HESA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la santé
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 16 juin 2015
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, mesdames et messieurs, et bienvenue à notre comité. Nous entamons aujourd'hui notre étude sur le cancer du poumon au Canada, étude à laquelle nous allons consacrer deux séances. Nous recevons deux groupes cet après-midi, de 15 h 30 à 16 h 30. D'abord, nous entendrons le Dr Paul Wheatley-Price et la Dre Natasha Leighl.
Vous avez 10 minutes. Nous vous écoutons.
Comme ils témoignent à titre personnel, ils auront chacun 10 minutes, mais ils vont coordonner leurs exposés.
Merci beaucoup, monsieur le président, de nous donner l'occasion de témoigner.
Comme vous le savez, près de la moitié des Canadiens auront le cancer à un moment donné de leur vie. Parmi tous les cancers, celui du poumon est la forme de cancer la plus fréquente au Canada. C'est, de loin, la plus grande cause de décès par cancer au Canada et dans le monde. En 2012, l'OMS a déclaré que le cancer du poumon est la cinquième cause de mortalité à l'échelle mondiale, après la cardiopathie ischémique, les accidents vasculaires cérébraux, la maladie pulmonaire obstructive chronique et la pneumonie. Au Canada, cette année, nous prévoyons plus de 26 000 cas de cancer du poumon et près de 21 000 décès. Pour mettre cela en contexte, les quatre cancers les plus répandus au Canada sont le cancer du poumon, le cancer colorectal, le cancer du sein et le cancer de la prostate, mais le cancer du poumon tuera plus de Canadiens que l'ensemble de ces trois autres types de cancer.
Les gens n'associent pas normalement le cancer du poumon à un cancer féminin, mais le cancer du poumon tuera plus de femmes au Canada que le cancer du sein, le cancer de l'ovaire et le cancer de l'utérus pris ensemble. Autrement dit, il s'agit de la principale cause de morbidité et de mortalité au pays et, comme on en a largement fait état, la Société canadienne du cancer prévoit que, dans l'ensemble, le nombre de cas de cancer augmentera de 40 % au cours des 15 prochaines années. Cette hausse est attribuable non pas à un risque accru sur le plan individuel, mais plutôt à l'augmentation de la population canadienne et au vieillissement de la population.
Malheureusement, dans le cas du cancer du poumon, la vaste majorité des patients reçoivent le diagnostic lorsque leur cancer est déjà à un stade avancé et incurable. C'est ce qui explique pourquoi le taux de survie au cancer du poumon est l'un des plus bas parmi tous les cancers. À l'heure actuelle, environ 18 % des patients atteints du cancer du poumon survivent cinq ans après le diagnostic. Cela dit, nous avons des raisons légitimes d'être optimistes en ce qui concerne le traitement du cancer du poumon. Le premier point que j'aimerais vous signaler, c'est que les stratégies de dépistage du cancer du poumon à un stade précoce chez les individus qui ne présentent pas de symptômes pourraient réduire d'au plus 20 % le taux de mortalité du cancer du poumon. Près de 1 250 vies seraient ainsi sauvées chaque année au Canada.
Nous constatons d'autres progrès. Grâce au profilage moléculaire des tumeurs pulmonaires, nous pouvons maintenant déceler, pour ainsi dire, l'empreinte génétique d'un cancer. Nous reconnaissons que le cancer du poumon ne constitue pas une seule maladie, mais une myriade de différents sous-types, pour lesquels il existe aujourd'hui, dans bien des cas, un médicament ciblé. Tout à l'heure, vous entendrez le colonel Jacques Ricard, qui est un médecin au sein des Forces canadiennes ainsi qu'un patient atteint du cancer du poumon et un bénéficiaire d'une de ces nouvelles thérapies moléculaires ciblées.
Très récemment, nous avons entendu parler aux nouvelles de l'immunothérapie, considérée comme la plus extraordinaire avancée depuis quelques années dans le domaine du traitement du cancer du poumon. Notre système immunitaire dépend de multiples points de contrôle ou freins immunologiques, qui empêchent le système immunitaire de suractiver ou d'attaquer nos cellules en santé. Les cellules cancéreuses ont appris à tirer avantage de ces points de contrôle pour éviter de se faire détecter par le système immunitaire. Cette nouvelle génération de médicaments d'immunothérapie agit sur ces points de contrôle, essentiellement en relâchant les freins pour que le système immunitaire s'attaque aux cellules à l'origine du cancer du poumon. D'ailleurs, il y a quelques semaines, nous avons appris une nouvelle très positive sur un nouveau médicament qui a déjà reçu l'approbation accélérée de la FDA aux États-Unis, et nous aimerions que ce médicament soit disponible au Canada le plus tôt possible.
Mon collègue, le Dr Pantarotto, qui est un radio-oncologue, vous parlera peut-être de certaines des nouvelles technologies intéressantes dans le domaine de la radiothérapie pour des traitements très ciblés et très précis. Il y a de l'optimisme, mais c'est dans le contexte d'une maladie qui est extrêmement meurtrière.
La Dre Leighl et moi-même faisons du bénévolat pour un organisme appelé Cancer pulmonaire Canada, en plus de nos fonctions cliniques et universitaires. Cancer pulmonaire Canada est un organisme de bienfaisance national dont le mandat est de diffuser de l'information sur le cancer du poumon, d'appuyer les patients qui en sont atteints et de défendre les intérêts des membres de leur famille. Nous espérons pouvoir élaborer des programmes, et nous travaillons dans ce sens avec les représentants du gouvernement fédéral depuis un an ou deux.
Cela m'amène à parler du rôle que le gouvernement fédéral pourrait jouer, selon nous, dans le dossier du cancer du poumon. Nous demandons respectueusement au comité permanent de chercher des moyens à l'échelle fédérale pour appuyer la lutte contre le cancer du poumon. Par exemple, le gouvernement fédéral peut faire preuve de leadership en ce qui concerne la sensibilisation à une maladie mortelle et la lutte contre la stigmatisation — et la Dre Leighl y reviendra —, tout en continuant ses efforts pour faire du Canada un pays sans fumée. De plus, le gouvernement fédéral peut collaborer avec des organismes comme Cancer pulmonaire Canada dans le but d'élaborer des programmes de sensibilisation au cancer du poumon pour les segments de la population dont le gouvernement fédéral est responsable. D'ailleurs, le Dr Stephen Lam, de la Colombie-Britannique, parlera tout à l'heure d'un programme de dépistage possible pour les anciens combattants.
Nous vous demandons aussi d'envisager de donner des directives à Santé Canada, aux IRSC et à l'Agence de la santé publique du Canada afin de fournir un financement proportionnel au titre de la recherche. La Dre Leighl parlera un peu de nos préoccupations au sujet de l'aide financière disproportionnée consacrée au dossier du cancer du poumon. Nous aimerions également que Santé Canada accorde une approbation réglementaire pour des médicaments contre le cancer du poumon.
Soit dit en passant, nous estimons que le cancer du poumon n'attire pas la même attention que certains autres cancers et maladies. Nous vous invitons à tenir compte de certains exemples, comme ceux provenant des États-Unis. En effet, en 2013, les États-Unis ont adopté un projet de loi qui met l'accent sur les cancers à taux de mortalité élevé, soit principalement le cancer du poumon et le cancer du pancréas.
Voilà qui conclut mes observations. Merci de votre temps.
Je cède maintenant la parole à la Dre Leighl.
Merci beaucoup. Paul et moi sommes honorés de témoigner devant le comité. Nous sommes tous deux oncologues, mais nous travaillons dans deux établissements différents. Nous traitons les patients atteints du cancer du poumon. C'est notre domaine d'intérêt. Nous faisons également du bénévolat auprès d'un organisme, Cancer pulmonaire Canada, qui vise à appuyer les personnes atteintes du cancer du poumon.
Comme Paul vous l'a dit, il s'agit d'un important problème de santé publique. J'aimerais parler un peu des effets dévastateurs de cette maladie sur les personnes qui en sont atteintes au Canada. Je veux aussi parler de ce qui nous empêche de faire des progrès, notamment le très faible taux de survie et la stigmatisation, que j'aborderai un peu plus en détail. Il en résulte un soutien public disproportionné envers les gens ayant reçu ce diagnostic et envers leur famille, ainsi qu'un financement disproportionné au titre de la recherche. Comme Paul, je tiens à souligner certaines des possibilités qui s'offrent à votre comité afin de nous aider concrètement à changer les résultats pour les Canadiens atteints du cancer du poumon.
Le cancer du poumon, comme vous venez de l'entendre, est malheureusement la première cause de cancer au pays. J'ai un esprit de compétition assez développé, mais le fait d'arriver au premier rang dans ce domaine n'a rien de réjouissant. Hélas, le cancer du poumon est, de loin, la principale cause des décès liés au cancer.
Même si 80 % plus de femmes meurent du cancer du poumon que du cancer du sein, le cancer du sein est considéré comme le principal cancer féminin au pays. Par ailleurs, au moins 200 % plus d'hommes meurent du cancer du poumon que du cancer de la prostate; pourtant, c'est le cancer de la prostate qui occupe l'esprit des gens le jour de la fête des Pères quand ils songent aux hommes de leur vie. Nous croyons que cette situation doit vraiment changer. Selon les estimations de Statistique Canada, le cancer demeure la principale cause de décès chez les Canadiens, mais le cancer du poumon, à lui seul, est à l'origine d'un quinzième des décès: chaque année, 8 % des décès au Canada sont attribuables au cancer du poumon. Cette maladie se classe au deuxième rang, derrière les maladies cardiovasculaires.
Qui développe le cancer du poumon au Canada? Bien entendu, il y a les gens ayant des antécédents de tabagisme: 15 % de mes patients fument actuellement. Mais, la grande majorité des patients, soit plus de 60 %, ont cessé de fumer à un moment donné, que ce soit un an avant le diagnostic ou il y a 60 ans. Une proportion croissante de personnes n'ont jamais fumé et n'ont jamais été exposées au tabagisme — c'est le cas de 25 % de mes patients, mais dans d'autres cabinets, il peut s'agir d'un pourcentage aussi bas que 10 à 15 %.
La plupart des gens, soit 75 %, reçoivent le diagnostic à un stade déjà incurable, ce qui témoigne vraiment du manque de dépistage précoce au pays et du manque de sensibilisation quant aux façons dont nous pouvons détecter rapidement le cancer du poumon.
Au moins la moitié de mes patients atteints du cancer du poumon doivent arrêter de travailler. À peine 15 % sont en mesure de continuer de subvenir aux besoins de leur famille. Le cancer du poumon est une cause importante de difficultés financières pour les familles canadiennes. Plus du tiers des patients estiment que leur maladie a un effet dévastateur sur leur famille et leurs finances. Nous savons que les gens atteints du cancer du poumon — selon une étude menée aux États-Unis — connaissent un taux de faillite plus élevé que les gens qui n'ont pas de cancer. Parmi tous les cancers à l'étude, le cancer du poumon est celui qui entraîne le taux de faillite le plus élevé. J'espère que cela vous donne une idée des effets dévastateurs que cette maladie peut avoir non seulement sur une personne, mais aussi sur une famille.
Nous avons également appris que bon nombre des personnes atteintes du cancer du poumon reçoivent le diagnostic trop tardivement, si bien qu'elles ne peuvent pas recevoir de traitement. Dans le cadre de certains travaux que nous avons effectués et dont les résultats ont été publiés récemment, nous avons découvert que seulement le quart des gens chez qui nous avons diagnostiqué un cancer avancé peuvent recevoir certaines des thérapies incroyables dont Paul vient de parler. Encore une fois, cela en dit long sur la nécessité d'un dépistage précoce et d'un changement de mentalité quant à la façon et au moment de diagnostiquer cette maladie.
Il s'agit vraiment d'un cancer meurtrier. Même si le taux de survie après cinq ans pour les cas d'un cancer du poumon a augmenté de 18 % au prix de beaucoup d'efforts, ce taux s'élève à 88 % pour le cancer du sein, à 95 % pour le cancer de la prostate et à 65 % pour le cancer du côlon. On peut donc voir l'énorme disparité au chapitre du taux de survie, à lui seul. En raison de ce faible taux de survie, nous n'avons pas une voix puissante sur le plan de la défense des intérêts. À cela s'ajoute la stigmatisation, car le public a généralement l'impression que si vous avez un diagnostic de cancer du poumon, c'est parce que vous avez des antécédents de tabagisme et, donc, que vous le méritez.
Ce faible taux de survie est attribuable, en partie, au dépistage tardif. Je crois que le Dr Stephen Lam vous parlera de la disponibilité de programmes de dépistage organisés, qui peuvent réduire considérablement le taux de mortalité chez les personnes à haut risque, et ce, beaucoup plus que les programmes de dépistage actuels pour des maladies comme le cancer du sein ou le cancer du col de l'utérus.
