HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 4 février 2003
¹ | 1530 |
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)) |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety (directrice, Programmes nationaux, Association canadienne de santé publique) |
¹ | 1535 |
La présidente |
Mme Elizabeth Gayda (présidente sortante, Association canadienne des troubles d'apprentissage) |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
La présidente |
Mme Priscilla George (coordonnatrice, "National Aboriginal Design Committee") |
¹ | 1550 |
La présidente |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne) |
¹ | 1555 |
Mme Priscilla George |
M. Monte Solberg |
Mme Priscilla George |
M. Monte Solberg |
º | 1600 |
Mme Elizabeth Gayda |
M. Monte Solberg |
La présidente |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
Mme Elizabeth Gayda |
M. Peter Adams |
Mme Priscilla George |
º | 1605 |
M. Peter Adams |
Mme Priscilla George |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
M. Peter Adams |
La présidente |
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ) |
º | 1610 |
Mme Elizabeth Gayda |
Mme Priscilla George |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
º | 1615 |
La présidente |
M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.) |
Mme Priscilla George |
º | 1620 |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
M. Ovid Jackson |
Mme Elizabeth Gayda |
M. Ovid Jackson |
La présidente |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
º | 1625 |
Mme Elizabeth Gayda |
M. Yvon Godin |
Mme Elizabeth Gayda |
M. Yvon Godin |
Mme Elizabeth Gayda |
º | 1630 |
Mr. Yvon Godin |
Mme Elizabeth Gayda |
La présidente |
Mme Priscilla George |
La présidente |
M. Monte Solberg |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
M. Monte Solberg |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
º | 1635 |
M. Monte Solberg |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
Mme Priscilla George |
M. Monte Solberg |
La présidente |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Priscilla George |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
º | 1640 |
Mme Diane St-Jacques |
La présidente |
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.) |
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety |
M. Raymond Simard |
La présidente |
Mme Elizabeth Gayda |
º | 1645 |
La présidente |
Mme Priscilla George |
M. Raymond Simard |
Mme Priscilla George |
La présidente |
Mme Priscilla George |
La présidente |
º | 1650 |
M. Yvon Godin |
º | 1655 |
La présidente |
Mme Suzanne Tremblay |
La présidente |
M. Monte Solberg |
» | 1700 |
Mme Diane St-Jacques |
La présidente |
M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.) |
La présidente |
M. Joe Fontana |
La présidente |
M. Joe Fontana |
» | 1705 |
La présidente |
M. Yvon Godin |
La présidente |
M. Yvon Godin |
La présidente |
Mme Diane St-Jacques |
La présidente |
M. Yvon Godin |
Mme Suzanne Tremblay |
La présidente |
» | 1710 |
Mme Suzanne Tremblay |
La présidente |
Mme Suzanne Tremblay |
La présidente |
CANADA
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 4 février 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)): Je souhaite à tous la bienvenue à cette dixième séance du Comité permanent du développement des ressources humaines. Nous avons le quorum voulu pour entendre nos témoins, et nous accorderons cinq minutes à chaque groupe pour faire son exposé.
Nous entendrons les exposés des trois groupes, après quoi les membres du comité pourront poser des questions.
Nous allons commencer par l'Association canadienne de santé publique, représentée par Deborah Gordon-El-Bihbety.
Vous avez la parole. Merci.
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety (directrice, Programmes nationaux, Association canadienne de santé publique): Merci.
Je suis directrice des programmes nationaux à l'Association canadienne de santé publique. Au nom de l'ACSP et de son programme national sur l'alphabétisation et la santé, je suis heureuse de pouvoir vous parler aujourd'hui de l'alphabétisation et de la santé au Canada.
Le programme national sur l'alphabétisation et la santé travaille en partenariat avec 27 associations nationales de la santé afin de sensibiliser les professionnels de la santé aux liens entre l'alphabétisation et la santé et à la nécessité de communiquer en pratique clinique dans un langage clair et simple.
Nous en sommes à notre douzième année d'activité, et nous avons réussi au cours de cette période à mettre sur pied un service de révision et de formation en langage clair et simple qui a attiré plus de 150 clients représentant le gouvernement, la santé, le secteur privé et les secteurs à but lucratif et non lucratif.
Le programme gère un portefeuille qui comprend des projets très divers ou différents dossiers, comme l'usage des médicaments chez les aînés et la prévention de la violence chez les jeunes à risque, sont abordés dans une optique fondée sur la santé de la population et les déterminants de la santé, et a réussi à incorporer cette optique dans la mise au point d'outils de formation en communication pour les professionnels de la santé des quatre coins du pays.
Récemment, le programme s'est avancé très ardûment dans le domaine de la recherche en alphabétisation et en santé grâce à un projet qu'il a entrepris en partenariat avec l'Université de Toronto, qui vise à élaborer un plan d'action national pour la recherche en alphabétisation et en santé au Canada.
Le programme a aussi reçu dernièrement des fonds du Secrétariat national à l'alphabétisation en vue de la réalisation d'un projet visant à définir des critères d'évaluation et à répertorier des pratiques exemplaires dans le contexte des programmes de lutte contre l'intimidation. S'ajouteront à cela des travaux de recherche portant plus particulièrement sur le rapport entre l'alphabétisation et les comportements d'intimidation.
Le programme national sur l'alphabétisation et la santé explore également la possibilité de mettre sur pied une fondation canadienne de l'alphabétisation et de la santé afin d'appuyer les programmes de recherche en alphabétisation et en santé au Canada. Cette fondation s'inspirerait des fondations pour l'alphabétisation qui ont déjà été créées grâce au programme de fonds de dotation qui a été mis sur pied par le Conseil du Trésor et qui travaille en partenariat avec le Secrétariat national à l'alphabétisation, en mettant à profit l'aspect prioritaire du programme de même que le partenariat qui lui assure la participation active de 27 associations nationales de la santé, ses liens solides avec le milieu canadien de l'alphabétisation et, plus particulièrement, l'expérience qu'il a acquise à titre d'hôte de la première conférence canadienne sur l'alphabétisation et la santé, «Cap sur l'alphabétisation et la santé pendant le nouveau millénaire», tenue en mai 2000.
Le programme national sur l'alphabétisation et la santé de l'ACSP est bien placé pour veiller à ce que les besoins en santé des gens qui sont très peu alphabétisés soient pris en considération dans l'actuel débat sur la réforme des soins de santé au Canada.
En 1989, l'Association pour la santé publique de l'Ontario a publié son rapport Projet alphabétisation et santé, première étape: rendre le milieu plus sain et sans danger pour les personnes qui ne savent pas lire, qui montrait l'existence d'un lien important entre une alphabétisation rudimentaire et un mauvais état de santé. Dans ce rapport marquant, on conclut à l'existence d'un lien tant direct qu'indirect entre l'alphabétisation et la santé.
Les conséquences d'une faible alphabétisation sur la santé tiennent au manque de compétences en communication verbale et écrite. En améliorant la communication en matière de santé, on peut atténuer considérablement les effets de ces conséquences directes pour les consommateurs de soins de santé qui sont peu alphabétisés. Parmi ces conséquences directes, mentionnons l'usage inapproprié de médicaments, le non-respect des consignes relatives à la santé, et les risques pour la sécurité.
Les aînés, qui reçoivent de 25 à 40 p. 100 de tous les médicaments qui sont prescrits au Canada, peuvent ne pas être en mesure de suivre une pharmacothérapie parce qu'ils ne peuvent pas lire les étiquettes, ouvrir les contenants de comprimés ou tenir compte de la fréquence et des doses recommandées. Il en résulte un accroissement du nombre de visites chez le médecin, de tests en laboratoire, de médicaments consommés, de nouvelles admissions à l'hôpital et de séjours prolongés dans des centres de soins infirmiers.
La facture annuelle s'élève à plus de 9 milliards de dollars pour l'économie canadienne. Le coût humain va de la perte d'autonomie des aînés jusqu'à une morbidité et mortalité inutiles.
Il y a plus souvent des accidents au foyer et en milieu de travail quand les gens ne sont pas capables de lire et de comprendre les avertissements et les instructions relatives à la sécurité. Beaucoup d'accidents du travail sont attribuables en partie aux dangers du milieu de travail.
Ainsi, le décès en 1998 d'un travailleur de Sudbury était une conséquence directe de son incapacité à lire les étiquettes sur des contenants de produits chimiques. Le fait qu'il était peu alphabétisé a été cité à l'enquête du coroner comme ayant été un facteur important dans son décès tragique.
L'étude de l'ACSP a également fait ressortir les conséquences indirectes d'une faible alphabétisation sur la santé. Ces conséquences sont étroitement liées aux conditions socioéconomiques dans lesquelles vivent les gens, y compris la pauvreté, le style de vie malsain, le manque d'estime de soi, le milieu de travail dangereux et le manque ou l'utilisation inappropriée de soins de santé. Les conséquences indirectes du manque d'alphabétisation sur la santé sont des conséquences d'envergure qui exigent une très vaste gamme de programmes et de soutien sociaux à long terme afin d'améliorer la qualité de vie des adultes peu alphabétisés.
Mais quelles sont les répercussions de ces conséquences directes du manque d'alphabétisation et de la mauvaise santé dans des domaines comme l'éducation des professionnels de la santé, les services directs et la politique en matière de santé? Je vais simplement vous en tracer très brièvement les grandes lignes dans le temps qu'il me reste.
En ce qui concerne l'éducation des professionnels de la santé, on a généralement l'impression que la capacité à bien communiquer est, non pas une compétence acquise, mais quelque chose qui dépend de la personnalité ou de l'attitude. Les étudiants qui étudient dans les différentes disciplines de la santé aux universités canadiennes ne reçoivent pas nécessairement de formation comme telle en communication dans le cadre de leur programme d'études, pourtant la recherche montre que la communication efficace en matière de santé est le résultat de diverses compétences acquises.
Le programme national sur l'alphabétisation et la santé travaille avec ses partenaires à promouvoir l'inclusion dans le programme d'études de beaucoup d'écoles de santé, y compris les écoles de services infirmiers, de médecine, de physiothérapie, d'ergothérapie et de pharmacie, de la communication verbale claire et de l'utilisation d'un langage clair et simple. Nous travaillons également de très près avec des organisations comme l'Association canadienne des soins de santé afin d'assurer une formation en communication claire dans le cadre d'un programme d'éducation permanente destiné aux administrateurs d'hôpitaux.
Le manque de communication efficace entre patient et médecin est un facteur déterminant des poursuites pour négligence professionnelle au Canada. D'après les avocats, l'attitude du médecin et son incapacité à communiquer sont la principale raison qui incite les patients dans 70 p. 100 des cas à intenter des poursuites pour négligence criminelle. Ne serait-ce que dans l'optique de la responsabilité professionnelle, étant donné la jurisprudence qui existe au Canada et qui oblige les médecins à s'assurer que leurs patients comprennent les avantages et les risques de tel ou tel traitement de même que les solutions de rechange, il est absolument essentiel que les professionnels de la santé reçoivent une formation qui puisse les aider à communiquer clairement.
En ce qui concerne le service direct, si les points d'entrée dans le système des soins de santé peuvent intimider le consommateur qui n'a pas de problème d'alphabétisation, ils sont d'autant plus intimidants pour ceux qui sont peu alphabétisés. Les formulaires de consentement peuvent être rédigés dans un langage facile à comprendre, et la présence de symboles ou de logos identifiables sur les bâtiments et le recours à des publicités qui ne font pas appel à l'imprimé sont souvent utiles pour ce qui est d'aider ceux qui risqueraient de mal utiliser les soins d'urgence parce qu'ils ont du mal à trouver les services spécialisés dont ils ont besoin dans un établissement de soins de santé ou un hôpital.
À propos des imprimés, la plupart des documents destinés à informer les patients ne peuvent être lus et compris de façon indépendante que par 20 p. 100 des adultes canadiens. Si ces documents étaient rédigés à un niveau de lecture correspondant à la cinquième année, on accroîtrait de 60 à 70 p. 100 la proportion d'adultes canadiens qui sont en mesure de lire et de comprendre l'information sur la santé qu'ils reçoivent.
