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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 038 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 octobre 2014

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Il est 11 heures; nous allons donc commencer la séance du comité.
    Nous tenons notre deuxième séance sur l'étude sur les cigarettes électroniques, laquelle durera deux heures. Pendant la première heure, le Centre de toxicomanie et de santé mentale comparaîtra par vidéoconférence, et la deuxième heure se déroulera également par vidéoconférence. Nous suspendrons la séance quelques instants après la première heure pour régler tous les détails techniques afin d'être prêts à continuer.
    Nous recevons Peter Selby, chef du Programme de lutte contre les toxicomanies du Centre de toxicomanie et de santé mentale.
    Bienvenue devant le comité. Vous disposez de 10 minutes ou du temps dont vous avez besoin. Vous avez la parole.
     Tout d'abord, je vous remercie beaucoup. C'est un honneur et un plaisir de m'adresser de nouveau au comité. Je vais traiter de l'utilisation des dispositifs électroniques assurant un apport de nicotine, communément appelés cigarettes électroniques.
    Nous vous avons fait parvenir des notes d'allocution. Je suis désolé qu'elles soient arrivées à la dernière minute, mais elles ont été envoyées.
    Très brièvement, mon exposé s'intitule E-Cigarettes: Disruptive Innovations with Promise and Peril. Je pense que c'est la raison pour laquelle nous devons nous pencher sur cette question.
    Sur le plan professionnel, je suis médecin et je travaille au Centre de toxicomanie et de santé mentale, où je m'occupe spécifiquement du traitement des gens dépendants du tabac et où j'effectue actuellement des études sur l'utilisation des cigarettes électroniques au sein de la population canadienne.
    Le gros problème, c'est que la lutte contre le tabagisme est au point mort au Canada. Par exemple, les cigarettes ont été inventées il y a plus de 150 ans, et la technologie n'a pas tellement évolué. Ce qui a changé, c'est la capacité des compagnies de tabac de les produire à grande échelle et de causer bien du tort.
    Si la lutte contre le tabagisme ne progresse pas, c'est aussi parce que le nombre de fumeurs n'a pas beaucoup fluctué depuis cinq ans. Actuellement, ceux qui ont le malheur de fumer sont ceux qui ont au moins les moyens de le faire, les personnes n'ayant pas de diplôme d'études secondaires et les gens atteints de maladies concomitantes, comme des problèmes de santé mentale ou d'autres dépendances. Le reste de la société a bénéficié des politiques en place, mais une injustice est apparue dans la société, où environ 4,5 millions de Canadiens consomment régulièrement des produits du tabac.
    Nous sommes au point mort. Nous devons adopter de nouvelles innovations et de nouveaux moyens pour nous attaquer au problème. Nous avons recouru à d'autres mécanismes, comme l'éducation, les taxes et des règlements antitabac. Toutes ces mesures ont été fort utiles, notamment la création de traitements pour cesser de fumer.
    Cependant, avec l'avènement des cigarettes électroniques lancées sur le marché à titre de dispositifs assurant un apport de substance, nous avons observé une forte demande de la part des fumeurs. Quand on leur parle, ils nous disent « Eh bien, je les utilise quand je ne peux pas fumer. » Par contre, bien des gens s'en servent pour contourner le problème des cigarettes contenant du tabac, car nombreux sont ceux qui pensent qu'elles sont plus sécuritaires et entraînent moins de dépendance.
    Si on examine les cigarettes électroniques, en utilisant non pas une approche scientifique, mais le gros bon sens, on peut automatiquement dire qu'elles semblent réduire le risque et le coût. Par exemple, nous savons qu'elles émettent un nombre de particules moins élevé que les cigarettes combustibles. Le degré de réduction du risque n'est pas encore entièrement connu.
    En moyenne, les fumeurs sont certainement exposés à beaucoup moins de produits chimiques qu'ils ne le seraient avec des cigarettes. Et bien sûr, au chapitre du coût, du moins aux États-Unis, les gens peuvent avoir avec une cigarette électronique l'équivalent d'un à deux paquets par jour. Il revient donc bien moins cher d'utiliser les cigarettes électroniques.
    Cependant, des risques pour la santé se font jour, et nous devons leur porter attention. Que la cigarette électronique contienne ou non de la nicotine, il y a quelques problèmes, attribuables au dispositif lui-même et à la manière dont il est fabriqué. Si la batterie fait défaut, par exemple, cela peut provoquer un feu. Elles peuvent surchauffer, comme nous l'avons vu dans quelques cas.
    Si aucun revêtement de sécurité ne protège l'élément chauffant, cela peut produire des émanations ou faire pénétrer des métaux lourds dans les poumons. Avec les nouveaux dispositifs qui peuvent atteindre des températures plus élevées, nous sommes peut-être même en train de créer des produits chimiques cancérigènes qui s'infiltrent dans les poumons et le corps.
    De plus, on en connaît bien peu sur le propylène glycol. Même si on le considère généralement sécuritaire pour les humains, son innocuité n'est pas nécessairement prouvée en cas d'exposition répétée. Nous savons toutefois qu'il se produit un nombre croissant d'empoisonnements, particulièrement aux États-Unis, quand des enfants mettent la main sur des cartouches de nicotine ou des cartouches rechargeables et s'intoxiquent. Bien entendu, il y a le problème de la vapeur secondaire.
    Essentiellement, les études effectuées pour vérifier si les cigarettes électroniques pourraient constituer une bonne solution de renoncement au tabac indiquent qu'elles ne sont pas aussi bonnes que les médicaments prévus à cette fin ou qu'elles y sont au mieux équivalentes. Les cigarettes électroniques ne peuvent tout simplement pas concurrencer les cigarettes. La transition n'est pas encore complètement effectuée, car bien des gens utilisent à la fois les cigarettes et les cigarettes électroniques.
(1105)
     Je pense que vous allez entendre bien souvent cette métaphore de la part de mes collègues également. Quand deux produits sont sur le marché, les gens choisiront celui qu'ils connaissent. C'est donc un des problèmes qui se posent.
    Cela s'est déjà produit au Canada. Par exemple, quand il y avait de l'essence au plomb et que nous avons dû adopter l'essence sans plomb, il a fallu déployer des efforts considérables pour faire en sorte qu'il n'y ait pas d'essence au plomb offerte en même temps que l'essence sans plomb. Il en a été de même pour la peinture avec ou sans plomb. Nous avons donc déjà assuré la sécurité en éliminant certains produits chimiques. Mais les deux produits ne peuvent être sur le marché simultanément.
    On ne sait donc pas encore le fin mot de l'histoire quand il s'agit de dire si les cigarettes électroniques peuvent aider à cesser de fumer quand il y a encore des cigarettes sur le marché.
    Ce qui me préoccupe le plus actuellement, particulièrement au Canada, c'est que puisque les cigarettes électroniques sans nicotine sont vendues dans n'importe quel magasin général sans restriction d'âge, même mon fils de cinq ans pourrait en acheter et se pratiquer à fumer, sans qu'un cadre de réglementation régisse ce produit pour savoir ce qu'il contient, s'il a de la nicotine ou pas et s'il y a des risques de contamination par des virus ou des bactéries. Nous n'avons aucune idée de ce à quoi les gens s'exposent. Personne ne contrôle la qualité ou ne divulgue le contenu; pour un même fabricant, nous n'avons aucun moyen de savoir ce que contiennent les cigarettes électroniques d'une marque à l'autre.
    J'analyse actuellement une cigarette électronique prétendument achetée légalement par le patient d'un médecin de famille de notre communauté. Ce patient, aux prises avec des maux de tête, des vomissements et des nausées, s'est présenté à l'urgence où, et après avoir réalisé quelques tests, on a découvert que la cigarette électronique contenait de la marijuana. Nous effectuons d'autres tests pour voir si c'est effectivement vrai, puisque nous avons certainement vu comment ces dispositifs peuvent être manipulés pour contenir de la marijuana au lieu de la nicotine.
    De plus, la réglementation est illogique au Canada, car les cigarettes électroniques contenant de la nicotine ne sont pas légales, sans pour autant être illégales. Nous savons donc essentiellement que des gens se servent de laboratoires maison pour fabriquer de la nicotine ou importent de la nicotine pour ensuite en faire un composé qu'ils vendent, car techniquement, ce n'est pas illégal de le faire. Les gens convertissent aisément leurs dispositifs pour utiliser de la nicotine ou de la marijuana.
    Quelles sont les difficultés et les préoccupations auxquelles nous sommes confrontés? Il y a le fait que la cigarette électronique pourrait favoriser la dépendance à la nicotine chez les jeunes. Les doses sont trop élevées. Les cigarettes électroniques sont agrémentées de saveurs et font l'objet de publicité. Même si les données recueillies aux États-Unis sont réconfortantes, puisqu'elles indiquent que les cigarettes électroniques n'incitent pas les jeunes à devenir de vrais fumeurs, la situation n'est pas encore claire. Cela risque grandement de se produire.
    Ce qui nous préoccupe le plus avec l'absence actuelle de réglementation, c'est que nous soyons en train de normaliser à nouveau l'usage du tabac. Vous êtes peut-être nombreux à avoir été surpris, au cours de vos voyages, de voir quelqu'un en train de « vapoter » une cigarette électronique dans le restaurant ou le salon d'un aéroport. Même s'il n'y a peut-être pas eu d'exposition dommageable, cela cause du tort à la société, car cela normalise l'acte de fumer et rend les cigarettes attirantes. Il devient alors impossible ou très difficile de maintenir tous les gains que nous avons réalisés grâce aux politiques antitabac.
    Nous avons également remarqué que cela mine les efforts que les gens font pour cesser de fumer, car l'attrait de la cigarette électronique les détourne des médicaments ou des approches approuvés dont les bénéfices ont été prouvés. Je suppose que le plus grand inconnu, ce sont les effets à long terme sur la santé, même si le gros bon sens veut qu'ils seraient certainement bien moins importants que ceux de la cigarette. Mais il y aura des dommages à long terme si les cigarettes électroniques incitent les gens à fumer des cigarettes combustibles.
    Si en fait les gens utilisaient les cigarettes électroniques sans recourir à d'autres formes de cigarettes, la situation serait différente. Cependant, comme les cigarettes sont sur le marché et compte tenu de la réglementation qui les entoure, le marché pourrait bien être tenté d'utiliser les cigarettes électroniques pour séduire une génération entière de fumeurs afin de remplacer ceux qui ont abandonné le tabac ou qui sont décédés. Il devient alors très difficile de transmettre un message cohérent aux gens au sujet de la lutte contre le tabagisme.
    Cela étant dit, toutefois, je vais pour l'instant vous faire part des huit recommandations que nous devrions avoir à l'esprit à court et à long terme.
(1110)
     À long terme, notre société doit se demander si elle veut qu'une technologie mise au point il y a 150 ans, dont il a été prouvé qu'elle tue la moitié de ses consommateurs si elle est employée comme le veulent ses fabricants, continue d'être sur le marché, ou si nous devons, par égard pour la prochaine génération, examiner les solutions de rechange potentiellement viables afin de remplacer la cigarette sur le marché.
    Nous pouvons tirer des leçons de ce qui s'est passé avec la prohibition de l'alcool. À l'époque, il est clair que les gens se sont rabattus sur l'alcool de contrebande et toutes sortes d'alcools dénaturés, ce qui a été plus dommageable. Ce n'est que lorsque l'alcool a été légalisé et réglementé que les empoisonnements et les dommages liés à l'alcool ont diminué de façon marquée. Ne pouvons-nous pas faire quelque chose de semblable avec un dispositif malpropre, quoique légal, comme les cigarettes et adopter une technologie mieux conçue? Les cigarettes électroniques en sont actuellement à leurs tout débuts; on peut donc les comparer à bien des égards aux premières automobiles. Vous savez, les voitures sans chevaux. Avec la technologie d'aujourd'hui, nous sommes en train d'adopter les « voitures électriques »; nous pouvons donc voir comment la technologie progresse pour être vraiment utile et apporter quelque chose à la société.
    Que devons-nous faire pour entamer ce processus? Il faut pouvoir mieux étudier ces produits. À l'heure actuelle, notre cadre de réglementation relève de Santé Canada, où j'aurais besoin, pour effectuer des recherches à ce sujet, de centaines de millions de dollars simplement pour commencer les travaux. Inutile de penser effectuer l'étude technique. Ne serait-ce que pour fournir des données sur la sécurité et l'exposition chez les animaux — il est évidemment extrêmement difficile de faire fumer des animaux —, il faudrait en faire une, car on étudie ces produits dans le cadre d'autres médicaments. À l'évidence, on fait fausse route en considérant la cigarette électronique comme un médicament, car nous savons ce qui se passe avec les médicaments; ils ne remplacent pas la cigarette. D'une certaine manière, cela fait la promotion des produits de l'industrie du tabac, car cela ne les remplace pas.
     Pouvons-nous créer un cadre permettant d'effectuer une étude accélérée de ces produits afin de les examiner légalement avec des produits contenant de la nicotine, et adopter une approche intégrée pour les étudier pendant qu'on étoffe les données probantes au Canada afin d'apporter de meilleures améliorations aux produits? Nous devons examiner clairement ces produits parce que le tabagisme concerne de très près la santé publique.
