HESA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent de la santé
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 avril 2014
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, mesdames et messieurs.
Nous allons débuter nos travaux. J'accueille tout le monde, par cette belle matinée printanière. C'était agréable de marcher dehors ce matin.
Nous entendrons deux témoins de l'Association des pharmaciens du Canada, de même que M. Lopatka, de l'Association des facultés de pharmacie du Canada, par téléconférence. Il ne s'agit pas d'une vidéo, mais bien d'une téléconférence.
Commençons par nos témoins dans cette salle et nous allons tenir deux réunions dans les délais normalement impartis pour une réunion de deux heures. Nous commencerons par l'Association des pharmaciens du Canada.
Vous avez 10 minutes ou plus pour vos exposés. Commencez, monsieur Emberley ou madame Cooper.
Je m'appelle Janet Cooper et je suis directrice principale, Affaires professionnelles et services aux membres, à l'Association des pharmaciens du Canada. Je suis accompagnée de Phil Emberley, directeur, Innovation dans la pratique de la pharmacie, à la CPhA. Nous sommes tous deux pharmaciens. La CPhA représente la profession de pharmacien au Canada. Avec plus de 37 000 pharmaciens, nous sommes la troisième plus importante profession du domaine de la santé. La CPhA est également le principal producteur de renseignements sur les médicaments et les thérapies au Canada, à l'intention des fournisseurs des soins de santé.
En tant que professionnels des soins de santé les plus accessibles au Canada, les pharmaciens sont idéalement situés pour offrir toute une gamme de services connexes dans le domaine de la santé aux Canadiens. Nous sommes heureux de vous rencontrer aujourd'hui afin de vous présenter, dans leurs grandes lignes, les changements apportés au champ de pratique des pharmaciens au cours des dernières années. D'ailleurs, s'agissant de pratiques exemplaires, d'autres pays s'inspirent du Canada, puisque nous sommes des meneurs dans l'élargissement du champ de pratique des pharmaciens. À l'appui de ces changements, la CPhA a piloté un plan directeur visant à réaliser la vision de la pharmacie, soit de « procurer aux Canadiens un traitement médicamenteux aux résultats optimaux par des soins axés sur le patient ».
Nous entendons également vous entretenir du rôle déterminant que le gouvernement fédéral a joué dans la mise en oeuvre de certains de ces changements dans le domaine pharmaceutique. Pendant des décennies, notre profession a affirmé qu'il fallait mieux employer le savoir et les compétences des pharmaciens afin d'améliorer les résultats des traitements médicamenteux. C'est cependant au gouvernement fédéral que l'on doit certains des catalyseurs du changement, il y a une dizaine d'années, par un travail réalisé avec les provinces et les territoires et des organisations professionnelles de soins de santé comme la CPhA.
En 2002, la Commission Romanow et le comité sénatorial présidé par le sénateur Kirby ont fait état, dans leur rapport, de l'accessibilité et de la compétence sous-exploitée des pharmaciens ainsi que de la nécessité d'étendre leur rôle. L'accord de la santé de 2003 a également souligné que les pharmaciens représentent une profession prioritaire. L'investissement fédéral de 800 millions de dollars dans le Fonds d'adaptation des soins de santé primaires, le FASSP, a permis de mettre ces changements en oeuvre. La Division de la stratégie en matière de ressources humaines en santé de Santé Canada a joué un rôle de premier plan dans la mobilisation des provinces et des territoires ainsi que des professionnels des soins de santé pour la réforme des soins primaires, pour la planification des ressources humaines en santé, pour l'élargissement du champ de pratique et pour le soutien de l'éducation et de la collaboration interprofessionnelles.
Je vais vous donner certains exemples du rôle joué par le gouvernement fédéral dans le domaine précis de la pharmacie.
Le Fonds pour l'adaptation des soins de santé primaires a financé le projet IMPACT en Ontario qui a permis de faire participer les pharmaciens aux cliniques de pratique familiale. Ce projet était notamment destiné à faciliter la collaboration entre les pharmaciens, les médecins de famille, le personnel infirmier et les autres membres des équipes soignantes dans le cadre d'un nouveau modèle de pratique. De nos jours, les pharmaciens travaillent avec des équipes de médecine familiale un peu partout au Canada.
Le FASSP a également financé la CPhA pour la mise au point d'e-Therapeutics, ressource en ligne destinée à permettre aux médecins, aux pharmaciens et aux autres fournisseurs de soins de santé un accès juste à temps à des décisions fondées sur des données cliniques probantes. De nos jours, e-Therapeutics est très utilisé, mais nous allons devoir maintenant collaborer avec Inforoute Santé Canada et les provinces et territoires pour aller plus loin encore. Il faudra réaliser cette intégration dès la prise en compte par une équipe médicale et charger les dossiers médicaux de façon électronique pour ainsi améliorer la prescription et la consommation sûre et rentable des médicaments.
Ressources humaines et Développement des compétences Canada a financé une étude projective des ressources humaines dans le domaine pharmacologique qui a été réalisée par la CPhA. La recherche et les recommandations de cette étude sont devenues les principaux moteurs de changement. RHDCC a également financé le travail réalisé par les organismes de réglementation dans le domaine de la pharmacie pour aider les diplômés étrangers dans ce domaine ainsi que l'adoption d'une nouvelle profession de la santé, celle de technicien en pharmacie réglementé.
Santé Canada a également financé en partie l'élaboration du programme de formation ADAPT en ligne de la CPhA. ADAPT est axé sur les techniques de soins aux patients, c'est-à-dire l'évaluation, la documentation, les décisions fondées sur les données cliniques probantes et la collaboration interprofessionnelle. ADAPT permet aux pharmaciens d'acquérir les compétences et la confiance nécessaires pour assumer un rôle élargi et passer d'une action essentiellement axée sur la distribution de médicaments à une action plus globale visant à parvenir à des résultats sûrs et efficaces. Non seulement ADAPT a remporté un prix national, mais il a permis de transformer la façon dont les pharmaciens abordent leur pratique avec une efficacité telle que les Américains s'en servent pour appliquer chez eux le modèle d'élargissement du champ de pratique des pharmaciens, dans le cadre de leur réforme des soins de santé.
Sans l'appui du gouvernement fédéral dans le passé, le domaine de la pharmacie au Canada n'en serait pas là où il est aujourd'hui et nous ne serions pas considérés comme des chefs de file dans le domaine, en matière de changement des pratiques pharmaceutiques. Où en sommes-nous aujourd'hui et que faut-il faire à partir de là?
Je cède la parole à Phil.
Au fil des ans, le champ de pratique des pharmaciens au Canada a été considérablement modifié, à commencer par les changements législatifs apportés en Alberta en 2006. Le degré d'évolution de la pratique est sans précédent dans l'histoire de la profession. On parle ici de changements dans la façon dont les pharmaciens prescrivent les médicaments, renouvellent les ordonnances, donnent des médicaments en situation d'urgence, ajustent les posologies et les types de posologie et interrompent ou au contraire entament des traitements. Les changements ont aussi porté sur l'évaluation et la prescription de médicaments pour des maux mineurs, ce qui contribue évidemment à alléger la charge de travail des salles d'urgence et des cliniques externes; il y a aussi la vaccination et la commande d'analyses de laboratoire pour améliorer la surveillance des traitements médicamenteux...
Merci beaucoup, monsieur le président, et excusez-moi de vous interrompre, monsieur Emberley, mais je souhaite déposer une motion visant à inviter le ministre de la Santé à rencontrer le comité, à la première occasion, afin de parler des accords sur la santé. Je souhaite déposer cette motion maintenant.
Je peux vous donner des explications. Je voulais m'entretenir avec le greffier sur ma façon de voir les choses et je déclare votre intervention irrecevable, madame Davies. Vous n'avez pas la parole.
De toute façon, vous savez quand vous avez la parole et vous pouvez utiliser votre temps comme bon vous semble, mais vous le ferez à ce moment-là. Ça va? Très bien. Merci.
Monsieur Emberley, vous pouvez poursuivre.
En outre, nous comptons maintenant, dans plusieurs provinces, des techniciens en pharmacie réglementés. Ils effectuent les dernières vérifications des médicaments délivrés sur ordonnance, libérant ainsi le pharmacien qui peut se consacrer à des tâches d'éducation des patients, de respect des médicaments et de surveillance du respect des traitements.
Nous avons fait remettre au greffier un sommaire d'une page présentant les champs de pratique élargis des pharmaciens au Canada, et vous devriez en avoir un exemplaire sous les yeux.
Bien que les champs de pratique varient d'une province et d'un territoire à l'autre, les tendances demeurent les mêmes. Les gouvernements reconnaissent de plus en plus que les pharmaciens peuvent offrir aux Canadiens des soins accessibles de haute qualité, à un coût inférieur pour le système de soins de santé. La recherche montre que les services des pharmaciens permettent d'améliorer le respect des traitements par les patients ainsi que les résultats des traitements et donc de réduire l'hospitalisation.
Outre les changements réglementaires apportés au champ de pratique, les gouvernements provinciaux dédommagent les pharmaciens pour offrir ces nouveaux services, comme les vaccinations antigrippales, le traitement de maux mineurs, la gestion du stress, la désaccoutumance au tabac et les rencontres de patients pour examiner leur traitement en détail et formuler des plans de soins annuels.
D'ailleurs, lors d'une rencontre du Conseil de la fédération, l'été dernier, les premiers ministres ont demandé au groupe de travail sur l'innovation en soins de santé d'examiner dans quelle mesure il serait envisageable, dans le cadre de la formule des équipes soignantes, de stimuler le rôle important que les ambulanciers paramédicaux et les pharmaciens pourraient jouer dans la prestation de services de première ligne. Nous sommes heureux de constater que Santé Canada, par le truchement du comité FPT sur les effectifs en santé, a récemment entamé ce travail.
En ce qui concerne les recommandations et les prochaines étapes, la profession pharmaceutique se réjouit de cette évolution. Cependant, nous pensons que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle plus actif dans trois grands aspects.
Premièrement, les gouvernements provinciaux ont permis l'élargissement du rôle des pharmaciens, non seulement par le biais de changements législatifs, mais aussi en rétribuant ces professionnels pour le nouveau service de gestion des médicaments. Or, tel n'a pas été le cas à l'échelon fédéral. Bien que la majorité des soins de santé au Canada soient assumée par les provinces, le gouvernement fédéral a, sous sa responsabilité, toute une population à qui il doit offrir des services de santé. On y retrouve les Autochtones, les anciens combattants, les réfugiés et les gendarmes. En fait, Santé Canada est le cinquième plus important fournisseur de soins au Canada. Cependant, contrairement aux gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral ne couvre pas les services pharmaceutiques élargis. Cela étant, la population qui relève d'Ottawa est désavantagée. Elle ne peut pas recevoir le même niveau de service et elle n'a pas non plus le même accès à ces services que la plupart des autres Canadiens. D'où notre première recommandation au comité qui est de demander à Santé Canada de revoir les services qu'il offre à la population qui dépend du fédéral, surtout les services de gestion des médicaments offerts par les pharmaciens, pour que les politiques en matière de couverture de soins soient en phase avec des programmes provinciaux correspondants.
Deuxièmement, à l'heure d'entamer la réforme des soins primaires et d'élargir le champ de la pratique, il convient que tous les professionnels de la santé soient accompagnés dans ce changement, surtout qu'ils aient accès aux dossiers médicaux des patients et qu'ils acquièrent les compétences en collaboration pour pouvoir travailler au sein d'une équipe. Notre programme de formation des compétences ADAPT est un excellent exemple de cours de qualité permettant d'aider les pharmaciens à modifier la façon dont ils pratiquent leur profession. Cependant, nous avons besoin de plus de programmes de ce genre encore afin d'appuyer la collaboration inter et intraprofessionnelle entre les pharmaciens, les techniciens en pharmacie, les médecins, le personnel infirmier et les autres fournisseurs de soins de santé.
Notre troisième recommandation concerne le leadership dont le gouvernement fédéral doit faire preuve pour appuyer la planification en matière de ressources humaines en santé partout au Canada, de même que l'innovation pour parvenir à de meilleurs soins, de meilleures valeurs, pour une meilleure santé.
Comme nous vous l'avons expliqué, la profession pharmaceutique est en pleine transformation. Outre les changements apportés à la pratique professionnelle, nous sommes en train de connaître des changements sans précédent dans le modèle d'affaires des pharmacies. Ce modèle est remis en question à cause des prix inférieurs des médicaments génériques, dans tous les territoires et les provinces. On demande aux pharmaciens de faire plus avec moins. De plus, nous sommes passés d'une forte pénurie de pharmaciens il y a 10 ans à un sureffectif dans certaines villes. Moyennant tous ces changements, il est de plus en plus difficile de planifier et de gérer les effectifs en pharmacie.