Pour ce qui est de la politique en matière de santé, cette politique ne saurait répondre véritablement aux besoins à moins qu'elle tienne compte de l'alphabétisation comme déterminant social de la santé au Canada. Toute politique bien faite s'appuie sur des recherches, d'où la nécessité d'effectuer des recherches qui permettent de mieux cerner le lien entre l'alphabétisation et les résultats sur le plan de la santé.
Nous, du secteur de la santé, devons établir des lignes directrices qui assurent une communication de grande qualité relativement aux soins de santé qui se fondent sur les objectifs suivants: simplifier la procédure administrative qui oblige les gens à remplir des formulaires compliqués; élaborer des documents d'information sur la santé, des formulaires de consentement et des plans de traitement faciles à lire; veiller à ce que les étiquettes portant sur la nutrition et la nature des médicaments qu'on trouve sur les produits commerciaux soient rédigées en langage clair et simple, tout comme d'ailleurs les dépliants d'information qu'on y insère; et soutenir l'investissement dans les programmes d'alphabétisation. Les consommateurs qui n'ont pas de problème d'alphabétisation ont de meilleures chances de savoir bien s'orienter dans le système des soins de santé.
Chaque dollar supplémentaire consacré à l'éducation réduit davantage le taux de mortalité que chaque dollar consacré aux soins médicaux au Canada. Étant donné les récents rapports sur les soins de santé, notamment le rapport de M. Romanow intitulé Guidé par nos valeurs: L'avenir des soins de santé au Canada, il est clair que la meilleure façon de guérir notre système de soins de santé malade, c'est de faire en sorte que les Canadiens soient en bonne santé. Pour y arriver, nous aurons certainement besoin de sensibiliser les professionnels de la santé aux conséquences d'un faible niveau d'alphabétisation sur la santé des Canadiens, et leur donner la formation nécessaire à une communication verbale en langage clair et simple afin qu'ils puissent mieux servir les consommateurs de soins de santé peu alphabétisés. Il nous faudra également continuer à améliorer les conditions socioéconomiques dans lesquelles vivent les Canadiens à l'aide de politiques et de programmes complets et axés sur la collaboration.
¹ (1535)
Surtout, nous ne devons pas perdre de vue l'importance d'améliorer les capacités de lecture et d'écriture des Canadiens, car cela touche tous les aspects de la vie et peut faire toute la différence entre une bonne ou mauvaise santé.
Je vous remercie.
La présidente: Merci.
Je donne maintenant la parole à Elizabeth Gayda, présidente sortante de l'Association canadienne des troubles d'apprentissage.
Mme Elizabeth Gayda (présidente sortante, Association canadienne des troubles d'apprentissage): Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui pour vous parler du recoupement entre les troubles d'apprentissage et l'alphabétisation. Pendant longtemps, nos deux organismes ont eu des approches différentes. La capacité de lire et d'écrire est une question qui touche différents segments de la population canadienne. Elle ne se limite pas au milieu scolaire ou professionnel, puisqu'elle influe sur l'accès ou le manque d'accès aux services de santé, aux services sociaux et aux activités pratiques de tous les jours.
Les troubles d'apprentissage ont un effet semblable dans chacun de ces contextes. Les troubles d'apprentissage sont neurologiques et permanents. Ils affectent un processus sinon plusieurs de l'apprentissage. Quand je parle d'apprentissage, j'entends l'apprentissage dans des contextes très différents: école, milieu de travail, terrain de soccer, en famille et en société.
Il y a un net recoupement entre les capacités de lecture et d'écriture et les troubles d'apprentissage. Si on consulte quelques statistiques, on constatera que chez 30 à 50 p. 100 de tous les étudiants suivant des cours d'alphabétisation et d'éducation élémentaire, on a diagnostiqué des troubles d'apprentissage. Sur tous les participants à des programmes de formation en milieu de travail, entre 15 et 30 p. 100 présentent des troubles d'apprentissage, et entre 25 et 40 p. 100 de tous les adultes qui reçoivent des prestations d'aide sociale en ont aussi.
L'alphabétisation et les troubles d'apprentissage sont considérés depuis des années comme étant un problème du secteur éducatif, et c'est pourquoi le gouvernement fédéral ne devrait pas s'en mêler. Cela dit, à moins de se doter d'une approche nationale en matière d'alphabétisation et son interaction avec les troubles d'apprentissage, les collectivités canadiennes ne s'entendront jamais sur une définition commune des capacités de lecture et d'écriture. Les meilleures pratiques découlant de la recherche et les interventions efficaces élaborées par les organismes communautaires seront gaspillées. L'annonce faite par le ministre, M. Rock, concernant l'établissement d'un réseau canadien de la langue et de l'alphabétisation, constitue une contribution considérable qui nous permettra de mieux comprendre ce domaine à l'avenir.
L'alphabétisation en milieu de travail est constamment redéfinie pour s'appliquer à un vaste éventail d'emplois—chauffeurs de taxi, fournisseurs de soins de santé, entraîneurs, conteurs ainsi que les travailleurs des secteurs plus traditionnels.
Les chercheurs parlent de l'apprentissage permanent et des multiples formes d'alphabétisation, mais plusieurs questions demeurent. Quels sont les liens entre l'alphabétisation telle que définie par les écoles et par le milieu de travail? Ayant moi-même travaillé dans des écoles et dans d'autres milieux de travail, je pense que cette question est cruciale. À l'heure actuelle, il y a une véritable rupture entre la manière dont l'alphabétisation est définie dans un contexte scolaire, c'est-à-dire la capacité de lire et d'écrire, et la manière dont elle est définie en milieu de travail, ce qui comprend les connaissances informatiques, le travail en équipe et toute une variété d'aptitudes. Cette question est cruciale pour ceux qui ont des troubles d'apprentissage.
Comment est-ce que nous définissons l'apprentissage et les connaissances? Quelles sont les connaissances qui comptent? Où allons-nous trouver des gens pour travailler dans l'économie du savoir qui s'annoncent déjà, et comment pouvons-nous aider les travailleurs dans ce processus permanent et difficile d'acquisition des connaissances?
Quels sont les liens entre l'alphabétisation, l'économie et le travail, et quelles nouvelles formes d'alphabétisation seront requises par l'économie en milieu de travail et pour lesquelles les travailleurs devront développer des aptitudes? Peut-être que les réponses à certaines de ces questions viendront-elles des recherches qui sont en cours.
¹ (1540)
Il est important de souligner que des réponses efficaces ne seront possibles que lorsque les résultats seront aussi fondés sur les constats des praticiens. La traduction des connaissances en pratique constructive passe notamment par la collaboration entre les différents chercheurs et les organismes de première ligne cherchant à répondre aux besoins des Canadiens en matière d'alphabétisation.
La réussite par le dépistage, outil qu'utilise l'Association canadienne des troubles d'apprentissage, est un exemple parmi d'autres du type de contribution que de tels organismes peuvent apporter. L'utilisation de cet outil de dépistage des troubles d'apprentissage mène à des interventions spécifiques et appropriées dans le cas de ceux qui éprouvent des difficultés d'apprentissage ou qui ont des troubles d'apprentissage. Cet outil et la formation connexe ont été conçus en partenariat avec divers organismes d'alphabétisation. Des outils, des pratiques et des connaissances de ce genre, fondés sur des recherches, peuvent, sinon doivent, être communiqués et mis en commun si le Canada en tant que nation veut que tous ses citoyens participent pleinement.
Les organismes à but non lucratif sont invités à faire part de leur savoir-faire et à entamer un dialogue à l'occasion de la conférence. C'est un pas dans la bonne direction, mais ils doivent prendre part activement aux projets de recherche en cours et aux travaux du réseau canadien de langue et d'alphabétisation. Cela permettrait aux praticiens de contribuer directement à la consolidation des connaissances dans ce domaine complexe.
Je vous remercie de votre attention.
¹ (1545)
La présidente: Merci beaucoup.
J'invite maintenant Priscilla George, directrice exécutive du National Aboriginal Design Committee, à prendre la parole.
Je vous souhaite la bienvenue.
Mme Priscilla George (coordonnatrice, "National Aboriginal Design Committee"): Merci beaucoup.
Je représente le National Aboriginal Design Committee, qui existe depuis maintenant quatre ans. La formation de ce comité est le résultat direct d'une enquête que nous avons effectuée il y a quelques années sur les programmes d'alphabétisation gérés par des Autochtones à l'échelle du pays. Nous avons appris qu'il existait plus de 90 programmes de ce genre. Bien des gens nous ont dit qu'ils se sentaient isolés et qu'ils avaient besoin de moyens d'échanger des informations sur les ressources, les technologies et les méthodes qui s'étaient révélées efficaces pour les Autochtones.
Il y a quelques années, nous avons organisé le premier rassemblement national sur l'alphabétisation des Autochtones. Le rassemblement avait attiré 129 personnes, représentant chaque province et chaque territoire du Canada, et on nous a mandatés pour former un organisme national pour l'alphabétisation des Autochtones. Nous sommes sur le point de nous constituer en personne morale.
Nous ne disposons pas de statistiques pour notre travail de recherche, étant donné que les Autochtones n'étaient pas suffisamment représentés dans la première enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes. Il est donc difficile d'extrapoler de manière constructive. Pour ce qui est de la deuxième enquête sur l'alphabétisation, nous sommes en train d'examiner les résultats et nous devrions disposer sous peu de cette information.
J'utilise donc les statistiques de l'enquête post-censitaire sur les Autochtones, qui n'a pas porté spécifiquement sur l'alphabétisation, mais plutôt sur le niveau d'instruction. Le niveau d'instruction dans les collectivités autochtones est inférieur de moitié à peu près à celui des collectivités non autochtones. De nombreux facteurs contribuent à cela: par exemple, les enseignants dans les établissements scolaires ne comprennent pas les styles d'apprentissage ou les réalités politiques et socioéconomiques qui affectent les Autochtones.
L'enquête post-censitaire sur les Autochtones signale des statistiques très navrantes qui ont une incidence sur la capacité des Autochtones à apprendre, ainsi que sur les taux élevés de suicide, de pauvreté et de ce que mes amis appellent communément les pratiques d'un mode de vie malsain.
Dans ma quête pour sensibiliser les gens à ce que nous appelons l'approche holistique, j'ai découvert des recherches éducatives, médicales et scientifiques qui corroborent notre approche. Les établissements scolaires ont manqué à leur devoir envers bien des Autochtones et non l'inverse. Les Autochtones n'ont pas échoué. C'est le système qui a échoué. Par approche holistique, nous entendons le fait de reconnaître et de cultiver l'esprit, le coeur, le cerveau et le corps. J'ai des recherches qui prouvent l'efficacité de cette approche.
J'ai participé à différentes conférences sur l'alphabétisation, et jusqu'à présent, j'ai fait 35 exposés devant quelque 1 500 personnes partout au Canada et dans de nombreux autres pays. Des gens sont déjà venus me dire après mon exposé qu'ils croyaient vraiment ce que je leur disais au sujet de l'approche holistique, puisqu'ils la mettaient en pratique sans pour autant utiliser la même terminologie que moi.
Il existe actuellement six organismes d'alphabétisation nationaux non autochtones. Nous sommes en fait le seul organisme autochtone dans ce domaine. Nous travaillons à établir des liens avec des organismes nationaux depuis un certain temps déjà. J'ai consulté les salaires et les honoraires prévus dans le cadre des programmes d'alphabétisation. À l'heure actuelle, un programme d'alphabétisation autochtone reçoit entre 40 000 et 60 000 $ par année. C'est pratiquement le salaire annuel d'un enseignant dans un établissement scolaire, et pourtant nous sommes en train de corriger les erreurs commises par les enseignants dans les établissements scolaires. En revanche, nos praticiens reçoivent un salaire minable, puisque les 40 000 ou 60 000 $ servent à la prestation de services et à l'administration.
Quand je considère ce que nous avons été en mesure de réaliser depuis quatre ans... nous avons dépassé de peu 500 000 $. Par contre, chacun des six organismes d'alphabétisation nationaux disposent d'une budget de 400 000 $. Il nous a fallu quatre ans pour dépasser de peu ce montant. Mais n'empêche que nous avons réalisé bien des choses.
