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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 060 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 19 juin 2007

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Français]

[Traduction]

    Bienvenue au Comité permanent des langues officielles. Nous en sommes à la 60e réunion ce matin.

[Français]

    Ce matin, nous avons le plaisir de recevoir M. Michel Doucet, professeur expert en droits linguistiques à la Faculté de droit de l'Université de Moncton, qui sera suivi de Mme Louise Aucoin, présidente de la Fédération des associations de juristes d'expression française de common law du pays. Enfin, on terminera par une présentation de l'Association du Barreau canadien donnée par Mme Tamra Thomson, directrice de la législation et réforme du droit, ainsi que par Mme Melina Buckley, représentante.
    Sans plus tarder, nous allons commencer à écouter nos témoins. Je vous inviterais, professeur Doucet, à entamer votre exposé.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais tout d'abord remercier les membres du comité de m'avoir invité aujourd'hui à faire une présentation sur le Programme de contestation judiciaire. J'ai préparé un texte que je vais présenter et je serai certainement disposé, par la suite, à répondre aux questions du comité.
    Depuis sa création en 1978, le Programme de contestation judiciaire du Canada aura permis de clarifier et de préciser un grand nombre de questions juridiques entourant les droits linguistiques au Canada. Malgré ces progrès notoires sur le plan judiciaire, il subsiste encore aujourd'hui de nombreuses questions non résolues autour de l'application des droits linguistiques et il subsiste également de nombreux problèmes quant à la mise en oeuvre effective de ces droits.
    Les droits linguistiques de nature constitutionnelle se retrouvent aux articles 16 à 23 de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'aux articles 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 et 23 de la Loi de 1870 sur le Manitoba. Avant l'adoption de la Charte, on ne comptait que quelques arrêts de la Cour suprême portant sur l'interprétation des droits linguistiques. Cette jurisprudence, même si elle établissait certains principes de base importants, n'a pas beaucoup contribué au développement des communautés linguistiques en situation minoritaire. Il était impossible d'en dégager une véritable théorie des droits linguistiques au Canada.
    Ce n'est qu'avec l'arrivée de la Charte et l'établissement du PCJ que nous verrons des intervenants conduire les dossiers qui amèneront la Cour suprême à énoncer les grands principes qui mèneront à l'établissement de ce que nous pouvons maintenant caractériser comme une théorie des droits linguistiques. Cette nouvelle approche du plus haut tribunal du pays sera énoncée clairement dans l'arrêt de principe R. c. Beaulac, où la cour favorisera une interprétation fondée sur l'objet des droits linguistiques. Je cite un passage de la décision :
Les droits linguistiques doivent dans tous les cas être interprétés en fonction de leur objet, de façon compatible avec le maintien et l'épanouissement des collectivités de langue officielle au Canada.
     Les communautés francophones et acadiennes vivant en milieu minoritaire se sont abondamment prévalues du système judiciaire depuis 1981, principalement dans le domaine des droits scolaires, pour donner vie aux droits qui leur avaient été reconnus par la Charte. Les décisions rendues par les tribunaux dans toutes les provinces canadiennes et à tous les niveaux sont venues préciser la portée des droits linguistiques. Ce développement sans précédent aurait été impensable sans l'aide financière accordée par le PCJ. Par son existence, le PCJ a donné une légitimité aux recours en justice pour la reconnaissance, l'affirmation, la confirmation et l'implantation des droits linguistiques.
    Les communautés francophones vivant en milieu minoritaire n'auraient pas eu, sans le soutien du PCJ, les moyens de porter la reconnaissance de leurs droits devant les tribunaux. D'autant plus que la partie adverse, ce sont souvent les gouvernements, fédéral ou provincial, avec des ressources financières et humaines pratiquement illimitées.
    En somme, l'existence du PCJ va bien au-delà du simple financement de litiges. Elle participe et sert de moteur au développement des communautés minoritaires de langue officielle qui, dans plusieurs régions, se sentent parfois isolées ou oubliés. Elle participe à l'amplification du bien commun, soit le maintien et le développement des langues officielles au Canada et, finalement, elle participe au développement démocratique en rappelant aux autorités que la démocratie ne se limite pas uniquement à la règle de la majorité mais que, dans un État de droit où la règle constitutionnelle est suprême, l'accès à la justice assure à la minorité le moyen de faire respecter par la majorité ses droits.
    Ainsi, il est fort probable que le droit à l'enseignement dans la langue de la minorité, reconnu à l'article 23 de la Charte, ne serait pas devenu une réalité sans les décisions judiciaires. Ces décisions judiciaires n'auraient probablement jamais été rendues sans l'appui financier du PCJ, qui aura permis à des citoyens ordinaires de mener, parfois dans des conditions très difficiles, une action en justice pour faire respecter notre loi suprême: la Constitution du Canada. Aujourd'hui, s'il existe des écoles et des commissions scolaires de la minorité dans toutes les provinces et territoires du Canada, nous en sommes grandement redevables au PCJ.
    Le PCJ facilite un accès plus grand au système de justice pour les individus et les groupes dont les droits linguistiques ne sont pas reconnus ou sont brimés. Il contribue de façon importante à la clarification de ces droits. Il joue un rôle important en faisant progresser la compréhension des dispositions constitutionnelles relatives aux droits linguistiques. Il a permis aux groupes de langue officielle de contester des politiques ou des pratiques qui violaient leurs droits. Il a joué un rôle de premier plan dans la plupart des contestations judiciaires liées à ces droits depuis 1978.
(0905)
    Il reste encore aujourd'hui plusieurs questions qui ne sont pas résolues et qui nécessiteront à l'avenir l'intervention des tribunaux. Le rapport préliminaire du commissaire aux langues officielles sur les plaintes déposées suite à l'abolition de ce programme en identifie d'ailleurs plusieurs.
    La décision d'abolir le PCJ m'apparaît d'autant plus surprenante qu'en juin 2002, le ministère du Patrimoine canadien avait retenu les services d'une firme de consultants externes, la Prairie Research Associates, pour l'aider à mener une évaluation sommative du PCJ. Cette évaluation avait conclu, entre autres, que le PCJ répondait toujours aux besoins à l'origine de sa création, ce qui justifiait sa continuation. Cette évaluation a d'ailleurs mené à la reconduction du PCJ pour la période de 2003 à 2009.
    Entre autres, ce rapport concluait et je cite :
Selon l'évaluation, le PCJ répond aux besoins à l'origine de sa création, et ses activités sont en accord avec les objectifs stratégiques établis par le ministère en avril 2000, en particulier en ce qui concerne l'engagement des citoyens et la promotion des langues officielles.
    Que s'est-il passé depuis cette étude et la décision actuelle de mettre de coté le Programme de contestation judiciaire? Sur quelle étude autonome s'est-on fondé pour affirmer que le PCJ ne répondait plus aux aspirations des Canadiens et qu'aujourd'hui, la loi de la majorité devrait être celle qui prévaut? Encore aujourd'hui, nous attendons des explications. Ces explications nous seront peut-être fournies lors de la réponse du gouvernement au rapport préliminaire du commissaire aux langues officielles, le 21 juin prochain, ou lors du dépôt, le 22 juin, de sa réponse à l'action intentée contre lui suite à sa décision. Je doute toutefois que ces explications soient plus convaincantes aujourd'hui qu'elles ne l'étaient à cette époque.
    Avant de terminer et de répondre, le cas échéant, à vos questions, permettez-moi de rappeler aux membres de ce comité l'engagement pris par le Parlement lors de l'adoption de la Loi sur les langues officielles.
    Cette loi constitue une des pierres angulaires du bilinguisme au niveau fédéral. Elle est une loi quasi constitutionnelle, c'est-à-dire un instrument flexible et organique qui est tourné vers l'avenir et qui traduit la réalité linguistique du Canada en même temps que ses aspirations. Le désir du législateur, lorsqu'il a adopté la loi en 1988, était de la rendre conforme aux obligations linguistiques inscrites dans la Charte. Il visait à favoriser la progression vers l'égalité des langues officielles et à donner aux droits linguistiques garantis un caractère exécutoire.
    La loi est fermement ancrée dans le paragraphe 16(1) de la Charte, qui prévoit que le français et l'anglais sont les langues officielles du Canada, qu'elles ont un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du Parlement et du gouvernement, et que le Parlement doit favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais.
    Par le truchement de la loi, le Parlement oeuvre à la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français, conformément à la Charte. Dans ce contexte, la partie VII de la loi prend toute son importance.
    Par l'intermédiaire de l'article 41 de la loi, le gouvernement fédéral a l'obligation de favoriser l'épanouissement des minorités linguistiques francophones et anglophones du Canada et d'appuyer leur développement, ainsi que de promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. Afin d'atteindre cet objectif, les institutions fédérales concernées doivent prendre des mesures positives pour mettre en oeuvre cet engagement. Les articles 42 et 43 de la partie VII imposent au ministre du Patrimoine canadien la responsabilité de susciter et d'encourager la coordination et la mise en oeuvre par les institutions fédérales de l'engagement pris et codifié à l'article 41 de la loi.
    La partie VII représente toujours ce qu'il y a de plus original dans la loi adoptée en 1988. Deux des dispositions du préambule lui sont consacrées en exclusivité. L'article 2 de la loi, lequel définit l'objet de celle-ci, consacre à la partie VII l'un de ses trois paragraphes de fond.
    La partie VII est un prolongement des droits reconnus dans la Charte, qui stipule que le français et l'anglais sont les langues officielles du Canada et qu'ils ont un statut et des droits égaux quant à leur usage dans les institutions du Parlement. Son adoption visait donc à donner effet à un principe des plus importants, soit celui de la progression vers l'égalité de statut ou d'usage du français et de l'anglais au Canada.
(0910)
    Étant donné ce que le législateur a inscrit dans la Charte et dans la loi, qui dans cette salle peut sans broncher et sans cligner des yeux affirmer que la décision de cesser de financer le PCJ sert à « favoriser l'épanouissement et le développement des communautés de langue officielle » et que cette décision favorise la « progression vers l'égalité » des langues officielles? Qui peut affirmer que cette décision est conforme à la partie VII de la loi que vous avez unaniment adoptée en 2005?
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Doucet.
    Nous allons passer la parole à Mme Aucoin.
    Bonjour, monsieur le président et membres du comité.
    Merci de m'avoir invitée à témoigner devant votre comité au sujet du Programme de contestation judiciaire du Canada, le PCJ. La Fédération des associations de juristes d'expression française de common law, la FAJEF, regroupe sept associations de juristes d'expression française représentant 1 200 juristes. La FAJEF voit à la promotion et à la défense des droits linguistiques des minorités francophones dans le secteur de la justice au Canada. La FAJEF est aussi membre de la FCFA, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada.
    La FAJEF tient d'abord à souligner qu'elle croit fortement au rôle déterminant qu'a pu avoir le PCJ pour favoriser l'épanouissement des minorités francophones ainsi que la pleine reconnaissance et la promotion de l'usage du français dans la société canadienne. D'ailleurs, le bilinguisme judiciaire a beaucoup progressé à cause des contestations judiciaires qui ont bénéficié de l'appui du PCJ, comme dans les affaires Beaulac et Donnie Doucet.
    En supprimant le financement au PCJ, il risque d'y avoir au mieux une stagnation, et au pire, un recul en matière de droits linguistiques, ce qui augure très mal pour le respect de la partie VII de la Loi sur les langues officielles du Canada, comme vient de le souligner mon collègue Me Doucet.
    Dans notre cas, plus particulièrement, nous nous préoccupons de toute la question de l'accès à la justice en français. La FAJEF est très préoccupée de l'impact que la suppression du financement aura sur la capacité des communautés francophones et acadienne à défendre leurs droits constitutionnels. D'ailleurs, nous entendons parler de certains groupes ou de particuliers francophones qui n'ont pas les moyens de défendre leurs droits linguistiques devant les tribunaux. Leur situation n'est pas compliquée: pas de financement, pas d'accès, pas de défense de leurs droits linguistiques et, dans une plus large mesure, pas de progrès des droits linguistiques.
    D'ailleurs, la FAJEF est déjà victime de cette situation, car nous ne pouvons pas, en ce moment, intervenir dans des causes comme nous l'avons fait dans différentes causes qui se sont présentées à la Cour suprême du Canada.
    Il est à noter que c'est grâce au PCJ si plusieurs des communautés francophones et acadienne ont des services, des institutions telles que des écoles, dans leurs communautés. L'abolition du PCJ appauvrit aussi le bénéfice de citoyenneté canadienne, en particulier pour les minorités linguistiques francophones du Canada. Pourquoi? Parce qu'un francophone qui choisit de vivre dans une province où il sera minoritaire pourrait être obligé de payer lui-même pour faire respecter ses droits linguistiques constitutionnels. Comme vous le savez très bien, cela peut coûter très, très cher, jusqu'à des centaines de milliers de dollars, pour faire respecter nos droits au Canada. Si un francophone minoritaire a des droits linguistiques mais qu'il ne peut pas les faire respecter, qu'est-ce que ça donne?
    En abolissant le financement du PCJ, le message transmis aux minorités francophones est le suivant: c'est votre langue, c'est votre problème, la protection des droits linguistiques des francophones n'est pas une question d'intérêt public et elle ne mérite pas d'être appuyée financièrement par le gouvernement fédéral. Nous pensons que ceci est très grave. Si la suppression du financement du PCJ découle du fait que certains groupes ou individus ne reçoivent pas de financement, la FAJEF ne voit aucun problème à ce que le mandat du PCJ soit élargi, en autant que cela ne se fasse pas aux dépens des moins nantis et des minorités linguistiques. D'ailleurs, nous considérons que le débat des idées devant les tribunaux est sain, mais ce n'est pas en éliminant l'accès à la justice aux moins nantis et aux minorités linguistiques qu'un tel débat aura lieu.
(0915)
    Si la suppression du financement au PCJ est fondée sur le principe que le gouvernement fédéral ne devrait pas contribuer à des contestations contre lui-même, il faudrait alors réformer le système d'impôt. Par exemple, un média peut présentement réclamer des dépenses d'affaires et réduire ainsi ses impôts dans le cas d'une contestation constitutionnelle contre le gouvernement fédéral portant sur la liberté d'expression, l'article 2 de la Charte. Étant donné la nature et l'évolution du droit, la FAJEF croit fermement qu'un programme peut-être similaire ou du moins, au minimum, équivalent au Programme de contestation judiciaire doit être une partie importante de notre système.
    C'étaient mes quelques commentaires. Il me fera plaisir de répondre à vos questions.
    Merci, madame Aucoin.
    Nous allons continuer avec l'Association du Barreau canadien. M. le greffier, un document a été distribué. Je tiens à informer les témoins que le document que vous avez présenté a été distribué aux parlementaires.

