:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je remercie le Comité permanent des langues officielles de l’invitation à discuter du Programme des langues officielles de la Défense nationale.
[Français]
J'aimerais vous présenter les gens qui m'accompagnent, Gérard Finn, Renald Dussault et Marcel Charlebois. Ils sont ici pour répondre aux questions de détail, car ils connaissent le dossier depuis plus longtemps que moi. Il est tout à fait possible que j'aie besoin de leur aide pour répondre à vos questions.
Le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes ont pour mission de défendre le Canada ainsi que les intérêts et les valeurs des Canadiens et des Canadiennes. Ils contribuent également à la paix et à la sécurité dans le monde.
Ma comparution s'inscrit dans le contexte d'un long dialogue avec les Forces canadiennes sur la dualité linguistique. Depuis presque un siècle, les Forces canadiennes essaient de faire face à leurs responsabilités envers leurs membres francophones et leurs familles. Depuis le rapport Laurendeau-Dunton, il y a presque quatre décennies, ce dialogue s'est intensifié. Tous mes prédécesseurs se sont inquiétés du lent progrès des Forces canadiennes et ont constaté des problèmes significatifs en matière de respect de la Loi sur les langues officielles. Aujourd'hui, à la suite d'un rapport sur une plainte du regretté député Benoît Sauvageau, nous voyons la dernière version de la réponse des Forces canadiennes et son dernier aveu d'échec.
À cause de leur mandat particulier, les Forces canadiennes se sont toujours considérées comme différentes des autres institutions gouvernementales en ce qui a trait à l'application de la Loi sur les langues officielles. Je conviens qu'il existe des différences opérationnelles importantes entre les Forces canadiennes et la fonction publique fédérale. Entre autres, contrairement au fonctionnaire qui choisit son lieu de travail, le militaire est affecté, selon ses qualifications, à une mission précise, n'importe où au pays ou dans le monde. Après quelques années, il est réaffecté à une autre mission, toujours selon les besoins opérationnels établis par les Forces canadiennes. On me dit qu'il y a 10 000 transferts par année. La réalité linguistique de l'individu ne joue pas un rôle déterminant dans la décision.
Il est important de signaler que la Loi sur les langues officielles n'accorde pas de statut unique ou distinct au ministère de la Défense nationale et aux Forces canadiennes. La Loi sur les langues officielles s'applique de la même façon à toutes les institutions fédérales.
[Traduction]
Je demeure donc d’avis que les Forces canadiennes doivent refléter les valeurs canadiennes, y compris la dualité linguistique. Elles doivent en faire la promotion et se conformer pleinement à la Loi sur les langues officielles. Au-delà des exigences législatives, il est particulièrement important que les hommes et les femmes qui choisissent de servir leur pays dans les Forces canadiennes, conscients de tous les risques que cela comporte, puissent le faire dans le respect de la langue officielle de leur choix.
Au fil des années, le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes ont toujours démontré une volonté de se conformer à la Loi sur les langues officielles. Par contre, je constate que la multitude de procédures et de politiques que ces organisations ont adoptées n’ont jamais donné les résultats escomptés. Maintenant, on nous propose une nouvelle politique, que l'on appelle l'approche fonctionnelle, et nous devrons en évaluer l’application et les résultats atteints. Cette nouvelle directive ne va pas à l’encontre de la Loi, mais l’échéance proposée de cinq ans pour mesurer les résultats est inacceptable.
Permettez-moi de vous décrire brièvement le contexte historique qui m'a amené à cette conclusion.
Voilà près de quarante ans, soit en 1969, la Commission Laurendeau-Dunton émettait une série de recommandations au ministère de la Défense nationale et aux Forces canadiennes, qui visaient l’égalité des deux groupes linguistiques. En 1972, les deux organisations ont adopté un premier plan, d’une durée de quinze ans, pour accroître le bilinguisme et le biculturalisme dans les Forces canadiennes. À l’échéance, les Forces canadiennes reconnaissaient que les objectifs n’avaient pas été atteints.