La viabilité du système de soins de santé dépend de modèles de pratique rentables et d'une utilisation efficace des ressources humaines. Ainsi donc, nous recommandons que le gouvernement fédéral assume un rôle plus important dans la planification des ressources humaines, dans l'évaluation des besoins des soins de santé et dans l'appui à la collaboration interprofessionnelle. Plus précisément, il faut effectuer davantage de recherches sur l'offre et la demande de main-d'oeuvre, les défis en milieu de travail et les besoins du marché du travail pour les pharmaciens et les techniciens en pharmacie réglementés, partout au Canada. Il nous faut vérifier après coup et prévoir les effectifs dans le domaine des pharmacies pour que notre profession puisse mettre à profit ses compétences en traitements médicamenteux pour s'assurer que la pharmacopée canadienne est utilisée de façon aussi sûre et efficace que possible.
Je vous remercie.
Merci, Phil.
Je résumerai très brièvement en vous parlant des trois recommandations que la CPhA soumet à votre analyse. Premièrement, étendre les nouveaux services offerts par les pharmaciens à la population dépendant du gouvernement fédéral; deuxièmement, investir en éducation et en formation pour appuyer les changements de pratique et élargir le champ de pratique; troisièmement, augmenter le rôle et la capacité du gouvernement fédéral dans la planification des ressources humaines en santé dans l'ensemble du Canada, ce qui se traduirait par des études sur le marché du travail en pharmacie et par des modèles de prévisions.
Nous reconnaissons que les soins de santé sont principalement réglementés et offerts à l'échelon des provinces et des territoires, mais le gouvernement fédéral a un rôle de premier plan à jouer. Nous avons encore beaucoup à faire, compte tenu du vieillissement de la population et des défis que représentent les coûts des soins de santé et les maladies chroniques, pour faire en sorte qu'on dispose, au Canada, d'un bon appariement de fournisseurs de soins de santé ayant les compétences recherchées à l'endroit et au moment où elles seront nécessaires.
Encore une fois, monsieur le président, je vous remercie, au nom de l'Association des pharmaciens du Canada, d'avoir entrepris cette importante étude. Nous sommes prêts à répondre à vos questions et à réagir à vos remarques, mais aussi à travailler avec l'administration fédérale et les autres intervenants pour mettre les solutions en oeuvre.
Merci beaucoup.
Nous accueillons maintenant M. Lopatka de l'Association des facultés de pharmacie du Canada.
Vous avez la parole, pour 10 minutes.
Bonjour tout le monde.
Merci au président de me permettre de faire cet exposé au nom de l'Association des facultés de pharmacie du Canada. Comme cela a été dit, je suis directeur exécutif de l'association. La pharmacologie est un des premiers domaines dans lesquels j'ai étudié.
Je vous ai remis une copie écrite de mes notes de présentation et je me propose de vous en lire certaines parties. Je traiterai de six aspects que je mentionnerai chemin faisant.
Quelques mots, pour commencer, à propos de l'AFPC et je vous signale que j'emploierai cet acronyme parce que le nom de l'association est trop long. L'AFPC est un organisme sans but lucratif national qui défend les intérêts de l'enseignement et des éducateurs en pharmacie au Canada. La mission de l'AFPC consiste à promouvoir et à reconnaître l'excellence de l'enseignement et des études en pharmacie. L'enseignement canadien en pharmacie est très bien coté sur la scène internationale et les jeunes diplômés sont très recherchés quand ils ont terminé leurs études. Chaque année, environ 5 000 étudiants de premier cycle et 1 250 étudiants des cycles supérieurs obtiennent un diplôme d'une faculté de pharmacie canadienne.
L'AFPC a établi des compétences visées à l'échelle nationale pour former les étudiants qui souhaitent devenir pharmaciens au Canada. Les compétences visées sont systématiquement utilisées pour planifier, pour mettre en oeuvre et pour évaluer les programmes universitaires qui préparent au diplôme de pharmacie au Canada. Les compétences visées actuelles sont conçues dans l'objectif général de former des diplômés experts en pharmacothérapie.
Passons aux études postsecondaires en pharmacie. Il existe 10 facultés de pharmacie au Canada. Celles-ci sont situées dans les universités suivantes: de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de Toronto, Waterloo, Laval, de Montréal, Dalhousie et Memorial. Les universités canadiennes offrent des programmes pour obtenir un baccalauréat, une maîtrise et un doctorat en pharmacie ainsi qu'un doctorat en philosophie. Ce n'est pas la même chose.
Jusqu'à récemment, le premier grade professionnel dans toutes les facultés était le baccalauréat. Aujourd'hui, dans deux provinces — l'Ontario et le Québec — le premier grade professionnel est le doctorat de premier cycle en pharmacie. Les facultés dans les autres provinces changent actuellement leur système pour que le doctorat de premier cycle en pharmacie devienne le premier grade professionnel. Par exemple, elles élaborent des propositions, obtiennent des approbations de l'université de la province et révisent ensuite leurs programmes d'études. L'AFPC vise à ce que toutes les facultés de pharmacie offrent le doctorat de premier cycle en pharmacie comme seul diplôme professionnel d'ici 2020.
Voici quelques explications des caractéristiques et des éléments du nouveau programme offert aux étudiants du doctorat de premier cycle en pharmacie à l'Université de Montréal, qui représentent les approches mises en oeuvre dans les autres programmes.
Programme fondé sur un cadre de compétences, compétences générales y compris professionnalisme, communication, travail d'équipe et collaboration interprofessionnelle, méthode scientifique et réflexion critique, apprentissage tout au long de la vie et leadership. Le programme est bien adapté aux étudiants actuels. Les étudiants jouent le rôle d'apprenants actifs et le corps professoral fait office de guide. Par exemple, les étudiants reçoivent des directives et des questions de la part du corps enseignant pour les guider dans le processus de découverte. Quarante-quatre pour cent du programme est réservé aux apprentissages par l'expérience, c'est-à-dire un assortiment de laboratoires de compétences, d'activités d'intégration et de stages. Le programme s'appuie sur un bassin de plus de 1 200 précepteurs formés, issus de tous les milieux d'exercice professionnel. Il comprend aussi plusieurs modules d'apprentissage interprofessionnels.
L'expérience québécoise montre que les nouveaux détenteurs du doctorat de premier cycle en pharmacie sont bien équipés pour exercer la pharmacologie dans les champs élargis d'exercice professionnel nouvellement définis. Tous les programmes de pharmacologie satisfont aux compétences visées de l'AFPC au titre des exigences du Conseil canadien de l'agrément des programmes de pharmacie.
Passons à un bref historique des activités nationales sur le plan des ressources humaines dans le domaine pharmaceutique. C'est entre 2006 et 2008 que l'initiative intitulée « Aller de l'avant: Les futures ressources humaines en pharmacie » a été mise en oeuvre, initiative qui comprend un programme de recherche et d'analyse à plusieurs volets visant à recueillir des données qualitatives et quantitatives sur les enjeux à court et à long terme au Canada dans le domaine des ressources humaines en pharmacie. Mes collègues de l'Association des pharmaciens du Canada vous ont brièvement expliqué cette activité.
Une planification de la main-d'oeuvre digne de ce nom doit s'inspirer de données disponibles. Depuis l'initiative « Aller de l'avant », la base de données canadienne sur les pharmaciennes et les pharmaciens a été élaborée et améliorée. Celle-ci est administrée par l'Institut canadien d'information sur la santé, l'ICIS. La base est alimentée par les renseignements dont on dispose sur les pharmaciennes et les pharmaciens depuis 2006 et l'on peut actuellement accéder à des données remontant à six années. La base de données contient des renseignements sur l'offre et sur la répartition, la démographie, la géographie, l'éducation et l'emploi des pharmaciennes et pharmaciens dans des provinces et territoires sélectionnés au Canada.
L'environnement opérationnel et d'exercice de la pharmacie au Canada est demeuré stable pendant de nombreuses années. Toutefois, l'environnement professionnel de la pharmacie a radicalement changé. Ces changements ont été résumés par mes collègues de l'Association des pharmaciens du Canada. Aucun examen de la main-d'oeuvre des pharmaciennes et des pharmaciens n'a été entrepris récemment à l'échelle nationale. Compte tenu des récents changements dans le domaine de la pharmacie, il conviendrait d'examiner la planification de la main-d'oeuvre, y compris l'offre et la demande de pharmaciennes et de pharmaciens.
Parlons de l'état de la main-d'oeuvre du point de vue de l'AFPC.
À la fin des années 1990 et au début des années 2000, le Canada a connu une pénurie de pharmaciennes et de pharmaciens. Le pays s'est attaqué au problème en augmentant le nombre de diplômés internationaux en pharmacie. Des politiques d'immigration ont été adoptées pour laisser entrer au Canada un plus grand nombre de pharmaciens formés à l'étranger. Des quotas annuels de diplômés internationaux en pharmacie ont été fixés et des programmes de formation officiels réservés à ces diplômés ont été créés pour aider les pharmaciennes et les pharmaciens formés à l'étranger à ajuster leur pratique à l'environnement d'exercice de la pharmacie au Canada.
Selon le dernier rapport de l'ICIS, Les pharmaciennes et pharmaciens 2012, les diplômés internationaux représentent 24,5 % de la main-d'oeuvre canadienne de pharmaciens. Si ces pharmaciens sont des praticiens qualifiés, leurs compétences et capacités à s'adapter au champ élargi de l'exercice de la pharmacie au Canada sont souvent limitées par leur formation qui, en général, a été axée sur la distribution de médicaments et non pas sur les nouveaux services cliniques que peuvent offrir les pharmaciens.
De plus, la capacité des facultés canadiennes de pharmacie à produire des diplômés canadiens s'est accrue, notamment par l'ouverture d'une nouvelle faculté de pharmacie à l'Université de Waterloo. Dans la période de 10 ans, de 2003 à 2012, la taille des promotions sortantes des facultés de pharmacie au Canada a augmenté de 42,8 %. Selon les chiffres sur les inscriptions en première année, le nombre de diplômés devrait atteindre 1 398 en 2018.
Une coalition d'organismes nationaux dans le domaine de la pharmacie, dont l'Association des pharmaciens du Canada et l'AFPC, a rencontré des représentants de Santé Canada et de Citoyenneté et Immigration Canada pour leur faire part de ses préoccupations relativement aux changements de l'offre de pharmaciens et des quotas de pharmaciennes et pharmaciens formés à l'étranger. À la suite de la réunion, Citoyenneté et Immigration Canada a apporté un léger changement aux quotas d'immigration des pharmaciens formés dans d'autres pays.
L'AFPC pense que la main-d'oeuvre des pharmaciennes et pharmaciens au Canada est passée d'une situation de pénurie à une situation d'excédent. Les doyens et les membres du corps enseignant des facultés de pharmacie ont commencé à entendre les nouveaux diplômés raconter que les conditions d'emploi ont changé, il est par exemple difficile de trouver des postes stables et les salaires ont diminué. En réaction à cette situation, l'AFPC a élaboré un sondage sur l'emploi des diplômés afin de mieux comprendre la situation de l'emploi des pharmaciens fraîchement diplômés. Selon les résultats du sondage, 17 à 19 % des nouveaux diplômés étaient au chômage au moment où le sondage a été effectué, c'est-à-dire après la session de l'hiver de l'an dernier.
Selon les données de l'ICIS, le pourcentage de pharmaciens au chômage a augmenté pour passer de 6,2 à 7,7 %.
Passons aux recommandations de l'AFPC.
Nous recommandons, premièrement, que Santé Canada, par l'entremise de la Division des stratégies en matière de ressources humaines en santé, ainsi que Citoyenneté et Immigration Canada réactualisent les quotas d'immigration des pharmaciens formés à l'étranger jusqu'à ce qu'une évaluation complète de la main-d'oeuvre actuelle et à venir des pharmaciens ait été réalisée.
La seconde recommandation propose que Santé Canada, par l'entremise de sa Division des stratégies en matière de ressources humaines en santé, mette en place une initiative d'évaluation complète de la main-d'oeuvre actuelle et à venir des pharmaciennes et pharmaciens axée sur l'offre et la demande de pharmaciens. Mes collègues de l'Association des pharmaciens du Canada en ont fait leur troisième recommandation.
En résumé, je vous ai fait part des observations, des réflexions et des suggestions de l'AFPC en ce qui concerne la main-d'oeuvre en pharmacie au Canada. L'AFPC soumet deux recommandations à votre examen, l'une suggérant de réactualiser les quotas d'immigration des pharmaciennes et pharmaciens formés à l'étranger et l'autre proposant une initiative de planification multipartite de la main-d'oeuvre en pharmacie.
Je vous remercie au nom de l'Association des facultés de pharmacie du Canada de l'occasion offerte de faire part de nos points de vue et suggestions sur ce sujet important pour les éducateurs en pharmacie, les étudiants et autres groupes du secteur de la pharmacie. Je serai heureux de répondre à vos questions et compte collaborer avec le gouvernement fédéral et autres intéressés aux travaux sur ce sujet.
Merci beaucoup, monsieur Lopatka.
Nous débutons la partie de la rencontre où des questions sont posées.
Le premier qui a droit au micro pendant sept minutes, c'est Mme Davies.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui, que ce soit en personne ou au téléphone.
