HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 25 mars 2003
¹ | 1550 |
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)) |
M. Ian Thorn (coordonnateur, Projet National D'Alphabétisation, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, Coalition pour l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick) |
¹ | 1555 |
La présidente |
Mme Cayla Chenier (coordonnatrice de développement de l'alphabétisation, Nunavut Literacy Council) |
º | 1600 |
La présidente |
Mme Sue Folinsbee (greffière suppléante, directrice coexécutive, «Ontario Literacy Coalition») |
º | 1605 |
La présidente |
M. Christian Pelletier (coordonnateur, Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec) |
º | 1610 |
º | 1615 |
La présidente |
M. Monte Solberg («Medicine Hat», Alliance canadienne) |
Mme Cayla Chenier |
M. Monte Solberg |
Mme Cayla Chenier |
M. Monte Solberg |
º | 1620 |
Mme Cayla Chenier |
M. Monte Solberg |
M. Ian Thorn |
M. Monte Solberg |
La présidente |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
º | 1625 |
Mme Cayla Chenier |
La présidente |
Mme Sue Folinsbee |
La présidente |
M. Ian Thorn |
Mme Sue Folinsbee |
La présidente |
M. Christian Pelletier |
Mme Diane St-Jacques |
M. Christian Pelletier |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Sue Folinsbee |
º | 1630 |
Mme Diane St-Jacques |
M. Christian Pelletier |
Mme Diane St-Jacques |
M. Christian Pelletier |
Mme Diane St-Jacques |
La présidente |
M. Sébastien Gagnon (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ) |
M. Christian Pelletier |
º | 1635 |
M. Sébastien Gagnon |
M. Christian Pelletier |
M. Sébastien Gagnon |
M. Christian Pelletier |
º | 1640 |
La présidente |
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.) |
Mme Sue Folinsbee |
La présidente |
M. Ian Thorn |
M. Eugène Bellemare |
Mme Sue Folinsbee |
M. Eugène Bellemare |
º | 1645 |
M. Ian Thorn |
M. Eugène Bellemare |
M. Ian Thorn |
M. Eugène Bellemare |
M. Christian Pelletier |
M. Eugène Bellemare |
º | 1650 |
M. Christian Pelletier |
La présidente |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
La présidente |
M. Yvon Godin |
M. Ian Thorn |
º | 1655 |
Mr. Yvon Godin |
M. Ian Thorn |
Mme Sue Folinsbee |
M. Yvon Godin |
La présidente |
» | 1700 |
M. Christian Pelletier |
La présidente |
Mme Sue Folinsbee |
M. Ian Thorn |
Mme Cayla Chenier |
M. Ian Thorn |
La présidente |
Mr. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.) |
» | 1705 |
M. Ian Thorn |
Mr. Raymond Simard |
Mme Cayla Chenier |
Mr. Raymond Simard |
M. Ian Thorn |
Mme Sue Folinsbee |
La présidente |
M. Christian Pelletier |
» | 1710 |
Mr. Raymond Simard |
M. Ian Thorn |
La présidente |
M. Ian Thorn |
La présidente |
M. Christian Pelletier |
M. Raymond Simard |
M. Christian Pelletier |
M. Raymond Simard |
M. Christian Pelletier |
M. Raymond Simard |
La présidente |
M. Sébastien Gagnon |
La présidente |
M. Ian Thorn |
» | 1715 |
La présidente |
Mme Cayla Chenier |
La présidente |
M. Christian Pelletier |
La présidente |
M. Christian Pelletier |
La présidente |
Mme Sue Folinsbee |
La présidente |
Mme Cayla Chenier |
» | 1720 |
La présidente |
M. Ian Thorn |
La présidente |
M. Ian Thorn |
La présidente |
CANADA
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 25 mars 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1550)
[Traduction]
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)): Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue à la dix-neuvième réunion du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous menons un étude sur l'alphabétisme dans le cadre de laquelle nous avons rencontré plusieurs témoins aux opinions pas mal fermes et d'une grande compétence en la matière. Il nous tarde donc d'entendre les témoins d'aujourd'hui. Vous aurez reçu des instructions du greffier au préalable. Je m'attends donc que vous respecterez les limites de temps, pour que les membres du comité aient le plus de temps possible pour poser des questions.
Je vais commencer par céder la parole à Ian Thorn, de la Coalition par l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick.
M. Ian Thorn (coordonnateur, Projet National D'Alphabétisation, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, Coalition pour l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick): Merci beaucoup.
Je suis le représentant national du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier et, à ce titre, je coordonne le programme national d'alphabétisation du syndicat. Je représente aujourd'hui la Coalition pour l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick.
La Coalition s'est formée en 1988, au moment où le gouvernement fédéral a commencé à offrir des subventions pour promouvoir l'alphabétisation. Depuis, grâce à une subvention annuelle de 75 000 $, la Coalition a réussi à réaliser de nombreux projets. Nous avons établi des partenariats avec le gouvernements provincial et fédéral, le milieu des affaires, les syndicats, des groupes communautaires d'alphabétisation, des groupes de personnes handicapées, des bénévoles, des tuteurs et divers intervenants. Nous avons beaucoup d'activités visant à accroître les partenariats concernant l'alphabétisation. La Conférence «Apprenons ensemble» a été la première activité permettant de réunir des représentants de deux cultures et langues distinctes. Le Learner's Forum a permis de rassembler des apprenants afin de discuter de diverses questions et de faire rapport au gouvernement. La Coalition a pris l'initiative de rassembler des groupes d'alphabétisation afin de conseiller le ministre de l'Éducation du Nouveau-Brunswick.
Les partenariats sont cruciaux pour faire avancer la cause de l'alphabétisation. La Coalition recommande que le gouvernement fédéral augmente le budget et élargisse le mandat du Secrétariat national à l'alphabétisation de manière à miser sur son excellent bilan pour développer des partenariats à tous les niveaux.
La Coalition participe à de nombreuses activités visant à renforcer les capacités communautaires. La conférence sur l'apprentissage précoce, la langue et l'alphabétisation a permis d'offrir un perfectionnement à des travailleurs de garderie et à des membres de groupes d'alphabétisation familiale. Ces travailleurs de garderie n'avaient pas reçu de formation depuis huit ans. Le document Side by Side, fruit de la collaboration des travailleurs de garderie et des intervenants en alphabétisation familiale, montre aux parents comment réaliser des activités d'alphabétisation au foyer, ce qui est très important. Une trousse d'outils est en préparation afin de donner aux programmes d'alphabétisation le soutien nécessaire pour le recrutement, la commercialisation et le renforcement des moyens de la collectivité. Nous sommes en train d'établir un réseau des apprenants pour leur donner voix au chapitre.
La Coalition recommande que le gouvernement fédéral soutienne le renforcement des capacités communautaires en appuyant les infrastructures et l'établissement de partenariats locaux. Des modèles d'alphabétisation familiale et intergénérationnelle fructueux ont été développés au Nouveau-Brunswick. La Coalition recommande que le gouvernement fédéral soutienne en permanence les projets qui sont des réussites.
La Coalition a récemment dirigé une étude, Évaluation intégrale des besoins de formation en alphabétisation au Nouveau-Brunswick, qui a porté sur le programme d'alphabétisation de la province, le Programme communautaire de récupération scolaire ou PCRS. Le rapport montre que les programmes d'alphabétisation sont en train de se dégrader au Nouveau-Brunswick, mais que la province ne finance pas de manière substantielle les programmes d'alphabétisation des adultes, d'alphabétisation familiale et en particulier d'alphabétisation en milieu de travail. Il faut faire beaucoup plus de recherche.
La Coalition recommande que le gouvernement fédéral continue d'appuyer les recherches sur l'alphabétisation.
L'évolution technologique a modifié le travail et les compétences dont nous avons besoin. Beaucoup doivent d'abord développer leurs aptitudes en apprentissage et en alphabétisation avant d'acquérir les nouvelles compétences dont ils ont besoin pour conserver leur emploi ou en trouver un autre. Dans le plan de la province sur la prospérité, l'alphabétisation ne constitue pas une priorité avant la huitième année et, même là, elle n'en est une que par rapport à l'emploi. Comme vous le savez, l'alphabétisation est liée à toutes les autres questions sociales. Il faut de l'argent pour évaluer les besoins et offrir le programme choisi, qui se rapporte aux besoins et aspirations de la personne: au travail et ailleurs, dans la famille et la collectivité, comme participant à la démocratie.
Les discussions d'aujourd'hui doivent graviter autour des apprenants. Bien souvent, leurs voix ne sont pas entendues. L'un d'eux a dit: «Je travaille avec beaucoup de pesticides et de produits chimiques... J'aimerais pouvoir lire les étiquettes, qui changent parfois. Je ne veux pas utiliser le mauvais produit.» Mais bien d'autres ont dit qu'il se passait tellement de choses aujourd'hui qu'ils devaient apprendre à mieux lire et écrire et enrichir leurs compétences psychosociales.
La Coalition recommande que les fonds de la partie II de l'assurance-emploi servent à appuyer l'éducation de base des adultes et l'alphabétisation en milieu de travail. Nous recommandons la conclusion d'une entente pancanadienne sur l'alphabétisation et sur l'acquisition des aptitudes essentielles de manière que tous les Canadiens aient accès aux services d'alphabétisation dont ils ont besoin.
Sans l'appui du Secrétariat national à l'alphabétisation, il n'existerait aucun programme d'alphabétisation des adultes ou intergénérationnelle au Nouveau-Brunswick. Les services d'alphabétisation se sont nettement dégradés dans notre province. Pour améliorer la situation, il faudra pouvoir compter sur la collaboration entre le gouvernement fédéral et la province, entre les organisations syndicales et patronales d'alphabétisation et entre les groupes communautaires et le réseau scolaire public. Les programmes butent sur de nombreux obstacles, et la Coalition s'efforce, avec ses partenaires, de les surmonter. Certains obstacles sont systémiques. Tous les programmes gouvernementaux doivent être scrutés à la lumière des objectifs en matière d'alphabétisation, et il faut reconnaître la nécessité d'investir en alphabétisation.
¹ (1555)
La Coalition recommande de lancer une campagne nationale visant à changer les attitudes de la société à l'égard de l'alphabétisation.
Nous ne comptons pas que le gouvernement réglera tout seul tous les problèmes liés à l'alphabétisation. La province doit collaborer de manière égale et travailler de concert avec les organisations qui s'occupent d'alphabétisation.
La Coalition recommande la conclusion d'une entente nationale sur l'alphabétisation, entente qui miserait sur les intervenants communautaires actifs dans ce domaine ainsi que sur les modèles de coopération qui existent déjà entre le gouvernement fédéral et les provinces, ainsi que les intervenants communautaires.
Merci beaucoup.
La présidente : Merci.
J'invite maintenant Cayla Chenier, du Nunavut Literacy Council.
Mme Cayla Chenier (coordonnatrice de développement de l'alphabétisation, Nunavut Literacy Council) : Bonjour.
