Mon nom est Ann Wright, et je suis directrice de la pratique de l'hygiène dentaire à l'Association canadienne des hygiénistes dentaires. Je suis accompagnée par Victoria Leck, hygiéniste dentaire et directrice du développement professionnel.
L'ACHD est la voix collective nationale de plus de 26 000 hygiénistes dentaires au Canada et représente plus de 17 000 membres individuels. L'hygiène dentaire est la sixième plus grande profession de la santé réglementée, et les hygiénistes dentaires jouent un rôle vital en aidant à préserver et à améliorer la santé buccodentaire et générale des Canadiens.
Les hygiénistes dentaires reçoivent leur formation de quatre universités et 33 collèges situés à travers le Canada et ils exercent leur profession dans une variété de milieux, y compris les agences de la santé publique, les cabinets d'hygiénistes dentaires en pratique autonome, les cabinets dentaires traditionnels, les hôpitaux, les établissements de soins de longue durée, les établissements d'enseignement et les centres de recherche.
La prestation des soins d'hygiène dentaire ne se limite pas aux soins préventifs comme le détartrage des dents, l'aplanissement des racines ou l'application de fluorure et des agents de scellement de puits et fissures. Nous faisons aussi un dépistage de cancer buccal et nous nous engageons à promouvoir certains changements de comportement en encourageant l'abandon du tabagisme et en donnant des conseils nutritionnels. L'ACHD a aussi participé aux discussions de la table ronde de la sur la prévention de la violence familiale et de la maltraitance des enfants. Les signes physiques de la violence familiale apparaissent souvent au niveau de la tête, du cou et du visage, ce qui fait que les hygiénistes dentaires occupent une position de premier plan pour observer et rapporter les signes et les symptômes reliés à la violence familiale.
Nous sommes très heureux d'avoir la chance de vous rencontrer aujourd'hui, afin de souligner les domaines dans lesquels le gouvernement fédéral peut assumer un rôle de chef de file dans le but de répondre de la meilleure façon possible aux besoins de tous les Canadiens.
Une mauvaise santé buccodentaire peut provoquer de la douleur, entraîner une diminution de la productivité professionnelle et de la qualité de vie générale, et est maintenant reconnue comme un facteur de risque du diabète et des maladies cardiovasculaires et respiratoires.
Dans son rapport publié en 2014, l'Académie canadienne des sciences de la santé a identifié de grands enjeux et inégalités en matière de santé buccodentaire et d'accès aux soins de santé buccodentaire au Canada. Comparativement au reste de la population canadienne, les groupes les plus vulnérables qui comprennent les aînés, les peuples autochtones et les sans-abris sont les plus susceptibles de se priver de soins dentaires à cause du coût, d'avoir des caries non traitées, une maladie des gencives et de la douleur.
Même si, au Canada, les soins de santé sont principalement gérés par les provinces, le gouvernement fédéral demeure directement responsable de la prestation des soins de santé pour certaines populations. Les anciens combattants bénéficient de programmes dont la gestion est assurée par le ministère des Anciens Combattants, et les collectivités des Premières Nations et inuites reçoivent des soins de santé dans le cadre du Programme des services de santé aux non-assurés, ou SSNA. En ce qui concerne les peuples autochtones du Canada, les Enquêtes sur la santé buccodentaire des Inuits et des Premières Nations ont révélé que ces peuples ont une moins bonne santé buccodentaire si on les compare à l'ensemble des Canadiens.
Comparativement aux autres pays de l'OCDE, le Canada figure parmi les premiers pour ses dépenses en matière de soins dentaires par habitant, mais la majorité de ces soins sont financés par les régimes d'assurance privée, qui ne sont pas accessibles aux résidants canadiens les plus vulnérables. Le Canada a besoin que le gouvernement fédéral assume un rôle de chef de file pour assurer que tous les Canadiens aient un accès équitable à des professionnels de la santé pouvant prodiguer des soins de la meilleure qualité possible dans le milieu approprié, au bon moment, et selon leurs besoins personnels.
Le champ de pratique d'une profession englobe les activités que le praticien est en droit d'exercer selon sa formation et l'autorité législative. Au Canada, le champ de pratique d'une profession est concrétisé par les forces sociales, réglementaires et financières, ce qui a souvent fait obstacle à l'optimisation des ressources et à l'amélioration globale des soins. Actuellement, au Canada, le champ de pratique de l'hygiène dentaire varie considérablement d'une région à l'autre, et ces différences deviennent apparentes lorsque les législations des provinces et des territoires sont comparées entre elles.
Par exemple, les Albertains bénéficient d'un accès direct à un hygiéniste dentaire et les hygiénistes dentaires de cette province ont le champ de pratique le plus vaste au Canada. En Alberta, les hygiénistes dentaires peuvent prescrire des drogues de l'annexe 1, prendre des radiographies et les interpréter, et fournir de l'anesthésie locale pour soulager la douleur buccale pendant les prestations de soins. En revanche, les programmes fédéraux, comme ceux offerts par le ministère des Anciens Combattants, interdisent aux hygiénistes dentaires de pratiquer au plein potentiel de leur champ de pratique en ne permettant aux anciens combattants que les services d'hygiène dentaire de base. Ces services sont basés sur le plus petit dénominateur commun du champ de pratique en hygiène dentaire.
D'ailleurs, les collectivités des Premières Nations ont souvent peu d'accès à des fournisseurs de soins de santé ou ont un accès peu fréquent. Malgré cela, le Programme des services de santé aux non-assurés des Premières Nations ne reconnaît pas les hygiénistes dentaires en tant que fournisseurs de soins buccodentaires directs, même s'ils habitent au sein, ou près, d'une collectivité des Premières Nations, sauf dans la province de l'Alberta.
Nous demandons vivement que le gouvernement fédéral agisse avec célérité pour assurer que tous les bénéficiaires du Programme SSNA puissent avoir le même accès aux soins de santé buccodentaire d'une région à l'autre du pays.
Dans le Nord, des dispositions en matière de supervision exigent que les hygiénistes dentaires travaillent exclusivement sous la gestion d'un dentiste, ce qui limite sérieusement l'accès du public aux soins de santé buccodentaire. Cette obligation a été enlevée de presque toutes les législations provinciales, laissant les populations du Nord prendre des décennies de retard sur les autres provinces du pays.
La visée d'un système de soins de santé optimal est d'offrir des soins qui soient sécuritaires, efficaces et performants. La meilleure utilisation des champs de pratique des professions de la santé requiert des solutions innovatrices pour répondre aux besoins grandissants de la population. Malgré les obstacles réglementaires actuels dans le Grand Nord, l'ACHD s'est associée à Santé Canada et au gouvernement du Nunavut pour collaborer à un projet de santé buccodentaire innovateur pour les enfants de 0 à 7 ans vivant dans les 19 collectivités du Nunavut.
Le gouvernement du Nunavut finance un projet selon lequel les hygiénistes dentaires offrent des prestations de soins préventifs qui comprennent le placement de restaurations temporaires, procédure que l'on nomme thérapie de stabilisation temporaire, ou TST. Elle a pour but de prévenir la douleur et de préserver la structure des dents jusqu'à ce que l'enfant soit examiné par un dentiste. Les résultats préliminaires de ce projet, lancé en 2014, sont très encourageants et cette thérapie est un exemple percutant de l'utilisation créative et efficace des ressources humaines dans le domaine de la santé, dans le but de répondre aux besoins d'un segment spécifique de la population. Nous avons inséré un collage de photos provenant de ce projet.
En résumé, les hygiénistes dentaires plaident en faveur de normes de pratique nationales en hygiène dentaire qui permettent de maximiser le champ de pratique afin d'assurer que tous les Canadiens, peu importe où ils habitent, puissent recevoir des services de santé buccodentaire équitables.
L'harmonisation des champs de pratique fondée sur des modèles de soins novateurs liés aux structures académiques, juridiques et économiques exigera du temps, ainsi que la collaboration de tous les intervenants. Bien que l'enseignement relève des provinces et étant donné que les programmes d'hygiène dentaire sont offerts dans huit provinces et 37 établissements, le gouvernement fédéral a un rôle à jouer non seulement dans la normalisation des programmes d'enseignement et de l'accréditation, mais aussi dans l'établissement d'un lien entre l'enseignement et les champs de pratique, peu importe les champs de compétences.
De plus, le gouvernement fédéral est dans une position idéale pour assumer le rôle de chef de file et appuyer la planification pancanadienne des ressources humaines en santé ainsi que l'innovation en matière de modèles de soins interprofessionnels afin d'améliorer la santé, la qualité des soins et la valeur obtenue.
La viabilité du système de soins de santé repose sur des modèles de pratique rentables. C'est pourquoi nous recommandons que le gouvernement fédéral joue un rôle plus important à l'égard des ressources humaines en santé et du soutien à la collaboration interprofessionnelle. Le but ultime d'un système juste et viable consiste à moduler les champs de pratique et les modèles de soins de façon à répondre le mieux possible aux besoins des Canadiens.
En résumé, l'ACHD soumet les trois recommandations suivantes:
Premièrement, le gouvernement fédéral doit reconnaître les hygiénistes dentaires en tant que fournisseurs de services et étendre les services de santé buccodentaire qu'ils prodiguent à l'ensemble des collectivités, par l'intermédiaire des programmes fédéraux de soins de santé.