Au Secrétariat national à l'alphabétisation, on nous dit que nous devons nous adresser à d'autres ministères, provinciaux et fédéraux, pour du financement, et que nous ne pouvons pas toujours nous tourner vers la même source. Nous sommes donc allés voir d'autres ministères, y compris provinciaux, et on nous renvoie de nouveau au Secrétariat national à l'alphabétisation.
Nous nous retrouvons donc pris dans ce cercle vicieux, étant constamment renvoyés d'un endroit à l'autre en nous faisant dire que nous ne répondons pas aux critères.
¹ (1550)
J'ai déjà travaillé pour l'administration ontarienne, et je m'étais donné comme mission d'informer les gens, en leur disant: «Voici nos critères, voici comment y satisfaire, et voici la formulation que vous pourriez utiliser pour faire approuver votre demande.» Tout cela pour dire que nous avons besoin d'une approche pan-gouvernementale de l'alphabétisation, car c'est quelque chose qui touche différents aspects de la vie.
Je trouve intéressant de me retrouver ici à côté de Deborah, à ma droite, et de la présidente de l'Association canadienne des troubles d'apprentissage, à ma gauche, car on dit de bien des Autochtones qu'ils ont des troubles d'apprentissage. Cela est peut-être vrai, peut-être pas, mais nous n'en avons pas la certitude.
Ce à quoi je veux en venir, c'est que bon nombre de réalités socio-économiques et politiques, par exemple les pensionnats ou la pauvreté, ont toute une incidence sur l'apprentissage. Lors de mes conférences, j'ai appris que bon nombre de programmes d'alphabétisation non autochtones donnaient aussi des résultats avec des apprenants autochtones. Nous aussi, nous travaillons avec des apprenants non autochtones, et ce n'est pas parce que notre programme est le seul du genre; c'est que les apprenants non autochtones préfèrent l'approche holistique que nous utilisons. Nous faisons une différence quantitative et qualitative dans la vie des gens.
En faisant de la recherche en vue de rédiger un exposé de principe, j'ai constaté que dans les pays de l'OCDE, une approche pan-gouvernementale de l'alphabétisation fait toute la différence. Il ressort des observations que la coordination des politiques dans un vaste éventail de domaines peut avoir une incidence considérable, directe et indirecte, sur les niveaux d'alphabétisation des adultes dans un pays.
Je recommande au Canada d'adopter une approche très vaste et très audacieuse en matière d'alphabétisation, qui ne laisse pas la question au soin du seul Secrétariat national à l'alphabétisation, mais qu'il mette en commun les ressources des différents ministères, y compris la justice ou la santé, pour que toutes les parties intéressées s'assoient autour de la même table pour déterminer de quelle manière chacune prendra une part de responsabilité dans l'effort d'alphabétisation.
Voilà qui termine tout ce que j'avais à dire. J'ai des notes de discours que je ferai distribuer.
Je vous remercie de votre attention.
La présidente: Je pense que vous aurez l'occasion d'en dire bien davantage, car j'ai dans l'idée que les membres du comité auront des questions à vous poser.
Nous allons commencer le premier tour de questions par M. Solberg, et ce sera un tour de six minutes.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Merci beaucoup, madame la présidente et merci aux témoins d'être venus nous rencontrer. Vous soulevez tous des problèmes intéressants.
Je voudrais poser quelques questions à Mme George. Les obstacles à l'apprentissage sont divers, je crois que vous avez raison de le souligner. C'est particulièrement vrai pour les gens qui vivent dans les réserves indiennes, par exemple. Vous dites qu'il faudrait étoffer votre budget, et c'est probablement logique, mais ne serait-il pas infiniment préférable de suivre votre approche, l'approche holistique, pour veiller à ce que ce soient les écoles qui enseignent cela? Il est de toute évidence plus facile d'éviter un problème que de le rectifier ensuite. Pourquoi ne pourrions-nous pas le faire? Ou peut-être d'ailleurs qu'on le fait, mais dans ce cas, à quelle échelle? Et sinon, qu'est-ce qui empêche de le faire?
¹ (1555)
Mme Priscilla George: Je crois que la meilleure formule serait une approche double. En effet, ce serait une excellente chose d'offrir un développement professionnel dans les systèmes scolaires institutionnels. J'ai été enseignante. J'ai enseigné pendant 14 ans, aussi bien en classe spéciale qu'en classe normale. J'aurais bien aimé savoir tout cela à l'époque où j'enseignais à des classes normales.
Toutefois, les gens pour lesquels le système d'enseignement institutionnel n'a pas marché ne veulent pas y revenir, et il faut donc trouver une solution à leur problème. Ils sont de plus en plus laissés pour compte parce qu'ils ne répondent pas aux critères établis, et le fossé de l'éducation ne cesse de s'élargir. Le gouvernement nous dit: «nous avons consacré tant d'argent au bien-être social» et: «nous avons consacré tant aux peuples autochtones». À mon avis, il serait plus judicieux d'utiliser cet argent pour encourager des programmes d'éducation parallèles.
M. Monte Solberg: Au sujet de votre démarche, qui fait intervenir l'esprit, le coeur, la pensée et le corps, je voudrais revenir à la question que je posais il y a un instant. Il me semble tout à fait logique de faire intervenir tous ces éléments, et c'est ce qui se passe au sein de nombreuses familles. Une intervention extérieure n'est pas toujours nécessaire, mais évidemment ce n'est pas vrai dans certains cas.
Je me demande dans quelle mesure on pourrait réapprendre cela aux familles pour éviter ces problèmes avant que les gens décrochent de l'école. Est-ce possible? Je suppose que comme il y a de nombreux problèmes dans les réserves indiennes du Canada aujourd'hui—je pense que nous le savons tous—il est peut-être plus facile de s'occuper des problèmes des gens qui sortent du système d'éducation que de s'occuper des problèmes internes que l'on retrouve malheureusement au sein de tant de familles dans de nombreuses réserves. On se sent presque dépassé par la situation.
Il serait manifestement plus facile et moins coûteux d'intervenir plus tôt, mais j'imagine que parfois, c'est impossible.
Mme Priscilla George: Je suis très heureuse que vous me posiez cette question.
L'alphabétisation est une réalité intergénérationnelle et c'est pour cela que de nombreux programmes d'alphabétisation sont axés sur la famille. On travaille avec des élèves et les bailleurs de fonds ne comptabilisent pas les heures de contact car les tranches d'âge ne correspondent pas. Les bailleurs de fonds vous expliqueront qu'on peut seulement travailler, selon la province ou le territoire, avec des gens de 16 ou 19 ans jusqu'à un certain âge, qui doivent être prêts à prendre un travail.
La réalité, c'est qu'il n'y a pas de travail dans nos collectivités. On ne peut pas leur garantir qu'ils auront un travail s'ils suivent un programme d'alphabétisation, donc nous travaillons avec toutes sortes de personnes, et bien souvent nous ne pouvons pas comptabiliser ces heures de contact.
Mais il est certain qu'une démarche familiale d'alphabétisation est une excellente chose.
M. Monte Solberg: Bon.
Enfin, madame Gayda, vous nous avez présenté des statistiques, mais malheureusement nous n'avons pas de texte sous les yeux et je ne les ai pas toutes notées. Vous nous avez donné des statistiques sur le nombre de personnes qui ont des troubles d'apprentissage, le nombre d'assistés sociaux qui ont des troubles d'apprentissage, ce genre de choses. Peut-être pourriez-vous prendre quelques instants pour nous expliquer d'où vous tirez ces statistiques et sinon, j'aimerais bien avoir un exemplaire des tests et des enquêtes qui ont été réalisés car je pense que ce sont des informations intéressantes.
º (1600)
Mme Elizabeth Gayda: Je suis présidente bénévole, et je n'ai donc pas tout cela ici, mais je vais demander à l'Association canadienne des troubles d'apprentissage de vous donner ces précisions et de vous expliquer d'où viennent ces statistiques.
Globalement, elles proviennent des États-Unis, pas du Canada, car l'enquête sur l'alphabétisation des adultes a été la première compilation de statistiques sur les difficultés d'apprentissage. Donc, pour vous donner une idée générale, l'essentiel de ces statistiques vient des États-Unis.
M. Monte Solberg: Merci.
La présidente: Merci, monsieur Solberg.
Monsieur Adams.
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Merci, madame la présidente.
Merci à tous pour vos exposés qui étaient très intéressants.
Je crois que la meilleure façon d'avoir des gens en bonne santé, c'est de leur faire voir leur santé à la fois de façon étroite et de façon holistique. Mais si l'on franchit une étape supplémentaire, si on peut les faire participer au système de santé, là encore défini de façon très générale, on obtient un meilleur système.
Ma question s'écarte un peu du sujet, mais je me suis dis qu'il serait bon de la consigner.
Vous connaissez peut-être les Instituts de recherche en santé du Canada, qui ont été créés ces dernières années pour organiser de façon très générale la recherche en santé au Canada. On est passé d'un Conseil de recherches médicales qui comportait le mot «médicales» à une organisation qui comporte le mot «santé». C'est un changement qui ne vous laisse certainement pas indifférents.
Il y a 11 ou 13 instituts qui portent sur divers secteurs de recherche en santé au Canada. Ils ont notamment pour objectif de faire participer le public, des organisations publiques comme la vôtre, à la recherche en matière de santé. Par exemple, la Société du cancer travaille depuis de très nombreuses années, elle recueille des fonds, etc., et elle aurait des tonnes d'informations précieuses à fournir à un institut.
Donc, ces instituts sont là, ils ont tous les spécialistes et ils ont des liens avec les organisations locales. Pour en revenir à votre idée de faire participer les gens au système, toute la question, c'est de voir comment cela marche.
Il est curieux de constater qu'on a donné à tous ces instituts des noms très compliqués pour travailler dans le domaine qui leur est assigné. Par exemple, il y a un institut du cancer, mais il y en a un autre qui est intitulé institut du métabolisme, ou quelque chose comme cela, et de la nutrition. Si vous comprenez ces mots, vous savez en quoi consiste leur travail, mais il s'agit en fait essentiellement de recherche sur les reins. Il y a beaucoup de dialysés dans ma circonscription qui souhaiteraient qu'on donne des noms compréhensibles pour le commun des mortels à ces Instituts canadiens de recherche en santé.
Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez et si les gens de vos organisations y ont réfléchi?
Mme Elizabeth Gayda: Je viens de Montréal et j'ai assisté à l'une de leurs conférences. Ne me demandez pas le nom, car c'est un de ces noms à rallonge, compliqué. Ce qui m'a intéressée, c'est qu'ils se rendaient compte qu'ils ne communiquaient pas bien leur objet à quelqu'un comme moi, une praticienne—une praticienne informée.
Je pense donc qu'ils évoluent dans cette direction, et c'est très important, car il s'agit d'un institut qui peut faire avancer les choses dans le domaine du fonctionnement neurologique. Cette conférence s'est déroulée à l'hôpital neurologique de Montréal. Je pense qu'ils sont bien conscients du problème et qu'ils s'en occupent, et il en a été question à cette conférence.
Je leur ai fait remarquer à ce moment-là qu'ils devraient inclure l'Association canadienne des troubles d'apprentissage au niveau de la conférence, mais en tant que partenaire de même niveau à part entière, et je ne l'ai pas encore vu. Cela ne veut pas dire que cela ne se fait pas, mais simplement je ne l'ai pas encore constaté.
M. Peter Adams: Merci.
Mme Priscilla George: J'aimerais préciser que dans mon existence de bénévole, j'ai été présidente de Anishnawbe Health Toronto et que j'ai été directrice de la santé pendant quelque temps.
Ce que nous avons constaté quand ces gens-là sont venus nous parler de grands problèmes de santé en termes alambiqués, c'est que non seulement les gens qui écoutaient ne comprenaient pas le problème quand il était présenté avec toute cette terminologie très compliquée, mais ils ne voyaient pas non plus les autres solutions possibles. Et nous devions donc leur expliquer ce que signifiait le grand mot scientifique, leur montrer comment cela les concernait, et leur suggérer les questions qu'ils pouvaient poser car souvent on nous demande si on a des questions à poser sur ce qu'on va nous faire. Si on ne connaît pas le symptôme, si on ne connaît pas la situation, on ne sait pas quelles questions poser.