Je considère que l'examen du champ d'exercice des pharmaciens constitue probablement l'un des meilleurs moyens de voir où des mesures vraiment pratiques sont possibles pour améliorer les soins de santé et, comme vous l'avez souligné, comment les pharmaciens peuvent participer beaucoup plus à l'approche d'un travail d'équipe axé sur la communauté.
J'aime beaucoup que vous ayez sorti ce tableau qui montre les divers aspects du champ d'exercice élargi partout au pays. C'est très utile. Si on regarde l'Alberta, pour laquelle tout est coché, je crois que l'Alberta et la Nouvelle-Écosse sont les meilleures.
Jusqu'à quel point le public est-il au courant? Je vous donne un exemple. Nous avons fait grandement appel à notre expérience personnelle quant au champ d'exercice. En Colombie-Britannique, je ne savais pas que les pharmaciens pouvaient renouveler une ordonnance en cas d'urgence ou encore en prolonger ou en renouveler une. Comment fait-on? Qui met cela en place? J'ai des ordonnances; la plupart des gens en ont. Je ne savais pas cela. Comment cela est-il connu du public et comment est-ce qu'on met ça en place?
C'est une excellente question, car une de nos grandes priorités, c'est la sensibilisation et le soutien à une campagne nationale de relations publiques. Je crois que beaucoup de Canadiens ont déjà utilisé ces services, mais la plupart des Canadiens ne savent pas qu'ils y ont accès. Lorsqu'ils en font l'expérience, ils aiment cela. C'est rapide, c'est accessible. Vous pouvez aller vous faire vacciner contre la grippe pendant votre pause du midi et avoir tout de même le temps de manger. Beaucoup de Canadiens connaissent le vaccin antigrippal, mais ils ne savent pas qu'ils peuvent prendre rendez-vous avec leur pharmacien et consacrer 15, 20 ou 30 minutes à examiner leur médication avec lui ou à obtenir tous les autres services offerts. C'est en partie du bouche à oreille, mais je crois qu'il faut s'investir à cet égard.
Par exemple, lorsque le gouvernement ontarien a mis en place le programme MedsCheck, il a lancé une campagne publicitaire à la télévision pour le faire connaître.
Pour être plus précise, je crois que la plupart des gens sont au courant du vaccin antigrippal parce que les pharmacies l'annoncent. La plupart des gens savent aussi, du moins en Colombie-Britannique, que si vous demandez à un pharmacien d'exécuter une ordonnance, il la lira et l'examinera avec vous.
Je crois que ce qui n'est pas aussi bien connu, c'est qu'un pharmacien peut également renouveler d'urgence une ordonnance, renouveler ou prolonger une ordonnance, ou encore changer la formulation. Qui met cela en place? Est-ce que c'est le patient qui dit considérer avoir besoin qu'on change la posologie, ou est-ce le pharmacien? Est-ce que ce dernier se renseigne auprès du médecin? Comment cela se passe-t-il?
Ça dépend de la province. L'Alberta est la plus en avance. Elle a donné aux pharmaciens ce qu'on appelle le pouvoir additionnel de prescrire, ce qui autorise les pharmaciens à débuter l'administration de nouveaux médicaments et à l'interrompre. Ce pouvoir doit être exercé selon un modèle de collaboration. Le pharmacien communautaire doit communiquer avec le médecin de famille, parce que ce dernier doit être au courant de tout changement apporté à la médication d'un patient. Vous ne pouvez pas simplement effectuer ces choses et le dire à personne. L'existence d'un dossier électronique de santé facilite certainement ce genre de communications.
Bien souvent, il s'agit de choses très simples, par exemple la prescription de l'antibiotique amoxicilline en préparation liquide, que l'enfant refuse d'avaler, au dire de la mère. Le pharmacien peut échanger la préparation liquide contre deux capsules: un geste très simple et pratique. Il y a aussi l'exemple du patient qui ne peut obtenir le renouvellement de son médicament pour l'hypertension artérielle parce que son médecin est en congé: le pharmacien est en mesure de prolonger l'ordonnance, vérifie la pression sanguine du patient à la pharmacie et s'assure que tout va bien.
La conscientisation prendra de l'ampleur avec le temps. Nous aimerions qu'elle soit beaucoup plus grande, bien sûr, et nous y travaillons.
J'ai une ou deux questions de plus à poser, alors.
La modification du champ d'exercice est de compétence provinciale, n'est-ce pas? Dans toutes les provinces où ça s'est produit, la mesure a fait l'objet d'une législation particulière.
Existe-t-il un processus de négociation, disons entre vous et le Collège des médecins ou quelque organe de réglementation, permettant d'en venir à un accord lorsqu'un champ d'exercice est considéré comme empiétant sur celui de quelqu'un d'autre?
Comment cela se passe-t-il? Est-ce que vous attendez simplement qu'un gouvernement provincial décide que c'est une bonne idée et qu'il va aller de l'avant.
Je pense que l'Alberta a été la première. La démarche a réellement été suscitée en grande partie par l'organe de réglementation du secteur de la pharmacie, et aussi par l'association bénévole des pharmaciens. Le mesure a inspiré de la crainte à la communauté des médecins et nous avons tenu de nombreuses discussions avec l'Association médicale canadienne et autres groupes, mais une fois déployée, ça n'a plus posé de problème. Tout le monde trouve une façon de travailler ensemble. Le Nouveau-Brunswick a été la province suivante à adopter cette mesure. Le ministre de la Santé a déclaré aimer ce que l'Alberta avait fait et a demandé qu'on l'applique à la province.
Donc la transformation s'est faite de diverses manières: des fois, c'est le secteur de la pharmacie qui l'a mise de l'avant, d'autres fois, c'est le gouvernement qui l'a demandée.
Ce que nous avons constaté avec les années, c'est que les craintes et les préoccupations, chez les médecins en particulier, ont fortement diminué. Ces dernières années, les provinces qui ont adopté cette mesure, soit la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse, ont travaillé en étroite collaboration avec l'organisme de réglementation de la pratique médicale et l'organisation de défense des intérêts des médecins. Dans la mesure où chacun comprend ce que cela signifie, et le terme d'ordonnance n'a pas le même sens pour tous, en bout de ligne, ça fonctionne.
Cette dernière question s'adresse à M. Lopatka.
Dans votre recommandation, vous déclarez que vous souhaitez « réactualiser » les quotas d'immigration. Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là? Est-ce que vous voulez actualiser à la baisse ou actualiser à la hausse? Qui décidera du chiffre? Je ne suis pas certaine de comprendre ce que vous dites dans votre recommandation.
Merci.
Nous croyons savoir que les quotas d'immigration sont fixés par CIC ou le groupe qui s'occupe de l'immigration au sein du gouvernement fédéral. Ce qu'on a compris, c'est qu'environ 1 000 pharmaciens et pharmaciennes avaient été autorisés à immigrer au Canada. Nous aimerions que ce chiffre soit abaissé jusqu'à ce que la situation de la main-d'oeuvre ait fait l'objet d'un examen complet.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue à tous les témoins.
Ma première question concerne le champ d'exercice élargi et l'ordonnance de médicaments par les pharmaciens.
Est-ce que cela englobe, de votre point de vue, ou devrait englober le diagnostic également?
Je crois que tout le monde sait que le diagnostic relève strictement de la compétence d'un médecin. Nous ne considérons pas que les pharmaciens ont fait les études nécessaires pour diagnostiquer une maladie. Nous considérons néanmoins que les pharmaciens sont les experts en pharmacothérapie, donc qu'ils sont définitivement en mesure de soupeser quels médicaments sont les plus appropriés, une fois le diagnostic posé. Bref, non, je n'envisage pas le diagnostic en soi; c'est là quelque chose que les médecins doivent faire.
Je vais vous dire pourquoi je pose cette question. Dans mon jeune âge — et je n'ai pas grandi dans ce pays, mais en Pologne — pour bien des choses, je n'allais pas voir le médecin. J'allais voir le pharmacien et je lui disais: monsieur, ou madame, je souffre de ceci ou de cela; pouvez-vous faire quelque chose? Ça fonctionnait toujours. Sérieusement, ça marchait toujours; il savait toujours quoi faire. Ce n'était rien de grave, mais pour les affections bénignes, vous n'alliez pas voir le médecin. Je ne sais même pas si c'était réglementé ou non, pour être honnête.
En effet, les pharmaciens exercent ce rôle important tous les jours. Les personnes viennent nous consulter pour une piqûre d'insecte, de l'acné ou une réaction allergique. Les pharmaciens sont évidemment en mesure d'offrir des médicaments qui permettent de supporter ou de traiter ces affections. On ne parle pas de diagnostic. Très souvent, la personne sait ce dont elle souffre ou en a une bonne idée, et le pharmacien sert essentiellement à confirmer la chose.
Ce que je veux ajouter, c'est la question de savoir ce qui est nouveau. Les pharmaciens font cela depuis toujours avec les médicaments en vente libre. Maintenant, avec un champ d'exercice élargi, ils peuvent prescrire des médicaments d'ordonnance pour traiter ce genre d'affections bénignes.
Cela fonctionnerait probablement très bien, en particulier dans les régions qui souffrent d'une pénurie de médecins. Nous avons des régions éloignées.
Absolument. Cela soulage également les salles d'urgence, qui sont vraiment envahies par des personnes dont les souffrances sont plus ou moins graves. Si les affections bénignes peuvent être traitées en pharmacie, la pression sera d'autant réduite, c'est certain.
Le comité vient d'effectuer une étude sur la surconsommation de médicaments d'ordonnance. C'est un problème grandissant. Quel est votre point de vue: est-ce qu'un champ d'exercice nouveau, élargi pour les pharmaciens compliquerait le problème? Est-ce que cela réglerait le problème?
Si quelqu'un s'adresse à vous en tant que pharmacien et déclare prendre tel ou tel médicament, étant donné que la consommation abusive ou impropre d'opiacés à des fins non médicales ou médicales est en croissance très rapide, est-ce que cela compliquerait le problème? Si quelqu'un s'adresse à vous et vous dit voyager et avoir besoin d'un médicament pour lequel il n'a pas d'ordonnance, que faites-vous? Je suppose que cela ne fonctionnerait pas très bien et que cela aggraverait en fait le problème.
Une chose que je veux qu'on comprenne bien, c'est qu'il est ici question de thérapeutique appropriée pour améliorer les résultats pour le patient. Dans bien des cas, la chose à faire, c'est de ne pas recommander un médicament. Je crois que les pharmaciens sont dans une position idéale pour effectuer cette évaluation.
Il y a également un volet éducatif, car il faut expliquer la fonction d'un médicament lorsqu'il est nécessaire et dire aussi pourquoi une pharmacothérapie n'est pas souhaitable.
Je ne pense pas qu'un champ d'exercice élargi accroîtrait la part des ordonnances dans la charge de travail. Je considère ce volet comme un second regard que les pharmaciens peuvent facilement offrir pour améliorer les résultats pour le patient et effectuer également ce qui est bon pour la santé du patient en bout de ligne.
Permettez-moi d'ajouter, pour préciser, que l'ordonnance de narcotiques et de médicaments réglementés est de juridiction fédérale, et que les pharmaciens n'ont pas ce pouvoir. Récemment, le gouvernement a autorisé un certain nombre d'autres prestataires de soins à prescrire des narcotiques — sages-femmes, infirmières praticiennes, podiatres peut-être — mais pas les pharmaciens. Donc, ils ne pourraient pas le faire.
Nous avons proposé d'autoriser les pharmaciens à le faire. Souvent, cela peut aider à sevrer quelqu'un car le processus est lent. Modifier le dosage de manière à aider tranquillement à se passer de narcotiques représente une démarche à laquelle les pharmaciens pourraient certainement contribuer.
Ou passer à un narcotique qui n'est pas aussi problématique, comme par exemple, dans le cas d'OxyContin, utiliser un autre narcotique aux effets similaires sur le plan du soulagement de la douleur, sans entraîner les mêmes complications.
J'ai une question à l'intention de M. Lopatka, pour qu'il m'explique quelque chose. Vous avez mentionné un quota de 1 000 personnes par année. Pouvez-vous me dire pourquoi vous aimeriez qu'on abaisse ce quota?
Comme je l'ai indiqué dans mon exposé, nous croyons que la situation s'est inversée et que la pénurie a fait place à un excédent. Au Canada, il y a plus de 1 000 diplômés de nos propres écoles de pharmacie — nous approchons en fait les 1 400 — et nous croyons que, pour autant qu'on sache, du moins, cette offre suffira à combler nos besoins pendant un bout de temps, du moins jusqu'à ce qu'on établisse les véritables besoins annuels, en tenant compte du nombre de pharmaciens qui quittent la profession pour prendre leur retraite ou pour d'autres motifs.
Quant à l'exactitude de nos calculs par suite des actions menées par CIC, le chiffre de 1 000 pharmaciens est le résultat de conversations que nous avons eues avec le ministère. Nous ne possédons pas vraiment des renseignements plus fiables nous permettant d'affirmer que leur nombre est plus élevé que cela.