Le Nunavut Literacy Council est un organisme territorial sans but lucratif qui aide les habitants du Nunavut à accroître leurs aptitudes à lire et à écrire dans la langue et la culture de leur choix. Son mandat est de favoriser l'alphabétisation dans nos quatre langues officielles, mais la grande priorité est de renforcer la capacité des familles et des collectivités de préparer, d'offrir, de gérer et de maintenir des projets locaux d'alphabétisation des adultes et d'alphabétisation familiale.
Le niveau d'alphabétisation du Nunavut est parmi les plus bas au Canada. Plus de 50 p. 100 des Nunavummiut de 15 à 65 ans ne sont pas assez alphabétisés pour faire des études avancées et occuper des emplois rémunérateurs satisfaisants. La moitié de ces personnes n'ont pas leur neuvième année.
Les Inuits ont été témoins de changements extraordinaires. Bien des gens de mon âge — j'ai 39 ans — ont vécu sur le territoire, et on ne parlait jamais anglais chez eux. La culture inuite a une riche histoire orale, mais ce n'est que depuis peu qu'il existe un réseau officiel d'éducation. Les livres et autres imprimés coûtent cher et la plupart des localités n'ont pas encore de bibliothèque publique.
Des habitants de tout le Nunavut s'inquiètent de la pauvreté, du taux élevé de décrochage scolaire, de la difficulté de constituer une main-d'oeuvre locale forte. La plupart reconnaissent qu'une alphabétisation insuffisante en inuktitut et en anglais est à l'origine de ces problèmes. Les pauvres qui travaillent forment une partie importante de notre population. Ils ne sont pas assez alphabétisés pour progresser sur le plan professionnel. Très souvent, les familles sont monoparentales et dirigées par la mère. Sans une aide suffisante, elles continueront d'éprouver des difficultés, incapables de fournir à leurs enfants les moyens nécessaires pour réussir. Tant que les gouvernements territorial et fédéral ne répondront pas à ces besoins, les Nunavummiut auront du mal. Dans un pays riche et plein de ressources comme le Canada, on se demande pourquoi l'alphabétisation reste si peu prioritaire. Le gouvernement du Canada consacre des montants énormes à l'aide sociale et aux paiements de transfert au Nord. Si nous pouvions trouver le moyen de canaliser un peu de cet argent vers l'alphabétisation, nous pourrions nous attaquer à l'une des causes profondes du problème.
Grâce aux fonds qu'il reçoit du Secrétariat national à l'alphabétisation, DRHC, notre organisme travaille avec les localités pour créer la capacité de concevoir, d'offrir et de gérer des programmes et services d'alphabétisation. Les montants que notre coalition reçoit du SNA sont essentiels à la mise en place d'une infrastructure, ainsi que de programmes et de services d'alphabétisation dans tout le territoire. Sans cela, il n'y aurait pas d'infrastructure d'alphabétisation au Nunavut.
Même si l'importance du problème ne lui échappe pas, le gouvernement du Nunavut continue de sous-financer les programmes d'alphabétisation. En 2003-2004, sa contribution à l'alphabétisation sera de seulement 150 000 $ pour offrir des programmes d'alphabétisation au Nunavut Arctic College. De plus, 75 000 $ sont accordés aux programmes locaux d'alphabétisation dans tout le territoire: moins de 3 000 $ par localité. Dans un territoire si peu alphabétisé, ces ressources ne feront pas grand-chose pour améliorer la situation.
Grâce aux fonds du SNA, notre coalition, en partenariat avec d'autres organisations et organismes, a fait des percées importantes dans le développement de l'alphabétisation communautaire. Hélas, l'insuffisance des ressources fédérales et territoriales a entravé les progrès. Cela menace notre capacité de maintenir le solide appui dont les localités ont besoin pour trouver des solutions à leurs problèmes locaux d'alphabétisation. Elle ont besoin de ce soutien pour faire le travail dans le respect de leur langue et de leur culture et en tenant compte de la réalité locale.
Le Secrétariat national à l'alphabétisation a aidé notre organisme à constituer des partenariats essentiels à l'alphabétisation du Nunavut. En favorisant l'établissement de relations entre notre coalition et d'autres organismes qui s'occupent d'alphabétisation ou d'autre chose, à l'intérieur comme à l'extérieur du territoire, le SNA nous a aidé à acquérir nos capacités et nos compétences. Son appui nous a permis d'obtenir du financement auprès d'autres sources.
Cette année, nous avons offert des ateliers sur le renforcement des capacités à Arviat, à Baker Lake, à Rankin Inlet et à Cambridge Bay. Nous avons préparé des documents en inuktitut et en anglais pour les éducateurs d'adultes, les parents, les éducateurs de la petite enfance et d'autres intervenants. Dans les prochains moins, nous offrirons un atelier à des jeunes de tout le Nunavut et d'autres ateliers pour aider les éducateurs qui travaillent avec des adultes ayant des difficultés d'apprentissage. Nous sommes fiers de ces réalisations, mais nous ne pouvons pas continuer à travailler dans l'isolement. L'alphabétisation est une question complexe, et elle exige une vaste politique intersectorielle et interministérielle, et des solutions en matière de programmes.
º (1600)
Le gouvernement fédéral doit prendre l'initiative, mais, au lieu de chercher de nouveaux modèles et de nouvelles formules, nous devrions tabler sur les points forts et les réussites des programmes, organisations, organismes gouvernementaux et ministères. Les localités du Nunavut veulent s'attaquer au problème, mais il leur manque souvent les outils, les ressources, la souplesse pour le faire. Comment pouvons-nous commencer à résoudre ce problème complexe?
Le comité devrait recommander que le gouvernement fédéral élargisse le mandat et accroisse le financement du Secrétariat national à l'alphabétisation. Le SNA soutient maintenant une infrastructure nationale qui permet à des organismes comme le nôtre pour aider les localités à développer leurs capacités. Il a les compétences voulues pour que l'alphabétisation devienne un dossier horizontal au gouvernement fédéral. Il facilite et aide aussi l'établissement de partenariats à bien des niveaux.
Il faut trouver de nouveaux moyens d'utiliser les ressources existantes. En intégrant l'alphabétisation à d'autres ministères et programmes, nous pourrions mieux répondre aux besoins de nos localités. Il faut arrêter de voir l'alphabétisation comme une question d'alphabétisation et y voir une question de développement communautaire qui intéresse tous les ministères et organismes gouvernementaux et tous les secteurs de notre société. Si les critères de financement des programmes fédéraux actuels étaient plus souples, nous aurions plus de ressources pour aider les apprenants au Nunavut. Le soutien doit être constant pour tous les Canadiens, d'un bout à l'autre de leur vie.
Le comité devrait aussi recommander que le gouvernement fédéral prenne l'initiative d'élaborer une stratégie pancanadienne sur l'alphabétisation et les compétences essentielles. Cette stratégie est essentielle pour que nous travaillions ensemble à la création d'une approche solide et intégrée de façon que tous les Canadiens, Inuits et Autochtones compris, aient les possibilités d'apprendre qu'ils souhaitent et qu'ils méritent.
Merci.
La présidente : Merci beaucoup.
J'invite maintenant Susan Folinsbee, de l'Ontario Literacy Coalition.
Mme Sue Folinsbee (greffière suppléante, directrice coexécutive, «Ontario Literacy Coalition») : Merci.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de cette importante occasion de vous adresser la parole aujourd'hui.
L'Ontario Literacy Coalition, ou OLC, est un organisme provincial sans but lucratif représentant des programmes d'alphabétisation, des réseaux, des intervenants et des personnes ayant du mal à lire, surtout du côté anglophone. Depuis 1986, l'OLC s'efforce d'aider les Ontariens qui ont des problèmes de lecture et d'écriture à acquérir les moyens de participer pleinement à la société à la maison, au travail et dans la collectivité. En Ontario, le système d'alphabétisation a trois autres composantes: Autochtones, sourds et francophones. Tous ont besoin d'une aide accrue.
En Ontario, 1,2 million d'adultes n'ont pas les compétences de base et 1,4 million d'autres ne sont pas assez alphabétisés pour leurs tâches courantes ou pour trouver et garder un emploi. Là-dessus, seulement 68 000 font appel à des programmes d'alphabétisation et seulement 44 000 participent à des programmes intensifs à plus long terme. Donc, moins de 10 p. 100 de ceux qui ont besoin d'aide la reçoivent. Si on veut répondre à ces besoins, il faut mieux soutenir les programmes d'alphabétisation.
Nous avons conclu qu'un élément de solution était que le gouvernement fédéral prenne l'initiative d'élaborer une stratégie canadienne d'alphabétisation. Je voudrais, pendant ces quelques minutes, souligner cinq recommandations principales et en faire ressortir l'importance, du point de vue de l'Ontario.
Tout d'abord, nous exhortons le gouvernement fédéral à imposer une conception large de l'alphabétisation comme principe directeur de la stratégie canadienne d'alphabétisation. Cette conception est essentielle au développement d'un pays prospère. Il nous faut une approche stratégique de l'alphabétisation qui respecte les objectifs des personnes à alphabétiser, non seulement pour le travail, mais aussi pour les besoins pratiques de la vie courante, l'aide aux enfants, les études et la formation, la vie citoyenne et la participation à la collectivité. Une approche responsable de l'alphabétisation en milieu de travail peut donner d'excellents résultats pour les travailleurs et les employeurs, mais nous tenons à dire que les besoins vont au-delà de la préparation à l'emploi et au milieu de travail. Si l'accent est mis sur les programmes d'alphabétisation liés à l'emploi, il faut donner aux participants aux programmes assez de temps et de ressources pour qu'ils puissent trouver de bons emplois bien rémunérés.
Deuxièmement, nous pressons le gouvernement fédéral d'appuyer un accord intergouvernemental pour établir des priorités, des protocoles et des investissements accrus afin d'assurer un financement de base durable. En Ontario, il faut accroître le financement si on veut répondre à la demande. Depuis plusieurs années, la contribution annuelle de la province stagne, même si la demande augmente, tout comme les coûts de l'infrastructure et s'il y a de nouvelles obligations. Les gouvernements fédéral et provincial doivent donc collaborer et dégager plus de ressources pour l'alphabétisation.
Troisièmement, nous recommandons instamment que le gouvernement fédéral s'assure que des stratégies et programmes d'intégration des immigrants et des réfugiés tienne compte des besoins en alphabétisation et en aptitudes de base. Les programmes d'alphabétisation sont une question d'accès et d'équité. Les immigrants et les réfugiés doivent avoir accès à des programmes d'alphabétisation de grande qualité. Il y a en ce moment en Ontario des lacunes dans les services offerts à ces groupes. Ainsi, même s'il est établi que les immigrants et les réfugiés ont besoin de services d'alphabétisation, il arrive souvent que ces services ne soient pas disponibles. On sépare souvent très nettement l'alphabétisation et l'anglais langue seconde à cause du partage des compétences provinciales et fédérales. Dans les programmes d'alphabétisation, on aiguille souvent les nouveaux venus ayant besoin d'alphabétisation vers les classes de CLIC et d'ALS, mais elles ne répondent pas nécessairement aux besoins. On a également coupé le financement des programmes de langue des nouveaux venus ayant des problèmes d'alphabétisation dans leur langue première.
