HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 3 novembre 2003
¹ | 1535 |
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)) |
Mme Judith Maxwell (présidente, Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques) |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
La présidente |
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne) |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
¹ | 1555 |
La présidente |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
º | 1600 |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
Mme Judith Maxwell |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Judith Maxwell |
º | 1605 |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Judith Maxwell |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Judith Maxwell |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Judith Maxwell |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Judith Maxwell |
Mme Diane St-Jacques |
Mme Judith Maxwell |
º | 1610 |
Mme Diane St-Jacques |
La présidente |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
º | 1615 |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
º | 1620 |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
La présidente |
M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.) |
º | 1625 |
Mme Judith Maxwell |
M. Larry McCormick |
º | 1630 |
Mme Judith Maxwell |
M. Larry McCormick |
La présidente |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
º | 1635 |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
La présidente |
M. Brian Pallister |
La présidente |
M. Brian Pallister |
La présidente |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
La présidente |
º | 1640 |
M. Brian Pallister |
La présidente |
M. Brian Pallister |
La présidente |
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.) |
Mme Judith Maxwell |
º | 1645 |
M. Eugène Bellemare |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Brian Pallister |
Mme Judith Maxwell |
M. Eugène Bellemare |
La présidente |
M. Eugène Bellemare |
La présidente |
M. Eugène Bellemare |
La présidente |
º | 1650 |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
º | 1655 |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
Mme Judith Maxwell |
La présidente |
CANADA
Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 3 novembre 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1535)
[Traduction]
La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)): Mesdames, messieurs, bonjour. Bienvenue à la 44e séance du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous reprenons notre étude sur l'amélioration de la conciliation travail-vie personnelle dans les secteurs relevant de la compétence fédérale.
Nous avons la chance d'accueillir Judith Maxwell, présidente des Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques.
Bienvenue, madame Maxwell et veuillez pardonner notre retard. Nous sommes très impatients d'entendre ce que vous avez à nous dire aujourd'hui.
Mme Judith Maxwell (présidente, Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques): Vous pourriez peut-être me mettre sur la bonne voie, madame la présidente. Vous avez le texte de mon court exposé, qui a été distribué à l'avance. Je pourrais limiter mes commentaires à cinq minutes et vous laisser regarder à loisir les autres parties, ou je pourrais essayer de lire tout le texte, selon la préférence des députés.
La présidente: Normalement, nous allouons au témoin entre 10 et 15 minutes pour présenter son exposé, puis nous passons aux questions.
Mme Judith Maxwell: Très bien. Merci beaucoup.
[Français]
Il me fait plaisir d'assister à votre séance d'aujourd'hui. Je ferai mes remarques en anglais, mais je pourrai répondre aux questions en français si vous le préférez.
[Traduction]
J'aimerais commencer mon exposé en signalant que la conciliation travail-vie personnelle est un enjeu de société. Elle a des répercussions sur tous les aspects de notre vie; elle influence la santé de la population, la décision des familles d'avoir des enfants, la capacité des individus de participer à la vie communautaire et, bien sûr—ce n'est pas négligeable—elle influence la productivité au travail, les résultats des employeurs.
Bien que nous ayons beaucoup parlé de la conciliation travail-vie personnelle depuis 15 ans et que certaines politiques publiques et pratiques d'employeurs aient beaucoup évolué, cet enjeu est en voie de devenir un problème tentaculaire.
Linda Duxbury et Chris Higgins ont fait une étude sommaire pour nous. Je sais que Linda a témoigné devant ce comité la semaine dernière. Les deux chercheurs ont établi que 60 p. 100 des hommes et des femmes déclarent que les pressions venant de leur vie professionnelle et personnelle sont excessives. Ce taux était de 47 p. 100 au début des années 90.
Nous en parlons, mais nous n'avons pas assez fait pour inverser la tendance, et nous n'avons certainement pas réussi à réduire les pressions associées au surcroît de travail.
Fondamentalement, je crois que le problème vient du fait que nous nous sentons encore ambivalents à l'égard de la conciliation travail-vie personnelle. Nous en sommes venus à croire que tous les adultes devraient travailler, peu importe leurs responsabilités familiales. En fait, si vous examinez l'évolution récente des règlements touchant les programmes sociaux, ils ont réduit l'âge limite des enfants auquel on s'attend à ce que leur mère retourne au travail. Auparavant, c'était 18 mois. Maintenant, il y a des provinces où on s'attend à ce que la mère retourne au travail quand l'enfant a atteint 6 mois.
Bien que nous estimions que tous les adultes doivent travailler, nous insistons toujours sur le fait que les familles doivent s'occuper de leurs enfants, de leurs aînés et des autres personnes à charge, de la vie communautaire, etc. Ainsi, ce que les gens recherchent est une contradiction totale—tout le monde devrait travailler, et chaque parent, ou quiconque ayant des responsabilités familiales, devrait s'acquitter de ces responsabilités. Mais ces deux objectifs sont incompatibles. Ils sont en totale contradiction.
Cette contradiction impose déjà un fardeau que je qualifierais d'inacceptable aux familles canadiennes qui travaillent, qu'elles aient à s'occuper d'enfants ou d'aînés. Nous devons comprendre que cette contradiction devient encore plus intenable avec le vieillissement des baby-boomers, et nous ne pourrons plus tarder encore longtemps à résoudre ce problème sans risquer de le voir devenir endémique.
Pourquoi y a-t-il plus de stress dans la vie des gens? Les gens travaillent de longues heures, et leur travail est plus intense. Le travail les assaille de toutes parts—le courriel, le télécopieur, les réunions au bureau, les appels téléphoniques, etc.
De plus en plus de gens sont capables d'emmener leur travail à la maison, parce que tout ce qu'ils ont à faire, c'est d'emporter leur ordinateur portatif, qu'ils ont une connexion de RPV à la maison, ce qui signifie qu'ils peuvent prendre leurs messages de courriel à 2 heures du matin, si le cœur leur en dit. Et je dois vous dire qu'il y a des gens qui le font. Vous l'avez probablement fait vous-même.
De plus, à cause du mode d'expansion des villes et de l'urbanisation de la population, les allez-retour au travail sont plus longs. Quand j'étais enfant, dans les années 50, beaucoup de gens allaient manger à la maison le midi, et maintenant, ils ont deux heures de voiture à faire matin et soir. C'est du temps, outre les heures de travail, que l'on consacrait auparavant à d'autres activités.
Bien sûr, puisque les adultes de la plupart des ménages travaillent, il n'y a personne à la maison pour préparer le souper, faire les courses, s'occuper des questions domestiques, ou donner des soins aux membres de la famille. Par ailleurs, depuis 15 ans, il y a eu une réduction du soutien que les employeurs avaient coutume d'offrir par leur manière d'organiser le travail, ou dans la façon dont les services publics répondaient aux besoins des gens. Ainsi, en ce qui a trait au système de soins de santé actuel, il y a beaucoup plus de soins ambulatoires et les gens quittent l'hôpital bien plus tôt qu'ils ne le faisaient auparavant.
Les répercussions du stress sont devenues très évidentes au travail. En fait, je pense que la majorité des réclamations à des régimes supplémentaires d'assurance-maladie ou d'assurance-invalidité sont attribuables à des blessures associées au stress et non au type de blessures physiques qui étaient courantes à l'ère industrielle, quand le travail était en grande partie manuel. Maintenant, nous avons des problèmes de tunnel carpien, de maux de tête, de maux de dos, et beaucoup d'autres malaises que les médecins associent au stress.
Il s'ensuit que les employeurs doivent payer davantage pour offrir une assurance-maladie supplémentaire. Nous constatons une hausse phénoménale de la consommation de médicaments en vente libre pour soulager la douleur, l'angoisse, etc. Nous voyons aussi des taux assez élevés d'insatisfaction au travail dans beaucoup d'endroits. Quand il y a insatisfaction au travail, quand il y a un degré élevé de stress au travail, alors on voit augmenter les coûts liés à l'absentéisme, le roulement du personnel, les gens qui cherchent un autre emploi ou qui souhaitent former un syndicat parce qu'ils veulent trouver un moyen de réduire leur stress. Tous ces coûts sont associés à l'exploitation d'une entreprise.
Nous avons donc des gens qui ne donnent pas leur plein rendement au travail, parce qu'ils sont stressés, parce qu'ils ne sont même pas là ou qu'ils doivent payer pour se faire soigner.