    De nos jours, environ 35 000 Canadiens — soit l'équivalent de la population de Belleville — meurent encore chaque année de maladies liées au tabagisme. Nous savons que si les fumeurs cessent de fumer, le risque de mortalité diminue de moitié en l'espace d'un an. Nous pourrions observer des avantages immédiats si les gens commençaient à faire la transition. Mes collègues du Royaume-Uni vous diront que 7 % de la population a laissé tomber le tabac pour utiliser exclusivement des cigarettes électroniques.
    Nous pourrions avoir une incidence vraiment considérable si nous effectuions un investissement pour étudier ainsi ces produits afin de nous assurer qu'ils satisfont aux normes de qualité. Ils devraient correspondre à certaines normes en matière d'hygiène et de propreté, et leur contenu devrait être identique d'un produit à l'autre. Ils devraient être conformes à une sorte de norme, et des inspecteurs devraient aller vérifier qu'ils ne sont pas fabriqués en présence d'enfants et que les gens portent des masques et ne toussent pas dans les liquides qu'ils préparent.
    Dans l'immédiat, nous devons interdire le vapotage dans les endroits où il est interdit de fumer. Il serait dommage de revenir en arrière alors que nous avons fait tant de gains dans la société, car nous perdrions tous les avantages qu'on offre aux travailleurs des soins de santé et aux employés qui travaillent dans ces endroits en les empêchant d'être exposés à ces composés. À l'évidence, nous devons adopter immédiatement une politique interdisant la cigarette électronique aux mineurs. Comment un enfant de cinq ans pourrait-il alors acheter des cigarettes électroniques dans un dépanneur simplement parce qu'il est indiqué que le produit ne contient pas de nicotine? Quand on réalise des études sur les cigarettes électroniques censées ne pas contenir de nicotine, on en trouve des traces, car les pratiques de leurs fabricants ne satisfont pas aux normes. Les cigarettes électroniques sont contaminées.
    Que pouvons-nous faire pour interdire la vente aux mineurs? Comment pouvons-nous empêcher la publicité?
(1115)
    Si on voit les publicités de cigarettes électroniques aux États-Unis, cela vient certainement miner les efforts déployés pour empêcher les jeunes à commencer à consommer ces produits ou pour les encourager à arrêter. Nous devons certainement informer les gens des risques, surtout les jeunes et les femmes enceintes. Avant tout, nous devons instaurer un système de surveillance détaillé pouvant nous indiquer ce que les gens utilisent et quels torts cela leur cause.
    Je m'arrêterai ici et répondrai à vos questions.
    Merci beaucoup de votre attention.
    Merci beaucoup, monsieur Selby.
    Madame Davies prendra la parole en premier pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Tout d'abord, monsieur Selby, je vous remercie beaucoup. Vous avez vraiment fait un exposé touffu. J'ai pris une foule de notes, car votre document n'a pas encore été distribué parce qu'il est effectivement arrivé tardivement. Espérons que nous l'aurons plus tard.
    Je veux tout d'abord remercier le CAMH d'avoir pris une position publique, et je pense très rationnelle, quant à la marijuana. Je considère que nous disposons d'une abondance de preuves montrant qu'il est très problématique d'interdire une substance. Cela pousse essentiellement le commerce vers la clandestinité et le crime organisé. La réglementation est préférable à l'absence de règlements. La réglementation est mieux que le chaos. Je suis donc très reconnaissante envers le CAMH de prendre position sur le point de vue de la politique publique.
    Pour ce qui est des cigarettes électroniques, j'entends parler de la même approche au sein du comité, mais j'aimerais obtenir quelques éclaircissements de votre part.
    Vous avez indiqué qu'on ignore quel est le degré de réduction du risque. Je veux vous demander si on tient compte des cigarettes électroniques qui pourraient contenir de la nicotine ou pas afin de connaître les deux côtés de l'équation.
    Vous avez aussi parlé un peu plus tard de recherches prometteuses qui montrent que les jeunes ne passent pas de la cigarettes électronique à la cigarette. Je ne suis pas certaine d'avoir bien entendu; je vous demanderais donc de vous répéter.
    Enfin, s'il reste du temps, je m'intéresse beaucoup à votre proposition, selon laquelle nous devrions, à long terne, envisager d'abandonner ou d'interdire carrément les cigarettes afin de les remplacer par quelque chose comme un nouveau régime reposant sur une nouvelle technologie. Je me demande combien de temps vous pensez qu'il faudrait pour en arriver là. Est-ce vraiment faisable? Peut-on convaincre les gens d'emboîter le pas?
    Je comprends ce que vous avez dit au sujet de la recherche. Nous devons réaliser des recherches, et regarder à court et à long terme. Ce sont toutes d'excellentes observations, mais pourriez-vous clarifier les points que j'ai soulevés?
    Merci beaucoup pour ces questions. Ce sont des questions importantes.
    Le CTSM tente vraiment de se présenter comme un intermédiaire honnête. Nous mettons à profit la science dans nos recommandations et signalons les lacunes. Je veux simplement m’assurer que c’est bien clair.
    Nous sommes tous très conscients qu'un cadre de réglementation serait avantageux pour la société et tous ceux qui pourraient avoir des problèmes de dépendance, car un tel cadre aiderait à faire comprendre que la toxicomanie découle d'une interaction entre le comportement du cerveau et la société… C’est un effet d’interaction.
    Cela dit, en ce qui a trait aux cigarettes électroniques, selon certains rapports, les jeunes essaieraient le produit. Ils sont peut-être victimes des forces du marché. Ils essaient les cigarettes électroniques d’abord, un produit d’introduction, et développent une dépendance. C’est un peu ce que font les trafiquants de drogue. Ils donnent des échantillons aux jeunes et, peu à peu, ces derniers développent une dépendance. Les jeunes essaient la cigarette électronique, aiment ça et passent ensuite aux cigarettes combustibles.
    Au début, les cigarettes électroniques ne faisaient pas partie de l’industrie du tabac. Mais, de plus en plus, cette industrie prend le contrôle du marché des cigarettes électroniques. Il est difficile de savoir si c’est pour tuer le marché, le faire grandir ou jouir de marchés mixtes. Ce n’est pas clair. Je ne suis pas un expert dans le domaine, mais c’est ce que nous avons observé. De ce point de vue, il faut s’inquiéter pour les jeunes à risque qui pourraient se laisser influencer.
    Aussi, selon les vastes études fondées sur la population qui ont été menées, et qui datent un peu, les jeunes ne sont pas si nombreux à utiliser les cigarettes électroniques. C’est peut-être parce que ces sondages sont menés auprès de l’ensemble de la population et non auprès des jeunes qui sont les plus à risque dans ce cas-ci.
    Vous comprenez?
(1120)
    Oui.
    Je suis désolée de vous interrompre, mais, lorsque vous dites qu’il faut mener plus d’études — et selon vous, les recherches sur la nicotine coûteraient des centaines de millions de dollars —, j’imagine que vous voulez dire qu’il faudrait étudier les deux produits, soit les cigarettes électroniques avec et sans nicotine, ainsi que leur impact sur la santé.
    C’est exact. Il faudrait étudier ces produits de ce point de vue.
    Je suis désolé, mais j’ai oublié quelle était votre troisième question. Vous m’aviez posé trois questions.
    Moi aussi, j’ai oublié.
    Une voix: Vous avez demandé s’il fallait remplacer les cigarettes combustibles.
    Ah oui. S’il est possible de remplacer les cigarettes combustibles.
    Je crois que cela représente un idéal. Bien entendu, lorsqu’il est question de changer quelque chose… Les exemples sont omniprésents dans la société. Lorsqu’on propose de faire un changement important, les gens veulent le statu quo. Mais, grâce au leadership et au soutien de suffisamment de gens, je crois que c’est possible. Si l'on avait dit aux dirigeants de la société Remington dans les années 1950 qu'un jour les machines à écrire seraient obsolètes et qu'elle devrait développer un plan d’affaires différent, ils ne nous auraient pas crus. Vous auriez beaucoup de difficulté aujourd’hui à trouver une machine à écrire. Elles ont été remplacées.
    Je crois que tout est possible. Tout dépend de l’approche adoptée. Ce n’est pas le genre d’idée qui remplirait les poches des médecins, mais je crois que c’est la responsabilité de la société d’aller de l’avant avec une telle initiative.
    Merci.
    Il vous reste encore quelques secondes.
    Savez-vous s’il y a beaucoup de recherches en cours? Je crois que quelqu’un fait des recherches dans le cadre de doctorat. Y a-t-il beaucoup de recherches en cours?
    Il est difficile de mener des recherches au Canada, notamment des recherches expérimentales sur des produits. On peut évaluer les tendances de la population, certes, mais il est difficile de mener une recherche au cours de laquelle on donne à un groupe des cigarettes électroniques avec nicotine et à un autre des cigarettes électroniques sans nicotine.
    Je vais vous donner un exemple pour vous montrer à quel point la situation est farfelue. Je peux mener une étude en donnant à des gens des cigarettes électroniques sans nicotine, car ce produit ne fait pas l’objet de réglementation, mais je dois leur donner une dose de nicotine par l’entremise de pastilles à la nicotine approuvées. Dès que j’ai introduit de la nicotine dans la cigarette électronique, celle-ci devient… En vertu de la réglementation actuelle, je dois présenter une demande d’essais cliniques. C’est ensuite que j’aurais besoin des centaines de millions de dollars pour soumettre mes résultats aux fins d'approbation. La situation au Canada est très étrange en ce qui a trait aux recherches sur ce produit.
    D’accord. Merci beaucoup.
    Madame Adams, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Avant de commencer, je tiens à dire que mon cœur est avec les citoyens de Hamilton, la ville où j’ai grandi et où, aujourd’hui, le caporal Cirillo sera porté en terre. Je sais que tout le pays se joint aux gens de Hamilton pour pleurer la perte du caporal Cirillo et pour son jeune garçon. Nous sommes de retour au travail aujourd’hui pour démontrer notre résilience.
    Merci beaucoup d’avoir accepté de venir témoigner dans le cadre de cette étude importante sur les cigarettes électroniques.
    Deux études ont été publiées récemment, l'une dans le journal The Lancet et l’autre dans le journal Addiction. J’ignore si ces études vous sont familières. Celle publiée dans The Lancet comparait les cigarettes électroniques avec et sans nicotine et les timbres à la nicotine afin de déterminer si ces produits sont des outils efficaces pour renoncer au tabagisme. On ne peut pas extrapoler en s’appuyant sur les résultats d’une seule étude, mais selon les résultats, les timbres à la nicotine sont presque aussi efficaces que les cigarettes électroniques. L’étude publiée dans le journal Addiction tentait de déterminer si les cigarettes électroniques pouvaient avoir une application concrète en tant qu'outil adéquat pour renoncer au tabagisme. Les observations soulevées sont prometteuses. Ce sont les deux études dont je suis au courant.
    Savez-vous s’il y en a d’autres?
(1125)
    Oui, je suis au courant de ces études. D’ailleurs, celle publiée dans The Lancet a été réalisée en Nouvelle-Zélande par un proche collègue. Le problème est le suivant: il est impossible d’obtenir le même produit d’une fois à l’autre, car même si les cigarettes électroniques portent le même nom, ce n’est pas nécessairement le même produit. C’est là un des défis.
    Mais, pour répondre à votre question, il y a effectivement d’autres études qui tentent d’évaluer l'efficacité des cigarettes électroniques par rapport à d’autres produits à base de nicotine. C’est l’orientation que nos recherches devraient suivre. Il y a une étude en cours en Italie. Un de mes collègues, en Suisse, mène une étude semblable. Un groupe en Afrique du Sud mène également une étude sur le sujet. La FDA a investi des sommes colossales dans des centres à Buffalo et en Virginie. D’ailleurs, nous sommes en discussion avec le groupe de Virginie afin d’évaluer la possibilité de mener une étude conjointe, car, contrairement au Canada, il est possible aux États-Unis de mener des études sur les cigarettes électroniques avec nicotine. Donc, certaines expériences…
    Si vous me le permettez, quelles sont les tendances sous-jacentes qui ressortent des études menées par vos collègues et associés? Les cigarettes électroniques sont-elles vues davantage comme un outil pour renoncer au tabagisme ou une voie vers la toxicomanie?
    En raison de la façon dont les études sont menées, la plupart font appel à des fumeurs récalcitrants ou à de gros fumeurs ayant de la difficulté à renoncer au tabagisme. Les études naturalistes montrent que les consommateurs utilisent les deux produits. Donc, lorsque c’est possible, ils fument de vraies cigarettes et lorsqu’ils ne peuvent pas fumer de cigarettes combustibles, ils utilisent une cigarette électronique. C’est la tendance actuelle.
    Aussi, on remarque qu’à court terme, si la cigarette électronique est classée et étudiée comme étant un produit médical permettant de renoncer au tabagisme, elle fonctionne sensiblement comme un produit à base de nicotine, c'est-à-dire que la plupart des fumeurs qui utilisent cette méthode à court terme recommenceront à fumer dans les six mois. C’est là où nous avons un problème. Étant donné la démographie actuelle…
    Pour être juste, on remarque la même chose avec toutes sortes de dépendances. Les gens doivent s’y prendre à plusieurs reprises avant de vaincre leur toxicomanie. Êtes-vous d’accord?