En 1988, la Défense adoptait alors une nouvelle politique visant à constituer un bassin d’officiers bilingues. L’objectif de cette approche, que l’on appelait « Corps d’officiers bilingues », voulait que tous les officiers supérieurs (en commençant par les niveaux de colonel et de capitaine de vaisseau) soient bilingues, peu importe leurs fonctions et l’endroit où ils les exerçaient. Cette politique a été modifiée à plusieurs reprises au cours des années et sa portée a finalement été atténuée. Tout dernièrement, on l’a renommée « Approche universelle ». Dix-huit ans plus tard, on arrive encore une fois à un constat d’échec et les Forces canadiennes nous proposent une autre nouvelle approche.
[Français]
Tous les commissaires aux langues officielles ont exprimé des préoccupations concernant l'application de la Loi sur les langues officielles par le ministère de la Défense nationale. Dans le cadre de plusieurs études et enquêtes, et même d'un rapport au gouverneur en conseil, mes prédécesseurs ont émis une foule de constats et de recommandations. Plusieurs d'entre eux ont déploré le processus d'affectation permettant aux militaires unilingues d'occuper des postes bilingues, et on a souvent dénoncé le manque de résultats probants des politiques linguistiques.
Dans le cadre d'un rapport d'enquête de 2001, la commissaire émettait des recommandations concernant la politique du corps d'officiers bilingues. Elle préconisait la revue des exigences linguistiques de tous les postes occupés par des officiers afin qu'elles s'imposent objectivement pour l'exercice des fonctions en cause. Elle recommandait également au ministère de relever les exigences linguistiques des postes qui nécessitaient l'utilisation immédiate des deux langues officielles et qui devaient donc être occupés par des officiers satisfaisant aux exigences linguistiques au moment de leur affectation ou de leur promotion.
Plus récemment, soit en 2005, les résultats d'une enquête effectuée au sein de la Défense nationale portaient sur la façon dont l'ensemble des Forces canadiennes tenaient compte du bilinguisme lorsqu'elles faisaient du recrutement, mutaient le personnel militaire et accordaient des nominations et des promotions. En outre, en 2006, on procédait à une vérification au quartier général de la Défense nationale afin de déterminer si le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes avaient réussi à créer un milieu de travail propice à l'usage du français et de l'anglais au quartier général, et à permettre à leurs employés d'utiliser la langue officielle de leur choix dans leur milieu de travail.
Sommairement, les principales recommandations qui découlent de ces études enjoignent les Forces canadiennes: à fixer des objectifs plus élevés en ce qui concerne la proportion des officiers et des membres du rang qui satisfont aux exigences linguistiques de leur poste ou de leurs fonctions bilingues; à inclure dans les ententes de gestion des officiers supérieurs la création et le maintien d'objectifs relatifs aux compétences linguistiques et d'un environnement propice à l'utilisation des deux langues officielles; à offrir toutes les occasions et les outils nécessaires aux militaires qui aspirent à des postes de direction d'apprendre la langue seconde en vue de maintenir ou de perfectionner leurs compétences linguistiques; à hausser le niveau de compétences linguistiques et le profil linguistique des postes bilingues de commandant d'unités bilingues à CBC, et à ne muter à ces postes que du personnel qui satisfait à ces exigences dès la mutation ou la nomination.
Qu'ont fait le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes de toutes ces recommandations? Quel sera l'impact de la nouvelle approche sur la mise en oeuvre de ces recommandations? Les réponses se font encore attendre.
[Traduction]
Nous arrivons donc à cette nouvelle approche, l'approche fonctionnelle.
Conformément à la Loi sur la défense nationale, cette approche reconnaît que les Forces canadiennes gèrent leur personnel par unité et non par poste, comme c’est le cas pour la fonction publique. Selon l’information recueillie, les Forces canadiennes sont d’avis que ce nouveau modèle rend leurs politiques en matière de formation et d’emploi plus directement conformes aux obligations prescrites par la Loi sur les langues officielles. Avec cette nouvelle approche, les Forces canadiennes s’éloignent de leur politique du corps d’officiers bilingues adoptée vers 1988. Devant l’échec de leur politique, les Forces nous proposent maintenant une toute nouvelle formule, mais sans garantie.