[Traduction]

    L'Association du Barreau canadien est heureuse d'avoir de nouveau l'occasion de prendre la parole en faveur du programme de contestation judiciaire.
    L'ABC est une organisation nationale qui représente plus de 37 000 juristes d'un bout à l'autre du Canada. Notre objectif est l'amélioration de la loi et de l'administration de la justice, dans une optique du respect de la règle de droit. Nous croyons que l'élimination du programme de contestation judiciaire aura de graves conséquences sur la primauté du droit et l'administration de la justice au Canada.
    Vous avez sous les yeux deux lettres que nous avons écrites au cours des derniers mois, l'une au premier ministre et aux ministres responsables du programme, et l'autre à vos collègues du comité du patrimoine canadien. Nous y exposons nos préoccupations au sujet du programme et je vais demander à Mme Buckley de vous en dire plus long là-dessus.
(0920)
    Je vous remercie moi aussi de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui.
    L'Association du Barreau canadien tient absolument à ajouter sa voix au tollé qui prend de plus en plus d'ampleur au sujet de l'annulation du financement du programme de constatation judiciaire. Nous estimons catégoriquement qu'il faut dénoncer cette décision haut et fort, car cette suppression aura pour conséquence de réduire au silence des groupes vulnérables à la seule tribune où ils ont des chances égales de faire entendre leurs voix, c'est-à-dire devant les tribunaux. Nous sommes donc très heureux d'avoir aujourd'hui cette occasion d'ajouter notre voix à cette clameur d'indignation.
    Je vais vous parler du rôle du programme de manière un peu plus générale que mes collègues ne l'ont fait, à cause de la position de l'Association du Barreau canadien à ce sujet. Évidemment, nous ne représentons pas les communautés de langues officielles, mais nous appuyons sans réserve leurs efforts déployés par l'entremise du programme.
    Je voudrais vous dire pourquoi nous avons besoin du programme de contestation judiciaire, quel rôle il joue au Canada et pourquoi tous les Canadiens ont tout lieu d'être inquiets de l'élimination de son financement.
    Comme Mme Thomson l'a dit, la principale préoccupation de l'ABC est l'accès à la justice. Nos tribunaux ont établi très clairement le lien entre l'accès à la justice et l'accès aux tribunaux et la primauté du droit dans la jurisprudence constitutionnelle canadienne. Pour que la loi soit vraiment efficace et que les droits constitutionnels aient vraiment un sens au Canada, il faut que les gens, les particuliers et les groupes aient accès aux tribunaux pour faire établir l'étendue et la portée de leurs droits.
    La Constitution établit des droits importants, y compris ceux qui étaient défendus par le programme de contestation judiciaire, les droits des groupes minoritaires de langue officielle à l'éducation et aux services gouvernementaux dans la langue de leur choix ou leur langue première, ainsi que le droit de chacun au Canada à l'égalité devant la loi. Comme je l'ai dit, ces droits n'ont aucune signification à moins qu'il n'y ait une manière de les faire appliquer.
    Les tribunaux canadiens ont reconnu de longue date qu'il serait « presque pervers » — cette expression est tirée textuellement de l'un des arrêts rendus par la Cour suprême — de s'attendre à ce que les gouvernements appliquent et contestent simultanément leurs propres lois ou qu'ils mettent en oeuvre des programmes et des politiques tout en les contestant en même temps devant les tribunaux. En conséquence, notre système de justice a reconnu qu'il était dans l'intérêt public de permettre des litiges pour combler ce vide, prenant conscience que ce n'est pas un rôle que le gouvernement peut jouer. Le programme de contestation judiciaire a joué un rôle extraordinairement important en facilitant les litiges de ce type dans les domaines faisant partie de son mandat.
    En passant, je signale brièvement que l'Association du Barreau canadien n'est nullement réconfortée quand les gouvernements promettent de respecter la Constitution. Bien sûr, tous les gouvernements croient agir conformément à la Constitution et cette responsabilité incombe au premier chef au gouvernement. Il est arrivé très rarement au Canada que le gouvernement ait sciemment ou délibérément violé la Constitution.
    La question est de connaître l'étendue des droits constitutionnels. En fait, c'est seulement au moyen d'une affaire entendue devant les tribunaux que l'on peut peser, mettre à l'épreuve et équilibrer ces droits. Il n'y a vraiment pas d'autre moyen que le litige pour y parvenir. C'est en appliquant les normes constitutionnelles en évolution constante à des situations et des faits précis que nous pouvons réellement connaître la portée de ces droits. Je pense que l'expérience dans le dossier des droits linguistiques a fait très clairement ressortir la valeur de cet outil.
    En l'absence d'une intervention proactive au moyen du programme de contestation judiciaire pour aider les particuliers et les groupes, ces droits constitutionnels et leur application et leur interprétation seraient le privilège des gens qui ont beaucoup d'argent, des entreprises, etc. C'est tout simplement inacceptable au Canada aujourd'hui.
    Je voudrais aussi faire remarquer que le budget accordé au programme de contestation judiciaire ne représente qu'une fraction de ce qu'il en coûte en réalité pour présenter un litige constitutionnel. Des particuliers et des groupes recueillent des fonds pour aider à financer les litiges en question. Les avocats se chargent souvent du travail à un tarif réduit et leurs services sont même souvent en partie gratuits. Même si le programme de contestation judiciaire ne représente qu'un pourcentage du coût d'un litige, c'est quand même un montant extraordinairement important. En l'absence de cet apport, sans avoir l'assurance que l'on peut au moins compter sur cette source de financement pour introduire une cause, la plupart des contestations n'auraient jamais lieu.
    Le gouvernement du Canada a présenté à maintes reprises des instances à divers comités des Nations Unies, affirmant qu'il est fier de financer le programme de contestation judiciaire parce que ce dernier l'aide à assumer ses responsabilités au chapitre des droits de la personne et du droit international en ce qui a trait à l'égalité d'accès aux tribunaux et aux recours efficaces aux termes de la Constitution et des traités internationaux en matière de droits de l'homme.
(0925)
    Il est très intéressant de constater qu'à l'étranger, le gouvernement du Canada s'est montré très fier de ce programme. En fait, les comités des Nations Unies ont vraiment félicité le Canada pour cette importante initiative.
    Le programme de contestation judiciaire, comme mes collègues l'ont déjà dit, a été un succès spectaculaire, surtout dans le domaine des droits linguistiques, mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Dans le domaine des droits de la personne et des droits linguistiques, nous parlons souvent de générations de droits. Même si nous avons réalisé certains progrès, surtout dans le domaine des droits linguistiques, il reste de nouveaux domaines qui n'ont pas encore été abordés. Certaines dispositions de la Charte, par exemple, ont à peine été examinées par les tribunaux à ce jour. Dans d'autres dossiers, par exemple l'éducation et les programmes d'enseignement, bien que l'on soit un peu plus avancé que pour d'autres services gouvernementaux, il reste encore beaucoup à faire, surtout en matière de mesures concrètes de rattrapage et de portée des obligations gouvernementales.
    Quel est l'impact de cette élimination du financement du programme de contestation judiciaire? Je pense qu'on peut l'envisager à la fois à court et à long terme. À court terme, les avocats continueront de faire ce qu'ils peuvent, les groupes continueront d'essayer de recueillir des fonds pour introduire des causes, mais j'insiste vraiment sur le fait qu'il y a eu un changement en profondeur dans l'équilibre du pouvoir entre les groupes comme les groupes minoritaires de langues officielles et le gouvernement. Le gouvernement a toujours eu le dernier mot pour ce qui est de l'accès aux ressources et aujourd'hui, il sait que les groupes qu'il combattait devant les tribunaux se sont vu retirer l'une de leurs principales sources de financement. Cela a profondément affecté l'équilibre du pouvoir.
    À long terme, la situation est encore plus sombre, parce que je pense que les particuliers et les groupes vont cesser d'intenter des poursuites devant les tribunaux. C'est un outil dont ils ne disposeront plus. Par ailleurs, nous devons comprendre qu'à cause de leur statut minoritaire ou de la vulnérabilité des groupes qui ont été jusqu'à maintenant bien servis par le programme de contestation judiciaire, ils n'ont aucun véritable accès au processus politique. Donc, en fait, on leur enlève toute possibilité d'agir. Je pense que c'est un rude coup porté à la démocratie constitutionnelle canadienne et un scénario épouvantable pour un pays comme le Canada qui se targue de son bilan en matière de droits de l'homme.
    La décision de supprimer le programme de contestation judiciaire a appauvri la qualité de la gouvernance au Canada et je pense que tous les Canadiens sont appauvris par ce manque de clairvoyance qui a entraîné l'élimination subite du financement de ce programme. Ce sont les membres des groupes défavorisés et minoritaires qui sont les plus durement frappés.
    En terminant, l'ABC voudrait insister sur l'indivisibilité du programme de contestation judiciaire. On ne peut pas compartimenter les droits, pas plus que les gens. Il y a d'importants chevauchements et l'article 15 de la Charte des droits et la jurisprudence en matière de droits linguistiques et constitutionnels s'appuient mutuellement. C'est très important que les deux puissent continuer d'évoluer parallèlement.
    Ce n'est pas le temps d'importer une mentalité du type « eux contre nous » dont on constate la présence dans tellement de sociétés éprouvées par les conflits dans le monde. Les Canadiens aspirent à bâtir un pays dans lequel l'égalité est vécue par tous, et non pas un pays dans lequel certains groupes font des gains au détriment d'autres groupes. C'est la manière canadienne, selon l'Association du Barreau canadien, d'entraîner tout le monde dans le sillage du progrès collectif et de nous réjouir des avantages communs et de la solidarité qui sont renforcés quand les droits constitutionnels sont protégés et favorisés.
    Voilà ce que j'avais à dire ce matin et je me ferai un plaisir de répondre aux questions.
    Merci, madame Buckley.
    Nous allons maintenant commencer le premier tour de questions. Chaque membre du comité aura sept minutes.
    Nous commençons tout de suite avec M. Brian Murphy.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Tout d'abord, je veux remercier tous les témoins de leurs témoignages.