    Vous avez tout à fait raison de dire que les gens doivent s’y prendre à plusieurs reprises avant de vaincre leur dépendance ou elles ont besoin d'un soutien continu pour ne pas recommencer à consommer. C’est ce que nous avons remarqué, notamment, chez les consommateurs d’opioïdes d’ordonnance ou les héroïnomanes. Au moins 25 % d’entre eux, sinon plus, ont besoin d’un traitement à long terme et non d'un traitement à court terme comme ceux que nous leur offrons.
    Que pensez-vous de l’impact de la fumée secondaire, l’aérosol qu’expirent les utilisateurs des cigarettes électroniques?
    Tout dépend de la version du produit. Les études menées jusqu’à maintenant montrent que les premières cigarettes électroniques faisaient peu de fumée, car elle n’atteignait pas une température suffisamment élevée. Les nouvelles, celle de la deuxième génération, créent beaucoup plus de fumées d'aérosols. De façon générale, elles ne créent pas autant de fumée qu’une cigarette combustible. Mais, puisque ce produit n’est pas réglementé, la teneur en nicotine dans ces cigarettes peut être plus élevée que dans une cigarette combustible. La science ne peut qu’évaluer ce qu’il y a sur le marché. Le problème, c’est que le produit utilisé aujourd’hui peut être très différent du produit utilisé la semaine suivante. Le produit change, puisque ce marché n’est pas réglementé. On ignore si le produit étudié aujourd’hui sera le même demain. Il faut donc prendre cela avec un grain de sel.
    Les compétences internationales réglementent-elles le contenu en tabac et, si oui, quel est le niveau accepté?
    Je crois que ça dépend si la teneur en nicotine est réglementée ou non. Ce que font les autorités compétentes, c’est de réglementer les arômes ou autres éléments qui rendent les cigarettes plus attrayantes. Donc, la plupart des produits contrôlés par l’industrie du tabac… Par exemple, Santé Canada demande aux fabricants de lui fournir le contenu de leurs produits. Ces informations ne peuvent être partagées avec quiconque en raison des règles en matière de marques de commerce et de confidentialité. Donc, de nombreux pays tentent…
(1130)
    Actuellement, au Canada, Santé Canada interdit les cigarettes électroniques avec nicotine. Mais, ce produit est-il permis dans d’autres pays et, si oui, quelle est la quantité de tabac permis dans les cigarettes électroniques?
    Si votre question porte sur les cigarettes électroniques avec nicotine, celles-ci sont habituellement disponibles aux États-Unis et en Europe. Certains pays commencent… L’Australie et le Canada sont les deux seuls pays à interdire le produit. À ce que je sache, ce sont les deux seuls pays où les cigarettes électroniques sont permises si elles ne contiennent aucune nicotine. Mais, aux États-Unis, la vente des cigarettes électroniques avec nicotine est permise, pourvu que le fabricant n’accompagne pas le produit d’une allégation de santé.
    Mais, savez-vous quelle est la teneur permise? Savez-vous quelle est la quantité de tabac permise ou quelle est la réglementation actuelle à cet égard? Utilise-t-on une approche systématique?
    En général, il n’y a pas de tabac dans les cigarettes électroniques. Elles contiennent de la nicotine extraite du tabac. Donc, les autres composés et produits chimiques contenus dans le tabac ne se retrouvent pas dans les cigarettes électroniques. On étudie la possibilité de fixer la limite à 18 mg, mais, encore une fois, le raisonnement derrière cette proposition fait toujours l’objet de débats. Le cadre de réglementation de la FDA se penche sur la question, mais j’ignore si des pays ont imposé une limite. La limite de 18 mg fait de plus en plus l'objet de discussions sur certains forums, mais je ne saurais vous dire si c’est la limite qui sera acceptée. Je ne suis pas un expert sur la question.
    Madame Fry, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Les opinions que j'ai entendues à savoir si la fumée secondaire était dangereuse ou non divergent. J’ai entendu dire également que les enfants utilisent les contenants de vapeur ou les bouteilles de nicotine aromatisée et qu’ils sont donc à risque. Toutefois, la réalité est la suivante: ce produit est maintenant en vente dans Internet. Comme vous le savez, la vente dans Internet est très difficile à réglementer. Certains réussissent même à obtenir une ordonnance d'individus dans Internet sans examen. C’est donc très difficile.
    Alors, la question qu’il faut se poser c’est, puisqu'il semble impossible de limiter l’accès à ces produits en raison d’Internet et connaissant les dangers associés à la fumée secondaire des cigarettes électroniques et les risques pour les enfants, ne serait-il pas logique et pratique de trouver des façons de réglementer l’utilisation de ces produits? C’est ma première question.
    Ma deuxième question est la suivante: avons-nous toutes les informations nécessaires pour réglementer l’âge légal pour l’utilisation de ces produits et la teneur en nicotine? Comme ce fut le cas avec d’autres toxicomanies, les fabricants des cigarettes électroniques avancent que leur produit peut aider les fumeurs à renoncer au tabagisme et qu’il s’agit donc d’un bon produit. Certains ont déjà utilisé l’argument selon lequel la méthadone pouvait aider dans les cas de dépendance aux opioïdes.
    Donc, selon vous, quels sont les dangers de ne pas réglementer ces produits? Quels sont les risques pour la population si le produit est facilement accessible? Et, devrait-on évaluer si l’utilisation de la nicotine, dans ce cas-ci, aiderait les fumeurs à renoncer au tabagisme?
    Je vous pose ces questions sans préjuger. Je n’ai encore adopté aucune opinion ni pris aucune décision dans ce dossier. Je vous pose simplement ces questions.
    Merci beaucoup de la question, madame Fry.
    Lorsqu'on examine la réglementation, je pense que l'histoire nous démontre que les gens consomment des substances. Comment pouvons-nous réduire le tort causé à ces gens, à leur famille et aux collectivités dans lesquelles ils vivent? En ce qui concerne la réglementation, je suis d'accord avec vous pour dire que nous devons trouver une façon de réglementer ce produit pour éviter que les gens choisissent d'acheter sur Internet des choses qui présentent un risque d'explosion ou qui pourraient les exposer à des produits chimiques et des toxines. Nous nous retrouvons soudainement à devoir réglementer des pratiques existantes. Nous l'avons fait pour le tabac, par exemple, et beaucoup de ces choses pourraient aussi s'appliquer dans le cas présent. Ce sont certainement des outils de réglementation qui pourraient être utiles.
    Si nous ne le faisons pas, nous minerons les progrès réalisés dans la lutte contre les effets nocifs du tabac. Oui, nous sommes au point mort, mais la prévalence n'est certainement pas de 50 % comme dans les années 1950. Cela a chuté à 20 %, environ. Peut-on réduire cela davantage? Oui, absolument. Si nous avons un produit plus sécuritaire, comment peut-on démontrer qu'il est beaucoup plus sécuritaire, et comment peut-on en réglementer la vente pour la limiter principalement aux adultes? Évidemment, il n'est jamais possible d'empêcher totalement les enfants de se procurer quelque chose, mais si on peut à tout le moins éviter que la majorité des enfants y ait accès, car la plupart des adultes sont aux prises avec cette dépendance...
    Je mène actuellement une étude en médecine familiale, en Ontario, et je peux vous dire que dans le cadre de cette étude, nous parvenons, sans mesures coercitives, à inciter des gens en phase terminale à vouloir volontairement cesser de fumer avant de mourir. Je n'avais jamais vu cela auparavant. Les gens veulent désespérément arrêter de fumer, et c'est très difficile pour eux. S'ils n'ont pas de solution de rechange, c'est très difficile.
    Je pense que par égard pour la prochaine génération, nous devons vraiment aider à faire progresser les choses en créant un cadre de réglementation relatif aux cigarettes électroniques ou aux inhalateurs électroniques pour nous assurer une fois pour toutes de tirer parti de cette technologie tout en minimisant les effets nocifs et en réduisant le danger pour autrui.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais voilà ma position sur le sujet.
(1135)
    Il me reste deux minutes; je vais donc simplement vous présenter une hypothèse.
    Si l'on réglemente les cigarettes électroniques de façon à éliminer la nicotine, le goudron et le benzopyrène et les autres produits que l'on trouve dans les cigarettes combustibles, pourrait-on alors rendre les cigarettes illégales et rendre légaux les vaporisateurs et les cigarettes électroniques?
    C'est une excellente question qui suscite beaucoup d'enthousiasme, parce que nous l'avons déjà fait. On peut remonter dans l'histoire; j'ai utilisé l'exemple de l'essence au plomb. Nous l'avons éliminée. Nous avons éliminé la peinture au plomb et l'essence au plomb; sur le plan de la santé publique, ce furent des décisions importantes. La leçon que l'on peut en tirer, c'est que lorsqu'il existe une solution de rechange plus sécuritaire, on parvient en général à contraindre l'industrie de la mettre en marché. Prenez la réglementation sur les automobiles et sur la fabrication des automobiles, par exemple. Les voitures ne peuvent être chaussées de pneus qui présentent un risque d'explosion et elles doivent être construites de façon à ne pas prendre feu en cas d'accident. Nous conjuguons la réglementation et les forces du marché pour forcer la création de meilleurs produits et pour améliorer la santé. En tant que médecin, je peux vous dire que je ne veux pas que tout cela ait lieu en clinique; cela se fera à l'extérieur, et cela aura pour effet d'entraîner des changements et d'améliorer la santé des Canadiens. Cela n'aura pas lieu dans le système de prestations de soins de santé. Nous sommes à même de constater les répercussions lorsque de bonnes politiques ne sont pas adoptées.
    Monsieur Young.
    Merci, monsieur le président.
    Docteur, si vous aviez comme patiente une femme adulte ayant l'habitude de boire une demi-bouteille de vodka par jour, que vous deviez lui donner votre meilleur conseil et que vous aviez le sentiment qu'elle en tiendrait compte, lui recommanderiez-vous de passer au vin ou à la bière parce qu'elle pourrait ainsi consommer moins d'alcool?
    C'est une excellente question, une belle mise en contexte. Si, par exemple, nous avions fait...
    Brièvement, s'il vous plaît.
    Si vous voulez que je réponde par oui ou par non, alors la réponse est non, si elle n'a pris aucune autre mesure.
    Merci.
    Sur le plan de la santé, quelle est la pire dépendance, au Canada? Quelle dépendance entraîne les problèmes sociaux les plus graves, la plus grande misère humaine et les coûts les plus élevés pour notre économie?
    La consommation de tabac combustible.
    Et la deuxième en importance?
    L'alcool.
    Vous savez peut-être qu'en Ontario, par exemple, nous avons l'un des régimes de réglementation les plus perfectionnés du monde. C'est un excellent régime. Pour acheter de l'alcool, toute personne âgée de moins de 25 ans doit présenter une pièce d'identité; les bars ferment à deux heures du matin et ne peuvent ouvrir avant midi; le permis des bars qui dépassent la capacité de clients permise ou qui servent trop d'alcool à leurs clients peut être suspendu ou révoqué, et l'alcool est frappé de lourdes taxes. Il y a une panoplie de règlements, mais la dépendance à l'alcool demeure tout de même l'un des problèmes les plus importants de notre société, et les ventes ne cessent de croître. Nous savons aussi qu'en Ontario seulement, il se vend pour des centaines de millions de dollars d'alcool illégal dans les bars clandestins, etc. N'êtes-vous pas d'accord pour dire que la réglementation ne règle pas le problème?
(1140)
    Je serais en désaccord sur ce point, parce que la comparaison doit être fonction des éléments comparables. Les règlements ne permettront jamais de régler complètement un problème, mais en comparaison à la solution de rechange — ce que nous a appris la prohibition, qui a causé plus de problèmes et de décès que...
    Je comprends, lorsque l'on compare cela à l'absence de règles.
    Dans l'absolu, vous avez tout à fait raison; cela ne réglera pas le problème.
    Comparé à l'absence de règles, en effet. Je comprends.
    Pourquoi les professionnels du CAMH adoptent-ils cette approche théorique dans leur étude des substances toxicomanogènes au lieu de mettre en garde les Canadiens contre une nouvelle dépendance, contre les problèmes de santé et les dangers liés à la marijuana ou contre les dangers potentiels associés aux cigarettes électroniques? En quelque sorte, vous semblez cautionner des drogues qui créent une dépendance; c'est comme si vous disiez que puisqu'elles seront normalisées, autant les légaliser. Or, nous savons que les règlements ne fonctionnent pas toujours, c'est le moins qu'on puisse dire.
    Je me demande pourquoi votre message n'est pas axé sur la protection de la population contre les dangers de la dépendance et des nouvelles dépendances plutôt que sur une méthode quelconque pour en normaliser l'utilisation.
    Je pense qu'il y a peut-être une certaine confusion. Nous ne disons aucunement que la légalisation d'une chose revient à en normaliser l'usage.