Je ne sais pas si vous le savez ou non, mais selon les données statistiques des dernières années, quel pourcentage des pharmaciens formés à l'étranger obtiennent une reconnaissance professionnelle après leur arrivée au Canada?
Je n'ai aucun chiffre à cet égard. Tout ce que je retiens de l'information disponible dans la base de données canadienne sur les pharmaciens, c'est qu'au cours des cinq à huit dernières années, les diplômés internationaux en sont venus à représenter le quart de la main-d'oeuvre, si les chiffres sont exacts. Donc, le nombre de personnes qui sont arrivées à entrer dans le système s'est grandement accru au cours des quatre à cinq dernières années.
Mais je n'ai aucun autre chiffre quant au nombre de personnes qui n'ont reçu ni agrément ni licence de pharmacien.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Votre présentation a été excellente et je favorise l'idée d'élargir le champ d'exercice des pharmaciens oeuvrant dans un cadre de travail en équipe. Cependant, je souhaite revenir sur les sujets abordés précédemment par M. Lizon. Je crois être d'accord avec ce dernier. Je considère que la capacité de poser un diagnostic constitue un champ d'exercice réservé aux médecins.
J'ai moi-même eu droit à mes médicaments contre l'asthme auprès d'un pharmacien, lorsque mon médecin était en vacances. Je comprends que c'est un champ d'exercice très approprié.
Il y a une chose qu'on ne cesse d'entendre et c'est pourquoi je souhaite vous interroger à ce sujet. Lorsque quelqu'un se présente à l'officine d'un pharmacien et, comme l'a dit M. Lizon, semble avoir le rhume, il est très facile d'en déduire qu'il suffit de lui donner un antihistaminique, du Tylenol, pour faire baisser la fièvre, etc. Est-ce que c'est un geste approprié, cependant, si on n'a pas été en mesure de communiquer avec le médecin de famille ou le médecin traitant pour établir s'il y a d'autres motifs d'explication ou si la personne prend d'autres médicaments? Lui donner le genre de médicaments que vous pourriez lui recommander pourrait être inapproprié.
À mon avis, cette capacité à échanger entre professionnels avant de donner n'importe quoi... Même un produit en vente libre, comme vous le savez bien, peut être nuisible, si la personne prend des médicaments pour lesquels ce produit est contre-indiqué. Que se passe-t-il quand quelqu'un se présente au comptoir? Ce n'est pas un patient que vous avez déjà vu ni quelqu'un dont vous parlez au médecin sur une base constante, par conséquent, vous ne connaissez pas son histoire.
C'est la première question que je veux vous poser. Comment cela fonctionne-t-il et quels sont les risques d'une telle pratique?
La deuxième chose, et cela je l'ai entendu probablement chez les médecins et ailleurs, donc c'est une question en fait biaisée... Je vous la pose seulement parce que j'aimerais vraiment connaître la réponse et je suis certain que vous en avez une. Est-ce que c'est parce que les pharmaciens, en général, sont avantagés directement par la vente de n'importe quoi ou l'ordonnance de n'importe quoi, même si c'est en vente libre, puisqu'ils sont également propriétaires ou exploitants d'une pharmacie? Chaque fois qu'ils donnent quelque chose, ils en tirent un avantage financier.
Quels sont les préceptes éthiques? Peut-être que le collège pourrait mieux y répondre.
Quels sont les préceptes éthiques en place pour s'assurer que les pharmaciens ne tirent pas d'avantages monétaires à s'assurer que toute personne qui les consulte obtienne quelque chose en vente libre ou autrement? C'est un vrai dilemme sur le plan éthique. Je ne sais pas si vous avez des lignes directrices à cet égard. Je ne sais pas si un suivi est assuré pour en assurer le respect. Bien sûr, l'honoraire de prescription obtenu de la distribution d'un médicament et tout cela... Je peux envisager cela comme fonctionnant très bien dans le cadre de soins communautaires, comme vous l'avez dit.
Je me demande s'il y a une façon d'évaluer le degré de conformité à ce précepte éthique. Comment s'assure-t-on que ces gains monétaires ne reviennent pas à des pharmaciens qui peuvent ou ne peuvent pas...? Il y a des médecins qui font toutes sortes de choses qu'ils ne devraient pas faire. Je me pose la même question. Comment vérifiez-vous et vous assurez-vous qu'un médicament n'est pas donné à quiconque se présente au comptoir parce qu'il souffre d'un petit rhume, puisque vous pouvez en tirer un gain monétaire? C'est le volet éthique dont je voulais parler en regard du champ d'exercice.
Pour répondre à votre première question, je dirais que, très souvent, la personne qui va à la pharmacie pour demander un conseil ou de l’aide n’a pas la possibilité de consulter un médecin dans l’immédiat ni d’aller à l’urgence. C’est le type de personne que l’on voit généralement le soir ou les fins de semaine. la personne explique alors au pharmacien un bobo qui semble guérissable; on peut déceler un rhume.
Selon moi, ce qui est important c’est l’après consultation: souvent, le pharmacien dira: « Surveillez ça. Si dans deux jours vous ne vous sentez pas mieux, il faudra consulter un médecin ou bien un autre spécialiste de la santé. » Donc, on n’incite pas les patients à ne pas faire de suivi dans des situations où le problème pourrait être plus grave, parce qu’on ne veut pas qu’ils rentrent chez eux en pensant que toutes leurs maladies peuvent être soignées de cette façon.
Beaucoup de patients qui viennent à la pharmacie choisissent eux-mêmes les produits. Ils voient une publicité à la télé ou l’entendent à la radio, ensuite ils vont à la pharmacie et choisissent quelque chose. La valeur ajoutée que représente le pharmacien c’est de pouvoir donner une évaluation et, en fonction de l’information qu’il a déjà sur les patients dans ses dossiers, de leur suggérer quelque chose qui représente un traitement réaliste. Mais il est indispensable de le faire en collaboration avec d’autres professionnels de la santé et non pas isolément.
Je comprends ça, mais je veux parler des cas où vous ne pouvez pas avoir de collaboration. Par exemple, quelqu’un qui vient chercher, disons, du Tylenol Sinus. Lui demandez-vous quels autres médicaments il prend?
Bien sûr. Il faut absolument faire cette évaluation parce qu’il est clair que tous les médicaments ne conviennent pas à tout le monde.
En second lieu, tout comme bien d'autres professions, nous avons un code de déontologie. En pharmacie, ce que demande ce code, c’est essentiellement de faire ce qu’il faut pour que les patients obtiennent un résultat positif. Tous les pharmaciens sont bien conscients que suggérer ou prescrire quelque chose qui, au bout du compte, pourrait avoir des effets secondaires négatifs ou empirer l’état des patients n’est pas dans leur intérêt. C’est ce type de bénéfice à court terme qui pourrait devenir un problème à long terme. Et spécialement d’un point de vue professionnel, perdre cette perspective après tous les efforts investis pour arriver là où en est la profession, ce n’est pas ce que nous voulons. Je pense que la plupart de nos membres partagent ce point de vue.
Je crois que les gouvernements provinciaux ont la possibilité de suivre les habitudes de prescription des pharmaciens, oui.
J’ai juste une dernière question. Concernant la prescription des opiacés, je sais qu’en Colombie-Britannique il existe un système de prescription en trois exemplaires. Comme médecin, je sais que les gens vont vous dire « Je viens d’Alberta et, oh mon Dieu, je prends ce médicament depuis 20 ans. Mon médecin me l’a prescrit. Mon dos me fait tellement mal et bla bla. » Avant, quand la prescription en trois exemplaires n’existait pas, vous ne saviez pas quoi faire dans cette situation; vous auriez appelé son médecin pour savoir si c’était vrai, parce qu’il y a des patients qui magasinent les opiacés un peu partout. Avez-vous ce problème? Comment pouvez-vous évaluer ce type de cas?
C’est un problème. La Colombie-Britannique a constitué depuis plus de 15 ans un réseau provincial sur les médicaments. Un pharmacien peut connaître chaque prescription donnée à un patient au cours de sa vie. Bien sûr, nous n’avons pas ça en Ontario et on en aurait besoin. Différentes mesures ont été prises pour éviter le cumul de prescriptions et l’abus de prescription de médicaments, mais finalement le système provincial de délivrance de médicaments, le système des profils, la prescription électronique et le dossier médical électronique auquel tout le monde peut avoir accès sont autant de mesures qui vont faire une énorme différence dans la façon dont on va pouvoir traiter nombre de ces défis.
J’aimerais juste ajouter que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, réglemente les médicaments contrôlés au Canada, mais sans avoir prévu l’aspect surveillance et contrôle. Je pense qu’il est peut-être temps de s’en occuper. Je crois que nous avons besoin d’un système de surveillance national, parce que les gens se déplacent d’une province à l’autre. Il faut donc examiner cette question à l’échelle nationale.
Merci, monsieur le président. Si vous le permettez, je vous demanderais de me faire signe quand il ne restera que deux minutes, pour je puisse partager mon temps avec M. Young. je sais qu’il tient beaucoup à poser quelques questions à ce témoin.
Si je peux juste insister sur ce qu’a dit mon collègue, M. Lizon, j’ai eu exactement la même expérience dans mes déplacements en Europe de l’Est. Si vous êtes malade, vous vous présentez au pharmacien et presque comme les apothicaires traditionnels, il vous examine et vous donne la médication dont vous avez besoin et vous pouvez repartir avec. Ça semble très efficace, en fait c’est très, très efficace et très, très pratique.
Je comprends bien ce qu’a dit Mme Fry sur l’importance de s’assurer que nous ne prescrivons pas trop d’opiacés et autres sortes de médicaments qui peuvent être lourds de conséquences; mais je pense que l’élargissement du champ d’exercice est l’occasion de doter le système de santé de moyens novateurs et plus économiques, et aussi de donner aux Canadiens des moyens plus pratiques dans tout le pays. Je pense tout spécialement à certaines expériences: par exemple, quand mon fils a fait une crise d’asthme pendant la nuit et que j’ai dû vite sortir acheter des recharges pour sa pompe. Il aurait été si simple d’aller directement à la pharmacie et de faire remplir la pompe. Au lieu de ça j’ai dû me mettre à la recherche d’une clinique ouverte 24 heures sur 24 pour obtenir une prescription et aller ensuite la faire exécuter à la pharmacie, alors que pendant tout ce temps mon fils était en détresse. Ce type de situation nous indique qu’il y a place à amélioration, dans le contrôle des coûts d’une part, et dans la commodité des services aux consommateurs d’autre part.
Je pense aussi à ce terrible gaspillage quand, par exemple, avant de partir en voyage les gens vont chez le médecin et lui prennent un temps précieux, alors que tout ce qu’ils veulent c’est simplement des antibiotiques prophylactiques pour aller dans certains pays. Je pense qu’il y a là une belle opportunité pour nos pharmacies de jouer un rôle, et pour le patient d’avoir toute la pharmacopée dont il aura besoin. Je pense à des produits de base comme Cipro, si vous prévoyez aller quelque part. Maintenant, au lieu de ça, les gens sont assis dans un bureau de médecin et lui prennent son temps et accaparent des ressources qui sont précieuses et limitées. Je pense que nous avons tous vécu cette expérience d’être assis dans la salle d’attente d’un médecin, et je crois qu’on pourrait faire autrement et régler ça ailleurs.
Je me demande, vous savez, juste pour revenir à la question de Mme Davies, jusqu’où peuvent aller ces renouvellements et prolongations de prescriptions et le reste? Ici en Ontario je ne connaissais pas ça. Je ne pensais pas qu’on pouvait simplement aller à la pharmacie pour faire renouveler une prescription.
On l’a implanté il y a environ deux ans. La situation typique est celle d’une personne qui prend un médicament régulièrement et qui s’aperçoit, un soir tard ou une fin de semaine, qu’elle n’en a plus. C’est peut-être un médicament pour la tension ou le cholestérol. Au lieu de contacter un médecin et d’avoir à attendre un peu, nous, nous pouvons lui permettre de poursuivre le traitement. Les médecins sont toujours avertis d’une telle situation. En fait il est obligatoire de les informer.
Est-ce que le patient doit revenir pour un renouvellement complet ou lui en donnez-vous assez pour qu’il rentre chez lui avec tout ce qui lui faut?
Normalement, on lui donne, par exemple, ses médicaments pour un mois de traitement régulier, ou trois mois. Là encore c’est une question de jugement de la part du pharmacien et il faut vraiment qu’il exerce ce jugement. Il ne s’agit pas de dire: « Oh c’est bon. » Il faut absolument faire une évaluation du cas.
Permettez-moi d’ajouter que, dans sa catégorie, l’Alberta est la meilleure au monde en ce qui a trait à l’étendue du champ d’exercice. Je crois que dans quelques années nous n’aurons plus de tableau parce que toutes les cases auront été cochées. Mais le gouvernement paie les pharmaciens pour ces types de services en fonction d'un très bon modèle de rémunération.