Par ailleurs, il y a évidemment des mesures que l'employeur peut prendre pour réduire ces coûts. Les études que nous avons effectuées sur les relations de travail, ou sur ce que nous appelons « la qualité de l'emploi », montrent certaines corrélations avec l'absentéisme et le roulement. La septième diapositive illustre les écarts dans le moral au travail ou le nombre de personnes qui ont cherché un emploi au cours de la dernière année. Là où les relations de travail sont déficientes, 39 p. 100 des gens disent qu'ils ont cherché un autre emploi au cours de la dernière année. Ce taux est inférieur à 20 p. 100 chez les gens qui ont de bonnes relations de travail.
Comment définir de bonnes relations de travail? Elles se caractérisent par une bonne communication, de la confiance et un engagement de la part de l'employeur et de l'employé. Plus précisément, elles se correspondent à un milieu de travail sain et solidaire, à un emploi intéressant, au fait de recevoir la formation nécessaire et de disposer des outils nécessaires pour faire le travail, à la sécurité d'emploi et à une rémunération juste. Toutefois, il est intéressant de constater que les questions subjectives entourant la qualité des relations de travail sont toujours jugées plus importantes que la rémunération et la sécurité d'emploi. Je ne dis pas que les gens sont prêts à travailler pour moins, mais ce qui les attire vers un milieu de travail, ce sont ces caractéristiques qualitatives.
¹ (1540)
Que font les employeurs à ce sujet? Certains s'efforcent d'être des employeurs de choix. Les banques essaient d'en faire une caractéristique de leur milieu de travail, et elles sont un exemple. Toutefois, en général, ce sont les très gros employeurs qui prennent cet engagement. Ils donnent aux gens un contexte de travail plus prévisible, plus de latitude quant au rythme du travail, etc.
En outre, si un employeur est vraiment engagé envers la conciliation travail-vie personnelle et un milieu de travail solidaire, il examinera le rendement de chaque gestionnaire, de toutes les personnes qui ont des responsabilités de supervision, en fonction de leurs capacité démontrée d'appuyer leurs employés. Autrement dit, non seulement le directeur général et le service des ressources humaines ont la mission de rendre le milieu de travail solidaire, mais cette mission trouve des échos à l'échelon de la supervision.
La situation est très difficile pour les employeurs qui doivent réduire de beaucoup leur effectif pour réorganiser leur entreprise, si les emplois sont réduits ou modifiés, et si les tâches des employés sont constamment remaniées. Il est très difficile de maintenir la solidarité dans un milieu de travail quand beaucoup d'éléments sont imprévisibles, mal communiqués et, en général, coûteux pour les employés.
L'autre question à laquelle je sais que le comité s'intéresse, c'est ce que les gouvernements peuvent faire. Les gouvernements peuvent donner l'exemple. Ils peuvent être des employeurs de choix. Le gouvernement fédéral est un très gros employeur, et on peut constater en examinant les sondages auprès des fonctionnaires, entre autres, que les milieux de travail sont très différents. Certains sont excellents et certains autres sont très déficients du côté des éléments associés à la qualité de l'emploi. Il y a donc beaucoup plus à faire à ce chapitre.
De plus, les gouvernements doivent établir des normes d'emploi qui servent de modèle, par le truchement du Code canadien du travail et, comme je le décrirai dans un moment, par des politiques sociales. La capacité de concilier le travail et la vie personnelle peut dépendre des congés pour raisons familiales, des congés parentaux ou des congés de compassion, des limites ou des contraintes relatives aux heures supplémentaires, et de l'octroi, aux employés à temps partiel, d'avantages sociaux proportionnels. Souvent, le travail à temps partiel est le moyen pour le deuxième travailleur de la famille de concilier travail et vie personnelle. Les gouvernements pourraient aussi chercher à démontrer plus activement les avantages, du point de vue du rendement, d'appliquer des politiques éclairées en matière de conciliation travail-vie personnelle, en répertoriant les coûts et les pratiques exemplaires.
Sur le plan des politiques sociales, il importe de veiller à ce que des systèmes de services sociaux, qu'il s'agisse de services aux enfants ou aux aînés, soient en place. Le Canada a une piètre feuille de route à ce chapitre. Nous n'appuyons pas l'éducation de la petite enfance comme nous le devrions. Nous n'appuyons pas les parents qui choisissent de rester à la maison et de dispenser eux-mêmes les soins. Nous avons un système de soins aux personnes âgées qui est calqué sur le modèle médical. Les gens n'obtiennent l'aide du gouvernement que quand ils sont trop malades pour s'occuper d'eux-mêmes ou quand les soignants de la famille sont épuisés, plutôt que d'obtenir une aide graduelle qui permet à la famille de prodiguer les soins dans la dignité et avec efficacité.
Il y a donc des mesures que le gouvernement peut prendre, et il y en a que les employeurs peuvent prendre.
Je vais conclure en disant qu'il s'agit aussi d'un enjeu individuel. Je crois que nous devons, en tant qu'individus, décider dans quelle mesure nous voulons travailler, et comment nous allons concilier notre travail et notre vie personnelle. Parfois, cela entraîne des sacrifices économiques à court terme.
¹ (1545)
Je pense que la société, par le truchement de programmes gouvernementaux, peut atténuer ce coût économique. À l'heure actuelle, nous en laissons trop sur les épaules des travailleurs, mais nous devons nous rendre compte que les familles peuvent aussi faire des choix pour régler ce problème.
En résumé, la conciliation travail-vie personnelle a d'énormes répercussions sur chacun d'entre nous. Dans une société du savoir vieillissante, il faut que tous les travailleurs soient aussi efficaces que possible dans leur vie professionnelle, et nous n'y arriverons que quand nous aurons déchargé la population en âge de travailler en répartissant son fardeau.
Merci beaucoup de votre attention, madame la présidente; je serai heureuse de répondre aux questions.
¹ (1550)
La présidente: Merci.
Nous allons entamer la discussion avec M. Pallister; vous avez 10 minutes.
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Merci beaucoup.
Merci pour votre exposé. C'était très intéressant.
Vous avez parlé de surcharger la population active. Comme les membres de ce comité le savent, j'estime que l'une des façons dont nous surchargeons la population active c'est en lui faisant payer des primes d'assurance-emploi trop élevées. Nous enlevons des centaines, ou même des milliers de dollars aux familles canadiennes qui travaillent, sans justification, à cause de ces primes excessives.
Votre organisme s'intéresse-t-il à cette question et, le cas échéant, quelle est votre opinion sur les primes d'assurance-emploi trop élevées?
Mme Judith Maxwell: Je pense que le problème des primes d'assurance-emploi vient du fait que les travailleurs n'en ont pas assez pour leur argent. Mais si vous comparez le Canada aux autres pays industrialisés, vous constaterez que nos charges sociales sont assez modestes.
Je ne considère donc pas qu'il s'agit d'une question de niveau de taxation. À mon avis, le problème vient du fait que nous exploitons beaucoup de travailleurs qui doivent payer sans qu'on leur accorde des prestations. Évidemment, les employeurs paient des primes semblables. Il y a des industries qui bénéficient de l'assurance-emploi parce que leurs périodes de travail sont saisonnières ou épisodiques, et elles savent pouvoir compter sur l'assurance-emploi pour indemniser les travailleurs jusqu'à ce qu'elles en aient de nouveau besoin. C'est là une perspective très traditionnelle des rapports entre l'employeur et l'employé.
M. Brian Pallister: Oui. Un groupe de travail de l'OCDE vient de terminer un rapport qui traite de la manière dont notre taux de chômage structurel est gonflé parce que ce volet de l'assurance-emploi est très mal conçu.
Mme Judith Maxwell: C'est exact. Alors, je ne me plaindrais pas tant du niveau de taxation que de la façon dont les recettes sont employées et des types d'incitatifs qui sont intégrés au programme.
M. Brian Pallister: Vous me pardonnerez si je me plains des deux.
Je trouve toujours très intéressant que nous parlions du stress qui sévit maintenant en milieu de travail. Quand les Canadiens faisaient les foins, pelletaient du grain ou transportaient de la fonte, ils subissaient moins de stress que nous et, pourtant, nous passons le plus clair de notre temps assis ici.
Ma connaissance en la matière n'est qu'anecdotique, mais dans certaines sociétés, on met davantage l'accent sur l'activité physique, en laissant un peu de temps aux gens pour qu'ils puissent revigorer leur corps de manière à stimuler leur esprit et leur rendement. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
Mme Judith Maxwell: Je pense qu'il existe de bons travaux de recherche qui démontrent que la santé physique va de pair avec la santé mentale. Si vous regardez du côté des employeurs qui ont des pratiques exemplaires, il est plus que probable qu'ils aient des installations de conditionnement physique sur place— dans le cas des grandes entreprises—ou qu'ils encouragent leurs employés à devenir membres d'un centre de conditionnement physique ou à y avoir accès. Dans les grandes villes, c'est peut-être...