Donc les praticiens médicaux doivent effectivement apprendre à s'exprimer simplement.
Mon fils est dentiste à Sioux Lookout et il dit que dans le nord-ouest de l'Ontario, les gens ne savent pas ce qu'ils peuvent faire, quelles questions ils peuvent poser, même sur des sujets aussi simples que les soins personnels.
º (1605)
M. Peter Adams: Meegwetch.
Mme Priscilla George: Merci d'avoir utilisé ce mot.
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: L'Association canadienne de santé publique collabore étroitement avec les Instituts canadiens de recherche en santé, et c'est un exemple intéressant car je peux vous dire que le débat sur le titre de l'institut de la santé publique et des populations a été très long.
Le langage, c'est le pouvoir, et quand on utilise un jargon compliqué, on dispose d'un certain pouvoir. Nous avons beaucoup discuté avec les professionnels de la santé du Canada, et comme je le disais, la communication est considérée comme une question de personnalité et d'attitude, et non comme une compétence acquise. Dans les disciplines de la santé, quand les gens font des études pour devenir médecin, infirmier ou ergothérapeute, on ne leur apprend pas à communiquer avec les personnes qu'ils seront amenés à soigner.
C'est un problème qui persiste et je crois que la prévention, l'intervention précoce est essentielle. C'est quand les gens sont à l'université et à l'école qu'il faut leur apprendre à communiquer plus clairement. Mais on ne le fait pas car l'enseignement est axé sur les aspects techniques de la profession. En outre, les gens aiment bien utiliser ce jargon car c'est une façon de distinguer une profession, de se distinguer.
Il est important de préciser que la notion de langage ordinaire est relative, que tout dépend de la personne à laquelle on s'adresse. Si je suis médecin et que je parle à mes collègues de salpingectomie, ils me comprennent très bien. Les autres gynécologues savent ce qu'est une salpingectomie, et pour eux c'est du langage ordinaire, mais si je parlais à des ingénieurs, il y en a sans doute beaucoup qui ne me comprenaient pas.
Il est donc important de comprendre que c'est un terme relatif et qu'il faut adapter son langage au public auquel on s'adresse. Je crois qu'il faut commencer plus tôt et qu'il faut une stratégie à deux niveaux. Il est certain qu'il faut faire ce travail au niveau de l'éducation universitaire, mais qu'il faut aussi continuer ce travail d'éducation plus tard auprès des professionnels praticiens.
M. Peter Adams: Merci à tous.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Merci, madame la présidente. Je m'excuse d'être en retard, mais j'ai été retenue à la Chambre un peu plus longtemps que prévu. Je n'ai pas pu entendre les présentations, mais j'en prendrai connaissance quand le rapport me sera acheminé.
Personnellement, je suis toujours un peu triste quand on aborde la question de l'analphabétisme. On est un pays riche, et nos enfants devraient être en droit de s'attendre à ce qu'on leur donne une éducation de qualité suffisante pour qu'ils soient capables de maîtriser les outils dont ils ont besoin pour mener une vie décente.
J'ai souvent dit aux parents qu'ils amenaient à l'école des enfants normaux et que l'école fabriquait des enfants inadaptés, des analphabètes. C'est l'école qui n'est pas capable de s'adapter aux enfants. On sait très bien qu'il y a moins de 1 p. 100 des enfants qui viennent au monde avec une capacité à apprendre insuffisante. Quand il y a 20, 25 ou 30 p. 100 de la population qui n'a pas appris les éléments de base, c'est nous qui en sommes responsables, car nous n'avons pas été capables de faire acquérir ces choses aux enfants.
Maintenant, je m'interroge devant les exigences du XXIe siècle. Seront bientôt analphabètes ceux qui ne sont pas capables d'envoyer un fax, ceux qui ne sont pas capables d'ouvrir un appareil qui s'appelle un ordinateur et de se servir de l'Internet.
Dans quelle mesure vous préoccupez-vous de ces choses dans le travail que vous faites?
º (1610)
[Traduction]
Mme Elizabeth Gayda: Je veux bien admettre que les écoles créent parfois des problèmes, mais il y a des enfants qui ont vraiment un handicap d'apprentissage qui n'est pas une question d'alphabétisation, mais qui est d'ordre neurologique et irréversible. Je pense donc qu'il y a des enfants—et par conséquent des adultes, puisque cela dure toute la vie—qui ont d'énormes difficultés d'apprentissage.
Mais j'aimerais revenir sur ce que vous dites à propos des gens qui ne sont pas capables d'ouvrir un ordinateur et de se servir de l'Internet. Je crois que dans les écoles—et je l'ai dit dans mon introduction—on définit l'alphabétisation comme l'aptitude à écrire et à lire, alors que la définition appliquée sur le lieu de travail n'est pas la même. Dans nos établissements d'enseignement, et j'ai été moi-même enseignante, nous ne nous concentrons pas vraiment sur ce dont ces enfants vont avoir besoin par la suite dans le monde réel.
Je vous donne un petit exemple: j'ai une amie avocate qui dicte ses textes au moyen du procédé JAWS. Je ne sais pas si vous connaissez ce dispositif d'assistance, mais elle, oui. Elle n'a pas de difficulté d'apprentissage, elle n'est pas aveugle, c'est le genre de choses qu'on devrait apprendre aux personnes qui ont des difficultés d'apprentissage pour les aider à apprendre, mais on ne le fait pas dans les écoles.
Est-ce que c'est vraiment sur le tas qu'on doit apprendre aux employés cette technologie qui est largement acceptée et connue dans le monde et dans tout le Canada? Je n'ai pas la réponse. Je crois que vos objections sont justifiées. Tout ce que je dirais, c'est que le problème des difficultés d'apprentissage fait que certaines personnes ne peuvent jamais apprendre correctement pendant toute leur vie. Cela ne veut pas dire que ces personnes ne peuvent pas travailler ou se servir d'un ordinateur. En fait, les ordinateurs sont un outil fantastique pour elles.
Je m'arrête là.
Mme Priscilla George: Merci.
Vous posez une excellente question qui soulève deux problèmes à mon avis. Il y a d'abord le problème des gens qui sortent des écoles sans avoir acquis les compétences fondamentales. Quand j'ai commencé à enseigner à des adultes—il y a 18 ans je crois—j'ai été effarée de voir le nombre de personnes qui étaient censées avoir un niveau de douzième année mais qui en étaient très loin dans la réalité; d'après leur test, c'était plutôt un niveau de sixième année qu'ils avaient. Je ne sais pas comment ces gens-là avaient poursuivi leur scolarité; si on se tient tranquille dans le fond de la classe, on peut continuer à avancer. Je pense qu'on pourrait accroître l'intervention des programmes d'alphabétisation dans le système d'éducation institutionnel.
Le deuxième problème concerne la technologie. Bien souvent, dans nos villes, nous n'avons pas l'infrastructure nécessaire. Mais là où les gens ont accès à des ordinateurs et peuvent s'en servir, nous avons trouvé des façons originales d'entretenir notre culture en montrant aux élèves que l'ordinateur était un moyen de se connaître eux-mêmes. C'est une façon d'amener les gens vers des programmes d'alphabétisation, car il est beaucoup plus facile de dire qu'on va suivre un cours d'informatique que de dire qu'on va suivre un cours d'alphabétisation.
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: À l'Association canadienne de santé publique nous travaillons en collaboration avec des professionnels de la santé d'un bout à l'autre du pays pour mieux faire connaître les liens qui existent entre l'alphabétisation et la santé. Nous ne travaillons pas précisément avec les apprenants. Donc, je pense que mes collègues sont mieux en mesure de répondre à votre question.
Cependant, nous travaillons effectivement très étroitement avec les organisations nationales d'alphabétisation du Canada, et je suis d'accord avec ce que Priscilla vient de dire à savoir qu'en utilisant les ordinateurs comme moyen pour les attirer—et il ne fait aucun doute que les aptitudes que l'on acquiert dans les cours en informatique sont extrêmement utiles—les gens sont plus susceptibles de suivre des programmes d'alphabétisation, parce que l'on considère encore honteux au Canada de ne pas savoir lire et écrire.
Donc je pense que c'est un moyen de les attirer, et une initiative qu'il faudrait poursuivre et appuyer.
º (1615)
La présidente: Monsieur Jackson.
M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
Il est toujours intéressant d'entendre les points de vue des divers groupes.
Vous avez dit plus tôt que différentes personnes utilisent différentes façons de s'exprimer et qu'un groupe pourrait avoir un avantage sur un autre groupe parce qu'il ne comprend pas un jargon en particulier.
Je crois que cette situation existe dans les ministères. Il existe une foule de structures traditionnelles. Il y a de l'argent pour l'éducation, mais chacun veut toujours tirer la couverture à soi.
Madame la présidente...et je sais que j'utilise mon temps à raconter des histoires. Pendant la guerre civile, des bandits ont attaqué un train. À bord de ce train se trouvait de l'or en lingots. Il était gardé dans un coffre-fort et il fallait connaître la combinaison du cadenas pour accéder. Ils ont utilisé toutes sortes de moyens pour essayer d'ouvrir le coffre-fort. Ils ont utilisé de la dynamite, ils l'ont précipité du haut d'une colline et ils ont aussi essayé de l'ouvrir à coups de marteau. Aucun de ces moyens n'a fonctionné. Quelques semaines plus tard, la cavalerie est arrivée. L'un des officiers connaissait la combinaison et a réussi à ouvrir le coffre-fort où se trouvait l'or.
Je crois que c'est ainsi que sont les gens, que chaque personne possède un don particulier. Il y a les enseignants que nous avons tous connus à l'école secondaire ou à l'université, qui ont le don d'atteindre les gens. Certains sont fous; ils ne tiennent pas en place et font bouger les choses. Ce sont les enseignants qui connaissent les combinaisons. Ce sont des gens à part. Comme dans d'autres professions, la plupart des enseignants se situent dans la moyenne.
Vous constateriez probablement la même chose dans une salle de classe. Vous constateriez que les jeunes les plus doués et enthousiastes s'assoient habituellement dans la première rangée. Ils ont une mémoire photographique; il est en fait assez révoltant de voir la facilité avec laquelle ils apprennent. Puis vous avez les jeunes qui se trouvent au milieu et qui essaient simplement d'obtenir une note de 50 p. 100 pour que personne ne les embête. À l'arrière de la classe, vous avez les entrepreneurs, qui parfois se démarquent de nombreuses façons différentes simplement parce que personne ne peut les atteindre, ou simplement parce qu'ils contestent le système.
Ce que je suis en train de dire, madame la présidente, c'est qu'il existe une lacune ici. Environ huit millions de personnes se rangent dans cette catégorie, et je pense qu'il nous faut une approche holistique. Je vais revenir sur la question de la prévention qui comprend le mentorat par les pairs. Les gens ont des enfants, et ont de mauvaises habitudes, comme le tabagisme et d'autres types d'accoutumance. Mais aussi, dans les environnements où les gens grandissent, ils doivent être témoins de certaines choses. S'ils ne voient pas certains de ces exemples dès le départ, cela aura des effets très néfastes sur eux.
Je dirais à nos invités que dans chacun de leur cas, indépendamment du fait qu'ils sont tous distincts et particuliers, il faudrait affecter certaines sommes d'argent. Je ne crois pas que nous devrions accorder un fonds spécial aux personnes ayant des difficultés ou ce genre de choses. C'est simplement une question d'éducation. Huit millions de personnes de cette catégorie ont un problème. Attaquons-nous à ce problème et utilisons l'ensemble des meilleures méthodes qui existent. Il n'y aura jamais de solution idéale, car comme je l'ai dit, les gens sont très différents et il n'est pas toujours facile de trouver la combinaison.
Que pensez-vous de cette idée?