Récemment, j’ai discuté avec quelqu’un à propos de gens qui partaient quelque part en Afrique. Ils sont allés dans une pharmacie Rexall et là, ils ont eu tous leurs vaccins, leurs prescriptions de prophylactiques, et aussi des conseils, bref tout ce qu’il leur fallait. Ils ont payé pour tout ça, parce que ces services ne sont pas couverts par le gouvernement, mais c’est tellement pratique; ce niveau de commodité est en fait la grande motivation de cette démarche, c’est la facilité d’accès aux soins. Il y a plus de 9 000 pharmacies là-bas qui sont ouvertes le soir et la fin de semaine et pas besoin de rendez-vous pour y aller.
Oui.
Est-ce que je peux revenir au rôle du fédéral qui est évidemment de fournir des services dans le Grand Nord et aux communautés des Premières Nations...
Juste très rapidement, avez-vous pris position sur l’échantillonnage des médicaments donnés par les infirmières en régions éloignées?
Merci.
Je suis très préoccupé par le nombre de patients qui font des réactions virulentes aux médicaments, car c’est la quatrième cause de décès en Amérique du Nord; et on pourrait en prévenir 70 %. J’ai un immense respect pour les pharmaciens. Je souhaiterais qu’ils aient davantage de pouvoir dans leur champ d’exercice pour remettre en question les prescriptions des médecins. Mais ce qui m’inquiète, ce sont des médicaments comme Remicade qui, si je me souviens bien, est approuvé pour le traitement de l’arthrite rhumatoïde, jusqu'à un maximum de trois mois; et il est aussi prescrit par les médecins pour une utilisation de longue durée non conforme au résumé des caractéristiques du produit, hors RCP, pour la maladie de Crohn; et 11 % des patients qui prennent du Remicade dans la durée auront ou peuvent avoir un cancer. Est-ce que les pharmaciens ont le droit de prescrire hors RCP? Et peuvent-ils prolonger ou renouveler une prescription hors RCP?
Si vous pouvez me répondre brièvement, j’ai une autre petite question.
Là encore il y a une grande part de jugement. Il faut que le pharmacien ait le niveau d’expertise nécessaire. Je dirais que la plupart des pharmaciens ne sont pas en position de prescrire Remicade. C’est un spécialiste qui doit le faire.
Un pharmacien peut être en mesure de détecter si un patient réagit mal au Remicade et que ce n’est peut-être pas la meilleure médication pour lui. Il y aurait une grande collaboration avec le patient dans un cas comme ça. Évidemment, on parle ici d’un médicament qui n’est pas sans conséquence et il ne faut pas négliger le risque éventuel de cancer.
Quelque chose d’autre m’inquiète beaucoup. Je suis tout à fait en faveur d’un élargissement du champ d’exercice si, et seulement si, c’est plus sécuritaire pour les patients.
Comment les pharmaciens peuvent-ils prescrire s’ils ne sont pas autorisés à poser un diagnostic? Le diagnostic est essentiel à la prescription. Comment pouvez-vous avoir le pouvoir de prescrire si vous ne savez pas comment diagnostiquer?
Un bon exemple est celui d’un médecin qui écrirait sur l'ordonnance: pour traitement de l'hypertension. Ensuite, en tenant compte de ce fait et des lignes directrices de pratique clinique, le pharmacien pourrait gérer le traitement médicamenteux. Les pharmaciens pourraient aussi commencer l’insuline, ajuster les doses, ce genre de chose.
Le pharmacien peut être la première personne à détecter qu’un patient fait de l’hypertension et l’envoyer chez le médecin pour investigation...
Alors un patient peut aller à la pharmacie et juste dire: « Je pense que je fais de l’hypertension...
Il devrait. Il faudrait avoir un diagnostic. Un pharmacien ne commencera pas à donner des médicaments antihypertenseurs à un patient, sans un genre de collaboration avec un médecin.
... qu’en Colombie-Britannique ils paient les médecins pour ne pas prescrire, ce qui se traduit par beaucoup...
Merci.
Ceci met fin à notre première heure de réunion.
J’aimerais remercier tous nos invités d’aujourd’hui pour leurs très bonnes présentations.
Nous allons donc suspendre la réunion pendant une ou deux minutes et nous demanderons ensuite aux personnes invitées à la seconde heure de rentrer et de se préparer. Vous allez avoir droit à un président de choix pour la seconde heure, car c’est Mme Davies qui va prendre ma place et vous aurez donc une vraie présidente pour la deuxième heure.
Donc nous allons suspendre et revenir dans deux minutes.
Je crois que nous sommes prêts à recommencer. Nous allons entamer la deuxième heure de ce comité.
Nous avons deux témoins.
Madame Cohen, qui êtes chef de la direction de la Société canadienne de psychologie, merci d’être ici.
Notre second témoin est M. Bland de l’Association des psychiatres du Canada, merci de votre participation.
Mme Cohen va faire la première présentation. Le temps alloué est de 10 minutes maximum.
Je ne prendrai en fait que huit minutes.
Merci beaucoup de m’avoir invitée aujourd’hui pour parler d’une meilleure pratique et des obstacles que doivent surmonter les professionnels des soins de santé au Canada.
Je vais d’abord présenter brièvement la Société canadienne de psychologie. C’est la l’association nationale de scientifiques et de praticiens en psychologie.
Il y a environ 18 000 psychologues réglementés au Canada. Ils sont à l’emploi de nombreuses institutions financées par des fonds publics, y compris les centres de soins de santé, les équipes de médecine familiale et de soins primaires, les écoles, les universités et les installations pénitentiaires. Service correctionnel Canada est le plus important employeur de psychologues au Canada.
Cependant, de plus en plus de psychologues ont une pratique privée. Dans divers secteurs, leur champ d’activité inclut l’évaluation psychologique et le diagnostic de troubles mentaux et de fonctionnement cognitif, le développement et l’évaluation de protocoles et de programmes de traitement, les traitements psychologiques et la recherche.
Au Canada, les besoins en services de santé mentale sont considérables. Un Canadien sur cinq a des problèmes de santé mentale au cours d’une année donnée, les problèmes les plus communs étant l’anxiété et la dépression. La dépression est la catégorie d’incapacité dont les coûts augmentent le plus rapidement. La maladie mentale coûte annuellement 51 milliards à l’économie canadienne alors que son incidence sur la productivité au travail est estimée à des dizaines de milliards chaque année.
Quarante pour cent des réclamations pour invalidité adressées au Conseil du Trésor sont reliées à la santé mentale, ce n’est pas un chiffre atypique pour les gros employeurs. L’importance des lacunes en santé mentale a été récemment reconnue par le Conseil du Trésor, quand le ministre Clément a annoncé que le montant de la couverture de services psychologiques pour les employés et les retraités du fédéral doublerait à partir d’octobre 2014. La SCP félicite le gouvernement fédéral pour une telle bonification qui était bien nécessaire, et particulièrement pour avoir pris cette décision en période de restrictions budgétaires.
Les obstacles considérables que crée le mode de financement de la santé au Canada et surtout de la santé mentale font ressortir toute l’importance de cette annonce du Conseil du Trésor. Seulement un tiers des gens qui en ont besoin reçoivent des soins en santé mentale. On peut attribuer ceci à la stigmatisation mais aussi au manque d’accès aux services.
Au Canada, les psychologues constituent le plus grand groupe de spécialistes réglementés en soins de santé mentale. Leurs services ne sont pas financés par les régimes d’assurance-santé des provinces ou des territoires. Dans le secteur privé, les Canadiens paient de leur poche le service des psychologues ou bien ils comptent sur les régimes d’assurance de leurs employeurs.
La couverture offerte par les régimes privés est presque toujours trop basse pour un service psychologique cliniquement significatif. Imaginez des soins cardiaques sans accès à un cardiologue ou des soins obstétriques sans accès à un obstétricien ou une sage-femme. C’est la situation où nous trouvons en ce qui a trait aux soins psychologiques et a la santé mentale. On a beaucoup parlé de ne pas créer un système de santé à deux vitesses au Canada, et pourtant c’est bien ce qui arrive en santé mentale, c’est indiscutable.
Les traitements psychologiques sont efficaces pour traiter une vaste gamme de troubles mentaux, de même que pour améliorer de façon significative la gestion de problèmes de santé chroniques comme l’obésité, les maladies cardiaques et la douleur chronique. Ils coûtent moins cher et sont au moins aussi efficaces que les médicaments pour bon nombre de problèmes courants de santé mentale.
Les gens qui souffrent de dépression et suivent une thérapie psychologique tendent à rechuter moins souvent que ceux traités par médication. Le succès des traitements psychologiques se traduit par une baisse des recours à d’autres services de santé, et par une réduction des frais de traitement en raison des plus faibles coûts de ces services.
Selon une récente recherche, la combinaison de la psychothérapie et de la médication favorise l’observance du traitement, réduit le fardeau subjectif de la maladie et est accompagnée d’un taux de suicide plus faible. Pour les problèmes d’anxiété, les traitements psychologiques sont des interventions de première ligne et sont généralement aussi efficaces que la médication.
Le Conseil de la fédération a constitué un groupe de travail sur l’innovation en matière de santé auquel j’ai participé à titre de coprésidente du Groupe d’intervention action santé ou HEAL. Il s’est donné trois priorités: les produits pharmaceutiques, le caractère approprié des interventions, incluant les modèles de prestation de soins en équipe et les soins aux aînés. La SCP se joint au HEAL pour demander au gouvernement fédéral de participer à cet important travail.
Pour que le Canada puisse innover et améliorer la prestation des soins de santé aux Canadiens, nous devons collaborer pour changer le système de la même façon que nous collaborons pour donner les soins. Si nous voulons un système de santé qui assure des soins de qualité et d'un bon rapport prix/prestations, alors nous devons revoir les politiques, les programmes et les structures de financement sur lesquels repose la prestation de soins de santé.
Pour sa part, la SCP a constitué un groupe d’économistes en santé pour chiffrer les modèles alternatifs visant à rendre les services psychologiques plus accessibles aux Canadiens. La SCP a donné les résultats de ce rapport ainsi que ses recommandations à toutes les parties prenantes en santé mentale: les employeurs, les gouvernements, les sociétés d’assurance privées. Nous espérons que, tout comme le Conseil du Trésor, les parties prenantes tiendront compte des économies individuelles, professionnelles et sociétales que représente une plus grande disponibilité de services psychologiques pour les Canadiens qui en ont besoin.
Même si on n’a peut-être pas très envie de dépenser davantage pour la santé, il reste que si on dépense peu maintenant, on devra dépenser plus, plus tard: plus en utilisation de soins de santé, en absentéisme, en présentéisme et en maladies au travail et peut-être, ce qui est encore plus important, en coûts assumés par les particuliers et les familles.
Un autre facteur qui influe sur l’exercice de la profession de psychologue, c’est le chapitre 7 de l’Accord sur le commerce intérieur. Les organismes de réglementation provinciaux et territoriaux sont mandatés par l’ACI pour mettre en place les mécanismes nécessaires pour favoriser la mobilité des professionnels à travers le Canada. Le problème est que, bien que les organismes de réglementation doivent assumer une grande responsabilité à l’égard de la mobilité, ils disposent de peu de pouvoirs pour établir les critères de mobilité.
Les normes d’accès à la profession de psychologue varient d’une région à l’autre du pays. Cependant, les nouvelles dispositions du chapitre 7 de l’ACI ont fait que la mobilité est fondée sur les moins rigoureuses de ces normes plutôt que sur celles, très strictes, établies et maintenues par les sociétés canadienne et américaine de psychologie depuis des décennies, et qui définissent le cadre de la formation en psychologie dans toute l’Amérique du Nord. La SCP considère que, pour accéder à l’exercice de la profession au Canada, les psychologues doivent détenir un doctorat et satisfaire aux normes d’agrément.
Enfin, il existe des lacunes sur le plan de la formation, du recrutement et du maintien en poste des psychologues canadiens. Nous avons entendu parler des besoins criants en matière de services de santé mentale dans le cas des militaires. Nous connaissons les problèmes de recrutement et de maintien en poste auxquels font face les institutions publiques comme les établissements correctionnels et scolaires qui embauchent des psychologues. Le succès du recrutement et du maintien en poste des psychologues est généralement influencé par trois facteurs.
Premièrement, les employeurs se doivent de participer à la formation de la ressource qu’ils souhaitent attirer et conserver. Nous avons proposé que le gouvernement fédéral envisage l’élaboration d’un programme canadien de résidence permettant aux doctorants en psychologie de poursuivre leur formation au sein des ministères fédéraux qui ont besoin d’eux.
Deuxièmement, les employeurs doivent être attentifs à la rémunération. Les organismes fédéraux qui emploient des psychologues sont reconnus pour offrir des salaires inférieurs à ceux offerts par d’autres employeurs du secteur public pour un travail similaire.
Enfin, les employeurs doivent se pencher sur les conditions de travail. Le succès au travail repose sur l’engagement sérieux de chaque employé et des équipes. À titre d’exemple, nous avons recommandé au ministère de la Défense nationale d’envisager le port de l’uniforme pour les psychologues cliniciens; en plus de donner aux psychologues l’occasion de renforcer la prestation des services de santé, cela leur permettrait de mettre leurs solides compétences à contribution pour la façonner.
