HESA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la santé
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 27 mai 2014
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue.
Nous en sommes à la dernière réunion de notre étude sur les risques que pose la marijuana pour la santé.
Nous entendrons deux groupes de témoins ce matin, soit trois membres de la GRC, et ensuite certains experts dans le domaine. Nous avons de 8 h 45 à 9 h 25, alors nous allons commencer immédiatement.
Vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, après quoi nous passerons à des séries de questions et réponses.
Merci de me donner l'occasion de vous parler du travail qu'effectue la GRC pour lutter contre la conduite avec facultés affaiblies par la drogue et les effets de la consommation du cannabis sur les mesures d'application de la loi.
Je suis l'inspecteur Jamie Taplin, et je travaille à l'unité de la politique opérationnelle des services de police contractuels. Je suis chargé du Programme d'expert en reconnaissance des toxicomanes et de la Stratégie de réduction de la conduite avec facultés affaiblies de la GRC.
Aujourd'hui, je suis accompagné de M. Smith, qui est un spécialiste des alcools et des drogues des laboratoires judiciaires de la GRC. Il est également un des instructeurs du Programme d'expert en reconnaissance des toxicomanes. Présentement, il mène une étude visant à déterminer s'il existe des appareils de dépistage routiers qui fonctionneraient avec les drogues consommées le plus couramment et qui affaiblissent les facultés d'un conducteur, pour voir s'il conviendrait de les utiliser au Canada.
Je suis aussi accompagné du sergent Dustin Rusk, des services fédéraux de la GRC. Il est un agent d'engagement du public de la police fédérale. Quand je parlerai de son programme dans mon exposé, je dirai EPPF. Ce programme cherche à être proactif et à être axé sur la prévention — bien avant l'étape où des actes criminels sont commis. L'EPPF a comme objectif de trouver des options et des solutions durables et de mettre en lumière les écarts qui existent entre les ressources communautaires ou privées et les politiques, ou les ressources qui ne suffisent pas pour venir en aide aux gens.
Aujourd'hui, je vais commencer par vous parler un peu de la conduite avec facultés affaiblies en général. Je vais mettre l'accent sur la conduite avec facultés affaiblies par la drogue, puis je vais vous parler un peu de ce que fait la police fédérale et des effets de la consommation du cannabis sur les mesures d'application de la loi. Nous allons aussi vous parler de certaines des initiatives que la GRC est en train de mettre au point pour lutter contre la conduite avec facultés affaiblies par la drogue; nous aborderons également, de façon plus générale, la lutte antidrogue et la prévention de la toxicomanie.
Même si la GRC a toujours travaillé au respect des lois canadiennes régissant la conduite avec facultés affaiblies, récemment, le commissaire de la GRC a demandé qu'on élabore une stratégie nationale pour lutter contre la conduite avec facultés affaiblies et contribuer à changer l'attitude de la population concernant ce problème. La conduite avec facultés affaiblies a un effet dévastateur sur les familles et les collectivités et elle engendre des coûts élevés pour les victimes, les contrevenants, les collectivités et les gouvernements. Notre stratégie sera axée sur des activités d'application de la loi, mais aussi sur la sensibilisation de la population. Nous avons comme objectif de nous attaquer aux problèmes associés à la conduite avec facultés affaiblies — une préoccupation grandissante dans le monde entier et aussi, évidemment, au Canada.
Parmi les principales façons de prévenir la conduite avec facultés affaiblies, il faut changer l'attitude des personnes qui choisissent de prendre le volant dans cet état, leur faire comprendre que leurs actions pourraient avoir des effets dévastateurs sur eux et d'autres, et aussi les informer qu'ils courront certains risques s'ils se font attraper. Tirant parti de l'excellent travail en cours dans les provinces grâce à l'engagement de nos partenaires du secteur sans but lucratif, d'autres organismes d'application de la loi et d'autres organisations gouvernementales consacrées à la sécurité routière, la GRC espère encourager les gens à choisir de ne pas prendre le volant avec les facultés affaiblies. Nous espérons encourager les citoyens à signaler tout conducteur qui se trouve dans cet état. Nous souhaitons accroître la probabilité que les conducteurs dont les facultés sont affaiblies seront appréhendés avant de faire plus de tort aux collectivités canadiennes.
Regardons les statistiques — et je vais vous parler de celles de l'ensemble du Canada, pas seulement de celles de la GRC. Les premières proviennent du Centre canadien de la statistique juridique. En 2012, 84 483 délits de conduite avec facultés affaiblies ont fait l'objet d'une inculpation. Même si, dans la grande majorité des cas, il s'agissait de conduite avec facultés affaiblies par l'alcool, dans environ 2 % des cas, les facultés avaient été affaiblies par la drogue. Chose intéressante, d'après les plus récentes enquêtes routières et études universitaires à avoir été publiées, nous apprenons que la conduite avec facultés affaiblies par la drogue correspond à un pourcentage beaucoup plus élevé que le 2 % dont font état nos statistiques.
Par exemple, je vais vous faire part de ce qui figure dans un rapport de 2011, intitulé La consommation de drogues des conducteurs mortellement blessés au Canada (2000-2008), qui a été publié par le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies. Les chercheurs se sont penchés sur les accidents où plus de 17 000 conducteurs ont été mortellement blessés. L'étude montre que des drogues pouvant causer le conducteur à avoir des facultés affaiblies ont été trouvées dans environ le tiers de tous les conducteurs ayant été mortellement blessés. Cela nous paraît important, parce que 33 % correspond à environ le même pourcentage de cas où de l'alcool a été trouvé dans des conducteurs ayant été mortellement blessés.
Une des autres choses importantes que nous apprenons dans ce rapport, c'est que, quand des drogues ont été trouvées, il s'agissait le plus souvent de dépresseurs du système nerveux central et aussi du cannabis.
Selon l'étude, ce sont les jeunes hommes âgés de 16 à 24 ans qui présentent le plus de risques, et leur drogue de prédilection est le cannabis.
Selon une autre étude portant sur une enquête routière de 2008 auprès de conducteurs de la Colombie-Britannique, plus de 10 % d'entre eux ont obtenu des résultats positifs lors d'un test de dépistage pour des drogues — la cocaïne et le cannabis ayant été les drogues dépistées le plus souvent. Dans cette enquête, on a trouvé que 10 % des conducteurs avaient consommé des drogues, que 8 % avaient bu de l'alcool et qu'environ 15 % des conducteurs avaient obtenu des résultats positifs tant pour l'alcool que pour les drogues.
Selon d'autres enquêtes qui ont été menées, 17 % des conducteurs canadiens déclarent avoir pris le volant dans les deux heures suivant la consommation de drogues qui peuvent affaiblir les facultés.
Ce qui est important ici, c'est que la plupart des gens savent que la capacité d'une personne de conduire un véhicule à moteur est affaiblie par la consommation d'alcool. Toutefois, un rapport du Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé nous révèle, au contraire, des faits alarmants: 26 % des gens ne croient pas qu'un conducteur pourrait être inculpé parce qu'il a les facultés affaiblies par le cannabis.
La GRC est préoccupée par la consommation de cannabis, surtout chez les jeunes Canadiens qui prennent le volant. J'ai des adolescents. J'écoute leurs conversations. Je parle à mon fils et à ses amis. Il semble que tout le monde sait qu'il ne faut par conduire en état d'ébriété. Évitez de boire et conduire. Voilà le message que l'on transmet depuis longtemps. Toutefois, les problèmes causés par la conduite avec facultés affaiblies par la drogue sont moins bien compris. J'ai entendu des jeunes dire qu'ils ne considèrent pas qu'une personne intoxiquée par des drogues pourrait être accusée de conduite avec facultés affaiblies.
Je vais vous donner deux ou trois autres statistiques qui ont été tirées d'une enquête menée en 2011, auprès d'élèves du secondaire de l'Ontario, de la 7e à la 12e année. Selon le rapport, le cannabis est la drogue illicite la plus couramment consommée par les élèves du secondaire, 22 % ayant déclaré qu'ils en avaient consommé au cours de la dernière année. Le même rapport fait remarquer que l'utilisation du cannabis augmente chaque fois que l'on interroge les élèves de l'année scolaire supérieure, commençant par la 7e année et allant jusqu'à la 12e. Selon l'étude, 12 % des étudiants de la 10e à la 12e année possédant un permis de conduire de classe G ont déclaré avoir pris le volant après avoir consommé du cannabis. Compte tenu de l'ampleur de l'enquête, ce 12 % représente environ 38 000 conducteurs.
Sur une note plus positive, la même enquête mentionne que nos efforts visant à sensibiliser les jeunes ont un certain impact étant donné que l'on observe une baisse dans le nombre d'élèves possédant un permis de conduire qui prennent le volant après avoir consommé du cannabis ou qui entrent dans une voiture comme passagers après que le conducteur a consommé du cannabis ou de l'alcool.
Dans le cadre de sa Stratégie de réduction de la conduite avec facultés affaiblies, la GRC essaie de transmettre de meilleurs messages de sensibilisation, tant à l'interne qu'à l'externe, en étroite collaboration avec des divisions de la GRC, des organismes partenaires et d'autres groupes d'intérêts spéciaux. Nous organisons des journées de sensibilisation à l'échelle nationale pour décourager la conduite avec facultés affaiblies. Nous testons des dispositifs servant aux enquêtes routières et soutenons l'achat de nouveaux appareils pour dépister les conducteurs avec facultés affaiblies par l'alcool et les drogues. Nous veillons à ce que les normes appliquées à la formation sur ces appareils soient mises à jour tout comme celles qui sont appliquées à la formation sur les tests de sobriété normalisés et la formation de l'expert en reconnaissance des toxicomanes.
J'ai parlé très brièvement du rôle que joue M. Smith avec nos dispositifs servant au dépistage à l'aide de liquides oraux. La GRC travaille à un projet en collaboration avec le Comité des analyses d'alcool de la Société canadienne des sciences juridiques. De plus, nous bénéficions d'un financement de la part du ministère des Transports de l'Ontario. Nous essayons de déterminer s'il existe des appareils de dépistage routiers à base de liquides oraux qui permettent de déceler les drogues ayant contribué le plus souvent à la conduite avec facultés affaiblies. Évidemment, cela comprend le cannabis. Nous voulons déterminer s'il conviendrait d'utiliser ces appareils au Canada. De tels appareils ressembleraient à un appareil approuvé de dépistage d'alcool et contribueraient à l'appréhension des conducteurs dont les facultés sont affaiblies.
La police fédérale reconnaît que la culture, la distribution et l'exportation de la marijuana constituent une importante source de revenus pour les groupes de crime organisé du Canada, revenus qui permettent à leur tour de financer d'autres activités de ces groupes et d'autres criminels.
En collaboration avec ses partenaires, la GRC continue de participer activement à la Stratégie nationale antidrogue sur les plans de la prévention et de l'application de la loi — qui comptent parmi les piliers de cette stratégie du gouvernement du Canada, qui a été déployée en 2007.
Cette stratégie porte principalement sur les drogues illicites et met l’accent sur les jeunes. Elle a pour but de contribuer à l’instauration de collectivités plus saines et plus sécuritaires grâce à des mesures coordonnées de prévention de la consommation de drogues illicites, de traitement de la dépendance et de réduction de la production et de la distribution de drogues illicites, y compris la marijuana. Elle englobe trois plans d’action: prévention, traitement et application de la loi.