Il me semble qu'il incombe aux employeurs d'encourager cela. Dans les villes plus petites, où les gens peuvent encore se rendre au travail à pied ou à bicyclette en toute sécurité, cette question n'a peut-être pas autant d'importance, mais il ne fait aucun doute que le conseil donné aux gens qui subissent un stress intense est de s'accorder un répit mental et d'aller faire de l'exercice.
Nos grands-mères diraient que c'est du gros bon sens, mais je crois qu'on a aussi démontré que c'est une bonne pratique.
M. Brian Pallister: Si je m'en remets à ma propre expérience dans la petite entreprise, les déplacements dans Portage la Prairie, pour ceux qui habitent dans la ville, prennent cinq minutes tout au plus. Nous sommes privilégiés d'avoir un accès rapide à notre lieu de travail. Toutefois, au Manitoba, il est très rare que les gens aillent travailler à pied en hiver, et je connais quelques entreprises qui ont instauré... En fait, dans ma petite entreprise, nous avons installé une salle de conditionnement physique et nous encourageons les gens des environs à l'utiliser. Il me semble, dans une société où l'obésité chez les enfants atteint une ampleur endémique, que les adultes devraient montrer l'exemple.
Vous avez cité une étude faite par...
Pardonnez-moi, j'ai oublié le nom de la dame.
¹ (1555)
La présidente: Linda Duxbury.
M. Brian Pallister: Oui.
Elle a mentionné qu'elle avait interrogé 30 000 personnes, mais que les répondants étaient tous dans de grandes entreprises, et non des petites et moyennes entreprises, qui sont en bien plus grand nombre dans notre pays. Je suis toujours intéressé à savoir quelle différence nos témoins relèvent dans les petites entreprises. Évidemment, je sais qu'il y a de larges écarts, étant donné le nombre, mais y a-t-il des exemples de pratiques novatrices que vous aimeriez souligner dans les petites et moyennes entreprises?
Mme Judith Maxwell: Je pense que vous avez raison de dire que les pratiques sont très bonnes ou très mauvaises. En moyenne, plus d'employés des petites entreprises estiment que leur lieu de travail est sain. En général, les gens sont plus à l'aise de travailler dans un lieu où il y a, disons, moins de 20 employés plutôt qu'au moins 100 ou 200.
M. Brian Pallister: À quoi attribuez-vous cela?
Mme Judith Maxwell: Eh bien, je pense que tout le monde connaît tout le monde, et l'une des qualités vraiment importantes est celle des rapports sociaux et du soutien social—vous savez, la sympathie manifestée quand un enfant est malade, ou se faire dire : « Prenez donc l'après-midi; votre enfant a besoin de vous. » Ce genre de chose peut augmenter considérablement le sentiment d'être soutenu—le fait de pouvoir changer ses habitudes pendant une journée ou quelques heures, afin de s'occuper de responsabilités familiales.
Par contre, il arrive que les gens soient coincés dans un milieu de travail où le patron est un tyran, ou encore que le voisin de bureau soit insupportable, par exemple. Les petites entreprises peuvent aussi imposer un milieu de travail éprouvant.
M. Brian Pallister: Il y a de cela à la Chambre des communes.
Mme Judith Maxwell: Je ne pourrais pas me prononcer sur la Chambre des communes.
La présidente: Et il ne saurait en être question à ce comité, monsieur Pallister.
M. Brian Pallister: Non, non, bien sûr que non. C'est merveilleux ici.
Je suis un néophyte quand il s'agit de ces choses, mais je sais qu'une grande majorité de PME du pays ne sont pas syndiquées, et que les gestionnaires ont plus de latitude pour accorder aux employés une souplesse qui ne serait pas de mise dans un milieu de travail plus rigide. Est-ce juste?
Mme Judith Maxwell: Il y a de la place pour plus de latitude, c'est vrai. Les gens peuvent mieux se connaître les uns les autres. Il n'y a pas autant de paliers hiérarchiques entre le patron et les employés, et souvent, le travail est plus varié parce que les gens sont censés effectuer diverses tâches.
D'un autre côté, je ne veux pas oublier les petites entreprises qui exploitent leurs employés. Si vous pensez à toutes les petites entreprises qui comptent sur des employés temporaires ou contractuels, et des quarts de travail imprévisibles, et qui n'offrent pas d'avantages sociaux... La majorité des petites et moyennes entreprises n'offrent pas de régime supplémentaire de soins de santé, de retraite ou autre, qui sont aussi des éléments importants de la qualité de la vie. En général, elles n'offrent pas de formation et elles sont lentes à adopter la nouvelle technologie.
Il existe de nombreux moyens d'encourager les petites et moyennes entreprises à collaborer dans certains domaines, à la mise sur pied d'un centre de conditionnement physique de quartier, par exemple, et à répartir un risque parmi une population plus vaste de manière à pouvoir offrir un régime collectif de soins de santé, pas seulement aux cinq ou dix travailleurs de l'entreprise, mais à un groupe plus vaste. Ce sont des mesures que les employeurs peuvent prendre pour rehausser considérablement la qualité du travail.
º (1600)
M. Brian Pallister: Oui.
J'ai récemment entendu que, compte tenu de la pénurie imminente de main-d'œuvre spécialisée, ces éléments seront de toute façon intégrés aux négociations collectives. En l'occurrence, les syndicats auront l'avantage, et beaucoup de ces facteurs seront inclus dans les négociations collectives, ou intégrés par le jeu des lois du marché.
Dans quelle mesure croyez-vous que la pression supplémentaire qui sera exercée sur les employeurs au cours des quelques prochaines années les obligera à tenir compte de la conciliation travail-vie personnelle, ou à trouver de meilleures solutions que celles qui existent déjà?
Mme Judith Maxwell: Dans l'ensemble, elle fera probablement pencher la balance du côté des employés, mais le pouvoir de négociation des travailleurs non spécialisés, des gens qui se trouvent au bas de l'échelle, si je puis me permettre cette expression, évoluera beaucoup plus lentement dans cette direction. Au Canada, il y a beaucoup de travailleurs qui n'ont aucun pouvoir. Qu'ils soient syndiqués ou non, ils travaillent dans des milieux qui sont inflexibles et non solidaires. C'est le travailleur qui finit par payer le prix, ainsi que l'employeur, qui obtient probablement une bien moins bonne productivité que s'il adoptait d'autres pratiques.
La présidente: Nous vous reviendrons plus tard, monsieur Pallister.
Madame St-Jacques.
[Français]
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Merci, madame la présidente.
Bonjour, madame Maxwell. Selon vous, quels changements organisationnels devrait-on envisager pour améliorer la qualité de vie personnelle et professionnelle? Quels sont les premiers éléments que nous devrions examiner?
Mme Judith Maxwell: Il s'agit surtout de la communication, je pense, afin que les gens aient toute l'information nécessaire pour comprendre ce qui arrive dans leur milieu de travail et pour prendre les meilleures décisions dans le cours normal de leur travail.
Ensuite, il y a la question de la flexibilité du temps de travail pendant la journée et pendant la semaine. Il serait bon que les gens puissent arriver un peu plus tard le matin et travailler un peu plus tard l'après-midi. Ils devraient avoir la flexibilité nécessaire pour bouger ou comprimer leurs heures de travail. Ainsi, un parent pourrait répondre aux besoins de sa famille.
Les travailleurs doivent également avoir de la stabilité afin qu'ils puissent prévoir, d'une semaine à l'autre, combien d'heures ils devront travailler et combien d'heures ils pourront consacrer à leurs autres responsabilités.
Mme Diane St-Jacques: En ce qui a trait à la flexibilité, Mme Linda Duxbury disait la semaine dernière qu'on devrait ajouter cinq jours de congé personnel aux congés qui sont déjà prévus dans le Code canadien du travail. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus et j'aimerais aussi savoir si vous pensez qu'on prévoit suffisamment de congés annuels dans le Code canadien du travail.
Mme Judith Maxwell: Je pense que pour la plupart des travailleurs, il y a assez de congés en général, mais il n'y a pas assez de flexibilité. Si un enfant est malade ou si une personne âgée a un accident, il faut absolument que quelqu'un soit là pour répondre à ses besoins et le soigner. Il ne faudrait pas que quelqu'un perde une partie de son salaire chaque fois qu'il s'absente du travail pour cette raison, ce qui arrive souvent dans le milieu de travail des gens à revenu modeste.