Deuxièmement, pour s'assurer que l'ensemble des Canadiens ait un accès équitable au professionnel pertinent qui leur offre la meilleure qualité de soins au moment adéquat, le gouvernement fédéral doit revoir et modifier la législation désuète liée aux champs de pratique, particulièrement celle qui s'applique au Grand Nord.
Troisièmement, le gouvernement fédéral doit investir dans les programmes d'enseignement et de formation qui appuient l'ensemble des champs de pratique, et jouer un rôle plus important à l'égard de la planification pancanadienne des ressources humaines en santé.
Tout en reconnaissant que la prestation des soins de santé relève principalement de la réglementation des provinces et des territoires, le gouvernement fédéral a, effectivement, un rôle clé de chef de file. Lorsque l'on considère les disparités en matière de santé buccodentaire qui touchent les Premières Nations et les Inuits, et l'augmentation du coût des soins de santé, il est essentiel que nous travaillions ensemble pour veiller à ce que l'ensemble des Canadiens ait accès à des services de santé buccodentaire. Il nous reste beaucoup de travail à accomplir pour s'assurer que le Canada ait la combinaison idéale de fournisseurs de soins.
Encore une fois, monsieur le président, au nom de l'Association canadienne des hygiénistes dentaires, nous vous remercions de nous avoir permis de prendre part à la discussion et nous avons hâte de travailler avec le gouvernement fédéral et d'autres intervenants pour mettre en oeuvre ces recommandations.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Bon après-midi à tous. Mon nom est Benoît Soucy, et je suis le directeur des Affaires cliniques et scientifiques de l'Association dentaire canadienne. Kevin Desjardins, à mes côtés, en est le directeur des Affaires gouvernementales.
En tant que représentants nationaux de la profession dentaire au Canada, nous sommes heureux de participer à votre étude des pratiques exemplaires et des obstacles fédéraux liés à la profession et à la formation des professionnels de la santé. Il y a plus de 18 000 dentistes au Canada, et tous détiennent une licence d'une autorité provinciale ou territoriale. Grâce au travail réalisé en lien avec le chapitre 7 de l'Accord sur le commerce intérieur, tous peuvent se déplacer d'une province ou d'un territoire à l'autre sans devoir faire réévaluer leurs compétences professionnelles.
La majorité des dentistes travaillent en cabinet privé, soit de façon autonome ou en partenariat. Les plus grands cabinets de dentistes au pays peuvent compter jusqu'à 30 ou 40 dentistes. Peu importe leur contexte de travail, tous les dentistes qui offrent des soins de santé buccodentaire au Canada ont tous un point important en commun: ils ne pourraient offrir de services à leurs patients avec le même niveau de qualité et d'efficacité sans le soutien d'une équipe dentaire où chaque personne joue un rôle bien précis.
Certains membres de l'équipe dentaire, comme les réceptionnistes et les gestionnaires cliniques, ne sont soumis à aucune réglementation car ils ne participent pas directement aux soins dispensés aux patients. D'autres, comme les assistants et les hygiénistes dentaires, sont assujettis à des réglementations qui varient d'une province à l'autre et qui, dans bien des cas, font en sorte que ces professions ne relèvent pas des organismes de réglementation dentaire.
Outre ces membres de l'équipe dentaire, trois autres professions participent à la prestation de soins de santé buccodentaire au Canada: les techniciens dentaires, qui participent surtout à la fabrication d'appareils utilisés par les dentistes pour le traitement des patients; les denturologistes, dont le champ de pratique est lié à la fabrication indépendante de prothèses dentaires amovibles partielles ou complètes; et les thérapeutes dentaires, qui sont formés pour fournir des services chirurgicaux et restaurateurs limités sous la supervision directe des dentistes.
Parmi ces professions, la thérapie dentaire est probablement la plus pertinente à l'étude de ce comité. À l'extérieur du Québec et de l'Ontario, où ils n'ont pas le droit de pratiquer, les thérapeutes dentaires améliorent l'accès aux soins pour les enfants et les populations éloignées. Dans bien des cas, ce sont des fonctionnaires fédéraux travaillant pour la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada.
L'École nationale de dentothérapie, ou END, a été fondée en 1972 et financée par Santé Canada jusqu'en 2011, année à laquelle ce financement a cessé, notamment parce que Santé Canada avait beaucoup de difficulté à combler les postes disponibles dans les collectivités inuites et des Premières Nations en régions éloignées, les diplômés de cette école préférant travailler dans des cabinets dentaires des villes de la Saskatchewan et du Manitoba, les deux provinces où ils sont autorisés à pratiquer.
L'incapacité de l'END d'offrir un accès à des soins dans les régions pour lesquelles elle avait été créée ne signifie pas qu'il est impossible d'obtenir des résultats grâce à des initiatives liées à ces champs de pratique. Comme on vient de le dire, les dentistes s'appuient sur la présence d'assistants et d'hygiénistes dentaires dans leur cabinet pour offrir des soins de qualité. Des changements aux réglementations provinciales, comme l'introduction de modèles de mesure permettant à un assistant d'offrir ce service dans des provinces souffrant d'une pénurie d'hygiénistes dentaires, continuent d'améliorer la capacité des dentistes à offrir de tels services.
La présence de thérapeutes dentaires en Saskatchewan a amélioré l'accès aux soins pour les enfants, tandis que des évaluations économiques du programme fédéral ont démontré que la dentothérapie constitue un moyen rentable d'offrir des soins aux enfants dans des circonstances précises. À l'étranger, en Australie et en Nouvelle-Zélande notamment, le recours à des thérapeutes dentaires a été un succès, tandis qu'au Minnesota, une évaluation préliminaire permet de conclure à des avantages incluant des économies directes, une hausse de la productivité de l'équipe dentaire et une plus grande satisfaction des patients.
Pour parvenir à de tels résultats positifs, ces programmes ont dû limiter la capacité des nouveaux fournisseurs de services de pratiquer de façon autonome en pratique privée. L'expérience a démontré que, dans bien des cas, la disponibilité de types de fournisseurs de services supplémentaires ne réduit pas les prix des services, pas plus qu'il n'améliore l'accès dans les régions éloignées. Il a fallu trouver des moyens pour corriger le fait que les frais dentaires des programmes publics ne respectent pas les montants minimums requis pour maintenir ces pratiques rentables, en particulier dans les régions éloignées à faible densité de population. Cela a été fait en définissant le champ de pratique des nouveaux fournisseurs de services d'une façon permettant une durée de formation plus courte et un moindre coût pour le système, et en faisant en sorte que ces nouveaux fournisseurs de services soient des employés salariés au travail limité à certains contextes de santé afin qu'ils se rendent là où leurs services sont le plus nécessaires.
En outre, les programmes fructueux bénéficiaient d'un financement suffisant et stable, et étaient gérés de façon à maintenir les économies liées au temps de formation réduit grâce à une gestion soignée du champ de pratique des nouveaux fournisseurs de services.
D'après l'expérience liée à ces programmes, l'Association dentaire canadienne considère comme exemplaires les pratiques suivantes liées au champ de pratique et à la formation des fournisseurs de soins de santé.
Réglementer uniquement les professions où les risques pour les patients justifient le coût d'une réglementation.
Appuyer la réglementation provinciale au moyen de systèmes nationaux d'accréditation des programmes d'enseignement et de certification des personnes afin de favoriser la mobilité de la main-d'oeuvre.
Élaborer des champs de pratique pour chacune des professions participantes afin qu'elles comblent un besoin réel et contribuent à la prestation sécuritaire et efficace des soins.
Déterminer chacun des facteurs qui pourraient avoir une incidence sur le succès des nouveaux modèles de prestation des soins avant leur mise en oeuvre et mettre en place des stratégies afin de les atténuer. Ces stratégies comprennent habituellement la réduction de la durée de formation et des coûts pour le système, la prévention de la modification des champs de pratique qui érodent ces économies, la limitation des contextes de pratique offerts aux nouveaux groupes de fournisseurs, et leur embauche à titre de salariés afin qu'ils pratiquent là où on a besoin d'eux.
J'espère que cette courte revue des soins de santé buccodentaire et des tentatives visant à améliorer l'accès à ces soins grâce à l'introduction de nouvelles professions et à l'élargissement des champs de pratique des autres sera utile à vos travaux.
Je vous remercie de votre attention, et je répondrai avec plaisir à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président de m'avoir invité à témoigner devant le comité.
Bonjour à tous les honorables membres du comité. Au nom de l'Association chiropratique canadienne, ou ACC, de la profession et de ses patients, je suis heureux d'être ici aujourd'hui en compagnie de mon collègue, M. Robert David, président du conseil de l'ACC et chiropraticien à Montréal, au Québec. Je me présente, Ward MacDonald, chiropraticien dans la splendide localité de Wolfville, en Nouvelle-Écosse.
L'ACC est une association professionnelle nationale qui représente 8 400 docteurs en chiropratique hautement qualifiés et réglementés. Les docteurs en chiropratique ont accompli au moins sept années d'études postsecondaires, dont une formation de quatre ans à temps plein dans un établissement d'enseignement chiropratique agréé. Cette formation poussée prépare les chiropraticiens à exercer à titre d'experts en santé musculosquelettique, en prodiguant des soins conservateurs fondés sur des données probantes, sans médicaments ni chirurgie.