C'est une maladie virulente. Bien que nous fassions des progrès, le cancer du poumon est associé à un taux de létalité très élevé. À l'heure actuelle, la plupart des personnes aux prises avec cette maladie en meurent. Il y a un véritable manque de fonds affectés à la recherche. Selon un rapport publié en 2011 par Charity Intelligence Canada, le cancer du poumon ne reçoit que 7 % des fonds dédiés à la recherche et moins de 1 % des dons publics, alors que cette maladie compte pour 27 % des décès attribuables au cancer chez les Canadiens. Je pense que cela en dit long sur la stigmatisation.
Selon d'autres travaux que nous avons examinés, même si le financement pour lutter contre le cancer du poumon augmente — entre 2005 et 2010, il a presque doublé, passant de 10 millions à près 22 millions de dollars —, il ne représente encore qu'une fraction des 536 millions de dollars qui ont été consacrés à la recherche en 2010. Vous pouvez voir que cela ne correspond qu'à 4 % du montant total, et ce, pour un cancer qui tue plus du quart des Canadiens emportés par une forme ou une autre de cancer.
J'ai aussi regardé ce qui s'est fait au cours de la dernière année. Les Instituts de recherche en santé du Canada ont donné cinq subventions de recherche sur le cancer du poumon, soit un investissement total de 230 000 $ sur un an. Il s'agit d'un organisme qui dispose d'un budget de 1 milliard de dollars pour financer la recherche qui se fait à l'échelle du pays, toutes maladies confondues. En comparaison, on constate que 500 subventions ont été accordées à la recherche sur le cancer du sein au cours des 5 dernières années, pour un total de plus de 140 millions de dollars, alors que la recherche sur le cancer du poumon ne faisait l'objet que de 159 subventions, pour un total de 39,6 millions de dollars. Encore une fois, on peut voir qu'il y a un déséquilibre en matière de financement et de soutien.
Cancer pulmonaire Canada a mené un sondage en ligne. Nous avons demandé à 1 600 Canadiens de nous dire ce qu'ils savaient au sujet du cancer du poumon. Les réponses données nous ont permis d'apprendre que seulement le tiers des personnes interrogées savaient que le cancer du poumon est le cancer le plus meurtrier de tous. Encore une fois, la plupart des femmes croyaient que le cancer du sein était le plus meurtrier des cancers chez les femmes, et que le cancer de la prostate détenait ce titre chez les hommes. La plupart des gens, dont les fumeurs, n'avaient pas discuté des risques de cancer du poumon avec leur médecin, et seulement 2 % des sondés étaient au courant de l'existence du Mois de la sensibilisation au cancer du poumon, en novembre.
Le lien avec le tabagisme était très bien connu. Mais, comme vous l'entendrez plus tard, le radon est aussi un important facteur de risque, et seulement 1 % des sondés le savaient. Du reste, seulement 7 % des propriétaires de maison sondés ont dit avoir soumis leur domicile à un test de détection du radon.
Deux tiers des répondants estimaient que les gens étaient très responsables des torts qu'ils s'étaient infligés en fumant. Au lieu de désigner, par exemple, les maladies du coeur ou d'autres types de cancer comme étant des conséquences du tabagisme — ce que nous savons —, ils estimaient que les gens atteints d'un cancer du poumon méritaient le moins leur sympathie, suivis de ceux qui boivent trop et ceux qui mangent trop. Encore une fois, il semble y avoir un énorme préjugé défavorable à l'endroit des gens qui souffrent de cancers découlant d'habitudes de vie et de ceux qui ont fumé, ainsi que pour toutes les autres maladies associées au tabagisme, entre autres les maladies du coeur. Mais les gens qui ont un cancer du poumon restent ceux envers qui les préjugés sont les plus virulents.
Alors, qu'en est-il du dépistage? Environ le quart des Canadiens savent qu'il existe un test de dépistage du cancer du poumon, et 90 % des Canadiens ont affirmé qu'ils appuieraient un programme national de dépistage pour les personnes à haut risque. Nous savons que le dépistage est autorisé et financé aux États-Unis. Le Partenariat canadien contre le cancer estime que l'instauration de programmes de dépistage permettrait de sauver la vie de 1 250 Canadiens. J'estime que de telles mesures pourraient avoir une incidence énorme sur les taux de survie.
Cela dit, j'aimerais encore une fois mettre en relief les domaines prioritaires pour lesquels ce groupe pourrait nous être d'un grand secours. Nous avons besoin d'une direction nationale pour sensibiliser la population et gagner les gens à notre cause, pour déboulonner les préjugés tout en travaillant à un Canada sans fumée. Nous avons besoin d'un mandat national qui aurait pour objet de réduire la mortalité attribuable au cancer du poumon. Les États-Unis ont une loi à cet égard. Je crois que les problèmes sont les mêmes au Canada, et les besoins aussi. L'instauration du dépistage permettra de transformer le visage de la maladie en profondeur, de changer le taux de survie et d'accomplir d'importants progrès dans la lutte au cancer du poumon. Nous devons aussi nous donner comme mission de favoriser l'augmentation du financement de la recherche sur le plan national jusqu'à ce qu'il atteigne un montant qui soit proportionnel à l'incidence qu'a cette maladie dans la population, certes, mais aussi pour augmenter nos chances de guérir les personnes atteintes du cancer du poumon au Canada.
Nous avons besoin de notre propre campagne nationale pour combattre les cancers les plus mortels, y compris le pire de tous, le cancer du poumon. Merci.
Très bien. Merci beaucoup.
Nos prochains témoins sont Rob Cunningham et Robert Nuttall, de la Société canadienne du cancer.
Allez-y.
Je m'appelle Robert Nuttall. Je suis le directeur adjoint des politiques de lutte contre le cancer. C'est moi qui donnerai l'exposé, mais mon collègue ici présent, Rob Cunningham, qui est analyste principal des politiques, me prêtera main-forte lors de la période des questions.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui du cancer du poumon. Nous représentons la Société canadienne du cancer, un organisme national bénévole à caractère communautaire dont la mission est d'éradiquer le cancer et d'améliorer la qualité de vie des personnes touchées par le cancer.
Comme vous l'avez entendu, le cancer du poumon contribue dans une large mesure au problème du cancer en général au Canada, et notre organisme s'en préoccupe beaucoup. Le cancer du poumon est le cancer diagnostiqué le plus répandu au Canada. On s'attend à ce que 26 600 nouveaux cas soient diagnostiqués cette année. De plus, comme vous l'avez entendu, le taux de survie relative à cinq ans pour le cancer du poumon est de 17 %, soit l'un des pires résultats, tous cancers confondus. En comparaison, le taux de survie relative à cinq ans pour l'ensemble des cancers est de 63 %. Nous prévoyons que 20 900 Canadiens mourront d'un cancer du poumon cette année. Comme nous l'avons entendu, ce chiffre est supérieur à celui de l'ensemble des victimes du cancer du sein, du cancer de la prostate et du cancer colorectal.
Ces chiffres sont considérables, mais la lutte que nous menons contre cette maladie connaît un certain succès. Les taux d'incidence du cancer du poumon chez les hommes reculent depuis les années 1980, et le taux d'incidence chez les femmes a finalement cessé d'augmenter. Ceci est attribuable aux tendances constatées depuis un certain nombre d'années en matière de tabagisme. Cependant, même si la proportion de fumeurs diminue, 19 % des Canadiens n'ont pas encore renoncé au tabac.
Le tabagisme est la principale cause de cancer du poumon. Or, bien que son rôle soit vérifiable dans 85 % des cas, il existe d'autres facteurs qui peuvent causer ce type de cancer — des facteurs qui, du reste, peuvent augmenter encore davantage les risques pour les fumeurs qui y sont exposés.
L'un de ces facteurs est le radon, un gaz radioactif incolore et inodore présent dans la nature. On estime qu'environ 16 % des décès découlant d'un cancer du poumon sont attribuables au radon. C'est plus de 3 000 décès par année. Sur le plan de la santé, les préoccupations concernent principalement les espaces intérieurs, où le radon peut s'accumuler et atteindre des niveaux élevés. Santé Canada recommande une limite de 200 becquerels par mètre cube dans les espaces intérieurs, même s'il convient de souligner qu'avec le radon, on ne reconnaît aucun niveau que l'on peut qualifier de sécuritaire.
Les Canadiens connaissent peu les problèmes associés au radon. Un sondage effectué l'automne dernier nous a permis de constater que seulement 32 % des Canadiens avaient eu vent ou étaient bien au fait de ce problème. Ils sont par ailleurs 16 % à n'en avoir jamais entendu parler. La seule façon de savoir si le radon environnant est en forte concentration est de faire tester sa maison. Or, notre sondage indique que 96 % des Canadiens n'ont pas fait tester la leur. La principale raison évoquée par la plupart des sondés était qu'ils n'avaient tout simplement jamais pensé à cela, ce qui montre à quel point il serait important d'informer les gens à ce sujet.
La Société canadienne du cancer apprécie le travail que fait Santé Canada pour conscientiser la population à ce problème par l'intermédiaire de sa campagne nationale « Occupe-toi du radon ». Nous croyons cependant que certaines initiatives additionnelles pourraient être prises à l'échelon fédéral pour réduire au minimum les risques d'exposition au radon. Il pourrait s'agir d'incitatifs financiers comme des crédits d'impôt pour aider les propriétaires à réduire les concentrations de radon dans leur maison; de passer en revue les lignes directrices de Santé Canada afin d'évaluer s'il ne serait pas mieux approprié d'abaisser la limite à 100 becquerels par mètre cube; de revoir les codes de construction nationaux pour faire en sorte qu'ils tiennent compte de nouvelles mesures dans la construction des nouvelles maisons; et de veiller à ce que la présence de radon soit testée dans les immeubles publics et que des mesures d'atténuation soient prises lorsque les niveaux dépassent ceux des lignes directrices de Santé Canada.
Une autre des grandes causes de cancer du poumon est l'amiante. Bien qu'il n'y ait plus de mines d'amiante en exploitation au Canada, de nombreux travailleurs continuent d'être exposés à l'amiante présent dans certains produits et certains immeubles, ou par l'intermédiaire d'importations d'amiante brut et de produits contenant de l'amiante. Certaines choses pourraient être faites pour réduire encore davantage l'exposition à l'amiante. On pourrait par exemple créer et tenir des registres sur l'amiante, comme un registre public faisant état des immeubles qui contiennent de l'amiante, et un registre des maladies, qui nous permettrait de savoir combien de Canadiens sont exposés à l'amiante dans leur milieu de travail. De plus, nous aimerions que cesse graduellement la production de nouveaux produits contenant de l'amiante, de manière à ce que nous puissions un jour éliminer les risques d'exposition pour les Canadiens.
Un certain nombre de produits chimiques présents sur les lieux de travail peuvent aussi favoriser le développement du cancer du poumon. Les secteurs où les risques sont les plus grands sont ceux de la construction et de l'industrie manufacturière. Les stratégies déployées pour protéger les travailleurs varieront selon les produits en cause. Il faut toutefois que des politiques soient mises en place sur les lieux de travail pour tenter de réduire l'exposition à ces produits ou pour l'éliminer complètement partout où ce sera possible de le faire.
Un autre facteur de risque que nous gardons à l'oeil est la pollution de l'air. En 2013, le Centre international de recherche sur le cancer a classé comme cancérigènes la pollution atmosphérique et les particules contenues dans l'air pollué. La pollution de l'air est un phénomène difficile à définir avec précision: il comprend de nombreuses différentes composantes et il est assujetti à une foule de facteurs indépendants comme les fluctuations météorologiques et les industries du milieu. Plusieurs particules contenues dans l'air pollué sont reconnues comme étant des agents cancérigènes, tels que les gaz d'échappement des moteurs diesel, le benzène, certains composés organiques volatils et d'autres composés.
On peut protéger les Canadiens contre la pollution atmosphérique en mettant en oeuvre des initiatives qui visent à surveiller les rejets, réduire les émissions et suivre l'évolution des maladies dans les collectivités touchées.
De plus, notre organisation contribue grandement au financement de la recherche. L'année dernière, nous avons investi 5,1 millions de dollars afin de financer à l'échelle nationale un vaste éventail de projets liés au cancer du poumon et au tabagisme. Au nombre des projets marquants que nous finançons, on retrouve des recherches visant à identifier les gènes qui pourraient entraîner des risques de cancer du poumon, en particulier chez les non-fumeurs; un modèle qui nous donnera de nouvelles idées de la façon dont débute le cancer du poumon; des recherches sur les cancers imputables au travail dans l'industrie minière; et l'élaboration d'un nouveau type d'immunothérapie qui peut cibler le micro-environnement d'une tumeur.
Il y a deux autres projets que je tiens à souligner. L'un des projets que nous finançons et qui porte sur les cancers professionnels au Canada nous permettra de recenser le nombre de cas de cancer pouvant être attribués à des expositions en milieu de travail et de cerner les coûts économiques associés à ces expositions. Le deuxième projet repose davantage sur une approche fondée sur la population puisqu'il nous permet d'étudier le nombre de cancers au Canada qui sont dus au mode de vie et à des facteurs environnementaux. Les deux études nous permettront de mieux comprendre le nombre de cancers du poumon qui pourraient être évités au Canada.
