral.
Docteure Ulan, vous avez évoqué la possibilité, pour les médecins de l'Alberta, de se connecter à un système de contrôle des ordonnances. Comme nous l'avons dit tout à l'heure, toute drogue peut faire l'objet d'abus, qu'il s'agisse de médicaments licites, de drogues illicites, de produits médicalement indiqués ou non, peu importe de quoi il s'agit, il peut en être fait un usage abusif, et il est clair que nous ne pouvons pas interdire tous les médicaments susceptibles d'abus.
Pourrait-on envisager l'obligation, pour les médecins de l'Alberta ou d'ailleurs, de se connecter à un tel système?
Ce n'est pas actuellement obligatoire, car la situation ne l'exige peut-être pas. S'il s'agit de quelqu'un qui vient se faire prescrire un antibiotique, ou d'un patient qui ne présente guère de risque, car son ordonnance ne porte que sur de petites quantités, il ne faut mettre aucun obstacle au traitement, et de telles mesures ne sont pas à indiquer.
Il s'agit d'un outil que de nombreux médecins utilisent, mais pas seulement au plan des médicaments. Cela permet, par exemple, à un médecin d'avoir accès aux rapports d'examens radiographiques. Un médecin peut ainsi consulter la radiographie elle-même. Il a accès aux résultats des analyses en laboratoire, ou aux comptes rendus opératoires. Cela englobe donc plus que les médicaments, mais à supposer qu'un de vos patients présente un risque élevé, ou qu'il suscite chez vous de l'inquiétude, ou encore qu'il s'agit d'un patient que vous ne connaissez pas, vous avez le moyen d'en savoir un peu plus et de réduire les risques.
Selon moi, il serait difficile d'imposer une telle obligation aux médecins, mais c'est un outil très utile qui, souvent, permet au médecin de repérer les patients qui, à leur insu, fréquentent plusieurs médecins.
[Français]
Merci, monsieur le président. C'est très apprécié.
Avant de poser des questions aux témoins, j'aimerais faire un commentaire. Je sais que ce n'est pas une pratique courante au comité, mais je veux quand même envoyer un message aux députés conservateurs d'en face. Plus tôt, Mme Adams a parlé de ce que le gouvernement conservateur avait annoncé dans le discours du Trône concernant le renouveau de la politique antidrogue. Depuis que nous avons commencé cette étude, le gouvernement ne semble pas ouvert à ce que j'ai proposé à tous les experts concernant la réduction des méfaits, qui était le quatrième pilier de la Stratégie nationale antidrogue avant le changement de politique, en 2007. Ma collègue Libby Davies a proposé la même chose au Dr Selby et à M. MacPherson.
Depuis que je suis ici pour étudier cette question, je vois clairement que les experts en matière de santé veulent que le gouvernement du Canada ramène la réduction des méfaits dans la politique antidrogue. J'espère vraiment que le gouvernement conservateur écoutera l'avis des experts.
Docteur Selby et monsieur MacPherson, je vous remercie d'avoir rappelé encore une fois l'importance d'inclure la réduction des méfaits dans notre politique antidrogue.
Ma prochaine question s'adresse à M. MacPherson.
[Traduction]
Dans votre exposé, vous nous avez parlé des lignes directrices sur les ordonnances d'opioïdes. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? En ce qui concerne les ordonnances d'opioïdes, quelles sont les sortes de lignes directrices que vous envisagez?
Je voudrais me référer à l'une des recommandations formulées dans le cadre du rapport S'abstenir de faire du mal. C'est manifestement un des domaines qui devraient retenir notre attention, même si ce n'est pas le seul. Nous faisons simplement valoir que nous avons étudié de très près les données factuelles concernant ce qui s'est fait dans d'autres pays, dont les États-Unis, en matière de lignes directrices applicables aux ordonnances médicales. Mais il est clair que les États-Unis sont en avance sur nous, c'est-à-dire qu'ils ont, sur ce point, davantage d'expérience.
Je vais m'en remettre au Dr Selby pour ce qui est du détail concernant d'éventuelles lignes directrices.
[Français]
[Traduction]
Les lignes directrices nationales sur l'emploi d'opioïdes ou le traitement de douleurs chroniques non cancéreuses se trouvent actuellement au National Pain Centre de l'Université McMaster. Tous les ordres des médecins du Canada ont participé à leur rédaction. Les efforts se poursuivent afin d'en assurer la diffusion et la mise en oeuvre.
Il s'agit essentiellement d'employer les opioïdes en toute sécurité, d'en réduire les méfaits et de faire en sorte que ceux qui les emploient sont suivis, conseillés et instruits quant aux risques que ces médicaments présentent. Il faudrait également savoir plus précisément quand de tels médicaments ne devraient pas être employés et quand il convient d'en cesser l'emploi à partir du moment où ils commencent à faire du mal. Ce n'est pas que nous ne sachions pas ce qu'il faut faire, mais que nous ne le faisons pas. C'est cela la situation au Canada. Nous ne faisons actuellement pas ce que nous savons devoir faire.
[Français]
Je vais maintenant revenir à M. MacPherson.