º (1605)
Quatrièmement, nous recommandons instamment que le gouvernement fédéral accroisse le financement et élargisse le mandat du SNA pour renforcer l'infrastructure nationale afin que nous puissions intensifier le renforcement des capacités et être plus à même d'établir des partenariats essentiels sur le terrain. Pendant plus de dix ans, le SNA a assuré un solide leadership et un bon soutien financier. Ce fut un atout très important pour l'alphabétisation, pour bâtir au Canada l'infrastructure de l'alphabétisation. En Ontario, par exemple, le SNA a permis d'offrir le soutien financier pour aider l'alphabétisation familiale à se donner des moyens d'agir. Nous avons défini des objectifs, et nous élaborons maintenant une vision provinciale commune et une stratégie d'alphabétisation familiale, mais, malgré l'apport du SNA, les ressources actuelles sont loin d'être suffisantes.
Cinquièmement, nous recommandons que le gouvernement fédéral revoie sous l'angle de l'alphabétisation ses principaux programmes et politiques. Une façon d'y arriver est d'assurer l'accès à l'information en ayant des politiques et des pratiques linguistiques claires dans les communications, Internet compris. On peut aussi financer des activités d'alphabétisation au moyen d'autres ministères et programmes fédéraux. Le nouvel Institut canadien sur l'apprentissage mis sur pied par le gouvernement fédéral est un exemple parfait de cas où l'intégration peut être fructueuse. L'alphabétisation devrait être l'un des grands axes de l'Institut.
Pour conclure, je remercie sincèrement le comité d'avoir entrepris ce travail important. Je vous invite à étudier les recommandations formulées par le Rassemblement canadien pour l'alphabétisation. Avec d'autres coalitions provinciales et territoriales, l'OLC a travaillé sur ces recommandations et les a appuyées. Nous vous exhortons à faire de même.
Merci.
La présidente : Merci.
Enfin, et ce n'est pas le moindre, voici Christian Pelletier, du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec.
[Français]
M. Christian Pelletier (coordonnateur, Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec): Bonjour et merci.
Je suis Christian Pelletier, coordonnateur du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec.
Vous savez qu'au Québec, il y a deux réseaux reconnus officiellement: le réseau des commissions scolaires et le Réseau des groupes communautaires du Québec. Le Réseau des groupes communautaires du Québec va bientôt faire l'objet d'une modification à la loi pour être reconnu plus officiellement, mais depuis plusieurs années, notre travail est reconnu. Les groupes qui font de l'alphabétisation au Québec sont au nombre de 130 et ils sont tous accrédités par le ministère de l'Éducation du Québec. Il y a une dizaine de groupes anglophones qui sont regroupés. Parmi les 120 autres, nous en rejoignons 75.
Le mandat du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec est de développer des outils pédagogiques pour les formateurs et formatrices en alphabétisation populaire, de défendre les droits des personnes analphabètes et sensibiliser la population aux droits des personnes analphabètes, et de faire des représentations au niveau du financement des groupes.
L'argent que le gouvernement du Canada investit au Québec pour l'alphabétisation fait l'objet de 80 p. 100 des investissements, c'est-à-dire environ 4 millions de dollars, dans le cadre d'une entente fédérale-provinciale appelée IFPCA. Selon cette entente, c'est le ministère de l'Éducation du Québec qui décide de la gestion et des modalités d'attribution des subventions accordées aux deux réseaux. La somme de 4 millions de dollars investie par le Canada est divisée entre les commissions scolaires et les groupes communautaires et représente en moyenne, pour les groupes, un investissement annuel de 10 000 $ environ par groupe. Bien sûr, selon l'entente, cet argent-là ne peut pas servir à financer directement les heures de cours pour les adultes peu alphabétisés. Il doit servir à la recherche et à la création d'outils pédagogiques ainsi qu'à des activités de sensibilisation et de recrutement.
Les 132 groupes populaires en alphabétisation rejoignent plus de 6 500 personnes, et les deux réseaux, malheureusement, réussissent seulement à rejoindre 2 p. 100 de la population québécoise recensée par Statistique Canada comme ayant des difficultés de lecture et d'écriture, soit 1,2 million de personnes.
Parmi les recommandations qu'on pourrait faire de façon informelle, il y aurait bien sûr celle d'augmenter les sommes consacrées à l'alphabétisation partout au Canada et au Québec. C'est important. C'est peu et c'est beaucoup à la fois, car on peut faire beaucoup de choses avec ça. Il serait important d'augmenter la moyenne des subventions à cet effet.
Mais il y a autre chose qui devrait passer avant même les subventions. Sue en a glissé un mot tout à l'heure. Le discours autour de l'alphabétisation est beaucoup axé sur le retour au marché du travail pour ces personnes-là. Bien sûr, le retour sur le marché du travail est important, mais il ne faudrait pas oublier de valoriser également les personnes qui veulent simplement apprendre à lire et à écrire, et il y en a beaucoup plus qu'on ne le pense. Souvent, ces personnes ont fait une croix sur le marché du travail pour certaines raisons, et il faudrait travailler avec elles, leur apprendre à lire et à écrire à cause de leurs propres motivations, pas nécessairement pour qu'elles retournent sur le marché du travail.
Souvent, des gens viennent nous voir en disant qu'ils aimeraient pouvoir lire une histoire à leur petite fille le soir avant d'aller dormir, mais qu'ils ne sont pas capables de le faire, etc. C'est par là que commence la valorisation et souvent, après cela, ils voient un espoir pour retourner sur le marché du travail. Donc, il ne faut pas valoriser l'alphabétisation seulement pour le marché du travail.
Je pense également qu'il faudrait qu'on consacre beaucoup plus d'argent à la recherche. Comment pouvons-nous rejoindre ces personnes-là, ce qui est difficile, puisqu'on n'en rejoint que 2 p. 100? Quelle est la relation que ces personnes entretiennent avec l'écrit? Comment ont-elles appris? Pourquoi ont-elles décroché? Comment ont-elles perdu la faculté de lire? Certaines de ces personnes ont terminé leur secondaire V et ne sont plus capables de lire parce qu'elles ne pratiquent pas, etc. Je pense qu'il faudrait qu'on pousse ces recherches-là beaucoup plus loin.
º (1610)
Avant de conclure, je voudrais revenir sur un point qui concerne surtout le Québec. Je pense que le gouvernement du Québec s'attache beaucoup au problème de l'analphabétisme, et le premier projet qu'il avait fait, en 1998, valorisait beaucoup l'alphabétisation à tous les niveaux, autant au niveau du marché du travail qu'à celui de la place que les gens peuvent prendre comme citoyens et citoyennes quand ils savent lire et écrire.
Malheureusement, la deuxième politique a été beaucoup plus axée sur le marché du travail. On ne parle presque plus, dans la politique qui vient d'être adoptée, d'alphabétisation, mais plutôt de formation de base pour amener les gens en secondaire V. C'est bien, sauf qu'on a peur que ça exclue certaines personnes. Savoir lire et écrire et prendre sa place comme citoyen et citoyenne est tout aussi important, et c'est souvent la première marche à gravir pour ensuite se sentir capable d'occuper un emploi.
Merci.
º (1615)
[Traduction]
La présidente : Merci beaucoup.
Monsieur Solberg, vous avez sept minutes.
M. Monte Solberg («Medicine Hat», Alliance canadienne) : Merci beaucoup, madame la présidente.
Excusez mon retard. Du reste, je ne pourrai rester pendant toute la réunion, et je présente des excuses à l'avance. Je remercie les témoins de leur présence. Nous avons reçu beaucoup de mémoires sur la question. Plus j'entends de témoignages, plus j'ai du mal, parfois, à comprendre ce que nous devrions faire.
Madame Chenier, ma question porte sur les difficultés particulière du Nunavut. Dans quelle mesure le problème tient-il à la formation scolaire initiale? Si le problème est si grave au Nunavut, faut-il consacrer l'argent à l'alphabétisation des adultes ou intensifier les efforts à l'école pour faire sorte que les écoliers qui en sortent sachent lire, écrire et compter? Puisque les ressources sont limitées, où vaut-il mieux les concentrer?
Mme Cayla Chenier : Je ne connais pas à fond le système d'éducation publique du Nunavut. Ce n'est pas mon domaine. Mais on ne peut choisir un seul front. Il faut sûrement plus de ressources pour l'alphabétisation des adultes et l'alphabétisation familiale. Comment aider les parents à aider les enfants à s'alphabétiser et à mieux se préparer à réussir à l'école?
M. Monte Solberg : Je conviens avec vous qu'il nous faut financer suffisamment l'alphabétisation des adultes, mais, s'il n'y a pas assez d'argent, il faut l'utiliser au mieux. À mon sens, il se fait un partage naturel. Dans toute population, un certain pourcentage de personnes qui, si l'école est correctement financée, apprendrons à lire et à écrire suffisamment, mais il y en a d'autres qui n'y arrivent pas à ce stade. À l'âge adulte, ces gens s'aperçoivent de leurs erreurs, et ils sont mieux préparés à apprendre. Il faut alors avoir des programmes pour adultes pour les aider. Toutefois, les ressources sont limitées, et je me demande si, dans le cas du Nunavut — je ne m'avance pas sur ce qui peut se passer dans les autres régions à cet égard —, étant donné la gravité du problème, on ne devrait pas s'attaquer au problème, autant que possible, à l'école avant tout. Si, par exemple, 70 p. 100 des gens en moyenne atteignent un niveau suffisant d'alphabétisation à l'école, et si ce résultat n'est pas atteint au Nunavut, c'est peut-être là-dessus qu'il faudrait d'abord mettre l'accent. Je ne propose aucunement qu'on refuse de financer l'alphabétisation des adultes, mais c'est peut-être sur l'école qu'il faudrait d'abord insister.
Mme Cayla Chenier : Je ne pense pas que les écoles puissent y parvenir seules, cependant. Si on aide les adultes à mieux lire et écrire, on les aide aussi à aider leurs enfants. C'est l'alphabétisation familiale.
M. Monte Solberg : Excellent point de vue. Je ne propose pas que nous condamnions une génération qui ne sait pas lire, écrire et compter, ces gens qui sont déjà passés par le système scolaire. Mais nous ne voulons pas répéter les erreurs du passé. Nous ne pouvons continuer dans la même voie, car les résultats seront semblables. Nous devons trouver une meilleure façon de nous y prendre. Il ne me paraît pas évident que, si le gros du financement va à l'alphabétisation des adultes, au détriment de l'alphabétisation de ceux qui entrent à l'école, nous réglerons le problème. Je réfléchis tout haut, excusez-moi, mais vous avez un problème qui semble sortir de l'ordinaire. Il y a un problème d'analphabétisme des adultes dans tout le Canada, mais, d'après ce que vous nous dites, il est plus grave au Nunavut.
º (1620)
Mme Cayla Chenier : Oui, et souvent, l'anglais est la deuxième langue des gens, au Nunavut; on n'y trouve pas de ressources en inuktitut. Par exemple, il n'y a pas beaucoup de livres en inuktitut. Comment bâtir une culture de l'écrit lorsqu'on n'a pas accès à des ressources en inuktitut? Cela aggrave le problème. Mais je ne crois pas qu'on puisse s'en tenir à un seul domaine. Il faut une perspective holistique, et il faut donner aux familles le nécessaire pour qu'elles aident les enfants.