Votre groupe aimerait également prendre connaissance des nouvelles pratiques exemplaires liées au dépistage et à la détection précoce. Comme vous en entendrez probablement parler au cours des prochains jours, une étude américaine cruciale a révélé une réduction de 20 % de la mortalité liée au cancer du poumon chez les gens qui subissent des tomodensitométries thoraciques à faible dose à titre de tests de dépistage. L'étude portait sur plus de 53 000 personnes âgées de 55 à 74 ans ayant des antécédents de tabagisme. Le dépistage du cancer du poumon pourrait réduire le nombre de décès par cancer enregistrés au Canada. Il pourrait également avoir une incidence sur les coûts associés au traitement du cancer. Ces coûts devront être comparés aux coûts qu'occasionneraient la mise en oeuvre et l'exécution de programmes. Contrairement aux autres programmes de dépistage qui ciblent tous les gens appartenant à un certain groupe d'âge, le dépistage du cancer du poumon est plus efficace lorsqu'il vise une population à risque élevé. Cela va rendre difficile le recrutement des participants aux programmes.
Enfin, nous savons que l'abandon du tabagisme contribue grandement à réduire le nombre de décès par cancer du poumon. Nous devrions donc chercher à intégrer des programmes de renoncement au tabac dans les programmes de dépistage du cancer du poumon.
Un certain nombre d'initiatives sont actuellement en cours à l'échelle nationale afin d'aider les planificateurs et les décisionnaires à comprendre le dépistage du cancer du poumon. Le Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs formule en ce moment des recommandations relatives au dépistage du cancer du poumon. Une étude pilote sur le dépistage du cancer du poumon est en cours en Alberta. Un réseau mis sur pied par le Partenariat canadien contre le cancer réunit des experts, dont des représentants de la société, afin de favoriser la mise en commun de renseignements à cet égard. Ce groupe a joué un rôle dans l'élaboration d'un cadre de dépistage du cancer du poumon, un outil qui sert à soutenir les administrations dans leurs délibérations relatives au dépistage du cancer du poumon ou leur planification de ces activités. Nous souhaitons que les responsables des programmes de dépistage prennent toutes les précautions voulues lorsqu'ils évalueront l'incidence du dépistage du cancer du poumon, afin de garantir que les programmes seront élaborés d'une façon responsable et fondée sur des données probantes.
Enfin, comme cela a déjà été mentionné, le cancer du poumon fait l’objet de préjugés. Le préjugé qui domine, c’est celui selon lequel il s’agit d’une maladie que les gens s’attirent en fumant. Les patients qui en sont atteints sont communément victimes de ces préjugés, ce qui peut entraîner chez eux une détresse psychologique et réduire leur qualité de vie. Une étude menée en Ontario seulement l’année dernière et portant sur les professionnels et les administrateurs de la santé ainsi que les organismes sans but lucratif a révélé que les patients atteints du cancer du poumon ressentent de la culpabilité et de la honte en raison des préjugés associés à leur maladie. Certains participants à l’étude ont signalé qu’à leur avis, ces préjugés ont eu pour effet de réduire les soins qu’on leur prodigue et le financement dont bénéficie le cancer du poumon, comparativement aux autres cancers.
Je souhaite conclure en citant les commentaires que quelqu’un a affichés sur notre site Web appelé ParlonsCancer.ca, qui offre un service d’entraide communautaire aux personnes atteintes du cancer du poumon. Une femme a écrit ce qui suit :
Je suis une femme de 58 ans qui a commencé à fumer à 13 ans, à l’époque où tout le monde fumait, et qui a finalement réussi à abandonner la cigarette seulement un peu avant que la biopsie de mon poumon confirme en janvier 2014 que je souffrais d’un cancer du poumon… Au travail, je l’ai annoncé seulement aux personnes essentielles parce que j’étais gênée, et je me réjouis de ne pas avoir encore été forcée de retourner au travail… pour affronter les questions. Au sein d’une entreprise relativement petite qui emploie moins de 200 travailleurs, cinq de mes anciens collègues, tous de sexe féminin, sont morts du cancer du poumon au cours d’une période de 5 à 6 ans — des fumeuses, des non-fumeuses ou d’anciennes fumeuses, peu importe. Le cancer du poumon est une maladie particulièrement mortelle… Malgré l'énormité des préjugés associés à cette maladie, personne ne mérite d’avoir le cancer.
En conclusion, je précise que le cancer du poumon est la principale forme de cancer au Canada et qu’il cause plus de décès que les cancers du sein, de la prostate, du côlon et du rectum combinés. La cigarette est le plus important facteur de risque pour le cancer du poumon, mais il y en a d’autres qui ont de graves répercussions, comme le radon, l’amiante, la pollution atmosphérique et un certain nombre de cancérigènes professionnels. La sensibilisation au radon est faible puisque seulement 30 % des Canadiens le connaissent un peu ou très bien.
Les gens atteints du cancer du poumon font souvent face à de graves préjugés. Quelle que soit la cause de leur cancer, les Canadiens et leur famille qui sont aux prises avec cette horrible maladie devraient recevoir autant d’aide que possible.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup.
Mme Moore est la première intervenante, et je crois qu'elle posera ses questions en français. Si vous avez besoin d'entendre la traduction des interprètes, il vous suffit de mettre un écouteur.
Je vous montrerais bien mon français, mais je n'ai pas l'intention de l'utiliser avant le mois de juillet.
Des voix: Oh, oh!
[Français]
Merci, monsieur le président.
Mes premières questions concernent le dépistage du cancer. Comme l'a dit M. Wheatley-Price, quand un cancer est détecté, souvent, il n'est plus traitable. En fait, il est déjà difficile à traiter ou non traitable. On ne traitera alors que les symptômes.
J'aimerais poser une question au sujet des programmes de dépistage. À partir de quel âge les tests de dépistage sont-ils recommandés et dans quelles situations? Bien sûr, on recommande ces tests aux fumeurs, mais serait-il pertinent de les recommander aux soudeurs et aux gens qui travaillent dans un environnement plus à risque? Quelles personnes devraient être visées par le programme de dépistage? Dans un monde idéal, bien sûr, à partir de quel âge serait-il préférable de commencer ces tests pour s'assurer de détecter le plus grand nombre de personnes qui ont un cancer du poumon?
[Traduction]
Merci. Voilà une excellente question.
Je pense que Dr Stephen Lam pourra y apporter une meilleure réponse. Les meilleures preuves de la diminution de la mortalité des personnes à risque de développer un cancer du poumon sont observées chez celles qui sont âgées de 55 à 74 ans et qui ont consommé un grand nombre de cigarettes. Nous parlons d'une consommation mesurée en ce que nous appelons des paquets-années, comme une consommation de 30 paquets-années. La population que nous connaissons le mieux est composée de gens qui ont fumé un paquet par jour pendant 30 années et qui n'ont pas abandonné la cigarette au moins 15 années avant leur test de dépistage. Lorsqu'on songe à la capacité de détecter des cancers et à son rapport coût-efficacité, on pourrait envisager de commencer à tester des gens plus âgés, des gens ayant été exposés davantage à la cigarette, ainsi que d'ajouter certains facteurs de risque. Je crois que Stephen vous présentera certaines des recommandations, mais je pense qu'à l'heure actuelle, les candidats les plus jeunes auraient 55 ans.
De nombreuses questions sont soulevées, comme « Que se passe-t-il si je n'ai jamais fumé? » ou « Qu'en est-il des gens ayant des antécédents familiaux et ayant subi d'autres expositions professionnelles ». Pour le moment, les meilleures données à cet égard proviennent de certains travaux effectués par Martin Tammemägi, un chercheur canadien. Il a publié un calculateur de risque, que nous pouvons certainement communiquer aux gens afin qu'ils calculent leur risque de cancer du poumon. Toutefois, en ce moment, les données les plus probantes sont liées aux personnes âgées de 55 à 74 ans et ayant consommé un grand nombre de cigarettes.
Paul, voulez-vous ajouter quoi que ce soit à cela?
Je pense que vous avez probablement couvert les principaux éléments.
Vous êtes conscients des conditions qui doivent être réunies pour qu’un programme de dépistage soit couronné de succès. Il faut, entre autres, avoir accès à une population à risque auprès de laquelle nous pouvons intervenir, au lieu de simplement diagnostiquer les gens plus tôt sans pouvoir changer le cours de leur maladie — ce que nous faisons déjà. Il faut aussi disposer d’un test sans danger et accessible, ce que nous procure la tomodensitométrie à faible dosage. Il faut aussi disposer d’un traitement efficace. Nous en avons un, et il prend la forme d’une chirurgie ou, dans certains cas, d’une radiothérapie pour les cancers diagnostiqués à un stade précoce. Enfin, il faut que les coûts du programme soient abordables, ce qui — heureusement pour moi — est votre problème, et non le mien.
Il serait probablement irréaliste de faire subir des tomodensitomètres à toute la population pour dépister ces cancers. Les données recueillies jusqu’à maintenant indiquent qu’il faut cibler les personnes les plus à risque. Nous savons que 85 % des cancers du poumon sont liés au tabagisme. Par conséquent, nous faisons passer des tests de dépistage à ceux qui ont beaucoup fumé. C’est auprès d’eux que nous avons observé l’avantage de ces tests. Si, dans les années à venir, nous pouvons prouver que cette approche est efficace, abordable et acceptable pour la population et le trésor public, et que ces preuves sont probantes, pourquoi ne pourrions-nous pas envisager d’étendre ce programme à d’autres groupes?
En ce qui concerne le groupe d’âge approprié, j’estime que l’autre facteur à prendre en considération, c’est que les données recueillies dans le cadre de l’étude liée au National Lung Screening Trial indiquent que les bienfaits sont observés chez les gens âgés de 55 à 74 ans qui satisfont au critère des 30 paquets-années. Par conséquent, si vous décidiez de lancer un programme, vous commenceriez par cibler ces gens.
L’autre problème qui survient en cas de dépistage excessif — et nous l’observons dans le contexte d’autres types de dépistage —, c’est que le dépistage ne fonctionne pas pour certaines populations. Ce problème est souvent lié aux effets néfastes qui se rattachent au dépistage. Lorsqu’on cherche un cancer, il arrive qu’on trouve un problème qui n’est pas de nature cancéreuse. Toutefois, pour arriver à cette conclusion, il faut parfois faire subir à la personne un grand nombre de tests qui sont considérés comme des analyses de suivi, des biopsies, etc. Ces tests peuvent mettre la santé d’une personne en danger.
Il faut donc minimiser les effets néfastes du dépistage. On doit s’assurer que les tests n’aboutissent pas à des faux positifs, qui pourraient amener des gens à subir des chirurgies inutiles ou des traitements de ce genre, tout en maximisant les bienfaits de ces tests. Il faut toujours déterminer la population qui bénéficiera le plus du dépistage en échange de ses effets néfastes. Je pense que, dans le cas d’autres groupes d’âge ou d’autres facteurs de risque, il est possible qu’il y ait des effets néfastes supplémentaires, si l’on n’est pas certain que le dépistage sera profitable aux patients. Je crois que ces populations doivent être prises en considération dans certaines des études.
[Français]
Dans le cas où un patient qui subirait un tomodensitogramme pour un problème donné présenterait un risque raisonnable de cancer du poumon, serait-il avisé de vérifier ses poumons à la même occasion?
Des gens subissent des tomodensitogrammes pour diverses raisons. Comme ils sont déjà sur place, pourrait-il être pertinent d'évaluer leurs poumons s'il y a un risque raisonnable de cancer?
[Traduction]
Eh bien, c’est logique lorsque vous décrivez la situation ainsi. Bon nombre de mes patients ont reçu un diagnostic précoce de cancer exactement de cette façon.
J’aime raconter l’histoire d’une dame qui est allée acheter une dinde pour son souper d’Action de grâce. Elle est allée en chercher une dans l’un de ces énormes congélateurs commerciaux à l’arrière du magasin. Elle désirait acheter la dinde qui se trouvait dans le fond du congélateur et, en cherchant à l’atteindre, elle est tombée dans le congélateur et s’est contusionné les côtes. Comme ses côtes étaient douloureuses, elle s’est rendue à l’hôpital. On lui a fait passer un tomodensitomètre qui a révélé un cancer du poumon. Elle a été guérie parce que son cancer a été découvert à un stade précoce.
Ce serait aller plus loin que de dire que, si une fumeuse se cogne le genou en tombant et se rend aux urgences, on lui fera passer un tomodensitomètre des poumons en plus d’une radiographie du genou. Je ne suis pas certain qu’un grand nombre d’urgentologues, par exemple, souscriraient à cette idée. Donc, bien que ce soit logique lorsque vous décrivez la situation ainsi, je ne suis pas sûr que la médecine clinique soit vraiment pratiquée ainsi. Cette responsabilité pourrait incomber à un omnipraticien…
[Français]
[Traduction]
J’aimerais remercier tous les témoins d’être venus participer à la séance du comité de cet après-midi.