Vous avez également, dans votre exposé, parlé des décès dus à une surdose accidentelle. D'autres témoins ont, eux aussi, parlé de cela. Cette étude concerne l'abus de médicaments prescrits par ordonnance. J'ai relevé que certains de ces décès dus à une surdose ne sont pas toujours accidentels. Le gouvernement pourrait-il faire quelque chose pour prévenir ces décès dus à une surdose accidentelle?
Il faudrait d'abord que le gouvernement fédéral intervienne vigoureusement au plan de la pédagogie publique. Dans le document du CCLT, la question est évoquée sous la rubrique de la prévention. Il s'agit de s'entendre sur les moyens de faire savoir partout au Canada quoi faire en cas de surdose, et de faire en sorte que toutes les familles dont un membre prend des médicaments antidouleur, ou souffre d'une dépendance aux opioïdes ont accès à la naloxone. Il faudrait que tout le monde sache à quoi ressemble une surdose. Nous pourrions parler de ça à n'en plus finir, mais il y a des mesures qui ne seraient pas difficiles à prendre afin, par exemple, de faire inscrire la naloxone sur les formulaires provinciaux. Il est arrivé, dans d'autres ressorts, que des enfants interviennent en cas de surdose et empêchent que celle-ci entraîne la mort. Une simple injection intramusculaire de naloxone permet de neutraliser immédiatement une surdose.
Au moment même où l'on se penche sur la complexité de la situation, on pourrait, au cours des semaines et des mois qui viennent, commencer à faire quelque chose pour prévenir ou réduire le nombre de décès dus à des surdoses. Nous pourrions, en même temps, faire, au niveau local, des efforts de pédagogie du public, afin que chacun sache qu'il y a des choses qu'il peut faire pour aider ceux qui souffrent d'une dépendance aux opioïdes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aurais deux questions à poser, une à M. Selby et M. MacPherson, et l'autre à M. Harris. Je vais poser mes deux questions en même temps.
Je m'intéresse à la naloxone. J'ai été policier et j'ai vu prescrire ce que je vais appeler du Narcan, notamment à des personnes qui avaient fait une surdose d'héroïne. Disons que la réaction à ce médicament varie d'une personne à l'autre. Lorsqu'on envisage d'en donner à quelqu'un, ou de fournir à diverses personnes les moyens d'en administrer, je me demande s'il ne conviendrait pas de bien préciser la dose à employer, car si la dose est trop forte, on risque d'obtenir un résultat dont on ne voulait pas. J'ai vu certaines personnes devenir plutôt agitées et, en pareil cas, on a tout intérêt à ne pas se mettre en travers de leur route parce qu'elles sont tout à fait mécontentes de ce qu'il leur arrive. Pourriez-vous me répondre sur ce point?
Monsieur Harris, un des témoins nous a expliqué que l'abus d'opioïdes prescrits par ordonnance est plus fréquent en zone rurale et dans les régions éloignées que dans les villes, les gens ayant moins accès aux soins dont ils ont besoin pour soulager leur souffrance, la physiothérapie, par exemple, ou des spécialistes de la douleur. J'entends par cela les zones rurales et urbaines de l'Alberta. Il se peut donc que, dans ces régions, les médecins ne puissent faire autrement que de prescrire des opioïdes à leurs patients souffrant de douleurs aigües chroniques. L'emploi de ce type de médicaments varie-t-il d'une région à une autre, à la fois au sein d'une province et entre provinces canadiennes? Quelles sont, entre les zones rurales et les zones urbaines les différences, s'il en est, dans le taux de mésusages ou d'abus de médicaments délivrés sur ordonnance?
Je vais d'abord demander à M. Selby et à M. MacPherson de me répondre, avant de passer à M. Harris. Monsieur le président, une minute et demie devait nous suffire.
Je suis d'accord avec vous. J'ai, en tant que médecin, effectivement vu cela se produire. La personne à qui l'on administre du Narcan se réveille tout d'un coup.
Il y a donc là un risque qu'il convient à gérer. Ce qu'il y a, bien sûr, c'est que l'on préfère voir la personne devenir un peu agitée que de mourir. Nous envisageons actuellement en Ontario l'adoption de ce programme de naloxone, et ce médicament ne sera donc plus uniquement distribué par Santé publique Canada. Nous tentons actuellement de préciser dans quelles circonstances des opioïdes pourraient être délivrés en pharmacie. Pouvons-nous éduquer la famille du patient, ou ceux qui vont passer chercher la naloxone?
Comme c'est le cas des injections avec un EpiPen, il nous faut trouver au Canada de nouveaux moyens d'administrer ce médicament. Actuellement, il faut préparer la seringue et, entre-temps, le médicament a tendance à se dessécher. Il faut trouver un système d'injection bon marché comme l'EpiPen. C'est pour le Canada, l'occasion de faire preuve d'un esprit novateur et de trouver, afin de prévenir les surdoses, de nouveaux produits comparables à l'EpiPen.
Je reviendrai à vous dans un instant. Je voudrais d'abord entendre la réponse de M. Harris, au cas où nous manquerions de temps.
Je vous remercie.
Je vous remercie de m'adresser cette question.
Vous étiez membre de la GRC et vous avez donc travaillé dans le cadre fédéral alors je ne suis, hélas, qu'un simple policier municipal.
Les données que nous avons recueillies ne concernent que la ville de Calgary. Je ne suis donc pas en mesure de vous donner une réponse plus globale.