[Traduction]

    Je vais commencer par m'adresser à l'Association du Barreau canadien. Je suis entièrement d'accord avec votre exposé, à tel point que je ne vais pas vous poser de questions. Je vais faire part à Me René Basque, président de l'ABC au Nouveau-Brunswick, de l'excellent travail que vous faites ici. Je vous remercie pour les expressions comme « générations de droits » et « on ne peut pas compartimenter les droits ».
    Nous serons confrontés ici, et je vous invite à en faire part à l'ABC, à certains arguments fallacieux et le tout a d'ailleurs commencé à votre conférence tenue l'été dernier à St. John's, à Terre-Neuve, quand le ministre de la Justice d'alors, M. Toews, a invoqué l'argument que les gouvernements ne doivent pas financer des causes dont ils ne connaissent rien à titre de partie adverse.
    Ce que nous avons appris grâce aux recherches que nous avons effectuées ici au comité, c'est que la grande majorité des poursuites ne visent pas le gouvernement fédéral, mais plutôt les administrations municipales — j'ai quelque expérience à cet égard —, les gouvernements provinciaux et d'autres commissions ou associations. C'est donc un argument fallacieux. On vous dira probablement aussi aujourd'hui que nous devrions nous préoccuper d'autres minorités, d'autres besoins en matière de langues minoritaires, et c'est une observation valable. Mais ce qui est en cause et ce dont nous sommes censés discuter ici aujourd'hui, c'est le dossier des langues officielles.
(0930)

[Français]

    Je vous remercie pour vos commentaires. J'aurai deux questions pour Me Doucet et une pour Mme Aucoin.
     Il est très important de comprendre que l'enchâssement des droits linguistiques à l'article 24 de la Charte n'est pas la fin de la jurisprudence dans ce domaine. De l'autre côté, on a dit que la question des droits linguistiques était réglée. Est-ce le cas?
    Deuxièmement, un argument qu'on invoque contre le Programme de contestation judiciaire est que des groupes comme les gens de Dieppe, au Nouveau-Brunswick, qui est maintenant la plus riche communauté de cette province, ont les moyens de défendre leurs droits. Ils peuvent payer des avocats pour défendre leurs droits. Êtes-vous d'accord sur cet argument, monsieur Doucet?
    Madame Aucoin, en quoi l'abolition du Programme de contestation judiciaire affectera-t-elle la société acadienne?
    Merci, monsieur le député. Il a visé la ville de Dieppe, où j'habite actuellement, et je le comprends très bien.
    En ce qui concerne la question de savoir si les droits sont maintenant clairs, je suis d'accord sur ce que Mme Buckley a dit. Il y a des générations de droits. De nombreuses décisions de la Cour suprême ont clarifié une partie des droits prévus à l'article 23 relatif à l'éducation dans la langue de la minorité. Cependant, plusieurs questions touchant l'article 23 ne sont toujours pas claires. Par exemple, la notion du préscolaire en milieu minoritaire n'est pas encore clarifiée dans plusieurs provinces canadiennes, sinon toutes. Les jeunes enfants francophones n'ont pas nécessairement accès à l'école dans les meilleures conditions, c'est-à-dire en leur permettant d'apprendre ou de réapprendre leur langue première au niveau préscolaire. Ces questions devront être débattues. On parle de la gestion scolaire et des pouvoirs du ministre contre ceux des commissions scolaires. Ces questions demeurent encore à débattre et à revoir.
    Très peu de questions concernant les articles 16, 17, 18, 19 et 20 de la Charte ont été portées devant les tribunaux. Je comprends le commentaire de M. Murphy. À l'époque, il était maire de Moncton et je suis l'avocat qui avait mené la municipalité de Moncton devant les tribunaux. Il en a résulté, pour les municipalités du Nouveau-Brunswick, une obligation en matière linguistique. On en a discuté souvent à l'époque. Cette décision importante a permis de clarifier les droits et de débattre sur la place publique une nouvelle génération de droits. La Constitution est un arbre vivant qui continue à évoluer. Dans ce contexte, il est important d'avoir accès aux tribunaux pour le faire.
    Vous m'avez demandé si les communautés francophones avaient les moyens de porter des décisions devant les tribunaux. Dans certains cas, il pourrait être possible de mener une campagne de financement pour porter ces questions devant les tribunaux. Cependant, il faut se rappeler qu'on soulève des questions d'intérêt public. Un anglophone qui habite à Moncton n'a pas à débattre à savoir si la municipalité de Moncton va lui fournir les arrêtés municipaux en anglais. Il n'a pas à débattre dans la région de Saint-Jean pour avoir accès à l'école dans sa langue. À Halifax, il n'a pas à débattre pour savoir s'il aura accès à des services de santé dans sa langue. Un francophone, par contre, doit très souvent avoir recours aux tribunaux parce que ces droits lui sont refusés. Dans ce contexte, pourquoi demanderait-on aux citoyens d'engager des sommes énormes?
    Mme Aucoin a parlé de sommes de 100 000 $ pour porter une décision jusqu'à la Cour suprême. J'en ai porté plusieurs grâce au Programme de contestation judiciaire. Sans ce programme, je ne sais pas comment nous aurions mené ces dossiers. On ne parle pas ici d'honoraires d'avocats, mais uniquement de frais de photocopies qui, dans le dossier que je défendrai devant la Cour suprême l'automne prochain, dépassent les 10 000 $. Je ne fais pas des photocopies pour le plaisir d'en faire. Je réponds aux demandes de la Cour suprême, qui exige un certain nombre de photocopies. Les dossiers sont importants.
    Nous contestons le gouvernement. Il sait que nos ressources sont limitées, ce qui n'est pas son cas. Les contribuables canadiens appuient sa démarche. Dans plusieurs dossiers, des questions préliminaires sont déposées, de sorte qu'on épuise nos ressources avant même de commencer à débattre sur le fond, parce que le gouvernement est de l'autre côté et a les ressources requises. La Cour suprême nous demande de retenir les services d'un correspondant à Ottawa. Ces services coûtent à eux seuls de 4 000 $ à 5 000 $. On demande à des citoyens qui veulent obtenir le droit à l'éducation dans leur langue et dans leur municipalité de défrayer des coûts 150 000 $. S'ils y sont obligés, ils trouveront les moyens de le faire. Cependant, je crois que c'est très peu demander à l'État, qui a reconnu ces droits, de leur donner également le moyen de se défendre devant les tribunaux.
(0935)
    Merci, monsieur Doucet. C'est ce qui termine le premier tour.
    On va maintenant passer à M. Nadeau, du Bloc québécois.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous. Des témoins comme vous, en d'autres circonstances, sont venus nous parler du programme. La vaste majorité d'entre eux y étaient favorables et quelques-uns s'y opposaient. Quelque chose se dessine présentement sur le plan politique. À ce sujet, votre expertise m'est nécessaire. J'ai une idée sur la chose, mais je voudrais entendre vos commentaires.
    L'actuel gouvernement fédéral, donc le gouvernement conservateur, serait peut-être d'accord pour faire revivre l'aspect du Programme de contestation judiciaire qui touche les langues officielles, mais s'opposerait à faire de même pour ce qui touche tous les autres groupes de la société qui ont eu recours au Programme de contestation judiciaire, soit les gens handicapés, les minorités visibles, et ainsi de suite.
    Madame Buckley, madame Aucoin, monsieur Doucet et madame Thomson, j'aimerais que vous nous parliez du danger d'opposer ces aspects du programme et de n'en faire revivre qu'un, et que vous nous démontriez la nécessité, si vous jugez bon de le faire et que c'est votre vision des choses, de faire en sorte que le programme dans son entier soit remis sur pied, voire peut-être même bonifié, si nécessaire. On pourrait commencer par Mme Aucoin.
    Certainement.
    Nos communautés francophones en situation minoritaire comprennent bien sûr des francophones, mais aussi des femmes et des personnes handicapées. Nous sommes une communauté. D'aucune façon, nous appuyons l'idée que le programme vise uniquement les droits linguistiques. La communauté entière a besoin du Programme de contestation judiciaire. Une femme handicapée francophone qui demeure à Tracadie ou ailleurs risque fort d'avoir davantage besoin du Programme de contestation judiciaire qu'une autre personne. Nous pensons qu'il est très important d'avoir un programme de contestation judiciaire, peut-être sous un autre nom, mais bonifié.

[Traduction]

    Je suis entièrement d'accord avec Mme Aucoin pour dire que le programme est indivisible. Je pense que l'un des atouts du programme, surtout depuis qu'il a été rétabli en 1993-1994, c'est la manière dont les défenseurs des droits linguistiques et des droits à l'égalité ont travaillé côte à côte, et la jurisprudence a vraiment été renforcée considérablement parce que le programme a permis de rassembler divers avocats et groupes pour discuter de la stratégie à suivre, etc.
    Ce que j'essaie de dire, c'est que ce n'est pas le moment de susciter des divisions et de privilégier certains droits par rapport aux autres. Nous sommes tous canadiens et nous bénéficions tous de l'intérêt public que sert le programme de contestation judiciaire dans son ensemble. Je vous exhorte vraiment à dire très fermement que le programme doit être pleinement rétabli tel qu'il était en septembre 2006.

[Français]

    Je suis certainement d'accord avec Me Buckley quand elle dit qu'on ne doit pas compartimenter les droits. Je crois que dans le contexte actuel, c'est très important. On ne peut pas risquer que des minorités se battent l'une contre l'autre pour un os qu'on aura lancé et leur annoncer qu'un groupe va être favorisé au détriment d'un autre.
    Le Programme de contestation judiciaire est un outil essentiel de la démocratie canadienne. En effet, celle-ci n'a pas comme unique rôle de représenter la majorité: elle doit également permettre à des minorités de faire valoir leurs droits, notamment devant les tribunaux. Dans le cas présent, je suis un de ceux qui croient qu'il s'agit d'un tout et qu'il ne faut pas compartimenter les droits. Je suis de l'avis de l'ABC à ce sujet.
(0940)
    D'accord.
    Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?
    Il vous reste environ trois minutes, monsieur Nadeau.
    Merci.
    On a entendu l'argument du premier ministre, à savoir que le gouvernement actuel allait respecter la Constitution et que par le fait même, le Programme de contestation judiciaire ne serait plus nécessaire.
    Je voudrais savoir jusqu'à quel point le gouvernement fédéral, aussi vertueux soit-il, peut garantir que dans l'avenir, il va respecter la Constitution selon les règles du jeu établies. Y a-t-il des exemples de provinces, municipalités, commissions scolaires ou autres instances qui ne respectent pas la Constitution? Est-il intelligent de dire que ce programme n'est pas nécessaire, compte tenu de la réalité de la société dans laquelle nous vivons?
    Je ne connais pas un seul gouvernement qui n'ait comme intérêt premier d'adopter des lois constitutionnelles, à moins d'être de mauvaise foi, comme Me Buckley le disait tout à l'heure.
    Par ailleurs, l'histoire nous démontre que même si un gouvernement est vertueux et qu'il dit qu'il veut une loi constitutionnelle, il agit parfois même très souvent à l'encontre de la Constitution. Si vous me posez la question relativement à la décision pour le PCJ, je crois que cela va à l'encontre des dispositions linguistiques de la Charte, ce qui devrait être clarifié par les tribunaux. Il y a là une première contradiction.

[Traduction]

    J'ajouterais, bien sûr, qu'en matière de droits linguistiques, beaucoup de litiges, comme l'honorable député l'a déjà dit, sont en réalité des poursuites contre d'autres paliers de gouvernement. Le gouvernement fédéral ne peut rien faire d'autre que financer le Programme de contestation judiciaire pour s'assurer que les provinces et les municipalités respectent la Constitution. C'est sa façon de procéder et de s'assurer que les groupes et les personnes obtiennent la garantie que les autres paliers de gouvernement se conforment à la Constitution.

[Français]