º (1605)
Mme Diane St-Jacques: Mais Mme Duxbury parlait de cinq jours qui appartiendraient au travailleur ou à la travailleuse. On les prendrait quand on le voudrait, que ce soit pour aider quelqu'un qui est malade ou pour avoir du temps pour soi. Seriez-vous favorable à ce que nous examinions cette possibilité?
Mme Judith Maxwell: Oui. Pour moi, ce serait vraiment un bon départ, et on pourrait, au bout de quelques années, voir si cinq jours suffisent. Pour débuter, l'idée est excellente.
Mme Diane St-Jacques: Vous parliez des gens malades tout à l'heure. Le congé de compassion entrera en vigueur en janvier 2004. Six semaines seront accordées aux gens qui auront un enfant ou un conjoint malade. Croyez-vous que c'est suffisant? Est-ce qu'on pourrait envisager de prolonger ce congé? Que pensez-vous de ce congé?
Mme Judith Maxwell: Encore une fois, c'est un bon départ. Pour moi, ce serait vraiment avantageux pour les gens qui doivent faire face à une situation urgente comme celle-là. Mais il y a toutes sortes d'autres situations qui surviennent, auxquelles ne conviennent pas les limites qui sont suggérées pour...
[Traduction]
Je vais passer à l'anglais.
Il y a beaucoup de situations qui ne correspondent pas aux circonstances auxquelles ce congé est destiné. Cependant, quand on accorde un avantage à la société, il faut établir des limites, de telle sorte que je ne peux pas vraiment critiquer cela. Mais je pense que nous devrons formuler une définition à long terme du congé de compassion, ou une façon d'aborder les écarts d'assiduité au travail de la part d'individus—une définition beaucoup plus souple, qui tient compte des circonstances particulières.
Je pense qu'il sera également important pour l'employeur et pour l'État de contribuer à payer ces coûts.
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Toujours en ce qui a trait au congé de compassion et aux congés spéciaux, on sait que les travailleurs autonomes n'ont pas droit à l'assurance-emploi. Nous nous sommes donné le mandat d'examiner cette possibilité pour eux parce qu'ils vivent souvent les mêmes situations. Pensez-vous qu'on devrait avoir une collaboration volontaire des travailleurs autonomes pour les congés spéciaux comme le congé de maternité, le congé parental et le congé de compassion?
Mme Judith Maxwell: Pour moi, une année, c'est excellent pour le moment. Ce qui me dérange un peu, c'est qu'il y a beaucoup de familles qui n'y ont pas accès à cause du fait que le congé est disponible seulement pour les gens qui ont accès à l'assurance-emploi.
Mme Diane St-Jacques: Mais comment pourrait-on intégrer les travailleurs autonomes? C'est toujours la question que je me pose. Est-ce que ce serait d'une façon aléatoire? On ne peut pas le leur imposer, parce qu'ils seraient tenus de payer la part de l'employeur et celle de l'employé.
Mme Judith Maxwell: Oui. Vous pourrez voir dans les études de Statistique Canada et surtout dans le document de Katherine Marshall que les femmes qui contribuent à l'assurance-emploi restent à la maison avec leur bébé pendant un an, alors que les femmes qui n'y ont pas accès retournent au travail très vite, après un mois ou deux, ce qui est trop tôt et pour la femme et pour le bébé.
Mme Diane St-Jacques: Ma dernière question portera sur une phrase de votre énoncé. Vous dites que les gouvernements devraient « permettre aux familles de gérer les soins, mais ne pas les forcer à les donner ». Sentez-vous que les gouvernements tentent maintenant de forcer les familles à donner les soins? Dans le fond, c'est encore laissé au choix de chacun.
Mme Judith Maxwell: Il faut que la famille qui...
º (1610)
Mme Diane St-Jacques: Merci, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Pallister, vous avez cinq minutes cette fois-ci.
M. Brian Pallister: Très bien.
À l'origine, il était prévu—je simplifie probablement—que l'employeur payait 1,4 fois plus, parce qu'il avait un plus grand pouvoir décisionnel sur les mises à pied. Mais la plupart des employeurs n'ont pas leur mot à dire sur le moment où une femme devient enceinte.
Et bien, je suppose qu'ils ont autant de pouvoir que n'importe qui d'autre, mais pas sur leurs employés en particulier; c'est ce que je veux dire.
Depuis dix ans, nous avons accumulé 45 milliards de dollars en primes excédentaires qui n'ont pas servi au fonds d'assurance-emploi, et environ 60 p. 100 de cette somme vient des employeurs—je ne connais pas le pourcentage exact. Nous allons maintenant ajouter d'autres prestations qui, peu importe dans quelle mesure elles sont justifiables, ne sont pas vraiment des prestations versées à la suite d'une décision prise par un employeur.
Comment justifions-nous de continuer d'appliquer ce taux de 1,4 quand une bonne partie de l'argent—l'actuaire en chef dit que c'est environ 30 p. 100—ne va même pas à l'assurance-emploi et quand les décisions à l'origine du versement des prestations ne sont même pas prises par l'employeur?
Mme Judith Maxwell: Comme je le disais à Mme St-Jacques, j'estime que l'assurance-emploi n'est pas le bon véhicule pour gérer les congés parentaux. C'était efficace à court terme, parce que nous avons pu les mettre en œuvre rapidement et employer le système existant pour percevoir les primes et payer les prestations. On peut comprendre que c'est tentant. Le problème, c'est que cette assurance ne couvre pas toutes les personnes qui pourraient en avoir besoin, et qu'elle contient des injustices inhérentes pour les cotisants.
Bien sûr, je crois que les employeurs devraient contribuer. Quant à savoir si le taux de contribution devrait être de 1,4, nous pourrions en discuter longtemps. Les employeurs ont certainement intérêt à ce que des bébés en bonne santé naissent, parce qu'ils auront besoin de main-d'œuvre dans 20 ans, et il existe cette réciprocité entre les générations qui nous concerne tous.
M. Brian Pallister: Mais nous devons être prudents, parce que nous disons que les employeurs ont la responsabilité de payer le programme dès maintenant et de motiver les gens à avoir plus d'enfants. Je ne suis pas certain que ce soient seulement les employeurs qui en bénéficient.
Mme Judith Maxwell: Non, non; je n'ai pas dit que c'était pour motiver les gens...
M. Brian Pallister: Oui, vous l'avez dit.
Mme Judith Maxwell: ... mais...enfin, c'est indirect. Je suppose que pour beaucoup de couples, il devient plus facile de décider d'avoir un enfant s'ils savent que ces possibilités leur sont offertes pendant la première année. Il existe des preuves multiples selon lesquelles la santé du bébé et de la mère sera meilleure à long terme. Il y a donc des avantages évidents pour la société.
Du côté des employeurs, je suppose que le besoin de réaliser des profits les incite à envisager les avantages sociaux surtout à court terme, mais le fait est que dans une société du savoir, nous devons investir autant que possible dans le capital humain, et la première année de vie d'un enfant est très importante.
º (1615)
M. Brian Pallister: Et la planification à court terme n'est pas exclusive aux petites et moyennes entreprises. Il y en a beaucoup ici aussi, au gouvernement.
Mme Judith Maxwell: Oui, c'est vrai.
M. Brian Pallister: Cela dit, pour être juste, il y a des effets négatifs. Beaucoup de programmes gouvernementaux ont des effets pervers—parfois imprévus et parfois simplement passés sous silence. Dans le cas de la création de nouvelles prestations, votre organisme a-t-il fait une étude sur les conséquences... pas seulement sur la rentabilité des entreprises? On pourrait soutenir qu'il n'y a pas de sécurité d'emploi dans une entreprise déficitaire, et que la productivité d'une entreprise est associée à la création d'emplois et, aussi, à la sécurité d'emploi.
Cela dit, avez-vous évalué les conséquences pour les jeunes femmes qui cherchent un emploi, par exemple, si on ajoute des avantages sociaux qui augmentent la probabilité que l'employeur doive se passer pendant un certain temps des employés qu'il embauche—ce qui constitueraient un effet pervers?
Comprenez-vous ce que je veux dire à propos des conséquences? Par exemple, au chapitre des congés parentaux, je connais une petite entreprise de profilage de métaux qui a moins de dix employés—je pense qu'il y en a sept, si je me souviens bien—où, l'an dernier, cinq hommes ont pris un congé parental en même temps. L'entreprise s'est retrouvée en position précaire. Je suppose que c'est un cas rare, mais peut-être pas.