    En effet; c'est moi qui le dis.
    Ce n'est pas notre avis. Manifestement, nous croyons que la prévention vient... Nous savons ce qui donne des résultats en matière de prévention: l'accès, le prix, les valeurs familiales et les bonnes conditions de vie. Tous ces facteurs sociaux empêchent les jeunes de développer une dépendance. L'accès à de bons soins prénataux, toutes ces choses ont démontré... Donc, de toute évidence, ce travail se poursuit. La question est certes de prévenir les gens des dangers. Les paquets de cigarettes comportent des avertissements accompagnés du numéro de téléphone d'une ligne de renoncement au tabagisme; cela existe. Cependant, cela n'atteint pas les gens...
    J'aimerais poser une autre question liée à cette même préoccupation.
    Je dois vous dire que les parlementaires n'ont pas tous été heureux d'entendre le CAMH déclarer publiquement que nous devrions légaliser la marijuana et adopter des règlements, parce que nous ne croyons pas que les criminels et les trafiquants de drogue qui enfreignent le Code criminel respecteront les règlements, comme par magie. Nous ne croyons pas que les gens qui achètent des drogues dans la rue et dans les bars se rendront dans des magasins de l'État pour acheter un produit qu'il pourrait considérer comme étant de qualité inférieure. En fait, nous sommes d'avis que cela mènerait — comme le prouve la consommation d'alcool — à la prolifération de la marijuana chez les jeunes. Donc, cela nous déçoit.
    Pourquoi le CAMH ne met-il pas en garde les Canadiens contre les nouveaux risques potentiels associés à l'utilisation de cigarettes électroniques pour fumer de la marijuana ou d'autres drogues plutôt que de chercher des façons de dire « Eh bien, cela pourrait être utile, voyons ce qu'il en est »?
    On les met en garde, mais lorsque l'on voit que 40 % des jeunes consomment de la marijuana, que notre hôpital est plein de jeunes aux prises avec des psychoses après avoir consommé de la marijuana... Nous ne savons pas si c'est attribuable à la marijuana ou s'il s'agissait de marijuana à laquelle on avait ajouté de la méthamphétamine, de la cocaïne, ou des choses du genre. Ce que nous disons, c'est qu'il faut être prudent, car ces jeunes se retrouvent en difficulté non seulement parce qu'ils ont consommé de la marijuana, mais aussi en raison des contaminants que l'on y trouve. Ensuite, ils se retrouvent avec un casier judiciaire, puis ils auront tendance à s'engager dans une voie qui les rendra plus susceptibles de se retrouver en prison et moins susceptibles d'être un membre productif de la société.
    Notre approche est très pragmatique. Voilà la leçon qui a été tirée de la prohibition de l'alcool. Si vous regardez ce qui s'est produit dans ce cas...
    Je dois vous interrompre, parce que je n'ai presque plus de temps.
    Si vous comparez les données sur la consommation d'alcool postérieures à la prohibition aux données antérieures à la prohibition... En fait, dire que tout allait pour le mieux aux États-Unis avant la prohibition est un mythe; ce n'était pas le cas. À l'époque, c'était le pire problème qu'ils aient jamais eu, que n'importe quel pays ait eu par rapport à l'alcool.
    Les gens consommaient beaucoup trop d'alcool; ils buvaient le jour, ils buvaient au travail. La prohibition n'a pas eu beaucoup d'effet à cet égard, mais elle n'a pas été un échec total. Je ne propose pas de réinstaurer la prohibition, mais il faut cesser de perpétuer ce mythe. Ne comparons pas notre régime de réglementation actuel à la prohibition, parce que ce n'est pas réaliste.
(1145)
    Tout régime réglementaire permet d'obtenir certains résultats, mais l'on observe ensuite que ses effets atteignent un plateau. Je ne veux pas que les gens pensent que les cigarettes électroniques sont une panacée qui réglera tous les problèmes, mais il convient certainement de les étudier.
    Il faut un cadre réglementaire qui nous permet de chercher à modifier le mode de diffusion et d'utilisation du produit de façon à minimiser son incidence sur l'ensemble de la société. Qu'on interdise quelque chose ou que l'on maintienne sa légalité, vous avez raison de dire qu'il n'existe pas de cadre unique qui permette de régler ces problèmes humains, mais le fait d'avoir de tels cadres nous permet certainement de maximiser les avantages pour la majorité et d'amener une certaine équité.
    Monsieur Morin, vous avez cinq minutes.
    Merci. Docteur, je vous remercie de votre témoignage.
    Dans votre exposé, vous avez mentionné que les gens ont le droit de fumer des cigarettes électroniques dans des restaurants, ce dont j'ai été témoin dans des restaurants d'Ottawa. Cela m'a dérangé. Vous avez dit qu'actuellement, ces cigarettes électroniques peuvent être vendues à des mineurs, que ces entreprises pourraient avoir adopté des pratiques de publicité douteuses et que le gouvernement ou des organismes n'ont mis en place aucun programme d'éducation ni mené de campagnes de sensibilisation.
    Essentiellement, nous le faisons actuellement pour les cigarettes ordinaires. Selon vous, la première étape de la réglementation des cigarettes électroniques devrait-elle être l'adoption du même modèle et des mêmes règlements que ce qui existe pour les cigarettes, et l'élimination des règlements qui ne s'appliquent pas aux cigarettes électroniques?
    Oui. Nous avons parlé des effets à court terme et à long terme. À court terme, sans vouloir miner les cadres de réglementation exhaustifs qui sont en place dans la plupart des provinces, les cigarettes électroniques devraient être assujetties à la même réglementation que les cigarettes combustibles relativement aux endroits où il est permis de fumer et aux personnes qui ont le droit d'en acheter.
    De toute évidence, si l'on veut éviter de normaliser de nouveau le fait de fumer dans des endroits publics, ce serait la première étape. Donc, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il s'agit d'une première étape facilement réalisable.
    Merci. Vous avez aussi mentionné que l'inhalation d'une dose unique de propylène glycol n'est probablement pas nocive, mais que nous ne savons pas si l'exposition répétée au propylène glycol a un effet négatif sur les poumons. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Y a-t-il des études à cet égard, peut-être pas des études à long terme, mais à moyen ou à court terme?
    Eh bien, le règlement de la FDA indique qu'à court terme, on le considère généralement sécuritaire pour les humains. Nous le savons parce que le propylène glycol est utilisé comme mécanisme de diffusion dans beaucoup d'inhalateurs pour l'asthme; nous avons donc des données sur l'exposition humaine à ce produit. Mais, encore une fois, dans le cas d'un inhalateur pour l'asthme, la personne l'utilise peut-être une ou deux fois par jour, tandis qu'une personne qui fume une cigarette électronique pourrait l'utiliser de façon répétée tout au long de la journée. Il pourrait alors en résulter une très grande exposition au propylène glycol, et nous ne savons pas si c'est nocif ou non.
    Il en va de même pour quelqu'un qui consomme de l'alcool en petites quantités en prenant un verre normal à tous les deux jours: le risque d'effet nocif est faible. Évidemment, ces gens pourraient se blesser s'ils venaient à trébucher et à tomber, mais manifestement, le risque d'effet nocif pour une personne qui consomme un flacon de 40 onces par jour est considérablement plus élevé. La différence ne tient pas de la modification de la qualité de l'alcool, mais du degré d'exposition.
    Merci.
    La semaine dernière, d'autres témoins nous ont dit que selon une étude menée en Ontario en 2013, 15 % des élèves de la 9e à la 12e année avaient utilisé des cigarettes électroniques au cours de leur vie, ce qui est troublant. Que pensez-vous de cette statistique, et selon vous, comment en est-on arrivé là?
(1150)
    Comme je l'ai indiqué, c'est parce que le produit est en vente partout. C'est un produit nouveau qui est offert en une panoplie de saveurs. C'est attrayant. Les gens voient les vedettes d'Hollywood les utiliser dans des films ou des émissions télévisées, et on commence ainsi à voir une vraie renormalisation de ce comportement. Aussi, comme nous le savons tous, l'adolescence est la période où l'on fait toutes sortes d'expériences. Certains jeunes sont plus susceptibles que d'autres de développer une dépendance, en raison de facteurs génétiques ou sociaux, voire une combinaison des deux.
    Il est troublant de voir que les jeunes commencent à... Le Canada a tellement eu de bons résultats quant à la réduction du taux de tabagisme chez les jeunes, et nous devrions chercher des façons de nous assurer que cela demeure ainsi. On observe une grande augmentation lorsque les cigarettes deviennent légales.
    Merci beaucoup.
    Le dernier intervenant de cette heure est M. Lunney.
    Je vous remercie de votre contribution à cette étude qui, en réalité, ne fait que commencer.
    J'aimerais revenir sur les préoccupations relatives aux jeunes. Outre la nicotine, les vaporisateurs peuvent servir à l'administration de produits en tous genres. Je pense que nous sommes peut-être un peu naïfs de penser que la nicotine est la drogue de choix des jeunes qui se lancent dans la nouvelle tendance du « vapotage ». Sur Internet, on trouve déjà toutes sortes de méthodes sur la préparation de mélanges de marijuana séchée et de propylène glycol.
    Bien entendu, c'est une préoccupation très grave, parce que la vaporisation ne dégage pas l'odeur caractéristique que l'on associe normalement à la marijuana. Par conséquent, les parents ne sont peut-être pas au courant et les responsables des écoles ne savent peut-être pas que les jeunes prennent des touches près de leur casier. De toute évidence, c'est une préoccupation pour beaucoup d'entre nous.
    Toutefois, cela va au-delà de la marijuana. Manifestement, la vaporisation est un mécanisme de diffusion très puissant pour toutes sortes de produits chimiques physiologiquement actifs. il y a une liste inépuisable de produits chimiques qui pourraient aussi être utilisés avec cette technologie peu coûteuse et facilement accessible. Est-ce une préoccupation pour votre organisme?
    Essentiellement, parce que nous côtoyons les patients avec les pires dépendances, et dans bien des cas, étant donné qu'elles sont facilement disponibles et non réglementées... C'est le far west en ce qui concerne ces produits. Nous voyons des shishas électroniques et des pipes à eau sur le marché, et les gens peuvent même imprimer des étiquettes de cigarettes électroniques avec leur imprimante personnelle. Par conséquent, nous gardons l'oeil ouvert, et je considère que nous avons besoin d'un cadre réglementaire qui, non seulement met fin aux dangers immédiatement, mais aussi fait en sorte qu'on ne perpétue pas par inadvertance la vente de cigarettes dans la société d'aujourd'hui.
     En ce qui a trait à la renormalisation, nous savons qu'il y a toutes sortes de phénomènes psychologiques et neurologiques associés au tabagisme. Le moment est important — par exemple, après les repas —, et le fait d'occuper ses mains et ainsi de suite. Les interdictions de fumer dans les endroits publics ont eu raison de nombreux fumeurs. Sur le plan de la stigmatisation sociale, c'est comme une liberté retrouvée pour beaucoup de fumeurs sur le point de cesser de fumer ou pour des fumeurs invétérés qui n'ont désormais qu'à se tourner vers le « vapotage ». Par conséquent, au lieu de se défaire de cette habitude, les fumeurs vont simplement opter pour une autre solution, n'est-ce pas?
    Il y a deux façons de voir les choses. Tout d'abord, lorsque les fumeurs combinent la cigarette classique et la cigarette électronique, est-ce en vue de cesser complètement de fumer ou plutôt de maintenir cette habitude? Nous n'avons pas en main les données scientifiques à cet effet, mais nous disposons de certains renseignements. Comme l'a révélé une étude réalisée par mon collègue du Royaume-Uni, Robert West qui, si je ne me trompe pas, s'adressera à vous, les gens vont souvent diminuer leur consommation avant d'essayer d'arrêter complètement. Alors tout ce qui peut aider les gens à réduire... De façon générale, nous devons déterminer si cette méthode incite les gens à cesser de fumer. Le problème avec les cigarettes électroniques, c'est qu'on ignore encore si les gens se disent: « je vais fumer quand je vais pouvoir, et quand je ne pourrai pas, je vais vapoter ».
    C'est une question qui est toujours sans réponse.
(1155)
    Ce qui me préoccupe, ce sont les éléments chauffants eux-mêmes et le métal, la façon dont elles sont produites, les températures, les piles. Quelles autres substances chimiques sont libérées? Ingère-t-on des vapeurs qui peuvent être hautement toxiques? De quels renseignements dispose-t-on? A-t-on réalisé une étude sur l'un de ces aspects? A-t-on recueilli des données quantitatives jusqu'à maintenant?
    Oui, on a mené certaines études à l'Université Virginia Commonwealth, et d'autres récemment à Buffalo sur les métaux lourds qui émanent de ces produits.
    Cela dit, c'est une technologie qui évolue très rapidement. En fait, quelques mois seulement après que j'ai parlé du fait qu'un enfant pourrait vapoter l'un de ses dispositifs à basse résistance et à haute tension, le distributeur m'a proposé une cigarette électronique fabriquée en Chine munie d'un dispositif de sécurité à l'épreuve des enfants.