En résumé, nous formulons au Comité permanent de la santé les recommandations suivantes: nous exhortons le gouvernement fédéral à participer au groupe de travail sur l’innovation en matière de santé, avec le Conseil de la fédération. C’est en collaborant que nous réussirons à redéfinir la meilleure façon d’assurer des soins de santé à la population canadienne. Nous demandons au gouvernement fédéral de réviser les dispositions de l’Accord sur le commerce intérieur afin d’assurer un alignement sur les rigoureux systèmes de formation et de diplomation établis de longue date par la profession. Nous insistons auprès du gouvernement fédéral pour qu’il participe à la formation des ressources dont il a besoin et dont il dépend pour assurer son efficacité. L’élaboration de programmes de résidence et l’examen attentif des conditions de travail contribueront grandement à améliorer le recrutement et le maintien en poste des professionnels de la santé.
La SCP reste à l’entière disposition du gouvernement fédéral pour collaborer à l’atteinte de ces objectifs.
Merci.
Merci beaucoup, madame Cohen. Vous avez en fait parlé moins de huit minutes.
Passons maintenant au Dr Bland.
Bienvenue au comité. Vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé.
Je vous remercie beaucoup d’avoir invité l’Association des psychiatres du Canada à faire une présentation devant votre comité aujourd’hui. Nous avons choisi de nous concentrer sur un nombre limité de sujets, mais j’accueillerai avec plaisir un débat plus large sur ces sujets, de même que toute autre question que le comité souhaiterait soulever par la suite.
Permettez-moi de me présenter, Dr Roger Bland, psychiatre, chercheur et rédacteur en chef adjoint de la Revue canadienne de psychiatrie. J’ai été directeur du département de psychiatrie de l’Université de l’Alberta et sous-ministre adjoint de la santé mentale en Alberta. Je suis membre du groupe de travail mixte de l’Association des psychiatres du Canada et du Collège des médecins de famille du Canada depuis 1998.
Fondée en 1951, l’Association des psychiatres du Canada est une organisation libre qui représente 4 500 psychiatres et 600 résidents. L’association défend les besoins en santé mentale des Canadiens et préconise les plus hautes normes de pratique professionnelle.
L’APC — soit l’Association des psychiatres et non celle des psychologues — collabore avec les gouvernements et divers intervenants en santé mentale pour offrir du perfectionnement professionnel permanent et promouvoir la recherche. L’Association des psychiatres du Canada n’est pas un organisme de réglementation professionnelle; elle n’établit pas les exigences en matière d’éducation et de formation et ne fixe pas les barèmes de tarifs ou d’honoraires des psychiatres.
Certains se demandent: qu’est-ce qu’un psychiatre, au juste? Les psychiatres sont d’abord formés comme médecins avant de suivre une formation supplémentaire de cinq ans en médecine comportementale et de passer l’examen national d’agrément. La capacité d’intégrer les principes de la médecine, de la psychiatrie, de la neuroscience, de la psychologie et des sciences sociales représente un ensemble de compétences propre aux psychiatres. De tous les médecins spécialistes, les psychiatres sont peut-être ceux qui travaillent le plus en équipe multidisciplinaire. Nous sommes de plus en plus appelés à travailler au sein d’un cadre de collaboration, ce qui diffère quelque peu de l’équipe multidisciplinaire.
Pour enchaîner, j’aimerais parler d’un modèle de prestation des soins de santé relativement novateur. En quoi consistent les « soins collaboratifs »? Les soins axés sur la collaboration font intervenir des prestataires de différentes spécialités, disciplines ou secteurs qui travaillent ensemble pour offrir des services complémentaires et du soutien mutuel et assurer que les personnes reçoivent le service le plus approprié, dispensé par le prestateur le plus adéquat, à l'endroit le plus accessible et cela, le plus rapidement possible et avec un minimum d'obstacles. Le modèle repose sur le contact personnel, le respect mutuel, la confiance et la reconnaissance du rôle et de la contribution potentielle de chacun des partenaires en soins de santé. Il fait appel à des pratiques efficaces, de préférence fondées sur des données probantes et sur l’expérience.
Les soins collaboratifs s’inscrivent dans la vision globale de la réforme du système des soins de santé primaires préconisée par l'Organisation mondiale de la santé. Le Canada a adhéré aux principes de la réforme des soins de santé primaires adoptés par l’OMS et les provinces ont manifesté leur appui à un degré plus ou moins grand.
Cependant, une fois l’enthousiasme initial passé et, dans notre cas, une fois terminé le soutien fourni par l’Initiative canadienne de collaboration en santé mentale — un consortium, composé de 12 organismes, financé par le Fonds d’adaptation des soins de santé primaires —, le gouvernement fédéral semble avoir perdu toute volonté de poursuivre la prestation de soins collaboratifs mise de l’avant par l’Initiative. Nous serions reconnaissants au gouvernement fédéral de renouveler son soutien à la réforme des soins primaires en s’assurant d’y inclure un important volet sur la santé mentale.
Accroître le nombre de spécialistes n’accroît pas nécessairement la santé de la population. Cela peut, en fait, l’aggraver et en augmenter les coûts. Par ailleurs, augmenter le nombre de prestateurs de soins primaires améliore la santé de la population et se traduit, à long terme, par une réduction des coûts. Dans ce cas, la tâche du spécialiste consiste à s’assurer que les prestateurs de soins primaires sont appuyés adéquatement et qu’ils ont largement accès à divers niveaux de services spécialisés, préférablement à proximité de leur lieu de travail.
Les psychiatres et les médecins de famille ont travaillé ensemble pendant 15 ans afin de promouvoir les soins collaboratifs. Les efforts menés en vue de faire adopter le concept par les deux organisations ont été très fructueux. Les nombreux programmes maintenant en place dans l’ensemble du Canada sont la preuve concrète de l’essor de cette approche.
L'Initiative canadienne de collaboration en santé mentale a produit un document évaluant les données probantes liées aux pratiques exemplaires en matière de soins collaboratifs. Il en ressort que les relations axées sur la collaboration requièrent une collaboration au niveau systémique, de la préparation, une réorganisation des services et dans bien des cas, du temps.
Le co-emplacement est un aspect primordial pour les patients. Le suivi systématique des patients a obtenu de meilleurs résultats que s'il avait été laissé au hasard ou au « venez me voir quand vous voudrez ». L’éducation dispensée aux patients par un spécialiste autre que le médecin en soins primaires améliore leurs résultats; la liberté de choix de traitements est un facteur important dans l’engagement du patient à l’égard du traitement.
Les soins en collaboration diminuent de façon significative la stigmatisation, un facteur majeur en santé mentale. Toutefois, les systèmes de rémunération, généralement établis par les provinces, peuvent constituer un obstacle aux soins collaboratifs. À défaut de système de rémunération cohérent, il n’existe pas de manière cohérente de soutenir véritablement les soins axés sur la collaboration.
Du côté de la santé mentale et des services fédéraux, les possibilités de collaboration sont nombreuses. En tant qu'employeur, l'Association canadienne des psychiatres, l’ACP, salue d’emblée le projet qui a permis l’élaboration de la norme nationale du Canada sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail, un projet financé par Santé Canada. L’ACP encourage son adoption à grande échelle.
Pour ce qui est de la GRC, nous estimons qu’il serait pertinent qu’elle offre à ses membres une formation sur la santé mentale en situation de crise. Il se fait certains efforts en ce sens, mais il est clair que cela est nettement insuffisant. Par exemple, certains services de police ont adopté le programme Premiers soins en santé mentale et offrent cette formation à un grand nombre de leurs membres, mais je ne crois pas que ce soit le cas à la GRC.
Quant aux militaires, la plus grande difficulté semble être la gestion du trouble de stress post-traumatique et des maladies concomitantes. Les programmes récemment mis en place semblent plutôt efficaces. Cependant, on n'a pas assez tenu compte des familles des militaires atteints de ce trouble. Ces dernières pourraient avoir besoin de soutien supplémentaire, tout comme les groupes d'entraide composés de bénévoles qui commencent à se former en certains endroits, pour venir en aide aux militaires.
Si l’on se tourne du côté des prisons fédérales, le taux d’incarcération y a augmenté de 75 % au cours des 40 dernières années. Il ne s’agit pas d’un chiffre, mais bien du taux d’incarcération par 1 000 habitants. Pendant une période d’un an, 60 % des détenus ont reçu des soins en santé mentale; parmi les délinquants, 30 % des femmes et plus de 14 % des hommes avaient déjà été hospitalisés en raison d’une maladie psychiatrique. Les problèmes de consommation de drogues touchent quatre détenus sur cinq. Parmi les détenues, 50 % présentaient des problèmes d’automutilation, 85 % avaient été victimes de violence physique et plus des deux tiers avaient été victimes de violence sexuelle. On m’a laissé entendre que les services correctionnels avaient de la difficulté à recruter des médecins, et c’est sans doute vrai. Pourtant, au début de la semaine, j’ai consulté le site officiel des offres d’emplois gouvernementaux et n’y ai vu aucun poste de médecin ou de psychiatre sous la rubrique Service correctionnel.
Dans le domaine de la recherche, le gouvernement fédéral est peut-être le plus important bailleur de fonds au Canada. Il est donc très important qu’il soutienne la réalisation de projets de démonstration sur la façon dont les soins collaboratifs peuvent contribuer à résoudre les problèmes courants auxquels les systèmes de santé font face, notamment en ce qui concerne les groupes mal desservis comme les Autochtones, les sans-abri et les collectivités rurales et isolées.
On s’est beaucoup interrogé sur la formation multidisciplinaire, et de nombreuses facultés des sciences de la santé des universités canadiennes offrent maintenant des cours combinés dans plusieurs disciplines de la santé. Bien qu’il s’agisse d’un grand pas en avant, il reste encore à faire. Il est impératif d'apprendre à travailler ensemble dans le cadre d’une équipe, même dans des situations où le médecin n’est pas le chef consacré de l’équipe.
Les programmes de résidence en psychiatrie — la formation spécialisée postdoctorale actuelle — prévoient une expérience obligatoire en soins collaboratifs. Il y a également place pour des programmes de perfectionnement professionnel multidisciplinaire continu. L’Association canadienne des psychiatres a piloté certains de ces programmes, mais ceux-ci sont financièrement difficiles à maintenir car ils bénéficient de très peu de soutien financier autre que les contributions des participants. Le rôle que pourrait y jouer le gouvernement fédéral n'est pas clairement défini, mais la promotion et le soutien d'activités de perfectionnement professionnel multidisciplinaire continu seraient sûrement appréciés.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup, docteur Bland.
Nous allons maintenant passer passons à notre première série de questions. Le temps accordé est de sept minutes pour les questions et les réponses.
Commençons par M. Morin.
[Français]
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vais prendre quatre minutes de mon temps de parole et laisser les trois autres minutes à mon collègue M. Boulerice. J'aimerais que vous me l'indiquiez lorsque ce sera le temps de lui céder la parole.
[Traduction]
[Français]
Ma question s'adresse à Mme Cohen.
Vous avez parlé des barrières liées à l'accessibilité de la population en général aux soins d'un psychologue. On sait que les services en santé mentale ne font pas partie du panier de services que les provinces et territoires offrent à la population au moyen des régimes publics. Du moins, c'est le cas dans la province de Québec. Si d'autres provinces couvrent publiquement les soins d'un psychologue, dites-le-moi. Bref, l'accessibilité aux soins est grandement limitée.
Croyez-vous que le gouvernement fédéral pourrait aider les provinces et territoires financièrement, peut-être en bonifiant le transfert aux provinces, afin que les soins en santé mentale fassent réellement partie des services offerts à la population par les régimes publics?
[Traduction]
Je vais vous répondre en anglais. Je pourrais essayer en français, mais comme la question est vraiment difficile, je préfère répondre en anglais.
Dans certains ressorts, bien sûr, les psychologues sont rémunérés par des institutions publiques et, essentiellement, aucuns frais ne sont facturés au patient, au client ou au bénéficiaire de ces services. Il y a des psychologues qui font partie d’équipes de soins primaires et d’équipes de santé familiale, mais ce qui se passe de plus en plus, c’est que les institutions publiques subissent elles aussi des pressions qui les incitent à réduire le nombre de salariés, alors ces institutions, de même que les psychologues, passent aux mains du secteur privé. Quand j’ai terminé mon doctorat, il y a des années de cela, la plupart de mes collègues partaient enseigner à l’université ou dans des hôpitaux. Aujourd’hui, les jeunes psychologues diplômés vont travailler en cabinet privé.
C’est tout un défi. Je pense, pour vous dire franchement, que nous avons un système public d’assurance-maladie et non un système public d’assurance-santé. Nous payons des prestateurs désignés pour dispenser des services désignés dans des endroits désignés.