Je m'inquiète donc des effets perturbateurs ou pervers éventuels de certaines de ces mesures, dont nous devrions tenir compte. Si, à cause d'elles, les femmes ont plus de difficulté à décrocher un emploi, nous devrions le prendre en compte. Votre organisme a-t-il fait quelque recherche que ce soit sur cette question?
Mme Judith Maxwell: Non, nous n'avons pas fait d'étude précise là-dessus. Mais, n'oubliez pas que, premièrement, l'assurance-emploi assumait une partie du salaire des gens qui prenaient ce congé. Ainsi, une partie du budget des salaires est libérée pour payer un remplaçant.
M. Brian Pallister: Oui, si vous trouvez un remplaçant qui veut occuper un poste spécialisé pendant une courte période, ce qui est très improbable.
Mme Judith Maxwell: Je pense aussi qu'il est très justifiable pour un employeur de demander aux employés de lui donner un préavis et d'insister sur une planification minimum. Il me semble que perdre cinq septièmes de la main-d'œuvre en même temps représente une coïncidence extraordinaire du point de vue de la natalité, notamment.
M. Brian Pallister: Eh bien, c'est merveilleux, d'un côté, parce qu'il y a plus de bébés dans le monde, n'est-ce pas?
Mme Judith Maxwell: C'est vrai, mais je pense que les couples ont généralement la capacité de décider si le père prendra son congé au début de l'année admissible ou plus tard pendant cette année. Il existe donc une certaine marge de négociation concernant le moment où les semaines de congé seront prises.
M. Brian Pallister: C'est vrai.
Mme Judith Maxwell: Mais par ailleurs, c'est encore un nouveau programme. Il n'existe que depuis bientôt deux ans. Les employeurs commenceront probablement à prévoir cette situation et à trouver des remplaçants. De plus, les travailleurs qui cherchent un emploi se rendent compte qu'il s'agit d'une excellente occasion de recevoir de la formation et d'essayer un genre d'emploi dans lequel ils pourraient ensuite décider de se lancer.
Par conséquent, le programme pourrait contribuer à une meilleure planification du côté de l'employeur et à une plus grande fluidité des marchés locaux de la main-d'œuvre.
º (1620)
M. Brian Pallister: Je suppose que nous sommes tous le produit de notre éducation et de notre expérience, naturellement. Je viens d'une petite collectivité rurale, où les petites et moyennes entreprises sont les principaux employeurs; je souhaite donc toujours que nous envisagions les conséquences tout comme les avantages immédiats.
Quand vous me dites que vous n'avez pas fait de recherche sur ce sujet; cela me porte à croire qu'il n'y a pas assez de réflexion à long terme dans votre organisme.
Mon autre réserve concerne les effets que ce genre de mesures ont sur le gouvernement et les grandes entreprises comparativement aux petites et moyennes entreprises. Avez-vous étudié comment ces mesures toucheront les petites entreprises si le gouvernement les met en vigueur?
Mme Judith Maxwell: Il n'y a aucun doute dans mon esprit que les petites entreprises ont plus de mal à s'adapter à ces mesures, simplement parce qu'elles n'ont pas ce que nous appelons un « bassin interne » de main-d'œuvre, un éventail de compétences et un grand nombre d'employés.
M. Brian Pallister: C'est vrai.
Mme Judith Maxwell: Il est beaucoup plus facile aux grandes entreprises de s'adapter. Pourtant, nous en voyons beaucoup qui n'ont pas pris les mesures nécessaires à ce chapitre.
Par conséquent, je pense que le fait d'aborder cette question dans un esprit de collaboration—au sein d'un groupe d'entreprises dans une petite ville ou dans un quartier particulier—, qu'une meilleure connaissance de l'endroit où se trouvent les compétences sur le marché du travail, et peut-être aussi l'aide d'un collège communautaire qui dispenserait une partie de la formation...
Il y a des mesures à prendre pour atténuer les effets; c'est ce que j'essaie de dire. Et nous n'en sommes pas encore à ce stade de notre adaptation à cette politique publique relativement nouvelle.
M. Brian Pallister: Vos commentaires démontrent une grande perspicacité; merci.
La présidente: Monsieur McCormick.
M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente et merci au témoin d'être ici.
À titre d'information pour mon honorable collègue qui vient de parler, j'ai parfois de la difficulté quand nous discutons, parce que moi aussi je viens d'une petite ville en région rurale, et du milieu de la petite entreprise.
De plus, puisqu'il est question des prestations de congé de maternité, j'ai parlé avec beaucoup de représentants de la petite entreprise, et ils sont très heureux de cette mesure, mais ce sont les profits qui représentent leur plus grand défi. Je pense qu'ils pourraient même trouver les gens...
En guise de clin d'oeil à mon collègue de l'opposition, je dirai en préambule que j'ai beaucoup travaillé au Manitoba depuis trois ou quatre ans, et encore plus en Saskatchewan. La circonscription que je représente se trouve entre Kingston et Belleville, en Ontario, dans une région rurale, mais le long du corridor de la 401. Là-bas, les gens ne semblent pas se rendre compte que nous sommes sur le point de souffrir d'une pénurie dans tous les métiers spécialisés que l'on puisse imaginer. Je les tiens au courant quand je vais au Manitoba et dans l'Ouest—pour des questions liées à l'agriculture ou pour siéger à divers groupes de travail—, et il est étonnant de voir combien, dans ces provinces, les gens savent que notre pays a besoin d'accueillir des immigrants.
Alors voilà, nous avons besoin de l'immigration, nous avons besoin que le taux de natalité augmente, et nous nous heurtons à la difficulté de déterminer comment payer pour cela.
Pour les petites entreprises, le village global devient bien plus petit. Je parle d'une petite entreprise qui s'appelle Wal-Mart. Je me suis intéressé à Sam bien avant qu'il devienne...et il n'est plus là. Lui et son chien sont allés explorer de nouveaux horizons. De toute façon, on en construira beaucoup, des douzaines de magasins au Canada. C'est bien. Des emplois seront créés, etc. Mais les profits...
Je me demande qui paiera la note tandis que nous appliquerons les principes de la conciliation travail-vie personnelle. C'est tellement nécessaire. Quand je vois que nous allons l'étudier, et nous sommes en train de le faire, je trouve que c'est merveilleux. Cela me fait penser au stress que subissent ceux d'entre nous qui sont assis autour de cette table. En fait, ça s'applique tout à fait à nous.
Nous examinons l'assurance-emploi. Bien. Chaque année depuis 10 ans, je réclame une diminution du taux, davantage que ce que nous avons fait. Ce ne sont pas tous les Canadiens qui en bénéficient. Je suis très heureux de constater que notre témoin reconnaît cette réalité dans le cas des petites entreprises et des petites villes, parce que beaucoup d'études, voire la plupart des études dont nous avons entendu parler ici, ne portent que sur les centres urbains.
Je voudrais même inclure les travailleurs migrants et des régions rurales. Il y a tellement de gens qui ne reçoivent aucun avantage social dans ce pays et l'État ne semble pas s'en rendre compte.
Je pense au commerce de détail, où la majorité des travailleurs sont des femmes. Beaucoup de grands magasins appartiennent à de grosses entreprises propriétaires de nombreuses boutiques qui portent différents noms. Notre fille a travaillé dans un tel commerce. Ce sont de bons emplois, mais je peux vous dire qu'ils ne paient pas plus que le salaire minimum. Il n'y a pas d'avantages sociaux. Les employés n'obtiennent même pas ce que la loi leur accorde, parce que c'est la façon de faire de ce genre d'entreprise.
Nous pourrions donc faire beaucoup dans ce domaine, mais je me demande vraiment d'où viendra l'argent pour le faire. Je sais qu'il y a des économies à réaliser en santé...notamment.
Le message que j'essaie de vous transmettre ainsi qu'à mes collègues comporte deux volets. D'accord, diminuons le taux de cotisation à l'assurance-emploi, mais alors nous n'aurons pas l'argent. Et dès que nous l'aurons fait, tout le monde se rendra compte que nous n'avons pas l'argent pour résoudre certains des problèmes. Nous devons apporter de vrais changements à l'assurance-emploi, et nous devons le faire pour les travailleurs autonomes.
Madame Maxwell, où recommandez-vous que le gouvernement concentre son attention quant à la réorientation de certaines priorités relativement à l'investissement financier dans les programmes? Encore une fois, il y aura des dizaines de milliers de petites entreprises touchées par une ou deux chaînes de magasins qui s'installeront dans à peu près toutes les villes du Canada. Les villes de 5 000 à 15 000 habitants auront toutes un magasin-entrepôt, et les problèmes seront immenses.
