Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Comme vous le savez, la présidente élue, Mme Smith, a démissionné aujourd'hui, ce qui crée une vacance au poste de président du comité. Sans surprise, votre première tâche aujourd'hui sera d'élire un nouveau président du Comité permanent de la santé.
[Traduction]
Je tiens à vous rappeler que le Règlement stipule que le président doit être un député du parti ministériel.
Je suis maintenant disposé à recevoir des motions pour le poste de président.
Tout d'abord, félicitations pour votre accession à la présidence.
Je souhaite proposer une motion pour qu'une lettre de remerciement soit envoyée à Mme Joy Smith au nom de tout le comité. Je sais qu'elle a travaillé longtemps au sein de ce comité et aussi en tant que présidente. Ce serait bien de lui envoyer une lettre pour la remercier pour toutes ses années de service et pour l'intérêt qu'elle a porté au comité.
Je tiens à vous féliciter pour votre nouvelle fonction de président.
Je veux aussi dire que je suis d'accord avec la motion de Mme Davies, que je seconde, en ce qui concerne Joy Smith, qui a passé de nombreuses années au sein de notre comité. Si l'on pouvait lui envoyer ça dans une lettre ou d'une autre façon, ce serait parfait.
Le greffier et moi allons préparer une lettre. Nous la distribuerons aux membres du comité pour qu'ils l'examinent et donnent leur aval, puis nous l'expédierons à Mme Smith.
Bonjour, mesdames et messieurs.
Nous avons tout un programme aujourd'hui. Nous entendrons les témoignages de quatre groupes distincts. Comme vous le savez — je suis sûr qu'on vous l'a dit — vous disposez de 10 minutes chacun pour faire votre exposé. L'exposé se fera sans interruption. Lorsque les 10 minutes prévues seront presque écoulées, je lèverai la main pour vous l'indiquer. Mais je suis convaincu que vos notes ont été préparées pour que vous arriviez à 10 minutes pile.
Nous commencerons par le ministère de la Justice. Nous accueillons donc M. Saint-Denis et Mme Goldstone. Que celui qui présente commence.
Étant donné que le ministère de la Justice du Canada dirige la Stratégie nationale antidrogue, je suis heureuse d'être ici aujourd'hui, à titre de chef par intérim, pour vous dire quelques mots au sujet de cette stratégie.
La Stratégie nationale antidrogue a pour but de contribuer à l’instauration de collectivités plus saines et plus sécuritaires grâce à des mesures coordonnées de prévention de la consommation de drogues illicites, de traitement de la dépendance et de réduction de la production et de la distribution de drogues illicites. La stratégie procède de l'effort concerté de 12 ministères et organismes partenaires fédéraux et est dotée d'un budget de 515,9 millions de dollars réparti sur un cycle quinquennal débuté en 2012 et se terminant en 2017.
[Français]
La stratégie comprend 22 programmes, dont la prestation est assurée au moyen de trois plans d'action, de prévention et de traitement gérés par Santé Canada. L'application de la loi, quant à elle, est gérée par Sécurité publique Canada.
[Traduction]
La stratégie porte principalement sur les drogues désignées illégales aux termes de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Depuis que la stratégie a été lancée, en 2007, le mauvais usage des médicaments sur ordonnance est devenu un important problème de santé et de sécurité publiques, ce qui se traduit par une augmentation des problèmes de dépendance, des surdoses, des décès et de la criminalité.
Les médicaments sur ordonnance consommés à mauvais escient proviennent souvent de l'armoire à pharmacie d'un ami ou d'un parent. Ils sont aussi détournés des voies légitimes et distribués par l'entremise de réseaux qu'utilisent habituellement les organisations illicites, c'est-à-dire le crime organisé. Les médicaments sur ordonnance sont dérobés à l'occasion de vols à main armée et de cambriolages dans les pharmacies; on se les procure en fraudant le système de santé — en sollicitant des ordonnances multiples auprès de différentes médecins ou en falsifiant des ordonnances —, en les achetant de particuliers qui tirent avantage des marchés lucratifs de la rue ou en profitant de leur vente illégale sur Internet.
Bien que la lutte au mauvais usage des médicaments sur ordonnance fasse déjà partie du mandat de certains ministères fédéraux, les pouvoirs stratégiques doivent être élargis afin que l'argent prévu pour la Stratégie nationale antidrogue puisse être utilisé pour s'attaquer à cet important problème.
Dans son dernier discours de Trône, le gouvernement du Canada s'est engagé à élargir les pouvoirs stratégiques de la SNA, la Stratégie nationale antidrogue, pour englober la lutte au mauvais usage des médicaments d'ordonnance. En outre, le besoin d'intervenir semble faire l'objet d'un fort consensus des parties concernées, dont les organisations des Premières Nations, les communautés du monde médical et de la recherche, celles du milieu pharmaceutique et les organismes responsables de l'application des lois.
Je n'ai pas d'exposé proprement dit. Si vous avez des questions de droit criminel ou en ce qui concerne les délits et les sentences en lien avec la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, je ferai de mon mieux pour y répondre.
D'accord. C'est donc la fin de votre exposé. Merci beaucoup pour votre brièveté. Cela nous permettra de poser plus de questions à la fin.
Accueillons maintenant des gens du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile: M. Bhupsingh — pardonnez-moi si ma prononciation laisse à désirer — et, avec lui, Mme Goguen.
J'aimerais remercier le président et les membres du comité de m'avoir invité à vous entretenir des abus de médicaments d'ordonnance et de leurs répercussions sur la sécurité publique.
Mon ministère est responsable du Plan d’action sur l’application de la loi, lequel fait partie de la Stratégie nationale antidrogue du Canada. Cette responsabilité signifie que nous devons travailler en étroite collaboration avec divers partenaires, dont la Gendarmerie royale du Canada, le ministère de la Justice et Santé Canada, afin de veiller à ce que les interventions du gouvernement fédéral soient coordonnées en ce qui a trait à la lutte antidrogue et, en particulier, en ce qui a trait aux opérations de culture de marijuana et aux laboratoires clandestins qui produisent des drogues synthétiques telles que l'ecstasy.
(1540)
[Traduction]
Dans le cadre de ce rôle, Sécurité publique Canada a continuellement tenté de régler les problèmes nouveaux et émergents liés aux drogues, qui ont des répercussions sur la sécurité publique. Au fil des dernières années, il est devenu de plus en plus évident que la consommation illicite de médicaments d'ordonnance est un problème de sécurité majeur au Canada.
Du point de vue de l'application de la loi, la criminalité associée à l'abus de médicaments d'ordonnance comprend l'utilisation frauduleuse du système de santé, les vols qualifiés de pharmacies, la conduite avec facultés affaiblies et les activités liées au trafic de drogues traditionnel, qu'elles soient menées par des membres du crime organisé ou par des personnes qui tirent profit des marchés lucratifs de la rue. En parallèle, ces médicaments « licites » mettent à rude épreuve les méthodes traditionnelles visant à réduire l'approvisionnement.
Au fil des ans, Sécurité publique Canada a travaillé avec le Comité sur l'abus des drogues de l'Association canadienne des chefs de police afin de faire de la sensibilisation au sujet de ce sérieux problème qui touche nos collectivités. Comme un grand nombre d'entre vous le savent, la consommation illicite ou abusive de produits pharmaceutiques, en particulier les opioïdes, constitue un problème de plus en plus préoccupant qui a des répercussions sur la sécurité publique et le bien-être collectif. En fait, les tendances indiquent que les jeunes utilisent de plus en plus des médicaments d'ordonnance à des fins récréatives, et qu'ils obtiennent ces médicaments des armoires à pharmacie de la maison et de leurs amis.
En juin 2011, Sécurité publique Canada a organisé à Vancouver un atelier national sur l'usage illicite de produits pharmaceutiques qui a réuni 100 participants représentant des organismes d'application de la loi fédéraux, provinciaux et municipaux ainsi que des responsables de la santé, y compris des médecins et des pharmaciens. Cet atelier avait pour objectif de faciliter les discussions multisectorielles et de permettre aux participants de mieux comprendre le problème que pose l'usage abusif de produits pharmaceutiques du point de vue de la sécurité publique.
Après ces ateliers, le ministère a investi dans un projet pilote dans la région de Niagara afin d'organiser en mai 2012 une journée de remise de médicaments d'ordonnance. L'objectif d'un tel événement était de disposer facilement des médicaments qui n'ont pas été utilisés ou complètement utilisés afin d'en restreindre un éventuel abus. Cette initiative a été couronnée de succès. En une seule journée, nous avons pu réunir 4 000 kg de médicaments, dont 835 comprimés d'oxycodone, plus de 3 400 comprimés de Percocet et d'Oxycocet, plus de 5 000 comprimés de codéine et 23 timbres de fentanyl.
Fort du succès du projet pilote, le ministère a appuyé l'Association canadienne des chefs de police dans la mise en oeuvre de son projet de journée nationale de remise de médicaments d'ordonnance, notamment en mobilisant des appuis au sein des forces de l'ordre. Le ministère a organisé un atelier et créé un manuel — je crois que des copies de ce manuel ont été distribuées aux membres, monsieur le président — pour aider les forces de l'ordre à organiser leur première journée nationale de remise de médicaments, laquelle a eu lieu en mai 2013. Ce manuel, maintenant connu à l'échelle internationale, porte sur les initiatives de remise de médicaments d'ordonnance actuellement mises en oeuvre au Canada. Il est accessible sur le site Web de Sécurité publique Canada ainsi que sur le site Web de la Stratégie nationale antidrogue.
Dans le même esprit que cette journée nationale, Sécurité publique Canada, en collaboration avec Santé Canada, a proposé au nom du Canada une résolution à la Commission des stupéfiants de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime. Adoptée par la commission le 15 mars 2013, ladite résolution encourage les États membres à favoriser des initiatives pour permettre la récupération des médicaments d'ordonnance dans des conditions opportunes et sécuritaires, en particulier des médicaments contenant des stupéfiants et des substances psychotropes placés sous contrôle international.
Santé publique Canada a également collaboré de près avec le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies en vue d'élaborer un Cadre national sur le mauvais usage de médicaments d'ordonnance. Plus précisément, en collaboration avec le Comité sur l'abus des drogues de l'Association canadienne des chefs de police, nous avons dirigé la rédaction du volet portant sur l'exécution de la loi de la stratégie « S'abstenir de faire du mal: Répondre à la crise liée aux médicaments d'ordonnance au Canada » du Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies. Nous travaillons actuellement sur le plan de mise en oeuvre de ce volet.