    L'éducation et la santé sont deux domaines très importants pour les Canadiennes et les Canadiens. En ce qui a trait au partage des compétences, cela relève du provincial. Plusieurs causes ont été entendues par la Cour suprême du Canada, comme celle de l'Hôpital Montfort, au chapitre de la santé. Les écoles acadiennes en Nouvelle-Écosse et celles en Alberta ou en Colombie-Britannique existent grâce au Programme de contestation judiciaire. Il est donc question de choses qui touchent les Canadiennes et les Canadiens des communautés francophones au quotidien, et je pense que c'est grâce au PCJ. En effet, sans le PCJ, beaucoup de communautés n'auraient pas d'école francophone. Il n'y aurait pas non plus d'Hôpital Montfort. Le gouvernement voudrait des lois constitutionnelles, mais lorsqu'on veut clarifier nos droits, il est important d'avoir un tel programme.
    Merci, madame Aucoin.
    Nous allons maintenant passer la parole à M. Godin.
    Merci, monsieur le président.
    Premièrement, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue.
    Il y a d'abord eu l'abolition du Programme de contestation judiciaire. Maintenant, on voudrait revenir avec une demi-formule. On veut permettre les causes liées aux langues officielles et envoyer les autres ailleurs. Je n'étais pas présent lors du témoignage du dernier témoin, Mme Kheiriddin, qui est professeur de droit à l'Université McGill. Selon le journal Le Droit d'aujourd'hui, elle aurait dit, et je cite :
Si vous voulez convaincre le gouvernement de protéger les minorités linguistiques, la réponse c'est simplement de dire qu'il faut respecter la loi, a-t-elle soutenu devant le comité.
    Nous souhaitons donc qu'il soit de bonne foi. Cependant, le problème est qu'il ne la respecte pas, tout simplement. On a une belle loi, une belle Constitution qui est violée tous les jours. Vous n'avez pas les moyens de la contester et c'est bien dommage. On continue, jour après jour, comme on fait normalement, mais on ne paiera pas les gens pour leur permettre de venir contester nos propres lois, parce qu'on va les respecter. Je ferai remarquer que si on avait toujours respecté les lois, on ne serait jamais allé en cour et on n'aurait pas eu besoin de la Cour suprême non plus.
    Je poursuis la lecture de la citation du journal Le Droit :
Si l'(article) 41 (2) de la Loi sur les langues officielles requiert, par des mesures positives, que le gouvernement fasse un programme comme le PCJ, c'est là votre réponse. [...] Ce n'est pas de dire qu'il faut recréer le programme en totalité.
    C'est comme si un messie était venu de Montréal pour nous livrer un message. Ça commence à être intéressant pour le gouvernement. Quelqu'un a trouvé une solution à nos problèmes. On va diviser le groupe. Les membres du Comité permanent des langues officielles ne doivent pas parler des autres parce qu'ils sont là pour parler des langues officielles.
    Que nous ont dit les groupes qui étaient opposés au Programme de contestation judiciaire? Ils nous ont dit que le programme n'était pas juste parce qu'il ne donnait pas d'argent à tout le monde. Mettons les faits sur la table. Par exemple, des groupes ont voulu s'opposer à la loi sur le mariage des personnes de même sexe. C'était d'ailleurs peut-être le gros problème de M. Harper. Des témoins nous ont dit que certains groupes minoritaires se sont présentés devant la cour, mais sans recevoir d'argent pour cela. C'est l'argument qui a été invoqué.
    Selon moi, ils ont reçu de l'argent, en ce sens que le gouvernement lui-même a utilisé l'argent des contribuables pour se défendre contre des groupes. Chaque fois que la minorité sent qu'on abuse de ses droits, le gouvernement utilise l'argent des contribuables pour se défendre contre ces minorités. Ce ne sont pas des baisses d'impôt, mais l'impôt au complet. C'est là où il y a contrepoids.
(0945)
    Bien dit!
    Ma question pour vous est très importante, puisqu'on voit le jeu du gouvernement: il s'agit de diviser pour régner. On voit le jeu du gouvernement, c'est clair. À mon avis, cette semaine, il est clair. Les témoins sont venus; certains d'entre eux ont dit avoir trouvé la solution. Il y a eu des arguments en or de la part de la dame de l'Université McGill. Elle nous a donné les arguments dont on devrait se servir. Elle nous dit de laisser tomber les autres situations et de s'occuper seulement des langues officielles.
    Voici ma question et j'aimerais obtenir une réponse de tous les témoins. Voulez-vous qu'on en vienne à une solution seulement dans le cas des langues officielles, ou tous les aspects du programme doivent-ils être pris en considération? On ne peut pas diviser les droits de la personne, la Constitution. Il faut prendre une direction, alors c'est tout ou rien.
    Monsieur Doucet.
    Au départ, c'est vrai que ce serait simple. La solution serait de dire tout simplement qu'il faut rétablir le Programme de contestation judiciaire sur la base des droits linguistiques. C'est peut-être une solution en or qu'on a découverte hier, mais qui existe depuis toujours parce que l'abolition du programme est contraire à la Loi sur les langues officielles, le commissaire l'a dit, et contraire à la Charte. Peut-être qu'un jour les tribunaux le diront également. Ce serait peut-être la solution en or, mais je ne crois pas que ce soit la seule et celle que l'on devrait favoriser. Je dis à nouveau qu'il ne faut pas compartimenter les droits.
    Je reviens également à l'évaluation qui avait été faite par le groupe externe, en 2002, du Programme de contestation judiciaire. Je suis certain que les membres du comité ont tous lu cette évaluation faite par ce groupe indépendant pour le ministère du Patrimoine canadien et qui était très élogieux par rapport au programme comme tel. Je crois que dans ce contexte, il démontre que le programme répond aux objectifs de citoyenneté canadienne, de la Charte canadienne des droits et libertés et que c'est le programme en entier qu'il faut sauver.

[Traduction]

    Je suis entièrement d'accord avec les propos de Me Doucet. J'ajouterais, cependant, que c'est peut-être encore plus clair en droit, compte tenu de l'aspect quasi constitutionnel de la loi et du fait que les droits linguistiques constitutionnels sont mieux établis que les droits à l'égalité. Le gouvernement fédéral a une obligation positive claire dans ce domaine, cela a déjà été dit.
    On peut également faire valoir qu'en vertu de l'article 15 de la Charte, le gouvernement fédéral a une obligation positive en matière de droits à l'égalité, mais ce n'est pas aussi clair dans ce cas, car la jurisprudence est moins importante. Il faudrait qu'une nouvelle cause apporte des précisions sur cette obligation.
    Je pense donc que le gouvernement fédéral a de bonnes raisons constitutionnelles et une obligation morale de rétablir l'intégralité du Programme. L'Association du Barreau canadien s'oppose fermement au rétablissement d'une partie du Programme. Ce serait une erreur.
(0950)

[Français]

    La FAJEF pense qu'on devrait avoir un Programme de contestation judiciaire bonifié. Je pense qu'on devrait en avoir plus que ce qu'on a eu jusqu'à maintenant.
    Bonifier, ce n'est pas moins, c'est plus!
    C'est plus, oui. Je pense qu'on devrait avoir un programme... On ne devrait pas l'appeler programme. Ça ne devrait pas être un programme, mais quelque chose d'indépendant, de sorte que lorsqu'il y a un nouveau gouvernement, celui-ci ne puisse pas l'abolir. On aimerait une structure différente qui deviendrait permanente. Si on pouvait avoir quelque chose par le moyen d'une fondation, que cela devienne une structure complètement indépendante et pas seulement un programme.
    Très bien. Merci, madame Aucoin.
    Vous pourrez continuer au prochain tour, monsieur Godin.
    Maintenant, on va donner la parole à Mme Boucher.
    Bonjour, tout le monde, et merci d'être venus nous rencontrer.
    Je souris parce que j'ai un bon copain de l'autre côté de la table qui me fait sourire ce matin. C'est une chance! Je parlais de vous, monsieur Godin.
    Je vous remercie d'être là; c'est très important pour nous. Je vais poser ma question à Mme Aucoin. Quand on a rencontré des gens, autant durant notre voyage pancanadien qu'ici, certains représentants du PCJ nous ont mentionné que celui-ci avait été créé pour financer les actions en justice qui feront progresser les droits à l'égalité et les droits linguistiques garantis dans la Constitution canadienne et la Charte. Dans la documentation fournie, on pouvait lire aussi que :
Une cause est une cause type dans la mesure où elle aborde un problème ou soulève une question qui n'a pas encore été présenté devant les tribunaux; cette cause doit aider les communautés minoritaires de langue officielle du Canada à protéger leurs droits linguistiques.
    On a appris aussi que, par le PCJ, on ne pouvait pas financer les contestations des lois, des politiques ou pratiques provinciales ou territoriales, les causes abordant les questions déjà financées par le PCJ.
    J'aurais une question pour vous, madame. Avez-vous été impliquée, directement ou indirectement, dans une cause financée par le PCJ? Si oui, dans combien de causes exactement? Expliquez-moi dans quel contexte, à titre de procureur ou d'avocat, de conseiller.
    Et de maman?
    Et de maman.
     Je pense qu'on oublie parfois un aspect du Programme de contestation judiciaire. Quand nous sommes arrivés à Moncton, il n'y avait pas d'école secondaire francophone. M. Murphy était maire à ce moment-là. Pour ma part, je faisais partie d'un groupe de parents. Il y avait sept écoles secondaires anglophones dans la région du Grand Moncton et une école francophone à Dieppe, de sorte que nos enfants étaient sur la route avant 7 heures le matin et arrivaient à la maison vers 16 h 30 ou 17 heures. Je parle ici uniquement de la journée scolaire, sans qu'il soit question d'activités sportives ou d'autres activités parascolaires.
    J'étais membre, à titre de parent, d'un groupe qui réclamait une école secondaire à Moncton. Dans ce groupe de parents, il y avait des directeurs de caisse populaire et d'autres personnes bien en vue de la communauté. On a couru après le gouvernement pendant des années; on a entre autres élaboré des plans d'affaires pour tenter d'obtenir cette école. Dans cette ville supposément bilingue du Nouveau-Brunswick, on n'avait pas d'école secondaire. On courait après le gouvernement provincial, mais il ne voulait pas nous rencontrer.
    Les choses ont changé au moment où on a obtenu un peu d'argent du Programme de contestation judiciaire, soit 5 000 $, pour réaliser une étude d'impact en vue de déterminer si on avait droit ou non à une école. Dès que nous avons entamé notre action en justice, le gouvernement a commencé à nous parler. Nous avons maintenant une école secondaire francophone à Moncton.
    Oui, j'ai bénéficié de ce programme quand j'étais présidente de l'Association des juristes d'expression française du Nouveau-Brunswick, mais pas à titre personnel. On a été impliqués dans des causes, mais je n'en tirais aucun avantage financier. C'était le cas quand j'étais présidente de la FAJEF, mais jamais à titre d'avocate.
(0955)
     Il s'agissait toujours de causes reliées à l'éducation?
    C'était surtout dans le domaine de l'éducation, mais il y a aussi eu le cas de la GRC.
     D'autres veulent peut-être répondre à la même question.
    Avez-vous déjà été impliqués dans des causes, directement ou indirectement?

[Traduction]

    Oui, j'étais l'un des avocats qui sont intervenus dans l'affaire VIA Rail. Ce litige a été financé par le Programme de contestation judiciaire, l'année dernière.
    L'Association du Barreau canadien n'a jamais demandé de financement en vertu du programme. Nous avons notre propre programme pour les causes dans lesquelles nous intervenons.

[Français]

    Dans mon cas, le nombre de causes est si élevé qu'il me serait difficile de vous dire combien il y en a eu. C'était dans pratiquement toutes les provinces canadiennes.
    Incluant le Québec?
    Non, pas le Québec. C'est pourquoi j'ai dit « pratiquement toutes les provinces canadiennes ». J'ai discuté de dossiers avec des personnes du Québec, mais je n'ai pas été directement impliqué dans des causes au Québec.
    Il vous reste environ une minute et 10 secondes.
    Avez-vous réussi à gagner certaines causes, plus faciles, sans avoir recours au Programme de contestation judiciaire, le PCJ?
    Lorsqu'on soulève des questions constitutionnelles de ce genre, aucune cause n'est facile. On se rend très souvent en Cour suprême, malgré soi. On gagne en première instance et on ne voudrait pas que ça aille plus loin, mais le gouvernement porte la cause en appel et on doit la défendre; le gouvernement la porte en appel de nouveau, devant la Cour suprême, et on doit encore la défendre. Ces causes ne sont jamais faciles et font appel à une expertise particulière.
    Donc, vous n'avez jamais gagné de cause pour les francophones à l'extérieur du cadre du PCJ?
    Je suis impliqué dans les questions de droits des francophones depuis que je sais parler, je crois. Alors, évidemment, on a eu gain de cause sans avoir recours au PCJ, mais il ne s'agissait pas de dossiers aussi compliqués. On n'avait pas, par exemple, à demander au gouvernement d'établir des écoles et de respecter des lois.
    Merci, madame Boucher.
    C'est ce qui complète notre premier tour de table de sept minutes. Les tours suivants seront d'une durée de cinq minutes pour les questions, commentaires et échanges.
    On passe maintenant au Parti libéral et à Mme Folco.
    Merci, monsieur le président.
    Pour donner suite à la question que Mme Boucher vous posait tout à l'heure, je vais vous dire que, compte tenu de votre réponse, je suis très contente de constater que les personnes devant nous aujourd'hui sont toutes des personnes qui non seulement ont pensé aux droits des francophones, et des anglophones au Québec, mais ont aussi agi sur le terrain. Vous avez donc énormément d'expérience sur le terrain, et c'est ce qui fait votre puissance et certainement votre expérience.
    Je voudrais aussi ajouter, simplement pour que ce soit consigné au compte rendu, que Me Doucet disait que le programme n'avait pas vraiment été utilisé au Québec. Évidemment, au Québec, on parle des droits des minorités anglophones. Cependant, le Programme de contestation judiciaire, on nous l'a fait remarquer la semaine dernière, avait apporté énormément d'aide dans une cause extrêmement importante au Québec, celle de la clause Canada, qui permettait à des enfants dont les parents avaient étudié en anglais au Canada, ailleurs qu'au Québec, de poursuivre leurs études en anglais. Il y a donc clairement une interrelation entre les droits des uns et les droits des autres, puisque ce sont des minorités.
    J'ai une première question, mais je voudrais que vous y répondiez très rapidement. Je veux vraiment poursuivre sur la lancée de M. Nadeau. Premièrement, avez-vous été en relation avec la ministre responsable, Mme Verner, ou avec le ministère au sujet de l'abrogation du Programme de contestation judiciaire? J'aimerais que vous répondiez par un oui ou un non.
(1000)
    Non. Nous avons appelé la ministre, sans recevoir de réponse.
    Merci. C'est bien.
    Voici ma deuxième question, dans le même genre: avez-vous eu l'occasion de rencontrer la ministre depuis qu'elle a été nommée, il y a environ un an et demi, madame Aucoin?
    Non, nous n'avons pas pu la rencontrer.
    L'avez-vous demandé, Ms. Buckley?

[Traduction]

    Non.
    Merci.
    Mme Thomson?
    En toute justice, nous avons eu la possibilité de poser nos questions au ministre de la Justice de l'époque, M. Toews, avant que ne soit aboli le programme.
    Mais vous n'avez pas pu vous adresser à Mme Verner. Vous n'avez pas pu la rencontrer, n'est-ce pas?