M. Monte Solberg : Changeons de sujet. On a dit que des entreprises s'intéressaient à l'alphabétisation. Bien sûr, elles le font. Je me demande simplement si l'un ou l'autre de nos témoins a songé à ce qui pourrait encourager les entreprises à financer un peu plus l'alphabétisation. Elles y ont un intérêt. Elles veulent une main-d'oeuvre instruite. Il peut arriver qu'elles demandent à des travailleurs qui ont manifesté certaines compétences par le passé d'accepter de nouvelles responsabilités. Ils peuvent devoir se perfectionner et apprendre à mieux lire et écrire. Les milieux de l'alphabétisation ont-ils songé à des moyens d'encourager, par le régime fiscal, les entreprises à fournir cette formation d'alphabétisation? Pourrait-il y avoir un crédit d'impôt ou quelque chose d'analogue pour encourager les entreprises à participer davantage, à faire un peu plus?
M. Ian Thorn : Grande question. D'abord, il y a des employeurs qui dépensent beaucoup, à toutes les étapes du développement des ressources, depuis l'alphabétisation jusqu'à l'acquisition de compétences. D'autres n'en font pas autant, et nous devons admettre que certaines sociétés ont plus de moyens que d'autres. Nous avons des membres dans les Territoires du Nord-Ouest, dans tous les territoires, et nous constatons des différences entre les employeurs. Imperial Oil, par exemple, implante un projet d'alphabétisation, mais c'est encore une situation fort différente. Je viens de participer à une table ronde de DRHC, avant cette séance, et il en est ressorti nettement qu'il fallait une excellente collaboration entre les employeurs, les gouvernements, les syndicats et d'autres groupes d'intérêts pour préciser combien d'argent le gouvernement doit injecter dans ces efforts et combien d'argent doit venir des employeurs.
En matière de fiscalité, nous pourrions tous suivre l'exemple du Québec, qui offre des incitatifs fiscaux pour favoriser toutes les dépenses en perfectionnement de la main-d'oeuvre, y compris l'alphabétisation. L'autre exemple, est l'industrie forestière de la Colombie-Britannique, avec son programme de régénération, qui un processus semblable: sauf erreur, un pourcentage des droits de coupe pour l'alphabétisation et l'acquisition de compétences essentielles est mis dans un fonds, où vont puiser ceux qui veulent faire de la formation. Le fonds est épuisé. Mon syndicat participait à cet effort, dans le secteur du papier. En réalité, beaucoup de programmes continuent, car ces employeurs, comme Northwood Pulp and Paper disent que c'est un investissement excellent, qu'il faut continuer. J'espère que cela répond à votre question.
M. Monte Solberg : Merci. Je vous suis reconnaissant de ces réponses.
La présidente : Monsieur Solberg, vous serez heureux d'apprendre qu'il y a des employeurs dans notre prochaine série de témoins. Nous pourrons leur parler directement des programmes sur lesquels ils travaillent.
Madame St-Jacques.
[Français]
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je voudrais enchaîner sur une des questions de M. Solberg et sur un commentaire que vous avez fait, madame Chenier, concernant le fait qu'avant de créer de nouveaux programmes, on devrait peut-être améliorer certains programmes existants. J'aimerais savoir, de la part des autres témoins--la question s'adresse à tout le monde--, quels programmes on pourrait améliorer. Et aussi, y a-t-il des programmes qui ne fonctionnent pas du tout et qu'on devrait peut-être éliminer?
º (1625)
[Traduction]
Mme Cayla Chenier : Il existe des fonds, mais ils sont difficiles à obtenir. Voici un exemple. L'an dernier, le Nunavut Literacy Council a demandé un financement au programme de prévention du crime, au ministère de la Justice. Les critères du programme ne comprennent pas l'alphabétisation, bien que, selon nous, prévention du crime et alphabétisation soient très liés. Si les ministères avaient un point de vue plus large sur les critères de financement, cela nous aiderait à obtenir des ressources. Parfois, le problème n'est pas de débloquer plus d'argent, mais d'adopter des critères plus larges.
La présidente : Madame Folinsbee, vous voudriez répondre?
Mme Sue Folinsbee : Vous parliez des programmes à améliorer. Je voudrais revenir à ce que Christian disait de la recherche et des besoins des différentes régions. Il ne faut pas financer un programme au détriment d'un autre. En Ontario, nous avons besoin de toute une gamme de programmes pour répondre à nos besoins. J'ai dit un mot de certains d'entre eux dans mon exposé. Chez les immigrants et les réfugiés, par exemple, les adultes ayant des difficultés d'apprentissage ne reçoivent pas les services dont ils ont besoin. C'est la même chose pour d'autres groupes. Il faut certainement de l'alphabétisation en milieu de travail. Tous les éléments ont leur place. Il ne faut pas s'attarder à l'un au détriment des autres.
La présidente : Monsieur Thorn.
M. Ian Thorn : Cela se rapporte aussi à la question de M. Solberg. Quels programmes? Tous, autant que possible. Il est vraiment difficile de dire lesquels. L'éducation de la petite enfance est si importante, selon moi, pour éviter d'avoir une autre génération qui arrivera sur le marché du travail et devra se débrouiller des activités de la vie courante et n'aura pas les compétences nécessaires pour faire face à notre monde en profonde mutation. Les connaissances d'hier ne suffiront pas demain ou après-demain.
Mme Sue Folinsbee : Je veux insister moi aussi sur ce que mes collègues ont dit et souligner la nécessité d'engager des ressources dans l'alphabétisation familiale. Nous pourrons ainsi tenir compte du caractère intergénérationnel du problème et faire d'une pierre deux coups. En aidant les parents, nous aidons les enfants.
La présidente : On nous a beaucoup parlé de la nécessité de tirer le maximum des ressources utilisées. On nous a déjà parlé de faire d'une pierre deux coups.
Monsieur Pelletier.
[Français]
M. Christian Pelletier: En fait, je ne pense pas qu'il faille en abolir. Le vrai problème, c'est l'accessibilité à ces programmes-là. Je ne les connais pas tous par coeur, mais je sais que parfois, on a de la difficulté.
Supposons qu'on veuille faire une recherche qui nécessite des liens avec les milieux universitaires, et certains programmes nous y obligent. Le lien n'est pas toujours facile à établir. D'un côté, on a des gens qui sont en contact direct avec les personnes analphabètes et de l'autre, des chercheurs qui sont, excusez-moi, un peu coupés du terrain. Mais en même temps, c'est important pour toute la théorie qu'il y ait une jonction entre ces gens-là. Parfois, la difficulté de présenter des projets ou d'établir ces liens-là fait que les gens abandonnent ou n'essaient pas de le faire. Par contre, ce serait intéressant. Il y a un travail à faire là-dessus, je pense.
Mme Diane St-Jacques: Vous avez parlé de recherche. Je ne sais pas si la question que je vais poser est liée à l'alphabétisation, mais je pense que oui. On entend de plus en plus parler de décrochage scolaire, et c'est plus fréquent chez les garçons que chez les filles. Est-ce qu'il y a des recherches ou des études qui se font là-dessus actuellement, que ce soit au Québec ou ailleurs?
M. Christian Pelletier: Pas dans le milieu dans lequel je suis. Je sais que le ministère de l'Éducation s'intéresse à ça, je ne sais pas jusqu'à quel point, mais c'est sûrement un problème dont on entend parler de plus en plus. La réforme de l'éducation au Québec va essayer d'aplanir ça. On essaie toutes sortes de choses à ce sujet, mais je ne pourrais pas vous dire l'état de la recherche. Mais cela ne me surprendrait pas qu'on aille de plus en plus dans cette direction, en effet.
Mme Diane St-Jacques: Oui.
[Traduction]
Voulez-vous ajouter quelque chose?
Mme Sue Folinsbee : La question des jeunes et des décrocheurs est un vrai problème en Ontario. Vous avez probablement tous entendu parler du test d'alphabétisation que le gouvernement provincial a institué. Ces dernières années, de 25 à 32 p. 100 des élèves ont échoué. Le chiffre est encore plus haut pour les élèves ayant des besoins spéciaux et les étudiants d'anglais langue seconde. On fait appel à nos organismes pour aider ces jeunes. Nos conditions d'admissibilité permettraient de les accueillir, mais nos programmes ne sont pas vraiment adaptés. Ils sont axés sur les adultes. C'est un vrai sujet d'inquiétude en Ontario.
º (1630)
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Monsieur Pelletier et peut-être les autres, mais ma question concerne surtout le Québec, les données de l'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes de 1994 disaient que c'est là qu'on trouvait le plus d'adultes de 16 ans et plus avec un bon niveau d'alphabétisation. Lors d'une séance de comité la semaine dernière, je pense, des témoins nous ont dit que le système d'éducation au Québec s'était amélioré et que ça avait permis un progrès assez rapide. Je me demandais si vous aviez des explications à ce sujet-là. Pourquoi étions-nous les plus en retard, et pourquoi sommes-nous maintenant en avance, en quelque sorte?
M. Christian Pelletier: Je vous avoue que j'ai hâte de voir les chiffres par rapport à cela parce qu'au Québec, il y a eu des avancées, en tout cas en 2002. Mais je ne sais pas à quels chiffres et à quelle étude vous faites référence. J'ai su qu'on avait fait paraître des chiffres par rapport au marché de l'emploi, mais si c'est d'une étude plus détaillée que vous parlez, un peu comme celle de 1994, parce que là, le Québec a accepté de donner un peu plus d'argent pour avoir un échantillonnage un peu plus complet, je n'en ai pas pris connaissance.
Il est sûr que le système d'éducation pour les jeunes a changé, mais ça me surprendrait qu'il y ait eu des effets aussi bénéfiques en si peu de temps, parce que ça fait trois ou quatre ans que les changements ont été mis en place. Tout n'est même pas fini; au primaire, ils viennent de finir. Ça me surprendrait, mais je ne connais pas les chiffres auxquels vous faites référence.
Mme Diane St-Jacques: Je ne me rappelle pas quel groupe a mentionné cela la semaine dernière. Je ne pourrais pas vous le dire.
M. Christian Pelletier: Effectivement, j'ai entendu des choses par rapport au marché du travail, mais ce ne sont pas les chiffres qui nous intéressaient le plus. On attend la recherche de Statistique Canada qui a été commandée par le Québec et qui va avoir un échantillonnage beaucoup plus grand. Au moins, cette fois, on va voir, parce qu'on ne pouvait pas le faire en 1994. On a pu le faire en 1989, avec l'Enquête canadienne sur les capacités de lecture et d'écriture utilisées quotidiennement. Mais avec l'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes, on ne pouvait pas avoir une idée précise des données au Québec. Si l'analphabétisme a reculé, tant mieux, mais ça me surprendrait.
Mme Diane St-Jacques: Merci.
Merci, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente : Merci.
Monsieur Gagnon.