    Ce qu'on étudie aujourd'hui évolue tellement rapidement que nous ne savons pas encore si les principes d'ingénierie peuvent être mis en oeuvre pour réduire la vaporisation des métaux lourds. Le fait de recouvrir l'élément chauffant d'un composé inerte permettrait-il d'éliminer le métal lourd qui s'échappe du cuivre actuellement utilisé?
    Nous ne sommes pas des experts. Nous devons nous en remettre à nos collègues ingénieurs et aux autres qui s'y connaissent en la matière, parce que le marché évolue plus rapidement que nous.... Nous accusons un certain retard au chapitre de la compréhension.
    C'est ce qui met fin à cette période de questions. Merci beaucoup, monsieur Lunney.
    Merci, monsieur Selby, de nous avoir consacré de votre temps. Nous nous réjouissons de tout ce que vous apportez au comité de la santé.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir permis de témoigner aujourd'hui.
    Nous allons faire une pause de quelques minutes pour permettre à notre équipe technique de nous mettre en communication avec nos témoins du Royaume-Uni et de la Suisse, après quoi nous reprendrons nos travaux.
    Merci, encore une fois.
(1155)

(1200)
    Merci. Nous reprenons nos travaux.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos deux invités, le professeur John Britton et le docteur Armando Peruga. Messieurs, soyez les bienvenus. Il s'agit de notre deuxième séance dans le cadre de notre étude sur les cigarettes électroniques. Nous sommes heureux que vous preniez le temps de nous aider à mieux comprendre ce dossier. Vous disposez de 10 minutes chacun pour faire votre exposé, après quoi nous enchaînerons avec la période des questions.
    Alors, professeur Britton, si vous pouviez nous faire une faveur et prendre la parole en premier, ce serait très apprécié. Allez-y, monsieur.
    Tout d'abord, je remercie le comité de m'offrir cette occasion de lui présenter des données probantes. Je suis professeur d'épidémiologie à l'Université de Nottingham. Je suis également directeur du U.K. Centre for Tobacco and Alcohol Studies, un réseau de chercheurs sur le tabac et l'alcool, et je suis également le président du groupe consultatif sur le tabac du Royal College of Physicians. C'est d'ailleurs à ce titre que j'ai dirigé la production d'un rapport intitulé Harm Reduction in Nicotine Addition, qui a été publié en 2007 et qui plaidait en faveur de l'élaboration de politiques et de dispositifs visant à offrir aux fumeurs une forme de remplacement de la nicotine afin de réduire le nombre de maladies et de décès attribuables au tabagisme. Nous avons validé ce concept avec l'expérience de la Suède relativement au tabac à usage oral, qui avait diminué la prévalence du tabagisme et du taux de cancer.
    Cette approche a été acceptée par les gouvernements du Royaume-Uni. Le Parti travailliste a publié un document stratégique qui comprenait la réduction des méfaits, puis le gouvernement de coalition actuel en a fait autant un an plus tard. On a donc favorisé les produits de remplacement de la nicotine pendant quelques années dans ce pays.
    Les cigarettes électroniques ont fait leur apparition sur le marché du Royaume-Uni à peu près au même moment où ce rapport a été publié. Par conséquent, il n'en était pas question dans le rapport, mais nous savions ce qu'il fallait faire pour encourager les fumeurs à utiliser des sources de nicotine moins néfastes — qui soient socialement acceptables, abordables et disponibles dans les mêmes points de vente que les cigarettes classiques. Il est probablement juste de dire que la première génération de cigarettes électroniques était beaucoup moins efficace que celles qui ont suivi, mais il n'en demeure pas moins que ces cigarettes se sont révélées extrêmement populaires au Royaume-Uni et dans beaucoup d'autres pays depuis.
    Plus tôt cette année, en collaboration avec le docteur Bogdanovica, j'ai publié un rapport pour Public Health England, que l'on peut consulter sur le site Web de cette organisation qui veille à la santé du public et qui, à mon avis, est considéré comme un cadre politique entourant l'utilisation des cigarettes électroniques et la santé publique. Ce rapport a conclu que le tabac tue. On compte 10 millions de fumeurs au Royaume-Uni. Je ne connais pas les chiffres pour le Canada, mais 5 millions d'entre eux mourront prématurément du fait de fumer à moins qu'ils ne renoncent au tabac. Même si nous faisons de notre mieux au moyen des politiques conventionnelles antitabac, la prévalence du tabagisme diminue progressivement, mais lentement. La plupart de ces fumeurs sont vivants aujourd'hui, mais ils mourront avant que nos politiques puissent avoir une réelle incidence sur eux.
    Ce fardeau de mortalité et de morbidité échoit de façon prédominante aux personnes les plus défavorisées de la société, les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou issues d'autres groupes isolés de la société. Les cigarettes électroniques offrent une solution de rechange que bon nombre de ces personnes trouvent acceptable. Offrir l'option de passer aux cigarettes électroniques en tant que choix personnel a l'immense potentiel de rejoindre les fumeurs qui résistent aux autres approches d'abandon du tabac actuellement offertes. Un grand nombre de fumeurs au Royaume-Uni utilisent désormais les cigarettes électroniques de façon occasionnelle ou régulière, et près de 700 000 fumeurs sont passés aux cigarettes électroniques de manière exclusive, et ce, au cours d'une période de quatre ans. C'est donc beaucoup plus que ce que les services d'abandon du tabac de notre Service national de la santé ont réussi à réaliser pendant une décennie.
    Par conséquent, nous estimons que les cigarettes électroniques présentent d'importants avantages potentiels pour la santé et ce sont vraisemblablement les groupes les plus défavorisés qui vont en tirer le plus grand parti. Parmi les risques que comportent les cigarettes électroniques, mentionnons la renormalisation de l'usage du tabac, la sécurité à long terme, la réintégration de l'industrie du tabac comme acteur dans l'élaboration de la politique sur le tabac, l'utilisation de méthodes de marketing subtiles et voilées, la promotion du tabac auprès des enfants en vue d'en faire de futurs consommateurs et toute une panoplie d'autres risques. Bien que ce soit des risques préoccupants, nous estimons qu'ils peuvent tous être gérés et que ce serait une erreur que de jeter le bébé avec l'eau du bain en restreignant l'accès aux cigarettes électroniques de façon à priver les fumeurs actuels de leurs bienfaits.
(1205)
    Au pays, les cigarettes électroniques sont déjà utilisées par beaucoup plus de gens que les thérapies de remplacement de la nicotine conventionnelles. Selon un récent sondage qu'a mené Smoking in England auprès des fumeurs, la consommation diminue et on parle maintenant d'un fumeur sur cinq.
    En ce qui a trait aux avantages et aux inconvénients de la réglementation de ces produits, je peux seulement vous parler de la situation au Royaume-Uni, où ces produits ont jusqu'ici été réglementés dans le cadre de règlements généraux touchant la vente et qui n'exigent pas de démontrer leur efficacité. Par conséquent, un fumeur pourrait dépenser beaucoup d'argent pour ces produits sans toutefois n'absorber aucune nicotine. De plus, nous ne garantissons pas leur innocuité. Je pense que la plupart des gens trouvent qu'il s'agit d'une situation plutôt boiteuse. Des mesures législatives sont en cours d'élaboration, et on a récemment adopté des restrictions afin d'interdire leur vente aux enfants ainsi que leur promotion.
    La MHRA, notre agence de réglementation des médicaments et produits de santé, a reconnu que ces produits étaient une bonne chose pour la santé publique et ne les définit plus comme des médicaments, mais a plutôt adopté l'orientation « touche adéquate » pour offrir un processus simplifié de demande de licences pour la cigarette électronique. Je considère toutefois que cette façon de faire n'est pas efficace et que le système demeure extrêmement lourd.
    À partir de 2016 ou 2017, selon le produit, toutes les cigarettes électroniques seront visées par la Directive sur les produits du tabac de l’UE, qui imposera des limites aux émissions et à la dose de nicotine conformément à des normes qui n'ont pas encore été établies. Nous n'avons aucune idée de ce que cela impliquera, mis à part le fait qu'on limitera la teneur en nicotine à des niveaux tels que ces produits seront inefficaces. Ce cadre réglementaire est donc insatisfaisant et on n'a pas d'autre solution.
    Si je reviens au rapport du RCP, nous avons soutenu que la seule solution était de réglementer la nicotine de façon différente des autres produits, et que les produits qui contiennent ou ne contiennent pas de tabac devraient faire partie d'un système uniforme. Cela permettrait la libre commercialisation proportionnellement à la sécurité relative du produit. On rendrait les cigarettes extrêmement inabordables et difficilement accessibles, puis on assurerait un meilleur accès aux substituts à la nicotine. J'aimerais que ce soit le cas, mais je ne crois pas que c'est ce qui va se produire.
    En terminant, je considère qu'il est essentiel que les tendances en matière d'utilisation des cigarettes électroniques fassent l'objet d'une surveillance régulière, compte tenu de leur potentiel, de sorte que celles qui sont vraisemblablement néfastes pour la santé publique puissent être jugulées très tôt. À l'heure actuelle, au Royaume-Uni, parmi les fumeurs, comme je l'ai dit, 20 % utilisent les cigarettes électroniques exclusivement et 7 % l'utilisent de façon régulière ou occasionnelle. Chez les enfants et les jeunes, leur utilisation se limite presque entièrement aux fumeurs, avec peut-être 1 ou 2 % des jeunes qui ne fument pas mais qui veulent essayer le produit. En ce moment, on a l'impression que les cigarettes électroniques sont une très bonne chose pour le bien-être des Anglais, et nous espérons que cela continuera.
    Merci.
(1210)
    Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole au M. Peruga. Vous pouvez commencer, monsieur.
    Oui, nous vous entendons. Vous pouvez commencer.
    Je disais que c'est un honneur de pouvoir témoigner devant votre comité sur les inhalateurs électroniques de nicotine, communément appelés les cigarettes électroniques. Je témoigne aujourd'hui au nom de l'Organisation mondiale de la santé, en m'appuyant sur son rapport qui a été établi à la demande de la Conférence des Parties à la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l'OMS. Ce rapport a été présenté à la sixième session de la Conférence des Parties, qui s'est déroulée il y a à peine deux semaines. Une copie de ce rapport a été distribuée au comité en anglais et en français. Mon témoignage se fondera également sur la décision adoptée par la sixième session de la Conférence des Parties sur les inhalateurs électroniques de nicotine, qui a également été transmise au comité.
    Les inhalateurs électroniques de nicotine font l'objet d'une controverse de santé publique entre sincères partisans de la lutte antitabac, de plus en plus divisés à mesure que l'utilisation de ces produits augmente. Alors que certains experts sont favorables à ces produits, y voyant un moyen de réduire la consommation de tabac, d'autres considèrent qu'ils pourraient saper les efforts entrepris pour dénormaliser le tabagisme. Les inhalateurs électroniques de nicotine se situent donc sur une frontière mouvante entre promesses et menaces pour la lutte antitabac. Les inhalateurs électroniques de nicotine diffusent un aérosol par chauffage d'une solution que l'utilisateur inhale. Le principal composant de l'aérosol de par son volume, outre la nicotine lorsque celle-ci est présente, est le propylène glycol, auquel peuvent s'ajouter du glycérol et des aromatisants.
    Il existe sur le marché près de 500 marques d'inhalateurs électroniques de nicotine, qui utilisent des liquides présentés en près de 8 000 saveurs. Les transnationales du tabac ont pénétré sur le marché des inhalateurs électroniques de nicotine et certaines d'entre elles concurrencent âprement les sociétés indépendantes pour gagner des parts de marché. Les questions relatives à l'utilisation des inhalateurs électroniques de nicotine ont été réparties en trois catégories: les risques pour la santé des utilisateurs et des non-utilisateurs, l'efficacité en tant qu'aide au sevrage tabagique et, à terme, contre la dépendance à la nicotine, et l'interférence avec les mesures existantes de lutte antitabac et avec la mise en oeuvre de la Convention-cadre de l'OMS.
    Lorsqu'il est question des risques, il est important de savoir que les différences de voltage de la pile et de montage des circuits, de même que le type de solvant utilisé dans le liquide donnent lieu à d'importantes variations dans la nature de la toxicité des constituants et des émissions.
    Sur le plan des risques pour la santé, j'aurais trois choses à dire.
    Les éléments de preuve sont suffisants pour mettre en garde les enfants et les adolescents, les femmes enceintes et les femmes en âge de procréer contre l'utilisation d'inhalateurs électroniques de nicotine parce que l'exposition du foetus et de l'adolescent à la nicotine a des conséquences à long terme sur le développement du cerveau.