[Français]

    Non.
    Merci.
    J'en arrive maintenant à la question que je voudrais vraiment poser et qui fait suite à la question de M. Nadeau. Elle porte sur des commentaires entendus. Je pense que ce comité est beaucoup plus avancé dans son travail depuis qu'il a rencontré presque une dizaine de témoins avant de vous rencontrer ce matin. Nous en sommes maintenant à nous poser la question suivante: peut-être que le Programme de contestation judiciaire ne devrait pas être rétabli exactement dans la forme qu'il avait auparavant.
    J'aimerais vous entendre, en tant que personnes d'expérience sur le terrain aussi bien que de personnes qui ont réfléchi à la question. Je suis aussi d'accord sur l'idée que le programme pourrait être amélioré. Quels ajouts verriez-vous à ce programme? Si jamais vous n'avez pas le temps de répondre à ma question, car je n'ai que cinq minutes, je souhaiterais vraiment que vous puissiez envoyer au président de ce comité un texte qui pourrait nous orienter et que nous pourrions incorporer à notre rapport à la ministre.
    Maître Aucoin, je vais vous poser la question d'abord.
    Oui.
    Premièrement, nous aimerions avoir un programme permanent. Il serait donc beaucoup plus difficile de l'abolir une troisième fois. Pour l'instant, il se limite à des questions de langues officielles, à l'article 15. Il y a plusieurs secteurs du droit qui devraient peut-être aussi être inclus, en ne se limitant pas seulement à l'article 15 et aux questions de langues officielles.

[Traduction]

    L'Association du Barreau canadien a toujours préconisé la création d'une fondation pour les contestations judiciaires. Nous avons travaillé sur ce projet et avons notamment obtenu le statut d'organisme de bienfaisance pour que cette fondation puisse commencer à recueillir des fonds indépendamment du financement du gouvernement fédéral. À la suite de certains problèmes, notamment de la première abolition dudit programme, nous avons voulu éviter de nous retrouver dans la même situation de nouveau. Nous avons élargi le mandat de cette fondation pour qu'il comprenne à la fois les droits linguistiques et les droits à l'égalité, voire même la liberté de circulation et d'établissement prévue par la Charte, et certains autres droits constitutionnels qui n'ont pas encore été explorés, pour avoir une réelle incidence sur la vie des personnes en situation minoritaire. Cependant, je crois que même si nous cherchons des fonds de sources variées, sans un financement important du gouvernement fédéral, ce projet n'est pas réalisable. Pourtant, ce serait l'idéal.
    Je pense que nous sommes tous favorables au rétablissement du Programme de contestation judiciaire, aussi rapidement que possible. Le mieux serait peut-être de procéder en deux étapes: rétablir le Programme tel qu'il existait en septembre 2006, puis s'engager à prévoir un financement stable et à long terme des contestations judiciaires.

[Français]

    Merci, madame Buckley. Merci, madame Folco.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mr. Michael Chong from the Conservative Party.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Merci de votre témoignage.

[Traduction]

    J'ai deux observations d'ordre général. Je n'ai pas de questions. Je pense que vos exposés étaient très clairs.
    La première, à mon avis, est une question de point de vue. Des personnes raisonnables pourraient être d'accord ou pas d'accord sur la nécessité d' un Programme de contestation judiciaire. Je pense qu'on peut raisonnablement invoquer des arguments pour et contre la continuation d'un tel programme.
    Si je dis cela c'est parce que le programme, tel qu'il a été créé à l'origine, visait à préciser un domaine du droit qui avait évolué rapidement à la fin des années 1960 et au début des années 1970, ainsi qu'à la fin des années 1970, avec la Loi sur les langues officielles et certaines initiatives des provinces. Il y avait peu de jurisprudence. À cette époque, on se posait beaucoup de questions au sujet des droits des minorités linguistiques, et c'est pour cela que le programme a été établi. Ensuite, il a été élargi pour inclure les autres droits des minorités, à la suite de la Charte canadienne des droits et libertés de 1982.
    Je pense que l'on peut dire qu'après 30 ans, nous avons établi une jurisprudence considérable. Est-elle complète? Est-elle assez vaste? Est-ce qu'elle précise tout? Non. Il y a certainement des domaines du droit qu'il faut encore clarifier, mais on peut dire que nous avons maintenant une vaste jurisprudence. Il y a des personnes raisonnables des deux côtés de cette discussion, qui ne sont pas d'accord, et je ne leur refuse pas leur opinion.
    Cela fait maintenant des semaines, ou plutôt des mois, que nous parlons de cette question au comité et lorsque vous réfléchissez à la question de l'accès aux tribunaux au Canada, il y a deux choses qui vous viennent à l'esprit. D'abord ce programme est honnêtement un programme minuscule pour ce qui est de l'accès au système juridique. Ici à Ottawa, sur la Colline parlementaire, nous avons associé l'idée de l'aide juridique à l'intention première du Programme de contestation judiciaire. Il ne fait aucun doute que le deuxième objectif du programme, était d'aider ceux qui voulaient accéder au système judiciaire, mais l'objectif principal était de financer les causes qui permettraient de clarifier la jurisprudence en matière de droits linguistiques et d'autres droits des minorités.
    Il s'agit d'un système pour lequel les provinces sont, de façon générale, ou plutôt intégralement, responsables de fournir de l'aide juridique pour l'administration de la justice. Les programmes des provinces, collectivement, représentent des centaines de millions de dollars et ont une incidence considérable sur l'accès au système judiciaire. Ensemble, ces programmes représentent près d'un demi-milliard de dollars de financement pour permettre aux gens d'avoir accès aux tribunaux, alors que nous, nous parlons d'un programme de 2 à 3 millions de dollars. Parfois, je me demande si nous — et je ne parle pas aux témoins, mais à vous, monsieur le président — sur la Colline du Parlement, nous n'avons pas une perspective un peu différente, ou plutôt un manque de perspective sur cette question. Savons-nous vraiment comment les gens accèdent aux tribunaux? Ils passent souvent par l'aide juridique.
    La dernière chose que je voudrais dire au sujet de l'accès au système judiciaire, c'est qu'il n'existe pas de droit absolu d'accès aux tribunaux. La Cour suprême l'a dit récemment dans l'affaire du procureur général de la Colombie-Britannique contre Christie. Elle a dit qu'il existe un droit à l'assistance d'un avocat dans certains cas précis, ou plusieurs cas, mais qu'il n'existait pas de droit absolu d'accès aux tribunaux et qu'il n'y avait pas de droit constitutionnel général d'être représenté par un avocat de la Couronne devant les tribunaux.
    Ce sont des observations générales dont je voulais vous faire part. Au début de mon intervention, j'ai dit qu'il y avait des personnes raisonnables des deux côtés de la question, et je remercie les témoins de leurs exposés.
(1005)
    Merci, monsieur Chong, de votre intervention.
    Passons à M. Malo.

[Français]

    Tout d'abord, j'aimerais simplement savoir si quelqu'un parmi les témoins aimerait répondre à ce que M. Chong vient de dire.
    Je serai brève.

[Traduction]

    Je reconnais volontiers que c'était un très petit montant d'argent. Si c'est votre argument, alors je crois que vous devriez le rétablir.
    Il est très clair que l'aide juridique est terriblement insuffisante au Canada. Certains d'entre vous savez sans doute que l'Association du Barreau canadien est en train de présenter une cause type dans ce domaine. Nous nous autofinançons. Cette cause n'aurait pas été financée par le programme.
    En réalité, l'aide juridique permet principalement aux personnes de résoudre leurs propres problèmes juridiques. Or, le Programme de contestation judiciaire finançait un créneau particulier, parfaitement distinct, soit des causes d'intérêt public qui permettaient de préciser le droit. Vous avez parlé du besoin de préciser le droit, comme si c'était une chose que nous faisions pour la satisfaction intellectuelle de savoir ce que signifie notre Constitution. Ce n'est pas pour cela que nous faisons ce travail; c'est pour que ces droits aient un sens pour les Canadiens, pour qu'ils représentent un aspect de leur citoyenneté. Les deux éléments sont très étroitement liés.
    En effet, il faut accorder davantage de financement à l'aide juridique, mais nous devrions également rétablir le Programme de contestation judiciaire.
(1010)
    Vous avez raison; il s'agit d'un financement dérisoire — on n'a pas investi beaucoup dans le Programme de contestation judiciaire, et il serait formidable d'augmenter son financement — mais son incidence est considérable si vous regardez les décisions que ce programme a permises. Demandez aux Francophones de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, de l'Alberta et de toutes les provinces du Canada qui n'avaient pas de droits à l'éducation dans leur langue, s'ils ont l'impression que le Programme de contestation judiciaire est un programme dérisoire. Ils vous diront que c'est un programme colossal. En ce sens, il vaut la peine d 'être rétabli.

[Français]

    Mon collègue M. Godin faisait référence au témoignage de Me Tasha Kheiriddin, qui est venue nous rencontrer la semaine dernière. Elle semblait dire qu'il pouvait y avoir d'autres solutions, d'autres moyens de défendre adéquatement les droits des minorités. Je lui ai demandé quelles étaient ces autres solutions, et elle m'a répondu que ce n'était pas à elle mais bien au gouvernement de réfléchir à cette question et d'apporter des solutions.
    J'aimerais simplement vous demander si vous voyez d'autres façons d'intervenir adéquatement pour défendre et protéger les droits des minorités.
    J'expliquais tout à l'heure que j'ai été impliqué dans plusieurs dossiers relatifs au Programme de contestation judiciaire un peu partout au Canada. Faire appel aux tribunaux n'est pas le premier choix des communautés. Elles sont très hésitantes à le faire. Leur choix de départ, c'est le dialogue avec le gouvernement, c'est de s'asseoir et de trouver une solution. Cependant, il arrive, comme l'expliquait Me Aucoin tout à l'heure, qu'on n'ait pas le choix et qu'il faille s'adresser aux tribunaux. Le fait que le Programme de contestation judiciaire existe n'empêche pas que d'autres moyens puissent être utilisés. Le dialogue et les moyens de pression exercés sur les gouvernements sont utilisés chaque fois. Ce n'est qu'à la toute fin que les communautés décident qu'elles n'ont pas le choix et qu'elles doivent aller devant les tribunaux. L'effort qui est demandé à un citoyen qui amène son gouvernement en cour est très grand, et le citoyen ne le fait pas avec plaisir, il le fait en dernier recours. Mais ce dernier recours demeure très important, au bout du compte.

[Traduction]

    L'autre chose dont il faut se souvenir, c'est que le gouvernement a déjà évalué deux fois le Programme de contestation judiciaire pour déterminer s'il permettait d'atteindre les objectifs voulus ou s'il y avait d'autres façons d'y parvenir. Les deux fois, l'évaluation du groupe indépendant a conclu sans équivoque que le programme permettait d'atteindre les objectifs voulus, qu'il fonctionnait bien, qu'il le faisait efficacement, et qu'il avait acquis l'expertise nécessaire pour prendre les décisions relatives au financement.
    Le programme a été établi parce qu'au départ, le gouvernement avait un bassin de financement qu'il accordait aux groupes minoritaires des langues officielles. Il faut tenir compte des questions de conflit d'intérêts, de qui prend les décisions, etc. La valeur de l'organisme indépendant est considérable. Je ne vois pas comment on pourrait améliorer ce système. Aucune critique pouvant être étayée, n'a été formulée contre le programme, alors pourquoi créer un programme différent, au lieu de le renforcer, de l'élargir et de le protéger des décisions politiques comme celles que l'on connaît en ce moment?