Il est difficile de parler de prestation de soins collaboratifs et multidisciplinaires, particulièrement dans le cas des maladies chroniques, dont font partie certains problèmes de santé mentale, parce qu’il n’existe pas de solution magique. Il n’existe pas de solution unique à l’ensemble des problèmes. Il n’y a pas de prestateur de soins de santé, qu’il soit médecin, psychologue, travailleur social ou conseiller qui, à lui seul, ait réponse à tout. Dans un modèle qui paie des prestateurs désignés pour fournir un service désigné, il est très difficile de soutenir la prestation de soins prodigués en équipe.
Le gouvernement fédéral pourrait-il prendre certaines mesures en matière de ciblage de fonds ou de transferts pour la santé mentale? Je laisse aux économistes mieux informés que moi le soin de répondre à cette question. Mais une chose est certaine, il faut trouver une solution.
[Français]
[Traduction]
[Français]
Je vais brièvement poser ma deuxième question.
[Traduction]
La plupart des assurances privées exigent une recommandation médicale pour rembourser des visites chez un spécialiste. Cela ne fait-il pas qu’ajouter un obstacle inutile de plus, surtout dans le cas de mesures préventives?
Vous avez tout à fait raison. Aucun règlement ne prescrit une chose semblable. Les psychologues sont réglementés par nos administrations respectives pour dispenser des soins. Ils sont autorisés à accepter des patients sans recommandation. Pourquoi certains programmes d’assurance ont-ils cette exigence et d’autres pas? C’est une façon de filtrer l’accès. Cette exigence n’est aucunement liée au champ d’application de la profession de psychologue.
Je suis d’accord avec vous. En plus de constituer un obstacle majeur pour le client ou le patient, cela crée un fardeau sur le système de santé public déjà surchargé.
[Français]
Merci beaucoup, madame la présidente.
Madame Cohen et monsieur Bland, je vous remercie beaucoup de votre présentation.
Tout d'abord, j'aimerais obtenir votre point de vue sur un enjeu très précis, soit le trouble de stress post-traumatique chez nos militaires et nos vétérans.
J'ai participé au Comité permanent de la défense nationale, il y a quelques semaines, et j'y ai appris avec un peu de stupeur qu'aucun suivi systématique ou régulier n'était fait auprès des gens qu'on envoyait outre-mer dans des situations de combat. Or, on constate malheureusement que cela cause des drames, des tragédies familiales.
Selon vous, que devrait faire le gouvernement fédéral pour améliorer le traitement des cas en santé mentale chez nos militaires qui reviennent de mission?
[Traduction]
Madame la vice-présidente, j’invoque le Règlement. Il s’agit d’un sujet très important et très intéressant, mais qui est hors de notre propos. Cela n’a rien à voir avec le champ d’application de la profession.
Eh bien, je pense que cela nous montre tout le rayon d’action du travail des psychologues de même que les domaines et les groupes de la population auprès desquels ils sont appelés à intervenir…
Le trouble de stress post-traumatique est assurément une affection pour laquelle il se fait de solides interventions. Nous avons, parmi nos 7 000 membres, un groupe de psychologues spécialisés en stress post-traumatique, tant en recherche qu’en prestation de services.
Au sein des forces armées, le problème, selon moi, tient à l’accès aux soins et à la façon dont ceux-ci sont dispensés. À ce que je sache, on n’y trouve pas de psychologues cliniques en uniforme. Il y a bien certains psychologues qui couvrent les volets personnel ou industriel et organisationnel, mais pas le volet clinique.
Il existe des traitements très valables et je crois qu’il serait peut-être nécessaire d’apporter une plus grande attention aux mécanismes pour y accéder.
Le Dr Bland a peut-être d’autres points de vue sur ce sujet.
Bon nombre d’entre nous avons entendu les commentaires de Roméo Dallaire qui, par exemple, des années après avoir vécu un épisode traumatisant éprouve encore des difficultés. Je ne crois pas que son problème soit une exception. Je ne sais pas pendant combien de temps les Forces canadiennes continuent d’offrir le service aux anciens militaires.
Un autre exemple est celui du colonel Ethell, lieutenant-gouverneur de l’Alberta. Le colonel parle souvent de l’expérience traumatisante qu’il a vécue en Bosnie. Plusieurs années ont passé depuis, mais il éprouve encore des difficultés à surmonter l’épreuve.
Je pense que dans certains cas, il est nécessaire que les militaires reçoivent des services de soutien prolongés, plusieurs années après leur congé. Et je crois qu’il est extrêmement important que ces services soient fournis non seulement à la personne qui a servi au sein des Forces, mais aussi aux membres de sa famille, qui sont eux aussi devenus des victimes de cette situation. Je ne peux…
Docteur Bland, vos sept minutes sont écoulées, et je vous remercie. Nous y reviendrons peut-être plus tard.
Merci beaucoup, madame la vice-présidente. C’est un plaisir de vous voir occuper la vice-présidence. Je crois que c’est la première fois depuis que je fais partie de ce comité.
Je remercie nos deux témoins d'être présents parmi nous ce matin.
Docteur Bland, vous parliez de modèles de soins collaboratifs interprofessionnels plutôt que d’équipes multidisciplinaires et, si j’ai bien compris, vous avez établi une distinction entre les deux. Vous avez aussi mentionné une étude récente qui s’est penchée sur les modèles.
Pourriez-vous nous préciser le nom de cette étude, où elle a été publiée ou encore, où il serait possible de la consulter?
Cette étude a été publiée en tant que supplément de la Revue canadienne de psychiatrie, je crois que c’était en 2008. Nous pourrons certainement vous en fournir quelques exemplaires.
Merci beaucoup. Ce serait très apprécié.
Revenons maintenant à vos modèles collaboratifs. Je crois vous avoir entendu dire que les prestateurs de services multiples attachent beaucoup d’importance aux contacts personnels, au respect mutuel, à la compréhension des compétences mutuelles, aux données probantes et tirées de l’expérience. Je trouve ces commentaires très pertinents.
Pouvez-vous décrire la genèse, le développement de ce type de modèle? Comment faites-vous pour réunir ces groupes? Ceux-ci sont-ils fonction de la taille ou du bassin de ressources dans lequel vous puisez? Pourriez-vous, je vous prie, me donner un exemple?
Tout a commencé par un travail de collaboration amorcé entre le Collège des médecins de famille et l’Association des psychiatres du Canada à la suite des problèmes que les membres du Collège des médecins de famille éprouvaient par rapport à la psychiatrie. Difficulté à obtenir des recommandations et ainsi de suite.
Je vous donne un seul exemple. J’ai travaillé environ cinq ans à titre de psychiatre consultant au Centre de santé communautaire du Nord-Est, à Edmonton, à temps partiel. Ce centre communautaire de santé mentale offre tout un éventail de services dont la médecine familiale, soins maternels, santé publique, soins à l’enfant, et quelques autres encore. Tous ces services travaillent en collaboration. Le programme de santé mentale y a été mis en place pour être combiné à d’autres programmes et non pour fonctionner de façon indépendante.
Dans ce centre, qui comptait aussi un service de soins aux toxicomanes, mon travail, et celui du personnel, consistait à recevoir des patients qui avaient été vus par d’autres services qui avaient déterminé que le patient souffrait peut-être d’un trouble mental. Je voyais ces patients avec eux, nous formulions un plan de traitement conjoint et déterminions nos responsabilités respectives dans ce traitement. Si nous avions affaire à un cas difficile, nous tenions une grande conférence de cas au cours de laquelle chacun des intervenants se voyait assigner sa responsabilité. Ce n’était pas une question de dire « ce problème me concerne, mais je te laisse t’en charger », non, il s’agissait de déterminer lequel d’entre nous allait se charger de tel ou tel aspect des problèmes constatés chez le patient afin d’aider ce dernier le mieux possible.
Est-ce que…
Vos précisions sont très utiles. Et par la suite, j’imagine que vous vous réunissiez une fois par semaine en équipe. Quel était le mode de financement? Comment le centre arrivait-il à gérer cet aspect qui semble être le principal obstacle à ce type de collaboration?
Le programme dans son ensemble recevait son financement par le biais de la Capital Health Authority, comme cela se faisait en Alberta à l’époque.
J’étais rémunéré à l’acte selon un barème. Nous ne recevions aucun financement supplémentaire pour les soins collaboratifs. Le barème de tarifs de l’Alberta est très favorable, il couvre même le temps consacré à des conférences de cas et aux discussions avec d’autres professionnels. Ce qui n’est pas le cas dans bien d’autres provinces.
La formation d’équipes comme celles-là repose-t-elle essentiellement sur la proximité physique ou sur la proximité relationnelle? Une fois les relations établies, le suivi peut-il s’effectuer en ligne ou sous une autre forme de communication électronique?
Il est plutôt difficile d’établir des relations à distance. C’est faisable, mais c’est très long.
Les choses sont différentes avec une personne que vous côtoyez chaque jour, qui n’est jamais loin lorsque vous avez une question à lui poser. Ces conditions facilitent et accélèrent l’établissement de relations étroites.
Exactement. Vous pouvez donc bâtir une équipe comme celle-là même dans une communauté éloignée: vous réunissez des gens, vous faites venir certaines ressources avec lesquelles vous passez une fin de semaine tous les trois mois pour établir des relations et le reste du temps, vous continuez de collaborer à distance.
Est-ce que ça pourrait fonctionner?
Oui, ça pourrait fonctionner. Je pense qu’il existe des modèles de ce genre. Mais une rencontre aux trois mois n’est sûrement pas suffisante. On risquerait d’oublier certains détails.
C’est une bonne remarque.
Vous avez mentionné qu’en augmentant le nombre de prestateurs de soins primaires, on améliorait l’accès aux spécialistes en même temps que la santé des patients. Cette affirmation me paraît tout à fait logique. Est-ce bien ce que vous avez dit?
Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit afin que je sois certain de bien saisir votre point de vue?
J’ai dit qu’une augmentation du nombre de prestateurs de soins primaires améliore généralement la santé de la population.
De toutes les professions de soins primaires au pays, la chiropratique arrive troisième en tant que premier point de contact avec le patient.
Ne trouvez-vous pas étonnant que le troisième plus important point de contact — je veux dire, entendez-vous parler de chiropraticiens qui participent à des modèles de soins collaboratifs? Si non, pourquoi?
Nous parlons du rayon d’action des prestateurs de soins de santé.
Je ne connais aucune situation où un chiropraticien se serait investi dans ce genre de soins. Pour autant que je sache, ils n’ont pas l’habitude de collaborer avec d’autres prestateurs de soins.
Je peux vous nommer de très bons exemples de collaboration plus fructueuse. L’hôpital St. Michael's avait mis en place un programme qui s’est poursuivi pendant plusieurs années.
Cela m’étonne vraiment car près de 40 % des problèmes à traiter dans un bureau de médecin sont des problèmes musculosquelettiques pour lesquels, de toute évidence, les chiropraticiens obtiennent de très bons résultats. Et ils sont 9 000 dans la profession.
Il me semble qu’il manque quelque chose dans ce modèle axé sur la collaboration.
À l’époque où l’Initiative canadienne de collaboration en santé mentale était en place, elle regroupait 12 organismes dont les chiropraticiens ne faisaient pas partie. J’ignore pourquoi.
Les psychologues en faisaient partie.
C’était le cas pour l’Initiative canadienne de collaboration en santé mentale, mais il y avait l’ACIS, une autre initiative axée sur la collaboration interdisciplinaire dans les soins de santé primaires en général, et non seulement sur la santé mentale. Les chiropraticiens participaient peut-être à cette initiative plutôt qu’à celle en santé mentale?
Vous parlez de collaboration au niveau de la pratique, et je voudrais soulever un point. Dans les établissements de soins tertiaires où les professionnels de la santé non couverts par les régimes provinciaux d’assurance-santé travaillent comme salariés, on appuie à fond la prestation collaborative des soins.
J’ai travaillé pendant 10 ans en médecine physique et en réadaptation afin d’aider des personnes souffrant de traumatisme médullaire et de douleurs chroniques à s’adapter à leur situation et à la gérer. La chiropratique serait probablement intervenue à un moment ou à un autre, si ce n’est au sein même de l’établissement de soins tertiaires.
Cela fonctionne remarquablement bien. Ce n’est pas que les professionnels de la santé ne savent pas travailler en collaboration, c’est que le modèle de financement tombe en panne lorsqu’il s’agit du domaine communautaire en soins primaires.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je pense que lorsqu’on examine le champ d’application de la pratique, on ne peut s’empêcher de chercher en même temps de meilleures méthodes de prestation des soins de santé. Traditionnellement, comme vous le savez, les soins de santé étaient prodigués à l’hôpital par un médecin ou un dentiste agréés et la Loi canadienne sur la santé couvrait tout cela. Aujourd’hui, on se rend compte qu’il s’agissait là d’une façon très coûteuse de dispenser des soins et qu’il existe, comme vous l’avez tous mentionné, beaucoup d’autres soignants qui, dans le cadre d’une équipe multidisciplinaire, sont parfaitement en mesure de dispenser des soins de très grande qualité.