En tant que l'un des trois chiropraticiens exerçant à Wolfville, je suis souvent appelé à assurer des soins primaires. Très souvent, les patients consultent directement ma clinique pour un éventail de problèmes musculosquelettiques et autres. En raison de ma formation et de la pénurie de praticiens dans ma région, on me demande souvent d'examiner, de diagnostiquer et de diriger les patients vers les soins adéquats. Je travaille en étroite collaboration avec d'autres professionnels de la santé afin que mes traitements contribuent à optimiser les soins médicaux que reçoivent mes patients. C'est un privilège pour moi d'exercer en de telles qualités.
Les problèmes musculosquelettiques imposent au système de santé une pression beaucoup plus lourde qu'on ne l'imagine. Tous les ans, 11 millions de Canadiens et de Canadiennes souffrent de dorsalgie ou d'autres troubles musculosquelettiques. Si l'on prend en compte l'ensemble des coûts de la santé, ils représentent la deuxième cause de consultation médicale et la première cause d'invalidité. Au cours des deux dernières décennies, ce fardeau s'est accru de 45 %, et l'on s'attend à ce qu'il continue d'augmenter, en partie dû au vieillissement de la population.
En tant que docteurs en chiropratique, nous détenons les compétences cliniques et l'expertise non seulement pour évaluer les patients, mais aussi pour diagnostiquer les problèmes musculosquelettiques. Ces troubles sont parmi les plus incapacitants et fragilisants pour la société canadienne. Notre objectif est d'aider les patients à reprendre leurs activités le plus rapidement possible.
Les données scientifiques à l'appui de la thérapie manuelle et d'autres approches chiropratiques ont favorisé l'intégration croissante de chiropraticiens à des équipes de soins collaboratifs. Les équipes de soins peuvent ainsi utiliser plus efficacement le budget consacré au traitement des patients atteints de problèmes musculosquelettiques. Par exemple, plusieurs provinces ont recours à des chiropraticiens et à des physiothérapeutes en pratique avancée pour l'évaluation et le triage des patients aux prises avec des douleurs lombaires chroniques qui attendent pour une consultation avec un spécialiste. Pour 90 % de ces patients, la chirurgie n'est pas indiquée; néanmoins, ils allongent inutilement les listes d'attente pour l'obtention d'une imagerie diagnostique telle I'IRM ou la tomodensitométrie. L'intégration se traduira par un degré de satisfaction plus élevé parmi les patients, de meilleurs résultats et une diminution des coûts de soins de santé.
Les problèmes musculosquelettiques ne sont pas uniquement de ressort provincial. Ils touchent également de manière directe le gouvernement fédéral. En tant que cinquième fournisseur de soins de santé au Canada, le gouvernement fédéral joue un rôle direct et crucial dans la santé musculosquelettique. L'incidence de la dorsalgie et d'autres problèmes musculosquelettiques est plus élevée parmi certains groupes qui relèvent du gouvernement fédéral que celle de la population générale.
Mais parlons avant tout des Forces canadiennes et des anciens combattants. En effet, la lombalgie est deux fois plus fréquente parmi les membres des Forces canadiennes qu'au sein de l'ensemble de la population. Ce sont des hommes et des femmes jeunes et en forme; pourtant, les problèmes musculosquelettiques sont responsables de 53 % des libérations pour raisons médicales. La carrière de militaire est une des carrières les plus exigeantes sur le plan physique. Sans recours immédiat, la blessure initiale devient chronique et peut entraîner une libération pour raisons médicales.
L'ensemble des experts en soins musculosquelettiques voudrait en faire davantage. À l'heure actuelle, nos soldats ont un accès inférieur aux soins chiropratiques que d'autres employés fédéraux. Ces soldats blessés deviennent des anciens combattants, dont plus de la moitié des demandes de remboursement de frais de santé touche aux problèmes musculosquelettiques. Les douleurs chroniques de nature musculosquelettique ne sont peut-être pas aussi visibles que d'autres problèmes de santé, mais les conséquences pour ceux qui en souffrent peuvent être lourdes. Par exemple, les problèmes musculosquelettiques peuvent compliquer le traitement de troubles mentaux si le patient doit prendre des opiacés contre la douleur. Sans compter que la prise d'opiacés peut entraîner une dépendance, avec toutes les conséquences que cela comporte.
J'aimerais maintenant céder la parole à M. Robert David, qui traitera des solutions possibles et des mesures que pourrait prendre le gouvernement fédéral pour améliorer la santé musculosquelettique.
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Merci, monsieur MacDonald.
Depuis plusieurs années, le gouvernement fédéral a joué un rôle novateur déterminant. Un tel leadership a soutenu la création de l'équipe de santé familiale de l'hôpital St. Michael. Le projet de cet hôpital est un modèle collaboratif fondé sur une équipe de neuf professions, incluant des médecins, des infirmières et des chiropraticiens.
Ce modèle a pris de l'ampleur et continue avec succès à répondre aux besoins des patients et de l'ensemble de la collectivité. Comme chiropraticiens, notre rôle consiste à mieux évaluer et à traiter les personnes qui souffrent de problèmes musculo-squelettiques. L'équipe de santé familiale de l'hôpital St. Michael a été désignée comme l'un des quatre centres d'excellence en santé au Canada.
À l'échelle internationale, il existe plusieurs modèles qui offrent aux personnes aux prises avec des problèmes musculo-squelettiques un accès direct à des équipes de soins, incluant la chiropratique. Le U.S. Department of Defense et la Veterans Health Administration constituent deux exemples de choix. Au Canada, les provinces de l'Ontario et de la Saskatchewan ont lancé des initiatives similaires. Ces modèles de soins peuvent servir d'exemples pour évaluer l'efficacité potentielle des équipes de soins pour le traitement des groupes qui relèvent du fédéral en matière de santé.
En décembre 2013, notre association a présenté un mémoire au Comité permanent de la défense nationale, qui suggérait d'investir dans la mise en oeuvre d'une stratégie de santé musculo-squelettiques globale inspirée des efforts consentis pour développer sa stratégie de santé mentale.
Une solide stratégie de santé musculo-squelettique pourrait réduire considérablement le fardeau qu'imposent les problèmes musculo-squelettiques au déploiement et au mieux-être des membres des Forces armées canadiennes. Nous recommandons également que le ministère de la Défense nationale et Anciens Combattants Canada travaillent en collaboration afin de réduire les libérations pour cause de problèmes musculo-squelettiques.
Toute recommandation énoncée par votre comité devrait tenir compte des besoins des groupes qui relèvent du fédéral et de l'utilisation optimale des praticiens qui exercent déjà au sein des communautés canadiennes. À notre avis, les progrès réalisés dans les soins aux groupes qui relèvent du fédéral bénéficieront aussi à l'ensemble de la population canadienne. Notre association recommande que l'approche du gouvernement fédéral favorise l'élimination des cloisonnements entre les différents ministères et assure une meilleure coordination des services de santé prodigués par les professionnels à l'échelle locale.
Heureusement, l'Association chiropratique canadienne, ou l'ACC, a pu constater à quel point les partenariats collaboratifs contribuent à la mise en oeuvre de pratiques exemplaires pour mieux soigner les groupes qui relèvent du fédéral. Ainsi, les Forces canadiennes ont adopté d'importantes mesures pour alléger le fardeau que représentent les problèmes musculo-squelettiques chez les militaires.
Je tiens à souligner le leadership des Forces canadiennes pour leur ouverture dans le cadre de nos échanges préliminaires sur le bien-fondé de partenariats entre les Forces canadiennes et les professions de la santé complémentaires pour le traitement des militaires. Ainsi, l'ACC a réservé des sommes importantes à un projet pour évaluer si l'accès chiropratique dont bénéficient les militaires américains pourrait être aussi profitable à nos militaires.
À l'échelle nationale, les chiropraticiens sont reconnus comme des professionnels de première ligne experts en soins musculo-squelettiques. Nous aimerions avoir la possibilité de travailler avec les ministères fédéraux à l'élaboration de nouvelles approches qui favoriseraient non seulement une amélioration des résultats sur le plan de la santé, mais également une utilisation plus efficace des budgets alloués à la santé.
Nous serions heureux de discuter davantage des recommandations formulées et de fournir plus de détails sur l'incidence des troubles musculo-squelettiques. Nous avons aussi des exemples qui expliquent comment on peut utiliser les ressources financières et humaines de manière plus efficace.
Je vous remercie sincèrement de votre temps et de votre attention. Nous nous tenons à votre entière disposition pour répondre à vos questions.
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Avant de poser mes questions, j'aimerais présenter une motion que nous n'avons pas besoin de passer au vote maintenant. Elle se lit comme suit:
Que le Comité permanent de la santé inclut les témoignages de la réunion 47 (27 janvier 2015) portant sur la considération du projet de loi C-608, Loi instituant la Journée nationale de la sage-femme à son étude Pratiques exemplaires et obstacles fédéraux : profession et formation des professionnels de la santé.
Je vais maintenant poser mes questions.
Dans vos trois professions respectives, tout le monde ne bénéficie pas d'une couverture. Souvent, ce sont les assurances privées qui paient, mais les personnes qui ne sont pas couvertes par de telles assurances doivent payer elles-mêmes de leur poche.
En ce qui a trait à l'accessibilité, ce n'est pas le mécanisme qui m'intéresse. J'aimerais savoir quels problèmes de santé on pourrait prévenir si vos soins étaient accessibles à toute la population.
J'aimerais aussi savoir si, à votre avis, vos compétences sont quelquefois sous-utilisées.
Dans quels domaines particuliers pourraient-elles être davantage mises à contribution?