Je ne peux m’empêcher de remettre en question le fondement d’une telle réorientation et les raisons de l’échec de l’approche adoptée en 1988. Est-ce que la fermeture du Collège militaire royal de Saint-Jean est un facteur? Est-ce qu’on recrute suffisamment d’officiers francophones? Quelles sont les chances de travailler dans sa langue pour un soldat francophone en vertu de ce nouveau système? Est-ce que cela signifie que la formation linguistique ne commence que lorsqu’un militaire est promu colonel? Quel en sera l’impact sur le recrutement de francophones?
En ce qui concerne le Collège militaire royal de Saint-Jean, on se rappelle qu’il avait été créé par la Défense nationale explicitement pour tenter de recruter un plus grand nombre d’officiers francophones. Le Collège a ouvert ses portes en 1952 et, avec les années, il est passé de simple collège à une université complète. De plus, grâce à son emplacement dans une province de langue française, le Collège revêtait un caractère exceptionnel puisqu’il permettait aux officiers anglophones de bénéficier d’un programme d’immersion inégalable en Amérique du Nord
Durant les années 90, dans la foulée des mesures prises par le gouvernement pour assainir les finances publiques, on procédait à la fermeture de deux des trois collèges militaires existants, dont le Collège militaire Royal Roads et le Collège militaire royal de Saint-Jean.
À ce moment, le Collège militaire royal de Kingston, déjà bilingue en théorie, devenait un centre de formation des élèves officiers complètement bilingues. Malgré de réels efforts déployés par les dirigeants de Kingston, nous constations, en 1995, une certaine baisse du nombre d’élèves officiers francophones. Il serait d’ailleurs intéressant d’en connaître le nombre actuel.
Malgré tout, pendant les années 90, la Défense a réalisé certains progrès en ce qui concerne la formation professionnelle en français destinée aux soldats. Tel n’est pas le cas, toutefois, pour la formation ou le perfectionnement des officiers. En effet, on constate que lors de son ascension dans la hiérarchie militaire, un officier peut difficilement poursuivre sa formation en français.
[Français]
Les Forces canadiennes conviennent que le bilinguisme est un élément inhérent au leadership. Cependant, selon la nouvelle approche fonctionnelle, seuls les superviseurs dans une unité bilingue ou unilingue française devront maîtriser le français, à l'exception des quelques lieutenants généraux et des vice-amiraux. De fait, il y a encore trop peu de superviseurs militaires bilingues pour créer un milieu de travail propice à l'usage efficace des deux langues officielles dans les unités bilingues.
Nos enquêtes, nos études et nos vérifications ont révélé que sur une période d'environ 20 ans, le pourcentage de postes militaires bilingues comblés par des militaires bilingues a peu progressé, et se situe à 47 p. 100 seulement. C'est tout simplement inacceptable.
Enfin, il faut tenir compte du point de vue d'un francophone qui s'enrôle dans les Forces canadiennes. Même si la formation de base dans le métier qu'elle a choisi se donne en français, la recrue francophone devra tôt ou tard apprendre l'anglais. Il est pratiquement impossible de faire une carrière intéressante dans les Forces canadiennes lorsqu'on est unilingue francophone. Le membre francophone prend nécessairement du retard sur ses collègues anglophones unilingues qui, de leur côté, entament tout de suite l'apprentissage de leur carrière. Pour un soldat unilingue francophone, par exemple, une des rares possibilités de carrière consisterait à être fantassin à la base de Valcartier.
[Traduction]
En conclusion, les années 1990 ont été particulièrement difficiles pour le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes. Des compressions budgétaires les ont obligés à rationaliser leurs ressources opérationnelles et inévitablement, comme pour la plupart des autres ministères, leur programme des langues officielles a été affecté. Le Plan d’action sur les langues officielles de 2003 reconnaît que la dualité linguistique canadienne a été affectée durant ces années difficiles. Des mesures correctives ont d’ailleurs été élaborées.
En effet, le gouvernement a récemment octroyé des budgets substantiels au ministère de la Défense nationale et aux Forces canadiennes. Nous tournons désormais la page aux années difficiles. J’ai donc bon espoir que l’ensemble du programme des langues officielles, incluant la formation linguistique des militaires, profitera des bienfaits de ce financement accru.