Merci, madame la présidente, de m'avoir laissé parler si longtemps.
º (1625)
Mme Judith Maxwell: L'arrivée de ces grands magasins a indéniablement un impact très net sur les petites collectivités—les magasins-entrepôts ont tendance à s'installer non pas sur la rue Principale, mais le long des autoroutes—sur la nature du travail, car ces personnes ne travailleront plus pour des petites entreprises locales, mais pour une entreprise plus grande où elles ne sauront pas à quoi s'attendre. Prenons, par exemple, la qualité du milieu de travail. Il se peut que l'employeur soit prêt à adopter des pratiques plus exemplaires, à accorder des avantages aux employés à temps partiel, à faire preuve de souplesse pour ce qui est des horaires de travail, ainsi de suite. Toutefois, rien ne dit qu'il va le faire. Comme il s'agit d'une entreprise plus grande, les rapports entre le travailleur et le patron seront plus distants. Il est difficile de dire quel impact cela va avoir sur la qualité du milieu de travail.
Pour ce qui est des avantages sociaux qui doivent être offerts aux travailleurs, peu importe leur lieu de travail, et du financement de leur coût, à mon avis, l'accès à la formation doit figurer en tête de liste, tout comme l'assouplissement des normes d'emploi pour tenir compte de la conciliation travail-famille.
Les dispositions de la partie II de la Loi sur l'assurance-emploi ne sont pas appliquées comme elles devraient l'être. J'ai dit, quand la loi a été adoptée, que si on voulait désormais parler d'assurance « emploi », il fallait qu'on offre des programmes de formation aux travailleurs. Ils ne devraient pas attendre d'être au chômage pour y avoir accès. En fait, nous avons tout simplement changé le nom de la loi sans en modifier le sens ou la portée.
Je suis d'accord pour dire qu'un examen en profondeur de la Loi sur l'assurance-emploi s'impose. Pour ce qui est de savoir qui doit payer, ce sont le gouvernement, l'employeur et l'employé qui doivent le faire. Comme ils profitent, ensemble, des programmes qui sont offerts, il est logique qu'ils en assument les coûts.
M. Larry McCormick: Vous avez dit que les petites entreprises pourraient se regrouper et offrir, ensemble, certains avantages, options, services. Je trouve l'idée intéressante. Il existe des associations nationales, comme la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, et je me disais... c'est une excellente organisation. Elle surveille de près le gouvernement, et elle a raison de le faire. Or, les petites entreprises devraient également chercher conseil auprès d'organismes pour voir comment, ensemble, elles peuvent arriver à faire encore plus. Elles pourraient garder leurs employés plus longtemps si ces derniers étaient plus satisfaits, ainsi de suite.
Je sais que vous avez d'autres défis à relever, mais je pense qu'il faut absolument sensibiliser les associations nationales à cette problématioque, pour le bien des petites entreprises.
º (1630)
Mme Judith Maxwell: Il y a aussi le fait que les petites entreprises doivent collaborer ensemble au niveau local. Cette collaboration doit se faire au niveau de la localité, d'un quartier, d'une région bien précise. Souvent, lorsque cette collaboration existe, le collège communautaire sert de catalyseur ou de fournisseur de services, si je peux m'exprimer ainsi.
Les entreprises doivent intervenir ensemble, au niveau local, pour faire bouger les choses. S'il existe, par exemple, un problème au niveau de la formation, on peut demander au collège de mettre sur pied des programmes d'apprentissage. Si on a de la difficulté à trouver des travailleurs pour remplacer ceux qui prennent un congé parental, par exemple, on peut s'adresser à la chambre de commerce locale ou même au club rotary, dont font partie la plupart des employeurs de la collectivité.
Il faut un leader, à l'échelle locale, pour faire bouger les choses.
M. Larry McCormick: Madame la présidente, je tiens à dire, pour terminer, que les collèges communautaires au Canada ont connu un essor considérable. Ils remplissent de nombreux rôles et offrent, aussi, de nombreux avantages. Votre idée d'inclure tout le monde, depuis les chambres de commerce jusqu'aux collèges, est très bonne. Il nous faut un leader.
Est-ce qu'il me reste du temps, madame la présidente? Non?
Merci beaucoup.
La présidente: Monsieur Pallister, une question très brève.
M. Brian Pallister: Je tiens d'abord à faire une observation. D'après mon expérience, la formation donnée par les petites entreprises est surtout informelle. Il m'est arrivé d'embaucher des personnes, et de nombreuses petites entreprises le font, qui avaient peu de compétences, mais un potentiel énorme. Nous avons, ensemble, aidé ces personnes à acquérir de nouvelles connaissances et ensuite, trop souvent, nous les avons perdues au profit de la concurrence—le gouvernement, notamment, est venu faire du recrutement dans les petites collectivités.
Cela dit, quelles mesures le gouvernement fédéral doit-il prendre ou quels changements devons-nous apporter aux normes de travail, en vue d'encourager l'apprentissage continu? À votre avis, quel rôle le gouvernement doit-il jouer à cet égard?
Mme Judith Maxwell: Je ne suis pas en faveur de l'imposition d'une taxe de formation où tout le monde doit payer, fournir un rendement, et qui vous donne droit aussi à une déduction si vous offrez une formation plus poussée. Il est très difficile de mesurer la qualité de la formation reçue, parce que celle-ci est surtout informelle. Je pense aussi que cette taxe va servir à financer une formation que les gens vont acquérir de toute façon, ce qui ne présentera pas un avantage pour la société dans son ensemble.
Autrement, vous devez utiliser des mesures moins coercitives. Je pense qu'il est important de recourir aux dispositions de la partie II de la Loi sur l'assurance-emploi pour financer des programmes qui offrent une formation plus poussée et pas seulement informelle—par exemple, si l'employeur veut initier les employés à de nouvelles technologies ou de nouveaux logiciels, ou encore développer de nouvelles compétences en milieu du travail. Il est préférable de former les employés qui connaissent déjà l'entreprise plutôt que de les mettre à pied et en recruter de nouveaux.
Il faut trouver un moyen de partager les coûts, d'aider les personnes qui souhaitent acquérir de nouvelles compétences, ou d'appuyer les petites entreprises qui font état de l'existence d'un tel besoin. Elles peuvent, si elles bénéficient d'une aide financière, s'organiser et offrir des programmes de formation par l'entremise du collège communautaire. Nous finirons tous par gagner au change si les niveaux de compétence sont renforcés.
Environ le tiers des entreprises au Canada sont considérées comme des milieux « d'apprentissage ». Nous avons donc encore beaucoup à faire pour amener les employeurs et les travailleurs à souscrire au principe de la formation continue.
º (1635)
M. Brian Pallister: Je pense que ma question supplémentaire est trop complexe pour qu'on puisse y répondre aujourd'hui. J'aimerais savoir quelle est la meilleure façon d'atteindre cet objectif. La portée du programme d'assurance-emploi est beaucoup plus vaste qu'à l'origine. Vous laissez entendre qu'il faut continuer de trouver des moyens d'utiliser les fonds, puisque nous les avons. Bien entendu, si nous les avons, c'est parce que les taux de cotisations sont élevés.
Vous avez parlé à plusieurs reprises des avantages que présente le fait d'assurer la formation des employés. Les employeurs en sont conscients. En tout cas, la plupart d'entre eux le sont, certains plus que d'autres. Quoi qu'il en soit, je pense que la plupart des employeurs en sont conscients, qu'ils offrent ou non de tels programmes. Mais est-ce que la société dans son ensemble n'en tire pas, elle aussi, profit?
Encore une fois, est-il juste ou acceptable de...serait-il préférable d'intégrer le compte d'assurance-emploi aux recettes générales pour que toute la société puisse en profiter, et pas seulement les employeurs et les employés qui cotisent au régime d'assurance-emploi? J'ai l'impression que cette façon de faire manque de transparence. Nous laissons entendre que les fonds sont destinés à la caisse d'assurance-emploi, mais nous les utilisons à d'autres fins—pour acheter des avions à réaction, disons, ou je ne sais quoi... Je ne veux pas me lancer dans un débat politique, mais on s'en sert à d'autres fins, et pas uniquement au titre de l'assurance-emploi.
Voilà le concept que je n'arrive pas à saisir.