J’aimerais poser une question à la Dre Cohen. Si l’on réfléchit à ce que serait la pratique multidisciplinaire idéale en contexte de soins communautaires, on s’aperçoit, à mon avis — j’espère que vous êtes d’accord avec moi — que sa seule raison d’être ne devrait pas être d’assurer la gestion des maladies mentales chroniques. Ne serait-il pas envisageable d’établir un lien avec les écoles et faire en sorte que des psychologues embauchés par les commissions scolaires interviennent de façon précoce en décelant les problèmes de comportement qui se manifestent dès la petite enfance, comme l’intimidation, ou les signes annonciateurs de suicide ou autres psychoses? Ces cas pourraient être pris en charge par un médecin de l’équipe de soins communautaires et, au besoin, par un psychiatre. Cela vous paraît-il un modèle valable? Il existe au Royaume-Uni et c’est un excellent modèle.
Vous soulevez un point extrêmement intéressant. Les questions de santé sont omniprésentes, pas seulement dans les hôpitaux, les bureaux de médecin et les écoles.
Une des choses que nous avons proposées afin de permettre le déploiement optimal des compétences du psychologue... car, à l’instar des psychiatres, nous ne sommes que l’un des membres d’une grande équipe, est que le travailleur social ou le préposé au soutien par les pairs est peut-être la personne la mieux désignée pour intervenir dans ce genre de problèmes. Mais c’est vraiment par là qu’il faut commencer, connaître la nature du problème… Il est, selon moi, absolument fondamental de pouvoir compter sur une expertise pour évaluer et diagnostiquer ces cas, et déterminer vers quelle spécialité les diriger. Entre ces deux pôles d’intervention, il y a place pour bien d’autres types de soins et de fournisseurs de soins.
Il y a des psychologues qui travaillent dans des écoles. Le problème, c’est que les écoles doivent composer avec des contraintes de financement, et les ressources y sont de plus en plus rares. Les parents dont l’enfant présente des troubles d’apprentissage ou autres déficits ne veulent pas être mis en liste d’attente pendant un an et demi avant que leur enfant soit évalué. Ils se tournent donc vers le secteur privé, et c’est lorsqu’ils reviennent au secteur public qu’il peut se produire une rupture de communication.
Vous avez soulevé un point très pertinent.
Je comprends que les écoles ont des besoins urgents en financement, mais si ce que vous avez décrit devient un nouveau modèle de la prestation de soins multidisciplinaires en contexte communautaire, le portefeuille de la santé ne pourrait-il pas financer la part représentée par un poste de psychologue dans ces écoles qui en ont besoin...? Il faudrait, je ne sais pas — vous le savez sûrement mieux que moi —, un psychologue pour six écoles, peut-être? Une chose est certaine, une telle approche serait vraiment déterminante en matière de prévention des problèmes de santé mentale.
Je voudrais poser une question à M. Bland. Quand j’étais à Halifax, j’ai rencontré des psychiatres, et j’ai toujours été à la fois impressionnée et émue par une chose que l’un d’eux m’a dite. Il avait été psychiatre légiste. Après 11 ans de travail dans le système carcéral, il a quitté pour se consacrer à la psychiatrie pédiatrique parce qu’il était convaincu qu’en intervenant auprès de l’enfant avant l’âge de quatre ans, il était possible d’orienter les connexions cérébrales en pleine formation et de prévenir ainsi un grand nombre des problèmes comportementaux qui se développent ultérieurement. C’est de là que m’est venue l’idée de l’établissement d’un lien avec les écoles dont j’ai parlé à Karen tout à l’heure.
Voyez-vous en cela un moyen de diminuer le nombre de psychiatres judiciaires dont le système carcéral a besoin? J’aimerais aussi savoir pourquoi, selon vous, les services correctionnels du gouvernement fédéral n’ont affiché aucun poste de psychiatre ou de psychologue — comme vous l’avez vu. Pourtant, la présence de ces professionnels est absolument essentielle en milieu carcéral.
Il m’est impossible de dire pourquoi je n’en ai pas vu. C’est peut-être moi qui ne les ai pas trouvés.
Vous aviez d’autres questions.
La plupart des troubles psychiatriques chez l’adulte trouvent leur origine dans l’enfance ou l’adolescence: entre 70 à 80 %, si l’on exclut la démence. Les programmes de santé mentale dans les écoles occupaient une place très importante dans les services de santé mentale. Ils ont disparu pendant longtemps. Ils commencent maintenant à réapparaître. Il va sans dire que l’Alberta a investi des sommes considérables dans le développement de programmes de santé mentale dans les écoles.
Les écoles n’ont pas toutes besoin du même type de programme. Certaines écoles sont de vraies écoles « à problèmes » et les élèves « à problèmes » qui les fréquentent ont besoin d’intervention de bien plus grande envergure que d’autres. Ainsi, le but n’est pas d’élaborer un programme uniforme pour toutes les écoles, mais quelle qu’en soit l’ampleur, les programmes de santé mentale dans les écoles sont un excellent mécanisme de dépistage précoce.
Quant à déterminer si l’on peut vraiment prévenir les troubles mentaux de l’adulte, je ne sais pas. Rappelez-vous que le mouvement d’orientation infantile qui a débuté en 1928 partait du principe que si seulement on pouvait traiter les enfants, les problèmes de maladie mentale chez les adultes n’existeraient pas. Visiblement, ce n’est pas tout à fait ainsi que les choses se sont passées.
Non.
Un groupe de l’Université Dalhousie mène actuellement d’importants travaux de recherche sur le sujet. Le groupe fait aussi du dépistage précoce auprès des enfants dans les écoles. Selon les membres du groupe, les diverses raisons pour lesquelles un bon nombre de ces enfants aboutiront en prison pourraient être évitées ou atténuées si un bon travail de prévention était effectué avant que leur situation ne les mène dans le système carcéral.
Si l’on se penche sur la population carcérale et que l’on examine la proportion de détenus qui ont subi des violences physiques et sexuelles, qui ont des problèmes de toxicomanie, il semble que ce soit une population très défavorisée, ayant subi beaucoup de coups durs. Ces cas ne sont pas si faciles à traiter. S'il était possible de prévenir la violence familiale, la violence envers les enfants et la violence sexuelle — et il existe des programmes dont c’est l’objectif — dans le cadre des programmes nationaux de santé publique, ce serait grand pas en avant.
Je connais une école dans un quartier défavorisé de Saskatoon où on accomplit un travail de ce genre. Les résultats obtenus après trois ans sont remarquables. Il y a un psychologue sur place. Vraiment, c'est un guichet unique pour les parents, les enfants, tout le monde. L'école est devenue une plaque tournante pour la prévention et l'intervention précoce.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur le président.
J’aimerais remercier les gens qui sont ici aujourd’hui.
Monsieur le président, je voudrais simplement revenir rapidement sur une chose que le M. Bland a mentionnée concernant la formation en santé mentale à la GRC. Je suis un retraité de la GRC.
Cette formation est offerte à la Division « Dépôt » de la GRC, à Regina, mais il est vrai que partout au Canada, les policiers sont probablement la première personne à devoir intervenir auprès d’une personne en crise pour motif de troubles mentaux. Pour dire les choses franchement, les policiers n'ont pas le temps de s’occuper de ces choses-là. Lorsqu'ils se retrouvent dans une telle situation, leur devoir est de diriger la personne vers la ressource appropriée et de passer à l’affectation suivante. Ils admettent qu’il s’agit d’un problème sérieux, mais ce n'est tout simplement pas leur travail.
Je vais m’arrêter là-dessus, parce que j'ai quelques questions.
La Commission de la santé mentale du Canada a reçu de notre gouvernement le mandat d’élaborer une stratégie en matière de santé mentale. Je crois que vous en faites partie. Pourriez-vous nous donner quelques précisions sur le sujet. C'était un bon point de départ, mais ensuite?
Karen, peut-être pourriez-vous commencer, et M. Bland répondra ensuite.
Investir dans la Commission de santé mentale était une idée formidable. C'est une excellente stratégie, mais sa mise en oeuvre constitue un défi en soi, car comme vous le savez, dans le domaine de la santé, toute mise en oeuvre relève de tellement d’instances. Les soins sont dispensés par les provinces et les territoires. Il s'agit donc de prendre ces recommandations en compte et de travailler au développement de la collaboration et de la volonté de procéder à des changements sur le terrain qui, je crois, constituent un des défis les plus importants pour la stratégie en santé mentale.
Notre organisme a participé. Nous avons mis en place des initiatives vraiment prometteuses qui s’intéressent aux lignes directrices en santé mentale et à la prévention du suicide. Je suis certaine que ces initiatives retiennent le temps et l’attention de toutes les collectivités d'intervenants concernées. Parfois, j’imagine voir un tas de gens faisant les cent pas autour d'un autobus. Nous connaissons tous sa destination, mais nous ne savons pas trop qui peut le conduire.
C’est là que réside le plus grand défi.
Je suis d’accord avec vous.
Cette stratégie est extrêmement touffue et je ne crois pas qu’on puisse prétendre pouvoir accomplir cent pour cent de ce qu’elle préconise. Il s’agira de déterminer, puis de réaliser, les éléments qui sont faisables sur le plan pratique, c’est-à-dire ceux que nos moyens nous permettent de réaliser, et faire avancer les choses.
En ce qui concerne vos remarques sur la police, j'accompagne la police environ 150 fois par année. Je vais avec la GRC à Sherwood Park et à St. Albert ainsi que dans certaines régions rurales. J'accompagne aussi la police de la ville d’Edmonton. La façon dont ces deux services de police composent avec les cas de crises mentales n'est pas comparable. Les policiers municipaux semblent y parvenir beaucoup mieux.
Reconnaissons notre désaccord sur ce point.
Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure les psychologues sont intégrés dans le système de santé en général?
De nombreuses institutions publiques emploient des psychologues et leur plus grand employeur est le SCC. Les psychologues effectuent des évaluations des risques et dispensent des traitements en fonction du lieu, et selon qu’il s’agit d’un établissement provincial ou territorial. Ils travaillent aussi dans des écoles et dans des hôpitaux. Un des enjeux, cependant, c’est que depuis une vingtaine d’années, nous avons été témoins d’un grand changement dans le profil d’exercice de la profession. Toronto en est un excellent exemple. Bon nombre d’hôpitaux d’enseignement ayant réduit leurs ressources salariées, on retrouve maintenant plus de psychologues dans le secteur privé que public. Les hôpitaux peuvent choisir de garder des psychologues, mais ceux-ci relèvent du secteur privé. Et dès qu’un poste relève du secteur privé, il n’est plus financé.
L’autre problème que j’aimerais souligner est que les psychologues qui travaillent à leur compte réussissent très bien; ce n’est pas une question de portefeuille. Le problème est que, des gens viennent vous voir, ils ont besoin de soins, mais ils n’ont pas les moyens de payer. C’est une situation difficile quand vous êtes un prestateur de soins pour qui l’important, c’est d’aider les gens.
Merci.
Je me demande si vous pourriez tous les deux nous donner un peu plus de précisions quant aux obstacles à surmonter pour accéder aux services de psychologues et de psychiatres au Canada.
Monsieur Bland, voulez-vous commencer?
Cela dépend probablement du lieu où vous et du type de service que vous cherchez. Si vous êtes en crise, vous pourrez sûrement voir quelqu’un le jour même. Sinon, l’attente peut durer des mois.
Je sais que nous avions un problème avec les délais d’attente pour les enfants et que nous l’avons réduit de 60 jours à 30 jours. Mais à mon avis, 30 jours c’est encore trop long.
La plupart des provinces ont déployé des efforts pour réduire ces temps d’attente; chacune a traité le problème à sa manière, bien sûr. La situation n’est pas parfaite, mais elle s’est améliorée.
Les psychologues du système public se heurtent probablement à des obstacles similaires. Il y a certains goulots d’étranglement dans le système public, comme la filière des recommandations. Dans certains établissements, il est possible de consulter un psychologue directement; dans d’autres, il faut passer par un médecin.
Dans le secteur privé, les goulots d’étranglement sont fonction de votre capacité à payer, de la nécessité d’obtenir une recommandation du médecin pour accéder aux services, mais en général, l’accès à un psychologue est plus rapide dans le secteur privé.
Une minute? Merci.
Vous avez soulevé une chose que j’aimerais tirer au clair. Les patients ont-ils besoin de la recommandation d’un médecin de famille pour consulter un psychologue ou un psychiatre dans le domaine des soins de santé?
Pas pour voir un psychologue.... S’il existe une exigence à cette fin, c’est qu’elle émane d’un établissement de soins tertiaires exigeant que le triage soit fait par un médecin, ou de l’assureur qui agit comme filtre ou comme gardien, mais cela ne fait pas partie de l’autorisation d’exercer.
D’accord. Merci.
Il est à peine plus de 10 h 30. Nous allons donc suspendre nos travaux et permettre à nos invités de prendre congé, puis nous prendrons 10 minutes pour nous charger de quelques questions à huis clos.
Si le comité est d’accord, nous allons nous arrêter pour quelques minutes.
Je remercie encore une fois nos invités d’aujourd'hui. Merci de nous avoir fait part de vos bonnes et judicieuses idées.
La séance est suspendue.
[La séance se poursuit à huit clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication