LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 17 octobre 2006
[Enregistrement électronique]
[Français]
Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à notre réunion du Comité permanent des langues officielles. Nous avons deux invités ce matin: M. Marc Hamel et M. Jean-Pierre Corbeil. Ils doivent faire un discours d'environ 10 minutes. Ensuite, nous leur poserons des questions. M. Corbeil va prendre la parole.
Merci.
Monsieur le président, messieurs les vice-présidents et membres du comité, il me fait plaisir de venir vous faire part aujourd'hui de l'état de la situation concernant les sources de données actuelles de Statistique Canada sur les thèmes de la santé et de l'immigration relativement aux minorités de langue officielle à l'extérieur du Québec. J'aimerais, par la même occasion, vous faire part des projets en cours à cet égard. Je débuterai mon exposé en abordant le thème de la santé et je poursuivrai sur celui de l'immigration.
Parlons tout d'abord des sources de statistiques sur la santé de la population. Plusieurs sources de données portant sur la santé sont disponibles à Statistique Canada. L'une des plus importantes est l'enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes qui a débuté en 2000 - 2001. Avec une taille d'environ 133 000 répondants, cette enquête permet de produire des estimations dans les 133 régions sociosanitaires du Canada. Elle fournit des estimations sur les déterminants de la santé, sur l'état de santé, de même que sur l'utilisation des services de santé au Canada. Parmi les questions pertinentes à notre propos, mentionnons la langue maternelle, la connaissance des langues officielles, la langue parlée à la maison et celle parlée avec le médecin.
Il faut mentionner un élément important: le site Internet de Statistique Canada contient des profils des indicateurs de santé des groupes linguistiques définis selon la langue maternelle ou la première langue officielle parlée, pour chacune des provinces. Outre ceux de 2001 et de 2003, il sera bientôt possible d'avoir accès au profil pour le cycle de 2005.
Plusieurs cycles de l'Enquête sociale générale de Statistique Canada ont jusqu'ici porté sur diverses facettes ou divers thèmes liés aux questions de santé. Mentionnons notamment les enquêtes sur la santé, l'entraide et le soutien social, l'usage du tabac, de même que celle sur le soutien social et le vieillissement. Étant donné les limites de l'échantillonnage dans plusieurs enquêtes, il n'est cependant pas possible d'avoir des statistiques au sujet des francophones de chaque province. Des estimations fiables peuvent cependant être obtenues pour l'ensemble des francophones à l'extérieur du Québec.
La nouvelle Enquête canadienne sur les mesures de santé est la première enquête canadienne permettant de recueillir des renseignements importants sur la santé de la population sous forme de mesures physiques directes, c'est-à-dire pression artérielle, taille et poids, échantillons sanguins et d'urine pour l'analyse, et des tests en vue d'évaluer la forme physique, par exemple. Un questionnaire est également soumis, dans le cadre de l'Enquête canadienne sur les mesures de santé, à partir duquel diverses informations sont recueillies sur différents aspects de la santé et sur certaines caractéristiques démographiques et socio-économiques. Encore là, compte tenu de la taille de l'échantillon, soit environ 5 000 personnes âgées de 6 à 79 ans, des estimations sont peut-être possibles pour l'ensemble des francophones à l'extérieur du Québec, mais cela reste à vérifier.
Les préoccupations liées à la santé ne portent pas, bien entendu, seulement sur les mesures de l'état de santé, mais également sur l'offre et la demande de services dans la langue de la minorité. Du côté de l'offre, le recensement canadien comporte, depuis 2001, une question à deux volets sur la langue utilisée le plus souvent au travail et sur les autres langues utilisées régulièrement au travail. Cette information est très utile dans la mesure où il est non seulement possible de connaître le bassin potentiel de professionnels de la santé qui, tout probablement dans le cadre de leur pratique, utilisent le français au travail, mais également dans la mesure où elle permet de connaître le bassin des professionnels qui, bien qu'ils ne l'utilisent pas régulièrement, ont indiqué être capables de soutenir une conversation dans cette langue.
Une étude publiée par Louise Marmen et Sylvain Delisle, de Statistique Canada, en 2003, sur les soins de santé en français à l'extérieur du Québec faisait état des difficultés rencontrées par les francophones de l'extérieur du Québec en ce qui a trait à l'obtention de services de santé en français, en raison notamment du fait que dans plusieurs provinces, les francophones sont proportionnellement plus nombreux dans les régions rurales, alors que les spécialistes francophones, ou susceptibles de pouvoir offrir des services en français, pratiquent surtout dans les grands centres urbains. L'étude concluait également que même dans les provinces où les communautés francophones sont plus susceptibles de se trouver dans les centres urbains, les francophones ne vivent pas nécessairement dans les villes où se trouvent les plus fortes proportions de professionnels francophones.
La question de la demande des services de santé est étroitement liée à celle de l'offre. Plusieurs francophones qui aimeraient recevoir des services en français n'en font pas nécessairement la demande et ne savent souvent pas si les professionnels de la santé à qui ils s'adressent ont une connaissance du français. Nous touchons là la question de l'offre active de services en français.
Le 10 octobre dernier, Statistique Canada a amorcé la collecte des données de l'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle. Fruit d'un partenariat avec huit agences et ministères du gouvernement fédéral, c'est la première fois qu'une enquête d'une telle envergure est menée qui porte exclusivement sur les minorités de langue officielle. L'enquête a été faite auprès de 50 000 personnes et comprend 17 modules portant sur des thèmes tels l'éducation, la petite enfance, le parcours linguistique de l'enfance à la vie adulte, l'accès aux soins de santé dans la langue de la minorité, les activités culturelles, les pratiques linguistiques au travail, l'appartenance identitaire et la vitalité subjective, pour ne nommer que ceux-là.
Comme on peut le constater à la lecture du module sur les soins de santé, celui-ci permettra notamment de recueillir de l'information pertinente sur l'importance accordée à l'obtention de services dans sa langue, le niveau de difficulté pour obtenir des services dans sa langue, les raisons pour lesquelles on estime difficile d'obtenir ces services, la langue dans laquelle les services ont été reçus et la mesure dans laquelle les francophones demandent à être servis en français. La collecte des données de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle se poursuivra jusqu'en décembre 2006, et la diffusion des premières statistiques aura lieu en octobre 2007.
Passons maintenant aux statistiques sur l'immigration. On peut difficilement se pencher sur la question de l'immigration en milieu francophone minoritaire en faisant abstraction de la situation des communautés francophones minoritaires dont la grande majorité des membres sont nés au pays. L'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle fournira à cet égard une mine de renseignements statistiques utiles à la compréhension des défis et des obstacles auxquels sont confrontées les minorités francophones au Canada.
À Statistique Canada, le recensement est la seule source majeure de données qui permet de fournir de l'information sur les immigrants de langue française à l'extérieur du Québec. Le recensement permet d'obtenir un portrait très riche des populations immigrantes au sein des diverses communautés francophones. Malheureusement, cette source de données n'est pas suffisamment exploitée. Notons que l'échantillon francophone de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle est composé non seulement des personnes de langue maternelle française, mais également des personnes qui ont le français comme première langue officielle parlée. Toutefois, compte tenu de leur faible proportion au sein des communautés francophones minoritaires, il sera difficile d'obtenir des estimations fiables sur les immigrants de langue française à l'extérieur du Québec.
L'une des enquêtes importantes de Statistique Canada sur l'établissement des immigrants au Canada est l'Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada. En 2003, Statistique Canada a diffusé les résultats du premier cycle de cette enquête. Environ 12 000 des quelque 164 000 immigrants de 15 ans et plus arrivés au Canada entre les mois d'octobre 2000 et de septembre 2001 y ont participé. Ils ont été interviewés, pour le premier cycle de cette étude, environ six mois après leur arrivée. On les a interviewés à nouveau deux ans et quatre ans après leur arrivée. La diffusion des résultats du troisième cycle aura lieu en mars prochain.
Les données recueillies durant les trois cycles d'interview permettent d'étudier et de mieux comprendre le déroulement du processus d'établissement des nouveaux arrivants. Compte tenu de la taille relativement petite de son échantillon au terme du troisième cycle, soit environ 8 000 répondants, l'Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada ne permet cependant pas d'obtenir des estimations fiables sur les immigrants de langue française à l'extérieur du Québec. Il est cependant clair que si des dispositions étaient prises pour effectuer un suréchantillonnage d'immigrants de langue française, une telle enquête longitudinale fournirait une mine très riche d'informations sur le processus d'établissement de ces immigrants au sein des communautés francophones en milieu minoritaire.
En terminant, j'aimerais vous parler des quelques graphiques et statistiques que j'ai distribués. Les statistiques tirées du recensement de 2001 révèlent qu'en utilisant le critère de la première langue officielle parlée, on comptait près de 53 000 immigrants de langue française à l'extérieur du Québec, soit à peine plus de 1 p. 100 de la population immigrante. Pour la population non immigrante, cette proportion atteignait 5 p. 100. Notons que de ces 53 000 immigrants ayant le français comme première langue officielle parlée, la majorité habite Toronto et Ottawa, là où leur nombre respectif oscille autour de 11 000 personnes. Mentionnons par ailleurs qu'en plus de ces 53 000 immigrants, ayant le français comme première langue officielle parlée, on trouve près de 70 000 immigrants pour lesquels on ne peut déterminer laquelle des langues, entre le français et l'anglais, est la première langue officielle parlée. Statistique Canada crée donc une catégorie résiduelle qu'elle nomme « première langue officielle parlée français-anglais ». En utilisant l'information fournie à la question sur les autres langues parlées de façon régulière au foyer, on note toutefois qu'une forte proportion de ces immigrants semblent s'orienter davantage vers l'anglais que vers le français, même s'ils indiquent avoir une connaissance des deux langues officielles.
Néanmoins, on ne peut évacuer ces immigrants du revers de la main du bassin potentiel de locuteurs du français en tenant pour acquis qu'ils ne peuvent contribuer au développement des communautés francophones en milieu minoritaire. Bien qu'il n'y ait pas de définition établie de ce qu'est un immigrant francophone, il y a certes lieu de pousser plus loin les études, afin de mieux comprendre comment les immigrants allophones qui ont une connaissance des deux langues officielles peuvent contribuer à accroître les échanges en français au sein de l'espace francophone.
Je vous remercie de votre attention et suis prêt à répondre à vos questions dans les deux langues officielles.
Je vous remercie, monsieur Corbeil.
Nous allons entreprendre notre premier tour de questions. M. Murphy va poser la première question.
Merci beaucoup.
Nous avons reçu une note de la Bibliothèque du Parlement qui m'a inquiété. J'ai constaté que 14 p. 100 des francophones du Nouveau-Brunswick n'ont pas accès à un centre de santé communautaire. J'ai vu quelles étaient les méthodes utilisées pour compiler ces chiffres; je vous demande donc s'il pourrait y avoir des problèmes relatifs aux résultats.
Je remarque que les réponses, sur lesquelles on se base pour établir ces chiffres, ont un aspect subjectif. Il ne s'agit pas d'une étude objective avec des données exactes, sauf en ce qui concerne les chiffres relatifs à la population, qui sont très exacts. Nous, les politiciens, avons beaucoup d'expérience avec les sondages, et les marges d'erreur, nous pouvons comprendre cela.
Y a-t-il une marge d'erreur contrôlée lorsqu'il y a de telles données subjectives?
On sait très bien que quand on demande aux gens quelle est leur impression en ce qui a trait à la possibilité d'obtenir des services dans leur langue, cela ne touche pas que la santé, mais tous les domaines. Lorsqu'on mène des enquêtes sur l'alphabétisation et qu'on demande aux gens s'ils ont accès à une bibliothèque, ils ne sont pas nécessairement au courant qu'il y a une bibliothèque. Ils peuvent donc nous répondre qu'ils n'ont pas accès à une bibliothèque.
Il y a, bien sûr, un élément subjectif lorsqu'on demande aux gens s'ils ont accès à des services de santé, et ce, pour toutes sortes de raisons. On peut demander s'ils ont de la difficulté à avoir accès aux services.
Je sais que dans le cadre de l'enquête sur la vitalité, qui est en cours présentement, on demande aux gens s'ils ont utilisé des services de santé. Ensuite, on demande aux gens s'ils ont été servis dans leur langue, s'ils ont pu recevoir ces services dans leur langue et s'ils avaient demandé à obtenir ces services. Il est possible de ne pas se limiter à demander si des services étaient disponibles; on peut demander aux gens s'ils ont utilisé les services.
Par exemple, si on demande aux gens s'ils sont au courant de l'existence de la ligne info-santé ou de l'existence d'un centre communautaire de services de santé, ils gens peuvent nous répondre qu'ils ne sont pas au courant. Si les gens nous répondent qu'ils sont au courant mais qu'il est difficile d'obtenir des services, on peut leur demander pourquoi il en est ainsi. On peut donc exercer un certain contrôle quand on pose ce type de questions, et c'est exactement ce qu'on a voulu faire dans le cadre de l'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle.
Je ne sais pas quelle est cette statistique de 14 p. 100 que vous avez évoquée. J'ignore de quelle étude elle provient. Comme je vous l'ai dit, on peut demander autre chose aux gens que s'ils ont accès à des services de santé dans leur langue. Il y a d'autres façons, on peut poser d'autres questions pour obtenir des renseignements plus objectifs ou un peu plus fiables qu'une simple perception.
On parle probablement d'une enquête autre que celle de Statistique Canada. Je sais que le réseau de recherche sur la santé en français a fait beaucoup de sondages à cet égard. Ces gens ont aussi réalisé un bon nombre d'enquêtes qualitatives dans le cadre desquelles ils demandaient à des gens de préciser quelle était l'offre ou la disponibilité des services. Je sais que ça ne relève pas de Statistique Canada; c'est pourquoi je ne peux pas me prononcer. Je ne connais pas non plus la formulation des questions.
Comme je vous le disais, on voit souvent dans les sondages des questions de nature subjective. Or, il y aurait moyen de poser des questions permettant de renforcer la crédibilité ou l'objectivité des réponses.
Je peux préciser que les statistiques auxquelles M. Murphy fait référence sont tirées de l'étude publiée en 2002 par la FCFA et intitulée Pour un meilleur accès à des services de santé en français. Cette étude est très connue; elle a été largement diffusée.
Êtes-vous certain que les gens connaissent la différence entre un centre de santé communautaire et une clinique médicale? Est-ce qu'on leur a bien expliqué?
Je ne connais pas le sondage de la FCFA. Habituellement, à Statistique Canada, on effectue des tests pilotes avant de mener une enquête. Il s'agit de tests de nature qualitative dans le cadre desquels on rencontre des gens à qui on pose des questions afin de voir s'ils les comprennent. Ça nous aide à valider le libellé des questions.
Le domaine de l'éducation est à cet égard un exemple frappant. Il existe divers niveaux d'éducation dans les provinces, et on emploie des appellations différentes pour les désigner. On parle de prématernelles aussi bien que de jardins d'enfants, par exemple. Le fait de demander aux gens s'ils comprennent bien les questions contribue à nous assurer que les gens saisissent bien les concepts que nous utilisons.
Merci, monsieur le président.
Merci d'être venus témoigner, messieurs.
Vous avez parlé de l'échantillonnage et du fait que l'on disait ne pas obtenir de données fiables. Si j'ai bien compris, vous dites qu'il serait parfois possible d'appliquer une méthode plus exhaustive pour obtenir ces données.
Les témoins nous disent continuellement, en ce qui concerne les minorités francophones hors Québec, que l'échantillonnage ne permet pas de cerner la réalité des gens. Cela s'applique à la santé des francophones hors Québec et davantage encore aux immigrants et immigrantes.
Que peut-on faire pour pallier cela?
Statistique Canada a toujours essayé de trouver un compromis en ce qui concerne la taille des échantillons. Vous savez comme moi que la taille de ces derniers est directement associée au coût de l'enquête. Les objectifs de l'enquête sont pris en considération, mais le nombre d'enquêtes menées par Statistique Canada est absolument énorme. En vertu de ses responsabilités relatives à l'article 41 de la Loi sur les langues officielles, Statistique Canada a tout fait pour s'assurer que dans le cas des enquêtes clés, c'est-à-dire celles qui constituaient un enjeu important et suscitaient un intérêt marqué chez les minorités de langue officielle, on essayait de procéder à un suréchantillonnage.
Évidemment, il y a un coût, parfois assez élevé, associé à cela. Lorsqu'on mène des enquêtes et qu'on procède à de l'échantillonnage, on essaie de respecter la proportion des sous-populations dans chaque province. Or, ce sont souvent des clients extérieurs au gouvernement fédéral qui financent les enquêtes menées à Statistique Canada. Notre responsabilité consiste à leur dire qu'un sujet donné peut intéresser les minorités de langue officielle, par exemple, et à leur demander s'il serait possible d'envisager un suréchantillonnage.
Il arrive qu'on réussisse à trouver des gens prêts à financer le suréchantillonnage. C'est ce qu'on a réussi à faire dans l'enquête sur l'alphabétisation des adultes. On a pu réaliser un suréchantillonnage portant sur des francophones de quatre provinces en plus des anglophones du Québec. On a mené l'enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, précisément parce qu'il est souvent très difficile d'obtenir une représentation de chaque communauté francophone au sein des provinces. Les enquêtes sur la santé en sont un exemple patent.
En ce qui a trait à l'enquête sur la santé dans les collectivités, l'échantillon de 133 000 répondants permet de faire des estimations sur les minorités de langue officielle pour chaque province, ce qui n'est certainement pas le cas lorsqu'on parle des immigrants. On sait que la proportion qu'ils représentent est très faible. Il faudrait faire un suréchantillonnage dans le cas des immigrants également.
En fait, l'enquête longitudinale portant sur les immigrants au Canada impliquait au départ 12 000 personnes. Il reste qu'on doit constamment sensibiliser les bailleurs de fonds et leur demander, lorsqu'il s'agit d'un sujet d'intérêt national, s'il n'y aurait pas lieu de faire un suréchantillonnage. Évidemment, ça entraîne des coûts additionnels.
La raison d'être de l'enquête postcensitaire est précisément de pallier ce phénomène. Du côté de la santé, je pense qu'on va réussir à obtenir des résultats fort intéressants. Par ailleurs, le recensement, comme je l'ai mentionné plus tôt, est sous-utilisé en ce qui concerne l'immigration. Quoi qu'il en soit, il y aurait lieu d'envisager des enquêtes dans le cadre desquelles les immigrants de langue française seraient plus fortement représentés dans les échantillons.
Je vous dirais que la santé est probablement le domaine où l'on a réussi à obtenir les estimations les plus fiables. Elles nous permettent de couvrir le plus grand nombre de sous-populations linguistiques au Canada. C'est le cas également de l'enquête postcensitaire.
Dans l'enquête de la FCFA, qu'on a mentionnée plus tôt, on disait qu'il n'y avait pas d'information fiable. Pouvez-vous me dire ce qu'il en est maintenant?
Comme je l'ai mentionné plus tôt, deux sujets préoccupent majoritairement les acteurs du domaine des soins de santé: l'offre de services et l'accès aux soins de santé, ainsi que la formation des médecins professionnels. Je sais que l'enquête sur la vitalité des minorités, vu la taille de son échantillon, nous permettra d'obtenir des estimations très fiables en ce qui concerne les difficultés d'accès aux services de santé et l'offre de services en français aux francophones.
Pour ce qui est de la formation des professionnels, je sais que des groupes de recherche et des groupes de travail travaillent sur le terrain. Toutes sortes de coopérations existent, par exemple entre l'Université de Sherbrooke et l'Université du Nouveau-Brunswick. Je vous dirais que du côté de la santé, on est maintenant assez bien outillés.
On a réussi à avoir un échantillon considérable au Québec, non seulement pour les anglophones du Québec selon la langue maternelle, mais aussi pour tous les immigrants allophones qui s'orientent vers l'anglais. Étant donné que la concurrence entre l'anglais et le français est un enjeu important au Québec, on a suréchantillonné de façon importante les allophones qui s'orientent vers le français, pour comprendre la dynamique. On pose donc toutes les mêmes questions concernant l'accès aux soins de santé et les divers modules de développement de la vitalité des communautés.
Je m'excuse, madame Barbot, votre temps est écoulé et nous allons demander à M. Godin de poser ses questions.
Merci, monsieur le président.
Le comité directeur qui a comparu devant ce comité a permis de relever des lacunes importantes dans les données sur la situation réelle de l'immigration francophone. Quelles sont ces lacunes?
On peut adopter deux approches quand on fait une étude sur le terrain pour essayer de comprendre les difficultés ou les obstacles. On peut mener une approche plus qualitative selon laquelle on rencontrera un représentant de telle association qui connaît quelqu'un d'autre, et, ce faisant, on bâtit un petit échantillon. On a des entrevues d'une heure ou d'une heure et demie avec ces gens, qui nous parlent de leur expérience, de leurs difficultés d'intégration, etc.
Cette façon de faire nous donne un portrait qui, s'il n'est pas forcément significatif sur le plan statistique parce qu'il n'est pas représentatif de l'ensemble de la population immigrante, nous permet néanmoins d'obtenir de l'information sur les obstacles, les difficultés et les contraintes auxquels font face certains groupes. Bien sûr, on ne peut extrapoler et dire que ce portrait s'applique à l'ensemble des immigrants au Canada, qu'il rend compte des immigrants de langue française et de ce genre de choses.
On peut toutefois s'inspirer de ce genre d'enquête au moment de l'élaboration de questionnaires plus standardisés et administrés à plus grande échelle. Pour ce qui est des enquêtes menées par Statistique Canada sur l'immigration de langue française, on en est à la case départ.
Je ne comprends pas. Il n'y a pas un million d'hôpitaux au Nouveau-Brunswick. Allez à l'hôpital Georges-L.-Dumont, à celui de Moncton, de Saint-Jean, de Fredericton, de Bathurst et posez des questions au sujet des médecins, de leur langue, de leur connaissance du français, etc. Ça ne prend pas la tête à Papineau pour obtenir ces données.
On sait que la région d'Acadie-Bathurst compte 80 p. 100 de francophones. Je ne travaille pas à Statistique Canada, je ne suis pas un expert, mais soyons sensés.
Le cas du Nouveau-Brunswick est unique, car sa population compte un tiers de francophones, qui sont concentrés dans certaines régions. De plus, cette réalité est totalement différente de celle de certaines régions de l'Ontario et de la majorité des autres provinces à l'extérieur de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. C'est aussi à des fins de comparaison, puisque la question se posera tout de suite...
Prenons Fort McMurray, en Alberta. Les francophones de cette région sont peut-être tous dans des camps, mais c'est tout de même en Alberta. Quels services leur offre-t-on? Y a-t-il des hôpitaux dans cette région?
D'après les contacts et les rencontres qu'on a eus avec des spécialistes et des intervenants du milieu, on ne sait pas jusqu'à quel point les gens revendiquent des services en français. Si on décide de mettre sur pied des programmes et d'allouer des fonds pour offrir des services en français, il faut savoir si les francophones revendiquent ces services et s'il est important pour eux d'avoir des services dans leur langue.
Plusieurs personnes bilingues accepteront de recevoir des services en anglais plutôt que d'attendre six mois avant d'obtenir des services dans leur langue. De nombreuses enquêtes ont été menées...
La personne bilingue qui préfère attendre six mois est-elle considérée comme une personne qui veut des services en français?
C'est la raison pour laquelle on mène l'enquête sur la vitalité. On veut savoir s'il est important pour ces gens d'obtenir des services en français.
Si vous posez une question comme celle-là, la réponse pourrait être trompeuse. Le répondant pourrait dire qu'il préfère recevoir ses services en anglais plutôt que d'attendre six mois. De plus, comme il ne saurait pas nécessairement qui est à l'autre bout de le ligne téléphonique, il pourrait dire que tout est bien, parce qu'il ne souhaiterait pas attendre six mois. À quel point ce questionnaire est-il fiable?
Dans le questionnaire, on demande pourquoi il est important pour le répondant d'obtenir ou de ne pas obtenir des services en français ou pourquoi il n'a pas cherché à obtenir des services en français. Si cette personne n'a pas essayé, c'est peut-être parce que le service n'était pas offert ou parce que la personne n'osait pas, ou parce qu'elle ne voulait pas perdre de temps ou ne pas retarder le processus. Nous serons en mesure de colliger ces raisons.
C'est pourquoi on essaie de mieux comprendre toute la problématique de l'offre de services en français.
J'ai aussi envoyé une version de la description de l'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle, avec une description de chacun des modules. Si cela vous intéresse, on la fera circuler.
Bonjour, monsieur Corbeil, et bonjour, monsieur Hamel. Je veux d'abord vous remercier d'être venus témoigner ce matin au nom de Statistique Canada.
J'aimerais aborder avec vous le problème suivant. Vous savez que la santé fait partie des cinq priorités du Parti conservateur du Canada: vous n'avez qu'à consulter le programme. Un peu plus tôt, vous avez soulevé un problème qui commence à m'inquiéter. Vous avez parlé d'immigration et vous avez donc parlé des gens qui viennent de l'extérieur. Je vis dans la province de Québec, et celle-ci connaît un déficit migratoire parce que beaucoup de migrants québécois vont travailler en Alberta, là où il y a du travail. Les Québécois qui sont francophones vont là où il y a du travail. Votre enquête porte sur les immigrants qui viennent de l'extérieur du Canada et qui vont s'installer dans différentes provinces. Vos statistiques ne tiennent pas compte des migrants. On parle d'environ 50 000 québécois, qui vont six mois en Alberta, qui reviennent deux ou trois jours au Québec pour continuer à avoir droit à la carte d'assurance-maladie et qui repartent en Alberta pour y rester 12 mois. Ces personnes ont besoin de services de santé. Ils sont au Canada, ils ont donc besoin de services de santé. Cela n'est pas comptabilisé dans vos statistiques. J'utilise le mot « migration ».
À Moncton, il y a un quartier complètement francophone où on trouve des écoles, dont le Collège Saint-Jean, etc. Beaucoup de migrants en provenance du Québec ont besoin de services en santé. La semaine dernière, M. Hubert Gauthier, qui s'occupe de la Société Santé en français, est venu nous voir. Naturellement, j'ai dû lui poser le même genre de questions que je vais vous poser aujourd'hui. Cet organisme favorise la diffusion pour retenir le personnel francophone, permettre aux médecins de rester et de soigner les francophones en Alberta, etc. Je ne sais pas si vous connaissez la Société Santé en français.
Pensez-vous que cet organisme peut répondre à votre questionnement, mais sans inclure les migrants qui viennent du Québec?
Je vous remercie de votre question. Je dirais qu'il faut faire une distinction. Vous avez parlé des immigrants...
C'est vrai. On a parlé d'immigration un peu plus tôt et on a parlé de l'Enquête longitudinale sur les immigrants au Canada. L'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle traite aussi des francophones qui ont quitté le Québec...
Oui. Tous les francophones de l'extérieur du Québec qui ont le français comme langue maternelle, de même que ceux qui ont le français comme première langue officielle parlée — souvent des immigrants allophones — se retrouvent dans l'échantillon.
On pose des questions sur la migration, c'est-à-dire où les gens étaient cinq ans auparavant, pourquoi ils ont déménagé, etc. C'est le genre de questions que l'on pose. C'est effectivement un élément important à considérer. Au cours du recensement, bien qu'on ne pose pas de questions sur la santé, on obtient quand même des informations très riches sur la mobilité des Québécois à l'extérieur du Québec. On est en mesure de savoir d'où ils viennent, où ils sont nés, où ils habitaient il y a un an, cinq ans. Il existe tout de même des sources d'information.
Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que la mobilité est très forte. D'ailleurs, entre 1996 et 2001, il y a eu une augmentation de près de 10 000 francophones à l'extérieur du Québec, et la plupart provenaient du Québec.
On doit définitivement tenir compte de cette réalité, en particulier lorsqu'on dit que tout va bien, car il y a eu une croissance de francophones à l'extérieur du Québec. Or, on sait qu'il y a eu une mobilité importante, plus particulièrement vers l'Alberta et, dans une moindre mesure, en Colombie-Britannique.
Je connais des gens qui travaillent à la Société Santé en français. La question de la migration est une problématique importante dont il faut effectivement s'occuper.
Dans le cas de l'Ontario, par exemple, les gens qui migrent du Québec pour des raisons d'ordre professionnel ont souvent un statut socio-économique supérieur à ceux qui ne migrent pas. Ce sont des éléments que l'on doit considérer lorsqu'on analyse les besoins dans le domaine de la santé.
Dans plusieurs provinces, sauf au Québec, les francophones sont beaucoup plus âgés. En Saskatchewan, il y a quatre fois plus de personnes de 65 ans et plus que de personnes âgées de 15 ans. C'est une réalité qui est tout à fait différente pour ce qui est des demandes de soins de santé.
J'aimerais aborder avec vous une dernière question.
Un peu plus tôt, M. Godin vous a posé une question qui m'intrigue aussi. Comme je n'ai pas pris connaissance du questionnaire, je risque de répéter un élément que vous avez déjà mesuré. Ma question pourra sembler étrange. Vous y avez déjà répondu, mais j'aimerais réentendre votre réponse.
Lorsque vous questionnez un francophone au sujet des services de santé, il peut vous répondre qu'il serait prêt, s'il le fallait, à aller faire soigner son cancer dans un milieu anglophone. Au Québec, par exemple, on a envoyé beaucoup de patients se faire soigner aux États-Unis pour un cancer, car les hôpitaux québécois ne pouvaient pas répondre à la demande. C'est un peu la même chose qui se produit dans le cas des francophones des autres provinces. Si les services de santé en français ne peuvent faire face à la demande, que feront les patients francophones? Ils iront se faire soigner en milieu anglophone, qu'ils sachent parler anglais ou non. Quand on est atteint d'un cancer, on veut se faire soigner le plus rapidement possible.
Avez-vous tenu compte de cette mesure relativement aux services de santé? Cela m'intrigue. Lorsqu'on est malade, on veut guérir, peu importe la langue.
C'est un enjeu important. Plusieurs recherches ont été effectuées sur le développement d'une identité bilingue, notamment par feu Roger Bernard. C'est une tendance qu'on voit émerger au Québec. De plus en plus, lorsqu'on demande aux gens pourquoi ils n'ont pas demandé des services en français, ils nous répondent qu'ils sont bilingues.
Nous voulons mieux comprendre pourquoi ils n'ont pas accès à des services et pourquoi ils ne les ont pas demandés. Cette identité bilingue ou cette attitude voulant que ce ne soit pas si important d'avoir des services en français parce qu'on est bilingue est-elle généralisée?
C'est un élément qui est assez important si l'on veut comprendre la dynamique et la problématique de l'offre et de la demande de services en français à l'extérieur du Québec.
Merci, monsieur Corbeil.
Le deuxième tour de table est de cinq minutes, et nous commencerons par M. D'Amours.
Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs Corbeil et Hamel, de votre présence ce matin.
J'aurais en gros deux questions, dont une que vous avez soulevée ou dont vous venez de parler un petit peu: les services.
Ne parlons pas des immigrants, mais des citoyens déjà établis au Canada qui vont changer d'endroit ou des personnes qui, comme moi qui viens du Nouveau-Brunswick mais pour d'autres raisons, vont aller chercher des services de santé. Est-ce possible, lorsque la langue de travail est l'anglais — par exemple dans un hôpital où les employés peuvent offrir les services en français mais que leur langue de travail, de discussion devant les clients est l'anglais — que des francophones bilingues ne se risquent pas à demander les services en français?
Il y a un élément important à considérer qu'on appelle l'offre active de services en français. Vous avez certainement vécu l'expérience de vous présenter à un endroit où un petit panneau indique: anglais-français. Tout de suite, votre réaction sera de demander à la personne qui se présente si vous pouvez avoir des services en français ou si elle parle français. S'il n'y a pas cet écriteau et qu'on est dans un milieu majoritairement anglophone, la réaction fort probable sera tout simplement de ne même pas se poser la question, parce qu'on se dira que ça n'en vaut pas la peine. Il y a donc cette considération de l'offre active de services.
Dans le cadre de l'enquête, on demande justement aux gens si on leur a offert des services dans leur langue ou s'il leur a fallu le demander, et, s'ils ne l'ont pas demandé, pourquoi?
Je pense que c'est effectivement une réalité. Souvent, lorsqu'on va à l'hôpital, on est préoccupé par sa santé davantage que par la revendication de ses droits linguistiques. C'est donc une dynamique importante.
Je ferai un parallèle rapidement. Il y a 300 000 jeunes anglophones qui, bon an mal an, sont issus des écoles d'immersion française ou qui sont inscrits à des programmes d'immersion. Ces jeunes sortent des écoles et n'ont pas la chance de pratiquer le français et le perdent. Il y a aussi tous ces francophones autour qui se disent que de, toute façon, ils ne parleront pas français parce qu'ils sont dans un milieu anglais. Il y a donc cette absence de communication ou ce manque d'information à propos des capacités de l'autre d'utiliser la langue.
Maintenant je vais parler de l'immigration, des immigrants.
Vous en avez parlé tantôt, le tiers de la population du Nouveau-Brunswick est francophone, mais en réalité, la majorité des francophones vivent en milieu rural. Dans le domaine de la santé c'est toujours un défi que d'attirer des professionnels de la santé dans ces régions. Nous avons accueilli un groupe, il y a quelques semaines, à qui j'ai demandé — et ils doivent me revenir là-dessus — à quoi s'attendent les professionnels de la santé. Qu'est-ce qui les encourage à venir en milieu rural francophone et d'y demeurer?
Vous avez mentionné tout à l'heure que 1 p. 100 des immigrants francophones s'installe à l'extérieur du Québec, si j'ai bien compris. C'est minime. Croyez-vous, à la lumière de vos analyses, que c'est peut-être le risque de ne pas recevoir des services dans leur langue qui les empêche d'aller ailleurs? Ce sont peut-être des unilingues francophones inquiets de ne pas pouvoir recevoir des services dans leur langue qui décident de ne pas considérer ces provinces comme des provinces d'accueil. Ils iraient donc plutôt au Québec, identifié comme région francophone à l'échelle planétaire, ce qui n'est pas le cas pour d'autres provinces.
Il y a encore des gens au Canada qui ne comprennent pas qu'un tiers de la population du Nouveau-Brunswick est francophone. En effet, je me suis fait dire lors mon premier mandat, même par des parlementaires ici, à Ottawa, qu'ils étaient surpris que je parle français et qui je sois du Nouveau-Brunswick. En réalité, on constate parfois une certaine ignorance. S'il y a une ignorance parmi certains parlementaires, je me dis qu'il y en a une aussi ailleurs.
Bref, est-ce qu'il pourrait y avoir un lien entre cette perception et le taux d'immigration de seulement 1 p. 100?
Il y a présentement tout un débat, et un bon nombre de travaux se font en vue de régionaliser l'immigration. La majorité des immigrants se concentrent dans les centres urbains, et on veut essayer de les envoyer en région. On travaille à cela depuis 25 ou 30 ans. On a souvent connu des réussites, mais on a aussi essuyé des échecs. Comprendre pourquoi les immigrants vont s'établir dans les grands centres urbains, c'est déjà répondre en grande partie à la question.
Toutes sortes de facteurs expliquent ce phénomène, et je vais oser émettre une hypothèse à ce sujet. Bien des immigrants bilingues font partie de ce qu'on pourrait appeler notre bassin d'immigrants francophones. Ces gens sont souvent surpris de constater que pratiquement tout se passe en anglais. Il y a aussi de nombreux immigrants unilingues français à qui l'on dit d'aller s'établir dans les communautés, mais qui se rendent compte que le fait de ne pas connaître l'anglais les empêche de fonctionner. Il s'agit certainement de facteurs qui poussent les immigrants unilingues francophones à opter pour des milieux homogènes francophones.
Merci beaucoup.
Votre présentation nous a permis de comprendre divers aspects de la santé des populations. Une étude a été réalisée par Decima Research pour le compte du ministère du Patrimoine canadien entre les mois de mars et avril derniers. On a déterminé que 60 p. 100 des anglophones et 42 p. 100 des francophones en situation minoritaire avaient remarqué que l'accès aux services de santé s'était amélioré ou était demeuré le même au cours des dernières années.
Pour moi, il y a une différence entre le degré de satisfaction des personnes et l'effet réel sur leur santé. L'effet réel est important. En effet, quand on consulte un médecin, il faut pouvoir comprendre ses conseils et les suivre. Il faut également faire ce qu'il faut pour améliorer sa santé.
Pouvez-vous émettre des commentaires sur la différence qui existe entre le degré de satisfaction d'une personne qui reçoit des services de santé et l'effet réel sur sa santé? Avez-vous déjà posé de telles questions?
Il est sûr qu'on pose habituellement une question sur l'état de santé. L'enquête qui porte sur la santé dans les collectivités canadiennes, dont j'ai parlé plus tôt, comporte beaucoup d'indicateurs sur la santé. Je crois qu'il y en a environ 120 ou 130.
Il y en a davantage, mais il y a aussi dans cette enquête des indicateurs sur la satisfaction. La satisfaction ne dépend pas nécessairement d'un service reçu. On mesure les choses en fonction d'une opinion générale. Certaines personnes fondent leur opinion sur ce qu'ils ont lu ou entendu ailleurs, alors que d'autres la fondent sur une expérience personnelle réelle. En général, quand on a mesuré le niveau de satisfaction relativement aux services reçus en matière de santé, le pourcentage se situait autour de 75 p. 100. Je n'ai pas procédé à une ventilation par langue, cependant.
Est-ce que les personnes avaient peur de ne pas comprendre ce qui se passait dans le bureau du médecin et souffraient de cette situation? Vouloir recevoir des soins de santé dans sa langue maternelle, c'est une chose, et je la comprends, mais subir directement des conséquences de la situation en termes de santé en est une autre.
La situation des anglophones du Québec, comme tout le monde le sait, est fort différente de celle qu'on trouve à l'extérieur du Québec, et ce, pour un certain nombre de raisons. Il est clair que les francophones à l'extérieur du Québec constituent une population beaucoup plus âgée, donc beaucoup plus susceptible d'avoir besoin de soins de santé. On remarque qu'une proportion beaucoup plus importante de francophones âgés est unilingue. Pour ces gens le stress ou les préoccupations associées au besoin d'être bien compris et de recevoir des services dans sa langue est peut-être plus élevé que pour les anglophones du Québec, où l'accessibilité à des soins de santé en anglais est plus répandu.
Il y a aussi la question des réseaux communautaires. Je sais qu'ils sont beaucoup plus développés chez les anglophones du Québec que chez les francophones à l'extérieur du Québec. Dans le cadre de l'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle, on demande si les répondants ont des problèmes de santé et à qui ils font appel, mis à part leur médecin ou un professionnel de la santé. On a remarqué, lors d'études passées, que chez les anglophones du Québec, on utilise plus les réseaux familiaux et les réseaux autour des individus que chez les francophones à l'extérieur du Québec. Ces réalités sont tout de même assez différentes.
En ce qui a trait aux craintes ou à l'anxiété associée au fait de pouvoir recevoir des services dans sa langue, on n'a pas d'enquête comme telle pour les anglophones du Québec, mais on peut supposer que si c'est intimement lié à la disponibilité des services dans sa langue, les difficultés sont moindres au Québec qu'à l'extérieur du Québec.
Bonjour, messieurs, je vous remercie d'être présents.
Quand on parle du rapport entre l'état de santé et la langue, on pense à la personne qui est malade ou en état de crise. Dans un tel cas, il est vraiment difficile d'expliquer ce qu'on a et, surtout, de comprendre. On a l'impression parfois, si on est très malade, de ne pas comprendre ce qui nous arrive. Un état de panique s'installe. L'état de santé est aussi lié à la prévention et aux examens quotidiens.
Êtes-vous capables d'établir une corrélation entre l'état de santé en général et la langue du traitement médical?
C'est un peu difficile, mais il y a des travaux en cours, en ce moment, qui sont assez novateurs. Depuis quelques années aux États-Unis, on a créé un indice qui s'appelle Literacy and Health in America. L'Enquête internationale sur l'alphabétisation des adultes permet de mesurer les compétences de ceux-ci. Il s'agit d'un test d'alphabétisation où on demande aux gens de répondre à un certain nombre de questions, et certains items touchent directement la question de la santé, notamment la demande des services, la question de la prévention et la sensibilisation. Les résultats de cette enquête ont révélé que les francophones réussissent beaucoup moins bien que le reste de la population et constituent une population à risque. Si les gens sont moins scolarisés et si leur niveau d'alphabétisation est moindre, leur sentiment d'être à la hauteur sera moindre, tout comme leur sentiment d'être capables de comprendre les enjeux auxquels ils sont confrontés lorsqu'ils sont malades ou quelles sont les démarches à entreprendre lorsqu'ils sont malades.
L'enquête sur l'alphabétisation pose des questions très élaborées. C'est un peu comme un examen qui comprend des questions à développement où on demande aux gens de comprendre l'information et de faire usage de cette information pour obtenir des réponses. La question de la connaissance et de la manière de faire des demandes de soins de santé, ainsi que toute la question de la sensibilisation et des démarches à entreprendre, sont des éléments majeurs, importants, et les recherches montrent que les francophones sont beaucoup plus vulnérables à cet égard que les anglophones.
Au Québec, c'est remarquable. On connaît le statut de la population anglophone du Québec, qui réussit très bien ces tests. Il s'agit de la population la plus scolarisée chez les populations anglophones au Canada. Cette dynamique est totalement différente, la problématique est complètement différente.
J'ai une question sur un autre aspect.
Dans le deuxième graphique de votre présentation, vous indiquez la proportion d'immigrants dont la première langue officielle parlée était le français en 1996, puis en 2001. Je constate une augmentation au Québec de la proportion d'immigrants ayant le français comme première langue parlée.
On sait qu'il y a au Québec une politique d'immigration pour la portion d'immigrants que l'on peut accueillir. Depuis des années, on a demandé de recevoir des immigrants francophones ou « francophonisables »; je ne sais pas si le terme est très français, mais on sait ce que cela veut dire. Ce sont des gens de pays où la langue seconde pourrait être le français.
L'augmentation des gens dont la première langue officielle est le français est-elle attribuable à cette politique québécoise, ou au plus fort taux de natalité chez les immigrants?
À propos du taux de natalité chez les immigrants, dès leur arrivée, ils ont souvent un taux de fécondité plus élevé que celui de l'ensemble de la population. Mais au fur et à mesure qu'ils s'établissent au pays, il se crée un équilibre et il n'y a plus d'écart significatif entre les populations immigrantes et la population en général.
Pour répondre à votre question, lorsqu'on examine les données du recensement au sujet de l'orientation linguistique des immigrants, il est clair que les pays sources d'immigration ont beaucoup influé sur cet aspect.
Par exemple, lorsqu'on compare la provenance géographique des immigrants qui s'établissent à l'extérieur du Québec avec celle des immigrants qui s'établissent au Québec, on obtient deux portraits complètement différents. Bien sûr, il y a une portion importante d'immigrants en provenance de la Chine et de l'Asie, mais elle n'est jamais comparable à ce que l'on retrouve, par exemple, à Toronto et à Vancouver.
Or, on remarque que beaucoup d'immigrants proviennent du Moyen-Orient, de l'Afrique du Nord, d'Haïti, de la France. Ils ont déjà une orientation vers le français, avant leur arrivée au pays. Étant donné la législation linguistique au Québec, les enfants sont orientés vers l'école française. Alors, il y a déjà un processus qui s'amorce relativement à l'utilisation de la langue au foyer et dans l'espace public. Il est donc clair que la provenance géographique des immigrants joue sur la facilité avec laquelle ils s'orientent ou non vers le français.
On remarque quand même que des expériences ont été tentées dans des communautés minoritaires à l'extérieur du Québec où des immigrants en provenance de l'Afrique francophone ne connaissaient que le français. Évidemment, cela augmente leur capacité de s'intégrer, mais du même coup, s'ils ne connaissent pas l'anglais, ils sont limités, pour les raisons qu'on connaît.
Merci, monsieur Corbeil et madame Brunelle.
La dernière question de ce tour de table viendra de monsieur Godin.
Merci, monsieur le président.
Je veux soumettre une question relative aux statistiques qui ont été compilées seulement à l'extérieur du Québec. Je vais utiliser le Nouveau-Brunswick comme exemple, mais je pense que cela peut valoir pour n'importe quelle autre province.
Je sais que vous pensez que c'est différent au Nouveau-Brunswick parce que le tiers de la population est francophone. Les études effectuées sont-elles concentrées dans les régions, ou sont-elles réparties dans toute la province? Je vais m'expliquer.
Il y a des villages francophones comme Tracadie et Caraquet. Je sais toutefois qu'il s'y trouve des médecins qui ne parlent pas du tout le français. Des études ont-elles été faites dans la région de Bathurst, où 80 p. 100 de la population est francophone?
Je vais citer en exemple l'ancien ministre de la Santé du gouvernement de Bernard Lord, qui avait dit — et cela m'avait inquiété — que s'il était malade, cela ne le dérangerait pas d'entrer dans un hôpital où on ne parle que l'anglais ou le français, pourvu qu'on le soigne. Il est chanceux de parler les deux langues. Toutefois, le pauvre individu qui est malade et qui ne parle que le français, lui, ne pourra s'expliquer avec le docteur. Si on lui enlève la rate au lieu de l'appendice enflammée ou rompue, il sera dans une mauvaise posture.
Je vais répondre spécifiquement pour le Nouveau-Brunswick. Nous nous sommes certainement inspirés de M. Rodrigue Landry de l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques situé à Moncton. De plus en plus, dans les études que nous menons, nous découpons le territoire du Nouveau-Brunswick en trois ou quatre régions, dans la mesure où cela nous permet d'avoir des régions qui sont homogènes francophones, donc essentiellement francophones, et des régions — entre autres à Moncton, où le tiers de la population est francophone — où les échanges avec la majorité anglophone sont évidemment différents de ce qu'on peut retrouver dans des régions plus homogènes.
Il y a aussi Miramichi, où le tiers de la population est francophone et 70 p. 100 anglophone, et on nous sert en anglais.
Exactement, et c'est la raison pour laquelle, dans l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, le Nouveau-Brunswick a été découpé en trois grandes régions principales. De mémoire, il s'agit du Nord-Est, du Sud et du reste du Nouveau-Brunswick.
On parle du Nouveau-Brunswick, mais qu'en est-il de l'Ontario? Y a-t-il eu un découpage? Il peut y avoir Kapuskasing et Hearst...
L'Ontario est divisé en régions: le Nord, le Sud, la région de Toronto, la région d'Ottawa et le reste de l'Ontario. Cela va nous donner de l'information qui nous aidera à tenir compte de la concentration des francophones dans les régions. Il est difficile de faire la même chose à l'extérieur de ces deux provinces pour des raisons évidentes de taille d'échantillons. Par exemple, nous aimerions bien avoir des concentrations au Manitoba ou en Saskatchewan. L'avantage c'est que nous avons développé un indice de concentration dans l'enquête sur la vitalité. Cette variable sera utilisée. Par exemple, sur une échelle de un à dix, quelqu'un en Colombie-Britannique pourrait demeurer dans une région où il y a un indice de huit, donc une forte concentration de francophones. Mais la Colombie-Britannique n'est peut-être pas un bon exemple puisque les francophones sont dispersés un peu partout. Il en va de même pour Toronto. Grâce à cet indice de concentration, nous pourrions quand même tenir compte de la concentration des francophones dans une région donnée. Il en va de même pour les anglophones au Québec.
Merci, monsieur le président.
Bienvenue, messieurs.
J'ai fait partie d'un comité de ressources humaines qui a fait une étude sur l'alphabétisation il y a quelques années. Nous avons vite remarqué que les francophones hors Québec avaient beaucoup plus de problèmes que la population en général. Ces données sont donc très importantes pour nous parce que les solutions peuvent être complètement différentes pour ces gens. En 2001, quand la Fédération des communautés francophones et acadienne nous a indiqué qu'il n'y avait pas beaucoup d'informations précises, cela nous a préoccupés.
Comme je suis arrivé un peu en retard, je ne sais pas si vous avez déjà répondu à cette question: l'information que nous avons aujourd'hui est-elle plus précise? D'autre part, j'aimerais savoir qui décide des questions qui seront posées ou des enquêtes qui seront menées? Décidez-vous au hasard de mener une enquête sur la santé des francophones? Comment cela se décide-t-il? Les communautés doivent-elles en faire la demande, pour que vous meniez ces enquêtes?
Je vous remercie de votre question.
D'abord, en ce qui concerne l'alphabétisation, l'Enquête internationale sur l'alphabétisation et les compétences des adultes a eu lieu en 2003. Les résultats à l'échelle canadienne et ceux à l'échelle provinciale ont été diffusés en décembre dernier. En décembre prochain, une monographie sur l'état de la situation chez les minorités de langue officielle sera publiée.
Jusqu'à maintenant, l'information détaillée dont nous disposions était celle de l'enquête de 1994. Bien que nous ayons de l'information sur l'enquête qui a eu lieu en 2003, celle-ci est assez générale et assez sommaire, en ce qui a trait aux minorités de langue officielle. Compte tenu du fait que, dans cette enquête, nous avons réussi à obtenir un suréchantillonnage des anglophones du Québec et des francophones du Nouveau-Brunswick, du Manitoba et de l'Ontario, nous sommes en mesure de mieux identifier les facteurs qui influencent les niveaux d'alphabétisme chez les francophones ou les anglophones vivant au Québec.
Vous demandiez également qui décide. Dans le cadre des responsabilités qui incombent à chaque ministère et agence du gouvernement fédéral en vertu de l'article 41, nous devons — chaque année ou de façon régulière — consulter les membres des communautés de langue officielle pour obtenir de la rétroaction ou pour mieux connaître leurs besoins ou leurs priorités.
Statistique Canada, avec d'autres partenaires du gouvernement fédéral, a organisé un symposium de deux jours, en 1998, au cours duquel nous avons pu tâter le pouls des minorités de langue officielle. Il y en aura un également en 2007. Entretemps, nous avons rencontré plusieurs communautés et associations, dont la FCFA, pour connaître leurs besoins à cet égard.
Quand nous voulons étudier des thèmes — comme dans le cas des 17 modules qui composent l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle —, un comité consultatif est formé de chercheurs chevronnés dans le domaine, mais aussi de représentants des communautés. Cela nous permet de bien guider l'orientation des enquêtes.
Est-ce Patrimoine Canada qui vous demande de le faire, ou est-ce Statistique Canada qui a pris cette initiative?
L'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle fait l'objet de discussions depuis très longtemps. À Statistique Canada, on savait que c'était probablement le seul moyen d'obtenir des données fiables sur un certain nombre de domaines touchant les minorités de langue officielle. On a eu des pourparlers, d'abord avec Patrimoine Canada et avec le Bureau du Conseil privé. Maintenant, il y a huit partenaires fédéraux qui ont financé l'enquête et qui font partie du comité directeur et du groupe de travail, dans le cadre de cette enquête. Ce n'est donc pas uniquement une initiative de Statistique Canada.
Il y a eu le Plan d'action pour les langues officielles en 2003. Pour le renouvellement du plan d'action qui aura lieu en 2008, l'enquête postcensitaire sera la source des données qui nous permettront d'évaluer les progrès que l'on aura réussi à accomplir.
Je vous remercie, monsieur Corbeil.
Monsieur Simard, votre temps est écoulé.
Mme Boucher posera la dernière question.
J'ai deux petites questions à poser.
Je vous écoute depuis tout à l'heure et je me demande s'il y a encore des gens des minorités linguistiques hors Québec qui ignorent qu'ils peuvent être servis dans leur langue. Est-ce que cela arrive encore aujourd'hui? Posez-vous cette question lorsque vous faites ce genre d'enquêtes? Certains individus vous répondent-ils qu'ils ignoraient qu'ils pouvaient être servis en français, par exemple dans un petit village?
Dans le cadre de l'enquête que nous menons en ce moment sur le terrain, il y a un module qui touche l'offre de services par le gouvernement fédéral.
On a fait un test pilote avant cette enquête et on s'entend pour dire que ce qui semblait ressortir — encore là, ce sont des données fragmentaires, puisqu'on a consulté seulement un petit échantillon de personnes —, ce sont des commentaires de gens qui nous disaient être au courant de ce service offert par le gouvernement fédéral, mais qu'ils n'y pensaient même pas pour ce qui est du gouvernement provincial.
Évidemment, je ne parle pas nécessairement du Nouveau-Brunswick. Il y a quand même la Loi sur les services en français en Ontario, mais je pense qu'un bon nombre de personnes ne connaissent pas la Loi sur les langues officielles, c'est clair. Il y a aussi probablement encore des gens qui ne savent pas qu'ils peuvent obtenir des services dans leur langue.
Il est clair également que cela revient toujours à l'offre active de services. Si vous composez un numéro sans frais 1-800 et qu'on vous dit d'appuyer sur le 2 pour avoir des services en français, il est clair qu'il est possible d'obtenir des services en français. Par contre, si vous appelez quelque part et qu'on vous répond en anglais, alors la question ne se pose probablement même pas.
C'est pourquoi je vous dis qu'il y a plusieurs considérations, et l'offre active de services dans une langue est certainement un élément qui joue sur la perception qu'ont les gens quant à la possibilité d'avoir des services dans leur langue.
Comme vous le savez, notre gouvernement appuie beaucoup les communautés, surtout pour avoir accès aux soins de santé dans leur langue. Il est sûr et certain que je suis une de ces personnes, parce que je suis francophone de souche. Maintenant, je suis bilingue, mais j'aime bien être servie dans ma langue, car c'est plus facile pour moi de m'expliquer, surtout si je suis malade, par exemple, comme on le disait plus tôt.
D'après vos connaissances, quels pourraient être les effets si on donnait aux gens plus d'informations afin qu'ils sachent qu'ils ont le droit d'être servis dans leur langue?
C'est une question à laquelle je m'abstiendrais de répondre, dans la mesure où c'est de la projection ou de la prospective. Je vous dirai cependant qu'il y a toujours deux aspects à une telle problématique, soit l'offre de services ou offre active, à savoir s'il est possible d'utiliser les services en question, et la perception des personnes. On sait, pour en connaître un bon nombre, que des francophones utilisent l'anglais par habitude. À la fonction publique fédérale, par exemple, bien des anglophones travaillent très fort pour maîtriser le français, mais ils se font souvent répondre en anglais par des francophones à qui ils s'adressent en français. C'est une réalité. Je peux comprendre que certains anglophones se grattent parfois la tête tant la chose les rend perplexes.
Je sais que certains francophones sont très sensibles à la question linguistique et que d'autres le sont moins, pour toutes sortes de raisons. Encore là, je reviens à l'enquête postcensitaire qui est menée présentement. Il y a dans celle-ci un module intitulé « Appartenance identitaire et vitalité subjective de la communauté ». On y pose des questions telles que: est-ce important pour vous d'utiliser le français? Avez-vous à coeur l'avenir de votre communauté francophone? Comment évaluez-vous la vitalité de votre communauté linguistique? Ces questions permettront certainement de mieux comprendre les pratiques et les comportements linguistiques observables dans les autres modules. C'est ce à quoi on travaille dans la sphère privée.
Si vous posez ce genre de questions au Québec, tout le monde sera d'accord, mais à l'extérieur du Québec, est-ce que les gens y sont sensibilisés? Je pense aux francophones de l'Alberta, entre autres. Est-ce un manque d'information, une forme de peur? C'est si automatique maintenant, de parler dans les deux langues. Le bilinguisme a quand même des conséquences.
Des enquêtes de nature plus qualitative ont déjà été faites sur le terrain. Je vais parler brièvement des unions mixtes ou exogames. Des gens ont dit à leur sujet qu'elles étaient un fléau parce que les francophones, à partir du moment où ils se mariaient avec des anglophones, se mettaient à utiliser l'anglais. Or, des recherches démontrent que les francophones qui utilisent davantage l'anglais au sein de ces couples exogames ont, dans bien des cas, déjà connu une orientation significative vers l'anglais, que ce soit depuis leur tout jeune âge ou, à tout le moins, depuis l'âge de 15 ans. Les comportements antérieurs ont donc leur importance.
On sait aussi que l'accès à des services d'éducation dans sa propre langue influe définitivement sur les comportements ultérieurs. Au Manitoba, par exemple, une très forte proportion des francophones n'a pas eu accès à l'école française. Certains d'entre eux ont fréquenté des écoles anglaises au secondaire et d'autres ont fait leurs études dans les deux langues. Pour ces gens, l'identité bilingue est très forte. Ce facteur influence certainement les perceptions en matière d'identité et de pratiques linguistiques.
Je vous remercie beaucoup.
Je veux remercier nos invités: c'était là un débat très instructif. Je voudrais aussi remercier les députés, qui ont posé des questions très intéressantes. On va suspendre la réunion pour deux minutes environ. On va ensuite passer à la motion de Mme Barbot.
Monsieur le président, ma motion se lit comme suit:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent des Langues officielles recommande au gouvernement de maintenir le financement du Programme de contestations judiciaires au niveau établi dans l'année fiscale 2005- 2006 et que rapport de l'adoption de cette motion soit fait dans les plus brefs délais à la Chambre par la présidence.
Monsieur le président, il est clair, compte tenu de la réalité des communautés de langue officielle, que le Programme de contestation judiciaire est très important. Je serai très fier de voter en faveur de cette motion, mais j'aimerais y apporter un amendement.
Il se lit comme suit:
[...] recommande au gouvernement de maintenir le financement du Programme de contestations judiciaires au niveau établi dans l'année fiscale 2005-2006, de garantir la pérennité de ce programme et que rapport de l'adoption de cette motion soit fait dans les plus brefs délais à la Chambre par la présidence.
J'ai reçu la motion en même temps que tout le monde et j'ai eu une semaine pour la lire. En fait, j'ai consulté le beau livre qui nous a été donné, en l'occurrence le Règlement. J'y ai vérifié l'article 108(2). Je vous ferai remarquer que cette motion est irrecevable en vertu du paragraphe (3)f). Le Règlement dit que tous les comités ont un tel pouvoir, à l'exception des comités énumérés entre autres aux paragraphes (3)a) et (3)f). Or, au paragraphe (3)f), il s'agit de notre comité. Nous n'avons pas ces pouvoirs, comme l'indique, au paragraphe (3)f), la description de notre mandat. On y lit ce qui suit:
f) celui du Comité des langues officielles comprend notamment l’étude des politiques et des programmes de langues officielles, y compris les rapports annuels du Commissaire aux langues officielles qui sont réputés renvoyés en permanence au Comité dès qu’ils sont déposés sur le Bureau, et la présentation de rapports à ce sujet;
On n'a aucun autre mandat que celui-là. C'est regrettable. Quatre comités sont dans cette situation. La motion, malgré toutes ses qualités, est donc irrecevable. Si nous étions au Comité de la justice ou à un autre comité permanent, la motion pourrait être recevable, mais le paragraphe (3)f) exclut cette possibilité.
Je vous demanderais donc, monsieur le président, de considérer cette motion irrecevable étant donné qu'elle n'est pas conforme à notre mandat, tel que mentionné au paragraphe (3)f).
J'aimerais demander l'avis de la greffière. À mon avis, ces propos sont tout à fait contraires à ce qui est écrit ici. En fait, considérer tout ce qui concerne l'application de la Loi sur les langues officielles fait partie de nos prérogatives.
Ce n'est pas à moi d'interpréter le paragraphe (3)f). C'est en effet le comité qui, en fin de compte, prendra la décision. Je vois cependant que le mandat du comité comprend notamment l'étude des politiques et des programmes de langues officielles. Tout ce qui touche les politiques et programmes de langues officielles est donc compris dans le mandat du comité. En plus, il y a les rapports annuels du commissaire. On dit en effet « y compris les rapports ». C'est mon interprétation, et c'est au comité de décider s'il l'approuve ou non.
Selon ma compréhension des choses — il y aurait peut-être lieu de faire vérifier cela par un expert juridique ou par le bureau du Président de la Chambre —, l'esprit de cette distinction quant au mandat vise le fait que le Comité permanent des langues officielles n'est pas lié à un ministère en particulier. Le fait de n'être pas lié à un ministère en particulier n'implique pas que telle ou telle question touchant les langues officielles ne puisse être traitée, c'est-à-dire que nous n'avons pas, d'office, les programmes spécifiques d'un ministère en particulier. Par exemple, nous ne sommes pas liés à l'analyse des états financiers d'un ministère, etc. Le comité est quand même libre d'étudier les questions qui touchent directement ou indirectement les programmes des langues officielles.
Merci, monsieur le président.
Ce matin, je vois que les conservateurs essaient d'obtenir par la porte de derrière ce qu'ils ne peuvent obtenir par la porte de devant.
En coupant le financement du Programme de contestation judiciaire, le gouvernement vient de faire descendre les minorités francophones au plus bas niveau auquel on peut se trouver au pays.
Je parle exactement de cette motion, qui concerne le Programme de contestation judiciaire.
Monsieur le président, vous étiez présent lorsqu'on a présenté des motions relatives au plan Dion, un programme de 700 millions de dollars. Nous avons formulé des recommandations au Parlement pour que le gouvernement mette de l'avant un programme de 700 millions de dollars.
Ce n'est pas la première fois qu'une telle situation se présente. Cela fait partie du large mandat de ce comité, et personne ne va nous bâillonner. Comme la greffière et notre analyste l'ont dit, notre mandat peut s'étendre à tous les ministères. C'est à nous de faire rapport, de donner notre interprétation et de faire nos recommandations au gouvernement en place, pour tout ce qui concerne les langues officielles.
J'aimerais attirer l'attention du comité sur le fait que je n'entre pas par la porte de derrière. Quand j'y vais, j'y vais directement. Je crois que j'ai un assez bon caractère pour y aller directement.
Je me suis fié au document présenté par Mme Barbot. J'aimerais lire l'article 108(2) du Règlement et je voudrais que ce soit noté au compte rendu, puisque ce sera enregistré. Il se lit ainsi:
(2) En plus des pouvoirs qui leur sont conférés conformément au paragraphe (1) du présent article et à l'article 81 du Règlement, les comités permanents, à l'exception des comités énumérés aux paragraphes (3)a), (3)f), [...]
Nous sommes une exception. Je n'entre pas par la porte de derrière. Je vous dit cela simplement. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le Parlement. On n'a pas le droit de faire cela, on n'a pas ce mandat. Je n'ai pas dit que la motion était bonne ou mauvaise; je ne m'oppose même pas sur le fond de la motion. Je vous dis qu'on n'a pas ces pouvoirs.
Si on veut vraiment le savoir, on peut avoir un débat tout de suite. Monsieur l'analyste — on va s'en parler —, une motion de cette nature relève de l'article 92 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, où on dit que seuls les tribunaux provinciaux ont le droit de s'occuper de ce qu'on appelle la procédure. Je peux déposer l'article immédiatement, si vous le voulez.
J'aimerais donc qu'on cesse de dire que j'entre par la porte de derrière.
Il est clair que la motion n'est pas restrictive. Sinon, on n'a plus notre raison d'être. Notre mandat consiste à étudier tout ce qui se fait à l'intérieur de l'appareil gouvernemental et à donner notre avis.
Nous avons voté sur le projet de loi S-3. Comment peut-on nous dire maintenant qu'une mesure qui fait en sorte qu'une partie importante de cette loi est inopérante ne fait pas partie de notre mandat? C'est complètement incohérent. Je comprends que les conservateurs ont l'habitude de l'incohérence. On a adopté le projet de loi S-3 et on enlève aux francophones hors Québec le moyen d'attaquer la loi.
Par ailleurs, le premier ministre a dit à la Chambre des communes qu'il gouvernait bien, donc, que les gens n'auront pas à protester. Toutefois, nul n'est à l'abri d'une erreur. Je ne préjuge pas de la volonté des gens, j'affirme que ce que soutient M. Petit est inopérant. Sinon, on n'a qu'à ramasser nos petits et à s'en aller chez nous, parce qu'on n'a rien à faire au Comité permanent des langues officielles. Il ne s'agit pas d'avoir une telle mauvaise foi en quelque chose qui, somme toute, est tout à fait et absolument à l'intérieur de notre mandat.
Non, je ne veux pas que la discussion sur la motion dégénère. On a lu les mêmes documents, mais d'habitude, on travaille en groupe. Je m'excuse, mais j'ai au moins le respect des autres et jamais je n'y manquerai. Ce qu'on a demandé, on l'a vu dans le document, il l'a expliqué, c'est maintenant à nous d'en débattre sans entrer dans la politicaillerie et sans essayer de se lancer des pierres.
Je pense que Mme Barbot a très bien expliqué mes pensées. Si la motion n'est pas recevable, le Président de la Chambre aura-t-il à se pencher sur la question? Pourrait-on décider aujourd'hui si la motion est adoptée? Ensuite, si elle n'est pas recevable, le Président de la Chambre pourra porter un jugement sur la question.
Si Mme Barbot est d'accord, j'aimerais suggérer qu'on fasse des recherches et qu'on décide jeudi. Peut-on prendre du temps jeudi?
Non, ce n'est pas ce que je recommande, monsieur le président. Je pense qu'on devrait débattre de la motion aujourd'hui et voter dessus. Je siège à ce comité depuis quatre ans et demi, et on a fait des recommandations semblables depuis cette période et même, je pense, depuis 25 ans. C'est tout à fait dans le cadre du mandat du Comité des langues officielles de faire ces recommandations; on est là pour cela. Autrement, en effet, on n'a aucune raison d'être.
Je me pose seulement une question, à laquelle la greffière pourra peut-être répondre. Est-ce que M. le député a un argument valable? Si oui, il faudrait que la motion soit recevable, n'est-ce pas?
Monsieur Godin.
Non. Monsieur le président, nos experts sont là et ils nous ont fait part de leur interprétation. C'est directement dans notre mandat. Je demande qu'on vote sur la motion. Tout le monde fait part de son opinion. Va-t-on, chaque fois qu'une motion sera présentée, attendre une semaine avant de la soumettre au vote parce qu'Yvon Godin veut donner son opinion? Je respecte le fait qu'on a une opinion, mais selon celle de notre collègue Daniel Petit, selon l'expérience de la greffière et selon l'expérience qu'on a eue avec le plan Dion de 700 millions de dollars, notre mandat a toujours été de donner nos opinions à la Chambre des communes. Ce comité est créé en vertu de la Loi sur les langues officielles, qui nous confère le mandat de faire des recommandations.
Je m'excuse de l'interruption, mais on vient d'apprendre que la motion se rapporte au mauvais article. À quel article doit-elle se rapporter?
M. Petit a raison en ce qui concerne l'article 108(2), mais pour ce qui est de l'article 108(3)f)...
Peu importe que la motion soit ou non présentée en vertu de l'article 108(3)f), son contenu n'est pas dans les cordes du paragraphe (3)f). Je pense qu'il y a un problème en ce qui concerne ce paragraphe. Nous avons une armée de greffiers et de personnes aptes à nous conseiller. Pourquoi ne pas leur demander si cette motion est conforme au paragraphe (3)f)? Au nombre où ils sont, ils vont sûrement être en mesure de nous faire part d'un avis juridique d'ici jeudi.
Monsieur l'analyste a dit qu'il avait fait une vérification. Or, c'est faux: j'ai vérifié. Il y a une interprétation beaucoup plus large, mais ce n'est pas le cas de ce point précis. Nous fonctionnons avec ce document jusqu'à preuve du contraire.
La motion est disponible depuis deux semaines déjà. Je pense qu'il aurait été très simple pour le député d'en saisir la greffière avant aujourd'hui.
Compte tenu de tout cela, je propose qu'on ne s'arrête pas. S'il s'avère que ce n'est pas dans notre mandat, la motion sera tout simplement déboutée. Il reste que ça ne devrait pas nous arrêter. On a essayé de trouver un terrain d'entente en changeant d'article, mais maintenant, on ne parle plus de numéro d'article mais de contenu.
Je ne veux pas qu'on tourne en rond. D'ailleurs, le vote a été demandé sur l'amendement et sur la motion au complet.
Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?
[Traduction]
Il n'y a plus d'autres interventions?
Madame Boucher.
[Français]
Il y a eu un premier amendement présenté par M. D'Amours. Il faudrait donc le soumettre au vote.
Voulez-vous que je vous dise de quoi il s'agissait?
Monsieur D'Amours propose d'ajouter, après les mots « établi dans l'année fiscale 2005-2006 », les mots « de garantir la pérennité de ce programme ».
Y a-t-il un débat à ce sujet?
Je crois qu'il y a un petit problème de traduction avec la version anglaise, j'ai sous les yeux « fiscal 2005-2006 », sans le mot « year ». Y a-t-il une différence entre l'anglais et le français?
[Français]
Ça doit être « fiscal years ».
[Traduction]
Oui, il semble y avoir une faute dans la version anglaise. Il faudra la corriger.
Merci d'avoir soulevé ce détail.
[Français]
Il faut demander si tout le monde est en faveur de la motion de Mme Barbot visant à remplacer l'article 108(2) par l'article 108(3)f).
Selon ce qui est écrit dans la motion, il faudra la présenter à la Chambre, probablement demain ou dès que nous aurons pu lui donner la forme d'un rapport.