[Français]

    C'est un peu triste. Les deux fois où on a aboli le Programme de contestation judiciaire, on a perdu une mémoire corporative, c'est-à-dire les experts qui ont travaillé au programme, de même que tout l'appareil. On est obligé de recommencer à zéro. Quand on a des forces, il faut miser sur celles-ci et aller de l'avant. C'est bien beau essayer de trouver de nouvelles solutions, mais lorsqu'on a une solution qui fonctionne bien, on devrait tenter de la garder.
    Merci, monsieur Malo.
     Nous passons maintenant à M. Godin.
    Merci, monsieur le président.
     Vous avez dit que le Programme de contestation judiciaire avait été annulé deux fois. En quelle année a eu lieu la première abolition?
    C'était en 1992.
    C'était à l'époque du gouvernement conservateur de M. Mulroney. Je veux simplement clarifier les choses. Je ne veux pas piquer M. Chong ce matin, mais il disait que pour lui, le programme visait plutôt à clarifier la loi, faire en sorte qu'il y ait une jurisprudence et que maintenant, il devrait y en avoir assez.
    Pensez-vous que M. Mulroney, ancien premier ministre conservateur, croyait qu'il y avait déjà suffisamment de jurisprudence en 1992 pour annuler le programme? De 1992 jusqu'à 2006, y a-t-il eu de nouvelles causes? Monsieur Doucet, vous avez dit que la Constitution est vivante. On la vit tous les jours et les choses changent. Le programme a-t-il servi et sert-il a éclaircir la loi, surtout depuis que la nouvelle loi S-3 a été adoptée? Nous allons avoir le défi d'y faire référence. Le gouvernement, ce bon citoyen, ne violerait-il pas la loi? Est-ce que la loi S-3 règle tous nos problèmes? Avons-nous encore besoin d'aller devant les tribunaux? Sinon, les communautés vont-elles devoir tester la loi pour savoir si le gouvernement la respecte au sein de ses institutions? Il a la responsabilité de mettre en place les mécanismes pour servir les gens dans les deux langues officielles.
(1015)
    Les décisions les plus importantes en matière linguistique, depuis le rétablissement du programme, qui me viennent à l'esprit sont les suivantes: Beaulac, Arsenault-Cameron, Solsky, Boudreau-Doucet, Charlebois, Montfort, Donnie Doucet.
    Nous n'avons pas besoin de ces décisions, nous avions déjà tout vu.
    Il semble que non. Le nombre de pages et le temps consacré à mener ces dossiers devant la Cour suprême a démontré que nous en avions clairement besoin.
    Sans le Programme de contestation judiciaire...
    ... nous n'aurions que la jurisprudence d'avant le programme.
    Monsieur Doucet, vous êtes l'un des avocats qui ont gagné plusieurs causes. Êtes-vous devenu millionnaire? Le gouvernement a dit que c'était seulement un programme pour rendre riches les avocats du Parti libéral.
    M. Murphy aimerait bien entendre cela, parce que je l'ai poursuivi. J'aimerais bien être millionnaire, mais ce n'est pas le cas. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ces causes coûtent très cher.
    Quelle est la réalité des choses sur le terrain? Vous êtes avocat et vous avez gagné des causes pour des minorités. Quelle est la réalité sur le terrain? À la Chambre des communes, le gouvernement a dit que des avocats sont devenus millionnaires grâce à ce programme. Il parlait de vous; il ne parlait pas de la batterie d'avocats du ministère de la Justice.
    J'avoue que les bureaux d'avocats bien établis ont très souvent beaucoup de difficulté à s'occuper de dossiers financés par le Programme de contestation judiciaire, à cause des tarifs de ces bureaux.
    Le ministre Baird a dit à la Chambre des communes que ce n'était qu'un programme pour rendre riches des avocats des provinces. En réalité, c'est faux.
    Je ne connais pas un seul avocat qui soit devenu millionnaire grâce au Programme de contestation judiciaire.
    Le programme aide donc vraiment les minorités, les gens et la collectivité. Il n'aide pas les individus, comme dans le cas de l'aide juridique. Il y a une différence entre les deux.
    Cela dépend de quels droits protégés par la Charte il est question, s'ils sont de nature individuelle, si leur portée est collective. Lorsqu'on ouvre une école à Summerside, à l'Île-du-Prince-Édouard, ce n'est pas uniquement pour Mme Arsenault-Cameron, c'est pour toute la collectivité.
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste près d'une minute, monsieur Godin.
    M. Chong a parlé d'aide juridique à chaque réunion. C'est son droit. Pouvez-vous développer un peu plus le sujet de l'aide juridique? Le gouvernement dit que les gens s'en sont servi.

[Traduction]

    Ils s'en servent pour l'aide juridique, mais ce n'est pas vraiment de l'aide juridique telle qu'on la connaît dans la province. Ce sont deux choses différentes.
    Il y a un dénominateur commun entre l'aide juridique et le Programme de contestation judiciaire. L'aide juridique, en tant que programme gouvernemental — auquel le gouvernement fédéral contribue, soit dit en passant, même s'il s'agit de compétences provinciales en grande partie — et le Programme de contestation judiciaire permettent tous deux de faciliter l'accès à la justice. En ce sens, ils ont des éléments en commun.
    Cependant, le Programme de contestation judiciaire est axé sur les causes types. Il vise à faire avancer le droit sur des questions dont les tribunaux n'ont pas encore été saisis, alors que l'aide juridique sert pour les causes ordinaires et permet de s'assurer que la loi est utile aux particuliers.
    La différence avec l'autre type d'aide, c'est, par exemple, un cas où la GRC ne respecte pas les langues officielles au Nouveau-Brunswick.

[Français]

     Merci, monsieur Godin.
    On vient maintenant de compléter notre deuxième tour de table. On va passer au troisième tour, toujours en gardant la même formule, soit cinq minutes pour les questions, commentaires et réponses.
    Monsieur Jean-Claude D'Amours, la parole est à vous.
(1020)
    Merci, monsieur le président.
    J'entends des voix, comme si les gens étaient heureux que je parle. Je tiens à vous remercier énormément d'être présents.
    Madame Aucoin, pouvez-vous me dire combien il y a d'étudiants à la polyvalente francophone de Moncton?
    Il y a environ 900 étudiants.
    Madame Aucoin, lorsque vous avez reçu la somme de 5 000 $, saviez-vous que cela représentait environ 1 p. 100 du Programme de contestation judiciaire pour la défense des droits linguistiques? Je pense qu'il y a des gens qui devraient réaliser que c'est pour défendre les droits des jeunes, des enfants. C'est certain, vous êtes une mère de famille, mais cela a coûté 5,55 $ par enfant pour leur défense, ce qui n'est quand même pas si cher. Comme je le dis souvent, ce sont des pinottes.
    Monsieur Doucet, vous irez devant la Cour suprême bientôt concernant la cause du Programme de contestation judiciaire. Pensez-vous que le gouvernement enverra des avocats pour tenter de détruire les arguments qui pourraient être présentés?
    Évidemment, le gouvernement est représenté par ses avocats.
    Pensez-vous que cela coûtera plus de 5 000 $ pour toute la batterie d'avocats qui seront là?
    En fait, je fais cette poursuite pro bono. Je présume que ce n'est pas le cas des avocats du gouvernement.
    Pour être sûr que les gens comprennent, pro bono veut bien dire que vous le faites absolument gratuitement. C'est pour la cause, en fin de compte, et non pas pour vous enrichir. Donc, vous le faites gratuitement. Et pour avoir permis — peut-être que l'autre bord devrait finir par comprendre — à 900 enfants d'aller dans une école francophone, parce qu'ils étaient francophones, c'est quand même pas cher. Si on considère la réalité, le salaire minimum est plus élevé que cela au Nouveau-Brunswick. Prenons l'exemple du Nouveau-Brunswick, parce qu'on est dans la même province. C'est incroyable de voir l'obstination de la part du gouvernement pour 5,55 $ par étudiant, dans ce cas-ci. En plus, il y a des gens qui l'ont fait gratuitement, qui ont fait du bénévolat.
    Monsieur Doucet, vous avez dit tout à l'heure de ne pas opposer l'une à l'autre, en parlant des différentes minorités. C'est certain que le gouvernement lance un os, comme vous l'avez mentionné, mais il n'est même pas enrobé de viande. Tout le monde se lance sur l'os en espérant pouvoir manger un petit peu, et en fin de compte...
    Madame Buckley, je pense que vous disiez que l'accès à la cour est un droit au Canada. Le gouvernement a lancé un os, mais il faut oublier le droit. Si vous n'avez pas d'argent, il n'y a pas de viande. Vous pouvez aller en cour: le droit d'aller en cour, c'est l'os, et les moyens d'y aller, c'est la viande. Or, le gouvernement ne donne pas de viande pour que les gens puissent se présenter en cour.
    J'écoutais les commentaires tout à l'heure des membres conservateurs du comité qui disaient que ce que nous faisons aujourd'hui, soit l'étude de l'élimination du Programme de contestation judiciaire, est très important pour eux. C'est beau dire que c'est important, mais ils n'ont rien compris. Si c'est tellement important, qu'ils le rétablissent ce matin et la discussion va finir là. On va arrêter d'argumenter à ce sujet.
    Quand je dis qu'ils n'ont rien compris, c'est certainement aussi une mauvaise compréhension. Je ne suis pas un avocat, je suis un banquier. Je faisais du financement pour les entreprises; c'est un peu différent. Ils ne pourront certainement pas dire que je me suis enrichi à cause du Programme de contestation judiciaire.
    Il y a quelques semaines, lors du débat sur la motion d'ajournement, j'ai posé une question au ministre de la Justice concernant le Programme de contestation judiciaire, et c'est le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice qui m'a répondu. Au cours des quatre minutes qui lui étaient allouées pour donner sa réponse, il a mentionné cinq fois l'expression « aide juridique en matière pénale ». Comme je l'ai dit, je ne suis pas un avocat, mais le secrétaire parlementaire, en réponse à ma question sur le Programme de contestation judiciaire, a dit que parmi les grandes priorités du gouvernement, il y a la volonté de protéger les familles, et une des façons de le faire, c'est l'aide juridique en matière pénale. À ma connaissance, c'est bien loin du Programme de contestation judiciaire.
    À la fin de sa réponse, il a ajouté les mots « le nouveau gouvernement ». On va oublier cela. En effet, je pense qu'il devrait regarder la définition du mot « nouveau » dans le dictionnaire. Il signifie « tout récent ». Or, le gouvernement commence à être vieux. J'aurais plutôt dit que « le gouvernement du Canada est déterminé à continuer à financer l'aide juridique en matière pénale ».
    Pouvez-vous me dire si on essaie de poursuivre les minorités en cour à cause d'un crime pénal? Au sujet du Programme de contestation judiciaire, le gouvernement nous répond que les minorités ne doivent pas s'inquiéter, car il donne de l'argent pour l'aide juridique en matière pénale. Où est le lien entre l'aide juridique en matière pénale et l'assurance de pouvoir défendre ses droits en vertu du Programme de contestation judiciaire?
    Dans le temps qu'il reste, pourriez-vous me dire s'il y a un lien? Vous êtes des avocats. Y a-t-il un lien ou pas?
(1025)
    Monsieur D'Amours, vous avez utilisé plus de temps qu'il ne vous en était alloué. On ne pourra donc pas nécessairement entendre les réponses des témoins maintenant.
    Je suis sûr que ça va revenir.
    Pouvez-vous m'indiquer qui va prendre la parole lors de ce troisième tour, s'il vous plaît?
    Ce sera M. Nadeau.
    Merci, monsieur le président.
    Les propos de mon collègue de la république du Madawaska sont très intéressants, et j'aimerais vous entendre à ce sujet.
    À mon avis, quand on parle de l'évolution de la société, un autre élément n'a pas encore été touché, c'est-à-dire le principe de réparation qui est dû aux communautés d'expression française minoritaires. On connaît la réflexion sur ce sujet. D'ailleurs, on en a discuté légèrement lors de notre dernière rencontre avec l'Association des parents fransaskois. Pourriez-vous peut-être répondre à mon collègue républicain du Madawaska? Je veux quand même souhaiter longue vie à Edmundston et au drapeau à l'aigle.
     Ensuite, monsieur Doucet, pourriez-vous aborder la question de la réparation, suite aux savants propos tenus par M. D'Amours?

[Traduction]

    Très brièvement, si je peux répondre à la question précédente, le seul lien entre l'aide juridique en matière pénale et le Programme de contestation judiciaire, c'est qu'il facilite tous les deux l'accès à la justice. Si le député voulait dire que le gouvernement du Canada ne peut se permettre de financer que l'aide juridique en matière pénale et que c'est sa priorité, eh bien j'imagine qu'il s'agit d'une décision du gouvernement, mais je ne vois pas très bien le rapport.

[Français]

    L'aide juridique pour des causes criminelles ne permet pas de construire des écoles très fortes en vertu de l'article 23.
    En ce qui a trait à l'article 24, on commence seulement à aborder cette question maintenant, à la suite de l'arrêt Doucet-Boudreau. J'ai eu l'occasion de participer à cette décision également. Les communautés ont été très tranquilles relativement aux redressements qu'elles pouvaient demander aux gouvernements pour les violations des articles de la Charte. Très souvent, on ne demandait que des jugements déclaratoires. Les communautés ont réalisé, par contre, à un moment donné, que les jugements déclaratoires n'étaient pas suffisants parce que, malgré le fait que la Cour suprême ait statué, plusieurs gouvernements continuaient à ne pas respecter l'ordonnance rendue par le tribunal. Ces communautés devaient donc retourner devant les tribunaux — j'envie la situation que l'on vit actuellement à Terre-Neuve — et demander une clarification. Évidemment, les communautés vont commencer aujourd'hui à demander des clarifications relatives à l'article 24, qui est l'article qui se rapporte à la réparation. Avec l'arrêt Doucet-Boudreau, on a déjà des paramètres. On devra construire sur ces paramètres.
    Ce sont donc des éléments qui sont en perspective parce qu'il n'y a pas de jurisprudence ou de cas d'espèce.
    En matière linguistique, c'est à développer, mis à part la décision Doucet-Boudreau, même si on a fait des pas de géant.
    Une autre chose me chicote. Si je comprends bien, les personnes handicapées ont dû avoir recours au Programme de contestation judiciaire pour avoir des rampes d'accès dans des édifices gouvernementaux, provinciaux ou fédéraux. Quelles sont les luttes qu'elles ont dû mener et qui ont été appuyées par le Programme de contestation judiciaire, leur permettant d'obtenir les mêmes services que les personnes qui ne sont pas handicapées?