Mme Priscilla George: En fait, vous avez utilisé l'un des mots que nous utilisons dans nos propres enseignements traditionnels autochtones, à savoir reconnaître le don que possède chaque personne. Lorsque j'ai décidé de sensibiliser les décideurs au sein du gouvernement aux raisons pour lesquelles il nous faut une approche holistique, je savais que je devrais trouver des données pédagogiques, scientifiques et médicales pour les corroborer. Comme j'ai travaillé au gouvernement de l'Ontario, je savais qu'on me dirait probablement, eh bien c'est une façon intéressante d'enseigner dans une collectivité autochtone. J'ai donc trouvé une étude faite par Howard Gardner qui énonce ce qu'il appelle la théorie des intelligences multiples. Eh bien, savez-vous que lorsque je suis allée à l'institut des intelligences multiples et que je me suis documentée à fond sur cette question, j'ai constaté que c'est précisément ce que font les intervenants autochtones en alphabétisation. Les enseignants ayant un don particulier dont vous avez parlé reconnaissent qu'il existe de nombreuses façons différentes qui permettent aux gens d'apprendre, de traiter et de retenir l'information qui leur est donnée.
C'est pourquoi je tiens à vous remercier d'avoir laissé entendre qu'effectivement nous avons besoin d'une approche holistique. Cela revient à ce que je vous ai dit à propos d'une approche à plusieurs volets.
º (1620)
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: Simplement à titre d'éclaircissement, ce n'est pas ce que j'ai cru comprendre par votre question. J'ai entendu autre chose, soit que vous envisagez un système pour tous. Mais vous êtes en train d'envisager un système intégré. Est-ce la différence?
Pourriez-vous alors nous donner un exemple de la façon dont ce système fonctionnerait? Parce que je tiens simplement à m'assurer que nous ne perdons pas de vue les caractéristiques des populations particulières et leurs besoins particuliers.
M. Ovid Jackson: Je suis simplement en train de dire que vous ne devriez pas vous disputer. L'un des aspects qui pose tant de problèmes au sein du gouvernement, ce sont tous ces cloisonnements. Quelqu'un a parlé du langage utilisé—qu'un avocat utilise un langage particulier; de même qu'un médecin ou un mécanicien ou qui que ce soit, utilise un langage que les gens ne comprennent pas.
Vous venez de mettre le doigt sur diverses lacunes, que ce soit au niveau de la perception, de l'écriture, ou des aptitudes linguistiques, quelles que soient ces aptitudes. Tout ce que je suis en train de dire c'est que, peu importe la démarche que nous adoptons au cours de cette étude, nous devrions recommander—parce que cela relève de la compétence provinciale, que ce soit au niveau autochtone ou provincial—que dans le fonds qui sert à financer l'éducation, les intéressés devraient obtenir leur part équitable de ce fonds.
Je dis ne pas être très sûr que nous trouverons un jour un système idéal pour chacun, parce que tant de facteurs interviennent, y compris leur milieu familial. J'ai proposé que vous soyez intégrés au système et que chaque secteur qui a besoin des ressources pour les diverses raisons que vous indiquez, devrait avoir sa part de ce financement global.
Mme Elizabeth Gayda: Je dois dire, malgré tout mon cynisme, que cela paraît intéressant. C'est comme l'éducation intégratrice: cela paraît intéressant, mais il y a des décideurs et des fonctionnaires qui prennent des décisions sur la façon dont ces fonds sont affectés, et je dois dire qu'ils commettent des erreurs. On ne répond pas aux besoins de certains enfants; on ne répond pas aux besoins de certains adultes. Bien que théoriquement j'aimerais bien être d'accord avec vous, dans la réalité je considère que cela n'existe pas.
Si vous examinez la question des troubles d'apprentissage. Elle n'existe pas au Nouveau-Brunswick. Si vous déménagez là avec votre enfant qui a des troubles d'apprentissage, il ne recevra aucun service, parce que selon le ministère de l'Éducation ce genre de difficultés n'existe pas. C'est le cas aussi au Québec. En Ontario, on reconnaît qu'il existe des troubles d'apprentissage.
Comment va-t-on améliorer cette situation en disant, «Nous allons vous offrir un programme»? Il s'agit d'enfants. Je veux servir les enfants. Je veux les atteindre, quels que soient leurs besoins, leurs points forts et leurs points faibles, mais je crois qu'il est naïf dans un certain sens de croire que des fonctionnaires dans divers ministères de l'éducation, qui ne sont pas particulièrement comptables envers le public qu'ils servent, sont ceux qui prennent un grand nombre de décisions quant à la façon dont les fonds sont dépensés. Et à mon avis, en ce qui concerne les enfants ayant des besoins particuliers, ils ne s'occupent pas nécessairement de leur intelligence particulière ou de leurs besoins spéciaux.
M. Ovid Jackson: Eh bien, madame la présidente...
La présidente: Votre temps de parole est écoulé. Je suis désolée mais je dois vous interrompre.
Monsieur Godin.
[Français]
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, madame la présidente. J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos invités.
Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi, mais je crois qu'on a en réalité deux problèmes. Comme Mme George le disait, on a le problème de ceux qui sont sortis de l'école et qui manquent d'éducation--ils sont sortis de l'école comme ça--et il y a l'avenir de nos jeunes, des prochains à venir. Comme vous le disiez, c'est triste de voir une personne qui a complété sa douzième année et qui, après vérification, est considérée comme ayant complété une sixième année. Chez nous, j'ai vu des personnes qui avaient une douzième année et qui, quand elles avaient essayé de trouver un emploi l'année suivante, avaient été évaluées comme ayant seulement l'équivalent d'une neuvième année. On a dû les renvoyer à l'école.
On se pose donc la question suivante. Est-ce qu'on exige trop des jeunes? Il y a certaines personnes qui se disent que si elles peuvent avoir une classe de 10 élèves, elles auront un contrat avec le gouvernement. La question se pose. Tout le monde peut dire qu'on est tous analphabètes. On peut tous avoir ce problème dépendamment de la classe dont on vient.
Comme on sait que beaucoup de jeunes sortis de l'école sont analphabètes, pourquoi n'a-t-on pas un système pour essayer de régler ce problème? Regardons du côté de nos jeunes qui sont à l'école présentement. Ne trouvez-vous pas que des classes de 30 ou 33 élèves, ça n'a pas d'allure? Un enseignant qui a une trentaine d'enfants dans une classe... Il y a des parents qui ont de la difficulté à élever deux enfants, et on a des professeurs qui se retrouvent avec 30 enfants qui ne sont pas les leurs, avec 30 enfants aux personnalités différentes qui ne viennent pas de la même famille. N'est-ce pas là le problème auquel il faudrait s'attaquer directement? Ne faudrait-il pas plutôt donner de l'aide à ce niveau?
Je reconnais qu'il y a des gens qui sont sortis de l'école, qui ont besoin d'aide et dont il faut s'occuper, mais l'avenir de nos jeunes n'est pas meilleur. C'est comme si on disait qu'on les entraîne à échouer et qu'on donnait ensuite du travail à d'autres pour essayer de les ramener. Ne faudrait-il pas agir directement dans les salles de classe, embaucher plus d'enseignants, réduire le nombre d'élèves dans les classes et vraiment se concentrer sur les jeunes?
Je pense que les jeunes sont capables d'apprendre. Je vais souvent à la polyvalente assister à des cours et je me demande comment les jeunes peuvent apprendre. Ça n'a aucune allure. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus ainsi que sur l'autre question que je vais vous poser.
La pauvreté n'est-elle pas aussi un manque dans notre société? Je pense qu'une personne qui va à l'école et qui a faim a pas mal de difficulté à étudier. Il y a 1,4 million d'enfants qui ont faim au Canada. Parmi eux, il doit y en avoir qui ne peuvent pas étudier beaucoup. Alors, je pense que notre problème en est un de société.
º (1625)
[Traduction]
Mme Elizabeth Gayda: L'éducation est un domaine qui relève des provinces et ce n'est pas une question dont le gouvernement fédéral s'est occupé. Je crois que tant que nous n'aurons pas une forme quelconque d'approche nationale en matière d'éducation, que ce soit par l'intermédiaire de ce centre ou d'une autre façon, les genres de problèmes dont vous avez parlé et que vous avez soulignés continueront d'exister.
Je n'ai donc pas de réponse à vous donner, mais je considère, étant donné qu'il s'agit d'un domaine de compétence provincial et non fédéral, que le gouvernement fédéral doit au moins prendre position à propos des pratiques exemplaires, demander à des chercheurs de présenter certaines de ces constatations dans l'ensemble du Canada et ne pas laisser aux ministères de l'Éducation le soin de décider en quoi consiste les pratiques exemplaires.
[Français]
M. Yvon Godin: J'aimerais vous poser rapidement la question suivante. Pourquoi faites-vous tellement confiance au fédéral pour faire quelque chose? Si le fédéral donnait davantage d'argent aux provinces pour que celles-ci soient capables de s'occuper de l'éducation des jeunes... Ce sont elles qui sont les plus proches de la population. Ici, au fédéral, qu'on ait le programme que l'on voudra, à moins qu'on se comprenne mal...
[Traduction]
Mme Elizabeth Gayda: Je ne veux pas que le gouvernement fédéral s'occupe d'éducation mais j'aimerais qu'il commence à informer les divers ministères des pratiques exemplaires qui existent. Quels sont les meilleurs moyens pour enseigner à un enfant qui a un trouble d'apprentissage et qui a de la difficulté à lire? Ce genre de moyens existent.
Vous êtes en train de dire que le ministère devrait le savoir. Or, j'ai constaté que ce n'est pas toujours le cas et qu'il faut établir certaines de ces meilleures pratiques et les communiquer pour qu'il y ait...
[Français]
M. Yvon Godin: Comment un enseignant dans une école peut-il enseigner à 30 personnes à la fois?
[Traduction]
Mme Elizabeth Gayda: Est-ce que vous me posez la question? Je crois que c'est difficile...
Oh, puis-je répondre?
La présidente: Bien sûr.
Des voix: Oh, oh!
º (1630)
Mr. Yvon Godin: Désolé, qu'avez-vous dit?
Mme Elizabeth Gayda: Que c'est difficile. Cela est faisable, et nous avons tous vu des enseignants extraordinaires qui l'ont fait. Mais pour l'enseignant moyen, c'est difficile.
La présidente: Je vais laisser Mme George répondre brièvement.
Mme Priscilla George: Comme j'ai enseigné dans le système d'éducation institutionnel pendant 14 ans, je peux dire que la façon de contourner la difficulté c'est d'enseigner selon le style d'apprentissage dominant. Par conséquent, ceux qui ne possèdent pas ce style d'apprentissage dominant vont tomber entre les mailles du filet.
Je considère donc qu'il faut enseigner aux futurs enseignants les différents styles d'apprentissage et qu'il faut aussi les enseigner à ceux qui sont déjà dans le système.
La présidente: Excellente réponse.
Monsieur Solberg.
M. Monte Solberg: Merci beaucoup, madame la présidente. J'ai différentes questions à poser et je vais sauter d'un sujet à un autre.
Tout d'abord, j'aimerais commenter la responsabilité provinciale en matière d'éducation. Je tiens à souligner que bien que la situation ne soit pas idéale, le Canada affiche en fait de très bons résultats en matière d'éducation, comparativement à d'autres pays. Donc je crois que l'on peut soutenir que les provinces ont fait un assez bon travail en matière d'éducation, indépendamment de ce que vous dites. Je n'ai pas l'intention de discuter des meilleures pratiques, mais j'aimerais remettre en question l'idée de fédéraliser l'éducation, si c'est ce que...
Non, je sais que ce n'est pas ce que vous avez dit. Vous parliez des meilleures pratiques. Mais au cas où il y ait des gens qui envisageaient cette solution, je tenais à le signaler.
J'ai une question précise, pour commencer, à l'intention de Mme Gordon-El-Bihbety en ce qui concerne le nombre de personnes qui se blessent parce qu'elles sont analphabètes.
Comme je suis arrivé en retard, et je m'en excuse, j'ai manqué ce que vous auriez pu dire à ce sujet. Vous avez toutefois raconté le cas d'une personne qui est morte suite à un accident du travail. Avez-vous des chiffres concrets à nous fournir à propos du nombre de gens qui sont blessés ou tués parce qu'ils ont de la difficulté à lire?