L’aspect budgétaire est certes important, mais il ne faut pas oublier que sans le leadership des dirigeants, la situation ne changera pas. Nous avons trop souvent vu, au fil des ans, des changements de procédures et des modifications aux politiques sans pour autant constater de résultats probants. Après plus de vingt-cinq ans de refonte de toutes sortes, les Forces canadiennes ont fait le tour de la question. Il est plus que temps qu’elles établissent des initiatives claires sur les langues officielles avec des objectifs mesurables.
On ne peut plus se permettre d’accuser un autre échec, tel que l’a été l’approche universelle des Forces canadiennes. Il est inacceptable que le ministère de la Défense nationale se donne cinq ans pour concrétiser les principaux éléments de sa nouvelle politique.
Je tiens à préciser que, bien que cette nouvelle politique tienne compte de certaines des recommandations émises par ma prédécesseure, ni elle, ni moi n’avons entériné la nouvelle approche. Je vous assure que l’approche fonctionnelle sera analysée cette année, lorsque nous entreprendrons le suivi d’enquête concernant la langue de travail au ministère. Elle sera également revue lors du suivi de notre vérification au quartier général de la Défense nationale prévue l’an prochain
[Français]
Je m'attends donc, dès le début de mon mandat, à ce que le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes démontrent des résultats concrets. On vise des résultats.
Merci beaucoup. Je suis prêt à répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
Bienvenue, monsieur le commissaire Fraser.
C'est pour moi un très grand plaisir de vous voir ici, dans le rôle de commissaire aux langues officielles. Je ne dis pas que vos prédécesseurs étaient moins attelés à la tâche, bien au contraire, mais je suis personnellement extrêmement contente de vous voir ici, d'autant plus qu'en écoutant votre discours, j'ai constaté que vous dressiez un portrait très musclé de ce que moi et plusieurs de mes collègues pensons de la nouvelle situation qui prévaut au sein des Forces canadiennes.
Mon orientation a toujours été que les Forces canadiennes étaient là pour protéger les Canadiens, que ce soit ici ou ailleurs, à court ou à long terme. Les Forces canadiennes projettent également une image du Canada à l'intérieur du Canada, mais aussi auprès des gens qui sont à l'extérieur du Canada.
Ce que j'ai entendu de la part de la ministre responsable des langues officielles aussi bien que de la part du ministre de la Défense nationale est que cette image allait devenir de plus en plus — elle l'est déjà — une image où le Canada est presque absolument un pays unilingue anglophone.
Vous avez dit une chose extrêmement importante. Il est parfois important de reconnaître des choses qui sont réelles, et vous l'avez fait en reconnaissant qu'un francophone unilingue, un fantassin, ne va nulle part dans l'armée canadienne, à cause des règlements en place, à cause de la façon dont les cours ont été organisés. Je suis une ancienne linguiste, monsieur le commissaire. Vous pouvez donc comprendre que j'ai un point de vue à ce sujet.
J'aurais un commentaire à faire et une question à poser. Mon commentaire, je l'ai fait au ministre de la Défense nationale. Quand on organise des cours de langue, on tient compte de plusieurs critères. On tient compte d'abord des objectifs que l'on se donne et, à la fin du compte, on fait l'évaluation des objectifs que l'on s'est donnés. Or, l'objectif que j'ai vu dans ce nouveau programme des Forces canadiennes est un objectif que je qualifierais de médiocre, pour ne pas dire plus.
Ensuite, il y a la motivation que l'on donne aux personnes qui suivent le cours. Dans ce sens, étant donné ce que vous venez de nous décrire, je n'exagère pas trop en disant que la motivation n'est pas grande, sinon presque inexistante. Je parle des anglophones qui doivent apprendre le français.
Ensuite, on tient compte des outils que l'on donne aux personnes qui apprennent et à celles qui enseignent. Encore une fois, le contexte que vous avez décrit par rapport au Collège militaire royal de Saint-Jean, qui était un excellent contexte et qui donnait une espèce de cours d'immersion non seulement au collège lui-même mais également à la ville, démontre que les outils que se sont donnés et que continuent à se donner les Forces canadiennes vont en se détériorant. Évidemment, nous ne savons pas grand-chose de l'évaluation.