J’adresse ma première question au Dr Wheatley-Price et au Dre Leighl. J’aimerais revenir sur les statistiques. Je comprends que vous avez déjà mentionné que la majorité des gens atteints du cancer du poumon, soit 85 %, sont des fumeurs, et, à ma connaissance, ce groupe est composé d’un nombre plus ou moins égal d’hommes et de femmes. Cependant, dans le groupe des non-fumeurs, je crois comprendre que le nombre de femmes atteintes du cancer du poumon est plus élevé que le nombre d’hommes. J’ignore si le pourcentage que je vais mentionner est exact, mais j’ai entendu dire que les non-fumeuses avaient 50 % plus de chances de développer un cancer du poumon que les non-fumeurs. Mais il se peut que je sois dans l’erreur à cet égard.
Est-ce que quelque chose indique la raison pour laquelle c’est ainsi? Y a-t-il eu des percées à ce sujet?
C'est une excellente observation. Certaines études publiées semblent indiquer précisément ce que vous venez de souligner, soit que les femmes n'ayant jamais fumé courent deux fois plus de risque de développer un cancer du poumon que les hommes n'ayant jamais fumé. Il n'existe actuellement aucune preuve concluante qui permettrait d'expliquer cette situation. Des questions ont été soulevées concernant les oestrogènes et le potentiel des oestrogènes et de la fumée secondaire, mais rien de concluant n'en est ressorti.
Nous savons toutefois que chez les patients n'ayant jamais fumé, nous sommes plus susceptibles de détecter des anomalies à l'intérieur même du tissu cancéreux, des gènes moteurs, des gènes devenus anormaux qui favorisent l'apparition du cancer et se prêtent davantage à un traitement qui cible cette anomalie génétique en particulier. C'est ce que nous avons constaté, et il existe des types d'anomalies plus courantes chez les femmes, comme la mutation spéciale qu'on appelle le récepteur du facteur de croissance épidermique.
Nous ne savons donc pas pourquoi, mais nous voyons cela dans la pratique clinique.
Les statistiques relatives aux groupes auxquels le gouvernement fédéral doit fournir des soins de santé, soit les militaires, les membres de la GRC et les Autochtones, sont-elles comparables à celles de la population en général? Y a-t-il quelque chose que nous devrions examiner, quelque chose d'alarmant?
Eh bien, je peux dire qu'actuellement, chez les Premières Nations, le taux de cancer du poumon n'a pas encore atteint celui de la population canadienne en général; il est plus bas, parce que le taux de tabagisme chez les Premières Nations a toujours été inférieur. Il est actuellement de 57 %, comparativement à 19 % dans la population en général, mais dans le passé, il était inférieur. C'est ce que je peux vous dire là-dessus.
D'accord.
Ma prochaine question porte sur la prévention. Que devrait savoir le public concernant la façon de prévenir le cancer du poumon? Nous avons entendu parler du tabagisme et du radon. Y a-t-il quelque chose de nocif dans notre alimentation? Quand vous évaluez le cas des patients, examinez-vous les antécédents familiaux? Est-ce utile ou non?
Je sais que notre temps est limité; j'aimerais donc vous poser la question suivante, qui concerne la détection précoce. Je crois comprendre que la technologie est accessible. Au moyen du cadre national, un projet pilote a été mis sur pied en Alberta, comme on l'a mentionné. Lorsqu'on détecte un cancer à un stade très peu avancé chez un patient, que fait-on? Est-ce qu'on intervient ou non? J'ai entendu dire que parfois, une détection précoce ne signifie pas nécessairement une intervention précoce. Comment gère-t-on cela?
Pour répondre à la première question sur ce que nous devrions faire concernant la population en général, étant donné que le tabagisme est encore le principal facteur de risque, toute stratégie qui ne comprend pas des mesures visant à réduire le tabagisme n'aura que des effets négligeables. Nous pouvons sensibiliser les gens au sujet du radon et leur parler des mesures concernant l'amiante, mais au bout du compte, pour vraiment changer les choses, je pense que nous devons continuer de mettre l'accent sur les programmes de lutte contre le tabagisme, peut-être sur les taxes et la publicité relative aux espaces sans fumée. D'après ce que je comprends, nous n'avons pas encore atteint notre objectif d'un Canada sans fumée, et il existe des différences selon les provinces.
En fin de compte, je pense que le tabagisme est probablement ce que nous devrions continuer de cibler.
À ce sujet, comme l'équipe de la Société canadienne du cancer nous l'a dit, en plus des mesures visant à faciliter le renoncement au tabac, une évaluation du risque lié au radon et à l'exposition au radon, ainsi que des mesures pour réduire l'exposition à l'amiante et les autres sources d'exposition en milieu de travail sont très importantes, selon moi.
Vous avez tout à fait raison. Il existe d'autres facteurs. Les antécédents familiaux sont importants. Je crois que c'est là le défi que doivent relever les chercheurs. Si, avec votre aide, nous pouvons détecter les personnes les plus à risque et changer le fardeau de cette maladie, la prochaine étape, pour nous, sera de cibler les patients ayant des antécédents familiaux afin de parvenir à une meilleure compréhension de la maladie, un peu comme nous l'avons fait pour le cancer du sein, le cancer de l'ovaire, le cancer du côlon, et d'autres syndromes liés aux antécédents familiaux.
Nous savons déjà qu'il existe des anomalies génétiques particulières. Par exemple, le gène du récepteur du facteur de croissance épidermique, dont j'ai parlé tout à l'heure, peut être héréditaire. Si nous pouvons cibler le plus grand nombre de personnes à risque possible, je pense que nous pourrons alors adopter une approche systématique à l'égard des autres facteurs de risque, en particulier chez les personnes qui n'ont jamais fumé et celles qui ne présentent aucun risque apparent. Je pense que c'est un grand domaine d'intérêt en matière de recherche, et effectivement, les antécédents familiaux et possiblement les gènes sont liés au risque de cancer du poumon.
M. Wladyslaw Lizon: Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
Trente secondes? C'est suffisant pour poser une petite question.
Nous parlons du tabagisme. Dans la maison où j'ai grandi, personne ne fumait, mais tous les fumeurs qui venaient à la maison fumaient à l'intérieur. Par conséquent, les gens de ma génération ont tous été exposés, d'une façon ou d'une autre, à la fumée secondaire. Avez-vous des observations à faire à ce sujet?
L'exposition à la fumée secondaire cause le cancer du poumon chez les non-fumeurs. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous devons poursuivre nos efforts afin de réduire l'exposition à la fumée secondaire dans le cadre de l'effort global pour lutter contre le cancer du poumon.
De plus, lorsque le cancer est détecté chez une personne, il est très important, dans le cadre d'un excellent traitement, de lui offrir du soutien afin qu'elle cesse de fumer. L'abandon ou non du tabac par la personne atteinte de cancer a une incidence sur sa survie. Le rapport de 2014 du directeur du Service de santé publique des États-Unis présentait pour la première fois un examen approfondi des données probantes relatives à l'importance de l'abandon du tabac pour les survivants du cancer.
Comme vous le dira sans doute Stephen Lam, je pense que les personnes de certaines générations devraient faire évaluer leur risque de développer un cancer du poumon. Si le risque est élevé, un programme de dépistage du cancer du poumon devrait être envisagé. Nous avons les connaissances et l'expertise nécessaires ici, partout au Canada, pour effectuer un excellent dépistage du cancer du poumon qui permet de sauver des vies. J'espère sincèrement que c'est l'une des choses que ce groupe nous aidera à mettre sur pied.
Je tiens à remercier les témoins de leurs exposés.
Je peux vous dire que les statistiques selon lesquelles 80 % plus de femmes meurent du cancer du poumon que du cancer du sein et 200 % plus d'hommes meurent du cancer du poumon que du cancer de la prostate m'ont renversé. Étant donné la publicité qu'on présente sur les cancers du sein et de la prostate, ce sont là des faits troublants.
En ce qui concerne le tabagisme, l'une des principales causes du cancer du poumon, quelle est la situation au Canada? Je suis de l'Île-du-Prince-Édouard et j'y vois davantage de jeunes fumeurs qu'il y a quelques années. Je n'ai aucune statistique à ce sujet. Je ne sais pas. Quelle est la situation réelle, en particulier pour ce qui est des jeunes fumeurs? On dit notamment que les produits du tabac aromatisés peuvent inciter les jeunes à fumer. Qu'en pensez-vous?
Nous faisons des progrès dans la lutte contre le tabagisme chez les jeunes, mais il nous reste beaucoup de travail à faire. Chaque mois, de plus en plus d'adolescents commencent à fumer, et pas seulement la cigarette, mais également les produits du tabac aromatisés. Il y a aussi les cigarillos, le tabac à narguilé et le tabac sans fumée. Je sais qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, un projet de loi vient d'être présenté afin d'interdire le tabac aromatisé. Six provinces l'ont fait. Vous savez, nous appuierions une interdiction de tous les produits du tabac aromatisés, y compris les cigarettes mentholées, partout au Canada. Il nous reste encore beaucoup de travail. Il y a encore 5,7 millions de fumeurs au Canada, et chaque année, 37 000 décès sont attribuables au tabagisme. Diverses mesures peuvent être prises. L'Australie a adopté les emballages neutres, tout comme la Grande-Bretagne et la France. L'Irlande les adoptera à son tour en mai prochain. On pourrait augmenter le financement accordé à Santé Canada pour ses efforts visant à réduire le tabagisme chez les jeunes. Il y a des programmes de renoncement au tabac et d'application de la loi. C'est une approche globale. Nous faisons des progrès, mais il nous reste encore beaucoup à faire.
En réalité, il faut déployer des efforts afin de cibler les jeunes et de les empêcher de commencer à fumer. Je me rappelle qu'à l'époque où j'allais à l'école secondaire, si on ne fumait pas, on était rejeté socialement. Les temps ont beaucoup changé, mais cette situation se produit encore trop souvent.
Vous suggérez essentiellement que nous interdisions les cigarettes mentholées et les produits du tabac aromatisés, et je sais qu'on prend des mesures en ce sens dans ma province.
Au sujet de la détection précoce, vous avez mentionné qu'il existe un programme de dépistage aux États-Unis. Quelle est l'incidence de ce programme? Avez-vous une idée de son coût? Ici, nous avons un système de santé public; on devrait donc considérer cela comme un investissement et non simplement comme un coût. Qu'en pensez-vous?
Bien sûr. Je peux commencer, puisque c'est moi qui suis coupable d'avoir abordé cette question.
Le Canada a un avantage potentiel sur les États-Unis, qui n'ont pas officialisé un programme, mais qui paient pour le dépistage qui est couvert par un régime d'assurance-maladie. La possibilité de mettre sur pied un programme dépend du centre qui offre le dépistage. Le dépistage peut être effectué dans un centre communautaire local ou dans un camion qui se rend à divers endroits. On n'a pas nécessairement à faire de lien avec les résultats, la rentabilité, la qualité et l'abandon du tabac. Ce que nous avons tenté de faire, avec le Partenariat canadien contre le cancer, ou PCCC, et le cadre sur le cancer du poumon, c'est de créer une initiative permettant de tenir des statistiques et de suivre les résultats. Nous sommes capables de déterminer quelle proportion des personnes à risque ont pu participer, d'obtenir les taux de participation au dépistage, et également d'établir un lien avec le renoncement au tabac.
En ce qui concerne la rentabilité de l'importante étude américaine randomisée, où peu importe si la détection était précoce, il y avait tout de même un avantage, sur le plan de la mortalité, à traiter la maladie, le rapport coût-efficacité différentiel, qui mesure l'avantage par rapport au coût — et permettez-moi de donner un chiffre approximatif, ici — était de 83 000 à 86 000 dollars américains par année de vie ajustée en fonction de la qualité. Je serai heureuse de fournir au comité un document de référence à ce sujet. Toutefois, c'est dans le système de santé des États-Unis. La façon dont ils ont procédé diffère de la façon dont notre étude pancanadienne a été réalisée et dont le cadre propose le dépistage. Les estimations du rapport coût-efficacité de l'IRSS en Ontario, qui ont été commandées par Action Cancer Ontario, sont de seulement 43 000 $ ou moins par année de vie ajustée en fonction de la qualité. Encore une fois, les effets du rapport coût-efficacité peuvent varier selon l'intervalle de dépistage et le niveau de risque. Oui, cela entraînera des coûts. Y aurait-il moyen de mettre en place un processus rentable de dépistage en choisissant la population et les mesures de suivi? Oui, nous pensons qu'il est possible de le faire en fonction d'une estimation raisonnable de la rentabilité.
Pour revenir à la détection précoce, que pouvons-nous faire, à l'échelle fédérale et provinciale, pour l'améliorer? J'entends trop d'histoires. D'ailleurs, ce matin, j'ai parlé à un homme dont la femme est décédée; elle a dû attendre un an avant d'avoir accès à notre système hospitalier. Cela aurait-il fait une différence? Nous l'ignorons.
Dans ce genre de situation, que peut faire le gouvernement, sur le plan des politiques, pour favoriser la détection précoce et, au besoin, les chirurgies?