Si on avait davantage recours à vos services et de façon plus efficace, quels seraient les avantages, en termes de coûts, pour les systèmes de santé?
En ce qui a trait aux soins abordables, les autres façons de procéder coûtent parfois plus cher. En ce qui concerne la chronicité, la complication des problèmes de santé, j'aimerais savoir quelle réduction de coûts serait possible si vous pouviez intervenir de façon plus précoce sur la santé des gens.
Je vais laisser chacune des associations répondre à tour de rôle à cette série de questions.
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En ce qui a trait à la médecine dentaire, au cours des cinq dernières années, Statistique Canada a fait une étude très en profondeur des besoins des Canadiens. Cette étude a permis de montrer que la grande majorité des Canadiens recevait les soins dont ils avaient besoin.
À cause de l'absence de couverture publique de ces soins, une partie de la population — c'est-à-dire environ 20 % de celle-ci — n'a pas accès à ce qui est nécessaire. Il faut donc viser cette population en adoptant des programmes publics. L'association recommande certainement des programmes qui visent ces personnes, qui sont d'ailleurs celles qui ont le plus haut niveau de maladies dentaires.
Nous savons très bien que 80 % des caries se trouvent dans la portion la plus pauvre de la population, qui constitue 20 % de celle-ci. C'est un problème majeur parce qu'il est entièrement possible de prévenir les caries dentaires. On peut les prévenir sans aucun problème, à condition d'avoir les ressources nécessaires.
Une de ces ressources, est, malheureusement, l'éducation, et un des facteurs qui permettent de prévoir l'apparition de caries et de maladies parodontales est le niveau socioéconomique. Si nous sommes capables d'apporter de l'aide dans ces domaines, ce sera très utile.
Les dentistes ont déjà un champ de pratique qui est relativement large, qui leur permet de faire du diagnostic, de faire de la chirurgie et de recourir à peu près à toutes les approches nécessaires sur le plan des structures du complexe maxillofacial. Les dentistes peuvent prescrire les médicaments appropriés au traitement de ces maladies. Nous n'avons donc vraiment pas de gros problème sur le plan de notre champ d'exercice. Nous sommes capables de traiter les problèmes dont nous avons la responsabilité sans grande difficulté.
Quand on n'intervient pas, et que l'on laisse les problèmes évoluer, on fait face à des problèmes qui sont beaucoup plus compliqués et beaucoup plus coûteux. Par exemple, on sait très bien que la première cause de chirurgie sous anesthésie générale chez les enfants est la carie dentaire. Toutes ces chirurgies sont facilement prévisibles si les enfants sont pris en charge de façon appropriée. C'est une des raisons pour lesquelles nous proposons que les enfants soient vus dès l'âge d'un an au plus tard, au cours des six mois qui suivent l'éruption des premières dents, pour que nous puissions intervenir, prévoir et évaluer les risques de caries et intervenir de manière appropriée.
L'utilisation des services hospitaliers d'urgence est un autre domaine pour lequel il y a des coûts très importants. Il n'y a pas beaucoup de raisons qui justifient qu'un patient qui a des problèmes dentaires se trouve à une urgence hospitalière. Tous les soins sont disponibles chez les dentistes. Beaucoup de sociétés dentaires organisent des systèmes d'urgence qui permettent de recevoir les soins 24 heures par jour. Ce n'est pas partout, mais c'est très répandu.
Il n'y a donc pas de raison de se trouver à l'hôpital. Dans la plupart des cas, les gens qui s'y rendent le font pour des raisons financières et si nous étions capables de les traiter en clinique dentaire, ce serait beaucoup plus efficace et moins coûteux pour le système.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens d'abord à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui.
Nous parlons aujourd'hui de champ de pratique, et vous savez tous que la vraie question qui nous occupe est la suivante: le régime d'assurance-maladie est-il viable? Nous ne devrions pas nous demander s'il est viable, mais plutôt si la prestation des soins de santé peut être viable dans le cadre d'un système de santé public.
Je crois que nous nous demandons comment modifier le système, comment le changer complètement, pour que les soins de longue durée soient donnés et gérés par des associations communautaires dans le cadre d'un système multidisciplinaire intégré.
Les chiropraticiens ont dit qu'ils pourraient être intégrés à ce système. En fait, étant donné que nous cherchons des moyens de faire de la prévention et de la sensibilisation, ils devraient l'être. Les personnes dont le cas est plus grave pourraient ensuite recevoir des soins médicaux, ce qui permettrait de mieux gérer par la suite les troubles chroniques, lorsqu'ils commencent à prendre de l'âge.
Ma question ne s'adresse pas à vous parce que je sais qu'on pourrait vous intégrer dans le système. Elle s'adresse plutôt aux dentistes et aux hygiénistes dentaires, car nous savons notamment que la mauvaise santé buccodentaire entraîne des maladies cardiaques, etc. Il est prouvé qu'il y a une forte corrélation entre la santé buccodentaire et les troubles de santé, les maladies chroniques, etc.
Les dentistes et les hygiénistes dentaires s'intègrent parfois au réseau public, mais je sais aussi que la plupart des dentistes et des hygiénistes dentaires font du privé, sauf dans certaines régions, comme le Nord. Les dentistes et les hygiénistes dentaires pourraient-ils jouer un rôle, selon vous, dans un tel système multidisciplinaire? Quelle forme ce rôle prendrait-il?
À bien des endroits, les dentistes devraient donc quitter la pratique privée — en fait, pas la pratique privée, parce que bien des professionnels de la santé exercent dans le secteur privé, hors du système public —, mais quitter plutôt le système privé pour faire partie d'un système de santé géré par l'État.
Comment voyez-vous les choses? Est-ce faisable, selon vous? On pourrait alors intervenir plus tôt auprès des jeunes enfants et des personnes âgées sans dentier. Comment cela pourrait-il fonctionner, selon vous? Comment l'intégration à un tel système pourrait-elle se faire? Car j'imagine que cela changerait profondément votre travail.
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Essentiellement, le champ de pratique des fournisseurs de soins dentaires se divise en trois segments.
Les assistants et les hygiénistes dentaires peuvent prodiguer ce qu'on appelle des soins réversibles. Selon la réglementation en vigueur, tous les actes réversibles peuvent être posés par eux. Évidemment, les soins que les assistants peuvent prodiguer directement aux patients sont assez limités. Le champ de pratique des hygiénistes est beaucoup plus vaste, mais il n'en demeure pas moins que tous les soins qu'elles peuvent prodiguer sont réversibles
Les thérapeutes dentaires sont à mi-chemin entre les deux autres groupes, parce qu'il peuvent fournir certains services irréversibles. Ils peuvent par exemple procéder à une extraction simple, ou à une restauration. Ils peuvent retirer le matériel dentaire nécessaire pour faire une restauration.
À part peut-être en Alberta, mais l'Alberta est un cas à part, aucun de ces deux groupes ne peut poser un diagnostic. Seuls les dentistes peuvent procéder à une restauration complète, poser des actes irréversibles et adapter les soins en fonction d'un diagnostic.
Voilà le principal obstacle qui empêche un groupe d'aller piger dans le champ de pratique d'un autre.
Pour poser des actes réversibles, il faut suivre une certaine formation. Pour poser un diagnostic, il faut suivre un autre type de formation, qui comprend de nombreux cours de sciences fondamentales qui ne font pas nécessairement partie de la formation que suivent les membres des deux autres groupes. Voilà ce qui complique les transferts. Je ne doute pas un seul instant qu'une hygiéniste qui décide de retourner à l'école de dentisterie pour obtenir les crédits qui lui manquent aura beaucoup plus de facilité à obtenir son diplôme de dentiste à cause de son expérience, mais ça ne change rien au fait qu'elle devra quand même suivre la formation lui permettant d'acquérir les compétences qu'elle n'a pas encore.
Je m'appelle Paulette Guitard et je suis ergothérapeute. Je suis aussi professeure agrégée à l'Université d'Ottawa, où je dirige le programme d'ergothérapie. Je viens de terminer mon mandat à la présidence de l'Association canadienne des ergothérapeutes, que je représente ici aujourd'hui. Nous vous remercions d'ailleurs de l'invitation.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais faire un bref survol de notre profession et de notre association.
L'ergothérapie existe depuis environ 1915, tout juste après la Première Guerre mondiale. Les soldats qui rentraient au pays étaient souvent blessés, et ils avaient du mal à faire la transition vers la vie civile. En leur permettant d'occuper un emploi valorisant, les ergothérapeutes les aidaient à régler leurs problèmes physiques, mentaux et sociaux.
Aujourd'hui, l'Association canadienne des ergothérapeutes, qui a été fondée en 1926, compte environ 9 000 membres et représente 15 000 ergothérapeutes partout au pays. Il faut au minimum une maîtrise pour exercer l'ergothérapie, mais il existe divers programmes d'études supérieures pour qui veut se spécialiser.
Les ergothérapeutes contribuent à rendre l'occupation quotidienne des gens valorisante à leurs yeux. Et quand je parle d'occupation, j'englobe tout ce qu'une personne fait à partir du moment où elle se lève le matin jusqu'à celui où elle se couche, le soir, qu'il s'agisse d'aller travailler, de se rendre à la banque, de jouer avec son enfant ou regarder un match de hockey avec des amis.
Nous aidons les gens à obtenir les compétences dont ils ont besoin selon leur occupation, et nous évaluons son environnement afin que l'un convienne parfaitement à l'autre.