Je pense, cependant, que la Dre Ulan devrait être en mesure de vous donner le renseignement.
Dans le cadre du programme de contrôle des ordonnances, en Alberta nous recueillons ce type de données depuis 1986. Il y a quatre ou cinq ans, nous avons élaboré des outils d'analyse nous permettant d'exploiter ces données et nous sommes maintenant en mesure d'établir une cartographie de la situation en Alberta.
Nous savons ainsi, pour chaque sous-zone, le nombre d'ordonnances concernant tel ou tel médicament, et pouvons le comparer avec le reste de la province. Nous pouvons donc situer, dans certaines communautés, les points chauds. S'agissant, par exemple, de l'OxyContin, nous pouvons savoir quelles sont les communautés où ce médicament est le plus prescrit. Nous pouvons alors réfléchir aux contacts à prendre avec les médecins concernés, ou transmettre le renseignement aux autorités sanitaires du lieu afin qu'elles puissent elles-mêmes décider de ce qu'il convient de faire.
Nous commençons tout juste à employer de cette manière les données que nous avons recueillies. Elles sont d'ailleurs publiées sur notre site Internet. Nous les échangeons avec les services gouvernementaux afin d'élaborer, de concert, les mesures qui conviendraient.
Puis-je vous demander, monsieur MacPherson, de ne pas dépasser une minute. Nous allons bientôt être à court de temps pour la série de questions posées par M. Wilks.
Je vous remercie.
Tout à fait.
Je suis entièrement d'accord avec le Dr Selby. Il est bien préférable de se trouver devant une personne agitée que devant un mort.
Je suis très content du travail qui se fait actuellement en Ontario. En Colombie-Britannique, le Centre for Disease Control, a lui aussi lancé un projet pilote. Il semblerait que ces programmes permettent tout de même d'empêcher un certain nombre de décès dus à des surdoses.
Les résultats ont été lents à se faire sentir et il nous faut donc trouver les moyens d'accélérer la diffusion de ces renseignements, et obtenir que les autres provinces prennent elles aussi des mesures dans le même sens. Tant que la naloxone n'est pas disponible, ou tant qu'elle ne peut être dispensée que par des ambulanciers ou au service des urgences, nous risquons d'enregistrer des décès qui pourraient pourtant être évités.
[Français]
Merci beaucoup.
Je remercie les témoins de participer à notre séance d'aujourd'hui.
J'ai trois questions, que je vais poser d'abord pour ensuite vous laisser répondre.
Madame Giudice-Tompson, je vous remercie beaucoup de votre témoignage. J'ai lu les recommandations que vous nous avez fait parvenir. Or il y en a une dont vous n'avez pas beaucoup parlé lors de votre témoignage. J'aimerais vous donner l'occasion de le faire. Il s'agit de la troisième, qui consiste à « abolir certaines manières de commercialiser les médicaments d'ordonnance susceptibles d'abus ». Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails à ce sujet?
Madame Ulan, à la fin de votre témoignage, vous nous avez demandé des fonds. Pouvez-vous nous dire exactement combien d'argent vous voulez et nous dire précisément comment vous comptez l'utiliser?
Ma dernière question s'adresse à M. MacPherson.
Au début de votre témoignage, vous nous avez parlé des causes expliquant la croissance de la consommation d'opiacés. Je trouve cela très important. On entend dire qu'il n'y a pas beaucoup de données à cet égard. En réponse à la question de notre secrétaire parlementaire, Mme Ulan a justement parlé du Ritalin. Elle a dit que toutes sortes de gens l'utilisaient, soit des jeunes, des étudiants, etc.
A-t-on présentement des données à ce sujet? S'il était question de faire une étude sur ces causes, par où devrait-on commencer? Combien de temps et quel genre d'échantillon est-ce que ça nécessiterait?
Je vais vous laisser répondre. Peut-être pourriez-vous prendre chacun une minute.
[Traduction]
Vous avez, je crois, évoqué la troisième recommandation. Il s'agit d'éliminer, en matière de médicaments sur ordonnance qui se prêtent à un usage abusif, certaines pratiques de commercialisation.
Dans les années 1990, Purdue Pharma a lancé une vaste campagne. Cette compagnie, propriétaire de la marque OxyContin, vantait les opioïdes, en général. Avant cette campagne de marketing, les médecins ne prescrivaient jamais des opioïdes aux patients souffrant de douleurs chroniques non cancéreuses. Aux États-Unis, la Federation of State Medical Boards — qui correspond, je crois, à notre Fédération des ordres des médecins du Canada, installée ici à Ottawa — a repris à son compte tous les renseignements que Purdue Pharma avait diffusés dans le cadre de sa campagne ventant les mérites des opioïdes. Selon Purdue Pharma, moins de 1 % des patients développeraient une dépendance. Or, cela était tout à fait inexact, mais aujourd'hui encore, il y en a qui continuent à faire valoir cet argument. Cette vaste campagne de marketing couvrant les États-Unis et le Canada reposait sur de faux renseignements.