[Français]
M. Sébastien Gagnon (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ): Merci.
Ma question s'adressera à M. Pelletier. Je voudrais remercier aussi l'ensemble des témoins d'être venus ici. Je pense que c'est important pour nous de bien comprendre le travail qui est fait sur le terrain et de l'analyser pour émettre des recommandations.
Actuellement, monsieur Pelletier, outre les besoins financiers, avec les moyens qui sont utilisés et les efforts qui sont faits, les résultats sont-ils positifs? C'est ma première question.
Ensuite, y a-t-il un plan d'intervention pour rejoindre la partie de la population qui est touchée par le problème et qu'on n'a pas encore pu rejoindre? Voilà ma deuxième question.
Vous avez également souligné le besoin de ressources supplémentaires. Est-ce que vous pourriez nous donner un ordre de grandeur de ces ressources? Mais aussi, est-ce qu'on pourrait penser à d'autres outils que des subventions? Par exemple--c'est une pure hypothèse--, une mesure telle que l'abolition de la TPS pourrait permettre à des familles plus démunies d'avoir accès à d'autres ressources financières pour satisfaire leurs besoins de consommation.
M. Christian Pelletier: Nous, nos efforts donnent des résultats. Je parle vraiment pour les groupes communautaires parce qu'au niveau des commissions scolaires, c'est différent. À ma connaissance, il y a de petites tentatives qui ont été faites dans des régions, mais pas au niveau national. On voit ça sur le terrain quand on voit les gens.
C'est sûr que les objectifs d'apprentissage des gens lors des démarches d'alphabétisation sont variés. Il y a des gens, comme je vous le disais tout à l'heure, qui ne veulent pas nécessairement retourner sur le marché du travail, mais plutôt être capables d'avoir une relation plus satisfaisante pour eux avec les enfants au niveau de la lecture et de l'écriture. Dans ce domaine, on voit que ça donne des résultats.
On voit aussi que ça donne des résultats parce que des gens qui sont venus nous voir, qui avaient eu une mauvaise expérience à l'école quand ils étaient jeunes pour x raison et qui n'avaient même pas l'idée d'y retourner, ont fini par le faire. Il y en a qui avaient déjà l'idée de retourner à l'école; d'autres ne l'avaient pas mais ils l'ont fait. Ça devrait peut-être faire l'objet d'une recherche plus poussée.
Nous nous servons de l'argent que nous recevons du gouvernement provincial beaucoup plus pour la formation telle quelle que pour les recherches. Quand on reçoit environ 10 000 $ par groupe en moyenne, on ne peut pas se permettre de faire beaucoup de recherche.
Mais je peux vous dire que des choses tout de même intéressantes ont été faites. Récemment, j'ai justement assisté au lancement d'une grosse recherche qui a duré cinq ans et qui portait sur les jeunes de 16 à 24 ans. Elle a été faite par un groupe de volontaires de Longueuil en collaboration avec un professeur de l'Université du Québec à Montréal. À partir du rapport de l'écriture et de la lecture chez les jeunes, on a étudié quels étaient leurs modes d'apprentissage, quels étaient les contacts plus bénéfiques et ce qui les avait fait se raccrocher à la lecture et à l'écriture. C'est intéressant, mais c'est un genre de recherche qui a demandé beaucoup d'investissements.
Quant à un plan d'action, je peux vous dire que nous attendons encore. En 1997, nous avions proposé un plan d'action national au niveau du Québec pour combattre l'analphabétisme. Nous avions proposé 42 mesures. Je relisais ce plan dernièrement et je peux vous dire que plusieurs de ces mesures ont été mises en place, entre autres avec les bibliothèques: la stimulation de la lecture et de l'écriture à la bibliothèque en termes de prévention, l'aide aux devoirs, des campagnes de sensibilisation sur le problème de l'analphabétisme et sur l'importance de s'alphabétiser et d'entreprendre des démarches dans ce but.
Maintenant, il y a tout de même un plan d'action récent de mis en place au Québec avec une nouvelle politique de formation continue en éducation des adultes. Il y a un volet à ce sujet mais, comme je vous le disais tout à l'heure, ça portait surtout sur la formation de base. Ils ont beaucoup axé ce plan sur la sous-scolarisation. Ils se sont aperçus qu'au Québec, il y avait deux fois plus de personnes sous-scolarisées qu'en Ontario par exemple, et ils ont décidé de mettre l'accent là-dessus en incluant l'alphabétisation. Qu'est-ce que cela va donner? Je ne sais pas, mais ce plan est tout de même relativement nouveau; ça fait moins d'un an qu'il a été adopté. Il y a des mesures qui ont été mises en place, mais il reste encore beaucoup de travail à faire là-dessus.
En ce qui a trait aux autres ressources financières, en effet, les problèmes qu'affronte une personne qui voudrait entreprendre une démarche d'alphabétisation sont souvent le fait qu'elle habite dans un lieu éloigné ou qu'elle a des enfants en bas âge. Je pense effectivement qu'il pourrait y avoir des mesures pour stimuler ou aider ces personnes. Nous, nous sommes capables de nous déplacer en région. Nous pouvons avoir des formateurs s'il y a un petit groupe, mais ce n'est pas toujours évident. Parfois, il faut aller dans des lieux assez éloignés, et ce n'est pas toujours facile en termes de transport. Il pourrait y avoir des mesures à cet égard.
º (1635)
M. Sébastien Gagnon: Merci.
En ce qui concerne les mesures pour diminuer le taux de pauvreté, j'avais parlé de l'abolition de la TPS, peut-être, qui permettrait à des familles d'avoir accès à un peu plus de produits de consommation.
M. Christian Pelletier: Oui. Mais il y a comme une culture aussi dans la pauvreté. Il faut se demander ce qui ferait en sorte qu'ils choisiraient une démarche d'alphabétisation et qu'ils auraient le goût de retourner sur le marché du travail plutôt que d'aller vers d'autres produits de consommation. Je comprends peut-être mal votre question, mais je pense qu'il faut les diriger, les orienter par rapport à ça.
J'ai peut-être mal compris votre question.
M. Sébastien Gagnon: Il s'agit de trouver, parmi les mécanismes qui existent déjà, des façons d'avoir accès à un peu plus de produits de consommation. On peut prendre l'exemple des livres ou des services offerts qui, pour les personnes vivant dans la pauvreté, sont plus difficilement accessibles, compte tenu des tarifs.
En fin de compte, la question est de trouver autre chose que des subventions et des programmes pour lutter contre la pauvreté. Il faut trouver d'autres mécanismes.
M. Christian Pelletier: Est-ce que je peux ajouter quelque chose? On disait plus tôt que les employeurs pourraient investir de façon plus significative. Je suis heureux d'apprendre que vous allez rencontrer certains d'entre eux. Certains employeurs m'ont déjà dit qu'ils n'étaient pas sûrs de vouloir qu'on sache que des personnes analphabètes travaillaient dans leur entreprise. C'est comme si la garantie du produit allait s'en ressentir. Il serait intéressant de vérifier jusqu'à quel point il n'y aurait pas chez ces personnes certains préjugés de ce genre.
Pour en revenir à Mme St-Jacques, je voudrais préciser que si jamais il y avait une amélioration de la situation, il faudrait à mon avis vérifier les statistiques pour déterminer comment on évalue la population. Ceux qui, en 1994--cela fait près de huit ans--, avaient 65 ans ne font plus partie des statistiques.
Enfin, pour ce qui est de la pauvreté, je voulais préciser qu'effectivement, des mesures du plan d'action--que je ne connais pas par coeur--pourraient être prises. On va y réfléchir.
º (1640)
[Traduction]
La présidente : Merci.
Monsieur Bellemare.
[Français]
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Merci, madame la présidente.
[Traduction]
Tous les deux jours, des groupes nous bombardent d'idées splendides. Bien sûr, nous sommes sensibilisés au problème de l'alphabétisation. Que dites-vous de l'alphabétisation familiale? D'autres groupes en ont parlé, mais pas vous. Que faisons-nous en Ontario?
Mme Sue Folinsbee : Nos pensons que l'alphabétisation familiale est extrêmement importante. Malheureusement, nos ressources sont très limitées. Nous recevons des subventions du SNA et, grâce à cet apport, nous avons travaillé sur une vision provinciale, une stratégie. Le problème, en Ontario, est que les fonds qui pourraient servir à l'alphabétisation familiale sont compartimentés. Les divers éléments de la famille relèvent de différents ministères provinciaux. Malheureusement, le gros de l'argent va aux enfants de 0 à 6 ans. Cela exclut l'adulte qui doit se perfectionner et qui pourrait aider sa famille. C'est un vrai problème en Ontario en ce moment. Nous cherchons à établir des partenariats pour nous y attaquer. À présent, l'alphabétisation familiale n'est pas aussi prioritaire que celle des adultes.
La présidente : Je crois que M. Thorn aurait quelque chose à ajouter.
M. Ian Thorn : Pour répondre à une question de tout à l'heure, j'ai parlé de l'alphabétisation de la petite enfance. C'est extrêmement important et cela relève de l'alphabétisation familiale. Beaucoup de nos programmes en milieu de travail deviennent de l'alphabétisation familiale jusqu'à un certain point, car nous invitons les participants à amener des membres de leur famille: conjoints, enfants, parents. Les employeurs coopèrent bien à cet égard également. L'alphabétisation familiale est un gros élément de l'activité de la Coalition pour l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick. C'est différent un peu partout.
M. Eugène Bellemare : Merci.
Les autorités fédérales ont de l'argent. Du moins, toutes les provinces le pensent. Tout ce qu'elles veulent, c'est que nous imprimions de l'argent, mais que nous n'intervenions pas. Comment nous assurer que l'argent sert aux fins prévues au lieu d'être mal dépensé? Dans ma province, on réduit les impôts — je n'ai pas vu beaucoup de différence, mais on est censé les avoir réduit de 40 p. 100. Bien sûr, cela entraîne des réductions des services. Si nous donnions plus d'argent, mettons à l'Ontario, Sue, que proposez-vous pour garantir que l'argent serve aux objectifs que nous avons établis après avoir écouté des groupes comme le vôtre.
Mme Sue Folinsbee : Vous soulevez une question très importante. C'est pourquoi il faut un accord intergouvernemental pour établir les priorités, des pratiques exemplaires, des principes régissant l'utilisation des fonds remis aux provinces. Je crois que, au moyen d'un accord, on peut garantir l'octroi d'un certain montant à l'alphabétisation familiale. Nous estimons que c'est un élément vraiment essentiel de la stratégie pancanadienne, et c'est là que le gouvernement fédéral doit assurer le leadership.
M. Eugène Bellemare : Il y a les programmes de services et le financement de la recherche. Nous pouvons contourner les provinces en finançant directement la recherche, comme le SNA le fait, et garantir ainsi que chacun a sa part, mais, lorsqu'il s'agit d'offrir les programmes, il y a des inquiétudes au sujet de certaines provinces qui tendent à réduire les impôts plutôt qu'à améliorer les services. Cet élément sera important dans notre rapport. Il y a une ou deux provinces qui veillent jalousement sur leur droit de dispenser les programmes, surtout en éducation : ne touchez pas à ça ou nous allons déclarer la guerre, nous séparer et tout le reste. Nous parlons des adultes, mais nous ne voulons pas oublier les enfants. Nous devons trouver une formule et je crois que nous touchons au but. Le ministre des Affaires intergouvernementales, M. Dion, devrait peut-être intervenir pour favoriser la conclusion d'accords.