Je tiens d'ailleurs à préciser que nous travaillons avec des gens de tous les âges et que notre métier se pratique surtout dans les hôpitaux, les écoles, les maisons de retraite, bref, partout où il y a des gens que nous pouvons aider.
Pour en revenir au sujet du jour, il y a quatre points que je veux aborder aujourd'hui, quatre éléments qui pourraient aider le gouvernement fédéral à mieux tirer parti du champ de pratique des ergothérapeutes: la représentation auprès des Premières Nations et des Inuits; les anciens combattants; les services correctionnels; ainsi que la santé globale et les soins communautaires, notamment dans un contexte de vieillissement de la population.
Commençons par les Premières Nations et les Inuits. L'accès constitue le principal problème. Les services d'ergothérapie destinés à ce segment de la population sont très limités. En Colombie-Britannique, par exemple, moins de 5 % des ergothérapeutes travaillent dans une communauté autochtone éloignée. Résultat: ceux qui y habitent ont un accès très limité à nos services.
Plusieurs remèdes s'offrent à nous. Nous avons notamment constaté qu'une fois leurs études terminées, les gens ont souvent tendance à retourner vivre là d'où ils viennent. Si nous pouvions inciter les jeunes autochtones et inuits à s'inscrire à tel ou tel programme, il y a de bonnes chances qu'ils retournent ensuite dans leur communauté, où ils pourraient être utiles.
Nous pourrions aussi envisager de faire appel aux professionnels formés à l'étranger. Le Canada cherche justement à les attirer de plus en plus. Je crois comprendre que l'ergothérapie ne fait plus partie de la Classification nationale des professions; les ergothérapeutes formés à l'étranger sont donc admissibles au volet « Entrée express » du Programme fédéral des travailleurs qualifiés.
Selon moi, ce serait intéressant, parce qu'année après année, environ 175 ergothérapeutes formés à l'étranger font les examens pour obtenir leur accréditation nationale. À partir de mai 2015, il en coûtera environ 4 000 $ aux ergothérapeutes formés à l'étranger pour pratiquer au Canada. Alors s'ils pouvaient avoir accès à une quelconque forme de financement, ce serait très utile. Peut-être qu'en retour, on pourrait leur demander de consacrer un nombre x d'heures à des travaux communautaires. Tout le monde serait gagnant.
Deuxième point: le programme de services de santé non assurés suscite énormément de frustration. Lorsqu'un ergothérapeute rencontre un client qui a besoin d'un fauteuil roulant, par exemple, il remplit son évaluation et communique avec le fournisseur, qui peut très bien être situé dans un autre territoire ou province. Ce n'est qu'après toutes ces démarches que le client peut soumettre une demande au programme. Ses représentants communiquent à leur tour avec le fournisseur, qui remonte jusqu'à l'ergothérapeute et ainsi de suite. Bref, ça peut prendre des mois avant que le client n'obtienne son fauteuil roulant, ce qui veut dire qu'il demeure inactif durant tout ce temps. Si le processus était simplifié, nous sommes d'avis que ces gens seraient mieux servis par nos professionnels.
Je disais tout à l'heure que l'ergothérapie a vu le jour après la Première Guerre mondiale. C'est donc quelque peu étonnant de constater que l'ergothérapie occupe une place très limitée dans la gamme de services offerts aux anciens combattants.
Au cours des dernières années, nous avons tenté de gagner du terrain, ce que nous avons fait, mais il y a encore très peu de services d'ergothérapie qui sont offerts à ces gens lorsqu'ils reviennent de l'étranger. Les ergothérapeutes sont employés comme analystes des politiques et gestionnaires chargés des études de cas, ce qui n'est pas nécessairement une mauvaise chose, mais cela empêche le client d'être en relation directe avec un ergothérapeute qui pourra l'aider à reprendre un travail qui lui permet de se réaliser.
L'embauche des ergothérapeutes se fait souvent par contrat. Ils sont tenus à l'écart des décisions qui concernent leurs clients. C'est un autre aspect qui limite la portée de notre pratique. De plus, il arrive que les ergothérapeutes embauchés par contrat au privé soient employés pour examiner des rapports, ce qui ne permet pas de tirer parti efficacement des diverses compétences acquises par les ergothérapeutes dans le cadre de leur formation et de leurs fonctions. Par ailleurs, nous pouvons contribuer non seulement à soigner les blessures, mais aussi à faciliter la transition entre la vie militaire et la vie civile.
Le secteur des services correctionnels est l'autre domaine de compétence fédérale où on emploie très peu d'ergothérapeutes. Or, nous savons tous que la population carcérale est aux prises avec de nombreux problèmes de santé mentale. C'est l'un des domaines où les ergothérapeutes peuvent apporter leur contribution. Lorsqu'ils retournent dans leur collectivité, ces gens n'ont pas une capacité d'adaptation plus développée qu'avant leur incarcération. C'est un cycle perpétuel. Nous aimerions faire une percée au sein des services correctionnels afin que cette population soit mieux desservie.
En ce qui concerne les soins de santé offerts aux collectivités et à la population vieillissante, nous aimerions parler brièvement des initiatives menées par notre association pour que les adultes plus âgés soient aussi autonomes et actifs que possible.
Nous avons consacré beaucoup d'efforts au plan d'action pour les conducteurs âgés. L'objectif est d'aider les adultes plus âgés à garder leur permis le plus longtemps possible tout en favorisant la sécurité, puisque nous devons tous partager la route. Nous croyons que de nombreuses mesures peuvent être prises à cet égard. Par exemple, nous mettons en oeuvre le programme éducatif CarFit, une autre initiative à laquelle nous participons en collaboration avec la CAA. Nous avons constaté — et les statistiques de Transports Canada le confirment — qu'il y a de nombreux décès liés à la conduite automobile chez les adultes plus âgés ou les aînés. Nous savons également que, dans bien des cas, ces incidents arrivent parce que la voiture est mal adaptée au conducteur. De nombreux ajustements sont possibles, mais les adultes plus âgés ne les connaissent pas ou ne savent pas comment les faire. Pour environ 500 $, nous pouvons organiser une activité visant à montrer aux gens comment adapter leur propre voiture et déterminer si celle-ci est parfaitement adaptée à leurs besoins.
Nous menons également un projet lié à la maltraitance des aînés que nous avons mis en place parce que bon nombre de nos membres qui travaillaient dans des foyers voulaient savoir ce qu'il faut faire lorsqu'on soupçonne un cas de maltraitance des aînés. Nous avons obtenu un financement pour nous pencher sur le problème, et nous offrons maintenant des programmes de formation des formateurs pour enseigner aux gens comment prévenir la maltraitance des aînés, la déceler, et prendre les mesures appropriées lorsqu'elle se manifeste. Ces programmes sont offerts non seulement aux ergothérapeutes, mais à tous ceux qui travaillent auprès des aînés, y compris les physiothérapeutes, les orthophonistes, le personnel infirmier, et les travailleurs sociaux.
Pour conclure, j'aimerais notamment souligner qu'il serait bon de considérer l'ergothérapie comme un investissement qui rapporte. Pour ce qui est des coûts, notons qu'une journée à l'hôpital coûte environ 1 000 $ au bas mot, tandis que les coûts sont de 130 $ dans un centre de soins de longue durée. Dans un logement avec services de soutien ou de soins communautaires, les coûts sont d'environ 55 $. Les ergothérapeutes cherchent à aider les gens à rester chez eux plus longtemps et dans des conditions plus sécuritaires. Ainsi, nous contribuons à maintenir les gens en dehors des hôpitaux tout en faisant économiser beaucoup d'argent au système.
Enfin, nous aimerions notamment que l'ergothérapie soit incluse dans l'assurance-maladie complémentaire offerte aux travailleurs fédéraux, ce qui n'est pas toujours le cas. Comme les prestations sont limitées, les gens qui ont besoin de nos services n'y ont pas accès.
Je n'en dirai pas plus si vous avez des questions.
:
Merci beaucoup. Je suis heureuse d'être ici cet après-midi.
Au nom de l'Association canadienne de physiothérapie, j'aimerais vous remercier de me permettre de parler des pratiques exemplaires et des obstacles fédéraux en ce qui a trait aux activités des professionnels de la santé du Canada. Je crois qu'il s'agit d'un sujet extrêmement important, car, bien que de nombreux professionnels des divers secteurs de la santé souhaitent prendre part à une collaboration interprofessionnelle, ce n'est pas toujours possible. Bon nombre de pratiques novatrices élaborées à l'échelle locale ne sont pas nécessairement diffusées dans l'ensemble du système.
Pour rendre les soins de santé plus efficaces, l'un des changements les plus importants à apporter de nos jours est l'intégration d'un modèle de collaboration interprofessionnelle au sein des divers services de santé de premier plan. Les recherches ont clairement démontré les avantages liés à la collaboration multidisciplinaire en matière de soins de santé. Parmi les résultats très positifs de cette approche, notons l'amélioration de l'accès aux services, la réduction du temps d'attente, une meilleure coordination des soins, et une approche en matière de soins qui est plus complète que lorsque les soins ne sont offerts que par un seul fournisseur de soins de santé.
En tant que professionnels de la santé, les physiothérapeutes ont des qualifications et des compétences qui leur permettent de fournir des soins complémentaires à ceux offerts par les médecins de famille et les autres fournisseurs de soins de santé. Leurs connaissances avancées leur permettent de faire une évaluation ou un diagnostic à propos de l'état de santé ou d'une blessure, et tout cela fait partie de leur champ d'activité.