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: Je ne les ai pas avec moi, mais nous avons des statistiques. Il faut tout de même que je dise qu'il y a trop peu de recherches dans ce domaine et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous participons maintenant, avec l'Université de Toronto, à l'examen des lacunes dans la recherche sur l'alphabétisation et la santé, soit la relation entre l'illettrisme et la santé.
Nous faisons ce genre de recherche, sur les coûts pour le système de soins de santé, quand 48 p. 100 de sa clientèle est peu alphabétisée et que, pour les personnes âgées de 65 ans et plus, cette proportion est de 80 p. 100. Cela représente un lourd fardeau pour les soins de santé, non seulement du côté du traitement, la partie la plus coûteuse du système de soins de santé, mais aussi pour d'autres aspects du régime de santé, comme la santé publique, les soins palliatifs, l'ensemble des soins à domicile et les programmes d'assurance-médicaments.
Nous disposons donc de certaines données, mais il faut planifier la recherche au Canada. C'est précisément ce que nous faisons maintenant, compte tenu du fait que les bonnes pratiques et les bonnes politiques sont fondées sur la recherche.
M. Monte Solberg: Bien. Voilà qui m'amène à ma question suivante, au sujet des dépenses fédérales.
J'ai déjà bien connu les chiffres. Autrefois, il y a quelques années, lorsque je m'intéressais à cette question, on consacrait environ 30 millions de dollars à l'enseignement des adultes. Je ne sais pas ce qu'il en est aujourd'hui, mais je présume que vous tous, et certainement certains d'entre vous, demandez plus d'argent. J'aimerais savoir comment les dépenses du Canada en alphabétisation des adultes se comparent à celles d'autres pays? Où nous situons-nous? Comment les autres pays se comparent-ils au Canada, pour ce qui est de leur capacité de régler ce problème? Je suis convaincu que toutes sortes d'études ont été menées à ce sujet.
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: On pourrait très bien commencer par l'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes, qui porte sur sept pays. Essentiellement, elle se penche sur les différents systèmes d'enseignement. Il y a une chose intéressante au sujet du Canada et des États-Unis: nous avons plus de gens qui sont illettrés et de gens qui sont très instruits que de gens entre les deux, alors que dans un pays comme le Suède, il y a plus de gens entre les deux, parce qu'on se concentre sur l'apprentissage continue, les stages d'apprentissage et des programmes qui permettent aux gens de continuer d'apprendre tout au long de leur vie.
Avec une culture aussi différente, sur laquelle fonder la société, on obtient davantage de gens alphabétisés, soit le groupe du milieu, par rapport aux deux extrêmes.
C'est très intéressant. Cette étude porte sur divers groupes de la population en comparant sept pays de l'OCDE. Je pense que c'est une bonne étude pour commencer à réfléchir à la question, si c'est ce que vous cherchez.
º (1635)
M. Monte Solberg: C'est un exemple intéressant, mais sans tenir compte de la recherche, je dirais qu'il est difficile d'en tirer des conclusions, puisque la Suède est un pays dont la population est assez homogène. Le Canada est un pays multiculturel, où l'anglais est la langue seconde de bon nombre d'habitants. Il est donc toujours difficile de tirer des conclusions à partir de ces études. C'est tout de même utile.
Par curiosité, j'aimerais savoir ce qu'on demande au gouvernement, au niveau du financement. Est-ce encore 30 millions de dollars? Est-ce ce qu'on dépense actuellement?
La présidente: C'est 28,2 millions de dollars.
M. Monte Solberg: Bien, alors il n'y a pas de grande augmentation, n'est-ce pas?
Est-ce que vous avez un chiffre précis en tête? Nous aurons bientôt un nouveau budget. Est-ce que les groupes d'alphabétisation au Canada ont cité un chiffre, comme cible idéale?
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: Je ne peux pas vous répondre, puisque nous ne sommes pas un groupe d'alphabétisation, nous ne faisons que travailler avec ce genre de groupes. Je travaille dans le secteur de la santé.
Mes collègues seraient mieux en mesure de vous répondre.
Mme Priscilla George: Voilà une très bonne question!
Je ne sais pas; je ne saurais vous répondre. Je sais que les autres organismes nationaux reçoivent 400 000 $ par an. Nous avons reçu en moyenne 100 000 $ et nous appuyons environ 90 programmes dans l'ensemble du pays dont les praticiens touchent des salaires de misère.
M. Monte Solberg: Bon, je m'arrête ici. Merci.
[Français]
La présidente: Madame St-Jacques.
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Merci, madame la présidente.
Ma question concerne la santé mentale. J'aimerais savoir premièrement s'il y a des liens entre la santé mentale et l'alphabétisation, et aussi si ces deux choses ont une influence l'une sur l'autre. Est-ce que des études ont été faites à ce sujet? Si oui, avez-vous ciblé des moyens d'aider les gens qui ont à la fois un problème de santé mentale et un problème lié à l'alphabétisation?
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: Aux États-Unis, il y a beaucoup d'études.
[Traduction]
Je vais continuer en anglais, parce que c'est ma langue, celle dans laquelle je suis le plus à l'aise.
Au sujet de la santé mentale, je sais qu'aux États-Unis, la University of New England a fait de la recherche dans ce domaine, soit la relation entre la santé mentale, l'alphabétisation et la santé. Je sais que c'est un domaine névralgique et au Canada, il y a une pénurie de recherche à ce sujet.
L'Association canadienne de santé publique a lancé un projet de deux ans sur la promotion de la santé mentale, grâce à des fonds de Santé Canada. C'était un excellent programme, et nous possédons l'information, des ressources et des résultats de recherche qui en émanent, mais il n'a pas établi un lien avec l'alphabétisation ou l'analphabétisme. C'est un sujet qu'il faut étudier au Canada, et vous soulevez là une excellente question.
Je dois vous dire que la promotion de la santé mentale a beaucoup souffert, comme service, comme secteur, chez Santé Canada. On n'y consacre pas beaucoup de crédits, actuellement, au Canada, alors que c'est une question cruciale
Vous soulevez donc une bonne question et je serais ravie de vous faire parvenir les résultats des recherches de l'Association canadienne de santé publique
Mme Diane St-Jacques: Les autres témoins ont-ils quelque chose à dire?
Madame George.
Mme Priscilla George: Oui, j'ai quelques petites choses à dire à ce sujet. Nous n'avons pas de statistiques fiables, mais nous avons des observations empiriques.
Lorsque j'ai fait mes recherches en préparation du mémoire, j'ai demandé à des formateurs combien à leur avis il y avait d'apprenants touchés par ce que nous appelons le syndrome du pensionnat. Les formateurs m'ont dit qu'ils étaient tous dans ce cas, parce que c'est une réalité générationnelle.
En outre, beaucoup de nos apprenants ont des problèmes de toxicomanie. Chez les apprenants autochtones, ce qui compte le plus, c'est l'estime de soi, l'identité culturelle positive. Je comprends que vous ayez parlé de santé mentale, mais pour moi, tout cela est interrelié.
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Madame Gordon-El-Bihbety, dans votre présentation, vous avez parlé d'intimidation. Voyez-vous un lien entre cela et la santé mentale, ou pouvez-vous élaborer sur ce que vous entendiez par l'intimidation reliée à l'alphabétisation?
[Traduction]
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: Je ne peux pas parler précisément d'intimidation. Dans le domaine de la santé publique, dans le secteur de la santé, nous avons comme cadre conceptuel la santé de la population. Nous examinons une population donnée, ses besoins et caractéristiques particuliers. Ainsi, si nous nous penchons sur le cas des personnes âgées, nous constatons qu'elles ont des besoins et des problèmes particuliers, étant donné l'étape de leur vie, leurs activités, leurs relations au travail et les relations avec leurs familles. Tout cela devient très important. Nous considérons parfois la relation entre une population donnée et ses besoins particuliers en matière de santé.
Il y a des groupes de population, comme les aînés, qui sont certainement intimidées par le régime de santé, ces divers points d'entrée, par exemple. Les personnes ayant des problèmes de santé mentale, ou une déficience intellectuelle sont dans le même cas. Pour cette population particulière, c'est ce qu'on constate partout.
Peu de travail a été accompli dans ce domaine. C'est un secteur négligé, tant sur le plan de la recherche que de l'intervention. Il faudrait y travailler davantage, pour cerner les problèmes.
º (1640)
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Merci, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente: Bien, merci.
Un autre membre du comité veut poser une question, à moins qu'il y en ait du côté de l'opposition.
M. Simard, vous avez la parole.
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Merci, madame la présidente.
Dans mon comté de Saint-Boniface, au Manitoba, il y a un groupe de femmes qui ne s'intéressait pas particulièrement à l'alphabétisation, mais qui s'en est occupé à cause de l'ampleur de la demande. Je crois que ce groupe a mis sur pied environ 16 programmes et a dû refuser les demandes de cinq ou six collectivités. Il y a donc un besoin manifeste. C'est très évident.
Ce que je crains, alors que le gouvernement parle maintenant de promouvoir une stratégie d'innovation, assortie de nouvelles technologies et de nouvelles façons de faire, on risque de laisser s'élargir encore davantage le fossé, si on ne règle pas d'abord les problèmes d'analphabétisme. Si nous ne réglons pas très bientôt ce problème, très bientôt, les coûts seront énormes. Cela fait peut-être partie de la stratégie d'innovation.
Dites-moi si vous pensez que l'alphabétisation peut être intégrée à la stratégie d'innovation. Et au sujet du choix du moment, ne pensez-vous pas qu'on aura des problèmes plus tard, si on ne règle pas maintenant ce genre de problèmes?
Mme Deborah Gordon-El-Bihbety: Je suis convaincue que nous voulons que notre pays progresse et mette en place des innovations pour l'avenir. Mais, par ailleurs, nous devons régler les problèmes actuels. Il y a une chose que je constate de plus en plus dans ce domaine et dont je parle avec mes collègues : il y a d'excellentes pratiques, déjà en place. Il y a de très bons programmes, initiatives et innovations pour trouver des solutions à ces problèmes. On peut innover en réglant ces problèmes et on peut intégrer les deux, au lieu de les isoler dans notre esprit.
On a tendance à séparer les choses, au lieu de les associer. C'est quand on les associe qu'on commence à faire des découvertes; associons donc ces deux concepts. Mais plus encore, tablons sur ce que notre acquis, en l'évaluant. Il ne faut pas se contenter uniquement de faire de la recherche, mais il faut évaluer aussi les pratiques qui existent actuellement au Canada et qui donnent des résultats.
Je peux faire une analogie avec le régime de santé publique, au Canada. On parle de toutes sortes de techniques et d'innovations médicales, d'incroyables chirurgies pour les problèmes cardiaques, alors qu'on pourrait prévenir ces problèmes si le régime de santé prenait des mesures simples, dans le cadre de programmes de promotion de la santé qui encourageraient la forme physique et de saines pratiques alimentaires.
Je pense qu'il faut faire les deux, et associer l'innovation à notre point de départ.
M. Raymond Simard: Merci.
La présidente: Madame Gayda, vous avez la parole.
Mme Elizabeth Gayda: Je suis tout à fait d'accord avec Mme Gordon. Par contre, nous n'avons pas mis le doigt sur la définition de l'alphabétisation, pour les 10 ou 20 prochaines années. Je m'intéresse non pas à ce qui se passera dans un siècle, mais dans 10 ou 20 ans, quand je serais toujours vivante, je l'espère.
Je ne veux pas tout rejeter du revers de la main, mais il faut être plus précis lorsque nous parlons d'exigences en matière d'alphabétisation. Il y a divers types de connaissances; lesquels seront nécessaires pour les deux prochaines générations qui me précèdent, ou plutôt qui me suivent?
Je me crois toujours plus jeune que je ne suis vraiment.
º (1645)
La présidente: Eh bien, vous êtes plus jeune que moi.
Mme Priscilla George: Juste avant Noël, j'ai eu le triste honneur de rencontrer quelqu'un oeuvrant à l'alphabétisation en milieu de travail, ce qui, dit-on, est appelé à devenir un volet important de la stratégie d'innovation, ou qui devrait l'être.