[Français]
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous offrir un aperçu du rôle que joue mon ministère dans la Stratégie nationale antidrogue et du travail que vous avez accompli jusqu'ici pour gérer le problème d'abus de médicaments d'ordonnance.
Je serai heureux de répondre à vos questions. Je vous remercie.
Bonjour, monsieur le président. Veuillez avant toute chose agréer mes félicitations pour votre élection à la présidence.
Distingués membres du comité, merci d'avoir invité la GRC à prendre la parole ici aujourd'hui. Je suis heureux d'être ici avec mes collègues et partenaires.
Je suis l'inspecteur Jean Cormier, actuellement directeur des Centres fédéraux de coordination au sein de la Police fédérale à la Direction générale de la GRC. Les centres fédéraux de coordination supervisent de nombreuses initiatives d'exécution des lois fédérales.
(1545)
[Français]
Je suis accompagné aujourd'hui par le caporal Luc Chicoine, qui est l'un des coordonnateurs nationaux du programme antidrogue à la direction générale de la GRC.
Je vous remercie de me permettre de dire quelques mots à propos de la mobilisation de la GRC face au problème de l'abus de médicaments d'ordonnance ainsi que sur notre relation avec les différents partenaires du gouvernement canadien engagés dans cette lutte.
[Traduction]
L'abus de médicaments d'ordonnance est un grave problème qui touche nos concitoyens. Ce n'est pas un phénomène nouveau, mais le fait qu'il ait récemment pris de l'ampleur exige la mobilisation de tous. L'utilisation de médicaments d'ordonnance à des fins non médicales est la troisième forme la plus fréquente d'abus de drogues chez les élèves ontariens, avec un taux de prévalence estimé à 16,7 % par Santé Canada, juste derrière la consommation de cannabis, à 22 %, et d'alcool, à 55 %.
[Français]
Ce fléau a des conséquences dévastatrices sur nos citoyens et sur toutes les composantes de notre société, et ce, sans distinction d'âge, de race, de classe sociale, de revenu, d'origine, d'ethnicité ou de sexe. Il a des répercussions directes sur l'ensemble de la population canadienne, sur nos entreprises, sur nos communautés et aussi sur notre réputation internationale.
L'un des dangers inhérents à ce genre d'abus est le faux sentiment de sécurité que ressentent les utilisateurs du fait que les médicaments sont prescrits par des médecins, produits par des installations réglementées et délivrés par des pharmaciens. Or, en abuser a le même effet destructeur que celui produit par d'autres drogues illégales.
[Traduction]
Il importe que la communauté d'application de la loi collabore avec ses partenaires au pays et à l'étranger afin de prévenir et de contrer le détournement de médicaments d'ordonnance et de poursuivre en justice les responsables. Les agents de la GRC et d'autres corps policiers sont souvent les premiers à intervenir sur les lieux d'incidents liés à l'abus de médicaments d'ordonnance. La sensibilisation et la formation des policiers sont donc indispensables.
[Français]
Nous croyons que l'échange d'information entre partenaires fait également partie de la solution.
La Stratégie nationale antidrogue prône depuis des années une approche en trois volets, soit la prévention, le traitement et la répression. La GRC est engagée à appuyer cette stratégie afin de s'attaquer aux problèmes liés à l'abus de médicaments d'ordonnance.
[Traduction]
Il est difficile d'enquêter sur l'abus et le détournement de médicaments d'ordonnance et de déposer des accusations tant les dossiers sont complexes. C'est pourquoi la GRC et ses partenaires concentrent leurs efforts sur deux volets de la stratégie nationale, à savoir la prévention et le traitement.
Tous les agents de la GRC sont tenus d'enquêter sur les activités liées aux drogues illicites. Nous disposons néanmoins d'agents qui, à l'instar du capitaine Chicoine, ont une formation spécialisée dans les enquêtes antidrogues et sont considérés comme des experts en la matière. Ces personnes sont également chargées d'enquêter sur les activités illicites touchant aux médicaments d'ordonnance et elles sont présentes dans toutes les provinces et tous les territoires du pays.
[Français]
Même si la coopération internationale a grandement favorisé l'établissement de normes pour prévenir et détecter l'abus de médicaments d'ordonnance en supprimant ou en restreignant davantage l'accès à certains d'entre eux, il nous faut poursuivre nos efforts et rester vigilants.
La GRC croit que chacun a un rôle à jouer dans la prévention de l'abus de médicaments d'ordonnance et doit y prendre part activement.
[Traduction]
Nous croyons qu'en mettant l'accent sur la prévention et en sensibilisant davantage nos communautés — notamment les intervenants de la santé — aux méfaits de l'abus des médicaments d'ordonnance, nous parviendrons à mettre en place des mesures efficaces aptes à contrer l'activité criminelle dans ce domaine. La GRC est déterminée à poursuivre ses efforts visant à détecter et à contrer l'abus de médicaments d'ordonnance qui nuit au Canada et au bien-être des Canadiens.
Je vous remercie de m'avoir écouté et me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Bonjour, monsieur le président, et bonjour aux membres du comité.
Je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui pour formuler des commentaires au sujet de l'étude du comité sur le rôle du gouvernement dans la lutte contre l'utilisation abusive de médicaments d'ordonnance.
Monsieur le président, à titre de commissaire du Service correctionnel du Canada, le SCC, je supervise les activités de 53 pénitenciers fédéraux, 16 centres correctionnels communautaires et 92 bureaux de libération conditionnelle et bureaux auxiliaires. Au cours du dernier exercice financier, le SCC avait la charge quotidienne moyenne de 22 762 délinquants, dont 15 056 étaient incarcérés.
Les membres du comité ne seront certainement pas surpris d'apprendre que la toxicomanie est un problème récurrent chez les délinquants. Nos données révèlent qu'au moment de leur incarcération dans un pénitencier fédéral, environ 80 % d'entre eux ont déjà eu des problèmes de toxicomanie, et ces problèmes sont très souvent liés à plus d'une substance. Il est tout aussi inquiétant d'apprendre que la drogue ou l'alcool ont joué un rôle dans les actes criminels ayant mené à la déclaration de culpabilité d'environ la moitié d'entre eux. Ce pourcentage est le même depuis de nombreuses années.
Dans les pénitenciers fédéraux, le personnel de première ligne doit jour après jour faire face à la grave menace que posent les drogues pour la sécurité des établissements. La diminution de l'offre de drogues constitue sans aucun doute une priorité pour mon organisation. Grâce à différentes mesures, comme le recours aux chiens détecteurs de drogues et l'amélioration de la capacité du renseignement de sécurité, le SCC a concentré ses efforts afin d'empêcher la drogue d'entrer dans nos établissements. Il a ainsi créé un milieu plus sûr pour nos employés et les détenus, ce qui favorise du même coup la réadaptation efficace des délinquants.
En plus de prendre des initiatives visant à réduire l'offre de drogues, le SCC est tout aussi déterminé à réduire la demande. À cette fin, le SCC offre des traitements pour les toxicomanes et des programmes de lutte contre la toxicomanie afin d'aider les délinquants à réussir leur réadaptation et de réduire le risque lié à la toxicomanie, facteur criminogène s'il en est. En fait, le SCC est reconnu mondialement comme un chef de file pour ses traitements et ses programmes en matière de toxicomanie.
Monsieur le président, le SCC peut sans aucun doute vous en dire long sur l'interdiction des drogues illicites et sur les traitements connexes. Toutefois, ce sur quoi le SCC serait d'une plus grande utilité pour ce comité concerne la question très pragmatique de la gestion de la distribution des médicaments d'ordonnance dans un milieu carcéral très complexe.
Comme les membres du comité le savent peut-être déjà, le SCC a le mandat de fournir des services de santé essentiels aux détenus sous responsabilité fédérale. Dans le cadre de ce mandat, le SCC doit veiller à ce que les délinquants aient accès, de façon raisonnable, aux médicaments d'ordonnance nécessaires. Comme vous pouvez sans doute l'imaginer, la gestion de la distribution et de l'administration des médicaments d'ordonnance au sein d'une clientèle composée de détenus constitue un défi unique en raison du grand potentiel d'abus.
Le SCC a donc créé un système permettant de limiter les possibilités que les délinquants abusent de ces substances tout en offrant des soins médicaux de haut niveau. Le formulaire national du SCC est l'élément le plus remarquable de notre cadre stratégique. Ce document, que tous les pénitenciers fédéraux doivent respecter, offre aux médecins et aux pharmaciens un moyen de favoriser la sélection de médicaments optimaux et économiques. Rempli par des professionnels de la santé et mis à jour deux fois par année, le formulaire dresse la liste des médicaments que le SCC est prêt à fournir, au besoin, aux détenus dont il a la responsabilité.
Par extension, tous les médicaments pouvant constituer un risque dans un milieu carcéral sont autant que possible exclus du formulaire. Toutefois, si, pour raison médicale, un médicament est absolument nécessaire, sa prescription et son administration sont assujetties à des restrictions.
Le formulaire fournit également des renseignements particulièrement importants sur certains médicaments, comme les médicaments de rechange disponibles, la façon de les distribuer aux délinquants en toute sécurité, la posologie, la période d'usage et les circonstances justifiant leur prise.
J'estime que les moyens qu'emploie le SCC pour distribuer des médicaments d'ordonnance en toute sécurité aux détenus sous responsabilité fédérale sont tout à fait pertinents dans le cadre de l'étude du présent comité. Compte tenu du temps qui m'est alloué, je ne peux pas vous faire part de détails précis sur ces politiques dans mon mot d'ouverture, mais je serai heureux de répondre aux questions que vous pourriez avoir à ce sujet.
Je vous remercie encore, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui.
Premièrement, je remercie les témoins de leur présence aujourd’hui. Je me réjouis d’entendre vos exposés et d’apprendre ce qu’accomplit chacun de vos ministères.
Monsieur Bhupsingh, vous avez mentionné dans votre mémoire que des données de plus en plus nombreuses semblent indiquer que l’usage illicite de médicaments d’ordonnance est un important problème de sécurité publique. Pourriez-vous déposer les documents dont vous disposez qui nous apporteraient ces preuves? Je ne sais pas si vous parlez de sondages, de rapports ou d’enquêtes qui ont été menées. J’ignore ce à quoi vous faites allusion, mais si vous pouviez les déposer au comité, ils nous seraient très utiles.