Aujourd'hui, j'aimerais parler de trois domaines en particulier dans lesquels le gouvernement fédéral peut faire preuve d'un plus grand leadership. Je parlerai d'abord de la possibilité d'adapter les programmes de santé fédéraux et de permettre aux professionnels de la santé d'exercer pleinement leur profession. Ensuite, je soulignerai l'importance de favoriser les pratiques exemplaires grâce à la collaboration et à la communication entre les professionnels de la santé dans le cadre des programmes de santé fédéraux. Enfin, je parlerai de la nécessité de favoriser le perfectionnement pour les physiothérapeutes et les autres professionnels de la santé qui travaillent dans les régions rurales ou éloignées.
Tout d'abord, soulignons que l'adaptation des programmes de santé fédéraux en fonction des pratiques reconnues n'est pas une mince affaire — et nous en sommes conscients —, puisque bon nombre de professions liées à la santé sont réglementées par un organisme provincial. Il est quelque peu difficile de concilier les diverses pratiques assujetties à une foule d'organismes et de règlements provinciaux avec les dispositions fédérales. Cependant, nous voyons la possibilité de mieux concilier les pratiques à l'échelle provinciale et régionale, notamment en raison des nombreux bureaux régionaux qui sont chargés de superviser la prestation des soins de santé dans le cadre des programmes fédéraux.
Pour parler des obstacles qui empêchent les professionnels d'exercer pleinement leur profession, prenons l'exemple du Programme des services de santé non assurés, ou PSSNA. J'aimerais revenir aux observations de Mme Guitard au sujet de la difficulté d'accéder aux soins, car dans le cas de ce programme, les obstacles qui empêchent de recevoir les soins appropriés sont justement attribuables à la difficulté d'accéder aux professionnels appropriés qui sont en mesure d'offrir les bons soins en temps opportun pour améliorer la santé et la qualité de vie du patient. Les faits tendent à démontrer que, en misant sur la prévention et la promotion de la santé, on peut réaliser des économies considérables, mais il faut surtout agir dès maintenant pour contrer les épidémies d'obésité, de diabète et d'asthme, et miser sur la prévention des blessures et la lutte contre les problèmes de dépendance.
Lorsque la ministre a annoncé l'examen du Programme des services de santé non assurés, en 2014, nous avons profité de cette occasion pour consulter nos membres afin qu'ils nous fassent part des difficultés observées dans le cadre du PSSNA. Nous cherchions à mieux comprendre comment les physiothérapeutes travaillaient dans le cadre du programme afin de pouvoir contribuer à améliorer l'approche dans l'avenir.
Nous avons appris que, bien que la mise en oeuvre du programme et la réglementation concernant la physiothérapie varient d'une région à l'autre, le programme fédéral manque de cohérence, et il ne couvre pas l'ensemble des pratiques actuelles des physiothérapeutes. Les plus grandes difficultés auxquelles les physiothérapeutes sont confrontés viennent non seulement de ce manque de cohérence, mais aussi du fait que le champ d'activité couvert par le programme fédéral est, somme toute, très restreint, puisque les physiothérapeutes ne sont autorisés qu'à prescrire ou commander des dispositifs d'aide ou de soutien pour le patient, par exemple, au lieu de pouvoir mettre à profit l'ensemble de leurs connaissances et de leurs compétences afin d'améliorer la santé et le bien-être du patient.
Concrètement, cela signifie que le champ d'activité des physiothérapeutes est réglementé. Par exemple, si un physiothérapeute travaille dans le nord de l'Alberta, la réglementation provinciale de l'Alberta l'autorise à exercer pleinement sa profession. Cependant, dès que cette personne offre des soins ou des services dans une réserve, ce champ d'activité n'est plus reconnu. Dans le cadre du PSSNA, la capacité — ou l'incapacité — à exercer pleinement sa profession varie de façon considérable.
Ainsi, nous recommandons une approche appuyée sur les faits, car ceux-ci démontrent clairement qu'on peut obtenir des résultats positifs à moindre coût pour les patients si les gouvernements sont disposés à implanter des modèles de soins interdisciplinaires afin d'optimiser les résultats en matière de santé.
Nous demandons au gouvernement fédéral de déterminer comment permettre aux professionnels d'exercer pleinement leur profession dans le cadre des programmes fédéraux comme le PSSNA, et de favoriser l'implantation de modèles de soins interdisciplinaires qui reflètent vraiment l'approche interdisciplinaire.
Pour revenir aux observations de Mme Guitard, dans le cadre du PSSNA, par exemple, un physiothérapeute devrait non seulement chercher des fournisseurs, mais aussi appeler le médecin pour lui demander d'approuver le dispositif qu'il juge approprié et qu'il voudrait prescrire au patient, alors que le médecin n'a jamais vu le patient. Le physiothérapeute est autorisé à commander lui-même le dispositif. Cependant, le programme ne l'autorise pas à utiliser pleinement ses compétences.
Le deuxième aspect dont j'aimerais maintenant parler est la possibilité d'adopter les pratiques exemplaires grâce à la collaboration et la communication entre les professionnels de la santé. Les faits démontrent que l'accès direct aux services de physiothérapie réduit le coût total des soins de santé, parce que les patients ont moins souvent besoin de consulter leur médecin généraliste et d'obtenir des prescriptions. Les patients ont moins souvent besoin d'un renvoi aux services de radiographie ou de soins secondaires, ou de subir des traitements invasifs. Dans le cas des patients atteints de problèmes musculosquelettiques, par exemple, le coût par traitement est beaucoup moins élevé lorsqu'ils sont pris en charge par un physiothérapeute, ce qui permet d'affecter une plus grande partie des fonds destinés aux soins de santé à d'autres services médicaux plus urgents.
Pour intégrer pleinement ces modèles de soins interprofessionnels aux programmes de santé fédéraux, il faut se pencher sur les méthodes de communication et de collaboration à l'échelle du système, au lieu de chercher des façons d'améliorer les soins à l'échelle locale. Sans ce changement, il y aura encore de bonnes pratiques à l'échelle locale, mais très peu d'évolution à l'échelle du système. Si nous renversions la vapeur de manière à améliorer les communications à l'échelle du système, nous pourrions améliorer l'efficacité de toutes les composantes du système.
Notre deuxième recommandation est le rétablissement du Partenariat fédéral pour les soins de santé. Pour ceux qui ne le savent pas, le Partenariat fédéral pour les soins de santé a été créé pour réaliser des économies d'échelle tout en améliorant les soins de santé. Dans le cadre de ce programme, les ministères fédéraux responsables de la prestation des soins de santé consultaient régulièrement les groupes de professionnels de la santé pour déterminer les lacunes et les difficultés ainsi qu'orienter les stratégies. Bien qu'il y ait encore des ententes entre plusieurs ministères et associations, le programme dans son ensemble a été démantelé. L'Association canadienne de physiothérapie aimerait voir ce programme être rétabli, car elle le perçoit comme un exemple de pratique exemplaire. Nous croyons que son rétablissement faciliterait l'établissement de partenariats stratégiques avec les principaux intervenants en vue d'améliorer les programmes, d'implanter des modèles de soins interdisciplinaires, et d'élaborer des politiques fondées sur des données probantes.
L'aide fédérale pour le perfectionnement est le troisième aspect dont j'aimerais parler. Les physiothérapeutes sont des professionnels de la santé qui, grâce à des connaissances et des méthodes de pointe éprouvées, contribuent de façon exceptionnelle à la résolution de problèmes au sein des systèmes de santé canadiens. Cependant, il y a un décalage entre l'acquisition de ces compétences de pointe par les professionnels de la santé et l'état du recrutement et du maintien en poste des physiothérapeutes dans les régions rurales ou éloignées. Je sais que cette difficulté ne touche pas seulement les physiothérapeutes. C'est un problème généralisé. Dans les régions rurales ou éloignées, on peine à recruter et à maintenir en poste les meilleurs candidats, car ceux-ci s'établissent souvent dans les régions urbaines. L'Association canadienne de physiothérapie est toutefois fortement préoccupée par la difficulté à doter des postes ou à offrir des services de physiothérapie dans de nombreuses régions de l'ensemble du Canada.
Par exemple, en 2014, la Physiotherapy Association of British Columbia a révélé qu'il y avait 267 postes à doter dans l'ensemble de la Colombie-Britannique, et la dernière vérification remontait à la fin de 2013. Ces 267 postes à doter révélaient l'ampleur de l'écart à combler, car, étant donné qu'il y avait quelque 3 000 physiothérapeutes en fonction dans la province, il fallait recruter au moins 10 % de physiothérapeutes de plus pour répondre aux besoins immédiats, sans compter les besoins futurs. À l'heure actuelle, les physiothérapeutes de la Colombie-Britannique exhortent le ministère de l'Enseignement supérieur à étendre à 132 le nombre de places offertes par le département de physiothérapie de l'Université de la Colombie-Britannique, et à suivre un modèle de répartition qui permettrait de mieux répondre aux difficultés auxquelles la Fraser Health Authority doit faire face dans le nord de la Colombie-Britannique.