Il m'a parlé des sommes considérables qui étaient injectées dans ce type de programme par des entreprises ayant conclu des ententes qui prévoient l'embauche d'un certain nombre d'Autochtones. En écoutant tout cela—et il était plein d'enthousiasme, à juste titre—, j'éprouvais la sensation qu'il manquait quelque chose. Et avant même que je m'en rende compte, la question suivante m'est venue à la bouche: «Quels sont vos taux d'achèvement et de réussite?» Il m'a répondu: «Oui, vous avez raison. Ils retournent rapidement à la réserve ou alors ils...» Je ne veux même pas répéter ce qu'il m'a dit. Cela frôlait le racisme.
Le lien que je perçois, c'est que l'alphabétisation est le fondement qui manque, avec toutes les compétences que l'alphabétisation suppose. C'est comme si l'on édifiait le troisième étage d'une maison avant même d'avoir assuré la fondation.
M. Raymond Simard: Est-ce que j'ai le temps de poser une brève question?
Je suis d'accord avec M. Godin, en ce sens que le problème présente deux volets. D'abord, il y a ceux qui éprouvent des problèmes en ce moment et qu'il faut aider, mais il y a aussi la génération qui suit et qui est actuellement dans le système d'éducation, qui est un champ de compétence provinciale.
Avez-vous réussi à en discuter avec les provinces, et vous ont-elles révélé les solutions qu'elles préconisent à l'heure actuelle?
Il y a quelques mois, des membres d'un organisme de promotion de l'alphabétisation sont venus me voir au bureau. Il y avait, parmi eux, un analphabète titulaire d'un diplôme d'études secondaires. Il avait probablement terminé ses études dix ans auparavant. Manifestement, le système a des failles lorsque quelqu'un peut décrocher son diplôme d'études secondaires sans savoir ni lire ni écrire.
Avez-vous eu du succès auprès des provinces? Avez-vous été bien reçu? Leur avez-vous proposé de nouvelles façons de faire?
Mme Priscilla George: L'une des suggestions que je leur ai présentées... Tout d'abord, plusieurs provinces élaborent ce qu'elles appellent des résultats d'apprentissage, et ceux-ci sont principalement de nature cognitive. Cette méthode ne fait que reprendre un système qui n'a pas fonctionné pour nous.
Je crois que l'approche holistique, qui englobe les dimensions cognitives, intellectuelles, spirituelles et émotionnelles, représente une solution au problème.
La présidente: Y a-t-il d'autres questions?
S'il n'y en a pas, permettez-moi d'en poser une à Mme George. Dans quelle mesure le programme d'aide préscolaire aux Autochtones a-t-il fonctionné pour promouvoir l'alphabétisation?
Mme Priscilla George: Je connais un peu le programme d'aide préscolaire aux Autochtones et j'approuve vivement les efforts entrepris. Je crois qu'il nous faut collaborer davantage au chapitre de l'alphabétisation familiale.
La présidente: Avant que je ne remercie les témoins de leur participation, l'un de vous trois souhaite-t-il ajouter le mot de la fin?
Dans ce cas, je remercie nos trois témoins d'être venus. Vous nous avez vraiment donné matière à réflexion, et je sais que vous suivrez les travaux de notre comité à mesure qu'avancera notre étude sur l'alphabétisation en milieu de travail.
À présent, chers collègues, nous devons étudier un avis de motion de 48 heures.
Monsieur Godin, je vous accorde trois ou quatre minutes pour présenter vos arguments. Puis, je donnerai la parole à au moins un membre de chaque parti pour les interventions pour et contre la motion, et nous mettrons ensuite la question aux voix.
º (1650)
[Français]
M. Yvon Godin: Merci, madame la présidente.
Voici pourquoi j'ai présenté cette motion. Vu que le comité est assez occupé, je pense qu'on devrait libérer des députés pour s'occuper de ce cas-ci, car c'est un cas spécial qu'il faut examiner. C'est un problème qui n'existe pas seulement au niveau de la pêche.
La semaine dernière, Développement des ressources humaines Canada a envoyé des enquêteurs dans la région du sud-est du Nouveau-Brunswick pour enquêter sur ce qu'on appelle l'accumulation des heures ou le banking of hours, comme on dit en anglais. Maintenant, des centaines et des centaines de personnes ne se qualifieront pas pour l'assurance-emploi. De plus, elles pourraient être accusées d'avoir fraudé le système, alors que l'industrie elle-même dit qu'elle ne peut plus arriver. Prenons l'exemple de l'industrie de la pêche. C'est une industrie où, au début des saisons de pêche, lorsqu'il y a beaucoup de poisson, on peut compter sur 60 à 70 heures de travail par semaine. Quand on arrive à la fin de la saison de pêche, il peut n'y avoir que 10 ou 20 heures de travail par semaine. Si les gens vont travailler, ils ne seront payés que pour 20 heures. En plus, ça va affecter leurs prestations d'assurance-emploi quand ils feront leur prochaine demande. Il y a eu le même problème à Terre-Neuve dans le passé, lorsque les employés ont été obligés de remettre à Développement des ressources humaines Canada 650 000 $ parce que selon la loi, ils avaient fraudé le système.
La raison pour laquelle je présente ma motion, c'est que le problème n'existe pas seulement dans le sud-est du Nouveau-Brunswick, mais partout. Maintenant, la ministre a annoncé qu'elle mettrait sur pied un comité spécial pour étudier ce problème dans une région. Moi, je ne suis pas d'accord sur ça, parce que le problème est plus grave que ça. Il faut regarder l'industrie en entier. De plus, certaines rumeurs disent qu'elle considère la possibilité d'un projet-pilote pour cette région-là. L'année dernière, ça a été fait dans la région de Madawaska. Si le gouvernement a l'intention de le faire cette année dans le sud-est, je trouve que ce n'est pas correct. C'est comme si le gouvernement essayait de régler les problèmes seulement là où il y a des libéraux.
Le gouvernement fédéral a un autre mandat que celui-là, celui d'avoir des programmes pour les Canadiens et les Canadiennes partout au pays. En plus des pêcheurs, il y a aussi les gens qui font des couronnes de Noël. On dit que les gens qui travaillent à faire des couronnes de Noël font le banking des heures et que les heures ne sont pas assurables, et on envoie des enquêteurs qui posent des questions. On leur demande qui a payé la corde pour amarrer les couronnes, s'ils ont loué le garage à l'employeur et toutes sortes de choses comme celles-là. Ces gens-là travaillent de 7 h 30 jusqu'à 21 h 30, et on leur dit maintenant que ce n'est pas assurable. Je trouve que c'est honteux.
Madame la présidente, j'aimerais qu'il y ait un comité spécial simplement pour étudier l'admissibilité de ces gens-là à l'assurance-emploi, parce que le système est censé encourager les gens à aller travailler. Sinon, les gens vont décider qu'ils peuvent aussi bien travailler sous la table et se faire payer de l'argent en plus. C'est pour ça que cette question est importante, et je demande l'appui de mes collègues pour qu'on puisse l'étudier et essayer de faire des recommandations à la ministre. C'est urgent, non seulement pour le Nouveau-Brunswick, mais pour toutes les provinces de l'Atlantique, le Québec, la Colombie-Britannique, partout où il y a des emplois saisonniers, même dans le secteur de la construction. Les travailleurs du secteur de la construction ont le même problème si dans la dernière semaine de travail sur un chantier de construction, il leur reste seulement 20 heures de travail. Il faut considérer ces emplois-là, et c'est le comité qui devrait le faire. C'est pour ça que je propose la création d'un comité spécial pour étudier spécifiquement le problème de l'admissibilité au programme. Merci, madame la présidente.
º (1655)
[Traduction]
La présidente: D'accord.
Mmes Tremblay et St-Jacques, puis, je vous donnerai une minute pour conclure à titre de parrain de la motion.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Pour ma part, madame la présidente, je suis tout à fait d'accord pour reconnaître l'urgence de cette question. Cela m'apparaît extrêmement important, d'autant plus que, depuis le mois de janvier, je me suis rendu compte davantage que notre système actuel encourageait la fraude et ce, avec la complicité des employeurs et des employés.
C'est nous qui avons créé ce système et qui avons adopté la loi. À cause du fameux diviseur qu'on a mis en application--Eugène, tu me regardes avec de gros yeux--, quand on fait des petites semaines, on est floué par le système.
Donc, plutôt que de déclarer avoir fait des petites semaines, par exemple 20 heures ici, 10 heures là et 20 heures ailleurs, ce qui fait 50 heures, on déclare moins de semaines de travail. On déclare 10 semaines à 50 heures, au lieu de 13 semaines, soit 10 semaines à 50 heures, 2 semaines à 20 heures et une à 10 heures.
C'est nous qui les encourageons à commettre des fraudes, puis quand on leur envoie des enquêteurs et qu'ils sont pris en faute, on leur impose des amendes et des intérêts. Il faut qu'on en arrive à reconnaître que ce travail est, d'une certaine façon, une industrie saisonnière. Dans certains cas, ce ne sont pas les travailleurs qui sont saisonniers, mais le secteur d'activité. Certaines industries sont saisonnières, et on sait que ceux qui y travaillent ne peuvent pas le faire toute l'année. Il faut donc prévoir des mécanismes appropriés.
En outre, des études ont été réalisées; la ministre a mis sur pied quatre comités, entre autres au Québec. Le Bas-Saint-Laurent a produit son rapport au mois de décembre, et la ministre l'a entre les mains depuis lors. Elle m'a dit, la semaine dernière, qu'elle croyait pouvoir m'en parler cette semaine.
Il y a des recommandations dans ce document. Ainsi, mon collègue propose que le comité suspende ses travaux et s'occupe de cette question-- parce qu'elle est urgente--ou que l'on confie à un sous-comité la responsabilité d'étudier la question, de façon à ce que ce dernier éclaire le comité le plus rapidement possible à cet égard. Mais on ne peut pas tout faire en même temps. Pour cette raison, je trouve l'idée d'un sous-comité fort intéressante. Il s'agirait de se réunir en petit groupe et d'accomplir un travail pour le comité et de le lui soumettre ensuite. Cette question me semble d'une grande importance.
C'était le premier point que je voulais soulever, madame la présidente. J'aimerais aussi que vous m'apportiez des précisions, mais uniquement sur un autre sujet.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Solberg.
M. Monte Solberg: Je crois savoir que le gouvernement vient de confier à des députés ministériels la tâche d'étudier cette situation et, si cela se confirme, je crois que c'est une façon de procéder qui nuit à la crédibilité de notre comité. Nous avons pour tâche de surveiller, notamment, l'assurance-emploi. Or, créer un comité constitué exclusivement de députés ministériels, avec quelques travailleurs et pêcheurs dans ce cas-ci, je crois que cela va à l'encontre de la rectitude démocratique perçue par tous ici. Nous devrions exiger que des députés de l'opposition siègent à ces comités, et que ceux-ci soient en fait, des émanations du nôtre.
C'est tout ce que j'ai à dire sur la question. Je suis sûr que je ne m'entendrai pas avec Yvon sur les détails, mais il est ridicule, d'après moi, qu'aucun député de l'opposition ne siège à ce comité qui, je le répète, devrait être une émanation du nôtre.
» (1700)
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Merci, madame la présidente.
Je crois que la ministre reconnaît l'urgence de la situation. Pour cette raison, d'ailleurs, elle a créé le comité conjoint qui va se pencher sur les problèmes vécus par les travailleurs confrontés à du travail saisonnier.
Je siège au comité depuis deux ans et je suis d'accord avec vous pour dire qu'on fait ici un travail assez efficace. Mais je suis sceptique quant à l'idée de mettre sur pied un sous-comité. Au Sous-comité des enfants et des jeunes à risque et à celui de la condition des personnes handicapées, par exemple, beaucoup de gens sont absents du fait qu'ils sont, comme nous le sommes tous, très occupés. Plusieurs députés siègent à deux comités ou à des sous-comités. Par conséquent, je ne sais pas si on pourrait obtenir une participation adéquate pour étudier cette question.
J'aimerais rappeler à mon collègue d'Acadie--Bathurst qu'on a aussi le pouvoir d'étudier les lois du ministère du Développement des ressources humaines et qu'en créant un troisième sous-comité, on va diluer notre travail. Plusieurs députés qui siègent sont confrontés à la question du travail saisonnier. Il s'agit peut-être donc d'un sujet susceptible d'intéresser tout le monde.