Il faut que les efforts de commercialisation de l'industrie pharmaceutique à l'intention des médecins prescripteurs et du public soient réglementés. Il faudrait presque instaurer un pare-feu entre, d'un côté, l'industrie des produits pharmaceutiques, et de l'autre, les médecins prescripteurs et les patients. Le fabricant vantait l'innocuité de son produit, soutenant que seul 1 % des patients développeraient une dépendance, et affirmait qu'il n'y avait aucun risque de dépendance pour les personnes qui le prenaient pour lutter contre la douleur. Tout cela était faux. C'était une simple campagne publicitaire. Les gens ne se rendent pas compte de ça, car si l'information est véhiculée par un médecin, ils pensent qu'il n'y a aucun risque.
Ai-je répondu à votre question?
[Français]
[Traduction]
Je vous remercie de vos questions.
Si j'ai bien compris, votre question comportait deux volets. Il s'agissait d'abord de savoir quels seraient les financements nécessaires pour soutenir les travaux dans ce domaine. Et puis, il y a aussi la question du Ritalin et de l'échantillonnage.
Le plus important serait d'abord de recueillir des données fiables. Cela suppose deux choses. La première serait la mise en place de programmes de contrôle des ordonnances. Du bon travail se fait dans toutes les provinces, mais il faudrait demander à chaque province et à chaque territoire de se donner les moyens de surveiller les médicaments prescrits par ordonnance. Il est en effet essentiel de savoir quels sont les médicaments dispensés, et à qui ils sont prescrits.
Il nous faut également prendre conscience de ce qui se fait ailleurs afin de ne pas refaire ce qui a déjà été fait. Il serait, d'après moi, essentiel de constituer un réseau d'information sur les programmes de surveillance des ordonnances. Nous pourrions ainsi exploiter les données recueillies et dégager les grandes tendances nationales et, aussi, relever les prévalences de certains médicaments tels que le Ritalin. Tant que nos renseignements ne reposeront pas sur des données factuelles, il nous sera difficile de cerner les causes, car nous ignorons une grande partie de ce qui se passe dans une province donnée ou dans l'ensemble du pays.
Savez-vous à peu près combien d'argent il faudrait pour mener cette étude? Avez-vous un chiffre en tête?
Il importe davantage, selon moi, de calculer combien il faudrait pour mettre en place un système de surveillance et normaliser les programmes de surveillance des ordonnances. Une partie de l'effort nécessaire est actuellement menée dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre l'abus des médicaments d'ordonnance. Une équipe de mise en oeuvre a été constituée. Je précise que j'en fais partie tellement ce dossier me passionne.
Il serait important d'effectuer une analyse des coûts, de fixer un certain nombre de priorités, de préciser les principaux indicateurs que nous souhaiterions obtenir, puis de nous pencher sur la manière dont nous recueillons les données afin de pouvoir chiffrer l'ensemble des mesures nécessaires.
Il me semble très difficile de calculer le montant du financement tant que nous n'aurons pas précisé tout ce qu'il nous faudra pour mettre sur pied un système satisfaisant.
Je vous remercie.
Merci, madame Morin.
Nous passons maintenant la parole à M. Lizon, qui dispose de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je tiens également à remercier les témoins, tant ceux qui se trouvent ici devant le comité, que ceux qui interviennent par vidéoconférence.
Monsieur le président, je souhaite d'abord faire une observation à l'intention de ma collègue d'en face. La question a été évoquée dans le discours du Trône et je ne pense pas que l'on puisse, quelle que soit l'obédience politique, considérer cette étude comme quelque chose de mauvais. Nous tentons en effet de régler un grave problème qui se pose actuellement à notre pays.
Je vais être franc. Nous avons consacré plusieurs réunions à l'abus des médicaments d'ordonnance, et je dois reconnaître que je m'y perds un peu. Je comprends fort bien qu'il s'agit d'une question très complexe, mais je ne suis pas certain d'en saisir toute l'ampleur. Jusqu'ici, tous nos témoins ont fait porter leurs propos sur les opioïdes.
Docteure Ulan, je vous remercie d'avoir évoqué les autres médicaments qui se prêtent à des abus ou à un mésusage.
Les opioïdes ne sont pas quelque chose de nouveau. La morphine existe depuis 200 ans. Je suppose, cependant, qu'une partie du problème provient du large accès que les gens ont maintenant aux opioïdes. Ces médicaments sont actuellement utilisés dans le cadre de traitements auxquels on ne recourait pas naguère.
Docteure Ulan, vous nous avez dit que, par rapport à sa population, le Canada est un des principaux consommateurs au monde. Comment cela se fait-il? Les autres pays ont-ils recours à d'autres types de traitements? Les populations des autres pays tolèrent-elles mieux la douleur? Pourquoi faisons-nous un si grand usage de ces médicaments?
La question mérite d'être posée. C'est un problème qu'éprouvent les pays industrialisés. Il ne se manifeste pas dans les pays du deuxième ou du tiers monde.
Je suis entièrement d'accord avec ce que vous venez de dire, car c'est effectivement fonction de la disponibilité. Le fait que ces médicaments sont devenus plus disponibles et que les médecins hésitent moins à les prescrire, cela étant particulièrement vrai des opioïdes, la plus grande disponibilité de ces médicaments a effectivement entraîné des méfaits. Les personnes éprouvant de la douleur chronique obtiennent sans doute un soulagement, et beaucoup d'autres patients aussi, mais la plus grande disponibilité de ces médicaments a également eu un certain nombre de conséquences.
Comme vous avez pu le voir lors de notre discussion, il est très difficile de distinguer entre abus et mésusage. Il est même difficile de recueillir des données qui sont valables pour l'ensemble du pays.
Je suis d'accord avec vous. Une plus grande disponibilité et un accès plus large à ces médicaments sont à l'origine des tendances que l'on constate actuellement.
Des études permettent-elles de savoir quel serait, parmi les personnes auxquelles ont été prescrits des traitements aux opioïdes, le pourcentage qui tombe dans la dépendance? Au cours de la Première ou de la Seconde Guerre mondiale, c'était la seule chose que les médecins pouvaient donner aux soldats très gravement blessés, si toutefois les stocks de médicaments le leur permettaient.
A-t-on fait des études en vue de préciser ces pourcentages? Quels sont les risques?
Le Dr Selby est, me semble-t-il, le mieux placé pour vous répondre sur ce point. Ce serait, avec la permission de la présidence, plutôt à lui qu'il conviendrait de poser la question.
En Ontario, nous avons procédé à une enquête sur la consommation de drogue chez les jeunes. Cette enquête est menée depuis 15 ou 20 ans et nous commençons à discerner une consommation d'opioïdes à titre récréatif.
Quant à expliquer comment certaines personnes tombent dans la dépendance, et d'autres non, je dois dire que ce n'est pas simplement une question de disponibilité. Il y a, certes, la disponibilité, mais il y a également les normes sociales relatives à la consommation de ce type de substances. Nous savons que le médicament lui-même, selon le type d'opioïde en cause, comporte un plus ou moins grand risque d'abus. Les opioïdes qui agissent rapidement sur l'organisme, qui peuvent être injectés et sont rapidement éliminés du corps sont ceux qui posent le plus grand risque.
En ce qui concerne le risque de dépendance, je précise que les opioïdes créent une moins forte dépendance que le tabac, mais entraînent une plus forte accoutumance que la marihuana. Dans l'échelle des risques, voilà où se situent les opioïdes. En ce qui concerne maintenant la prévalence, je précise que moins de 1 % des Canadiens finissent par éprouver des problèmes dus à des drogues illicites. Ce chiffre est à comparer à ceux de la consommation d'autres substances. C'est dire que la disponibilité explique en partie le phénomène, mais pas complètement.
Merci, monsieur Lizon. Votre temps de parole est écoulé.
Nous passons maintenant la parole à M. Marston.
Merci, monsieur le président.
Je voudrais d'abord poser une question au détective Harris, puis à la Dre Ulan. M. MacPherson souhaitera peut-être également me répondre sur ce point.
Depuis en avoir entendu parler, j'ai déjà évoqué cet exemple plusieurs fois devant le comité. M. Wallace, notre spécialiste des prisons, a dit, au comité, que 80 % des nouveaux détenus sont déjà accrocs lors de leur arrivée en prison ou, à tout le moins, éprouvent déjà un problème de dépendance vis-à-vis de certains médicaments. Ça m'a frappé, car j'ai pu voir, lors d'une réunion, que le chef De Caire, chef de police de Hamilton, était quasiment blême en parlant de cette nouvelle drogue, la désomorphine, familièrement appelée Krokodil. D'autres nous en ont parlé ici devant le comité.
Il s'agit d'un mélange de codéine, d'essence, de diluant pour peintures, d'iode ou d'acide chlorhydrique. Ce qui est particulièrement inquiétant, c'est que c'est une drogue nécrosante, et que ceux qui l'injectent risquent gros. On l'appelle également la « drogue zombie » et, étant donné l'actuel engouement pour les zombies... Il est clair qu'avec un peu de bon sens on arrive à distinguer entre la réalité et la fiction, mais c'est un produit qui coûte moins cher, même s'il est beaucoup plus dangereux que n'importe quelle forme d'héroïne. Cette drogue est plus toxique, et en même temps, la sensation dure beaucoup moins longtemps.
Comment se fait-il que nous en soyons arrivés là? Est-ce la faute de l'OxyContin, le fait qu'auparavant ce médicament était disponible et puis qu'on a fait de gros efforts afin d'en limiter l'accès?
J'aurais une ou deux autres questions à poser. La désomorphine a-t-elle une utilité clinique? J'imagine que non. Est-elle fabriquée par des sociétés pharmaceutiques, ou est-ce quelque chose qui est concocté dans un labo clandestin?
Merci pour cette question.
On peut effectivement s'interroger à cet égard. Il semblerait, d'après les premiers éléments d'enquête, qu'on ne relève au Canada, aucun cas de consommation de krokodil.
On en a pourtant relevé trois cas la semaine dernière à Niagara. Il est possible que le produit soit venu des États-Unis. Je ne suis pas certain. Les trois individus ont dû être pris en charge par le système de soins de santé.
Il est bon que les gens signalent la présence de cette drogue, mais sur quoi se base-t-on? Cette drogue a-t-elle fait l'objet de saisies? D'où nous proviennent ces renseignements? S'agit-il d'un tiers qui affirme connaître quelqu'un qui s'est piqué au krokodil, ou de personnel médical qui dit avoir eu affaire à quelqu'un qui en avait pris? Pour l'instant, nous ne pouvons rien affirmer.
C'était à peu près la même chose avec les sels de bain, où l'on nous avait signalé des personnes qui avaient commis des actes odieux... la situation est tout à fait comparable, puisque les médias avaient affirmé à l'époque que les auteurs de ces crimes avaient auparavant consommé des sels de bain, alors qu'après analyse, on n'en a pas relevé la moindre trace.
Mes renseignements me proviennent de notre chef de police, et la semaine dernière, notre journal local, qui couvre la région de Niagara, y a consacré un article.
Je voudrais obtenir une petite précision. Sait-on si ce produit a une indication clinique? Est-ce quelque chose qui est produit par une société pharmaceutique?
Non. Heureusement, car je ne comprenais vraiment pas comment nous avions pu en arriver là. Il y a toutes sortes de... à l'époque de la prohibition, de nombreuses personnes ont été empoisonnées par de l'alcool fabriqué clandestinement. Je n'oublierai jamais le visage qu'avait notre chef de police lorsqu'il m'a expliqué de quoi il s'agissait.
Je vais un peu m'avancer, Giudice... Non, je sais que ma prononciation n'est pas parfaite. Permettez-moi de vous appeler Ada. Ce sera plus facile.
Enfin, je vous remercie de votre présence devant le comité. Rien ne remplace un récit de première main.
Santé Canada maintient actuellement son autorisation d'un oxycodone générique. Or, aux États-Unis, de gros efforts sont actuellement faits pour supprimer le marché parallèle. Les Américains reconnaissent en effet que...
Pourquoi ce produit est-il encore autorisé au Canada? Dans le document que vous nous avez remis, vous parlez des arguments de vente avancés par le fabricant. Il y a eu tout un battage publicitaire. Pensez-vous que, dans une certaine mesure, nous nous sommes laissés prendre par cela? Les professionnels de la santé y semblent acquis, mais cela peut-il être vrai même de Santé Canada?
Je regrette d'avoir à dire que oui. Il est probable que Santé Canada n'ait pas un personnel en nombre suffisant, mais pourquoi aurions-nous besoin de cette oxycodone générique alors que Santé Canada a rayé l'OxyContin du formulaire? Ce médicament a en effet été remplacé par l'OxyNEO, formulation dont il est moins facile de faire un usage détourné. Cela ne veut pas dire, cependant, qu'il n'entraîne pas une aussi forte accoutumance. Mon fils n'en a jamais sniffé, et n'a jamais pulvérisé les cachets. Il prenait ce médicament selon les indications du médecin et, au départ, c'est du Percocet qu'on lui avait prescrit. Il est mort chez lui, dans son lit. Le docteur lui avait prescrit de l'hydromorphone. Je précise, en passant, que, par rapport à sa population, le Canada est, de tous les pays du monde, le plus gros consommateur d'hydromorphone.
Mais, pour revenir à votre question, il est vrai qu'on dispense actuellement de l'oxycodone générique. Je ne comprends vraiment pas pourquoi. Il y a des lois qui protègent les brevets et d'autres lois commerciales et économiques qui l'emportent sur la sécurité des patients et l'innocuité des produits pharmaceutiques. C'est ce que m'ont appris les études que j'ai menées au Canada et aux États-Unis. De nombreux renseignements inexacts ont été transmis à Santé Canada. Pour le constater, il n'y a qu'à se pencher sur les actions en justice qui ont été engagées. Elles montrent bien ce qu'il en est, qu'il s'agisse du Paxil, du Ritalin, ou de divers autres médicaments. C'est particulièrement vrai de la société Purdue Pharma. La société a été inculpée en 2007. Elle a plaidé coupable et, pourtant, nous continuons à consommer ses produits.
Avons-nous besoin d'un si grand nombre d'opioïdes? Nous avons parlé, ici, de systèmes de surveillance, de bases de données et de la naloxone. Tout cela va dans le bon sens, mais ces mesures n'interviennent qu'après-coup. Or, nous souhaiterions prévenir les méfaits. Il faudrait pour cela que nos médecins disposent au départ de renseignements exacts. C'est une question de vie ou de mort. Mon fils n'aurait pas dû mourir. Il y a eu une tromperie à grande échelle et, pourtant, ces produits restent sur le marché.
Je suis désolée de vous avoir répondu si longuement, mais nous disposons d'informations très complètes sur la question.
Merci, monsieur le président. Je tiens moi aussi à remercier nos témoins.
Je remercie tout particulièrement Mme Giudice-Tompson du témoignage qu'elle nous a livré aujourd'hui. Votre dernière réponse nous en dit long sur la question, et je vous en remercie.
Il y a une ou deux autres choses dont j'aimerais parler.
Docteur Selby, vous nous avez parlé, tout à l'heure, des régions éloignées et de l'état de la prise en charge, dans ces régions, de patients souffrant de douleurs chroniques. Il y a quelques jours, nous avons appris que, dans ces régions, les patients se voient peut-être plus fréquemment qu'ailleurs prescrire des opioïdes. Je n'étais pas certain que ça aille dans le sens de ce que vous avez vous-même dit. On avait expliqué ça par l'insuffisance, dans ces régions, de moyens sanitaires auxiliaires.
Pourriez-vous m'apporter des précisions sur ce point?
C'est tout à fait exact. Les gens finissent par recourir à des médicaments antidouleur tels que les opioïdes parce qu'ils pensent ainsi régler le problème. Ils n'ont effectivement pas accès à des soins, que couvre cependant l'assurance médicale, tels que la physiothérapie, les massages ou la relaxation. Ils éprouvent des problèmes de santé, et recourent aux opioïdes, car c'est la solution qui s'offre le plus facilement à eux.
Il y a, effectivement, un problème d'inégalité en matière de soins de santé puisque les gens qui sont couverts par une assurance privée et qui vivent en zone urbaine ont accès à ce type de services, alors que cela devient de moins en moins vrai plus on avance dans le Nord. Les médicaments antidouleur, et plus particulièrement les opioïdes, sont une sorte de solution miracle qui attire les gens souffrant de douleur chronique. Rappelons que, dans certains cas, l'emploi chronique d'opioïdes peut en fait aggraver la douleur. Ce type de médicament doit être employé avec discernement. Même avec une posologie adaptée, ce type de médicament n'est pas indiqué pour tout le monde.
Je vous remercie.
Docteure Ulan, j'ai pris connaissance de la mission que s'est donnée la Coalition on Prescription Drug Misuse. La question a déjà été évoquée par M. Harris et je voudrais simplement revenir sur une ou deux choses.
Je sais que vous vous attachez actuellement à mieux cerner les déterminants, le contexte et les effets de l'emploi abusif de médicaments d'ordonnance en Alberta. Étant moi-même de l'Alberta, je vous demanderais de nous en dire un peu plus à ce sujet. Vous entendiez, dans le cadre de votre mission, élaborer un modèle qui démontrerait comment les services de santé, les forces de l'ordre et les autorités provinciales et fédérales pourraient agir de concert dans ce domaine. Vous avez entamé ce projet en 2008 et j'aimerais que vous nous expliquiez un peu où vous en êtes actuellement.
Volontiers.
Nous avons commencé par recueillir des renseignements et des données auprès de personnes ayant acquis un vécu dans des zones où les risques sont particulièrement élevés, et auprès de groupes de discussion formés de professionnels de la santé et d'intervenants de première ligne. Nous avons, à l'époque, constaté dans la province des insuffisances au plan du leadership local. C'est pour cela qu'en mars 2010, nous avons organisé un symposium. Nous avons réuni les principales parties prenantes, les décideurs et les responsables. La famille Bruketa y a pris part. Les membres de cette famille ont été les premiers à prendre la parole pour évoquer ce qui était arrivé à la jeune Jodie.
Nous sommes parvenus à capter l'attention du médecin hygiéniste en chef, qui a reconnu qu'il s'agissait d'un problème qui a de graves incidences et qui, pourtant, n'était pas, en Alberta, considéré comme important au plan de la santé et de la sécurité publiques. Cela a été, pour nous un important indicateur de succès.
Nous nous sommes alors attachés à l'étude des données recueillies en Alberta. Nous avons procédé à une revue de la littérature publiée sur les systèmes de surveillance, tant au Canada que dans d'autres pays. Puis, nous avons passé un contrat avec le groupe OKAKI Health Intelligence, à qui nous avons demandé d'interviewer les principaux intervenants ayant recueilli des données en Alberta, c'est-à-dire le médecin légiste en chef, l'Ordre des médecins et des chirurgiens, l'Ordre des pharmaciens de l'Alberta, le ministère provincial de la Santé, les Services provinciaux de santé et les organismes de maintien de l'ordre.
Nous avons examiné les types de données recueillies, et étudié l'usage qui en était fait. Nous avons cherché à savoir si les diverses organisations s'échangeaient ce type de renseignement et nous avons constaté que les données comportaient de larges lacunes. Les données sont utiles et abondantes, mais elles ne sont pas utilisées de manière efficace. Ayant constaté cela, nous nous attachons maintenant à élaborer, en Alberta, un modèle de gouvernance intégrant les activités des groupes faisant partie de la Coalition on Prescription Drug Misuse. Nous étudions actuellement comment faire pour que les intervenants de première ligne, les services de maintien de l'ordre, les médecins, les pharmaciens, les groupes de patients, les infirmiers et infirmières, et les dispensateurs de services tels que les services de traitement des dépendances parviennent à collaborer plus étroitement afin d'agir sur la situation et réduire les méfaits.
Je vous remercie.
Monsieur Dreeshen, votre temps de parole est épuisé.
Monsieur Aspin, vous disposez de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je tiens, à mon tour, à remercier nos invités de leur contribution à notre étude.
Madame Giudice-Tompson, mes remerciements s'adressent particulièrement à vous. Le courage dont vous avez fait preuve est pour nous une source d'inspiration.
Permettez-moi de vous adresser ma première question. Vous avez formulé plusieurs recommandations et je voudrais revenir sur la deuxième, qui a trait à la constitution d'un comité ministériel multidisciplinaire constitué d'experts. Pourriez-vous nous dire en quoi cela consisterait. Il s'agirait de contribuer au processus réglementaire de Santé Canada. Pourriez-vous nous parler de cela et nous dire un peu ce que vous envisagez?
L'idée serait de constituer un groupe d'experts pour épauler Santé Canada. Ce qui se passe actuellement c'est que les sociétés pharmaceutiques effectuent des essais cliniques et que Santé Canada accepte comme vérité absolue les résultats qu'on lui transmet. Ce n'est que lorsque le public commence à prendre ces médicaments qu'on commence à en constater les méfaits ou effets nocifs. Nous servons de cobayes.
J'espérais, par cette recommandation, réunir des experts des divers domaines de la santé, ainsi que les personnes ayant un vécu personnel et familial afin de contribuer au processus d'homologation des médicaments. Il faudrait qu'un plus grand contrôle soit exercé avant que ce type de médicament soit autorisé à la vente. Si nous souhaitons faire de la prévention, il faut remonter à la source. Les prescripteurs, malgré les outils dont ils disposent, malgré les ressources qui sont là — il y a, en effet, un outil qui permet de mesurer le risque que présentent les divers opioïdes, et puis il y a les directives en matière d'ordonnances, mais tout cela est en grande partie fondé sur des renseignements provenant des sociétés pharmaceutiques. Il nous faut changer cela. Il faut qu'interviennent dès le départ des gens qui ont les connaissances nécessaires, des chercheurs qui sont en mesure de dire « Non. Voilà comment les choses vont se passer. » Pour savoir quand et comment utiliser un produit, on ne peut pas simplement, s'en remettre à son fabricant.
Les prescripteurs n'exercent aucun pouvoir sur les dépendances. Les patients n'ont plus. Un médecin ne peut pas vous dire « Remplissez ce questionnaire. C'est un bon outil d'évaluation du risque que comportent les opioïdes. Vous ne présentez guère de risque et je vais donc vous en prescrire », ou bien « Vous présentez un risque élevé mais c'est ce qu'il vous faut ». Aucun système de surveillance ou de contrôle ne va prévenir les toxicomanies. La dépendance est en effet une maladie qui s'installe progressivement, qui ne fait que s'aggraver et qui a parfois une issue fatale. Il nous faut donc la prévenir et ne pas nous contenter de discuter des diverses mesures à prendre après-coup.
Les systèmes de surveillance sont une bonne chose. La naloxone est, elle aussi, une très bonne chose. J'aurais souhaité en avoir eu à l'époque, car j'aurais pu en donner à mon fils. Mais tout cela ne fait qu'intervenir après-coup, alors qu'il nous faut, par des mesures proactives, agir préventivement. Il faudrait informer le patient des risques que pose le médicament en question, bien sûr, mais le médecin n'est guère en mesure de le faire, et cela a bien été le cas. Lorsque nous avons quitté le service des urgences, ils l'ont prescrit à mon fils pour soulager la douleur, car il souffrait de coliques néphrétiques dues à des calculs rénaux. Vous pouvez constater ce qui lui est arrivé. Pourtant, le médicament lui avait été prescrit entièrement dans les règles. C'est pour ça que je parle de cette dichotomie qui n'a pas lieu d'être. Ce n'est pas nécessairement une question d'abus des médicaments.
Il faut donc mettre en place des contrôles pour épauler Santé Canada afin que chacun comprenne mieux les incidences de ces médicaments. Il faut examiner la structure moléculaire de l'héroïne. Puis, celle de l'oxycodone. Les deux ont, sur le cerveau, sur la conscience et sur le corps, les mêmes effets. Nous ne devrions pas être surpris de voir des gens en mourir. Qu'il y ait un décès ou qu'il y en ait 5 000, peu importe les statistiques. Il nous devrait être possible d'intervenir sans plus attendre.
Je vous remercie. Cela me semble être une recommandation essentielle.
Monsieur le président, si j'en ai le temps, je voudrais poser une deuxième question.
Monsieur le détective Harris, docteure Ulan, selon le groupe que vous représentez, il faudrait, pour lutter contre l'abus ou le mésusage de médicaments sur ordonnance, éliminer certaines pratiques commerciales malhonnêtes par lesquelles, pour commercialiser leurs produits, des sociétés pharmaceutiques avancent des arguments qui ne reposent sur aucune donnée scientifique.
Estimez-vous que les pratiques commerciales des entreprises pharmaceutiques contribuent, au Canada, à l'abus ou au mauvais usage de médicaments d'ordonnance?
Je ne pense pas que nous ayons formulé de recommandation à cet égard. Cette recommandation émanerait plutôt d'Ada et de son groupe.
Je suis tout à fait convaincue qu'il nous faut installer un pare-feu entre les entreprises pharmaceutiques et l'information transmise aux prescripteurs. On ne peut pas prendre pour argent comptant ce que les entreprises nous disent au sujet des médicaments qu'elles fabriquent.
Merci beaucoup. Encore une fois, nous nous trouvons à court de temps.
Je tiens à remercier nos témoins de nous avoir fait profiter de leurs connaissances, contribuant en cela à notre étude et au rapport qui devrait en découler.
Nous nous retrouverons donc lundi.
J'avais dit, à l'intention des membres du comité, que nous aurions, un soir, une petite réunion. Celle-ci aura lieu dans une salle de réunion, après la séance de lundi. Nous ne voudrions pas que les gens aient trop à se déplacer. Je demande donc à chacun de marquer ça sur son calendrier et j'espère que vous pourrez tous y assister.
C'est ce soir notre fête de Noël, et je dois donc m'éclipser afin de m'y préparer.
Je souhaite à chacun une excellente soirée. Soyez prudents.
La séance est levée.
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