Je sais qu'il s'agit d'un enjeu de compétence provinciale, mais il y a aussi une certaine responsabilité fédérale, puisqu'il existe des exemples qui démontrent que les modèles d'enseignement de type distributif utilisés au pays favorisent le recrutement et la rétention du personnel en milieu rural. Nous aimerions donc que ce soutien s'applique aussi aux programmes de physiothérapie et à d'autres programmes, de façon à ce que l'effectif de la santé soit plus stable et de façon à ce que l'on puisse répondre aux besoins urgents de différentes régions.
Il n'y a pas que la Colombie-Britannique qui a de la difficulté à doter les postes vacants en milieu rural et dans les régions éloignées. L'association des physiothérapeutes du Manitoba considère aussi que l'amélioration de l'accès à des services de physiothérapie dans les régions rurales et éloignées de la province est une priorité. Il n'y a que très peu de physiothérapeutes offrant des services payés par l'État hors de la région de Winnipeg. La Nouvelle-Écosse est aussi très inquiète des répercussions que pourraient avoir ces postes vacants. Dans cette province, si un poste demeure vacant trop longtemps, on l'élimine tout simplement.
Nous croyons que la planification des ressources humaines en santé est une solution plus efficace que ce que prévoit la compétence provinciale en matière d'éducation.
La troisième recommandation vise à élargir...
:
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Pierre Poirier. Je suis le directeur exécutif de l'Association des paramédics du Canada.
[Traduction]
Je vous remercie de me donner cette occasion de prendre la parole.
J'ai quelques notes, mais je m'efforcerai d'être bref vu l'heure qu'il est.
En ce qui concerne les pratiques exemplaires et les obstacles fédéraux, la solution est plutôt simple: le gouvernement fédéral doit contribuer de façon continue au développement des cadres de pratique professionnelle. On trouve probablement déjà des pratiques exemplaires paramédicales à de nombreux endroits au Canada, et celles-ci sont aussi reconnues à l'échelle internationale. Le gouvernement fédéral devrait continuer d'appuyer l'élaboration de programmes éducatifs qui correspondent à ces champs de pratique.
J'aimerais maintenant présenter rapidement la profession d'ambulancier paramédical: on compte environ 40 000 ambulanciers paramédicaux au Canada. Nous sommes sans doute le troisième groupe de professionnels de la santé en importance au pays, derrière les infirmières et les médecins. Il existe trois groupes de paramédicaux au Canada: les paramédicaux en soins primaires, les paramédicaux en soins avancés et les paramédicaux en soins critiques. La différence réside dans le niveau d'éducation: il faut deux ans d'études pour obtenir une certification en soins primaires, une troisième année pour une certification en soins avancés, et la certification en soins critiques nécessite une formation supplémentaire.
Notre association compte des membres partout au pays. C'est une série d'événements qui a permis de façonner la profession telle qu'on la connaît aujourd'hui. Dans les années 1970, à Calgary, les paramédicaux sont devenus plus que des chauffeurs d'ambulance, et on a commencé à offrir de la formation avancée. Dans les années 1980, on a commencé à offrir aux paramédicaux de Toronto de la formation en soins critiques. Dans les années 1990, de nombreuses autres provinces ont commencé à reconnaître les études dans ce domaine. En élaborant un profil national des paramédicaux, en 1997, Ressources humaines et Développement des compétences Canada — je ne suis plus certain du nom que portait le ministère à l'époque — a marqué la transformation de la profession au pays et notre contribution à la prestation de soins de santé. Cette importante contribution du gouvernement fédéral a permis de donner une visibilité nationale à la profession de paramédical. Avant la création de ce profil, il y avait environ 50 titres différents qui s'appliquaient à ce que nous faisions. Aujourd'hui, il existe trois titres reconnus. Les différentes administrations du pays utilisent des titres différents, mais en général, la formation suivie par les paramédicaux leur confère l'un des trois titres propres à la profession.
Nos champs de pratique varient selon l'endroit où l'on se trouve au pays, puisqu'en vertu de notre cadre de soins de santé, les provinces ont une grande responsabilité en ce qui concerne les soins de santé dans une vaste mesure. Les ambulanciers paramédicaux, dans le cadre de leur travail, accomplissent des choses extraordinaires et sauvent des vies. C'est l'unique but de chacune de nos interventions. Aujourd'hui, on assiste à la création de programmes paramédicaux communautaires qui nous permettent d'offrir des soins de santé très différents — le mot « intervenir » serait un peu trop fort — lorsque la situation n'est pas urgente.
Je me suis attardé à un contexte plus large, et je m'en excuse. Dans une certaine mesure, on peut dire que la Loi canadienne sur la santé ne reconnaît pas le travail des paramédicaux. Elle ne tient pas compte de notre milieu. Quand on parle de services de santé assurés, on fait uniquement référence aux services hospitaliers et de médecins. Ce que font les ambulanciers paramédicaux n'est pas inclus dans la définition. Je crois qu'il serait pertinent d'examiner la possibilité d'accorder une portée plus large à la loi sur la santé et de trouver une façon, pour le gouvernement fédéral, d'aider les paramédicaux à faire leur travail.
Je crois que nous sommes dans une période de transition en ce qui concerne les modèles de prestation de soins de santé et que l'argent versé dans ce secteur n'a pas la même valeur que par le passé. En d'autres termes, je crois qu'il faut reconnaître la valeur de la collaboration interprofessionnelle et des champs de pratique non exclusifs. Plus précisément, il serait intéressant d'ouvrir les champs de pratique et de diminuer les droits de pratique exclusifs dans certains domaines. Par exemple, au titre de la loi sur les professions de la santé de l'Alberta, les universités peuvent présenter une demande afin de pratiquer des activités soumises à des restrictions. Le système de soins de santé et les différentes universités ont maintenant le droit de pratiquer toutes les activités qui ne font pas l'objet de restriction. Voilà qui offre beaucoup de possibilités en matière de prestation de services de santé. Il est important que nous examinions cette mesure législative. Je crois que le gouvernement fédéral pourrait faire preuve de leadership à l'échelle nationale en se montrant plus ouvert au sujet des champs de pratique.
Un document relatif à l'optimisation des champs de pratique a d'ailleurs été publié dernièrement. On y traite de l'assouplissement des règles de pratique liées à certaines activités et de l'élimination de la compartimentation des règlements et des notions qui se rapportent aux soins de santé.
Le gouvernement fédéral pourrait aussi faire preuve de leadership en examinant la façon dont nous mettons en commun les pratiques actuelles des professionnels et des paramédicaux et en trouvant une méthode pour les intégrer au système. Il devrait reconnaître qu'il s'agit de compétences distinctes et les associer à un secteur donné afin d'établir une méthode de certification qui n'aurait aucun lien avec le cheminement universitaire. Cela permettrait de simplifier la prestation de services. Dans le document sur l'optimisation des champs de pratique auquel j'ai fait référence, le Dr Turnbull explique très bien pourquoi nous devrions jeter un regard très différent sur les soins de santé.
J'ai dit que, à de nombreux égards, le Canada est un chef de file en ce qui concerne la diversification des modes de prestation des services. La création de postes de paramédicaux communautaires au cours des cinq à dix dernières années a eu un effet très positif sur la prestation de services et sur l'accès des patients à ces services. Je peux donner quelques exemples.
Le comité a peut-être déjà entendu parler de la stratégie Vieillir chez soi de Deep River, en Ontario. Dans le cadre de ce projet, les paramédicaux procèdent à des vérifications de la glycémie, font de la prévention en sensibilisant les gens aux risques de blessures par glissade, trébuchement et chute, et mesurent la tension artérielle de leurs patients. Ces actes délégués ne font pas l'objet de restrictions. Les paramédicaux aident ainsi les gens à vieillir à la maison et à s'assurer qu'ils vivent dans un environnement sain. Voilà l'un des secteurs où les paramédicaux peuvent offrir leurs services.
Les paramédicaux ont aussi participé activement à la lutte contre la grippe H1N1 en administrant des vaccins. Il y a une étude à long terme en cours à l'île Brier, en Nouvelle-Écosse, sur les services offerts par les paramédicaux dans la localité. Ils ne fournissent pas toujours des services d'urgence, il arrive très souvent qu'ils offrent des soins de base et je crois que cela est très important.
Récemment, le gouvernement de l'Ontario a consacré six millions de dollars aux programmes de ressources paramédicales communautaires, et c'est un excellent investissement. On commence à voir le rendement de cet investissement au sein des communautés et au sein des différents paliers de gouvernement: tout cela est extrêmement positif.
J'aimerais aussi revenir sur un point important lié à la Loi canadienne sur la santé, c'est-à-dire les coûts prohibitifs des services qui restreignent l'accès. L'émission Marketplace, diffusée sur le réseau CBC, a récemment parlé du coût du transport en ambulance — je déteste cette expression — en évaluant les services offerts par les paramédicaux. À mon avis, ces coûts sont exorbitants et nuisent à la prestation des services. En Ontario, un déplacement en ambulance coûte environ 50 $. Au Nouveau-Brunswick, le coût est de 140 $, et il peut atteindre 250 $ ou 300 $ en Saskatchewan ou au Manitoba. Cela pose problème. Je crois que le gouvernement devrait faire preuve de leadership en aidant à démontrer que ces coûts peuvent empêcher certains patients de recourir aux services dont ils ont besoin.
Enfin, j'aimerais vous remercier de votre temps et de m'avoir donné la chance de témoigner aujourd'hui.
:
Monsieur Poirier, j'aimerais vous poser des questions au sujet des différences qui existent entre les provinces.