L’autre chose qui m’a frappé en entendant les exposés d’aujourd’hui est le fait que nous avons entendu parler de ce qui est en train de se dérouler, à savoir la journée de remise. L’idée d’organiser une journée nationale de remise et le fait que nous participons à son organisation et qu’une résolution à cet effet a été adoptée à l’ONU ne me posent pas de problème, mais il me semble qu’en mettant l’accent sur une politique de retour appropriée, on prend en quelque sorte des mesures après coup. Je n’ai entendu aucun d’entre vous parler de ce que nous faisons de manière systématique pour prévenir d’abord les usages abusifs.
En Colombie-Britannique, notre programme d’assurance-médicaments fait appel à des systèmes qui, avec l’aide des pharmacies, utilisent des mécanismes de contrôle pour garantir que les gens ne magasinent pas pour se procurer des médicaments d’ordonnance. Il est difficile de savoir si l’un ou l’autre de vos ministères, ou même Santé Canada, s’emploie à tenter de promouvoir un programme de ce genre à l’échelle nationale.
Ma question est la suivante: pourquoi nous concentrons-nous tellement sur ce qui doit être fait après l’apparition du problème, au lieu de mettre sur pied des systèmes?
Monsieur Head, vous avez dit que vous disposiez de systèmes déjà en service. Peut-être pourriez-vous répondre à ma question en expliquant les leçons que nous pouvons tirer de vos systèmes, mais je suis préoccupée par le fait que nous ne semblons pas avoir une manière systématique de nous attaquer à ce problème. Il me semble qu’en étudiant le problème seulement dans le contexte de la mise en application de la loi, nous manquons le bateau. Nous devons examiner la façon dont le système lui-même garantit que nous minimisons autant que possible les cas d’abus.
L’un d’entre vous pourrait-il répondre à ma question
Premièrement, mon allusion aux tendances croissantes que nous observons relativement aux produits pharmaceutiques et aux médicaments d’ordonnance découle en grande partie de ce que nous constatons dans les enquêtes. Nous remarquons une hausse du nombre d’affaires qui font l’objet de poursuites pénales. Voilà les tendances dont je parle.
Monsieur le président, un certain nombre d’études mentionnées dans des mémoires présentés plutôt par Santé Canada et d’autres députés le démontrent clairement. Nous observons une tendance à la hausse dans celles-ci. En fait, je vous fais remarquer que, du moins sur le plan de la sécurité publique, nous n’observons aucune mesure différente pour contrer cette tendance. Je tiens à préciser que j’appartiens au milieu de l’application de la loi, mais je sais que les représentants de Santé Canada, qui étaient ici la semaine dernière, parlaient d’un certain nombre de systèmes qu’ils tentaient de mettre en place.
Je ne suis pas la personne la mieux placée pour formuler des observations sur l’adoption d’une approche systématique pour cerner le problème au stade initial. Toutefois, je peux vous dire qu’en réglant quelques-unes des préoccupations des forces de l’ordre concernant la diminution de l’offre, nous faisons des progrès, et nous pensons qu’en fin de compte, les journées de remise et d’autres initiatives de ce genre peuvent avoir un effet bénéfique. Je sais qu’il ne s’agit pas d’une approche systématique comme celle dont vous parlez, mais, pour ce qui est d’apaiser les inquiétudes des forces de l’ordre, nous pensons que c’est une façon appropriée d’intercepter une partie de l’offre
Du point de vue de la sécurité publique, votre première approche ne consisterait-elle pas à disposer d’un meilleur système de réglementation? Qu’elles soient jugées légales ou non, les substances qui nous occupent peuvent être puissantes, faire l’objet d’un usage abusif et avoir des effets très nocifs si elles sont utilisées de manière inappropriée.
Je n’ai entendu aucun de vous parler de cet aspect. Il me semble qu’il nous faut un système de réglementation opérationnel, afin de disposer des mécanismes de contrôle requis.
Je me contenterais de dire que les intervenants collaborent grandement. Il y a des problèmes de compétence. Je crois comprendre que les provinces jouent un rôle important dans la réglementation des substances contrôlées. Je suis d’accord pour dire que nous avons un rôle à jouer. Dans la mesure où ce rôle consiste à mettre en place les systèmes, je pense que nous envisageons et tentons de le faire.
Encore une fois, sur le plan de la santé et des responsabilités, il serait probablement bon de poser ces questions à nos collègues de Santé Canada.
J’ai quelques observations à formuler, monsieur le président.
Premièrement, d’après mes souvenirs, lors de leur comparution, les représentants de la santé ont signalé que le Canada était le deuxième pays consommateur de médicaments d’ordonnance en importance dans le monde. Cela signifie que le nombre de médicaments en circulation est effectivement élevé. Ces médicaments sont distribués par des moyens légitimes, c’est-à-dire qu’ils sont prescrits. Donc, lorsque nous parlons d’un problème systémique, nous indiquons peut-être que la façon dont les médicaments sont prescrits est inappropriée.
Bon nombre des médicaments prescrits finissent par être parfois volés, parfois utilisés de manière abusive, alors que d’autres médicaments sont volés dans les pharmacies. Je ne crois pas qu’une approche réglementaire systémique réglerait le problème des cambriolages de pharmacies, de maisons ou de résidences pour personnes âgées, au cours desquels des médicaments sont volés, ou qu’elle préviendrait ceux-ci.
Je ne suis pas en désaccord avec ce que vous dites, mais, si un système d’une sorte ou d’une autre empêchait les gens de magasiner ou d’obtenir des ordonnances en double ou en triple, les choses s’en trouveraient assurément grandement améliorées. Conviendriez-vous que cela doit être fait?
Si cette mesure est prise dans une ou peut-être deux ou trois provinces, tant mieux, mais il y a d’énormes lacunes à combler partout au pays.
En ce qui a trait à une approche à l’échelle nationale — comme vous le savez, il existe une infraction que l’on qualifie essentiellement de « fraude du système de santé »; ce n’est pas celle-là —, l’infraction qui s’applique est la recherche d’un stupéfiant. Comme Mme Davies l’a mentionné, certaines provinces disposent d’un mécanisme systémique informatisé pour surveiller les ordonnances. Peut-être est-ce une mesure que nous pourrions mettre en oeuvre dans l’ensemble du pays, mais ces enjeux sont réglementés par les provinces. Par conséquent, c’est vraiment une question d’intervention provinciale
Je remercie également nos témoins de leur présence.
J’ai un certain nombre de questions à poser, alors je vous serais reconnaissant de me donner, si possible, des réponses relativement concises. J’aimerais commencer par la sécurité publique.
Certaines personnes parlent de faire appel aux organisations locales, de communiquer avec des groupes communautaires et de travailler avec ceux-ci. Je pense qu’il serait plutôt logique de s’attaquer au problème au niveau le plus bas qui soit – soit, entre autres, des groupes communautaires qui s’occupent des jeunes et qui les tiennent à l’écart des drogues.
Pouvez-vous parler de la mesure dans laquelle vous coordonnez vos activités avec des groupes communautaires? Avez-vous des exemples de coordination à nous donner? Est-ce que les grandes compagnies pharmaceutiques ont un rôle à jouer à cet égard, du point de vue de l’éducation?
L’une des facettes que nous examinons en ce moment… J’admets, monsieur le président, qu’il y a probablement un certain nombre de façons de s’attaquer au problème, en ce qui a presque trait à la sensibilisation à un certain nombre d’égards.
Le problème que nous observons du point de vue de l’application de la loi tient essentiellement au fait que le problème s’étend des plaques tournantes au crime organisé, en passant par des individus. En ce qui concerne le caractère individuel du problème, je pense que vous avez raison. Nous avons probablement l’occasion d’amorcer des campagnes de sensibilisation populaire, au sein des collectivités locales. Je pense qu’à l’avenir, c’est un aspect que nous examinerons.
En ce qui concerne les compagnies pharmaceutiques, elles ont probablement un rôle à jouer. Que pourraient-elles faire? Au bout du compte, il y a un certain nombre de sujets dont nous pourrions discuter avec elles, notamment les mécanismes de contrôle, etc. Encore une fois, cela fait partie de la solution.
Toutefois, notre première priorité est vraiment la sensibilisation, qui est un problème croissant. Notre deuxième priorité est de nous attaquer au problème probablement à divers niveaux, dont le niveau local, les individus et vous, mesdames et messieurs.
Ma prochaine question est subjective, et elle engendrera probablement une réponse subjective, mais par où devons-nous commencer, lorsqu’il s’agit de parler aux jeunes de l’usage abusif de médicaments d’ordonnance et de la consommation abusive de drogues et de substances illégales, comme la marijuana? Devons-nous commencer par les élèves de 6e, 5e ou 4e année? Par où devons-nous commencer?
Je n’ai pas d’excellentes réponses à vous donner, si ce n’est que cette question relève de Santé Canada et que c’est vraiment leur domaine de compétence.
Je sais que la GRC offre également certains programmes axés sur les jeunes, alors il se peut que ses représentants veuillent ajouter quelque chose.
Nous offrons un certain nombre de programmes de sensibilisation. L’un d’eux s’appelle le programme Bouclier autochtone, et il cible en principe les collectivités autochtones et certainement les jeunes, en commençant par les enfants d’âge scolaire.
Nous mettons aussi en oeuvre le Programme de sensibilisation aux dangers de la drogue, aussi connu sous le nom de DARE. Ce dernier cible aussi les enfants d’âge scolaire, mais plutôt ceux de 7e et 8e année, avant leur entrée à l’école secondaire où ils seront plus susceptibles d’être exposés à divers types de drogues ou de s’en faire offrir. Encore une fois, c’est une question de sensibilisation et de prévention.
Nous mettons aussi en oeuvre le programme des EMD, des enfants menacés par la drogue, soit une initiative d’intervention précoce qui cherche à mettre un terme au cycle de la violence faite aux enfants occasionnée par l’exposition à des activités liées aux drogues. Le programme offre un guide de ressources, qui a été traduit en français, et un programme de formation que peut suivre le personnel responsable de la prestation des services.