La GRC mène aussi des activités de sensibilisation et d'engagement communautaire liées à la consommation illégale de marijuana. L'agent d'engagement public de la Police fédérale participe à toute une gamme d'initiatives visant à sensibiliser les gens sur les drogues illicites et leurs conséquences néfastes. Par exemple, la GRC a offert au cours de l'exercice 2012 plus de 3 000 séances de sensibilisation dans le cadre de programmes comme DARE, un programme de sensibilisation aux dangers de la drogue; Bouclier autochtone; La course contre la drogue; Les enfants et les drogues; et les enfants menacés par la drogue. Ces mesures sont axées sur les jeunes et leur milieu.
Le contenu des programmes est régulièrement mis à jour pour veiller à ce que l'information sur les drogues soit exacte de même que pertinente et adaptée à la région et à la culture. Chaque initiative comprend des renseignements exhaustifs sur les effets néfastes et les risques rattachés à la toxicomanie, à la consommation et au trafic de substances, y compris la marijuana, naturellement.
Dans le cas de la marijuana, la GRC demeure préoccupée à l'échelle locale et fédérale par la présence de plantations au Canada. En septembre 2011, elle a mis en place l’Initiative relative aux cultures de marijuana afin de mieux lutter contre ces plantations. Cette initiative repose sur trois composantes, à savoir la sensibilisation, la dissuasion et l'application de la loi, et fait appel à la collaboration d'organismes gouvernementaux, de groupes communautaires, d'entreprises et de membres de la collectivité. Au cours de la dernière année, de nombreuses mesures fédérales d'application de la loi se rapportant à la culture de la marijuana et aux groupes criminels organisés ont porté leurs fruits.
Voilà qui met fin à mon exposé. Le sergent Rusk, M. Smith et moi-même serons ravis de répondre à vos questions.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les trois témoins d'être avec nous.
Je suis ravi de me trouver au Comité de la santé. Je n'ai pas eu la chance d'y siéger au cours de la présente législature.
J'ai deux questions, après quoi Libby pourra poursuivre.
Vous avez parlé de technologie. Par curiosité, lorsqu'on pense au matériel informatique et aux logiciels relatifs à la formation de l'agent, avez-vous une idée du coût, plus particulièrement dans les provinces où vous êtes présents?
Je ne peux malheureusement pas répondre à cette question. Il y a évidemment un coût, mais je n'ai pas les chiffres en main. Veuillez m'en excuser.
Voilà qui m'amène à ma deuxième question, qui porte sur les services de police des Autochtones, et plus particulièrement des Premières Nations. Au sein d'autres comités, dont celui de la sécurité publique, nous avons appris que les services de police autochtones sont gravement sous-financés au Canada, plus particulièrement chez les Premières Nations. D'après mon expérience, le service de police de la nation Nishnawbe-Aski est vraiment une triste histoire de manque de fonds. J'imagine que la plupart de vos services de police des Premières Nations se trouvent en Colombie-Britannique, en Alberta et dans ce secteur; vous y verrez peut-être une comparaison.
Comment ces initiatives s'intègrent-elles aux services de police des Premières Nations d'un bout à l'autre du Canada, compte tenu de leur situation économique?
Certains programmes ciblent justement les jeunes Autochtones, comme le Bouclier autochtone. Je suis persuadé que Dustin pourra vous en dire plus à ce sujet.
Je dirais que dans les milieux autochtones, comme dans toute autre collectivité où nous sommes présents, les ressources sont allouées là où c'est nécessaire pour que nous puissions faire notre travail, et ce que vous dites en fait bel et bien partie. Je n'ai pas de chiffres ou de données semblables à l'appui, mais dans le cadre des nombreux programmes que nous offrons... Il y en a beaucoup, et je dirais que la plupart peuvent aussi être mis en place dans les milieux autochtones.
Oui, du programme Bouclier autochtone. Ce qu'il y a de merveilleux, c'est que le programme s'adapte aux besoins de la collectivité et peut répondre avec pertinence à tout enjeu du milieu. La collectivité en prend la responsabilité et devient un partenaire clé pour s'attaquer à quelque problème que ce soit relatif aux drogues, à la toxicomanie et à la violence dans le milieu, et pour mobiliser les ressources. La police aide donc la collectivité à trouver des solutions à ses difficultés.
Merci infiniment aux témoins d'être avec nous aujourd'hui.
J'aimerais revenir sur deux ou trois de vos remarques, mais je vais d'abord vous poser une question générale.
En tant que responsables de l'application de la loi, j'imagine que vous analysez vous-mêmes ce qui se passe du côté de la loi et de son application. À quel moment la GRC tire-t-elle la conclusion que l'interdiction de la marijuana a véritablement échoué?
Si je pose la question, c'est parce que nous avons constaté récemment que les chefs de police... Ils préconisaient autrefois la décriminalisation. Je pense que c'était l'avis de l'association de police, mais les chefs recommandent plutôt un genre de système de contraventions.
Je me demande quel est le point critique de la loi actuelle. Au fond, c'est un échec lamentable sur le plan tant économique que de l'application de la loi. L'interdiction n'a vraiment pas dissuadé la consommation. Il est nettement préférable de mettre l'accent sur la sensibilisation, la prévention, le traitement et la réduction des méfaits.
Que pensez-vous du fait que même la police semble désormais préconiser un système de contraventions?
Tout d'abord, je travaille au sein de l'engagement public de la Police fédérale. Une de nos priorités est de nous pencher sur la prévention, surtout comparativement à l'industrie médicale. La prévention vaut tellement plus que toute mesure réactionnelle.
Par contre, nous avons pour mandat d'appliquer tout ce qui se trouve dans les lois — y compris la Loi réglementant certaines drogues et autres substances; nous devons nous en tenir à cette position, peu importe la situation. Nous appliquons donc les lois comme il se doit en présence de substances illicites, peu importe desquelles il s'agit parmi les différentes annexes.
Croyez-vous qu'il soit important d'adopter une approche axée sur la santé? Par exemple, j'ai toujours trouvé plutôt intéressant que ce soient des agents de police qui viennent à l'école pour la sensibilisation et la prévention dans le cadre du programme DARE. Lorsqu'on parle d'éducation sexuelle dans les écoles, on n'y envoie pas de policiers pour autant. Pourquoi le faisons-nous dans le cas des drogues, alors que c'est plutôt une question de santé et de sensibilisation? Les jeunes doivent notamment savoir ce qui se passe dans leur corps et apprendre comment faire des choix judicieux. En fait, c'est uniquement ainsi parce que les drogues sont illégales.
Je m'interroge sur l'efficacité de cette façon de faire. Convenez-vous qu'il est très important, surtout lorsqu'on cible les jeunes, d'adopter une approche axée sur la santé et fondée sur la prévention, l'éducation et la sensibilisation? La police a peut-être un rôle à jouer, mais c'est un problème qui touche la santé, et il faut absolument le rappeler aux jeunes.
En ce qui concerne le mandat de votre comité, je ne peux pas parler au nom de Santé Canada, mais il y a certainement lieu d'adopter une approche globale réunissant tous les intervenants, surtout lorsqu'il est question de nos jeunes.
Après tout, comme on dit, pour avoir une collectivité saine, il faut aussi que le milieu soit sécuritaire et que les gens, surtout les jeunes, puissent explorer les options qui s'offrent à eux et être bien informés de la voie à suivre pour faire leurs choix dans la vie.
Inspecteur Taplin, j'aimerais vous poser des questions sur des affirmations qui m'ont stupéfié, même après des semaines à écouter des témoignages là-dessus.
Veuillez me dire si j'ai bien compris. Vous dites que le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies aurait étudié 17 000 cas de conducteurs ayant perdu la vie. Est-ce bien cela?
On aurait donc décelé la présence de drogue dans le sang du tiers des conducteurs morts au volant, la substance la plus courante étant la marijuana, n'est-ce pas?
Si je consulte mes notes, les substances les plus courantes étaient plus particulièrement les dépresseurs du système nerveux et le cannabis. La marijuana remportait la palme chez les 16 à 24 ans.
Merci.
Dans le cas des conducteurs en état d'ébriété, vous disposez d'un outil fiable, l'alcootest, vous permettant de porter un très grand nombre d'accusations puisque sa précision a fait ses preuves.
Il n'existe actuellement aucun test semblable pour la marijuana, n'est-ce pas? Est-ce la raison pour laquelle vous dites que la conduite avec facultés affaiblies par la marijuana est probablement bien plus courante que les 2 % qui sont signalés? Est-ce bien parce qu'il n'y a aucun test fiable et aucune façon d'en faire la preuve?
C'est assurément une partie de la raison. La conduite avec facultés affaiblies par la drogue nécessite une enquête complexe qui comporte effectivement plus d'étapes et des outils différents que ceux employés lors d'enquêtes pour conduite en état d'ébriété. Lorsque j'ai parlé des 2 % signalés, je parlais de conduite avec facultés affaiblies par la drogue en général, et pas seulement par le cannabis.
Lorsqu'un agent de police arrête une voiture pour un contrôle routier, il est formé pour sentir l'odeur de l'alcool dans l'haleine du conducteur. Il peut voir si ses yeux sont rouges et peut-être même si son élocution est difficile. Ce n'est pas si facile dans le cas de la marijuana, n'est-ce pas?
C'est exact. Nous offrons notamment le programme d'expert en reconnaissance des toxicomanes. M. Smith est d'ailleurs un des formateurs. Si vous le voulez bien, monsieur, je vais lui demander de vous donner un bref...
Le programme d'expert en reconnaissance des toxicomanes a été créé parce que nous n'avons aucun appareil pour détecter la présence de drogue lors de contrôles routiers, ni la boîte noire que tout le monde cherche lorsque nous avons affaire à d'autres drogues. Lorsque l'évaluateur applique la procédure à un individu ayant consommé une substance comme le cannabis, la précision est plutôt bonne.
À ce moment, l'individu a normalement été arrêté parce qu'on soupçonnait la présence de drogue dans son système. Une évaluation est ensuite demandée, puis l'individu est ramené au poste à cette fin.
Il faut que l'intoxication soit assez importante, car lors d'un contrôle routier, il doit être assez difficile pour un agent de dire qu'un individu a consommé de la marijuana s'il vient de fumer un joint, ou même la moitié d'un, n'est-ce pas?
On a brisé le mythe selon lequel le cadre réglementaire de l'alcool est une grande réussite, et qu'il suffirait de décriminaliser la marijuana, de la taxer et de la réglementer pour que tout rentre dans l'ordre. Une étude récente du Centre de toxicomanie et de santé mentale, ou CAMH, révèle que 54,9 % des élèves ontariens de la 7e à la 12e année consomment illégalement de l'alcool à l'occasion. Nous savons qu'il y a un problème de consommation excessive d'alcool, ce qui nous porte à croire que la réglementation est un échec.
J'ai siégé pendant trois ans à la Commission des alcools et des jeux, où j'ai assisté à plus de 100 audiences. À l'époque, 500 millions de dollars d'alcool illégal étaient vendus dans les bars clandestins et dans ce genre d'endroits. Bien que l'Ontario ait apparemment un des meilleurs systèmes réglementaires de l'Amérique du Nord, on y vendait tout de même 500 millions de dollars d'alcool de fabrication illégale. Je n'ai pas pu obtenir de chiffres plus récents.
Inspecteur Taplin, que pensez-vous de la supposition naïve voulant que la réglementation de l'alcool empêche les jeunes de s'en procurer, laissant croire que légaliser et réglementer la marijuana empêcherait aussi les jeunes de s'en procurer?
C'est une question très large. Comme on l'a dit, si une personne est mineure, elle aura eu recours à des moyens illégaux pour s'en procurer. Je sais que dans l'ensemble des provinces, il faut avoir 18 ou 19 ans pour acheter de l'alcool, à plus forte raison en consommer.