[Traduction]

    Cela dépend de la nature de la cause. Certaines causes ont été intentées en vertu de la Loi sur les droits de la personne, et n'ont donc pas été financées par le Programme de contestation judiciaire. Mais il y avait également certaines causes principales, comme l'affaire Eldridge, par exemple, qui portait sur le droit à l'interprétation gestuelle pour les services de santé, de sorte qu'une femme qui accouchait puisse communiquer avec son médecin. C'était une cause importante dans ce domaine, qui a été partiellement financée par le programme. Plus récemment, il y a eu l'affaire VIA Rail, qui porte sur le devoir d'accueillir les personnes en chaise roulante dans les wagons, en vertu de la Loi sur les transports au Canada. C'était une autre victoire récente importante.

[Français]

    Il vous reste environ une minute, monsieur Nadeau.
    C'est bien.
    J'ai une autre question. On parle beaucoup des articles de la Charte qui ont trait aux langues officielles. On parle aussi de l'article 15, qui touche l'ensemble de la société, mais sans aborder les langues officielles. Pourriez-vous nous indiquer quels groupes peuvent bénéficier, dans ce cas, d'un programme de contestation judiciaire?
(1030)
    On parle de questions d'égalité, à l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, et il peut s'agir de n'importe quel citoyen qui se sent lésé dans ses droits, qui pense qu'il y a eu de la discrimination. En règle générale, ce sont plutôt les membres vulnérables de la société, soit des femmes, des gens qui appartiennent à des minorités visibles ou des personnes handicapées. Cela vise vraiment les membres vulnérables de la société, de l'ensemble de la communauté, des Canadiens et Canadiennes.
    On va maintenant donner la parole à M. Jacques Gourde.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je voudrais féliciter tous les témoins d'être venus ici. En période estivale, c'est digne de mention.
    Ma question s'adresse à tous les témoins. Avant de commencer, permettez-moi de citer un passage de l'Évaluation sommative du Programme de contestation judiciaire de 2003. On y mentionne que :
Le Programme a pour principal objectif la clarification de certaines dispositions constitutionnelles relatives aux droits à l'égalité et aux droits linguistiques.
    On parle de clarification, et l'un des critères principaux au sujet du programme est, et je cite de nouveau :
[...] que le Programme, tel qu'il est aujourd'hui exécuté, n'appuie que les causes qui protègent les droits visés par le Programme et les fonds avancés. En d'autres termes, un groupe ou un particulier qui présenterait des arguments juridiques prônant une application restrictive de ces droits ne recevrait pas de fonds du PCJ.
     Le Programme de contestation judiciaire a été créé pour clarifier certaines dispositions constitutionnelles relatives à l'égalité et aux droits linguistiques.
    Selon vous, y aurait-il d'autres moyens pour le gouvernement d'appuyer les contestations judiciaires en visant toujours la clarification de certaines dispositions constitutionnelles relatives aux droits linguistiques?
    Je ne suis pas certain d'avoir compris spécifiquement la question. Cependant, si on parle de favoriser des poursuites judiciaires qui n'auraient pas nécessairement comme but de clarifier ou de faire avancer les droits linguistiques, je crois que le gouvernement fédéral se trouverait, s'il appuyait des causes comme celles-là, à aller à l'encontre de sa propre Loi sur les langues officielles, dans laquelle on dit, à la partie V, que le gouvernement doit avoir des programmes d'actions positives pour favoriser l'épanouissement des minorités francophones.
    C'est pour cette raison que je disais tout à l'heure qu'au niveau de l'évaluation et du Programme de contestation judiciaire, lorsqu'on appuie des démarches qui visent à favoriser l'épanouissement des minorités francophones, on répond à l'obligation qui est celle du gouvernement d'avoir des mesures positives.
    Dans une partie de votre citation, vous avez parlé de restreindre les droits. Il me semble que ce n'est pas le but du gouvernement. Peut-être ai-je mal compris, mais je pense que l'important, c'est de clarifier les droits.
    Également, de plus en plus, lorsqu'on lit la jurisprudence, on parle de l'importance d'interpréter les droits de façon large et libérale. Toute l'approche de l'interprétation des droits va à l'encontre de la restriction des droits. Je ne sais pas si j'ai bien compris, mais si vous voulez créer un nouveau programme qui répondrait à ces besoins, un programme bonifié qui n'appliquerait pas seulement l'article 15 de la Charte et la Loi sur les langues officielles, mais qui éclairerait vraiment tout l'aspect de la Constitution, un programme qui engloberait toutes les causes d'aspect constitutionnel, ce serait très intéressant, et nous vous appuierions certainement dans sa réalisation.

[Traduction]

    Je crois que Me Aucoin a présenté un argument extrêmement important, à savoir que tous les gouvernements du Canada ont la responsabilité première d'essayer de promouvoir autant que possible les droits constitutionnels — tous les droits constitutionnels. Ils peuvent le faire sans avoir à passer devant les tribunaux, évidemment — et c'est la première façon de s'y prendre. Mais la seule façon de clarifier la portée de ces droits et la seule façon pour la doctrine juridique d'évoluer c'est de faire intervenir les tribunaux. Je ne pense pas qu'il y ait d'autres façons de progresser dans ce domaine sans un programme comme le Programme de contestation judiciaire.
(1035)

[Français]

    Il vous reste moins d'une minute, monsieur Gourde. Vous allez vous arrêter ici? D'accord.
    Nous allons maintenant passer au représentant du Nouveau Parti démocratique, M. Godin.
    Merci, monsieur le président.
     M. Gourde a posé une question dans son préambule. Madame Buckley, vous avez parlé de deux évaluations, je crois.

[Traduction]

     Est-ce que ce gouvernement ne devrait pas rencontrer votre organisation et lui demander son avis? Vous représentez l'Association du Barreau canadien. Je crois que ça veut dire quelque chose.

[Français]

    Madame Aucoin, vous êtes la présidente de la Fédération des associations de juristes d'expression française de common law inc. Le gouvernement a décidé de son propre chef de mettre fin à un programme dont on sait qu'il est important. En effet, on l'entend dire depuis ce matin. Ces gens en entendent parler depuis des mois et ils vont continuer à en entendre parler s'ils ne le rétablissement pas.
    Croyez-vous que le fait d'abolir ce programme dénote un manque de responsabilité de la part du gouvernement ou pensez-vous qu'il s'agit simplement d'un aléa de la politique?

[Traduction]

    Je crois que c'est une question facile.
    Je crois que vous voulez peut-être une évaluation un peu plus politique de la situation.
    Eh bien, pensez-vous qu'il s'agit d'une décision politique?
    Tout ce que je peux vous dire, c'est que l'Association du Barreau canadien a demandé qu'on lui explique cette décision et que, pour l'instant, on ne nous a pas fourni d'explication.
    Quand avez-vous demandé une telle explication?
    Nous avons rencontré le ministre de la Justice, le ministre Toews, juste avant cette décision, car c'est avec son ministère que l'Association du Barreau canadien a le plus de contacts. On nous a dit à l'époque, je crois, que le programme était évalué et que de cette évaluation découlerait une décision. C'est tout ce que l'on nous a dit.
    Qui sera chargé de cette évaluation?
    Je n'en sais rien.
    Ce n'était pas l'Association du Barreau canadien?
    Non.
    À l'époque, avez-vous signalé au ministre combien il était important que vous le rencontriez de nouveau pour lui expliquer votre position? Vous n'aviez rien à y gagner; vous ne faites que représenter le Barreau. Vous défendez le droit — je l'espère — vous avez foi en la justice, or, le programme représentait une possibilité pour les Canadiens de dire: voici une nouvelle loi, nous voulons pouvoir la mettre à l'essai devant les tribunaux. C'est cela qui vous intéresse, puisque vous avez dit que vous n'avez jamais eu recours au programme vous-même. Alors, vous devez avoir un intérêt à ce que la justice règne dans notre pays.
    L'Association du Barreau canadien a présenté au ministre en août dernier sa position sans équivoque au sujet du programme.

[Français]

    Et vous, madame Aucoin?
    Le Programme de contestation judiciaire est en effet d'une très grande importance pour la FAJEF, mais on n'a pas eu l'occasion de rencontrer Mme Verner à ce sujet. Lorsque la FAJEF a rencontré le ministre Toews — et je n'étais pas présidente à ce moment-là —, on était aussi préoccupé par la nomination d'un juge unilingue anglophone à la Cour suprême du Canada.
    On dit que le gouvernement a dépensé ou dépense plus de 700 millions de dollars pour des plans d'action, entre autres pour celui de 2003.
    Monsieur Doucet, je pense à tout l'argent qui a été dépensé en 10 ans. Si le gouvernement n'avait pas contesté les décisions qui ont été rendues au début... En fait, beaucoup de décisions ont été acceptées en première instance, mais ce sont les gouvernements qui les contestent, n'est-ce pas?
(1040)
    C'est le gouvernement qui décide, s'il a perdu en première instance, de porter une cause en appel. C'est le droit de toute partie à un litige de décider de porter une cause en appel. D'une certaine façon, ça permet aux communautés de faire clarifier ces questions par le plus haut tribunal du pays. Par conséquent, il est important de suivre ce processus. Par contre, c'est une chose difficile à réaliser pour les communautés qui manquent d'argent.
    Prenons comme exemple la cause concernant la GRC. Si le gouvernement avait accepté la décision des juges de la Cour d'appel... C'est passé devant la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick?
    La cause a été entendue par la Cour d'appel fédérale et elle est maintenant devant la Cour Suprême.
    Si le gouvernement avait accepté la décision, il n'aurait pas été nécessaire de porter l'affaire en Cour Suprême, c'est-à-dire que le gouvernement aurait accepté la décision de la cour.
    On en aurait terminé à cette étape.
    D'une part, le gouvernement donne de l'argent aux communautés et, d'autre part, il les confronte devant la cour. C'est vraiment lui qui utilise l'argent.
    Merci, monsieur Godin.
    C'est ce qui complète notre troisième tour de table. J'aimerais maintenant informer les membres du comité qu'il y a une personne...
    J'aimerais présenter une motion, s'il vous plaît.
    Je voudrait simplement en finir avec nos témoins. J'en suis encore à discuter des questions aux témoins. Il y a une personne qui m'a dit souhaiter interroger les témoins. Je voulais donc obtenir le consentement du comité pour que l'on pose une dernière question. Est-ce que les membres du comité sont d'accord? Madame Folco a demandé de poser des questions lors d'un dernier tour de table. Les autres ne me l'ont pas demandé.
    Y a-t-il une question?
    On a fait trois tours de table. J'aimerais qu'on se garde du temps pour examiner ce que seront les travaux futurs de ce comité.
    On pourrait allouer trois minutes aux membres du comité qui souhaitent poser des questions.
    Combien y en a-t-il qui veulent poser des questions?
    Quels sont ceux qui souhaitent poser des questions? Levez la main.
    Il y a une personne, donc il y aura une question de trois minutes. Madame Folco.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais remercier les membres du comité également de leur compréhension. À mon avis, le fait que le gouvernement donne de l'argent à des citoyens qui souhaitent se protéger de ses décisions, c'est le plus haut fait de la démocratie. Je suis très fière que le gouvernement canadien, que le Canada, quel que soit le parti au pouvoir, ait adopté ce genre de programme. Sincèrement, je voudrais qu'il continue.
    Cela dit, chaque fois que j'ai posé une question et que d'autres députés ont posé des questions pendant la période de questions, à une ou à un ministre et même au premier ministre, la réponse — et j'ai vérifié au Hansard — a toujours été que de toute manière, l'argent allait directement aux groupes, sans passer par le Programme de contestation judiciaire, et que ça allait protéger les droits des minorités et l'épanouissement des communautés de langue minoritaire. Donc, j'aimerais savoir si vous savez si des groupes sur le terrain ont pu utiliser, depuis la fin du programme, de l'argent venant du gouvernement pour contester ses décisions?
    Habituellement, pour les groupes communautaires, on a ce qu'on appelle des accords de contribution avec le gouvernement. Donc, si on a des fonds pour établir des projets, généralement, il est interdit d'utiliser ces sommes pour se présenter devant la cour. Il est absolument impossible pour la FAJEF d'utiliser à cet effet l'argent obtenu pour un programme spécifique.
    Vous pouvez le confirmer, maître Aucoin?
    Certainement.
    Merci.
    Parfait. Merci beaucoup.
    J'aimerais rectifier certains propos entendus ici tout à l'heure.
    C'est un rappel au Règlement.
    C'est un rappel au Règlement. Mme la député de Laval—Les Îles a dit plus tôt que l'ABC avait écrit à la ministre Oda. Elle n'a jamais écrit à la ministre Verner; on vient de vérifier. Pas vous, l'ABC. Vous avez dit tout à l'heure qu'elle avait écrit à la ministre. La Fédération des associations de juristes d'expression française du common law n'ont pas écrit à la ministre Verner non plus.
(1045)
    J'aimerais bien qu'on vérifie le procès-verbal parce je ne me souviens pas d'avoir soulevé une question de lettre ou quoi que ce soit. Monsieur le président, j'aimerais qu'on le vérifie.
    Ce sera vérifié, madame Folco.
    Monsieur le président, au sujet de ce rappel du Règlement, ce que j'ai entendu, c'est que l'association avait appelé le bureau de la ministre pour en discuter et qu'elle n'avait pas obtenu de réponse de la ministre. On pourrait vérifier dans les « bleus ».
    On va clarifier cela. Vous allez le vérifier, monsieur Graeme? D'accord.
    C'est maintenant le temps de remercier les témoins d'être venus nous rencontrer. Je voudrais vous remercier d'avoir su livrer vos présentations sans dépasser le temps prévu ainsi que d'avoir présenté votre argumentation de manière concise et structurée. Merci de votre présence.
    Nous allons poursuivre notre rencontre.
    Monsieur le président, peut-on s'occuper des motions, s'il vous plaît?
    Oui, est-ce qu'elle est relative au Programme de contestation judiciaire?
    Oui. Elle se lit comme suit :
Que le Comité des langues officielles invite les ministres; l'honorable Bev Oda, Ministre du Patrimoine canadien, l'honorable Josée Verner, Ministre de la Francophonie et des langues officielles et l'honorable Rob Nicholson, Ministre de la Justice, à venir nous expliquer lors de notre prochaine rencontre, le jeudi 21 juin 2007, ou en septembre 2007, les raisons pour lesquelles le Programme de contestation judiciaire a été éliminé en septembre 2006.
    Ce serait une terrible erreur de ne pas poser la question. Il faut au moins que le gouvernement  — et je fais cela pour lui — ait la chance de venir nous expliquer ses motifs. Il serait intéressant d'entendre les ministres nous expliquer pour quelles raisons ils ont agi comme ils l'ont fait. On a des questions à leur poser, et dans n'importe quel rapport qu'on soumet, il est normal que les ministres de la Chambre, qui prennent les décisions, aient la chance de venir s'expliquer devant le comité. Même au Comité de la justice, le ministre de la Justice a comparu. Ce serait une erreur que ce comité ne donne pas l'occasion aux ministres de venir nous donner des explications.
    Monsieur Godin, votre motion est pertinente. Votre motion vise à inviter des témoins à comparaître relativement au programme...
    Exactement, qu'ils viennent nous expliquer pourquoi le programme a été annulé.
    Donc, elle est recevable. Je serais prêt à entendre des commentaires au sujet de la motion de M. Godin. Ensuite, j'aimerais aborder la question des affaires courantes du comité; j'ai fait circuler une feuille à ce sujet. Je remercie les témoins de leur participation.
    Dans l'ordre, pour parler de la motion, on a M. Chong, Mme Boucher et Mme Folco.
    Monsieur Chong.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je n'étais pas ici lorsque le comité a été créé, je ne suis donc pas au courant des motions qui ont été adoptées au début des délibérations du comité.
    Avons-nous reçu un avis de motion pour cette motion?