Je crois qu'il serait préférable de poser de nouveau la question au cours de la prochaine heure, lorsque le Dr Stephen Lam témoignera de la Colombie-Britannique.
Il y a environ un an et demi, nous avons engagé des discussions avec le député Lizon, le sénateur Ogilvy et des médecins du pays au sujet des programmes de dépistage dans les populations dont le gouvernement fédéral est responsable. Nous commençons seulement à élaborer une proposition relative à un programme de dépistage chez les anciens combattants. Le Dr Lam est vraiment la personne qui peut vous fournir plus de précisions.
Merci, monsieur le président.
Avant de commencer, je tiens à remercier les témoins.
Comme les autres comités mettent fin à leurs travaux, je voudrais dire à mon collègue, M. Lizon, qui prend cette question très à coeur, et à tous les membres du comité que d'après ce que nous entendons, c'est une question très importante qui mérite qu'on lui accorde un peu de temps. J'espère que nous pourrons reprendre le travail à la prochaine législature; il y aura peut-être des progrès considérables.
J'ai trouvé intéressant que vous disiez que 96 % des Canadiens n'avaient à peu près aucune idée de ce qu'est le radon, et je suis un peu gênée de dire que je fais probablement partie de ce groupe. Mon collègue a ensuite parlé de Sparwood. Je pense qu'une étude a été réalisée là-bas; les niveaux de radon y sont terriblement élevés. Nous avons ensuite parlé de la situation en Colombie-Britannique, mais j'ai vu qu'à Kamloops, il y a beaucoup d'argile, alors j'imagine que je n'ai rien à craindre.
Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, car je pense qu'il est important, aux fins du compte rendu, de parler de toute cette question concernant le radon, le test de radon et les mesures d'atténuation.
Oui, je peux répondre à la question.
Essentiellement, sur le plan géologique, le Canada dispose d'un large éventail de richesses naturelles, dont l'une est l’uranium. La plupart des émissions de radon sont attribuables à l’uranium. Nous avons des cartes géologiques qui indiquent les zones à fortes concentrations et les zones où il n’y en a pas. Ces cartes donnent une bonne idée des régions où le niveau de radon est élevé. Cela dit, l'une des choses qui importent beaucoup, c'est la façon dont une maison a été construite.
Votre maison peut se trouver dans une région où il n’y a que de faibles concentrations d’uranium, mais, si elle est mal construite, les émissions s'accumuleront au fil du temps. Même si elle est dans une région à faibles concentrations, les niveaux peuvent être plus élevés que dans une maison bien construite qui se trouve dans une zone à fortes concentrations d'uranium. De nombreux codes du bâtiment ont une stratégie d’atténuation du radon, et il existe des pompes de puisard conçues pour évacuer l’air qui s’infiltre dans les sous-sols — tout ce qui provient du sol est évacué à l’aide d’un système de ventilation. À vrai dire, il suffit d’ouvrir les fenêtres pour faire sortir une grande partie du radon qui circule dans l'air.
Voilà ce qui est vraiment important. Nous devons tester toutes les maisons. Même si les cartes géologiques indiquent que vous habitez dans une région à faibles concentrations d’uranium, votre maison pourrait avoir une concentration élevée de radon. Vous ne pouvez même pas vous servir de la maison de votre voisin comme référence, car les niveaux de radon dans le sous-sol y sont peut-être faibles parce qu’il s’agit d’une bonne construction bien ventilée. Il est très important de cibler les propriétaires et de tester leurs maisons.
Il y a toutefois des stratégies en place. Nous nous sommes servis de l’enquête de Santé Canada. Le ministère a distribué 18 000 trousses de mesure du radon partout au pays, ce qui a permis de délimiter des zones où de nombreuses maisons ont des concentrations élevées de radon, plus que ce à quoi on se serait attendu. Nous pouvons nous servir de ces données. La Société canadienne du cancer, l’Association pulmonaire du Canada et Santé Canada mettent en oeuvre des stratégies ciblées dans ces régions. L’intérieur de la Colombie-Britannique est une de ces régions. Il y en a d’autres au Manitoba. Des stratégies sont déployées dans les collectivités concernées. On peut procéder collectivité par collectivité. Il est parfois nécessaire de choisir dans quelles régions il faut se rendre en premier. On peut se servir des cartes géologiques ou des cartes de radon.
C’est là-dessus que nous mettons vraiment l’accent. Si toutes les maisons étaient testées, que le taux de participation était de 100 % et que nous savions exactement ce qu’il faut faire, il faudrait ensuite que les gens prennent des mesures. Certains pourraient vous donner... Le test en soi est relativement peu coûteux. Des organismes de bienfaisance l'offrent gratuitement. Dans une quincaillerie, on pourrait l’obtenir pour 30 $. Ce qui est coûteux, c’est ce qu’il faut faire pour se débarrasser du radon. Il pourrait y avoir un coût simple: un professionnel se rend sur place et examine la situation. Le coût de l’atténuation constitue un obstacle potentiel, mais, étant donné que peu de gens font le test, nous ne savons pas à quel point c'est le cas. La Société canadienne du cancer et le personnel de nos bureaux tentent d’amener le plus grand nombre possible de propriétaires à faire le test, peu importe où ils habitent.
Le test ne nécessite donc qu’une simple trousse. Qui est en mesure d’analyser les résultats et d’examiner le domicile? Est-ce un inspecteur d’habitations qualifié qui se rend sur place lorsque les résultats sont inquiétants?
Il y a des professionnels de l’atténuation du radon. Un répertoire de Santé Canada donne le nom de tous les professionnels du domaine d'un bout à l'autre du pays.
Dans le cadre de notre travail, si des gens reviennent nous voir avec des résultats supérieurs à 200 becquerels par mètre cube, nous les dirigeons vers Santé Canada pour qu’ils suivent le processus leur permettant de trouver dans leur région un bon professionnel du radon. Il y a encore de nombreuses lacunes dans le domaine des professionnels de l’atténuation du radon. Notre bureau de la Colombie-Britannique a d'ailleurs participé au coparrainage de programmes de formation afin d’accroître le nombre de professionnels certifiés.
La sensibilisation de la population et l'augmentation du nombre de tests nous permettront de trouver un plus grand nombre d’habitations à fortes concentrations, et la demande de professionnels du radon sera plus forte. Je crois que c’est un autre domaine dans lequel le gouvernement fédéral pourrait potentiellement contrôler la formation pour accroître le nombre de professionnels formés et certifiés qui savent quelles améliorations doivent être apportées à une maison pour résoudre le problème.
Vous avez parlé tout à l’heure d’un programme de sensibilisation que nous avons entrepris. Pourriez-vous nous le décrire un peu mieux?
La campagne Occupe-toi du radon reçoit un important appui de Santé Canada, de l'Association pulmonaire du Canada et de la Société canadienne du cancer. Il y a également un groupe, le groupe Summerhill, mais je ne me souviens plus de ce qu'il fait. Je répète qu'il existe un groupe chargé de la sensibilisation de la population et de la mise en oeuvre d'initiatives environnementales. Nous nous réunissons pour discuter de ces stratégies et apprendre au contact des autres.
Santé Canada offre des programmes de tests alors que certains groupes offrent des programmes communautaires de sensibilisation. Nous pouvons partager des ressources. C'est une bonne façon d'éviter que quatre groupes distincts qui oeuvrent dans le domaine fassent quatre choses différentes. Nous pouvons travailler ensemble. Si nous sommes très présents en Colombie-Britannique, mais moins en Saskatchewan, l'Association pulmonaire du Canada le sera davantage dans cette dernière province. Ce genre d'approche nous aide à établir nos priorités et à déterminer à quels endroits nous devons déployer ou non des efforts. Je crois que cela n'aurait vraiment pas été possible si Santé Canada n'avait pas réuni les intervenants.
Merci beaucoup.
Je remercie les témoins d'avoir pris le temps de comparaître devant notre comité. Vous êtes libres de rester ou de partir, ou de faire ce que vous voulez, pendant que nous nous préparons pour notre prochain groupe de témoins.
Merci encore.
Nous sommes de retour. Nous entendrons d'autres témoins au cours de la prochaine heure.
Les témoins qui se joignent à nous par vidéoconférence nous entendent-ils bien?
Bien. Nous vous laisserons témoigner en premier, par vidéoconférence.
Ce sera ensuite au tour de témoins qui se trouvent dans la salle. Nous poursuivrons avec les questions.
Les témoins à Vancouver ont la parole.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, bonjour.
Je suis le docteur Stephen Lam, de la British Columbia Cancer Agency. Je vous remercie de me donner l'occasion de parler de la situation actuelle du dépistage du cancer du poumon au Canada.
Comme l'a souligné plus tôt la Dre Natasha Leighl, le dépistage du cancer du poumon par tomodensitométrie à faible dose peut réduire la mortalité due à ce cancer de 20 %. Il s'agit ici de grands fumeurs ou d'anciens grands fumeurs âgés de 55 à 74 ans. Il faut noter que, à l'heure actuelle, plus de 50 % de nos patients atteints du cancer du poumon sont d'anciens fumeurs. Certains ont suivi nos conseils en arrêtant complètement de fumer pendant un certain nombre d'années, mais ils ont tout de même développé un cancer du poumon. Le dépistage du cancer du poumon permettra de réduire la mortalité. Comme l'a également souligné la Dre Leighl, même aux États-Unis, le dépistage du cancer du poumon est rentable. En moyenne, aux États-Unis, le coût d'une année de vie ajustée en fonction de la qualité est de 81 000 $. Ce coût peut être moins élevé au Canada.
De plus, le dépistage peut non seulement réduire la mortalité liée au cancer du poumon, mais aussi diminuer le nombre de personnes atteintes d'un cancer avancé en permettant de détecter la maladie au stade précoce, que nous appelons le stade I ou II, alors qu'elle peut être traitée grâce à la chirurgie à visée curative. Sans le dépistage du cancer du poumon, les trois quarts des patients atteints du cancer du poumon reçoivent un diagnostic à un stade avancé de la maladie, et la plupart suivent un traitement palliatif. Toutefois, grâce au dépistage par tomodensitométrie à faible dose, nous pouvons renverser la tendance, de sorte que les trois quarts des personnes aux stades précoces de la maladie, les stades I et II, puissent recevoir un traitement curatif par chirurgie.
Nous avons mené une étude de dépistage d'un océan à l'autre, de Vancouver à St. John's, à Terre-Neuve, avec l'appui de l'Institut de recherche Terry Fox, du Partenariat canadien contre le cancer et de Cancer pulmonaire Canada. Dans le cadre de cette étude, nous avons constaté qu'en traitant les gens atteints d'un cancer de stade I ou II, qui peut être détecté au dépistage, nous pouvons économiser 14 000 $ sur deux ans par rapport au coût du traitement d'un cancer avancé, de stade III ou IV, par chimiothérapie, radiothérapie ou les deux.
Nous pouvons non seulement réduire la mortalité attribuable au cancer du poumon, mais aussi économiser de l'argent en atténuant les symptômes de la maladie. Selon une étude menée en Ontario, plus de la moitié des patients atteints d'un cancer du poumon ont des symptômes modérés ou graves tels que la perte d'appétit, l'essoufflement, la diminution du bien-être et la fatigue. Le tiers des patients éprouvent beaucoup de douleurs, d'anxiété et de somnolence, et le quart d'entre eux souffriront de dépression. En dépistant rapidement le cancer, nous pouvons en soulager les symptômes.
De plus, les patients atteints d'un cancer du poumon diagnostiqué mobilisent beaucoup de ressources hospitalières. Dans les trois mois précédant le diagnostic, environ 40 % d'entre eux se sont rendus aux services d'urgence. Dans les trois mois précédant leur décès, les trois quarts des patients se sont présentés à une salle d'urgence en raison de leurs symptômes. Comme je l'ai dit, nous pouvons réduire le nombre de personnes qui mobilisent les ressources hospitalières.
Quatre innovations canadiennes pourraient faire de nous des chefs de file mondiaux en matière de dépistage du cancer du poumon. Nous avons un outil Web très novateur de prédiction du cancer du poumon qui nous permet de déterminer par tomodensitométrie quels sont les patients qui pourraient bénéficier du dépistage. Les participants au programme de dépistage profitent d'un calculateur qui nous permet de déterminer par tomodensitométrie quelles taches ou quels nodules ont besoin d'attention, en procédant à des examens répétés d'imagerie ou à des biopsies. Le calculateur nous permet également d'adapter la fréquence du dépistage par tomodensitomètre aux fins de suivi. Nous avons élaboré un outil chirurgical très novateur qui permet au chirurgien de retirer rapidement de petites parties de poumon pour traiter les cancers au stade précoce. La quatrième innovation est une signature génomique qui nous permet de dire quel cancer est agressif et qui peut profiter de chimiothérapie additionnelle après la chirurgie.
Parmi nos innovations, il y a également une technologie informatique qui nous permet de mettre automatiquement en évidence les taches anormales pour ainsi aider les radiologistes à formuler des recommandations en vue de gérer les taches détectées par tomodensitométrie.