    Pour ce qui est des risques que présente l'inhalation chronique de substances toxiques en aérosol pour la santé des utilisateurs, étant donné l'arrivée relativement récente des inhalateurs électroniques de nicotine sur le marché et le long délai qui s'écoule avant l'apparition de nombreuses maladies à prendre en considération, comme le cancer, on ne disposera pas de données probantes sur l'association entre l'utilisation des inhalateurs électroniques de nicotine et ces maladies avant plusieurs années voire plusieurs décennies. Toutefois, une étude fondée sur les composés chimiques dans les liquides utilisés et l'aérosol produit par les inhalateurs électroniques de nicotine révèle qu'en moyenne, l'utilisation des inhalateurs électroniques de nicotine est à l'origine de plus faibles expositions à des substances toxiques que les produits combustibles, bien que certains inhalateurs puissent produire certains composés cancérogènes semblables à ceux produits par les cigarettes. Par conséquent, nous recommandons de réglementer les inhalateurs électroniques de nicotine de façon à minimiser les risques pour les utilisateurs et à empêcher leur utilisation par les non-fumeurs.
    Quant à l'inhalation passive d'aérosols pour la santé des non-utilisateurs, sachez que les tiers sont exposés à l'aérosol exhalé par les utilisateurs, lequel augmente la concentration de fond de certaines substances toxiques, de nicotine et de particules fines et ultrafines dans l'air. Néanmoins, la quantité de substances toxiques, de nicotine et de particules émises par un inhalateur électronique de nicotine est plus faible que dans les émissions d'une cigarette classique. On ignore si ces concentrations réduites dans l'aérosol exhalé vont de pair avec une diminution de l'exposition, comme il a été établi pour la nicotine. Bien que contenant moins de nicotine que la fumée de tabac secondaire, l'aérosol exhalé par l'utilisateur entraîne une absorption similaire, comme l'atteste la mesure de concentration similaire de cotinine dans le sérum. On ignore si l'augmentation accrue aux substances toxiques et aux particules présentes dans l'aérosol exhalé augmente le risque de morbidité et de mortalité chez les tiers comme le fait l'exposition à la fumée du tabac.
(1215)
    Cependant, les données épidémiologiques obtenues au moyen d'études environnementales montrent les effets nocifs de l'exposition à court comme à long terme aux particules, quelle qu'en soit la source. La fourchette inférieure des concentrations ayant des effets nocifs avérés pour la santé n'est pas très supérieure à la concentration de fond, ce qui signifie l'absence de seuil de nocivité et que les mesures de santé publique devraient viser les plus faibles concentrations possible. D'où notre recommandation de protéger les non-utilisateurs dans les locaux publics.
    En ce qui concerne l'inhalateur électronique de nicotine comme aide au sevrage tabagique, il semble, mais c'est anecdotique, qu'il ait amené une proportion indéterminée de ses utilisateurs à cesser de fumer; que son efficacité pour le sevrage soit limitée. Impossible, encore, de tirer des conclusions. D'où notre recommandation d'interdire les allégations santé non prouvées dont les inhalateurs font l'objet.
    En ce qui concerne les répercussions de l'inhalateur sur l'effort actuel de lutte antitabac, les motifs d'inquiétude sont multiples.
    D'abord, l'inhalateur pourrait constituer le premier pas vers le tabagisme et la dépendance à la nicotine chez les jeunes. La probabilité de survenue et l'importance de cet effet dépendront d'un jeu complexe de facteurs individuels, commerciaux et réglementaires, et elles sont très difficiles à prédire. On ne peut les évaluer qu'à l'aide de données empiriques qui, actuellement, sont limitées. Ces données montrent que les jeunes qui n'ont jamais fumé, mais qui vapotent, constituent 1 % de ce groupe d'âge dans les quelques pays sur lesquels on possède des données. Dans certains pays, cette proportion semble stable, tandis que dans au moins un pays, la Pologne, le vapotage ponctuel chez les jeunes de 15 à 19 ans qui n'ont jamais fumé est passée de 1,6 à 7,1 % en trois ans, tandis que le taux de vapotage habituel est passé de 0,6 à 2 %, pendant que le tabagisme augmentait notablement dans ce groupe d'âge.
    Ensuite, des sociétés productrices de tabac font un marketing agressif des inhalateurs électroniques de nicotine pour leur faire une place dans les ambiances sans fumée et ainsi contrer les politiques antitabac.
    Enfin, l'industrie du tabac, qui, simultanément, vend des cigarettes traditionnelles et des cigarettes électroniques pour dominer le marché des inhalateurs et préserver le plus longtemps possible le statu quo en faveur des cigarettes. L'intérêt traditionnel de l'industrie dans les produits du tabac sans fumée ailleurs que dans certains pays nordiques, produits auxquels on attribuait des avantages semblables à ceux de l'inhalateur électronique de nicotine s'expliquait parce que ces produits pouvaient servir, comme on peut le lire dans les documents de l'industrie, dans les milieux sans tabac et qu'on pouvait en faire la promotion auprès des jeunes non-fumeurs pour créer de nouvelles formes de consommation du tabac. Pendant tout ce temps-là, l'industrie prétendait que cela faisait partie du remède pour l'épidémie de tabagisme, parce qu'elle présente l'inhalateur comme la solution à l'épidémie qu'elle a elle-même créée.
    Après examen du rapport et délibérations prolongées de la Conférence des parties à la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, dans la semaine du 13 octobre 2014, les 179 parties ont décidé, à l'unanimité, d'accueillir le rapport de l'OMS, d'inviter les parties à en prendre soigneusement note et de demander à l'OMS une actualisation qu'elle devra présenter dans deux ans. Elles ont aussi invité les parties à envisager des mesures pour au moins atteindre les objectifs suivants conformément à leur droit national: d'abord empêcher que les non-fumeurs et les jeunes commencent à utiliser l'inhalateur, en veillant particulièrement aux groupes vulnérables; ensuite réduire le plus possible les risques potentiels pour la santé des vapoteurs et protéger les non-vapoteurs contre l'exposition à ces vapeurs; puis empêcher les allégations santé non prouvées sur les inhalateurs; enfin protéger les mesures antitabac contre tous les intérêts commerciaux et les autres intérêts particuliers dans l'utilisation des inhalateurs, y compris les intérêts de l'industrie du tabac. La conférence allait aussi inviter les parties à envisager l'interdiction ou la réglementation des inhalateurs électroniques de nicotine y compris à titre de produits du tabac, de produits médicinaux, de produits de consommation et de produits de toute autre catégorie, comme il conviendrait de le faire, en tenant compte d'un haut niveau de protection pour la santé humaine. Enfin, elle a recommandé vivement aux parties d'envisager l'interdiction ou la limitation de la publicité, de la promotion et du parrainage des inhalateurs, de même que d'en surveiller tous les aspects de leur utilisation.
    Merci de l'attention que vous m'avez accordée.
    Je serais heureux de répondre à vos questions sur les problèmes touchant... [Note de la rédaction: inaudible].
    Merci.
(1220)
    Merci beaucoup, messieurs, pour vos exposés.
    M. Kellway dispose de sept minutes pour poser les premières questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aussi, messieurs les témoins, d'être ici.
    C'était beaucoup d'information en très peu de temps.
    Petite demande de mise au point, monsieur Peruga, si vous permettez. Vos observations concernent les cigarettes électroniques qui renferment de la nicotine, n'est-ce pas? Est-ce que cela a constitué tout le sujet de vos observations?
    Non. Mes observations concernent aussi celles qui sont sans nicotine.
    D'accord. Est-ce que, pour les deux types de cigarettes, avec et sans nicotine, vous suivez la même démarche?
    Je suis désolé. Votre exposé ne m'a pas permis de distinguer les règlements qui s'appliqueraient à l'une et à l'autre. Faites-vous une distinction nette entre les règles que vous proposez pour les deux?
    Seulement pour les cigarettes électroniques contenant de la nicotine... On pourrait réglementer cet aspect, mais, quant au reste, c'est exactement la même chose, pour les deux types de cigarettes.
    D'accord.
    Si je vous ai bien compris, vous avez semblé dire que les faits permettant d'affirmer que la cigarette électronique remplace la cigarette ordinaire ne sont pas clairs.
    Effectivement. Les deux caractéristiques probantes sont leur toxicité: sont-elles moins toxiques ou d'une toxicité égale? Nous pensons qu'elles sont moins toxiques — dans certains cas extrêmement moins et, dans d'autres, pas tellement moins, avec une grande variabilité entre les marques et dans une même marque.
    Ensuite, en ce qui concerne, en plus, leur éventuelle efficacité pour remplacer la cigarette ordinaire ou d'autres produits combustibles, nous avons conclu que, actuellement, les données ne permettent pas de conclure de manière définitive.
    Merci.
    Monsieur Britton, votre enquête continue vous a permis de citer énormément de statistiques. Je me demande si elles vous diraient que la cigarette électronique remplace la cigarette ordinaire.
    Merci.
    Ce n'est pas mon étude continue. C'est celle de Robert West de l'University College de Londres. On peut la consulter en ligne si on fait une recherche sous « Smoking in England and the latest electronic cigarettes statistics », tabagisme, Angleterre, statistiques les plus récentes, cigarettes électroniques. Elle révèle, pour les deux ou trois dernières années, une augmentation progressive de l'usage chez les fumeurs, tant occasionnels que d'habitude. Les cigarettes électroniques ont en grande partie cannibalisé le marché des thérapies de remplacement de la nicotine en vente libre.
    Nous constatons que beaucoup plus de fumeurs utilisent un produit nicotineux. Si on regroupe thérapies de remplacement de la nicotine et cigarettes électroniques, on observe des taux accrus de cessation du tabagisme et un nombre accru de fumeurs qui essaient de cesser de fumer.
    Est-ce que cela répond à votre question?
(1225)
    Oui.
    À combien se chiffre cette augmentation?
    Eh bien, c'est difficile à dire, parce que c'est une étude continue qui porte sur quelques milliers de personnes. Une autre étude, publiée par Action on Smoking and Health au milieu de l'année, a donné un résultat semblable, c'est-à-dire que deux millions de fumeurs, un fumeur sur cinq, utilisent parfois la cigarette électronique et, parmi eux, 700 000, environ le tiers, avaient complètement remplacé la cigarette par la cigarette électronique. Ils ne fument donc plus.
    Pour 2013, nos statistiques sur le tabagisme — des chiffres préliminaires ont été publiés la semaine dernière — montrent une diminution de la prévalence, qui est passée de 19,9 à 18,6, je pense, ce qui est sa diminution annuelle la plus importante au cours des deux dernières décennies.
    Monsieur Britton, si je devais qualifier de désinvoltes vos observations sur les autres risques que comportent les cigarettes électroniques, y compris ceux que posent les constituants des vapeurs qu'elles émettent — je pense que vous avez dit que nous pouvions gérer ces risques — pouvez-vous vous expliquer? Est-ce votre volonté de neutraliser les effets négatifs qui vous amène à dire que les cigarettes ordinaires posent un problème plus grave et que, en conséquence, il faut s'y attaquer et laisser de côté ces risques à long terme?
    Je ne les mettrais pas complètement de côté. Je pense que j'ai notamment une opinion divergente de celle de mon collègue, c'est-à-dire que les risques posés par les cigarettes électroniques sont inconnus et qu'ils varient d'un produit à l'autre. Les produits de piètre qualité brûlent ou chauffent la nicotine de manière moins efficace et moins complète et produisent plus de toxiques que les produits de qualité qui, eux, posent un risque qui, bien qu'inconnu, est 10 ou 100 fois moins élevé que celui de la cigarette. Ce risque est négligeable par rapport à celui du tabagisme de tous les jours. La difficulté consiste à réduire au minimum possible ce risque. Comme il a été dit, il faudra des décennies avant que nous ne connaissions les vrais effets. Mais, pour réduire ce risque au minimum, en épurant les émissions autant qu'il est raisonnable...
    Je pense donc que le risque est très faible, je ne dirais pas négligeable, mais il faut relativiser.
    Merci beaucoup.
    Les sept prochaines minutes appartiennent à M. Wilks.
    Je remercie les deux témoins pour leur témoignage.
    Pour commencer, monsieur Britton, en ce qui concerne un rapport commandé par le ministère de la Santé publique d'Angleterre, auquel vous avez participé en mai dernier, permettez que je vous interroge à ce sujet. Vous dites dans ce rapport:
Les cigarettes électroniques et autres inhalateurs de nicotine offrent un vaste éventail d'avantages potentiels pour la santé, mais, pour maximiser ces avantages et réduire au minimum les préjudices et les risques pour la société, il faut une réglementation judicieuse, un suivi attentif et une bonne gestion des risques. Il ne faut toutefois pas rater l'occasion qu'ils présentent d'intégrer ce dispositif à la politique de santé publique, afin de compléter l'arsenal existant de politiques de lutte contre le tabac.
    D'après-vous, quels avantages potentiels pour la santé offrent les cigarettes électroniques actuelles? Quelles modifications aux régimes réglementaires seraient nécessaires, le cas échéant, pour les maximiser?
    Désolé, quelle était la première question?
    D'après-vous, quels avantages potentiels pour la santé offrent les cigarettes électroniques actuelles?
    Les avantages actuels sont innombrables, parce que le cancer du poumon, la bronchopneumopathie chronique obstructive et les maladies cardiovasculaires sont les trois principales causes de mortalité dues au tabagisme. Ces maladies sont, pour autant que nous le sachions, causées presque entièrement par les autres constituants du tabac que la nicotine. Je ne dis pas que la nicotine est complètement inoffensive, mais ce n'est pas le principal agent nocif du tabac. Les avantages de la cigarette électronique font que si tous les fumeurs de Grande-Bretagne délaissaient la cigarette pour le vapotage, l'incidence de ces maladies diminuerait de façon spectaculaire — celle des maladies du coeur dans un avenir très rapproché, celle du cancer du poumon et de la bronchopneumopathie dans un avenir plus lointain.