[Français]

    Le greffier m'informe que lorsqu'une motion est présentée qui porte sur les affaires courantes, elle est admissible et recevable, comme je l'ai indiqué tout à l'heure.

[Traduction]

    La seule chose que je voudrais dire, puisque cette motion a été jugée recevable, c'est qu'il est inadmissible de demander aux ministres de comparaître devant le comité à moins de 48 heures d'avis. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une motion raisonnable et on ne peut pas demander aux membres du comité de l'appuyer. Nous sommes mardi, il est un peu moins de 11 heures du matin et nous demandons à tout un nombre de ministres de venir comparaître jeudi à 9 heures. Ce n'est pas raisonnable; ils ont des engagements et des choses prévus des semaines à l'avance. Je peux vous dire tout de suite qu'ils sont certainement occupés jeudi matin entre 9 et 11 heures. Je ne crois pas qu'il soit raisonnable que le comité leur demande de comparaître dans un délai aussi court.

[Français]

    Merci, monsieur Chong.
    Madame Boucher.
(1050)
    On ne sait trop quand la session va se terminer. En principe, tout le monde sait que ce sera bientôt. Si ça devait être demain soir, je n'y serai pas. Je ne crois pas non plus que de la façon dont la fin de session se déroule, la ministre Verner pourra venir ici jeudi. C'est vraiment impossible. Elle a un horaire très chargé et c'est la fin de session pour tout le monde. Je crois que ça pourrait se faire, mais en septembre. Pour l'instant, comme c'est la fin de session, on travaille durant un nombre d'heures épouvantable. Peut-être vaudrait-il mieux poursuivre le travail sur ce sujet en septembre.
    Merci, madame Boucher.
    J'ai aussi eu des indications selon lesquelles il serait difficile pour la ministre Verner de comparaître ce jeudi, ce dont je veux vous informer, monsieur Godin.
    Monsieur le président, je suis prêt à amender ma motion pour la recevoir lorsqu'elle sera disponible, même si c'est en septembre.
    C'est noté.
    Madame Folco.
    Excusez-moi, on a un amendement ici.
    Donc, ce serait soit d'ici la fin de la session ou...
    J'avais écrit le 21 juin dans la motion, mais si cela cause un problème à la ministre, ce sera à la rentrée en septembre.
    Cela pourrait être le 21 juin en après-midi, puisqu'il y a une rencontre le matin avec la ministre.
    Nous sommes flexibles, nous ne sommes pas des ministres. On pourrait la recevoir dans l'après-midi ou lors de la prochaine réunion du comité en septembre.
    Donc, vous voulez modifier votre motion?
    M. Yvon Godin: Oui.
    Le président: Avez-vous remis votre motion par écrit au greffier?
    M. Godin: Oui.
    Le président: Madame Folco.
    Monsieur le président, je ne peux pas accepter les arguments qui ont été présentés par les députés d'en face.
    Premièrement, j'entends dire que les ministres n'auront eu que 36 heures ou quelque chose du genre pour se préparer. Ensuite, il y a le nombre de questions que nous, de l'opposition, avons pu poser lors de la période des questions orales à la Chambre des communes, ainsi que le nombre de représentants qui ont essayé de rencontrer un ministre ou l'autre. Évidemment, il y en a un certain nombre qui n'ont pu avoir de rencontre. Enfin, le fait que les ministres, le ministre ou la ministre ait pris une décision quant à la vie, la survie ou à la non-survie, en fait quant à l'abolition du Programme de contestation judiciaire veut dire qu'on avait en tête des raisons pour l'éliminer.
    Tout ce qu'on demande à ces ministres, c'est de venir devant nous et de présenter leur côté de la médaille. Après tout, on a entendu au moins une dizaine de témoins, peut-être même plus si on pense à la tournée qu'a fait ce comité d'un bout à l'autre du Canada. À l'exception de deux d'entre eux, à ma connaissance, tous nous ont dit la même chose.
    Je trouve que la proposition de mon collègue M. Godin est juste et équilibrée. Je souhaite très fortement que les ministres viennent nous en parler. Je proposerais même à mon collègue de demander aux ministre de nous écrire un mot, s'ils ne peuvent pas venir, pour nous dire exactement les raisons pour lesquelles ils ont aboli ce programme.
    Merci, madame Folco.
    Je vais relire la motion :
Que le Comité des langues officielles invite les ministres; l'honorable Bev Oda, Ministre du Patrimoine canadien, l'honorable Josée Verner, Ministre de la Francophonie et des langues officielles et l'honorable Rob Nicholson, Ministre de la Justice, à venir nous expliquer lors de notre prochaine rencontre, le jeudi 21 juin 2007, ou en septembre 2007, les raisons pour lesquelles le Programme de contestation judiciaire a été éliminé en septembre 2006.
    Monsieur Godin.
    Monsieur le président, en réponse à la suggestion de ma collègue, le problème est que si la ministre nous écrit, on ne pourra pas lui poser la question à pourquoi elle a refusé d'avoir des réunions, etc.
    Je dis qu'on devrait voter.
(1055)
    Monsieur D'Amours.
    Monsieur le président, je vais faire vite.
    Premièrement, je suis quand même surpris de voir que les députés du gouvernement s'attendent à ce que la Chambre ajourne ses travaux mercredi, alors que selon notre ordre du jour, à ce que je sache, ce sera vendredi. Je comprends qu'ils veulent peut-être partir plus vite, car ça commence à chauffer de plus en plus, mais cela me surprend un peu d'entendre ces commentaires. Parfois, on entend tellement de choses.
    Monsieur le président, dites-moi si j'ai eu un moment de faiblesse à un moment donné. Ne nous avez-vous pas annoncé au cours d'une séance précédente que la ministre Verner était censée comparaître devant le comité le 19 juin 2007, ce qui, comme par hasard, est aujourd'hui?
    Comme vous le savez, monsieur D'Amours, deux motions ont été adoptées par le comité pour faire comparaître la ministre, mais elle n'était pas en mesure de le faire aujourd'hui. Comme je l'ai indiqué, il semble qu'elle ne soit pas non plus en mesure de comparaître jeudi.
    Je comprends ce que vous dites, monsieur le président. Seulement, si on recule de quelques séances, est-il possible que nous ayez annoncé ici, au comité — à moins que je n'aie eu un petit moment de faiblesse — que la ministre devait comparaître devant le comité le mardi 19 juin 2007?
    Oui, selon les informations que j'avais à moment-là, la ministre souhaitait comparaître le 19 juin.
    Je pensais avoir eu un moment d'inattention, mais ce n'était pas le cas. Combien de fois va-t-il falloir demander à la ministre ou au ministre de comparaître? Ils vont jouer au yoyo avec nous parce qu'ils ne veulent pas se présenter devant le Comité des langues officielles concernant un sujet aussi important. Je n'en reviens pas. Je comprends qu'ils ne soient pas disponibles jeudi; en fait, ils ne le seront jamais.
    Merci, monsieur D'Amours.
    Nous allons passer à Mme Boucher, et j'aimerais savoir ensuite si le comité est prêt à se prononcer sur la motion.
    Monsieur le président, pour ce qui est de la motion qui a été déposée et du fait que la ministre n'a pas pu comparaître le 19 juin, pour se conformer à la motion adoptée, la ministre Verner va répondre par écrit au comité, et ce, avant la reprise des travaux. D'accord?
    Par ailleurs, tous ceux qui ont déjà été ministres savent qu'à la fin d'une session, il peut être difficile de se libérer pour le lendemain ou le surlendemain.
    Merci, madame Boucher, pour ces éclaircissements.
    Monsieur Chong.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Cette question a été étudiée « ad nauseam ». Je pense que tout ce qui devait être dit, des deux côtés de la question, a été dit. Je ne crois pas que ce soit une façon productive d'utiliser le temps du comité que de prévoir une autre séance à ce sujet. A mon avis, il y a des façons beaucoup plus productives pour le comité de faire son travail.
    Honnêtement, notre pays est aux prises avec de sérieux problèmes dans le domaine des droits des minorités linguistiques, du recours au français au Canada. Il est vrai que le français disparaît peu à peu, et pourtant, on accorde la priorité à ce programme de 2 ou 3 millions de dollars, dont nous avons parlé « ad nauseam ».
    Honnêtement, je crois que le comité pourrait utiliser son temps de façon bien plus productive. Si l'on regarde le temps que l'on a passé à étudier ce programme en particulier ces dernières années, je crois que les gens diront que notre travail n'a pas été productif.
    J'aimerais bien mieux étudier des questions plus générales sur le bilinguisme et sur la façon d'augmenter le nombre de personnes bilingues au Canada plutôt que de tenir encore d'autres audiences à discuter de cette question. Je crois que ce serait une bien meilleure façon d'utiliser notre temps. Je ne crois pas qu'il faille consacrer une autre séance à discuter de cette question.
    Si vous me permettez une analogie, Rome est en train de brûler et nous nous perdons en futilités. Il faut passer à autre chose.

[Français]

    Merci monsieur.
    Je voudrais rappeler aux membres du comité qu'il est 11 heures. J'aimerais savoir si le comité est prêt à prendre une décision concernant la motion.
    Je demande le vote, monsieur le président.
    Monsieur le président, nous voulons que soit un vote par appel nominal.
    D'accord, on va procéder au vote.
    La motion se lit comme suit :
Que le Comité des langues officielles invite les ministres; l'honorable Bev Oda, Ministre du Patrimoine canadien, l'honorable Josée Verner, Ministre de la Francophonie et des langues officielles et l'honorable Rob Nicholson, Ministre de la Justice, à venir nous expliquer lors de notre prochaine rencontre, le jeudi 21 juin 2007, ou en septembre 2007, les raisons pour lesquelles le Programme de contestation judiciaire a été éliminé en septembre 2006
    (La motion est adoptée par 5 voix contre 3.)
    Je voudrais vous dire également, avant de terminer la réunion, que j'ai distribué un document sur les pratiques courantes du comité concernant la comparution des témoins. Il y est simplement question du budget nécessaire pour couvrir les dépenses engagées par les témoins.
    Ai-je le consentement du comité pour les dépenses courantes des témoins?
    Une voix: Oui.
    Le président: D'accord, c'est accordé.
    La séance est levée.