En tant qu'ancienne linguiste, je ne comprends pas pourquoi on a choisi de faire une évaluation cinq ans plus tard. Pourquoi ne pas avoir choisi de la faire après 15 ans, tant qu'à faire?
Enfin, un mot revient souvent dans votre texte, soit le mot « inacceptable ».
Ce sont les commentaires que j'avais à faire pour vous dire à quel point je suis contente de vous entendre. Peut-être voudrez-vous commenter ce que je viens de dire, mais j'aimerais aussi que vous commentiez ce qui suit. On nous a dit que dorénavant, si j'ai bien compris, les unités des Forces canadiennes seraient plus ou moins divisées en unités linguistiques: d'une part, les anglophones; d'autre part, les francophones. Cela me rappelle un peu ce qui s'est produit lors de la Deuxième Guerre mondiale, alors que dans plusieurs pays, y compris les États-Unis, on avait des unités noires et des unités blanches. Les deux ne devaient pas se rencontrer. Si on veut que les Forces canadiennes soient le reflet de notre société, il faut absolument que les gens travaillent ensemble. Donc, de prime abord, je suis contre cette idée d'avoir des unités linguistiques séparées. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet, s'il vous plaît.
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Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je tiens à remercier le commissaire d'être parmi nous.
La première fois que vous avez comparu, je n'étais pas présent, mais il me fait plaisir de vous rencontrer aujourd'hui, vous et les membres de votre équipe. Vous êtes les serviteurs du Parlement et les gardiens de la Loi sur les langues officielles.
J'ai aimé la manière dont vous avez parlé des langues officielles. Je pense que vous êtes sérieux à ce sujet. Vous l'avez écrit dans votre livre Sorry, I Don't Speak French. Ça dit bien des choses. Les mots « I don't speak French » font penser aux Forces canadiennes.
Vous avez dit trouver l'approche universelle intéressante. C'est un peu comme une vision. À partir de cette vision, on recule. C'est du moins la façon dont je perçois les choses. Dans le cas de l'approche fonctionnelle, il s'agit de suivre la loi. Si on n'est pas satisfait, on change la loi. C'est aussi simple que ça.
Je ne suis pas un expert, mais je crois savoir que les plus hauts gradés de la Défense doivent être bilingues alors que ceux travaillant à un niveau moins élevé n'ont pas à l'être. Ça équivaut pratiquement à dire aux jeunes qu'ils n'ont pas à s'inquiéter, qu'ils peuvent aller à l'école mais n'auront pas à apprendre les deux langues officielles. On sous-entend que le bilinguisme n'est pas important, qu'à la suite de leur enrôlement dans les Forces canadiennes, on n'aura plus le temps de faire quoi que ce soit d'eux et qu'on va donc s'organiser pour leur trouver une petite place ici ou là.
Monsieur le commissaire, il est regrettable que l'ancien gouvernement libéral ait fermé la base militaire de Saint-Jean. Il ne faut pas l'oublier. Parfois, on ne dit pas les choses telles qu'elles sont. On utilise des mots comme « anciennement », par exemple. Il reste que les libéraux ne nous ont pas aidés.
Maintenant que j'ai précisé où l'on est rendu, d'où l'on vient et le fait qu'on n'a pas avancé, je vais aborder la liste des 12 recommandations du commissariat, que j'ai en main. Cette semaine, la ministre a témoigné devant le comité et elle a parlé, si j'ai bien compris, des 10 recommandations qui avaient été suivies. Deux des recommandations n'auraient donc pas été suivies? S'agit-il des deux plus importantes?
:
C'est encore à moi? C'est parfait.
[Traduction]
Comme je le disais plus tôt, si au sein d'une unité il vous faut 15 majors et que certains d'entre eux doivent être bilingues, l'armée ne consacrera pas de temps et d'efforts à s'assurer que Pierre Lemieux, qui est bilingue, soit affecté à l'un de ces postes bilingues parce que, d'une certaine façon, cela importe peu. Ce qui compte, c'est que cette unité compte un officier bilingue et offre des services bilingues. Voilà ce qui compte.