Mme Judith Maxwell: Il y a beaucoup de Canadiens qui sont contre l'idée d'utiliser la caisse d'assurance-emploi à des fins autres que l'assurance-emploi. Nous n'investissons pas assez dans les programmes que nous pourrions financer avec la caisse d'assurance-emploi. Nous utilisons le régime d'assurance-emploi pour financer, par exemple, le congé parental, alors qu'il serait préférable d'offrir une prestation universelle à incidence fiscale, ou quelque chose du genre, ou une prestation parentale axée sur le revenu avant la naissance de l'enfant, qui correspond davantage au modèle utilisé au Québec.
M. Brian Pallister: L'Institut C.D. Howe n'a-t-il pas proposé, il y a quelques années, un modèle...
La présidente: Une deuxième question supplémentaire?
M. Brian Pallister: Une sous-question supplémentaire.
La présidente: Vous me stressez. Je trouve aussi que vous exagérez.
M. Brian Pallister: Eh bien, le sujet est intéressant, et nous avons ici devant nous une spécialiste en la matière, madame la présidente.
La présidente: Allez-y.
M. Brian Pallister: Je me trompe peut-être, mais d'après le modèle qu'il a proposé, les cotisations de l'employeur serviraient à financer les prestations. Un mécanisme serait prévu pour justifier, de façon transparente, l'utilisation des fonds. Je pense qu'il était question de prestations de « type 1 ». Les membres du comité connaissent probablement mieux que moi le modèle qui a été proposé. Les employés seraient eux aussi appelés à cotiser au régime, et les fonds serviraient à financer le genre de programmes que vous avez mentionnés. Il était clair, en vertu du modèle proposé, que les employés participeraient au financement des services qui seraient offerts, tandis que les employeurs participeraient au financement des prestations. Ce serait, en quelque sorte, un régime hybride.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. La transparence constitue un élément important de ces programmes, mais...
Mme Judith Maxwell: Il est bon d'avoir différents modèles. Nous allons être obligés, à un moment donné, que ce soit au cours du prochain mandat ou du mandat suivant, de réexaminer la loi et de voir quel type de modèle convient le mieux à une société postindustrielle.
M. Brian Pallister: Merci.
La présidente: J'assumais la présidence du comité quand nous avons examiné le projet de loi C-2, entre autres. J'espère que quelqu'un d'autre va occuper le fauteuil quand nous allons réexaminer la loi.
º (1640)
M. Brian Pallister: Je n'ai pas l'intention de présenter des excuses au comité parce que je trouve le sujet intéressant. Il est dommage que seuls quelques collègues s'y intéressent.
La présidente: Non, je le trouve intéressant, moi aussi, et c'est pour cette raison que je vous ai laissé posé tant de questions.
M. Brian Pallister: Merci, madame la présidente.
La présidente: Monsieur Bellemarre.
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Madame Maxwell, nous avons parlé des avantages sociaux qu'il faut accorder aux employés dans le but de les aider à concilier leurs responsabilités professionnelles et familiales. Nous souscrivons tous à ce principe. Il suffit tout simplement de trouver un moyen de l'appliquer.
Qu'en est-il des employeurs. Devons-nous, et pouvons-nous, leur accorder des avantages? Je ne parle pas des grandes entreprises, qui trouvent avantageux d'avoir un bassin d'employés qui viennent travailler pour elles. Je pense plutôt à ce que mon collègue, M. McCormick, a dit au sujet des petites entreprises. Si elles commencent à accorder des avantages sociaux et qu'elles se rendent compte qu'elles ont de la difficulté à trouver des employés pour remplacer ceux qui s'absentent—que ce soit pour une période longue ou courte, surtout si cette absence se produit à un moment peu indiqué de l'année, d'après l'employeur—devons-nous, pouvons-nous, offrir un régime d'avantages sociaux dans ces cas-là?
Supposons que j'exploite une petite entreprise et que j'accepte de mettre sur pied un tel régime pour le bien de mes employés, pour qu'ils produisent davantage, augmentent la productivité. Devons-nous tenir compte de l'aspect financier, ou comment...?
Nous devons faire la part des choses. Comment pouvons-vous, par l'entremise du programme d'assurance-emploi, encourager les petites entreprises à offrir de tels avantages? Vous savez, elles ne sont pas à plaindre, car si les résultats financiers sont l'unique chose qui compte pour elles—« Ces employés ne font pas du tout l'affaire » ou « Il faut travailler, travailler, travailler » ou encore « Si vous ne voulez pas travailler, partez, quelqu'un d'autre vous remplacera », etc.—ce sont alors des brutes qui ne pensent qu'à améliorer leur situation financière, leur production.
Pour revenir à la productivité, comment pouvons-nous créer un régime qui les incitera à accorder des avantages à leurs employés?
Est-ce que la question est trop complexe?
Mme Judith Maxwell: Disons, qu'il n'y a pas de réponse simple à cette question.
D'abord, je n'aime pas payer les gens pour faire ce qu'ils ont tout intérêt à faire de toute façon. Il me semble qu'il faut plutôt investir pour sensibiliser, informer la population.
Comme je l'ai dit à M. McCormick, beaucoup de ces problèmes devraient se résoudre à l'échelle locale. Il faut se demander qui serait le mieux placé pour le faire localement. Dans ce cas, ce pourrait être la Chambre de commerce, qui pourrait effectuer quelques études sur le sujet. Par exemple, on pourrait vérifier pendant combien de semaines les mères et les pères de la localité s'absentent pour un congé parental après la naissance d'un nouvel enfant, combien de semaines de travail sont ainsi perdues pour l'employeur, et quelle est la formation professionnelle de ces nouveaux parents. Puis, on peut commencer à réfléchir aux solutions. Y a-t-il des retraités qui pourraient prendre leur place? Y a-t-il de jeunes gens sous-employés qui pourraient profiter de l'occasion pour s'initier à un nouvel emploi, acquérir de nouvelles connaissances et apprendre à connaître un autre milieu de travail?
Je sais que le marché du travail se resserre quelque peu, surtout dans l'ouest du pays, mais il y a encore beaucoup de talents à exploiter. Ce serait l'équivalent des anciens services de placement. Vous pourriez en fait offrir des avantages intéressants à des gens qui, sans avoir à s'engager dans un poste à temps plein, pourraient recevoir une formation en milieu de travail pendant trois, quatre ou six semaines.
º (1645)
M. Eugène Bellemare: Si, au lieu de poser la question pour les petits employeurs, je la posais pour les très gros employeurs, il semblerait...j'ai des idées préconçues, et je l'admets en partant. Il reste que les gros employeurs, comme Wal-Mart ou McDonald, semblent exploiter les travailleurs en offrant le salaire minimum et en refusant la syndicalisation. Ces travailleurs n'ont pas d'avantages. Je remarque que ce sont surtout des jeunes ou des retraités qui y travaillent pour arrondir leurs revenus.
Est-ce que les gouvernements pourraient les obliger, si ce n'est pas par la loi, à tout le moins en principe, à assurer des services à leurs employés? Par exemple, les fonctionnaires fédéraux peuvent prendre congé pour aller chez le dentiste avec leurs enfants ou pour autre chose. Ils seraient obligés d'accorder les mêmes avantages au prorata ou autrement; je ne sais pas quelle formule pourrait être adoptée.
Les entreprises comme Wal-Mart sont en train d'avaler toutes les petites entreprises. Ils disent créer des emplois. Je ne le crois pas, parce qu'ils ne seraient pas en affaires si c'était seulement pour créer des emplois. Si une petite entreprise de 10 employés fait faillite, et que 10 autres se retrouvent dans la même situation, il y a 100 employés qui sont touchés. Si Wal-Mart remplace l'épicerie, la quincaillerie, les magasins de vêtements et autres d'un village, il ne reste plus qu'un Wal-Mart. Au lieu d'avoir 100 personnes qui travaillent, vous en avez probablement seulement 50, qui touchent 7 50 $ de l'heure, sans avantages.
Le gouvernement devrait-il songer à demander aux McDonald et Wal-Mart de ce monde de prendre leurs responsabilités à l'égard des travailleurs, au prorata peut-être, mais de commencer à faire quelque chose.
Qu'en pensez-vous?
Mme Judith Maxwell: Il y a une loi en Saskatchewan qui exige qu'il faut offrir des avantages au prorata à tous les employés à temps partiel. Je ne pense pas qu'elle s'applique à tous les secteurs, mais je ne me rappelle pas ce...
Le savez-vous, monsieur Pallister?
M. Brian Pallister: D'après ce que je comprends, il est très difficile d'offrir des avantages au prorata, comme des prestations d'invalidité et des prestations complémentaires de santé.