Par votre entremise, monsieur le président, je m’adresse au commissaire Head. Au cours de votre exposé, vous avez mentionné que le SCC était un chef de file à l’échelle internationale dans le domaine des programmes relatifs aux toxicomanies et de leur traitement.
Pouvez-nous en dire un peu plus au sujet des programmes et, plus précisément, du traitement des toxicomanies au sein du système carcéral?
Absolument. Au cours des 20 dernières années, nous avons conçu une série de programmes, fondés sur la recherche, qui ciblent divers enjeux, les toxicomanies étant l'un des plus importants enjeux que nous cernons. Grâce à la recherche et au travail de nos employés, nous avons élaboré divers programmes pour les toxicomanes qui sont offerts aux délinquants. Ce sont des programmes à intensité modérée ou haute qu'on va même jusqu'à adapter pour répondre aux besoins précis des délinquants autochtones ainsi qu'à certains des besoins uniques des femmes.
De nombreux pays de la planète ont adopté notre cadre de programmation et l'ont mis en oeuvre au sein de leur administration.
Un programme à haute intensité dure de 12 à 18 semaines et exige trois heures de participation par jour, à raison de quatre à cinq jours par semaine. Puis, un suivi permanent est assuré par les employés de première ligne, les agents de libération conditionnelle qui s'occupent des cas et toute autre personne qui interagit avec le délinquant en question.
Je m'efforce d'examiner cette question d'un peu plus près. Pouvez-vous être un peu plus précis et nous indiquer exactement comment le programme se déroule? Les participants s'abstiennent-ils de consommer des drogues? ou leur fournit-on des drogues dont la quantité diminue avec le temps? Autrement dit, comment procédez-vous?
Le programme est fondé sur un modèle socio-psychologique. Au cours du programme, on présente aux participants des situations, et on leur fait examiner des solutions autres que les drogues. Il faut qu'ils déterminent comment faire des choix plus judicieux qui ne font pas appel aux drogues, à l'alcool ou à toute autre substance intoxicante.
Nous employons une thérapie cognitivo-comportemental.
Nous croyons que nos prisons doivent être exemptes de drogues, et nous allons continuer de fonctionner de cette manière. C'est notre façon d'appliquer la loi. Nos traitements, en revanche, correspondent aux programmes dont je suis en train de parler.
Encore une fois, ma question est peut-être un peu hors de votre domaine de compétence mais, si cette approche fonctionne au sein du système correctionnel, là où, pardonnez mon expression, le public est captif, pensez-vous qu'elle pourrait être pareillement appliquée au traitement des toxicomanes qui ne sont pas derrière les barreaux?
Je pense que le cadre à suivre est excellent. Nous collaborons avec quelques organismes communautaires, car l'un des aspects qui nous intéressent vraiment, c'est le fait que les collectivités bénéficieront plus tard de toute amélioration de l'état de santé des délinquants qui pourrait survenir pendant leur incarcération. Sous la supervision des collectivités, nous assurerons la prestation d'un programme d'entretien destiné aux délinquants, mais nous travaillerons aussi avec d'autres organismes, afin qu'ils puissent appuyer ces délinquants après l'expiration du mandat.
Tous les témoins ont donné des exposés très intéressants.
Je sais qu'au sein de l'équipe, vous vous occupez particulièrement de la question de l'offre. Mais je sais, en raison de mes connaissances de médecin et de la compréhension de ces problèmes que j'ai acquise au fil des ans, qu'on ne peut pas s'occuper uniquement de l'offre. Il faut examiner les raisons qui justifient la demande; il est nécessaire d'examiner cet aspect.
Comme M. Hawn, j'aimerais vous demander d'être concis dans vos réponses. Je m'efforcerai de vous poser de brèves questions.
Monsieur Head, vous avez dit que 80 % des délinquants qui arrivaient dans vos prisons souffraient d'une dépendance, quelle qu'elle soit, ou prenaient des médicaments prescrits ou illicites d'une sorte ou d'une autre. J'ai aussi remarqué que vous aviez dit, qu'après 20 années d'expérience, cette statistique était toujours la même. Examinez-vous des données probantes...? Je veux dire, si une statistique demeure constante pendant 20 années, envisagez-vous la possibilité d'examiner le bien-fondé de cette approche?
Oui, nous utilisons les preuves. Le pourcentage de 80 % ne représente pas le même groupe de personnes qui cheminent dans le système. Quatre-vingt pour cent des personnes nouvellement admises dans le système fédéral ont eu un quelconque problème de toxicomanie.
Est-ce que le taux de récidive chez ces personnes est élevé par rapport à celui chez les toxicomanes emprisonnés? Ne sont-elles pas les mêmes personnes qui sortent de prison pour y retourner plus tard?
Vous avez dit que vous travaillez avez des centres correctionnels communautaires. Que montrent vos données statistiques sur le pourcentage de personnes qui en sortent et n'y retournent jamais?
Nous constatons que les personnes qui suivent les programmes de lutte contre la toxicomanie que nous offrons dans les établissements ou le Programme communautaires de maintien des acquis... nous constatons que jusqu'à 63 % de ces personnes — seulement pour ce programme — ne commettent ni une nouvelle infraction ni une infraction avec violence.
Vous dites qu'il y a un programme de maintien des acquis. Est-il similaire aux programmes de substitution qui sont offerts dans les collectivités et dans le cadre desquels on utilise la méthadone et d'autres produits semblables?
Nous offrons, dans l'établissement, un traitement de substitution aux opioïdes et, si une personne commence à suivre un tel traitement, nous cherchons à faire en sorte qu'elle continue à le suivre dans la collectivité. Nous constatons que le traitement à la méthadone offre, à ceux qui ont souffert de dépendance à l'héroïne, plus de chances de s'en sortir que s'ils ne le suivaient pas.
Je suis d'accord, mais de nombreuses études indiquent que les programmes de substitution actuels comme les traitements à la méthadone ou à la suboxone ne donnent pas de résultats positifs chez un petit pourcentage de personnes à risque élevé. Il faut donc se demander quel programme fonctionnerait pour eux? Si vous croyez, et vous avez dit un peu plus tôt que vous acceptiez les résultats fondés sur des données probantes... Si les preuves montrent qu'une partie de ce groupe fort restreint doit prendre de la diacétylmorphine, ne penseriez-vous pas que cela constituerait un traitement de substitution pour ce groupe?
Ce serait quelque chose que nous examinerions. Nous devrions, pour ajouter un médicament de substitution au formulaire, passer par le processus normal: mesurer le degré d'efficacité et d'efficience. Cependant, nous étudierons aussi cette possibilité. Il faut également tenir compte de l'incidence potentielle de l'usage de ce genre de médicament dans un établissement. C'est un facteur que nous devons toujours prendre en considération.
Oui, je pense que c'est important, car il y a maintenant un nombre considérable d'études qui montrent que si ces personnes ne prennent pas de la diacétylmorphine ou de l'hydromorphone, c'est-à-dire du Dilaudid, elles retourneront dans la rue où se vendent les drogues. Je suis contente que vous pensiez que ces études devraient être utiles dans certains de ces cas.
Je veux parler de l'idée — et je ne sais pas qui devrait répondre. Monsieur le président, vous pouvez adresser ma question à la personne qui devrait y répondre — vous avez parlé du programme S'abstenir de faire du mal. Cela veut-il dire que vous estimez que la réduction des méfaits est un élément important, si ce programme est préconisé par les autorités médicales? Qui veut répondre?
Je remarque que personne n'a tenu compte de la réduction des méfaits en se penchant exhaustivement sur la toxicomanie et sur la diminution de la quantité. Qui veut...?
Monsieur le président, qui veut parler du programme S'abstenir de faire du mal et me dire pourquoi vos programmes ne mentionnent pas la réduction des méfaits?
Je peux répondre à une partie de la question, et mes collègues peuvent intervenir.
Des représentants du gouvernement fédéral ont participé à la rédaction du rapport S'abstenir du faire du mal sous la direction du Centre canadien de lutte contre les toxicomanies. Je crois que vous entendrez le témoignage de Michel Perron plus tard cette semaine; et le ministère de la Sécurité publique était chargé du plan d'action sur l'application de la loi. Le rapport contenait beaucoup de bonnes idées et beaucoup de bonnes recommandations, notamment celle visant à élargir la portée de la Stratégie nationale antidrogue afin d'y inclure l'abus de médicaments d'ordonnance. Mais le rapport n'a pas abordé la réduction des méfaits.
Je sais que le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies compte parmi ses piliers la réduction des méfaits. Donc, je me demande pourquoi nous choisissons minutieusement certaines choses et pas d'autres, d'autant plus que l'utilité de la réduction des méfaits a été prouvée à l'étranger. En Australie et en Europe, elle est maintenant complètement acceptée comme étant une partie de la stratégie, car lorsque vous réduisez les méfaits et que la personne sait qu'elle ne va pas mourir, sa volonté de suivre un traitement se renforce.
Combien de temps me reste-t-il monsieur le président? Une petite minute.
Mme Davies a parlé de coordination. Je me souviens, du rapport que le comité a publié en 2002 sur cette question et qui proposait que chacun collabore. Pour vous, collaborer, c'est travailler avec les provinces, etc.
Je sais qu'il y a en Colombie-Britannique un programme des ordonnances d'opiacés en triplicatas. Ça signifie que, lorsqu'un médecin remplit une ordonnance, il y a trois exemplaires: un exemplaire pour le médecin, un pour le pharmacien et un pour les collèges et la police. C'est un programme qui a mis fin très efficacement à l'obtention d'ordonnances multiples.
Ne pensez-vous pas que collaborer avec les provinces est une bonne idée qu'il faut promouvoir dans le cadre d'une stratégie nationale? Il n'y a pas que les provinces. Vous travaillez avec elles. Vous avez tous dit que cette collaboration est efficace. Donc, pourquoi ne pas le faire, particulièrement en ce qui concerne notamment les Inuits, les Premières Nations et les forces armées dont le gouvernement fédéral est responsable?
Non, parce qu'il est question des forces de police dans les provinces dont j'ai parlé. Elles participent à ce programme.
Il faut se demander pourquoi on ne peut pas le faire à l'échelle nationale, puisque vous collaborez avec les provinces? Tout le monde travaille ensemble sans qu'il n'y ait de lacunes dans le système. C'est tout ce que je voulais demander. Ne voyez-vous pas les avantages que procurerait un tel programme et les résultats que l'on obtiendrait?