Je peux vous dire où ils s'approvisionnent. Nous avons tous été adolescents. Ils font appel à des amis, des frères et des soeurs qui sont plus vieux, ou ils en volent dans la maison familiale. Si la marijuana était légale et que des amis, des frères ou des soeurs plus âgés pouvaient en acheter, c'est là que les jeunes s'en procureraient. Ne peut-on pas l'affirmer sans crainte?
Bien, merci.
Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais laisser une partie de mon temps à M. Wilks, s'il vous plaît.
Merci beaucoup.
Messieurs, je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
En ce qui concerne le THC, monsieur Smith, un laboratoire judiciaire a-t-il déterminé la concentration nécessaire dans le sang pour affaiblir les facultés? Pour l'instant, l'agent de police doit demander un échantillon de sang pour se faire une opinion. C'est la seule façon de procéder avec la marijuana.
La difficulté lorsqu'on tente de déterminer le seuil à partir duquel les facultés sont affaiblies dans le cas du cannabis ou du THC, c'est la pharmacocinétique unique du cannabis dans le système. Le corps a besoin de temps pour l'éliminer. Même lorsqu'il n'a plus les facultés affaiblies par la drogue, un consommateur aura encore une présence quantifiable de marijuana ou de THC dans le sang.
Ce que vous dites, c'est que le cannabis, la marijuana ou le THC demeurent dans le corps, filtré par les tissus adipeux, pendant beaucoup plus longtemps que l'alcool.
Les études relatives à la conduite automobile et celles menées en laboratoire sur les effets du cannabis sur les facultés démontrent que les capacités de conduite sont affaiblies pendant deux à quatre heures après la consommation de cannabis. Au tout début du test, le niveau de THC dans le sang peut être de 25 à 50 nanogrammes par millilitre. Ce niveau diminue rapidement. Chez environ 90 % de la population, le niveau diminuera à moins de 2,5 nanogrammes par millilitre en 160 minutes. Les gens qui consomment beaucoup de cannabis peuvent présenter des niveaux résiduels d'alcool de deux à trois nanogrammes par millilitre dans leur sang, même s'ils n'ont pas fumé depuis plusieurs jours.
Il est difficile de déterminer quel niveau est nécessaire pour affaiblir les facultés. Certains États, notamment le Colorado et Washington, ont fixé cette limite à cinq nanogrammes par millilitre.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
J'aimerais revenir sur la question des accidents de la route liés au cannabis. J'ai quelques questions à ce sujet.
Parmi les gens dont les capacités étaient affaiblies par la consommation de cannabis, combien avaient consommé seulement du cannabis et combien avaient également consommé de l'alcool? Autrement dit, comment détermine-t-on quelle substance a causé le problème ou comment peut-on savoir si le cannabis entraîne plus d'effets et affaiblit davantage les facultés que d'autres substances?
Une étude sur les accidents mortels de la route menée en France, en 2005, révèle que les conducteurs qui avaient obtenu un résultat positif au test de dépistage d'alcool couraient quatre fois plus de risques d'avoir un accident mortel que les conducteurs qui avaient obtenu un résultat positif au test de dépistage de THC dans leur sang.
Vous avez également affirmé que l'alcool n'affaiblissait pas les facultés de la même façon que le cannabis, et que le moment où les niveaux culminent est important. Je ne crois pas que la plupart des gens se rendent compte que de 8 à 16 heures après avoir consommé une grande quantité d'alcool, leurs facultés sont toujours affaiblies, notamment leurs capacités cognitives, leurs réflexes, etc., car les effets de l'alcool sur le cerveau se font sentir pendant tout ce temps.
Peut-on trouver, au Canada, des renseignements sur les liens entre l'utilisation du cannabis à lui seul et les accidents de la route?
Je ne sais pas. Je n'ai aucune étude de ce type. J'ai effectué quelques recherches, mais j'ai accès aux mêmes choses que vous.
Nous tentons de mener autant d'études que nous le pouvons. En général, notre initiative vise l'ensemble des substances qui affaiblissent les facultés pendant la conduite, plutôt qu'une substance en particulier. Je conviens certainement que de nombreuses études démontrent que si une personne consomme du cannabis, elle consommera probablement aussi de l'alcool en même temps.
Darcy, avez-vous des commentaires sur le programme d'ERD et sur la façon de reconnaître les symptômes liés à la consommation des deux substances combinées chez une personne?
L'utilisation de multiples drogues est l'un des plus grands défis auxquels font face la plupart des conducteurs sur nos routes. Il est très rare que le service de toxicologie de mon laboratoire reçoive des échantillons qui contiennent seulement une substance. Ils contiennent généralement de deux à trois différentes drogues.
La plupart des études sur les décès révèlent l'utilisation de multiples drogues. Les études sur les enquêtes routières indiquent également l'utilisation fréquente de multiples drogues. L'un des avantages du programme d'ERD, c'est que les agents de la paix sont formés pour repérer les signes de l'utilisation de multiples drogues. On leur enseigne la nature des effets entraînés par les différentes combinaisons de drogues et les symptômes qu'ils devraient rechercher. Dans le programme d'ERD, le programme d'expert en reconnaissance de drogues, on traite l'alcool séparément, c'est-à-dire qu'on effectue d'abord un alcootest pour déterminer si l'alcool joue un rôle important ou non. Si le résultat est au-dessus de 100, par exemple, nous évaluerons probablement les facultés de la personne.
Il est très courant de trouver des personnes dont les niveaux d'alcool sont de 30, 40 ou 50 milligrammes par 100 millilitres et qui ont également d'autres substances susceptibles d'affaiblir leurs facultés à l'intérieur de leur véhicule. L'alcool et le cannabis combinés affaiblissent particulièrement la capacité de conduire un véhicule, car les niveaux acceptables de chaque substance... c'est-à-dire que si une certaine quantité d'une substance n'affaiblit pas les facultés, lorsqu'elle est combinée à une autre, la combinaison affaiblit beaucoup plus les facultés que prévu.
Encore une fois, l'étude sur l'utilisation chronique du cannabis et les changements physiologiques menée en 2012 a conclu qu'aucune différence importante n'avait été observée relativement aux tâches de suivi critique et d'attention diffusée chez les utilisateurs chroniques de cannabis. On a découvert que les facultés des utilisateurs chroniques étaient très peu affaiblies dans le cas des tâches psychomotrices. Toutefois, évidemment, n'importe quelle quantité d'alcool entraînera l'affaiblissement de vos facultés — même s'il s'agit seulement d'un verre de vin — si vous prenez le volant.
En ce qui concerne la consommation de multiples drogues, les antihistaminiques ou les médicaments contre la toux font partie des substances les plus couramment utilisées. Nous savons que ces médicaments peuvent grandement affaiblir les facultés d'une personne. Devrions-nous donc tester les gens pour déterminer s'ils ont consommé des antihistaminiques ou du sirop contre la toux lorsqu'on évalue leurs capacités motrices au volant?
Ce qu'il faut retenir, c'est que de nombreux médicaments consommés pour des raisons légitimes ou médicales, etc., peuvent affaiblir les facultés, et pourtant, les gens prennent le volant même sous l'effet d'antihistaminiques ou de médicaments contre la toux.
Oui. C'est malheureux, mais c'est vrai.
Ce qui préoccupe réellement les policiers qui patrouillent sur les routes, c'est la sécurité de la population. L'agent de la paix ne fait pas vraiment la différence entre les drogues illégales ou les médicaments d'ordonnance; si les facultés d'une personne sont affaiblies, on mènera une enquête. Dans le cadre de notre stratégie sur la conduite avec facultés affaiblies, l'un des domaines sur lesquels nous voulons insister davantage en ce qui concerne la sensibilisation de la population, c'est la question des médicaments d'ordonnance.
Avez-vous constaté une diminution dans le nombre d'accidents de la route liés à l'alcool en raison du nombre d'annonces et de séances de sensibilisation organisées par MADD et de nombreux autres groupes? J'ai remarqué que les jeunes, après l'obtention de leur diplôme, sont conscients qu'il ne faut pas conduire lorsqu'on a consommé de l'alcool ou qu'il faut avoir un conducteur désigné. Évidemment, ce type de sensibilisation a eu un impact. Il a fallu du temps, mais il y a eu des effets.
Si on peut légaliser une substance sans avantage apparent, par exemple l'alcool et les cigarettes, ne pourrait-on pas faire la même chose avec le cannabis, qui pourrait présenter des avantages sur le plan médical? Ne pourrait-on pas, par la sensibilisation, espérer obtenir les mêmes résultats observés dans le cas des campagnes contre l'alcool au volant, qui semblent avoir eu des effets importants?
Eh bien, j'aime l'idée de sensibiliser davantage la population pour accroître la sécurité sur nos routes. Notre commissaire affirme que tout le monde a le droit de rentrer chez soi en sécurité, et je suis certainement d'accord. En ce qui concerne la légalisation, je ne peux pas vraiment commenter à cet égard.
Non, et je ne vous demande pas de le faire. Je dis simplement que nous avons l'exemple de deux drogues légales qui ne présentent aucun avantage apparent pour la santé, mais plutôt de nombreux risques liés à la santé personnelle et à la conduite. Les efforts de sensibilisation ont fait une différence en ce qui concerne l'alcool, surtout chez les jeunes, car ils ont grandi dans ce milieu. Lorsque j'étais jeune, nous pensions que nous étions éternels et nous faisions toutes sortes de choses stupides. Mais aujourd'hui, nous savons que de bons efforts sont déployés en matière de sensibilisation, et on pourrait faire valoir qu'ils fonctionnent.
Combien de temps me reste-t-il?
Malheureusement, votre temps est écoulé. Merci beaucoup.
Nous allons terminer avec M. Wilks. Vous avez environ cinq minutes.
J'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
En tant que membre des forces à la retraite, je sais que de temps en temps, il peut être inconfortable de répondre à ces questions par l'entremise des politiques et des exigences. J'aimerais vous poser une question, sergent Rusk. Le programme D.A.R.E. existe-t-il toujours dans les écoles? A-t-on mesuré l'efficacité de ce programme, étant donné qu'il est mis en oeuvre dès l'école élémentaire?
Oui, le programme D.A.R.E. existe encore. C'est l'un des nombreux programmes proactifs que nous utilisons au sein de la GRC. Une équipe de l'Université de la Pennsylvanie a récemment effectué une évaluation du programme Keepin' it REAL; cette évaluation a démontré que le programme est efficace et qu'il a une incidence positive dans les écoles.
Diriez-vous qu'il y a un effort concerté, que ce soit de la part de la GRC ou d'autres corps policiers du Canada, pour éduquer les enfants à un âge relativement jeune — le programme D.A.R.E. est probablement offert dès la cinquième ou la sixième année du primaire...? Seriez-vous d'accord là-dessus?
Le programme D.A.R.E. est l'un des éléments qui forment les assises de la capacité des jeunes à prendre des décisions éclairées. Comme nous l'avons tous dit ici, l'éducation est un facteur des plus importants. Les autres organismes, les autres partenaires, qu'ils soient communautaires, provinciaux, territoriaux ou fédéraux, ont tous à coeur le bien-être de nos jeunes et ils veulent s'assurer que ces jeunes ont accès aux meilleures informations pour prendre des décisions éclairées.
Merci.
Quand j'étais plus jeune, comme l'a mentionné Mme Fry, j'ai eu la chance de suivre le cours de TED en 1986, ici, dans le magnifique Rockcliffe. Je suis sûr que les choses ont changé.
Ma question s'adresse à M. Smith ou à l'inspecteur Taplin. Dans les écoles, on vend habituellement la drogue sous forme de joints, à cinq dollars l'unité. Cela n'a pas changé.