(1230)
    J'ai une question touchant un membre de ma famille qui est fumeur, mon charmant fils, qui s'est mis au vapotage à la maison. Il est militaire et quand, pendant un exercice, il ne peut pas recharger sa cigarette électronique, il s'achète des cigarettes ordinaires, parce qu'il ne peut pas encore se passer de la nicotine. Voici donc ma question, messieurs Britton et Peruga.
    Est-ce que nous remplaçons vraiment un produit par l'autre? Il me semble à moi, personnellement, qu'on peut simplement remplacer l'un par l'autre. Je comprends les avantages potentiels, je les vois. Mais comment mettre fin à une double toxicomanie, faute d'un meilleur terme, à l'égard de deux substances différentes? Comment y mettre fin?
    Répondez de votre mieux, monsieur Peruga. J'entendrai ensuite M. Britton.
    Votre question est très intéressante et elle touche au coeur du problème. L'avantage potentiel sera maximal quand l'immense majorité des fumeurs aura entièrement adopté la cigarette électronique. C'est alors que les possibilités deviendront importantes.
    Nous percevons un problème, du moins dans la recherche qui a été publiée sur les essais cliniques, qui montre que les cigarettes électroniques sont d'une efficacité très limitée... Cela ne correspond pas à un ensemble de preuves, mais certaines données montrent leur faible efficacité, ce qui, essentiellement conduit à un double emploi chez la plupart des fumeurs. Il est difficile de savoir si c'est bon ou mauvais, parce que, manifestement, vous pouvez faire valoir que, si on fume deux cigarettes de moins par jour, c'est un avantage. Le problème est délicat, et il est difficile d'y répondre, mais il faut se poser encore deux autres questions.
    D'abord, nous savons que l'avantage maximal qui découle du sevrage tabagique n'est pas nécessairement la réduction de la quantité consommée de tabac. Le risque diminue principalement du fait de la durée de la consommation et non de la quantité consommée. C'est donc préoccupant. Je ne dis pas que c'est le seul facteur dont il faille tenir compte, mais si le tabagisme persiste, cela signifie que l'avantage potentiel de la cigarette électronique est considérablement diminué.
    Ensuite, que signifie cette double consommation? Je pense que nous pouvons convenir que le but final est visiblement l'abandon total du tabac pour l'adoption de l'inhalateur électronique de nicotine et, si c'est possible, la fin de la dépendance à la nicotine. Il n'est pas sûr que la double consommation permette d'atteindre cet objectif à long terme ou qu'elle offre la possibilité de revenir au tabagisme.
    Je suis désolé du fait que, en ce moment, j'ai plus de questions que de réponses, mais c'est effectivement un problème très important.
    Merci.
    Monsieur Britton.
(1235)
    Je dirais que votre fils n'a pas de dépendance à l'égard de deux produits. Il est dépendant d'un produit, la nicotine, et il la trouve là où il peut. Plus les sources de nicotine de rechange sont nombreuses, le mieux c'est pour lui.
    Être fumeur, c'est comme être pris dans une discothèque où un incendie se déclare. On a besoin d'autant d'issues de secours que possible, peu importe celle qu'on utilise.
    Cependant, la double consommation est répandue pour ces produits, tout comme pour la nicotine médicinale. Nous savons, et le British National Institute for Health and Care Excellence l'a validée dans son guide sur la réduction des effets nocifs, que les doubles consommateurs sont beaucoup plus susceptibles de réussir leur sevrage complet que les fumeurs qui n'ont jamais essayé d'autre produit nicotineux. L'avenir s'annonce donc meilleur pour votre fils: il cessera de fumer, mais cela peut lui prendre une année ou deux pour y parvenir. C'est la réalité.
    L'atout de la cigarette électronique est d'amener des personnes comme votre fils à essayer des produits nicotineux, alors que dans d'autres circonstances elles ne le feraient pas. L'historique des thérapies de remplacement de la nicotine montre qu'elles sont utilisées par une petite minorité de fumeurs, tandis que les cigarettes électroniques sont utilisées par une proportion beaucoup plus forte d'entre eux.
    Merci beaucoup.
    Madame Fry.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de bien vouloir répondre à nos questions.
    J'aimerais d'ailleurs en poser quelques-unes. Je pense que l'argument que nous n'avons effectivement pas entendu, c'est-à-dire si la cigarette électronique peut conduire la plupart des fumeurs de cigarettes au sevrage, l'Organisation mondiale de la Santé l'a clairement prononcé, monsieur Peruga. Ce n'est pas encore prouvé, bien que, dans votre rapport, vous disiez que le seul effet décelé était une augmentation de l'utilisation de ces cigarettes chez des personnes qui, jusque-là, ne fumaient pas, en Pologne.
    Voici la question que je tiens à vous poser. Comme vous le savez, les médecins, normalement, quand ils essaient de faire perdre leur habitude à des fumeurs, utilisent des timbres, de la gomme, etc. à la nicotine. Il s'agit donc, dans ce cas, de nicotine. Dans un souci de clarté, si on ne dispose pas d'une source combustible de nicotine, comme une cigarette, avec le goudron, les benzopyrènes et tous ces cancérogènes et agents de la bronchopneumopathie chronique obstructive, etc., quel est, intrinsèquement, le risque que pose la simple dépendance à la nicotine?
    Je peux répondre en premier si vous voulez.
    D'accord, monsieur Britton. Allez-y.
    Les essais cliniques ont démontré que la nicotine n'est pas particulièrement dangereuse. Elle n'est pas associée à un risque accru de maladies cardiovasculaires. Ses effets sur le corps humain sont probablement similaires à ceux de la caféine.
    Les preuves que nous détenons des dangers que comporte l'utilisation à long terme de la nicotine sans combustion sont tirées d'une étude qui a été menée en Suède auprès de personnes qui consommaient exclusivement du tabac sans fumée. Ces personnes peuvent présenter un risque accru de cancer de l'oesophage et du pancréas, quoique cela peut très bien être attribuable aux nitrosamines présentes dans le tabac qu'elles avalent.
    Par contre, les risques pour les autres maladies — cancer du poumon, MPOC et maladies cardiovasculaires — ne sont pas considérablement plus grands. Dans le cas des maladies cardiovasculaires, le risque est légèrement plus élevé. En ce qui concerne la MPOC et le cancer du poumon, on n'a rien observé.
    Je crois alors qu'on peut conclure que les dangers de la consommation régulière de nicotine pour les personnes en bonne santé sont pratiquement négligeables.
    Merci.
    Monsieur Peruga, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je suis d'accord avec M. Britton à bien des égards. Quant aux risques que pose la nicotine, je peux dire que ce n'est pas cette substance qui peut vous tuer. Cependant, j'estime que les recherches sur la nicotine n'ont pas été assez approfondies pour certains aspects.
    Nous savons que la nicotine semble favoriser légèrement la formation de tumeurs, mais la principale préoccupation, je dirais, comme l'a indiqué le Surgeon General dans son rapport publié cette année, c'est l'accès à la nicotine dont disposent les jeunes qui sont dans une période de leur vie où le système neurologique, particulièrement le cerveau, n'est pas entièrement développé. Il peut alors y avoir des effets sur le développement de leur cerveau, qui peuvent entraîner des problèmes tels que des troubles d'apprentissage. Dans son rapport, le Surgeon General des États-Unis souligne qu'il s'agit d'une importante préoccupation. C'est pourquoi les inquiétudes à l'égard de la nicotine visent les jeunes principalement — et, bien entendu, les femmes enceintes — et pas nécessairement les adultes.
(1240)
    Pourrait-on modifier la réglementation afin d'imposer un âge minimal pour obtenir toute forme de nicotine, et particulièrement les cigarettes électroniques? Il y aurait donc un âge minimal pour les jeunes prévu dans la réglementation.
    Puis-je répondre?
    Je conviens avec M. Peruga que personne ici ne voudrait que ses propres enfants ou les enfants de qui que ce soit d'autre consomment de la nicotine, mais je ne connais pas le taux de tabagisme chez les jeunes au Canada. Chez nous, parmi les personnes âgées de 24 ans, 40 % ont déjà fumé et environ 25 % sont des fumeurs réguliers. Les enfants qui proviennent de milieux défavorisés, où il y a des fumeurs à la maison, sont exposés à des quantités élevées de nicotine à des étapes très importantes du développement de leur cerveau. Si on pouvait remplacer les produits de nicotine nocifs, c'est-à-dire le tabac, par des produits de nicotine moins nocifs, ce serait l'idéal.
    Bien que je sois entièrement d'accord avec l'idée d'imposer un âge minimal pour les jeunes, surtout si des jeunes vont fumer de toute façon, il me semble beaucoup plus logique qu'ils utilisent la cigarette électronique.
    Puis-je poser une autre question? Serait-il possible de mettre en place un règlement qui interdirait aux compagnies de tabac de fabriquer des cigarettes électroniques? Est-ce que cela serait possible? Autrement dit, comment peut-on les empêcher de tirer profit d'un produit qui s'adresse à une toute nouvelle génération d'utilisateurs?
    Je crois que la réponse à cette question dépend vraiment de l'objectif que vous voulez atteindre. Si votre but est d'empêcher l'industrie du tabac de faire davantage de profits, alors ce pourrait être la chose à faire. Si votre objectif est d'empêcher les gens de fumer la cigarette, alors il faut viser les produits, et non pas les fabricants.
    Je partage un grand nombre des préoccupations de M. Peruga à l'égard de l'industrie du tabac. Je ne fais pas l'apologie de cette industrie, mais je pense qu'il faut se rappeler que notre objectif est de prévenir les décès prématurés chez les fumeurs, et non pas de mener les compagnies de tabac à la faillite. Peu importe qui fabrique les produits, tout ce qui compte pour moi c'est qu'ils fonctionnent.
    Cependant, je dois dire qu'il serait naïf de penser que le produit et le fabricant sont deux éléments tout à fait distincts. La façon de gérer les différents produits fait partie de la stratégie de l'industrie du tabac. Le fabricant et le produit sont deux éléments étroitement liés à bien des égards.
    Merci.
     Madame Adams, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Le taux de tabagisme au Canada n'a jamais été aussi bas. Nous sommes passés de 22 % à 16 % au cours de la dernière décennie.
    Nous sommes bien entendu particulièrement préoccupés par le tabagisme chez les adolescents, car s'ils commencent à fumer à cette période, ils risquent fort de demeurer des fumeurs pour le reste de leur vie. Toutefois, le taux de tabagisme chez les adolescents n'a également jamais été aussi bas. Il se situe seulement à 7 %. Chez les Canadiens âgés de 15 à 17 ans, seulement 7 % sont des fumeurs. Je crois qu'à l'échelle internationale, nous sommes un chef de file, notamment parce que nous avons banni les cigarettes aromatisées et que nous interdisons aux compagnies de tabac de faire de la publicité qui s'adresse directement aux enfants.
    J'aimerais revenir sur la préoccupation soulevée par mes collègues d'en face à propos de l'utilisation de la cigarette électronique, avec ou sans nicotine, dans les endroits publics. J'ai deux points à faire valoir. Premièrement, même si la cigarette électronique contient de la nicotine, cela ne me préoccupe pas beaucoup, car il y a une diminution considérable de l'utilisation des cigarettes régulières, et ce que les Canadiens devraient souhaiter, pour eux-mêmes et pour leurs enfants, c'est de vivre dans un milieu sans fumée.
    Par ailleurs, il faudrait que le tabagisme ne fasse plus partie de la normalité. Les enfants sont particulièrement sensibles aux comportements qu'ils observent... On se souvient de cette époque où, dans les films, fumer était à la mode. De même, il semble normal que dans un restaurant, un endroit public ou un milieu de travail les gens fument une cigarette électronique, avec ou sans nicotine. Je crois que cela envoie un très mauvais message aux jeunes, et je pense que fumer ne devrait pas être perçu comme étant normal.
    Je crois qu'il s'agit là par contre d'une toute autre discussion que celle sur la question de savoir si nous voulons offrir aux adultes des cigarettes électroniques avec nicotine. J'espère qu'en tant que pays, nous pourrons encourager ceux qui interdisent la cigarette à interdire également toutes les cigarettes électroniques, avec ou sans nicotine, parce que je crois que nous voulons véritablement protéger les adolescents et nous assurer qu'ils ne commencent pas à fumer.
    Auriez-vous un commentaire à formuler au sujet des cigarettes électroniques avec nicotine, car nous voulons nous assurer d'avoir un environnement sans fumée? Actuellement, au Canada, il est interdit de fumer dans les lieux publics. On ne peut pas tout simplement se mettre à fumer dans un restaurant. Cela m'inquiète grandement que vous affirmiez qu'il n'y a pas beaucoup de danger. Pouvez-vous en dire un peu plus long à ce sujet?