Je remercie les témoins de s'être présentés aujourd'hui. La plupart d'entre vous travaillent dans le domaine de l'application de la loi. Ça devient donc, disons, un peu compliqué parfois quand vous parlez de traitement et de prévention. Votre travail porte essentiellement sur l'application de la loi.
Monsieur Cormier, je pose ma première question à la GRC. Je suis un agent à la retraite. Donc, je respecte le grade. En 2009, la GRC — j'ignore si elle a cessé de le faire — publiait un rapport annuel sur la situation des drogues illicites.
Pouvez-vous me dire si elle continue de le faire? Si oui, où peut-on le trouver? S'agit-il d'un rapport interne?
Prévoit-on...? Il me semble que ce serait un rapport utile pour tous ceux qui veulent connaître les statistiques sur les drogues, celles tenues par la GRC partout au Canada.
Je crois que c'est Santé Canada qui s'occupe des statistiques sur les médicaments d'ordonnance. Nous avons, bien sûr, des statistiques sur les saisies et auxquelles nous avons déjà accès.
Il est certain, de mon point de vue en tout cas, qu'il y aura toujours une partie de la société qui ne s'intéresse pas au traitement et à la prévention. Leur intention est d'aggraver le problème.
Cette question peut d'adresser aux représentants du ministère de la Justice. Est-ce que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances ou la Loi sur les aliments et drogues ou même le Code criminel contiennent des dispositions qui pourraient viser l'abus ou le mauvais usage de médicaments d'ordonnance? Il n'y a pas grand-chose à ce sujet pour le moment, à part sur l'obtention d'ordonnances multiples.
Je ne suis pas sûr de ce que vous recherchez exactement. La Loi réglementant certaines drogues et autres substances prévoit une infraction pour l'obtention d'ordonnances multiples. Le Code criminel n'a vraiment rien de pertinent dans ce domaine. Si vous parlez notamment d'infractions de cette nature...
Je parle de quelqu'un qui se procure 50 T3 — qui se vendaient 5 $ l'unité — pour en vendre à d'autres. Il n'y a pas de disposition interdisant la vente des T3.
Est-il possible de modifier la loi? La vente de médicaments d'ordonnance à une autre personne semble devenir un problème, mais rien ne permet de porter une accusation.
Nous avons l'infraction de trafic de stupéfiants, nous le savons. Les infractions de trafic de stupéfiants s'appliquent à pratiquement tous les médicaments d'ordonnance inscrits aux annexes de la loi. Si, par exemple, ce médicament particulier figure à une annexe de la loi, le trafiquant se fera prendre pour le trafic et la possession en vue de faire du trafic.
Je ne connais pas ce médicament particulier, j'ignore donc s'il est inscrit à une annexe de la loi.
Dans le cas où le médicament est considéré comme un barbiturique ou est inscrit à une annexe à laquelle M. Saint-Denis fait référence, alors la Loi réglementant certaines drogues et autres substances s'appliquera alors certainement. Nous ferons une enquête sur les infractions aux termes de cette loi. Nous porterons probablement des accusations contre la personne impliquée soit pour possession en vue d'un trafic soit pour trafic.
Trevor, vous avez mentionné dans votre déclaration l'omniprésence des médicaments d'ordonnance. A-t-on déterminé que certains types de médicaments d'ordonnance étaient plus consommés que d'autres?
Une partie du problème semble être le fait que nous nous trouvons dans une zone grise en ce qui concerne les médicaments d'ordonnance. À mon époque — je déteste me vieillir, mais c'était avant la Charte —, les médicaments d'ordonnance ne posaient pas de problème parce nous accordions plus la priorité aux drogues illicites qui entraient au pays. Mais nous avons trouvé dans le crime organisé une clientèle qui a découvert que les médicaments d'ordonnance étaient une belle occasion de gagner de l'argent.
Monsieur Head, vous avez parlé, entre autres, de la façon dont vous gérez la distribution et l'administration des médicaments d'ordonnance, du type de médicaments qu'une personne peut obtenir et des raisons pour lesquelles elle peut l'obtenir ou non dans les établissements fédéraux. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, car il semble que ce soit des informations que nous pourrions transmettre au milieu médical afin de l'aider.
Nous nous fions à notre formulaire national qui, entre autres, contient la liste de tous les médicaments pouvant être prescrits en milieu correctionnel.
En vous fondant sur le formulaire, comment déterminez-vous qui obtient quoi et en quelle quantité? Je vous prie de me décrire toutes les étapes du processus?
D'abord, nous nous en remettons aux professionnels de la santé agréés qui prennent les décisions appropriées: médecins, pharmaciens ou infirmières et infirmiers autorisés. Mais dans le formulaire, en fonction des données que nous recevons de Santé Canada et de ses processus d'homologation de médicaments, puis de notre comité de pharmacologie et de thérapeutique interne qui examine les médicaments homologués... Le comité étudie l'efficacité et l'efficience des médicaments ainsi que les problèmes de sécurité qu'ils peuvent poser à l'établissement.
Aussitôt que le comité aura déterminé que les médicaments seront inscrits dans le formulaire, il indiquera, en se fondant sur les avis de professionnels, la dose qui pourrait ou devrait être administrée en fonction de la situation. Le formulaire est un guide, un outil, qui est utilisé et que tous nos établissements sont censés respecter.
J'allais poser une question à M. Bhupsingh, mais tous les autres membres du comité l'ont déjà un peu mis sur la sellette. Donc, je garde cette question pour la fin.
Monsieur Cormier, il y a eu quelques changements dernièrement en ce qui concerne la marijuana médicale provenant du petit producteur à la maison. Il semble que de grands changements vont être apportés. Du point de vue des forces d'application de la loi, combien de fois ces endroits ont-ils fait l'objet d'entrée par effraction et les produits — c'est un mot étrange — ont-ils été volés? Est-ce que cela arrive très souvent?
Eh bien, c'est l'aspect médical qui m'y a fait penser, car nous étions en train de parler de l'abus de médicaments d'ordonnance, et la marijuana médicale devrait, espérons-le, être prescrite — je suppose qu'elle le sera. J'y ai pensé parce que durant la semaine de relâche, j'ai pris la parole dans deux écoles — aux classes de 4e et de 5e — et parce que ces jours-ci un chef politique a parlé de la légalisation de la marijuana. J'ai été très surpris que des élèves de 4e et de 5e me posent des questions au sujet de la marijuana. C'est ce qui m'a poussé à vous poser cette question.
Pour aller un peu plus loin, nous avons des informations sur un rapport de Sécurité publique Canada. M. Wilks en a touché un mot plus tôt. C'est au sujet du mauvais usage des drogues. Diriez-vous que les agents de la GRC et des polices municipales reçoivent suffisamment de formation pour déterminer quand il y a un abus? Si non, où se situe, selon vous, le manque de formation?
Je pense que les agents en général — de la GRC et des forces de police municipales et provinciales — reçoivent une formation adéquate. Mais je crois qu'elle devrait être permanente, car on ne peut jamais recevoir suffisamment de formation. Ce n'est pas que la formation qu'ils reçoivent n'est pas satisfaisante, c'est simplement qu'elle doit être reprise d'année en année. De nouveaux agents sont recrutés, et leur formation doit continuer. De nouvelles drogues sont offertes, et il faut donner de la formation sur la question. Donc, la formation des agents doit être un processus permanent.
Elle est offerte dans plusieurs endroits. Par exemple, nous avons le cours de l'enquêteur en matière de drogues, qui est dispensé au Collège canadien de police. Quelques forces de police municipales et provinciales offrent également leur propre formation. Par exemple, le caporal Luc Chicoine, qui est également ici aujourd'hui, fait des exposés dans le cadre de beaucoup de cours organisés par la GRC ou d'autres forces de police municipales et provinciales.
Serait-ce les seules ressources disponibles pour une municipalité qui souhaiterait élaborer ses propres stratégies et mesures pour faire appliquer la loi? Est-ce à peu près tout ce qu'on a à leur offrir actuellement?
Comme je le disais dans ma déclaration préliminaire, l'application de la loi est une responsabilité qui incombe à tous, et il en va de même de l'éducation. On ferait donc un pas intéressant dans la direction de la prévention en permettant aux agents d'avoir accès à de la formation.
J'ai longtemps siégé au conseil d'administration de Centraide à Hamilton. La toxicomanie faisait partie des sujets qui émergeaient de temps à autre. On discutait notamment de la nécessité pour le policier de trouver le juste équilibre entre le devoir de procéder à une arrestation et de chercher à obtenir une condamnation, d'une part, et l'assistance à apporter à la personne, d'autre part. Je suis persuadé que c'est un dilemme particulièrement difficile pour les agents de police à l'amorce de leur carrière.
La formation ne s'adresse pas uniquement aux policiers. Elle s'inscrit aussi dans une démarche plus globale qui fait intervenir les professionnels de la santé présents dans la collectivité, surtout lorsqu'il est question de médicaments sur ordonnance. Bien évidemment, ces gens-là ont aussi un rôle à jouer. Différents partenaires peuvent avoir leur mot à dire.
Du côté de l'opposition officielle, nous nous interrogeons quant à la suffisance des ressources mises à la disposition des corps de police tout particulièrement, mais aussi des autres services de soutien au pays. Lorsqu'on sait que 80 % des individus incarcérés sont aux prises avec un problème à leur arrivée en prison, on peut aisément conclure que nos collectivités doivent composer avec une situation particulièrement difficile.
Comme vous pourrez le constater au fil de nos séances, j'ai parfois tendance à parler trop longtemps.
Je voulais simplement dire qu'il est essentiel que les soutiens nécessaires soient en place. Je vais m'en tenir à cette conclusion pour vous remercier de votre bienveillance en cette première journée de travail, monsieur le président.
Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins de leur présence aujourd'hui.
J'aimerais aborder quelques aspects de la question avec vous. Dans un premier temps — et j'y reviendrai — je veux parler des jeunes et de quelques-uns des problèmes associés aux différentes formes de toxicomanie. J'ai enseigné les maths et la physique au secondaire pendant 34 ans, ce qui fait que j'ai vu passer pas mal d'adolescents. J'ai vu d'excellents élèves nous arrivant du primaire qui, au moment de terminer leur secondaire... Après avoir été eux-mêmes des victimes au départ, ils se retrouvaient malheureusement pris dans le même engrenage quatre ou cinq ans plus tard. J'estime donc primordial de trouver des façons de briser ce cycle.