Voici ce qui me préoccupe. Je pense que l'on répand des informations erronées dans le monde actuel de la drogue selon lesquelles ceux qui achètent de la marijuana dans les écoles ou à proximité risquent fort d'acheter une drogue mélangée avec une autre, que ce soit de la méthamphétamine, de l'ecstasy ou une autre drogue qui peut être ajoutée au joint.
Sait-on si le THC et les autres drogues qui sont mélangées à la marijuana sont plus présents, moins présents ou si on en retrouve la même quantité par rapport aux années passées?
Comme vous l'avez mentionné, la vente de joints dans les écoles, selon mon expérience d'agent de police qui patrouillait dans les rues de la Colombie-Britannique, se faisait précisément là, dans les écoles.
Quant à ce qui se passe dans le programme sur les drogues, Dustin serait probablement mieux en mesure que moi de répondre à votre question. Je vais demander à Darcy de penser à certains résultats d'analyses toxicologiques effectuées par le laboratoire et d'ajouter quelque chose si nécessaire.
Dustin.
L'une des choses importantes à souligner, c'est que l'achat de toute substance illicite constitue un risque énorme, car cette substance ne provient pas d'une source réglementée comme une pharmacie, par exemple. D'où que provienne ce produit, quel que soit l'endroit où il est cultivé ou fabriqué, il y a un énorme facteur de risque lié à ce qui pourrait y être ajouté.
Encore une fois, pour revenir aux facteurs réglementaires comme la LRDS et d'autres qui visent ces substances, les gens prennent des risques lorsqu'ils achètent des produits dans la rue.
De notre point de vue, si cela passe par l'un de nos laboratoires, c'est sans aucun doute lié à une activité criminelle. La vente de joints dans les écoles secondaires serait davantage associée à la possession en vue du trafic. Les laboratoires de Santé Canada font ensuite les analyses.
À moins que le cas ne soit lié à un élève conduisant un véhicule et que nous devions faire une enquête pour conduite avec facultés affaiblies, nous ne verrions pas ces analyses. Je n'ai donc pas grand-chose à ajouter.
Merci beaucoup.
Voilà qui conclut les témoignages de notre premier groupe ce matin.
Nous allons nous arrêter quelques minutes afin de laisser les témoins se retirer, puis nous poursuivrons avec la vidéoconférence.
Pour répondre à la question de M. Young à savoir qui vend de la drogue aux jeunes à l'école secondaire, d'après mon expérience à Clinton, c'est habituellement le type qui a coulé quatre fois sa 9e année.
Sur ce, nous allons nous arrêter et reprendre dans quelques minutes.
Merci.
Mesdames et messieurs, soyez à nouveau les bienvenus.
Nous accueillons maintenant notre deuxième groupe de témoins.
Nous avons trois témoins, deux par vidéoconférence et un en personne. Nous allons d'abord entendre les personnes qui comparaissent par vidéoconférence, pendant que nos liaisons fonctionnent bien. Nous entendrons ensuite le témoin qui est ici avec nous, après quoi nous passerons aux séries de questions.
Nous sommes dans les temps. Il y a certaines questions dont nous devons discuter à 10 h 30; cela nous donne donc une heure pour entendre nos témoins. Nous avons amplement de temps.
Nous allons commencer par M. Asbridge, de l'Université Dalhousie.
Vous avez la parole, monsieur.
Je tiens d'abord à vous remercier de m'avoir invité à témoigner.
Je suis épidémiologiste. Mes recherches dans ce domaine portent principalement sur les dépendances et la prévention des blessures, et plus particulièrement sur la sécurité routière.
Je vais vous parler de la conduite avec facultés affaiblies et du rôle que joue le cannabis. Je m'intéresse également à d'autres enjeux. Une partie de ma recherche porte sur les questions touchant les jeunes, les tendances de consommation chez les jeunes et les jeunes adultes, la notion de normalisation de la consommation de cannabis et certaines questions liées à la définition de la consommation problématique ou nocive. Je vous en parlerai si le temps le permet, mais n'hésitez pas à m'interrompre, car je suis assez volubile.
Lorsqu'il est question des risques pour la santé associés au cannabis, il est important de mettre en contexte la façon dont il est utilisé, ou la nature de son usage. Il est important que notre façon de concevoir le cannabis soit un peu comme notre façon de concevoir l'alcool. Peu d'effets négatifs associés au cannabis sont liés à ce que nous appellerions une consommation incontrôlée ou irresponsable, où le risque d'effets négatifs est maximisé par rapport à un usage plus contrôlé où les risques sont minimes ou inexistants. Je veux vous en parler quand j'aborderai ces sujets.
En ce qui a trait au cannabis et à la conduite automobile, il y a trois ou quatre points que je veux aborder. La recherche expérimentale montre que le cannabis, consommé en quantité suffisante, affaiblit les capacités cognitives et psychomotrices nécessaires à la conduite sécuritaire d'un véhicule automobile. C'est ce qui ressort d'une série d'études expérimentales exhaustives. De nombreux aspects de la conduite sont affectés, notamment le repérage des véhicules, le temps de réaction, l'attention, et ainsi de suite. C'est important, car nous savons, d'après les données hospitalières et les données d'enquêtes, que le nombre de cas de conduite sous l'influence du cannabis a augmenté au cours des 20 dernières années.
Selon le type de sondage, la proportion de jeunes ayant admis avoir conduit sous l'influence du cannabis de une à deux heures après en avoir consommé varie de un sur dix à quatre sur dix, selon la province. Ce délai d'une à deux heures est un seuil important, car les effets du THC sur les facultés, sur la conduite se feront sentir durant cette courte période.
Nous savons également, d'après les données hospitalières, qu'entre 10 et 20 % des conducteurs impliqués dans des accidents — ceux qui souffrent de blessures et qui sont conduits à l'hôpital — sont sous l'influence du THC. Environ 6 % des conducteurs choisis au hasard dans le cadre de la récente enquête routière menée en Colombie-Britannique avaient consommé du THC. Les données de Transports Canada révèlent qu'une proportion élevée de conducteurs décédés dans un accident avaient également consommé du THC. Dans bien des cas, il y a usage de plusieurs drogues, mais il y a présence de THC.
Enfin, bon nombre des enquêtes qui ont été menées en Australie, aux États-Unis et au Canada, en particulier chez les jeunes et les jeunes adultes, indiquent que les cas autodéclarés de conduite avec facultés affaiblies par le cannabis ont dépassé les cas de conduite avec facultés affaiblies par l'alcool. Ils sont supérieurs. C'est une source de préoccupations.
Ce qu'il est important de savoir, du point de vue de la sécurité routière, c'est comment la consommation de cannabis avant de prendre le volant influe sur la probabilité d'être impliqué dans un accident. Nous savons qu'une consommation récente ou importante, une heure ou deux avant de conduire, fait doubler les risques d'accident. Cela a été confirmé par de nombreuses analyses médicales, des examens systématiques et des résumés détaillés des témoignages. Cela a été confirmé par les traces de cannabis dans le sang.
L'aspect clé est la mesure objective de la consommation récente. Lorsqu'on fait une analyse de la présence de THC, les résultats sont moins clairs si elle est mesurée dans l'urine. C'est en grande partie attribuable aux incohérences dans la détermination du moment précis de la consommation par rapport à la conduite.
La corrélation entre le cannabis et le taux d'accidents est aussi généralement plus forte dans le cas de collisions plus graves causant des blessures ou des décès. La preuve n'est pas aussi claire pour les collisions moins graves ou sans blessure.
Il semble aussi y avoir une relation entre la dose et la réaction, de sorte que le risque de collision est accru lorsque des niveaux plus élevés de THC sont détectés dans le sang, et qu'il y a d'importants effets synergiques avec l'alcool, même à des seuils inférieurs à ceux auxquels chaque drogue affaiblirait individuellement les capacités d'une personne.
C'est une question très importante, mais il subsiste des disparités dans les conclusions. C'est en grande partie attribuable à notre incapacité à réaliser les études les plus parfaites, faute d'une meilleure expression, pour étudier la question.
Il est vraiment difficile d'étudier cette question, car pour déterminer de façon adéquate si le cannabis augmente le risque d'accident, il faut prélever des échantillons non seulement auprès de personnes impliquées dans des accidents, mais aussi auprès de personnes qui n'ont pas fait d'accident. C'est extrêmement difficile, du point de vue de l'éthique et de la logistique: comment arrêter les gens sur le bord de la route et les convaincre de nous fournir un échantillon sanguin afin que nous puissions mesurer la présence de cannabis chez les gens qui ne sont pas impliqués dans des accidents routiers par rapport à ceux qui le sont? C'est tout un défi. Il reste du travail à faire dans ce domaine. Il nous faut des études de grande qualité et des études qui mesurent le THC dans le sang, et non dans l'urine, et qui mesurent ensuite le THC dans ces échantillons témoins.
Sur le plan législatif, vous avez probablement entendu des témoins experts parler de l'état actuel de la loi relativement au cannabis et à la conduite automobile au Canada. Il existe diverses politiques dans le monde concernant la façon de détecter les facultés affaiblies. Ces politiques varient quant à la manière de repérer les personnes qui conduisent sous l'influence du cannabis, aux méthodes employées pour déterminer si leurs facultés sont affaiblies au sens juridique, et à la sanction qui y est associée, qu'il s'agisse d'une accusation criminelle ou d'une sanction administrative.
La détection prend habituellement deux formes. Il y a l'observation d'une personne qui a les facultés affaiblies et qui est au volant d'un véhicule. Vous avez probablement des motifs de soupçonner qu'une personne a les facultés affaiblies en raison de sa conduite erratique et, par conséquent, vous l'interceptez. C'est ainsi que l'on procède au Canada. Vous avez des motifs probables de croire qu'ils conduisent de façon erratique et vous les interceptez. Dans d'autres pays, on fait des interceptions au hasard ou des vérifications ponctuelles, et on évalue sans cause précise.
Au Canada, pour déterminer l'affaiblissement des facultés, nous avons, comme vous l'avez probablement entendu, le programme d'expert en reconnaissance de drogues, qui permet de détecter les facultés affaiblies grâce à 12 étapes. Il s'agit d'abord de déterminer si les facultés sont affaiblies par l'alcool, puis de passer à d'autres drogues. Certains pays ont un niveau de tolérance zéro; toute présence de THC dans l'organisme indique que les facultés sont affaiblies. C'est problématique, en raison de la façon dont on mesure le THC. C'est un peu mieux si on le mesure dans le sang, mais la plupart du temps, on le mesure dans l'urine et ce n'est pas aussi efficace, car le résultat peut tenir compte d'une consommation remontant à des semaines. D'autres pays ont une limite permise, comme celle que nous avons pour l'alcool: le Code criminel prévoit une sanction lorsque l'alcoolémie dépasse les 80 milligrammes par 100 millilitres de sang. Des suggestions ont été faites au sujet du taux qui devrait être fixé. À certains endroits, on tolère 5 nanogrammes par microlitre, ou de 7 à 10 nanogrammes par microlitre, ce qui équivaut à environ 50 milligrammes par 100 millilitres de sang pour le taux d'alcoolémie. Ce sont différents exemples.
Nous ne disposons pas de très bons appareils de mesure portatifs. Nous n'avons pas d'appareil pour détecter le cannabis. Les Australiens utilisent des échantillons de salive, mais ils connaissent d'autres problèmes. Ces tests par prélèvement de fluides buccaux présentent des problèmes sur le plan des faux positifs et des faux négatifs, et la question n'est pas encore réglée.
Me reste-t-il deux ou trois minutes?
Je veux simplement parler d'une autre question sur laquelle nous nous sommes penchés, soit la façon de définir la consommation nocive ou problématique du cannabis. Un groupe national et international avec lequel je travaille à examiner cette question. Je sais que cela préoccupe le comité.