Faudrait-il accorder les incitatifs fiscaux à l'entreprise privée ou aux particuliers également? Comment s'y prendrait-on? Quelle serait la formule à appliquer?
º (1645)
M. Ian Thorn : Je ne suis pas sûr, mais l'aide accordée maintenant aux employeurs pour l'élaboration des programmes d'alphabétisation s'accompagne au départ d'une aide pour l'évaluation des besoins. Je ne sais trop. Je suis prudent. Je ne veux pas vous donner des renseignements que je n'ai pas vérifiés.
M. Eugène Bellemare : Vous avez peut-être touché juste en parlant d'évaluation des besoins. C'est peut-être sur ce plan que nous pouvons aider l'industrie privée.
M. Ian Thorn : C'est là qu'il nous faut une collaboration entre les différents partenaires du pays. Dans certaines régions, il y a de l'argent pour financer l'évaluation des besoins, puis du financement pour un ou deux moniteurs rémunérés du réseau d'éducation. Dans d'autres régions, ce financement n'existe pas.
[Français]
M. Eugène Bellemare: J'aimerais adresser mon autre question à M. Pelletier.
En tant que Franco-Ontarien, j'ai beaucoup d'admiration pour la province de Québec, pour ce qui est de ses programmes pour la jeunesse. À mon avis, dans ce domaine, vous êtes en avance sur toutes les provinces et territoires.
En ce qui a trait à la réhabilitation des jeunes contrevenants, avez-vous des programmes d'éducation de base, au Québec?
M. Christian Pelletier: Votre question porte sur un sujet très précis.
Je vous ai parlé d'un organisme de Longueuil qui se consacre aux jeunes de 16 à 24 ans. Le genre d'évolution que ces jeunes poursuivent ne correspond pas à ce que vous venez de mentionner. Cependant, je peux vous dire qu'on les sauve d'une certaine délinquance. Quand je parle de délinquance, je tiens à faire attention à mes mots. Disons qu'en les valorisant par l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, à partir de choses qu'ils ont le goût d'apprendre, que ce soit par la réalisation d'une émission de radio ou de projets qui leur tiennent à coeur, on leur permet d'éviter de prendre un autre chemin. Cela n'est pas inclus dans les statistiques officielles mais a tout autant de valeur.
En ce qui concerne les autres programmes, je ne suis pas en mesure de vous répondre.
M. Eugène Bellemare: C'est dommage, parce que comme ancien commissaire de police, j'ai observé chez les jeunes contrevenants et chez les gangs, comme les motards, le manque d'éducation et l'analphabétisme. Ça porte ces gens-là à rester en gang et ensuite à se lancer dans des domaines criminels. Je pense que les provinces devraient s'intéresser à fournir des programmes. Je sais qu'il y a en a, qu'il en existe, entre autres en Ontario, mais dans l'ensemble du pays, je me demande si on a des programmes prévus spécifiquement pour les délinquants, pour les jeunes contrevenants et pour les gens qui font partie d'un gang, comme les motards qui sont en prison présentement.
º (1650)
M. Christian Pelletier: Je sais qu'il y a des programmes d'alphabétisation pour les détenus, mais je ne suis pas capable de vous en parler parce que c'est plus le réseau institutionnel qui le fait. Nous, au niveau des groupes communautaires, on ne touche pas à ça. Comme je vous le disais, c'est bien plus de façon à... On peut avoir des jeunes contrevenants dans les groupes, mais ils ne sont pas étiquetés en ce sens. Ils font la démarche qu'ils veulent faire là-dessus, et cela a des répercussions. Mais si on prend le pointu par rapport à la criminalité, ce n'est pas de notre ressort, mais on y touche.
[Traduction]
La présidente : C'est regrettable, mais vous avez largement dépassé votre temps de parole. La bonne nouvelle, c'est que nous avons invité des témoins de la Société John Howard et du Service correctionnel du Canada. Vous pourrez leur poser ces questions précises.
Monsieur Godin.
[Français]
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, madame la présidente.
J'aimerais vous souhaiter la bienvenue au Comité du développement des ressources humaines. Je ne suis pas du même avis que M. Bellemare quand il pense qu'ils viennent ici pour chercher de l'argent. Je pense que c'est la place où venir; l'argent est fait ici, à Ottawa, et il est ici pour être distribué. L'argent est mis dans les coffres par les Canadiens et les Canadiennes qui paient leurs taxes, dont le retour devrait être mis à la bonne place. Je veux juste être certain que vous ne partirez pas avec l'impression de vous sentir mal parce que vous venez ici pour demander des programmes. C'est la bonne place où venir cogner à la porte. En tout cas, c'est mon opinion. Ce n'est pas notre argent à nous, les parlementaires, c'est l'argent de tous les Canadiens et Canadiennes. Vous avez le droit de venir demander de l'argent.
[Traduction]
La présidente : Votre temps de parole court.
[Français]
M. Yvon Godin: Je le sais, madame la présidente, mais je pense que c'est important que les témoins le sachent et qu'ils se sentent à l'aise de venir chercher de l'argent à Ottawa.
Juste pour faire un petit historique au sujet du travail, je me rappelle que quand je travaillais à la mine Brunswick, où j'étais président du syndicat, on était venus avec un programme d'alphabétisation pour les travailleurs et les travailleuses. Dans le temps, il y avait beaucoup de changements technologiques et on avait le programme EST , qui était parrainé par le CTC à l'époque. Je trouve qu'on avait fait quelque chose de vraiment super. Il y avait des mineurs sous la terre qui ne savaient même pas lire ni écrire. Ces gens-là ont pris des cours d'alphabétisation. Certains ont suivi des cours au collège communautaire et ont même été diplômés. Donc, cela a été un succès tout au long. Je voulais faire ce commentaire.
Trouvez-vous qu'on n'en fait pas assez, que le gouvernement, que ça soit au fédéral ou au provincial ou conjointement, n'arrivera pas avec un programme qui serait acceptable pour tout le monde? Je ne veux pas faire trop de commentaires pour que ma question reste claire. Ce que j'aimerais voir, quand je parle du travail, c'est une coordination solide entre les provinces, le fédéral et même l'industrie. C'est le sens de ma question. Je parlerai des autres choses après, mais là-dessus, ne trouvez-vous pas, avec les différents groupes, les différentes provinces, qu'il y a un manque de coordination quelque part? Et est-ce qu'on n'est pas trop éparpillés, ce qui ferait l'affaire du gouvernement, puisqu'on ne concentre pas nos efforts sur un programme d'alphabétisation auquel tout le monde pourrait participer?
[Traduction]
M. Ian Thorn : Je suis parfaitement d'accord avec vous. Je n'ai aucun remords à venir demander de l'argent au gouvernement fédéral. Je suis un contribuable, et cet argent vient de moi, de nous. Je demande à tout le monde, et cela vaut pour M. Solberg également, de prendre conscience du fait que, lorsque nous nous adressons aux gouvernements, fédéral ou autre, pour obtenir des fonds pour des programmes comme ceux-ci, il s'agit d'un investissement. Ce n'est pas un coût, mais un investissement indispensable. Si nous n'investissons pas dans l'alphabétisation et l'acquisition des compétences essentielles, les compétences de la main-d'oeuvre, nous allons y perdre. Je vous ai remis un ou deux documents que j'ai rédigés au sujet du changement. Je vous invite à en prendre connaissance. La population active et toute la société changent très rapidement, et le rythme de changement va s'accélérer. Ce n'est pas près de finir. Il est absolument impérieux que les gens aient les compétences pour réagir à ces changements que ce soit en milieu de travail ou à l'extérieur, qu'il s'agisse des membres de la famille ou du milieu de travail. Si nous n'investissons pas, nous allons perdre gros.
Nous avons fait une enquête dans tout le pays, produit un vidéo qui parle de tout le Canada. Nous avons parlé aux employeurs, à nos membres, aux syndicalistes locaux. Une réponse très claire de nombreux employeurs, c'est que l'élaboration de programmes d'alphabétisation en milieu de travail est un investissement superbe. Ils disent que c'est un bon investissement, un investissement solide dans l'avenir de leur entreprise. Beaucoup disent la même chose : si nous ne faisons pas cet investissement, nous allons y perdre. Je ne doute aucunement, et personne d'autre ne devrait en douter, que l'entreprise, l'industrie, le milieu de travail, le pays qui ont la main-d'oeuvre la plus qualifié sont ceux qui réussiront le mieux dans ce monde où la concurrence est acharnée.
º (1655)
Mr. Yvon Godin : Quel investissement le gouvernement devrait-il faire? Nous parlons d'investissement, mais c'est un terme très général. Que recommandez-vous? Mettre sur pied un programme avec les gouvernements provinciaux et l'industrie? Mettre sur pied un programme avec des groupes? Est-ce cela que le gouvernement doit faire?
M. Ian Thorn : Tout à fait. C'est un investissement que le gouvernement doit consentir. D'où l'argent doit venir? Je m'en remets à vous, les législateurs, mais il faut que le gouvernement fasse cet investissement de concert et en collaboration avec l'industrie et d'autres intervenants comme les syndicats au Canada. Nous ne devons pas nous contenter de la recherche. Nous en avons déjà fait des masses. La recherche doit se poursuivre sur les programmes mis en place pour en voir les résultats et rajuster les programmes pour dépenser l'argent au mieux. Le grand point à faire ressortir, c'est qu'il doit s'agir d'un programme pancanadien et qu'il doit mobiliser tous les intervenants, avec le gouvernement fédéral, les provinces et les employeurs répondant aux besoins en financement.
Mme Sue Folinsbee : J'insiste sur ce que Ian a dit. Je suis on ne peut plus d'accord. L'investissement, cela revient à la nécessité d'une stratégie nationale d'alphabétisation. C'est là que le gouvernement fédéral peut assurer un leadership audacieux. Il peut y avoir trois éléments. Nous avons parlé de l'accord intergouvernemental, et c'est essentiel. Nous avons aussi parlé d'intégration, le gouvernement fédéral examinant ses programmes et ministères pour voir d'où pourrait venir l'argent pour les programmes d'alphabétisation. Il faut que les communications soient claires. Il faut aussi élargir le rôle, le mandat du SNA. Il pourrait assurer le leadership dans cette stratégie nationale, car il a acquis beaucoup de compétences pendant une longue période. Voilà quelques-uns des points de départ de l'investissement.
[Français]
M. Yvon Godin: J'aimerais aussi connaître votre opinion sur un autre point. Il y a à peu près 45 milliards de dollars de surplus dans le compte d'assurance-emploi. Je pense que le but, c'est toujours que quelqu'un puisse apprendre à lire et à écrire pour être capable d'entrer sur le marché du travail.