C'est très important, car l'un des éléments essentiels de ce nouveau régime est la façon dont on évalue son succès. Dans l'ancien système, le succès était évalué poste par poste. Il arrivait qu'il y ait 10 postes bilingues et qu'il y ait aussi 10 officiers bilingues dans une unité qui n'étaient toutefois pas nécessairement affectés à ces 10 postes bilingues. On pourrait considérer cela comme un échec, mais ce n'était pas le cas. Les 10 officiers étaient bien présents au sein de cette unité, mais pas affectés aux 10 postes bilingues. Voilà ce que je voulais signaler.
Vous avez aussi fait une observation sur les corps de métier.
[Français]
Dans le service de génie électronique et mécanique, j'étais responsable des techniciens, des chars blindés, des armes à feu, etc.
[Traduction]
Vous avez dit qu'il était possible pour un soldat d'être affecté immédiatement à un poste en particulier et vous avez dit que c'est ainsi que ça marche, mais il y a en fait beaucoup plus de stabilité que cela.
Exceptionnellement, quand les circonstances le permettent, en effet, on peut devoir muter quelqu'un sans délai, mais la planification de carrière se fait chaque année. Tout cela suit un cycle; les affectations se font selon un cycle.
[Français]
Si quelqu'un veut aller au Québec, il faut qu'il le demande, il faut considérer les besoins des Forces canadiennes. Si ça convient à la personne, si ça convient aux Forces canadiennes, ça peut se faire.
:
Si vous aviez vu la vidéo, vous auriez pu constater la difficulté du ministre à me répondre en français. En réalité, ç'aurait été ainsi s'il avait eu à me donner un ordre et si j'avais été un unilingue francophone. Je respecte néanmoins le fait que des gens parlent seulement l'anglais et que d'autres parlent seulement le français.
Par contre, lorsqu'on occupe un poste à un niveau supérieur et qu'on se doit de donner des instructions, des ordres, on ne peut pas, en tant que Canadiens, risquer de ne pas comprendre ce qui se passe. Il ne peut donc exister des unités francophones, des unités anglophones et des unités bilingues.
Vous avez bien décrit la situation, plus tôt. En effet, vous avez dit qu'une personne peut être envoyée dans une autre région parce que là est le besoin. Par ailleurs, cela ne veut pas nécessairement dire que cela sied à la situation particulière de cet individu.
À mon avis, il ne s'agit pas de déclarer que l'ensemble des soldats-élèves ou des soldats doit être bilingue. Je parle spécifiquement de ceux qui donnent les instructions et les ordres aux subalternes. Les commentaires que j'ai adressés au ministre mardi ont trait à une question de santé et de sécurité.
Monsieur le commissaire, en réponse à une question de mon collègue , vous avez dit plus tôt qu'il y avait un risque.
Reconnaîtrez-vous comme moi que si on a l'impression... Je comprends que vous disiez qu'on va voir les résultats, mais je pense sérieusement qu'il y a un risque. Or, s'il y en a un, cela veut dire dès le départ qu'il y a un problème. En effet, si l'on détermine qu'il y a une possibilité de risque, on est en situation problématique.
Si l'on reconnaît ce fait, pourquoi n'agit-on pas? Pourquoi laisse-t-on aller les choses et déclare-t-on que ce n'est pas nécessaire? Pourquoi faut-il prendre le risque en ce moment même, alors que des gens peuvent peut-être ne pas bien comprendre?
Je reviens à ce que j'ai dit au ministre mardi. Je comprends l'anglais, c'est une chance. Bien qu'il existe un service d'interprétation simultanée, je n'en ai pas eu pas besoin. Cependant, je suis convaincu que le simple soldat ne bénéficie pas d'un service d'interprétation simultanée qui le suit et qui lui souffle à l'oreille la traduction des propos d'un autre.
Imaginez-vous les relations étroites que ces individus doivent entretenir quotidiennement parce qu'on ne les respecte pas complètement en ce qui concerne leur langue maternelle?