Au Québec, on mène une lutte depuis assez longtemps pour faire reconnaître certains actes médicaux. Les ambulanciers paramédicaux de l'Ontario ont le droit de poser certains actes médicaux, alors que ceux du Québec n'en ont pas le droit. Il y a une différence assez grande entre les provinces quant aux actes médicaux qui peuvent être posés par les ambulanciers paramédicaux.
J'aimerais également que vous parliez de cette sorte d'autonomie entourant l'évaluation. Je suis infirmière et je travaillais encore jusqu'en janvier, avant ma grossesse. Régulièrement, des ambulanciers arrivaient à l'hôpital avec des patients en disant que ces derniers n'avaient pas besoin d'aller à l'urgence, mais qu'ils n'avaient pas le choix de les y emmener.
Y aurait-il un moyen pour vous d'évaluer le patient et de le guider en lui disant qu'il n'a pas besoin d'aller à l'urgence de l'hôpital étant donné que son état de santé ne le nécessite pas, tout en lui donnant certains conseils? Serait-il possible d'intégrer cela dans votre pratique?
J'ai une question d'ordre technique. Les adjoints médicaux de la Force régulière suivent le même cours au Collègue Ahuntsic que les ambulanciers civils, mais pas les adjoints médicaux de la Force de réserve. Cela pourrait-il être avantageux de trouver un moyen de les intégrer à votre profession après qu'ils aient terminé leur carrière militaire?
C'est ce qui conclut mes questions à votre intention, monsieur Poirier.
Je vais maintenant m'adresser à Mme Guitard.
J'aimerais parler de l'accès aux services d'ergothérapie. Souvent, dans le système de santé, une référence médicale est requise pour avoir accès à des services d'ergothérapie. Il faut qu'il arrive quelque chose et qu'on aille voir un médecin, qui nous donnera une référence. Notre nom est alors inscrit dans une liste d'attente et on finit par voir un ergothérapeute.
Ne serait-il pas plus judicieux qu'une personne puisse demander directement à être évaluée par un ergothérapeute ou un autre professionnel de la santé, par exemple une infirmière, et que ces professionnels puissent lui donner une référence et déterminer qu'il serait judicieux que cette personne soit évaluée par un ergothérapeute et ainsi éviter des blessures?
Je vais commencer par répondre à la première question à propos des soins non urgents, des soins externes.
[Traduction]
Il est important de signaler qu'un certain nombre de projets à cet égard ont été mis en oeuvre. L'aiguillage vers les partenaires communautaires par les services médicaux d'urgence est une initiative récente, qui est utilisée à Toronto depuis plusieurs années.
[Français]
C'est exactement ce qu'ils font. Au lieu d'envoyer les gens à l'hôpital, ils les mettent en contact avec les services sociaux disponibles. J'aimerais bien que cela puisse être fait partout au pays, dans toutes les villes.
[Traduction]
C'est un aspect crucial de la prestation de soins. Il ne s'agit pas seulement des soins de courte durée, en fait, à bien des égards, cette façon de procéder n'est pas liée aux soins de santé. Ce service d'aiguillage indique aux patients quels sont les services sociaux offerts dans la communauté. Toronto est un bon exemple. D'autres localités au pays ont aussi recours à cette méthode, mais il s'agit de la première ville à l'avoir mise en oeuvre.
[Français]
Depuis quelque temps, le Collège Ahuntsic offre un cours lié au profil national. Cela fonctionne assez bien. Il existe aussi des moyens permettant aux professionnels de la santé qui quittent les Forces canadiennes d'être reconnus comme professionnels dans la société civile.
[Traduction]
Je félicite le gouvernement fédéral parce qu'il a pris l'initiative, au cours des 10 dernières années, d'intégrer d'anciens militaires à notre profession. Ceux sont maintenant des ambulanciers paramédicaux. Il existe bel et bien un lien entre ces domaines, et le gouvernement a choisi de respecter la terminologie utilisée dans le profil national.
Merci.
En ce qui a trait aux ambulanciers paramédicaux, à leur rôle et à l'élargissement de ce rôle, j'estime qu'il y a de grandes possibilités à cet égard dans les régions rurales et les régions éloignées. Vous avez probablement entendu de diverses professions que les collectivités rurales et éloignées sont souvent les moins bien desservies par le système de santé. Prenons l'Alberta. À l'heure actuelle, un grand nombre des hôpitaux ruraux n'ont pas de médecins la nuit ou à certains moments. Ce sont les paramédicaux qui fournissent alors les services et, souvent, qui assurent les services d'urgence durant la nuit. C'est un cas où, je pense, il y a des possibilités.
Je pense que c'est aussi une bonne façon d'optimiser les ressources. Je ne dis pas que les paramédicaux sont sous-utilisés ou qu'ils ont de grandes capacités. Je pense simplement qu'il serait sensé, compte tenu de leurs compétences et de leur capacité, qu'ils puissent fournir ce service. C'est une bonne utilisation et cela rend service à la collectivité. J'ai entendu Kate ou Paulette mentionner que si l'on peut former des personnes dans une collectivité, elles sont plus susceptibles d'y rester. Je pense que c'est une excellente occasion en ce sens.
Je vais passer à la troisième question puis revenir à ce sujet, car elle nous amène au concept général de la planification des effectifs en santé, qui est un volet important, et je pense que cela pourrait être une bonne occasion pour le gouvernement fédéral. Les paramédicaux ne figurent pas dans ce plan. Si l'on prend les pharmaciens — et j'ai examiné le volet pharmacie —, il y a de l'information sur leur nombre, leur âge, leur éducation et leurs perspectives de carrière. On comprend globalement qui ils sont, ce qui permet de planifier pour l'avenir.
J'ai dit qu'il y avait environ 40 000 paramédicaux, mais je n'en connais pas le nombre exact. Nous pourrions demander à tous les organismes de réglementation provinciaux et nous n'en connaîtrions toujours pas le nombre. Je pense qu'il y a une réelle méconnaissance du milieu et que cela nous prive de possibilités au moment de planifier. Je pense que c'est un lien très important. Je vous remercie donc de poser la question.
La dernière partie concerne le champ de pratique. J'espère que ce n'est pas trop abstrait, mais le Collège royal des médecins et chirurgiens a adopté le modèle ProMEDS pour définir la profession. Nous avons aussi adopté ce modèle, car il prend en compte vos connaissances, votre champ de compétence et vos capacités pour déterminer la nature de votre fonction. La présentation du collège à ce sujet m'a toujours fasciné. Ils ont demandé à la population ce qu'elle attendait des médecins. Les médecins se voyaient eux-mêmes comme des cliniciens et c'est ainsi qu'ils voyaient le monde. Or, la population a répondu vouloir que les médecins soient des collaborateurs, des éducateurs, des leaders, toutes ces autres choses.
C'est ainsi qu'ils ont commencé à dresser leur nouveau profil de compétences. C'est ce que nous avons choisi de faire pour les paramédicaux. Nous suivons exactement le même processus pour examiner toutes les fonctions que nous pouvons assumer. Comment la collectivité voit-elle le rôle que nous devrions jouer? Quelles sont les fonctions correspondantes? Les réponses nous amèneront aux connaissances, aux compétences et aux capacités nécessaires.
Encore une fois, je pense que le gouvernement fédéral pourrait appuyer ce genre de réflexion sur notre façon d'envisager les services de santé. J'espère que cela répond à votre question.
En fait, je pense que cela fait suite à une chose qui est... Nous parlons de champ de pratique. Le fait est qu'il y a beaucoup de chevauchements des champs. La grande question est donc, s'agissant de stratégies concernant les ressources humaines en santé, où vous situez-vous? Je sais ce que font les ergothérapeutes. Je pense que c'est une vraie honte que les ergothérapeutes ne soient plus sollicités pour les diagnostics et les soins des anciens combattants, car ce sont les ergothérapeutes qui prenaient leur défense. Je pense d'ailleurs que c'est ce qui explique qu'on ne recourt plus à eux pour soigner les anciens combattants.
Si nous devions étudier des modèles de soins intégrés, de soins communautaires — laissons de côté le modèle pour les hôpitaux et les soins intensifs, qui fait parti du nouveau modèle intégré —, où diriez-vous que le physiothérapeute, l'ergothérapeute ou le chiropraticien se situe dans le champ de pratique, dans ce modèle? Si nous prenons les paramédicaux, les infirmières, les infirmières à domicile, les médecins de famille, comment ces quatre professions s'inscrivent-elles dans le champ de pratique lorsqu'il y a chevauchement?
Comment déterminer les champs de pratique nécessaires? Comment les intégrer à un système sans qu'il y ait doubles emplois, chevauchements et guerres de territoires? Comment assurer la prestation des meilleurs soins aux patients de la manière la plus économique et de manière à pouvoir constater les économies et la qualité de vie qui en découlent et à ce que tous les autres indicateurs permettant d'évaluer le fonctionnement d'un système soient positifs? Comment faire cela alors qu'il y a tant de gens dont les fonctions se chevauchent? À mon avis, c'est par là qu'il faut commencer notre examen du champ de pratique dans un contexte où beaucoup de gens font les mêmes choses de maintes façons. Je me demande seulement comment nous devons procéder. C'est une chose qui ne me paraît pas évidente. Je pense que les soins intégrés, complets etc. sont importants. Mais comment déterminer qui est la meilleure personne, disons, pour les soins de réadaptation?
C'est ce que je trouve difficile. Comment décider?