En termes simples, il y a divers outils utilisés par les cliniciens pour évaluer ou détecter la consommation problématique. Ces outils comprennent le codage ASSIST de l'OMS, par exemple, et d'autres comme le CUDIT, ou cannabis use disorders identification test. Ils sont utilisés pour repérer les personnes à risque d'abus et de problèmes de cannabis.
Lorsque nous examinons cette question, nous constatons que le seuil ou la barre sont généralement placés trop bas. On considère que toute consommation est une consommation problématique; selon nous, ce ne sont pas des outils très utiles. Bien souvent, on détermine seulement si la personne consomme et à quelle fréquence.
Par exemple, avec l'outil ASSIST, on pourrait consommer du cannabis une fois par mois et être considéré comme une personne dont la consommation est problématique ou dommageable, ce qui constituerait un dépistage excessif du point de vue des soins de santé. Ce serait un très mauvais outil pour détecter la consommation problématique. On exclut les véritables problèmes liés à la consommation qu'éprouve la personne. Je pense qu'il nous faut faire preuve de prudence quand nous utilisons ce genre d'outils pour détecter la consommation problématique, et nous devons tenir compte des enjeux plus vastes concernant les effets nocifs réels qui peuvent toucher la personne.
Nous nous sommes dits qu'il est peut-être plus important de déterminer la quantité consommée, comme nous le faisons avec l'alcool. Nous pouvons nous inspirer des recherches sur l'alcool. La quantité est plus importante que la fréquence. La consommation excessive est plus importante que la consommation régulière d'un joint par jour. Il serait plus important de s'occuper d'une personne qui fume plus de trois ou quatre joints en une seule fois à des intervalles irréguliers ou d'une personne qui consomme plusieurs joints dans une journée. Si l'on se fonde sur la documentation relative à l'alcool, on peut dire que la quantité n'est pas suffisamment prise en compte quand nous déterminons s'il y a consommation problématique et nocive.
J'ai encore beaucoup de choses à dire, mais je vais en rester là et répondre à vos questions.
Merci beaucoup, monsieur Asbridge.
C'est maintenant au tour de M. Wood.
Soyez le bienvenu. Merci. Nous savons qu'il est tôt chez vous, mais nous vous remercions d'être avec nous.
Vous disposez de 10 minutes pour nous présenter votre déclaration.
Bonjour. Merci beaucoup de me donner l’occasion de témoigner. J’ai préparé un bref exposé. Ensuite, je répondrai à vos questions avec plaisir.
En guise d’introduction, je suis un professeur de médecine à l’Université de la Colombie-Britannique. Je détiens une chaire de recherche du Canada en médecine en milieu urbain. Je suis le directeur médical des services de traitement de la toxicomanie à Vancouver Coastal Health et je suis un médecin spécialisé en dépendances accrédité par l’American Board of Addiction Medicine.
Aujourd’hui, je vais résumer certains des effets nocifs du cannabis sur la santé des particuliers et du public et j’espère vous offrir un aperçu de la façon de les atténuer.
La recherche des dernières années a démontré que le cannabis peut avoir des effets nocifs sur la santé, même si je pense qu’ils ont souvent été surestimés. Je serais heureux de vous parler des cas où je pense qu’ils l’ont été. Comme les témoins précédents l’ont indiqué, bien que ces effets nocifs soient préoccupants, en particulier parmi les populations vulnérables, relativement parlant, la littérature scientifique et la communauté médicale considèrent qu’ils sont moins graves que les effets nocifs du tabac et de l’alcool.
Plus important encore, je tiens à souligner que le cannabis est l’un des produits les plus utilisés, ou certainement la drogue illicite la plus utilisée. La plupart des gens en consomment rarement et ne subissent pas d’effets nocifs manifestes.
J’aborde cette question avec prudence à l’égard de la responsabilité du gouvernement et de la nécessité d’évaluer l’incidence des interventions financées par les contribuables. Comme vous le savez sans doute, malgré des dépenses de plus de mille milliards de dollars au cours des 40 dernières années consacrées à la lutte contre le marché des drogues, les jeunes ont encore facilement accès au cannabis dans notre société. À bien des égards, les jeunes y ont plus facilement accès qu’à l’alcool et au tabac. Des statistiques provenant de diverses sources financées par le gouvernement américain, notamment l’étude intitulée Monitoring the Future, indiquent que près de 80 % des jeunes trouvent qu’il leur est facile de se procurer du cannabis.
Au cours des dernières décennies, les taux de consommation de cannabis ont grimpé; la puissance du cannabis a augmenté et le prix du cannabis a diminué. Malgré nos efforts en matière d’éducation du public et d’application de la loi, il est clair que nous n’avons pas été en mesure d’enrayer efficacement l’offre et la demande de cannabis. Notons surtout que le vide relatif à l’approvisionnement des consommateurs a été comblé par un marché non réglementé et violent.
L’Institut Fraser, un groupe de réflexion sur l’économie et les politiques publiques, a estimé que le marché du cannabis illégal en Colombie-Britannique pourrait s’élever à 7 milliards de dollars par an. C’est plus du double des revenus combinés des secteurs de l’agriculture, de la foresterie et des pêches de la province. Les efforts bien intentionnés visant à réduire l’offre et la consommation de cannabis en le rendant illégal — comme l’interdiction de l’alcool, dans le passé — ont eu une série de conséquences imprévues relativement à contribution au crime organisé. Il importe de ne pas séparer le marché du cannabis d’autres industries illégales. À titre d’exemple, la GRC a très bien décrit comment le marché d’exportation de cannabis vers les États-Unis contribue de façon considérable à l’importation de cocaïne et d’armes à feu au Canada.
Les économistes qui étudient cet enjeu m’ont aidé à comprendre que c’est uniquement une question d’offre et de demande, c’est-à-dire que toute intervention corrélative sur le marché du cannabis qui a pour effet de réduire l’offre aura pour effet pervers de faire grimper le prix du cannabis et d’inciter de nouveaux acteurs à investir dans ce marché. Étant donné les effets nocifs de la consommation de cannabis et des répercussions sociales de son interdiction, la question qui se pose est la suivante: Que doit-on faire, maintenant?
On avance souvent que le taux de consommation de cannabis serait plus élevé si ces mesures d’application de la loi n’étaient pas en place, ce qui nous amène à nous interroger sur la pertinence de renforcer les dispositions sur l’interdiction du cannabis. Fait important, les preuves scientifiques n’appuient pas cette approche. Une enquête menée dans les États membres de l’ONU sur l’application sévère des lois antidrogues, y compris les lois interdisant le cannabis, a démontré qu’il n’existe aucune corrélation entre les taux de consommation par habitant et la sévérité de l’application des lois interdisant le cannabis.
Au contraire, dans les pays ayant des lois moins strictes en ce qui concerne le cannabis, comme les Pays-Bas, où le cannabis a été légalisé de fait, les taux sont plus faibles que dans les pays où les lois interdisant le cannabis sont appliquées de façon agressive, du moins traditionnellement, comme les États-Unis.
D’autres témoins ont déjà indiqué que le cannabis que l’on trouve sur nos rues est plus puissant que jamais. Il importe de souligner que cela s’est produit malgré l’escalade des dépenses visant à réduire l’offre de cannabis. Nos efforts pour limiter l’offre et la demande n’ont pas été couronnés de succès. En conséquence, le cannabis est facilement accessible partout au pays, et ce, dans un marché non réglementé qui profite au crime organisé.
En tant que médecin et chercheur, je me range du côté des principaux organismes de santé publique, dont le Health Officers Council of British Columbia et l’Association canadienne de santé publique, qui ont fait valoir que nous devrions examiner le régime fiscal et la réglementation stricte de la consommation de cannabis chez les adultes comme les meilleurs mécanismes pour livrer une guerre économique contre le crime organisé et, sans doute, pour être en mesure de mieux protéger les jeunes contre le libre accès au cannabis qui prévaut dans ce régime d’interdiction.
Je vais arrêter ici. Je serai heureux de répondre aux questions des membres du comité.
Je remercie le comité de m’avoir invité à parler de ce que je considère probablement comme l’un des sujets liés à la santé mentale les plus controversés, mais aussi les plus difficiles sur le plan scientifique. Parlant de santé mentale et de toxicomanie, des psychiatres dirigent l’unité de psychiatrie de la dépendance au Centre hospitalier de l’Université de Montréal ainsi qu’un laboratoire spécialisé dans la recherche sur le système endocannabinoïde et la neurobiologie de la toxicomanie.
J’ai la chance de suivre, je pense, un groupe formidable de chercheurs hautement qualifiés et de grande renommée qui ont probablement beaucoup parlé des divers aspects des risques liés au cannabis. Par conséquent, je serai en mesure de me concentrer sur un aspect très précis du cannabis et du risque associé à cette substance. Il s’agit essentiellement de la composition du cannabis qui est à mon avis l’un des facteurs très importants à prendre en compte lorsque l’on essaie de comprendre les risques qui peuvent être liés au cannabis.
En guise d’introduction générale, un aspect très intéressant à ce stade des connaissances scientifiques sur le cannabis est, en fait, la compréhension croissante que nous avons de la neuroscience de la toxicomanie et plus particulièrement notre compréhension du système endocannabinoïde qui, selon nos connaissances actuelles, est constitué des principaux composés que l’on trouve dans le cannabis, dont le THC. Je pense que cette compréhension nous a vraiment permis d’avoir une meilleure idée des effets de l’exposition au cannabis à court terme et à long terme. En outre, les nouvelles connaissances que nous avons maintenant, dont nous parlerons sous peu, portent sur la composition du cannabis, une substance très complexe.
Vous avez probablement entendu parler de diverses études réalisées sur les effets de l’exposition au cannabis. De toute évidence, des effets très précis liés à la santé mentale ont fait l’objet d’études poussées. Il s’agit notamment de la relation entre l’exposition au cannabis et la psychose; entre l’exposition au cannabis et le risque de développer une dépendance à cette substance, mais aussi d’autres substances; le lien entre l’exposition au cannabis et le risque de développer des troubles anxieux, des troubles dépressifs, des troubles d’apprentissage et des troubles cognitifs.
Au cours des cinq à dix dernières années — probablement plus ces cinq dernières années —, dans le monde des neurosciences, la communauté clinique et le secteur de la psychiatrie de la dépendance, la connaissance accrue du fait que tous n’ont manifestement pas la même sensibilité à l’exposition au cannabis est ce qui a véritablement permis de mettre en évidence et d'examiner sous un autre angle la relation entre l’exposition au cannabis et divers effets. Ce que j’entends par là, très clairement, quand on regarde la population en général qui n’est pas vulnérable sur le plan de la santé mentale ou même sur le plan génétique, l’exposition au cannabis est très rarement liée à des effets négatifs très graves à long terme, y compris les effets sur la santé mentale.
Ce qui est clair maintenant, c’est aussi le fait que certains facteurs peuvent vraiment accroître le risque de développer des effets négatifs très importants lors d’une exposition au cannabis. La génétique est certainement l’un de ces facteurs. Lorsque l’on étudie toutes les données sur la relation entre l’exposition au cannabis et la psychose, il y a des facteurs génétiques qui modulent le risque de développer une psychose lors d’une exposition au cannabis. De toute évidence, l’âge est l’un des autres facteurs. D’autres chercheurs ont probablement parlé du fait que l’âge module le risque de développer des problèmes cognitifs lorsque vous êtes exposé au cannabis, par exemple. Plus une personne est jeune lorsqu’elle est exposée, plus les problèmes cognitifs se prolongeront.
L’un des facteurs dont je veux vous parler aujourd’hui, qui est la raison de ma présence ici, est un facteur qui module le risque associé à l’exposition au cannabis et à d’autres cannabinoïdes: la composition du cannabis. On a longtemps mis l’accent sur le THC qui, en laboratoire, a été associé à un grand nombre d’effets dont j’ai parlé: les problèmes cognitifs, la psychose, l’anxiété, par exemple, mais nous avons maintenant une très bonne compréhension — une meilleure compréhension, en fait — des autres cannabinoïdes qui composent le cannabis. De toute évidence, il n’y a pas seulement le THC. À titre d’exemple, mentionnons le cannabinol et le cannabidiol.
J’aborde le sujet parce que tous les autres cannabinoïdes que l’on retrouve dans le cannabis sont très différents du THC. Je vais vous donner un exemple. De toute évidence, lorsqu’une personne arrive en laboratoire... et des groupes à travers le monde ont montré qu'en milieu contrôlé, lorsqu’on administre à un sujet une dose suffisante de THC, on observe des problèmes cognitifs, des symptômes psychotiques et il est très facile d’observer les symptômes d’anxiété. D’un autre côté, lorsqu’on administre un autre cannabinoïde, comme le CBD, le cannabidiol, les effets sont très différents. Je vais vous donner un exemple.
En laboratoire, lorsqu’on administre une dose importante de THC à un sujet, on provoque des symptômes très similaires à la schizophrénie. Si l’on administre préalablement du cannabidiol à ces gens, ces sujets, on peut diminuer les symptômes de la psychose. Cela vous donne une idée de la complexité de cette drogue, mais en somme, différents composés auront un effet différent.
Cela a une incidence très importante sur notre compréhension des risques associés au cannabis, sur le genre de données que nous devons recueillir pour avoir une meilleure idée du risque lié au cannabis et aussi sur notre réaction par rapport à la modification des lois et sur la façon dont nous allons aborder la question de l’usage du cannabis à des fins thérapeutiques, par exemple, si la société choisit d’aller dans cette direction.
Je pense que les conséquences sont très importantes. Tout d’abord, je pense que l’évaluation des effets cliniques et des risques associés au cannabis ne peut être faite avec précision que si la teneur en THC et en CBD est prise en compte, car l’effet de cette substance peut varier beaucoup en fonction du ratio de CBD et de THC.
L’usage du cannabis à des fins thérapeutiques n’est pas un sujet dont je parle habituellement, mais cette substance a manifestement un potentiel thérapeutique, dans l’ensemble, et cela ne peut être mis en place que si l’on se fonde sur des preuves scientifiques, avec un contrôle rigoureux de la teneur en THC et en CBD. Nous savons que chaque substance a un effet très précis; si nous voulons les utiliser à des fins thérapeutiques, nous devons être en mesure de contrôler cet aspect, comme nous le faisons pour tous les autres médicaments.
En ce qui concerne la recherche, je pense aussi que d’importantes recherches visant à étudier et discerner les effets du THC et du CBD doivent être menées et qu’il faut aussi étudier les risques qu’ils comportent. Des études portant sur les risques et les propriétés thérapeutiques du cannabis devraient prendre en compte le ratio de THC et de CBD.
Quant à des recommandations, si vous me permettez d’en présenter, mon commentaire général serait qu’il est essentiel de souligner que nous avons encore beaucoup à apprendre sur les effets nocifs du cannabis. On ne peut véritablement comprendre le risque que si l’on prend en compte tous les facteurs qui peuvent moduler ce risque. Encore une fois, tous ne réagissent pas de façon identique à l’exposition au cannabis. L’un des principaux problèmes qu’il faut résoudre, c’est la compréhension des effets précis des divers cannabinoïdes que l’on retrouve dans cette substance, principalement le THC et le CBD.
En ce qui concerne la réglementation, je pense que tout règlement relatif au cannabis doit prendre en compte le rapport de la teneur en CBD et en THC, et ce, tant pour l’usage à des fins récréatives que pour l’usage à des fins thérapeutiques.
Je pense aussi qu’en l’absence de données scientifiques plus précises sur l’effet de ces deux composés, tout règlement relatif au cannabis devrait tenir compte du fait que le composé simple ayant un taux élevé de CBD ou un taux faible de CBD est considéré comme potentiellement plus sûr, pour le moment.
Je pense vraiment que la recherche liée à d’autres cannabinoïdes devrait être facilitée, y compris la recherche sur le cannabidiol, mais aussi le cannabinol et d’autres cannabinoïdes — le cannabis en contient des dizaines —, notamment par la réduction de certaines exigences liées à l’étude de cette substance. Il est plutôt étonnant de voir à quel point il est beaucoup plus difficile pour un chercheur d’étudier des composés précis, des cannabinoïdes précis, selon une méthode scientifique rigoureuse fondée sur des preuves, que d’étudier une substance comme le cannabis, dont le contenu est très différent. Il est vraiment difficile de l’étudier en tant que composé médical destiné à un usage thérapeutique.
Je pense aussi que les règlements relatifs à d’autres cannabinoïdes, dont le CBD, devraient être revus. En fait, dans les annexes de la réglementation, le cannabidiol, qui n'est pas toxicomanogène, ne provoque pas d’effets psychotiques et n’est pas consommé excessivement dans la rue est considéré comme aussi dangereux et toxicomanogène que des substances qui peuvent créer une dépendance, comme le THC ou d’autres substances telles que la cocaïne ou l’héroïne.
Je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Nous allons entreprendre la première série de questions. Madame Davies, la parole est à vous.
Ma question s'adresse au Dr Wood.
Tout d'abord, merci beaucoup de vous être levé aussi tôt. Je crois que nous sommes au moins trois ici à savoir combien tôt vous avez dû vous lever pour être parmi nous, aujourd'hui, depuis Vancouver.
Je sais que vous avez fait beaucoup de recherche et que vous avez beaucoup d'expérience de terrain, à Vancouver. L'étude qui nous occupe a une portée assez restreinte puisqu'elle ne porte que sur les dommages et les rsiques associés à l'usage de la marijuana.
J'ai trois questions pour vous et j'espère que vous serez en mesure de répondre à chacune d'elles.
Comparativement à toute une panoplie d'autres produits — que ce soit l'alcool, les médicaments d'ordonnances et les autres drogues illégales —, croyez-vous que la marijuana est une drogue mortelle?
Oui. J'en ai deux autres après celle-là. Nous disposons de sept minutes, alors il faut aussi tenir compte de cela.
Très rapidement, beaucoup d'études ont été réalisées pour évaluer les dommages relatifs associés aux substances psychoactives et aux médicaments pharmaceutiques. Comme je l'ai clairement expliqué dans mon exposé, la question fait l'objet d'un vaste consensus au sein de la communauté scientifique, et quiconque prétendrait que le cannabis est plus dommageable que l'alcool et le tabac irait à l'encontre de ce consensus. L'alcool et le tabac sont assurément beaucoup plus accoutumants et toxiques que le cannabis.
Vous me demandez si le cannabis peut tuer. Il n'existe à peu près aucun rapport dans la littérature actuelle concernant les propriétés psychologiques du cannabis et la consommation. Compte tenu des facteurs consternants associés à l'usage de substances multiples et d'autres choses, le cannabis en soi est relativement inoffensif. Je suis d'accord avec le présentateur de tantôt et j'ai déjà vu des personnes être affectées de troubles psychotiques d'avoir consommé trop de cannabis, mais ce n'était qu'un effet passager de l'intoxication. Je n'ai jamais vu qui que ce soit garder des marques permanentes de ces épisodes. Je crois qu'il est important de souligner que l'alcool, durant l'intoxication ou le sevrage, peut entraîner des troubles psychotiques.
Alors, tout étant relatif, le cannabis est assurément moins dangereux.
Merci, docteur Wood.
Passons à ma deuxième question.
Je ne sais pas si vous avez entendu parler de Kevin Sabet, qui est en Floride. Il est venu témoigner ici. En fait, il a été cité abondamment. Il consacre son temps à un projet intitulé SAM, pour Smart approaches to marijuana. J'ai lu des choses qui mettent en doute sa crédibilité en soulevant la question des preuves scientifiques et le fait que ses écrits n'ont pas nécessairement fait l'objet d'une révision par les pairs.
Je me demandais si vous connaissez son travail, et si vous avez une opinion sur le bien-fondé des conclusions qu'il tire.
Oui, je connais le travail de Kevin. Kevin n'a pas l'habitude de faire ses propres recherches et il ne fait pas partie de la communauté scientifique qui travaille activement dans ce domaine. On sait qu'il travaille avec des groupes de réflexion qui prônent un passage de la prohibition complète à une sorte de prohibition allégée. Je ne placerais pas Kevin dans le groupe des scientifiques hautement crédibles qui travaillent dans ce milieu et qui sont capables d'être plus nuancés dans leur approche.
Je n'ai pas vu de documents scientifiques à son nom. Je crois qu'il a publié des observations et des articles de cette nature, mais rien comme ce qui a été présenté aujourd'hui par les Instituts de recherche en santé du Canada, ou comme mon propre travail, financé par le National Institute of Health des États-Unis.
On pourrait donc dire de lui qu'il est plutôt un commentateur que quelqu'un qui a fait de la recherche scientifique à proprement dite.
J'ai une troisième question, et vous y avez partiellement répondu dans vos observations. Nous parlons de substances qui causent toutes des torts, mais à divers degrés. Nous pourrions probablement dire que la chose la plus risquée dans nos vies est quelque chose que nous faisons quotidiennement, c'est-à-dire conduire une auto, n'est-ce pas? Et nous mettons la ceinture de sécurité. Nous tentons d'atténuer le risque et de rendre notre environnement plus sécuritaire.
Selon vous, quelle est la meilleure façon d'encadrer l'usage de la marijuana, tant sur le plan du contrôle que de la sécurité? Faut-il prohiber ou réglementer?
Voilà une très bonne question. Je crois qu'il importe de comprendre qu'il y a un juste milieu entre la prohibition et la légalisation. J'ai fait allusion au Health Officers Council de Colombie-Britannique et à l'Association canadienne de la santé publique, qui croient que le fait d'encadrer l'usage adulte de cannabis par une taxation et une réglementation sévères équivaudrait à lancer une guerre économique contre le crime organisé qui contrôle ce marché, et que ce serait une meilleure façon de protéger nos jeunes contre un accès gratuit et facile au cannabis. C'est assurément une opinion à laquelle je souscris.
Dans le même ordre d'idée, l'un des problèmes que M. Sabet soulève pour justifier le maintien d'une forme de prohibition est le fait que la teneur en THC du cannabis a augmenté au fil des ans. Or, j'ai l'impression qu'une réglementation à cet égard — comme nous en avons pour l'alcool ou le tabac — permettrait effectivement de contrôler cet aspect. Ce serait un moyen de réduire les risques pour la santé. La réglementation pourrait se faire en fonction de la consommation des adultes plutôt qu'en fonction de celle des jeunes.
En ce qui concerne la réglementation — et je sais que les médecins ont fait beaucoup de travail dans ce domaine —, comment envisagez-vous le cadre réglementaire relatif à la gestion des risques et des dommages?
Ce domaine a fait l'objet d'innombrables recherches scientifiques pour d'autres substances dont, notamment, le tabac et l'alcool. Comment ces substances sont-elles réglementées? Comment se les procure-t-on? Quels dosages et quelle densité des points de vente faut-il permettre? Doit-on interdire ou encourager la publicité à ce sujet? Tous ces aspects peuvent avoir une incidence énorme sur la popularité du produit et les dommages connexes. Tout ce savoir scientifique pourrait être mis à profit pour créer un marché réglementé encadrant la consommation adulte du cannabis, taxation incluse.
Bien entendu, des choses comme la puissance — ou, comme un témoin le décrivait avant moi, la teneur relative en cannabinol et en THC — sont des choses qui peuvent être contrôlées. Il faut reconnaître que l'augmentation de la puissance du cannabis a eu lieu dans un contexte de prohibition, lequel a aussi donné lieu à une sophistication accrue du marché. Nous avons laissé des entités illégales s'occuper de la réglementation, mais nous sommes nombreux à croire fermement que si nous prenons le contrôle du maché, nous serons en mesure de réglementer ce genre de choses.
Docteur Jutras-Aswad, en termes simples, pouvez-vous m'expliquer à quoi ressemblent un épisode psychotique et un épisode de schizophrénie?
Ce sont en fait deux choses différentes. Les symptômes d'un épisode psychotique peuvent évidemment comprendre des hallucinations, du délire et des idées en marge du monde réel. Cela peut se produire dans une foule de circonstances différentes, comme dans le cas d'une dépression grave ou lorsque vous souffrez de troubles psychotiques profonds, ce qui est plutôt un état à long terme. Mais il peuvent aussi être provoqués par une exposition à certaines substances comme, incidemment, le cannabis, la cocaïne et beaucoup d'autres drogues.
Merci.
Je ne sais pas si vous avez eu vent d'une étude produite en 2011 par le groupe de surveillance canadien de la consommation d'alcool et de drogues. Il s'agissait en fait d'une enquête qui indiquait que, dans la dernière année... Ils ont calculé le nombre de consommateurs de marijuana. En 2004, 14 % de l'ensemble de la population — ils extrapolent — avait consommé de la marijuana au moins une fois au cours des 12 derniers mois, mais en 2011, ce pourcentage était tombé à 9,1. D'un point de vue statistique, il s'agit d'une diminution considérable. Il semble donc que le cannabis était beaucoup plus populaire en 2004, et qu'il avait passablement perdu de sa popularité en 2011.
Je crois que nous sommes tous un peu préoccupés de voir cette question devenir tout à coup un enjeu politique et faire la une des journaux, alors que, dans les faits, la légalisation ou la possibilité de vendre de la marijuana dans tous les dépanneurs ne sont pas vraiment réclamées à grands cris. Je m'inquiète particulièrement de l'incidence que cela pourrait avoir sur les esprits en développement et des conséquences en matière de santé.
C'est la dernière journée d'audience pour cette étude. Ce que nous nous efforçons de trouver, ce sont des preuves scientifiques indépendantes sur les effets et l'incidence que l'usage récréatif de la marijuana peut avoir sur la santé, notamment sur les esprits en développement. Cette étude nous indique que la population en général ne consomme plus autant qu'avant, mais elle indique d'autre part que les jeunes sont de grands consommateurs, et les chiffres à cet égard sont très, très élevés. Au cours de la dernière année, 21,6 % des jeunes consommaient du cannabis, soit trois fois plus que les adultes.
Je crois que la crainte est que, si l'on met la marijuana en vente dans les dépanneurs et que la seule condition d'achat est une preuve d'âge, comme pour les cigarettes... Je crois que nous avons tous pu constater que les adolescents fument des cigarettes, alors il faut bien qu'ils se les soient procurées. Avez-vous fait des recherches sur des plus jeunes, sur des participants de 13, 14 ou 15 ans, afin d'évaluer les conséquences sur la santé de l'usage récréatif de la marijuana, ou avez-vous entendu parler d'études ou de travaux scientifiques à ce sujet?
Je ne suis pas certain de comprendre la question. Est-ce à propos de la disponibilité de la drogue ou s'il s'agit d'établir si une modification de la loi en faciliterait l'accès pour les jeunes? Ou est-ce qu'on cherche à cerner les effets à long terme?
En matière de santé, je cherche à savoir si vous êtes au courant de quelque travail scientifique que ce soit sur l'incidence de l'usage récréatif de la marijuana sur les cerveaux en développement. Je présume que les études auxquelles vous avez fait référence portaient sur des adultes consentants de plus de 18 ou 19 ans, mais existe-t-il des données scientifiques sur les répercussions que la marijuana peut avoir sur le cerveau d'un jeune de 12 ou 13 ans?
Oui, il y en a. Comme je l'ai dit, c'est très clair — comme le Dr Wood l'a évoqué d'une certaine façon... Pour l'instant, les données montrent qu'en général, et pour la population en général, les risques associés aux cannabis sont en fait relativement faibles à certains égards, lorsqu'une personne n'est pas vulnérable, mais il y a de toute évidence certains facteurs qui peuvent augmenter les risques. Il y a, comme je l'ai mentionné, la question des gènes, mais aussi, sans équivoque, la question de l'âge...
L'une des données disponibles concerne les effets cumulatifs de l'exposition au cannabis. L'un des facteurs qui feront vraisemblablement augmenter le risque de problèmes cognitifs associés au cannabis est l'âge où l'on commence à y être exposé. Certaines des études menées à ce sujet indiquent que le fait d'être exposé avant l'âge de 15 ou 16 ans peut avoir des conséquences beaucoup plus importantes et beaucoup plus durables sur les facultés cognitives que si l'exposition commence plus tard ou, par exemple, à l'âge adulte.
Seriez-vous surpris si je vous disais que, selon cette étude, l'âge moyen de la première consommation de cannabis est de 15,6 ans? Vous dites que c'est un âge critique. Or, il s'agit d'une moyenne. Cela signifie que certaines personnes commencent beaucoup plus tard, mais que d'autres l'essaient beaucoup plus tôt. Cela vous préoccupe-t-il?
Il y a deux choses là dedans. Est-ce surprenant? Pas vraiment. Nous savons que le cannabis est l'une des premières choses — avec le tabac et l'alcool — que quelqu'un essaie quand il commence à s'adonner aux drogues. Nous savons que le cannabis est l'une des premières drogues que les jeunes essaient. D'un point de vue épidémiologique — et je ne suis pas un épidémiologiste —, nous savons aussi que la consommation atteint un sommet durant l'adolescence ou au début de l'âge adulte; alors ce n'est pas vraiment surprenant.
Est-ce une préoccupation? Comme je l'ai dit, plus la première exposition est précoce, plus les risques de conséquences à long terme sont grands. Évidemment, si la consommation atteint son sommet plus tard, à l'âge adulte, lorsque le cerveau est bien développé, plus solide et moins flexible, on peut présumer que les torts associés à l'exposition au cannabis diminueront.
Oui, c'est inquiétant que l'exposition ait lieu plus tôt que plus tard.
En dernier lieu, permettez-moi de me tourner vers les femmes enceintes. À l'heure actuelle, la possession n'est pas légale. Si le cannabis était facilement accessible dans les dépanneurs... Je crois que nous nous inquiétons tous de voir une femme boire ou fumer alors qu'elle est enceinte. Il y a maintenant un certain nombre d'études qui démontrent les répercussions importantes que cela peut avoir sur le bébé.
Pouvez-vous dire un mot au sujet de ces répercussions?
À l'évidence, nous avons de bien meilleures données qu'auparavant sur les effets de la consommation de tabac et d'alcool durant la grossesse. Mais les données sur les effets de l'exposition au cannabis ne sont qu'embryonnaires.
Je dois cependant souligner que, pour de simples raisons d'éthique, toutes les recherches à ce sujet sont très difficiles à mener. On ne peut évidemment pas exposer une femme à la drogue et faire une étude suivie avec placebo, mais les données que nous avons — comme celles provenant de l'étude de Brain Bank, mais aussi de modèles animaux — montrent que le cannabis peut avoir une certaine incidence sur le développement du cerveau du foetus ainsi que des conséquences à long terme. Comme je l'ai dit, plus tôt l'exposition a lieu — y compris à l'âge du foetus — plus grandes peuvent être les conséquences à long terme.
Mais je le répète, ce domaine de recherche ne fait que commencer et c'est un sujet qui est très difficile à étudier pour des raisons d'éthique.
Oui. Nous pourrions en parler longtemps, mais la question de l'auto-divulgation est le principal problème lorsqu'il s'agit de contrôler la validité et la qualité des renseignements rapportés par des femmes qui affirment avoir fait usage de cannabis ou ne pas y avoir touché. Pour cette raison, il est extrêmement difficile de faire une bonne étude sur le sujet.
Merci à tous nos témoins.
Compte tenu des résultats obtenus par nos comités parlementaires qui voient ce gouvernement se servir de sa majorité pour imposer ses recommandations déterminées à l'avance qui ont préséance sur les discussions tenues en comité et aller jusqu'à restreindre le plus possible la portée des études que nous menons, j'estime préférable d'utiliser le temps qui m'est alloué pour vous permettre de nous exposer très clairement, et je m'adresse tout particulièrement à vous, docteur Wood et docteur Jutras-Aswad, les recommandations que vous formuleriez si vous deviez rédiger le rapport de notre comité.
Le Dr Wood nous a déjà dit que l'accès libre et facile au cannabis dans un contexte de prohibition n'est pas une bonne chose. L'Association canadienne de santé publique a recommandé une approche misant sur l'imposition et la réglementation. On nous a aussi dit qu'il fallait approfondir les recherches, et même s'interroger sur le genre de recherches que nous menons dans les domaines de la médecine personnalisée et de la prédisposition génétique. Je suis malheureusement assez vieille pour pouvoir vous raconter qu'à l'époque où j'étais urgentologue à l'hôpital Wellesley de Toronto, nous avions des patients qui faisaient des crises psychotiques après avoir vu L'exorciste. C'était parce qu'ils avaient déjà une prédisposition à cet effet.
Je vais donc vous laisser à tous les deux le temps nécessaire pour nous dire quelles devraient être selon vous les recommandations du comité à l'issue de notre étude, qui ne sera malheureusement pas aussi vaste que nous l'aurions souhaité, de façon à ce que les Canadiens puissent comparer ce qui a été dit devant notre comité et les recommandations édulcorées qui en découleront du fait que ce gouvernement conservateur ne cesse de faire valoir sa majorité pour faire fi des points de vue exprimés.
Il est donc primordial que vous nous disiez ce qu'on devrait retrouver dans le rapport de notre comité.
À la lumière des échanges de ce matin et du débat de société concernant ces enjeux, j'estime qu'il faut d'abord et avant tout que chacun, et notamment les membres du comité qui ont fait état aujourd'hui de leurs préoccupations concernant les adolescents, les foetus et la conduite avec les facultés affaiblies, comprennent bien que ces problèmes tout à fait concrets sont aggravés par la prohibition. Le crime organisé, les invasions de domicile, les installations de culture de marijuana et les incendies qu'elles provoquent sont autant de conséquences naturelles de l'interdiction visant le cannabis, de la même manière que le crime organisé, la corruption et la violence ont émergé dans le contexte de la prohibition de l'alcool.
Si vous faites partie des gens qui sont sincèrement préoccupés par le sort des jeunes et des foetus et par tous les dangers que pose pour notre société cette méga-industrie non réglementée du cannabis, je vous encourage à respirer profondément, à prendre un peu de recul et à reconnaître le fait que le cannabis est plus librement et facilement accessible aux jeunes que l'alcool et le tabac et que nous pourrions, en réglementant de façon stricte et avec une intervention soutenue des gouvernements la consommation de cannabis par les adultes, nous pourrions sans doute éliminer bon nombre des torts causés tout en nous débarrassant du phénomène du fruit défendu qui est également une conséquence naturelle de la prohibition en incitant les jeunes à vouloir consommer du cannabis simplement du fait que c'est illégal.
Les politiques en place n'ont pas produit les résultats escomptés. Elles imposent un très lourd fardeau aux contribuables. Ceux-ci ont en quelque sorte investi dans la croissance du crime organisé. Les mesures prises ne fonctionnent tout simplement pas et nous ne devrions pas continuer à injecter des fonds dans cet exercice voué à l'échec.