Mme Judith Maxwell: Oui.
M. Brian Pallister: C'est une chose qui peut être difficile à réaliser.
Mme Judith Maxwell: Je pense que la série d'avantages obligatoires est limitée, et ce n'est pas l'ensemble de la population active qui y a droit.
Quoi qu'il en soit, il y a des pays, et une province, où ce serait la chose normale à faire. On pourrait prévoir dans la Loi sur les normes d'emploi les cinq jours par année de congé pour raisons familiales dont Mme St-Jacques en a parlé plus tôt.
Il y a toutes sortes de possibilités, mais il faut dégager un consensus sur la bonne mesure à prendre. Les employeurs les plus touchés seraient sûrement ceux du secteur du commerce de détail, de l'hébergement ainsi que les petits entrepreneurs oeuvrant dans le domaine de la vente et des services. Et je pense que nous avons tout lieu de vraiment légitimer le travail à temps partiel, parce que c'est un très bon moyen pour les familles de concilier obligations professionnelles et personnelles.
M. Eugène Bellemare: Madame la présidente, notre attaché de recherche pourrait-il examiner le modèle de la Saskatchewan?
La présidente: Je suis sûre que oui.
Nous devons nous rappeler que les recommandations que nous formulons doivent tenir compte de ce dont le gouvernement fédéral est responsable, c'est-à-dire de la compétence fédérale. Les exemples que vous avez donnés dans le secteur de la vente au détail et dans d'autres domaines ne relèvent pas du gouvernement fédéral. La Loi sur les normes d'emploi est...
[Français]
M. Eugène Bellemare: Un instant.
[Traduction]
La présidente: Oui.
M. Eugène Bellemare: Je sais que Loblaws s'est lancé dans le domaine des services bancaires et de l'assurance.
La présidente: Les services bancaires ne représente qu'une partie de ses activités... ces activités seraient réglementées, j'imagine, mais seulement dans la mesure où...
Oui.
º (1650)
Mme Judith Maxwell: Si je peux me permettre, madame la présidente, je pense que le Code canadien du travail est important parce qu'il sert d'exemple.
La présidente: Exactement. Et j'allais vous demander ce que le gouvernement fédéral peut faire. Je pense que nous devons donner l'exemple, et vous avez parlé de normes qui permettent de concilier obligations personnelles et obligations professionnelles. Quels sont les seuils appropriés, d'après vous?
Mme Judith Maxwell: Pour les congés?
La présidente: Oui.
Mme Judith Maxwell: Je peux trouver la liste dans mes notes.
Pour le congé pour raisons familiales ou personnelles, je commencerais par cinq jours. Pour le congé parental, je pense, comme je l'ai déjà dit, qu'accorder un an est excellent. Le véritable problème c'est la portée du régime, parce qu'il y a trop de familles qui n'ont pas accès à ces prestations.
La présidente: Aimeriez-vous que cet avantage soit offert aux travailleurs autonomes?
Mme Judith Maxwell: Ce serait le meilleur exemple à donner.
La présidente: Oui.
Mme Judith Maxwell: Dans une famille où les enfants se suivent de près, la mère peut avoir du mal à accumuler assez d'heures avant l'arrivée de son deuxième enfant pour toucher des prestations pendant toute la durée du congé. Pour des raisons de maladie ou autres, la mère peut aussi s'être absentée avant de tomber enceinte, ce qui écourte la période de référence. Il semble que les interruptions de travail soient nombreuses dans la vie des gens, ce qui peut compliquer leur situation.
Pour ce qui est du congé de compassion, je pense qu'on devrait essayer les six semaines proposées. Je pense qu'on doit examiner de plus près les modèles européens, la façon dont ils envisagent la question, et étudier plus globalement les programmes sociaux et la manière dont nous allons les financer, parce que c'est lié à l'organisation des soins de santé et à la gestion des programmes d'invalidité.
Il y a beaucoup de facteurs à prendre en ligne de compte avant de trouver la bonne solution.
La présidente: Est-ce que cela devrait être prévu par le régime d'assurance-emploi ou la politique fiscale?
Mme Judith Maxwell: Dans la mesure où on exige des normes d'emploi, ces mesures devraient être prévues dans la Loi sur les normes d'emploi, dans le Code du travail. Sinon, je pense que ce sont des enjeux sociaux. Il faut se demander sérieusement si on les limite... Si on modifie le régime d'assurance-emploi, on peut peut-être laisser les choses telles quelles, mais, dans le cas du congé parental, il vaudrait mieux qu'il repose sur une base différente.
La présidente: D'accord.
Pour ce qui est des heures supplémentaires, quelles en seraient les limites raisonnables, d'après vous?
Mme Judith Maxwell: Il existe des limites actuellement, mais elles s'appliquent seulement à ceux qui sont visés par les normes d'emploi. Les normes ne sont d'ailleurs pas nécessairement appliquées de façon à offrir la protection nécessaire à l'ensemble des travailleurs.
La présidente: Donc, vous pensez que les limites sont raisonnables, mais que c'est l'application qu'il faut surveiller.
Mme Judith Maxwell: Je commencerai par là.
La présidente: D'accord.
Vous signalez ensuite que les avantages sociaux devraient être proportionnels dans le cas du travail à temps partiel. Je pense que le gouvernement fédéral a sûrement un rôle à jouer dans le cas des employés contractuels et des travailleurs à temps partiel. Nous nous entendons là-dessus.
Sur l'autre page, vous indiquez que les gouvernements doivent « moderniser les politiques sociales pour mettre l'accent sur les soins. » Je suis d'accord pour soutenir l'éducation des tout-petits. Je crois que c'est crucial et que c'est de l'argent bien dépensé pour le reste de la vie de l'enfant.
Pensez-vous que le gouvernement fédéral devrait adopter des mesures fiscales pour soutenir la petite enfance?
Mme Judith Maxwell: Je pense qu'il faudrait conclure des ententes de partage des coûts avec les provinces. Auparavant, la part du gouvernement fédéral était versée dans le cadre du Régime d'assurance publique du Canada, mais nous savons ce qui est arrivé à ce régime. Nous n'avons proposé aucun autre mode de financement et nous ne nous sommes pas encore adaptés au fait que 70 p. 100 des mères de jeunes enfants travaillent.
Je ne pense pas que nous puissions appliquer l'ancien modèle. Je voudrais que, pour les enfants de trois ou quatre ans qui vont à l'école, l'aide provienne des fonds consacrés à l'éducation. Il reste cependant qu'il faut encore réfléchir à la question des crèches et des autres services offerts aux très jeunes enfants.
º (1655)
La présidente: Le gouvernement fédéral doit aussi respecter les sphères de responsabilités déterminées par la Constitution. Je conviens que si on peut négocier des ententes de partage des coûts qui fonctionnent...mais il y a des provinces qui estiment que le gouvernement fédéral empiète sur leurs champs de compétences. Je ne pense pas que le gouvernement doive pour autant s'en laver les mains, et que nous devons trouver une autre solution.
Mme Judith Maxwell: Je pense que les provinces auraient beaucoup de mal à assumer cette responsabilité seules. Un débat important est déjà engagé au Québec sur la viabilité de l'engagement pris. La contribution du gouvernement fédéral aux coûts du programme du Québec est minime. Le Québec a fait un pas de géant pour ce qui est du nombre de places et de la qualité de ces places. Ce serait dommage qu'il doive réduire le nombre de places ou la qualité des services, mais il faut trouver une nouvelle formule de financement pour déterminer la part que les parents et le gouvernement fédéral devraient verser.
Évidemment, le gouvernement fédéral pourrait s'entendre avec les provinces pour établir un système de bons qui pourraient servir à payer les frais de garde des enfants. C'est un moyen qui serait assez efficace. Le crédit d'impôt remboursable est une autre solution. Il faut commencer à discuter le plus tôt possible pour arriver à s'entendre sur le mode de financement et sur les rôles que devront jouer le gouvernement fédéral, les provinces et le système d'éducation.
La présidente: Bien.
Merci beaucoup. Toutes les informations que vous nous avez transmises nous donnent vraiment matière à réflexion. Je vous remercie d'être venue rencontrer notre comité. Nous recommuniquerons avec vous si nous avons besoin d'autres renseignements. Merci beaucoup.
Mme Judith Maxwell: Merci. C'est une question qui me tient beaucoup à coeur, et je suis heureuse d'avoir eu l'occasion d'en discuter avec vous.
La présidente: Parfait.
La séance est levée.