La consommation abusive de médicaments d'ordonnance n'est bien sûr qu'un aspect supplémentaire compliquant cette problématique. Je suis convaincu que les parents aimeraient savoir exactement de quoi il en retourne, car ce sont bien souvent leurs médicaments à eux qui sont en cause. C'est donc une facette dont nous pourrions discuter.
J'aimerais revenir à certains témoignages entendus précédemment. Monsieur Bhupsingh, vous avez parlé de l'atelier national tenu en 2011, de cette tribune pour une discussion multisectorielle et des différentes manières d'analyser la consommation abusive de produits pharmaceutiques.
Vous avez également abordé le sujet des aînés et des problèmes découlant du genre de médicaments qu'on leur prescrit. Je me demandais si des approches avaient été tentées auprès des aînés pour s'assurer que le même message parvient jusqu'à eux.
Je vais vous répondre brièvement, après quoi je laisserai la parole à Mme Goguen.
Comme certains de mes collègues l'ont déjà souligné, nous nous sommes rendu compte en 2011 qu'il ne fallait pas limiter nos interventions aux seuls plans de l'approvisionnement et de l'application de la loi à proprement parler. Nous avons alors voulu étendre nos actions dans d'autres secteurs. Ainsi, nous avons mobilisé les pharmaciens et les médecins pour discuter des vrais problèmes et concevoir des approches que nous estimons novatrices pour nous y attaquer.
La démarche est d'autant plus complexe qu'il s'agit au départ d'un produit parfaitement licite, ce qui est bien différent de la lutte contre le commerce de substances illégales. Nous avons donc dû intervenir en adaptant notre façon de voir les choses.
Je vais en rester là pour l'instant et demander à Mme Goguen de répondre à quelques-unes de vos autres interrogations.
Vous avez parlé des aînés. Pour ce qui est des journées de cueillette de médicaments, nous avons relevé quelques exemples dans la brochure que nous vous avons laissée. On pouvait notamment dans bien des cas réunir policiers et pharmaciens de telle sorte que les gens puissent parler avec eux en rapportant les médicaments dont ils n'avaient plus besoin. Il y a toutefois différents autres modèles possibles. Je pense notamment à l'initiative Médi Dépôt à Cornwall. Une boîte postale était utilisée pour la cueillette des médicaments d'ordonnance. Au fil de notre recherche d'autres exemples de la sorte au Canada, on nous a entre autres parlé d'infirmières qui visitent les centres pour aînés afin d'y recueillir les médicaments non utilisés.
Il y a donc tout un secteur qui est pleinement conscient des risques pour les personnes âgées de conserver ces médicaments en leur possession. La sécurité des aînés peut être en péril, car certains individus peuvent essayer de s'en prendre à eux pour s'emparer de leurs médicaments d'ordonnance. Bon nombre de ces autres modèles possibles sont appliqués au Canada.
Inspecteur Cormier, vous avez indiqué que le caporal Chicoine pourrait sans doute nous fournir des renseignements plus détaillés. Lorsque vous appréhendez un individu ayant en sa possession un sac rempli de toutes sortes de petites pilules, quelle est la marche à suivre pour prouver qu'il y a effectivement infraction, que la personne n'a pas tout simplement égaré le couvercle de son propre contenant de médicaments?
La marche à suivre dépend dans une large mesure de la situation dans laquelle l'agent de police se retrouve. Il est bien sûr difficile de vous répondre précisément en rapport avec le scénario que vous évoquez. Habituellement, on saisirait un tel sac rempli de toutes sortes de pilules ou encore on appellerait un médecin ou un pharmacien pour confirmer l'identité de la personne et obtenir des détails sur la posologie de son ordonnance. C'est généralement la manière dont on procéderait en pareil cas.
Monsieur Head, lorsque vous travailliez dans les pénitenciers, que faisiez-vous lorsque vous constatiez qu'un détenu accumulait les médicaments, plutôt que de les prendre au fur et à mesure?
Il y a quelques options possibles. Si le détenu devait prendre lui-même ses médicaments, nous pouvions procéder à une évaluation pour déterminer dans quelle mesure on pouvait lui faire confiance avec certaines quantités. Si nous découvrions qu'un détenu accumulait les médicaments, nous le ramenions généralement à la formule dite d'observation directe, c'est-à-dire qu'il devait prendre le médicament en présence d'un membre du personnel, plus souvent qu'autrement l'une de nos infirmières, et suivre un protocole pour démontrer qu'il l'avait effectivement avalé.
La loi nous permet en outre d'effectuer des analyses d'urine pour dépister la consommation de drogues, et nous avons augmenté le nombre d'analyses semblables de plus de 20 % depuis l'an dernier. Nous procédons de façon aléatoire. Certaines dispositions de la loi nous autorisent de plus à soumettre au dépistage des individus que nous soupçonnons.
Les jeunes m'intéressent également. Vous dites que l'utilisation de médicaments d'ordonnance à des fins non médicales arrive au troisième rang parmi les formes les plus fréquentes d'abus de drogue chez les élèves ontariens.
De quelle façon se procurent-ils de la drogue? Avez-vous des statistiques là-dessus?
On n'a pas vraiment de statistiques sur la façon dont ils se procurent de la drogue. Ils utilisent les différentes méthodes qui ont déjà été mentionnées. Ils la volent dans l'armoire pharmaceutique de leurs parents ou de leurs grands-parents. Dans certains cas, la drogue est distribuée par des trafiquants, ce qui nous amène à faire des enquêtes.
Le Code criminel contient des dispositions qui visent les trafiquants de drogues illégales, mais que se passerait-il dans le cas d'un distributeur de drogues légales?
Les distributeurs de drogues illégales ne relèvent pas de moi, mais de la cour canadienne.
Dans le cas des distributeurs dont vous parlez, ils seraient certainement soumis aux mêmes accusations que celles déjà mentionnées, soit trafic de drogue ou possession pour trafic de drogue. La peine imposée dépendrait d'un certain nombre de facteurs, par exemple le dossier criminel et l'âge de l'accusé. Ce serait à la cour de trancher.
Existe-t-il des dispositions concernant les parents qui donnent accès à leurs jeunes aux médicaments qui se trouvent dans leur pharmacie? Vous avez parlé d'élèves. Il s'agit donc de jeunes des niveaux primaire et secondaire. Si les parents leur donnent accès à ces médicaments, ne s'agit-il pas de négligence?
Le Conseil consultatif national sur l'abus de médicaments sur ordonnance a affirmé ceci:
On a également constaté une recrudescence de l’activité criminelle de détournement des médicaments d’ordonnance des voies d’approvisionnement légales et réglementées vers le marché noir [...]
Depuis un moment, vous parlez beaucoup de prise de conscience. Vous dites qu'il faut de plus en plus recourir à la prévention.
J'aimerais savoir quelles techniques de détournement permettent présentement d'acquérir des médicaments sur ordonnance en utilisant les voies d'approvisionnement légales.
C'est difficile de répondre à cette question. Il faut dire qu'il y a différentes méthodes de détournement des drogues. C'est ce qu'on appelle en anglais « diversion ». Il s'agit de médicaments légaux qui deviennent illégaux.
Selon le processus en vigueur, essentiellement, lorsque nous apprenons que ça se passe, nous enquêtons à ce sujet. Il reste que la plupart de nos programmes sont basés sur l'éducation et la prévention.
Pouvez-vous nous parler de la façon dont cela s'articule entre le fédéral et le provincial pour que la prévention soit réussie et que ça touche vraiment les jeunes? J'étais enseignante avant d'être députée. Or je n'ai jamais entendu parler de tels outils de prévention pour les jeunes, au Québec. Comme vous le précisez, le risque est que les gens s'imaginent, du fait qu'un médicament est sur le marché, dans les pharmacies, qu'il est sans danger.
J'aimerais que vous me parliez de ce qui se fait entre le fédéral et le provincial, de la façon dont vous travaillez ensemble et des partenariats que vous formez pour prévenir les jeunes des dangers de cela.
En ce qui concerne la prévention, j'ai fait partie de plusieurs groupes destinés à informer et aider les autres premiers répondants, soit les policiers, les pompiers et les ambulanciers, afin d'accroître leurs connaissances sur certaines substances. Le phénomène des médicaments sur ordonnance est passablement récent. Il a pris beaucoup d'ampleur au cours des deux ou trois dernières années. Ce danger est maintenant beaucoup plus présent chez nous. C'est à ce moment que nous avons commencé à agir. Je dis « nous », mais il s'agit des policiers en général, d'un bout à l'autre du Canada. Ça inclut notamment ceux de la GRC et de la Sûreté du Québec ainsi que ceux de l'Ontario.
Les cours d'enquêteur et ceux sur la prévention sont tous dispensés au Collègue canadien de police et au Collège de police de l'Ontario. Je suis instructeur dans ces deux collèges, et les médicaments sur ordonnance sont un des sujets importants dont je traite.
À une échelle supérieure, c'est au département de faire des démarches en ce sens dans les écoles. Je peux vous dire qu'à la GRC, nous le faisons dans les écoles et auprès du public. Nous tentons d'améliorer les connaissances des gens.
Félicitations encore une fois à notre nouveau président.
Un grand merci pour votre comparution d'aujourd'hui et les formidables services que vous rendez jour après jour à notre pays.
Mon collègue, M. Wilks, a posé une question très précise en demandant quels médicaments étaient surtout touchés par la consommation illicite. On ne lui a pas vraiment répondu. Peut-être avez-vous une idée des médicaments sur ordonnance qui sont le plus souvent consommés de façon abusive par les enfants et les jeunes?
Je ne saurais vous dire si c'est le cas pour les très jeunes enfants, les adolescents ou les jeunes adultes, mais l'OxyContin est l'un des médicaments qui atteint maintenant des sommets de popularité. C'est une situation qui est préoccupante depuis plusieurs années.
Il y a quelques semaines à peine, ce point était à l'ordre du jour d'une réunion de l'Association canadiennes des chefs de police. Parmi les menaces émergentes qui ont alors été mentionnées, notons le Fentanyl, un opioïde extrêmement puissant. Les chefs de police se sont dit particulièrement inquiets de la montée en popularité de ce médicament, bien qu'il ne soit pas du tout aussi répandu que l'OxyContin.