En résumé, le dépistage du cancer du poumon nous permet d'accorder moins d'importance au traitement palliatif pour privilégier le traitement curatif. Nous pouvons soulager les symptômes du cancer du poumon avancé ayant fait l'objet d'un diagnostic sans dépistage. Nous pouvons également transformer le traitement du cancer du poumon.
Le gouvernement fédéral peut nous aider à améliorer les soins prodigués aux personnes souffrant du cancer du poumon ainsi que les résultats sur leur santé en finançant les programmes de dépistage par tomodensitomètre à faible dose — par exemple, pour les employés fédéraux comme les anciens combattants et les membres de la GRC. Pour les personnes qui résident en région éloignée, comme nos peuples des Premières Nations qui vivent dans des régions peu densément peuplées, nous pouvons utiliser les appareils CT mobiles ou combiner des séances d’abandon du tabagisme avec des dépistages du cancer du poumon, selon le groupe d’âge de la population.
Enfin, le gouvernement fédéral peut nous aider en facilitant la mise en oeuvre de dépistages à l’échelon provincial — notamment par le truchement du Partenariat canadien contre le cancer. Nous avons maintenant un réseau canadien de dépistage du cancer du poumon qui est appuyé par le PCCC et financé par le gouvernement fédéral.
Je pense que je vais m’arrêter ici pour répondre à vos questions.
Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité de la santé, je tiens à vous remercier de me donner l’occasion de vous parler aujourd’hui du rôle que jouent la pathologie et les essais en laboratoire dans le diagnostic et le traitement du cancer du poumon, sujet qui me passionne énormément.
Bien que ce ne soit pas toujours évident pour les patients et le public, les pathologistes sont au premier plan de la prévention et du dépistage du cancer. Mon collègue, le Dr Lam vient de vous présenter des données concernant le dépistage du cancer du poumon. Lorsque la radiologie permet la détection d’un nodule dans un poumon et que l’on présume sur les plans clinique et radiologique qu’il pourrait être cancéreux, on procède à une biopsie et on envoie l’échantillon pour examen microscopique.
L’examen pathologique est la norme de référence pour diagnostiquer le cancer depuis plus d’un siècle. Un programme de dépistage du cancer du poumon sans diagnostic pathologique est comme un polar qui n’est pas élucidé.
Depuis que j’ai commencé à travailler comme experte-conseil en pathologie à la BC Cancer Agency à Vancouver il y a environ neuf ans, mon rôle en ce qui touche le cancer du poumon a changé de façon dramatique. Ce changement s’est opéré vers 2007 en raison de la découverte de médicaments seulement efficaces pour certains types de tumeurs définis par analyse moléculaire, pour des traitements que l’on appelle maintenant des « traitements ciblés ». Les oncologues médicaux ont besoin de plus en plus de renseignements précis concernant chaque tumeur au poumon pour décider des traitements. En fait, on met au point les médicaments en fonction des caractéristiques moléculaires des tumeurs. Le « traitement unique » n’est plus la norme de soins, et nous adaptons les traitements à chaque patient atteint du cancer du poumon.
L’une des parties les plus stimulantes de mon travail quotidien est de faire des essais sur les tumeurs afin de déterminer le traitement qu'il convient d'offrir à un patient donné au moment opportun. Ces essais, qui prédisent comment une tumeur réagira à un médicament, sont connus sous le nom d’essais diagnostiques complémentaires. Nous cherchons à cerner les caractéristiques de la tumeur, ou les biomarqueurs, au niveau moléculaire; par conséquent, ces essais portent aussi le nom d’essais de biomarqueurs. Les essais diagnostiques complémentaires aident à adapter les traitements et à mieux stratifier les patients, prévoir les réponses et surveiller le traitement. Ce type d’essai est un concept relativement nouveau, mais il ne se limite pas au cancer du poumon. Le recours à pareils essais ne fera qu’augmenter à l’ère de la médecine personnalisée, et ils sont déjà offerts aux patients souffrant d’autres types de cancers.
L’un des biomarqueurs précurseurs en oncologie, que nous mettons à l’essai en pathologie depuis le début des années 1990, est un récepteur d’estrogène de la tumeur. Nous mettons ce biomarqueur à l’essai avec tous les types de cancers du sein et obtenons des résultats cliniques notables. L’une des déclarations les plus émouvantes que j’aie jamais entendues a été celle d’une jeune mère non fumeuse à qui on a diagnostiqué un cancer du poumon. Elle a dit qu’elle aimerait avoir le cancer du sein, car si c’était le cas, la société s’en préoccuperait.
Nous avons tant à apprendre de tout le bon travail qui a été accompli dans le domaine de la recherche sur le cancer du sein au fil du temps pour ce qui concerne les essais de biomarqueurs, mais nous avons besoin de votre aide afin de pouvoir bénéficier de l’infrastructure et du soutien continu nécessaires pour appuyer la recherche sur les autres types de cancers au pays.
Au Canada, des groupes nationaux multidisciplinaires d’oncologues et de pathologistes médicaux appliquent les essais de biomarqueurs au traitement du cancer du poumon depuis 2009; ils ont collaboré à formuler et à mettre en oeuvre une stratégie de mise à l’essai pour les Canadiens qui souffrent du cancer du poumon. Nous avons tenu compte non seulement des résultats scientifiques, mais aussi de la réalité économique de notre système de soins de santé, et nos efforts ont été très fructueux. Cette approche nationale à l’égard de la mise à l’essai est simple et élégante, et elle nous rend fiers, nous, spécialistes canadiens du cancer du poumon, de pouvoir collaborer de cette façon entre nous et avec les responsables des soins de santé, et de voir que notre travail est cité par des universitaires et des laboratoires privés dans le monde entier.
Pour ce qui est du cancer du poumon au Canada, nous procédons actuellement à l’essai clinique de deux biomarqueurs appelés EGFR et ALK pour identifier les patients qui répondront à diverses thérapies ciblées. Je vous ai présenté des données concernant mes essais de biomarqueurs dans le domaine du cancer du poumon au Canada dans un mémoire que j’ai soumis à votre examen.
Les patients qui souffrent du cancer du poumon bénéficieront bientôt de médicaments supplémentaires assortis d’essais diagnostiques complémentaires, notamment des médicaments d’immunothérapie. Il est primordial que nous disposions d’un système de mise à l’essai dans les laboratoires pour pouvoir identifier les patients efficacement et avec exactitude. Cela montre une fois de plus l’importance croissante de la pathologie dans les soins de santé offerts aux patients souffrant du cancer du poumon.
Compte tenu des avancées rapides dans le domaine de la médecine personnalisée pour ce qui concerne le cancer du poumon et son incidence clinique sur la survie et la qualité de vie de nos patients, nous devons étudier les médicaments et les essais diagnostiques complémentaires comme un tout et appuyer ensemble ces programmes aux plans scientifique, financier et politique.
J’aimerais vous remercier de m’avoir permis de témoigner devant vous aujourd’hui.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant nous tourner vers nos invités ici présents: le Dr Jason Pantarotto et le Dr Jacques Ricard.
Aimeriez-vous commencer, monsieur?
Je m’appelle Jason Pantarotto. Je suis chef du programme de radio-oncologie à l’Université d’Ottawa et à l’Hôpital d’Ottawa. Je suis ici à titre d’expert du traitement du cancer du poumon au moyen de la radiation. Je travaille aussi au sein du réseau provincial Action Cancer Ontario, dont je peux vous parler en ma qualité de responsable régional de la radio-thérapie de l’Est ontarien au RLISS de Champlain, réseau local d’intégration des services de santé de 1,3 million de personnes. De plus, je participe à un effort important à l’Hôpital d’Ottawa pour régler la question des temps d’attente des personnes souffrant d’un cancer du poumon. Je vais vous parler de certains défis auxquels nous sommes confrontés.
Cet après-midi, j’ai pensé limiter mes commentaires aux quatre composantes de la résolution adoptée par le comité.
Pour ce qui est des principales causes de cancer du poumon à part le tabagisme, je pense que les intervenants d’aujourd’hui en ont mentionné un bon nombre, mais je veux formuler d'autres commentaires et répondre aussi à certaines des questions qui ont été soulevées au cours de la dernière heure.
Il y a divers agents, tant artificiels que naturels, qui peuvent causer le cancer du poumon. Nombre des agents industriels employés au cours des 100 dernières années peuvent être inhalés mais, honnêtement, il est difficile d’évaluer le risque de chacun. Il a été clairement prouvé au cours des dernières décennies que des agents comme l’amiante, le carburant diesel, la poussière de silice et l’arsenic, qu’ils soient inhalés ou ingérés, peuvent causer le cancer du poumon en particulier, mais il y a une période latente de nombreuses années entre l’exposition à ces agents et le développement du cancer du poumon en tant que tel.
Les résultats montrent souvent que les effets de ces agents agissent en synergie avec ceux du tabagisme. En conséquence, à exposition égale, les taux de cancer du poumon sont plus élevés chez les fumeurs que les non-fumeurs. Compte tenu de la prévalence du tabagisme au cours des 60 ou 70 dernières années — le nombre de fumeurs était très important —, il est vraiment très difficile de déterminer l’incidence réelle de nombreuses toxines industrielles.
Pour ce qui concerne le radon, qui n’est, bien entendu, pas un agent industriel mais, comme nous l’avons entendu aujourd’hui, une substance naturelle qui se forme dans la croûte terrestre en raison de la dégradation naturelle de l’uranium, je crois personnellement que Santé Canada offre de la documentation très pertinente sur son site Web. Cependant, je constate avec mes patients, et même avec mes collègues, mes amis et mes voisins, que les tests de dépistage du radon ne sont vraiment pas une priorité pour la population en général.
En fait, vous pouvez vous poser la question suivante: combien d’entre vous avez fait des tests de dépistage du radon dans vos propres maisons? Dans la négative, pourquoi pas? Je soupçonne que nous avons un certain nombre de bonnes réponses. Je crois que les coûts sont l’un des obstacles, et s’il est difficile de convaincre les gens de mettre 4 $ de piles dans un détecteur de fumée, alors comment arriver à les convaincre de faire un dépistage, qu’il coûte 99 $ ou 30 $, en plus de toutes les choses qu’il leur faudra peut-être faire chez eux? S’il y a un effet synergique entre le radon et le tabagisme, alors pour ceux qui fument davantage — il s'agit habituellement des personnes ayant un statut socioéconomique ou un niveau d’instruction moindre —, il est encore plus difficile d’avoir accès à un test de dépistage du radon et de prendre ensuite des mesures correctives.
Passons aux enjeux de la collecte de fonds. Les gens ne sont pas sensibilisés à la prévalence et à la gravité du cancer du poumon, même parmi les professionnels de la santé. Avec peu de survivants et, donc, peu de défenseurs de la cause pour promouvoir les programmes de recherche, nous n’avons pas vraiment été capables de faire des collectes de fonds aussi importantes que pour les autres types de cancer. Encore une fois, le tabagisme est plus fréquent chez les groupes que je viens de mentionner — ceux qui ont un statut socioéconomique réduit — qui, historiquement, n’ont pas été en mesure de bien faire valoir leurs droits, pour des raisons évidentes.
En ce qui touche la recherche relative aux causes du cancer du poumon chez les hommes et les femmes, je pense que le tabagisme arrive, de loin, en tête de liste. Je vois beaucoup de recherche sur le traitement du cancer du poumon, dont nous avons entendu parler brièvement aujourd’hui, et aussi sur la prévention et le dépistage efficace.
Je pense que le dépistage est primordial, mais qu'il est nécessaire d’avoir un programme de dépistage efficace. En Ontario et dans diverses autres administrations au Canada, nous avons mis en place des tests de dépistage du cancer du sein, du cancer du col de l’utérus et du cancer colorectal, mais si on prend les données les plus récentes pour l’Ontario, 62 % des femmes y étant admissibles ont fait des tests de dépistage du cancer du col de l’utérus entre 2011 et 2013. Pendant la même période, 59 % des femmes admissibles ont passé un test de dépistage, et, pour le cancer colorectal, le pourcentage était bien moindre, aux alentours de 30 %, malgré le fait que ce type de cancer soit le deuxième plus meurtrier, si vous voulez, au Canada, derrière le cancer du poumon. Toutes ces données sont tirées du Cancer System Quality Index, publié par le Conseil de la qualité des soins oncologiques de l’Ontario.
En terminant, les pratiques exemplaires émergentes pour le dépistage étaient le dernier point dans la résolution. Je pense que nous avons entendu beaucoup de bons renseignements aujourd’hui concernant le fait que l’on dispose de preuves solides de l’efficacité des dépistages par tomodensitomètre à faible dose dans les populations à haut risque. Je pense que lorsque l’on a un programme de dépistage, il y a plein d’éléments que l’on doit traiter en profondeur. Il faut accréditer chaque installation et le personnel qui y travaille, gérer les bases de données, prévoir un système de rappel pour les nodules suspects, car vous allez trouver toutes sortes de choses une fois que vous aurez commencé à regarder, mettre en place des cliniques de surveillance et, bien sûr, donner l’accès à des biopsies pulmonaires en temps opportun. L’intégration est cruciale.