(1245)
    Le Canada a en effet mis en place des politiques de contrôle du tabagisme qui font l'envie du reste du monde. Votre pays, à l'instar d'un ou deux autres, a très bien réussi à réduire la prévalence du tabagisme. Vous êtes une source d'inspiration.
    En Grande-Bretagne, il est interdit de fumer dans tous les endroits publics fermés et les milieux de travail. Nous n'avons toutefois pas encore adopté de loi interdisant l'utilisation de la cigarette électronique dans ces endroits.
    Comme vous l'avez fait remarquer, il y a deux éléments. D'un côté, nous voulons protéger nos enfants, mais d'un autre côté, en les exposant à la fumée des fumeurs à l'extérieur des immeubles et dans la rue, on se trouve à normaliser ce comportement, et lorsqu'ils voient des utilisateurs de cigarette électronique, ils considèrent cela également comme un comportement normal. Je ne souhaite pas que les enfants aspirent à devenir des utilisateurs de cigarettes électroniques, mais je préfère de loin qu'ils aspirent à cela qu'à devenir des fumeurs de cigarettes ordinaires.
    Je crois qu'il est difficile de trouver un juste équilibre. Selon moi, au Royaume-Uni, là où la cigarette est interdite, il faudrait également interdire la cigarette électronique, mais cela devrait procéder de la courtoisie plutôt que de la législation.
    Il y a certains cas où l'utilisation de la cigarette électronique à l'intérieur devrait être permise. Je donnerais comme exemple certains départements des hôpitaux — notamment les départements de santé mentale, car, en Grande-Bretagne, la prévalence du tabagisme chez les personnes atteintes de maladie mentale est très élevée — et aussi des lieux comme ma propre clinique. En tant que pneumologue, je sais que mes patients se cachent pour utiliser la cigarette électronique parce qu'ils savent que son utilisation à l'intérieur est interdite. Je crois qu'il faut prévoir des exceptions, plutôt que d'obliger les patients à sortir dehors avec leur solution intraveineuse pour fumer sous la pluie.
    Vous avez mentionné tout à l'heure que l'Europe s'apprête à mettre en oeuvre un règlement visant les cigarettes électroniques. Vous avez affirmé que vous ne savez pas exactement quelle sera la concentration de nicotine permise. Pouvez-vous me recommander certains documents qui ont été pris en compte?
    La directive sur les produits du tabac a été publiée plus tôt cette année. Vous pouvez la trouver en effectuant une recherche sur la directive des produits du tabac de l'Union européenne. M. Peruga connaît peut-être mieux que moi le contenu de ce document.
    Je ne me souviens pas quelle était la concentration maximale de nicotine permise, mais je sais qu'elle était extrêmement faible.
    Je veux simplement ajouter que, dans la directive sur les produits du tabac, on fait une distinction entre les produits. Les produits qui contiennent jusqu'à 20 milligrammes par millilitre de nicotine sont régis par la loi sur le contrôle des produits du tabac. Les produits qui contiennent au-delà de 20 milligrammes par millilitre de nicotine devraient être considérés comme des produits médicinaux et être réglementés comme tels. C'est ce que précise la directive sur les produits du tabac.
    Merci.
    À votre connaissance, quelles sont les pratiques exemplaires concernant la vente de cigarettes électroniques? Au Canada, par exemple, même nos dépanneurs sont assujettis à une réglementation. Ils ont l'obligation de demander une pièce d'identité. Il faut être âgé de plus de 18 ans pour acheter des cigarettes.
    Quelles sont les pratiques exemplaires que vous connaissez à l'échelle internationale concernant les cigarettes électroniques?
    Si je peux répondre en premier, je dirais que c'est très similaire... C'est difficile, car, comme je l'ai déjà affirmé, je préfère que les adolescents expérimentent avec la cigarette électronique plutôt que la cigarette ordinaire. En même temps, je pense qu'il faut interdire la vente aux personnes âgées de moins de 18 ans. En Angleterre, on s'apprête à adopter une loi en ce sens.
    Il faut dire que, jusqu'à maintenant, si on fait exception de la Pologne, où, comme M. Peruga l'a mentionné, on a observé une hausse de 60 % du tabagisme sur une période de trois ans — qui est un taux plus élevé que je pourrais croire, car les échantillons ne provenaient pas des mêmes sources à chaque fois — l'accessibilité de la cigarette électronique n'a pas entraîné une énorme hausse de son utilisation chez les jeunes qui ne sont pas des fumeurs.
    Il est logique qu'il y ait des restrictions, mais je me demande si elles sont nécessaires.
(1250)
    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Davies.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Premièrement, je tiens à dire que j'ai trouvé très intéressant d'entendre vos points de vue.
    J'aimerais m'adresser à M. Britton pour discuter du Royaume-Uni. Je crois qu'il y a beaucoup de mythes au sujet des dépendances. D'après ce que j'ai lu, l'une des dépendances les plus importantes et les plus courantes est la dépendance à la caféine, comme vous l'avez laissé entendre. En effet, le sevrage de la caféine est extrêmement ardu, comme vous pouvez le savoir si vous en avez fait l'expérience. La consommation de caféine fait tellement partie de notre culture que nous n'en parlons pratiquement pas.
    J'aimerais vraiment savoir comment s'est déroulé le débat en Grande-Bretagne sur la scène politique. Vous parlez de réduire les méfaits, de minimiser les risques et vous affirmez que les cigarettes électroniques valent mieux que les cigarettes régulières. Pourtant, dans le débat actuel, on se montre très craintifs à l'égard d'une approche de réduction des méfaits. Ce terme est presque devenu péjoratif. On revient toujours à la tolérance zéro et à la prohibition, ce qui, à mon avis, ne peut que mener au chaos. On fait valoir qu'il s'agit de la meilleure approche, mais je n'en suis pas convaincue.
    Je me demande seulement comment s'est déroulé le débat sur la scène politique. Vous avez parlé de deux gouvernements différents qui ont adopté cette approche. Quel genre de débat a eu lieu au Royaume-Uni en ce qui concerne la cigarette électronique et l'approche de réduction des méfaits?
    Je crois que chez nous le débat a été et continue d'être... Je présente mes opinions, mais je ne parle pas au nom du Royaume-Uni; je m'exprime en mon nom. Bien des arguments ont été présentés. L'un d'eux est que la dépendance est une mauvaise chose, et comme vous l'avez laissé entendre, on entend souvent cet argument au sujet de la caféine. On a fait valoir également qu'il ne s'agit pas d'un produit élaboré par des médecins. Il ne s'agit pas d'un produit mis au point par une compagnie pharmaceutique en vue de traiter une maladie. Il s'agit plutôt d'un phénomène social. Comme ce n'est pas un produit élaboré par les médecins, alors on assume que ce n'est pas très bon.
    Il y a aussi l'opposition à l'industrie du tabac, que je comprends entièrement, mais c'est une cible secondaire plutôt que primaire. On s'inquiète beaucoup du fait qu'il s'agit de la porte d'entrée du tabagisme. Ces arguments ont été invoqués et continuent de l'être. En raison de la publication du rapport du RCP en 2007, je crois que ces arguments ont été invoqués en Grande-Bretagne un peu plus tôt qu'ils ne l'ont été dans d'autres pays.
    Il faut dire qu'il y a jusqu'à environ deux ans, on ne pouvait pas discuter de la réduction des méfaits sans se demander si le snus suédois est bon ou mauvais. Maintenant, on se demande si la cigarette électronique est bonne ou mauvaise. Je vous ai déjà donné mon avis à ce sujet.
    Seulement pour aller un peu plus loin, pouvez-vous me dire si vous prévoyez qu'un jour en Grande-Bretagne les cigarettes seront interdites et remplacées complètement par les cigarettes électroniques?
    Comme vous l'avez laissé entendre tout à l'heure, interdire quoi que ce soit, particulièrement un produit qui crée une dépendance, est très risqué. J'aimerais croire que, dans les prochaines années, disons dans une dizaine d'années environ, les cigarettes régulières seront hors de prix pour la grande majorité des gens et qu'elles seront donc moins accessibles. Il ne s'agit donc pas de les interdire. Il faut faire le choix évident et opter pour les cigarettes électroniques, ou à tout le moins ce qui va les remplacer. Il s'agit d'un secteur qui évolue très rapidement, et, dans trois ou cinq ans, on ne parlera pas des produits dont on parle aujourd'hui.
(1255)
    J'étais à l'aéroport récemment et je suis allée à la boutique hors-taxe. J'ai été abasourdie par le prix d'une cartouche de cigarettes, même exempte de droits. Je ne me souviens plus de la marque, mais je ne pouvais pas le croire; c'était très cher. Le coût est donc évidemment un élément dissuasif. A-t-on mené des recherches pour déterminer si les gens prennent leur décision davantage à cause de prix ou de leur santé, ou bien si les deux facteurs entrent en ligne de compte? Est-ce que l'un est plus important que l'autre?
    Je suis désolé, mais pour respecter le temps, je vais vous demander de répondre brièvement. Je vais ensuite donner la parole à M. Lunney.
    Actuellement, la plupart des personnes qui passent à la cigarette électronique en Grande-Bretagne le font pour des raisons de santé, quoique le prix est un facteur qui pèse dans la balance. Le prix est un élément important en ce qui a trait à la consommation de tabac, mais ce qui compte, c'est le prix des produits du tabac les plus économiques, et non pas la moyenne des prix. En Grande-Bretagne, la moyenne est très élevée, mais les produits les plus économiques demeurent très abordables.
    Merci.
    Monsieur Lunney, la parole est à vous.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs, je vous remercie de contribuer aujourd'hui à notre discussion.
    On s'inquiète grandement du fait qu'il s'agit d'un inhalateur non seulement de nicotine, mais aussi de toutes sortes de produits chimiques. Je pense que nous faisons preuve de naïveté si nous pensons que les jeunes vont se contenter d'y mettre uniquement de la nicotine. Dans Internet, on peut facilement trouver comment préparer sa propre marijuana à partir de marijuana séchée mélangée à du propylène glycol et la consommer à l'aide de ces inhalateurs. De cette façon, l'odeur habituellement associée à la marijuana ne se dégage pas. Le Canada est très préoccupé par ce phénomène. Toute une gamme de produits chimiques toxiques pourraient très bien être utilisés et dont nous connaissons ou non les effets. Est-ce que cela fait partie de la discussion? Nous n'en avons pas parlé avec vous jusqu'à maintenant.
    En Europe, notamment à l'OMS, y a-t-il des discussions au sujet de l'utilisation d'autres produits dans ces inhalateurs électroniques?
    Il s'agit en effet d'une préoccupation, car ces dispositifs peuvent être utilisés avec bien d'autres drogues. Toutefois, il est très difficile à ce stade-ci d'évaluer l'importance de ce comportement. Il faut penser qu'ils peuvent faire la même chose avec beaucoup d'autres dispositifs, pas seulement les cigarettes électroniques. La question de la consommation d'autres drogues, dans ce cas-ci illégales, à l'aide des dispositifs vendus légalement comme les cigarettes électroniques exige une approche plus vaste en matière d'application de la loi.
    Ce n'est pas seulement un problème associé à la cigarette électronique. Par contre, il peut être aggravé par le fait que ce produit est maintenant considéré comme très normal, du moins dans certains pays, et il peut par conséquent passer par inadvertance pour un autre produit, dans le contexte de l'application de la loi portant sur l'utilisation de drogues illégales.
    Ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas un problème qui concerne uniquement la cigarette électronique.
    Monsieur Britton.
    Je suis d'accord. Les jeunes vont trouver des moyens de consommer des drogues qu'ils ne devraient pas consommer, peu importe ce que nous disons ou faisons. Il s'agit d'un autre problème que nous n'avons pas beaucoup examiné.
    J'ai une dernière question à poser. Vous avez parlé de la cytotoxicité lorsque vous avez abordé l'étude de l'OMS. C'est lié à la concentration des arômes dans le liquide.
    Monsieur Peruga, pouvez-vous nous donner une brève explication?
    Oui. Quelques études ont été menées sur le sujet. Il n'y en a pas eues beaucoup, mais on a réussi à prouver qu'en chauffant certains de ces arômes, ce qu'on appelle la décomposition thermique, on libère des produits cytotoxiques. C'est ce qui se produit, mais il est très difficile d'évaluer exactement dans quelle mesure ces produits ont un effet sur la santé.
    J'ai mentionné cela par-dessus tout pour souligner qu'il y a des préoccupations à propos des produits toxiques et cytotoxiques dont il faudrait tenir compte, particulièrement, comme M. Britton l'a mentionné, quand vient le temps de réglementer ces produits en vue d'en maximiser les bienfaits et d'en minimiser les méfaits.
    Cela peut se faire uniquement par la réglementation. C'est pourquoi l'OMS a recommandé notamment de minimiser les méfaits en ayant recours à la réglementation et non à des directives volontaires.
(1300)
    Je vous remercie beaucoup. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de comparaître devant nous, car nous savons que vous êtes très occupés. Vos commentaires et les renseignements que vous nous avez fournis nous ont été utiles. Je vous remercie beaucoup encore une fois au nom de tous les membres du comité.
    La séance est levée.
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