Comme vous pouvez vous l'imaginer, c'est une question qui inquiète beaucoup les parents. De quels genres de symptômes devraient-ils être à l'affût? S'il arrivait que votre enfant consomme de ces médicaments sur ordonnance dont vous venez de nous citer les deux plus répandus, quels signaux d'alerte pourriez-vous observer?
J'aimerais pouvoir répondre de façon plus précise à votre première question, mais il est difficile pour nous des forces policières, comme pour tous les intervenants présents à cette table, de déterminer exactement quels médicaments sont le plus souvent consommés de façon illicite, car si nous connaissons bien ceux qui nous sont facilement accessibles, c'est ceux que l'on ne voit pas qui causent problème. Je parle des médicaments que chacun de nous garde dans son armoire à pharmacie. Ce sont ces médicaments qui sont subtilisés, un ou deux comprimés à la fois, par l'enfant, l'adolescent ou même le jeune adulte pour consommation illicite. Tout cela se fait à notre insu.
Vous avez tout à fait raison. J'essaie simplement de mieux saisir toute l'ampleur du problème, et je me demande qui consigne des données à ce sujet. Je crois que toutes les personnes ici présentes sont bien conscientes de la gravité de la question, mais il nous serait utile pour la suite de notre étude et la recherche de solutions de pouvoir mieux comprendre dans quelle mesure ce problème est répandu et de connaître les médicaments les plus touchés par la consommation illicite. Il serait bon que nous puissions conseiller les parents en nous appuyant sur des données concrètes et factuelles. Il est possible que votre expérience vous permette de me répondre, mais si ce n'est pas le cas, peut-être pourriez-vous m'aiguiller vers quelqu'un qui saura retracer cette information.
Comme je le disais, les médicaments consommés illégalement sont ceux que nous gardons dans notre armoire à pharmacie. Cela peut aller de l'OxyContin dont nous avons saisi de grandes quantités, jusqu'au Fentanyl, lequel est de plus en plus répandu, en passant par tout un éventail d'autres produits dont les diazépams. Les gens peuvent consommer de façon illicite une foule d'autres médicaments dont ils entendent parler via Internet. Il peut s'agir également d'une combinaison de deux comprimés différents qui produisent un certain effet sur l'organisme. Bien évidemment, cet effet peut varier d'une personne à l'autre, ce qui fait qu'il est très difficile de cibler exactement les symptômes à surveiller sans savoir quel médicament a été consommé.
Je pourrais peut-être ajouter quelque chose. Étant donné que nous avons une clientèle captive que nous sommes en mesure de surveiller d'un peu plus près, nous pouvons constater que lorsque nous bloquons l'accès à une source d'approvisionnement, les individus aux prises avec un problème de toxicomanie non traité se tournent vers un autre médicament, l'alcool, une substance intoxicante ou un produit pour inhalation. Je crois que le caporal Chicoine voulait notamment faire valoir que les efforts déployés pour enrayer l'accès au médicament qui est peut-être le plus répandu aujourd'hui n'auront peut-être pour effet que d'inciter les gens à s'intéresser au médicament suivant sur la liste.
Si vous me permettez, je crois que nos collègues de Santé Canada ont parlé la semaine dernière de nos préoccupations au sujet de la consommation abusive d'analgésiques, de sédatifs et de stimulants, et du suivi qui est effectué en la matière par le truchement de l'Enquête de surveillance canadienne de la consommation d'alcool et de drogues (ESCCAD).
J'aimerais vous dire d'entrée de jeu à quel point j'apprécie pouvoir participer ainsi à une séance de comité un lundi après-midi, surtout que c'est celui de la santé.
Ma première question fait suite à celle posée par mon collègue d'en face concernant la collecte de données par la GRC pour la publication d'un rapport annuel sur la situation des drogues illicites. Comme vous l'avez indiqué, le dernier rapport de la sorte a été publié en 2009. Comme nous le savons tous, les données sont primordiales pour évaluer l'efficacité d'un système, car on ne peut pas simplement se fier à son instinct et aux impressions de chacun. La GRC a pourtant cessé de recueillir ces données qui nous auraient permis d'élaborer des politiques éclairées et de prendre des décisions bien étayées concernant les mesures de prévention à mettre en oeuvre, tout en nous brossant un portrait réaliste de la situation. J'aimerais savoir pourquoi on ne le fait plus. Est-ce la GRC qui a renoncé à se prêter à l'exercice en déterminant qu'elle n'avait plus besoin de cet outil? Je veux savoir pourquoi on a abandonné une activité aussi utile.
Je ne sais pas trop quoi vous répondre. Peut-être qu'un de mes collègues pourrait vous dire pourquoi ce rapport n'est plus produit, car certaines des statistiques qu'on y trouvait sont toujours disponibles. Les données existent toujours; c'est simplement, je présume, qu'on a décidé de ne plus publier ce rapport.
Pour avoir été enseignante et conseillère pendant plusieurs années dans des écoles élémentaires et secondaires, je suis tout à fait à même de jauger la gravité de la situation. Je pense que les députés de tous les partis en sont pleinement conscients. Je crois toutefois que nous savons tous également qu'il n'existe pas de solutions simples. Il nous faut une approche à plusieurs volets.
J'aimerais poursuivre dans le sens d'une question posée également par mon collègue d'en face au sujet des programmes de prévention disponibles pour les jeunes. J'ai été fort impressionnée lorsque vous avez parlé de toute la formation qui est offerte et des différentes mesures qui sont prises du côté des fournisseurs de services. Mais je sais également que nous pourrions épuiser toutes nos ressources et ne plus rien avoir à dépenser sur quoi que ce soit d'autre si nous négligeons d'examiner les causes pour nous attaquer à quelques-unes d'entre elles, en commençant par l'éducation qui est le meilleur antidote... ou le meilleur remède, devrait-on dire, en l'espèce.
Au fil de mes années d'enseignement en Colombie-Britannique, j'ai assisté à l'érosion de bon nombre des ressources disponibles à cette fin. Lorsque j'ai quitté le système d'éducation — et cela remonte à quelques années — une bonne partie des programmes de prévention avaient déjà disparu, non pas en raison d'un manque d'intérêt de la part des intervenants, mais parce que le financement était insuffisant. C'est une situation qui me préoccupe énormément. Je sais que vous représentez le maintien de l'ordre, mais je pense qu'il serait très naïf de notre part de nous limiter à ce seul aspect dans le contexte de la problématique globale que nous souhaitons traiter.
J'ai une dernière observation que je tiens à formuler, après quoi j'aurai une question pour vous. Je suis députée de Newton—North Delta. La portion Newton correspond à la ville de Surrey dont je suis originaire. J'ai été atterrée d'apprendre aujourd'hui que nous avons enregistré notre 22e meurtre de l'année. Dans l'article de journal que j'ai lu, on indiquait que la majorité de ces homicides étaient reliés au trafic de stupéfiants ou à la guerre des gangs. Nous discutons donc d'un sujet qui m'interpelle fortement, car je vis au sein d'une collectivité où il se passe beaucoup de choses, et où chaque nouveau meurtre nous ébranle encore davantage. Nous avons d'ailleurs battu un record à ce chapitre cette année. La plupart des villes sont en quête de records, mais certainement pas de cette nature.
J'en viens donc à vous demander — et j'ai rencontré les services de police de ma circonscription...
Quel genre de coordination s'établit-il entre vous et les autres autorités, dans la recherche de solutions ou l'élaboration d'une stratégie à plusieurs volets, mais pas seulement en aval? Que fait-on pour intervenir en amont?
Je peux répondre. Mon collègue a aussi quelque chose à dire.
Nous avons certainement une stratégie. Pour l'application de la loi, nos stratégies rassemblent plusieurs partenaires. Nous croyons que la résolution du problème n'incombe pas seulement à la GRC, mais plutôt au gouvernement canadien, à tous les intervenants aux stades de l'application ou de la prévention ou qui ont un autre rôle, peu importe lequel.
De même, je crois que, pour maîtriser le problème, il faut s'attaquer aux causes premières, pas seulement aux symptômes. C'est pourquoi nous avons participé à des enquêtes approfondies sur les organisations criminelles qui pourraient se livrer à ce trafic.
Mes félicitations, monsieur le président. Je suis arrivé en retard et j'aimerais profiter de l'occasion pour vous féliciter pour votre élection et remercier nos témoins d'être ici.
J'ai une question très simple, dont la réponse nous permettra peut-être de mieux comprendre le problème.
Pour l'application de la loi, on se trouve devant un groupe en état d'accoutumance aux médicaments délivrés sur ordonnance, un groupe de criminels, qui obtiennent ces médicaments et les distribuent, et, bien sûr, vous prenez les mesures appropriées. Mais on se trouve aussi devant un groupe à qui ces médicaments ont été délivré sur ordonnance du médecin et auxquels il a, je ne sais comment, développé une accoutumance. Techniquement, rien n'est illégal, parce qu'il obtient les médicaments d'un ou de plusieurs médecins, peut-être, à son gré. Et, parfois, ses enfants ou de jeunes visiteurs, éventuellement, peuvent mettre la main sur le médicament.
Maintenant, comment s'attaquer à ce problème? D'après moi, il n'y a pas vraiment d'activité criminelle dans ce dernier cas, mais il y a un problème. Alors, comment s'y attaquer? Avez-vous des exemples, particulièrement la GRC, de collaboration avec les forces de l'ordre de différents pays? Y a-t-il, à l'étranger, dans d'autres services de police, dans la profession médicale aussi, des moyens de le circonscrire? de l'aborder?
La question est très générale, mais une partie du problème, ici, ne procède pas nécessairement d'une activité criminelle.
Une partie de la réponse se trouve dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, l'infraction consistant à obtenir ou à chercher à obtenir une autorisation... Quand on veut obtenir une deuxième ordonnance d'un médecin, on est tenu de lui signaler une ordonnance obtenue dans les 30 jours précédents. C'est une obligation des patients ou des personnes qui veulent obtenir une deuxième ordonnance. Cela peut répondre en partie à votre question.
Peut-être que nos amis de la police ont quelque chose à ajouter.
Pas vraiment. Je ne suis au courant d'aucun autre programme d'autres polices pour combattre le problème. Visiblement, l'apparition d'une dépendance aux médicaments délivrés sur ordonnance revient d'abord à une question de contrôle de la quantité prescrite.