J'aimerais connaître l'opinion de tout le monde. Croyez-vous que le gouvernement pourrait avoir un programme lié au programme de l'assurance-emploi, pas seulement pour les travailleurs et les travailleuses, mais aussi pour les personnes qui ne travaillent pas, peu importe d'où elles viennent? Ce programme pourrait aider les gens à aller prendre un cours d'alphabétisation et, en même temps--vous avez volé ma question tout à l'heure--, leur offrir un salaire. Un des témoins en a parlé.
Si les gens se déplacent, ils veulent être payés, et c'est normal. C'est ça qui va les encourager. Quand on reçoit sa paye le vendredi et qu'on a la chance de la dépenser en fin de semaine, le lundi, on retourne au travail pour en gagner une autre. Je pense que ça donne déjà un encouragement. Que veut dire une paye? Il faut payer le salaire, la gardienne, les dépenses pour la voiture. C'est bien beau d'avoir de beaux grands programmes, mais si les gens ne peuvent pas y avoir accès parce qu'ils sont pauvres, ça ne sert à rien.
Est-ce que vous pensez que le régime d'assurance-emploi pourrait profiter à ces gens-là et qu'il pourrait y avoir une entente du gouvernement fédéral avec les provinces plus large que celle qu'il y a aujourd'hui?
[Traduction]
La présidente : Et c'est la fin de vos questions.
Monsieur Pelletier.
» (1700)
[Français]
M. Christian Pelletier: Je pense que c'est une piste à explorer, en effet. Ça peut être intéressant. Faisons attention cependant au nombre de semaines qu'on accordera aux gens, car l'alphabétisation ne prend pas nécessairement le même temps, selon les individus. Alors, si on prend le programme d'assurance-emploi et qu'on dit que la personne a droit à 40 semaines, je pense que ça pourrait même prendre des années dans certains cas.
Et à partir du moment où on établit ce programme-là, il faut lui assurer une continuité. Par exemple, il ne faudra pas dire qu'il n'y a plus de fonds pour cette année et qu'on va recommencer l'année prochaine, comme ça peut se voir dans certains cas. En tout cas, au Québec, ça arrive parfois, au niveau d'Emploi-Québec, dans le cas de programmes pour les travailleurs. Il faudrait donc faire attention à cela.
Selon moi, il faudrait aussi que les gens aient, dans ce programme-là, la possibilité de choisir leur lieu de formation, que ce soit dans une commission scolaire ou via un groupe populaire. Je pense qu'il faudrait que ce ne soit pas seulement les gens qui sont accrédités, par exemple, pour le Québec, à Emploi-Québec ou à la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. C'est une piste qui peut être intéressante à suivre.
Je voudrais juste parler 30 secondes de la stratégie. Ça peut être un des moyens de la stratégie.
[Traduction]
La présidente : Vous allez devoir attendre votre conclusion, parce que nous dépassons largement notre temps, et je veux laisser aux trois autres témoins la possibilité de parler.
Sue.
Mme Sue Folinsbee : Je voudrais revenir sur bien des choses que Christian a dites. Nous voulons éviter que les gens n'aient pas assez de temps, qu'on les laisse tomber, qu'ils doivent accepter des emplois mal payés, au salaire minimum. Il est très important que le soutien soit durable.
M. Ian Thorn : Je vous rappellerais la recommandation de la Coalition pour l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick et celle du Congrès du travail du Canada: qu'on utilise les fonds de l'assurance-emploi pour soutenir les programmes d'alphabétisation et d'acquisition de compétences de base en milieu de travail, un peu comme on le fait pour d'autres programmes portant sur des compétences essentielles. C'est l'argent des travailleurs. Les employeurs disent que c'est en partie leur argent. Je ne discuterai pas de cela ici, mais c'est l'idéal. Il y a là des ressources considérables qu'on peut utiliser pour faire en sorte que les programmes soient vraiment centrés sur le milieu de travail et les compétences de base. Ce serait payé par l'assurance-emploi.
Mme Cayla Chenier : Bien des habitants du Nunavut ne répondent pas aux critères pour obtenir des prestations de l'assurance-emploi. C'est donc très intéressant pour nous que les choses changent. Il y a aussi que le processus est très intimidant. Si l'anglais est votre langue seconde et si les documents ne sont pas écrits très simplement, la démarche est très difficile. J'ai travaillé quatre ans au Nunavut Arctic College comme agent de perfectionnement, et les étudiants qui auraient pu faire payer leurs études par l'assurance-emploi n'ont pu obtenir cette aide parce que, même s'il y avaient droit, ils n'ont pas suivi les démarches nécessaires. Et bien d'autres ne sont pas admissibles.
M. Ian Thorn : Une question rapide à ma collègue Cayla, si je peux. Le Congrès du travail du Canada, le mouvement syndical estiment que ce financement devrait être à la disposition non seulement de ceux qui sont au chômage et ont droit aux prestations, mais de tout le monde. On pourrait être au travail et obtenir tout de même l'aide de l'assurance-emploi s'il s'agit d'une formation en milieu de travail. L'aide devrait être offerte à tout le monde.
La présidente : Merci.
Monsieur Simard.
Mr. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.) : Merci, madame la présidente.
Je pense que tous les groupes qui ont comparu ont parlé d'une stratégie pancanadienne. Pour cela, il faut que nos partenaires participent: les provinces, les syndicats, les entreprises. Un des témoins a dit aujourd'hui que le quart des élèves ne réussissaient pas un test d'alphabétisme. Il y a évidemment un énorme problème au niveau provincial. Qu'avez-vous fait lorsque vous avez rencontré vos représentants provinciaux? Ont-ils avoué qu'il y avait un problème? S'il y a ce problème à la base que nous n'avons pas encore réglé et que nous essayons de pallier? Avez-vous pu convaincre les provinces qu'il y a un problème d'alphabétisation? Si vous en avez été incapables, comment allons-nous les convaincre de participer à un partenariat pancanadien?
» (1705)
M. Ian Thorn : La Coalition pour l'alphabétisme du Nouveau-Brunswick essaie constamment de faire valoir ce point de vue auprès de la province, mais le gouvernement a réduit le financement au lieu de l'augmenter. Je coordonne un programme national d'alphabétisation. À ce titre, je peux travailler avec d'autres, qui représentent leurs gouvernements provinciaux. C'est un objectif constant de faire connaître le problèmes aux instances provinciales et fédérales.
Mr. Raymond Simard : Quelqu'un me disait ce matin que, au cours d'un énorme conférence, lorsqu'on a parlé de cette proportion de un sur quatre, les gens du milieu de l'éducation ont été insultés, comme si cela ne se pouvait pas. Il est donc très difficile de faire admettre au niveau provincial que nous avons un problème. Si nous voulons rallier les provinces autour d'une stratégie nationale, ils faut qu'elles soient là et qu'elles admettent le problème. C'est la première condition.
Nous avons vu ici tant de groupes qui ont des problèmes et des besoins différents. Le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest ont des défis tout à fait différents à relever. Même s'il y a une stratégie nationale, il faut qu'elle soit assez souple et simple pour tenir compte du contexte local, si on peut dire. J'ignore si vous avez réfléchi à cette structure. Comment cela fonctionnerait-il? Avec une représentation provinciale ou même locale? Comment les choses se passeraient-elles?
Mme Cayla Chenier : Le Secrétariat national à l'alphabétisation pourrait faciliter une démarche comme celle-là, mais je conviens avec vous que notre gouvernement territorial et le niveau local doivent être partie prenante. Notre gouvernement est sûrement conscient que l'alphabétisation est une question à aborder, mais je crois que l'intérêt d'élaborer une stratégie tient à la démarche à faire pour répondre aux questions. Il y aura une plus grande mobilisation, plus de participants, plus de gens qui discuteront du problème, plus d'idées, plus de contacts et plus de partenariats pour s'attaquer au problème.
Mr. Raymond Simard : Selon vous, comment pourrons-nous rallier les provinces? Lorsqu'on débloque des fonds, il arrive souvent que les provinces trouvent des fonds de contrepartie. Cela suffira-t-il pour les intéresser, leur faire admettre le problème et les amener à s'associer avec nous dans une stratégie nationale?
M. Ian Thorn : Nous avons beaucoup fait. Je travaille sur l'alphabétisation depuis près de dix ans. Il faut d'abord une sensibilisation, puis faire accepter qu'il y a un problème. Il faut ensuite susciter l'engagement pour s'attaquer au problème. La sensibilisation et l'acceptation sont acquises depuis longtemps. Nous progressons bien pour obtenir un engagement. Selon moi, lorsque tous les partenaires seront réunis avec les gouvernements provinciaux et fédéral, l'engagement viendra. De là viendront les plans, les processus, et le financement suivra, et les réussites.
Mme Sue Folinsbee : Je voudrais parler de la mobilisation des provinces. En Ontario, nous avons un système très bien établi pour offrir les programmes d'alphabétisation et un solide investissement, mais, si on considère le nombre de participants, c'est une goutte d'eau dans la mer. Il y a une autre préoccupation, qui fait ressortir la nécessité d'un accord : l'accent sur le milieu de travail et l'alphabétisation pour le travail est très fort. Il faudrait une perspective plus ouverte sur l'alphabétisation. Le gouvernement pourrait élargir les perspectives en élaborant un accord et une stratégie sur l'alphabétisation.
La présidente : Monsieur Pelletier.
[Français]
M. Christian Pelletier: Lorsqu'on parle de stratégie nationale au Québec, ça soulève toujours des questions. Vous avez parlé de souplesse de la stratégie nationale. Il faudrait au minimum que tant les provinces que le gouvernement fédéral reconnaissent qu'il y a un problème et qu'ils prennent connaissance des statistiques qui font état de la situation. À ce chapitre, le Québec a pris des initiatives, et croyez-moi, ça n'a pas été facile; au début, ça n'allait pas de soi, mais on a fait beaucoup de sensibilisation, et ils y ont cru. Il faudrait aussi reconnaître une volonté d'agir qui soit conforme aux possibilités d'une action des partenaires du fédéral, du provincial, etc.
Monsieur Bellemare, vous demandiez plus tôt comment on peut s'assurer que des fonds destinés à l'alphabétisation ne soient pas détournés de leur objectif. Il y a au Québec 1,2 million de personnes analphabètes. Je peux vous dire que si nos 132 groupes apprenaient que le gouvernement fédéral a investi 10 ou 15 millions de dollars au Québec pour l'alphabétisation, ils verraient à ce que ces fonds soient consacrés à l'alphabétisation. Nous serions là pour leur rappeler.
Il s'agit là d'un besoin. Je ne sais pas ce qu'il en est des autres provinces, mais au Québec, on cogne sur le clou depuis longtemps. Il y a 20 ans, par contre, on ne parlait pas d'alphabétisation, non pas parce que le phénomène était moins répandu. À mon avis, c'est beaucoup une question de stratégie de sensibilisation, et s'il est question de faire quelque chose au plan national, ce devrait être de la sensibilisation au problème.
» (1710)
[Traduction]
Mr. Raymond Simard : C'est la première fois que j'ai l'honneur d'accueillir un membre du mouvement syndical ici. Le mouvement syndical a-t-il cerné l'alphabétisation comme un problème, et négociez-vous des programmes dans vos conventions?