Si la présidente et le comité sont d'accord, on pourrait considérer la possibilité d'accueillir des représentants du ministère du Développement des ressources humaines, qui se pencheraient sur ce problème au cours des prochaines semaines. Ils pourraient nous faire un compte rendu de la situation, et nous pourrions en retour étudier leurs recommandations.
Bref, je suis opposée à la motion de M. Godin. Il faudrait peut-être envisager une autre approche qui nous permettrait de ne pas diluer notre travail; en outre, nous pourrions continuer à travailler ici, ce qui serait à l'avantage de tous les députés.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Fontana.
M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): J'invoque le Règlement. Je crois que la secrétaire parlementaire soulève une question importante. Je ne mets nullement en doute l'urgence ou la gravité des questions que Yvon et Suzanne ont soulevées.
Puis-je poser une question? Je ne suis pas membre permanent du comité mais j'ai participé aux réformes de l'assurance-emploi et j'ai siégé au sein des groupes de travail des ministres lorsque nous avons adopté la nouvelle loi.
La loi prévoit déjà un mécanisme d'examen permettant au comité et à la ministre de suivre les effets de la loi et les changements que cela entraîne dans la vie des gens. Voilà la première chose. Je ne sais pas quand ce comité ou la ministre... qui, je crois, est tenue de déposer annuellement un rapport relativement à l'assurance-emploi.
Deuxièmement, je me demande si, dans le cadre de vos travaux futurs, comme la secrétaire parlementaire l'a dit, il ne serait pas plus opportun d'étudier cette question au sein du comité au complet. Je me demandais donc si le comité s'était penché sur la question de l'assurance-emploi et de ses conséquences, et avait envisagé toute la question de l'examen.
Peut-être qu'il serait superflu de mettre aux voix la question de cet examen, étant donné ce que le comité a déjà décidé de ses travaux futurs, et compte tenu de l'examen obligatoire prévu par la loi.
La présidente: Que je sache, la ministre est tenue de faire rapport annuellement. Nous n'avons pas reçu le rapport de 2002 mais nous l'attendons incessamment. Vous avez raison lorsque vous dites que nous devrions d'abord attendre ce rapport.
En ce qui concerne l'examen obligatoire prévu par la loi, je ne crois pas que nous soyons parvenus au point où l'examen est nécessaire.
M. Joe Fontana: Et à propos des travaux futurs du comité, avez-vous prévu que...
La présidente: Pas pour l'instant.
À présent, nous avons repris nos travaux depuis trois semaines environ et venons tout juste d'amorcer une étude assez approfondie sur l'alphabétisation en milieu de travail. Cela ne veut pas dire que notre comité n'aura pas l'occasion d'inviter des fonctionnaires à venir nous présenter une mise à jour sur la question.
En d'autres mots, le comité reste maître chez soi; s'il décide qu'il est important de faire venir un témoin, il peut manifestement le faire.
M. Joe Fontana: Eh bien, si je me fie à ce que la secrétaire parlementaire a dit, il me semble qu'il serait en effet judicieux d'inviter des fonctionnaires du ministère des Ressources humaines... et de s'attaquer à la question en comité, ce qui fait que la motion d'Yvon fait probablement double emploi. Les suggestions de la secrétaire parlementaire sont probablement plus solides et devraient être appuyées par Yvon, Suzanne et même Monte.
» (1705)
La présidente: Et maintenant, à titre de rappel au Règlement ou de question de privilège, c'était son intervention au nom de... et j'avais promis de vous laisser le mot de la fin sur cette question avant de la mettre aux voix.
[Français]
M. Yvon Godin: Madame la présidente, si le comité en entier voulait s'en occuper, ça me ferait le plus grand plaisir. C'est parce qu'il s'agit d'une question urgente que j'ai parlé d'un sous-comité. Mais si le comité en entier veut s'en occuper, il faut agir vite. Je veux expliquer le problème rapidement.
Les enquêteurs font leur enquête, et si les pêcheurs sont accusés d'avoir accumulé du temps, ils doivent remettre trois ans de leur assurance-emploi au gouvernement. En plus, ils ont des pénalités qui équivalent au double des montants qu'ils ont reçus. Ce sont des gens pauvres qui n'ont qu'un travail saisonnier et qui se retrouvent avec des dettes de 30 000 $. C'est ce qui arrive à ces familles-là.
C'est pour cette raison que c'est vraiment important, comme je vous le dis. Aller dans la région pour s'occuper simplement d'un petit groupe de personnes que l'on aura rassemblées, ce n'est pas correct, selon moi. On va régler le problème dans un coin de la province, puis on va avoir des problèmes ailleurs. Mais si on me suggère d'aller voir mes gens pour leur dire d'aller dans la rue s'ils veulent être écoutés... Je ne pense pas que c'est ça qu'on veut faire. Moi, c'est ça que je veux éviter. Si on ne s'en occupe pas... Ce n'est pas du chantage, c'est une promesse. Il y a un problème.
[Traduction]
La présidente: Très bien.
Madame St-Jacques, puis j'aurai quelques remarques.
[Français]
M. Yvon Godin: Excusez-moi, madame la présidente. Je ne pensais pas que vous m'aviez coupé la parole. Il y a un membre du comité qui veut faire le travail de la présidente ou quoi?
[Traduction]
La présidente: Je vous ai très bien entendue.
Aux fins de précision, le calendrier de nos réunions est fixé jusqu'au 20 février. J'hésite à inviter des témoins pour le 25 février, étant donné que c'est le dernier mardi de ce mois. Nous attendons un budget. Il y a des chances que le budget soit déposé ce jour-là... Je ne veux pas dire, au nom du ministre des Finances, que c'est ce jour-là qu'il déposera le budget, mais nous devons rester réalistes et ne pas trop nous engager.
Le premier mardi au retour de la pause du mois de mars, nous recevrons déjà la vérificatrice générale, qui vient nous entretenir au sujet des réserves de la caisse d'assurance-emploi.
Au chapitre des travaux futurs, je vous propose de tenir une réunion du comité directeur au début de la semaine prochaine. Nous pourrions inscrire ce point à l'ordre du jour du comité directeur et voir s'il est possible d'accéder à votre demande visant à inviter les fonctionnaires à venir témoigner.
Je voulais que tout cela soit dit avant de voter sur votre motion, mais je ne peux vous promettre d'inscrire ça à notre calendrier des deux prochaines semaines.
Madame St-Jacques.
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Madame la présidente, on ne peut pas recevoir tout de suite les délégués du ministère parce qu'il faut tout de même qu'ils fassent l'étude. Ils s'apprêtent à la commencer. On ne peut pas les recevoir au cours des prochaines semaines parce que ce serait trop tôt. Si on veut avoir un compte rendu, il faut leur laisser le temps de faire leur étude.
Je reviens à ce que le député d'Acadie--Bathurst disait. Je pense que le compte rendu va toucher non pas un petit groupe de gens, mais l'ensemble des gens qui vivent des problèmes de travail saisonnier. La problématique existe un peu partout, que ce soit dans le secteur des pêches ou dans un autre secteur. Comme vous l'avez dit vous-même, il y a aussi les gens qui s'occupent des décorations de Noël, par exemple. Donc, ce n'est pas un problème particulier à un groupe minuscule; cela va s'étendre à tous les gens qui vivent ce problème.
La présidente: Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Mais on ne sait pas qui siège au comité.
Mme Suzanne Tremblay: Et on ne sait pas quel mandat il a.
M. Yvon Godin: Non, on ne sait pas quel mandat il a.
[Traduction]
La présidente: Je mets la question aux voix.
(La motion est rejetée [Voir le Procès-verbal])
La présidente: Monsieur Godin, je m'engage auprès de vous à convoquer une réunion du comité directeur au début de la semaine prochaine et d'inscrire cette question comme point principal à l'ordre du jour. Le comité directeur doit donc essayer de trouver un créneau pour recevoir les fonctionnaires et discuter de ce sujet. Cela vous convient-il?
Oui, Suzanne.
» (1710)
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Madame la présidente, je suis un peu mal à l'aise. C'est peut-être la façon habituelle de fonctionner de votre comité, mais cela me met mal à l'aise. J'aimerais savoir exactement quelle sorte d'étude on doit faire ici, au comité. On semble être en train d'étudier l'analphabétisme, mais quel est notre mandat, quel est notre objectif, où allons-nous et sous quel angle regardons-nous cela? Il faut avoir une espèce de cadre de travail. Si on reçoit des gens et qu'on ne sait trop pourquoi on les reçoit et sous quel angle on doit regarder le problème... J'ai l'impression qu'on peut recevoir des groupes à longueur d'année, mais qu'on ne saura pas au juste ce qu'on fait comme travail. Qu'est-ce qu'on doit faire au juste? Quel est notre mandat?
[Traduction]
La présidente: C'est une question très importante que vous posez. Nous avons demandé à la ministre de se pencher sur la question de l'alphabétisation en milieu de travail. Nous étions d'avis qu'il était nécessaire de procéder à un survol de la question avant de décider s'il était opportun de faire une étude en profondeur. Ce que nous avons prévu pour la réunion d'aujourd'hui et les deux réunions suivantes, c'est de tenter d'obtenir une idée au sujet des intervenants et des problèmes.
Ce que je compte faire et ce que j'espère, après en avoir parlé aux autres membres du comité, c'est que le comité siège ensuite et décide s'il convient ou non de procéder à une étude approfondie, en établissant les paramètres précis d'une telle étude. Mais pour l'instant, nous ne faisons qu'examiner la question pour obtenir une vue d'ensemble.
Pour un sujet comme l'alphabétisation, il est très difficile de déterminer une orientation sans connaître le contexte. A en juger d'après la séance d'aujourd'hui, avec les trois témoins que nous avons reçus, vous pouvez voir, je crois, que tout le monde jette un regard différent sur la question. Nous constatons que le problème est peut-être beaucoup plus grave que nous ne le croyions au départ.
Vous avez raison. Il nous faut une orientation, mais il nous faut d'abord un contexte de base, avant de procéder. Voilà donc mon intention... D'abord, nous tiendrons deux autres réunions, une cette semaine et l'autre, la semaine prochaine. Ensuite, nous pourrons nous réunir et décider si la question mérite une étude approfondie. Le cas échéant, nous déciderons alors d'une orientation précise.
D'accord?
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: J'ai été assez chanceuse depuis que je suis à la Chambre des communes. J'ai participé à des comités qui ont eu des mandats clairs, et le travail qu'on a fait a donné quelque chose. J'ai pris connaissance de ce qui s'est passé à votre comité, car je n'étais pas là. Les députés ont adopté 17 recommandations à l'unanimité, mais aucune d'elles n'a été retenue par le ministère. Je ne suis pas du genre à travailler pour rien. Si je siège à un comité, que c'est flou, que je ne sais pas ce que je dois faire et que cela ne donne rien, je vais commencer à m'absenter. Je ne m'absentais pas des réunions des autres comités auxquels j'ai siégé. J'ai travaillé très, très fort aux autres comités, mais je n'aime pas travailler pour rien. C'est pour ça que j'aimerais savoir... J'ai maintenant compris la démarche, mais il faudrait que ça aboutisse à quelque chose. Ce doit être assez décevant de voir qu'un rapport qu'on a adopté à l'unanimité ne donne rien. C'est un peu décevant.
[Traduction]
La présidente: Mais je crois que nous pouvons aussi voir les choses d'un autre oeil. Vous avez constaté que notre comité avait travaillé à l'unisson pour rédiger un rapport vigoureux. Nos efforts étaient donc ciblés et on produit un rapport unanime.
Je peux vous assurer, madame Tremblay, si vous êtes déçue en tant que membre de l'opposition, de voir que les recommandations n'aient pas été adoptées, que les députés ministériels, qui ont aussi appuyé cette décision unanime, sont tout aussi irrités. C'est pourquoi notre comité, qui a montré sa capacité de collaborer et d'adopter à l'unanimité d'excellents rapports, doit procéder de cette manière.
Je suis trop occupée pour travailler inutilement, tout comme vous.
Bien. Je vous remercie.
La séance est levée.