À Ottawa et dans la région ottavienne, dont la population est relativement aisée et instruite, selon les données de 2011, pour le 90e percentile, il fallait attendre 117 jours après un dépistage par tomodensitomètre anormal pour obtenir des traitements contre le cancer du poumon. C’est le cas à Ottawa et dans le reste du pays pour diverses raisons. Lorsque l’on prend certaines de ces autres populations, elles ont plus de mal à passer un test de dépistage une fois que pareil système a été mis en place et encore plus de mal à obtenir une biopsie. Le temps d'attente est encore plus long.
Je veux simplement terminer ce que je disais en ce qui concerne les segments de la population qui relèvent de la compétence fédérale: les Autochtones, les militaires, les détenus et la GRC. On constate que dans certains sous-groupes de la population autochtone, le tabagisme est très répandu. Pour la population du Nunavut, et ces données sont tirées des études du professeur Kue Young à l’Université de l’Alberta, les populations autochtones qui vivent autour du Cercle polaire dans divers pays ont des taux plus élevés de cancer du poumon que quiconque dans le monde. La population autochtone au Canada semblait aussi avoir des taux encore plus élevés que les autres.
De façon similaire, dans des revues éminentes comme Cancer, on a publié des preuves selon lesquelles les taux de cancer du poumon étaient plus élevés chez les anciens combattants de l’armée américaine et de l’armée australienne — mais rien pour le Canada — et que s’ils se retrouvent avec le cancer du poumon, il est plus probable qu’ils en meurent. Je ne serais pas surpris que nous voyions des résultats semblables si des études étaient menées auprès des anciens combattants canadiens — ou qu’elles aient été menées et que je l’ignore. Je ne serais pas surpris que nous constations exactement la même chose.
Je vais m’arrêter là, car je crois que mon temps est écoulé.
Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, je vous remercie d'écouter mon exposé. Je ne sais pas trop ce que je peux apporter à votre étude, mais je peux peut-être donner une dimension humaine aux statistiques qu'on vous a données. Si j'entends parler une seule autre fois du taux de survie, je pense que je vais devoir me servir un verre de scotch de single malt ce soir, mais les chances qu'on n'en parle plus sont très minces, n'est-ce pas? Mais il y a quand même de l'espoir.
Je suis le colonel Jacques Ricard. Je suis médecin hygiéniste dans ce que nous appelons les forces. Je suis médecin généraliste depuis 33 ans.
Il y a environ un an et demi, j'ai éprouvé des douleurs intenses au dos pendant un test de condition physique. Je n'ai pas pu me lever le lendemain. Je croyais que c'était une hernie discale. J'ai subi des tests, dont l'IRM habituelle, et nous avons découvert que ce n'était pas une hernie discale. J'ai subi l'examen par IRM en juillet. Le médecin est venu me voir et m'a annoncé que ce n'était pas une hernie discale, mais un cancer. Il a passé à l'étape suivante pour essayer d'en découvrir la source. Le tomodensitogramme a indiqué que c'était un cancer du poumon. Le diagnostic m'a énormément étonné puisque je suis un non-fumeur.
Au début, il faut passer par les interventions d'urgence, les traitements de radiothérapie de la colonne vertébrale et ainsi de suite. J'ai rencontré le Dr Wheatley-Price en oncologie pour voir s'il y avait un traitement.
Lorsqu'on vous dit qu'il n'existe aucun traitement, vous commencez à vous demander pourquoi. Lorsque vous avez un cancer de stade IV et que vous obtenez un diagnostic trop tard pour qu'on envisage une intervention chirurgicale, alors vous recevez des soins palliatifs, si vous voulez.
J'ai fait de la radiothérapie. Je me demandais ce que j'aurais pu faire pour détecter ce cancer à un stade plus précoce. Je n'ai rien raté. Si vous avez une toux le matin, vous pensez que c'est probablement à cause des médicaments pour l'hypertension que vous prenez car c'est l'un des effets secondaires. Si vous avez un peu de douleur à la cage thoracique, vous pensez que vous avez une costochondrite. Vous avez une raison, une explication, pour pratiquement tous les petits symptômes que vous avez. Lorsque vous vous présentez pour cette douleur au dos, il est trop tard.
C'est étrange parce que nous devons subir tous nos examens médicaux annuels. J'ai subi une colonoscopie à l'âge de 50 ans. J'en ai eu une autre à 55 ans. J'ai fait le test de dépistage de l'antigène prostatique spécifique, le test sanguin. Mon épouse a subi une mammographie et ma fille, un test Pap. Mais il n'y a aucun test pour les poumons. On se fie tellement au patient pour qu'il détecte s'il y a quelque chose qui ne va pas, pour qu'il se présente chez le médecin et pour qu'il subisse des tests, mais il est alors trop tard.
Je crois qu'il faut trouver un moyen de détecter les maladies avant qu'il y ait des symptômes, car c'est trop tard lorsque les symptômes se manifestent. Nous avons tous ces processus de dépistage... Je n'avais eu aucun symptôme pour qu'on me fasse subir une colonoscopie. Il en va de même pour le test pour la prostate. On m'a offert ces tests.
Voilà qui m'amène à la question du traitement. Je suis l'un des chanceux, car j'ai eu une biopsie. Puisque je suis un non-fumeur, on m'a dit qu'il y avait plus de risques que j'aie l'une de ces mutations, l'ALK ou l'EGFR. Il faut attendre environ un mois avant d'obtenir les résultats.
Lorsque les résultats sont arrivés, on m'a dit que j'avais 50 % de chances que ce soit positif. Le résultat pour l'EGFR était positif. J'étais l'un des chanceux — ou malchanceux — qui pouvaient obtenir le traitement ciblé avec des médicaments qu'il faut prendre une fois par jour et qui offrent une excellente qualité de vie. Ce n'est ni de la chimiothérapie ni de la radiothérapie. Ce traitement ne fait que freiner l'évolution de la maladie. Depuis les 10 derniers mois, je prends ce médicament et rien n'a changé. Ma maladie est stable, je travaille à temps partiel et tout semble être pareil. Mais la maladie est toujours là. Le tomodensitogramme montre que l'état de mes poumons, de ma colonne vertébrale et de ma région pelvienne n'a pas changé.
Nous devons maintenant compter sur quelqu'un pour trouver un traitement pour une maladie qu'on m'a dit être incurable il y a de cela un an. Mais peut-être que dans deux ou trois ans, on m'annoncera qu'il y a maintenant un traitement pour ma maladie. Du financement pour le programme de dépistage aiderait mes enfants, tandis que du financement pour le programme de recherche aiderait quelqu'un comme moi.
J'espère vraiment que nous pouvons faire d'énormes progrès si nous investissons massivement dans la recherche sur cette maladie mortelle qui est très souvent dépistée trop tard pour qu'une intervention chirurgicale soit possible.
Merci.
Merci beaucoup.
Pour avoir le temps d'effectuer toutes les séries de questions avant les votes, je pense que nous allons accorder cinq minutes à chaque intervenant pour les questions.
Monsieur Rankin, on vous écoute.
Merci.
Merci à tous les témoins de leurs témoignages très intéressants.
Il me reste peu de temps pour poser des questions. J'aimerais commencer avec vous, docteurs Lam et Ionescu, si vous le permettez, car j'ai été vraiment saisi par vos déclarations sur l'effet du tomodensitogramme chez les groupes à risque élevé.
Docteur Lam, j'ai été particulièrement étonné que vous ayez dit qu'il s'agit de quatre « innovations ». J'avais un peu de mal à comprendre votre première idée d'un outil électronique de prévision pour le cancer du poumon. Vous avez dit que c'est très perfectionné, puis vous avez parlé de la signature génomique.
Docteure Ionescu, vous avez parlé de deux biomarqueurs qui sont particulièrement appropriés pour le cancer du poumon.
Parliez-vous de choses semblables? Ou l'analyse des biomarqueurs est-elle différente de l'outil électrique de prévision ou de la signature génomique que vous, docteur Lam, parliez? Vous pourriez peut-être me fournir des explications à cet égard.
Je vais commencer.
L'indicateur de risque du cancer du poumon vise à prédire quels fumeurs actuels ou anciens fumeurs pourraient développer un cancer du poumon qui pourrait être détecté à un stade précoce par TDM à faible dose. C'est non seulement basé sur les antécédents de tabagisme, mais aussi sur l'âge, le niveau d'éducation, l'indice de masse corporelle, les antécédents familiaux de cancer du poumon et plusieurs autres facteurs. C'est quelque chose que nous pouvons utiliser sur un iPad ou sur un dossier médical électronique. Le patient peut répondre à quelques questions en l'espace de 5 à 10 minutes, puis nous pouvons déterminer le risque qu'il a de développer un cancer du poumon.
C'est seulement pour déterminer ceux qui bénéficieraient d'un dépistage par TDM à faible dose. Le biomarqueur dont la Dre Ionescu parlait est pour les personnes qui sont déjà atteintes du cancer du poumon afin d'établir les traitements ciblés qui leur conviennent.
Si vous voulez toujours que je réponde à la partie de la question qui s'adresse à moi...
M. Murray Rankin: Oui.
Dre Diana Ionescu: ... le Dr Lam a parlé de la signature génomique du cancer du poumon. Tout ce qui a trait à la génomique, l'analyse de l'ADN ou l'analyse moléculaire, se fait en pathologie.
La première étape pour diagnostiquer un cancer du poumon ne nécessite pas de test génétique. Toutefois, on nous demande maintenant en pathologie de classer les cancers du poumon selon leur signature génomique, le type de biomarqueurs associés à chaque tumeur qui permettent de prédire le comportement du cancer ou la réponse au traitement. Ce sont des marqueurs prédictifs.
Nous ne faisons actuellement pas de test pour les marqueurs servant au pronostic. Nous effectuons les tests pour l'EGFR et l'ALK, qui permettent de prédire la réponse au traitement.
Docteur Lam et docteur Pantarotto, vous avez tous les deux fait référence aux collectivités autochtones et au taux de tabagisme élevé, et plus particulièrement au Nunavut, qui est la région où l'on dénombre le plus grand nombre de personnes atteintes du cancer du poumon sur la planète, si j'ai bien compris. Dr Lam a ensuite dit qu'on pourrait notamment avoir des cliniques mobiles de tomodensitogrammes et mettre en place un programme d'abandon du tabac, que nous pourrions offrir conjointement avec le gouvernement fédéral.
Je me demande si vous pourriez nous en parler un peu plus longuement, car au début de votre témoignage, docteur Lam, vous avez parlé du coût de ces appareils de dépistage. J'aimerais savoir si vous avez songé aux coûts associés aux mesures que vous recommandez.
Grâce à l'étude pancanadienne sur le dépistage du cancer du poumon, nous savons que le coût du dépistage pour une personne est d'environ 225 $ par année. Dans des collectivités éloignées comme celles des peuples des Premières Nations, il est très difficile pour les habitants de se rendre dans un grand centre urbain pour subir un tomodensitogramme car ils sont dispersés un peu partout dans la région.
Une solution que les Japonais mettent en oeuvre depuis plus d'une décennie, ce sont des cliniques mobiles de tomodensitogrammes. Elles nous permettent de dépister le cancer du poumon, mais aussi de diagnostiquer d'autres maladies, sans que le patient ait besoin de se rendre dans un grand centre médical. Dans les unités mobiles, nous pouvons aussi avoir des conseillers pour aider les gens à cesser de fumer.
Je tiens à mentionner que nous pouvons maintenant avoir la technologie pour qu'un logiciel montre l'état des poumons si une personne souffre d'une maladie pulmonaire obstructive chronique ou d'emphysème, ainsi que pour montrer la calcification de l'artère coronaire du patient. Il s'agit d'images très éloquentes qui montrent l'état de santé des gens et, si les gens fument toujours, ces images contribueraient à les convaincre de cesser de fumer.
Merci beaucoup.
Docteure Ionescu, je me demande si vous pourriez nous parler un peu plus des deux biomarqueurs que vous dépistez. Vous avez mentionné l'EGFR et l'ALK. De quoi s'agit-il exactement, et que font-ils?
Dans le passé, nous classions le cancer du poumon en deux grands groupes: le carcinome à petites cellules et le carcinome non à petites cellules. Nous avons fait ce classement pendant plus de 50 ans, je pense, parce que nous avions seulement deux groupes de traitements pour ces deux types de cancer du poumon.
Nous savons qu'environ 54 ou 55 % des cancers du poumon, surtout le sous-type que nous appelons l'adénocarcinome, présentent des mutations, des changements génomiques, qui dirigent le comportement du cancer. L'un de ces biomarqueurs est l'EGFR. Il s'agit d'un récepteur sur la surface de la tumeur qui change le comportement des cellules cancéreuses pour qu'elles se divisent de façon incontrôlable afin que la tumeur grossisse et forme des métastases.