Si nous voulons nous attaquer à tous ces torts qui nous affligent depuis un bon moment déjà, il nous faut un débat éclairé sur la mise en place d'un régime d'imposition et de réglementation de la consommation du cannabis par les adultes. C'est une mesure qui exige beaucoup de courage de la part d'un gouvernement, mais j'encourage certes notre gouvernement actuel à aborder la question de façon réfléchie en cherchant à miser sur l'innovation, plutôt que de répéter les erreurs du passé.
Comme je le disais précédemment, d'une manière générale — et c'est une précision très importante — le cannabis est rarement nocif, mais il peut l'être pour un certain pourcentage de la population. Il faut également prendre en compte certains aspects très particuliers de la problématique, y compris la teneur en THC et en CBD du cannabis.
Cela étant dit, il y aura toujours des consommateurs de cannabis. Si nous voulons réduire les méfaits associés à cette consommation, nous devons être en mesure de protéger les plus vulnérables, mais aussi être capables de contrôler le contenu de cette substance et veiller à diffuser dans la société des messages clairs qui correspondent à la réalité.
Il s'agit en fait de déterminer la réglementation appropriée pour protéger les personnes qui sont vulnérables et contrôler la composition du cannabis sans nécessairement empêcher la majorité des gens de consommer cette substance qui ne présente pas de risque pour eux. Il va de soi que c'est une question qui déborde de mon domaine d'expertise. D'un point de vue clinique, je peux toutefois vous dire que la réglementation et le contrôle de la composition de la substance ne sont évidemment pas l'affaire des trafiquants qui écoulent la drogue dans la rue ni des organisations criminelles qui mettent le cannabis sur le marché. C'est une évidence pour moi.
Il faut en outre que l'on soit capable de mener des recherches plus pointues sur les effets des différents produits chimiques que l'on retrouve dans le cannabis. Il importe aussi de bien faire la distinction entre la consommation à des fins thérapeutiques et la nécessité d'établir des lois et des règlements relativement à sa consommation à des fins d'agrément.
Il s'agit de deux sujets totalement différents que l'on semble parfois confondre au sein de la population, mais aussi dans les milieux politiques et scientifiques.
Des gens souffrant de différentes maladies considèrent le cannabis comme un médicament. C'est le cas de bon nombre de mes patients atteints de sclérose en plaques. Si l'on songe à l'avenir des soins de santé au Canada, on peut donc penser qu'il est important que les recherches menées sur la médecine personnalisée portent notamment sur le THC et les cannabinoïdes.
Je pense que des recherches plus poussées s'imposent pour ce qui est de l'utilisation thérapeutique. Si vous souhaitez utiliser une substance comme médicament, vous devez savoir, non seulement à titre de scientifique mais aussi de médecin, ce qu'elle contient, comme c'est le cas pour tout autre médicament. Mon exemple n'est peut-être pas le meilleur qui soit, mais si je me retrouve avec un sac rempli de pilules, sans savoir ce qu'elles contiennent, je ne vais pas en donner à mes patients.
Si vous voulez utiliser une substance à des fins médicales, vous devez savoir ce qu'elle renferme. La réglementation en vigueur ne nous permet pas de le savoir dans le cas du cannabis utilisé à des fins thérapeutiques.
Merci beaucoup, madame Bennett. Vous n'avez plus de temps.
Nous passons à M. Lunney pour les sept prochaines minutes.
Je remercie tous nos témoins pour leur contribution à notre étude.
Je vais m'adresser au Dr Asbridge, là-bas à Halifax. Doit-on vous appeler docteur ou monsieur?
Oh, vous êtes à Toronto.
Monsieur Asbridge, vous avez parlé tout à l'heure de tests effectués, je crois, en bordure de route en Colombie-Britannique et vous avez dit qu'une étude avait révélé la présence de THC dans 6 % des cas. Était-ce relié aux accidents dont vous avez traité? Comment le test était-il effectué? Prenait-on un échantillon de salive, d'urine ou de sang? Pouvez-vous m'aider à y voir plus clair?
Oui. C'est dans le cadre de l'enquête routière menée en Colombie-Britannique. On a répété l'exercice à quelques reprises. Les résultats que j'ai cités sont ceux de 2010. Les conducteurs étaient interceptés au hasard. Il ne s'agit pas de ceux qui étaient impliqués dans des accidents. Ils devaient fournir un échantillon de salive.
Il peut effectivement y avoir de petits problèmes... C'est généralement très révélateur, mais il y a quelques faux positifs et faux négatifs, comme pour la plupart des tests.
La conduite avec les facultés affaiblies est certes une source de préoccupation en matière de sécurité publique. Il existe au Colorado des preuves concluantes révélant un grand nombre d'accidents liés à la consommation de marijuana, et les hospitalisations résultant de ces accidents sont à la hausse. Je vais en rester là pour l'instant et passer à un autre sujet.
Je m'adresse à nouveau au Dr Jutras-Aswad. J'aimerais revenir à ce que nous a dit le Dr Kalant de l'Université de Toronto lors de sa comparution. Il enseigne la pharmacologie. Il a surtout insisté sur le fait que ceux qui commencent à consommer du cannabis à un jeune âge sont les plus touchés, notamment pour ce qui est des risques d'une éventuelle dépression et d'un accident de la route.
D'autres témoins nous ont parlé de résultats obtenus au moyen de l'IRM fonctionnelle révélant des troubles du développement cognitif. On nous a ainsi dit qu'il y avait retard dans la myélinisation du lobe frontal où se développent les fonctions exécutives les plus avancées, dont le raisonnement, la résolution de problèmes et la prise de décisions. Ces retards de développement peuvent affecter les adolescents plus tard dans leur vie. Même la consommation par la mère a un impact mesurable sur le développement futur.
Dans votre examen de quelque 120 études portant sur différents aspects de la relation entre le cannabis et le cerveau des adolescents... C'est inquiétant pour bon nombre d'entre nous du fait que l'on commence à consommer à un très jeune âge. Il y a peut-être des options de carrière qui se ferment malencontreusement devant ces très jeunes adolescents en raison de l'altération de leurs fonctions exécutives avancées, lesquelles sont nécessaires pour les activités exigeant d'importantes capacités cognitives.
Vous avez parlé du lien entre la consommation de cannabis et la dépendance ultérieure à des drogues plus fortes ainsi qu'entre le cannabis et la psychose. J'aimerais que vous nous en disiez plus long à ce sujet, car vous n'avez pas eu beaucoup de temps tout à l'heure.
Il s'agit bien évidemment de deux questions distinctes. Il y a d'abord la relation entre le cannabis et l'accoutumance ultérieure à d'autres substances. C'est ce qu'on appelle également la théorie de la porte d'entrée qui a fait l'objet d'études et de rapports depuis bon nombre d'années. Plusieurs de ces études ont essentiellement démontré qu'une vaste majorité de ces personnes finissent par consommer de la cocaïne, de l'héroïne ou ce qu'on appelle des drogues dures. Lorsqu'on examine leurs antécédents de toxicomanie, on constate qu'ils ont commencé par le cannabis ou que celui-ci se retrouve quelque part le long de leur cheminement vers d'autres drogues. C'est ce qui a donné naissance à l'hypothèse voulant que le cannabis pourrait mener à d'autres dépendances alors que les résultats indiquent en fait, comme c'est le cas la plupart du temps... Cela ressemble beaucoup au constat qui est fait pour la psychose. Il y a effectivement des données indiquant que le cannabis pourrait avoir des répercussions sur le développement cérébral qui ferait en sorte que la personne risquerait davantage de développer une accoutumance par ailleurs.
Il y a bien sûr d'autres facteurs beaucoup plus importants qui peuvent être à l'origine d'une dépendance à d'autres drogues.
Il faut également tenir compte du fait, comme je l'indiquais précédemment, que le cannabis ne cause généralement pas de dommages à long terme. La plupart des gens, ou je dirais même la plupart des adolescents, qui consomment du cannabis n'en viendront pas à opter pour des drogues plus fortes. Les données épidémiologiques nous indiquent qu'une minorité de consommateurs vont passer à des drogues plus dures, mais reste quand même que le cannabis s'inscrit dans leur cheminement. Nous savons qu'il y a des effets neurobiologiques découlant de l'exposition précoce au cannabis qui pourraient accroître d'une certaine manière le risque de développer d'autres dépendances.
Pour ce qui est de la psychose, je vous dirais brièvement que nous savons maintenant que le cannabis n'est sans doute pas en lui-même une cause de schizophrénie ou de troubles psychotiques à long terme. Ce que nous pouvons affirmer pour l'instant, c'est que le cannabis peut agir comme facteur de stress ou comme déclencheur pour les gens qui ont une prédisposition à la psychose. Lorsqu'ils sont exposés au cannabis, ces gens-là peuvent par exemple devenir schizophrènes.
Vous avez parlé des parties du cerveau pouvant être affectées par les cannabinoïdes et le cannabis. Ce sont celles qui gouvernent nos capacités d'apprentissage, de gestion des récompenses et de comportement motivé, et qui contribuent aux activités décisionnelles, à la formation des habitudes et aux fonctions motrices. Toutes ces capacités se développent à l'adolescence. Nous parlons d'expression génétique, et les gènes sont activés et désactivés par des facteurs externes dans bien des cas.
Que savez-vous des répercussions de la consommation maternelle ou de l'exposition à la marijuana à la maison — on parle beaucoup de fumée secondaire dans un autre contexte — pour les enfants qui grandissent dans un tel environnement? Vos recherches vous ont-elles permis d'établir des connexions avec la consommation de la marijuana ou l'exposition à un environnement semblable?
Je ne saurais pas vous répondre d'un point de vue scientifique. Je peux seulement vous réitérer mes commentaires précédents concernant l'exposition du foetus au cannabis en raison de la consommation par la mère.
Docteur Jutras-Aswad, vous avez parlé de consommation à des fins médicales. Notre étude ne porte pas expressément sur cet aspect, mais plutôt sur les autres facteurs reliés à la consommation de marijuana. Étant donné cette perception voulant que la marijuana soit inoffensive et bien tolérée, on n'a pas étudié de façon suffisamment approfondie toute la gamme de ses composantes et de leurs répercussions. Je crois que vous avez souligné au Dr Bennett qu'il y avait des inconnues relativement aux quantités, aux mélanges et à la puissance de la marijuana.
Si l'on revient aux conclusions de la commission Le Dain, la puissance s'établissait il y a une vingtaine d'années à 1 %, peut-être 2 %. Aujourd'hui, elle varie de 10 à 15 %, et peut même atteindre... Chez moi, sur l'île de Vancouver, nous avons la variété Lasqueti Gold. Quelqu'un a parlé de la production de marijuana à grande échelle en Colombie-Britannique. Dans certains cas, le taux de puissance est très élevé et peut même atteindre 30 %. C'est du moins ce qu'on nous a dit pour certaines cultures. Nous nous retrouvons donc avec une substance dont les impacts peuvent être bien différents de celles des générations précédentes.
Pourriez-vous nous parler de cette évolution dans la puissance?
Je suis désolé, mais c'est tout le temps que vous aviez.
De toute manière, nous nous rapprochons beaucoup de l'heure à laquelle nous souhaitons discuter des travaux du comité. Le moment est venu de remercier nos invités pour le temps qu'ils nous ont consacré, malgré un agenda que nous savons très chargé. Un grand merci à vous.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques minutes pour reprendre à la demie de l'heure. Nous aurons alors une quinzaine de minutes pour discuter des travaux du comité.
Nous serons de retour dans quelques minutes.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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