[Français]
Monsieur Pelletier, vous avez dit plus tôt que vous développiez des outils pédagogiques. Or nous, au comité, n'en avons pas entendu parler. Nous n'avons pas entendu dire que des normes avaient été établies à l'égard de ceux qui dispensent la formation.
Est-il possible de former ces derniers en 15 heures ou 20 heures? Où en sont vos travaux à cet égard? S'ils sont suffisamment avancés, il nous serait très utile de pouvoir utiliser cette information ailleurs au Canada.
[Traduction]
M. Ian Thorn : Bien sûr, nous négocions des dispositions sur l'alphabétisation et l'acquisition des compétences de base en milieu de travail. Nous avons un ensemble de lignes directrices à ce sujet. Je vous les communiquerai, si vous voulez.
La présidente : Monsieur Thorn, nous allons passer à M. Pelletier, car nous aurons toute une séance avec les représentants du mouvement syndical. Ils pourront répondre. Je ne voulais pas vous couper la parole, monsieur Thorn.
M. Ian Thorn : Très bien. Merci.
La présidente : D'accord.
Monsieur Pelletier.
[Français]
M. Christian Pelletier: Non, on n'a pas de normes à ce sujet, et je vous dirais que c'est très variable. Il est important de faire une distinction. Quand on fait de l'alphabétisation en milieu communautaire, on fait l'apprentissage de l'écriture, de la lecture et du calcul, mais l'objectif est aussi et surtout la prise de parole et l'action citoyenne, c'est à dire prendre sa place et apprendre à articuler ses pensées. Pour nous, c'est important. Pour ce qui est du temps requis pour l'apprentissage du code, je vous dirais que ça varie d'une personne à l'autre.
M. Raymond Simard: Je parlais du temps requis pour former les éducateurs.
M. Christian Pelletier: Nous dispensons un programme de formation qui est payé, en grande partie, par le Secrétariat national à l'alphabétisation.
M. Raymond Simard: Quelles sont les normes?
M. Christian Pelletier: L'important pour nous, c'est le contact que les gens établissent avec d'autres. À cet effet, une foule d'outils sont disponibles au Québec. Nous avons l'obligation d'acheminer toutes les productions réalisées par les 132 groupes à un centre de documentation qui se trouve à Montréal. N'importe qui dans n'importe quelle province peut faire ce genre de chose.
M. Raymond Simard: Merci.
[Traduction]
La présidente : Merci.
Monsieur Gagnon, vous êtes le seul qui n'ait pas largement dépassé son temps de parole. Je vais donc vous donner une ou deux minutes de plus à la fin, tout de suite.
[Français]
M. Sébastien Gagnon: Merci, madame la présidente.
J'aimerais seulement faire un commentaire. Il faut être prudent lorsqu'on parle d'un plan d'action national. Le rapport de Statistique Canada, la semaine dernière, témoignait du bon rendement du Québec comparativement aux autres provinces. Il existe déjà deux canaux établis qui fonctionnent. Tout ce dont on a besoin, ce sont des ressources; je pense que vous serez de cet avis, M. Pelletier. On parle ici d'une allocation des ressources qui nous permettrait d'être plus compétents et de nous développer.
Pour ma part, je ne suis pas favorable à un plan d'action national. Il faudrait plutôt faire une réallocation des ressources et travailler avec les compétences existantes sur le terrain. Merci.
[Traduction]
La présidente : Avant d'inviter chacun de vous à conclure, il y a une question qui est revenue sans cesse. Vous avez parlé d'accord fédéraux-provinciaux et de la nécessité d'une action intergouvernementale, mais tous les groupes qui ont comparu ont également souligné que le SNA était un excellent mécanisme pour appliquer les programmes. C'est la quadrature du cercle, si on peut dire. Est-ce un accord fédéral-provincial que vous voulez ou des fonds qui seraient remis au SNA pour travailler avec les divers groupes et organisations? Les deux demandes s'excluent-elles l'une l'autre?
M. Ian Thorn : Nous avons besoin d'un accord fédéral-provincial, et le SNA serait la contribution fédérale. Nous voulons voir les méthodes utilisées par le SNA. Elles ont été très fructueuses et le financement a été excellent. Je crains maintenant que le financement ne diminue, et ce sera très démoralisant pour ceux qui ont travaillé pendant des années pour organiser des programmes d'alphabétisation dans les classes.
» (1715)
La présidente : Si le comité a son mot à dire, le financement ne va pas diminuer.
Madame Chenier.
Mme Cayla Chenier : Je suis d'accord avec Ian.
La présidente : Monsieur Pelletier.
[Français]
M. Christian Pelletier: Nous, nous avons une entente fédérale-provinciale, mais tout ne passe pas par là. C'est important de le savoir. L'entente fédérale-provinciale touche les 132 groupes et les 70 commissions scolaires. Par contre, il y a un million de dollars qui sont donnés directement par le fédéral sans nécessairement passer par le provincial et qui sont donnés à des syndicats ou à des groupes communautaires qui ne sont pas accrédités à l'alphabétisation. Ça aussi, c'est important.
Nous recevons aussi de l'argent du niveau national pour notre programme de formation. Je pense que quand on parle d'augmentation, c'est à tous ces niveaux-là. Je ne pense pas qu'une entente fédérale-provinciale réglerait tous les problèmes non plus. Si le gouvernement du Québec accepte qu'il y ait un million de dollars qui soient fournis sans passer par lui, et que nous, nous sommes capables d'obtenir du fédéral un montant pour les formateurs, c'est parce que c'est différent.
Il y a des juridictions qui sont provinciales, bien sûr, mais il y a moyen de s'entendre là-dessus. Parfois, l'argent ne va pas directement à la personne, mais il peut y avoir un moyen de le donner à des organisations qui, indirectement, sont ensuite capables de faire profiter de cela sur le terrain.
[Traduction]
La présidente : Très bien.
Nous allons inverser l'ordre des exposés. Monsieur Pelletier, vous avez deux minutes pour conclure, si vous le souhaitez.
[Français]
M. Christian Pelletier: Je répète, à la lumière des discussions qu'on a eues, qu'il faut en effet investir plus d'argent et que le SNA est nécessaire. Je pense aussi qu'il faut consacrer plus d'argent au Secrétariat national à l'alphabétisation. Je résumerais brièvement la stratégie nationale en termes de sensibilisation et de volonté d'agir.
Est-ce qu'on ira plus loin? Je pense qu'il faut laisser aux provinces la souplesse de décider des moyens qu'elles prendront pour régler le problème, à partir du moment où elles le reconnaissent. Faisons attention, parce qu'il y a aussi des particularités régionales.
Je veux aussi cogner de nouveau sur le clou de la recherche. Je pense que ça peut être bien utile, et ce ne sont pas des commissions scolaires et des groupes qui peuvent le faire. Faisons juste attention que cette recherche-là ne soit pas coupée de ce qui se passe sur le terrain. Il y a des gens qui sont directement sur le terrain.
[Traduction]
La présidente : Très bien.
Madame Folinsbee.
Mme Sue Folinsbee : Je voudrais revenir sur un point qui n'a pas été abordé aujourd'hui, la question des statistiques. On parle beaucoup de la nécessité d'amener tant de personnes du niveau 1 au niveau 3, par exemple. Je dirai au comité que l'amélioration de l'alphabétisme est un processus vraiment très complexe. Il ne s'agit pas simplement de faire passer les gens du niveau A au niveau B. Les statistiques nous donnent une idée générale de la nature du problème dans des populations générales, et c'est très important, mais cela ne nous dit rien sur ce que ces chiffres veulent dire sur le terrain. Elles ne disent pas pourquoi certaines politiques marchent ou non, ni pourquoi on atteint les objectifs ou non. Elles ne disent rien non plus sur les liens entre l'analphabétisme et d'autres problèmes sociaux comme le racisme et la pauvreté, les chances données à chacun. Seules, les statistiques ne donnent qu'une partie du tableau.
J'exhorte le comité à considérer les recherches d'ordre qualitatif, en plus des chiffres. Il nous faut une réponse plus riche, et nous ne pouvons l'obtenir des milieux de l'alphabétisation. Vous discutez avec des témoins, mais il faut faire plus de recherche à partir de la base pour déceler les causes profondes, derrière les chiffres.
La présidente : Merci.
Madame Chenier.
Mme Cayla Chenier : Une faible alphabétisation touche tellement d'aspects de la vie: employabilité, capacité de gagner sa vie et celle de sa famille, santé, capacité d'aider les enfants. C'est pourquoi nous estimons que tous les ministères, quoi qu'ils fassent, devraient tenir compte de l'alphabétisation.
Nous vous exhortons à augmenter le financement et à élargir le mandat du SNA. Il nous a aidé énormément. Sans lui, nous n'existerions pas, nous ne pourrions aider les localités à se donner les moyens de s'attaquer à leurs propres problèmes d'analphabétisme.
» (1720)
La présidente : Merci.
Monsieur Thorn.
M. Ian Thorn : Ce fut un grand honneur de venir ici et je tiens à rappeler que j'ai comparu à deux titres. Je suis un coordonnateur rémunéré et à temps plein en alphabétisation, au service de mon syndicat, et nous recevons un financement partiel du Secrétariat national à l'alphabétisation, mais je suis aussi bénévole dans deux domaines : l'alphabétisation à l'école et l'alphabétisation familiale. Je souligne qu'il y a une foule de bénévoles qui, trop souvent passent inaperçus. Ils font un travail admirable. Ils sont discrets, mais il faut souligner leurs efforts.
Notre syndicat, grâce au financement reçu du SNA, a fait des recherches, et je vous exhorte à lire le résumé de plus d'une centaine de pages sur les sondages que nous avons faits auprès de nos membres, de leur représentants syndicaux locaux et de leurs employeurs aux quatre coins du pays. J'ai aussi parlé de notre production vidéo. Il y est question des programmes d'alphabétisation. Les gens parlent de leurs réussites, de leurs impressions après avoir suivi les programmes. Je m'en sers lorsque je parle avec des employeurs et des employés. Je leur dis que ce sont là des centaines de membres du SCEP qui parlent à d'autres membres du SCEP, et des employeurs qui parlent à d'autres employeurs de l'alphabétisation, et la question est prise très au sérieux.
Je vous rappelle les deux documents que j'ai rédigés, Reflections on Workplace Education et Changing Literacy Needs in the Changing Workplace. Je souligne que, en ce moment , nous avons beaucoup de mal à aller de l'avant et à élaborer les programmes d'alphabétisation dont on a besoin maintenant, et dont a besoin depuis fort longtemps, en fait. L'accélération du changement ne va qu'aggraver le problème. Nous tirons de l'arrière. Nous devons accélérer, commencer à soutenir le rythme pour assurer aux gens les compétences dont ils ont besoin non seulement au travail, mais aussi pour tout ce qui s'y rapporte. C'est une question de démocratie, une question d'accès.
Merci.
La présidente : Vous allez nous rappeler que c'est un investissement clé dans notre avenir.
M. Ian Thorn : Excellent investissement.
La présidente : Merci
La séance est levée.