Nous effectuons un test de dépistage du biomarqueur de l'EGFR car plusieurs groupes de médicaments que nous appelons des inhibiteurs de la tyrosine kinase ont été créés et sont disponibles sur le marché, y compris sur le marché canadien, pour les patients atteints du cancer du poumon, mais aussi pour ceux qui présentent cette mutation particulière.
Les tests de dépistage de l'EGFR et de l'ALK sont complètement différents. Ils sont effectués à des niveaux différents. Par exemple, celui pour l'EGFR est une analyse moléculaire. Ce test permet d'examiner la signature génétique de la tumeur, le gène EGFR, pour relever cette mutation particulière qui rend la tumeur plus susceptible à certains médicaments.
L'ALK ou l'ALKi, qui est une restructuration de la signature génomique de la tumeur, est détectée en laboratoire au moyen de tests complètement différents que nous appelons l'immunohistochimie ou l'hybridation fluorescente in situ.
Un aspect que j'aimerais soulever et qui, je pense, intéressera le comité, c'est que le médicament qui aide les patients qui ont cette restructuration de l'ALK, que l'on appelle le crizotinib, a été approuvé en premier aux États-Unis par la FDA pour les patients dont cette condition a été dépistée seulement au moyen de l'hybridation fluorescente in situ. C'est un test très spécialisé et coûteux. Il prend beaucoup de temps et nécessite une expertise technique et professionnelle. Sachant que l'on ne peut pas vraiment dépister un grand nombre de patients atteints du cancer du poumon puisque très peu — on parle ici de 5 % — ont cette restructuration de l'ALK, nous avons collaboré à l'échelle nationale pour concevoir un type de test qui utilise l'immunohistochimie pour le dépistage, puis nous confirmons par l'hybridation fluorescente in situ, ou test FISH. Cet exercice nous a permis d'utiliser un test beaucoup plus rapide et moins coûteux comme l'immunohistochimie pour le dépistage de 95 % des patients dont les résultats sont négatifs et d'utiliser le test plus coûteux pour confirmer les résultats positifs de 5 % des patients. C'est un test qui a plus tard été mis en oeuvre dans d'autres pays tels que le Japon, la France et de nombreux autres pays européens qui ont vraiment tenu compte de l'équilibre entre la réalité du milieu scientifique et la réalité de leur système de soins de santé.
Merci, monsieur le président.
Merci également à tous les témoins du panel.
Docteur Ricard, j'aimerais commencer par vous. Merci de nous avoir rappelé la réalité. Vous avez tout à fait raison, à mon avis, quant au besoin de financement pour la recherche et les méthodes de détection précoce. Vu votre profession, je ne peux m'empêcher de penser que vous êtes probablement parmi ceux qui bénéficient de dépistages réguliers, ce qui n'est pas le cas de bon nombre de gens dans notre société, qui n'ont pas cet avantage.
D'après votre expérience, d'après ce que vous avez vécu, y a-t-il quelque chose que les gouvernements ou le système de soins de santé peuvent faire qui permettrait des dépistages plus précoces?
Merci beaucoup.
Je travaille à Ottawa, et mes soins de santé me sont offerts par le gouvernement fédéral, mais dans bien des cas, les analyses ont lieu du côté civil. Je me suis retrouvé exactement à la bonne place à un moment propice pour bénéficier de soins hors pair. On est intervenu immédiatement à l'hôpital général d'Ottawa et on m'a administré de la radiothérapie à 2 heures du matin. Je suis arrivé dans l'après-midi, et à 2 heures du matin, je recevais mon premier traitement.
C'est regrettable, mais ce ne sont pas tous les Canadiens qui peuvent obtenir de tels soins. Il est très important que tous puissent bénéficier des mêmes soins que j'ai reçus, même si mes chances ne sont pas très bonnes.
Il faut que ce soit plus qu'un programme de dépistage facultatif. Il nous faut un programme ou une politique qui visera la tranche des fumeurs âgés de 55 à 74 ans, une population ciblée pour qui les tests seront obligatoires. De cette façon, on pourra rattraper tous les cas qui bénéficieraient d'une détection précoce. Les gens n'auront plus besoin de se manifester et de dire: « je crois que j'ai quelque chose ici », « je crache du sang », et ainsi de suite.
Si ce sont les patients qui doivent se manifester, il y a aura des problèmes, à mon avis. C'est comme l'auto-examen des seins: c'est formidable, mais on peut manquer des bosses si on ne le fait pas correctement. S'il existe un test, un tomodensitogramme à faible émission, et vous l'offrez aux personnes à risque, c'est, pour reprendre une expression de l'armée, un objectif de grande importance dans une opération basée sur les effets.
Merci pour votre réponse.
Docteur Pantarotto, vous avez indiqué qu'à Ottawa, il faut compter 117 jours à partir des résultats anormaux d'un tomodensitogramme pour se faire réellement soigner. Je peux vous dire que c'est déjà beaucoup, beaucoup mieux que ce ne l'est dans d'autres régions du pays, notamment dans l'Île-du-Prince-Édouard, que je représente. Nous venons enfin de constituer une deuxième équipe pour les tomodensitogrammes après des années d'efforts.
Ma première question est la suivante: que doivent et peuvent faire les gouvernements pour réduire grandement le temps d'attente?
Une deuxième question: j'ai indiqué plus tôt que c'était pour moi une question d'investissement. Si le diagnostic et le traitement se font de façon précoce, il en coûtera beaucoup moins cher au système de soins de santé.
Avez-vous des observations?
Merci beaucoup pour votre question.
Je suis entièrement d'accord avec vous. Il vaut beaucoup mieux pour le patient que le dépistage se fasse à un stade plus précoce. Le taux de guérison est beaucoup plus élevé, le patient se porte mieux lorsque sa maladie a été soignée à un stade plus précoce et le traitement coûte moins cher. Il coûte moins cher de soigner quelqu'un à un stade moins évolué de la maladie et on réussit à le guérir. On évite ainsi tous les coûts associés aux soins donnés dans le cas de maladies avancées et de métastases. Les coûts dans ces cas-là sont énormes. Oubliez le coût de la chimiothérapie ou de la radiothérapie. Oubliez le coût des soins de l'oncologue. Ce sont le coûts des consultations chez le médecin de famille, des visites aux urgences, des soins offerts à domicile. Ces patients peuvent être très malades.
Pour revenir à votre point central, c'est-à-dire le rôle du gouvernement, il faut parler de la prévention, qui est essentielle. La prévention, ce sont les stratégies anti-tabac, et il existe beaucoup de recherches et de personnes qui peuvent nous renseigner sur des stratégies de sevrage qui fonctionnent. On pourrait également penser à la détection et à la réduction du radon et à des analyses obligatoires. Devrais-je être capable d'acheter une maison sans connaître les taux de radon qui sont présents? Il devrait peut-être y avoir un genre de registre, parce qu'à moins de rendre l'analyse obligatoire, je ne crois pas que beaucoup de gens le feraient.
Nous avons beaucoup parlé du dépistage. Il faut l'intégrer et il existe de nombreuses idées excellentes. On pourrait, par exemple, avoir un tomodensitomètre portatif. Il faut également penser à toutes les étapes qui accompagnent le dépistage. Si une masse est détectée, cela ne sert à rien à moins qu'on puisse insérer une aiguille à des fins de biopsie. Qui va faire la biopsie? Si j'habite à Rankin Inlet et le tomodensitomètre est sur place, je peux me faire examiner. C'est formidable. Il y a de meilleures chances que je participerai. Mais si l'on trouve une masse et il faut prélever une biopsie, je dois ensuite prendre l'avion jusqu'à Ottawa ou Montréal. Il faut donc songer à la suite et intégrer les diverses étapes, car elles font partie d'une suite cohérente.
Nous avons trouvé, dans notre évaluation effectuée au cours des deux dernières années sur les temps d'attente dans la région d'Ottawa, que l'intégration est un élément clé. Dans notre système de soins de santé, nous ne réussissons pas très bien quand il s'agit de passer des soins primaires aux soins tertiaires et encore aux soins palliatifs et aux soins offerts aux survivants.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tout le monde d'être venu aujourd'hui.
Docteur Ricard, je vous remercie tout particulièrement de votre courage, vous qui êtes venu ici aujourd'hui pour nous raconter votre histoire. Votre témoignage nous est extrêmement utile. Merci.
Docteur Lam, 28 % de nos jeunes de la septième à la douzième année fument de la marijuana. Certains en deviendront des consommateurs habituels, et 5 % d'entre eux en deviendront dépendants.
Nous avons entendu des témoignages selon lesquels la marijuana peut provoquer des psychoses et de la schizophrénie chez les jeunes ainsi que des lésions sur le cortex préfrontal du cerveau. Nous savons que la marijuana contient plus de cancérogènes que le tabac, mais il est très difficile d'établir le lien entre la consommation de marijuana et le cancer des poumons, car les consommateurs de marijuana fument également du tabac. Les deux sont roulés ensemble dans un joint ou fumés dans des cigarettes séparées.
Quelle est l'incidence, selon vous, de la consommation régulière de la marijuana pour ce qui est du cancer du poumon?
On soupçonne que la consommation de la marijuana peut également augmenter le risque du cancer du poumon, mais comme vous l'avez bien souligné, il est très difficile d'étayer ce lien, car les gens fument divers types de marijuana, et le nombre de joints fumés varie d'un jour à l'autre. Il est très difficile de quantifier le montant fumé comparativement au nombre de cigarettes, par exemple.
J'ai examiné les bronches de nombreuses personnes qui fument de la marijuana. On y retrouve une inflammation impressionnante, ce qui me porte à croire que les dommages favoriseront le cancer du poumon.
Il faudrait effectuer davantage de recherches sur ce phénomène, afin d'établir l'incidence de la consommation à long terme de la marijuana.
Oui. Certaines études portent à croire que la marijuana peut causer le cancer du poumon. Les gens ont fumé de la marijuana pendant suffisamment de temps maintenant que nous allons commencer à en observer l'incidence.
Lorsque j'ai fait mes études à Toronto pendant les années 1960, les gens commençaient à fumer de la marijuana. Nous nous retrouvons 40 ou 50 ans plus tard, et je crois que plus les gens en fumeront, plus nous verrons une hausse graduelle du risque de cancer du poumon.
Merci beaucoup.
Docteur Pantarotto, j'ai lu un article sur cet appareil qui s'appelle le « CyberKnife », qui est une machine non invasive dotée d'un bras robotique permettant d'irradier les tumeurs à de fortes doses. Il me semble que seuls des hôpitaux à Ottawa, à Montréal et à Hamilton en disposent.
Je représente Oakville. Savez-vous pourquoi l'hôpital Princess Margaret n'en a pas, ni les hôpitaux de ma région?
Nous avons effectivement un CyberKnife ici à Ottawa. Comme vous l'avez dit, c'est un appareil robotique qui permet de cibler de petites zones sur le corps pour les irradier. En fait, cette technique a constitué une énorme amélioration dans le traitement du cancer du poumon de premier stade chez les patients qui, pour diverses raisons, ne peuvent être opérés.
Pour répondre à votre question, d'autres machines permettent d'irradier de la même façon. En fait, même si nous avons un CyberKnife ici à Ottawa, les 170 patients que nous avons pris en charge pendant la dernière année civile n'ont pas été soignés au moyen du CyberKnife. Nous avons utilisé une autre technologie qui convient fort bien aux cancers des poumons.
Merci.
Docteure Ionescu, c'était fascinant de vous entendre parler des biomarqueurs et des médicaments qui ciblent les cancers. À long terme, à quoi peut-on s'attendre dans le traitement des patients atteints d'un cancer du poumon?
Je suis pathologiste, ce qui fait que je ne vois pas les patients directement, comme vous le savez, mais en me fiant au nombre d'appels que je reçois des oncologues et à leur intérêt croissant à l'égard de ces biomarqueurs, je crois que c'est monnaie courante. Il s'agit des normes en matière de soins. Au fur et à mesure que nous en apprenons davantage sur les cancers du poumon, nous allons voir de plus en plus de médicaments qui serviront à une thérapie ciblée et des biomarqueurs qui seront utilisés dans des tests diagnostiques.
Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration et dans mon mémoire dans l'un des diagrammes circulaires, on connaît déjà le type de facteurs oncogéniques d'environ 54 ou 55 % des adénocarcinomes du poumon. Il reste encore à établir les facteurs des 46 ou 45 % restants, et j'espère que nous pourrons trouver des biomarqueurs et des médicaments qui aideront réellement les patients, non seulement pour ce qui est du taux de survie, mais également de la qualité de vie. Même si je ne vois pas les patients chaque jour, ce qui m'importe, c'est leur qualité de vie. Mes collègues oncologues m'ont appris qu'ils ne sont plus obligés de renvoyer les patients chez eux en leur indiquant qu'il n'y a plus rien à faire. Ils sont maintenant capables de dire aux patients qu'ils peuvent rentrer chez eux avec des pilules, un médicament à prendre pendant plusieurs mois, qui améliorera à la fois leur pronostic et leur qualité de vie. Les oncologues sont en mesure d'affirmer aux patients qu'ils vivront plus longtemps avec la maladie.
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