Mais, si nous cherchons des façons de surveiller l'utilisation des médicaments, nous pouvons le faire. Nous pouvons créer un système informatique intégré pour toute la province ou pour un certain nombre de provinces. La nouvelle technologie des étiquettes électroniques, qui sera sur le marché très bientôt, ne permet pas seulement d'enregistrer l'utilisation des médicaments achetés, mais elle permet aussi d'enregistrer et de communiquer ces données au système.
La technologie existe. Que fait-on pour l'adopter et combien de temps faudra-t-il? Êtes-vous au courant de ce qui se fait en matière de surveillance?
Je ne crois pas que le problème soit dû à la technologie. Des programmes et d'autres facteurs compliquent la situation et rendent difficile cette adoption. La protection des renseignements personnels est un facteur. Il y a le partage des compétences: qui est responsable de quoi? Je sais que ce n'est pas insoluble. J'imagine que, graduellement, nous aurons besoin de solutions intégrées. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que la complexité du problème résidait dans le fait que nous essayions de nous occuper de beaucoup de populations différentes pour qui les solutions ne sont pas les mêmes.
Si, pour commencer, nous envisageons une solution technologique pour faire le suivi des médicaments délivrés sur ordonnance, il existe, dans les provinces, des modèles qui fonctionnent bien. Que nous ayons besoin ou non d'un système national, c'est sujet à discussion, et il y a des limites à respecter dans la communication de renseignements et entre les champs de compétences.
Chers témoins du ministère de la Justice, les lois sur la protection de la vie privée peuvent parfois, particulièrement à la faveur des nouvelles lois, entraver la communication de renseignements, etc. Est-ce un obstacle à la mise en commun de l'information, un obstacle que viendraient renforcer les différences entre les lois provinciales, fédérales et territoriales sur la vie privée?
Voilà une excellente question. Elle porte sur ce qui s'est dit précédemment, c'est-à-dire que, manifestement, si quelqu'un se fait prescrire un médicament à des fins médicales, la prescription constitue un renseignement personnel à son sujet, qui est assujetti aux lois fédérales et provinciales en vigueur. Certaines concernent le secteur public; d'autres le secteur privé. Il est sûr que, dans le domaine de la santé, différents acteurs créent et utilisent de l'information. Certains de ces acteurs sont privés; d'autres sont des acteurs de l'État.
Cela cause des difficultés. En effet, l'objet de ces lois n'est pas nécessairement d'empêcher la communication de ces renseignements, mais de la réglementer à certaines fins. Même si, d'un bout à l'autre du pays, les lois se ressemblent et se fondent sur les mêmes principes généraux, elles ne sont pas partout identiques, et on tend à traiter chaque cas comme un cas d'espèce.
En ce qui concerne l'utilisation des médicaments délivrés sur ordonnance, il faut peut-être distinguer de multiples circonstances. Visiblement, des patients respectent la loi, ils respectent la posologie, tandis que d'autres font le contraire. Dans différentes circonstances, la loi autorise la communication de renseignements; dans d'autres, peut-être pas. Visiblement, le remède est l'adoption de plus de lois, si c'est nécessaire.
J'y reviendrai, mais je tiens à poser une question à la GRC.
Vous avez fait allusion aux enfants qui prennent des médicaments dans la pharmacie familiale, etc. Dans ce tableau, où le crime organisé intervient-il? Pouvez-vous esquisser les craintes que suscite sa présence dans ce secteur?
C'est certainement un marché intéressant pour le crime organisé. Le crime organisé y est mêlé. Nous avons enquêté sur des cas dans lesquels nous avons constaté sa présence.
Je pense que les renseignements que nous possédons à ce sujet montrent que probablement plus de 70 groupes criminels opèrent dans ce milieu. Le nombre total de groupes criminels en activité au Canada dépasse amplement 70, comme vous pouvez déjà le savoir.
Dans ce domaine précis, comment le crime organisé s'y prend-il? Est-ce que ces groupes rassemblent tous ces médicaments délivrés sur ordonnance puis les vendent? Sinon, comment font-ils?
Ils s'y prennent de diverses façons. Cela ressemble beaucoup à la manière qui a été décrite. Certains pratiquent des vols dans les pharmacies. D'autres se livrent au trafic de ces médicaments, mais il peut aussi s'agir, dans certains cas, de contrefaçon de médicaments délivrés sur ordonnance. Ils sont présents sur ce marché de différentes façons.
Je reviens aux témoins du ministère de la Justice pour les questionner sur les lois sur la vie privée etc. Vous êtes un spécialiste du domaine. Que peut-on faire pour neutraliser ou faire disparaître les obstacles à la mise en commun des renseignements? Vous avez dit plus de lois; je proposerais le contraire.
Je pense que les lois actuelles permettent la communication et la mise en commun des renseignements personnels dans de nombreuses circonstances. D'après la nature des problèmes évoqués ici, aujourd'hui, le spectre des situations est large. Cela va du patient qui peut perdre ses médicaments à celui qui pourrait vendre les siens, en passant par la vente illégale de médicaments. Il faut vraiment examiner au cas par cas l'échange de médicaments à différentes fins.
Il existe peut-être des scénarios plus problématiques dans ces types de situations, et nous pouvons certainement y trouver une réponse uniforme, mais il serait difficile de donner une réponse complète à tous les problèmes qu'on affronte ici et qui auraient une solution très simple.
On s'interroge beaucoup sur le mésusage des médicaments délivrés sur ordonnance. Je pense qu'il importe surtout de discerner un processus dans cette situation. Le médecin prescrit un médicament. Les opiacés et les opioïdes sont très utiles contre la douleur: postopératoire, due au cancer, due à la chimiothérapie, et ainsi de suite. Ce sont probablement les analgésiques les mieux connus.
Mais si vous vouliez examiner une manière de bloquer cet engrenage, les médecins, qui s'autodisciplinent dans chaque province, ont... C'est pourquoi j'ai parlé, plus tôt, de propager les pratiques exemplaires. Quand je pratiquais la médecine, beaucoup de gens d'autres provinces venaient me voir, pour obtenir des médicaments à base d'opiacés. Ils venaient de toutes les provinces. Ils me disaient que leur médecin en Alberta, à Winnipeg, etc., et je n'ai jamais cédé. Invariablement, je leur répondais: « Donnez-moi son nom, je l'appellerai et je vérifierai. »
En Colombie-Britannique, le collège des médecins peut se faire une idée du phénomène grâce aux ordonnances en triple exemplaire. Chaque ordonnance pour un opiacé ou un opioïde doit être faite en triple exemplaire, et le collège est en mesure d'examiner la quantité que tel médecin prescrit et de voir pourquoi il en prescrit tant, etc. La communication de cette information aux autres provinces a un effet préventif. C'est pourquoi ce programme national ou pancanadien de mise en commun de l'information, entre les collèges, serait un moyen très important pour faire cesser cela.
Mais il faut aussi parler de l'obligation du patient de s'interroger aussi. Ces médicaments causent une très forte dépendance, qui fait qu'on ne peut plus s'en passer, et ça devient le problème. Le patient a un rôle.
Les enfants l'obtiennent dans la pharmacie de leurs parents. Une grande partie de la propagation des médicaments délivrés sur ordonnance dans la rue s'explique par le fait qu'un comprimé d'OxyContin vaut combien? 45 $? Pour les enfants, c'est de l'argent facile. Certaines personnes se livrent à ce commerce et s'enrichissent. Ce n'est pas nécessairement du crime organisé de haut vol — il y en a aussi —, mais c'est à l'échelle de petites communautés qui essaient d'en tirer profit.
L'important, je pense, c'est de s'attaquer aussi à l'aspect accoutumance. Quelqu'un peut-il répondre à cette question jusqu'ici sans réponse, vu que l'opiacé le plus utilisé — nous occupons le premier rang mondial, devant les États-Unis — est l'OxyContin. Les États-Unis ont cessé la fabrication de l'OxyContin générique, qui est facile à consommer dans la rue et ils ont demandé au Canada de faire de même. L'année dernière, le ministre a autorisé six sociétés pharmaceutiques de produits génériques à fabriquer l'OxyContin.
Le secrétaire à la Justice des États-Unis demande maintenant que cela cesse. Comment, quand on est l'autorité qui réglemente l'offre, peut-on tolérer cela? Ne parlez-vous pas à Santé Canada pour l'avertir que les rues en seront pleines, lui faire remarquer que, pendant que ce ministère donne le feu vert, partout en Amérique du Nord, on n'en produit plus, sauf au Canada? La question est vraiment importante. Si nous allons collaborer pour résoudre le problème, il faut une certaine logique, du bon sens dans la collaboration.
Quelqu'un peut-il répondre à cette question? Est-ce que cela a du sens?
Je voudrais savoir combien de travail vous consacrez, puisque vous collaborez avec Santé Canada et d'autres groupes, à l'examen du problème de la demande réelle.
Sachant que l'accoutumance est une maladie chronique, à traiter médicalement... La plupart des toxicomanies ne proviennent pas d'une absence de volonté; elles sont imputables aux neurotransmetteurs du cerveau, etc. Comme nous le savons maintenant, tous s'entendent sur l'idée de thérapie de substitution.
Voici ma question. Que faisons-nous pour nous attaquer, très clairement, à la demande? Collaborez-vous avec Santé Canada et les provinces d'une manière raisonnable pour vous attaquer au problème de l'accoutumance proprement dite et au problème médical et comment pouvons-nous, en même temps, le traiter et le prévenir? Je veux simplement savoir si vous y participez. Je sais que les services de police le font. Mais, à la GRC, j'aimerais savoir si vous voyez le problème de ce point de vue.
Non, aussi avec les autres agents de police de partout au pays. À Vancouver, je sais qu'on considère beaucoup l'accoutumance comme une maladie et non comme un problème uniquement de respect de la loi.
Bon. De par sa nature même, le travail de policier fait que, nécessairement, nous sommes préoccupés par le respect de la loi. Mais, comme j'ai dit, nous savons que ce n'est pas la seule dimension du problème, que c'est aussi un problème pour la collectivité, à la solution duquel chacun a un rôle...
Mais un problème médical. Je tiens à en parler ici et, par conséquent, de la réduction des dommages comme pièce maîtresse de la politique de santé publique. Pour chaque maladie, il y a un volet de réduction des dommages. Historiquement, pourquoi ce volet qui a fait partie des politiques publiques jusqu'en 2005 a-t-il disparu?